Thèse - JOURAND Clément...Une étude de l’activité d’élèves dans différents dispositifs...

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1 THÈSE présentée par Clément JOURAND en vue de l’obtention du grade de : Docteur de Normandie Université délivré par l’Université de Rouen Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives (74 ème section) Dynamique des interactions lors de leçons d’Education Physique et Sportive en Course d’Orientation Une étude de l’activité d’élèves dans différents dispositifs d’apprentissage Le 1 er avril 2015 Devant le jury composé de : Fabienne d’Arripe-Longueville Professeure, Université de Nice (rapporteur) Nathalie Gal-Petitfaux Maître de Conférence HDR, Université de Clermont-Ferrand (rapporteur) Denis Hauw Professeur, Université de Lausanne Jacques Saury Professeur, Université de Nantes Carole Sève Inspectrice Générale HDR, Ministère de l’Education Nationale Régis Thouvarecq Professeur, Université de Rouen (directeur) David Adé Maître de Conférence, Université de Rouen (co-directeur)

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THÈSE présentée par

Clément JOURAND

en vue de l’obtention du grade de : Docteur de Normandie Université

délivré par

l’Université de Rouen

Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives (74ème section)

Dynamique des interactions lors de leçons d’Education Physique

et Sportive en Course d’Orientation

Une étude de l’activité d’élèves dans différents dispositifs

d’apprentissage

Le 1er avril 2015

Devant le jury composé de :

Fabienne d’Arripe-Longueville Professeure, Université de Nice (rapporteur)

Nathalie Gal-Petitfaux Maître de Conférence HDR, Université de Clermont-Ferrand (rapporteur)

Denis Hauw Professeur, Université de Lausanne

Jacques Saury Professeur, Université de Nantes

Carole Sève Inspectrice Générale HDR, Ministère de l’Education Nationale

Régis Thouvarecq Professeur, Université de Rouen (directeur)

David Adé Maître de Conférence, Université de Rouen (co-directeur)

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Remerciements

Cette thèse est le résultat de dynamiques d’interaction avec de nombreuses personnes sans

lesquelles ce travail n’aurait pas pu aboutir. Particulièrement...

… Régis et David, mes directeurs de thèse

J’espère que ce manuscrit sera un remerciement à la hauteur de vos exigences, de votre investissement et de vos encouragements continus durant ce travail de thèse. Dans le bureau des « Gentleman », j’ai été le témoin de discussions épistémologiques les plus enrichissantes qui soient…

… Aux membres de mon jury de thèse, Profs. Fabienne d’Arripe-Longueville, Nathalie Gal-Petitfaux, Denis Hauw, Jacques Saury et Carole Sève

Je tiens à les remercier pour le temps qu’ils ont pris à expertiser ce manuscrit, et l’intérêt qu’ils ont pu y porter.

… John,

Merci pour ta disponibilité, ton intuition scientifique et tes remarques constructives qui ont contribué à nourrir ce travail. Merci aussi pour tes encouragements surtout sur la fin de thèse lorsque le sprint final a démarré.

… Aux membres du laboratoire CETAPS,

Je remercie tous les membres pour leur aide et leur soutien qu’ils ont pu m’apporter durant cette thèse, et notamment Jérémie (« pour sa carte de photocopie »), Ludovic, Pascal et Mickaël (pour leurs disponibilités et leurs précieux conseils).

… A mes parents, mes deux frangins et Sarah

Je les remercie pour avoir toujours cru en moi et leurs encouragements sans cesse renouvelés durant cette thèse aussi bien dans les moments les plus durs que dans les moments les plus paisibles. Spécialement, à Benjamin (le grand frère) avec qui je suis par exemple au téléphone - il est 23h40 - pour son soutien logistique en informatique réquisitionné plusieurs fois ; à Maxime (le petit frère) pour ses compétences linguistiques sollicitées à plusieurs reprises et aussi pour son prêt de PC portable (le mien n’ayant pas supporté deux ans de Master avec David et 4 ans de thèse avec la dyade détonante Régis/David).

… A Anne-Sophie, Cédric, Maxime, Frédéric, Mélanie, Sylvain, Thomas, Guillaume, Jean-Marc et Bertrand, des amis indissociablement liés à l’aboutissement de ce manuscrit

Merci pour leur soutien et leur amitié incommensurable (Oui Cédric c’est un gros mot !) et pour avoir toujours cru en moi et avoir été là dans tous les moments, des plus critiques aux plus sereins.

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Table des matières

Remerciements ......................................................................................................................... 2

Table des matières .................................................................................................................... 3

Introduction générale……………………………………………………………………….13

Partie 1. Revue de littérature ............................................................................................. 16

Chapitre 1. Les recherches relatives aux interactions entre les élèves en EPS ........... 18

1. Les interactions dans l’approche psychosociale ........................................................ 18

1. 1 Les interactions dans le courant Cooperative Learning .................................................. 18

1.1.1. Catégorisation des formes d’interaction ....................................................................... 18

1.1.2. Effets des interactions entre les élèves sur leurs apprentissages .................................. 19

1.1.2.1 Apports épistémiques ................................................................................................... 19

1.1.2.2 Apports transformatifs .................................................................................................. 21

1. 2 Les interactions dans le courant Peer-Assisted Learning ............................................... 22

1.2.1. Catégorisation des formes d’interaction entre les élèves ........................................... 22

1.2.2. Effets des interactions dyadiques sur les apprentissages .............................................. 23

1. 3 Intérêts et limites des résultats issus des courants Peer-Assisted Learning et Cooperative Learning. ......................................................................................................................... 26

1.3.1 Intérêts……. ................................................................................................................. 26

1.3.2 Limites….. .................................................................................................................... 27

2. Les interactions dans les approches situées ............................................................... 28

2.1 Les interactions spontanées entre les élèves ................................................................... 29

2.2 La co-détermination des interactions entre élèves en EPS avec : l’activité enseignante, l’activité des pairs et l’environnement ............................................................................ 30

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2.3 Intérêts et limites des résultats issus du courant Cours d’Action ................................... 32

2.3.1 Intérêts….. .................................................................................................................... 32

2.3.2 Limites….. .................................................................................................................... 32

3. Synthèse intermédiaire : investiguer la dynamique des interactions ......................... 33

Chapitre 2. Les recherches relatives aux dynamiques d’interactions .......................... 36

1. Dynamique des interactions entre élèves en EPS ...................................................... 36

1. 1 Configuration d’activité collective ................................................................................. 36

1. 2 Les coordinations interpersonnelles ................................................................................ 38

1. 3 Les histoires collectives .................................................................................................. 38

1.3.1 L’agencement temporel des histoires collectives d’élèves : une analyse en deux points…… .................................................................................................................... 39

1.3.2 Le développement des histoires collectives d’élèves : une analyse en trois points...... 40

1.3.3 Les modes d’articulations des histoires collectives : une analyse en quatre points ..... 40

1. 4 Intérêts et limites des travaux sur la dynamique des interactions ................................... 41

1.4.1 Intérêts….. .................................................................................................................... 41

1.4.2 Limites……. ................................................................................................................. 42

1. 5 Synthèse intermédiaire : investiguer la représentation graphique des dynamiques d’interaction .................................................................................................................... 42

2. Modélisations de la dynamique des formes d’interaction .......................................... 43

2.1 Une dynamique centrée sur l’activité individuelle de l’élève ......................................... 44

2.2 Une dynamique centrée sur l’activité collective de l’élève ............................................ 48

2.3 Vers l’utilisation des modèles mathématiques ................................................................ 51

2.4 Intérêts et limites des représentations graphiques ........................................................... 54

2.4.1 Intérêts….. .................................................................................................................... 54

2.4.2 Limites….. .................................................................................................................... 54

3. Synthèse ..................................................................................................................... 55

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Chapitre 3. Les interactions entre élèves en course d’orientation ................................ 57

1. L’activité ordinaire des élèves engagés en leçon de course d’orientation ................. 57

1. 1 Une activité instrumentée : carte - boussole - GPS (Global Positioning System) .......... 58

1. 2 Une activité individuelle ou collective ........................................................................... 58

1. 3 Une activité en partie non accessible à l’enseignant d’EPS ........................................... 59

1. 4 Une activité plus ou moins anxiogène ............................................................................ 60

1. 5 La situation d’interaction entre élèves en course d’orientation en classe de 6ème ........... 60

2. Revue de littérature sur l’activité en course d’orientation ......................................... 61

2.1 L’activité décisionnelle du coureur expert en course d’orientation ................................ 62

2.2 Les profils d’apprenants au lycée ................................................................................... 63

2.3 L’activité de navigation dans deux conditions de pratique particulières : « poseur/contrôleur » vs « classique » ............................................................................ 63

2.4 Les revues professionnelles ............................................................................................ 64

3. Intérêts et limites des études portant sur la course d’orientation ............................... 65

3.1 Intérêt………………………………………………………………………………..….65

3.2 Limites………………………………………………………………………………….66

Chapitre 4. Objet d’étude et questions de recherche ..................................................... 68

Partie 2. Cadre théorique et méthodologique du Cours d’Action .................................. 70

Chapitre 1. Options théoriques et méthodologiques ...................................................... 72

1. Les hypothèses structurantes du cadre théorique et méthodologique du Cours d’Action… ................................................................................................................. 72

1. 1 Une considération énactive de l’activité humaine individuelle ...................................... 73

1.1.1 L’hypothèse de l’autopoïèse ......................................................................................... 73

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1.1.2 L’hypothèse énactive de l’activité individuelle ............................................................ 74

1. 2 Une considération énactive de l’activité humaine collective .......................................... 76

1. 3 Synthèse intermédiaire .................................................................................................... 78

2. L’objet théorique pour l’analyse de l’activité collective ............................................ 78

3. L’engagement du chercheur : ses croyances, son travail pour la capacité de croissance et le pouvoir heuristique du cadre théorique et méthodologique du Cours d’Action……………………………………………………………………………80

3.1 Les croyances du chercheur ............................................................................................ 80

3.2 La capacité de croissance ................................................................................................ 81

4. Synthèse générale dans la construction de la démarche de recherche fondée sur le cadre théorique et méthodologique du Cours d’Action ............................................. 83

Chapitre 2. Méthode de recueil des données .................................................................. 85

1. Observatoire ............................................................................................................... 85

1. 1 Contractualisation chercheur-institution-enseignants-élèves ......................................... 85

1. 2 Posture du chercheur ....................................................................................................... 86

1. 3 Participants et situations étudiées ................................................................................... 87

1.3.1 Participants ................................................................................................................... 87

1.3.2 Les dispositifs d’apprentissage ..................................................................................... 88

1.3.2.1 Dispositif sans chambre ................................................................................................ 91

1.3.2.2 Dispositif chambre ........................................................................................................ 92

1.3.2.3 Dispositif 2 cartes ......................................................................................................... 93

1.3.2.4 Dispositif leurre ............................................................................................................ 95

2. Enregistrements des données ..................................................................................... 96

2.1 Enregistrements des données in situ ............................................................................... 96

2.2 Données de verbalisations .............................................................................................. 99

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2.3 Réflexions ..................................................................................................................... 102

3. Conclusion ............................................................................................................... 103

Partie 3. Analyse qualitative ............................................................................................. 105

Chapitre 1. Méthode de traitement des données .......................................................... 107

1. Reconstruction des cours d’action ........................................................................... 107

2. La reconstruction de l’articulation collective des cours d’action individuels des deux élèves de chaque dyade ............................................................................................ 111

2.1 Synchronisation temporelle des cours d’action individuels ......................................... 112

2.2 Analyse compréhensive de l’articulation collective des cours d’action individuels .... 114

2.3 L’articulation collective des cours d’action : lecture simultanée vs lecture différée ? . 115

Chapitre 2. Résultats ...................................................................................................... 119

1. Emergence des formes d’interaction ........................................................................ 119

1. 1 La forme co-construction .............................................................................................. 119

1.1.1. Première déclinaison : relation de convergence simultanée des UE et des E ............ 119

1.1.1.1.Dispositif sans chambre ............................................................................................. 119

1.1.1.2.Dispositif chambre ..................................................................................................... 121

1.1.1.3.Dispositif 2 cartes ....................................................................................................... 122

1.1.1.4.Dispositif leurre .......................................................................................................... 123

1.1.2. Deuxième déclinaison : relation de convergence différée des UE et des E ............... 124

1.1.2.1 Dispositif sans chambre .............................................................................................. 124

1.1.2.2 Dispositif chambre ...................................................................................................... 126

1.1.2.3 Dispositif 2 cartes ....................................................................................................... 127

1.1.2.4 Dispositif leurre .......................................................................................................... 129

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1. 2 La forme confrontation ................................................................................................. 130

1.2.1 Dispositif sans chambre .............................................................................................. 130

1.2.2 Dispositif chambre ...................................................................................................... 131

1.2.3 Dispositif 2 cartes ....................................................................................................... 132

1.2.4 Dispositif leurre .......................................................................................................... 134

1. 3 La forme de délégation ................................................................................................. 136

1.3.1 Première relation : convergence et divergence des UE et des E ................................ 136

1.3.1.1 Première déclinaison : convergence différée des UE et divergence différée des E ... 136

Dispositif sans chambre ......................................................................................................... 136 Dispositif chambre ................................................................................................................. 137 Dispositif 2 cartes ................................................................................................................... 138 Dispositif leurre ...................................................................................................................... 140 1.3.1.2 Deuxième déclinaison : divergence différée des UE et convergence différée des E . 141

Dispositif sans chambre ......................................................................................................... 141 Dispositif chambre ................................................................................................................. 142 Dispositif 2 cartes ................................................................................................................... 144 Dispositif leurre ...................................................................................................................... 145 1.3.2 Deuxième relation : digression des UE et des E ......................................................... 146

1.3.2.1 Dispositif sans chambre .............................................................................................. 146

1.3.2.2 Dispositif chambre ...................................................................................................... 148

1.3.2.3 Dispositif 2 cartes ....................................................................................................... 150

1.3.2.4 Dispositif leurre .......................................................................................................... 152

2. Trois modes d’utilisation dyadique de la carte en relation avec ses propriétés physiques et fonctionnelles ...................................................................................... 154

2.1 Le mode partagé ............................................................................................................ 154

2.2 Le mode univoque ........................................................................................................ 155

2.3 Le mode détaché ........................................................................................................... 156

Chapitre 3. Discussion intermédiaire ............................................................................ 158

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Partie 4. Analyse quantitative .......................................................................................... 161

Chapitre 1. Méthode de traitement des données .......................................................... 163

1. Labellisation et définition d’une fenêtre mobile ...................................................... 163

2. Indicateurs de la dynamique des formes d’interaction ............................................. 166

2.1 Ratio de changements ................................................................................................... 166

2.2 Répartitions des formes d’interaction ........................................................................... 166

2.3 Récurrence des successions des formes d’interaction .................................................. 167

Chapitre 2. Résultats ...................................................................................................... 170

1. Nombre d’occurrences des formes d’interaction ..................................................... 170

1. 1 Dispositif sans chambre ................................................................................................ 170

1. 2 Dispositif chambre ........................................................................................................ 171

1. 3 Dispositif 2 cartes ......................................................................................................... 172

1. 4 Dispositif leurre ............................................................................................................ 173

2. Dynamiques des formes d’interaction ...................................................................... 175

2.1 Dispositif sans chambre ................................................................................................ 175

2.1.1 Ratio de changements ................................................................................................. 175

2.1.2 Répartition des formes d’interaction .......................................................................... 177

2.1.3 Récurrence des successions des formes d’interaction ................................................ 179

2.2 Dispositif chambre ........................................................................................................ 183

2.2.1 Ratio de changements ................................................................................................. 183

2.2.2 La répartition des formes d’interaction ...................................................................... 185

2.2.3 Récurrence des successions des formes d’interaction ................................................ 187

2.3 Dispositifs 2 cartes ........................................................................................................ 191

2.3.1 Le ratio de changements ............................................................................................. 191

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2.3.2 Répartitions des formes d’interaction ......................................................................... 194

2.3.3 Récurrence des successions des formes d’interaction ................................................ 197

2.4 Dispositif leurre ............................................................................................................ 203

2.4.1 Ratio de changements ................................................................................................. 203

2.4.2 Répartition des formes d’interaction .......................................................................... 205

2.4.3 Récurrence des successions des formes d’interaction ................................................ 207

3. Dynamique des formes d’interaction indexée aux modes d’utilisation de la carte .. 211

3.1 Stabilité de la forme de co-construction ....................................................................... 211

3.2 Changement d’une interaction de co-construction à une interaction de confrontation 213

3.3 Changement d’une interaction de co-construction à une interaction de délégation ..... 214

3.4 Changement d’une interaction de confrontation à une interaction de co-construction 216

3.5 Stabilité de la forme confrontation ............................................................................... 218

3.6 Changement d’une interaction de confrontation à une interaction de délégation ......... 219

3.7 Changement d’une interaction de délégation à une interaction de co-construction ..... 220

3.8 Changement d’une interaction de délégation à une interaction de confrontation ......... 222

3.9 Stabilité de la forme délégation .................................................................................... 223

Chapitre 3. Discussion intermédiaire ............................................................................ 226

1. Les quantités de changements d’une interaction à une autre ................................... 226

2. Nature des changements ........................................................................................... 227

3. La dynamique des formes d’interaction ................................................................... 229

Partie 5. Discussion générale ............................................................................................ 232

Chapitre 1. Apports épistémiques ................................................................................. 234

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1. Le rôle des propriétés physiques et fonctionnelles de la carte en lien avec les modes d’utilisation .............................................................................................................. 234

2. La forme d’interaction de délégation ....................................................................... 239

Chapitre 2. Apports à la conception de dispositifs d’apprentissage pour l’enseignement de la course d’orientation ................................................ 243

1. Les effets de dispositifs d’apprentissage en course d’orientation ............................ 243

2. Domestiquer la carte de course d’orientation........................................................... 246

Chapitre 3. Contribution à la méthodologie du cadre théorique et méthodologique du Cours d’Action sur l’étude de la dynamique des interactions ............... 250

1. Les données d’expérience ........................................................................................ 250

1. 1 Exploiter la signature graphique des données d’expérience ......................................... 253

1. 2 Une démarche « ré-itérative » entre approche qualitative et approche quantitative ..... 254

1. 3 Limites de la démarche ................................................................................................. 255

2. Croisement méthodologique ou inspiration issue des approches dynamiques ........ 256

2.1 Complexité du système ................................................................................................. 256

2.2 Dynamique du système ................................................................................................. 257

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Conclusion générale ............................................................................................................. 261

Références ............................................................................................................................. 262

Table des illustrations .......................................................................................................... 274 Tableaux ................................................................................................................................. 274 Figures ................................................................................................................................... 280

Annexe ................................................................................................................................... 284

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Introduction générale

Cette thèse rend compte d’une étude sur l’activité d’élèves de 6ème engagés en dyades

dans des dispositifs d’apprentissage lors de leçons d’Education Physique et Sportive en

Course d’Orientation. Elle vise à caractériser les formes d’interaction entre les élèves au sein

des dyades et ambitionne de caractériser la dynamique de ces formes d’interaction. A ce titre,

elle envisage à partir du traitement des données d’expériences, de représenter graphiquement

la dynamique des interactions entre élèves. Pour ce faire, il est proposé d'une part, d'analyser

les données d'expériences recueillies auprès des élèves, et d'autre part, à partir de ces

dernières, de décrire à travers des représentations graphiques la dynamique de leurs

interactions.

Nous entendrons par « dynamique d’interactions », l’évolution temporelle des formes

d’interaction émergentes entre élèves, c’est-à-dire les façons dont cette évolution se construit

et se transforme dans le temps de la course. L’« activité » quant à elle est entendue comme

l’ensemble des moyens que dispose un acteur pour interagir avec un environnement « matériel

et humain » (Barbier & Durand, 2006). Enfin, un « dispositif d’apprentissage » caractérise

dans notre étude l’organisation spatiale, matérielle, temporelle et sociale choisie et conçue par

l’enseignant à des fins d’apprentissage (Saury, Adé, Gal-Petitfaux, Huet, Sève, & Trohel,

2013).

Cette thèse s’inscrit dans le cadre théorique et méthodologique du Cours d’Action

(Theureau, 2006) (Partie 2. Chapitre 1) dans la mesure où elle vise à renseigner la dynamique

des expériences des élèves, ici dans une activité collective (au sein de dyades). Toutefois, elle

dépasse la définition expérientielle pour représenter graphiquement la dynamique des

interactions par le biais d’outils méthodologiques originaux n’appartenant pas à l’observatoire

du cadre théorique et méthodologique de référence mais compatibles avec ses présupposés

théoriques. En ce sens, notre travail de thèse poursuit également une réflexion

épistémologique s’inscrivant dans les démarches récentes des approches mixtes (Davids &

Araújo, 2010) visant à appréhender la dynamique de phénomènes complexes. Cette réflexion

sera conduite lors de la discussion générale de cette thèse (Partie 5. Chapitre 3).

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Cette thèse s’organise en cinq parties.

La première partie, organisée en quatre chapitres, est une synthèse des travaux de

recherche ayant pour focale les interactions entre les élèves en EPS. Si le chapitre 1 se

focalise sur les interactions entre élèves en EPS, le chapitre 2 propose une revue de travaux

s’intéressant à la dynamique des interactions entre les élèves. Le chapitre 3 rassemble les

recherches inhérentes à l’activité sportive en course d’orientation. L’ensemble de ces

chapitres construit progressivement nos questions de recherche et aboutit à la définition de

l’objet d’étude de notre travail présenté en chapitre 4.

La deuxième partie présente autour de deux chapitres le cadre théorique et

méthodologique du Cours d’Action dans lequel nous nous sommes inscrits. Le chapitre 1

énonce les options méthodologiques de ce cadre. Le chapitre 2 décrit la méthode de recueil de

données utilisée dans le cadre théorique et méthodologique choisi.

La troisième partie présente en trois chapitres (i) la première étape du traitement des

données, (ii) les résultats obtenus et (iii) une discussion intermédiaire. Précisément, le chapitre

1 présente « l’étape qualitative » du traitement des données fondée sur une analyse classique

de l’articulation collective des cours d’action individuels des acteurs dans le cadre théorique

et méthodologique du Cours d’Action. Sur cette base, le chapitre 2 présente deux lignes de

résultats qui sont ensuite discutées dans le chapitre 3.

La quatrième partie, composée de deux chapitres, présente la deuxième étape du

traitement des données, les résultats obtenus et une discussion intermédiaire. Le chapitre 1

décrit la deuxième étape du traitement des données : « l’étape quantitative » issue de l’analyse

qualitative évoquée dans l’étape précédente (Partie 3). Cette étape quantitative s’appuie sur

l’utilisation d’outils hétérodoxes au cadre théorique et méthodologique du Cours d’Action.

Sur cette base, le chapitre 2 présente les résultats qui sont ensuite discutés dans le chapitre 3.

La cinquième partie structurée en trois chapitres, propose une discussion générale

autour de volets (i) épistémique, (ii) transformatif et (iii) réflexif, des résultats obtenus et des

différentes discussions intermédiaires. Le chapitre 1 discute des apports de connaissances sur

l’activité des élèves engagés en course d’orientation et notamment les liens entre la

dynamique des formes d’interaction des élèves, les modes d’utilisation dyadique de la carte et

ses propriétés physiques et fonctionnelles d’une part et la forme d’interaction de délégation

d’autre part. Le chapitre 2 porte sur la conception de dispositifs d’apprentissage dans l’activité

course d’orientation. Sont envisagées notamment des discussions autour de dispositifs

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d’apprentissage susceptibles d’encourager ou de dissuader la dynamique des formes

d’interaction. Enfin, une réflexion méthodologique et épistémologique, présentée dans le

chapitre 3, questionne l'usage d'outils graphiques pour représenter la dynamique des

interactions dans le cadre théorique et méthodologique du Cours d'Action.

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Partie 1. Revue de littérature

De nombreuses études récentes se sont attachées à comprendre les situations

d’enseignement en EPS (Education Physique et Sportive). Certaines l’ont fait à partir de

l’activité des enseignants (e.g., Ria & Durand, 2001 ; Ria, Sève, Theureau, Saury, Durand,

2003), d’autres à partir de l’activité collective enseignant-élèves (e.g., Veyrunes, 2011 ; Vors

& Gal-Petitfaux, 2011), d’autres encore à partir de l’activité des élèves (e.g., Ensergueix &

Lafont, 2009). Cette dernière focale est investiguée par de nombreuses approches dont nous

présentons une synthèse.

Cette revue de littérature se compose de quatre chapitres :

Le chapitre 1 présente une revue de littérature concernant les études relatives aux

interactions entre élèves en EPS

Le chapitre 2 présente une revue de littérature sur les travaux ayant pour focale l’étude de la

dynamique des interactions entre élèves

Le chapitre 3 présente une revue de littérature portant sur les recherches inhérentes à

l’activité sportive course d’orientation

Le chapitre 4 présente notre objet de recherche et les questions orientant notre travail de

recherche

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CHAPITRE 1

Les recherches relatives aux interactions entre

élèves en EPS

Ce chapitre vise à présenter une synthèse des travaux récents ayant pour focale d’étude

les interactions des élèves en EPS. Dans un premier temps, nous rendrons compte des travaux

issus d’une approche psychosociale d’une part, notamment ceux du courant Cooperative

Learning (CL) puis ceux du Peer-Assisted Learning (PAL) qui permettra de cibler davantage

sur les interactions dyadiques en EPS. Dans un second temps, nous mettrons en exergue les

recherches issues des approches situées, et particulièrement celles issues du courant du Cours

d’Action (CA), pour pointer le caractère « situé » et « collectif » des interactions en EPS.

Nous adopterons une démarche spécifique au cours de laquelle, après avoir présenté les

apports épistémiques et transformatifs de chaque courant, nous évoquerons de notre point de

vue leurs intérêts et leurs limites.

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Chapitre 1. Les recherches relatives aux interactions entre les élèves en EPS

Les interactions entre élèves en EPS ont fait l’objet de nombreuses recherches issues

de différentes approches scientifiques. Deux types d’approches ont particulièrement étudié

cette question : d’une part, celle relevant d’une approche psychosociale (e.g., Ward & Lee,

2005) et d’autre part, celle relevant d’une approche située (e.g., Saury, Adé, Gal-Petitfaux,

Huet, Sève, & Trohel, 2013).

1. Les interactions dans l’approche psychosociale

La plupart des travaux ancrés dans une approche psychosociale se sont intéressés aux

interactions entre les élèves en EPS selon des unités de fonctionnement (dyade ou groupe

restreint) et des degrés de structuration (définition ou non de rôles particuliers) (Ensergueix &

Lafont, 2009). Suivant ces deux éléments, il ressort deux courants : celui du Cooperative

Learning (CL) et celui du Peer-Assisted Learning (PAL).

1. 1 Les interactions dans le courant Cooperative Learning

Le courant CL ou Apprentissage Coopératif est un courant pédagogique dans lequel

les élèves sont réunis en groupes hétérogènes restreints et travaillent ensemble pour atteindre

un but commun (Dyson, 2002).

Ce courant pointe dans un premier temps des catégorisations de formes d’interaction

entre les élèves lorsqu’ils coopèrent (Lafont, 2012).

1.1.1. Catégorisation des formes d’interaction

Sur la base d’analyses conversationnelles entre les élèves (Trognon, 1999 ; Trognon &

Coulon, 2001), des recherches pointent l’existence de quatre catégories de formes

d’interaction en situation scolaire non spécifique à l’EPS (Gilly, Fraisse, & Roux, 1988) : 1)

la « co-élaboration acquiesçante » (l’un des élèves élabore une solution face à un problème

rencontré et la propose à ses camarades qui la contrôlent et donnent leur accord) ; 2) la « co-

construction » (les élèves élaborent au fur et à mesure une solution ensemble) ; 3) la

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« confrontation avec désaccord » (un des élèves n’accepte pas la solution proposée par un

partenaire et ne propose aucun argument) et 4) la « confrontation contradictoire » (l’élève qui

s’oppose à la proposition d’un partenaire réagit de manière argumentée à celle-ci). Sorsana

(1999) apporte un complément à cette classification en ajoutant les « comportements

parallèles » ou « comportements non collaboratifs » (les élèves juxtaposent leurs idées sans

prendre en compte celles de leur partenaire ni parvenir à une solution).

En EPS, Darnis et Lafont (2008) identifient des formes d’interaction entre les élèves

qui caractérisent une activité de co-élaboration en reprenant celles précédemment décrites

(une forme « de comportements parallèles », une forme « co-élaborative consentante », une

forme de « co-construction », une forme de « confrontation sans désaccords », une forme de

« confrontation contradictoire »). Ces formes d’interaction n’ont pas les mêmes effets sur les

apprentissages des élèves. Ce lien entre les effets des interactions et les apprentissages des

élèves a fait à ce titre l’objet de recherches particulières.

1.1.2. Effets des interactions entre les élèves sur leurs apprentissages

Des travaux issus du courant CL étudient les dimensions motrices, cognitives et

sociales des interactions entre les élèves sur la performance scolaire (Slavin, 1996).

1.1.2.1 Apports épistémiques

Ce courant se focalise sur les interactions coopératives1 entre les élèves en tant

qu’élément facilitant les apprentissages moteurs, cognitifs et sociaux (Dyson, Griffin, &

Hastie, 2004). Les études ont d’ailleurs montré le rôle bénéfique des interactions entre les

élèves dans les apprentissages sociaux en ce sens que l’expérience de communication des

pairs aide au développement des processus de maîtrise sociale tels que la participation et

1 La coopération est définie par Saury (2008) par trois caractéristiques : 1) l’interdépendance des activités individuelles (les acteurs qui coopèrent agissent d’une façon mutuellement dépendante), 2) le partage d’une situation de travail (les acteurs poursuivent un but commun), 3) la préoccupation inhérente à la coordination avec leur partenaire (les acteurs cherchent à articuler leurs activités ensemble pour atteindre le but commun).

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l’argumentation, mais aussi des processus cognitifs comme la vérification ou la critique des

actions par rapport au but commun instauré (Lehraus & Buchs, 2008). Elles ont aussi montré

le rôle bénéfique des interactions dans les apprentissages moteurs en termes d’acquisitions

d’habiletés motrices (Lafont, 2012) comme l’augmentation de l’efficacité dans une tâche de

tir au basket-ball. Précisément, Gilly et al. (1988) démontrent l’efficacité des formes

d’interaction entre les élèves dans la résolution de problèmes lors de tâches scolaires non

spécifiques à l’EPS : elles mettent en évidence la supériorité de la forme de co-élaboration

acquiesçante sur la résolution des problèmes individuels et le fait que les formes confrontation

avec désaccord et confrontation contradictoire sont plus bénéfiques sur le plan des

apprentissages individuels que les deux autres formes d’interaction.

Dans le prolongement de ces études, celles en EPS pointent les bénéfices des

interactions entre les élèves, et plus particulièrement des interactions verbales, dans le

développement d’une compréhension améliorée des situations, mais également des stratégies

de jeu (Dyson & Grineski, 2001). Elles se sont intéressées essentiellement 1) aux sports

collectifs qui incluent une dimension duale et/ou collective pouvant être à la base d’une

situation coopérative (les partenaires partagent un même but commun) (Lafont, Proeres, &

Vallet, 2007) et 2) aux activités artistiques qui incluent à la fois la dimension individuelle et la

dimension collective de la coopération (Lafont & Chaze-Capmartin, 2010). En effet, Lafont et

al. (2007) ont examiné les interactions entre pairs qui apparaissaient pendant les discussions

dans de petits groupes. A titre d’exemple, l’option choisie pour l’intervention de l’enseignant

d’EPS consistait à susciter des échanges verbaux entre les élèves dans l’activité basket-ball.

L’analyse quantitative permettait de comparer une condition expérimentale utilisant la

coopération dans un petit groupe (les élèves se consultaient entre la réalisation de deux tâches

motrices) avec une condition « contrôle » (un groupe d’élèves travaillant sans échanges

verbaux entre la réalisation de deux tâches motrices). Les résultats ont montré que les

conditions de coopération à travers des échanges verbaux avaient des effets positifs sur

l’efficacité des stratégies de jeu mises en place par les élèves en fin de séquence de travail

comparée au groupe de contrôle, et une amélioration de leurs statistiques aux shoots. Les

auteurs ont donc mis en évidence la supériorité des groupes bénéficiant d’interactions

verbales par rapport aux autres groupes sur les stratégies collectives pour atteindre la cible et

aussi les performances motrices individuelles identifiées par l’augmentation des scores.

D’autres études ont examiné les interactions entre pairs qui apparaissaient pendant une tâche

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morphocinétique (Lafont & Chaze-Capmartin, 2010). A titre d’illustration, l’option choisie

pour l’intervention de l’enseignant d’EPS consistait, comme dans la première étude, à susciter

des échanges verbaux entre les élèves dans l’activité acrosport. L’analyse quantitative

consistait à comparer six groupes de différents critères (affinité et genre) utilisant la

coopération dans le cadre de la réalisation d’un enchaînement de pyramides. Les résultats ont

montré d’une part que les échanges verbaux renforçaient les liens entre pairs quel que soit le

groupe (bénéfices sociaux). Ils ont montré d’autre part que les groupes qui utilisaient la forme

d’interaction « co-élaborative consentante » (l’un des élèves trouvait une solution, la proposait

à ses partenaires qui acceptaient après l’avoir examinée) étaient plus efficaces pour terminer

plus rapidement les éléments pyramidaux que les autres groupes. En revanche, les groupes qui

utilisaient la forme de co-construction (les élèves élaboraient au fur et mesure les solutions

ensemble) réalisaient des pyramides plus difficiles et plus créatives. Ces deux études ont donc

montré le rôle bénéfique en EPS des interactions notamment verbales chez les élèves

organisés en petits groupes dans les apprentissages moteurs, cognitifs et sociaux.

1.1.2.2 Apports transformatifs

En plus de l’apport d’éléments de connaissances relatifs aux interactions entre élèves

sur les dimensions motrices, cognitives et sociales de leurs apprentissages en EPS, le courant

CL met en avant des éléments qui contribuent à structurer ces interactions de manière efficace

lorsque les élèves agissent ensemble (Buchs, Filisetti, Butera, & Quiamzade, 2004).

Premièrement, le groupe doit être de taille restreinte variant de deux à cinq membres (plus le

nombre d’apprenants est important, plus les interactions sont riches, mais plus les processus

coopératifs sont complexes).

Deuxièmement, l’instauration d’une tâche commune cristallisée par un but commun adapté au

travail d’équipe, et qui ne permet pas une juxtaposition de fonctionnements individuels, met

en place une dépendance de chaque élève du groupe envers les autres partenaires.

Troisièmement, l’enseignant d’EPS attribue des responsabilités singulières à chaque élève du

groupe pour atteindre ce but commun : la responsabilité personnelle souligne l’importance des

contributions individuelles et rend nécessaire la participation des différents membres.

Quatrièmement, les élèves endossent un rôle de soutien systématique aux partenaires sous la

forme d’encouragements de manière à soutenir la dynamique de groupe favorisant un partage

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d’idées lors de discussions et/ou d’évaluations sur l’atteinte du but commun. L’enseignant

veille alors à instaurer des récompenses afin de stimuler cette aide réciproque (Johnson &

Johnson, 1989).

Cinquièmement, l’enseignant d’EPS développe auprès des élèves des savoirs relatifs à la

communication et à l’écoute des partenaires. Dès lors, une interdépendance positive dans le

groupe d’élèves est favorisée : elle permet une situation dans laquelle ils partagent un but

commun et où les interactions entre les élèves s’affectent mutuellement pour réussir. Dans

cette situation, les élèves travaillent ensemble en vue d’un but commun et perçoivent qu’ils ne

peuvent l’atteindre que si les autres membres du groupe l’atteignent également.

1. 2 Les interactions dans le courant Peer-Assisted Learning

Le courant PAL (Topping & Ehly, 1998) ou Apprentissage Assisté par les Pairs est un

modèle pédagogique qui se définit comme « l’ensemble des stratégies d’acquisition de

connaissances et/ou habiletés au travers de l’aide active d’un alter-ego » (Topping, 2005).

Autrement dit, les interactions dyadiques pointent la distribution de rôles particuliers entre les

élèves : un élève-tuteur (qui a la responsabilité d’aider le partenaire à progresser) et un élève-

tutoré (qui reçoit les conseils de l’élève-tuteur). Lorsqu’il y a un écart de compétences entre

les deux élèves, la dyade est qualifiée de « dissymétrique ». Lorsque les deux élèves de la

dyade ont le même niveau de compétence (ou un niveau de compétence relativement proche),

la dyade est qualifiée de « symétrique ». Le courant PAL étudie notamment deux types de

situations : les situations d’interactions libres (aucun rôle d’élève-tuteur et/ou d’élève-tutoré

n’est prédéfini) et les situations d’interactions fixes (les rôles d’élève-tuteur et/ou d’élève-

tutoré sont prédéfinis à l’avance par l’expérimentateur).

1.2.1. Catégorisation des formes d’interaction entre les élèves

Si les travaux précédents issus du CL pointent quatre formes d’interaction entre les

élèves, ceux issus du courant PAL viennent compléter la classification existante : dans le

cadre de l’EPS, des études reprennent ces formes d’interaction et les enrichissent d’une

« forme de tutelle » (d’Arripe-Longueville, Gernigon, & Huet, 2000 ; d'Arripe-Longueville,

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Gernigon, Huet, Winnykamen, & Cadopi, 2002) quand l’un des deux élèves donne une

solution partielle en aidant ou en conseillant son partenaire lui permettant de progresser.

Précisément, ont été mises en avant une première forme de tutelle regroupant les

formes de co-élaboration acquiesçante, de co-construction et une deuxième forme de tutelle

de confrontation interindividuelle (regroupant les formes de confrontation contradictoire et

confrontation avec désaccord). En définitive, en EPS, Darnis et Lafont (2008) définissent six

catégories de formes d’interaction dyadiques entre les élèves caractérisant une co-

élaboration : 1) une forme de comportements parallèles quand il n’y a aucun comportement

co-élaboratif (il n’y a aucune communication mais seulement une juxtaposition de discours

individuels des deux élèves) ; 2) une forme co-élaborative consentante (un des deux individus

trouve seul une solution, et son partenaire la contrôle puis l’accepte) ; 3) une forme de co-

construction où chaque partenaire procure une partie de la solution (les solutions s’altèrent et

amènent graduellement à une construction ou à une adoption commune d’une solution) ; 4)

une forme de confrontation sans désaccords (les désaccords sont non discutés) ; 5) une forme

de confrontation contradictoire définies comme la présence de désaccords argumentés (les

réponses sont opposées entraînant un conflit sociocognitif) et 6) une forme de tutelle (l’un des

partenaires donne un solution partielle en aidant ou en conseillant l’autre partenaire lui

permettant de progresser).

1.2.2. Effets des interactions dyadiques sur les apprentissages

Des études récentes portent en EPS sur les bénéfices moteurs, cognitifs et sociaux des

interactions dyadiques chez les élèves et discutent de cette efficacité au regard du niveau des

élèves (e.g., d’Arripe-Longueville et al., 2000), du genre des élèves (e.g., d'Arripe-

Longueville et al., 2002 ; Darnis-Paraboshi, Lafont, & Menaut, 2005), ou des modalités

d’organisation du tutorat entre pairs (e.g., Darnis-Paraboshi, Lafont, & Menaut, 2006 ; Darnis,

Lafont, & Menaut, 2007 ; Ensergueix & Lafont, 2007).

1.2.2.1. Apports épistémiques

En EPS, le champ d’étude inscrit dans cette mouvance de recherche porte sur

l’acquisition des habiletés motrices complexes dans une démarche socio-constructiviste

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(Darnis-Paraboshi et al., 2005). Celui-ci étudie les rôles que peuvent avoir les interactions

langagières dans la co-construction des règles d’action en EPS à partir du cadre des analyses

conversationnelles (Trognon, 1999) - ces interactions langagières favorisant une prise de

conscience chez les élèves et aboutissant à une émergence des règles efficaces (Darnis et al.,

2007). Les travaux actuels se situent dans le prolongement de ceux initiés par d’Arripe-

Longueville, Fleurance et Winnykamen (1995) qui ont comparé, dans le cadre d’interactions

libres, les bénéfices moteurs obtenus par les élèves lors de l’apprentissage du salto-avant en

gymnastique sportive dans des conditions contrastées de travail en dyades dissymétriques non

mixtes, en dyades symétriques non mixtes et en solitaire : les interactions entre les élèves

organisés en dyades dissymétriques et symétriques obtiennent de meilleurs résultats que ceux

en travail solitaire. Si l’efficacité de ces interactions est supérieure à un travail individuel dans

les bénéfices moteurs, elle est également discutée au regard du niveau des élèves constituant

les dyades.

A ce propos, des travaux ont poursuivi ces recherches et ont examiné de manière contrastée le

rôle des interactions verbales dans des dyades symétriques et dans des dyades dissymétriques

(Darnis-Paraboshi et al., 2006). L’analyse s’est penchée sur les interactions verbales au sujet

de la co-construction de règles d’action portant sur des choix tactiques en handball. Les

résultats ont montré des bénéfices cognitifs et moteurs plus importants pour les élèves en

situation de dyades dissymétriques que pour les élèves en dyades symétriques : les élèves

initialement moins compétents interagissant avec un partenaire de meilleur niveau initial

obtenaient des performances significativement plus élevées et progressaient davantage que

leurs pairs interagissant en dyades symétriques dans la pertinence du choix et l’efficacité de

l’action en attaque. D’Arripe-Longueville et al. (2002) ont montré aussi le rôle des

interactions non verbales (e.g., la démonstration du tuteur) dans des conditions de travail

contrastées : les bénéfices moteurs et cognitifs étaient plus importants pour les élèves en

situation de dyades dissymétriques que pour les élèves en situation de dyades symétriques. De

plus, l’écart de compétences favorisait de manière privilégiée certaines formes d’interaction

entre les élèves : si la symétrie du niveau des élèves dans la dyade tendait davantage à des

formes de coopération et de comportements parallèles, la dissymétrie dyadique faisait tendre

les élèves à davantage de forme de tutelle (Arripe-Longueville et al., 2000, 2002). Si ces

études discutent de la différence d’efficacité des interactions dyadiques selon qu’elles sont

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dissymétriques ou symétriques sur les dimensions motrices, cognitives et sociales des élèves,

l’efficacité de ces effets a aussi été discutée selon le genre des élèves.

Darnis-Paraboshi et al. (2005) ont à ce titre mis en évidence le rôle des interactions verbales

en dyades paritaires dans l’apprentissage d’une performance tactique en handball.

Effectivement, les dyades composées de garçons obtenaient de meilleures performances que

celles constituées par les filles au niveau de l’efficacité de l’action dans l’atteinte de la cible.

Les auteurs ont montré aussi que les dyades ayant interagi entre les séquences de jeu étaient

plus efficaces dans leurs choix tactiques pour atteindre la cible que les élèves n’ayant pas

interagi verbalement. Ces résultats confirment les deux tendances montrées par les travaux de

d’Arripe-Longueville et al. (1995, 2002) selon lesquelles 1) les bénéfices qu’ils soient

moteurs, cognitifs ou sociaux sont d’autant plus grands que les dyades d’élèves ont la

possibilité d’échanger, de discuter sur une tâche entre chaque séquence de jeu et 2) les dyades

composées de garçons obtiennent de meilleures performances motrices que les filles dans les

mêmes conditions. De plus, le genre des élèves, tout comme l’écart de compétence, était

enclin à favoriser davantage certaines formes d’interaction entre les élèves : les dyades

constituées de filles rendaient compte davantage de formes de coopération et de tutelle que les

dyades constituées de garçons (Arripe-Longueville et al., 2000, 2002).

L’efficacité des interactions dyadiques a aussi été discutée suivant les modalités

d’organisation du tutorat entre pairs. Legrain, d’Arripe-Longueville et Gernigon (2003) ont

mis en évidence des bénéfices moteurs, cognitifs et sociaux supérieurs dans l’apprentissage

chez les élèves-tuteurs comme chez les élèves-tutorés. De plus, la formation préalable d’un

élève-tuteur à son rôle dans le tutorat favorisait une attitude coopérative supérieure

(encouragements, augmentation des feedbacks) et une implication plus grande chez celui-ci

que les élèves-tuteurs dans la formation des élèves-tutorés. D’autres séries d’études ont pointé

que les interactions suivant un fonctionnement tutoriel n’étaient pas forcément préétablies par

le niveau de compétence (d’Arripe-Longueville et al., 2000) : les élèves organisés en

interactions libres de niveau intermédiaire (en comparaison à un niveau débutant) ont montré

que le rôle de tuteur dans les dyades n’est pas rempli que par les élèves les plus compétents.

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1.2.2.2. Apports transformatifs

En plus de l’apport d’éléments de connaissances relatifs aux interactions dyadiques

entre élèves sur les dimensions motrices, cognitives et sociales des apprentissages en EPS, les

études issues du courant PAL montrent que la formation d’élève-tuteur favorisent des

bénéfices moteurs, cognitifs et sociaux supérieurs chez l’élève-tutoré si l’élève-tuteur est

formé à ce rôle (Cicéro & Lafont, 2007) et que ces bénéfices sont visibles aussi bien chez

l’élève-tuteur lui-même que chez l’élève-tutoré (Ensergueix & Lafont, 2007). Dès lors, ces

études visant l’identification des conditions favorables à la mise en œuvre du tutorat entre

pairs s’attachent à proposer un cadre pour former les élèves-tuteurs. Ce protocole s’articule

notamment autour de quatre points (Ensergueix & Lafont, 2009) :

Premièrement, l’élève-tuteur doit avoir connaissance de la tâche que l’élève-tutoré réalise.

Deuxièmement, l’élève-tuteur doit prendre en compte les difficultés que rencontrera l’élève-

tutoré dans la tâche.

Troisièmement, l’élève-tuteur doit être formé aux interactions de guidage (e.g., imitation,

explications).

Quatrièmement, l’élève-tuteur doit vivre en simulation une situation de tutorat. Cette

procédure a été étudiée et développée notamment dans l’activité tennis de table.

La conception de dispositif d’apprentissage peut donc s’organiser autour de cette formation

d’élève-tuteur pour que les interactions dyadiques entre les élèves en EPS soient les plus

efficaces possibles pour les deux élèves.

1. 3 Intérêts et limites des résultats issus des courants PAL et CL

1.3.1 Intérêts

Les travaux issus des courants PAL et CL font preuve de notre point de vue de cinq

intérêts majeurs sur l’étude des interactions dyadiques entre élèves en EPS.

- 1) Ils proposent une catégorisation des formes d’interaction entre les élèves lorsqu’ils

coopèrent. Cela permet d’avoir une vision claire sur la nature des interactions et des

interactions dyadiques déjà mises en avant dans la littérature scientifique entre les élèves en

EPS.

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- 2) Ils pointent les bénéfices moteurs, cognitifs et sociaux des interactions libres (sans rôle

prédéfini à l’avance) et des interactions fixes (rôle de tuteur vs rôle de tutoré) dans des tâches

prescrites par l’enseignant d’EPS. Autrement dit, si de nombreuses recherches ont étudié le

travail individuel de l’élève dans les apprentissages en EPS, celles du courant PAL et celles

du courant CL montrent l’intérêt de se pencher sur le travail collectif dans ces mêmes

apprentissages influençant une dimension « collective et participative » des interactions entre

élèves.

- 3) En se focalisant sur l’interdépendance des relations entre les élèves, ces travaux

envisagent la notion de complexité des interactions entre les élèves par la présence

d’interrelations mutuelles (ce n’est pas tant le nombre d’individus qui confèrent le caractère

complexe d’un système - pourvu que l’on considère la classe comme un système - mais la

présence ou non des relations mutuelles entre les acteurs) (Morin,1990).

- 4) Ils pointent le rôle des interactions verbales et non verbales dans les progrès moteurs,

cognitifs et sociaux des élèves. En d’autres termes, la discussion et les gestes peuvent être

étudiés conjointement et au même niveau d’analyse lorsque le chercheur s’intéresse aux

interactions entre les élèves en EPS.

- 5) Ils mettent en avant également des éléments qui structurent des interactions efficaces

entre les élèves en EPS. Cela permet d’avoir une visée transformative pour les dispositifs

d’apprentissage dans les leçons.

1.3.2 Limites

Les recherches issues des courants CL et PAL présentent de notre point de vue trois

limites.

- 1) Comme les travaux issus du courant CL, ceux du courant PAL sont conduits dans des

tâches prescrites et contrôlées par l’enseignant d’EPS. Il est probable que la présence de

l’enseignant d’EPS contribue à des comportements-types d’élèves et laisse peu de place à des

interactions spontanées qu’il serait possible de voir en situation ordinaire lors de leçons

d’EPS.

- 2) Ces travaux n’ont pas investi certaines APSA (Activité Physiques, Sportives et

Artistiques) notamment celles de pleine nature. Or, nous pouvons supposer que certaines

spécificités comme le milieu incertain dans lequel se déroulent les interactions entre élèves ou

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encore le caractère caché à l’enseignant d’EPS de ces interactions en course d’orientation par

exemple sont sources d’interactions particulières et d’évolutions singulières.

- 3) A l’instar des travaux issus du courant CL, la plupart de ceux du courant PAL a été mené

dans un dispositif expérimental c’est-à-dire que les chercheurs s’attachaient à mesurer l’effet

d’une variable en le comparant avec des groupes-témoins. Malgré quelques rares études

réalisées dans un dispositif écologique (la moitié d’une classe sous protocole expérimental,

l’autre moitié en situation naturelle) (Ensergueix & Lafont, 2009), les recherches dans ces

courants reconnaissent cette limite en terme de validité écologique.

2. Les interactions dans les approches situées

Les études conduites dans le paradigme de l’écologie de la classe (Doyle, 1977) ont

été les premières à pointer la dimension collective de l’enseignement scolaire : le paradigme

analyse la classe comme un système d’interactions entre ses différents acteurs (Doyle, 1986).

Siedentop y voit notamment un « système social d’interactions » dans lequel se déploient les

activités des élèves (Siedentop, 1994). Ce système est indissociable de l’écologie de la classe

formée par deux autres systèmes : le « système organisationnel » (l’environnement matériel)

et le « système d’instruction » (tâches d’organisation et d’apprentissages prescrites par

l’enseignant) (Siedentop, 1994). Cette définition des situations de classe, de la vie de la

classe, n’est pas sans conséquence sur la manière d’appréhender les interactions entre élèves

en EPS en posant les limites à une tradition « individualiste » et « décontextualisée » de

l’activité de la classe, ancrée dans le paradigme cognitiviste (Newell & Simon, 1972) pour

développer une conception « collective » et « située » des interactions : l’étude des

interactions entre les élèves en EPS ne peut donc pas se réduire seulement à l’analyse d’une

juxtaposition des actions individuelles de chaque élève dans un groupe ou dans des dyades.

Des travaux pointent d’ailleurs l’interdépendance entre l’activité des élèves et les tâches

d’organisation prescrites par l’enseignant d’une part, et entre l’activité des élèves et les tâches

d’apprentissage prescrites par l’enseignant d’autre part (Carlson & Hastie, 1997) pendant les

leçons d’EPS (Hastie & Siedentop, 2006). Cette perspective écologique et complexe (pour

rappel, ce qui fonde la complexité ce n’est pas tant le nombre d’éléments mais davantage la

présence ou non de relations mutuelles entre ces éléments) nous semble primordiale à rendre

compte si l’on souhaite étudier les interactions dyadiques entre les élèves en EPS. Dans cette

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veine des approches situées, des études issues du courant du Cours d’Action (CA) poursuivent

l’identification de différentes catégorisations de formes d’interaction telles qu’elles sont

vécues par les élèves lorsqu’ils interagissent (Saury et al., 2013).

2.1 Les interactions spontanées entre les élèves

Des recherches ont pointé une classification des formes d’interaction sur la base de la

construction de connaissances mutuelles entre les élèves au cours de tâches d’apprentissage

(De Keukelaere, Guérin, & Saury, 2008). Trois formes d’interaction entre les élèves ont à ce

propos été repérées : 1) l’évolution d’un non-partage à un partage partiel de connaissances

entre les élèves (les interactions ne s’accompagnaient pas seulement des connaissances

relatives aux problèmes posés mais également des connaissances relatives à leurs

compétences respectives devant des ressources pour réaliser la tâche) ; 2) une forme de co-

construction de connaissances conflictuelles (les interactions faisaient émerger de la co-

construction de connaissances par deux élèves à propos d’un troisième élève ne partageant pas

initialement celles-ci) et 3) une forme de tutelle spontanée (les interactions étaient de l’ordre

du conseil en direction d’un ou plusieurs élèves pour qu’ils puissent réaliser la tâche).

Cette dernière forme d’interaction peut s’actualiser de manière discrète en dehors du

regard de l’enseignant d’EPS ou bien faire l’objet d’opportunités de la part de celui-ci qui s’en

saisit pour distribuer différents rôles sociaux aux élèves par exemple. L’étude de ces

interactions spontanées s’est basée sur l’analyse des préoccupations d’élèves dirigés vers un

apprentissage coopératif. A ce titre, des travaux mettent en avant quatre catégories de formes

d’interaction spontanées de coopération et de tutelle entre les élèves en EPS (Huet & Saury,

2011). La première forme d’interaction correspond à un tutorat spontané. Elle a été remarquée

lorsqu’un guidage dans l’apprentissage par un élève débutait soit à l’initiative d’un tuteur

spontané soit à la suite d’une sollicitation adressée à un élève jugé comme plus compétent. La

deuxième forme correspond à des préoccupations qui convergent vers la résolution à deux du

problème (forme proche de la forme co-construction évoquée dans les approches

pyschosociales). La troisième forme correspond à une co-construction dans les interprétations

des élèves à propos de leurs solutions respectives apportées (les élèves évaluent leurs essais et

prenaient en compte les remarques du camarade et leurs propres jugements). La quatrième

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forme d’interaction correspond à des conflits d’interprétations explicites (les deux élèves

essayaient de convaincre l’autre du bien fondé de la solution apportée).

En définitive, Saury et al. (2013) synthétisent en cinq formes les interactions entre les élèves

dirigées vers des préoccupations d’apprentissage : 1) une forme caractérisée par « des offres

et demandes d’aide non suivies des effets attendus » (cette forme traduit des modalités au

cours desquelles un des élèves propose une solution mais n’est pas perçue comme telle par

son ou ses partenaires) ; 2) une forme caractérisée par « un partage d’interprétations et/ou co-

élaboration de solutions » (cette forme traduit des modalités au cours desquelles les élèves

partagent des interprétations relatives à un problème) ; 3) une forme de « tutelle spontanée »

(cette forme traduit des modalités au cours desquelles un des élèves procure une aide à son ou

ses partenaires qui s’en saisissent) ; 4) une forme de « confrontation contradictoire

d’expériences » (cette forme traduit des modalités au cours desquelles les élèves s’opposent

aux solutions proposées par leurs pairs) et 5) une forme de « délégation » (cette forme traduit

des modalités au cours desquelles un des élèves prenaient la main et son ou ses partenaires le

suivait sans contrôler la proposition faite).

2.2 La co-détermination des interactions entre élèves en EPS avec : l’activité

enseignante, l’activité des pairs et l’environnement

Les nombreux travaux ancrés dans le courant du CA se sont intéressés aux interactions

entre les élèves en EPS comme émergentes de leurs liens avec l’activité enseignante, avec

l’activité d’autres pairs et avec l’environnement (Saury et al., 2013).

Premièrement, les interactions entre les élèves ne peuvent pas être considérées comme des

unités isolées de l’activité enseignante. A ce titre, des études se sont attachées à identifier des

situations-types pour lesquelles l’activité de l’enseignant d’EPS influençait les formes

d’interaction dyadiques entre les élèves (Evin, Sève, & Saury, 2013b) : l’enseignant d’EPS

avait un effet positif sur les interactions entre les élèves lorsque son activité favorisait des

formes d’interaction dyadiques coopératives et facilitantes de l’activité individuelle et/ou

collective (e.g., en escalade, les interventions de l’enseignant développaient cette forme

d’interaction entre les élèves lorsqu’elles contribuaient à l’augmentation de la confiance dans

l’activité du pareur tenu par le partenaire) ; en revanche, l’enseignant d’EPS avait un effet

négatif sur les interactions entre les élèves lorsque son activité favorisait des formes

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d’interaction dyadiques non coopératives (e.g., en escalade, les interventions de l’enseignant

développaient cette forme d’interaction entre les élèves lorsqu’elles contribuaient à

l’invalidation d’une proposition faite par un des deux élèves dans la dyade). Ces travaux

montrent bien que les formes d’interaction entre les élèves en EPS et notamment les formes

dyadiques sont co-déterminées avec l’activité de l’enseignant d’EPS.

Deuxièmement, les interactions entre les élèves ne peuvent pas être considérées comme des

unités isolées de l’activité des autres élèves. A ce propos, des études ont montré la présence

de formes d’activité au cours desquelles les élèves cherchaient à perturber des élèves d’un

autre groupe : dans l’activité tennis de table, les élèves voulaient faire passer le temps jusqu’à

la fin de la situation en cours en chahutant avec les élèves d’un autre groupe situé à une table

voisine (Guerin, 2008). Ces travaux montrent que les formes d’interaction entre les élèves en

EPS et notamment les formes dyadiques sont co-déterminées également avec l’activité des

pairs.

Troisièmement, les interactions entre les élèves en EPS ne pouvent pas être considérées

comme des unités isolées de l’environnement matériel : elles se sont attachées à mettre en

avant la place et le rôle de la matérialité dans ces interactions. D’une part, elles ont montré

l’inscription contextuelle de l’activité des élèves en caractérisant l’évolution de leurs

préoccupations et des formes d’action selon l’aménagement matériel de la leçon (Adé,

Jourand, & Sève, 2010 ; Adé, Picard, & Saury, 2013). A titre d’exemple, l’organisation des

ateliers dans l’activité musculation et des postures associées pour le travail demandé

modifiaient les interactions entre les élèves : l’atelier développé-couché et sa position

allongée limitaient les interactions avec les élèves d’autres ateliers alors que celui du

développé-assis et sa position assise favorisaient chez l’élève pratiquant une observation de

l’activité dans l’atelier voisin, et aboutissaient parfois à une forme d’interaction d’entraide.

D’autre part, ces études ont pointé les liens des formes d’interaction entre les élèves avec leur

utilisation de certains objets matériels. Dans ces cas, il ressortait que ces derniers constituaient

des médiateurs des interactions entre les élèves comme à l’occasion de l’utilisation de fiches

d’observation (Saury, Huet, Rossard, & Sève, 2010). Ces fiches orientaient des formes

typiques d’interaction dans l’activité badminton entre les élèves : une forme d’entraide était

visible à plusieurs reprises dans la situation d’observation au cours de laquelle le joueur aidait

l’observateur à remplir correctement les fiches en adéquation avec les attentes supposées de

l’enseignant, rendant compte d’arrangements évaluatifs. Les formes d’interaction entre élèves

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apparaissent aussi comme co-déterminées avec l’environnement matériel dans lequel

s’inscrivent les élèves.

2.3 Intérêts et limites des résultats issus du courant CA

2.3.1 Intérêts

Les travaux du courant CA offrent de notre point de vue quatre intérêts majeurs sur

l’étude des interactions entre élèves en EPS.

- 1) Ils proposent une catégorisation des formes d’interaction qui rejoint certaines identifiées

dans le cadre des courants CL et PAL d’une approche psychosociale et enrichissent la vision

des interactions entre élèves en EPS.

- 2) Ils proposent d’étudier à partir d’expériences vécues les interactions entre les élèves en

EPS c’est-à-dire les interactions telles qu’ils la vivent du « dedans ».

- 3) En s’attachant à être au plus près de l’activité des élèves, ils prennent en compte le

caractère situé de l’activité. En se focalisant sur des situations naturelles de classe, ces travaux

prolongent une notion de complexité dans l’étude des interactions et des interactions

dyadiques entre les élèves en EPS par la prise en compte au même niveau d’analyse de ces

relations avec l’environnement dont les objets matériels font partis, l’activité d’autres pairs et

l’activité des enseignants d’EPS.

- 4) Ils montrent la présence d’interactions spontanées entre les élèves. En d’autres termes, ces

travaux pointent une notion d’émergence dans les formes d’interaction entre les élèves en

EPS, c’est-à-dire que celles-ci ne sont pas le fait d’une organisation du type cause/effet mais

d’une organisation de co-définition avec d’autres éléments de la situation en cours.

2.3.2 Limites

Les travaux issus du courant CA présente entre autre de notre point de vue une limite :

- 1) « L’étude des interactions entre élèves en est encore à ses balbutiements dans le

cadre du programme de recherche du CA […]. Plusieurs pistes d’investigation constituent des

défis pour les études futures » (Saury et al., 2013, p.132) : si les études montrent la

dimension située et contextualisée des interactions entre les élèves en EPS et pointent le

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caractère complexe et émergent de ces interactions, la caractérisation de leur dynamique à

partir d’éléments quantifiant ses phénomènes est un point qui reste dans l’ombre et qui fait

l’objet de rares investigations en EPS. Dès lors, une des pistes consisterait « à étudier la

dynamique de transformation des formes d’interaction […] entre les élèves » (Saury et al.,

2013, p. 132).

3. Synthèse intermédiaire : investiguer la dynamique des interactions

Les travaux issus d’une approche psychosociale ont pointé l’intérêt des interactions

entre élèves en EPS lorsqu’ils sont organisés en petits groupes (de deux à cinq élèves) et en

dyades concernant les dimensions motrices, cognitives et sociales de leurs apprentissages. Ils

catégorisent aussi les formes d’interaction entre les élèves en EPS. A ce propos, Lafont (2012)

qui synthétise l’ensemble de ces travaux, dégage six formes d’interaction entre les élèves pour

caractériser des natures différentes de co-élaboration : 1) une forme de comportements

parallèles ; 2) une forme co-élaboratif consentant ; 3) une forme co-construction ; 4) une

forme de confrontation sans désaccords ; 5) une forme de confrontation contradictoire et 6) un

mode tutoriel. L’apport des éléments de connaissances relatives à l’efficacité de telle ou telle

forme d’interaction par rapport à une autre permet des apports transformatifs sur les situations

d’enseignement d’EPS. Aussi, les travaux issus d’une approche située ont montré l’intérêt de

l’étude des interactions entre élèves en EPS à partir des liens avec l’activité enseignante,

l’activité des pairs et l’environnement matériel qui participent à l’émergence des formes

d’interaction entre les élèves.

Si l’ensemble des travaux évoque la complexité des interactions en pointant 1) la

présence de relations mutuelles entre élèves à l’intérieur même du système constitué par la

dyade d’élèves et contribuant à déterminer des formes d’interaction d’une part et 2) la

présence également de relations mutuelles entre le système et l’activité de l’enseignant d’EPS,

l’activité des pairs et de l’environnement matériel d’autre part et contribuant à déterminer

d’autres formes d’interaction, peu d’études, en revanche, ont instigué la dynamique des

formes d’interaction entre les élèves en EPS.

Au regard de cette partie de littérature, il semble dès lors intéressant alors d’aller

étudier la dynamique des formes d’interaction entre les élèves en EPS pour comprendre ce qui

se joue dans cette dynamique, pour comprendre quels sont les éléments qui influencent

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l’émergence des formes d’interaction. On entendra par dynamique, « l’évolution d’un état,

c’est-à-dire les interactions entre élèves dans notre étude, au cours du temps ». Ce premier

niveau de définition permet donc d’envisager la possibilité d’étudier l’évolution des formes

d’interaction entre les élèves en EPS au cours du temps.

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CHAPITRE 2

Les recherches relatives aux dynamiques

d’interactions

Ce chapitre précise une synthèse des études récentes s’intéressant à la dynamique des

formes d’interaction entre plusieurs acteurs. Dans un premier temps, nous rendrons compte

des travaux ayant abordé la notion de dynamique dans l’activité d’acteurs dans le domaine

sportif et en EPS. Ensuite, nous ambitionnerons, à partir de recherches récentes, un état des

lieux sur les façons de représenter graphiquement la dynamique de l’activité telle qu’elle est

vécue par les acteurs dans le cadre du courant CA. A l’instar du chapitre précédent, nous

adopterons la même démarche au cours de laquelle, après avoir présenté les apports de chaque

étude, nous évoquerons de notre point de vue leurs intérêts et leurs limites.

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Chapitre 2. Les recherches relatives aux dynamiques d’interactions

Si de nombreuses études se sont intéressées à l’identification de formes d’interaction

entre les élèves en EPS et aux effets de ces formes sur les dimensions motrices, cognitives et

sociales des élèves, d’autres se sont penchées sur leur dynamique en précisant les mises en

tension existantes entre plusieurs acteurs et leurs évolutions au cours du temps, notamment

entre l’enseignant et les élèves, entre les partenaires d’une même équipe sportive et entre des

élèves d’une même classe.

1. Dynamique des interactions entre élèves en EPS

Les études conduites dans le paradigme de l’écologie de la classe envisagent la classe

comme un système dans lequel l’activité collective se fait à partir des relations

d’interdépendances entre les différents acteurs la constituant (Doyle, 1977). Ces études

envisagent également la dynamique des relations en pointant le caractère évolutif et

transformatif dans le temps de l’état d’un acteur, de son activité.

1. 1 Configuration d’activité collective

Le courant du CA s’intéresse à la dynamique des interactions entre les élèves et

l’enseignant à partir des formes d’activités collectives que ces interactions génèrent. Inspiré

de la notion de configuration sociale (Elias, 1970), la notion « de configuration d’activité

collective » articule activités individuelles en tant qu’unités (inscrites dans la classe) et leurs

activités qui se coordonnent (connexions entre ces unités inscrites dans la classe) aboutissant à

ladite « configuration d’activité collective ». A ce propos, Veyrunes (2011, p.39) la

définit : « nous concevons ces configurations comme des formes auto-organisées, délimitées

dans le temps et l’espace, qui offrent un potentiel pour la coordination des conduites des

individus qui la composent, tandis qu’en retour, ces dynamiques individuelles et leurs

coordinations contribuent en permanence à l’individuation de la configuration ».

Des travaux se sont intéressés à la description et à l’explication des relations

d’interdépendance des différents individus et des processus émergents aboutissant à la

construction, déconstruction et reconstruction de ce système d’interdépendances. Ils ont

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identifié précisément des structures stables qui émergeaient, sans que les individus en

prennent forcément conscience en ce sens qu’il n’y avait pas de responsable organisateur de

cet état collectif de la configuration d’activité collective observée. A titre d’exemple, l’étude

de la configuration collective en classe fait émerger un passage dans les rangs de l’enseignant

traduisant des structures caractérisées par des déplacements et des arrêts typiques de celui-ci

dans la classe et des interactions verbales enseignants-élèves : en fonction de ses

déplacements et arrêts, l’enseignant a concentré sur lui « un centre de gravité » autour duquel

émergeaient des interactions verbales privilégiées entre certains élèves et lui. La présence de

l’enseignant dans ce noyau autoalimentait la dynamique de l’activité collective de la classe :

d’une part, elle permettait à ces élèves de le solliciter davantage, d’autre part, elle amenait

l’enseignant à être plus attentif aux travaux de ces élèves proches de lui, et empêchait à

d’autres plus éloignées de le solliciter. Cette dynamique résultait de l’action de l’enseignant

mais surtout de l’articulation de ses actions avec celles de ses élèves qui interagissaient

ensemble, non directement accessible à la conscience des acteurs (Veyrunes, 2011). Dans

cette veine, en EPS, Vors et Gal-Petitfaux (2011) se sont intéressés à cette configuration

d’activité collective dans des dispositifs scolaires dits « difficiles » labélisés ZEP (Zone

d’Education Prioritaire) et ECLAIR (Ecoles, Collèges et Lycées pour l’Ambition,

l’Innovation et la Réussite) pour appréhender les moments des leçons qui étaient viables. A

partir de l’analyse des données d’expérience des différents acteurs de la leçon (enseignant,

élèves), les résultats ont montré une alternance dans la forme d’activité des élèves entre un

masquage dans leurs activités lorsque l’enseignant d’EPS était éloigné et se focalisait sur

d’autres élèves (leurs préoccupations étaient orientées vers « s’amuser à se défier et se

provoquer entre pairs ») et une activité d’ostentation lorsque l’enseignant focalisait son

attention sur eux (leurs préoccupations étaient orientées vers « travailler les exercices prescrits

par l’enseignant »). Autrement dit, au cours du temps et selon le déplacement de l’enseignant

d’EPS, les formes d’activités collectives se transformaient dans la classe. Dès lors, la notion

de configuration d’activité collective met en avant dans l’analyse collective de la vie de classe

le caractère complexe d’une part (relations mutuelles entre les élèves et l’enseignant) et le

caractère dynamique d’autre part de cette activité (évolution dans le temps de ces relations

mutuelles aboutissant à deux configurations d’activités collectives stables).

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1. 2 Les coordinations interpersonnelles

Des travaux issus du courant CA se sont aussi intéressés à la dynamique des relations

d’interdépendance à partir de la notion de « coordination interpersonnelle ». En effet, dans le

domaine sportif, des recherches l’ont mise en avant (Bourbousson, Cogé, & R’ Kiouak, 2013)

en se focalisant sur l’évolution des coordinations interpersonnelles suivant des formes de

réseaux collectifs globaux s’enchainant dans le temps. A titre d’exemple, Bourbousson,

Poizat, Saury et Sève (2008) se sont penchés sur la construction d’un réseau de coordinations

unissant différents équipiers sur la base des activités individuelles des membres du collectif en

basket-ball. Les résultats ont mis en exergue un degré de connectivité des joueurs (prise en

compte ou non pour agir des coéquipiers) : les joueurs ne prenaient en compte pour agir aucun

de leurs coéquipiers ou bien un seul d’entre eux dans la majeure partie du match. Les

moments où les élèves prenaient en compte trois ou quatre partenaires pour agir

apparaissaient de manière ponctuelle et correspondaient à des actions de surveillance et/ou de

compréhension de jeu (e.g., pressing en défense). Ces études ont pu caractériser des modes de

coordination dyadique suivant (a) une coordination mutuelle et (b) une coordination

unidirectionnelle en quantifiant notamment les coordinations (les coordinations dyadiques

mutuelles représentaient 13% de l’ensemble des coordinations dyadiques dans l’étude) au

cours du temps. Dès lors, la notion de coordination interpersonnelle collective met en avant

dans l’analyse collective d’une équipe sportive le caractère complexe d’une part (relations

mutuelles ou non entre les équipiers) et le caractère dynamique d’autre part de cette activité

(évolution dans le temps des relations mutuelles entre les acteurs). Si cette étude caractérise la

dynamique des interactions entre les joueurs d’une équipe de basket-ball, elle le fait en milieu

sportif et non en milieu scolaire. A ce titre, une étude récente investit cette notion de

dynamique d’interactions entre les élèves dans le domaine de l’EPS à partir de la notion

« d’histoires collectives ».

1. 3 Les histoires collectives

En EPS, une étude récente à partir de la notion d’histoires collectives en EPS a rendu

compte de la dynamique des interactions des élèves. Cette notion d’histoire collective renvoie

« aux histoires individuelles communes telles qu’elles sont vécues par des acteurs qui y

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intègrent un engagement relatif à une entreprise commune » (Evin, 2013). L’étude s’est

intéressée à l’analyse de la dynamique des histoires collectives d’élèves engagés dans des

situations de coopération vécues suivant des empans temporels relativement longs (cycle

d’enseignement). Pour cela, les données recueillies étaient des données d’expérience

aboutissant à une reconstruction de l’expérience des élèves telle qu’ils la vivaient. Elles ont

été recueillies au moyen d’enregistrements audiovisuels de l’activité des élèves et des données

de verbalisations lors d’entretiens post-leçon avec ces mêmes élèves. Le traitement des

données a consisté à identifier, à partir de l’expérience des élèves, les histoires collectives (i.e.

mettant en jeu un « Nous » ou « On » mutuel entre les élèves dans la description de la

situation) puis à les catégoriser en histoire collective-type. Dans un deuxième temps, le

traitement des données d’expérience a consisté à caractériser la dynamique de ces histoires

collectives vécues par les élèves.

Les résultats montrent que l’étude de cette dynamique s’articule autour 1) d’un agencement

temporel d’histoires collectives ; 2) d’un développement de ces histoires et 3) de modes

d’articulation de ces histoires (Evin, 2013).

1.3.1 L’agencement temporel des histoires collectives d’élèves : une analyse en

deux points

L’étude de la dynamique des histoires collectives d’élèves peut s’appréhender tout

d’abord à partir d’une analyse de l’agencement temporel de ces histoires qui elle-même est

étudiée sous deux focales (cela renvoie d’ailleurs à la définition que nous avons donné

précédemment de la dynamique) :

- 1) les différents empans temporels (les histoires collectives des élèves étaient visibles sur

soit une leçon, soit sur plusieurs leçons ou soit sur l’ensemble du cycle d’enseignement).

- 2) le caractère continu ou discontinu de ces histoires (les histoires collectives des élèves

pouvaient apparaître ponctuellement, disparaître pendant un moment, réapparaître sur des

empans temporels courts ou longs).

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1.3.2 Le développement des histoires collectives d’élèves : une analyse en trois

points

L’étude de la dynamique des histoires collectives d’élèves peut s’appréhender ensuite

à partir d’une analyse du développement de ces histoires, qui elle-même est étudiée sous trois

focales :

- 1) l’ouverture de l’histoire collective des élèves suivant deux modalités (une ouverture

simultanée pour les élèves d’une histoire collective en lien avec un élément de la situation qui

devenait significatif pour l’ensemble des acteurs vs une ouverture en décalée initiée par un

élève dont l’élément significatif de la situation se propageait par la suite dans l’expérience des

autres élèves).

- 2) le développement de l’histoire collective des élèves suivant deux modalités (un

développement de l’histoire avec peu de « bruits » vs un développement brusque avec

beaucoup de « bruits » qui pouvait donner lieu à de nouveaux décours à l’histoire collective).

- 3) la clôture de l’histoire collective suivant deux modalités (une clôture suivant la

satisfaction telle qu’elle est vécue par l’ensemble des élèves dans la situation vs une clôture

suivant l’abandon des élèves dans la situation).

1.3.3 Les modes d’articulations des histoires collectives : une analyse en quatre

points

L’étude de la dynamique des histoires collectives d’élèves peut s’appréhender enfin à

partir d’une analyse des modes d’articulation de ces histoires, qui elle-même est étudiée sous

quatre focales :

- 1) des histoires collectives isolées, indépendantes les unes des autres (les histoires

collectives d’élèves se développaient parallèlement à d’autres sans que celles-ci s’articulent

ensemble).

- 2) des histoires se succédant de façon séquentielle (les histoires collectives d’élèves

s’enchaînaient de manière systématique, la fin d’une histoire aboutissant à l’apparition d’une

nouvelle histoire collective).

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- 3) des histoires qui s’enchevêtraient à d’autres histoires (les histoires collectives d’élèves

s’enrichissaient mutuellement aboutissant à un nouveau décours de chacune d’entre elles sans

pour autant aboutir à une nouvelle histoire collective).

- 4) des histoires qui s’enchevêtraient aboutissant à une nouvelle histoire collective d’élèves

(les histoires collectives s’enrichissaient mutuellement aboutissant à une nouvelle histoire

collective).

1. 4 Intérêts et limites des travaux sur la dynamique des interactions

1.4.1 Intérêts

Ces études présentent de notre point de vue deux intérêts majeurs :

- 1) Les études présentées permettent d’enrichir l’intérêt d’étudier la dynamique. Elles

montrent que plusieurs états différents peuvent être repérés de façon stable et durable dans le

temps. En effet, c’est par l’activité de déplacement de l’enseignant d’EPS vis-à-vis de ses

élèves que ces derniers vont construire une configuration d’activité (activité stable de

masquage de certaines de leurs activités collectives lorsque l’enseignant est loin d’eux), la

déconstruire et la reconstruire différemment (activité ostentatoire de certaines de leurs

activités collectives lorsque l’enseignant est près d’eux) (Vors & Gal-Petitfaux, 2011). Dès

lors, dans l’étude de la dynamique, il est possible de caractériser une stabilité dans

l’apparition d’un état. D’autre part, les études pointent des éléments de la situation participant

à cette dynamique : dans l’étude précédente, le déplacement de l’enseignant indissociable de

l’activité de travail des élèves entraîne la présence de deux configurations collectives dans la

classe. Autrement dit, il est envisageable lorsqu’on étudie la dynamique de rendre compte

d’une partie des éléments participants à la dynamique des états. Ces études montrent de plus

que la dynamique rend compte d’une alternance d’états : à titre d’exemple, il existe des

relations préférentielles ou non entre les partenaires d’une même équipe lorsqu’ils jouent

ensemble (Bourbousson et al., 2008) - les individus passant d’un état à un autre.

- 2) Les études font apparaître des outils méthodologiques ou une exploitation des outils

méthodologiques innovante (i.e. des objets théoriques) pour appréhender la dynamique des

interactions entre des acteurs aboutissant à des questionnements sur les cadres théoriques et

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méthodologiques respectifs et contribuant à des réflexions épistémologiques qui les

questionnent et les enrichissent.

1.4.2 Limites

Ces études présentent de notre point de vue deux limites :

- 1) Même si de nombreux travaux récents s’attachent désormais à la dynamique des

phénomènes, les études pour la caractériser à partir d’indicateurs de quantification restent à ce

jour peu développées alors qu’une telle étape peut être un levier pour parvenir à des

modélisations de dynamiques expérientielles.

- 2) Ces travaux étudient une succession d’états (il est possible de décrire l’évolution au cours

du temps des préoccupations-typiques d’un élève par exemple) mais ne se sont pas attachés à

caractériser les changements entre ces états.

1. 5 Synthèse intermédiaire : investiguer la représentation graphique des

dynamiques d’interaction

Si de nombreuses études s’attachent désormais à retranscrire la dynamique de

l’activité d’acteurs, elles l’ont fait à partir d’organisateurs de la dynamique différents.

Certaines se sont attachées à rendre compte de la dynamique de préoccupations-typiques

d’élève (Evin, 2013) ou de la dynamique de formes d’activité enseignant-élèves (Vors & Gal-

Petitfaux, 2011). D’autres l’ont fait plus rarement à partir de modèles mathématisant la

dynamique, permettant ainsi le calcul d’indicateurs la quantifiant (Bourbousson et al., 2013).

Au vu de cette deuxième partie de revue de littérature, il semble intéressant alors

d’aller étudier la dynamique des formes d’interaction entre les élèves en EPS à partir

d’indicateurs quantitatifs pour rendre compte par exemple de l’importance plus ou moins

grande des occurrences inhérentes à la présence des formes d’interaction ou de l’évolution de

la quantité des changements dans ces formes. On peut alors, à cet instant de la réflexion,

enrichir notre définition de la dynamique : « la dynamique caractérise l’évolution d’un état

(c’est-à-dire les interactions entre élèves dans notre étude) au cours du temps et l’évolution

des changements entre plusieurs états ». Ce deuxième niveau de définition permet donc

d’envisager la possibilité d’étudier l’évolution des formes d’interaction entre les élèves en

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EPS au cours du temps et de leurs changements. Autrement dit, plus que les formes

d’interaction en elles-mêmes, la dynamique de ces formes à travers leurs changements est tout

aussi intéressante à étudier pour comprendre ce qui se joue à un grain fin dans cette

dynamique.

L’étude de la dynamique des interactions entre différents acteurs s’accompagne d’une

volonté de la modéliser pour décrire et expliquer l’activité en cours d’une autre façon. Cette

modélisation doit répondre à la fois aux exigences de description, d’explication et de

compréhension et aux exigences de transformation de l’activité individuelles et collective

(Veyrunes, 2011).

2. Modélisations de la dynamique des formes d’interaction

Les récentes études que nous venons de pointer ont convoqué des outils pour

représenter graphiquement la dynamique des interactions et décrire l’activité en cours.

Il en existe de plusieurs types : des modèles statistiques, des modèles informatiques, des

modèles mathématiques. Les modèles informatiques et mathématiques permettent de

modéliser des dynamiques prenant en compte des entités individuelles (les acteurs) dans des

structures réticulaires (les réseaux) et rendent compte des évolutions dynamiques des réseaux

(Manzo, 2007). Autrement dit, les modèles mathématiques et informatiques rendent compte

d’une notion se rapprochant d’une configuration globale de l’activité de plusieurs acteurs

connectés impliquant une vue des connexions au cours du temps (dans un groupe de trois

individus, la représentation graphique prend en compte la présence/absence de connexions

entre l’acteur n°1 et l’acteur n°2 à l’instant ‘t’, la présence/absence de connexion entre

l’acteur n°1 et l’acteur n°3 à l’instant ‘t’, la présence/absence de connexion entre l’acteur n°2

et l’acteur n°3 à l’instant ‘t’ puis celles à l’instant ‘t1’, ‘t2’, ‘t3’ … jusqu’à la fin du décours

temporel de l’activité étudiée).

Modéliser le déroulement de l’activité d’un acteur est un défi pour tous les programmes de

recherches scientifiques pour peu qu’ils aient la volonté d’être au plus proche de la réalité de

l’activité d’un acteur car devant être fidèle (rendre compte de la réalité) et viable (lisible

clairement). Les modélisations présentent donc une ou plusieurs activité(s) complexe(s) (dans

l’exemple précédent, il est possible de qualifier ces connexions de mutuelles ou de dirigées :

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potentiellement, l’acteur n°1 peut être connecté à l’acteur n°2 sans que celui ait ouvert cette

connexion) s’imbriquant dans un continuum temporel (déroulement du temps) et

événementiel (perturbations dans l’activité). Ceci est d’autant plus difficile à renseigner que le

continuum temporel est long et que les perturbations sont nombreuses. Au regard d’une

littérature centrée sur le courant du CA, différents termes apparaissent pour désigner ces

représentations graphiques de l’activité d’un ou de plusieurs acteurs : ainsi, nous retrouvons

« modèles graphiques », « modélisations », « schématisations », « graphes »… Tous ont pour

objectif de trouver un moyen de rendre compte de la dynamique de l’activité d’un ou de

plusieurs acteurs.

2.1 Une dynamique centrée sur l’activité individuelle de l’élève

Des études ont développé des modélisations prioritairement centrées sur l’activité d’un

acteur à partir de l’analyse de données d’expérience. Sur cette base, des modélisations rendent

compte de cette activité suivant non pas un décours temporel précis mais à partir d’un

enchaînement de phases dans l’activité.

A ce titre, en course d’orientation, une représentation graphique s’est attachée à caractériser

l’activité d’un coureur dans sa navigation depuis le départ, en caractérisant l’approche du

point d’attaque (dernier point remarquable avant d’atteindre la balise) et la phase d’après

point d’attaque (Mottet & Saury, 2014) en la comparant dans deux situations de

navigation contrastées : une situation classique (les élèves devaient trouver les balises le plus

rapidement possible et revenir au point de ralliement) et une situation de

poseur/contrôleur (les élèves installaient le plus rapidement possible dans un ordre précis des

balises et revenaient au point de ralliement) (Figure 1).

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Figure 1 : « Modélisation graphique de l’activité de navigation sur un interpose dans la

tâche de CO classique et de ‘poseurs-contrôleurs’ » (Mottet & Saury, 2014)

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Une autre étude a caractérisé l’activité d’un élève en course de durée au fil des tours réalisés

dans un parcours athlétique (Adé et al., 2010). Dans cet exemple, la représentation graphique

propose de retranscrire l’évolution de l’apparition des préoccupations-typiques de l’élève en

fonction de sa position sur le parcours et au fil des tours (Figure 2).

Figure 2 : Modélisation de l’évolution des préoccupations-typiques au fil des tours chez

Benjamin (axe des abscisses : le nombre de tour / axe des ordonnées : les préoccupations-

types) (Adé et al., 2010)

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Des travaux ont aussi mis en avant des modélisations de la dynamique centrée à la fois sur

l’évolution des préoccupations-typiques d’élèves mais aussi sur le décours temporel. A ce

titre, Saury et Rossard (2009) ont présenté une modélisation de la dynamique des

préoccupations-typiques des élèves indexées à un décours temporel (Figure 3).

Figure 3 : « Graphe représentant le faisceau de préoccupations de Sim lors de la leçon 5

dans une tâche compétitive » (axe des abscisses : le temps en minutes / axe des ordonnées :

les préoccupations-archétypes) (Saury & Rossard, 2009)

Ces trois illustrations gravitent autour d’une volonté de décrire de manière synthétique

l’activité d’un acteur à partir d’une composante de son activité ou d’une forme plus globale.

Si la première décrivait l’évolution d’une forme globale d’activité dans des séquences

temporelles correspondante à des phases durant la course, la deuxième représentation

graphique renseignait l’évolution des préoccupations-typiques de l’élève en se rapprochant

méthodologiquement de la construction d’une logique de graphique avec en abscisses

l’évolution du nombre de tours et en ordonnées les préoccupations typiques identifiées dans

l’étude (1 : gagner du temps ; 2 : récupérer ; 3 : estimer la situation de course ; 4 : respecter

les consignes de l’enseignant). Un point sur le graphe correspondait à l’émergence d’une

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préoccupation selon le tour effectué par l’élève : à titre d’exemple, à la ligne n°1 du parcours

athlétique, et au tour n°9, il est possible de voir l’enchaînement de deux préoccupations :

« gagner du temps » puis « récupérer ». La troisième représentation graphique renseignait,

quant à elle, l’évolution des faisceaux de préoccupations dans le temps selon que l’élève était

engagé dans un cycle coopératif (les points noirs sur le graphe) ou dans un cycle compétitif

(les points gris sur le graphe). Les représentations graphiques visaient à faciliter

l’identification de certaines similitudes (ou différences) des préoccupations d’un acteur selon

des phases dans l’activité sportive ou suivant un décours temporel précis. Dans la

modélisation proposée par Mottet et Saury (2014), elle visait particulièrement à faciliter

l’identification des similitudes et des différences des formes d’activité de navigation

d’individus débutants selon qu’ils étaient engagés dans une situation classique ou dans une

situation de poseur-orienteur. Dans la modélisation proposée par Adé et al. (2010), elle visait

particulièrement à faciliter l’identification de certaines similitudes (ou différences) des

préoccupations-typiques au fil des tours selon la ligne du parcours athlétique sur lesquelles

étaient en train de courir l’élève : les élèves se sont par exemple attachés tout au long du

parcours à gagner du temps et à respecter les consignes de l’enseignant. Dans la modélisation

proposée par Saury et Rossard (2009), elle visait particulièrement à comparer la présence et

l’évolution des préoccupations-archétypes selon que l’élève s’inscrivait en tâche compétitive

ou coopérative dans l’activité badminton.

2.2 Une dynamique centrée sur l’activité collective de l’élève

Des travaux récents ont mis en avant plusieurs modélisations de la dynamique de

transformation des interactions entre élèves (Evin, 2013).

Une première modélisation (Evin, 2013) présente l’agencement temporel d’histoires

collectives vécues par des élèves au cours d’un cycle d’enseignement. L’axe des abscisses

retranscrit le décours temporel à partir de l’unité de la leçon (7 unités successives correspond

à la succession des 7 leçons) tandis que l’axe des ordonnées renvoie à la caractérisation des

histoires collectives (i.e. la catégorisation a été faite sur la base de la typicalité des données

issues de l’articulation collective des CA individuels). Tout d’abord, cette modélisation rend

compte du moment de l’émergence des histoires collectives (à quelle leçon elles

apparaissaient ?). Ensuite, il présente le caractère continu ou discontinu des histoires

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collectives au cours du cycle d’enseignement (sur combien de leçons elles duraient ?). A titre

d’exemple, « l’échange de balles d’Hugues et Thom » a démarré à la leçon n°1 du cycle « arts

du cirque », a perduré à la leçon n°2 et s’est achevé à la leçon n°3 (Figure 4).

Figure 4 : « Graphe représentant l’ordonnancement temporel des histoires collectives au

cours du cycle d’arts du cirque » (axe des abscisses : le numéro de leçon dans le cycle / axe

des ordonnées : les histoires collectives) (Evin, 2013)

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Une deuxième illustration s’inscrit autour de la volonté de dégager des « patterns » (Evin,

2013) dans l’activité des élèves correspondant à l’identification de structures répétées ou non

de l’activité étudiée. Cela est notamment possible en comparant plusieurs graphes (Evin,

2013). Une comparaison de trois graphes construits suivant la même échelle et la même

logique (en abscisses, les unités de temps référencées en leçons ; en ordonnées, les histoires

collectives) permet en effet une identification de l’existence (ou non) de patterns

(identification des structures qui se répètent) dans l’ordonnancement temporel des histoires

collectives au cours des cycles (Figure 5).

Figure 5 : « Synthèse des patterns identifiés au cours des trois cycles d’enseignement » (axe

des abscisses : chaque colonne délimitée par des pointillés correspond à une leçon dans les

cycles / axe des ordonnées : les histoires collectives) (Evin, 2013)

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Ces représentations graphiques décrivent donc une dynamique d’interactions entre

élèves en ce sens qu’elles mettent en lien des histoires collectives (basées sur l’analyse des

données d’expériences des élèves) et un ordonnancement temporel (dans un cycle

d’enseignement).

2.3 Vers l’utilisation des modèles mathématiques

Dans le but de caractériser les interactions entre des acteurs et leurs dynamiques, des

recherches récentes se sont penchées sur des modélisations sous forme de réseau émergeant

(R’Kiouak, 2013) pour représenter les coordinations entre différents partenaires d’une même

équipe. Précisément, en s’appuyant sur l’approche du Social Network Analysis (SNA) qui

utilise les apports mathématiques de la théorie des graphes et des analyses matricielles

(Wasserman & Faust, 1994), l’étude propose une étape de « mathématisation de l’empirique »

passant par une transformation quantitative pour obtenir des séries temporelles appliquées à

des phénomènes (i.e. les données d’expérience) : à partir d’une analyse centrée sur la

description de l’activité des joueurs de l’équipe observée, elle caractérise des actions-types

puis les codent avec des valeurs numériques. Cette démarche, bien que présente dans les

domaines des sciences humaines et sociales et notamment en géographie et en économie,

ouvre une voie prometteuse dans le domaine des sciences du sport pour l’analyse de

phénomènes collectifs selon Lusher, Robins et Kremer (2010). Cet outil quantifie en effet les

phénomènes intersubjectifs (e.g., présence/absence de relations identifiées par le partage des

connaissances et des engagements des acteurs) en réduisant la dynamique des interactions à

un enchaînement de réseaux (présence/absence de connexions entre les individus dans la

situation), et mathématiquement à un enchaînement de matrices (logique binaire :

connecté/non connecté) au cours du temps. A partir de ce traitement quantitatif

mathématiques, trois indicateurs, modélisant la dynamique du réseau, ont été calculé : 1) la

densité ; 2) la réciprocité et 3) la transitivité. La densité du réseau renvoie à la quantité de

connections reliant les acteurs du réseau. Plus les acteurs sont reliés plus le réseau est dense.

La réciprocité du réseau renvoie à la quantité de liens bidirectionnels dans le réseau. Cela

précise la part des liens réciproques et des liens non réciproques entre les acteurs. Enfin, la

transitivité renvoie à la tendance à ce que deux acteurs séparés qui sont connectés à un même

partenaire le soit également entre eux. Ces indicateurs sont calculés dans le temps suivant une

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série temporelle. Autrement dit, l’outil SNA permet de rendre compte de l’évolution de ces

indicateurs de la dynamique dans le temps. La Figure 6 présente une illustration de la

fluctuation des trois indicateurs étudiés au cours des 7 minutes 15 secondes d’activité dans un

match de basket-ball.

Figure 6 : a) Evolution de la densité de l’équipe en fonction du temps. b) Evolution de la

transitivité de l’équipe en fonction du temps. c) Evolution de la réciprocité de l’équipe en

fonction du temps (axe des abscisses : le temps en secondes / axe des ordonnées : 1 est la

valeur maximale et 0 la valeur minimale de l’indicateur) (R’Kiouak, 2013)

En s’appuyant sur des corrélations fenêtrées (i.e. mesures de similitudes de séries

temporelles), le chercheur, articulant par cette démarche séries temporelles (Figure 6) et

événementielles (données d’expérience codées), peut pointer le degré d’association entre ces

deux séries : il peut identifier et pointer des périodes au cours desquelles les indicateurs

fonctionnaient ensemble de manière saillante (e.g., correspondance simultanée d’un pic entre

plusieurs représentations graphiques). Dans la Figure 7, le moment 1’37’’/1’40’’ (illustré par

les cercles rouges) est retenu par le chercheur car les indicateurs « transitivité/densité » et

« transitivité/réciprocité » passent sous le seuil de significativité.

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Figure 7: a) Evolution de la corrélation fenêtrée entre réciprocité et densité pour une fenêtre

de 10 données. b) Evolution de la corrélation fenêtrée entre réciprocité et densité pour une

fenêtre de 20 données. c) Evolution de la corrélation fenêtrée entre transitivité et densité pour

une fenêtre de 10 données. d) Evolution de la corrélation fenêtrée entre transitivité et densité

pour une fenêtre de 20 données. e) Evolution de la corrélation fenêtrée entre transitivité et

réciprocité pour une fenêtre de 10 données. f) Evolution de la corrélation fenêtrée entre

transitivité et réciprocité pour une fenêtre de 20 données (les pointillés au dessus de la valeur

0 : seuil de significativité positive/les pointillés en dessous de la valeur 0 : seuil de

significativité négative/axe des abscisses : le temps en secondes / axe des ordonnées : les

valeurs maximales des indicateurs) (R’Kiouak, 2013)

Ainsi, se développent des modélisations à partir d’indicateurs quantitatifs rendant

compte de la dynamique des interactions entre des acteurs. Elles appréhendent en réseau

émergent de la coordination entre les partenaires d’une équipe au cours d’une période étudiée

(R’Kiouak et al., 2013). Dans l’étude, cela permet de voir autrement l’évolution des

coordinations et de cibler un moment du match significatif. Le chercheur, dès lors, peut

entreprendre une démarche itérative sur les données d’expérience pour mener une analyse

compréhensive localisée.

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2.4 Intérêts et limites des représentations graphiques

2.4.1 Intérêts

Les travaux présentent de notre point de vue de quatre intérêts majeurs :

- 1) Les graphiques ont pour principale visée de permettre de comparer des états dans un

décours temporel plus ou moins long, ce qui permet de rendre compte de la succession des

états dans le temps.

- 2) Les graphiques issus du SNA permettent un rapprochement des séries événementielles et

des séries temporelles dans l’étude de la dynamique des coordinations interpersonnelles en

mettant en avant le potentiel de l’outil mathématique. A partir de la lecture de ces graphiques,

des moments saillants (moment observé dans les deux représentations graphiques « au même

endroit sur chacun ») sont identifiés : le chercheur revient alors sur les données d’expérience

pour identifier les éléments expliquant ces moments saillants de l’activité. Cela permet de

mettre en avant une démarche pour comprendre à un grain plus fin la dynamique des

interactions entre les élèves en EPS.

- 3) Ces représentations graphiques permettent de rendre compte de l’évolution d’états dans le

temps que la littéralisation (i.e. la description littéraire de l’activité des acteurs) du CA rend

difficile d’accès.

- 4) Certaines études centrées sur la dynamique sont dans la logique d’emprunt d’outils issus

de champs scientifiques dont l’objet est de comprendre justement le processus de la

dynamique (i.e. avoir un regard sur comment évolue le processus de relations entre des

variables) autres que celui du CA.

2.4.2 Limites

Ces travaux offrent de notre point de vue au moins une limite :

- 1) Les graphiques issus du SNA s’intéressent à la dynamique des coordinations

interpersonnelles sur un empan temporel relativement court (7 minutes de phase de jeu en

basket-ball soit 4 minutes 10 secondes effectives), potentiellement difficile à utiliser sur des

empans temporels plus longs.

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3. Synthèse

De nombreux travaux ont appréhendé les interactions entre les élèves en EPS en

identifiant des catégories de formes d’interaction et en rendant compte des effets de ces

interactions sur les dimensions motrices, cognitives et sociales des élèves. D’autres se sont

attachés à appréhender la dynamique des phénomènes étudiés et à la représenter

graphiquement. Ils ont mis en avant entre autres :

- 1) Les propriétés complexes des interactions entre les élèves en EPS à travers leurs

caractères émergents (organisation qui apparaît soudainement caractérisant un changement

d’état et non réductible à la somme des parties) (Maturana & Varela, 1994) et la présence

d’interrelations mutuelles entre les acteurs (i.e. les élèves) (Morin, 1990) d’une part, et

d’interrelations mutuelles entre le système formé par les interactions entre les élèves et

l’activité enseignante, l’activité des pairs et l’environnement matériel d’autre part.

- 2) Les propriétés dynamiques des interactions entre les élèves à travers leurs caractères

évolutifs (stabilité des formes d’interaction, changements des formes d’interaction).

- 3) Des représentations graphiques des dynamiques des interactions d’acteurs à partir

d’organisateurs différents (évolution des préoccupations-typiques, indicateurs mathématiques

moyennant l’utilisation d’outils spécifiques).

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CHAPITRE 3

Les interactions entre les élèves en course

d’orientation

Ce chapitre vise à présenter une synthèse des travaux étudiant l’activité sportive de la

course d’orientation. Tout d’abord, nous caractériserons la situation d’interaction en course

d’orientation en la ciblant dans un contexte d’enseignement scolaire au collège avec des

élèves de 6ème débutants. Ensuite, nous présenterons les recherches scientifiques qui se sont

intéressées à l’activité des pratiquants de la course d’orientation. Enfin, nous rendrons compte

des études professionnelles portant sur l’enseignement de la course d’orientation en EPS.

Nous adopterons la même démarche que les chapitres 1 et 2, c’est-à-dire qu’après avoir

présenté les apports de chaque revue de littérature, nous évoquerons de notre point de vue

leurs intérêts et leurs limites.

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Chapitre 3. Les interactions entre élèves en course d’orientation

La majorité des travaux précédemment cités étudie les interactions entre les élèves en

EPS lorsqu’elles se déroulent en permanence à proximité de l’enseignant : cette proximité

rend les interactions entre les élèves systématiquement visibles de l’enseignant. Même lorsque

celles-ci lui sont masquées, elles peuvent faire l’objet à tout instant d’une attention, d’un

contrôle visuel de sa part. Il existe cependant des conditions dans l’enseignement de l’EPS

pour lesquelles les interactions entre les élèves ne sont pas continuellement à proximité et

sous la supervision constante de l’enseignant. En effet, les conditions ordinaires de pratique

en course d’orientation amènent les élèves à ne pas agir en permanence devant l’enseignant

d’EPS et à s’éloigner de lui jusqu’à ce que les interactions entre élèves ne soient plus visibles

par celui-ci.

1. L’activité ordinaire des élèves engagés en leçon de course d’orientation

L’activité ordinaire des élèves engagés en course d’orientation consiste à se déplacer,

seul ou à plusieurs, dans un milieu plus ou moins inconnu, en établissant des itinéraires à

l’aide d’une carte, et éventuellement d’une boussole, pour se rendre aux différentes balises et

les valider dans une limite de temps. Cette activité ordinaire des élèves varie selon les

dispositifs d’apprentissage visant l’atteinte de compétences des Programmes EPS.

La connaissance qu’ont les élèves de l’aire d’évolution influence leur activité : si les élèves

d’un cycle terminal se déplacent dans un milieu inconnu, les élèves débutants, quant à eux, se

déplacent dans un milieu partiellement connu et le domestiquent au fur et à mesure de leurs

expériences dans le cycle. Lorsque les élèves en EPS s’engagent dans des leçons de course

d’orientation, il ressort entre autre de leur activité quatre caractéristiques : l’activité de l’élève

est 1) instrumentée, 2) individuelle ou collective, 3) en partie non accessible à l’enseignant

d’EPS et 4) plus ou moins anxiogène.

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1. 1 Une activité instrumentée : carte - boussole - GPS (Global Positioning

System)

L’activité des élèves en course d’orientation est une activité instrumentée en ce sens

qu’ils utilisent des objets pédagogiques (la carte, la boussole, le GPS) pour choisir un

itinéraire et se rendre aux balises.

Outre la différence d’échelle de carte (1/5000ème pour les élèves débutants jusqu’à 1/15000ème

pour les élèves en cycle terminal), les inscriptions qui se trouvent dessus ainsi que la présence

ou non de la couleur (i.e. photocopie en noir et blanc de la carte vs carte en couleur) sont des

éléments qui influencent l’activité des élèves : l’élève débutant cernera ainsi les lignes

directrices les plus évidentes (chemins de grande taille ou sentiers marqués, indiqués

respectivement par un trait noir épais continu et un trait noir discontinu) tandis que l’élève de

niveau intermédiaire, en plus, se servira des couleurs sur la carte indiquant différents

coefficients de pénétrabilité pour couper les chemins.

Dans un niveau confirmé, l’utilisation de la boussole dans l’enseignement EPS peut

apparaître : elle permet de calculer un azimut (c’est-à-dire la direction directe pour se rendre à

la balise sans passer pas les lignes directrices). Son utilisation est associée indissociablement à

celle de la carte pour le calcul de cet azimut.

Plus récemment, le GPS qui est un système de navigation automatique s’est répandu en tant

qu’instrument d’aide à la navigation (Mottet, 2015). Il correspond à un objet technologique

qui permet l’enregistrement des itinéraires effectué par des élèves. Grâce à un logiciel

informatique, il est possible de superposer sur la carte d’orientation l’enregistrement de

l’itinéraire effectif : cet objet permet donc prioritairement à l’enseignant d’EPS de disposer

d’une trace très précise de l’activité de l’élève en forêt, de la comparer par exemple avec leur

ressenti sur la course. L’utilisation de cet objet technologique, bien que présent dans les

pratiques usuelles de navigation (e.g., voiture, bateau, avion), n’est pas de nos jours très

répandue dans les pratiques professionnelles EPS.

1. 2 Une activité individuelle ou collective

Les élèves sont amenés à se déplacer, seul ou à plusieurs. Selon que l’activité course

d’orientation se situe au collège dans un premier cycle d’enseignement ou au lycée dans un

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cycle terminal, les conditions de pratique diffèrent : si la compétence attendue par le niveau

terminal et celle du niveau 2 collège invite à une activité individuelle du fait de la préparation

respective à l’épreuve du baccalauréat (« le candidat doit réaliser seul un parcours de son

choix [...] dans un temps limité de 30 à 35 minutes », bulletin officiel spécial n°5 du 19 juillet

2012), et à l’épreuve du Diplôme National du Brevet (« le coureur doit réaliser un parcours

de son choix dans un temps limité de 25 à 30 minutes », bulletin officiel spécial n°5 du 19

juillet 2012), les Programmes de lycée et de collège invitent également à une activité

collective : les élèves peuvent réaliser les leçons en groupe en lien avec des objectifs

scolaires (« En coopération, comparer ses choix d’itinéraires avec les autres, émettre des

hypothèses alternatives en cas d’échec », Fiches ressources, lycée niveau 3 ; « Oser s’engager

[…] à deux ou trois dans un milieu peu connu », Fiche ressources niveau 1 collège, 2009).

1. 3 Une activité en partie non accessible à l’enseignant d’EPS

Les élèves doivent poinçonner sur la carte les balises qui sont réparties à différents

endroits dépendants du niveau de pratique. Plus le niveau de compétence de l’élève est élevé,

plus l’emplacement des balises est éloigné de l’enseignant d’EPS (qui reste au point de

ralliement) et difficile à localiser : à titre d’exemple, si un élève en cycle terminal devra

s’enfoncer dans la forêt selon un azimut pour trouver la balise, l’élève débutant la cherchera à

un endroit caractérisé par un élément remarquable (e.g., croisement de chemins, dépression à

côté d’un chemin, arbre caractéristique à côté d’un chemin) tandis que l’élève de niveau

intermédiaire la repérera sur un élément remarquable (e.g., dépression, bute, talus, souche

d’arbre caractéristique). Les élèves s’éloignent donc de l’enseignant et leurs choix dans le

projet de déplacement et d’adaptation d’itinéraire ne font pas l’objet d’un contrôle permanent

par celui-ci. Autrement dit, ce qui se joue dans l’activité ordinaire des élèves s’engageant dans

une leçon de course d’orientation est en grande partie non accessible à l’enseignant d’EPS.

L’activité des élèves est souvent inférée par l’enseignant à partir de leurs verbalisations et de

la vérification des poinçons des balises.

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1. 4 Une activité plus ou moins anxiogène

L’activité course d’orientation est une activité sportive de pleine nature qui se

caractérise par l’incertitude du milieu dans lequel évoluent les élèves. Cette incertitude peut

générer dans l’activité des élèves une dimension anxiogène qui s’actualise ordinairement à

travers le sentiment d’être perdu. Mais si la familiarité avec l’environnement peut s’installer

au fil des expériences vécues, l’enseignant s’attache à y remettre de l’incertitude (et donc une

dimension anxiogène) afin de toujours encourager chez les élèves une activité de recherche.

Pour cela, les enseignants d’EPS découpent parfois les environnements retenus pour les

leçons de course d’orientation en différentes parcelles, pour trouver l’équilibre dans

l’apprentissage entre familiarisation et exploration de l’environnement naturel.

1. 5 La situation d’interaction entre élèves en course d’orientation en classe de

6ème

Les élèves peuvent fonctionner collectivement lors des leçons de course d’orientation

en EPS. Une des conditions ordinaires de pratique est le fonctionnement dyadique. Ces

interactions entre deux élèves sont privilégiées surtout au niveau débutant et notamment au

collège. Au regard de la littérature mise en avant précédemment, ces interactions dyadiques

peuvent être libres (aucun rôle d’élève-tuteur ou d’élève-tutoré n’est préétabli) ou fixes (un

rôle d’élève-tuteur et d’élève-tutoré est établi) et se caractériser par une dissymétrie (i.e. écart

de compétence entre les deux élèves) ou une symétrie (i.e. niveau de compétence relativement

proche entre les deux élèves). Toutefois, les interactions dyadiques des élèves débutants sont

souvent liées à une organisation affinitaire : en effet, l’élève de 6ème par exemple met en jeu

des ressources affectives pouvant inhiber ses actions dans un milieu partiellement inconnu. En

s’organisant en dyade affinitaire, les interactions avec un camarade participent à diminuer ce

stress et encouragent chez les élèves un sentiment de sécurité lorsqu’ils s’engagent dans cet

environnement imprévisible. Ainsi, les interactions dyadiques entre les élèves débutants se

caractérisent potentiellement par des formes d’interaction coopératives dans lesquelles ils

vont concevoir des projets de déplacements et les adapter pour trouver l’ensemble des balises

(e.g., croisement de chemins, arbre particulier) dans une limite de temps imparti.

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Pour se faire, les deux élèves disposent d’une carte représentant l’aire d’évolution dans lequel

ils vont pouvoir se déplacer : cette aire d’évolution est généralement constituée de lignes de

« niveau 1 » (e.g., chemins facilement identifiables comme les chemins carrossables ou les

sentiers) que les élèves peuvent emprunter et d’éléments remarquables (e.g., souche d’arbre

caractéristique, dépression, talus) pour faciliter l’orientation des élèves. A l’aide de cette

carte, les élèves vont pouvoir « identifier et associer les éléments simples du terrain avec leur

représentation graphique sur la carte (relation terrain-carte) » et « identifier et associer les

lignes simples de la carte avec leurs présences sur le terrain (relation carte-terrain) » (Fiche-

ressources niveau 1 collège, 2009). En d’autres termes, le deux élèves de la dyade partagent

une carte et, à partir d’une reconnaissance d’éléments du terrain correspondant à des symboles

sur la carte et inversement, interagissent pour élaborer un itinéraire, l’adapter au fur et à

mesure de leurs déplacements et trouver les balises.

Ces déplacements, ces interactions dyadiques pour élaborer un itinéraire à partir d’une lecture

de carte ne se font pas continuellement à proximité de l’enseignant d’EPS et donc ne sont pas

sous sa supervision constante. Autrement dit, ce qui se joue lorsque les élèves discutent,

confrontent leur itinéraire sont rarement sous un contrôle direct in situ de l’enseignant.

Au total, la situation d’interaction entre des élèves débutants engagés dans des leçons

de course d’orientation en EPS se caractérise par une activité dyadique qui reste pour partie

inaccessible à l’enseignant d’EPS et qui est médiée par une carte dont la lecture leur

permettent d’échanger ensemble pour construire des itinéraires et se rendre aux balises

recherchées.

2. Revue de littérature sur l’activité en course d’orientation

La course d’orientation a déjà fait l’objet de travaux professionnels notamment dans la

revue EPS et en moindre proportion dans la littérature scientifique. Toutefois, celle-ci rend

compte particulièrement de l’activité décisionnelle du coureur expert dans le cadre de la

psychologie du sport, de l’étude sur les profils d’apprenants engagés en situation

d’enseignement au lycée dans le cadre d’une approche didactique, et sur l’activité individuelle

de navigation telle qu’elle est vécue par le coureur dans le cadre d’une approche située.

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2.1 L’activité décisionnelle du coureur expert en course d’orientation

La course d’orientation a déjà été l’objet d’investigation notamment sur l’activité

cognitive de coureurs experts en course d’orientation dans le cadre de la psychologie du sport

(Eccles, & Walsh, 2006 ; Macquet, Ecclès, & Barraux, 2011).

Eccles et al. (2002) ont montré que l’activité cognitive du coureur de course d’orientation

requérait une attention de trois sources d’information : la carte (pour localiser les balises),

l’environnement (pour le comparer avec sa représentation sur la carte) et la course (surveiller

l’itinéraire pris). En raison de ces nombreuses ressources attentionnelles, l’expert alterne son

attention sur les trois sources d’information. A ce titre, le coureur d’élite s’adapte et use de

stratégies telles que la simplification des informations données sur la carte au minimum

requises pour naviguer. Précisément, il réduit les informations requises sur la carte pour

naviguer en sélectionnant les caractéristiques qui sont visuellement faciles et utilise les

« périodes calmes » dans la course pour examiner la carte et planifier l’itinéraire.

Une autre étude (Macquet et al., 2011) s’est intéressée aux préoccupations-typiques chez le

coureur expert. Elles s’articulaient autour de (1) trouver les points de contrôles plus

rapidement que les concurrents, (2) optimiser l’allure de course le long du parcours et (3)

réfléchir sur les actions entreprises durant la performance. Précisément, la première s’est

actualisée en deux sous-préoccupations : « simplifier la carte » (e.g., diviser l’itinéraire sur la

carte avec des points remarquables sous forme de checkpoint) et « utiliser les chemins les plus

courts et les plus efficaces en termes d’énergie » dépendant de quatre facteurs : la longueur du

chemin, sa « courabilité », la simplicité de navigation et la fatigue ressentie. La deuxième

s’est actualisée quant à elle par la volonté de maintenir une vitesse moyenne de course tout au

long du parcours en courant plus vite quand il était sur les chemins, quand il quittait une

balise et quand il dépassait un coureur ; en maintenant la vitesse de course malgré la fatigue,

les sols glissants, la végétation et les difficultés de navigation ; et en ralentissant pour faire

plus attention à la carte et récupérer physiquement. La troisième s’est actualisée lorsque le

coureur a essayé de réfléchir durant la performance sur ce qui était fait et sur ce qui restait à

faire. A titre d’exemple, le coureur d’élite jugeait de la navigation en essayant de considérer la

difficulté qu’il pouvait rencontrer et en décidant si les informations sur les autres concurrents

devaient être utilisées (utiliser les observations des comportements des coureurs sachant qu’ils

pouvaient faire une erreur de navigation à l’exception de changements brusques de direction).

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2.2 Les profils d’apprenants au lycée

Si des études s’intéressent à l’activité de coureur d’élite, d’autres se sont penchées sur

des profils d’élèves dans l’enseignement de la course d’orientation en EPS et plus

particulièrement lorsqu’ils étaient engagés dans un cycle de terminale (préparation à l’épreuve

du baccalauréat) avec entre autres une focale issue d’une analyse motrice (Bonnard, 2012).

Précisément, l’analyse effectuée dans le cadre à dominante motrice correspondait à la manière

dont l’élève s’engageait dans l’action motrice en course d’orientation. Cette dernière est

organisée par le risque (l’élève acceptait plus ou moins l’incertitude spatio-temporelle

inhérente au rapport balise/temps imparti), la complexité (l’élève construisait un itinéraire

plus ou moins long) et la difficulté (l’élève construisait un itinéraire avec des balises plus ou

moins cotées pour obtenir le plus de points). Les résultats soulignent l’existence de quatre

profils (profils de fin de cycle) : le timoré (l’élève « jouait » la sécurité en ramassant les

balises les plus proches), l’audacieux (l’élève prenait un risque soit sur le plan énergétique

avec un itinéraire long soit sur le plan des balises plus compliquées à trouver), le modéré

(l’élève mesurait les risques pour ne pas dépasser le temps imparti malgré un itinéraire qui

pouvait paraître difficile) et le symbiotique (l’élève adaptait son parcours selon ses capacités

physiques et le terrain). Ces profils n’étaient pas figés en ce sens qu’ils étaient

l’aboutissement d’une évolution de profils initiaux (de début de cycle) à savoir le « confiant »

(l’élève ramassait toutes les balises quelle que soit sa difficulté), le « scoreux » (l’élève

ramassait les balises les plus difficiles pour obtenir un minimum de points), et le

« sécuritaire » (l’élève ramassait les balises les plus proches de rentrer avec quelques-unes).

2.3 L’activité de navigation dans deux conditions de pratique particulières :

« poseur/contrôleur » vs « classique »

D’autres études se sont intéressées à l’activité d’un pratiquant débutant dans le cadre

de l’enseignement universitaire. Mottet et Saury (2013, 2014) se sont attachés à comparer la

dynamique de l’activité de navigation chez des pratiquants débutants dans deux situations :

une situation « poseur/contrôleur » (les étudiants débutants dans l’étude installaient le plus

rapidement possiblement dans un ordre précis des balises et revenaient au point de ralliement)

et une situation « classique » (les étudiants devent trouver les balises le plus rapidement

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possible et revenir au point de ralliement). Il ressortait des similitudes et des différences dans

l’activité des coureurs dans les deux situations. Précisément, l’ensemble des étudiants

présentait des formes similaires d’activité de navigation. A titre d’exemple, les pratiquants

interprétaient les caractéristiques du terrain dans l’environnement, basées sur les

caractéristiques de celui-ci qui étaient attendues ou inattendues par rapport à la lecture de la

carte. Cette forme d’activité était présente dans les deux situations étudiées : elle commençait

dès que le signal de départ était donné et se terminait quand les coureurs atteignaient le point

d’attaque du poste (emplacement caractéristique de la balise). Cette forme d’activité se ré-

ouvrait aussi à l’arrivée de chaque nouveau point remarquable. Aussi, les formes d’activité

des coureurs ont montré des différences pour la phase d’attaque de la balise. Une situation

« classique » invitait les pratiquants à trouver rapidement la balise (lorsque les coureurs,

longeant les lignes directrices, estimaient que la balise est proche, ils bifurquaient

brusquement sans continuer à les suivre) - les coureurs alors pouvaient la trouver par hasard si

le niveau de difficulté de l’emplacement était faible (les coureurs atteignaient la balise en

explorant le paysage et en essayant de deviner sa position jusqu’à ce qu’ils la trouvent). En

revanche, une situation « poseur/contrôleur » invitait les pratiquants à atteindre le poste le

plus sûrement possible (les étudiants se déplaçaient uniquement sur les lignes directrices pour

être le plus proche de l’emplacement même si la distance était plus longue qu’une trajectoire

« coupée ») qui prenaient en compte ensuite toutes les caractéristiques de la carte pour les

anticiper sur le terrain et faire la description exacte du poste lors de la pose de la balise.

2.4 Les revues professionnelles

De nombreux travaux professionnels ont donné une illustration de l’activité enseignée

en collège et en lycée. La course d’orientation est une activité dans laquelle le professeur

d’EPS est dans l’impossibilité de superviser directement les comportements des élèves

lorsqu’ils agissent en forêt. Pour autant, il est en mesure de les inférer lors des moments

fugaces de rencontres (les élèves passent l’enseignant au niveau du point de ralliement pour

rejoindre une balise, les élèves discutent en fin d’exercice avec l’enseignant de ce qu’ils ont

fait). Au-delà de proposer des situations d’apprentissage et des axes de simplification pour les

élèves en difficulté et des axes de complexification pour les élèves en réussite, des travaux se

sont attachés a identifier des comportements individuels et collectifs d’élèves (Blanchard,

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2008) : à partir d’items (sécurité, apprentissages, motivation, évaluation), des avantages et des

inconvénients sont mis en avant à titre de comparaison dans une pratique individuelle et dans

une pratique collective. Il ressort chez des élèves notamment un rôle de « locomotive-wagon »

dans la pratique collective : l’élève le plus compétent cherche la balise sans expliquer aux

partenaires qui se contentent de suivre. Dans l’optique de ces travaux, d’autres ont proposé

des situations d’apprentissage pour favoriser une coopération entre les élèves dans leurs

interactions à partir d’une connaissance de leur expérience telle qu’elle est construite de leur

point de vue dans les situations de course d’orientation (Mottet, 2012).

3. Intérêts et limites des études portant sur la course d’orientation

3.1 Intérêts

Ces études font preuve de notre point de vue de trois intérêts majeurs :

- 1) Les études en psychologie du sport mettent en avant la complexité de l’activité d’un

coureur expert en pointant trois éléments qui sont indissociables les uns des autres pour

construire et adapter l’itinéraire de course (la carte, l’environnement et le déroulement

pendant la course). Cela permet d’avoir une vision relativement précise de ce qui se joue

lorsqu’un pratiquant construit un itinéraire dans des tâches de navigation. Ces études

décrivent également les préoccupations-typiques des coureurs d’élite et comment ils les

actualisent. D’autres décrivent des profils d’apprenant à partir d’une focale motrice, décrivant

les éléments s’y rattachant (e.g., la difficulté du parcours joue sur la dimension du profil

moteur de l’élève). Ces études concourent à une description de plus en plus approfondie de

l’activité du pratiquant engagé en course d’orientation sur des niveaux différents de pratique.

- 2) Au-delà des apports dans la conception de dispositifs d’apprentissage en lien avec

l’atteinte de compétences précises en course d’orientation, un des travaux professionnels

compare deux formes de pratique communément utilisées en EPS (pratique individuelle vs

pratique collective) (Blanchard, 2008) : la pratique collective met en évidence une interaction

de « locomotive-wagon » au cours de laquelle un élève (le plus compétent) cherche la balise

sans expliquer aux partenaires qui le suivent. Cet élément montre que les interactions entre les

élèves prennent des formes particulières qu’il conviendrait d’explorer (au vu de la littérature

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scientifique concernant les interactions dyadiques, il ressort que le tuteur n’est pas forcément

celui qui a le plus de compétences).

- 3) Une étude s’intéresse à la dynamique de l’activité de navigation de débutants en course

d’orientation (étudiants en STAPS) telle qu’ils la vivent dans des dispositifs de pratique

différents (Mottet, 2015 ; Mottet & Saury, 2013, 2014). En s’intéressant à cette dynamique et

en montrant des formes d’activité de navigation similaires et différentes dans les deux

dispositifs, cette étude pointe l’importance à explorer plus avant ce qui se joue dans l’activité

des élèves quand ils s’engagent dans des dispositifs d’apprentissage différents en course

d’orientation.

3.2 Limites

L’ensemble de ces études présente de notre point de vue trois limites :

- 1) L’étude sur les préoccupations-typiques du coureur expert ainsi que celle de son activité

décisionnelle a permis de rendre compte à un grain fin la description de l’activité du coureur

expert. Toutefois, rares sont les recherches qui ont investigué cette activité chez l’élève en

EPS à ce grain.

- 2) Bien qu’une seule recherche se soit intéressée à la dynamique de l’activité d’étudiants

débutants et montre une activité de navigation particulière selon les phases du parcours de

course d’orientation, la majorité des études ne s’est pas focalisée sur cet aspect dynamique

qui, dans le milieu imprédictible de la forêt, est sans doute « perturbé » par des nombreux

événements favorisant une activité du pratiquant d’adaptation constante et évolutive.

- 3) Les travaux ne rendent pas compte de l’activité ordinaire collective des pratiquants

pourtant présente dans l’enseignement de la course d’orientation en EPS surtout à un niveau

débutant. A ce titre, cette activité collective lorsque les élèves s’engagent en groupe dans la

recherche de balises au cours des leçons est une piste d’investigation.

« Cette APSA est un terrain d’expérimentation privilégié pour l’observation des

interactions : lecture de documents, lecture du milieu, mise en action, échanges entre pairs,

entre professeurs et élèves. Lorsque l’élève voit et dit, alors il commente, c’est ce que font les

élèves en observant les cartes et le terrain » (Bonnard, 2012, p.145).

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CHAPITRE 4

Objet d’étude et questions de recherche

Sur la base des trois chapitres précédents, nous présenterons notre objet d’étude et les

questions qui ont orienté notre travail de thèse.

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Chapitre 4. Objet d’étude et questions de recherche

L’examen des études s’étant intéressées aux interactions entre les élèves en EPS

pointent l’existence de catégorisations de formes d’interaction entre les élèves (Lafont, 2012).

Ces formes d’interaction peuvent être recherchées par les enseignants d’EPS (e.g.,

interactions fixes dans des dyades avec un rôle de tuteur et un rôle de tutoré prédéfini)

(Ensergueix & Lafont, 2009) ou être spontanées, c’est-à-dire qu’elles s’actualisent en dehors

de la prescription de l’enseignant d’EPS (Huet & Saury, 2011). Ces travaux se sont

principalement attachés à mettre en avant par exemple les effets bénéfiques des interactions et

de la coopération pour les apprentissages (Huet & Saury, 2011) ou encore les conditions et

contraintes participant à structurer ces interactions et apprentissages coopératifs comme

l’importance de la formation des tuteurs, le rôle du profil cognitif ou du genre chez les élèves

(Ensergueix & Lafont, 2009). Pour autant certains de ces travaux ont montré que l’activité

enseignante, l’activité des pairs et l’environnement dans lequel se déroulent les leçons

(environnement naturel, environnement matériel) participaient à l’émergence de ces formes

d’interaction entre élèves (Saury et al., 2013). De plus, ces interactions évoluaient dans le

temps : les auteurs ont donc été amenés à s’intéresser à leurs dynamiques. Dans ces cas, ils

ont abouti à des représentations graphiques de cette dynamique donnant à voir plusieurs

formes d’interaction entre élèves qui apparaissaient, disparaissaient, réapparaissaient dans le

temps. Par exemple, Evin (2013) proposent de l’étudier sous la notion d’histoires collectives

en s’intéressant notamment à leur apparition, leur permanence et fugacité au cours du temps

dans des cycles d’EPS. Mais dans ces cas, ces rares travaux relatifs à la dynamique des

interactions entre élèves n’ont pas cherché à caractériser les processus de ces dynamiques. De

plus, l’ensemble de ces études se ressemblent sur leurs conditions d’étude : l’activité des

élèves était sous la supervision de l’enseignant d’EPS. Etudier les dynamiques des formes

d’interaction entre élèves dans des dispositifs différents en leçons d’EPS de course

d’orientation constitue donc « une situation privilégiée d’étude ». En effet, dans la mesure où

ces interactions sont pour partie non accessible à l’enseignant d’EPS, elles peuvent favoriser

l’émergence de dynamiques singulières.

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Notre étude s’intéresse dans un premier temps à caractériser les formes d’interaction

émergentes entre les élèves engagés dans différents dispositifs d’apprentissage en course

d’orientation. Dans un deuxième temps, il ambitionne de caractériser la dynamique de ces

formes d’interaction. Pour cela, des options méthodologiques ont été prises dans la

perspective d’en discuter leur potentiel heuristique.

Trois questions essentielles ont orienté notre travail :

Question 1 : Quelles sont les formes d’interaction entre élèves de 6ème regroupés en

dyades, dans des dispositifs différents en course d’orientation ?

A partir de l’analyse de l’activité dyadique d’élèves en course d’orientation, il s’agissait

d’identifier les formes typiques d’interaction au regard des travaux existants. Sur cette base,

nous souhaitons étudier les liens entre les caractéristiques des dispositifs d’apprentissage et

les formes d’interaction en course d’orientation afin d’identifier d’éventuels invariants et

éléments de spécificité.

Question n°2 : De quelle manière ces formes d’interaction se succèdent, se répètent

ou au contraire s’effacent sur la durée d’une course ?

Il s’agit de caractériser la dynamique de ces différentes formes d’interaction c’est-à-dire à

identifier des états, des changements d’états et des éléments participants à ces changements.

Pour ce faire, nous convoquons des outils méthodologiques étrangers à l’observatoire du CA.

Cet emprunt méthodologique nous conduira inévitablement à une réflexion épistémologique.

Question n°3 : Dans quelles mesures s’intéresser à la nature des formes d’interaction

ainsi qu'à leurs dynamiques peut-il être utile pour l’intervention en EPS ?

Cette étude poursuit également des préoccupations professionnelles en souhaitant participer à

la réflexion sur la conception et la régulation des leçons de course d’orientation en EPS.

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Partie 2. Cadre théorique et méthodologique

du Cours d’Action

« Si l’on ne se contente pas d’user de l’adjectif ‘scientifique’ comme argument de vente ou

d’autorité, cette question est encore aujourd’hui loin d’être triviale » (Theureau, 2004, p.5).

S’interroger sur le choix d’un cadre théorique et méthodologique dans la perspective

de recherches scientifiques suppose d’une part de le comprendre dans une cohérence et une

pertinence en lien avec un objet de recherche, et d’autre part de comprendre les éléments qui

lui confèrent un caractère scientifique, explicitant par là-même cette cohérence.

Ce caractère scientifique permet d’ailleurs de rendre viable dans la communauté

scientifique des résultats de recherche et de les discuter à des fins épistémiques et

transformatives (Schwartz, 1997) - l’enjeu épistémique contribuant à l’apport de

connaissances en EPS tandis que l’enjeu transformatif favorise la conception de dispositifs

d’apprentissage en EPS.

La présentation du cadre théorique et méthodologique du Cours d’Action se compose

de deux chapitres :

Le chapitre 1 est consacré aux options théoriques et méthodologiques du cadre du Cours

d’Action

Le chapitre 2 décrit la méthode de recueil des données

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CHAPITRE 1

Options théoriques et méthodologiques

Ce chapitre vise à justifier le choix du cadre théorique et méthodologique pour lequel

nous avons opté afin de conduire ce travail de thèse. Précisément, nous présenterons tout

d’abord les hypothèses princeps qui structurent la lisibilité épistémologique du cadre

théorique et méthodologique utilisé dans cette étude. Ensuite, nous présenterons et justifierons

l’objet théorique convoqué. Enfin, nous affirmerons notre positionnement au sein du cadre

théorique et méthodologique en abordant l’idée, qu’au-delà des justifications lui conférant le

caractère scientifique, le chercheur adhère à des croyances relatives aux hypothèses princeps

et s’investit dans une perspective « heuristique » et « de croissance » du Programme de

Recherche d’appartenance.

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Chapitre 1. Options théoriques et méthodologiques

Le choix du cadre théorique et méthodologique d’une part, et de ses objets théoriques

d’autre part, entraine celui de savoir lequel, parmi les multiples critères de comparaison à

d’autres cadres théoriques et méthodologiques ou à d’autres objets théoriques, doit être

préféré dans une situation où ces critères entrent en conflit. En d’autres termes, pourquoi

utiliser le cadre théorique et méthodologique du CA (Theureau, 2004, 2006, 2009) et non un

autre ? Dans une perspective « lakatosienne », cette question du choix du cadre théorique et

méthodologique utilisé par le chercheur doit être discutée à partir d’une pertinence avec

l’objet d’étude et de ses relations avec des cadres théoriques et méthodologiques qualifiés de

concurrents. Le cadre théorique et méthodologique du CA est un moyen d’analyse de

l’activité humaine. Toutefois, il n’est pas le seul. A titre d’exemple, l’éthologie humaine s’y

intéresse également en étudiant les comportements humains dans leur environnement

physique et social naturel comme peut le faire le cadre théorique et méthodologique du CA.

Autrement dit, comment les chercheurs utilisant ce cadre envisagent de comprendre l’activité

humaine ? Ainsi, il semble se dégager un premier élément fondant le caractère de scientificité

d’un cadre théorique et méthodologique s’intéressant à l’activité humaine : c’est la manière

d’analyser cette activité. La connaissance des hypothèses structurantes du « noyau dur »

relatives au cadre théorique et méthodologique est nécessaire (Lakatos, 1974) pour déterminer

sa spécificité. Celles-ci sont en effet des bases sur lesquelles doit se développer le travail de

recherche. Si le cadre théorique et méthodologique de l’éthologie humaine par exemple prend

forme à partir d’une analyse de l’activité humaine considérée comme planifiée et socialement

contrôlée, celui du CA se situe dans une vision de l’activité humaine qui est liée aux

composants de l’environnement humain et matériel dans lequel se déploie l’activité des

acteurs (Maturana & Varela 1994), et qui s’intéresse à l’expérience des acteurs en contexte :

dans les deux cas, l’activité humaine est liée à l’environnement mais pas de la même façon.

1. Les hypothèses structurantes du cadre théorique et méthodologique du

CA

Un cadre théorique et méthodologique est composé d’un noyau dur (Lakatos, 1974)

correspondant à des hypothèses fortes directrices accompagnées de notions théoriques et

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épistémologiques. Ces hypothèses permettent de justifier l’utilisation du cadre théorique et

méthodologique dans un travail de recherche car elles constituent « un argument d’autorité »

(Lakatos, 1974, p.133, cité par Chalmers, 1987) ; étant entendu que l’objectif d’un travail de

recherche est d’éprouver la validité de ces hypothèses théoriques qui sont d’ailleurs tenues

pour vraies tant que le contraire n’a pas été prouvé. Donc, choisir un cadre théorique et

méthodologique, c’est comprendre un de ses éléments de scientificité à savoir les hypothèses

constitutives de son noyau dur qui organisent la recherche.

1. 1 Une considération énactive de l’activité humaine individuelle

1.1.1 L’hypothèse de l’autopoïèse

L’approche énactive de l’activité humaine sur laquelle se fonde le cadre théorique et

méthodologique utilisé dans ce présent travail est emprunte de l’hypothèse de l’autopoïèse.

L’autopoïèse est issue, dans ses fondements, de recherches biologiques sur les systèmes

vivants (Maturana & Varela, 1994), et est entendue comme : « une organisation d’un réseau

de processus de production de composants qui (a) régénèrent continuellement par leurs

transformations et leurs interactions le réseau qui les a produit, et qui (b) constituent le

système en tant qu’unité concrète dans l’espace où il existe, en spécifiant le domaine

topologique [la structuration de cet espace] où il se réalise comme réseau » (Varela, 1989,

p.45). Ce concept renvoie donc à la dynamique d’auto-reproduction de structure en équilibre

instable : les systèmes vivants, quel que soit leur niveau de l’échelle pris en compte (e.g.,

cellules, être vivant), ont la particularité de produire leur propre organisation dans leurs

rapports avec l’environnement de façon à ce que cette organisation du système et son mode

propre entretiennent une relation de co-détermination (Varela, 1989). Ces relations

dynamiques d’un système vivant avec son environnement peuvent donc être comprises à

différentes échelles en ce sens que l’unité peut être aussi bien le système cellulaire, le système

nerveux ou l’être humain. Dans ledit système formé, chacune des unités autopoïétiques (e.g.,

un individu) et son environnement (e.g., d’autres individus, le milieu naturel et matériel dans

lequel il évolue) interagissent à chaque instant, ce qui est source de perturbations pour elles,

amenant une nouvelle organisation dans leurs rapports à l’environnement qui lui-même a

évolué de part les interactions. La dimension « autopoïétique humaine » renvoie donc à la

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capacité de l’être humain à faire face aux perturbations émergentes dans leurs interactions

avec son environnement par une organisation interne qui lui est propre. Dans notre recherche,

étudier les interactions entre les élèves en EPS doit donc s’envisager à plusieurs niveaux qui

sont indissociables : un premier qui conçoit l’élève comme l’unité autopoïétique dont

l’activité se co-construit dans ses relations avec l’environnement matériel et naturel présent

(la carte de course d’orientation, les chemins de la forêt, les dépressions) et l’environnement

humain (le pair de la dyade, l’enseignant d’EPS, et les autres élèves de la classe). Autrement

dit, lorsqu’un élève en course d’orientation est en activité de recherche de balise caractérisant

une situation à un instant donné, celle-ci peut se transformer lorsque ce dernier perçoit un

élément de la forêt lui indiquant qu’il se trompe de direction par exemple ; de la même façon,

à un deuxième niveau qui conçoit les interactions entre deux élèves comme unité

autopoïétique dont l’activité se co-construit également dans ses relations avec

l’environnement naturel et matériel, et l’environnement humain (l’enseignant d’EPS, les

autres élèves de la classe), les interactions au cours desquelles les élèves étaient en accord

pour le choix de l’itinéraire peuvent évoluer si l’un d’eux perçoit un élément de terrain faisant

« choc » pour lui (donc signifiant dans son monde propre et révélateur du premier niveau

précédent) amenant donc à une nouvelle organisation des interactions dyadiques (qui aura

également son monde propre) pourvu qu’il le partage avec son partenaire.

1.1.2 L’hypothèse énactive de l’activité individuelle

Le paradigme de l’énaction est en rupture avec les présupposés cognitivistes (e.g., le

monde est prédéfini, notre cognition de ce monde prédéfini s’accomplit à partir de la

représentation de ses propriétés, puis d’une action fondée sur cette représentation - l’activité

étant la conséquence d’un plan d’action déterminé par l’analyse de l’environnement effectuée

par l’individu). En transposant l’idée de l’autopoïèse sur l’activité humaine au sens

d’ « acteur », il existe un système autonome formé par un acteur et son environnement.

Considérer l’activité humaine comme énactive entraîne des hypothèses fortes sur l’activité

humaine qui est considérée comme (1) autonome, (2) vécue, (3) individuelle-sociale.

Premièrement, l’activité humaine est autonome : « on entend par autonomie, sa capacité

fondamentale à être, à affirmer son existence et à faire émerger un monde qui est signifiant et

pertinent tout en n’étant pas prédéfini à l’avance » (Bourgine & Varela, 1992, cité par

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Theureau, 2006, p.39). L’activité humaine ne s’inscrit donc pas dans un système où chacun de

ses composants (e.g., les acteurs, l’environnement matériel) seraient isolables, prédéterminés

et indépendants les uns des autres. A ce titre, l’activité de l’acteur est construite à tout instant

par lui comme une interaction avec la situation, caractérisant un couplage structurel (Varela,

1979). Ce couplage structurel est asymétrique dans la mesure où l’acteur interagit avec des

éléments qui lui apparaissent pertinents dans la situation (e.g, les autres acteurs, une partie de

l’environnement matériel ou une partie de l’objet matériel). Deux acteurs placés dans une

même situation interagissent avec des éléments de la situation qui pourraient apparaître

comme différents car indissociables du monde propre de chacun des acteurs. Cela caractérise

l’asymétrie d’un couplage structurel acteur(s)/situation(s). Autrement dit, cette hypothèse

reconnaît la possibilité pour chaque individu de faire émerger son propre monde qui lui est

signifiant. Dans le cadre de notre étude, chaque élève au sein de la dyade pouvait prendre en

compte, à un instant donné, des éléments différents sur la carte pour proposer un itinéraire

(e.g., traits noirs continus correspondant à des gros chemins vs traits noirs en pointillé

correspondant à des petits chemins pour construire l’itinéraire de déplacement). L’activité des

acteurs est alors « située dynamiquement » en ce sens qu’elle est indissociable de la situation

dans laquelle elle prend forme (Lave, 1988 ; Suchman, 1987) et ses acteurs participent à la

construction de cette situation. Autrement dit, le couplage entre l’acteur et la situation se

transforme en permanence au cours de l’activité, qui découle d’un effort d’adaptation à des

environnements (naturel et matériel) dont les propriétés sont changeantes, d’où l’intérêt de

travailler à rendre compte de façon la plus fine possible de cette dynamique. En effet, comme

ce couplage acteur(s)/situation(s) se transforme en permanence, il semble intéressant d’étudier

prioritairement sa dynamique de transformation et de rendre compte des éléments qui

participent à celle-ci. Dans le cadre de notre étude, cela signifie qu’une forme d’interaction

entre les élèves pouvait durer dans le temps mais aussi changer vers une autre forme

d’interaction selon des évènements comme la vue de la balise ou le sentiment d’être perdu

d’un des élèves.

Deuxièmement, cette activité est vécue, c'est-à-dire qu’elle donne lieu à chaque instant à une

expérience pour l’élève. Cette expérience renvoie à la notion de conscience pré-réflexive

(Sartre, 1943, cité par Theureau, 2006) héritée de la phénoménologie (Merleau-Ponty, 1945),

exprimant la capacité d’un acteur à décrire ce qu’il vit dans la situation, dans son monde

propre. Précisément, l’activité humaine est accompagnée d’un vécu qui peut être partiellement

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appréhendée de manière subjective par l’acteur. Cette appréhension par l’acteur correspond à

l’expérience qu’il a de ce qu’il a accomplit ou est en train d’accomplir. En d’autres termes,

cette hypothèse accorde « le primat de l’intrinsèque » dans l’étude de l’activité humaine mais

pas l’exclusivité, en ce sens que ce vécu est aussi renseigné par des données extrinsèques et

pertinentes pour l’acteur recueillies par le chercheur. Dans le cadre de notre étude, l’accès à

cette expérience vécue (grâce aux données d’enregistrement audio-visuel et de verbalisation)

nous a permis de renseigner le flux d’intentions et de significations des élèves engagés dans la

course d’orientation (ce qui attirait leur attention à un moment donné de la course lorsqu’ils

construisaient l’itinéraire, les éléments de l’environnement signifiants pendant la course)

moyennant des conditions particulières dans les entretiens d’autoconfrontation pour accéder à

« une description symbolique acceptable » (Varela, 1989, p.184) de ce que l’acteur a vécu

(issue de la dynamique du couplage structurel acteur/situation).

Troisièmement, l’activité humaine est individuelle-sociale, autrement dit indissolublement

individuelle et collective. L’activité d’un acteur intègre toujours celles des autres acteurs qui

participent ainsi à définir le champ de possibles pour l’acteur lui-même et constituer des

ressources pour sa propre activité (Saury et al., 2013). Dans le cadre de notre étude, cela

signifiait que les élèves n’agissaient jamais seul, même lorsqu’a priori ils agissaient en

solitaire (e.g., cas de l’élève qui mène son partenaire dans la conduite de l’itinéraire).

1. 2 Une considération énactive de l’activité humaine collective

Sur la base des hypothèses structurantes le noyau dur du cadre théorique et

méthodologique du CA pour l’activité individuelle, il est possible de les étendre à l’analyse

d’un collectif d’acteurs : à ce titre, les apports de Sartre ont influencé une analyse

compréhensive de l’aspect collectif de l’activité humaine dans l’œuvre de Theureau.

L’activité collective est envisagée comme « altérité-culture » et comme « altérité-

nature ». Ces notions ont été développées par Sartre (1960) et reprises par Theureau (2006).

Le concept d’ « altérité-culture » renvoie dans le collectif à l’émergence d’un sens partagé

construit par les activités individuelles le composant. La notion d’ « altérité-nature », quant à

lui, renvoie dans le collectif à l’émergence d’une situation matérielle et physique commune

sans pour autant que celui-ci en prenne conscience, ne partageant a priori aucune relation

directe du type « déjà-là » avec cette situation matérielle et physique.

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De plus, si la conscience pré-réflexive permet d’accéder au propre point de vue pourvu

qu’il soit signifiant pour l’acteur, elle ne peut faire l’impasse de la rencontre avec autrui :

C’est en ce sens que Theureau élargit la proposition en disant « qu’autrui appartient au

couplage structurel » (Theureau, 2006, p.92).

Un collectif, composé par deux ou plusieurs acteurs et composant de leurs relations,

est donc une « totalité » en permanence « dé-totalisée » par les activités de chacun, c’est-à-

dire les activités individuelles subséquentes au collectif (Theureau, 2006). Autrement dit,

l’activité collective est dynamisée par les activités des individus qui lui sont propres,

impliquant une structure d’organisation particulière et changeante au gré de ses activités.

En définitive, s’intéresser à un collectif d’individus, c’est s’intéresser aux activités

individuelles qui le construisent, le façonnent et le déconstruisent pour le refaçonner sans pour

autant négliger la forme construite ou refaçonnée qui, en retour, façonne, déconstruit,

reconstruit, refaçonne les activités individuelles. Cela renforce l’intérêt de l’étude de la

dynamique des interactions dyadiques des élèves en EPS issue de l’évolution de la prise en

compte du couplage « acteur-acteur/situation ».

L’hypothèse de l’énaction dans la perspective d’une étude sur l’aspect collectif

d’acteurs engagés dans une même situation est donc en rupture avec la notion de

l’individualisme méthodologique suivant lequel l’activité humaine se fonderait exclusivement

sur des caractéristiques individuelles des acteurs. L’hypothèse de l’énaction est aussi en

rupture avec le collectivisme méthodologique selon lequel l’activité humaine reposerait

exclusivement sur les caractéristiques des collectifs formés par les acteurs individuels. Cette

hypothèse de l’énaction propose davantage une réflexion autour du « situationnisme

méthodologique » (Theureau, 2006) : elle permet notamment l’étude du collectif en

considérant la nécessité de le comprendre comme fondé sur l’activité individuelle des acteurs

mais n’ayant de sens que dans le collectif qui influe sur ses activités individuelles. Autrement

dit, les interactions entre des acteurs doivent être étudiées à partir de l’articulation de leurs

significations propres dans leurs interactions, elles-mêmes participant à la signification de

chacun des acteurs interagissant. Dans le cadre de notre étude, la dynamique du monde propre

d’un élève est indissociable de la dynamique du monde propre de son partenaire, elles-mêmes

indissociables de la dynamique du monde propre de la dyade en interaction.

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1. 3 Synthèse intermédiaire

Au total, un des éléments de scientificité du cadre théorique et méthodologique du CA

est constitué d’hypothèses fortes sur lesquelles il développe des recherches : il s’agit de

considérer l’activité humaine comme autonome, vécue et individuelle-sociale, caractéristiques

empruntes à un fondement autopoïétique. C’est d’ailleurs en ce sens que ces hypothèses sont

pertinentes pour notre objet de recherche car nous souhaitons accéder à la dynamique des

interactions des élèves en EPS (en course d’orientation) et aux éléments qui participent à cette

dynamique.

Pour étudier ces hypothèses sur l’activité humaine, le recours à des objets théoriques

est nécessaire car ils correspondent à ce qui, dans l’utilisation du cadre théorique et

méthodologique, permet « la réduction pertinente d’un domaine de phénomène » étudié,

influencée par ces mêmes hypothèses (Theureau, 2006, p.48). Autrement dit, les objets

théoriques du cadre théorique et méthodologique du CA permettent la description de l’activité

humaine circonscrite à une caractérisation autonome, vécue et individuelle-sociale. Ainsi, un

autre élément de scientificité d’un cadre théorique et méthodologique s’articule autour de la

connaissance des objets théoriques qu’il construit.

2. L’objet théorique pour l’analyse de l’activité collective

Pour étudier la dynamique des interactions entre les élèves, nous avons mobilisé un

objet théorique qui permet d’appréhender l’activité humaine dans son aspect collectif. C’est-

à-dire l’activité humaine collective comme intégrant l’activité individuelle. Précisément, nous

avons convoqué l’Articulation collective des cours d’action individuels qui correspond

à : « l’articulation des domaines cognitifs potentiellement consensuels individuels de

différents acteurs » (Theureau, 2006, p. 94). Dès lors, mobiliser l’objet théorique Articulation

collective des cours d’action individuels intègre celui du Cours d’action.

L’objet théorique Cours d’action permet une description de l’activité humaine qui dépasse

celle qui ressort du cours d’expérience (le cours d’expérience est entendu comme : « La

construction du sens pour l’acteur de son activité au fur et à mesure de celle-ci, ou encore

l’histoire de la conscience pré-réflexive de l’acteur, ou encore l’histoire de ce qui est

‘montrable, racontable et commentable’ qui accompagne son activité à chaque instant »,

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Theureau, 2006, p.48) en sens qu’il permet une reconstruction de l’expérience vécue par

l’acteur (i.e. primat de l’intrinsèque) en relation avec un ensemble de caractéristiques jugées

par l’acteur comme pertinentes (les éléments de l’environnement, l’activité d’autres acteurs)

(i.e. contraintes extrinsèques). Il correspond donc à la partie de l’activité qui est « montrable,

racontable et commentable » pour un acteur (Theureau, 2006, p.46) associant les éléments de

son environnement significatifs pour lui à chaque instant. Ces éléments correspondent à une

double relation de contraintes extrinsèques (e.g., éléments remarquables dans la forêt) et

d’effets extrinsèques pertinentes pour l’acteur (e.g., sensations d’être perdu dans la forêt). Au

regard de l’objet théorique Cours d’action, celui de l’Articulation collective des cours

d’action individuels permet une reconstruction de l’expérience vécue par les acteurs dans une

situation a priori collective en relation avec un ensemble de caractéristiques extrinsèques

jugées par les acteurs comme pertinentes (e.g., les éléments de l’environnement, l’activité

d’autres acteurs). Des auteurs ont contribué à l’enrichissement de cet objet théorique en

précisant l’intérêt à identifier les histoires individuelles intégrant l’engagement de l’élève dans

une activité collective (i.e. identification dans l’expérience d’un acteur d’un « Nous » ou

« On » signifiant la prise en compte du collectif) (Evin, 2013) ou en précisant l’intérêt à

spécifier la direction de cette articulation (i.e. identification de la convergence ou divergence

des expériences des acteurs dans l’activité collective) (Veyrunes, 2010). Dans le cadre de

notre étude, cet objet théorique permet d’accéder à la dynamique des interactions des dyades

d’élèves telles qu’ils la vivent et aux éléments extrinsèques (e.g., les symboles sur la carte, la

vue d’éléments remarquables dans la forêt) qui sont significatifs pour eux et indissociables de

la compréhension de la situation d’interaction.

L’objet de notre recherche et les caractéristiques de la situation de course d’orientation nous

amènent à privilégier l’objet théorique de l’Articulation collective des Cours d’action

individuels pour l’étude de l’activité des élèves dans chaque dyade, étant entendu que dans

une analyse prenant en compte cet objet théorique, plus le nombre d’acteurs est important plus

faire fonctionner ces objets théoriques est complexe. Dans ce cas, il est possible de cibler

l’activité de plusieurs acteurs à l’instar des recherches menées par Veyrunes (2011) (i.e.

interactions enseignant/élèves en particulier). Dans notre étude, du fait que les élèves sont

répartis en dyade, ce degré de complexité est moindre que dans l’étude d’une classe.

L’utilisation de l’objet théorique Articulation collective des cours d’action individuels va

permettre d’accéder à l’expérience de l’élève (associée à un ensemble de caractéristiques

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jugées pertinentes de son propre point de vue) de manière indissociable de celle du partenaire

qui elle aussi est renseignée lorsqu’ils sont tous deux engagés ensemble dans les leçons de

course d’orientation.

Les objets théoriques permettent donc d’opérationnaliser les hypothèses du noyau dur

du cadre théorique et méthodologique et ainsi de former une structure conférant à la démarche

du chercheur un caractère scientifique. Pour rentrer dans cette démarche, cette connaissance

des hypothèses princeps et des objets théoriques n’est pas suffisante si elle n’est pas doublée

d’une compréhension plus large d’un autre élément scientifique : celui de l’engagement du

chercheur.

3. L’engagement du chercheur : ses croyances, son travail pour la capacité de

croissance et le pouvoir heuristique du cadre théorique et méthodologique du

CA

Dans une perspective « lakatosienne », la question du choix d’un cadre théorique et

méthodologique utilisé par le chercheur doit être discutée aussi à partir du travail accompli au

sein du cadre théorique et méthodologique de manière isolée (Lakatos, 1974).

3.1 Les croyances du chercheur

A l’instar de Feyerabend, le chercheur appréhende la science de manière subjective :

« Ce qui reste [après avoir exclu la possibilité de comparer logiquement des théories en

comparant des séries de conséquences qui s’en déduisent], ce sont les jugements esthétiques,

les jugements de goût, les préjugés métaphysiques, les désirs religieux, bref ce sont nos désirs

subjectifs » (Feyerabend, 1975). En d’autres termes, un chercheur adhère à des croyances et

dans notre cas à des croyances sur l’activité humaine qui divergent de la notion d’un monde

qui serait considéré comme un « déjà-là » tel qu’il est pensé dans les approches cognitivistes.

Elle rejoint à ce propos les hypothèses décrites précédemment sur l’activité humaine.

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3.2 La capacité de croissance

Autour du noyau dur du cadre théorique et méthodologique, gravitent des hypothèses

secondaires qui lui confèrent une ceinture protectrice (Lakatos, 1974). Ces hypothèses

peuvent être remises en cause et discutées. Dès lors, elles peuvent évoluer et contaminer

d’autres domaines de recherche qui inversement peuvent nourrir la ceinture protectrice du

cadre théorique et méthodologique : c’est, en partie, la capacité de croissance du cadre

théorique et méthodologique (Lakatos, 1974). Ainsi, un autre élément de scientificité dans le

choix du cadre théorique et méthodologique s’inscrit dans la compréhension du chercheur de

cette capacité de croissance et de son engagement à vouloir y contribuer.

Pour comprendre cette capacité de croissance, il s’agit de s’inscrire dans une perspective

historique de l’utilisation du cadre théorique et méthodologique du CA : des rencontres entre

des chercheurs issus de différents domaines (ergonomes, ingénieurs, psychologues) ont

favorisé des collaborations plus ou moins durables aboutissant à une fécondité de ce cadre : en

STAPS, ces rencontres ont permis dans un premier temps de rendre plus systématique et

rigoureux son utilisation amenant à des résultats de recherches fins dans le domaine du sport

(e.g., Arripe-Longueville, Saury, Fournier & Durand, 2001 ; Hauw, Berthelot & Durand, 2003

; Sève, 2000), dans le domaine de l’enseignement de l’EPS (e.g., Adé, 2005 ; Gal-Petitfaux,

2000). Dans un deuxième temps, le cadre théorique et méthodologique du CA s’est enrichi à

partir des travaux empiriques en STAPS qui contribué « à des hypothèses et notions

théoriques fondamentales » (Sève, Theureau, Saury & Haradji, 2012) comme l’étude de

l’activité collective sous ses aspects coopératifs (Poizat, Saury, Bourbosson & Sève, 2009)

d’une part, et des perfectionnements apportés par Theureau lui-même d’autre part (Veyrunes,

2011).

Notre étude a été menée en référence à l’objet théorique Articulation collective des cours

d’action individuels (Theureau, 2006) dans la mesure où une focalisation sur l’étude de la

dynamique des interactions dans les dyades nous semble susceptible d’établir une option

méthodologique dans le cadre théorique et méthodologique du CA permettant de contribuer à

des systématisations de représentations graphiques approchant non seulement les interactions

d’élèves à des moments différents (évolution, ordonnancement temporel), mais aussi leur

dynamique (évolution de la quantité de changements des interactions, évolution de la nature

des changements des interactions, évolution de la tendance d’apparition des interactions). En

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effet, il ressort que la communauté des chercheurs engagée dans le Programme de Recherche

du CA cherche à l’enrichir entre autres d’outils méthodologiques facilitant à la fois la

représentation et la compréhension de la dynamique de phénomènes complexes comme ceux

des interactions entre élèves (Saury et al., 2013).

3.3 Le pouvoir heuristique

Un autre critère de scientificité s’articule autour du pouvoir heuristique du cadre

théorique et méthodologique de la démarche entreprise par le chercheur (Lakatos, 1974).

Autrement dit, pour acquérir un caractère scientifique, l’utilisation du cadre théorique et

méthodologique doit permettre la production de nouvelles connaissances, l’émergence de

nouvelles questions au sein du programme de recherche d’appartenance, ou la reformulation

de questions anciennes.

Si l’éthologie humaine consiste en l’étude des comportements humains dans leur

environnement physique et social naturel, le chercheur peut décider de le faire autant auprès

de la tribu des Achumawi (tribu amérindienne) qu’auprès de la tribu des Zoulou (tribu

africaine) ; ce qui aura pour conséquences directes (après recueil et traitement des données) la

production de deux types de résultats différents, ou potentiellement de connaissances

scientifiques. Elles sont d’autant « plus scientifiques » qu’elles représentent des « propositions

falsifiables » (Popper, 1985). En d’autres mots, si les connaissances sont vraies chez les

Achumawi, rien ne dit au chercheur qu’avec la même démarche de recherche, elles le sont

dans la tribu des Zoulou : les propositions chez les Achumawi sont donc falsifiables. De

même, le cadre théorique et méthodologique du CA peut être utilisé aussi bien dans le secteur

de l’enseignement de l’EPS, soit dans le cadre de l’analyse de l’activité des enseignants (e.g.,

Adé, Veyrunes, & Poizat, 2009) soit dans le cadre de l’analyse de l’activité des élèves (e.g.,

Evin et al., 2013a) ou bien dans le secteur de l’industrie dans le cadre de l’analyse de l’activité

d’un ouvrier engagé dans une situation de travail (e.g., Theureau, 1974).

Dans le cadre de notre étude, cela signifie que les connaissances produites sur les interactions

entre les élèves de 6ème lorsqu’ils s’engagent dans l’activité physique et sportive de course

d’orientation sont falsifiables parce que rien ne garantit qu’elles soient vraies au niveau de

classes de Troisième ou dans d’autres activités physiques et sportives proposant des

« moments cachés » à l’enseignant d’EPS. Toutefois, nous devons replacer le pouvoir

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heuristique du cadre du CA dans une vision qui considère l’activité humaine est faite à la fois

d’éléments de généricité et spécificité : même si rien ne nous dit que les connaissances

construites par le chercheur soient vraies pour un autre niveau de classe ou dans une APSA

caractérisée par des moments cachés, il est possible de généraliser une partie de connaissances

tant que le contraire n’est pas prouvé.

4. Synthèse générale dans la construction de la démarche de recherche

fondée sur le cadre théorique et méthodologique du CA

La connaissance des différents éléments conférant le statut scientifique d’un cadre

théorique et méthodologique permet de le comprendre pour réaliser une démarche de

recherche. Précisément, dans le cadre théorique et méthodologique du CA, les hypothèses de

son noyau dur relatives à l’activité humaine (i.e. entendue comme autonome, vécue,

individuelle-sociale) sont « les garants » de la compréhension d’un phénomène lié à un objet

d’étude (i.e. la dynamique des formes d’interaction entre élèves en EPS) en ce sens qu’elles

influencent la définition d’objets théoriques pour appréhender ce phénomène de manière

systématique. Les objets théoriques deviennent alors des « garde-fous », c’est-à-dire qu’ils

permettent aux chercheurs de ne pas travailler avec des imprudences épistémologiques. A ce

titre, ces « garants » et ces « garde-fous » guident la démarche du chercheur dans le recueil et

dans le traitement des données.

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CHAPITRE 2

Méthode de recueil des données

Ce chapitre aborde les procédures de recueil des données. En premier lieu, nous

présenterons le terrain d’étude investi en pointant les conditions éthiques et contractuelles du

chercheur d’une part, et en décrivant les participants et les situations étudiées d’autre part. En

second lieu, nous aborderons les différentes étapes de recueil des données qui s’articulent

autour d’un recueil de données en première personne in situ chez les élèves puis d’un recueil

des verbalisations de ces mêmes élèves lors d’autoconfrontations.

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Chapitre 2. Méthode de recueil des données

Si nous venons de mettre en évidence les éléments scientifiques du cadre théorique et

méthodologique du CA, ils permettent de construire une démarche pour recueillir les données.

1. Observatoire

Cette recherche a été réalisée avec des élèves de deux classes de 6ème et leurs deux

enseignants d’EPS au cours de deux cycles d’enseignement distincts en course d’orientation

dans deux établissements scolaires différents.

1. 1 Contractualisation chercheur-institution-enseignants-élèves

Le travail d’enquête doit être en adéquation avec des principes éthiques que les

chercheurs doivent respecter. Cela permet de construire « une collaboration entre les

chercheurs et les participants afin que ces derniers s’engagent dans les études au côté des

chercheurs de manière active et en toute confiance » (Saury et al., 2013, p.35).

Premièrement, la rencontre avec les deux enseignants d’EPS volontaires a permis de présenter

les objectifs de l’étude et le protocole mis en place (e.g., niveau de classe souhaité, activité

physique et sportive choisie, matériels d’enregistrements audio-visuels présents dans la

leçon). Il a été convenu lors cette rencontre que la recherche correspondait à des situations

ordinaires d’enseignement de la course d’orientation et qu’elles ne prêtaient ni à un jugement

ni à une évaluation de la part du chercheur. A ce titre, il a été précisé que les leçons devaient

se dérouler telles qu’elles étaient prévues par les enseignants d’EPS.

Deuxièmement, la rencontre avec les chefs d’établissement a permis de situer les objectifs de

l’étude et le protocole mis en place en reprenant ce qui avait été présenté aux enseignants

d’EPS. Sur cette base, des autorisations ont été signées suivant lesquelles la présence du

chercheur était acceptée dans l’établissement pour mettre en place les protocoles auprès des

classes et des enseignants d’EPS collaborateurs à l’étude. Aussi, lors de cette rencontre, un

document à l’attention des parents d’élèves des classes concernées a été finalisé pour répondre

aux exigences du droit à l’image et à l’exploitation des données a posteriori (il a été

notamment spécifié aux parents que les séquences filmées s’inscrivaient dans un projet de

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recherche universitaire, qu’elles pourraient faire l’objet d’un support dans la formation des

futurs enseignants ou à des fins de présentation de travaux de recherche dans le cadre

d’articles ou de communications scientifiques). Il a été convenu lors de cette rencontre de

l’immersion du chercheur dans la classe (le chercheur n’avait pas autorité sur les élèves dans

le cadre de l’enseignement) et que le document devait être distribué à tous les élèves des

classes concernées.

Troisièmement, la rencontre avec les classes concernées a permis au chercheur de se présenter

(e.g., enseignant d’EPS qui fait de la recherche pour mieux comprendre comment les élèves

agissent dans les leçons), de présenter les objectifs de l’étude aux élèves (e.g., comprendre

comment ils fonctionnaient quand ils utilisaient la carte, quelles stratégies ils développaient

dans la forêt quand ils cherchaient les balises) et de distribuer aux élèves les autorisations à

l’attention de leurs parents. Il leur a été expliqué que les leçons seraient filmées par un

matériel spécifique (montré par le chercheur lors de la première prise de contact avec la

classe), qu’il y aurait des entretiens après les leçons avec des questions à partir des séquences

recueillies sur le terrain pour les élèves concernés nécessitant une autorisation parentale (i.e.

droit à l’image et à l’exploitation des données). Le chercheur a d’ailleurs insisté sur le fait que

les entretiens n’étaient pas des évaluations auprès des élèves pour ne pas dénaturer leur

manière d’être dans les leçons d’EPS. Enfin, le chercheur a expliqué aux élèves qu’ils

pouvaient à tout moment mettre un terme à leur participation dans la recherche (proposition

écrite sur le document d’autorisation à l’attention des parents d’élèves) et que ce qu’ils

raconteraient pendant les entretiens ne serait en aucun cas transmis à une autre personne

(enseignants, parents, chef d’établissement).

1. 2 Posture du chercheur

S’il est nécessaire de distinguer celui qui observe (le chercheur) de celui qui est

observé (les élèves), il ne faut pas non plus les dissocier. Cela rend compte de la complexité

de l’attitude à adopter en tant que chercheur s’immergeant dans un terrain d’étude.

Précisément, cette posture doit favoriser la transaction d’un regard croisé à un regard partagé,

« consistant dans une attitude de rupture avec une conception asymétrique de la science

fondée sur la captation d’informations par un observateur absolu qui surplomberait la réalité

étudiée, mais n’en ferait pas partie » (Laplantine, 2012, p.23). En prenant compte cette

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attitude de chercheur doublée de celle du professeur d’EPS, notre posture devait amener un

climat de confiance avec les enseignants d’EPS volontaires pour l’étude et avec les élèves

observés. Ce climat de confiance est essentiel si l’on souhaite une intégration du chercheur

dans l’intimité de la classe, malgré la présence d’appareillages d’enregistrements audio-

visuels (e.g., caméras et micros) et la présence d’entretiens d’autoconfrontation (e.g., les

élèves savaient qu’après leur activité, ils verraient ce qu’ils venaient de faire et auraient des

questions posées par le chercheur sur leur activité). L’immersion du chercheur dans l’intimité

de la classe a débuté dès les premières leçons pour habituer les élèves à sa présence

« extraordinaire » et permettre d’instaurer un climat de confiance avec tous les participants

collaborateurs (élèves comme enseignants). Cette présence depuis la première leçon contribue

notamment à instaurer une relation de confiance avec les élèves qui est nécessaire afin de

faciliter leur participation lors des autoconfrontations.

1. 3 Participants et situations étudiées

1.3.1 Participants

Cette étude a été menée en collaboration avec deux classes de 6ème (élèves âgés de

douze ans) dans l’activité course d’orientation dans lesquelles 12 élèves étaient volontaires et

disponibles pour des entretiens d’autoconfrontation ayant lieu au maximum dans les deux

jours après la leçon étudiée. Ces deux classes s’inscrivaient dans deux établissements

scolaires ordinaires : les enseignants d’EPS estimaient qu’elles étaient sans problème

particulier, actives et dynamiques au cours des leçons.

Les prénoms de tous les élèves ont été remplacés pour préserver leur anonymat : Marie et

Mélanie (dyade 1), Camille et Sophie (dyade 2), Cédric et Antoine (dyade 3), Lola et Lucie

(dyade 4), Adrien et John (dyade 5) et Régis et David (dyade 6).

Les recueils de données ont été réalisés à la 5ème leçon dans la première classe et aux leçons 5,

6, 7 et 8 pour l’autre dans des cycles d’enseignement en comptant 9. A l’issue du cycle,

l’ensemble des élèves devait acquérir le niveau 1 de compétence des programmes

EPS (« choisir et conduire un déplacement pour trouver des balises, à l’aide d’une carte en

utilisant essentiellement des lignes directrices simples dans un milieu nettement circonscrit.

Gérer l’alternance des efforts. Respecter les règles les règles de sécurité et l’environnement »,

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Compétence de niveau 1, Course d’Orientation, 26/08/08). La 4ème leçon a fait l’objet d’une

évaluation permettant de valider chez les élèves un niveau d’acquisition : précisément, ils (a)

avaient pris l’habitude de travailler sous forme dyadique depuis la première leçon, (b) étaient

capables de se situer sur le terrain à l’aide d’une carte (reconnaissance des différents éléments

dessinés sur la carte et leur correspondance sur le terrain), (c) de choisir un itinéraire pour se

rendre aux balises à partir des grandes lignes directrices et (d) de revenir au point de

ralliement dans la limite de temps imposée par l’exercice. Aussi, nous pensons que par ces

acquisitions, tous les élèves étaient en mesure d’établir des projets de déplacement vers les

balises et de les justifier (e.g., le plus court, le plus sûr). En étudiant l’activité des élèves lors

d’une leçon précise, l’articulation collective des cours d’action individuels de chaque dyade

traduisait à la fois l’expérience vécue par les élèves au cours de cette leçon, mais aussi les

expériences passées des leçons précédentes qui participaient à structurer leurs activités dans

cette leçon.

Le cadre théorique et méthodologique du CA prenant pour parti d’aller étudier des situations

de classe sans dénaturer l’activité ordinaire des acteurs, le choix du dispositif et le choix des

formes de travail était celui choisi par les enseignants d’EPS lors de leur préparation de leçon.

A ce titre, la forme de groupement des élèves retenue par les enseignants était la forme

dyadique. Ils la justifiaient entre autre pour rassurer les élèves engagés dans une première

expérience de course d’orientation en forêt du fait du caractère anxiogène (i.e. premier cycle

d’enseignement).

1.3.2 Les dispositifs d’apprentissage

Les deux enseignants avaient pour habitude de programmer cette activité sportive à

tous les niveaux de classes. Les parcours dans lesquels étaient engagées les six dyades

d’élèves étaient similaires du point de vue du niveau de difficulté (défini en accord avec les

attentes curriculaires) et de la durée estimée pour retrouver l’ensemble des balises (entre 30 et

40 minutes pour des parcours comprenant 3 à 4 balises). Dans les deux classes, les

enseignants d’EPS visaient à faire se déplacer les élèves sur des lignes directrices simples de

« niveau 1 » (chemins facilement identifiables comme les chemins carrossables ou les

sentiers) pour rejoindre des balises placées à côté de points remarquables (e.g., croisement de

chemins, souche d’arbre, banc) sans prendre en compte les caractéristiques de la végétation.

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Les cartes retenues par les enseignants précisaient donc pour les deux classes prioritairement

des éléments très facilement identifiables par les élèves. Les cartes à l’échelle de 1/5000ème

dans un format A4 (21cm x 29,7cm), représentaient une forêt traversée par des chemins

carrossables ou sentiers et des aires de pique-niques aménagées de tables et de bancs. Ces

cartes étaient des photocopies en noir et blanc (la végétation n’étant pas une option retenue

par les enseignants) sur lesquelles les enseignants avaient dessiné en rouge des cercles

correspondant à l’emplacement des balises et un triangle cerclé représentant le point de

ralliement confondu au point de départ (Figure 8).

Figure 8 : Exemple de carte utilisée par la dyade 1 (Marie/Mélanie)

Par sécurité, chaque enseignant a systématiquement rappelé, avant le départ, les limites

spatiales (lignes d’arrêt c’est-à-dire des chemins remarquables dans la forêt ; sur la Figure 8,

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elles correspondaient aux traits verts) et temporelles (soit 30 ou 40 minutes selon le cas même

si les balises n’étaient pas toutes trouvées) à ne pas dépasser. Les enseignants d’EPS ont

utilisé lors de ces différentes leçons des dispositifs d’apprentissage variés qui sont

successivement présentés ci-après (Tableau 1).

Caractéristiques

Dispositif

sans

chambre

Dispositif

chambre

Dispositif

2 cartes

Dispositif

Leurre

Chambre Non Oui Non Non

Carte 1 pour 2 1 pour 2 1 chacun 1 pour 2

Balises-leurres Non Non Non Oui

Nombre de balises

/ Temps 4/40mn 3/30mn 4/40mn 4/40mn

Tableau 1 : Récapitulatif des dispositifs d’apprentissage des leçons de course d’orientation

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1.3.2.1 Dispositif sans chambre

Le dispositif sans chambre amenait les deux élèves de la dyade à chercher quatre

balises dans la forêt en moins de 40 minutes (Figure 9). L’enseignant leur avait distribué de

manière aléatoire une carte pour deux sur laquelle était indiqué l’emplacement des quatre

balises. Ce dispositif concernait les élèves de la dyade 1 et 2 (classe 2) et avait eu lieu pendant

la 5ème leçon du cycle de course d’orientation.

Figure 9 : Exemple de carte distribuée pour la dyade 2 (Camille/Sophie) dans le dispositif

sans chambre

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1.3.2.2 Dispositif chambre

Le dispositif chambre se caractérisait par la présence d’une chambre d’appel (espace

aménagé permettant la mise à l’écart des élèves dans le but d’encourager la construction en

temps contraint d’une stratégie de course) : avant de débuter leur course, les élèves avaient

donc un passage d’une minute dans cette chambre d’appel, pour ensemble découvrir la carte

et construire un itinéraire de course. L’enseignant leur avait distribué une carte pour deux sur

laquelle étaient indiquées trois balises à trouver en moins de 30 minutes (Figure 10). Ce

dispositif concernait les élèves de la dyade 3 et 4 (classe 1) et avait eu lieu pendant la 6ème

leçon du cycle de course d’orientation.

Figure 10 : Exemple de carte distribuée pour la dyade 3 (Cédric/Antoine) dans le dispositif

chambre

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1.3.2.3 Dispositif 2 cartes

Le dispositif 2 cartes se caractérisait par la distribution d’une carte pour chaque élève

dans la dyade. Sur chaque carte étaient positionnées deux balises différentes (cette distribution

visait 1) à encourager un rapprochement ponctuel des deux cartes invitant les deux élèves à

discuter ensemble de l’itinéraire et 2) à donner une responsabilité de deux conduites

d’itinéraire à chaque élève) (Figure 11). Les élèves devaient rechercher les quatre balises en

moins de 40 minutes, sans passage en chambre d’appel. Ce dispositif concernait les élèves de

la dyade 1, 2 et 5 (classe 2) et avait eu lieu pendant la 7ème leçon du cycle de course

d’orientation.

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Figure 11 : Exemple de cartes distribuées pour la dyade 5 (Adrien/John) dans le dispositif 2

cartes

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1.3.2.4 Dispositif leurre

Le dispositif leurre se caractérisait par la présence de balises-leurres : à proximité de

chaque balise, l’enseignant en avait placé deux fausses pour vérifier la capacité des élèves à

décoder les éléments remarquables et faire le bon choix de balise. L’enseignant leur avait

distribué une carte pour deux sur laquelle était indiqué l’emplacement des quatre balises à

trouver en moins de 40 minutes. Les élèves n’avaient pas de passage en chambre d’appel

(Figure 12). Ce dispositif concernait les élèves de la dyade 2 et 6 (classe 2) et avait eu lieu

pendant la 8ème leçon.

Figure 12 : Exemple de carte distribuée pour la dyade 6 (Régis/David) dans le dispositif

leurre

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2. Enregistrements des données

Deux catégories de données ont été recueillies : (a) des données d’enregistrement

audio-visuel pendant l’activité de recherche des balises par les élèves, et (b) des données de

verbalisation lors d’entretiens d’autoconfrontation avec les élèves.

2.1 Enregistrements des données in situ

Pour obtenir une trace continue de l’activité des élèves et avoir accès à la dynamique

de cette activité, l’utilisation de matériels technologiques permettant des enregistrements

audio-visuels du point de vue des élèves (i.e. en première personne) en temps réel a été

privilégiée. En effet, les données d’enregistrements audio-visuels relatives à l’activité des

élèves en situation de course d’orientation ont été recueillies grâce à une caméra miniature

HD et un micro intégré sur une paire de lunettes portée par les élèves (Figure 13). Pour deux

dyades (dyade 3 et 4), ces données ont été recueillies par le biais d’une caméra « paluche »,

fixée sur un casque de cycliste (la caméra était inclinée de telle façon à voir ce que montraient

les élèves sur la carte et regardaient pendant leur course) pour des raisons de disponibilité

matérielle et de celle des élèves (Figure 14). Dans les deux cas (avec lunettes et caméra), cela

permettait d’avoir accès à une vue d’ensemble de la situation prenant en compte

l’environnement et le partenaire de la dyade, mais aussi ce qui était regardé (sans être certain

qu’ils soient effectivement perçus et pris en compte par l’élève), pointé du doigt par les élèves

sur la carte ou montré de la main sur le terrain pendant leur course (Figure 13). Les micros

permettaient d’enregistrer les communications verbales au sein de la dyade. Ces données ont

représenté environ 300 minutes d’enregistrement audiovisuel sur l’activité des élèves en

situation de course d’orientation.

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Caméra lunette

Vue en première personne

Figure 13 : Illustration des données d’enregistrements audio-visuels avec une paire de

lunettes-caméra

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Caméra type « paluche »

Vue en première personne

Figure 14 : Illustration des données d’enregistrements audio-visuels avec une caméra type

« paluche »

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Au total, 9 situations de course d’orientation ont été filmées (Tableau 2).

Dispositif Dyades Durée

d’enregistrement Dispositif de recueil

Dispositif sans chambre 1 34mn25s Paire de lunettes

2 31mn38s Paire de lunettes

Dispositif avec chambre

3 23mn23 Caméra « paluche » pour

un élève

4 34mn26s Caméra « paluche » pour

un élève

Dispositif 2 cartes

1 44mn16s Paire de lunettes

2 29mn59s Paire de lunettes

5 39mn29s Paire de lunettes

Dispositif leurre 2 37mn56s Paire de lunettes

6 27mn10s Paire de lunettes

Tableau 2 : Récapitulatif des durées des données d’enregistrements in situ

2.2 Données de verbalisations

Les données de verbalisation ont été recueillies au cours d’entretiens

d’autoconfrontation selon la disponibilité des élèves. Ces entretiens ont été menés

individuellement avec un élève de la dyade en présence de la carte et ont été filmés à l’aide

d’une caméra positionnée derrière lui en plan large et fixe (Figure 15). Ces entretiens ont

respecté une proximité temporelle facilitant le rappel de l’activité chez l’élève et se sont

déroulés au maximum dans les deux jours qui ont suivi la leçon filmée. Cette opération a

permis d’adapter le moment des entretiens à la disponibilité des élèves durant leur temps

scolaire. Ils consistaient à placer chaque élève devant l’enregistrement de son activité passée

et à partir d’un questionnement et de relances initiés par le chercheur, à l’inviter à décrire ce

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qu’il avait vécu, fait, ressenti au fur et à mesure du déroulement de l’enregistrement de son

activité.

Figure 15 : Illustration du dispositif lors des entretiens d’autoconfrontation

Ces questionnements et relances étaient adaptés à l’attention des élèves afin de faciliter la

mise en récit de leur activité. Le chercheur s’efforçait à ce titre de conforter le climat de

confiance qu’il avait construit depuis la première leçon en leur précisant de nouveau qu’il

voulait comprendre, pour son travail, ce qu’ils faisaient pour réaliser l’exercice en course

d’orientation, de raconter ce qu’ils faisaient, regardaient ou ressentaient pendant la course. Le

chercheur leur a rappelé également qu’ils n’étaient pas évalués et qu’ils pouvaient à tout

moment arrêter la vidéo pour la commenter. Ces précautions méthodologiques avait pour but

de maintenir les élèves en contact avec la situation analysée et de les placer dans une posture

et un état mental favorables à l’explicitation de leurs sensations (e.g, « Comment te sens-tu à

ce moment ? »), leurs focalisations (e.g., « Là, à quoi fais-tu attention quand ton partenaire et

toi regardent la carte ? »), leurs préoccupations (e.g., « Qu’est-ce que tu cherches à faire là

Dispositif d’autoconfrontation

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? »), et leurs pensées et interprétations (e.g., « A quoi penses-tu à ce moment-là ? »). Il

s’agissait pour le chercheur de questionner et de relancer l’acteur avec la volonté de graviter

autour de la « conscience préréflexive de l’acteur » (Theureau, 2004), c’est-à-dire autour de la

partie de son activité qui lui est possible « de montrer, de raconter, de commenter » et

aboutissant à une « description symbolique acceptable » de son activité (Varela, 1989, p.184).

Effectivement, mener des autoconfrontations avec des jeunes collégiens (élèves âgés de 12

ans) nécessite d’adapter cette procédure contraignante pour principalement une raison : les

élèves ne délivrent pas nécessairement leurs pensée secrète (Veyrunes, 2011) surtout dans

l’activité course d’orientation où leurs interactions sont cachées à l’enseignant d’EPS (i.e. les

élèves de 6ème ne se confient pas facilement pour expliquer au chercheur « qu’il préférait

suivre le partenaire »). Les entretiens d’autoconfrontation à partir des traces de l’activité des

élèves ont duré en moyenne 30 minutes. L’ensemble des autoconfrontations a représenté un

peu moins de 440mn d’enregistrements. Au total, 16 entretiens ont été menés (Tableau 3).

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Dispositif Dyades Elève(s)

présent(s) Durée d’enregistrement

Dispositif sans chambre

1 Marie 30mn20s

Mélanie 24mn14s

2 Sophie 39mn00s

Camille 25mn14s

Dispositif avec chambre 3

Antoine 19mn50s

Cédric 17mn40s

4 Lucie 31mn30s

Dispositif 2 cartes

1 Marie 33mn45s

Mélanie 26mn46s

2 Sophie 27mn45s

Camille 28mn50s

5 John 25mn44s

Dispositif leurre

2

Sophie 28mn50s

Camille 22mn17s

6 Régis 36mn35s

David 20mn44s

Tableau 3 : Synthèse des durées des données issues des entretiens d’autoconfrontation

2.3 Réflexions

Si les données sont à l’interface entre la raison de l’acteur qui agit et la raison du

chercheur qui analyse l’activité de cet acteur, il existe des principes qui orientent la méthode

de recueil de données. Précisément, il s’agit pour le chercheur, utilisant le cadre théorique et

méthodologique du CA, de contribuer à une participation réglée (Theureau, 2004) de l’acteur

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au processus de connaissance de son propre comportement en posant des questions-types et en

effectuant des relances-types adaptées à l’acteur sur son activité.

« L’expérience de l’altérité (et l’élaboration de cette expérience) nous engage à voir ce

que nous n’aurions pas pu imaginer, tant notre attention a du mal à se fixer sur tout ce qui

nous est tellement habituel que nous finissons par estimer que ’cela va de soi’ » (Laplantine,

2012, p .13). Cette citation suggère la nécessité d’un effort méthodologique particulier lors

des moments d’entretiens d’autoconfrontation avec les élèves. Notre regard de professionnel

ne devait pas nuire au déroulement de l’entretien notamment dans la mise en mots par les

élèves de leur activité. C’est pourquoi, une dérive d’observation nous semble pertinente en ce

sens que cela engage le chercheur dans une logique d’attentions flottantes « qui ne consiste

pas seulement à être attentif, mais aussi et surtout à être inattentif, à se laisser approcher par

l’inattendu et l’imprévu » (Affergan, 1987, p.143). En d’autres termes, pour éviter une

observation que le chercheur considère comme un allant de soi, un regard naïf semble

permettre de capter des données au plus près l’activité de l’élève

3. Conclusion

Le chercheur utilise donc des méthodes dans le recueil des données obéissant à des

règles précises dictées par le cadre théorique et méthodologique utilisé. Le chercheur peut

avoir accès à des données aboutissant potentiellement à des connaissances scientifiques.

Toutefois, le moment de recueil des données ne suffit pas pour donner le statut scientifique à

des connaissances (et donc au cadre théorique et méthodologique) puisque celles-ci, à cette

étape de la démarche scientifique, n’existent pas encore. Elles émergent a posteriori après le

traitement des données.

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Avant-propos méthodologique

La méthodologie de traitement des données s’est organisée autour de deux étapes

majeures :

1) une première étape qualitative a consisté à traiter les données recueillies suivant une

reconstruction de l’articulation collective des cours d’action individuels des deux élèves dans

chaque dyade pour caractériser les formes d’interaction entre les élèves lorsqu’ils

s’engageaient dans des dispositifs d’apprentissage en Course d’Orientation.

2) une deuxième étape quantitative a consisté à traiter, à partir des résultats issus de la

première étape, les mêmes données suivant un outil méthodologique permettant des

représentations graphiques de la dynamique des formes d’interaction de chaque dyade

d’élèves dans les différents dispositifs d’apprentissage.

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Partie 3. Analyse qualitative

Cette analyse visait à caractériser les formes d’interaction émergentes entre les élèves

sur la base de la reconstruction des cours d’action de chaque élève et de leur articulation

collective dans chaque dyade et des modes d’utilisation dyadique de la carte.

Cette analyse qualitative est organisée de trois chapitres :

Le chapitre 1 présente la première étape qualitative de traitement des données

Le chapitre 2 décrit les résultats issus de cette analyse qualitative

Le chapitre 3 discute des résultats obtenus

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CHAPITRE 1

Méthode de traitement de données

Ce chapitre présente les deux moments de la construction et du traitement des données

concernant l’approche qualitative. Dans un premier temps, il s’agira d’expliciter la

construction des cours d’action des élèves pour dans un second temps expliquer celle de

l’articulation collective des cours d’action des deux élèves dans chaque dyade.

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Chapitre 1. Méthode de traitement des données

Cette analyse visait à caractériser les formes d’interaction entre les élèves sur la base

de la reconstruction des cours d’action de chaque élève et de leur articulation collective pour

chaque dyade.

L’utilisation des objets théoriques Cours d’action et Articulation collective des cours

d’action individuels mobilisent le modèle sémio-logique (Theureau, 2006). Celui-ci est

organisé par une logique de six composantes, descriptives mutuellement dépendantes les unes

des autres renseignant à un grain fin une facette différente de l’activité de ou des acteurs

étudiés (i.e. analyse locale des unités d’activité significative) (Theureau, 2006). Ces six

composantes sont : l’Unité Elémentaire (UE), le Representamen (R), l’Engagement (E),

l’Actualité Potentielle (A), le Référentiel (S) et l’Interprétant (I).

1. Reconstruction des cours d’action

Le cours d’action permet une reconstruction de l’expérience vécue par l’acteur en

relation avec un ensemble de caractéristiques jugées par l’acteur comme significatives et

pertinentes (e.g., le comportement du partenaire ou les caractéristiques sur la carte)

correspondant à la part de l’activité qui est « montrable, racontable et commentable à chaque

instant » pour cet acteur (Theureau, 2006, p.46).

La reconstruction d’un cours d’action a consisté pour chaque élève à identifier l’enchaînement

des Unités Significatives Elémentaires (USE) pour lui au cours d’une période d’activité (la

durée de la course d’orientation), ainsi que les composantes pour chacune d’elles (Theureau,

2004, 2006). Les quatre composantes qui ont été considérées dans le cadre de ce travail de

recherche sont l’UE, le R, le E et le A. Cette identification a été réalisée à partir de l’analyse

simultanée des enregistrements audio-visuels de l’activité in situ des acteurs et de leurs

verbalisations lors des entretiens d’autoconfrontation (Tableau 4).

La première composante d’une USE est la fraction de l’activité (une action pratique, une

communication, une émotion, une interprétation) commentée par l’acteur. Elle constitue une

adaptation de l’acteur au Representamen (R). Par convention cette composante est nommée

Unité Elémentaire (UE) du cours d’action. Elle a été identifiée par un questionnement du

type : « Quand ton partenaire te dit que la balise n’est pas loin, que fais-tu ? Que ressens-tu

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quand tu aperçois la balise ? ». Renseigner les unités élémentaires nous a permis de rendre

compte de l’enchaînement des actions, des pensées, des émotions… de chacun des élèves

(e.g., pointe sur la carte un élément, pense que le chemin se trouve à droite, se sent perdu).

La deuxième composante correspond à ce qui, à un instant donné, est pris en compte par

l’acteur et qui fait agir, réagir, s’adapter l’acteur dans la situation à travers ses UE. Par

convention cette composante est nommée Representamen (R) du cours d’action. Elle a été

identifiée par un questionnement du type : « Que regardes-tu sur la carte à ce moment-là ? A

quoi fais-tu attention quand tu es arrêté avec ton camarade ? ». Renseigner les representamen

nous a permis d’identifier les éléments de la situation faisant signe pour les élèves (e.g., les

différents traits noirs sur la carte, le croisement des chemins, la question de son partenaire).

La troisième composante correspond aux intérêts de l’acteur au regard de ce qui fait signe

pour lui, c’est-à-dire le R. Par convention cette composante est nommée engagement (E) du

cours d’action. Elle a été identifiée par un questionnement du type : « Quelles sont tes

préoccupations quand tu regardes la carte ? Que cherches-tu à faire quand ton partenaire et toi

n’êtes pas d’accord sur le chemin à suivre ? ». Il prend en compte le caractère sélectif de la

perception d’un acteur dans une situation qui l’inclut dans une dynamique de construction de

son monde propre à partir de son R. Renseigner les engagements nous a permis de rendre

compte des préoccupations des élèves et de leurs évolutions au cours de la course (e.g.,

informer son partenaire du chemin à prendre, suivre son partenaire).

La quatrième composante correspond aux attentes possibles de l’acteur au regard de ses

Engagements (E). Par convention cette composante est nommée Actualité Potentielle (A) du

cours d’action. Elle a été identifiée par un questionnement du type : « A quoi t’attends-tu

quand tu vois ton partenaire accélérer ? quand tu lèves la tête à ce moment-là ? ». Renseigner

les actualités potentielles nous a permis de rendre compte des anticipations des élèves dans la

situation et leurs évolutions au cours de la course (e.g., se rapprocher de la balise, trouver la

balise, se rendre au point de ralliement).

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109

Antoine

Activité de la dyade 3 (Cédric/Antoine) : Juste après avoir poinçonné la deuxième balise,

l’élève porteur de la carte (Antoine) s’arrête pour construire un itinéraire. Son partenaire le

rejoint. Les deux élèves regardent la carte et discutent au sujet de leur itinéraire de course en

traçant sur la carte les chemins à prendre.

Extraits de verbalisations des données

d’enregistrement audio-visuel

Antoine : « On continue sur le chemin qu’on a

pris [trace sur la carte avec son doigt le chemin

à suivre]. Donc, on retourne sur le chemin

qu’on a pris [montre du bras le chemin que son

partenaire et lui viennent de quitter]. On

continue tout droit et après c’est le premier

chemin qui va vers la gauche ».

Extraits d’autoconfrontation

Chercheur : « Vous êtes passés par où

entre la balise A2 (deuxième balise) et la

balise A3 (troisième balise) ? ».

Antoine : « Au début on a continué tout

droit [montre sur la carte le chemin] et

après on avait vu qu’il fallait prendre à

gauche. Au début, on avait vu un chemin

qui était petit donc on pensait que c’était

ça mais quand on a continué tout droit on

a vu le gros chemin sur la gauche ».

N° USE Temps UE R E A

50 2’55’’ Regarde la carte

Le tracé

proposé par son

partenaire

Suivre des yeux

l’itinéraire

proposé par son

partenaire

Construire

l’itinéraire de

course

51 2’58’’ Pointe sur la

carte un endroit

L’itinéraire

proposé par son

partenaire

Signifier son

accord à son

partenaire

Construire

l’itinéraire de

course

52 3’00’’

Trace sur la

carte avec son

doigt un

itinéraire

Le chemin

menant à la

deuxième balise

sur la carte

Proposer à son

partenaire un

itinéraire

Construire

l’itinéraire de

course

Tableau 4 : Extrait du Cours d’Action d’Antoine (Dyade 3)

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110

Réflexions sur le renseignement des composantes du cours d’action en course

d’orientation

L’écriture descriptive s’efforce de rendre compte de la totalité de ce que le chercheur

voit. Cette description a pour exigence la saturation, le rangement et la classification : elle

consiste en un certain mode de découpage de la reconstruction du réel.

L’écriture descriptive s’efforce de montrer la solidarité spatiale et temporelle des éléments

perçus par le chercheur. Elle s’organise spatialement. En course d’orientation, il s’agit pour le

chercheur d’être au plus près de l’activité de navigation des acteurs en décrivant les directions

des trajets des élèves (e.g., « tourne à gauche », « marche en direction du chemin de droite »)

et les positions des élèves (e.g., « marche derrière son partenaire », « court devant »).

Renseigner les composantes du cours d’action d’un élève, c’est donc instaurer des relations

entre les éléments selon une contiguïté spatiale. Dans le cadre de l’étude, le chercheur devait

être en mesure par cette description littérale du cours d’action de suivre l’itinéraire réalisé par

l’acteur sur la carte de course d’orientation utilisée (le chercheur accède à l’activité des élèves

en première personne).

Cette description s’organise aussi temporellement. En course d’orientation, il s’agit pour le

chercheur d’être au plus près de l’activité vécue de l’élève en décrivant les souvenirs des

élèves (e.g., « se souvient que le chemin se situe à côté d’un banc ») et leurs anticipations

(e.g., « il faut prendre après le chemin de droite »). Dans le cadre de la course d’orientation, le

chercheur devait être en mesure de rendre compte des faits antérieurs mais aussi de ce que

pourrait se passer après du point de vue de l’acteur. Renseigner les composantes du cours

d’action d’un élève, c’est donc instaurer des relations entre des éléments selon une contiguïté

temporelle.

L’écriture descriptive s’efforce aussi de montrer la complexité de la gestuelle liée à l’activité

de l’acteur accentuant cette description spatiale et temporelle. A titre d’exemple, il n’est pas

rare dans les enregistrements audio-visuels in situ de renseigner une communication indiquant

la direction à suivre (e.g., « il faut aller tout droit » / dimension spatiale) accompagnée dans le

même temps d’une gestuelle de l’élève du type « montre une direction avec son bras ». Dans

cette même logique, il est possible de renseigner une gestuelle du type « montre une direction

avec son bras » accompagnée dans le même temps d’une autre du type « trace avec le doigt

sur la carte l’itinéraire à suivre ». Renseigner les composantes du cours d’action d’un élève,

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111

c’est par conséquent instaurer des relations entre des actions selon une contiguïté proche liée à

la gestuelle de l’élève.

Enfin, l’écriture descriptive s’efforce de montrer la complexité de la communication des

acteurs liée aux dimensions spatiales, temporelles et gestuelles. A titre d’illustration, un acteur

peut annoncer une direction à suivre et indiquer un repère temporel (e.g., « il faut tourner à

gauche après avoir dépassé la cabane ») dans le même temps où il montre une direction à

suivre avec sa main. Renseigner les composantes du cours d’action d’un élève, c’est donc

instaurer des relations entre des éléments selon une contiguïté croisée communicationnelle,

gestuelle, spatiale et temporelle. Il n’est pas question dans la mise en mots de la

reconstruction du cours d’action de prioriser tel ou tel type de relations avec les éléments

décrits car ils sont indissociables, mais bien de réfléchir sur un découpage systématique de ces

relations afin d’être au plus près de la description de l’activité de l’acteur lorsqu’il s’engage

dans une situation de course d’orientation pour ne pas en laisser de côté.

Ainsi, dans chaque reconstruction du cours d’action des élèves, et pourvu que le

chercheur soit en mesure de le(s) renseigner, la démarche consiste à décrire l’activité de

l’élève suivant la contiguïté spatiale, temporelle, communicationnelle, et gestuelle inhérente à

l’activité de la course d’orientation.

2. La reconstruction de l’articulation collective des cours d’action individuels

des deux élèves de chaque dyade

L’articulation collective des cours d’action individuels des deux élèves (pour une

illustration, voir Annexe) permet une analyse des processus de construction d’une activité

collective dans la dyade. La conception de l’activité collective dans le cadre théorique et

méthodologique du CA repose sur l’idée qu’un collectif ne constitue pas une totalité donnée

et préconstituée, mais qu’il est en permanence construit, transformé et reconstruit par les

activités individuelles. L’activité collective est une « totalité organisée dont l’organisation est

constamment remise en cause par les activités individuelles et constamment reconstruite par

ces mêmes activités individuelles » (Theureau, 2006, p. 96).

La reconstruction de l’articulation collective des cours d’action des élèves pour chaque dyade

a consisté d’abord à synchroniser temporellement les cours d’action des deux élèves de la

dyade, puis à caractériser la manière dont les deux cours d’action s’articulaient.

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2.1 Synchronisation temporelle des cours d’action individuels

La synchronisation temporelle des cours d’action des élèves a consisté à présenter

dans un même tableau les cours d’action des deux élèves articulés selon l’ordonnancement

temporel de l’activité de la dyade. Ainsi, les numérotations ont été harmonisées dans le sens

où l’USE n°66 à « t = 4’07’’ » d’un élève ‘A’ pouvait correspondre à l’USE n°60 à « t =

4’07’’ » de son partenaire ‘B’ mais ne correspondant pas à l’USE dans l’articulation

collective des cours d’action de ses deux élèves de la dyade (Tableau 5).

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USE

(Temps) Cédric

N°USE

Dyade

USE

(Temps) Antoine

66

(4’07’’)

UE : Pointe leur

position sur la

carte

R : Le banc

E : Informer

Antoine de leur

position sur la

carte

A : Se rendre à

la deuxième

balise

73 60

(4’07’’)

UE : Regarde la

position pointée

par Cédric

R : La position

pointée par

Cédric

E : Suivre des

yeux l’endroit

pointé par

Cédric

A : Se rendre à

la deuxième

balise

67

(4’08’’)

UE : Montre un

chemin

R : La vue du

chemin en face

E : Informer

Antoine d’une

direction à

suivre

A : Se rendre à

la deuxième

balise

74 61

(4’08’’)

UE : Regarde la

direction

désignée par

Cédric

R : La direction

montrée par

Cédric

E : Suivre

Cédric

A : Se rendre à

la deuxième

balise

Tableau 5 : Illustration d’une synchronisation temporelle à partir d’un extrait d’une

articulation collective des cours d’action individuels de la Dyade 3 (Cédric/Antoine)

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2.2 Analyse compréhensive de l’articulation collective des cours d’action

individuels

Dans un premier temps, nous avons identifié des formes typiques d’interaction entre

les élèves. Le caractère de typicité renvoie à quatre aspects au moins (descriptif, statistique,

génératif et significatif) que les chercheurs utilisent pour identifier ces occurrences-types

(Durand, 2014) : 1) elles concentrent le plus d’attributs de l’activité observée au sein de

l’échantillon des acteurs et des situations étudiées, 2) elles sont les plus fréquemment

observées dans l’échantillon enquêté, 3) elles ont une propension à s’actualiser de façon

privilégiée lorsque des conditions ayant un air de famille avec celles observées se

reproduisent et 4) elles sont l’objet d’un sentiment de typicité exprimé par les acteurs durant

leurs interactions avec les chercheurs. Les formes typiques d’interaction entre les élèves ont

été identifiées en croisant les données des enregistrements audio-visuels de l’activité des deux

élèves, les données des entretiens d’autoconfrontation, et les relations de

convergence/divergence/digression entre les contenus des UE et des E du cours d’action de

chaque élève. En effet, les contenus des UE ont permis de caractériser les actions de chaque

élève qu’ils actualisaient dans les formes d’interaction. Les contenus des E, quant à eux, ont

permis de préciser les intentions des élèves qui caractérisaient les formes d’interaction. Nous

avons qualifié les contenus des UE et des E du cours d’action d’un élève de convergents avec

ceux de son partenaire (convergence codée par « ≈ » dans les tableaux des résultats ci-après)

quand ils correspondaient à ce que faisait et à ce qu’attendait l’autre élève. Par exemple,

lorsqu’un élève proposait un itinéraire, son partenaire acquiesçait. Par contraste, les contenus

des UE et des E du cours d’action d’un élève ont été qualifiés de divergents avec ceux de son

partenaire (divergence codée par « ≠ » dans les tableaux des résultats ci-après) quand ils ne

correspondaient pas à ce que faisait ou à ce qu’attendait l’autre élève de la dyade (Jourand,

Adé, Sève & Thouvarecq, soumis ; Veyrunes, 2004). A titre d’illustration, lorsqu’un élève

proposait un itinéraire, le partenaire remettait en question ce choix. Les contenus des UE et

des E du cours d’action d’un des deux élèves étaient digressifs quand ils étaient orientés vers

un élève d’une autre dyade (digression codée par « � » dans les tableaux des résultats ci-

après). A titre d’exemple, une dyade en suivait une autre pour « copier » ses choix

d’itinéraires.

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115

Dans un second temps, nous avons cherché à rendre compte des modes d’utilisation de

la carte sur la base d’une analyse compréhensive de l’articulation collective des cours d’action

individuels des deux élèves : il s’agissait d’identifier des modes récurrents d’utilisation de la

carte par les élèves à partir des enregistrements audio-visuels de l’activité des élèves et de la

reconstruction de leur cours d’action notamment lorsque les contenus des UE et des R

indiquaient une relation avec la carte. Ces modes d’utilisation de la carte seront présentés dans

les résultats.

2.3 L’articulation collective des cours d’action : lecture simultanée vs lecture

différée ?

Sur la base de l’analyse du contenu des composantes UE et E dans l’articulation

collective des cours d’action individuels de chaque élève, deux lectures sont possibles : 1) une

lecture « simultanée » de l’articulation collective du contenu des ces composantes et 2) une

lecture « différée » de l’articulation collective du contenu de ces composantes.

A partir de la synchronisation des cours d’action de chaque élève, les USE du cours

d’action d’un élève pouvait structurer les USE du cours d’action de l’autre élève soit de façon

synchrone, c’est-à-dire simultanée (dans le Tableau 6, USE n°2 de Marie structure USE n°2

de Mélanie) ; soit de façon différée (dans le Tableau 7 et pour la même USE n°2, USE n°2 de

Marie structure USE n°3 de Mélanie).

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116

N°USE

(temps)

Marie

UE/E

Convergence (≈) et

divergence (≠) des

UE/E

Mélanie

UE/E

2

(15’’)

UE : Annonce à

Mélanie un ordre de

balises à poinçonner

E : Proposer à

Mélanie un ordre de

balises

UE : ≈

E : ≠

UE : Entend les

propos de Marie

E : Ecouter ce que

propose Marie

Tableau 6 : Extrait de l’articulation collective des cours d’action de Marie et Mélanie (Dyade

1) illustrant une analyse simultanée des relations entre les contenus des UE et des E de

chaque élève

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117

N°USE

(temps)

Marie

UE/E

Convergence (≈) des

UE/E

Mélanie

UE/E

2

(15’’)

UE : Annonce à

Mélanie un ordre de

balises à poinçonner

E : Proposer à

Mélanie un ordre de

balises UE : ≈

E : ≈

UE : Entend les

propos de Marie

E : Ecouter ce que

propose Marie

3

(23’’)

UE : Entend les

propos Mélanie

E : Ecoute ce que dit

Mélanie

UE : Confirme

l’ordre des balises

proposé par Marie

E : Signifier son

accord à Marie

Tableau 7 : Extrait de l’articulation collective des cours d’action de Marie et Mélanie (Dyade

1) illustrant une analyse différé des relations entre les contenus des UE et des E de chaque

élève

Etudier la dynamique des interactions entre deux acteurs invite donc le chercheur à

dépasser une analyse simultanée de l’interaction telle qu’elle est renseignée dans l’articulation

collective des cours d’action individuels des deux élèves de la dyade à tout instant ‘t’ dans le

tableau de présentation, en l’englobant dans une analyse différée plus large à l’instant ‘t = n x

USE’.

Des « conflits d’interprétation » dans l’analyse des contenus des composante UE et E des

deux élèves pouvaient émerger dans la mesure où l’analyse simultanée d’une USE ne rendait

pas compte nécessairement de la même relation qu’avec une analyse différée qui se

construisait à partir de l’enchaînement de plusieurs USE. Cela nous a conduits à privilégier

une analyse différée des relations entre les contenus des UE et des E de chacun des élèves.

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CHAPITRE 2 Résultats

Ce chapitre présente les résultats issus d’une analyse qualitative opérée dans la

première étape de traitement des données. Particulièrement, celle-ci mettra en évidence deux

lignes de résultats : premièrement, il ressort la présence de trois formes typiques d’interaction

entre les élèves lorsqu’ils s’engagent dans différents dispositifs d’apprentissage lors des

leçons d’EPS en course d’orientation ; deuxièmement, il résulte la présence de trois modes

d’utilisation dyadique de la carte d’orientation entre les élèves quel que soit le dispositif

d’apprentissage étudié.

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Chapitre 2. Résultats

1. Emergence des formes d’interaction

Trois formes typiques d’interaction ont été repérées selon la convergence, la

divergence et la digression des contenus des composantes dans l’articulation collective des

cours d’action individuels des deux élèves dans les dyades : 1) une forme de co-construction,

2) une forme de confrontation et 3) une forme de délégation.

1. 1 La forme co-construction

La forme de co-construction a été identifiée par une relation de convergence des

contenus des Unités Elémentaires (UE) et des Engagements (E) dans l’articulation collective

des cours d’action individuels des deux élèves. Dans ce cas, les élèves s’accordaient sur les

modalités à mettre en œuvre pour résoudre le problème auquel ils étaient confrontés. Cette

relation a été remarquée sous deux déclinaisons : premièrement, les contenus des composantes

UE et E des deux élèves entretenaient une relation de « convergence simultanée ».

Deuxièmement, ces contenus ont entretenu une relation de « convergence différée » avec

l’UE d’un des deux élèves qui structurait le contenu de l’UE et du E dans l’USE suivante du

partenaire. Ces deux déclinaisons, spécifiant une relation de convergence entre les contenus

des composantes UE et E des élèves, ont été remarquées dans tous les dispositifs

d’apprentissage.

1.1.1. Première déclinaison : relation de convergence simultanée des UE et des E

1.1.1.1. Dispositif sans chambre

Dans le dispositif sans chambre, cette déclinaison a été particulièrement identifiée

lorsque les deux élèves vérifiaient le numéro de la balise. En effet, quand ils pensaient être

arrivés à l’endroit supposé de la balise et qu’ils en voyaient une, les élèves s’assuraient que le

numéro inscrit sur la carte correspondait au numéro inscrit sur la balise. A titre d’exemple, en

voyant la deuxième balise, Sophie, élève de la dyade 2, s’est écriée : « Je la [la balise] vois.

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120

Elle est là ! ». Sa partenaire Camille a acquiescé pour confirmer qu’elle l’avait vue : « Oui,

moi aussi ». Les deux élèves se sont alors rendues à la balise et ont vérifié son numéro :

« C’est la 8 ! » (Sophie) / « Ce n’est pas la nôtre, on ne poinçonne pas » (Camille). Lors de

l’autoconfrontation, à la question du chercheur : « Qu’est-ce que vous faîtes à ce moment-

là ? », Sophie a répondu : « On vérifie le numéro de la balise. Là, c’est une fausse ». A la

relance du chercheur : « D’accord. Vous faites ça à chaque fois ? », elle a répondu : « Oui, à

chaque balise dans le coin on vérifie ». Les élèves s’accordaient donc sur les modalités à

mettre en œuvre pour vérifier le numéro de la balise (poinçonner selon que le numéro de la

balise trouvée correspondait à celui de la carte) (Tableau 8).

N°USE

(temps)

Sophie

U/E

Convergence (≈) des

UE/E

Camille

UE/E

118

(15’39’’)

UE : Aperçoit une

balise

E : Rejoindre la

balise

UE : ≈

E : ≈

UE : Voit une balise

E : Rejoindre la

balise

119

(15’40’’)

UE : Marche en

direction de la balise

E : Rejoindre la

balise

UE : ≈

E : ≈

UE : Court en

direction de la balise

E : Rejoindre la

balise

120

(15’48’’)

UE : Annonce le

numéro de la balise

E : Comparer le

numéro de la balise

avec celui recherché

UE : ≈

E : ≈

UE : Vérifie le

numéro de la balise

E : Comparer le

numéro de la balise

avec celui recherché

Tableau 8 : Extrait de l’articulation collective de Sophie et de Camille (Dyade 2) traduisant

une relation de convergence simultanée de leurs composantes UE et E

Dans cet exemple, les contenus des UE et des E de Sophie et de Camille étaient convergents

simultanément dans la mesure où ils rendaient compte en même temps des mêmes actions et

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121

des mêmes préoccupations chez les deux élèves, marquant ainsi une forme d’interaction de

co-construction.

1.1.1.2. Dispositif chambre

Dans le dispositif chambre, cette déclinaison a été notamment identifiée lorsque les

deux élèves se situaient sur la carte. En effet, bien que les élèves aient décidé ensemble de

l’itinéraire de course à suivre dans la chambre d’appel, ils ont cherché leur position sur la

carte à plusieurs reprises. A titre d’illustration, arrivées à un croisement, Lola et Lucie, élèves

de la dyade 4, se sont arrêtées, ont regardé la carte et ont levé la tête pour être sûres de leur

position. Dans l’autoconfrontation, le chercheur a demandé à Lucie : « Est-ce que vous

preniez les décisions ensemble ? ». Celle-ci a répondu : « Oui » et a poursuivi : « On

regardait la carte ensemble pour savoir où on était et savoir où on allait et on se met

d’accord ». Elles étaient donc d’accord à ce moment-là sur les modalités à mettre en œuvre

pour se situer sur la carte (faire correspondre leur position sur la carte et celle du terrain)

(Tableau 9).

N°USE

(temps)

Lucie

UE/E

Convergence (≈) des

UE/E

Lola

UE/E

46

(1’58’’)

UE : Regarde la carte

E : Se situer sur la

carte

UE : ≈

E : ≈

UE : Regarde la carte

E : Se repérer sur la

carte

47

(1’59’’)

UE : Regarde devant

E : Apercevoir un

élément de la carte

sur le terrain

UE : ≈

E : ≈

UE : Lève la tête

E : Comparer les

éléments de la carte

et du terrain

Tableau 9 : Extrait de l’articulation collective de Lucie et de Lola (Dyade 4) traduisant une

relation de convergence simultanée de leurs composantes UE et E

Dans cet exemple, les contenus des UE et des E de Lucie et de Lola étaient convergents

simultanément en ce sens qu’ils décrivaient au même instant chez les deux élèves les mêmes

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122

actions et les mêmes préoccupations, témoignant ainsi d’une forme d’interaction de co-

construction.

1.1.1.3. Dispositif 2 cartes

Dans le dispositif 2 cartes, cette déclinaison a été identifiée principalement dans des

moments au cours desquels les deux élèves cherchaient la balise à vue. Effectivement, quand

ces derniers pensaient être à l’endroit supposé de la balise, ils recherchaient autour d’eux pour

l’apercevoir. A titre d’exemple, pensant être arrivés dans une zone proche de la balise, les

deux élèves de la dyade 5 ont arrêté leur course. Adrien a alors dit : « On doit regarder » et

John a poursuivi : « Elle [la balise] est forcément dans le coin ». Ils ont alors regardé aux

alentours. Dans l’autoconfrontation, à la question du chercheur : « C’est important d’arrêter ?

Tu regardes tout autour... », John a répondu : « Oui car la balise est à côté donc on regarde

partout ». Les élèves étaient donc d’accord sur les modalités à mettre en œuvre pour chercher

la balise à vue (regarder autour d’eux) (Tableau 10).

N°USE

(temps)

Adrien

UE/E

Convergence (≈) des

UE/E

John

UE/E

113

(10’22’’)

UE : A l’arrêt,

regarde aux alentours

E : Voir la balise

UE : ≈

E : ≈

UE : A l’arrêt,

regarde autour de lui

convaincu de la

présence de la balise

E : Trouver la balise

114

(10’26’’)

UE : Se remet à

marcher en regardant

autour de lui

E : Chercher à vue la

balise

UE : ≈

E : ≈

UE : Alterne marche

et course tout en

regardant de tous

côté

E : Apercevoir la

balise

Tableau 10 : Extrait de l’articulation collective des cours d’action d’Adrien et de John

(Dyade 5) traduisant une relation de convergence simultanée de leurs composantes UE et E

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123

Dans cet exemple, les contenus des UE et des E d’Adrien et de John étaient convergents

simultanément dans le sens où ils présentaient les mêmes actions et les mêmes préoccupations

au même moment, caractérisant ainsi une forme d’interaction de co-construction.

1.1.1.4. Dispositif leurre

Dans le dispositif leurre, cette déclinaison a été identifiée surtout lorsque les deux

élèves se situaient sur la carte. En effet, quand les élèves pensaient avoir dépassé la balise à

valider car ils ne la trouvaient pas, ils cherchaient à se situer sur la carte en vérifiant

l’itinéraire qu’ils venaient de faire. A titre d’illustration, regardant tous les deux la carte,

Régis, élève de la dyade 6, a pointé un endroit en disant : « C’est ce chemin-là ! » tandis que

son partenaire David, en même temps, a pointé le même endroit et a dit : « On a pris le

chemin-là ! ». Les élèves étaient donc d’accord sur les modalités à mettre en œuvre pour se

situer sur la carte (chercher le chemin à la fois sur la carte et sur le terrain) (Tableau 11).

N°USE

(temps)

Régis

UE/E

Convergence (≈) des

UE/E

David

UE/E

91

(10’35’’)

UE : Regarde la carte

et pointe le même

endroit que David

E : Se situer sur la

carte

UE : ≈

E : ≈

UE : Regarde la carte

et pointe le même

endroit que Régis

E : Signifier son

accord

92

(10’38’’)

UE : Lève la tête

E : Comparer

l’élément pointé sur

la carte au terrain

UE : ≈

E : ≈

UE : Regarde à

droite

E : Apercevoir

l’élément pointé sur

la carte

Tableau 11 : Extrait de l’articulation collective des cours d’action de Régis et de David

(Dyade 6) traduisant une relation de convergence simultanée de leurs composantes UE et E

Dans cet exemple, les contenus des UE et des E de Régis et de David étaient convergents

simultanément dans la mesure où ils rendaient compte en même temps des mêmes actions et

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124

des mêmes préoccupations chez les deux élèves, marquant ainsi une forme d’interaction de

co-construction.

1.1.2. Deuxième déclinaison : relation de convergence différée des UE et des E

1.1.2.1 Dispositif sans chambre

Dans le dispositif sans chambre, cette déclinaison a été principalement identifiée

lorsque les deux élèves décidaient d’abandonner la balise recherchée. A titre d’illustration,

bien que les élèves de la dyade 2 aient construit l’itinéraire en début de course prévoyant

l’ordre des balises à valider, ils l’adaptaient pendant la course. Effectivement, alors qu’elles

n’arrivaient pas à trouver la première balise qu’elles pensaient proche, Sophie a proposé à

Camille d’abandonner la recherche de cette balise pour se concentrer sur la suivante en

justifiant sa proposition : « Si on rate la balise, on peut l’avoir au retour ». Camille a de suite

accepté : « On va alors à la prochaine ». Dans l’autoconfrontation, lorsque le chercheur a

demandé à Sophie : « A quoi tu penses quand tu dis ‘si on rate la balise, on peut l’avoir au

retour ? », elle a répondu : « A le dire à Camille parce que … au chemin qu’on avait dit, on

faisait tac, tac, tac [montre sur la carte un itinéraire], et la balise, elle était là… donc on

avait juste à faire tac [montre sur la carte un itinéraire] et on allait l’avoir au retour… et

puis, on perdait du temps… ». Les élèves s’entendaient donc sur les modalités à mettre en

œuvre pour abandonner la recherche de la balise en cours (récupérer la balise sur le chemin de

retour) (Tableau 12).

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125

N°USE

(Temps)

Sophie

UE/E

Convergence (≈) des

UE/E

Camille

UE/E

25

(3’00)

UE : Propose à

Camille

d’abandonner la

recherche de la balise

E : Justifier sa

proposition UE : ≈

E : ≈

UE : Entend les

propos de Sophie

E : Ecouter Sophie

26

(3’05’’)

UE : Entend la

réponse de Camille

E : Ecouter Camille

UE : Confirme la

proposition de

Sophie

E : Montrer son

accord à Sophie

Tableau 12 : Extrait de l’articulation collective de Sophie et de Camille (Dyade 2) traduisant

une relation de convergence différée de leurs composantes UE et E

Dans cet exemple, les contenus des composantes UE et E de Sophie et de Camille

entretenaient une relation de convergence différée ; le contenu de l’UE de Sophie structurait

l’UE et le E qui étaient convergents dans l’USE suivante de Camille. Cela témoignait ainsi

d’une forme d’interaction de co-construction.

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126

1.1.2.2 Dispositif chambre

Dans le dispositif chambre, cette déclinaison a été particulièrement identifiée lorsque

les élèves établissaient un itinéraire de course dans la chambre d’appel. Ils construisaient leur

itinéraire de course en alternant leur proposition sur les chemins à suivre et en faisant

également le compromis de l’éloignement des positions des différentes balises par rapport au

départ de la course (choix de la première balise), les unes par rapport aux autres (choix de la

deuxième et troisième balise) et par rapport au point de ralliement : à titre d’illustration, alors

que Cédric et Antoine, élèves de la dyade 3, découvraient la carte, tous les deux cherchaient à

construire un itinéraire de course. Antoine a proposé un itinéraire pour se rendre à la

deuxième balise : « En fait, on fait tout le tour et on passe à côté du stade de foot ». Cédric a

acquiescé, reprenant pour partie des éléments descriptifs de la proposition de son camarade :

« Voilà, d’accord. Oui, à côté du terrain de foot ». Lors de l’autoconfrontation, à la question

du chercheur : « Vous avez fait quoi pendant la minute de la chambre d’appel ? », Antoine a

répondu : « On a pris le triangle rouge et comme on voulait aller à la balise là [pointe sur la

carte] on a repéré la maison du gardien ». Le chercheur a alors relancé : « C’est la maison du

gardien que vous avez regardé en premier ? ». Antoine a poursuivi : « Oui, c’est la maison du

gardien et après on a regardé le point rouge [l’emplacement de la balise] à côté d’un banc ou

d’une table et après on a repéré le terrain de foot ». Les élèves s’accordaient donc sur les

modalités à mettre en œuvre pour établir un itinéraire de course ensemble (passer à côté de la

maison du gardien) (Tableau 13).

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N°USE

(temps)

Cédric

UE/E

Convergence (≈) des

UE/E

Antoine

UE/E

2

(3’’)

UE : Regarde la carte

E : Suivre des yeux

l’itinéraire d’Antoine

UE : ≈

E : ≈

UE : Trace du doigt

sur la carte un

itinéraire

E : Proposer à Cédric

un itinéraire de

course

3

(6’’)

UE : Tapote sur la

carte l’endroit du

terrain de football

E : Confirmer

l’itinéraire d’Antoine

UE : Regarde la carte

E : Etre attentif à ce

que fait Cédric

Tableau 13 : Extrait de l’articulation collective de Cédric et d’Antoine (Dyade 3) traduisant

une relation de convergence différée de leurs composantes UE et E

Dans cet exemple, les contenus des UE et des E de Cédric et d’Antoine entretenaient une

relation de convergence différée car le contenu de l’UE d’Antoine structurait l’UE et le E qui

étaient convergents dans l’USE suivante de Cédric. Cela traduisait ainsi une forme

d’interaction de co-construction.

1.1.2.3 Dispositif 2 cartes

Dans le dispositif 2 cartes, cette déclinaison a été notamment identifiée lorsque les

deux élèves se situaient sur la carte. En effet, bien que les élèves aient construit un itinéraire

de course ensemble, ils se sont situés sur la carte à plusieurs reprises pour confirmer

l’emplacement de la balise et leur position. A ce propos, ne trouvant pas immédiatement la

première balise, Adrien et John, élèves de la dyade 5, se sont arrêtés autour des deux cartes,

les ont juxtaposées et les ont regardées pour se situer par rapport à la première balise. Adrien

a alors pointé l’endroit où ils étaient : « Nous, on est là et l’intersection là ! », ce qu’a

confirmé John : « Bah oui à côté-là ». Adrien a poursuivi en signalant le repère qu’il y avait

sur la carte : « C’est le trou ! ». Lors de l’autoconfrontation, le chercheur a questionné John :

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128

« A ce moment-là, tu arrêtes la course. Hop ! Tu prends la carte et tu la colles à la tienne. Tu

penses à quoi là ? C’est important de coller les deux cartes ? ». Celui-ci a répondu : « Bah,

pour se repérer. Comme on ne trouvait pas la balise il fallait qu’on cherche où on était avec

Adrien pour savoir si on était loin. On pensait qu’on était à l’intersection ». Les élèves étaient

donc d’accord sur les modalités à mettre en œuvre pour se situer sur sa carte (trouver leur

position sur la carte en collant des deux cartes côte-côte) (Tableau 14).

N°USE

(temps)

Adrien

UE/E

Convergence (≈) des

UE/E

John

UE/E

122

(12’13’’)

UE : Pointe son doigt

sur la carte une

intersection

E : Informer John de

leur position

UE : ≈

E : ≈

UE : Regarde la carte

E : Suivre des yeux

l’endroit pointé par

Adrien

123

(12’15’’)

UE : Voit le doigt de

John à côté du sien

E : Suivre ce que fait

John

UE : Pointe son doigt

sur la carte le même

endroit qu’Adrien

par Adrien sur la

carte

E : Confirmer leur

position à Adrien

Tableau 14 : Extrait de l’articulation collective d’Adrien et de John (Dyade 5) traduisant une

relation de convergence différée de leurs composantes UE et E

Dans cet exemple, les contenus des UE et des E d’Adrien et de John entretenaient une relation

de convergence différée car le contenu de l’UE d’Adrien structurait l’UE et le E qui étaient

convergents dans l’USE suivante de John. Cela caractérisait ainsi une forme d’interaction de

co-construction.

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129

1.1.2.4 Dispositif leurre

Dans le dispositif leurre, cette déclinaison a été notamment identifiée lorsque les deux

élèves poinçonnaient la carte. En effet, lors de ce moment, les élèves ont rendu compte d’une

stratégie spécifique. A titre d’illustration, les élèves de la dyade 5 se répartissaient les tâches

d’un commun accord : Régis tenait le poinçon pour valider tandis que David tendait la carte

pour que son partenaire la poinçonne à l’endroit prévu : « Vas-y, poinçonne ! » (David). Dans

l’autoconfrontation, le chercheur a commenté le moment : « Tu prends le poinçon… Donc là

tu poinçonnes… C’est lui [David] qui tend la carte et toi qui poinçonne ? Vous faites ça

souvent ? ». Régis a répondu : « Oui j’crois qu’on fait ça tout le temps car on s’était dit ça ».

Aussi, le chercheur a questionné David : « Tu tends la carte pour qu’il poinçonne [Régis] ? ».

David a répondu : « Oui c’est normal parce que j’avais la carte ». Les élèves se mettaient

d’accord sur les modalités à mettre en œuvre pour poinçonner d’une certaine façon la carte en

arrivant aux balises (Se répartir des rôles) (Tableau 15).

N°USE

(temps)

Régis

UE/E

Convergence (≈) des

UE/E

David

UE/E

53

(5’02’’)

UE : Prend le

poinçon de la balise

E : Poinçonner la

carte UE : ≈

E : ≈

UE : Regarde Régis

prendre le poinçon

E : Laisser faire

Régis

54

(5’05’’)

UE : Regarde David

tendre la carte

E : Poinçonner la

carte

UE : Tend la carte en

incitant Régis à

poinçonner

E : Faire poinçonner

la carte

Tableau 15 : Extrait de l’articulation collective de Régis et David (Dyade 6) traduisant une

relation de convergence différée de leurs composantes UE et E

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130

Dans cet exemple, les contenus des UE et des E de Régis et de David entretenaient une

relation de convergence différée car le contenu de l’UE de Régis structurait l’UE et le E qui

étaient convergents dans l’USE suivante de David. Cela témoignait ainsi d’une forme

d’interaction de co-construction.

1. 2 La forme confrontation

La forme de confrontation a été identifiée par les relations de divergence différée des

contenus des UE et des E dans l’articulation collective des cours d’action individuels des deux

élèves. Elle a été repérée par le fait que le contenu de l’UE de l’un des deux élève structurait

les contenus de l’UE et du E devenant divergents dans l’USE suivante du partenaire. Dans ce

cas, les élèves ne s’accordaient pas sur les modalités à mettre en œuvre pour résoudre le

problème auquel ils étaient confrontés. Cette relation entre les composantes a été remarquée

dans tous les dispositifs d’apprentissage.

1.2.1 Dispositif sans chambre

Dans le dispositif sans chambre, cette déclinaison a été essentiellement identifiée

lorsque l’un des deux élèves imposait son itinéraire. Bien que le choix d’un itinéraire de

course ait été décidé par les deux élèves en début de course, il était parfois soumis à des

désaccords au cours desquels l’un des deux élèves imposait son choix d’itinéraire. Alors que

les élèves de la dyade 1 se rapprochaient de leur première balise, Mélanie a proposé à sa

partenaire Marie de continuer sur le chemin emprunté : « Il faudrait rester sur le chemin ».

Marie a manifesté ostensiblement son désaccord en sortant du chemin et en s’enfonçant dans

la forêt imposant par là-même son choix d’itinéraire : « Du chemin, on ne la verra pas ». Lors

de l’autoconfrontation, le chercheur a demandé à Marie de commenter ce passage : « Mélanie

te propose de rester sur le chemin mais toi tu n’es pas d’accord. A quoi tu penses à ce

moment-là ? ». Marie a répondu : « Elle avait tord car du chemin elle ne la [la balise] verrait

pas… donc j’ai coupé dans la forêt. Elle devait me suivre. La balise était un peu plus loin et

on entendait des cris [présence d’autres dyades d’élèves au loin] ». Les élèves étaient donc

en désaccord sur les modalités à mettre en œuvre pour rejoindre la balise ; l’un d’eux

imposant son itinéraire (continuer sur le chemin vs s’enfoncer dans la forêt) (Tableau 16).

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N°USE

(temps)

Marie

UE/E

Divergence (≠) des

UE/E

Mélanie

UE/E

49

(10’35’’)

UE : Entend le

conseil de Mélanie

E : Ecouter Mélanie UE : ≠

E : ≠

UE : Pense qu’il faut

rester sur le chemin

E : Proposer à Marie

de rester sur le

chemin

50

(10’42’’)

UE : Refuse et

s’enfonce dans la

forêt

E : Manifester son

désaccord

UE : Voit Marie

sortir du chemin

E : Regarder ce que

fait Marie

Tableau 16: Extrait de l’articulation collective de Marie et de Mélanie (Dyade 1) traduisant

une relation de divergence différée des composantes UE et E

Dans cet exemple, les contenus des UE et des composantes E de Marie et de Mélanie

entretenaient une relation de divergence différée car le contenu de l’UE de Mélanie structurait

les contenus de l’UE et du E qui étaient divergents dans l’USE suivante de Sophie. Cela

traduisait ainsi une forme de confrontation.

1.2.2 Dispositif chambre

Dans ce dispositif chambre, cette relation a été essentiellement identifiée à des

moments où un des deux élèves refusait de suivre la direction proposée par son partenaire. En

effet, les choix de direction et de chemin à prendre étaient source de désaccords entre les

élèves dans la course. A ce propos, alors que Lola, élève de la dyade 4, montrait la direction à

suivre avec son bras : « C’est par là », sa partenaire, Lucie, a refusé : « Bah non, sur la route

c’était l’autre sens ». Elle a alors manifesté son désaccord en justifiant l’erreur d’orientation

de la carte : « Bah non, la carte était mal orientée au début de la course ». Dans

l’autoconfrontation, le chercheur a questionné Lucie : « Vous étiez toujours d’accord ? C’est-

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132

à-dire vous êtes à un endroit : et vous étiez d’accord pour le chemin ? ». Elle a répondu :

« Parfois non, on n’était pas d’accord sur la direction ». Le chercheur a alors relancé :

« Qu’est-ce qui fait que vous n’étiez pas d’accord ? ». Lucie a poursuivi : « L’endroit où on

était ou la direction à suivre ». Les élèves étaient donc en désaccord sur les modalités à

mettre en œuvre pour rejoindre la balise (suivre le chemin vs faire demi-tour) (Tableau 17).

N°USE

(temps)

Lola

UE/E

Divergence (≠) des

UE/E

Lucie

UE/E

147

(8’45’’)

UE : Montre une

direction avec son

bras

E : Informer Lucie de

la direction à suive UE ≠

E ≠

UE : Regarde la

direction montrée par

Lola

E : Suivre des yeux

la direction

148

(8’47’’)

UE : Entend le

désaccord de Lucie

E : Ecouter Lucie

UE : Refuse en

levant la carte vers le

ciel

E : Justifier son

désaccord

Tableau 17 : Extrait de l’articulation collective de Lola et de Lucie (Dyade 4) traduisant une

relation de divergence différée des composantes UE et E

Dans cet exemple, les contenus des composantes UE et E de Lola et de Lucie entretenaient

une relation de divergence différée car le contenu de l’UE de Lola structurait les contenus de

l’UE et du E qui divergeaient dans l’USE suivante de Lucie. Cela témoignait ainsi d’une

forme de confrontation.

1.2.3 Dispositif 2 cartes

Dans le dispositif 2 cartes, cette relation a été principalement identifiée quand l’un des

deux élèves tentait d’arracher la carte des mains de son partenaire. En effet, des désaccords

ont émergé entre les deux élèves dans des moments où ils avaient le sentiment d’être perdu :

une carte renseignant la position de deux balises, l’élève porteur de la carte était

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133

potentiellement le seul à pouvoir mener son partenaire à ses balises. Dans une situation où le

meneur n’aboutissait pas à une solution concluante, sa carte a été l’objet d’une volonté

d’appropriation du partenaire occasionnant des désaccords entre ces derniers. A d’illustration,

dans la dyade 2, l’itinéraire qui incombait à Camille (la position de la troisième balise étant

sur sa carte) n’était pas concluant : les élèves n’arrivaient pas à trouver la troisième balise.

Cela a créé une tension : lorsque Sophie a demandé à Camille de continuer en tentant de lui

arracher des mains la carte, celle-ci a immédiatement refusé manifestant ostensiblement son

désaccord par un « Non ! » catégorique et en écartant la carte. Lors de l’autoconfrontation, le

chercheur a commenté ce passage : « Là on voit que tu dis non de manière énervée… qu’est-

ce qui s’est passé ? » ; Camille a répondu : « Elle voulait voir ma carte car on ne trouvait pas

la balise et c’est moi qui devait la trouver car c’était sur ma carte. Je n’étais pas d’accord

car elle a voulu l’arracher ». L’élève porteur de carte manifestait donc un désaccord sur les

modalités à mettre en œuvre relatives à la tentative d’un élève de s’approprier la carte du

partenaire (Tableau 18).

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N°USE

(temps)

Sophie

UE/E

Divergence (≠) des

UE/E

Camille

UE/E

109

(22’46’’)

UE : Essaye de

prendre la carte de

Camille

E : Reprendre la

main sur l’itinéraire UE : ≠

E : ≠

UE : Regarde la

direction montrée par

Sophie

E : Laisser faire

Sophie

110

(22’48’’)

UE : Ne prends pas

la carte à Camille

E : Laisser Faire

Camille

UE : Eloigne la carte

des mains de Sophie

E : Signifier son

désaccord à Sophie

Tableau 18 : Extrait de l’articulation collective des cours d’action de Sophie et de Camille

(Dyade 2) traduisant une relation de divergence différée des composantes UE et E

Dans cet exemple, les contenus des composantes UE et E de Sophie et de Camille

entretenaient une relation de divergence différée car le contenu de l’UE de Sophie structurait

les contenus de l’UE et du E qui devenaient divergents dans l’USE suivante de Camille. Cela

caractérisait ainsi une forme de confrontation.

1.2.4 Dispositif leurre

Dans le dispositif leurre, cette relation a été surtout identifiée quand l’un des deux

élèves refusait la direction à suivre par son partenaire. En effet, bien que le choix d’un

itinéraire de course ait été décidé par les deux élèves en début de course, il était quelquefois

soumis à des désaccords. A ce propos, alors que les élèves de la dyade 2 se rendaient vers la

première balise, Sophie a informé sa partenaire Camille de la direction à suivre : « A 100

mètres, il faudra prendre de ce côté-là ». Camille a aussitôt manifesté son désaccord : « Mais

non, mais non, c’est plus loin ! ». Dans l’autoconfrontation, lorsque le chercheur a commenté

ce passage : « Donc elle [Camille] n’est pas d’accord avec toi… Elle fait ‘Mais non mais

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135

non’. Qu’est-ce qui se passe ? ». Sophie a répondu : « En fait, quand j’ai dit il y a presque

100m et il y a la balise, elle n’était pas d’accord avec moi car elle pensait que c’était plus

loin ». Les deux élèves étaient donc en désaccord sur les modalités à mettre en œuvre

inhérentes à l’appréciation de la distance qu’il fallait parcourir pour changer de direction et

pour se rendre à la balise (Tableau 19).

N°USE

(temps)

Sophie

UE/E

Divergence (≠) des

UE/E

Camille

UE/E

14

(1’15’’)

UE : Annonce à

Camille une distance

et une direction à

suivre

E : Informer Camille

du chemin à prendre UE ≠

E ≠

UE : Entend les

propos de Sophie

E : Ecouter Sophie

15

(1’17’’)

UE : S’aperçoit du

désaccord de Camille

E : Ecouter Camille

UE : En haussant les

épaules, refuse de

suivre Sophie

E : Justifier son

désaccord

Tableau 19 : Extrait de l’articulation collective de Sophie et de Camille (Dyade 2) traduisant

une relation de divergence différée des composantes UE et E

Dans cet exemple, les contenus des UE et des E de Sophie et de Camille entretenaient une

relation de divergence différée car le contenu de l’UE de Sophie structurait les contenus de

l’UE et du R qui étaient divergents dans l’USE suivante de Camille. Cela caractérisait ainsi

une forme de confrontation.

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136

1. 3 La forme de délégation

La forme de délégation a été identifiée par une relation de convergence différée et de

divergence différée des contenus des UE et des E dans l’articulation collective des cours

d’action individuels des deux élèves ; le contenu de l’UE de l’un d’eux structurant les

contenus de l’UE qui pouvaient être soit convergent soit divergent dans l’USE suivante du

partenaire. De même, le contenu de l’UE de l’un des deux élèves structurait le contenu du E

du partenaire dans l’USE suivante. Le contenu du E de l’élève pouvait présenter alors une

relation de divergence différée ou de convergence différée avec le E dans l’USE suivante du

partenaire. Cette relation a été remarquée sous deux déclinaisons : premièrement, les contenus

des UE des deux élèves entretenaient une relation de convergence différée tandis que ceux des

E entretenaient une relation de divergence différée ; deuxièmement, les contenus des UE des

deux élèves entretenaient une relation de divergence différée alors que ceux des E

entretenaient une relation de convergence différée. Cette forme de délégation a été également

repérée par une relation de digression des contenus des UE et des E d’un des deux élèves de la

dyade avec un élève d’une autre dyade. Ces deux relations entre les composantes UE et E ont

été remarquées dans tous les dispositifs d’apprentissage.

1.3.1 Première relation : convergence et divergence des UE et des E

1.3.1.1 Première déclinaison : convergence différée des UE et divergence

différée des E

Dispositif sans chambre

Dans le dispositif sans chambre, cette déclinaison a été identifiée particulièrement

quand l’un des deux élèves proposait d’adapter l’itinéraire et que son partenaire le suivait sans

contrôler la proposition. En effet, Sophie, élève de la dyade 2, a proposé à sa partenaire

Camille de faire demi-tour. Celle-ci s’est contentée, sans contrôler sur la carte alors qu’elle en

était la détentrice, de faire demi-tour. Dans l’autoconfrontation, lorsque le chercheur a

demandé à Sophie de commenter ce qu’elle faisait, celle-ci a répondu : « Là, je lui [Camille]

demande de faire demi-tour si on ne trouvait pas la balise. On ne l’a pas trouvé. Elle m’a

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137

suivi ». Un des deux élèves suivait donc sans rien dire les consignes du partenaire (Tableau

20).

N°USE

(Temps)

Sophie

UE/E

Convergence (≈) et

divergence (≠) des

UE/E

Camille

UE/E

57

(7’27’’)

UE : Propose de faire

demi-tour

E : Revenir sur leurs

pas UE : ≈

E : ≠

UE : Entend la

proposition de

Sophie

E : Ecouter Sophie

58

(7’30’’)

UE : Marche

E : Revenir sur leurs

pas

UE : Fait demi-tour

E : Suivre Sophie

Tableau 20 : Extrait de l’articulation collective de Sophie et de Camille (Dyade 2) traduisant

une relation de convergence différée des UE et de divergence différée des E

Dans cet exemple, le contenu de l’UE de Sophie était convergent avec celui de l’USE

suivante de Camille tandis que les contenus des E divergeaient ; le contenu de l’UE de Sophie

structurant les contenus de l’UE et du E de Camille. Cela caractérisait ainsi une forme

d’interaction de délégation.

Dispositif chambre

Dans le dispositif chambre, cette déclinaison a été identifiée lorsque l’un des deux

élèves prenait la carte que lui tendait son partenaire. En effet, arrivée dans une zone où il y

avait trois bancs et trois chemins, Lucie, élève de la dyade 4, avait un doute sur lequel

prendre. Elle a alors passé la carte à sa partenaire Lola, l’invitant par là-même à choisir la

suite de l’itinéraire de course. Lola a donc regardé la carte : « C’est la table là à gauche ». Un

des deux élèves confiait donc à son partenaire la responsabilité de l’itinéraire de course sans

qu’il ne contrôle les choix faits (Tableau 21).

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138

r

N°USE

(temps)

Lola

UE/E

Convergence (≈) et

Divergence (≠) des

UE/E

Lucie

UE/E

90

(5’07’’)

UE : Regarde Lucie

lui tendre la carte

E : Laisser Faire

Lucie UE ≈

E ≠

UE : Tend la carte à

Lola

E : Laisser Lola

prendre la décision

91

(5’09’’)

UE : Prend la carte

des mains de Lucie

E : Récupérer la carte

UE : Lâche la carte

E : Laisser Lola

prendre la décision

Tableau 21: Extrait de l’articulation collective de Lola et de Lucie (Dyade 4) traduisant une

relation de convergence différée des UE et de divergence différée des E

Dans cet exemple, le contenu de l’UE de Lucie était convergent avec celui de l’USE suivante

de Lola tandis que les contenus des E divergeaient ; le contenu de l’UE de Lucie structurant

les contenus de l’UE et du E de Lola. Cela caractérisait ainsi une forme d’interaction de

délégation.

Dispositif 2 cartes

Dans ce dispositif 2 cartes, cette déclinaison a été particulièrement identifiée lorsque

l’un des deux élèves demandait l’itinéraire à suivre à son partenaire. En effet, à certains

moments, un élève n’était pas sûr de lui et interrogeait son partenaire sur l’itinéraire de course

(e.g., la direction, le repère à voir), l’invitant par là-même à le choisir. A ce propos, au cours

de la recherche de la quatrième balise, Marie, élève de la dyade 1, a annoncé à sa partenaire

Mélanie qu’elle hésitait sur l’itinéraire et lui a demandé : « Je ne suis pas sûre… On fait

quoi ? ». Mélanie a, à cet instant, pris la main dans la course et a guidé sa partenaire : « On

doit continuer ». A la relance du chercheur concernant ce passage : « Là. Tu hésites. Tu

penses à quoi ? A quel moment sais-tu si tu es trop loin ou pas ? », Marie a répondu : « Je ne

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139

suis pas sûre donc je demande son avis parce que sur le chemin on avait vu qu’on pouvait

couper. Il y avait un autre chemin qu’on prendrait, et je ne savais pas lequel… ». De même,

lorsque le chercheur a demandé à Mélanie de commenter ce passage, elle a expliqué :

« Comme elle [Marie] n’était pas sure, je voulais qu’elle me suive pour pas perdre de

temps ». Un des deux élèves invitait donc son partenaire à prendre la main pour le suivre sans

contrôler ses décisions (Tableau 22).

N°USE

(temps)

Marie

UE/E

Convergence (≈) et

Divergence (≠) des

UE/E

Mélanie

UE/E

130

(32’’38’)

UE : Hésitante,

demande la direction

à suivre

E : Questionner

Mélanie sur

l’itinéraire UE : ≈

E : ≠

UE : Ecoute le doute

de Marie

E : Ecouter Marie

131

(32’41’’)

UE : Entend la

réponse de Mélanie

E : Ecouter Mélanie

UE : Annonce la

direction à suivre à

Marie

E : Prendre la dyade

en main

Tableau 22 : Extrait de l’articulation collective de Marie et de Mélanie (Dyade 1) traduisant

une relation de convergence différée des UE et de divergence différée des E

Dans cet exemple, le contenu de l’UE de Marie était convergent avec celui de l’USE suivante

de Mélanie tandis que ses contenus des E divergeaient ; le contenu de l’UE de Marie

structurant les contenus de l’UE et du E de Mélanie. Cela caractérisait ainsi une forme

d’interaction de délégation.

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140

Dispositif leurre

Dans le dispositif leurre, cette déclinaison a notamment été identifiée lorsqu’un des

deux élèves demandait à son partenaire leur position. A titre d’exemple, dans la dyade 2,

Camille, se sentant perdue, a demandé à sa partenaire Sophie : « On est où ?... là ! [pointe du

doigt un endroit]». Celle-ci a répondu en lui montrant la carte : « On est là ! », prenant ainsi

la main et guidant la dyade. A la question du chercheur dans l’autoconfrontation : « Tu

demandes souvent ta position ? », Camille a répondu : « Oui comme je ne sais pas où on est je

demande ». Un des deux élèves invitait donc son partenaire à prendre la main en

l’interrogeant sur leur position sans contrôler son choix d’itinéraire (Tableau 23).

N°USE

(temps)

Sophie

UE/E

Convergence (≈) et

Divergence (≠) des

UE/E

Camille

UE/E

48

(4’48’’)

UE : Entend le

sentiment de doute

de Camille

E : Ecouter Camille

UE : ≈

E : ≠

UE : Hésitante,

pointe un endroit sur

la carte

E : Se situer sur la

carte

49

(4’50’’)

UE : Pointe du doigt

sur la carte un

endroit à Camille

E : Répondre à la

question de Camille

UE : Regarde

l’endroit pointé par

Sophie

E : Suivre Sophie

Tableau 23 : Extrait de l’articulation collective de Sophie et de Camille (Dyade 2) traduisant

une relation de convergence différée des UE et de divergence différée des E

Dans cet exemple, le contenu de l’UE de Camille était convergent avec celui de l’USE

suivante de Sophie tandis que les contenus des E divergeaient ; le contenu de l’UE de Cédric

structurant les contenus de l’UE et du E de Sophie. Cela caractérisait ainsi une forme

d’interaction de délégation.

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141

1.3.1.2 Deuxième déclinaison : divergence différée des UE et convergence différée

des E

Dispositif sans chambre

Dans le dispositif sans chambre, cette déclinaison a été essentiellement identifiée

quand l’un des deux élèves suivait la direction annoncée par son partenaire. En effet,

l’itinéraire de course devenait l’objet de décisions d’un seul élève sans que le partenaire ne les

contrôle. A ce propos, dans la dyade 2, Sophie, à plusieurs reprises, prenait la main dans la

conduite de l’itinéraire en montrant de son bras les directions à suivre : « Par-là ! ». Camille,

sans contrôler l’itinéraire, continuait de marcher en se dirigeant dans la direction indiquée par

sa partenaire. Dans l’autoconfrontation, le chercheur a demandé à Sophie d’expliciter ce

moment : « Qu’est-ce que tu fais ? ». Sophie a répondu : « Je lui indique la direction comme

elle est devant. On a marché souvent comme ça. Si elle part devant, je lui donne la direction

et elle suit ». Un des deux élèves suivait donc les indications données par son partenaire à

certains moments de la course : si l’un indiquait une direction, l’autre suivait sans la contrôler

(Tableau 24).

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N°USE

(temps)

Sophie

UE/E

Convergence (≈) et

Divergence (≠) des

U/E

Camille

UE/E

81

(10’35’’)

UE : Désigne une

direction avec son

bras

E : Informer Camille

de la direction à

suivre UE : ≠

E : ≈

UE : Voit le chemin

indiqué

UE : Regarder dans

la direction montrée

par Sophie

82

(10’45’’)

UE : Marche

E : Suivre le chemin

de la balise

UE : Marche dans la

direction annoncée

par Sophie

E : Prendre le chemin

montré par Sophie

Tableau 24 : Extrait de l’articulation collective de Sophie et de Camille (Dyade 2) traduisant

une relation de divergence différée des UE et de convergence différée des E

Dans cet exemple, le contenu de l’UE de Sophie était divergent avec celui de l’USE suivante

de Camille tandis que les contenus des E convergeaient ; le contenu de l’UE de Sophie

structurant les contenus de l’UE et du E de Camille. Cela caractérisait ainsi une forme

d’interaction de délégation.

Dispositif chambre

Dans le dispositif chambre, cette déclinaison a été principalement identifiée dans des

moments au cours desquels l’un des deux élèves suivait la direction donnée par son

partenaire. A titre d’exemple, dans la dyade 3, Antoine, regardant seul la carte, annonçait

l’itinéraire à suivre ou les éléments remarquables à repérer. Son partenaire Cédric suivait alors

ses instructions. Antoine, dès la troisième minute de course, a regardé la carte et a précisé un

chemin à trouver pour poursuivre l’itinéraire : « Il faut chercher un chemin sur la gauche, il

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faut tourner au prochain chemin ». Son partenaire, Cédric, a suivi ses instructions et a tourné

sur le premier chemin situé à gauche sans faire de commentaires. Dans l’autoconfrontation, à

la question du chercheur : « Vous avez fait comment pour trouver les chemins ? », Cédric a

commenté : « Il [Antoine] a trouvé le chemin là-bas [montre sur la carte]. Il a dit ‘c’est par

là où on est parti’, bah je l’ai suivi ». A la relance du chercheur : « A quoi tu penses dans ces

moments-là ? », Cédric a répondu : « Bah euh … à le suivre ». Un des deux élèves suivait

donc son partenaire à différents moments de la course : l’un indiquait les directions à prendre,

l’autre suivait sans les contrôler (Tableau 25).

N°USE

(temps)

Cédric

UE/E

Convergence (≈) et

Divergence (≠) des

UE/E

Antoine

UE/E

57

(3’08’’)

UE : Voit le chemin

indiqué par Antoine

E : Suivre la

direction indiquée UE ≠

E ≈

UE : Indique la suite

de l’itinéraire

E : Informer Cédric

du chemin à prendre

58

(3’15’’)

UE : Marche en

tournant à gauche

E : Prendre le chemin

annoncé

UE : Continue de

marcher

E : Suivre le chemin

de la balise

Tableau 25 : Extrait de l’articulation collective de Cédric et d’Antoine (Dyade 3) traduisant

une relation de convergence différée des UE et de divergence différée des E

Dans cet exemple, le contenu de l’UE d’Antoine était divergent avec celui de l’USE suivante

de Cédric tandis que ses contenus des E convergeaient ; le contenu de l’UE d’Antoine

structurant les contenus de l’UE et du E de Cédric. Cela caractérisait ainsi une forme

d’interaction de délégation.

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144

Dispositif 2 cartes

Dans le dispositif 2 cartes, cette déclinaison a été notamment identifiée quand un des

deux élèves suivait la direction annoncée par son partenaire. A titre d’illustration, dans la

dyade 6, John, responsable de la deuxième balise à poinçonner (il avait la carte qui indiquait

sa position), a en permanence annoncé à Adrien les directions à suivre et les repères qu’ils

pouvaient rencontrer : « Tout droit », « Là, passe par là », « Tu dois voir un banc »… Celui-

ci se laissait alors guider en se plaçant derrière son partenaire. Lors de l’autoconfrontation, le

chercheur a interrogé John : « Quand tu dis ça. Tu le dis pour toi ou c’est important de lui

dire à Adrien ? ». Il a répondu : « Oui c’est important car il me suivait depuis le début. C’est

moi qui guidait ». Un des deux élèves donnait donc la direction à suivre à son partenaire qui le

suivait sans contrôler ni faisant de commentaires (Tableau 26).

N°USE

(temps)

Adrien

UE/E

Convergence (≈) et

Divergence (≠) des

UE/E

John

UE/E

87

(9’02’’)

UE : Voit le chemin

à suivre

E : Se diriger vers le

chemin à suivre

UE ≠

E ≈

UE : Regardant sa

carte, annonce la

direction à prendre

E : Informer Adrien

de la direction à

suivre

88

(9’04’’)

UE : Marche derrière

John

E : Prendre la même

direction que John

UE : Marche

E : Suivre le chemin

de la balise

Tableau 26 : Extrait de l’articulation collective d’Adrien et de John (Dyade 5) traduisant une

relation de convergence différée des UE et de divergence différée des E

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145

Dans cet exemple, le contenu de l’UE de John était divergent avec celui de l’USE suivante de

d’Adrien tandis que ses contenus des E convergeaient ; le contenu de l’UE de John structurant

les contenus de l’UE et du E d’Adrien. Cela caractérisait ainsi une forme d’interaction de

délégation.

Dispositif leurre

Dans le dispositif leurre, cette déclinaison a été surtout identifiée lors quand l’un des

deux élèves attendait la proposition de son partenaire dans la construction de l’itinéraire de

course. En effet, dans la dyade 6, Régis espérait que David construise l’itinéraire pour se

rendre aux balises. A ce titre, après qu’ils aient localisé leur position sur la carte, David a

proposé un ordre de balises en le traçant dessus et en le commentant : « On va à la 14, puis à

la 12 et 7… ». Pendant qu’il traçait sur la carte l’itinéraire de course, Régis s’est contenté de

suivre des yeux l’itinéraire proposé et s’est mis à courir en direction de la première balise une

fois que son partenaire eut fini. Pendant l’autoconfrontation, le chercheur a commenté ce

passage : « Régis au début te pose la question : ‘on commence par la combien ?’. Vous avez

discuté ou pas de l’itinéraire », David a répondu : « Pas du tout, j’ai dit un itinéraire. Il m’a

suivi ». Un des deux élèves suivait donc son partenaire dans la construction de l’itinéraire sans

le contrôler (Tableau 27).

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N°USE

(temps)

Régis

UE/E

Convergence (≈) et

Divergence (≠) des

UE/E

David

UE/E

8

(11’’)

UE : Entend le

numéro de la balise

E : Ecouter David UE : ≠

E : ≈

UE : Annonce le

numéro et le chemin

de la première balise

E : Informer Régis

du chemin et du

numéro de la

première balise

9

(12’’)

UE : Se met à courir

E : Se rendre à la

première balise

UE : Regarde Régis

qui s’éloigne

E : Rejoindre Régis

Tableau 27 : Extrait de l’articulation collective de Régis et de David (Dyade 6) traduisant

une relation de convergence différée des UE et de divergence différée des E

Dans cet exemple, le contenu de l’UE de David était divergent avec celui de l’USE suivante

de Régis tandis que les contenus des E convergeaient ; le contenu de l’UE de David

structurant les contenus de l’UE et du E de Régis. Cela caractérisait ainsi une forme

d’interaction de délégation.

1.3.2 Deuxième relation : digression des UE et des E

La forme de délégation a également été identifiée par une relation de digression des

contenus des composantes UE et E de l’un des deux élèves de la dyade.

1.3.2.1 Dispositif sans chambre

Dans le dispositif chambre, la relation de digression a été notamment identifiée

quand l’un des deux élèves demandait de l’aide à un ou plusieurs élèves d’une autre dyade

rencontrée durant la course. En effet, lors de ces rencontres entre les dyades d’élèves ou de

détection de la présence d’une autre dyade au loin, ils en profitaient pour demander de l’aide

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et glaner des informations utiles à leur course : ces informations portaient le plus souvent sur

la possibilité que la dyade interrogée ait la même balise à poinçonner et sur les chemins et les

directions à suivre pour se rendre à la balise recherchée. A titre d’exemple dans la dyade 1,

Marie, après s’être assurée que l’élève interrogé avait le même numéro de balise, a demandé

si la direction qu’elle lui montrait à l’aide de son bras était la bonne : « John, John, c’est par

là ? ». Dans l’autoconfrontation, Marie a expliqué au chercheur : « Quand on rencontre des

élèves, des fois ils nous aident et donc on les aide. Dès qu’on croise quelqu’un en fait on

demande quelles sont leurs balises pour savoir si on a les mêmes et s’échanger des

informations ». Un des deux élèves demandait donc ponctuellement de l’aide à des élèves

d’une autre dyade (Tableau 28).

N°USE

(temps)

Marie

UE/E

Digression (��) des

UE/E

Elève d’une autre

dyade

17

(3’00’’)

UE : Appelle John et

lui demande si c’est

la bonne direction

E : Demander de

l’aide à John

UE : �

E : �

La présence au loin

d’une autre dyade

d’élèves

Tableau 28 : Extrait de l’articulation collective de Marie et de Mélanie (Dyade 1) traduisant

une relation de digression des UE et des E

Dans cet exemple, les contenus de l’UE et du E de Marie étaient digressifs en ce sens qu’ils

étaient orientés vers une autre dyade d’élèves, traduisant ainsi une forme d’interaction de

délégation.

Dans le dispositif sans chambre, cette relation de digression a aussi été identifiée

lorsque l’un des deux élèves répondait à la question d’un ou plusieurs élèves d’une autre

dyade. A titre d’exemple, dans la dyade 2, Sophie a répondu à une question posée par un

élève d’une autre dyade au sujet d’une balise : « La 9, elle est par là ! ». Marie lors de

l’autoconfrontation a commenté ce passage de manière spontanée sans que le chercheur

n’arrête la vidéo en disant : « On savait où elle [la balise cherchée par les autres élèves] car

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148

on venait de la croiser ». Un des deux élèves apportait donc ponctuellement son aide à une

autre dyade d’élèves (Tableau 29).

N°USE

(temps)

Sophie

UE/E

Digression (��) des

UE/E

Elève d’une autre

dyade

80

(10’37’’)

UE : Annonce à un

élève d’une autre

dyade la direction à

suivre

E : Répondre à la

question d’une autre

élève

UE : �

E : �

La question d’un

élève d’une autre

dyade

Tableau 29 : Extrait de l’articulation collective de Sophie et de Camille (Dyade 2) traduisant

une relation de digression des UE et des E

Dans cet exemple, les contenus de l’UE et du E de Sophie étaient digressifs en ce sens qu’ils

étaient orientés vers une autre dyade d’élèves marquant ainsi une forme d’interaction de

délégation.

1.3.2.2 Dispositif chambre

Dans le dispositif chambre, la digression a été notamment identifiée dans des moments

au cours desquels l’un des deux élèves demandait de l’aide à un ou plusieurs élèves d’une

autre dyade rencontrée. A ce titre, en rencontrant les élèves d’une autre dyade sur un chemin,

Antoine, élève de la dyade 3, leur a demandé si elles avaient aperçu une balise sur le chemin :

« Vous avez trouvé la balise qui est sur ce chemin ? Oh les filles, vous avez vu une balise sur

le chemin ? ». Antoine a expliqué ce moment : « On a croisé les filles qui couraient vers nous

en criant sur le chemin… on a demandé si elles avaient vu la balise ». Un des deux élèves

demandait donc ponctuellement de l’aide à une autre dyade rencontrée (Tableau 30).

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N°USE

(temps)

Elève d’une autre

dyade

Digression (��) des

UE/E

Antoine

UE/E

107

(9’39’’)

La rencontre d’une

autre dyade d’élève

UE : �

E : �

UE : Demande aux

élèves d’une autre

dyade si elles ont

trouvé une balise sur

le chemin

E : Demander de

l’aide à des élèves

d’une autre dyade

Tableau 30 : Extrait de l’articulation collective de Cédric et d’Antoine (Dyade 3) traduisant

une relation de digression des UE et des E

Dans cet exemple, les contenus de l’UE et du E d’Antoine étaient digressifs en ce sens qu’ils

étaient orientés vers une autre dyade d’élèves caractérisant ainsi une forme d’interaction de

délégation.

Dans le dispositif chambre, la digression a également été identifiée lorsqu’un des

élèves répondait à la question d’un ou plusieurs élèves d’une autre dyade. A titre

d’illustration, en rencontrant les élèves d’une autre dyade sur un chemin, Lucie, élève de la

dyade 4, a répondu à une de leur question : « Non on n’a pas vu la balise ». Celle-ci a par

conséquent apporté ponctuellement son aide à un élève d’une autre dyade qui leur avait posé

une question (Tableau 31).

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N°USE

(temps)

Elève d’une autre

dyade

Digression (��) des

UE/E

Lucie

UE/E

329

(31’24’’)

La question d’un

élève d’une autre

dyade

UE : �

E : �

UE : Répond aux

élèves d’une autre

dyade

E : Répondre à la

question des autres

élèves

Tableau 31 : Extrait de l’articulation collective de Lola et de Lucie (Dyade 4) traduisant une

relation de digression des UE et des E

Dans cet exemple, les contenus de l’UE et du E de Lucie étaient digressifs en ce sens qu’ils

étaient orientés vers une autre dyade d’élèves témoignant ainsi d’une forme d’interaction de

délégation.

1.3.2.3 Dispositif 2 cartes

Dans le dispositif 2 cartes, la digression a été surtout identifiée quand l’un des deux

élèves demandait de l’aide à un ou plusieurs élèves d’une autre dyade rencontrée.

Effectivement, en croisant des camarades de classe sur un chemin, l’un des deux élèves

demandait leur carte pour la superposer à la sienne et établir l’itinéraire de course à suivre. A

titre d’exemple, ayant dépassé la balise n°11 qu’elles n’avaient pas à valider et ne trouvant

pas la balise n°4 alors qu’elles pensaient en être proches, Sophie, élève de la dyade 2 a

demandé à la dyade d’élèves qu’elle croisait de montrer leur carte : « Tu me prêtes la carte

pour savoir si on a dépassé la 4 ». La dyade rencontrée avait justement la balise n°11 à

valider. En comparant les emplacements des balises n°11 (qu’elles venaient de dépasser) et

n°4 (qu’elles recherchaient), Sophie et Camille ont pu en conclure qu’elles n’avaient pas

dépassé la balise n°4 (son emplacement étant plus loin dans le chemin sur lequel elles

marchaient). Dans l’autoconfrontation, lorsque le chercheur a demandé à Sophie : « Vous

faites quoi là ? », elle a répondu : « Je voulais savoir si on avait dépassé la 4. Elles avaient la

11 qui était sur leur carte donc j’ai pu voir la distance qu’il y avait si on avait dépassé la 4 ».

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151

Un des deux élèves a donc demandé ponctuellement de l’aide à une autre dyade rencontrée en

utilisant les informations de leur carte (Tableau 32).

N°USE

(temps)

Sophie

UE/E

Digression (��) des

UE/E

Elève d’une autre

dyade

66

(12’50’’)

UE : Demande à un

élève rencontré sa

carte

E : Demander de

l’aide à une autre

dyade

UE : �

E : �

La rencontre d’une

autre dyade

Tableau 32: Extrait de l’articulation collective de Sophie et de Camille (Dyade 2) traduisant

une relation de digression des UE et des E

Dans cet exemple, les contenus de l’UE et du E de Sophie étaient digressifs en ce sens qu’ils

étaient orientés vers une autre dyade d’élèves traduisant ainsi une forme d’interaction de

délégation.

Dans le dispositif 2 cartes, la digression a également été identifiée dans des moments

où l’un des deux élèves répondait à la question d’un ou plusieurs élèves d’une autre dyade. A

ce titre, en rencontrant les élèves d’une autre dyade sur un chemin, John, élève de la dyade 5,

les a informé que la balise qu’ils recherchaient n’était pas dans la direction qu’ils prenaient

mais sur le côté gauche : « Non, elle [la balise] n’est pas par là, elle est par-là sur le chemin

de gauche ». John a donc apporté ponctuellement son aide à un élève d’une autre dyade qui

lui avait posé une question. Lors de l’autoconfrontation, à la question : « Vous faites ça

souvent ? », John a répondu : « Oui à chaque fois qu’on se croise ». Un des deux élèves

apportait donc ponctuellement son aide à un élève d’une autre dyade qui lui posait une

question (Tableau 33).

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N°USE

(temps)

Elève d’une autre

dyade

Digression (��) des

UE/E

John

UE/E

83

(8’37’’)

La question d’un

élève d’une autre

dyade

UE : �

E : �

UE : Répond que la

balise n’est pas dans

les alentours

E : Répondre à la

question d’un autre

élève

Tableau 33: Extrait de l’articulation collective d’Adrien et de John (Dyade 5) traduisant une

relation de digression des UE et des E

Dans cet exemple, les contenus de l’UE et du E de John étaient digressifs en ce sens qu’ils

étaient orientés vers une autre dyade d’élèves caractérisant ainsi une forme d’interaction de

délégation.

1.3.2.4 Dispositif leurre

Dans le dispositif leurre, la digression a principalement été identifiée quand l’un des

deux élèves demandait de l’aide à un ou plusieurs élèves d’une autre dyade rencontrée. En

effet, lorsque les élèves ne trouvaient pas du premier coup la vraie balise dans la zone-leurre,

un des deux élèves demandait à une autre dyade au loin si elle l’avait vu. A titre d’illustration,

alors que les élèves de la dyade 2 étaient tombées sur une fausse balise, Camille et Sophie se

sont dirigées vers les élèves d’une autre dyade qui revenaient d’une autre balise dans la zone-

leurre. Camille leur a demandé : « Vous avez-vu la 18 ? ». Les autres élèves ont acquiescé.

Sophie a demandé aussitôt : « Où ça ? ». Ils ont répondu : « Là-bas [un élève montre une

direction avec son doigt] ». Sophie a insisté en redemandant : « Où ça là-bas ? » et Camille a

poursuivi en montrant la même direction avec son bras : « Derrière, là-bas ? ». Les deux

élèves ont chacun leur tour demandé ponctuellement de l’aide à des élèves d’une autre dyade

rencontrée au sujet de la balise qu’ils recherchaient (Tableau 34).

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153

N°USE

(temps)

Sophie

UE/E

Digression (��) des

UE/E

Camille

UE/E

49

(4’56’’)

La rencontre d’une

autre dyade d’élèves

UE : �

E : �

UE : Demande à un

autre élève s’il a la

balise qu’elle

recherche

E : Demander de

l’aide à une autre

dyade

50

(5’00’’)

UE : Demande aux

autres élèves la

direction de la balise

E : Demander de

l’aide à des élèves

d’une autre dyade

UE : �

E : �

La rencontre d’une

autre dyade d’élèves

Tableau 34 : Extrait de l’articulation collective de Sophie et de Camille (Dyade 2) traduisant

une relation de digression des UE et des E

Dans cet exemple, les contenus des UE et des E de Sophie et Camille étaient digressifs en ce

sens qu’ils étaient orientés vers une autre dyade d’élèves marquant ainsi une forme

d’interaction de délégation.

Dans le dispositif leurre, la digression a également été identifiée dans des moments où

l’un des deux élèves répondait à la question d’un ou plusieurs élèves d’une autre dyade. A ce

titre, en rencontrant les élèves d’une autre dyade sur un chemin, Régis, élève de la dyade 6,

les a informé de la direction à suivre pour trouver la balise qu’ils recherchaient à l’aide de son

bras : « Elle est par-là ». Régis a donc apporté ponctuellement son aide à un élève d’une autre

dyade qui lui avait posé une question (Tableau 35).

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154

N°USE

(temps)

Régis

UE/E

Digression (��) des

UE/E

Elève d’une autre

dyade

83

(8’37’’)

UE : Montre une

direction du bras

E : Répondre à la

question d’un autre

élève

UE : �

E : �

La question d’un

élève d’une autre

dyade

Tableau 35: Extrait de l’articulation collective de Régis et de David (Dyade 6) traduisant une

relation de digression des UE et des E

Dans cet exemple, les contenus de l’UE et du E de Régis étaient digressifs en ce sens qu’ils

étaient orientés vers une autre dyade d’élèves caractérisant ainsi une forme d’interaction de

délégation.

2. Trois modes d’utilisation dyadique de la carte en relation avec ses

propriétés physiques et fonctionnelles

L’analyse compréhensive de l’articulation collective des cours d’action individuels des

élèves dans chaque dyade a permis de caractériser trois modes différents d’utilisation

dyadique de la carte en relation avec ses propriétés physiques et fonctionnelles chez les élèves

lorsqu’ils s’engagent dans les leçons de course d’orientation : (1) le mode partagé, (2) le mode

univoque et (3) le mode détaché. Ces modes contrastés d’utilisation de la carte ont été

qualifiés « d’utilisation dyadique » pour signifier qu’ils sont toujours le fruit d’une activité

indissolublement individuelle et sociale.

2.1 Le mode partagé

Lors d’un mode partagé, les propriétés physiques notamment les inscriptions sur la

carte ressortaient : les élèves avec leurs doigts pointaient les symboles dessinés sur la carte

(élément remarquable comme une souche d’arbre), traçaient un itinéraire en suivant les traits

noirs (les traits noirs symbolisant les chemins) ou balayaient une zone de leur doigt (plusieurs

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155

éléments remarquables proches comme les dépressions) en agissant dessus alternativement ou

simultanément. Ces moments de pointage, de traçage et de balayage sur la carte faisaient

ressortir une de ses propriétés fonctionnelles relative à son « utilité d’orientation » : « Là, il

faut aller à la maison du gardien et prendre le chemin ! [pointe du doigt sur la carte un

symbole] » (Antoine, porteur de carte) / « Le chemin-là [place son doigt à côté de celui de son

partenaire] » (Cédric, non porteur de carte) / « mmm » (Antoine) / « On doit passer par là »

(Cédric). Dans l’autoconfrontation, à la question du chercheur : « Qu’est-ce que vous avez fait

dans la chambre d’appel ? », Antoine a répondu : « On a construit un itinéraire de course ».

Le chercheur a relancé : « C’est-à-dire ? » et Antoine a poursuivi en disant : « On a fait des

chemins pour aller aux balises ». Ce mode partagé a également été observé lorsque les élèves

s’arrêtaient à un croisement de chemins (i.e. un point de décision) et manifestaient des doutes

au sujet de la direction à prendre. Lors de ce mode partagé, d’autres propriétés physiques de la

carte ressortaient : sa petite taille (format A4) et sa matière légère (en papier) lui conférait une

propriété fonctionnelle « facilement transportable » qui permettait à l’élève « porteur de

carte » de la montrait à son partenaire et de l’inviter à la tenir conjointement d’une main. La

carte rapprochait les deux élèves et leurs regards étaient dirigés dessus : « Donc, la table ici

[pointe sur la carte un symbole puis le montre sur le terrain] » (Mélanie, non porteuse de

carte et la tenant d’une main la carte) / « Bah, oui [pointe du doigt de sa main libre sur la

carte le même symbole près du doigt de sa partenaire]. Je crois qu’il faut aller par-là [montre

une direction à suivre - la même montrée que celle de sa partenaire] » (Marie, porteuse de

carte et la tenant d’une main) / « Bah oui, je crois qu’il faut passer par-là [regarde la

direction montrée par sa partenaire] » (Mélanie, non porteuse de carte). Lors de

l’autoconfrontation, à la relance du chercheur : « d’accord, vous regardez ensemble…. »,

Marie a poursuivi l’autoconfrontation en disant : « Oui à chaque fois on est à côté comme ça,

elle est là et puis moi je suis comme ça [montre au chercheur qu’elles sont autour de la

carte]. On regarde la carte et on construit le chemin pour voir s’il y en a une qui dit : ‘on fait

ça’ ou que l’autre se trompe et bah du coup on peut vérifier ».

2.2 Le mode univoque

Lors d’un mode univoque, l’élève regardait seul la carte et parfois empêchait l’autre de

la consulter. Du fait de ses propriétés physiques (petite taille et légère), la carte faisait

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apparaître sa propriété fonctionnelle « facilement transportable » : elle pouvait être tenue

d’une seule main par l’élève qui l’éloignait de la vue de son partenaire le privant ainsi

ponctuellement de toute utilisation : « Mais non, c’est mieux d’aller tout droit Marie [pointe

du doigt un chemin sur la carte] » (Mélanie, porteuse de carte) / « Ca va plus vite par là [tout

en éloignant la carte de son bras gauche, tend son bras droit et indique du doigt une

direction] » (Marie, non porteuse de carte) / « Mais non ça va pas plus vite parce que j’ai

vu [en regardant seule la carte] » (Mélanie, porteuse de carte). L’élève « porteur de carte » se

l’appropriait. Lors de l’autoconfrontation, à la question du chercheur : « Qu’est-ce qu’il se

passe à ce moment-là ? », Marie a commenté : « Elle [sa partenaire Mélanie] s’est un peu

écartée pour ne pas que je la regarde [la carte]. Après j’ai dit c’est bon tu as raison quand

elle m’a dit pour le chemin ».

2.3 Le mode détaché

Lors d’un mode détaché, les propriétés physiques de la carte ressortaient lorsque les

élèves approchaient d’un point remarquable (e.g., un banc à une intersection, une dépression,

une cabane dans la forêt) et estimaient reconnaitre des éléments de l’environnement pour

s’émanciper de son utilisation. Indissociablement, la propriété physique « pliable » de la carte

ressortait dans ces moments-là. A titre d’exemple, tout en courant, Camille a interrogé Sophie

(porteuse de carte) : « Il faut suivre quel chemin ? » (Camille, non porteuse de carte).

Toujours en courant, Sophie a répondu sans regarder la carte qui était pliée en deux dans une

main en indiquant de l’autre la direction : « A droite, c’est le chemin de droite, là où il y a le

banc. Elle est juste là-bas » (Sophie, porteuse de carte). Camille a suivi sa partenaire en

prenant le chemin de droite. Lors de l’autoconfrontation, le chercheur fait remarquer à Sophie

qu’elle n’avait pas utilisé la carte à ce moment-là, elle a alors expliqué : « Là elle [Camille]

m’a demandé quel chemin il faut suivre, je me rappelais que c’était le chemin du banc qu’il

fallait prendre et comme on le voyait [le banc] j’ai dit : ‘à droite’ ».

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157

CHAPITRE 3

Discussion intermédiaire

Sur la base des résultats précédents et les études déjà réalisées sur les interactions entre

les élèves en EPS, ce chapitre présente une discussion intermédiaire relative prioritairement

aux différentes formes d’interaction identifiées en course d’orientation telles qu’elles sont

vécues par les dyades d’élèves en EPS. Nous discuterons plus tard des modes d’utilisation de

la carte repérés dans ces lignes de résultats.

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Chapitre 3. Discussion intermédiaire

Dans les quatre dispositifs, ont émergé trois formes typiques d’interaction dyadique :

une forme de co-construction, une forme de confrontation et une forme de délégation. Nos

résultats viennent à la fois confirmer et enrichir ceux d’études antérieures concernant les

formes d’interaction entre pairs engagés dans la réalisation d’une tâche commune.

Effectivement, la forme de co-construction identifiée dans notre étude est similaire à celle de

la co-élaboration acquiesçante et celle de la co-construction mises en évidence par Gilly et al.

(1988) et reprises en EPS par Darnis et Lafont (2008). Les deux élèves pouvaient s’accorder

sur les modalités à mettre en œuvre pour résoudre la tâche soit à partir de propositions

alternatives des deux élèves aboutissant à une solution commune (e.g., dans la construction de

l’itinéraire, les deux élèves traçaient simultanément sur la carte les chemins à suivre,

reprenant pour partie ce qu’avait commencé à tracer le partenaire) (cas de la co-élaboration

acquiesçante) soit à partir de la proposition d’un des deux élèves que son partenaire contrôlait,

aboutissant à son accord (e.g., dans la construction de l’itinéraire, un des deux élèves traçait

sur la carte ou indiquait une balise à aller chercher pendant que son partenaire regardait et

acquiesçait lors de co-construction). La forme de confrontation identifiée dans notre étude

peut apparaître également similaire à celle de la confrontation contradictoire (Darnis et

Lafont, 2008 ; Gilly et al., 1988). Les deux élèves ne s’accordaient pas sur les modalités à

mettre en œuvre pour résoudre la tâche, chacun proposant des arguments pour justifier son

désaccord à la proposition du partenaire (e.g., à la proposition de suivre une direction

annoncée par leur partenaire, les élèves pouvaient refuser en proposant une autre direction et

en la justifiant) (cas de la confrontation contradictoire). Il semble donc que les interactions

dyadiques entre élèves qui sont non accessibles à l’enseignant d’EPS sont similaires à celles

déjà identifiées par les recherches étudiant les interactions entre élèves sous supervision

constante de l’enseignant.

Pourtant, une forme d’interaction ne nous paraît pas ou peu avoir été dévoilée dans les études

en milieu scolaire : la délégation. Si elle semble se rapprocher d’une forme de co-élaboration

acquiesçante (un des deux acteurs élabore une solution et la propose à son camarade qui la

contrôle et ne manifeste pas d’opposition) (Gilly et al., 1988), la délégation est différente en

ce sens qu’elle caractérise le « lâcher-prise » d’un élève qui « laisse la main » à son

partenaire : l’élève en question n’agit pas pour aider à l’atteinte de l’objectif visé devant

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l’intervention de son partenaire (i.e. il ne contrôle pas la solution proposée par son partenaire).

Dans ce cas, soit cette délégation s’initie à la demande volontaire de l’élève (i.e. l’élève

demande à son partenaire de prendre la responsabilité de l’itinéraire et le suit sans contrôler),

soit le flux de l’activité du partenaire lui fait « lâcher-prise » (i.e. le partenaire mène la dyade

sans aucun contrôle de l’élève). La délégation dévoile donc une configuration de type

« locomotive/wagon » (Blanchard, 2008) car l’un des deux élèves de la dyade se laisse guider

par son partenaire. Aussi, la forme de délégation caractérise un « lâcher-prise » d’un élève qui

demande des informations à une autre dyade lui délégant ainsi une partie de la responsabilité

de l’itinéraire. Ce « lâcher-prise » s’illustre également lorsqu’un élève répond à la question

d’un élève d’une autre dyade - la délégation dévoile donc une configuration de type

« locomotive/wagon » dans la mesure où un des deux élèves de la dyade se laisse guider de

manière opportuniste (rencontre avec d’autres dyades) ou guide de manière spontanée une

autre dyade. La forme de délégation a été particulièrement remarquée lors des moments de

doute. Le fait de douter sur un itinéraire pouvait être lié au sentiment d’être perdu (l’élève

n’aperçoit ni les points remarquables ni la balise), à une succession de mauvais itinéraires

proposés (l’élève initialement avait pris la main et guidait la dyade mais de manière peu

performante) ou à une façon très convaincante de proposer l’itinéraire par le partenaire (le

partenaire insiste sur la validité de ces propos) : dans ces trois cas, dans l’urgence temporelle,

l’élève laissait souvent la main à son partenaire en lui faisant confiance et le suivait quelles

que soient les options retenues. Aussi, le fait de rencontrer des élèves d’une autre dyade ou de

les apercevoir au loin favorisait un échange d’informations sur les balises (les élèves

échangeaient sur la direction à prendre, sur la possibilité que la dyade rencontrée avait vu la

balise qu’ils cherchaient) : dans ce cas, les élèves faisaient confiance aux autres élèves et

suivaient leurs indications d’une part, et aidaient les autres dyades d’autre part.

Johnson, Johnson et Holubec (1994) montrent que les interactions entre élèves les plus

performantes sont celles qui sont coopératives à dominante de co-construction et qui sont

stimulées dans des dispositifs d’apprentissage pour favoriser notamment le développement

des apprentissages sociaux. En course d’orientation, bien que l’enseignant d’EPS fasse le

choix de formes de groupements spécifiques (les dyades affinitaires encourageraient les

discussions entre les élèves et diminueraient le caractère anxiogène du milieu), des

organisations spatiales particulières (la chambre d’appel inviterait les élèves à construire une

stratégie de course avant le départ de la course) et matérielles (la distribution d’une carte pour

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deux inciterait les élèves à se regrouper autour pour une lecture commune), nos résultats

montrent qu’ils n’induisent pas nécessairement cette forme de co-construction recherchée par

les enseignants d’EPS. En effet, les résultats montrent que les interactions s’actualisent

majoritairement par une co-construction mais aussi par une délégation (la forme de

confrontation étant peu présente quel que soit le dispositif d’apprentissage). Cette forme de

délégation a déjà été évoquée en course d’orientation dans les leçons d’EPS par Blanchard

(2008) : l’étude portait sur une comparaison des avantages et des inconvénients sur l’activité

individuelle vs activité collective en course d’orientation - l’auteur catégorisant cette

configuration comme inconvénient en ce sens qu’un seul élève du groupe travaillait

activement. Pourtant, si nos résultats confirment cette présence de « locomotive/wagon », ils

montrent aussi qu’il suffit qu’un doute dans le choix du chemin apparaisse chez l’élève

porteur de carte pour que le partenaire propose un itinéraire et « reprenne la main » ou que

l’itinéraire proposé par l’élève porteur de carte conduisent la dyade dans une mauvaise

direction pour que celui-ci « laisse la main » à son partenaire. Les rôles des élèves

fluctuent donc au gré de la situation dans la course. Ce qui se joue dans cette dynamique des

interactions et qui échappe en partie au contrôle de l’enseignant d’EPS est source de savoir-

faire sociaux. C’est dans le « jeu » des confrontations, délégations ou des co-constructions

que les élèves apprennent sur eux-mêmes et sur les autres.

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Partie 4. Analyse quantitative

La deuxième analyse comprenant le traitement quantitatif des données issues de

l’analyse qualitative précédente a consisté à représenter graphiquement la dynamique des

formes d’interaction au sein des dyades d’élèves et à caractériser cette dynamique.

Cette analyse quantitative est composée de trois chapitres :

Le chapitre 1 présente la première étape quantitative de traitement des données

Le chapitre 2 décrit les résultats issus de cette analyse quantitative

Le chapitre 3 discute des résultats obtenus

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CHAPITRE 1 METHODE DE TRAITEMENT DES

DONNEES

Ce chapitre présente l’emprunt d’un outil hétérodoxe à notre cadre théorique et

méthodologique d’appartenance. Il ambitionnera d’expliquer la construction et l’ajustement

de la méthode de traitement quantitatif des données. Dans un premier temps, il s’agira

d’expliciter la construction de la « fenêtre mobile temporelle d’analyse » permettant de

représenter graphiquement les dynamiques des formes d’interaction identifiées entre les

élèves. Dans un second temps, nous présenterons les trois indicateurs de cette dynamique qui

la caractérise et permettent sa représentation graphique.

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Chapitre 1. Méthode de traitement des données

1. Labellisation et définition d’une fenêtre mobile

Sur la base de l’analyse de l’articulation collective des cours d’action individuels nous

permettant d’établir des formes typiques d’interaction (i.e. la première étape de traitement des

données), nous avons attribué à chaque seconde un label correspondant à une forme

particulière d’interaction jusqu’à la fin de la course. Nous avons donc d’abord identifié à

chaque seconde de la course la forme typique d’interaction présentée par chaque dyade. A

titre d’exemple, dans la dyade 4, à la seconde « 4s », la forme typique d’interaction

correspondait à une forme de délégation et a été labélisée par un « C ». En revanche, à la

seconde « 2066s », la forme typique d’interaction correspondait à une forme de co-

construction labélisée par un « A » (Tableau 36). Cela nous a permis d’obtenir le nombre

d’occurrences pour chaque forme d’interaction, dans chaque dyade, et pour chacun des quatre

dispositifs d’apprentissage. A partir de ces résultats, nous avons pu inventorier le nombre total

d’occurrences de toutes les formes d’interaction. Nous avons ainsi pu calculer le pourcentage

de chaque forme typique d’interaction pour chaque dyade dans les différents dispositifs

d’apprentissage. A titre d’exemple, pour la dyade 4, nous avons identifié 965 occurrences en

co-construction, 81 en confrontation et 1020 en délégation. Cela donne 2066 occurrences au

total permettant de calculer la présence de chacune des formes en pourcentages (e.g., 81/2066

= 3,9% de confrontation).

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Dyade 4 : Lola/Lucie - Dispositif chambre

Temps en secondes Labellisation des formes

d’interaction

1 C A : co-construction

B : confrontation

C : délégation

2 C

3 C

4 C

(…)

2066 A

Tableau 36 : Extrait illustrant la labellisation des formes d’interaction typiques dans la dyade

4 (Lola et Lucie)

Nous avons ensuite défini une fenêtre temporelle mobile d’analyse permettant sur toute la

durée de la course de saisir la part de l’interaction précédente et la part de l’interaction

potentiellement émergente dans l’activité des dyades. Cette fenêtre mobile d’une durée de

trois minutes a été déplacée toutes les minutes jusqu’à la fin de la course (Figure 16). Ces

paramètres ont pu être déterminés à partir de l’analyse de l’articulation collective des cours

d’action individuels des deux élèves. Elle a permis en effet d’identifier la durée de trois

minutes comme une fenêtre temporelle mobile significative pour repérer des changements de

formes d’interaction entre les élèves dans la dyade (i.e. cette durée correspondait à une durée

suffisamment grande pour pouvoir repérer des changements dans les formes d’interaction

entre les élèves dans la dyade). Afin de circonscrire dans ce laps de temps le début et la fin de

chaque forme d’interaction pour en saisir le flux, nous avons analysé minute par minute

chaque fenêtre temporelle. Ce pas d’une minute nous garantissait en effet le repérage à un

grain fin de tous les changements possibles de formes d’interaction afin de n’en manquer

aucune sur toute la durée de la course.

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Figure 16 : Illustration de l’utilisation d’une fenêtre mobile

A partir de cette fenêtre mobile, trois indicateurs ont été calculés afin de rendre compte de la

dynamique des formes d’interaction : 1) la quantité de changements dans les formes

d’interaction présentées par chaque dyade (i.e. ratio de changements) ; 2) la tendance à la

disparition ou à l’émergence de telle ou telle forme d’interaction au cours du temps dans

chaque dyade (i.e. répartition des formes d’interaction) et 3) la nature des changements d’une

forme d’interaction à une autre dans le temps (i.e. récurrence des successions des formes

d’interaction) grâce au logiciel MATLAB2.

2 MATLAB (Matrix Laboratory) est un logiciel de programmation de calculs numériques. Il permet d’utiliser des matrices (interprétant des phénomènes linéaires et non linéaires), d’afficher des courbes, d’obtenir des représentations graphiques à partir de données numériques.

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2. Indicateurs de la dynamique des formes d’interaction

2.1 Ratio de changements

Premièrement, la quantité de changements est caractérisée par le ratio de changements

des interactions. Il correspond au rapport en pourcentage entre le nombre réel de changements

observés dans les interactions et le nombre de changements potentiels qui auraient pu s’opérer

à l’intérieur d’une fenêtre temporelle. A titre d’exemple, dans la Figure 16, la fenêtre

temporelle « t1 » rend compte de dix interactions successives suivant la logique [A, A, A, A,

A, A, C, A, A, C]. Le ratio de changement est de 3 (nombre observé de changement) / 9

(nombre de changements potentiels) x 100 soit égal à 33,3%. Dans la fenêtre « t2 », dix

interactions successives s’organisent différemment suivant la logique [A, A, C, A, A, C, A, A,

C, B]. Le ratio de changements est de 6 / 9 x 100 soit égal à 66,9%. Dans la fenêtre temporelle

« t3 », dix interactions successives s’organisent différemment suivant la logique [A, C, A, A,

C, B, B, C, C, A]. Le ratio est alors de 6 / 9 x 100 soit égal à 66,6%. Le ratio de changements

renseigne donc sur la dynamique de la quantité des changements entre les formes

d’interaction au cours du temps.

2.2 Répartitions des formes d’interaction

Deuxièmement, l’indicateur répartition des formes d’interaction a été calculé afin de

mettre en évidence la tendance d’émergence et de disparition des formes d’interaction au

cours du temps. A l’intérieur de chaque fenêtre temporelle, il correspond à la distribution en

pourcentage des formes d’interaction relevées. A titre d’exemple, dans la Figure 16, la fenêtre

temporelle « t1 » rend compte d’une suite de dix interactions suivant la logique [A, A, A, A,

A, A, C, A, A, C]. Parmi ces dix interactions, huit ont un label « A », deux ont un label « C »,

soit, respectivement, une répartition égale à 8 / 10 x 100 (80% de présence de l’interaction

labélisée « A ») et 2 / 10 x 100 (20% de présence de l’interaction labélisée « C »). La fenêtre

temporelle « t2 » rend compte d’une suite de dix interactions successives suivant la logique

[A, A, C, A, A, C, A, A, C, B]. Parmi ces dix interactions, six ont un label « A », une a un

label « B » et trois ont un label « C » soit, respectivement, une répartition égale à 6 / 10 x 100

(60% de présence de l’interaction labélisée « A »), 1 / 10 x 100 (10% de présence de

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l’interaction labélisée « B ») et 3 / 10 x 100 (30% de présence de l’interaction labélisée

« C »). La fenêtre temporelle « t3 » rend compte d’une suite de dix interactions suivant la

logique [A, C, A, A, C, B, B, C, C, A]. Parmi ces dix interactions, quatre ont un label « A »,

deux ont un label « B » et quatre ont un label de « C » soit, respectivement, une répartition

égale à 4 / 10 x 100 (40% de présence de l’interaction labélisée « A »), 2 / 10 x 100 (20% de

présence de l’interaction labélisée « B ») et 4 / 10 x 100 (40% de présence de l’interaction

labélisée « C »). Du fait de la superposition partielle des fenêtres mobiles, une fenêtre

temporelle à un instant donné tient compte en partie des formes d’interaction de la fenêtre

mobile précédente et aussi celles de la fenêtre suivante. La répartition des interactions

renseigne donc sur la dynamique des tendances de la distribution des formes d’interaction au

cours du temps.

2.3 Récurrence des successions des formes d’interaction

Troisièmement, la récurrence dans l’évolution d’une forme d’interaction à une autre

est caractérisée par la récurrence des successions des formes d’interaction. Cet indicateur

correspond à l’identification au cours du temps d’un changement dans la nature d’une

interaction à une autre. Cet indicateur rend compte de la répétition des interactions dans le

temps (i.e. succession d’une interaction à l’instant ‘t’ à la même interaction à ‘t + 1’) et du

changement des interactions dans le temps (i.e. succession d’une interaction à l’instant ‘t’ à

une autre interaction à ‘t + 1’). A titre d’exemple, dans la Figure 16, la fenêtre temporelle

« t1 » rend compte de dix interactions successives suivant la logique [A, A, A, A, A, A, C, A,

A, C]. Les changements d’une forme d’interaction à une autre possibles s’opérant sont

[A→A] ; [A→C] ; [C→C] ; [C→A]. Dans cette fenêtre [A, A, A, A, A, A, C, A, A, C], il y a

six répétitions [A→A], deux changements [A→C], un changement [C→A]. Dans la fenêtre

« t2 », dix interactions successives s’organisent différemment suivant la logique [A, A, C, A,

A, C, A, A, C, B]. Les changements d’une forme d’interaction à une autre possibles s’opérant

sont [A→A] ; [A→C] ; [A→B] ; [B→A] ; [B→C] ; [C→C] ; [C→A] ; [C→B]. Dans cette

fenêtre [A, A, C, A, A, C, A, A, C, B], il y a trois répétitions [A→A], trois changements

[A→C], deux changements [C→A] et un changement [C→B]. Dans la fenêtre temporelle

« t3 », dix interactions successives s’organisent différemment suivant la logique [A, C, A, A,

C, B, B, C, C, A]. Les changements d’une forme d’interaction à une autre possibles s’opérant

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168

sont [A→A] ; [A→C] ; [A→B] ; [B→B] ; [B→A] ; [B→C] ; [C→C] ; [C→A] ; [C→B].

Dans cette fenêtre [A, C, A, A, C, B, B, C, C, A], il y a une répétition [A→A], deux

changements [C→A], deux changements [A→C], un changement [C→B], une répétition

[B→B], une répétition [C→C] et un changement [B→C]. La récurrence des successions des

formes d’interaction renseigne donc la nature des changements d’une forme d’interaction à

une autre que ni le ratio de changement ni la répartition des formes d’interaction pris

séparément ne permettent. La récurrence des successions des formes d’interaction renseigne

donc une dynamique des changements de la nature d’une forme d’interaction à une autre au

cours du temps.

Dans le cadre de notre étude centrée sur la dynamique des formes d’interaction en course

d’orientation, la labellisation des données d’expérience puis leur traitement quantitatif à partir

des indicateurs de ratio de changements, de répartitions des formes d’interaction, et de

récurrence des successions des formes d’interaction favorisent la compréhension de cette

dynamique pour chaque dyade en rendant compte de la quantité des changements d’une forme

d’interaction à une autre, de la tendance à émerger ou à disparaître de ces formes

d’interaction, et de la nature des changements opérés entre ces formes au fil de la course et en

fonction du dispositif d’apprentissage.

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169

CHAPITRE 2

Résultats

Ce chapitre présente les résultats issus d’une analyse quantitative opérée dans la

deuxième étape de traitement des données. Particulièrement, celle-ci mettra en évidence trois

lignes de résultats : premièrement, à partir du nombre d’occurrences de chaque forme

d’interaction, il pointe la répartition en pourcentage des formes d’interaction pour chaque

dyade d’élèves dans les différents dispositif d’apprentissage étudiés ; deuxièmement, il ressort

des singularités et des similarités dans les dynamiques des formes d’interaction des dyades

d’élèves selon les différents dispositifs d’apprentissage de course d’orientation ;

troisièmement, il résulte que le mode d’utilisation dyadique de la carte participe à la

dynamique des formes d’interaction, et précisément à trois stabilités récurrentes de formes

d’interaction et à six changements récurrents entre ces formes.

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Chapitre 2. Résultats

L’analyse quantitative nous a permis de rendre compte du nombre d’occurrences des

différentes formes d’interaction dans chaque dyade d’élèves pour chacun des dispositifs

d’apprentissage et de caractériser la dynamique de ces formes d’interactions.

1. Nombre d’occurrences des formes d’interaction

1. 1 Dispositif sans chambre

Dans le dispositif sans chambre, le nombre d’occurrences des trois formes

d’interaction montre dans les deux dyades étudiées que la forme de confrontation est

minoritaire avec un pourcentage inférieur à 3%. La délégation, quant à elle, est

systématiquement supérieure à 80% tandis que celle de la co-construction est inférieure à 20%

(Tableau 37).

Forme d’interaction Occurrences %

Dyade 1

(Marie/Mélanie)

Co-construction 300/2065 14,5%

Confrontation 60/2065 2,9%

Délégation 1705/2065 82,6%

Dyade 2

(Sophie/Camille)

Co-construction 323/1891 17,1%

Confrontation 20/1891 1,1%

Délégation 1548/1891 81,8%

Tableau 37 : Nombre d’occurrences et pourcentages des formes d’interaction dans le

dispositif sans chambre

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1. 2 Dispositif chambre

Dans le dispositif chambre, le nombre d’occurrences des trois formes d’interaction

montre chez les deux dyades étudiées que la forme de confrontation est minoritaire avec un

pourcentage inférieur à 4%. La délégation, quant à elle, oscille entre 38,4% et 49,4% tandis

que celle de la co-construction entre 46,7% et 61,6% (Tableau 38).

Forme d’interaction Occurrences %

Dyade 3

(Cédric/Antoine)

Co-construction 879/1426 61,6%

Confrontation 0/1426 0%

Délégation 547/1426 38,4%

Dyade 4

(Lola/Lucie)

Co-construction 965/2066 46,7%

Confrontation 81/2066 3,9%

Délégation 1020/2066 49,4%

Tableau 38 : Nombre d’occurrences et pourcentages des formes d’interaction dans le

dispositif chambre

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1. 3 Dispositif 2 cartes

Dans le dispositif 2 cartes, le nombre d’occurrences des trois formes d’interaction

montre que la forme de confrontation est minoritaire avec un pourcentage oscillant de 0,1% à

2,2% selon la dyade. La délégation, quant à elle, oscille entre 48,7% et 69,6% tandis que celle

de la co-construction entre 30,3% et 49,1% (Tableau 39).

Forme d’interaction Occurrences %

Dyade 1

(Marie/Mélanie)

Co-construction 805/2656 30,3%

Confrontation 3/2656 <1%

Délégation 1848/2656 69,6%

Dyade 2

(Sophie/Camille)

Co-construction 664/1799 36,9%

Confrontation 5/1799 <1%

Délégation 1130/1799 62,8%

Dyade 5

(Adrien/John)

Co-construction 1164/2369 49,1%

Confrontation 53/2369 2,2%

Délégation 1152/2369 48,7%

Tableau 39 : Nombre d’occurrences et pourcentages des formes d’interaction dans le

dispositif 2 cartes

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1. 4 Dispositif leurre

Dans le dispositif leurre, le nombre d’occurrences des trois formes d’interaction

montre dans les deux dyades étudiées que la forme de confrontation est minoritaire avec un

pourcentage avoisinant les 5%. La délégation, quant à elle, oscille entre 50,9% et 54,1%

tandis que celle de la co-construction entre 40,6% et 44,3% (Tableau 40).

Forme d’interaction Occurrences %

Dyade 2

(Sophie/Camille)

Co-construction 925/2277 40,6%

Confrontation 121/2277 5,3%

Délégation 1231/2277 54,1%

Dyade 6

(Régis/David)

Co-construction 722/1630 44,3%

Confrontation 78/1630 4,8%

Délégation 830/1630 50,9%

Tableau 40 : Nombre d’occurrences et pourcentages des formes d’interaction dans le

dispositif leurre

1. 5 Synthèse comparative

La présence des formes d’interaction quel que soit le dispositif montre que seule la

présence de la forme de confrontation reste minoritaire par rapport aux deux autres (elle

n’excède pas 5%). De plus, dans le dispositif sans chambre, la forme délégation est nettement

supérieure à celle de la co-construction tandis que, dans les trois autres dispositifs, cette

différence n’est pas aussi importante. Seul le dispositif chambre montre une supériorité de la

présence de la forme co-construction par rapport à la délégation (Tableau 41).

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Forme

co-construction

Forme

confrontation

Forme

Délégation

Dispositif

sans chambre 15,8% 2% 82,2%

Dispositif

chambre 54,1% 1,9% 44%

Dispositif

2 cartes 38,8% <1% 60,3%

Dispositif

leurre 42,5% 5% 52,5%

Tableau 41 : Pourcentages de la présence des formes d’interaction en fonction des dispositifs

d’apprentissage

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175

2. Dynamiques des formes d’interaction

Nos résultats montrent que les dynamiques des formes d’interaction entre les élèves

pour chaque dyade présentent à la fois des singularités et des similarités entre les différents

dispositifs d’apprentissage.

2.1 Dispositif sans chambre

2.1.1 Ratio de changements

Dans la dyade 1 (Marie/Mélanie), les valeurs du ratio de changements oscillent de 0%

à 5% avec un plateau à 0% durant la deuxième moitié de la course. Ce ratio remonte en toute

fin de course à 1% (Figure 17).

Figure 17 : Ratio de changements des formes d’interaction de la dyade 1 (Marie/Mélanie)

dans le dispositif sans chambre

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Dans la dyade 2 (Sophie/Camille), les valeurs oscillent de 0% à 6% au cours du temps.

A partir de la 15ème minute, elles diminuent avec un plateau à 0% en fin de course (Figure 18).

Figure 18 : Ratio de changements des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille)

dans le dispositif sans chambre

Dans le dispositif sans chambre, les ratios de changements montrent donc une

similitude dans la dynamique des formes d’interaction chez les deux dyades étudiées : si elle

se caractérise dans la première partie de la course par des changements d’une forme

d’interaction à une autre, celle-ci, dans la deuxième, se caractérise par une diminution du

nombre de ces changements jusqu’à ce qu’il n’y en ait plus aucun.

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177

2.1.2 Répartition des formes d’interaction

Dans la dyade 1 (Marie/Mélanie), la répartition des formes d’interaction montre en

première partie de course une tendance à l’alternance de forme de co-construction, de

délégation et de confrontation jusqu’à une deuxième partie où une tendance majoritaire à la

délégation émerge. En toute fin de course, cette tendance majoritaire s’efface en partie au

profit de la forme de co-construction qui réapparait (Figure 19).

Figure 19: Répartition des formes d’interaction de la dyade 1 (Marie/Mélanie) dans le

dispositif sans chambre

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Dans la dyade 2 (Camille/Sophie), la répartition des formes d’interaction montre

quatre pics de co-construction tout au long de la course au cours desquels la tendance à la

délégation s’efface. Cette tendance devient cependant exclusive en fin de course (Figure 20).

Figure 20 : Répartition des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille) dans le

dispositif sans chambre

Dans le dispositif sans chambre, la répartition des formes d’interaction montre des

fluctuations au cours du temps avec soit une tendance à la co-construction soit une tendance à

la délégation et très peu de confrontation. Particulièrement, elle montre une similitude

manifeste dans la dynamique des formes d’interaction chez les deux dyades étudiées : en

début de course, il est possible de noter des fluctuations dans les formes d’interaction puis en

fin de course une tendance à la stabilisation de la forme délégation.

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179

2.1.3 Récurrence des successions des formes d’interaction

Dans la dyade 1, la récurrence de successions des formes d’interaction montre la

présence de 4 changements et des 3 stabilités possibles : 1) une stabilité de co-construction ;

2) un changement co-construction/confrontation ; 3) un changement co-

construction/délégation ; 4) une stabilité de confrontation ; 5) un changement

confrontation/délégation ; 6) un changement délégation/co-construction ; 7) une stabilité de

délégation (Figure 21).

Figure 21 : Récurrence de successions des formes d’interaction de la dyade 1

(Marie/Mélanie) dans le dispositif sans chambre

nombre d’occurrences

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La stabilité délégation est majoritaire et représente 72,6% de l’ensemble des

stabilités/changements dans la dyade 1 (Tableau 42).

Stabilité/Changement Occurrences Pourcentages

co-construction

� co-construction 529/2064 25,6%

co-construction

� confrontation 2/2064 <1%

co-construction

� délégation 10/2064 <1%

Confrontation

� confrontation 14/2064 <1%

Confrontation

� délégation 2/2064 <1%

Délégation

� co-construction 8/2064 <1%

Délégation

� délégation 1499/2064 72,6%

Tableau 42 : Occurrences et pourcentages des stabilités/changements opérés dans la

dynamique des formes d’interaction de la dyade 1 (Marie/Mélanie) dans le dispositif sans

chambre

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Dans la dyade 2, la récurrence de successions des formes d’interaction montre la

présence des 6 changements et des 3 stabilités possibles : 1) une stabilité de co-construction ;

2) un changement co-construction/confrontation ; 3) un changement co-

construction/délégation ; 4) un changement confrontation/co-construction ; 5) une stabilité de

confrontation ; 6) un changement confrontation/délégation ; 7) un changement délégation/co-

construction ; 8) un changement délégation/confrontation ; 9) une stabilité de délégation

(Figure 22).

Figure 22 : Récurrence de successions des formes d’interaction de la dyade 2

(Sophie/Camille) dans le dispositif sans chambre

nombre d’occurrences

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La stabilité de la forme délégation est majoritaire et représente 81,6% de l’ensemble des

stabilités/changements dans la dyade (Tableau 43).

Stabilité/Changement Occurrences Pourcentages

co-construction

� co-construction 301/1890 15,9%

co-construction

� confrontation 2/1890 <1%

co-construction

� délégation 10/189 <1%

Confrontation

� co-construction 2/1890 <1%

Confrontation

� confrontation 20/1890 1,1%

Confrontation

� délégation 2/1890 <1%

Délégation

� co-construction 8/1890 <1%

Délégation

� confrontation 2/1890 <1%

Délégation

� délégation 1543/1890 81,6%

Tableau 43 : Occurrences et pourcentages des stabilités/changements opérés dans la

dynamique des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille) dans le dispositif sans

chambre

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2.2 Dispositif chambre

2.2.1 Ratio de changements

Dans la dyade 3 (Cédric/Antoine), la valeur du ratio de changements en début de

course est de l’ordre de 9% et chute dans les cinq premières minutes très rapidement à 1%.

Jusqu’à la fin de la course, ce ratio reste inférieur à 1%. Au milieu de la course et en fin de

course, le ratio stagne à 0% pendant quelques minutes (Figure 23).

Figure 23 : Ratio de changements des formes d’interaction de la dyade 3 (Cédric/Antoine)

dans le dispositif chambre

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Dans la dyade 4 (Lola/Lucie), la valeur du ratio de changements en début de course est

l’ordre de 10% et diminue progressivement pour atteindre près de 2% en fin de course (Figure

24).

Figure 24: Ratio de changements des formes d’interaction de la dyade 4 (Lola/Lucie) dans

le dispositif chambre

Dans le dispositif chambre, les ratios de changement montrent une similitude dans la

dynamique des formes d’interaction chez les deux dyades étudiées : elle se caractérise par une

diminution du nombre de changements d’une forme d’interaction à une autre au cours du

temps.

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2.2.2 La répartition des formes d’interaction

Dans la dyade 3 (Cédric/Antoine), la répartition des formes d’interaction montre une

distribution soit avec une tendance à la co-construction soit avec une tendance à la délégation

tout au long de la course (Figure 25).

Figure 25 : Répartition des formes d’interaction de la dyade 3 (Cédric/Antoine) dans le

dispositif chambre

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186

Dans la dyade 4 (Lola/Lucie), la répartition des formes d’interaction montre une

distribution fluctuante en « dents de scie » entre la forme de co-construction et la forme de

délégation avec des moments ponctuels de confrontation (Figure 26).

Figure 26 : Répartition des formes d’interaction de la dyade 4 (Lola/Lucie) dans le dispositif

chambre

Dans le dispositif chambre, les répartitions des formes d’interaction ne montrent pas

de similitudes manifestes dans la dynamique de ces formes exceptées les présences en fin de

course d’une inversion des tendances : d’une tendance à la co-construction qui s’efface au

profit d’une délégation, à une tendance à cette délégation qui s’efface au profit d’une co-

construction.

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187

2.2.3 Récurrence des successions des formes d’interaction

Dans la dyade 3, la récurrence de successions des formes d’interaction montre la

présence de 2 changements et de 2 stabilités : 1) une stabilité de co-construction ; 2) un

changement co-construction/délégation ; 3) un changement délégation/co-construction ; 4)

une stabilité de délégation (Figure 27).

Figure 27 : Récurrence de successions des formes d’interaction de la dyade 3

(Cédric/Antoine) dans le dispositif chambre

nombre d’occurrences

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Les stabilités des formes co-construction et délégation sont majoritaires et représentent

respectivement 53,1% et 45,1% de l’ensemble des stabilités/changements dans la dyade

(Tableau 44).

Stabilité/Changement Occurrences Pourcentages

co-construction

� co-construction 757/1425 53,7%

co-construction

�délégation 12/1425 <1%

Délégation

� co-construction 13/1425 <1%

Délégation

� délégation 643/1425 45,3%

Tableau 44 : Occurrences et pourcentages des stabilités/changements opérés dans la

dynamique des formes d’interaction de la dyade 3 (Cédric/Antoine) dans le dispositif

chambre

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Dans la dyade 4, la récurrence de successions des formes d’interaction montre la

présence des 6 changements et des 3 stabilités possibles : 1) une stabilité de co-construction ;

2) un changement co-construction/confrontation ; 3) un changement co-

construction/délégation 4) un changement confrontation/co-construction ; 5) une stabilité de

confrontation ; 6) un changement confrontation/délégation ; 7) un changement délégation /co-

construction ; 8) un changement délégation/confrontation ; 9) une stabilité de délégation

(Figure 28).

Figure 28 : Récurrence de successions des formes d’interaction de la dyade 4 (Lola/Lucie)

dans le dispositif chambre

nombre d’occurrences

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Les stabilités des formes co-construction et délégation sont majoritaires et représentent

respectivement 36,4% et 59% de l’ensemble des stabilités/changements dans la dyade

(Tableau 45).

Stabilité/Changement Occurrences Pourcentages

co-construction

� co-construction 751/2065 36,4%

co-construction

� confrontation 5/2065 <1%

co-construction

� délégation 25/2065 1,2%

Confrontation

� co-construction 2/2065 <1%

Confrontation

� confrontation 36/2065 1,7%

Confrontation

� délégation 4/2065 <1%

Délégation

� co-construction 21/2065 1%

Délégation

� confrontation 2/2065 <1%

Délégation

� délégation 1219/2065 59%

Tableau 45 : Occurrences des stabilités/changements opérés dans la dynamique des formes

d’interaction de la dyade 4 (Lola/Lucie) dans le dispositif chambre

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191

2.3 Dispositifs 2 cartes

2.3.1 Le ratio de changements

Dans la dyade 1 (Marie/Mélanie), les valeurs du ratio de changements oscillent

constamment de 0% à 2,5% durant toute la course. Au milieu de la course, le ratio stagne à

0% pendant quelques minutes (Figure 29).

Figure 29 : Ratio de changements des formes d’interaction de la dyade 1 (Marie/Mélanie)

dans le dispositif 2 cartes

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192

Dans la dyade 2 (Sophie/Camille), les valeurs du ratio de changements oscillent

constamment entre 0% et moins de 4%. A deux reprises, le ratio atteint 0% dans la course

(Figure 30).

Figure 30 : Ratio de changements des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille)

dans le dispositif chambre

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Dans la dyade 5 (Adrien/John), les valeurs du ratio de changements oscillent

constamment entre 0% et 5%. A trois reprises, le ratio est de 0% dans la course (Figure 31).

Figure 31 : Ratio de changements des formes d’interaction de la dyade 5 (Adrien/John) dans

le dispositif chambre

Dans le dispositif 2 cartes, les ratios de changements montrent une similitude chez les

trois dyades étudiées : la dynamique des formes d’interaction se caractérise par une

fluctuation constante de changement d’une forme d’interaction à une autre tout au long de la

course.

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194

2.3.2 Répartitions des formes d’interaction

Dans la dyade 1 (Marie/Mélanie), la répartition des formes d’interaction montre en

première partie de course une alternance de formes de co-construction et de délégation avec

une tendance majoritaire de la délégation. Cette tendance s’inverse en deuxième partie de

course avec une alternance entre les formes de co-construction et de délégation avec une

tendance majoritaire à la co-construction. Au milieu de la course, un plateau de délégation

apparaît (Figure 32).

Figure 32 : Répartition des formes d’interaction de la dyade 1 (Marie/Mélanie) dans le

dispositif 2 cartes

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195

Dans la dyade 2 (Sophie/Camille), la répartition des formes d’interaction montre une

alternance équilibrée entre les formes de délégation et de co-construction. Cette tendance

majoritaire est accompagnée de la présence de la forme confrontation de manière minoritaire

(Figure 33).

Figure 33 : Répartition des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille) dans le

dispositif 2 cartes

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196

Dans la dyade 5 (Adrien/John), la répartition des formes d’interaction montre en

première partie de course une alternance de forme de co-construction et de délégation avec

une tendance très majoritaire à la co-construction. Cette tendance s’inverse en deuxième

partie de course avec une alternance entre formes de co-construction et de délégation avec une

tendance majoritaire à la délégation. Tout au long de la course, une tendance minoritaire de

confrontation émerge (Figure 34).

Figure 34 : Répartition des formes d’interaction de la dyade 5 (Adrien/John) dans le

dispositif 2 cartes

Dans le dispositif 2 cartes, les répartitions des formes d’interaction montrent une

tendance à l’alternance majoritaire des formes de co-construction et des formes de délégation

tout au long de la course.

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197

2.3.3 Récurrence des successions des formes d’interaction

Dans la dyade 1, la récurrence de successions des formes d’interaction montre la

présence de 4 changements et des 3 stabilités : 1) une stabilité de co-construction ; 2) un

changement co-construction/délégation ; 3) une stabilité de confrontation ; 4) un changement

confrontation/délégation ; 5) un changement délégation/co-construction ; 6) un changement

délégation/confrontation ; 7) une stabilité de délégation (Figure 35).

Figure 35 : Récurrence de successions des formes d’interaction de la dyade 1

(Marie/Mélanie) dans le dispositif 2 cartes

nombre d’occurrences

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198

Les deux stabilités majoritaires sont la délégation et celle de la co-construction et représentent

respectivement 71,9% et 27,4% de l’ensemble des stabilités/changements dans la dyade

(Tableau 46).

Stabilité/Changement Occurrences Pourcentages

co-construction

� co-construction 718/2655 27,4%

co-construction

� délégation 17/2655 <1%

confrontation

� confrontation 1/2655 <1%

confrontation

� délégation 1/2655 <1%

délégation

� co-construction 10/2655 <1%

délégation

� confrontation 1/2655 <1%

délégation

� délégation 1907/2655 71,9%

Tableau 46 : Occurrences et pourcentages des stabilités/changements opérés dans la

dynamique des formes d’interaction de la dyade 1 (Marie/Mélanie) dans le dispositif 2 cartes

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199

Dans la dyade 2, la récurrence de successions des formes d’interaction montre la

présence de 4 changements et des 3 stabilités : 1) une stabilité de co-construction ; 2) un

changement co-construction/délégation ; 3) une stabilité de confrontation ; 4) un changement

confrontation/délégation ; 5) un changement délégation/co-construction ; 6) un changement

délégation/confrontation ; 7) une stabilité de délégation (Figure 36).

Figure 36 : Récurrence de successions des formes d’interaction de la dyade 2

(Sophie/Camille) dans le dispositif 2 cartes

nombre d’occurrences

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200

Les deux stabilités majoritaires sont la délégation et la co-construction et représentent

respectivement 57,3% et 40,9% de l’ensemble des stabilités/changements dans la dyade

(Tableau 47).

Stabilité/Changement Occurrences Pourcentages

co-construction

� co-construction 735/1798 40,9%

co-construction

� délégation 13/1798 <1%

confrontation

� confrontation 4/1798 <1%

confrontation

� délégation 2/1798 <1%

délégation

� co-construction 12/1798 <1%

délégation

� confrontation 2/1798 <1%

délégation

� délégation 1030/1798 57,3%

Tableau 47 : Occurrences et présence des stabilités/changements opérés dans la dynamique

des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille) dans le dispositif 2 cartes

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201

Dans la dyade 5, la récurrence de successions des formes d’interaction montre la

présence de 5 changements et des 3 stabilités : 1) une stabilité de co-construction ; 2) un

changement co-construction/délégation ; 3) un changement confrontation/co-construction ; 4)

une stabilité de confrontation ; 5) un changement confrontation/délégation ; 6) un changement

délégation/co-construction ; 7) un changement délégation/confrontation ; 8) une stabilité de

délégation (Figure 37).

Figure 37: Récurrence de successions des formes d’interaction de la dyade 5 (Adrien/John)

dans le dispositif 2 cartes

nombre d’occurrences

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202

Les deux stabilités majoritaires sont la délégation et la co-construction, et représentent

respectivement 54,4% et 43,4% de l’ensemble des stabilités/changements dans la dyade

(Tableau 48).

Stabilité/Changement Occurrences Pourcentages

co-construction

� co-construction 1028/2368 43,4%

co-construction

� délégation 10/2368 <1%

confrontation

� co-construction 1/2368 <1%

confrontation

� confrontation 21/2368 <1%

confrontation

� délégation 4/2368 <1%

délégation

� co-construction 9/2368 <1%

délégation

� confrontation 6/2368 <1%

délégation

� délégation 1289/2638 54,4%

Tableau 48 : Occurrences et pourcentages des stabilités/changements opérés dans la

dynamique des formes d’interaction de la dyade 5 (Adrien/John) dans le dispositif 2 cartes

Dans le dispositif 2 cartes, la récurrence des successions des formes d’interaction

montrent une similitude manifeste chez les deux dyades étudiées : les changements

majoritaires sont la co-construction et la forme délégation.

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203

2.4 Dispositif leurre

2.4.1 Ratio de changements

Dans la dyade 2 (Sophie/Camille), les valeurs du ratio de changements oscillent

constamment de 0% à 4% tout au long de la course avec un plateau à 0% en fin de course

(Figure 38).

Figure 38 : Ratio de changements des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille)

dans le dispositif leurre

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204

Dans la dyade 6 (Régis/David), les valeurs du ratio de changements oscillent

constamment de 0% à 5% tout au long de la course. Dans la deuxième moitié, le ratio atteint

0% pendant quelques minutes (Figure 38).

Figure 39 : Ratio de changements des formes d’interaction de la dyade 6 (Régis/David)

dans le dispositif leurre

Dans le dispositif leurre, les ratios de changements montrent une similitude chez les

deux dyades étudiées : la dynamique des formes d’interaction se caractérise par une

fluctuation constante de changement d’une forme d’interaction à une autre tout au long de la

course.

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205

2.4.2 Répartition des formes d’interaction

Dans la dyade 2 (Sophie/Camille), la répartition des formes d’interaction montre 4

pics de co-construction tout au long de la course au cours desquels la tendance à la délégation

s’efface. A deux reprises, la forme de confrontation apparaît et devient plus importante en fin

de course sur quelques minutes (Figure 40).

Figure 40 : Répartition des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille) dans le

dispositif leurre

Dans la dyade 6 (Régis/John), la répartition des formes d’interaction montre 3 pics de

co-construction tout au long de la course au cours desquels la tendance à la délégation

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206

s’efface. Cette tendance devient cependant majoritaire en deuxième partie de course pendant

une minute. Les 3 pics de co-construction sont accompagnés d’une tendance minoritaire à la

forme confrontation (Figure 41).

Figure 41: Répartition des formes d’interaction de la dyade 6 (Régis/John) dans le dispositif

leurre

Dans le dispositif leurre, les répartitions des formes d’interaction montrent une

similitude chez les deux dyades étudiées. La dynamique des formes d’interaction se

caractérise par une distribution particulière de ces formes : tout au long de la course, émergent

des pics de co-construction atteignant dans les dyades les mêmes valeurs au détriment de la

délégation.

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207

2.4.3 Récurrence des successions des formes d’interaction

Dans la dyade 9, la récurrence de successions des formes d’interaction montre la

présence des 6 changements et des 3 stabilités : 1) une stabilité de co-construction ; 2) un

changement co-construction/confrontation ; 3) un changement co-construction/délégation ; 4)

un changement confrontation/co-construction ; 5) une stabilité de confrontation ; 6) un

changement confrontation/délégation ; 7) un changement délégation/co-construction ; 8) un

changement délégation/confrontation ; 9) une stabilité de délégation (Figure 42).

Figure 42 : Récurrence de successions des formes d’interaction de la dyade 2

(Sophie/Camille) dans le dispositif leurre

nombre d’occurrences

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208

Les stabilités des formes co-construction et délégation sont majoritaires et représentent

respectivement 58,4% et 40,1% de l’ensemble des stabilités/changements dans la dyade

(Tableau 49).

Stabilité/Changement Occurrences Pourcentages

co-construction

� co-construction 912/2276 40,1%

co-construction

� confrontation 2/2276 <1%

co-construction

� délégation 9/2276 <1%

confrontation

� co-construction 1/2276 <1%

confrontation

� confrontation 7/2276 <1%

confrontation

� délégation 1/2276 <1%

délégation

� co-construction 9/2276 <1%

délégation

� confrontation 2/2276 <1%

délégation

� délégation 1333/2276 58,4%

Tableau 49 : Occurrences et pourcentages des stabilités/changements opérés dans la

dynamique des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille) dans le dispositif leurre

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209

Dans la dyade 6, la récurrence de successions des formes d’interaction montre la

présence des 6 changements et des 3 stabilités possibles : 1) une stabilité de co-construction ;

2) un changement co-construction/confrontation ; 3) un changement co-

construction/délégation ; 4) un changement confrontation/co-construction ; 5) une stabilité de

confrontation ; 6) un changement confrontation/délégation ; 7) un changement délégation/co-

construction ; 8) un changement délégation/confrontation ; 9) une stabilité de délégation

(Figure 43).

Figure 43 : Récurrence de successions de la dynamique des formes d’interaction de la

dyade 6 (Régis/David) dans le dispositif leurre

nombre d’occurrences

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210

Les stabilités des formes co-construction et délégation sont majoritaires et représentent

respectivement 40,6% et 55,9% de l’ensemble des stabilités/changements dans la dyade

(Tableau 50).

Stabilité/Changement Occurrences Pourcentages

co-construction

� co-construction 661/1629 40,6%

co-construction

� confrontation 5/1629 <1%

co-construction

� délégation 9/1629 <1%

confrontation

� co-construction 3/1629 <1%

confrontation

� confrontation 19/1629 1,2%

confrontation

� délégation 6/1629 <1%

délégation

� co-construction 9/1629 <1%

délégation

� confrontation 6/1629 <1%

délégation

� délégation 911/1629 55,9%

Tableau 50 : Occurrences et pourcentages des stabilités/changements opérés dans la

dynamique des formes d’interaction de la dyade 6 (Régis/David) dans le dispositif leurre

Dans le dispositif leurre, la récurrence des successions des formes d’interaction

montrent une similitude manifeste chez les deux dyades étudiées : les changements

majoritaires sont la co-construction et la forme délégation.

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211

3. Dynamique des formes d’interaction indexée aux modes d’utilisation de la

carte

Nos résultats montrent que le mode d’utilisation dyadique de la carte participe à la

dynamique des formes d’interaction, et précisément à trois stabilités récurrentes dans les

formes d’interaction et à six changements récurrents entre ces formes.

3.1 Stabilité de la forme de co-construction

La première stabilité récurrente identifiée était celle de la forme co-construction. Cette

stabilité s’accompagnait majoritairement d’un maintien du mode d’utilisation détaché de la

carte et celui du mode partagé. Respectivement, ces modes représentaient toutes dyades et

dispositifs confondus 88,3% et 9,8%, les autres modalités d’utilisation de la carte

correspondant à un pourcentage inférieur ou égal à 1 (Tableau 51). A titre d’exemple, dans la

chambre d’appel, Cédric et Antoine traçaient chacun leur tour l’itinéraire de course, reprenant

en partie ce que venait de montrer le partenaire. A titre d’illustration, alors que Cédric et

Antoine, élèves de la dyade 3, découvraient la carte, tous les deux cherchaient à construire un

itinéraire de course. Antoine a proposé un itinéraire pour se rendre à la deuxième balise : « En

fait, on fait tout le tour et on passe à côté du stade de foot ». Cédric a acquiescé, reprenant

pour partie des éléments descriptifs de la proposition de son camarade : « Voilà, d’accord.

Oui, à côté du terrain de foot ». La forme de co-construction s’est maintenue accompagnée

d’un maintien du mode partagé de la carte durant cette construction d’itinéraire.

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212

Stabilité de la forme co-construction

Maintien d’un même

mode/Passage d’un mode à

un autre

Occurrences Pourcentages

mode partagé

� mode partagé 626/6391 9,8%

mode partagé

� mode univoque 1/6391 <1%

mode partagé

� mode détaché 17/6391 <1%

mode univoque

� mode univoque 75/6391 <1%

mode univoque

� mode détaché 9/6391 <1%

mode détaché

� mode partagé 6/6391 <1%

mode détaché

� mode univoque 7/6391 <1%

mode détaché

� mode détaché 5645/6391 88,3%

autre (utilisation de la carte

d’une autre dyade) 5/6391 <1%

Tableau 51 : Présence des maintiens/passages d’un mode d’utilisation de la carte à un autre

dans la stabilité de la co-construction

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213

3.2 Changement d’une interaction de co-construction à une interaction de

confrontation

Le premier changement récurrent repéré était celui d’une interaction de co-

construction à une interaction de confrontation au cours de laquelle les élèves ne s’accordaient

plus sur les modalités à suivre pour résoudre le problème posé. Ce changement

s’accompagnait majoritairement d’un maintien du mode partagé de la carte et d’un passage

d’un mode partagé à un mode univoque. Respectivement, ils ont représenté 25% et 62,6%

toutes dyades et dispositifs confondus, les autres modalités d’utilisation de la carte avoisinant

les 6% (Tableau 52). A titre d’exemple, Marie et Mélanie, élève de la dyade 1, ont dans un

premier temps utilisé conjointement la carte pour définir une direction à prendre, caractérisant

un mode partagé de la carte : « Ensuite on continue tout droit. Après, on tourne vers un

chemin vers la gauche et on prend la balise qui est juste ici » [suit avec son doigt un trait noir

sur la carte] (Marie, porteuse de carte) / « Ici ! » [Pointe sur la carte un endroit à côté de

celui de sa partenaire] (Mélanie, non porteur de carte). La forme d’interaction entre les élèves

était alors une co-construction. Celle-ci s’est prolongée jusqu’à ce que Mélanie ait manifesté

son désaccord : « Mais non ! Fais voir [prends la carte des mains de Marie]… On est mal

orientée. Regarde ! [tourne la carte]». Durant cette interaction, Mélanie a pu alors

s’approprier la carte, privant sa partenaire de toute utilisation : le mode d’utilisation de la

carte est devenu alors un mode univoque.

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214

Changement d’une interaction de co-construction à une interaction de confrontation

Maintien d’un même

mode/Passage d’un mode à

un autre

Occurrences Pourcentages

mode partagé

� mode partagé 4/16 25%

mode partagé

� mode univoque 7/16 62,6%

mode détaché

� mode partagé 1/16 6,2%

mode détaché

� mode détaché 1/16 6,2%

Tableau 52 : Occurrences et pourcentages des maintiens/passages d’un mode d’utilisation de

la carte à un autre dans le changement de formes co-construction/confrontation

3.3 Changement d’une interaction de co-construction à une interaction de

délégation

Le deuxième changement récurrent repéré était celui d’une interaction de co-

construction à une interaction de délégation. Les élèves poursuivaient un objectif commun et

s’accordaient ensemble sur les modalités à mettre en œuvre pour résoudre le problème auquel

ils étaient confrontés (co-construction). Si les élèves poursuivaient le même objectif, au fil de

l’interaction l’un des deux « laissait la main » en restant relativement passif et n’agissait plus

pour aider à l’atteinte de l’objectif commun (délégation). Ce changement s’accompagnait

d’une présence plus importante d’un maintien du mode détaché de la carte (30,4%) et d’un

changement d’un mode partagé à un mode détaché (27%). Egalement, le maintien du mode

partagé et le passage d’un mode détaché vers un mode partagé ont représenté respectivement

14,8% et 17,3%, celui « autre » 8,7%, les autres modalités d’utilisation de la carte

correspondant à un pourcentage inférieur à 1% toutes dyades et dispositifs confondus

(Tableau 53). A titre d’illustration, l’utilisation partagée de la carte au sein de la dyade 1

(Marie/Mélanie) a, dans un premier temps, engagé les élèves dans des interactions de co-

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215

construction afin de s’accorder sur le choix de l’itinéraire pour se rendre à la deuxième

balise : « Elle [la balise] est par-là [en balayant de son doigt une zone sur la carte] » (Marie,

porteuse de carte)/« Oui [pointant avec son doigt successivement le trait noir du chemin

carrossable et le cercle rouge représentant la balise] » (Mélanie, non porteuse de la carte).

Une fois l’itinéraire défini, les élèves ont commencé à suivre celui-ci en pointant de leur doigt

le trait noir représentant le chemin sur lequel ils évoluaient. Le mode d’utilisation partagé de

la carte et la forme d’interaction entre les deux élèves se sont modifiés lorsque Marie s’est

référée à des expériences passées pour poursuivre l’itinéraire sans consulter la carte : « C’est

comme au cross » (Marie, porteuse de carte). Elle a alors accéléré jusqu’au croisement de

chemins sans s’aider de la carte qu’elle avait plié pour courir plus vite et Mélanie l’a suivi en

accélérant également son allure sans demander d’explication. L’interaction est alors devenue

une interaction de délégation et le mode de la carte est devenu un mode détaché.

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Changement d’une interaction de co-construction à une interaction de délégation

Maintien d’un même

mode/Passage d’un mode à

un autre

Occurrences Pourcentages

mode partagé

� mode partagé 17/115 14,8%

mode partagé

� mode univoque 1/115 <1%

mode partagé

� mode détaché 31/115 27%

mode univoque

� mode détaché 1/115 <1%

mode détaché

� mode partagé 19/115 17,3%

mode détaché

� mode univoque 2/115 1,7%

mode détaché

� mode détaché 35/115 30,4%

autre (utilisation de la carte

d’une autre dyade) 10/115 8,7%

Tableau 53 : Occurrences et pourcentages des maintiens/passages d’un mode d’utilisation de

la carte à un autre dans le changement de formes de co-construction/délégation

3.4 Changement d’une interaction de confrontation à une interaction de co-

construction

Le troisième changement récurrent identifié était celui d’une interaction de

confrontation à une interaction de co-construction au cours de laquelle les deux élèves, après

un désaccord (confrontation), parvenaient à s’entendre sur les modalités à mettre en œuvre

pour résoudre le problème auquel ils étaient confrontés (co-construction). Ce changement

s’est accompagné majoritairement du passage du mode univoque au mode partagé de la carte

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(55,5%) et du maintien du mode partagé (33,5%). Le passage d’un mode détaché à un mode

partagé représentait également 11% de l’ensemble des modes d’utilisation de la carte, toutes

dyades et dispositifs confondus (Tableau 54). A titre d’illustration, Marie et Mélanie étaient,

dans un premier temps, en désaccord sur le chemin à suivre caractérisant une interaction de

confrontation : « Mais non, c’est mieux d’aller tout droit Marie [pointe du doigt un chemin

sur la carte] » (Mélanie, porteuse de carte)/« Ca va plus vite par là [tout en éloignant la carte

de son bras gauche, tend son bras droit et indique du doigt une direction] » (Marie, non

porteuse de carte)/« Mais non ça va pas plus vite parce que j’ai vu [en regardant seule la

carte] » (Mélanie, porteuse de carte) : l’élève porteur de carte se l’ait appropriée, privant ainsi

ponctuellement sa partenaire de toute utilisation, caractérisant le mode univoque d’utilisation

de la carte. Ce n’est que dans un deuxième temps que Mélanie a tendu la carte à sa partenaire

pour justifier son choix et avoir son accord : « Regarde. On est là [montre la carte à sa

partenaire en la tenant avec une main et en pointant une position sur la carte de son autre

main]. C’est mieux de continuer tout droit parce qu’après on passe par là [trace sur la carte

un chemin] » (Mélanie, porteuse de carte). Marie, tenant aussi la carte d’une main, a suivi du

regard le tracé proposé par sa partenaire et a acquiescé : « Oui ok d’accord [place son doigt à

côté de celui de sa partenaire » (Marie, non porteuse de carte). Le mode d’utilisation de la

carte correspondait à ce moment à un mode partagé et, dans le même temps, la forme

d’interaction devenait une forme de co-construction.

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Changement d’une interaction de confrontation à une interaction de co-construction

Maintien d’un même

mode/Passage d’un mode à

un autre

Occurrences Pourcentages

mode partagé

� mode partagé 3/9 33,5%

mode partagé

� mode univoque 5/9 55,5%

mode détaché

� mode partagé 1/9 11%

Tableau 54 : Occurrences et pourcentages des maintiens/passages d’un mode d’utilisation de

la carte à un autre dans le changement de formes confrontation/co-construction

3.5 Stabilité de la forme confrontation

La deuxième stabilité récurrente repérée était celle de la forme confrontation au cours

de laquelle les élèves ne s’accordaient pas sur les modalités à mettre en œuvre au regard d’un

problème posé. Cette stabilité s’est accompagnée majoritairement d’un maintien du mode

univoque de la carte (48,4%). Aussi, les maintiens du mode partagé et détaché ont représenté

respectivement 23,8% et 27% des modalités d’utilisation de la carte toutes dyades et

dispositifs confondus, la modalité restante (mode détaché vers un mode univoque)

correspondant à un pourcentage inférieur à 1 (Tableau 55). A titre d’illustration, alors que

Lola, élève de la dyade 4, montrait la direction à suivre avec son bras : « C’est par là », sa

partenaire, Lucie, a refusé regardant seul la carte : « Non je ne pense pas, je pense que c’est

par là, il faut suivre le chemin ». Le mode de la carte était alors univoque et la forme de

confrontation. Lola, ne faisant pas confiance à sa partenaire, lui a alors arraché la carte des

mains : « Fais-voir » et a regardé seule la carte pour vérifier les propos de Lola. La forme

d’interaction de confrontation s’est alors prolongée et le mode univoque d’utilisation de la

carte se maintenait.

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Stabilité de la forme de confrontation

Maintien d’un même

mode/Passage d’un mode à

un autre

Occurrences Pourcentages

mode partagé

� mode partagé 29/122 23,8%

mode univoque

� mode univoque 59/122 48,4%

mode détaché

� mode univoque 1/122 <1%

mode détaché

� mode détaché 33/122 27%

Tableau 55 : Occurrences et pourcentages des maintiens/passages d’un mode d’utilisation de

la carte à un autre dans la stabilité de l’interaction de confrontation

3.6 Changement d’une interaction de confrontation à une interaction de

délégation

Le quatrième changement récurrent repéré était celui d’une interaction de

confrontation à une interaction de délégation au cours de laquelle un des élèves décidait de

suivre son partenaire alors qu’il proposait un itinéraire différent. Ce changement se

caractérisait majoritairement par un passage du mode univoque de la carte vers un mode

détaché. Il représentait à ce titre 77,4% des modalités possibles toutes dyades et dispositifs

confondus. Le maintien du mode détaché de la carte était quant à lui égal à 13,6%, les deux

modalités restantes étant inférieures à 5% (Tableau 56). A titre d’illustration, Antoine et

Cédric cherchaient à rejoindre le point de ralliement. Au croisement d’un chemin, Cédric a

proposé un nouvel itinéraire qu’Antoine a refusé : « On fait le chemin en sens en inverse ? »

(Cédric, non porteur de carte) / « Bah non … » (Antoine, porteur de carte). L’interaction était

alors une confrontation et le mode d’utilisation de la carte univoque. Antoine à ce moment-là

était l’unique possesseur de la carte. C’est par sa (re)connaissance du chemin et en affirmant

qu’ils allaient gagner du temps (« ... vaut mieux prendre ce chemin-là c’est moins long

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220

[montre le chemin], je connais bien ! » [Antoine, porteur de carte, sans la regarder]), que

Antoine a convaincu Cédric : « Ah ouais ! Je te suis, j’te fais confiance » (Cédric, non porteur

de carte). Cédric s’est alors placé derrière son partenaire et s’est laissé guider, marquant ainsi

le changement d’une interaction de confrontation en une interaction de délégation sans que la

carte n’ait été utilisée - caractérisant par là-même le maintien du mode d’utilisation détaché.

Changement d’une interaction de confrontation à une interaction de délégation

Maintien d’un même

mode/Passage d’un mode à

un autre

Occurrences Pourcentages

mode partagé

� mode partagé 1/22 4,5%

mode univoque

� mode détaché 17/22 77,4%

mode détaché

� mode univoque 1/22 4,5%

mode détaché

� mode détaché 3/22 13,6%

Tableau 56: Présence des maintiens/passages d’un mode d’utilisation de la carte à un autre

dans le changement des formes confrontation/délégation

3.7 Changement d’une interaction de délégation à une interaction de co-

construction

Le cinquième changement récurrent repéré était celui d’une interaction de délégation à

une interaction de co-construction au cours de laquelle l’élève qui avait « laissé la main » à

son partenaire dans la conduite de l’itinéraire donnait de nouveau son avis et participait

activement et conjointement à la construction de l’itinéraire. Ce changement se traduisait

majoritairement par le passage d’un mode détaché à un mode partagé d’utilisation de la carte

(30,3%) et le maintien du mode détaché (37,3%). Egalement, le maintien du mode partagé et

de la modalité « autre » (superposition des deux cartes) ont représenté respectivement 16,1%

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221

et 14,1% de l’ensemble des modalités possibles, la dernière (passage du mode partagé au

mode détaché) étant égale à 2,2% toutes dyades et dispositifs confondus (Tableau 57). A titre

d’illustration, David s’est, à plusieurs reprises, laissé guider dans les choix d’itinéraires par

Régis sans que celui-ci ne regarde la carte qui était à cet instant pliée en quatre dans sa poche :

« Il faut chercher un chemin sur la gauche au prochain carrefour » (Régis, porteur de carte).

L’interaction était alors une délégation et témoignait d’une confiance de David dans la

connaissance et reconnaissance du parcours par Régis qui le guidait (mode détaché de la

carte). Cette forme d’interaction s’est prolongée jusqu’à ce que Régis doute de l’itinéraire :

« Je ne suis pas sûr. Le chemin recherché est plus loin » (Régis, porteur de carte). Face à ce

doute, Régis a ressorti la carte de sa poche, l’a déplié et les deux élèves l’ont consulté

conjointement. Ils ont cherché à se repérer pour décider ensemble d’un nouvel itinéraire,

faisant évoluer l’interaction en une interaction de co-construction : « Regarde David [pointe

un endroit] » (Régis) / « Oui, c’est proche d’un trou » (David) / « Oui il faut trouver un

trou [pointe une dépression sur la carte] » (Régis). Le mode d’utilisation de la carte

correspondait alors à un mode partagé.

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Changement d’une forme de délégation à une forme de co-construction

Maintien d’un même

mode/Passage d’un mode à

un autre

Occurrences Pourcentages

mode partagé

� mode partagé 16/99 16,1%

mode partagé

� mode détaché 2/99 2,2%

mode détaché

� mode partagé 30/99 30,3%

mode détaché

� mode détaché 37/99 37,3%

Autres (superposition des

deux cartes) 14/99 14,1%

Tableau 57 : Occurrences et pourcentages des maintiens/passages d’un mode d’utilisation de

la carte à un autre dans le changement des formes délégation/co-construction

3.8 Changement d’une interaction de délégation à une interaction de

confrontation

Le sixième changement récurrent repéré était celui d’une interaction de délégation à

une interaction de confrontation au cours de laquelle l’élève, qui était mené (délégation),

manifestait son désaccord sur l’itinéraire à suivre (confrontation). Ce changement se traduisait

majoritairement par le passage d’un mode détaché de la carte à un mode univoque (57,1%) et

par le maintien du mode détaché (28,6%), les deux autres modalités étant inférieures à 9,5%

(Tableau 58). A titre d’illustration, dans la dyade 2, Sophie suivait Camille en marchant

derrière elle sur le chemin de la troisième balise. Camille ne regardait pas la carte qu’elle

tenait et indiquait à sa partenaire qu’elles étaient proches de la balise : « Sophie, c’est au

bout ». Sophie a alors suivi sa partenaire caractérisant une forme d’interaction de délégation.

Cette délégation s’est poursuivie jusqu’à ce que les deux élèves arrivent à l’emplacement

supposé de la balise. S’apercevant que la balise n’y était pas, Sophie a pris des mains la carte

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à Camille : « Fais voir ! » et se l’est appropriée. Elle a précisé à sa partenaire qui n’avait plus

la carte « Vas-y toi continues » et a poursuivi en regardant seule la carte « Non, la balise… il

fallait tourner à droite avant ». Le mode de la carte a évolué d’un mode détaché à un mode

univoque, et la forme d’interaction a changé d’une délégation à une confrontation.

Changement d’une forme de délégation à une forme de confrontation

Maintien d’un même

mode/Passage d’un mode à

un autre

Occurrences Pourcentages

mode partagé

� mode partagé 2/21 9,5%

mode détaché

� mode partagé 1/21 4,8%

mode détaché

� mode univoque 12/21 57,1%

mode détaché

� mode détaché 6/21 28,6%

Tableau 58 : Occurrences et pourcentages des maintiens/passages d’un mode d’utilisation de

la carte à un autre dans le changement des formes délégation/confrontation

3.9 Stabilité de la forme délégation

La troisième stabilité récurrente identifiée était celle de la forme délégation. Cette

stabilité s’accompagnait majoritairement des maintiens du mode détaché (69%) et partagé de

la carte (27,3%) d’une part, et de manière beaucoup moins importante du mode univoque

(2,7%), le reste des modalités étant inférieures à 1% (Tableau 59). A titre d’illustration, alors

que Cédric et Antoine, élèves de la dyade 3, marchaient le long d’un chemin, Antoine a pris

l’initiative de retourner sur leurs pas pour recommencer la recherche de la balise car ils ne la

trouvaient pas : « Je pense qu’il faut retourner sur nos pas ». Cédric, sans contester ni

contrôlant sur la carte, a suivi son partenaire : « J’te fais confiance » engageant la dyade dans

une forme de délégation. Lors de ce moment, la carte n’a pas été consultée par les élèves qui

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ont fait demi-tour. Cette forme de délégation a perduré au premier croisement rencontré

quand Antoine a pris le chemin de gauche : Cédric l’a suivi en se mettant derrière sans faire

de commentaire. La carte était utilisée encore dans le mode détaché.

Stabilité de la forme délégation

Maintien d’un même

mode/Passage d’un mode à

un autre

Occurrences Pourcentages

mode partagé

� mode partagé 3103/11373 27,3%

mode partagé

� mode univoque 1/11373 <1%

mode univoque

� mode univoque 304/11373 2,7%

mode univoque

� mode détaché 12/11373 <1%

mode détaché

� mode partagé 7/11373 <1%

mode détaché

� mode univoque 29/11373 <1%

mode détaché

� mode détaché 7846/11373 69%

autre (utilisation de la carte

d’une autre dyade) 71/11373 <1%

Tableau 59 : Occurrences et pourcentages des maintiens/passages d’un mode d’utilisation de

la carte à un autre dans la stabilité de l’interaction délégation.

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CHAPITRE 3 Discussion intermédiaire

Sur la base des résultats précédents et les études déjà réalisées sur la dynamique des

interactions dans le domaine sportif et en EPS, nous discuterons, à partir de deux points de

réflexions, les quantités de changement d’interaction et la nature de ces changements, pour

questionner le caractère fécond d’une démarche du chercheur alternant apports qualitatifs sur

les résultats et apports quantitatifs sur les résultats. Aussi, nous envisagerons un dernier point

au sujet de la dynamique des « coordinations humaines » autour des différentes échelles dans

lesquelles ces coordinations interpersonnelles existent. Ce dernier point de discussion

ambitionnera une amorce de réflexion qui sera reprise dans la discussion générale de ce

travail de thèse.

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Chapitre 3. Discussion intermédiaire

L’analyse de l’articulation collective des cours d’action individuels des élèves de

chaque dyade montrent la présence de trois formes d’interaction quelles que soient les

caractéristiques des dispositifs d’apprentissage à savoir une forme de co-construction, de

forme de confrontation et de forme de délégation. La dynamique de ces formes dévoile en

revanche une autre définition de la course d’orientation. Nos résultats montrent que la course

d’orientation est bien plus qu’une activité de co-construction et de délégation entre les élèves

car elle propose des dynamiques singulières indexées aux dispositifs d’apprentissage choisis

par les enseignants d’EPS.

1. Les quantités de changements d’une interaction à une autre

Si des études ont déjà pointé les liens entre les caractéristiques spatiales et

matérielles, et l’émergence de certaines formes d’interaction (Adé et al., 2010 ; Saury, &

Rossard, 2009), nos résultats amènent à discuter du rôle de ces caractéristiques sur la

dynamique même des formes d’interaction.

Effectivement, les ratios de changements diminuent progressivement au cours du temps pour

les dyades engagées dans le dispositif chambre tandis que ceux des dispositifs 2 cartes et

leurre fluctuent continuellement au cours du temps. Aussi, le début de la course dans le

dispositif chambre est marqué par des ratios de changements qui sont supérieurs à ceux des

autres dispositifs de pratique. Le dispositif chambre invite donc les élèves à explorer

majoritairement deux formes d’interaction (la co-construction et la délégation) de façon

fugace en début de course - ils changent souvent d’une interaction à une autre - au profit

d’une stabilisation plus durable d’une forme d’interaction durant la course. Dans ce dispositif,

la chambre d’appel est un élément qui semble participer à des changements importants dans

les formes d’interaction en début de course tendant vers une stabilisation de l’une d’elle : dans

un premier temps, la découverte de la carte dans cet espace aménagé peut occasionner des

accords, des désaccords entre les élèves voire une imposition du point de vue de l’un d’eux

renvoyant à des changements dans les formes d’interaction. Dans un second temps, en quittant

la chambre, et du fait que les deux élèves ont conscience que chacun d’eux a visualisé

l’itinéraire, l’un des deux pouvait « laisser faire » son partenaire dans la responsabilité des

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itinéraires pouvant donc conduire à une stabilisation de la forme délégation. Aussi, dans la

chambre d’appel, les élèves font l’expérience de discussions (accords, désaccords, imposition

du point de vue induisant des changements dans les formes d’interaction) aboutissant à un

itinéraire global où chacun d’eux participe à sa construction durant la course, tendant ainsi

plus tard à une stabilisation de la co-construction pour un moment.

Par contraste, les dispositifs 2 cartes et leurre invitent les élèves à vivre des changements

d’interaction moins fréquents mais réguliers sur toute la durée de la course. Dans le dispositif

2 cartes, la distribution d’une carte pour chaque élève de la dyade et sur lesquelles figurent

deux balises constituent pour eux autant d’opportunités qui, lorsqu’elles sont exploitées,

participent à des changements qui émergent de manière régulière dans les formes

d’interaction : l’alternance de balise à poinçonner peut occasionner un changement de porteur

de carte (les deux cartes indiquent des balises différentes) et potentiellement de rôle

« locomotive/wagon » (Blanchard, 2008) chez les élèves. Dans le dispositif leurre, la

présence des balises-leurres dans une zone où se situe la « vraie » balise est également un

élément pouvant perturber le flux stable d’une interaction et favoriser des changements vers

d’autres formes.

Les résultats soulignent donc le caractère singulier de la dynamique des quantités de

changements dans les formes d’interaction en fonction des caractéristiques du dispositif

d’apprentissage.

2. Nature des changements

Plus que la caractérisation d’interactions successives, c’est aussi la caractérisation de

la nature des changements entre les interactions en lien avec le dispositif d’apprentissage qui

nous paraît également importante de discuter. Ces changements semblent en effet en partie

stimulés par des évènements de la course et les histoires de course vécues par les élèves dans

les leçons.

Dans le dispositif sans chambre, la dynamique de répartition des formes d’interaction met en

évidence une distribution particulière avec la présence majoritaire de la forme de délégation

(82,6% et 81,8%) (Tableau 37) qui tend à se stabiliser durablement (Figures 19 et 20).

L’analyse croisée de l’articulation collective des cours d’action individuels montre, dans les

deux cas, que les plateaux de délégation correspondent à un regroupement de dyades d’élèves.

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C’est précisément à ces moments que les élèves de dyades différentes décidaient de rester

ensemble pour poursuivre leur course de manière durable. A titre d’exemple, dès le début de

l’exercice, la dyade 1 (Marie/Mélanie) a pris connaissance du fait qu’une autre dyade (non

appareillée) avait les mêmes balises qu’elle. Malgré le départ alterné des deux dyades, les

élèves de la dyade 1 ont attendu leur homologue sur le chemin en direction de la première

balise et ont fait la majeure partie de course ensemble délégant en grande partie à l’autre

dyade la responsabilité des itinéraires.

Dans le dispositif chambre, la répartition des formes d’interaction montre pour la dyade 3

(Cédric/Antoine) une distribution soit avec une tendance à la co-construction soit une

distribution avec une tendance à la délégation tout au long de la course (Figure 25). L’analyse

croisée des cours d’action individuels montre que cette distribution est en partie liée à une

histoire vécue par les élèves et à des évènements survenus pendant la course. A titre

d’exemple, après avoir poinçonné la balise à la deuxième minute, Antoine a pointé sur la carte

l’endroit où son partenaire Cédric et lui se situaient. Cédric a immédiatement acquiescé et

confirmé cette position. Juste après, Antoine s’est contredit en justifiant qu’il n’avait pas bien

orienté la carte et a pointé son doigt sur un autre endroit. A partir de ce moment-là,

l’affirmation de Cédric, acquiesçant à une proposition de son partenaire qui était fausse,

semble l’avoir plongé dans une volonté de suivre Antoine, marquant ainsi une forme

importante d’interaction de délégation. Celle-ci s’est achevée lorsque, sous le guidage

d’Antoine, la dyade ne trouvait pas la balise. Dès lors, les deux élèves sont tombés d’accord

pour revenir sur leurs pas caractérisant un changement vers une forme de co-construction.

Cette dernière s’est poursuivie jusqu’à ce qu’un doute s’installe chez Cédric confiant de

nouveau à Antoine la responsabilité de l’itinéraire. Enfin, cette forme d’interaction de

délégation a perduré jusqu’au signal de fin de l’exercice : les élèves se sont accordés pour

rentrer au point de ralliement en faisant le chemin en sens inverse.

Dans le dispositif 2 cartes, la répartition des formes d’interaction montre un plateau traduisant

une relative permanence de la forme de délégation (Figure 32). L’analyse croisée de

l’articulation collective des cours d’action individuels fait correspondre ce moment à une

rencontre avec une autre dyade. Marie a interpellé un élève d’une autre dyade pour se

renseigner de la position de la balise qu’ils recherchaient. Malgré la réponse négative de cet

élève, Marie lui a demandé sa carte pour vérifier si la balise qu’elle venait de croiser était

inscrite dessus (Marie était en possession d’une carte qui ne l’avait pas) : Marie a alors pris la

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carte de l’élève rencontré et l’a superposée à la sienne pour définir un nouvel itinéraire de

course (la carte empruntée détenait l’emplacement de la balise rencontrée).

Dans le dispositif leurre, la dynamique de répartition des formes d’interaction met en

évidence une distribution particulière : à plusieurs reprises, des tendances à la co-construction

émergent régulièrement au détriment de la délégation (Figures 40 et 41). L’analyse croisée de

l’articulation collective des cours d’action individuels des deux élèves montre que ces pics

sont concomitants avec l’approche des zones de balises. C’est à ce moment que les élèves

s’accordaient sur la stratégie à mettre en place : vérifier toutes les balises à vue dans la zone

des balises-leurres pour trouver la bonne. A titre d’illustration, le guidage de la course par un

élève de la dyade 6 (Régis/David) (i.e. délégation) prenait fin systématiquement lorsque son

partenaire et lui arrivaient dans la zone de balises. Précisément, à la vue de la première balise,

David est allé vérifier son numéro et a constaté qu’elle était fausse. Son partenaire Régis et lui

se sont immédiatement accordés pour de nouveau regarder la description de l’emplacement de

la balise et vérifier les autres balises qu’ils voyaient à vue soit en se répartissant les tâches (un

élève allait voir une balise, le partenaire une autre) soit en les cherchant ensemble (les deux

élèves se dirigeaient vers les balises une par une) jusqu’à trouver la bonne balise rendant

compte dans les deux cas d’une interaction de co-construction.

Ce dernier point invite à poursuivre les réflexions sur l’importance du choix des

caractéristiques matérielles (les balises leurres) lors de la conception de dispositif

d’apprentissage puisqu’elles co-déterminent les flux transitoires de formes d’interaction entre

les élèves.

3. La dynamique des formes d’interaction

Malgré des caractéristiques différentes des dispositifs d’apprentissage, il semble qu’il

y ait une permanence dans l’émergence et la présence des formes d’interaction entre élèves en

course d’orientation. Toutefois, cette deuxième partie de résultats met en avant des

dynamiques singulières d’interactions dans les différents dispositifs d’apprentissage et apporte

un autre regard. Précisément, ils permettent d’interroger à nouveau les formes d’interaction

telle qu’elles sont appréhendées par les approches psychosociales : un certain nombre

d’études s’étant intéressé à l’impact du travail en dyades sur le développement de compétence

motrices et/ou sociales des élèves en EPS, ont souvent assigné un rôle prédéfini aux deux

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élèves de la dyade (le tuteur et le tutoré) (Cicéro & Lafont, 2007 ; Ensergueix & Lafont,

2007 ; 2009). Nos résultats invitent à ne pas considérer ces rôles au sein des dyades comme

figés lors de la réalisation d’une tâche commune. A titre d’exemple, la désignation par

l’enseignant d’EPS d’un élève comme porteur de la carte (e.g., lors du moment de distribution

de la carte) et donc comme orienteur, ne garantit pas qu’il conserve et assume ce rôle tout au

long de la course d’orientation. Nos résultats permettent d’interroger à nouveaux frais les

formes d’interaction telle qu’elles sont appréhendées par les approches situées et notamment

celle relative au cadre théorique et méthodologique du CA dans lequel nous nous situons :

certaines recherches s’étant intéressées à la dynamique des formes d’interaction entre

plusieurs acteurs ont montré l’apparition, la disparition, la réapparition des formes

d’interaction au cours du temps (e.g., Bourbousson et al., 2013 ; Evin, 2013) ou encore des

catégories d’interprétation au sujet de la qualité de navigation des coureurs en course

d’orientation (Mottet, 2015). Nos résultats invitent à ne pas s’attacher seulement à l’étude

« de photographies d’états » mais aussi à caractériser la dynamique des formes d’interaction

entre des acteurs utilisant des indicateurs de la dynamique comme le ratio de changement

(évolution du nombre de changements d’une interaction à une autre), la répartition des formes

d’interaction au cours du temps (la tendance à l’émergence des formes d’interaction) ou la

récurrence de succession des formes d’interaction (caractérisation de la nature du changement

d’une forme d’interaction à une autre au cours du temps). Autrement dit, si par exemple,

Bourbousson et al. (2013) rendent compte au sein d’une équipe de basket-ball de la

dynamique de la présence ou non d’un degré de connexion entre deux joueurs (car c’est leur

objet d’étude), ces auteurs ne s’intéressent pas à caractériser cette dynamique à partir

d’indicateurs calculés issus des données d’expériences. Cela pourrait être une piste

d’investigation à réaliser et systématiser dans les travaux menés dans le cadre théorique et

méthodologique du CA afin de rendre compte de la dynamique de plusieurs acteurs.

Aussi, d’autres approches s’intéressent à la complexité notamment sur les cycles de

coordinations interpersonnelles qui impliquent des éléments rendant compte notamment des

signatures qui fondent la dynamique d’un système (e.g., Ramenzoni, Riley, Shockley &

Baker, 2012 ; Riley, Richardson, Shockley & Ramenzoni, 2011). Dans cette veine, il est

possible d’envisager une discussion autour des différentes échelles dans lesquelles les

coordinations interpersonnelles, entendues dans un sens large, existent (e.g., niveau

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biomécanique, niveau phénoménologique) : est-ce qu’il est possible de trouver les mêmes

« signatures » selon l’échelle appréhendée ?

Cette discussion pose les questions suivantes : s’il est possible de créer de la

fluctuation dans la coordination motrice selon certaines formes de contraintes (i.e. attracteur),

le dispositif d’apprentissage 2 cartes de notre étude ne remplit-il pas ce même rôle en

générant également de la fluctuation dans les formes de coordination (i.e. interactions) ?

Autrement dit, jouer sur des contraintes dans les interactions entre élèves du type distribution

de carte (une carte pour 2 vs 1 carte chacun), ou chambre d’appel (présence ou absence de

chambre d’appel), ou encore la présence ou non de balises leurres ne reviendrait-il pas à

évoquer des conditions de pratique critique ?

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Partie 5. Discussion générale

Cette partie conclut cette thèse sur des volets épistémique, transformatif et réflexif

discutés à partir de nos résultats et de nos discussions intermédiaires.

Cette discussion générale se compose de trois chapitres :

Le chapitre 1 présente une discussion autour de la connaissance sur l’activité des élèves en

course d’orientation

Le chapitre 2 discute de la conception de dispositifs d’apprentissage dans l’activité course

d’orientation

Le chapitre 3 présente une discussion sur la contribution de cette thèse à une réflexion

méthodologique et épistémologique dans le cadre théorique et méthodologique du Cours

d’Action

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CHAPITRE 1

Apports épistémiques

Ce chapitre ambitionnera de discuter des apports de connaissances sur la dynamique

des formes d’interaction entre les élèves en course d’orientation à partir d’une analyse

rapprochant approche qualitative et approche quantitative des résultats. A ce titre, nous

discuterons des liens entre la dynamique des formes d’interaction des élèves, les modes

d’utilisation dyadique de la carte et ses propriétés physiques et fonctionnelles. Aussi, nous

discuterons de la forme d’interaction de délégation qui ne nous semble pas avoir été pointée à

notre connaissance dans les études portant sur les interactions entre élèves en EPS.

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Chapitre 1. Apports épistémiques

L’analyse qualitative complétée par l’analyse quantitative permet de discuter les

résultats obtenus en prenant en compte notamment ce qui participe à la dynamique des formes

d’interaction comme par exemple les caractéristiques matérielles et fonctionnelles de la carte,

et en discutant de la forme d’interaction de délégation.

1. Le rôle des propriétés physiques et fonctionnelles de la carte en lien avec

les modes d’utilisation

Les recherches conduites dans le paradigme de l’écologie de la classe (Doyle, 1977)

appréhendent l’espace de la leçon comme un système éco-social (Lemke, 2000) pointant ainsi

les relations d’interdépendance entre les formes de travail de l’enseignant, des élèves, et de la

matérialité du dispositif d’apprentissage. En plaçant au même niveau d’analyse l’activité des

acteurs de la classe et le dispositif matériel, ce paradigme participe à « prendre au sérieux »

les objets matériels dans les situations d’enseignement. En effet, les objets matériels en tant

que composants des dispositifs d’apprentissage contribuent à générer des ressources offrant

ou non aux élèves des possibilités d’interaction entre eux et des ancrages concrets à leurs

négociations et redéfinitions collectives de « ce qu’il convient de faire » (Adé, 2010). A ce

propos, des recherches ont déjà pointé l’importance des objets matériels dans la structuration

de la dynamique des interactions en EPS. A titre d’illustration, Saury et Rossard (2009) se

sont intéressés à l’utilisation de fiches d’observation dans l’activité badminton. Dans une

première situation, les élèves n’avaient pas à disposition les fiches d’observation. Ils

respectaient les consignes de l’enseignant d’EPS et augmentaient l’intérêt de l’interaction

duale (mise en place de challenge plus attractif du point de vue des élèves). Dans une

deuxième situation, les élèves avaient à disposition les fiches d’observation à remplir dans le

cadre d’une évaluation. L’activité des élèves a évolué en relation avec son utilisation. Les

élèves étaient toujours engagés sur le respect des consignes de l’enseignant (remplissage de

fiche). Toutefois, une préoccupation relative à la négociation des normes communes

concernant le but de l’activité a émergé. Cette dernière s’est actualisée par une mise en œuvre

d’une entraide spontanée visant à améliorer la performance de l’élève-observé par un meilleur

remplissage de la fiche (e.g., l’élève observateur rappelait la nécessité de faire telle ou telle

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action pour avoir tel ou tel remplissage) et une surveillance des joueurs sur l’activité des

observateurs aboutissant à une négociation du remplissage de la fiche (négociations des

inscriptions des points-bonus). Cette étude montre donc que l’objet matériel participe à

structurer des interactions entre les élèves au sein de la classe. Aussi, dans cette perspective,

nos travaux de recherche dans le cadre du Master (Jourand, 2010) ont mis en évidence

l’utilisation particulière de la carte de course d’orientation par les élèves organisés en dyades

influençant des formes d’interaction. Ces travaux se sont intéressés aux objets matériels en

tant que support de la dynamique d’interactions entre les élèves et se sont focalisés sur le rôle

de l’objet dans l’activité des élèves. Bien que l’ensemble de ces travaux ait démontré

l’importance de la matérialité dans la structuration de l’activité des acteurs de la classe, ils ne

se sont pas intéressés prioritairement à ce qui dans l’objet matériel participait à structurer cette

activité. Une étude récente a cependant abordé les liens entre l’activité des élèves et les

caractéristiques physiques des appareils de musculation (Adé et al., 2013). L’organisation des

ateliers dans l’activité musculation et des postures associées pour le travail sur les appareils

modifiaient les interactions entre les élèves : l’atelier « développé-couché » et sa position

allongée limitaient les interactions avec les élèves d’autres ateliers alors que celui du

« développé-assis » et sa position assise favorisaient chez l’élève-pratiquant une observation

de l’activité dans l’atelier voisin aboutissant parfois à une forme d’interaction d’entraide.

Nos résultats mettent en avant les liens entre les modes d’utilisation de la carte par les

élèves, ses propriétés physiques et fonctionnelles et les formes d’interaction. Précisément, les

objets ne sont plus considérés comme « content free » (Dyson & Grineski, 2001) mais comme

des médiateurs dans l’activité de l’enseignant et des élèves. L’ensemble de ces travaux

converge notamment avec ceux réalisés dans des domaines extra sportifs, défendant l’idée

d’une intervention des objets matériels dans les processus mentaux (e.g., Conein, 1997 ;

Goodwin & Goodwin, 1997 ; Heath & Luff 1994 ; Heath & Hindsmarsh, 1997 ; Hutchins,

1995 ; Kirsh, 1995 ; Norman, 1993). Parmi eux, Norman a particulièrement mis en avant

l’importance des propriétés physiques des objets comme révélateur d’actions pratiques

(Norman, 1988). L’argumentation de l’auteur repose sur la présence à la surface des objets de

« propriétés visibles » (« Physically visible ») (p.79, opt. cité 1988) qui constituent le « design

naturel » (p.12, opt. cité 1988) de l’objet et qui participent à définir certaines actions à

accomplir, à faciliter l’accès à l’information. Ces propriétés convoquent ainsi une forme

d’utilisation qui dessine les propriétés fonctionnelles des objets et amènent Norman à

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distinguer de bon et de mauvais design. Le bon design de l’objet est celui qui est rendu

explicite par les propriétés physiques (forme, couleur, texture) de l’objet qui rendent visibles

les utilisations possibles et souhaitées. Le mauvais design est celui qui génère des difficultés

d’utilisation ou de manipulation de l’objet. Dans le domaine sportif, des recherches ont fait un

« pas en avant » sur le rôle des objets matériels dans la structuration de l’activité des sportifs

en dévoilant l’importance des propriétés physiques et fonctionnelles des objets matériels. Par

exemple, dans le domaine de l’entrainement sportif, une étude conduite avec des nageurs

élites évoluant sur un dispositif technologique immergé, montrent que les nageurs en ont une

utilisation qui varie au fil de la situation en fonction des vitesses de nage prescrites (Adé,

Poizat, Gal-Petitfaux, Toussaint & Seifert, 2009 ; Gal-Petitfaux, Adé, Poizat & Seifert, 2013).

Cette variation s'explique notamment par les différentes forces repérées au niveau du ressenti

des nageurs indexé aux propriétés physiques du dispositif technologique et aux seuils de

vitesse de nage. C'est au seuil de vitesse rapide que le dispositif technologique est vécu par les

nageurs comme « transparent », alors qu'il est vécu comme perturbant et contraignant aux

vitesses lentes et maximales. Dans le domaine de l’expertise en sport, une étude récente en

cascade de glace a mis en avant le rôle de la forme de la lame et du manche du piolet mais

aussi des matériaux qui les constituent, pour amplifier lors de la frappe certaines informations

(e.g., le son produit par la lame pénétrant la glace et les vibrations ressenties dans l’avant-bras

véhiculées par le manche) indispensables aux experts pour estimer la fiabilité de l’ancrage

(Seifert et al., 2014).

Ces travaux montrent donc qu’il ne suffit pas de prendre en compte l’objet matériel en

tant que médiateur dans l’activité d’acteurs mais aussi ses propriétés physiques dans les

formes d’interaction entre individus. Nos résultats, à ce titre, prolonge ce point de discussion.

Le mode univoque de la carte a été plutôt observé dans les moments de désaccord au cours

desquels le porteur de carte, à l’arrêt ou en courant, souhaitait imposer son point de vue. Dans

ce cas, les propriétés physiques de la carte encourageaient ce mode d’utilisation de part sa

petite taille (A4) et sa matière (en papier) permettant de faire émerger des propriétés

fonctionnelles (facilement transportable) : l’élève pouvait la tenir à une main pour l’éloigner

de sa partenaire, l’empêchant ainsi de la consulter. Le rôle de la carte ne peut donc se

comprendre en dehors des gestes qui la font exister et de ses caractéristiques matérielles et

fonctionnelles. En effet, la carte se dévoile comme à la fois suffisamment petite pour qu’un

élève s’en saisisse et prive son partenaire de toute utilisation, et suffisamment grande pour

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engager les élèves dans un mode d’utilisation partagée. C’est par exemple dans les moments

de doute quant au choix de l’itinéraire à suivre et lorsque les deux élèves étaient arrêtés, que

des propriétés physiques de la carte se dévoilaient de façon similaire pour chaque élève qui

s’engageait alors à la consulter conjointement. Sa taille invitait chaque élève à la saisir,

favorisait leur rapprochement, et engageait les élèves à prendre en compte différents symboles

de la carte (e.g., dépression, talus, chemins carrossables, sentiers) pour co-construire un

itinéraire en traçant, pointant ou balayant avec leur doigt sur la carte. A ce titre, nos résultats

montrent que 55,5% de ces passages de modes d’utilisation de la carte (partagé à univoque)

s’inscrivent dans ce changement de formes d’interaction (confrontation à co-construction). En

revanche, la conservation d’un mode partagé entre les élèves durant ce changement

correspond à 33,5% des différentes utilisations de la carte (Tableau 54), ce qui laisse suggérer

que la dynamique des formes d’interaction est indissociable du mode d’utilisation de la carte

mais également de la situation dans laquelle ils prennent tous deux forme. C’est aussi parce

que les élèves ont le sentiment d’être à proximité de la balise recherchée qu’ils valorisaient un

mode d’utilisation détaché de la carte, indissociable d’une forme de co-construction dans

laquelle les deux élèves s’accordaient par exemple pour rechercher la balise à vue. Les

travaux de Mottet et Saury (2014) vont d’ailleurs dans ce sens en pointant chez des

pratiquants débutants des formes récurrentes de « recherches à vue » des balises lorsqu’ils

estimaient en être proches. Dans ces moments-là, les élèves se déplaçaient de manière

approximative et opportuniste (Mottet & Saury, 2014) favorisant un mode détaché de la carte

que nous pointons dans notre étude. Si nos résultats montrent une tendance à la

correspondance entre certains passages d’un mode d’utilisation de la carte à un autre et un

changement d’une forme d’interaction à une autre, ils renforcent aussi le caractère

indissociable des liens entre les propriétés physiques et fonctionnelles de la carte et son

utilisation par les élèves, les formes d’interaction entre ces mêmes élèves et la situation en

cours. A ce propos, la conservation du mode détaché de la carte dans le

changement délégation/co-construction représente l’apparition la plus importante (33,7%)

toutes dyades et dispositifs confondus (Tableau 57) : l’expérience régulière vécue dans

chaque leçon par les élèves au cours du cycle (pour rappel, cette présente étude s’intéresse

aux leçons 5, 6, 7 et 8 sur un cycle en comptant 9) peut faciliter une (re)connaissance du

milieu. Cette expérience progressive du terrain associée à des lectures communes de la carte

peut faire ressortir, à différents moments de la course, ses propriétés physiques (les

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inscriptions dessus) et ses propriétés fonctionnelles de rappel et favoriser le changement de la

forme délégation à la forme co-construction, au cours de laquelle les élèves s’accordent sur un

itinéraire notamment en discutant des éléments remarquables. A ce propos, Antoine s’est

rappelé, sans regarder la carte et en courant, que le chemin que son partenaire et lui devaient

prendre pour se rendre à la balise était celui qui se trouvait à côté du banc, ce qu’a

immédiatement confirmé Cédric.

A travers ces liens entre la carte, l’activité de chaque élève et les formes d’interaction,

nous souhaitons surtout mettre en avant deux points interdépendants venant préciser le rôle de

médiateur des objets déjà développé dans des travaux récents en EPS (Adé & de Saint

Georges, 2010 ; Adé et al., 2009).

Le premier point est une invitation à dépasser la vision statique et objectiviste des objets. Les

caractéristiques physiques et fonctionnelles des objets ne pré-existent pas à l’activité mais se

dévoilent dans l’action (Semprini, 1995) ou l’interaction entre des acteurs. Nous défendons

ainsi l’idée que les objets possèdent un « potentiel praxique » dans le sens où en fonction de

l’engagement du ou des acteurs dans la situation, ils délimitent des possibilités d’interaction

entre l’objet et le ou les acteurs. A titre d’illustration, le fait de douter en étant arrêté à un

croisement de chemins, constitue des opportunités pour faire ressortir certaines propriétés

physiques et fonctionnelles de la carte qui la définissent, pour cet instant-là, comme un objet à

partager. Dans ce cas, ces « propriétés visibles » (Norman, 1993, p.79) invitent les deux

élèves de la dyade à s’en saisir en la tenant chacun par une main et à les engager dans une

interaction de co-construction. Mais notre conception diverge de celle de Norman pour qui

ces « propriétés visibles » caractérisant le design des objets, pré-existent à l’activité des

acteurs. Nos résultats montrent au contraire qu’elles s’offrent ou s’effacent en fonction de

l’engagement des acteurs dans la situation.

Notre conception nous semble renforcée par notre deuxième point qui met en avant la

participation des objets au processus d’intersubjectivité. Le potentiel praxique de la carte

participe au sein des dyades à la distribution tacite et plus ou moins implicite de rôles

(orienteur, poinçonneur) et de statuts (leader, suiveur) mais aussi à une organisation

émergeante des tâches à réaliser. Ce point n’est pas négligeable lorsqu’on vise le

développement d’apprentissages sociaux car il met en avant le rôle des objets dans la

construction du sujet, de son identité, de son savoir-être. Le rôle de médiateur des objets est

donc également à envisager en termes d’ « agentivité » (Engeström, 2006). L’idée

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d’agentivité renforce celle qui considère que les intentions des acteurs sont des phénomènes

émergents non réductibles à des représentations mentales individuelles de buts et de plans.

L’intentionnalité découle de l’interaction sociale, c'est-à-dire de l’interaction entre plusieurs

acteurs et leur environnement matériel (Gibbs, 2001). Dans la veine des travaux d’Engeström

(2006), nous pouvons ainsi qualifier les interactions entre élèves en course d’orientation de

« structuration nodale » (« knotworking ») (p. 147, opt. cité 2006), pour assimiler l’activité

coopérative entre élèves comme distribuée (entre les élèves de la dyade et les propriétés

physiques de la carte), partiellement improvisée et en mouvement perpétuel (les formes

d’interaction et les modes d’utilisation de la carte se transformant au fil de la situation).

Reprenant la métaphore de la « structuration nodale » d’Engeström, nos résultats montrent

qu’en course d’orientation autour des propriétés physiques et fonctionnelles de la carte, se

nouent, se dénouent et se renouent des formes d’interaction et des modes d’utilisation de la

carte, participant ainsi à définir de façon plus ou moins durable dans le temps les rôles et

statuts des élèves dans la dyade. Au final, considérer le « potentiel praxique » et

l’« agentivité » des objets matériels revient à envisager leur rôle de médiateur non plus

comme une propriété exclusive, mais comme émergeante du couplage des acteurs avec la

situation dans laquelle l’activité collective se déploie. En d’autres termes, leurs propriétés

physiques et fonctionnelles et leurs modes d’utilisation se révèlent, s’imposent, s’effacent ou

s’inventent dans la dynamique du couplage structurel acteur/situation (Julien & Rosselin,

2009 ; Stewart, Khatchatourov & Lenay, 2004).

Aussi, cette conception du rôle des objets dans l’activité collective, nous semble

devoir être prise en compte au niveau des pratiques professionnelles des enseignants.

2. La forme d’interaction de délégation

Les textes programmes suggèrent l’atteinte pour tous les élèves d’une compétence que

ce soit au niveau 1 ou niveau 2, notamment relative au choix et à la conduite d’un

déplacement pour trouver toutes les balises à l’aide d’une carte. L’analyse des fiches-

ressources rendent compte de capacités chez les pratiquants servant de tremplins à

l’acquisition de la compétence. Nos résultats montrent que la course d’orientation lorsqu’elle

est pratiquée dans un travail collectif (ce qui est souvent le cas) se définit par des formes

d’interaction dyadique s’actualisant majoritairement sous forme de co-construction mais aussi

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de délégation. Cette forme de délégation peut s’expliquer par le fait qu’une partie de l’activité

des élèves échappe à la supervision des enseignants : les comportements entre élèves

différeraient selon la présence ou l’absence de l’enseignant (Ward et Lee, 2005). A ce titre,

une étude montre que la dynamique de l’activité des élèves en classe est fondée sur des

processus ostentatoires et de masquages selon l’éloignement de l’enseignant (Vors & Gal-

Petitfaux, 2009) : si les élèves rendent visibles de manière ostentatoire le travail demandé par

l’enseignant lorsque celui-ci est proche, ils ont tendance à transgresser ce même travail de

manière dissimulée lorsque l’enseignant s’éloigne. Etant éloignés et cachés de l’enseignant

d’EPS lorsqu’ils agissent ensemble en leçon de course d’orientation (l’enseignant en course

d’orientation est tenu de rester au point de ralliement), les élèves pourraient par exemple

moins tendre à répondre à ses exigences par une participation moins active laissant à son

partenaire la responsabilité de guider la course. Une autre explication pourrait référer au

caractère incertain voire anxiogène de l’activité course d’orientation lié notamment au fait que

les élèves entrent dans leur premier cycle et que les leçons se passent dans un milieu forestier

partiellement connu. Le caractère incertain d’une situation peut en effet être perçue de

manière subjective par les individus comme anxiogène. A ce propos, une étude montre que

cette perception anxiogène chez un individu peut l’amener à y « faire face » en opérant un

comportement de fuite (Frijda, 2006). Ce comportement de fuite peut être réinterprété dans

notre étude par une interaction de délégation : la peur du milieu ou d’être perdu pourrait être

vécue par l’élève comme des « émotions négatives » déclenchant chez lui un comportement

« de faire face » caractérisé par une délégation à son partenaire de la responsabilité de

conduite d’itinéraire. Le dispositif émotionnel pourrait prendre ainsi le pas sur le dispositif de

l’aménagement matériel. Ces deux suggestions semblent limiter l’importance des variables

des dispositifs d’apprentissage dans la mesure où l’interaction de délégation émerge de façon

majoritaire dans trois dispositifs sur les quatre étudiés (Tableau 41).

Au regard des éléments de discussion ci-dessus, nous proposons, sans visée

d’exhaustivité, quatre pistes indissociables de réflexion, visant à utiliser la dynamique des

interactions comme levier pour des apprentissages sociaux. En premier lieu, nous invitons les

enseignants à envisager les dyades d’élèves non pas comme une forme de travail pédagogique

organisée et figée, mais comme un véritable processus dynamique. Nos résultats montrent que

les rôles de locomotive/wagon fluctuent au gré de la situation. Il s’agit donc de considérer les

dyades comme des « dispositifs d’interactions encouragées » au cours desquels se dévoilent

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des épisodes variés et changeants d’interactions sources d’apprentissages sociaux. En

deuxième lieu, nous incitons les enseignants à interroger à nouveau frais la notion de travail

collectif et/ou coopératif. Différents auteurs (e.g., Slavin, 1996 ; Ward & Lee, 2005) ont

pointé que le fait de proposer aux élèves de réaliser un travail en groupe, ne s’accompagnait

pas forcément d’une coopération effective entre les élèves. Nos résultats le confirment en

montrant que si certaines interactions peuvent effectivement relever de la coopération

effective (co-construction), d’autres engagent les élèves dans de la concurrence

(confrontation), ou dans l’abandon ponctuel de responsabilité (délégation).

Toutefois nous défendons l’idée que développer des apprentissages sociaux, c’est pour

les élèves faire l’expérience de ces différentes formes d’interaction.

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CHAPITRE 2

Apports transformatifs

Ce chapitre vise, à partir des résultats de cette présente étude, à proposer des pistes de

réflexions sur les conceptions de dispositifs d’apprentissage en course d’orientation. S’il

questionnera la prise en compte de l’aspect des dynamiques des formes d’interaction entre

élèves dans cette conception, il invitera également à réfléchir sur l’intérêt de « prendre au

sérieux » les propriétés physiques et fonctionnelles de la carte d’orientation pour

encourager/dissuader certaines formes d’interaction entres les élèves.

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Chapitre 2. Apports à la conception de dispositifs d’apprentissage pour

l’enseignement de la course d’orientation

Si l’approche du CA met en avant la nécessité à prendre en compte le point de vue des

élèves, c’est pour mieux en tirer des bénéfices dans la conception des dispositifs

d’apprentissage : elle a montré à ce propos l’importance qu’il y a à prendre en compte

l’environnement matériel comme « espace d’actions et d’interactions encouragées » (Saury et

al., 2013). Ces dispositifs d’apprentissage constituent des espaces d’actions et d’expériences,

supposés induire un apprentissage/développement (Durand, 2008) : à titre d’exemple, c’est

parce qu’il y a un arrangement spatial des ateliers de musculation (les appareils sont répartis

dans une salle) qu’émergent des interactions anticipatrices d’entraide relatives au travail à

réaliser entre les élèves (un élève quittait son atelier pour conseiller un autre partenaire avant

que celui-ci ne travaille dessus à travers une démonstration du geste sécuritaire par exemple)

(Adé et al., 2013). Les dispositifs d’apprentissage mis en place par les enseignants d’EPS

constituent alors des ressources ouvrant des possibles pour la construction des interactions

entre les élèves en classe. Pour se faire, les enseignants d’EPS doivent porter une attention sur

la matérialité (le choix des objets pédagogiques), la spatialité (l’agencement des objets et des

personnes dans l’espace de la leçon), la temporalité (la durée du travail) et l’organisation

sociale du travail (choix des formes de travail) (Saury et al., 2013).

Dans cette veine, nous proposons de poursuivre l’idée d’une ergonomie didactique (Saury et

al., 2013) centrée sur l’expérience des élèves. Cette ergonomie favorise la conception des

dispositifs d’apprentissage visant à être au plus près à la fois des préoccupations pédagogiques

des enseignants d’EPS et de l’activité des élèves, et des conditions écologiques de

l’intervention.

1. Les effets de dispositifs d’apprentissage en course d’orientation

La dynamique temporelle des interactions au sein de dyades d’élèves nous semble

ouvrir des perspectives intéressantes dans le cadre des recherches sur les apprentissages

coopératifs (Ward & Lee, 2005). Certains travaux, comme ceux relatifs à l’analyse des

programmes anglo-saxons du « Sport Education » ou de « Sport for Peace » (Ennis, Solmon,

Satina, Loftus, Mensch, & McCauley, 1999 ; Siedentop, 1994), défendent l’importance

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d’engager les élèves dans des projets d’apprentissage à long terme pour apprendre à travailler

en équipe. Nous pensons que d’autres pistes sont possibles, comme celles consistant à

exploiter le potentiel éducatif contenu dans la dynamique même des interactions entre les

élèves. Faire expérimenter aux élèves une situation stimulant des changements de formes

d’interaction, notamment dans des situations de course d’orientation n’excédant pas les 15mn

constituent selon nous autant d’expériences complémentaires pour développer chez les élèves

des compétences d’entraide (Dyson, Griffin & Hastie, 2004 ; Kirk & Kinchin, 2003 ; Patrick,

Ward & Crouch, 1998). Même si, comme nous l’avons déjà signalé, la dynamique des

interactions entre élèves au sein de dyades n’est pas tout le temps accessible à l’enseignant,

nous croyons en la possibilité de concevoir des dispositifs d’apprentissage susceptibles

d’influer sur elles.

Nous suggérons donc que ce qui se joue dans cette dynamique des interactions et qui est non

accessible en partie à la supervision de l’enseignant d’EPS est source d’apprentissage et

notamment de savoir-faire sociaux relatifs à « apprendre […] à travailler en équipe »

(Programmes du collège, 28 août 2008). A ce titre, nos résultats permettent de mettre en débat

la question des apprentissages sociaux et notamment des apprentissages coopératifs : si les

études psychosociales mettent en avant le rôle bénéfique de la coopération (Ward & Lee,

2005), à notre connaissance, elles n’ont pas discuté de savoir s’il était mieux de stabiliser une

même forme d’interaction ou de stimuler des changements de formes d’interaction chez les

élèves pour favoriser ces apprentissages sociaux. Nos résultats ont mis plus particulièrement

en avant le caractère singulier des ratios de changement (i.e. quantités de changements) dans

la dynamique des formes d’interaction en fonction des caractéristiques du dispositif

d’apprentissage au cours du temps. En effet, dans les dispositifs sans chambre et chambre, il

semble apparaître une période autour de laquelle la dynamique tend à la stabilité des formes

d’interaction dans le temps (à partir d’une zone autour de 15mn) (Figures 17 et 23). C’est

donc pour faire vivre aux élèves des changements fréquents dans les formes d’interaction que

l’enseignant d’EPS va privilégier des durées de course courtes (inférieures à 15 minutes) dans

des dispositifs de pratique sans chambre ou chambre. Dans cette optique, cela renforce

l’intérêt du dispositif couramment utilisé par les enseignants des « parcours en papillon » au

cours desquels les élèves vont chercher une ou plusieurs balises avant de revenir au point de

ralliement, pour obtenir une nouvelle carte distribuée par l’enseignant d’EPS et repartir sur

d’autres balises.

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Si au-delà d’une quinzaine de minutes la quantité de changements dans la dynamique des

formes d’interaction diminue dans ces dispositifs, c’est par l’utilisation du dispositif 2 cartes

ou leurre avec une durée de course estimée à 40 minutes que l’enseignant d’EPS encourage

de façon régulière les changements de forme d’interaction à une autre entre les élèves

(Figures 31 et 38). Autrement dit, selon la posture de l’enseignant d’EPS en rapport à sa

perception de ce qui est le mieux pour le développement des apprentissages sociaux (vivre de

nombreux changements dans la dynamique des formes d’interaction sur des durées courtes vs

vivre des changements d’interaction moins nombreux mais réguliers sur des empans plus

longs vs vivre peu de changements au travers d’une interaction qui se stabilise), celui-ci peut

choisir le dispositif d’apprentissage qui semble être au plus près de ses objectifs de formation.

Aussi, conjointement aux ratios de changements des formes d’interaction, la caractérisation de

ces changements est également une source de discussions. Nos résultats montrent que la

présence de la forme d’interaction de délégation est supérieure dans trois dispositifs

d’apprentissage sur quatre (sans chambre, chambre, leurre). Conscient qu’une partie de

l’activité des élèves lui échappe en partie en course d’orientation, l’enseignant d’EPS

« redoute » les activités collectives de type « locomotive/wagon » (i.e. délégation) : elles

seraient enclines en effet à ne pas créer les mêmes conditions de la réussite pour tous. Elle est

d’ailleurs à ce propos catégorisée comme un inconvénient par Blanchard (2008) lorsqu’il met

en avant les avantages et les inconvénients des formes de pratiques individuelle vs collective

en course d’orientation. Toutefois, la connaissance de la dynamique de répartition des formes

d’interaction nuance cet « allant de soi ». En effet, la conception d’un dispositif

d’apprentissage en course d’orientation avec des balises-leurres permet à l’approche de

chaque zone de balises de limiter une persistance de l’interaction de délégation au profit d’une

co-construction dans la mesure où les deux élèves tombent d’accord sur les stratégies à mettre

en place (à plusieurs reprises, des tendances à la co-construction émergent régulièrement au

détriment de la délégation) (Figures 40 et 41) : à l’approche de la zone des balises-leurres, les

deux élèves se concentrent davantage sur la lecture de carte pour identifier la caractéristique

remarquable de l’emplacement de la balise à poinçonner et se mettent d’accord sur ce qu’il

faut rechercher à vue comme élément prioritaire.

C’est donc en composant avec la matérialité, la temporalité et avec le caractère

indéterminé des interactions entre élèves, que l’enseignant en tant que « praticien enactif »

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(Masciotra, Roth, & Morel, 2007), peut encourager/dissuader des dynamiques particulières

d’interaction, sources d’apprentissages variés chez les élèves.

2. Domestiquer la carte de course d’orientation

Nos résultats ont mis en avant les liens entre les modes d’utilisation dyadique de la

carte par les élèves, ses propriétés physiques et fonctionnelles, et la dynamique des formes

d’interaction : la conception de l’objet carte dans l’activité dyadique en course d’orientation

nous semble devoir être prise en compte au niveau des pratiques professionnelles des

enseignants d’EPS. Pour cela, nous proposons une réflexion visant à « domestiquer la

matérialité » dans les situations de classe où l’enseignant d’EPS cherche à encourager les

interactions coopératives à dominante de co-construction entre les élèves ; ces interactions

favorisant le développement des apprentissages cognitifs, moteurs et sociaux (Johnson &

Johnson, 1994). Nos résultats ont montré que les propriétés physiques de la carte relatives aux

inscriptions figurant dessus favorisaient notamment un mode d’utilisation partagé engageant

les deux élèves de la dyade dans des formes de co-construction : ces derniers agissaient dessus

en traçant, en balayant ou en pointant de leurs doigts des éléments remarquables pour définir

des itinéraires.

A partir de ces résultats, la première piste d’intervention suggère d’équiper chacun des deux

élèves de la dyade d’un extrait de carte différent, de telle sorte que la carte soit rendue

inutilisable si ses deux parties ne sont pas associées. Cette proposition fondée sur la

complémentarité des propriétés physiques des deux extraits de carte distribués nous semble

encourager des interactions de co-construction entre élèves engagés dans une tâche

commune : la particularité des inscriptions (i.e. les différentes positions des cercles rouges

correspondant aux emplacements des balises) sur les deux extraits de carte inviteraient les

élèves, chacun en possédant un, à les coller l’un à côté de l’autre ou à les superposer pour

établir un ordre des balises à chercher par exemple en début de course. De plus, d’un point de

vue des consignes de sécurité systématiquement appliquées par les enseignants d’EPS

inhérentes « à rester ensemble » lors d’un travail dyadique en course d’orientation, cette

proposition garantit tout au long de la course la proximité des élèves de la dyade : dès que

l’un deux souhaite construire un itinéraire entre deux balises, adapter leur itinéraire, vérifier

leur position, ce dernier a besoin de l’extrait de carte de son partenaire nécessitant sa présence

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immédiate. En favorisant une forme d’interaction de co-construction entre les élèves par un

jeu de propriétés physiques des deux cartes, cette proposition vise à garantir une expérience

relative à « prendre des décisions communes » (Fiche ressources, Course d’orientation niveau

1, 2009). Cette attitude suggérée dans les textes officiels pour un niveau débutant est donc une

opportunité à l’exploration de cette conception de la carte chez les enseignants d’EPS.

Nos résultats ont montré aussi que les mêmes propriétés physiques et fonctionnelles de la

carte pouvaient entraîner des modes différents d’utilisation selon l’engagement des élèves : sa

petite taille ainsi que sa légèreté favorisaient aussi bien un mode partagé invitant les élèves à

une interaction de co-construction en centrant leurs regards dessus, qu’un mode univoque

invitant l’un des deux élèves à s’emparer de la carte les engageant dans une interaction de

confrontation. La deuxième proposition consiste alors à plastifier la carte et à doter chaque

élève de la dyade d’un feutre effaçable. Le fait de plastifier la carte et donc de la rigidifier,

ouvre de nouveaux possibles dans son mode d’utilisation. Ces caractéristiques peuvent inviter

les élèves à la tenir d’une seule main et les engager dans une lecture partagée. De plus,

l’utilisation des feutres effaçables permet d’objectiver des choix d’itinéraires, de les

conserver, les modifier ou les supprimer, et par conséquent d’engager différemment les élèves

dans leur travail. Cela rejoint la proposition de Mottet (2015) qui suggère la mise en place de

dispositif en milieu de cycle pour un niveau débutant permettant de se focaliser sur la

construction des itinéraires chez les élèves après que ces derniers aient vécu des tâches de

suivi d’itinéraire. La carte plastifiée associée aux feutres effaçables garantit une conservation

des traces de cette construction de l’itinéraire emprunté par les élèves. Aussi, une des pistes de

réflexion pour tendre vers des dispositifs « d’espaces d’actions et d’interactions encouragées »

évoquée par Saury et al. (2013, p. 173) consiste pour les enseignants d’EPS à enquêter sur

l’expérience vécue par les élèves au cours de l’apprentissage en se plaçant dans leurs espaces

de travail. Toutefois, en course d’orientation, l’enseignant d’EPS est tenu de rester au point de

ralliement pour des raisons de sécurité (e.g., si un des deux élèves se blesse, le partenaire peut

alerter l’enseignant qui se trouve au point de ralliement). Les moments potentiels de

régulations directes de l’enseignant sont donc les moments de départ, d’arrivée et des

passages ponctuels des élèves au point de ralliement. Ces moments sont propices de manière

fugace à des échanges verbaux au cours desquels l’enseignant d’EPS se renseigne, enquête,

contrôle l’activité des élèves et le cas échant la régule. En fin d’exercice, les interventions en

termes de régulations se font sur la base d’inférences, a posteriori, à partir soit des récits des

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élèves ou soit des traces de performances (le nombre de balises trouvées, le temps de course

réalisé). Cette proposition présente l’intérêt, en plus d’encourager des formes d’interaction de

co-construction, de rendre compte de ces traces de performances (itinéraire tracé sur la carte).

En favorisant une forme d’interaction de co-construction entre les élèves par un jeu de

propriétés physiques de la carte, cette proposition vise à garantir une expérience relative à

« prendre des décisions communes » (Fiche ressources, Course d’orientation niveau 1, 2009)

mais aussi à « choisir et planifier son itinéraire d’un point à un autre en s’appuyant sur des

éléments connus » (Fiche ressources, Course d’orientation niveau 1, 2009). Cette capacité

suggérée dans les textes officiels pour un niveau débutant est donc une opportunité à

l’exploration de cette conception de la carte chez les enseignants d’EPS.

Nos résultats ont montré que du fait de ses propriétés physiques (petite et légère), la carte

faisait ressortir sa propriétés fonctionnelle « facilement transportable » : à plusieurs reprises,

les élèves la pliait, la conservait à la main et se déplaçait. Parfois, l’élève la rangeait dans une

de ses poches. Il la ressortait à l’occasion d’un doute, ou à la demande de son partenaire : le

porteur de carte indiquait ou confirmait la direction à suivre sans que le partenaire ne la

contrôle entraînant une forme d’interaction de délégation. C’est en ce sens que la dernière

piste d’intervention vise à imposer un changement du porteur de la carte toutes les 5 minutes,

l’enseignant d’EPS désignant au début un élève porteur de carte et son partenaire responsable

du temps. Lors du changement d’utilisateur de carte, en plus d’échanger la carte et le

chronomètre, il est probable que les deux élèves soient amenés à discuter pour se repérer sur

la carte : le détenteur antérieur de la carte fournissant probablement des indications à l’autre

élève concernant leur position par rapport à des points remarquables. C’est au cours de ces

changements institués de rôles que nous faisons le pari de stimuler la dynamique des

interactions entre élèves.

Au total, c’est entre autre pour ces raisons que nous défendons l’idée de l’enseignant

d’EPS comme « designer » (Adé, 2010), considérant les objets à la fois comme des « appels »

à susciter des comportements attendus par l’enseignant, et des « potentiels » pour les élèves,

modifiant en permanence leur champ de possibles et participant à la dynamique de leurs

formes d’interaction.

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CHAPITRE 3

Apports réflexifs

Ce chapitre ambitionne de présenter une discussion gravitant autour d’une réflexion

épistémologique. En effet, l’emprunt méthodologique d’un outil hétérodoxe au cadre

théorique et méthodologique d’appartenance soulèvera deux points de réflexions : d’une part,

nous envisagerons l’exploitation de la signature graphique des données d’expérience pour

mettre en avant une démarche « ré-itérative » chez le chercheur entre approche qualitative et

approche quantitative des mêmes données d’expérience. Enfin, nous viserons une réflexion

confirmant le positionnement épistémologique de notre travail de thèse.

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Chapitre 3. Contribution à la méthodologie du cadre théorique et

méthodologique du Cours d’Action sur l’étude de la dynamique des

interactions

1. Les données d’expérience

L’étude des phénomènes dans leur complexité et leur dynamique fait l’objet de plus en

plus de travaux scientifiques. Ces travaux qui visent à renseigner ces phénomènes de la façon

la plus précise le font à notre connaissance de trois manières différentes : 1) l’articulation de

données de nature différente (e.g., Sève, Nordez, Poizat, & Saury, 2013) ; 2) la juxtaposition

de cadres théoriques différents (e.g., Mecheri, 2015) ; 3) l’emprunt d’outils hétérodoxes

d’analyse (notre travail de recherche ici présenté). L’articulation de données de nature

différentes étant actuellement la plus développée dans le Programme de Recherche du CA,

nous choisissons de discuter cette option.

L’articulation de données de nature différente issues d’une approche quantitative et d’une

approche qualitative peut se faire en accordant le primat soit aux données quantitatives soit

aux données qualitatives. Dans le premier cas, une étude s’est attachée à partir des données

d’expérience de sportifs de haut-niveau en aviron, à vérifier leurs ressentis au cours du temps

en les couplant à des mesures cinématiques précises exercées sur le bateau (Sève et al., 2013).

Les résultats ont montré que les ressentis des sportifs étudiés (e.g., impression d’être poussé

par leur partenaire, impression d’être en retard sur leur partenaire) pouvaient être soit

convergents avec les données cinématiques (e.g., le partenaire exerçait à ce moment-là une

pression supérieure au sportif qui commentait son activité) soit divergents (e.g., le sportif était

synchronisé à son partenaire). Autrement dit, les données d’expérience viennent enrichir les

données cinématiques en précisant une convergence ou une divergence dans l’analyse de la

dynamique de l’activité des sportifs. Dans le deuxième cas, Seifert et al. (2014) ont montré

que la coordination motrice des grimpeurs débutants (e.g., une coordination visant à conserver

un équilibre prioritairement sur les quatre appuis) convergeaient avec leurs activités telles

qu’ils la vivaient (e.g., en cascade de glace, les grimpeurs décrivaient une activité consistant à

réaliser de nombreuses frappes de piolets et de crampons pour avoir un ancrage profond pour

s’équilibrer). Autrement dit, les données biomécaniques viennent enrichir les données

d’expérience dans le sens où elles confirment les expériences vécues par les grimpeurs.

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Une autre option consiste à ne pas accorder le primat ni aux données quantitatives ni aux

données qualitatives. A titre d’illustration, une étude a mesuré la force exercée par des

nageurs de haut-niveau lors des trajets propulsifs à l’aide de capteurs disposés sur plaques

immergées (données cinématiques) et a corrélé ces données avec leurs sensations (données

d’expérience) (Gal-Petitfaux et al., 2013). Les résultats ont montré que si les ressentis des

nageurs indiquaient une sensation de stabilisation dans la force exercée lors des trajets

propulsifs, les mesures de la résistance active montrent parfois des irrégularités de force dans

ces mêmes trajets. Autrement dit, les données biomécaniques et les données d’expérience

enrichissent l’analyse de la dynamique de l’activité des acteurs en montrant par exemple qu’il

existe des convergences et des divergences entre les données objectives et les données

interprétatives ; et en révélant différemment l’activité des acteurs enrichie de l’articulation des

données qualitatives et quantitatives.

Une autre option récente et ambitieuse vise la construction d’un « méta-cadre » théorique. Les

approches dynamiques ont par exemple été couplées avec la psychologie écologique donnant

le cadre théorique et méthodologique « ecological dynamics » (Davids & Araújo, 2010). Si

ces approches mixtes sont controversées car elles soulèvent des questionnements sur la

possibilité de « combinaisons épistémologiques » des différents cadres théoriques et

méthodologiques d’une part, de leurs objets théoriques d’autre part, tout comme le

rapprochement des libellés « approche quantitative », « approche qualitative » ou « données

subjectives » et « données objectives », la réflexion de « l’incommensurabilité » (Feyerabend,

1975) se pose : le choix du cadre théorique et méthodologique d’une part, et de ses objets

théoriques inhérents d’autre part, entraine celui de savoir lequel, parmi les multiples critères

de comparaison à d’autres cadres théoriques et méthodologiques ou d’autres objets

théoriques, doit être préféré dans une situation où ces critères entrent en conflit (Feyerabend,

1975). Au vu des rapprochements récents de plusieurs cadres théoriques et méthodologiques,

cette réflexion de Feyerabend doit être désormais étendue : le choix du cadre théorique et

méthodologique d’une part, et de ses objets théoriques inhérents d’autre part, doit être préféré

dans une situation où une complémentarité est envisagée avec d’autres pour savoir lequel

implique la meilleure combinaison possible. Autrement dit, ce qui est central ce n’est plus « le

noyau dur » du cadre théorique et méthodologique, ce qui le légitime en « arguments

d’autorité » et le rendant pérenne, mais jusqu’où le chercheur peut s’affranchir de ce noyau

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pour effectuer un rapprochement avec d’autres cadres théoriques et méthodologiques. La

quête de la complexité pousse désormais les chercheurs à ne plus uniquement opter pour un

cadre théorique permettant d’investiguer leur objet d’étude mais à considérer également le

potentiel de leur cadre à se combiner à d’autres. Si les débats existent sur ce type de

démarches scientifiques, c’est que les discussions entre chercheurs portent sur certains points

d’achoppement dans l’utilisation complémentaire de ces différents cadres. A l’inverse, si le

chercheur ne considère pas l’incommensurabilité comme un frein à sa démarche, alors il peut

- autant faire se peut - utiliser deux cadres théoriques et méthodologiques différents pourvu

que (1) les hypothèses princeps du noyau dur de chaque cadre théorique et méthodologique ne

soient pas modifiées et (2) que l’objet de recherche nécessite ce questionnement. Ces

réflexions issues des différentes options précédentes ont contribué à jalonner notre travail en

termes de garde-fous épistémologiques.

Cette thèse de doctorat cherche à poursuivre la réflexion sur une option

méthodologique permettant d’appréhender la dynamique des formes d’interaction telle qu’elle

est vécue par des acteurs. Elle propose une méthodologie qui exploite d’autres possibilités

contenues dans la donnée d’expérience en tant que signature graphique et non plus seulement

en tant que signature littérale. L’ensemble de ce travail nous a amené à conduire une

investigation méthodologique dans le cadre théorique et méthodologique du CA qui

envisageait autrement le traitement des données pour appréhender la dynamique des

interactions entre des acteurs. Nous n’avons pas croisé des données de nature différente mais

nous avons pris une option méthodologique permettant d’avoir une autre analyse de ces

mêmes données.

Sans proposer une réflexion sur un « méta-cadre théorique » (i.e. il ne suffit pas de prendre

deux ou trois cadres théoriques et méthodologiques ou objets théoriques de nature

épistémologiques différentes et les faire fonctionner ensemble à partir de leurs ressemblances

pour en créer un nouveau) pour répondre à l’éventuelle incomplétude du cadre théorique et

méthodologique du CA (i.e. la limite d’un cadre étant atteinte, le chercheur en utilise un

autre), ni ignorer l’essor actuel des approches mixtes nécessitant une proximité

épistémologique (il s’agit d’aller chercher les présupposés théoriques qui sont partagés par les

différents cadres théoriques et méthodologiques), notre démarche emprunte une option

méthodologique située à l’interface d’une complémentarité entre approche qualitative et

approche quantitative. En effet, convoquer un outil méthodologique étranger à l’observatoire

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de référence n’est pas un problème d’incomplétude mais une volonté du chercheur à trouver

des opportunités d’interprétations nouvelles. Deux questions se posent alors : dans quelles

mesures pouvons-nous emprunter des outils hétérodoxes restant compatibles avec les

hypothèses théoriques fondatrices ? Quelle(s) plus-value(s) le chercheur peut-il espérer de cet

emprunt ?

1. 1 Exploiter la signature graphique des données d’expérience

La littéralisation des données d’expérience, organisée et présentée dans l’articulation

collective des cours d’action individuels de deux élèves pour chaque dyade, ne semble pas

« intuitive » lorsqu’il s’agit de rendre compte de la dynamique des interactions entre les

élèves : à être trop près des données dans l’analyse locale du cours d’action et des

composantes du signe hexadique (qui exige de la part du chercheur une démarche rigoureuse

et itérative), le chercheur peut passer à côté d’autres aspects de la dynamique des interactions

comme la quantité de changements d’une forme d’interaction à une autre, ou la nature de ces

changements au cours du temps. C’est pourquoi, il semble judicieux si l’on ambitionne

d’approcher la complexité de la dynamique des interactions d’opter pour une approche

différente des données d’expérience à travers des représentations graphiques. Pour cela,

l’utilisation d’un outil d’analyse extérieur au cadre théorique d’origine semble judicieuse.

L’exploitation de la signature graphique des données d’expérience pourrait alors

constituer une « avancée méthodologique » pour le cadre théorique et méthodologique du CA

permettant de réaliser des représentations graphiques de phénomènes complexes pourvu que

l’outil utilisé ne rentre pas en conflit avec les hypothèses princeps du noyau dur du cadre

théorique et méthodologique du CA.

Dans notre étude, les outils choisis ne remettent pas en question le noyau dur du cadre

théorique et méthodologique du CA au moins pour deux raisons.

- 1) La traduction de la signature littérale en signature graphique se fonde sur la même donnée

d’expérience recueillie par le chercheur. Cette traduction, comme le rappelle Theureau (2004,

p. 6) n’est pas forcément une quantification mais peut être aussi une littéralisation, c’est-à-dire

que « l’on use de symboles qu’on peut et doit prendre à la lettre, sans avoir égard à ce

qu’éventuellement ils désignent » (Theureau, 2004, p.6). Autrement dit, le fait de coder une

forme d’interaction pour l’outil utilisé en label « A », « B » ou « C » est envisageable. Le fait

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d’exploiter les données d’expérience en tant que signature graphique à partir de la signature

littérale permet d’avoir accès à « une description symbolique graphique acceptable » - pour

reprendre les propos de Theureau - de la dynamique des interactions des acteurs car la

traduction réalisée est fondée sur le primat de l’intrinsèque (Theureau, 2006). Dès lors, les

règles de traduction de la signature littérale vers la signature graphique de la donnée

d’expérience ne rentrent pas en conflit avec les notions théoriques du cadre du CA.

- 2) L’utilisation de l’outil d’analyse fait intervenir une fenêtre mobile (fenêtre de calcul qui a

une durée de trois minutes et qui se déplace de minute en minute jusqu’à la fin de la course)

pour permettre la représentation graphique de la dynamique des formes d’interaction. Celle-ci

saisit sur toute la durée de la course la part de l’interaction précédente et la part de

l’interaction potentiellement émergente dans l’activité des dyades. Cela est en correspondance

avec un des présupposés du cadre théorique et méthodologique du CA : en s’intéressant à

l’activité des élèves, le cours d’action de ces derniers traduit l’expérience vécue par les élèves

sur une plage temporelle au cours de cette leçon. Le cours d’action traduit aussi les

expériences passées dans cette leçon et celles qui les tirent vers leurs futures activités (i.e.

chevauchement dans le calcul des fenêtres mobiles) - ces expériences passées et futures

participant à structurer leurs activités à un instant donné.

La démarche d’emprunt d’outil méthodologique réalisée reste donc garante de

l’épistémologie fondatrice du CA parce qu’elle rend compte de l’adhésion aux présupposés

théoriques constituant son noyau dur et donc potentiellement le protège de contestations

scientifiques.

1. 2 Une démarche « ré-itérative » entre approche qualitative et approche

quantitative

La signature graphique, même si elle met en évidence sous forme graphique des

indicateurs de la dynamique des formes d’interaction des dyades étudiées, ne nous renseignent

pas sur les significations de la situation telles qu’elles sont vécues par les deux acteurs. Si l’on

souhaite étudier la dynamique de ces formes d’interaction dans la perspective de comprendre

ce qui s’y joue du « dedans », effectuer un rapprochement de l’approche qualitative (i.e.

signature littérale) et de l’approche quantitative (i.e. signature graphique) sous forme d’allers-

retours semble alors indiqué.

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L’exploitation de la signature graphique contenue dans les données d’expérience voit donc

son intérêt augmenter en favorisant une démarche « ré-itérative » du chercheur vers la

signature littérale. Ce point conforte la nécessité de recourir aux représentations graphiques

pour avoir accès à une activité d’acteurs qui pourrait rester cachée au chercheur s’il reste sur

une première analyse littérale. A titre d’exemple, dans notre étude, les pics de co-construction

visibles sur les Figures 39 et 40 sont associés à une activité d’élèves qui approchent la zone de

balises-leurres : ils s’accordent alors à chercher à vue les balises, à vérifier leurs numéros

jusqu’à valider la bonne.

Par conséquent, exploiter dans une démarche de traitement des données les possibilités « ré-

itératives » de la signature littérale (i.e. tableaux des articulations collectives des cours

d’action individuels de chaque dyade) et de la signature graphique (i.e. représentations

graphiques) semble s’avérer une voie prometteuse pour accéder à la dynamique des formes

d’interaction entre plusieurs acteurs avec comme objectif d’être le plus précis possible.

1. 3 Limites de la démarche

La limite principale à cette démarche réside dans le fait que les représentations

graphiques donnent une certaine vision de la réalité faussée. Ceci est d’autant plus vrai que le

choix de l’ordonnée est hiérarchisé. Par exemple, dans notre étude, le premier niveau

correspond à la co-construction, le deuxième à la confrontation et le troisième à la délégation

dans l’étape de quantification. Or, si l’ordre avait été différent, les représentations graphiques

l’auraient été également, ne suggérant pas la même démarche en « aller-retour » entre

l’analyse quantitative et qualitative. Le graphique dépend également des valeurs des échelles

de la fenêtre mobile. Précisément, nous ne nous sommes pas intéressés à une valeur absolue

parce qu’elle est dépendante de ces échelles choisies : si la valeur avait été de cinq minutes, il

aurait été possible que le chercheur évince d’un point de vue graphique des changements.

Autrement dit, si on avait pris une durée de cinq minutes et un pas de deux minutes trente, les

descriptions graphiques auraient été différentes.

La deuxième limite correspond au fait que des représentations graphiques n’ont de

sens que sur une certaine temporalité. Il est en effet difficile de reproduire cette démarche

dans le cadre d’une articulation collective de cours d’action individuels relativement longs

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(les représentations graphiques ne traduiraient pas tous les changements d’interaction par

exemple) ou sur l’articulation collective de cours de vie.

2. Croisement méthodologique ou inspiration issue des approches

dynamiques

2.1 Complexité du système

Le cadre théorique et méthodologique du CA s'inscrit clairement dans une ontologie

complexe. Ses références à une conception énactive de l’activité humaine (Varela, 1989)

illustrent en partie cette ontologie complexe.

Un système complexe, pour Von Bertalanffy (1982), est « un ensemble d’unités en

interrelations mutuelles » pour peu qu’elles existent (s’il n’y a pas d’interrelation, il n’y a pas

de système) et pour peu qu’elles soient non linéaires : « ce sont des qualités qu’on retrouve au

niveau du tout et qu’on ne retrouve pas au niveau des parties » impliquant nécessairement

donc de concevoir que « le tout est plus que la somme des parties » (Morin, cité par Fortin,

2005). Dans ce sens, ce n’est pas un nombre d’éléments qui renvoie à la complexité mais les

relations qu’ils entretiennent entre eux qui est le plus important. Autrement dit, les

interactions entre des éléments du système doivent être considérées comme un ensemble

systémique dont ses unités (acteurs) sont en interrelations mutuelles. L’idée de l’auto-

organisation s’articule autour de la conception suivante : « La stratégie […] est de construire

un système cognitif à partir, non pas de symboles et de règles, mais de constituants simples

qui peuvent dynamiquement être reliés les uns aux autres de manière très dense. […] chaque

constituant fonctionne seulement dans son environnement local de sorte que le système […]

peut être actionné grâce à la nature configurationnelle du système, une coopération globale

émerge spontanément lorsque l’état de chaque neurone en cause atteignent un stade

satisfaisant. Un tel système ne requiert donc pas d’unité centrale de traitement pour contrôler

son fonctionnement » (Varela, 1989). En d’autres mots, l’idée est de penser le système

comme composé de constituants (les différents partenaires d’une équipe) qui peuvent être

dynamiquement reliés les uns aux autres (les interactions potentielles entre chaque acteur).

Chaque constituant fonctionne de manière locale (activité individuelle) mais grâce à la nature

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de la configuration du système (interactions), émerge un nouvel état du système global (les

actions individuelles liées les unes aux autres) par rapport par exemple à une tâche (une

équipe qui s’adapte à un jeu adverse). L’auto-organisation est donc à la fois processus et

produit (i.e. état). Le but est de parvenir à une compréhension des processus constitutifs d’une

interaction en tant qu’état d’un système complexe : les interactions entre des activités

individuelles aboutissent à une configuration d’activité collective évoluant dans le temps

caractérisable par des structures d’interactions répétées (ou patterns), et autonomes (niveau

local de l’activité individuelle) dans le même temps où l’état de la configuration collective se

reconstitue avec les activités individuelles et leurs interactions. Les interactions peuvent être

alors considérées à la fois comme processus (e.g., les activités interindividuelles connectées)

et comme état (e.g., ce qui émerge de ces activités interindividuelles connectées et sans que

les acteurs du système en aient forcément conscience) marquant un aspect complexe et

récursif.

Dès lors, si l’on considère l’interaction entre deux acteurs comme ancrée dans une vision

complexe, il faut considérer l’analyse de ces interactions dans un principe récursif (qui permet

de reconnaître les processus où les produits et les effets sont nécessaires à leur production et à

leur causalité) et dans un principe dialogique (qui permet de reconnaitre les phénomènes où il

faut lier des termes antagonistes, voire contradictoires, pour appréhender leur réalité) : « une

analyse qui n’occulte pas les liaisons, articulations, imbrications et interdépendances des deux

acteurs… » (Fortin, 2005) et non plus les stimulateurs de ces liaisons, de ces articulations, de

ces imbrications et de ces interdépendances.

2.2 Dynamique du système

Au delà de la complexité de structure se pose celle de l'évolution des produits de cette

complexité dans le temps, en fonction d'éléments qui eux-mêmes viennent interagir avec le

système. Particulièrement, un pan de la recherche sur les systèmes complexes s'est intéressé à

ces questions : l'analyse dynamique des systèmes et notamment la synergétique (Haken,

1983). A ce titre, cet auteur développe cinq signatures caractéristiques d’un système

dynamique, à savoir : 1) la multistabilité (i.e. existence de plusieurs états stables) ; 2) la

transition (i.e. passage brusque, non linéaire, d'un état à un autre sous l'effet d'un « paramètre

de contrôle ») ; 3) la fluctuations critique (i.e. perte de stabilité à l'approche des zones de

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transition) ; 4) l’hystérèse (i.e. la transition dépend de l'histoire du système) et 5) la relaxation

(i.e. le temps pour revenir à un état stable après déstabilisation du système). Si Haken étudie

la dynamique de phénomènes complexes dans les domaines de la physique, d’autres l’ont

investi dans le domaine de la motricité humaine : dans ce champ, des travaux princeps portant

sur la coordination bi-manuelle (e.g., Haken, Kelso, & Bunz, 1985) et de la posture (e.g.,

Bardy, 2002) ont effectivement montré la présence des cinq signatures du système dynamique

précédemment évoquées. Dès lors, il est possible d'envisager d'étudier le système perceptivo-

moteur en tant qu'un système dynamique dont le comportement et son adaptation émerge de

l'interaction de contraintes (Newell, 1986). Sur cette base d’influence et de porosité, la

tentation de faire le lien direct entre d'une part, ces approches fécondes et, d'autre part, nos

résultats et ceux qui s'inscrivent dans le même courant, est grande.

Notre étude, dans la même veine que d’autres recherches (e.g., Bourbousson et al., 2008 ;

Evin, 2013 ; Vors & Gal-Petitfaux, 2011) ancrée dans une perspective située, montre que

l’état d’un système (i.e. les deux élèves en interaction) se transforme dans le temps : il y a

plusieurs états identifiables de ce système (forme d’interaction de co-construction, de

confrontation, de délégation). Vors et Gal-Petitfaux montrent que c’est par l’activité de

déplacement de l’enseignant d’EPS vis-à-vis de ses élèves que ces derniers vont construire

une configuration d’activité (activité stable de masquage de certaines de leurs activités

collectives lorsque l’enseignant est loin d’eux), la déconstruire et la reconstruire différemment

(activité ostentatoire de certaines de leurs activités collectives lorsque l’enseignant est près

d’eux). Il est tentant de faire le lien entre cette identification de plusieurs états et le critère de

multi-stabilité mentionné dans les approches des systèmes dynamiques (Hacken, 1983) qui

confère en partie le caractère dynamique au système.

Notre étude montre également que les élèves passent d’une forme à une autre. De la même

manière, Bourbousson et al. (2008) expliquent que l’état du système étudié (une équipe de

basket-ball) alterne entre des coordinations préférentielles (systématiquement connectés

ensemble) et des coordinations ponctuelles entre deux joueurs. Ce critère d’alternance des

états peut faire écho à celui de la transition mentionnée dans les approches des systèmes

dynamiques (Hacken, 1983) conférant également le caractère de dynamique au système.

Nos résultats montrent aussi que l’état d’un système est ancré par son activité précédente (i.e.

les élèves se souvenaient par exemple d’un élément particulier de leçons précédentes qui

organisaient l’activité en cours). Evin (2013) montre d’ailleurs que les histoires collectives

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d’élèves au cours d’un cycle peuvent apparaître en début de cycle, disparaître puis

réapparaître en fin de cycle en EPS selon un élément de travail particulier. Ce critère relatif à

une expérience vécue n’est pas sans rappeler celui de l’hystérèse mentionné dans les

approches des systèmes dynamiques (Hacken, 1983) conférant aussi le caractère de

dynamique au système.

Notre étude montre enfin que l’évolution des formes d’interaction des élèves est indissociable

des modes d’utilisation de la carte d’orientation (e.g., le passage d’un mode partagé à un

mode détaché favorise dans 62,6% des cas un changement de la forme d’interaction de co-

construction à une forme de confrontation). Autrement dit, le passage d’un mode d’utilisation

de la carte à un autre peut annoncer une évolution dans les formes d’interaction. Dans cette

même perspective, Evin (2013) montre que les histoires collectives sont traversées par des

« bruits » qui peuvent aboutir à la fin de l’histoire et à l’émergence d’une autre. Il est tentant

encore de faire le lien avec le critère de fluctuations critiques mentionné dans les approches

des systèmes dynamiques définissant ce caractère dynamique (Hacken, 1983).

Toutefois, si évoquer ces rapprochements entre l'analyse dynamique et les résultats de

notre étude est tentant, il n’en reste pas moins que cela n’est pas aussi simple. Il faudrait par

exemple vérifier, systématiquement, l'existence des états stables pour pouvoir prédire leur

émergence. Autrement dit, il faudrait passer d’un éventuel lien identifiable du processus à la

mesure de son existence. Si l’on considère que cela peut être fait, il aurait fallu mettre en

œuvre des outils méthodologiques propres à l'analyse dynamique, ce qui n'a pas été fait dans

notre travail de thèse. De fait, l'application de ces outils dans l'étude des comportements

sensori-moteurs telle qu'elle a pu être mise en œuvre par Haken, Kelso et Bunz (1985) ou

Bardy (2002) ne semble pas être applicable directement à nos données d’expérience.

Effectivement, pour chacune des signatures répertoriées par Hacken (1983), il est nécessaire

de faire varier et d’incrémenter des paramètres, déterminés à l'avance (i.e. les paramètres

d'ordre), ce qui ne semble pas envisageable dans le cadre d'une leçon de course d'orientation

(quand bien même l’enseignant d’EPS fait varier la présence ou non d’une chambre d’appel,

la distribution de la carte ou la présence de balises-leurres). L'autre limite tient à la nature

même des données puisqu'il ne s'agit pas de mesurer des valeurs physiques (comme les

travaux de Hacken) ou des comportements en troisième personne (comme les travaux de

Haken et al.) mais bien de partir de données expérientielles accordant le primat de

l’intrinsèque. De plus, s’il est envisageable à ce jour de placer sur un même continuum

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différents niveaux de processus répondant aux mêmes lois, comme par exemple du neurone

au comportement (Kelso, Fuchs, Lancaster, Holroyd, Cheyne & Weinberg, 1998), la

possibilité de le faire entre comportement mesurable et expérience vécue n'a pas à notre

connaissance été faite. C'est sans doute pourquoi il paraît plus raisonnable dans notre travail

de thèse de parler d'inspirations issues de l'analyse dynamique plutôt que de réel croisement

des méthodologies.

Avoir été confronté à ces approches (approche qualitative et approche quantitative) a

suscité des questionnements et a ambitionné le choix d'outils hétérodoxes (qui

paradoxalement ne sont pas nécessairement à proprement parler ceux de l'analyse

dynamique) : dire que ce travail est une articulation des deux ne serait pas dire la réalité de ce

qu'il est ; en revanche, il nous semble que cette confrontation ouvre des pistes de réflexions

théoriques et méthodologiques qui restent à explorer, ou tout au moins à envisager pour le

cadre théorique et méthodologique du CA.

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Conclusion générale

Cette étude s’est intéressée dans un premier temps à caractériser les formes

d’interaction entre les élèves engagés dans différents dispositifs d’apprentissage en course

d’orientation. Dans un deuxième temps, elle ambitionnait de caractériser la dynamique de ces

formes d’interaction. Pour cela, des options méthodologiques ont été prises. Au-delà des

apports épistémiques et transformatifs mis en avant dans ce travail sur les liens entre les

dynamiques des formes d’interaction d’élèves et la conception de dispositifs d’apprentissage

particuliers, l’utilisation d’un outil appréhendant les phénomènes complexes, et son

ajustement dans le cadre théorique et méthodologique sur lequel notre travail s’est développé,

ont permis de montrer qu’il était possible de caractériser la dynamique de ces formes

d’interaction telles qu’elles étaient vécues par des acteurs, c’est-à-dire de leurs propres points

de vue. Les représentations graphiques relatives à cet emprunt méthodologique ont favorisé

une démarche qui exploitait la signature littérale des données d’expérience recueillies (i.e.

étape qualitative) ainsi que la signature graphique (i.e. étape quantitative) : la démarche « ré-

itérative » entre l’articulation collective des cours d’action de chaque dyade et leurs

représentations graphiques a permis de montrer que les différents dispositifs d’apprentissage

influençaient la dynamique des formes d’interaction entre les élèves. A ce titre, les variables

chambre, 2 cartes et balises-leurres ainsi que les propriétés physiques et fonctionnelles de

l’objet carte d’orientation sont autant d’éléments participant à cette dynamique.

Notre travail cherchant à caractériser la dynamique des interactions, nous avons été

conduits à une réflexion méthodologique. L’emprunt d’outils méthodologiques hétérodoxes

peut encourager de nouvelles interprétations des données. Toutefois, le risque possible est

d’assujettir ces interprétations à celles déjà mises en avant par l’outil emprunté. A titre

d’exemple, une des dérives aurait consisté dans notre étude à vouloir reconnaître dans la

dynamique expérientielle les signatures identifiées dans le cadre des travaux relatifs aux

dynamiques des coordinations motrices.

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Table des illustrations

Tableaux

Tableau 1 : Récapitulatif des dispositifs d’apprentissage des leçons de course d’orientation 90

Tableau 2 : Récapitulatif des durées des données d’enregistrements in situ ........................... 99

Tableau 3 : Synthèse des durées des données issues des entretiens d’autoconfrontation ..... 102

Tableau 4 : Extrait du Cours d’Action d’Antoine (Dyade 3) ................................................. 109

Tableau 5 : Illustration d’une synchronisation temporelle à partir d’un extrait d’une articulation collective des cours d’action individuels de la Dyade 3 (Cédric/Antoine) .................................................................................................................................... 113

Tableau 6 : Extrait de l’articulation collective des cours d’action de Marie et Mélanie (Dyade 1) illustrant une analyse simultanée des relations entre les contenus des UE et des E de chaque élève ........................................................................................................... 116

Tableau 7 : Extrait de l’articulation collective des cours d’action de Marie et Mélanie (Dyade 1) illustrant une analyse différé des relations entre les contenus des UE et des E de chaque élève ............................................................................................................... 117

Tableau 8 : Extrait de l’articulation collective de Sophie et de Camille (Dyade 2) traduisant une relation de convergence simultanée de leurs composantes UE et E ................... 120

Tableau 9 : Extrait de l’articulation collective de Lucie et de Lola (Dyade 4) traduisant une relation de convergence simultanée de leurs composantes UE et E .......................... 121

Tableau 10 : Extrait de l’articulation collective des cours d’action d’Adrien et de John (Dyade 5) traduisant une relation de convergence simultanée de leurs composantes UE et E ....................................................................................................................... 122

Tableau 11 : Extrait de l’articulation collective des cours d’action de Régis et de David (Dyade 6) traduisant une relation de convergence simultanée de leurs composantes UE et E ....................................................................................................................... 123

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Tableau 12 : Extrait de l’articulation collective de Sophie et de Camille (Dyade 2) traduisant une relation de convergence différée de leurs composantes UE et E ........................ 125

Tableau 13 : Extrait de l’articulation collective de Cédric et d’Antoine (Dyade 3) traduisant une relation de convergence différée de leurs composantes UE et E ........................ 127

Tableau 14 : Extrait de l’articulation collective d’Adrien et de John (Dyade 5) traduisant une relation de convergence différée de leurs composantes UE et E ............................... 128

Tableau 15 : Extrait de l’articulation collective de Régis et David (Dyade 6) traduisant une relation de convergence différée de leurs composantes UE et E ............................... 129

Tableau 16: Extrait de l’articulation collective de Marie et de Mélanie (Dyade 1) traduisant une relation de divergence différée des composantes UE et E .................................. 131

Tableau 17 : Extrait de l’articulation collective de Lola et de Lucie (Dyade 4) traduisant une relation de divergence différée des composantes UE et E ......................................... 132

Tableau 18 : Extrait de l’articulation collective des cours d’action de Sophie et de Camille (Dyade 2) traduisant une relation de divergence différée des composantes UE et E 134

Tableau 19 : Extrait de l’articulation collective de Sophie et de Camille (Dyade 2) traduisant une relation de divergence différée des composantes UE et E .................................. 135

Tableau 20 : Extrait de l’articulation collective de Cédric et d’Antoine (Dyade 3) traduisant une relation de convergence différée des UE et de divergence différée des E ........... 137

Tableau 21: Extrait de l’articulation collective de Lola et de Lucie (Dyade 4) traduisant une relation de convergence différée des UE et de divergence différée des E ................. 138

Tableau 22 : Extrait de l’articulation collective de Marie et de Mélanie (Dyade 1) traduisant une relation de convergence différée des UE et de divergence différée des E ........... 139

Tableau 23 : Extrait de l’articulation collective de Sophie et de Camille (Dyade 2) traduisant une relation de convergence différée des UE et de divergence différée des E ........... 140

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Tableau 24 : Extrait de l’articulation collective de Sophie et de Camille (Dyade 2) traduisant une relation de divergence différée des UE et de convergence différée des E ........... 142

Tableau 25 : Extrait de l’articulation collective de Cédric et d’Antoine (Dyade 3) traduisant une relation de convergence différée des UE et de divergence différée des E ........... 143

Tableau 26 : Extrait de l’articulation collective d’Adrien et de John (Dyade 5) traduisant une relation de convergence différée des UE et de divergence différée des E ................. 144

Tableau 27 : Extrait de l’articulation collective de Régis et de David (Dyade 6) traduisant une relation de convergence différée des UE et de divergence différée des E ........... 146

Tableau 28 : Extrait de l’articulation collective de Marie et de Mélanie (Dyade 1) traduisant une relation de digression des UE et des E ................................................................ 147

Tableau 29 : Extrait de l’articulation collective de Sophie et de Camille (Dyade 2) traduisant une relation de digression des UE et des E ................................................................ 148

Tableau 30 : Extrait de l’articulation collective de Cédric et d’Antoine (Dyade 3) traduisant une relation de digression des UE et des E ................................................................ 149

Tableau 31 : Extrait de l’articulation collective de Lola et de Lucie (Dyade 4) traduisant une relation de digression des UE et des E ....................................................................... 150

Tableau 32: Extrait de l’articulation collective de Sophie et de Camille (Dyade 2) traduisant une relation de digression des UE et des E ................................................................ 151

Tableau 33: Extrait de l’articulation collective d’Adrien et de John (Dyade 5) traduisant une relation de digression des UE et des E ....................................................................... 152

Tableau 34 : Extrait de l’articulation collective de Sophie et de Camille (Dyade 2) traduisant une relation de digression des UE et des E ................................................................ 153

Tableau 35: Extrait de l’articulation collective de Régis et de David (Dyade 6) traduisant une relation de digression des UE et des E ....................................................................... 154

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Tableau 36 : Extrait illustrant la labellisation des formes d’interaction typiques dans la dyade 4 (Lola et Lucie) ......................................................................................................... 164

Tableau 37 : Nombre d’occurrences et pourcentages des formes d’interaction dans le dispositif sans chambre .............................................................................................. 170

Tableau 38 : Nombre d’occurrences et pourcentages des formes d’interaction dans le dispositif chambre ...................................................................................................... 171

Tableau 39 : Nombre d’occurrences et pourcentages des formes d’interaction dans le dispositif 2 cartes ........................................................................................................ 172

Tableau 40 : Nombre d’occurrences et pourcentages des formes d’interaction dans le dispositif leurre ........................................................................................................... 173

Tableau 41 : Pourcentages de la présence des formes d’interaction en fonction des dispositifs d’apprentissage .......................................................................................................... 174

Tableau 42: Occurrences et pourcentages des stabilités/changements opérés dans la dynamique des formes d’interaction de la dyade 1 (Marie/Mélanie) dans le dispositif sans chambre .............................................................................................................. 180

Tableau 43 : Occurrences et pourcentages des stabilités/changements opérés dans la dynamique des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille) dans le dispositif sans chambre .............................................................................................................. 182

Tableau 44 : Occurrences et pourcentages des stabilités/changements opérés dans la dynamique des formes d’interaction de la dyade 3 (Cédric/Antoine) dans le dispositif chambre ...................................................................................................................... 188

Tableau 45 : Occurrences des stabilités/changements opérés dans la dynamique des formes d’interaction de la dyade 4 (Lola/Lucie) dans le dispositif chambre ......................... 190

Tableau 46 : Occurrences et pourcentages des stabilités/changements opérés dans la dynamique des formes d’interaction de la dyade 1 (Marie/Mélanie) dans le dispositif 2 cartes .......................................................................................................................... 198

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Tableau 47 : Occurrences et présence des stabilités/changements opérés dans la dynamique des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille) dans le dispositif 2 cartes 200

Tableau 48 : Occurrences et pourcentages des stabilités/changements opérés dans la dynamique des formes d’interaction de la dyade 5 (Adrien/John) dans le dispositif 2 cartes .......................................................................................................................... 202

Tableau 49 : Occurrences et pourcentages des stabilités/changements opérés dans la dynamique des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille) dans le dispositif leurre .......................................................................................................................... 208

Tableau 50 : Occurrences et pourcentages des stabilités/changements opérés dans la dynamique des formes d’interaction de la dyade 6 (Régis/David) dans le dispositif leurre .......................................................................................................................... 210

Tableau 51 : Présence des maintiens/passages d’un mode d’utilisation de la carte à un autre dans la stabilité de la co-construction ........................................................................ 212

Tableau 52 : Occurrences et pourcentages des maintiens/passages d’un mode d’utilisation de la carte à un autre dans le changement de formes co-construction/confrontation .... 214

Tableau 53 : Occurrences et pourcentages des maintiens/passages d’un mode d’utilisation de la carte à un autre dans le changement de formes de co-construction/délégation .... 216

Tableau 54 : Occurrences et pourcentages des maintiens/passages d’un mode d’utilisation de la carte à un autre dans le changement de formes confrontation/co-construction .... 218

Tableau 55 : Occurrences et pourcentages des maintiens/passages d’un mode d’utilisation de la carte à un autre dans la stabilité de l’interaction de confrontation ...................... 219

Tableau 56: Présence des maintiens/passages d’un mode d’utilisation de la carte à un autre dans le changement des formes confrontation/délégation ......................................... 220

Tableau 57 : Occurrences et pourcentages des maintiens/passages d’un mode d’utilisation de la carte à un autre dans le changement des formes délégation/co-construction ....... 222

Tableau 58 : Occurrences et pourcentages des maintiens/passages d’un mode d’utilisation de la carte à un autre dans le changement des formes délégation/confrontation ........... 223

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Tableau 59 : Occurrences et pourcentages des maintiens/passages d’un mode d’utilisation de la carte à un autre dans la stabilité de l’interaction délégation. ............................... 224

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Figures

Figure 1 : « Modélisation graphique de l’activité de navigation sur un interpose dans la tâche

de CO classique et de ‘poseurs-contrôleurs’ » (Mottet & Saury, 2014) ...................... 45

Figure 2 : Modélisation de l’évolution des préoccupations-typiques au fil des tours chez Benjamin (axe des abscisses : le nombre de tour / axe des ordonnées : les préoccupations-types) (Adé et al., 2010) ...................................................................... 46

Figure 3 : « Graphe représentant le faisceau de préoccupations de Sim lors de la leçon 5 dans une tâche compétitive » (axe des abscisses : le temps en minutes / axe des ordonnées : les préoccupations-archétypes) (Saury & Rossard, 2009) ....................... 47

Figure 4 : « Graphe représentant l’ordonnancement temporel des histoires collectives au cours du cycle d’arts du cirque » (axe des abscisses : le numéro de leçon dans le cycle / axe des ordonnées : les histoires collectives) (Evin, 2013) ........................................ 49

Figure 5 : « Synthèse des patterns identifiés au cours des trois cycles d’enseignement » (axe des abscisses : chaque colonne délimitée par des pointillés correspond à une leçon dans les cycles / axe des ordonnées : les histoires collectives) (Evin, 2013) ............... 50

Figure 6 : a) Evolution de la densité de l’équipe en fonction du temps. b) Evolution de la transitivité de l’équipe en fonction du temps. c) Evolution de la réciprocité de l’équipe en fonction du temps (axe des abscisses : le temps en secondes / axe des ordonnées : 1 est la valeur maximale et 0 la valeur minimale de l’indicateur) (R’Kiouak, 2013) ..... 52

Figure 7: a) Evolution de la corrélation fenêtrée entre réciprocité et densité pour une fenêtre de 10 données. b) Evolution de la corrélation fenêtrée entre réciprocité et densité pour une fenêtre de 20 données. c) Evolution de la corrélation fenêtrée entre transitivité et densité pour une fenêtre de 10 données. d) Evolution de la corrélation fenêtrée entre transitivité et densité pour une fenêtre de 20 données. e) Evolution de la corrélation fenêtrée entre transitivité et réciprocité pour une fenêtre de 10 données. f) Evolution de la corrélation fenêtrée entre transitivité et réciprocité pour une fenêtre de 20 données (les pointillés au dessus de la valeur 0 : seuil de significativité positive/les pointillés en dessous de la valeur 0 : seuil de significativité négative/axe des abscisses : le temps en secondes / axe des ordonnées : les valeurs maximales des indicateurs) (R’Kiouak, 2013) ...................................................................................... 53

Figure 8 : Exemple de carte utilisée par la dyade 1 (Marie/Mélanie)..................................... 89

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Figure 9 : Exemple de carte distribuée pour la Dyade 2 (Camille/Sophie) dans le dispositif sans chambre ................................................................................................................ 91

Figure 10 : Exemple de carte distribuée pour la Dyade 3 (Cédric/Antoine) dans le dispositif chambre ........................................................................................................................ 92

Figure 11 : Exemple de cartes distribuées pour la dyade 5 (Adrien/John) dans le dispositif 2 cartes ............................................................................................................................ 94

Figure 12 : Exemple de carte distribuée pour la Dyade 6 (Régis/David) dans le dispositif leurre ............................................................................................................................ 95

Figure 13 : Illustration des données d’enregistrements audio-visuels avec une paire de lunettes-caméra ............................................................................................................ 97

Figure 14 : Illustration des données d’enregistrements audio-visuels avec une caméra type « paluche » ................................................................................................................... 98

Figure 15 : Illustration du dispositif lors des entretiens d’autoconfrontation ...................... 100

Figure 16 : Illustration de l’utilisation d’une fenêtre mobile ................................................ 165

Figure 17 : Ratio de changements des formes d’interaction de la dyade 1 (Marie/Mélanie) dans le dispositif sans chambre .................................................................................. 175

Figure 18 : Ratio de changements des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille) dans le dispositif sans chambre .................................................................................. 176

Figure 19: Répartition des formes d’interaction de la dyade 1 (Marie/Mélanie) dans le dispositif sans chambre .............................................................................................. 177

Figure 20 : Répartition des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille) dans le dispositif sans chambre .............................................................................................. 178

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Figure 21 : Récurrence de successions des formes d’interaction de la dyade 1 (Marie/Mélanie) dans le dispositif sans chambre (en z : le nombre d’occurrences / en abscisses : la forme d’interaction, en ordonnées : la forme d’interaction à t + 1 en fonction du temps - plus la couleur est chaude - rouge - plus la fin de la course approche) .................................................................................................................... 179

Figure 22 : Récurrence de successions des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille) dans le dispositif sans chambre ...................................................... 181

Figure 23 : Ratio de changements des formes d’interaction de la dyade 3 (Cédric/Antoine) dans le dispositif chambre .......................................................................................... 183

Figure 24: Ratio de changements des formes d’interaction de la dyade 4 (Lola/Lucie) dans le dispositif chambre ...................................................................................................... 184

Figure 25 : Répartition des formes d’interaction de la dyade 3 (Cédric/Antoine) dans le dispositif chambre ...................................................................................................... 185

Figure 26 : Répartition des formes d’interaction de la dyade 4 (Lola/Lucie) dans le dispositif chambre ...................................................................................................................... 186

Figure 27 : Récurrence de successions des formes d’interaction de la dyade 3 (Cédric/Antoine) dans le dispositif chambre .............................................................. 187

Figure 28 : Récurrence de successions des formes d’interaction de la dyade 4 (Lola/Lucie) dans le dispositif chambre .......................................................................................... 189

Figure 29 : Ratio de changements des formes d’interaction de la dyade 1 (Marie/Mélanie) dans le dispositif 2 cartes ........................................................................................... 191

Figure 30 : Ratio de changements des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille) dans le dispositif chambre .......................................................................................... 192

Figure 31 : Ratio de changements des formes d’interaction de la dyade 5 (Adrien/John) dans le dispositif chambre ................................................................................................... 193

Figure 32 : Répartition des formes d’interaction de la dyade 1 (Marie/Mélanie) dans le dispositif 2 cartes ........................................................................................................ 194

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Figure 33 : Répartition des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille) dans le dispositif 2 cartes ........................................................................................................ 195

Figure 34 : Répartition des formes d’interaction de la dyade 5 (Adrien/John) dans le dispositif 2 cartes ........................................................................................................ 196

Figure 35 : Récurrence de successions des formes d’interaction de la dyade 1 (Marie/Mélanie) dans le dispositif 2 cartes ................................................................ 197

Figure 36 : Récurrence de successions des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille) dans le dispositif 2 cartes ............................................................... 199

Figure 37: Récurrence de successions des formes d’interaction de la dyade 5 (Adrien/John) dans le dispositif 2 cartes ........................................................................................... 201

Figure 38 : Ratio de changements des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille) dans le dispositif leurre .............................................................................................. 203

Figure 39 : Ratio de changements des formes d’interaction de la dyade 6 (Régis/David) dans le dispositif leurre ....................................................................................................... 204

Figure 40 : Répartition des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille) dans le dispositif leurre ........................................................................................................... 205

Figure 41: Répartition des formes d’interaction de la dyade 6 (Régis/John) dans le dispositif leurre .......................................................................................................................... 206

Figure 42 : Récurrence de successions des formes d’interaction de la dyade 2 (Sophie/Camille) dans le dispositif leurre .................................................................. 207

Figure 43 : Récurrence de successions de la dynamique des formes d’interaction de la dyade 6 (Régis/David) dans le dispositif leurre .................................................................... 209

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Annexe

Extrait de l’articulation collective des cours d’action individuels de la dyade 3 (Cédric/Antoine) - dispositif chambre - de la chambre d’appel à la validation de la première balise.

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pel

1’’

Reg

arde

la

carte

L’en

droi

t po

inté

sur l

a ca

rte p

ar

Ant

oine

Suiv

re

l’end

roit

poin

té su

r la

carte

par

A

ntoi

ne

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

1

Pren

d la

ca

rte, l

a to

urne

et

poin

te

dess

us u

n en

droi

t

La c

arte

te

ndue

par

l’e

nsei

gnan

te

/ La

carte

m

al o

rient

ée

Info

rmer

A

ntoi

ne d

e le

ur p

ositi

on

sur l

a ca

rte

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

3’’

Reg

arde

la

carte

Le tr

acé

prop

osé

par

Ant

oine

Suiv

re d

es

yeux

l’i

tinér

aire

d’

Ant

oine

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

2

Trac

e du

do

igt s

ur la

ca

rte u

n iti

néra

ire

Le s

ymbo

le

de la

mai

son

du g

ardi

en

sur l

a ca

rte

Prop

oser

à

Céd

ric u

n iti

néra

ire d

e co

urse

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

6’’

Poin

te su

r la

carte

un

endr

oit

repr

ésen

tant

un

che

min

à

côté

de

la

mai

son

du

gard

ien

L’iti

néra

ire

prop

osé

par

Ant

oine

Sign

ifier

à

Ant

oine

son

acco

rd

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

3 R

egar

de la

ca

rte

L’en

droi

t po

inté

sur l

a ca

rte p

ar

Céd

ric

Suiv

re

l’end

roit

poin

té su

r la

carte

par

C

édric

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

8’’

Ente

nd le

s pr

opos

d’

Ant

oine

L’ac

cord

d’

Ant

oine

Ec

oute

r A

ntoi

ne

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

4 A

cqui

esce

Le c

hem

in

poin

té su

r la

carte

par

C

édric

Mon

trer s

on

acco

rd à

C

édric

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

Page 286: Thèse - JOURAND Clément...Une étude de l’activité d’élèves dans différents dispositifs d’apprentissage Le 1er avril 2015 Devant le jury composé de : Fabienne d’Arripe-Longueville

286

C

édri

c U

SE

Ant

oine

T

emps

U

R

E

A

N

° U

R

E

A

11’’

Trac

e su

r la

carte

ave

c so

n do

igt u

n iti

néra

ire

Le c

hem

in

men

ant à

la

prem

ière

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ise

sur l

a ca

rte

Prop

oser

à

Ant

oine

un

itiné

raire

po

ur se

re

ndre

à la

pr

emiè

re

balis

e

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

5 R

egar

de la

ca

rte

L’iti

néra

ire

tracé

par

C

édric

Suiv

re

l’itin

érai

re

prop

osé

par

Céd

ric

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

13’’

R

egar

de la

ca

rte

Le tr

acé

prop

osé

par

Ant

oine

Suiv

re

l’itin

érai

re

prop

osé

par

Ant

oine

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

6

Trac

e un

iti

néra

ire

avec

son

doig

t sur

la

carte

Le c

hem

in

men

ant à

la

deux

ièm

e ba

lise

Prop

oser

à

Céd

ric

l’itin

érai

re

pour

se

rend

re à

une

de

uxiè

me

balis

e

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

16’’

A

cqui

esce

L’

itiné

raire

pr

opos

é pa

r A

ntoi

ne

Con

firm

er

les p

ropo

s d’

Ant

oine

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

7 En

tend

les

prop

os d

e C

édric

L’ac

cord

de

Céd

ric

Ecou

ter

Céd

ric

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

18’’

R

egar

de la

ca

rte

Le tr

acé

prop

osé

par

Ant

oine

Suiv

re

l’itin

érai

re

prop

osé

par

Ant

oine

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

8

Ann

once

la

suite

de

l’itin

érai

re

en tr

açan

t su

r la

carte

av

ec so

n do

igt

Le c

hem

in

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ant à

la

trois

ièm

e ba

lise

Prop

oser

à

Céd

ric

l’itin

érai

re

pour

se

rend

re à

la

trois

ièm

e ba

lise

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

Page 287: Thèse - JOURAND Clément...Une étude de l’activité d’élèves dans différents dispositifs d’apprentissage Le 1er avril 2015 Devant le jury composé de : Fabienne d’Arripe-Longueville

287

C

édri

c U

SE

Ant

oine

T

emps

U

R

E

A

N

° U

R

E

A

22’’

R

egar

de la

ca

rte

Le tr

acé

prop

osé

par

Ant

oine

Suiv

re

l’itin

érai

re

prop

osé

par

Ant

oine

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

9

Ann

once

la

fin d

e l’i

tinér

aire

en

traç

ant

avec

son

doig

t sur

la

carte

Le c

hem

in

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ant a

u po

int d

e ra

lliem

ent

Prop

oser

l’i

tinér

aire

po

ur se

re

ndre

au

poin

t de

ralli

emen

t

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

24’’

C

onfir

me

l’itin

érai

re

d’A

ntoi

ne

L’iti

néra

ire

prop

osé

par

Ant

oine

Sign

ifier

à

Ant

oine

son

acco

rd

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

10

Ente

nd

Ant

oine

L’

acco

rd

d’A

ntoi

ne

Ecou

ter

Ant

oine

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

27’’

ve so

n br

as

L’em

plac

emen

t su

ppos

é de

la

prem

ière

bal

ise

Mon

trer à

A

ntoi

ne la

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rect

ion

à pr

endr

e en

so

rtant

de

la

cham

bre

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

12

Reg

arde

la

carte

La d

irect

ion

mon

trée

par

Céd

ric

S’as

sure

r qu

e la

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rect

ion

mon

trée

est

la b

onne

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

30’’

R

egar

de la

di

rect

ion

de

Céd

ric

La d

irect

ion

mon

trée

par

Céd

ric

Suiv

re d

es

yeux

la

dire

ctio

n m

ontré

e

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

13

Acq

uies

ce

en le

vant

la

mai

n ve

rs la

di

rect

ion

mon

trée

par

Céd

ric

La d

irect

ion

à su

ivre

an

nonc

ée p

ar

Céd

ric

Sign

ifier

à

Céd

ric so

n ac

cord

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

Page 288: Thèse - JOURAND Clément...Une étude de l’activité d’élèves dans différents dispositifs d’apprentissage Le 1er avril 2015 Devant le jury composé de : Fabienne d’Arripe-Longueville

288

C

édri

c U

SE

Ant

oine

T

emps

U

R

E

A

N

° U

R

E

A

34’’

R

egar

de la

ca

rte

L’iti

néra

ire

prop

osé

par

Ant

oine

Suiv

re d

es

yeux

l’i

tinér

aire

pr

opos

é pa

r A

ntoi

ne

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

14

Trac

e de

no

uvea

u su

r la

car

te a

vec

son

doig

t to

ut

l’itin

érai

re

depu

is le

but

L’iti

néra

ire

pour

po

inço

nner

le

s tro

is

balis

es /

La

fin d

u te

mps

éc

oulé

en

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bre

d’ap

pel

Rep

rend

re

l’itin

érai

re

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

39’’

R

egar

de la

ca

rte

L’en

droi

t pr

opos

é pa

r A

ntoi

ne

Suiv

re

l’itin

érai

re

prop

osé

par

Ant

oine

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

15

Mon

tre à

C

édric

sur l

a ca

rte la

pr

ésen

ce d

u te

rrai

n de

fo

ot su

r l’i

tinér

aire

Le te

rrai

n de

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otba

ll pr

ès

de la

pr

emiè

re

balis

e

Info

rmer

C

édric

du

repè

re p

rès

de la

pr

emiè

re

balis

e

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

40’’

A

cqui

esce

Le

stad

e de

fo

ot m

ontré

par

A

ntoi

ne

Sign

ifier

à

Ant

oine

son

acco

rd

Con

stru

ire

un

itiné

raire

de

cou

rse

16

Page 289: Thèse - JOURAND Clément...Une étude de l’activité d’élèves dans différents dispositifs d’apprentissage Le 1er avril 2015 Devant le jury composé de : Fabienne d’Arripe-Longueville

289

C

édri

c U

SE

Ant

oine

T

emps

U

R

E

A

N

° U

R

E

A

R

eche

rche

de

la b

alis

e 1

(la A

2)

49’’

Se

met

à

mar

cher

Le si

gnal

de

dépa

rt do

nné

par

l’ens

eign

ant

Suiv

re

l’itin

érai

re

préc

édem

men

t dé

cidé

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

17

Se m

et à

m

arch

er

Le si

gnal

de

dépa

rt do

nné

par

l’ens

eign

ant

Suiv

re

l’itin

érai

re

préc

édem

men

t dé

cidé

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

53’’

Se

met

à

cour

ir le

long

de

la ro

ute

L’iti

néra

ire

déci

dé d

ans

la c

ham

bre

d’ap

pel

Suiv

re

l’itin

érai

re

préc

édem

men

t dé

cidé

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

18

Se m

et à

co

urir

le

long

de

la

rout

e

L’iti

néra

ire

déci

dé d

ans l

a ch

ambr

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appe

l

Suiv

re

l’itin

érai

re

préc

édem

men

t dé

cidé

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

56’’

R

alen

tit sa

co

urse

La

dem

ande

d’

Ant

oine

R

este

r en

sem

ble

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

19

Dem

ande

à

Céd

ric d

e ra

lent

ir

Céd

ric q

ui

cour

t tro

p vi

te

Res

ter

ense

mbl

e

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

1’11

’’

Aff

irme

que

ce n

’est

pas

le

bon

ch

emin

Un

chem

in

qui t

ourn

e su

r la

gau

che

Info

rmer

A

ntoi

ne q

ue

ce n

’est

pas

le

chem

in à

pr

endr

e

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

20

Con

tinue

de

cour

ir

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

1’14

’’

Mar

che

La d

eman

de

de C

édric

R

este

r en

sem

ble

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

21

Con

firm

e qu

e ce

n’e

st

pas l

e bo

n ch

emin

et s

e m

et à

m

arch

er

Le c

hem

in d

e ga

uche

Sign

ifier

à

Céd

ric so

n ac

cord

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

Page 290: Thèse - JOURAND Clément...Une étude de l’activité d’élèves dans différents dispositifs d’apprentissage Le 1er avril 2015 Devant le jury composé de : Fabienne d’Arripe-Longueville

290

C

édri

c U

SE

Ant

oine

T

emps

U

R

E

A

N

° U

R

E

A

1’18

’’

Con

tinue

de

mar

cher

Ant

oine

qui

s’

est m

is à

m

arch

er

Suiv

re

Ant

oine

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

23

Con

tinue

de

mar

cher

et

rega

rde

la

carte

en

dem

anda

nt à

C

édric

de

l’atte

ndre

Le c

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in

mon

tré p

ar

Céd

ric /

La

dist

ance

le

sépa

rant

de

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S’as

sure

r qu

’ils v

ont

dans

la b

onne

di

rect

ion

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

1’21

’’

Se m

et à

m

arch

er

derr

ière

A

ntoi

ne le

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ng d

u ch

emin

La d

eman

de

d’A

ntoi

ne

Suiv

re

Ant

oine

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

24

Se m

et à

m

arch

er le

lo

ng d

u ch

emin

La le

ctur

e de

ca

rte

Trou

ver l

e bo

n ch

emin

à

pren

dre

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

1’23

’’

Tour

ne à

ga

uche

sur l

e ch

emin

La d

irect

ion

anno

ncée

par

A

ntoi

ne

Pren

dre

le

chem

in

anno

ncé

par

Ant

oine

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

26

Tour

ne à

ga

uche

sur

le c

hem

in

Le c

hem

in d

e ga

uche

La

lect

ure

de

carte

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

1’31

’’

Se m

et à

co

urir

La c

ours

e d’

Ant

oine

Su

ivre

l’al

lure

d’

Ant

oine

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

27

Se m

et à

co

urir

Le te

mps

qui

pa

sse

Ne

pas p

erdr

e de

tem

ps

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

1’45

’’

Dem

ande

à

Ant

oine

la

dire

ctio

n à

suiv

re

L’ab

senc

e de

la

bal

ise

Dem

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r à

Ant

oine

son

avis

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

28

Mar

che

La d

oule

ur a

u ge

nou

Evite

r d’a

voir

mal

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

Page 291: Thèse - JOURAND Clément...Une étude de l’activité d’élèves dans différents dispositifs d’apprentissage Le 1er avril 2015 Devant le jury composé de : Fabienne d’Arripe-Longueville

291

C

édri

c U

SE

Ant

oine

T

emps

U

R

E

A

N

° U

R

E

A

1’48

’’

Mar

che

Ant

oine

qui

m

arch

e Su

ivre

A

ntoi

ne

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

29

Ann

once

la

dire

ctio

n à

suiv

re

La q

uest

ion

de

Céd

ric

Rép

ondr

e à

la

ques

tion

de

Céd

ric

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

1’52

’’

Ente

nd le

s pr

opos

d’

Ant

oine

La ré

pons

e d’

Ant

oine

Su

ivre

A

ntoi

ne

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

30

Pens

e qu

e le

te

rrai

n de

fo

ot n

e do

it pa

s être

loin

Le te

rrai

n de

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ot à

pr

oxim

ité d

e la

pr

emiè

re b

alis

e

Info

rmer

C

édric

du

repè

re

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

1’56

’’

Ape

rçoi

t la

balis

e

La v

ue d

e la

pr

emiè

re

balis

e

Info

rmer

A

ntoi

ne d

e l’e

mpl

acem

ent

de la

bal

ise

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

31

1’58

’’

Acc

élèr

e La

vue

de

la

balis

e

Rej

oind

re le

pl

us

rapi

dem

ent l

a ba

lise

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

32

Con

tinue

de

cour

ir La

vue

de

la

balis

e R

ejoi

ndre

la

balis

e

Se re

ndre

à

la

prem

ière

ba

lise

2’00

’’

S’ar

rête

à la

ba

lise

La b

alis

e Pr

endr

e le

po

inço

n V

alid

er la

ba

lise

33

S’ap

proc

he

de la

bal

ise

La b

alis

e R

ejoi

ndre

la

balis

e V

alid

er la

ba

lise

2’02

’’

34

S’ar

rête

à la

ba

lise

La b

alis

e Po

inço

nner

la

carte

V

alid

er la

ba

lise

2’05

’’

Pren

d le

po

inço

n de

la

balis

e

Le p

oinç

on

de la

bal

ise

Poin

çonn

er la

ca

rte

Val

ider

la

balis

e 35

2’07

’’

Tend

le

poin

çon

de la

ba

lise

Le p

oinç

on

de la

bal

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Clément JOURAND

Dynamique des interactions lors de leçons d’Education Physique et Sportive en Course d’Orientation Une étude de l’activité d’élèves dans différents dispositifs d’apprentissage

Résumé

Cette thèse visait à caractériser les formes d’interaction émergentes entre des élèves engagés dans différents dispositifs d’apprentissage en course d’orientation et ambitionnait de caractériser la dynamique de ces formes d’interaction. Cette recherche a été conduite dans le cadre théorique et méthodologique du Cours d’Action (Theureau, 2006). 12 élèves de 6ème, volontaires, ont été répartis en 6 dyades affinitaires. Les enseignants ont proposé aux élèves des parcours d’orientation similaires du point de vue du niveau de difficulté et de la durée. Toutefois, les leçons étudiées étaient contrastées par le dispositif d’apprentissage choisi par les enseignants. Deux catégories de données ont été recueillies : (a) des données d’enregistrements audiovisuels pendant l’activité de recherche des balises par les élèves, et (b) des données de verbalisation lors d’autoconfrontations avec les élèves, rendant compte d’un recueil fondée sur les données d’expérience. Le traitement des données a été réalisé en deux étapes. La première étape qualitative a caractérisé les formes d’interaction émergentes entre les élèves. Sur cette base, la deuxième étape, en faisant appel à des outils hétérodoxes du Cours d’Action a représenté graphiquement la dynamique de ces formes d’interaction pour chaque dyade. Les résultats issus de la première étape ont permis de montrer la présence, quel que soit le dispositif d’apprentissage, de trois formes typiques d’interaction entre les élèves (co-construction, confrontation, délégation) et de trois modes d’utilisation dyadique de la carte (partagé, univoque, détaché). Les résultats issus de la deuxième étape ont permis d’une part de caractériser les dynamiques des formes d’interaction en pointant leurs singularités et similarités selon les dispositifs d’apprentissage, et d’autre part les éléments participant à cette dynamique comme les propriétés physiques et fonctionnelles de la carte d’orientation. Ces résultats sont discutés en trois points : un apport épistémique sur les interactions entre élèves lorsqu’ils s’engagent en course d’orientation ; un apport transformatif pour la conception de dispositifs d’apprentissage en course d’orientation ; et un apport réflexif au sujet du choix de la méthode de traitement des données.

Mots-clés : Interactions, Dynamiques d’interaction, Cours d’action, Course d’orientation, Education Physique et Sportive.

Abstract This thesis aimed to characterize both the modes of coordination that emerge in student dyads and the

dynamics of the dyadic interactions during performance under learning contexts involving orienteering tasks. The Course of Action framework was adopted to underpin theoretical and methodical concerns that arose (Theureau, 2006). Twelve students were recruited across two separate seventh-grade classes were placed into six affinity-based dyads. Orienteering lessons were designed by experienced teachers at similar levels of difficulty and duration but, modified in terms of their contextual features. Two types of data were collected: (a) data from audiovisual recordings made during students search for check points; and, (b) verbalization data during individual interviews after the orienteering lessons were completed. Data processing involved two steps. The first, qualitative step, consisted of characterizing the interaction modes that emerged between the students. The second step consisted of graphically representing the students’ activity dynamics within the dyads, using heterodox instrument for analysis. Results from the first step, showed, across all four learning contexts, three consistent modes of inter-student interaction (co-construction, confrontation, delegation), and three modes of map using (shared, exclusive, detached). Results highlighted the dynamics of the dyadic interactions showed features that were specific to each learning context and that these features were shared by dyads within each context; that, in general, across all learning contexts identified were dynamics that correlated to physical and functional properties specific to orienteering maps. Results are discussed across three major points of interest: the epistemic contribution in conceptualizing the nature of orienteering interactions; applications for professionals involved in the design of learning contexts in orienteering, and; novel perspectives supported by the data processing techniques as applied.

Key words: Interaction, Dynamics of interactions, Course of Action, Orienteering, Physical Education