TRAITÉ sur LA PRÉDESTINATION ET . LE LIBRE ARBITRE

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Sobre el concepto de destino (qadar) en la obra del maestro Qashani, reputado sabio y comentarista de Ibn Arabi (francés)

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    TRAIT sur

    LA PRDESTINATION ET . LE LIBRE ARBITRE

    ...

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  • 1'RAI1' DU DCRET (AL-QAD1l ') )\ ET DE L'ARR.T (AL-QADAR),

    PAR LE SHAYKH KAMAL AD-D!N, Que Dieu lui octroye amplement sa misricorde

    Louange Dieu qui, par sa science, embrasse toutes choses dans leur e11Semble et dans leurs .dtails; qui lesa dtermines d'avance, dans son dcret (qada'), puis excutes suivant son arrt (qadar) prcis; qui les a disposes dans l'ordre le plus parfait, conformment sa volont, et leur a assign chacune une piace ligne ou rapproche, dans sa prescience; qui, dans sa puissance (qudrah), a produit les tres et leur a fix un commencement ; qui, d~ns sa sagesse, a manifest les cratures et.leur a prescrit un terme ; qui a prcipit

    (x) Sur ces mots, voyez la note suivante.

  • TRAITi~ SUR LA PRi;m~STINATlON

    ou retard leur arrive d~ns le cours du temps ;

  • 66 'l'RAITf~ SUR LA PRlWES1'1NATION

    de la Raison (al-'alam al-'aqli)(l>. Le mot qadar est une expression signifiant arnvee

    daus le monde de l'Ame (al-'dlam an-najsi) des types des choses existantes, aprs s'tre individualiss, pour s'adapter aux matires extrieures, ces types tant lis leurs causes, produits par elle, et se manifestant dans leurs temps respectifs.

    Quant la prescience divine (al-'tdyah al-ilcl.hiyyah}, appele prescience premire, elle renferme en elle le dcret et l'arret de la mme faon que le dcret t l'arrt contiennent tout ce qui est eu acte (jf-l-waqi'). La prescience premire est clone la science divine embrassant le Tout, tel qu'il est, d'une manire uni-verselle et permanente. Elle ne rsicle en aucun lieu, car la science de Dieu, isol dans son essence, n'est rien autre que la prsence (constante) de son essence son essence mme, laquelle est essentiellement une et accompagne de toutes les proprits qui lui' sont inhrentes. Or, la premire de ces proprits que suppose l'essence divine est une substance spirituelle (jawhar ruhdni), qui a t dsigne sous le nom de Premier Esprit (ar-ruh al-awwal), de Premire Intelli-gence (al-'aql al-awwal), ou de Plume Sublime (al-

    Quant au mot 'inayah, il signifie providence, prescience. Ce sens drive de l'acception primitive de 'ana, prendre soin d'une chose, s'en occuper. Castell l'a bien rendu, dans son Iexigue, par Pfovidentia; Kazinrsk.i a omis cette acception. Jur.Jnl , n'en donne pas la dfinition, probablement parce que ce mot .: est trs usit et qu'il ne peut y avoir de doute sur sa signification. ,

    {x) [Le mot Raison doit tre entendu ici conuue Intellect.] (2) C'est--dire aux matires visibles. (3) Les types universels.

    'l'HAl'l' SUJ.~ LA PRDE.S'l'lNATION qalam al-a'l/i)

  • DU LIEU OU RSIDE LE DCRE'l'

    Il est constant qu'il existe des forn~es spiritudles. ~uwar ruhaniyyah) (les anges) (1>, abstrattes de la matlere, exemptes de corruption, concevant par leur, esse1:ce tout ce qui est en dehors d'elles p~r esse~ce,.et detachees des corps (ceci est prouv en phtlosoplue par des ~r~uments, et enseign premptoirement dans la trad1tlon et dans le Coran, par exemple, dans ces paroles du Trs-Haut :

  • 70 'fRAIT SUR LA PRDESTINATION

    en eux, et, ce point de vue, on appelle les anges cles intelligences ('ttqul). Quant cette impression elle-meme, c'est la forme du dcret divin (urah al-qada! al-ilahi) , et son lieu est le monde de la rparation (alam al-jabarut). Ce monde est encore nomm la Mre du Livre (mnm al-K~'tab), et il y est fait allusion dans ces paroles du Trs-Haut :

  • 72 'rRAIT SUR LA PRl.:DESTINA'l'ION

    On dsigne (l' Ame universelle) sous le nom de 'fable garde (al-lawh al-mahfuzh), parce que c'est en elle que sont dposs ces concepts, et qu'ils y sont pr-servs contre toute altration. Ensuite, ces concepts viennent se graver dans les ames clestes individtielles (an-nufus as-sanuiwiyyah al-f'uz'iyyh), qui sont des facults(l) drives des ames raisonnables individuelles, inhrentes ces ames, en types exclusivement sp-ciaux,. dous de formes dtermines, ayant une mesure

    . dtermine, et occupant des positions dtermines dans. la matire, tels enfin que nous les voyons dans la raHt. C'est d'une faon analogue que se peignent dans nos facults imaginatives (quwana al-khayaliyyah) des notions spciales, telles que les ides d'individus, par exemple, ou les mineures des syllogism~s, qui, rapproches des majeures, amnent des conclusions particulires d'o rsultent des dterminations cer-tains actes prcis, qui, forcment, doivent alors se produire. Ce monde (des ames clestes partielles) est dsign sous le nom de Table de l'arrt (lawh al-qadar), d'Imagination du monde (khayal al-' alam), de Ciel le plus proche (as-sanui' ad-dunya), et c'est l que descendent tout d'abord les tres, leur sortie du nori-manifest (ghayb al-gkuyub), pour apparaltre ensuite dans le monde sensible ('alam ash-shahadah),

    (1) L'auteur entend les facults hnaginativ~ des mes ra~sonnables individuelles, drives de l' Ame ratsonnable un~verselle, qui sont les ames des sphres et ~:s plantes. La ph1- . losophie arabe considre les facults de l ame conune autant d'ames distinctes, subordonnes l'ame raisounable.

    (2) Mot mot: imprimes dans leurs .parties. . (3) .Parce que les mineures des syllogtslnes sont touJours des

    propositions particulires.

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    'fRAI'l' SUR LA PRf:DESTINATION 73

    ainsi que l'enseigne la traditionU>. Et les ames (clestes imaginatives indiques plus haut) sont dans le meme rapport avec leurs ames raisonnables (respectives) que notre imagination avec notre ame (raisonnable indi-viduelle). Chacune d'elles est un Livr~ vident, comme. ceux dont parle le Trs-Haut : Il n'y a pas un seui grain dans les tnbres de la terre, un brin vert otl dessch, qui ne soit inscrit dans le Livre vident ... . Il n'y a pas un animai auquel Dieu ne se charge d~ four-nir la nourriture ; i1 connait son repaire et le lieu de sa mort; tout est inscrit dans le Livre vident .... Au-cune calamite ne frappe soit la terre, soit vos personnes, qui n'ait t crite dans le Livre, avant que nous les ayons cres. ,, .

    L'arrive (sur la t:ible de l'arrt) de chaque forme dtennine dans son temps dtermin est ce qu'on

    (I) Jurji.ni, au mot lawh, rsume les renseignements divers que vient,de donner Qashani. cc Il y a, dit-il, quatre tables ; Io celle du decret, sur laquelle on efface ou maintient : c'est la table de l'Intellect Premier .. (al-'aqt al-awwal) : 2o la table de l'arret c'est--dite la table de l'Ame raisonnable universelle, s~ laquelle sont diviss (en types gnraux) les universaux de la premire table, ces types gnraux restant dans la dpen-dance de leurs causes ; c'est la table dsigne sous le nom .de

    t~ble. garde; 3 la ~able de l'Ame cleste particulire (ima-gzna_,tzon de .Z A1~e razs?'l!nable), surlaquelle se peignent tous

    .les etres qu1 extstent 1ct-bas, avec leur forme, leur figure et leur volume: c'est elle qu'on appelle le ciel le plus proche, et ce ci~l est comme l'imagination du monde, de mme que la prem1re table en est comme l'esprit, et la seconde .table, comme le cceur: 4 enfin, la table de la matire premire susceptible de recevoir l es fonnes, dans le monde des sens .. ~ [op. cit., p. 204].

    (2) Coran, VI, 59 (3) Coran, XI, 6. (4)" Corcm, r.vrr, 22.

  • 74 TRAIT SUR LA PRDESTINA'l'IO::\

    appelle le qadar d'une chose extrieure, dtermine, suivant ces paroles du Trs-Haut : Nous ne les faisons descendre que dans une mesure (qadar) dtermi-ne. Et l'on ne peut douter que la ralisation de cette chose ici-bas ne soit fatale, lorsque son moment est arriv.

    Le m onde (don t nous venons de parler) porte le no m de Monde de la Royaut (' alam al-malakut) . C'est le monde des agents qui, par la permission de Dieu, mettent tout en mouvement et dirigent les affaires . de l'univers, en mesurant la matire et en disposant les causes. Le sjour de l'arret est donc le monde de la Royaut, comme celui du dcret est le monde de la Rparation.

    Ceci< 4> rclame des explications dtailles.

    (I) Ce mot est pris ici dans un sens trs voisin de celui d'arret, pour ne pas dire dans le meme sens. Il signifie : dter-mination d'un etre, en forme, en tem:P.s, en lieu, en quantit, en volume, etc. C'est avec ce sens qu'1l parait le plus souvent dans le Coran.

    (2) Coran, xv, 21. (3) Le mot malaktet est dfini par Ibn 'Arabi ; Monde dn

    Mysti:e ('dlam al-ghayb) et par Jurjaui ; (( Monde du Mys-tre, rserv aux esprits et aux ames ( encore appel le M onde des Modles ('dlam al-mithdl) ; c'est le domaine de la mani-festation subtile, le domaine de la manifestation infonnelle tant le 'alam al-jabarut].

    {4) Par le mot ceci, l'auteur entend ce qu'il vient de dire un peu avant, savoir : que le monde de l'arret met tout en mouvement. On verra plus loin (chap. v) que, dans l'opinion de l'auteur, les corps clestes du monde de l'i.me sont camme les organes et les membres de l'univers.

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    ;. IV

    DTAII~S SUR CE QUI VIENT D'TRE SOMMAIREMENT INDIQUI~

    Les corps clestes sont dous d'ames raisonnables qui, semblablement nos ames, ont des conceptions et des dsirs gnraux, par leur essence, des conceptions et des dsir.; spciaux, par leurs organes. Toutes ces ames tendent vers une substance spirituelle (jawhar ruhani)(l> qui est jeur source et (pour ainsi dire) leur rservoir immcliat, et cherchent s'assimiler cette substance, cela, parce qu'elles conoivent certaines de ses perfections. Eles aspirent donc une manire d'etre universelle, qui leur permette de raliser cette assimilation. Pour arrher ce but. elles sont doues de conceptions spciales qui viennent se joindre leurs conceptions gnrales, de sorte qu'il en rsulte pour elles des dsirs spciaux: et des tendances spciales, occasionnant de leur part des mouvements analogues ceuxque produisent les ames, lorsqu'elles cherchent atteindre un but quelconque.

    A chaque mouvement que font ces ames clestes, elles s'lvent une position nouvelle, et cet tat leur procure,

    (r) Un des esprits qui habitent le monde de la Raison uni-verselle.

  • TRAI1' SUR LA PRimES'fiNATION

    de la part de Ja substance vers laquelle elles tendent, la communication d'une image intellectuelle, qui est une perfection (nouvelle), l'panchement de lumires qui leur font gouter une nouvelle jouissance, leur inspirent un nouveau dsir d'acqurir une antre per-fection, et provoquent derechef en elles la volont de s'lever un degr (suprieur). 1/image (susclite) s'imprime dans la force imaginative de ces ames, sous forme d'une image spciale, laquelle fait naitre en elles un dsir spcial, une tendance vers un tat spcial,. de sorte que leur volont primitive, (qui s'appliquait, dans le principe, au but) gnral, se particularise, devient une volont (dirige vers ce but) spcial et suivie d'un mouvement spcial, qui les conduit cet tat nouveau. Cet tat, une fois atteint, leur fait concevoir un autre mouvement spcial (qui les conduira vers un degr suprieur). A chaque nouvel tat, il dcoule de ces ames sur les matires de l'univers, en raison de leur plus ou moins grande aptitude, des formes qui les perfectionnent et une nouvelle aptitude recevoir la forme subsquente qui doit accompagner un tat subsquent. C'est ainsi que les mouvements partiels se produisent la suite les uns des autres, qu' un tat succde un autre tat, que les formes (de plus en plus parfaites) sont communiques tor tour aux ames clestes, que ces ames rpandent leurs influences conscutives sur les matires, que les matires acquirent successivement de nouvelles aptitudes recevoir ces formes, et que ces formes leur sont successivement transmises.

    Nous avons dj fait comprendre que l'existence positive, perptuelle, immuable, ternelle, cles formes

    TRAIT SUR LA PRlmESTINATIO~ 77

    (ou types) dans les esprits(l), objets du dsir (des ame~ clestes), s'appelle le dcret. L'arrive de ces formes, individualises, dans les ames elestes imaginatives, . de manire les remplir!2>, prend le nom d'arret. Certains philosophes appliquent le terme d'arret l'arrive cles formes dans les matires dlimites cxt-rieurement!3>, et croient que ces formes ne peuvent etre efiaces ou traces que dans ces matires, tandis que les formes spciales qui remplissent les ames clestes y subsist~nt jamais, dans leur intgrit. Mais nous croyons, nous, que les formes sont effaces ou traces dans les ames clestes et dans les matires, la fois et qu' chacune de ces alternatives il s'ensuit pour les matires destruction ou cration. Il est d'ailleurs hor) de doute que les matires sont dans une dpendance ncessaire des ames.

    Quoi qu'il en soit, parmi les diffrentes manires d'tre (ou positions des corps clestes), il y en a de gn-rales, qui constituent la cration ou la destruction des individualits, et il y en a de particulires, d'o rsultent les circonstances de la vie et les perfectionne-ments successifs de ces memes individualits. Les manires d' etre particulires sont tablies, espaces entre les manires d'etre gnrales. Chaque groupe de manires d'etre, chelonnes dans un certain ordre, et amenant le perfectimmement d'un tre quelconque, ou produisant en lui quelque circonstance, quelque modification,

    (t) Ce sont les Intelligences du monde de la Raison uni- verselle.

    (2) Mot mot : s'imprimer ans leurs parties. (3) C'est--dire sur terre.

  • 'l'RAI'l' SUl{ LA l'RDES'l'IN A'flON

    est donc limit par deux mauires d'etre (extremes), ' dont 1'w1e amne l'apparition de cet etre, et l'autre,

    sa destruction. Quant la dure qui s'tend entre les deux manires d'etre extremes (dure qui accom-pagne chaque tat intenndiaire et se compose de la somme des dures cles mouvements qui produisent ces tats (intermdiaires), pendant l'existence de l'etre en question, jusqu' son dernier moment), cette dure, disons-nous, est le Livre dsign par ces paroles du Trs-Haut : Il y a un Livre pour chaque terme (ou . dure). - Que nous interprtions le mot afal dans le sens de terme de la dure, ou dans celui de dure entire, il devra toujours s'entendre du premier moment qui accompagne la premire manire d'tre manifeste, suivi de toute la srie de moments qui accompagnent les tats intermdiaires, jusqu'au dernier tat. Et il n'est pas douteux que cette dure ne soit dtermine dans toutes ses parties par (la quantit) cles circons-tances fixes dans le dcret pour chaque etre, de telle sorte qu'aucune de ces circonstances ne peut arriver que dans une partie dtermine du temps (qui constitue la dure de l'tre). C'est pourquoi on ne peut chapper l'arrt ( la destine), ainsi que l'a dit le Trs-Haut.: cc Dis : La fuite ne vous servira de rien. Si vous avez chapp la mort naturelle ou violente (elle fhra par vous atteindre) ... Lorsque leur terme est venu, ils ne sauraient l'avancer ou le retarder d'un seu1 instant.

    (1) Coran, XIII, 38. (2) Coran, XXXIII, 16. (3) Coran, X, 49

    .;.

    'l'RAIT SUR LA PRimESTINA'l'ION 79 Quant aux ames du monde du dcret, elles ne sont

    point sujettes aux vicissitudes, ni soumises aux divisions du temps. A ce propos, on rapporte que le Prophtc (sur lui la paix !) se dtourna, un jour, d'un mur qui menaait ruine, et que quelqu'un lui dit : Veux-tu clone chapper au dcret de Di eu ? )) Il rpondit : > Par l il est mmfeste que l'arret est l'excution en dtail du dcret. -Et Dieu embrasse toutes choses.

  • / EXEMPLE POUR ILLUSTRTIR

    CE QUI PR~CDE

    Sache que la forme de l'univers est .de tous points sen:-blable celle de l'homme. En effet, 1l y a quatre degr.es dans la production des actes de I'.homm:: quand 1~s sortent des arcanes de leur mystneux seJOUr (maka-min ghaybi-ha) pour se montrer sur le thatre d.e leur apparition. Ils sont d'abord J?rofondment enfoms dans son esprit (ruh), qui est ce qu':l y a de plus secre: en lui. Ils so n t insaisissa bles en ra1so11 de le\1r ex tre me

    te, Puis ils clescendent dans le domamc de sun pure . , cceur (qalb), au moment o illes voque clans sa pen~ee et se les reprsente d'une manire tr~s gr:ra~e. EnsUlte ils descendent dans le trsor de son nnagmab~n (m~k![zan khayali-hi), dj individualiss .. ~t part1culanse7. Enfin, ses membres s'agitent, lorsqu 11 veut les m~mfester, et ils se produisent au dehors. Il en est de ~eme pour tous les vnements qui se passent dans l'umvers. Le premier degr correspond au dcret (qada') ; le deuxime, l'ame de la Table garde ( l'arret, al-qa~~r); le troisime, l'apparition des form~s. dans les matleres composes des lments. Il est ev1dent que la P,re-mire descente (des actes) n'a lieu qu'.en ve:t~ d un dsir gnral ; la seconde, en vertu d un des1r plns

    (I) Au moyen des mouvements ~es .corps clestes (voy. chap .. IV), qui so'nt les membres de l umvers.

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    'l'RAI'l'i': SUR I.A l'IdWES'fiNA'flON

    p:..:rticul~e.r m~is ,11on appare1~t, qu~,. se joignant au pre-m1er des1r generai, le partlculanse et le transforme en. une ~mlon~ particulire. De cette volont, qu' elle sott aff1rmatlve ou ngative

  • 82 'l'RAIT SUR LA l'RDES'i'INA'l'ION

    universelle. Quant l'esprit (particulier) de la qua-trime sphre, il correspond l'esprit animai qui est dans notre cceur, puisque c'est lui qui vvifie tous nos membres (comme l'esprit particulier de la quatrime sphre vivifie les corps clestes). Cet esprit n'est autre que la Maison habite (al-bayt al-ma'mur), bien comme, dans notre religion, pour etre situe au quatrimc ciel, et par laquelle Dieu a jur dans le Coran : Par le mont Sinai. Par un livre crit, sur un Roulcau dploy. Par la Maison habite. Par la V ml.te leve. Par la Mer gonfle. n C'est pourquoi la Maison habite est la station (maqam) de ] sus, l'Esprit de Dieu (ruh Allah) (sur lui la paix l), don t le mi rade consista i t ressusciter les morts. Le mont Sina1 est le Trne (3 l. Le Livre crit (kittib mastur) est le dcret ~al-qadft') lui-meme qui rside dans le Premier Esprit (ar-rt''th al-awwal)

  • VI

    DES ACTIONS SOUMISES AU LIBREARBITRE (AL-IKHTIY AR)

    Il a t dmontr, dans ce qui prcde, que tout cc qui arrive est arret, en forme et en temps, dans un autre monde, avant de se produirc en ce monde.

    Si maintenant la question des actes attrihus au lihrc arbitre te semblait obscure ; si tu tais tent c t'ima-giner que ces actes sont fatals, par suite de )eur pr-dtermination (l) ; (si tu te disais) comment se fai t-il alors que nous usions de la dlibration, que nous lJlls-sions modifier nos actes, les avancer ou les retarder, et que nous distinguions entre les actes fatals et les actes dtermins par un choix ; si tu te demandais pourquoi l'homme est tantt pun et chati, cause de ses actions, tantt rmunr et rcompens ; pour-quoi il en est rendu responsable ; quelle est la dif-frence entre les actions involontaires et les actions voulues ; comment elles entrainent leur suite la louange ou le blme; quel est le but cles comman-dements de Dieu et de ses dfenses; quelle utilit il y a dans l'obligation d'accomplir de bonnes ceuvres et des pratiques agrables Dieu, dans l'appel adress aux hommes par les prophtes, au moyen des signes

    (r) Mot lUOt dans cette hypothse n, c'est--ire dans l'hyp?thse que les actes sont arrets d'avance dans le monde supneur.

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    'l'RAITi~ SUR LA PRimES1'INATION 8S

    clestes et des miracles ; quel est le rsultat cles efforts v~r~ le bien ; quoi tendent les promesses et les menaces dtvmes ; quel est le sens cles preuves que Dieu envoie - toutes choses exprimes dans ces paroles du Trs-H~ut : > et clans bien d'autres versets, indi-quant ~ous qu~ le pivot cles prescriptions religieuses est le hbre arb1tre, et que le commandement de faire usage de son libre arbitre est fond sur son existence me.n:e (autrement,. les fondements cles obligations re!1g1euses re~osera1ent sur clu sable, et la parole de D1eu ne sermt que :adotage et plaisanterie) ; - si clone tu te demandms tout cela, je te rpondrais : Comme~1ce })ar implorer ton pardon auprs du Dieu tout-pu1ssant, et repens-toi, puis considre le cours des ordres divins, dans la marche clu dcret et de

    .l'anet ; rflchis sur la disposition de la chai:ne cles causes ; tablis, parla pense, les bases de toutes choses, comme elles doivent etre tablies ; pntre avec tout la force de la rflexion dans le sens intime cles versets du Coran, peut-etre Dieu t'accordera-t-il l'assistance de sa gnke, aprs t'avoir pardonn, et alors, convaincu (de ton erreur), tu t'empresseras de t'excuser.

    En . effet, le d~:et et l'arret produisent ce qu'ils prodmsent, p~r lmtermdiaire de causes, ranges clan~ ~n c:rtam ordre, panni lesquelles les unes sont clestmees a rgler et clisposer, comme les ames des SJ?hres, les mouvements et les positions cles corps celestes, les types cles choses, les proprits de lamatire les vnements qui jouent le rle d'vnements for~

    (r) Coran, r.,xvn, 2.

  • 86 TRAIT SUR LA PRtDESTINATIO?{

    tuits, et, en autre, les perceptians et les volitions de l'hamme, avec les mauvements et les repas arganiques ; les autres sant actives, daues d'influences, camme les principes suprieurs des essences spirituelles ; d'autres encare sant passives (leurs praprits tant essentielles au accidentelles) et reaivent l'impressian des causes prcdentes, dans certains cas, l'exclusian d'autres cas, suivant certaines farmes, l'exclusian d'autres farmes, mais taujaurs d'aprs un ardre vident, une dispasitian cannue dans le dcret primitif. La runian de tautes ces causes et de toutes ces canditians est appele cause camplte (l), et cette cause camplte amne farcment, taut abstacle tant lev, la pra-ductian de la chase dispase d'avr'l.ce, dcrte et arrete. Au cantraire, tant que l'actian de l'une quel-canque de ces causes partielles est retarde, au si quelque abstacle survient, la praductian de la chase reste dans le damaine du passible, et cela quelle que sait la cause qui reste inactive. Or, camme au nambre des causes susdites, et principalement des plus vaisines

    (1) La cause complte est donc l'ensemble de toutes les causes dont le concours est ncessaire pour la productiou d'une chose quelconque. Dans tous les vnements non soumis la volont humaine, ces causes agissent fatalement ; dans tous les actes soumis au libre arbitre, ces causes sont mises en mouvement par cette autre cause qui est le libre arbitre. Jurjni dfinit ainsi ce tenne : La cause complte est celle qui amne forcment la production de l'effet, ou encore l'ensemble de tout ce dont dpend l'existence d'une chose, en ce sens qu'en dehors de cet ensemble on ne peut. suppose~ aucun autre efficace. >> - Chacune des causes parhelles qut composent cet ensemble, et par rapport laquelle l'existence d'une chose est possible, reoit le nom de cause incomplte (ndqisah).

    {2) Obstacle naturellement prvu dans le dcret.

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    l'RAITJ:; SUR I.A PRl~DESTIN A TION 87

    (de l'acte), figure prcisment l'individualit humaine ou anim~le avec ses facults de percevoir, de savoir, c~e pauvotr, de voulair, avec sa rflexian et san imagina-tlan . a,u I~ayen clesquelles an adapte ou rejette un parti, l acban laquelle on s'est dcid est dtermine par un chaix ; mais sa praductian est fatale, ds que taut cet ~nsemble de causes, appel cause camplte, a agi, et passtble, par rappart l'une quelconque de ces causes. La productian fatale de l'acte n'est danc pas incompatible avec son libre choix, puisque cette praductian fatale n'a t amene que par le libre chaix.

    ~i h1 ve~:-: que je reprenne en dtail cet expas sam-mmre en dr~r1sant cl~irement man sujet et en expliquant ch~que P?mt auss1 campltement que possible, je vms le fa1re dans un chapitre spcial. coute avec un esprit v_eill, . et ~e te laisse distraire par rien, car ce .que Je va1s d1re renferme un enseignement pour c~Ulcanque est dau d'intelligence, sai t preterl'oreille et votrO>.

    (1) Coran, r,, 37

  • VII

    EXPLICATION EN DTAIL DE CE QUI VIEN'l' D'ETRE EXPOS:f: SQMMAIREMENT

    ET CLAIRCISSEMENT DE CE QUI PRCDE

    Sache que !es facults de percevoir, de savoir, de pouvoir, sont des modifcations de l'ame et font partie . de ses proprits nnes. Nous allons maintenant !es dfinir et montrer l'emploi de chacun cles termes qui les dsignent.

    La science ('ilm) est l'impressioa dans l'fune des formes cles choses.

    La perception (idrak) est la saisie d'une chose, au moyen d'un cles organes extrieurs, tels que les cinq sens, ou d'un organe intreur, comme l'ntelligence (al-'aql) et la facult de conception (wahm) qui est la source premire de la science.

    Le pouvoir (qudrah) est cette facult de l'me qui permet de se dcider galement faire ou ne pas fatre une chose.

    La volition (iradah) est l'intention dcisive qui nous pousse l'action, ou l'abstention de l'action. Lorsque nous avons peru une chose, nous la connaisso.ns, et lorsque nous la connaissons, selon qu' ell.e ex.c1te. en nous l'amour ou la haine, soit dans notre unagmatwn, soit dans notre raison, il nait en nous un dsir tendant attirer nous cet objet ou le repousser. C'est prcis-ment ce dsir qui est l'intention dcisive appele volition.

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    Lorsque la volition se joint au pouvoir, qui est la forme de notre facult d'action, cette force active se dispose aussitt mouvoir les membres ; le mouve-ment est alors fatalement produit, mais par l'effet du libre arbitre. Le libre arbitre (ikhtiyar) est donc la runion de la volition au pouvoir.

    I-~orsqu'un objet n'excite pas ncessairement en nous l'amour ou la haine, la raison emploie sa facult de rflexion, ou l'imagination sa facult imaginative, pour provoquer une dlibration de la part de la volont raisonnable ou imaginative, dlibration qui produira un mouvement du libre arbitre d'oit, finalement, rsul-tera 1' option.

    Souvent un objet est agral: ~ certains gards, et dsagrable cl'autres gards; par exemple, il est agrable certains de nos sens, dsagrable certains au1 res ; agrable . certains de nos membres, dsagrables au:x autres ; agrable aux sens et dsagrable la raison, ou rciproquement; agrable en ce monde et dsagrable en vue de l'autre monde, ou rciproquement; agrable par certains avantages qu'il possde, mais dsagrable par certains inconvnients. . Or, de tout sentiment agrable nait un motif invitant l'action, et de tout sentiment dsagrable, un motif qui en dtourne.

    {I) Ces expressions de volont raisonnable, de volont imaginative pourraient signifier : volont jointe la raison, volont jointe l'im.agination. Mais l'auteur fait videm.ment de la volont raisonnable et de la volont imaginative des facults part, et, aujourd'hui encore, on enseigne dans les traits de philosophie que c'est la volont gui prend une dci-sion. On fait donc de la volont une faculte de l'entendement, en qtte1qne sorte.

  • go TRAITI~ SUR I,A PRDESTINA'fiON

    Si les motifs opposs se contrebalancent, il en rsulte .un acte de notre volont qui nous incline l'abstenbon de l'action. Il est, dans ce cas, obligatoire pour nous d'opter pour l'abstention(l). De l.le mrite et, le ~mrite, la louange et le blame, smvant que 1 opbon a t benne ou mauvaise, et de l la rcompense ou le chatiment. La distinction entre ce qui est forc et ce qui est librement choisi apparait clone bien nettement.

    Souvent l'quilibre cles motifs n'apparait pas claire-ment l'ame elle demeure alors dans l'incertitude.

    , ..

    D'autres fois certaines dispositions, certaines dctswns semblent en' exclure d'autres. C'est alors qu'a lieu la dlibration sur l' opportunit de changer telle ou telle chose, telle ou telle drconstance, d'avancer ou de retarder telle ou telle poque. Le rsultat dpend du jugement plus ou moins sain de l'homme.

    Il est hors de doute que notre perception, notre science, notre pouvoir, notre volont, notre rflexion, notre imagination et les autres facults et organes de l'homme, tels qu'ils sont disposs, sont 1' reuvre de Dieu, et non notre reuvre, ni le produit de notre ben plaisir, car, sans cela, notre pouvoir et 1:otre volont. ne se ra ttac.heraient rien. Mais il est d es plulosophes q ut, considrant (la volont humaine) seulement dans ses rapports avec les causes les plus voisines de l'acte, (et perdant de vue les causes loignes,) proclament qu'elle

    (I) Le cas suppos ici par l'auteur est natnrellement celui o il s'agit d'une action agrable aux sens, mais que rprouve la raison. , l't (2} L'auteur dit ail.leurs que Dieu. tie~t comptc de l'inega 1 des mtelligences, au JOU.l' de la rtnbuhon.

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    Tl~AITJ~ SUR LA PRDBSTINATION 91

    est indpendante. Ils professent la doctrine du Qadar et du Tajwid, c'est--dire, croient que les actes manent de notre propre puissance, sont arrets par notls seuls, et que nous en avons la pleine et entire disposition. C'est pourquoi le Prophte (sur lui la paix !) a dit : cc Lcs Qadaris sont les Mages de ce peuple-ci. ))

    En effet, ils tablissent deux principes indpendants, d'une puissance ga1e, absolument comme les Mages qui croient Ormazd et Ahriman, faisant du premier le principe inclpendant clu bien, et du seconclle principe indpendant clu mal. C'est ainsi que les Qadarls en-seignent que tout mal vient de nous, et non (comme nous le disons) qu'il est produit par la volont de Dieu et par son commandement.

    Ceux, au contraire, qui contemplent seulement la cause premire et la manire dont toutes les autres causes et intermdiaires remontent, suivant l'ordre institu clans l' enchainement des causes et des e:ffets, jusqu' Dieu, par une dpendance ncessaire, suivant cles dispositions fixes conformes au dcret et l'arret,

    (1) La doctrine du Qadar tait professe par les Mu'tazills et diverses autres sectes comprises sous le nom de Qadariyyah. Jurjani dfinit cette secte : cc Les Qadarls sont ceux qt pr-tendent que tout holllllle cre ses actions, et ne croient pas que l'infidlit et les actes de dsobissance aient t dcrts par Dieu. >

    Le mot tafwid signifie ordinairement : confier une affaire quelqu'tm et s'en rapporter lui pour son excution. Ici, ce temte doit tre J?ris dans le sens de confiance absolue en soi-UH~me et, par smte, d'indpendance. [Ce tafw'id serait videm-ment celui d'Allah, qui remettrait ainsi le destin entre les ma.ins de Son serviteur.]

    (2) C'est--dire opposent l'honune Dieu.

  • 92 'tRAITI~ SUR LA PRl.mESTINATION

    et qui perdent absolument de vue ]es causes les plus voisines de l'acte, ceux-l. disons-nous, professent la doctrine du J abar et de la cration des actes, sans faire la distinction entre les actes libres et ls actes fatals< 2>. Les uns et les autres sont borgnes : ils ne voient que d'un reil. Les Qadaris sont privs de l'reil droit, le plus fort, celui qui nous fait contempler les essences(3>. Les ]abaris sont privs de l'reil gauche, le plus faible, celui qui nous fait voir les choses ext-rieures. Mais celui qui voi t juste et se sert des deux . yeux de so n creur contemple l es essences, de l'rei l droit, et rattache la volont divine les actions bonnes et mauvaises, puis regarde les cratures, de l'reil gauche, et affirme l'influence (propre) qu'elles exercent sur les actions, mais par un effet de la volont de Dieu et non indpendamment de lui. Il reconnait la vrit de ces paroles de J a' far a-diq : Il n'y a ni contrainte absolue (fabr), ni indpendance absolue (tafwid), mais quelque chose entre ces deu:x extremes, ,, et se range

    (r) C'est le dogme de la fatalit. Jurjani s'exprime en ces termes : ''Le Jabar (est la doctrine qui) attribue Dieu les actions de l'homme. Il y a deux sortes de Jabaris. Les modrs tablissent que l'homme acquiert ses actions. (c'est--dire en a le mrite et le dmrite, bien qu'elles soient cres par Dieu) : ce sont les partisans d'Ash'ari : les radicaux, tels que les J abmis, repoussent (mme) l'acquisition du mrite on du dmrite. >>

    (2) :Mot mot: les actes des honuues et les actes des tninraux. (3) Qui sont les causes loignes. (4) Qui sont les causes prochaines. (5) Un jour on dem.andait Abu Hanifah son avis sur la

    prdestination. Il rpondit ; C'est une question difficile, qui ne peut tre rsolue que par ceux auxquels Dieu euvoie sa rvlation: or, la rvlation divine est interrompue. Pour-tant, je vm1s dirai comme Ja'far a-iidiq : Il n'y a ni con-trainte absolue, ni indpendance absolnc, etc. ~

    l 'l'RAITJ~ SUR J,A l'lu'-:DHS'l'IKA'fiON 93 son avis. Celui-l est favoris de la gracc maJeure (al-fadl al-kabir) (Il.

    Quant celui(2l qui parvient rattacher clircctement Ics actions Dien, par la contemplation de son un.it ( bi-nazhari-t-tawhid), e n faisant abstraction cl e toute relation, et en supprimant les causes et les effets, mais non en ce sens que les actions ont t cres en nous (une fois pour toutes), ou qu' chaqne manifestation d'une action de notre part Dieu cre (en nous) un pouvoir nouveau et une volition (iriidah) nouvelle, comme le prtendent les lvfztjabbirah< 3>, celui-l replie la crat.ion camme un tapis, franchit d'un seui coup l'intervalle, se dbarrasse des catgories de entre et de o- ? et s'ab-sorbe dans l'essen ce de l'tre (Dien) ; mais il reste lui-meme dans l'anantissement et ne peut obteni~ en meme temps la vision du movde cr, plong qu'il

    . est dans l' essence de la runion avec Dieu, empech qu'il est, par la contemplation de la Vrit (Dieu), de voir la cration. Son regard ne se dtache pas de l'aspect de Sa splendeur< 4J, et' son ame ne se dtourne pas de l'intuition de Sa perfection ; bien loin de l, la lumire

    (r) Expression tire du Coran, :'0\.."XV, 32 ; xr.rr. 2 2. (2) C'est le Soufi. (3) Secte de Jabaris. (4) Dans le langage des Soufis, la splendeur et la :perfection se

    rapportent l'essence de Dieu, tandis que la majeste se rapporte ses attributs extrieurs. Dans tout ce passage Qasharu opp?se l'essence .divine la cration. La splendeu:r, la per-

    f~cf;ion, la lu_nu;e , de la splendeur dsignent l'essence d1v1~e ; la maJeste, l ombre de la majest, les tnbres des ~ttr1~uts S?~t .autau~ ?-e synonymes de cration. (Voyez cc suJet I tzlahat a-ujtyyah, p. 18, aux mots jalal et jamal.)

    (5) Cf. la note prcdente.

  • 94 TRAITI~ SUH LA PREDESTINA'l'ION

    de Sa splendeur lui cache l'ombre de Sa majest~1>, les clarts de Sa face et de Son essence ne lui pennettent pas de voir les tnbres de Ses attributs. La multiplicit disparait pour lui dans sa vision contemplative (sltu-hud), et il ignore sa propre existence. Cct tat est la flicit supreme (al-fawz al-'azhim)(2>. Puis, lorsqu'il revient la perception du monde extrieur, aprs avoir t plong dans l' anantissement (al-mahw), et qu'il voi t l es dtails dans l'essen ce totalisante, alors la vision de la Vrit (Dieu) ne lui enlve pas celle de la cration, ni la vision de la cration celle de la Vrit. La contemplation des attributs ne le distrait pas de celle de l'essence, ni la contemplation de l'essence de celle des attributs. La splendeur de Dieu ne lui en drobe pas la majest, et la majest ne lui en drobe pas la splendeur. Celui-l est le vritable voyant qui, parvenu la stabilit (tamkin)( 3> et la ralisation effective (tahqiq), connait la relation des actions avec Dieu, en tant qu'il les cre, mais sans les dpouiller de leurs rapports avec l'homme.

    Il est 1dans cet tat auquel font allusion les paroles suivantes du Trs-Haut : Ce n'est pas toi qui lanais (la poussire con tre l es enne mis), lorsq ue tu la lanas ;

    (x) Cf. ibid. . . (2) Allusion l'.expression s! frquentc, du Coran, dllaltka

    httwa-l-fawzu-l-'azlmn. On dstgne cet etat, plus .cotmnu-nment, sous le nom de fam: m~ rnnion, rec~eilleme?t. Qashani dfinit ce terme : u Vou Dten senl et oubher la crea-tion. (Cf. Itilaluit, p. xg.) . . . ,

    (3) La siguification de ce mot est snfftsaw.ment 1nd1quee dans ce passa9e. (Cf. pourtant Jurjani, Ta'rtfdt, p. 7 et 292, et Itilahat a-ufiyyah, p. 156, au mot talwin.)

    'l'RAI'l'. SUR LA PRDES1'I~.}.'l'IO~ 95 c~ ~s~ J?ieu qui la lan~it. n - Cet tat est la grande fehc1te (al-fawz al-kab~r).(2)

    .(x) Au cot:?-bat de Badr, le Prophte lana, conune on le satt, une po1gne de poussire contre les ennemis. (Coran, VIU, 17).

    (~). Plus ordinairement appele jam' al-fam'. Qashaui dftmt ce tenne : Voir que la cration subsiste par Dieu c'~st-!t-dire voir .J?i~u agissant dans tout phnomne de 'ta c~eatwn. (Cf. Itztahat, p. 19) [et voir l'unite dans la mnltipli-ctt~ et la multiplicit dans l'unit sans que la vue de l'une volle l'autre, ou iuversement (cf. ibid., p. 130)]. L'expression al-faw;; al-kabir est empruute au Coran, r.xxxv, II.

  • ;/ UTILITJ! DE L'OBLIGA'l'ION DES BONNES CEUVRES ET DE L'APPEL LA RELIGION, p AR LE MOYEN DES SIGNES CLESTES. 1NFLUENCE DU ZLE ET DES EFFORTS, DU'l' DES MENACES ET DES PROMESSES DIVINES,

    .:f:PREUVES QUE DIEU NOUS ENVOIE.

    Dans le chapitre prcdent nous avons expos le mode de production cles actes soumis au libre arbitre,

    de manire dissiper tous les doutes cet gard, et nous avons montr camme .. ~ ccs actes s'attiraient la louange ,ou le blme, la rcompense ou le chitiment. Il nous reste, prsent, dmontrer l'utilit des obligations religieuses et des pnitences, l'influence du zle et cles efforts, des rprimandes et cles eucouragements.

    Nous dirons, ce sujet, que si tu as bien compris que toutes les facults inhrentes l'~tre humain,.comme la facult de connaitre, de pouv01r, de voulou, etc., se rangeut parmi les causes produc.trices de l'action, tu peux supposer aussi que les choses que nous venaus d'numrer, et qui sont en dehors de l'homme, font galement partie de ces causes. La prdication: les obligations, la direction spirituelle, les e:rnort~twns, les promesses, les encouragements, la d1~suaswn et les rprimandes ont t institus p~r D1eu co~um~ des stimulants de nos dsirs, propres a nous conv1er a la pratique du bien et cles bonnes ceuvres, l'acquisitiou cles mrites et des perfections, et camme cles moyens de

    '1'RAI'l'I: SUH LA PRimBS1'INA1'ION 97

    nous pousser faire de belles actions, contracter de louables habitudes, dvelopper en nous de belles qualits, cles vertus cxcellentes et aimables qui nous sont dparties et qui nous servent en ce monde et dans l'autre, par Iesquelles nous amliorons notre condition ici-bas, et qui nous assurcront une fin heureuse ; qui nous prservent, enfin, de leurs contraires, c'est--dire des maux, cles fautes honteuses, cles pchs, de l'a\i-lissement, en un mot de tout ce qui peut nous nuire en ce monde et faire notre malheur dans I'autre.

    Il en est de nH~me du zle, cles efforts, de la prudence et de la circonspection qui ont t dcrts par Dieu camme tant propres nous conduire l'objet de nos dsirs, nous faire atteindre les buts divers que nous nous proposons, manifester an dehors nos per-fections, et qui (de plus) ont t institus par Dieu camme des causes intermdiaires au moyen desquelles il nous conununique ses faveurs journalires, ce qu'il a dcid de nous accorder pendant notre vie, ou ce qu'ilnous prpare dans l'autre monde, et par l'entremise desquelles il dtourne de nous les malheurs, nous pargne les maux et les calamits - tous rsultats que nous ne pouvons obtenir d'une autre manire.

    Aussi Dieu a-t-ilxarret l'existence de ces choses, pour nous, et leur acquisition est-elle obligatoire pour notre libre arbitre, suivant cette rponse que fit le Prophte (sur lui la paix !) une personne qui lui demanclait si les remdes et les incantations taieut

    . efficaces con tre l es 'rrets de Di eu : Les remdes et

    (1) C'est--dire : le zle, les efforts, la prudence et la circons-pectiou.

    .,

  • g8 TRAI'l'B SUR LA PRDES'l'INA'l'ION

    les incantations proviennent eux-mmes de l'arreJ de Dieu. Mais il a dit aussi : > Et quand on lui demanda : Sommes-nous au milieu de choses compltement termines, ou au milieu de choses en :V?ie de formation ? >> Il rponclit : Nous sommes au nuheu de choses termines et de choses en voie de formation. >>

    Il rsulte de l que tout ce qui nous revient en fait de mouvements, de repos, d'actions bonnes et mau-vaises, est conserv, inscrit notre charge, et que nous devons l'accomplir, bien que ce soit en usant de notre libre arbitre. Cela ressort de ces paroles clu Trs-Haut : Tout ce qu'ils font est consign dans le Livre. Toute chose, petite et grande, tout y est crit ... Et nous inscrivons leurs ceuvres et leurs traces. Nous

    (x) C'est--dire : rieu ne peut plus etre chang dans sa destine. Ces paroles s:ap?liquent Abu .r~ura_Yrah. .

    (2) Ce qui revient a dire que la parbc1pat1on de l ~m.Wlle la production des actes est au nombre des choses decretes par Dieu. .

    (3) Cette parole ne contredit pas celle o le Proph~te d1t qu~ la plum.e qui a crit la destine est sche. ~n effet, s'il est e~tre dans les dispositions de Dieu que certames ch?ses sera1ent hors de notre pouvoir, et d'autres en notre pouv~rr, par co~squent modifiables, le Prophte pouvait dire que D1eu ne, reVlen~ pas sur ses dcisions, et en meme temps que, conformemeut a ces dcisions il y a au monde des choses compltement ter-mines, ou f~tales, et des choses en voie de formation, ou en notre pouvoir. . .

    (4) En effet, tout acte produit par notre hbre arb1tre a du etre prvu par Dieu, afin qu'il disposat d'avance toute chose ncessaire l'accomplissement de cet acte.

    (5) Coran, r,IV, 52-53

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    'l'RAI1'J~ SUR LA PRBDES1'INATION 99 a;.ons tout :ompt~ dans un prototype vident ... C est notre I-~tvre; 11 parlera sur vous en toute vrit car_ nous couchons par crit tout ce que vous faites. >; Mms ces choses

  • 100 TRAI1'i~ SUR LA PH.DESTINA'l'IO~

    Quant aux preuves (que Dieu envoie), c'est la ralisa-tion des vnements qui ont t dcrts pour nous ou contre nous (md kataba lana wa 'alayna fi-l-qad1) ; , c'est l'apparition de faits, d'vnements, de devous pnibles, qui font sortir de nous et rduisent en actes ~es .. facults qui ont t dposes en nous et que, :e.cele en puissance notre nature, de manire ~~e nous me:l.tt?ns la rcompense (ath-thawdb) ou le chattment (al- ~qab). En effet, les actions capables de rcompense et de chatiment sont les fruits, les suites invitables, les cons~ quences, les accidents de facults qui existent en no~s, et ces effets n'existent pas encore lorsque (nos facultes) ne se sont pas manifestes au dehors, .lorsqu' elle~ ne se sont pas traduites par des actes, bten que J?teu les connaisse et bien que ces effets e::-..J.;::;tent \'trtuelle-ment en' nous. Et comment rsulterait-il (de nos facults) des fruits et des co~s.quences qui en sont le~ accidents (si elles ne se tradmsa1ent pas par des actes) C'est pourquoi le Trs-Haut a dit, entre autres versets analogues :

  • 102 TRAIT SUR LA PRDES'l'INA'l'ION

    serviteurs

  • 104 TRAI'l'f.: SUR LA PRIWESTINA TION

    parfait que possible, car s'il y en avait un plus parfait, il ex:isterait. D'ailleurs, si les aptitudes (al-isti'dadat) taient gales en tout, la beaut de l'orc1re de l'univers disparaitrait, et toute organisation serait dtrnite dans le monde. Tous les etres appartienclraient la meme classe resteraient dans le meme tat et se trou-

    .

    veraient au meme degr: Leurs affaires ne marchera1ent pas, leurs commodits seraient supprimes, et tous les autres possibles (al-mumkinah) demeureraient dans les arcanes du nant (kutnm al-'adam), malgr la possibilit de leur existence. Ce serait l une in~ust~ce et une iniquit pour ces tres et non pas la Justlce ('adl) et l'quit (qist). Le monde aurait besoin d'eux, et pourtant ils n'ex:isteraient pas. Ce serait absolument comme si l'oignon tait du safran et le laurier-rose de la camomille, l'oignon et le laurier-rose tant entirement privs d'ex:istence. Les hommes ser~ie!1t frustrs par. l du profit qu'ils en retirent et sonffnratent dans certa~ns de leurs avantages, par le manque de ces prodlllts. Si donc tu te proccupes fort peu de ce que l' oignon ne soit pas du safran, l'abrotone du stc:echas, le chien un lion, la chvre un chameau, les rochers cles an.imaux, les animatL">: des hommes, le ftu de paille un c:eil, et l'imagination la raison ; de meme, ne te soucie point de savoir pourquoi un adolescent n'est pas un Sahban, le mendiant un sultan, le malheureux un heureux,

    (1) Sahban, fils de Wil et contemporain .de Mu'a~iy~, personnage clbre par son loquence, et qm a donne lieu au proverbe : Plus loquent que Sahban. ))

    (2) Ou le rprouv un lu, car shaqi et sa'id ont ce sens. Nous avons traduit malheureux et heureux pour donner aux: mots prcits la signification la plus tenduc.

    !

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    'J'RAI'f SUR I.A PRDESTINA'l'ION I05

    l'ignorant nuisible un savant vertueux et habile, car, s'il en tait ainsi, le sultan se verrait rduit balayer et le savant qui se consacre l'adoration de Dieu serait contraint de vivre avec les betes fauves. Cette galisation cltruirait tonte proportion : le sultan ne serait pl\.1s sultan, ni l'intendant intendant; l'ordre de l'univers serait aboli, et l'on verrait apparaitre le dsordre et la confusion. Cet tat de choses ne serait pas la justice : bien au contraire, ce serait l'arbitraire et la tyrannie. En effet, la justice consiste associer les matires et les corps avec les formes et les ames qui leur conviennent, rpartir les tempraments en raison des genres, des espces et cles individus, et imprimer aux ind.ividus la direction qui les fait tendre vers des occupations conformes celles de leur espcc.

    Quiconque fait le mal et pche dans sa manire de voir se maltraite donc lui-meme, par la mchancet de sa nature et l'insuffisance de ses aptitudes. Il est digne du malheur dans la_vie future. Malik, gardien de l'enfer, lui criera cc Tout beau ! Ce.sont tes propres mains qui ont serr (l'outre), ta propre bouche qui l'a gonfle !

    Et si ses aptitudes sont dfectueuses et sa nature mauvaise, c'est quesanaturenecomportaitpasla possibi-lit d'etre meilleure qu'elle n'a t cre, de meme qu'il est impossible qu'un singe, par exemple, engendre un homme parfait, au point de vue de la beaut de la forme et de la conduite.

  • I06 'l'RAI'l' SUR LA PRimES'riNA'l'ION

    remplirai l'enfer de gnies et d'hommes la fois .. Mais, de mme qu'on ne reproche pas au plus lm~l des hommes de ne pas ressembler Joseph, en,?eaute, et de meme que Dieu excuse les homm.es d etre de formes si diverses qu'on n'eu trouvera1t pas deux pareils, de mme on ne reproche pas au pire des homn:es de ne pas etre comme Muhammad, le Prophte de Dt.eu (que Dieu le protge et le sauve !), dans sa condmte et sa manire d'agir. Dieu excuse les hommes et~ cela, car leurs qualits et leurs caractres. so~t aus,st varis que leurs formes et l~urs natu.res, et a111s1 que l a dit le Prophte (sur lui la pmx !), D1e~ ~ complten~ent achev quatre choses : la form~ exteneure .(al-hh~lq), le caractre (al-kh~tlq), la subststance (ar-r~zq) et le terme de la vie (al-afal).

    Et maintenant, comment se garder de ce don t il faut se garder ? Nous rpondons: Celui dont l'me est noble: le . caractre lev, la nature excellente, l'hume~r do~1le, ne songe pas accomplir des actions. co~traues a .s~ nature des actes honteux et vils qut n ont pas ete dcrts sa charge, parce qu'ils ne lui sont pas con- formes. Et s'il y songe parfois, vaincu p~r m:e des qualits ou des forces de son me, parla pr:do~ma~1ce d'un des motifs que lui fournissent son 1mag:nat~on (wahm.) et sa passion (hawa), ou par Ul;e. exc1tatwn venue de ses facults passionnelles et c?lenque~, alo.rs sa raison l'carte et l'loigne de cette achon, et l Espr~tSaint qui est en lui (ruh-hu al-qudsi) l'empeche et le

    (x) Coran, XI, II8II9. . ( 2 ) Il suffit que cet houuue agisse aussi bieu qu'1l est en son

    pouvoir.

    l l f

    TRAI'l'I: SUR LA l'Rl-:DES'fiNA'rlO}; 107

    retient, ainsi que Dieu l'a expos, en parlant de Joseph (sur lui la paix !) : - Lorsque l'homme est infrieur cela, en fait de puret d'aptitude, il ne peut etre retenu que par la loi religieuse et civile, par les conseils et l es rprimandes, etc., et il en a besoin.

    Quand au contraire l'homme suprieur mdite de faire une belle action, conforme sa nature, il y trouve un e:xcitant dans sa raison et dans son intelligence, un auxiliaire dans l'assistance (at-tawfiq) et la direction

    (al-h~'dayah) divines qui sont en lui. Il se dispose alors accomplir cette action avec dsir (shawq) et passion (slza'af), parce qu'elle lui est conforme, et rien ne l'en dtourne n.i ne l'en carte. - Chez l'homme un peu infrieur cela, le besoin se fait sentir d'excitations et de stimulants venus du dehors..

    Quant celui dont l'me est basse, le caractre sordide, l'origine perverse, l'humeur intraitable, les choses se passent pour lui d'une manire inverse, suivant ces paroles du Trs-Haut, qui s'appliquent Abt'1 Jahl et ses pareils : Il leur est indiffrent que tu les avertisses ou non, ils ne croient pas , et ces autres : Tu ne peux pas diriger qui il te plait. En effet, chacun dsire faire ce qui est compatible avec sa nature, ce qui lui est agrable et ce qui lui plait,

    (1) Coran, XII, 24. TI est ici question de la femme de Putiphar. (2) Enuemi dclar du Prophte. (3) Coran, II, 6; XXXVI, ro. (4) Coran, xxvm, 56.

  • ro8 'fRAITi~ SUI~ LA PRDES'NA'fiON

    l t que le contraire est prfrable et plus tout en sac 1an , , nf ts beau C'est ainsi que le ngre prefere ses .e an ,. ' malg~ leur laideur, un jeune garon turc, b;en 9-u 11 n'ignore pas que ce dernier est plus beau que es stens.

    En Ce qui concerne le bOlilieur et le malhe'":r' nous 1 l At ' Dteu

    allons l'exposer dans un chapttre, s 1 p al a .

    DE LA F~LICITn (AS-SA 'ADAJI) ET DU~~fALHEUR (ASH-SHAQAvVAH)

    Tu sais prsent ce qui vient d'etre expos, touchant la classification des aptitudes et la rpartition des esprits (arwc'h) en diffrents degrs (darajtlt). Apprends mainte-nant que chacun a une flicit (spciale), en corrlation a vec son etre intime (lwwiyyah), avec les faveurs (al-minnah) que Dieu lui a accordes, et avec sa proxi-mit (qttrb) de Dieu, flicit qui est le tenne e:xtrme de la perfection (al-kamil) que comporte sa nature. A l' oppos de cette perfection est le terme e:xtreme de l'imperfection dont elle est susceptible : c'est l son

    S 1-.malheur spcial. Les flicts (respectives) sont dane gradues suivant les aptitudes, et (par consquent), la plus grande flicit appartient absolument aux plus excellentes aptitudes, aux perfections les plus nobles, au plus noble des esprits qui est l'esprit du vritable p6le absolu (1 >, c'est--dire Muhammad (sur lui la paix !}, ainsi que l'a dclar le Trs-Haut : Nous avons lev l es prophtes au-dessus l es uns d es autres ... Il a lev l es degrs de certains d' entre eux(2>. )) Le Prophte possde donc le degr le plus lev des apti-tudes (al-martabah al-'aliyi ft-l-isti'ddd), et la flicit supreme (as-sa'adah al-kttbrd), dans l'autre vie. Au

    (1) Cf. Jurjaui, aux mots qutbiyyah et qutb lp. 184-5}. (2) Coran, II, 253.

  • IlO 'rRAI'l'f: SUR LA l'RDES'l'INATION

    contraire, plus les aptitudes sont bornes, moindre est le bonl1eur; moindre aussi l'intervalle qui le spare du dernier degr du malheur ou du bonheur (relatif) F qui lui correspond.

    Lorsque les aptitudes occupent un juste milieu entre les deux termes extremes, suprieur et infrieur, svmboliss par la lumire (an-nur) et Ies tnbrcs (azlz-zJmlmah) et encore par la divinit (lahttt) et par l'huma-nit (nasut), l es penchants de l'homnl.e se trouv~nt gale distance de la perfection et de l'it:lpe:fec,twn dsignes dans le Coran par les termes de Illzy~un.(l) et de Asfala Sajain

  • II2 TRAIT SUR LA l'RDES'l'INATION

    ('mhaliyyat), consistant en ce qu'o1~ accomplit _de bonnes ceuvres (at-ta'at) et de belles actlons (al-khayrat). Et de meme que la beaut du visage et du corps ~entre dans la premire catgorie du(~bonlJeur mondatn, .,de meme les belles qualits rentrent dans la prenuere catgorie dubonheur futur. C'est d'aprs ces qualits que l'on numre les diffrents clegrs du l~m~heur On demanda l'mir cles croyants(l> de decnre le savant il le dcrivit. Puis on lui dit : Dcris-nous l'ignor;nt. n Il rpondit : J e viens de le. faire( 2l. >> En effet liJbonheur et ldilnalheur sont en rmson de la science (al-'ilm) et de l'ignorance (al-jahl) (et, ils sont essentiellement inhrents aux hommes, cela eternelle-ment, tout jamais), ou en raison cles bonnes ~t des mauvaises actions, d'aprs lesquelles on re01t sa rtribution, et sur lesquelles on mcsure les rc.om-penses et les chatiments. Di:~ n'a-t-i.l pas, dit : C'est la rcompense de ce qu 1ls ont fmt...; c e~t la rtribution de ce qu'ils ont acquis(3) ? - Mals le

    5 malheur n'est pas perptuel (sauf le bou plaisir de Dieu), et il. admet des aggravations et des allgements. On peut dire, toutefois, en gnral, que les pchs les plus nombreux et les plus graves sont la consquence de l'ignorance, et que la plupart des ve~tus et les plus grandes sont la consquence de la sc1ence. O n:on Dieu ! place-nous panni les bienheureux que tu agrees, et non parmi les rprouvs que tu loignes.

    (r) Probablement 'Ali. . . ,. (2) Il voulait dire que pour avoir la descnptwn de.l1gnorant

    et de son tat, il suffisait de prendre la contrepartle de celle du savant.

    (3) Coran, passim.

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    TRAITI~ SUR LA PRDESTINATIOX IIJ ~'est d'~illeurs I'intelligence (al-'aql) qui est le

    pomt cardmal des obligations imposes tous les hom~es . c!uel que soit, dans ce domaine, leur degr de v1vac1te ou de lenteur. En effet, l'intelligence est ~a commune mesure des etres intelligents (al-'uqala') : {ent~nds ce p~r quoi l'homme lui-nH~me est appel mtelhgent ('aqtl). C'est r>ourquoi tous les hommes sont astreints aux memes devoirs, mais ne sont pas tous tenus lgalement de connaitre les dcisions juri-diques, ni d'approfondir les sciences, suivant cette parole du Trs-Haut : Dieu n'impose chaque ame

    q~e ce qu'elle peut supporter(ll. >l Les progrs dans les sc1ences sont donc eu dehors de la loi.

    Quant aux ceunes, elles assurent leur auteur un rang en proportion de ce qu'il a fait. Quiconque reste en de de la perfection laquelle ses aptitudes lui per-mettaient d'atteindre, soit par omission, soit parce qu'il a commis cles actions incompatibles avec elles, recevra en rtribution de ses fautes un chatiment proportionnel la distance laquelle il sera rest en arrire. De mme, tout homme, dont les ceuvres sont inscrites au livre des comptes, qui sera parvenu au degr debonheur auquel il lui tait donn d'at-teindre, et qui avait t dcrt pour lui, obtiendra le salut, quand bien meme son bonheur futur serait humble et restreint, en comparaison de la flicit supreme. En effet, comme cet homme ne conoit pas ce quoi il ne peut atteindre, il n'en a pas le dsir, et .d~s qu'il n'en a pas le dsir, il ne souffre pas d'en etre. pnve.

    (r) Coran, II, 286.

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  • II4 TRAITi~ SUR LA PRiWES'riNA'l'ION

    Tout ce qui a t dcid est fatal un point de vue et possible un autre point de vue. Cela n'exclut clone pas la participation du libre arbitre.

    Ce que nous venons d'exposer suffira quiconque est assist de Dieu. Quant celui dont Dieu a rendu l'intelligence obtuse, en dire plus long ne le convaincrait pas. Notre recours est en Dieu, contre l'incapacit. C'est lui qui facilite les choses ardues, qui exauce les prires. C'est en lui qu'est notre confiance. Il est notre protecteur, et quelle belle protection !

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