Tomodensitométrie haute résolution dans le diagnostic...
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Tomodensitométrie haute résolution dans le diagnostic
des pneumopathies médicamenteuses et radiques
en Unités de Soins Intensifs
Hôpital la MilétriePoitiers, France.
AuteursCendrine Godet(*)Jean-Pierre Frat(**)Véronique Goudet(**)Gaëlle Fromont-hankard(***)Ali Belgour(****)Olivier Delval(****)Jean-Pierre Tasu(****)
(*) Service de Maladies Infectieuses et de Médecine interne, CHU la Milétrie, Poitiers, France.
(**) Service de Réanimation Médicale, CHU la Milétrie, Poitiers, France.
(***) Service d’Anatomie et de Cytopathologie, CHU la Milétrie, Poitiers, France.
(****) Service de Radiologie, CHU la Milétrie, Poitiers, France.
Introduction (1)Le poumon toxique médicamenteux correspond à l’action directe d’une substance médicamenteuse sur le parenchyme pulmonaire, quel qu’en soit le mécanisme physiopathologique d’action ou la voie d’administration.
Les pneumopathies médicamenteuses subaiguës ou chroniques s’expriment sous plusieurs forme :
– Pneumopathie d’hypersensibilité (PHS)
– Pneumopathies interstitielles (fibrosantes ou non)
– Pneumopathie à éosinophiles
– Pneumopathie organisée (PO)
– Bronchiolite constrictive
– Maladie veino-occlusive
Introduction (2)Reconnaitre une pneumopathie médicamenteuse impose de la
rigueur
Un diagnostic précoce est important car l’évolution spontanée peut-être rapidement progressive et fatale par insuffisance respiratoire aiguë
La décision de l’arrêt immédiat du médicament supposé en cause est nécessaire pour espérer une amélioration voire une guérison rapides
Cette décision doit-être mûrement réfléchie, en raison de l’impact potentiel de l’arrêt du médicament supposé toxique sur l’évolution de la maladie sous-jacente
Secondairement, une évolution non favorable peut nécessiter l’instauration d’une corticothérapie, laquelle représente un facteur de risque infectieux non négligeable
Introduction (3)Le diagnostic de PN médicamenteuse est difficile en raison de signes cliniques non spécifiques, compatibles avec une PN infectieuse, radique ou une localisation de la pathologie sous-jacente.
Le diagnostic repose sur un faisceau d’arguments :
– chronologie compatible
– tableau clinico-radiologique évocateur
– lavage bronchioloalvéolaire éliminant une pathologie infectieuse ou maligne avec une cellularité évocatrice
– épreuves fonctionnelles respiratoires compatibles
– évolution favorable à l’arrêt du traitement et/ou àl’introduction de corticoïdes
Matériels et Méthodes
Analyse rétrospective, entre janvier 2007 et juin 2008, en Unité de Soins Intensifs, des données scanographiques couplées au LBA et confirmées sur le plan histologique de 10 PN médicamenteuses
Objectifs
Le but de ce poster est de déterminer la place de la tomodensitométrie thoracique haute résolution (TDM-HR) dans la prise en charge des pneumopathies médicamenteuses admises en Unité de Soins Intensifs et d’en exposer les aspects sémiologiques
Indication de la TDM-HR dans les PN médicamenteuses
Confirmer la suspicion clinique avec mise en évidence de lésions élémentaires tomodensitométriques imputables à une toxicité du médicament incriminéApprocher un diagnostic histologique dans les cas atypiques afin d’éliminer une néoplasie ou une infectionGuider vers un site optimal de lavage ou de biopsieQuantifier l’atteinte pulmonaire et réaliser un suivi évolutif
Diagnostic de la PN médicamenteuse
Le dénominateur commun clinique des 10 observations suivantes
est l’admission en USI pour détresse respiratoire aiguë fébrile.
Cas 1 : Toxicité pulmonaire de la Cyclophosphamide
Symptômes : toux, dyspnée, fièvre à 2 mois d’un traitement par EndoxanR pour LMNHTDM-HR : verre dépoli diffus et bilatérale associé àdes plages de condensations alvéolaires basales contenant un bronchogramme aérique.LBA : absence d’agent infectieux et cellularité mixte à prédominance lymphocytaire (55%) avec une hyperéosinophilie modérée (11%)Histologie : pneumonie organiséeÉvolution : régression sous corticoïdes.
Verre dépoli diffus et bilatéraleassocié à des plages de condensations alvéolaires basales
contenant un bronchogramme aérique
Cas 2 : Toxicité pulmonaire de la Cyclophosphamide
Symptômes : toux, dyspnée, fièvre à 1 an d’un traitement par EndoxanR pour LLCTDM-HR : verre dépoli diffus et bilatérale associé à des opacités réticulaires et linéaires basales et périphériquesLBA : absence d’agent infectieux et cellularitémixte à prédominance de neutrophile (40%) et de macrophages (30%)Histologie : pneumonie interstitielle non spécifiqueÉvolution : régression sous corticoïdes.
Verre dépoli diffus et bilatéraleassocié à des opacités réticulaires et linéaires
basales et périphériques
Cas 3 : Toxicité pulmonaire du Méthotrexate
Symptômes : toux, dyspnée, fièvre chez une femme traitée par Méthotrexate pour une polyarthrite rhumatoïdeTDM-HR : verre dépoli diffus et bilatérale associé à des aspect en « crazy paving », à des condensations et à des opacités en bande basales sous pleurales .LBA : absence d’agent infectieux et cellularitémixte à prédominance lymphocytaire (38%) avec une hyperéosinophilie modérée (6%)Histologie : pneumonie organiséeÉvolution : régression à l’arrêt du Methotrexate.
Verre dépoli diffus et bilatéraleassocié à des aspect en « crazy paving », à des condensations et à des opacités
en bande basales sous pleurales .
Cas 4 : Toxicité pulmonaire de l’Amiodarone
Symptômes : toux, dyspnée, fièvre chez une homme traité par Amiodarone pour une AC/FA depuis 6 moisTDM-HR : verre dépoli diffus et bilatéral associé àdes plages de condensation hétérogènes plutôt gravito-dépendantes évocatrices de dommage alvéolaire diffus.LBA : absence d’agent infectieux et cellularité mixte à prédominance macrophagique avec présence de macrophages spumeux à inclusionsÉvolution: régression à l’arrêt de l’Amiodarone associéà des corticoïdes.
Verre dépoli diffus et bilatérale associéà des plages de condensation hétérogènes
gravito-dépendantes évocatrices de dommage alvéolaire diffus.
Cas 5 : Toxicité pulmonaire du Tacrolimus
Symptômes : toux, dyspnée, fièvre chez une femme traitée depuis 1 an par Tacrolimus et Cyclosporine dans le cadre d’une greffe de reinTDM-HR : verre dépoli diffus et bilatérale associé àdes plages de condensations alvéolaires basales contenant un bronchogramme aérique.LBA : absence d’agent infectieux et cellularité faite de sidérophages évoquant une hémorragie intra-alvéolaireHistologie : lésion de pneumonie organisée aux basesÉvolution : régression à l’arrêt du tacrolimus.
Verre dépoli diffus et bilatéraleassocié à des plages de condensations alvéolaires basales
contenant un bronchogramme aérique
Cas 6 : Toxicité pulmonaire du Sirolimus
Symptômes : toux, dyspnée, fièvre chez un homme traitédepuis 8 ans par Sirolimus, Cyclosporine et corticoïdes dans le cadre d’une greffe cardiaqueTDM-HR : verre dépoli diffus et bilatérale associé à des condensations plutôt nodulaires bilatérales et sous-pleurales et à des épaississements de septa interlobulairesLBA: absence d’agent infectieux et cellularitéessentiellement lymphocytaire à 70%Histologie : aspect de BOOP associée à des granulomes àcellules géantes sans nécrose compatibles avec une pneumonie granulomateuse au SirolimusÉvolution : régression à l’arrêt du Sirolimus.
verre dépoli diffus et bilatéraleassocié à des condensations plutôt nodulaires bilatérales
et sous-pleurales et à des épaississsements de septa interlobulaires
Cas 7 : Toxicité pulmonaire des bétabloquants
Symptômes : toux, dyspnée, fièvre chez un homme traité par bétabloquant depuis 2 ans pour une HTATDM-HR : verre dépoli diffus et bilatérale associé àdes opacités linéaires et réticulaires sous pleurales, périphériques évoquant une pneumonie interstitielle fibrosanteLBA : absence d’agent infectieux et cellularitélymphocytaire à 42% Histologie : aspect de PINSÉvolution : régression à l’arrêt du traitement associéà des corticoïdes
Verre dépoli diffus et bilatérale associéà des opacités linéaires et réticulaires sous pleurales,
périphériques évoquant une pneumonie interstitielle fibrosante
Cas 8 : pneumonie interstitielle àéosinophiles aux AINS
Symptômes: toux, dyspnée, fièvre chez un homme traité par AINS depuis 3 semainesTDM-HR: aspect en verre dépoli diffus et bilatéral avec en distribution plus périphérique que axiale (en ailes de papillon inversées) LBA: absence d’agent infectieux et cellularitériche en éosinophiles (34%), associé à une hyperéosinophilie sanguine (914/mm3)Évolution: régression sous corticoïdes
Aspect en verre dépoli diffus et bilatéralavec en distribution plus périphérique que axiale
(en ailes de papillon inversées)
Cas 9 : Pneumonie radiqueSymptômes : toux, dyspnée, fièvre chez un homme traité par radiothérapie médiastinale(40grays) dans le cadre d’un lymphome il y a 3 semainesTDM-HR : aspect en verre dépoli associé à des condensations avec parfois bronchogramme intéressant le champ d’irradiation LBA : absence d’agent infectieux et cellularitélymphocytaire à 60% Évolution : régression sous corticoïdes
Aspect en verre dépoli associéà des condensations avec parfois bronchogramme
intéressant le champ d’irradiation
Cas 10 : Syndrome BOOP post-radique
Symptômes : toux, dyspnée, fièvre chez un femme traitée par radiothérapie médiastinale LSD (40grays) dans le cadre d’un lymphome il y a 6 semainesTDM-HR : aspect en verre dépoli associé à des condensations avec parfois bronchogramme intéressant le champ d’irradiation mais aussi le poumon controlatérale avec forte distribution péribronchovasculaire des lésionsLBA : absence d’agent infectieux et cellularitépanachée, lymphocytaire à 60% avec 11% de polynucléaires éosinophilesHistologie : BOOPÉvolution : régression sous corticoïdes
Aspect en verre dépoli associéà des condensations avec parfois bronchogramme
intéressant le champ d’irradiation mais aussi le poumon controlatérale( distribution péribronchovasculaire des lésions)
Sémiologie des PN médicamenteuses
Les lésions élémentaires le plus souvent rapportées sont :– Le verre dépoli– Des condensations alvéolaires diffuses et
bilatérales– Des aspects de fibrose– Un trappage associé à des dilatations de
bronches– Des hyperdensités avant injection de produit
de contraste
Orientation sémiologique (1)Le verre dépoli quasi constant oriente plutôt vers : – la PHS s’il est isolé et centrolobulaire– le DAD ou l’HIA s’il est diffus et bilatéral– la PINS ou la BOOP s’il est en plages disséminées
Les condensations alvéolaires diffuses et bilatérales :– sont le fait des DAD ou des HIA graves– en foyers périphériques et basales : PINS et la
BOOP – en foyers lobaires supérieurs : PN interstitielles à
éosinophiles
Orientation sémiologique (2)
Les aspects de fibrose (bronchectasies de traction, opacité linéaires et rétractiles, opacités en rayon de miel) orientent vers la PINS ou les formes évoluées de DADLe trappage et les dilatations bronchiques orientent vers la bronchiolite constrictiveUne hyperdensité avant injection de produit de contraste oriente vers une surcharge en Amiodarone
Diagnostic (1)Il repose sur des critères d’orientation:
Une chronologie compatible avec un traitement supposé toxique référencé pour ses risques pneumologiquesUne élimination policière d’autres causes : infectieuses, néoplasique, surcharge, systémiques et environnementalesUn tableau clinique, fonctionnel respiratoire et biologique compatible
Diagnostic (2)
la sémiologie TDM-HR couplée au lavage bronchiolo-alvéolaire prend toute sa valeur pour permettre :de réaliser le diagnostic différentiel des pneumopathies infectieuses, de surcharge, ou néoplasiquesde limiter les indications biopsiques agressives, grâce à une meilleure connaissance des spécificités propres à chaque traitement, en terme d’expression lésionnelle scanographique et de cellularité du LBA.
Conclusion (1)
Le diagnostic d’une PN médicamenteuse impose une réflexion rigoureuse et une parfaite connaissance de l’expression historadiologique de la toxicité des médicaments La TDM-HR permet d’identifier les anomalies radiologiques à un stade précoce La TDM-HR permet une étude analytique pour définir le mécanisme lésionnel rencontré : DAD, PHS, toxicité spécifique (Amiodarone).
Conclusion (2)
La TDM-HR permet de quantifier l’atteinte pulmonaire et de réaliser un suivi évolutifLa TDM-HR permet d’écarter rapidement d’autre causes de détresse respiratoire aigues comme la lymphangite carcinomateuse ou les surcharges hydrovolémiques
Conclusion (3)
L’intérêt de l’analyse sémiologique radiologique couplée aux données du LBA est de limiter de recourir inutilement à la biopsie thoracique agressive pour aboutir au diagnostic de PN médicamenteuse.Cependant, chez le patient immunodéprimé, le diagnostic différentiel de pneumopathie infectieuse ou spécifique d’une hémopathie est crucial, et ne doit pas retarder l’indication d’une biopsie thoracique même agressive quand le tableau est atypique.