tuer l´autre avec les motsjoseph-agostini.fr/uploads/images/presse/On-peut-se-pendre-avec-sa... ·...

16

Transcript of tuer l´autre avec les motsjoseph-agostini.fr/uploads/images/presse/On-peut-se-pendre-avec-sa... ·...

Il me semble que chacun de nous en a l´intime conscience. C´est une intuition, une fulgurance, qui nous étreint sauvagement à certains instants de la vie. Chacun de nous sait qu´il peut tuer l´autre avec les mots. Chacun de nous sait qu´avec un peu de volonté, un peu de travail, sous la lampe, le soir, devant une feuille de papier, il peut trouver la formule meurtrière pour détruire son prochain.

Tuer avec les mots… Inventer une phrase assez cruelle pour anéantir une per-sonne sur le champ ! L´héroïne d´«On peut se pendre avec sa langue» est passée experte en la matière. Elle a mis au point des stratagèmes, les uns plus terribles que les autres, pour détruire son prochain avec délectation. Un jour, une victime. Sa dérision meurtrière ne fera de cadeau à personne, pas même aux enfants et aux vieilles dames ! «On peut se pendre avec sa langue» est une descente dans les enfers du cynisme et de l´humour ravageur.

Ecriture et MISE EN SCENE, Joseph Agostini

A la fois croustillante et cynique, tragiquement sincère et monstrueusement fausse, l´héroine d´«On peut se pendre avec sa langue» raconte son périple, vêtue d´un rouge sanglant. Une langue géante trône sur scène, une langue que le public affronte du regard en même temps que le personnage raconte «ses» histoires. Ma mise en scène oscille toujours entre le burlesque le plus déjanté et le tragique radi-cal, avec des univers sonores différents pour chaque tableau. Le cinéma (l´hyperviolence de Funny games) et le cartoon (la truculence de Tim Burton) ont été mes sources d´inspiration pour mettre en scène ce texte.

1

CAMILLE SOLAL, NOTES DE LA COMEDIENNE

Il est des évidences qui nous font du bien, un bien orgasmique, quand la vie coule de source vive. La rencontre avec Joseph Agostini puis avec son texte, offert à moi sur un plateau sanglant ont été des évidences. Le sang de la vie et de la mort mêlés avec audace, humour et éloquence. Joseph a mis en mots ce que je tentais de dire depuis toujours. Avec cette pudeur, ce recul qui font la force de «On peut se pendre avec sa langue». Texte actuel et intemporel, sexuel et charnel, cruel et sacrificiel. Mais aussi cicatrificiel. Il me fait du bien de le dire, de le jouer. Je ne peux forcer personne à adhérer à son propos mais personne ne peut m´empêcher de le dire. Je ne crois pas avoir déjà ressenti une telle force. Je suis prête. Que le spectacle commence.

2

CAMILLE SOLAL, BIOGRAPHIENée à Toul un 14 Août, (oh ça va, la Lorraine est une région magnifique !!!) Camille passe son adolescence à l´Ile de la Réunion (tout de suite plus pittoresque) où elle découvre métissage et voyages.

De là, elle va promener ses tongs à Madagascar, aux Comores, à l´Ile Maurice et même en Australie, pays dont elle fait un peu partie puisqu´elle a une double nationalité franco-australienne (pas mal...). C´est une période où elle s´essaie aux planches et à l´écriture de spectacles pour enfants.

En 1995, elle atterrit en classe préparatoire à L´Ecole Normale Supérieure au Lycée Jeanson de Sailly, dans le 16e arrondissement de Paris, puis au Lycée Chaptal, dans le 17e, où elle fait sa khâgne en 1996.

Elle survit «tant bien que mal» (surtout «que mal») et se jure qu´on ne l´y pren-dra plus. C´est clair, il faut que le spectacle devienne son métier. En 1999, elle s´inscrit donc à l´Ecole de théâtre Claude Mathieu parallèlement à sa Maîtrise de Langue et Civilisation anglaise à l´université de Nanterre.

Après quelques créations et des représentations, pendant l´été 2002, d´extraits shakespeariens et moliéresques au Château de Chantilly, sous le regard bien-veillant d´Alain Decaux, c´est, en Novembre 2002, sur le tournage d´un téléfilm ja-ponais, la rencontre avec Denis Bardiau («Le monde de Marty», «Training Sauvage», «Le coach»...) et le début d´une aventure : un one-woman-show , «Ne soyez pas en retard» qui évoluera pour devenir «Comédienne c´est pas un métier» en collabora-tion avec Romaric Poirier.

Le spectacle est joué de 2004 à 2007 à Paris et en tournée. Diplômée d´art-thé-rapie en 2006, Camille assure des ateliers avec différents publics en utilisant l´outil clown.Elle est aussi formatrice et coach en communication, négociation, prise de parole en public.

En paralèlle de ces activités, Camille continue à tourner des courts-métrages, publi-cités et films d´animation. Elle participe comme auteur et co-animatrice à «L´Amour d´Ecrire en direct» en 2007-2008, à l´Ogre à plumes, l´Académie Os-car Sisto et au Vent se lève! et gagne deux fois le prix de la meilleure auteure. De-puis peu elle est en répétitions de «On peut se pendre avec sa langue» de Joseph Agostini pour des représentations prévues prochainement en France.

3

CAMILLE SOLAL, PRÉCÉDENT SPECTACLE

Ses Références? Elles sont multiples, théâtrales pour beaucoup; j´aime énormé-ment le talent et la générosité de Philippe Caubère, d´Alex Métayer, de Gad Elmaleh... Ce sont pour moi des comédiens authentiques qui donnent une jolie dimension au terme «one-man-show». Jacqueline Maillan est la comédienne que j´aurais adoré rencontrer bien sûr. Pour sa classe et sa drôlerie intrinsèque. Chaplin et Keaton sont mes DVD de chevet. Et l´école anglo-saxone de la comé-die musicale, un modèle depuis longtemps.

Je crois au vécu, à l´expérience, aux parcours aussi riches et hétéroclites possi-bles, aux rencontres hallucinantes et inattendues comme autant d´éléments indis-pensables à la formation du comédien de théâtre qui doit, pour donner au public, avoir «quelque chose de plus» à donner.

Écrit d´abord dans une version plus «théâtrale», le spectacle s´est modifié avec le temps, les ré-pétitions, le public et surtout les conseils avisés de mon entourage.

Le spectacle raconte l´histoire d´une fille qui veut être comédienne et pouvoir en vivre à peu près correctement, pour qu´on arrête de lui dire «Non, comédienne c´est ton hobby, mais c´est quoi ton vrai métier ?»

Tout le spectacle est du vécu; pendant mes études universitaires ou théâtrales, j´ai essayé plein de jobs, pensant toujours que je trouverais ma place quelque part. Mais non, jamais plus d´un mois ! Au final, ça donne un panel drôle rien que dans les noms de métiers «instructrice de permis pénichette... téléacheteuse... chef-pla-ceuse au Parc des Princes... etc...»

4

PRESSE

LE FIGARO MAGAZINE

Bienvenue dans le quotidien tumultueux d´une comédienne en mal de rôle. Sur fond d´humour et de dérision, Camille Solal campe une jeune femme pétillante qui, loin de ses rêves d´actrice, exerce divers métier afin de payer son loyer. Au fil des sketches, chaque travail devient l´occasion pour la comédienne d´incarner un nouveau personnage : seule en scène, elle est tout à la fois conteuse et ma-gicienne déjantée dans un goûter pour enfants, placeuse dépressive des sup-porters au Parc des Princes ou vendeuse survoltée dans un centre de téléachat. Insolente et décalée, Camille Solal entraîne son public dans les situations les plus insolites. On bascule peu à peu dans un univers incongru mais enthousiasmant où s´enchaînent pêle-mêle sarcasmes, gestuelle désopilante et danses saugrenues. Un one-woman-show à l´image de son interprète : débordant d´énergie. M. -A. L., 18 décembre 2005

TÉLÉRAMA

Surveillante de musée exaspéré par les touristes, animatrice de centre aéré débor-dée, comédienne courant les castings, autant de personnages que Camille Solal campe avec une belle énergie.[...] Camille Solal possède [...] les atouts nécessaires pour transformer cet essai prometteur en réussite.

5

METRO

Attention, cette femme est folle... un peu, en fait ça dépend des jours. Hystérique aussi, hypocrite, faux c... Faut dire qu´elle n´a pas la vie facile, Camille Solal. Elle est comédienne, même si sa mère lui que ce n´est pas un vrai métier. En attendant de décrocher un super rôle, et elle a de sérieuses pistes, il faut bien qu´elle bosse pour payer le loyer et c´est pas un yaourt périmé depuis l´an 2000 qui va la nourrir ! Donc, entre les castings prometteurs pour des pubs de shampoing et la Comédie-Française (cher-chez l´erreur), elle fait un peu tous les métiers. Tour à tour animatrice dans un centre de loisirs où elle perd des enfants, sur-veillante de salle au Louvre, où elle fait se perdre des visiteurs, placeuse au Parc des Princes (elle ne perd que son sang-froid) ou encore téléacheteuse au «téléa-cheting», où elle perd des clients... S´ensuivent une série de boulot divers et surtout variés qui se finissent souvent en queue de poisson. Comédienne c´est pas un métier est un spectacle révélateur d´une Camille Solal débordante d´énergie, qui prend possession de la scène d´un théâtre Clavel trop petit pour elle. Une artiste dont on risque d´entendre parler prochainement, au-delà du cliché : «Elle est humoriste, jolie, sexy ? Pas possible.» Anne-Sophie Caucheteux, 17 décembre 2004

LA PROVENCE

Camille Solal est comédienne. Pas devin : elle ne pouvait donc pas connaître les résultats du match France-Togo. Et justement : en se disant que l´on aurait soit envie de fêter une victoire, soit envie d´oublier certaine défaite, elle propose de rire. Ce soir [...] elle présente son spectacle, «Comédienne c´est pas un métier». Soit les aventures de plein de petits boulots (dresseuse de monstres de 4 ans, placeuse de supporters assoiffés de sang...), et d´une drôle de fille qui tâche d´en vivre tant bien que mal. Son spectacle a eu un vrai succès au théâtre Clavel ou au Palais des Glaces de Paris. A découvrir. Ph X,dr

6

JOSEPH AGOSTINI, NOTES DE L´AUTEUR

En écrivant ce texte, j´ai mis de côté la pudeur, la compassion, la gentillesse, pour m´intéresser à la part obscure, étrange, mortifère, que chacun porte en soi. J´aime le théâtre où l´on ne sait pas si l´on doit rire ou pleurer, suivre l´héroïne dans sa folie ou s´arrêter aux portes de la méchanceté sans âme. «Tout est imposture, absolument tout, en ce bas monde» crie le personnage, tragi-comique jusqu´au bout des ongles. Camille Solal s´est saisi de ce texte avec dextérité et inventivité pour en faire un spectacle qui invite autant à la réflexion qu´à la jubilation. Elle a le style et le désir, deux mots qui, au théâtre, me semblent créer l´alliage parfait. Ainsi, avec elle, «On peut se pendre avec sa langue» a trouvé une partenaire idéale. Ensemble, c´est sur le chemin de l´absurde, de la cruauté et du rire effroyable qu´ils nous emmènent.

7

8JOSEPH AGOSTINI, AUTEUR

Psychanalyste, membre d´Espace analytique, et auteur de théâtre, Joseph Agostini, après avoir été directeur de publication de Théâtral magazine, a écrit trois pièces de théâtre jouées à Paris et en Corse, lors des Rencontres internationales organisées par Robin Renucci. Clinicien diplômé de l´université Paris 7 Denis Diderot, il a mené des recherches universitaires sur la mélancolie.

PRÉCÉDENTES PIÈCES

«Les thrènes des roses qu´on assassine», 2003Représentée aux Rencontres Internationales de Robin Renucci «Le monstre parade», 2004Théâtre Matisse, Paris 19è, mis en scène par Julien GaunetCollaboration artistique : Meg Galetti Boucrot

«Dalida, à quoi bon vivre au mois de mai ?», 2005Ateliers Théâtre de Montmartre, Paris 18è, par Elsa ZadkineCollaboration artistique : Michèle Tollemer

ARTICLE SUR LES PIÈCES PRÉCÉDENTES DE JOSEPH AGOSTINI www.theatrotheque .com

«Les thrènes des roses qu´on assassine» - «Le monstre parade», entre drame enfantin et farce fellinienne.

Joseph Agostini assassine les roses et laisse parader les monstres. Les faux sem-blants, les belles images, jeux de mots et de miroirs, n´ont pas lieu d´être. Seule la vie, dans sa violence désespérée, dans sa force même, teintée de rouge vif et de noir, chante. C´est une force qui s´échappe de la gangue des mots, les détruit comme on détruirait ses propres armes, pour se livrer à mains nues et voir ce que l´on vaut enfin. L´effet est dévastateur et l´herbe tendre de nos illusions sur laquelle nous nous vautrons ne repoussera pas.

Emportés dans la tourmente, travaillés au corps et à l´esprit par la crudité du tex-te, nous nous découvrons, étonnés, dans notre entière nudité. Quoi de plus terrible que les larmes de ce Pierrot solaire, héros des Thrènes, qui tue les roses, et tel un dictateur déchu, courbe la tête sous la cruauté de la vie ? Quels êtres plus mons-trueux, métastases de notre ironie aiguë, que les enfultes qui ne peuvent échapper à la Bête du Monstre Parade ?

Joseph Agostini range pour vous les masques, les travestissements, le maquillage avec lesquels nous nous grimons consciencieusement. Le rire explose en paillet-tes, gonfle la baudruche jusqu´à ce que la vérité éclate.

Joseph Agostini peint des vanités et les laisse danser autour de nous. Il nous rappelle que nous avons tous couru après les nuages, que nous avons tous eu un inaccessible sublime, et que nous nous sommes tous retrouvés seuls, désespéré-ment seuls, un beau soir de printemps.

Entre le drame enfantin et mystique des Thrènes et la farce fellinienne du Mons-tre parade, la vie est là, prête à bondir. Elle est le terreau de l´écriture de Joseph Agostini, le terreau de ces Roses, aussi rouges que notre sang.

Caroline SOURRISSEAU

9

«ON PEUT SE PENDRE AVEC SA LANGUE», EXTRAITS

Tout est imposture, absolument tout, en ce bas monde. La preuve? Je vais vous la servir bien chaude, bien croustillante. Vous n´allez pas en croire vos oreilles mais tout ce que vous allez entendre ce soir est absolument la vérité. Je m´étais donné une semaine pour tuer avec les mots. Avec ce qu´il faut de préméditation, aigui-ser sa flèche, viser sa cible et tirer droit, sans fléchir et sans discuter. Une petite semaine pour appliquer ma théorie à la lettre. Rien ne devait être laissé au hasard. J´avais planifié l´ensemble de mes tâches. Vous ne pouvez pas savoir à quel point le fait de dire ce qu´on a dans le coeur libère, élève, contribue à notre bonne santé psychique. Je n´ai absolument aucun remord. Au contraire. J´ai mené une mission de salut public.

(…)

Didier K. était mon «meilleur ami». Je l´avais trouvé dans un cours d´expression dramatique à l´école de théâtre du Poisson chat, l´année précédente. J´ai immé-diatement su que c´était Didier qu´il me fallait. Il présentait toutes les caractéristi-ques du «meilleur ami». Il n´était ni beau ni laid mais fade. Il n´avait aucun succès auprès de la gente féminine. Il faisait rire tout le monde par sa maladresse et sa voix nasillarde. Didier K. était le rigolo de la bande, celui qu´on adorait pour son coeur sur la main mais qu´on n´aurait pas mis dans son lit pour un empire. A son spectacle de fin d´année, le poisson chat avait fêté Montherlant. Didier s´était bien sûr retrouvé dans la peau du hallebardier dans La reine morte. Un rôle entièrement muet. Pendant le pot organisé après la pièce, il s´était confié à moi: «Je sais que mon personnage est muet, mais c´est déjà bien de monter sur scène, non? C´est une expérience!» Je tenais décidément un gros poisson, capa-ble de débourser cinq cents euros par trimestre pour finir en tapisserie. J´avais acquiescé en lui disant avoir adoré son jeu. «Tu as vraiment une présence, Didier. Tu m´as fait penser à Louis Jouvet». Aussitôt dit, aussitôt fait. Didier m´a rappelé. Nous nous sommes vus à l´extérieur. Nous sommes allés au cinéma ensemble voir Le monde de Némo et nous avons partagé plusieurs Mac Donald´s. Un soir, Didier a voulu m´embrasser en bas de chez moi. J´ai refusé son baiser, lui ai serré la main droite et lui ai dit: «Je ne veux pas briser une si belle amitié. Je t´aime autrement. Tu es et tu resteras toujours mon meilleur ami».

10

Didier ne semblait pas malheureux. Son petit train-train correspondait exactement à son rythme biologique. Il vivait pour ses passions: l´expression dramatique -le lundi et le jeudi de 20h à 23h00 à Montreuil - et sa collection de voitures de course miniatures. Il était de ceux qui ne jettent pas leurs cartes de fidélités Attac quand elles viennent à échéance. Bref, Didier K. représentait la parfaite cible pour les téléphones roses de tout poil.

(…)

Au troisième jour de mon plan, j´avais choisi de me pencher sur un tout autre problème: les rêves de gloire chez les trous du cul de moins de dix-huit ans. Vous connaissez certainement tous l´émission de télé-réalité intitulée «Chantez main-tenant», qui fait miroiter à des apprentis chanteurs de tous les coins de France, une place au soleil du music hall. Il y a quelques années de cela, je suis tombée par hasard sur la grande finale annuelle (…) Quand Kevin a chanté «Je t´aime» en duo avec Lara Fabian, ses groupies en larmes se tenaient par la main dans l´assistance, comme si leur dernière heure avait sonné. C´était aussi beau que la fin de Titanic. Il ne manquait plus que les violons et les bouées de sauvetage. Et puis, la salle entière s´est levée à la fin de «Je t´aime». Kevin s´est approché du public, a baissé les yeux et a dit: «Je vous aime». De quoi largement convaincre 87% des votants... Cinq ans s´étaient écoulés depuis la superfinale de «Chantez maintenant». Des trois superfinalistes, il ne restait plus personne sur le marché du disque. John était vendeur à la Fnac (Rayons Musiques du monde), Kimberley était chercheuse... d´emploi, dans l´univers de la télévision. Mais Kevin était celui qui m´intéressait le plus. La «star absolue de l´émission» avait trouvé une reconversion: suicidaire à temps plein. Parfois, des journaux à scandale le prenaient en photo, à la sortie d´un hôpi-tal grenoblois, en titrant: «Kevin, de Chantez maintenant: encore un suicide!» Le plus vicieux dans l´histoire, c´est qu´il vivait de ces événements pitoyables autour de sa petite personne. Il dealait 50 euros des photos de lui sur son lit d´hôpital! Et ce n´était pas Lara Fabian qui allait venir à sa rescousse...

(…)

11

Mon objectif était clair: casser de la vieille qui parle seule ou avec son chien dans les rues ou les supermarchés. Je m´apprêtais à démolir cette splendide icône de la solitude urbaine. Pour les vieilles qui parlent seules ou avec leurs chiens, dans les rues ou les supermarchés, j´avais commencé par avoir une immense indulgence, voire, pour elles aussi, une immense compassion. Je ne pouvais faire de mal à aucune d´entre elles. Toutes m´émouvaient terri-blement, avec leurs petits paniers en osier, leurs petits porte monnaies mauves à dentelles, leurs petites lunettes et leurs petites voix bien sympathiques. Même les grosses avec leurs gabardines me donnaient les larmes aux yeux. Au marché, je leur laissais toujours ma place dans la queue, en esquissant un sourire bien poli quand elles faisaient semblant de me remercier.

Depuis, je suis largement revenue de cette humanité mauve à dentelles. Pour sélectionner ma petite vieille du vendredi, j´ai joué les aides à domicile deux mois durant, avec trois cobayes, de quatre-vingts, quatre-vingt-un et quatre-vingt-deux ans. C´est la plus vieille qui a remporté le pompon. Elle s´appelait Philiberte (…) Ce matin-là, Philiberte m´attendait de pied ferme. Je ne lui avais pas donné signe de vie pendant les dernières vingt-quatre heures. Je ne pouvais pas non plus lui faire les courses pendant que Didier mijotait. «Mais alors, vous m´abandonnez ou quoi?» me cria-t-elle sur le palier, pour que la concierge puisse l´entendre. Elle s´était foutue du rouge à lèvres sur la gueule. C´était mauvais signe. Quand Philiberte se mettait du rouge à lèvres, cela signifiait que le vent allait tour-ner. Elle en mettait en général pour aller à la banque ou pour régler ses dettes chez la bouchère. Philiberte s´était organisée pour régler sa vie comme une hor-loge. Lever, Amour, gloire et beauté, les courses, le repas, Jean-Pierre Pernaut, les Feux de l´amour, la sieste, la sortie de la chienne, les coups de téléphone (enfants, traiteur, bouchère), le repas, Jean-Pierre Foucault, coucher. Imaginez ce qu´une absence injustifiée avait pu déclencher en Philiberte! Il y avait déjà de quoi la rendre cinglée! «J´ai failli prendre quelqu´un d´autre», trancha-t-elle, toujours sur le palier. «Il y a des filles très bien qui rêvent de prendre votre place». Philiberte pouvait être très fielleuse quand elle le voulait. Je crois qu´elle aimait ça. Un jour, au tout dé-but de notre «collaboration», j´ai cassé un verre dans sa cuisine. Elle m´a jeté un regard assassin et m´a lancé: «J´aurais dû prendre une arabe. Ca sent mauvais mais c´est très adroit».

12

Elle en avait d´autres comme «Les jeunes d´aujourd´hui sont vraiment méchants. C´était mieux à mon époque» ou bien encore comme «Je préfère les chiens aux humains, et je n´ai pas honte de le dire!» Bref, Philiberte se plantait toute seule un drapeau noir sur la tête, et ça me faisait bien rigoler.

(…)

Mes parents n´ont heureusement pas supporté la lecture de ce texte. «Je vais vous lire un très beau poème», leur ai-je dit au début du repas. Ils m´ont laissé le finir avant de s´étriper sous mes yeux, en se disant leurs qua-tre vérités. C´était bien ça. Il fallait agiter pour que ça vienne, simplement et natu-rellement. Il est des lectures efficaces. Je pose mon cahier sur la table, bien mis en évidence. Je vais m´aérer un peu. Après un dernier bol d´oxygène, je franchirai le dernier pas. L´ultime. Je démonterai mon propre mécanisme. Je dirai au monde pourquoi j´ai écrit tout cela. Je me dirai la vérité. Comme un serpent, je tournerai autour de moi-même, j´enroulerai tout mon être et l´étoufferai en serrant très fort. Une explication s´impose toujours. Je ne m´épargnerai pas.

13

CONTACT

KAPUCH´PROD57 bis Avenue Jean Jaures93120 La Courneuve

09 50 14 08 7706 64 39 25 03 (contact presse Gregory Ganier)

«On peut se pendre avec sa langue»Pièce ecrite et mise en scène par Joseph Agostini, interpretée par Camille Solal.

Musique de Frédéric Bry.

Photos et Film de Laura Goncalves et Jean-Louis Schoonbaert.

Collaboration Artistique : Florent Lenziani.

Graphisme du dossier de presse, affiche et flyer : Céline Rameaux

14

15

REMERCIEMENTS

Mélanie Lasry, Mathieu Girandola, Caroline Sourrisseau, Julien Agostini, Sauveur Orsini, Daniela Lumbroso, Laura Goncalves, Marika et Maria Vollmann.