Théories de la concurrence imparfaite: illustrations ...

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HAL Id: hal-01527449 https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01527449 Submitted on 24 May 2017 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Théories de la concurrence imparfaite : illustrations récentes de thèmes anciens Jean Jaskold Gabszewicz To cite this version: Jean Jaskold Gabszewicz. Théories de la concurrence imparfaite : illustrations récentes de thèmes anciens. [Rapport de recherche] Institut de mathématiques économiques ( IME). 1979, 27 p., figures, bibliographie. hal-01527449

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HAL Id: hal-01527449https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01527449

Submitted on 24 May 2017

HAL is a multi-disciplinary open accessarchive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come fromteaching and research institutions in France orabroad, or from public or private research centers.

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, estdestinée au dépôt et à la diffusion de documentsscientifiques de niveau recherche, publiés ou non,émanant des établissements d’enseignement et derecherche français ou étrangers, des laboratoirespublics ou privés.

Théories de la concurrence imparfaite : illustrationsrécentes de thèmes anciens

Jean Jaskold Gabszewicz

To cite this version:Jean Jaskold Gabszewicz. Théories de la concurrence imparfaite : illustrations récentes de thèmesanciens. [Rapport de recherche] Institut de mathématiques économiques ( IME). 1979, 27 p., figures,bibliographie. �hal-01527449�

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EQUIPE DE RECHERCHE ASSOCIEE AU C.N.R.S.

DOCUMENT DE TRAVAIL

INSTITUT DE MATHEMATIQUES ECONOMIQUES

UNIVERSITE DE DIJON

FACULTE DE SCIENCE ECONOMIQUE ET DE GESTION

4, BOULEVARD GABRIEL - 21000 DIJON

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N° 37

THEORIES DE LA CONCURRENCE IMPARFAITE: ILLUSTRATIONS RECENTES DE THEMES ANCIENS

Jean JASKOLD GABSZEWICZ Juin 1979

Cette étude a fait l'objet d'une communication au Xème Colloque annuel de l'I.M.E. le 24 novembre 1978.

L'auteur enseigne au C.O.R.E. à Louvain-la-Neuve (Belgique).

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N°24 Pietro BALESTRA: Determinant and Inverse of a Sum of Matrices with Applicationsin Economics and Statistics (avril 1978)

N°25 Bernard FUSTIER: Etude empirique sur la notion de region homogène (avril 1978) N°26 Claude PONSARD: On the Imprecision of Consumer’s Spatial Preferences(avril 1978) N°27 Roland LANTNER: L ’apport de la théorie des graphes aux représentations de

l’espace économique (avril 1978)N°28 Emmanuel JOLLES: La théorie des sous-ensembles flous au service de la

décision: deux exemples d’application (mai 1978)N°29 Michel PREVOT: Algorithme pour la résolution des systèmes flous (mai 1978)N°30 Bernard FUSTIER: Contribution à l’analyse spatiale de l’attraction imprécise

(juin 1978)N°31 TRAN QUI Phuoc: Régionalisation de l’économie française par une méthode de

taxinomie numérique floue (juin 1978)N°32 Louis De MESNARD: La dominance régionale et son imprécision, traitement

dans le type général de structure (juin 1978)N°33 Max PINHAS: Investissement et taux d ’intérêt. Un modèle stochastique

d ’analyse conjoncturelle (octobre 1978)N°34 Bernard FUSTIER, Bernard ROUGET: La nouvelle théorie du consommateur est-elle

testable? (janvier 1979)N°35 Didier DUBOIS: Notes sur l’intérêt des sous-ensembles flous en analyse de

l’attraction de points de vente (février 1979)N°36 Heinz SCHLEICHER, Equity Analysis of Public Investments: Pure and Mixed

Game-Theoretic Solutions (April 1979)

TRAVAUX DEJA PUBLIES

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THEORIES DE LA CONCURRENCE IMPARFAITE :

ILLUSTRATIONS RECENTES DE THEMES ANCI ENS

par

Jean JASKOLD GABSZEWICZ

Les hypothèses qui caractérisent l'état de concurrence parfaite

constituent le point de départ naturel des théories qui tentent d'ex­

pliquer le fonctionnement des marchés imparfaits. Les imperfections

du marché résultent de la violation de l'une au moins des quatre hypo­

thèses suivantes : multiplicité des participants au marché, homogénéité

du produit échangé, libre entrée sur le marché, et information parfaite

des agents économiques. Chacune de ces imperfections a donné lieu à

des développements théoriques particuliers, conduisant à une mosaïque

complexe dont il n'est pas toujours aisé d'identifier les fils conduc­

teurs. Le présent exposé reflétera cette mosaïque puisqu'il vise à

illustrer la nature de certaines contributions récentes ayant pour

objet l'analyse des marchés quand au moins l'une des hypothèses de la

concurrence parfaite est violée.

On considérera d'abord le rôle joué par le nombre de participants

sur la structure du marché. Il s'agit là d'un thème ancien de l'analyse

économique qui a bénéficié récemment des apports méthodologiques de la

théorie des jeux, introduite par von Neumann et Morgenstern en 1945.

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En particulier, le concept de noyau, proposé par cette théorie, et qui

décrit abstraitement l'ensemble des solutions collectivement acceptables

d'un jeu à N personnes, s'est avéré fructueux pour représenter le fonc­

tionnement des marchés concurrentiels. L'application de ce concept à

l'analyse des situations de collusion entre agents économiques apparaît,

elle aussi, pleine de promesses. La première partie de cet exposé sera

consacrée à une illustration de cette application pour le modèle de pur

échange.

Dans la seconde partie, on illustrera des modèles récents qui étu­

dient l'impact de la différenciation des produits sur le degré de la

concurrence. Il y a longtemps aussi que les théoriciens essaient de

faire progresser l'analyse économique sur ce front. L'observation con­

crète du fonctionnement des marchés révèle combien les stratégies des

firmes qui sont usuellement prises en compte par la théorie - stratégies

en prix ou en quantités - ne constituent en réalité qu'un faisceau très

limité de la gamme des variables stratégiques auxquelles les firmes ont

effectivement accès. Parmi ces dernières, la possibilité de combattre

la concurrence en brisant l'homogénéité des produits vendus sur le

marché apparaît comme une arme particulièrement efficace. L'illustration

de travaux récents issus d'une contribution ancienne de H. Hotelling

[9] en théorie de la localisation spatiale, sert de support aux

développements de la seconde partie du présent exposé.

On évoquera enfin, dans la troisième partie, le domaine à peine

exploré de la concurrence potentielle. Dès 1949, J. Bain [3] et

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Sylos Labini considéraient la possibilité ouverte aux firmes installées

sur un marché de retarder l'érosion de leurs profits en pratiquant des

politiques appropriées visant à ralentir le processus d ’entrée de nou­

velles firmes. Ce thème a, lui aussi, fait l'objet de travaux récents

que la troisième partie du présent exposé s'efforcera d'illustrer.

Seules les questions liées à l'imperfection de l'information dont

disposent les agents ne seront pas abordées ici. Ces questions consti­

tuent un domaine en pleine évolution qui justifierait à lui seul un

exposé complet et homogène.

Notre propos n'est pas de faire une présentation exhaustive des

thèmes étudiés, ni d'en révéler les aspects techniques particuliers.

Il s'agit plutôt de se servir d'illustrations intuitives pour suggérer

au lecteur les préoccupations actuelles de certains chercheurs, relatives

à ces thèmes anciens qui n'apparaissent cependant pas encore tout-à-fait

éculés.

LA MULTIPLICITE VES AGENTS ECONOMIQUES

Cournot [5], le premier, a évoqué la question fondamentale consis­

tant à identifier le rôle joué par la multiplicité des agents sur le

degré de la concurrence. Pour procéder à cette identification, il

avait imaginé une industrie comprenant un petit nombre de firmes,

chacune d'elles produisant les quantités correspondant à l'équilibre

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non coopératif d ’un jeu dont les joueurs sont les firmes et les straté­

gies, les quantités offertes par chacune dalles.1 En accroissant le

nombre de firmes, il montrait que les quantités d1 équilibre correspon­

dantes tendaient à sfajuster aux offres concurrentielles. La contri­

bution de Cournot a donné lieu ultérieurement à un grand nombre de

recherches et le sujet est loin d'être épuisé, comme en témoigne par

exemple le travail récent de Novshek et Sonnenschein [13].

Ce n fest pourtant pas ce type de recherches que nous voudrions

évoquer ici, mais plutôt celles qui dérivent d ’un modèle proposé par

le professeur R. Aumann [1]. Bien que centré sur le même thème

(multiplicité des agents), ce modèle diffère de lfapproche de Cournot

à la fois par le mode de représentation choisi et par le type de solu­

tion de marché considéré, i.e., le noyau de lféconomie. Dans [1],

Aumann propose de représenter de manière formelle la concurrence par­

faite en utilisant un modèle d’économie d ’échange comprenant un continu

d ’échangistes. De plus, il montre l’adéquation de ce modèle au para­

digme concurrentiel en prouvant que, moyennant l’hypothèse d ’un continu

d ’échangistes, le noyau de l’économie d ’échange considérée coïncide

avec l’ensemble de ses allocations concurrentielles (Aumann [2])

1Si (q̂ ,..., q^,..., qn) sont les quantités offertes par n firmes et si ^h,### ^n^ désigne Ie Profit de la hî®me firme, un n-tuple

(q*> • • • 5 • • • y constitue un équilibre non coopératif du jeu si, et seulement si, V h, h = 1,..., n, V q^ ,

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- 5 -

Pour illustrer ce modèle et la portée du résultat que l'on vient

d'énoncer, je propose d'examiner l'exemple suivant. Considérons

l'économie d'échange composée de deux biens et de deux échangistes, et

caractérisée par une allocation initiale des biens qui assigne le

vecteur (4, 0) au premier échangiste, et le vecteur (0, 4) au second.

Supposons de plus que les préférences des échangistes sont toutes iden­

tiques et représentables par la fonction d'utilité

u^iXj, x2) = \/xj + \/x^. La Figure 1 décrit la "boîte d'Edgeworth"

correspondant à cette situation d'échange.

Figure 1

L'allocation concurrentielle, associée au système de prix = P2»

est située au centre de la boîte, et le noyau correspond au segment AC

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- 6 -

de la diagonale principale . Dans cet exemple, on constate que, si

l'allocation concurrentielle appartient bien au noyau, ce dernier inclut

beaucoup d'autres allocations qui ne peuvent être bloquées par les

coalitions qui peuvent se former. En particulier, il inclut un ensemble

d'allocations qui défavorisent le premier échangiste par rapport à

l'allocation concurrentielle (le segment AB) et, symétriquement, celles

qui défavorisent le second échangiste par rapport à cette même alloca­

tion (le segment BC).

Imaginons alors que les deux échangistes soient, chacun, remplacés

par un continu d'agents que nous choisirons de représenter par l'inter­

valle T = [0, 2] ; un agent t de l'intervalle [0, 1[ est caractérisé

Pour rappel, une allocation concu.vrenti.elZe dans une économie d'échangecomposée de n consommateurs i, i = l,...,n - le consommateur i détenantinitialement le complexe de biens w. - se définit comme une distribu-

. 1 ntion (Xj,..., x^,..., xn) des quantités totales 2 w^, pour laquelleil existe un système de prix £ tel que, quelque soit l'agent i, lecomplexe de biens x^ rend maximal ses préférences sur sa "droite debudget" {y | p . y — p . w^} (les notations y, x^, w^, £ représententdes vecteurs qui ont autant de composantes qu'il y a de biens différents

P * *- disons m; la notation p • y représente alors la somme p^ • yJ ,i.e., la "valeur" du complexe de biens y . ^

Quant au noyau, il se définit de la façon suivante. Une coalition est un groupe S de consommateurs. Une coalition S bloque une allocation x = » • • • * x£» • • • » xft) si, V i € S , il existe un complexe de biens y^,i € S, tel que y. est préféré par i à x. et 2 y. = 2 w. . Le

i 1 i£S 1noyau est lfensemble de toutes les allocations x qufaucune coalitionne bloque•

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par un vecteur de ressources initiales w(t) = (A, 0) et un agent t de

l'intervalle [1,2] par le vecteur w(t) = (0, A) . Pour tout t € T,

on pose u (x , x ) = J x + \Jx . L'économie ainsi obtenue est en tous t 1 2 1 2points semblable à la précédente, sinon qu'aux deux échangistes on a

substitué une masse anonyme d ragents qui leur sont identiques. 3 Le

théorème d'Aumann stipule que, pour cette nouvelle économie la seule

réallocation des ressources initiales qui soit dans le noyau de cette

économie est l'allocation concurrentielle représentée par le point B

au centre de la boîte. Ainsi donc, pour un continu d'échangistes,

chaque individualité a perdu tout pouvoir, et il devient équivalent

pour cette masse de choisir l'allocation finale des biens par l'inter­

médiaire d'un système de prix concurrentiels ou de laisser librement

jouer la formation de toutes les coalitions concevables. En d'autres

termes, la négociation directe par formation libre de toutes les coa­

3Dans le cas d'un continu d'agents, les concepts de coalition et d'al­location doivent être redéfinis en tenant compte de la substitution des intégrales aux sommes. En particulier, dans l'exemple considéré, l'égalité des flux échangés à une réallocation x des biens s'écrit :

J x(t) dy = J2 w(t) dy = (4, 4) ,o o

où l'intégration est réalisée par rapport â la mesure y de Lebesgue que l'on sait être sans atome (un atome dans un espace mesurable (T, T, y) est un sous ensemble E € T tel que y(E) > 0 et y(E') = 0, VE' c E). De même la classe des coalitions est l'ensemble T des sous-ensembles mesurables à la Lebesgue de [0, 2],

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litions conduit aux mêmes solutions de marché que les allocations décen­

tralisées par le mécanisme des prix.

Une hypothèse fondamentale de ce théorème est la formation libre

de toute coalition. Elle est formellement introduite dans le modèle

par le choix de T comme classe de coalitions admissibles : tout sous-

ensemble de T, pourvu qu'il soit mesurable, est une coalition candidate

à bloquer une réallocation des ressources. C'est précisément la richesse

de cette classe qui permet d'assurer que toute allocation non concurren­

tielle sera chassée du noyau par au moins une coalition susceptible

de réaliser un échange avantageux par rapport à celui qui est proposé

à ses membres. Dans la réalité cependant, on observe couramment la

constitution de groupes organisés d'agents économiques, dont l'objectif

est d 1intégrer en une unité indissoluble une multitude de pouvoirs

décisionnels initialement dispersés. L'effet direct de ces concerta­

tions est en particulier d'interdire désormais la formation de certaines

coalitions : plus précisément, toute coalition qui inclurait un sous-

ensemble propre de l'un quelconque de ces groupes devient prohibée. La

classe des coalitions admissibles se trouve "de facto" amputée de toute

coalition de ce type. La formation de groupes organisés d'agents

économiques au départ d'une multiplicité d'agents isolés opère donc de

façon inverse à celle qui résultait de la substitution d'un continu

d'échangistes en lieu et place d'un petit nombre de ceux-ci.

Pour analyser l'effet de ces formations "syndicales" sur le noyau

de l'économie d'échange, considérons au départ une économie d'échange

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où T est l1 ensemble des agents et T la classe de tous les sous-ensembles

mesurables de T • Le théorème d ’Aumann stipule que N(T) = E si N

désigne le noyau et E lfensemble des allocations concurrentielles.

Supposons alors qufun ensemble A de consommateurs conviennent d ’agir

à lfunisson; en d ’autres termes, tous les consommateurs de A tombent

d 1 accord de n fentrer dans une coalition avec des consommateurs qui ne

sont pas membres de A que si, et seulement si, le groupe A tout entier

est inclus dans la coalition considérée. On obtient dès lors une nou­

velle classe de coalitions admissibles que nous désignerons par ,

i-e., = {S | S £ T ; ou bien S n A = 0, ou bien S H A = A}. Si le

noyau est redéfini comme l’ensemble de toutes les allocations qu’aucune

coalition dans ne bloque, que peut-on dire de N(T^), en particulier

quant à sa relation à E, l’ensemble des allocations concurrentielles ?

La réponse à cette question est d ’importance pour au moins deux raisons.

Tout d’abord elle pourrait éclairer dans quelle mesure la formation de

groupes de pression dans une économie a priori constituée d ’une multi­

plicité d ’agents isolés conduirait à une solution de marché que ne serait

plus concurrentielle. Il est clair en effet que si N(TA ) =É N(T) = E,

la formation de syndicats a pour effet d f introduire dans le noyau des

solutions nouvelles qui ne sont plus concurrentielles.5 D ’autre part,

si le syndicat veut maintenir sa cohésion, il faut que ces dernières

*♦ ?L ensemble A devient un atome de T. .AIl est évident que E est invariant par rapport aux formations syndicales.

5

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- 10 -

solutions soient avantageuses pour ses membres : pour toute allocation

appartenant à E» il existe potentiellement une coalition qui

serait susceptible de la bloquer si la discipline syndicale n'était pas

maintenue.6 Le syndicat doit donc offrir un avantage à ses membres

pour se prémunir contre la tentation qu'ils auraient de rompre les

liens qui les unissent.

Puisque le théorème d'Aumann stipule qu'en l'absence de syndicat,

toute allocation du noyau serait concurrentielle, l'avantage proposé

doit se mesurer en comparant, du point de vue de ses membres, l'alloca­

tion résultant de la formation du syndicat à l'allocation concurren­

tielle. En particulier, il apparaît nécessaire, pour assurer la sta­

bilité syndicale, de garantir à chaque membre de ce syndicat la déten­

tion, après échange, d'un complexe de biens préféré à celui qu'il

aurait obtenu à la solution concurrentielle.

Il est utile d'examiner cette question à la lumière de l'exemple

que nous avons considéré plus haut. Supposons que tous les échangistes

appartenant à l'intervalle [0, l[ conviennent entre eux de négocier

l'échange à l'unisson en formant un syndicat A. Dès que ce syndicat

s'est formé, et pour autant que la discipline syndicale soit maintenue,

toute coalition qui regrouperait un sous-ensemble propre de A est

6En effet, si une allocation appartient à N(T^) "s E, il existe au moins une coalition incluant un sous-ensemble propre du syndicat qui pourrait la bloquer. S'il n'en était pas ainsi, l'allocation considérée appar­tiendrait à N(T) et donc à E, contrairement à l'hypothèse initiale.

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désormais interdite. On vérifie facilement que le noyau, après formation

syndicale, inclut tout le segment BC , c'est-à-dire toutes les alloca­

tions qui favorisent les syndiqués par rapport à l'allocation concur-7

rentielle. En outre - et c'est une conséquence d'un théorème dû à

B. Shitovitz [16] - seul le segment BC reste dans le noyau après la

formation du syndicat : toutes les allocations du segment AB restent

en dehors du noyau, c'est-à-dire toutes celles qui, étant dans le noyau

avec deux échangistes, défavorisent les syndiqués par rapport à l'allo­

cation concurrentielle. Dans cet exemple, la formation syndicale

vérifie donc le critère de syndicat "avantageux" : toutes les alloca­

tions appartenant à N(T^) ^ E sont préférées par les membres du

syndicat à l'allocation concurrentielle.

Il n'est malheureusement pas exact que cette propriété puisse

s'étendre à toutes les économies d'échange. R. Aumann [2] a même

construit des exemples où toute allocation appartenant à N(T ) v EA

est moins avantageuse pour les membres du syndicat que l'allocation

concurrentielle ! Il n'en est pas moins vrai qu'en formant des syndi­

cats, les agents économiques peuvent se défendre contre la dilution du

pouvoir résultant de l'anonymat lié au nombre des individus sur le

marché. Les consommateurs empêcheront ainsi le mécanisme naturel de

décision collective de suivre son libre cours, mécanisme qui prévoit

a priori la formation de toute coalition.

1 'Demonstration en appendice.

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2. LA PIFFERENCIATION PES PRODUITS

Je voudrais, dans ce paragraphe, commenter une contribution origi­

nale du Professeur H. Hotelling [9] en théorie de la localisation

spatiale, contribution dont les implications pour l'analyse de la

concurrence imparfaite par différenciation des produits n'ont peut-êtreg

pas retenu toute l'attention qu'elles méritent.

Le problème auquel Hotelling s'est intéressé peut être illustré

au moyen de l'exemple suivant. Une plage de longueur donnée L est

uniformément recouverte de baigneurs. Chacun d'eux se propose de con­

sommer un rafraîchissement qu'il peut, à son choix, acheter à un

vendeur 1, localisé à une distance a d'une extrémité de la plage,

ou au vendeur 2, localisé à une distance b de l'autre extrémité de

cette dernière. Le coût total à supporter par le baigneur est égal au

prix à payer pour le produit, augmenté d'un coût ex proportionnel à

la distance x qu'il aura à parcourir. Un baigneur achètera donc au

vendeur 1 plutôt qu'au vendeur 2 si, et seulement si, ex + p t< cy + p2

(x (resp. y) désigne la distance entre le baigneur et le vendeur 1

(resp. vendeur 2) et Pj (resp. p2) désigne le prix pratiqué par le

vendeur 1 (resp. vendeur 2)).

®L'analyse de Hotelling semble cependant susciter un regain d'intérêt dans la littérature économique anglo-saxonne, comme en témoignent de nombreux travaux récents qui s'inspirent de cette analyse, par exemple [ 14], ou [15].

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Etant donné les localisations a et b, et les prix pt et p2, il

est dès lors possible de déterminer les parts de marché de chacun des

vendeurs et les profits qui y sont associés. Pour nous fixer les idées,

considérons la figure 2, qui représente schématiquement la plage, chaque

point de la ligne étant associé au baigneur qui s’y trouve installé.

» ya b

L

Figure 2

Trois cas sont possibles : (i) si Pj < P2 - C(L - a-b) , le vendeur 1

récolte la totalité du marché : le coût total encouru par chaque baigneur

pour se rendre en a est inférieur à celui encouru pour se rendre en b ;

(ii) si P2< Pj -c(L-a - b ) , le vendeur 1 a une part de marché nulle pour

la même raison, mutatis mutandis, que celle évoquée sous (i); (iii) si

|Pj ~ P21 < c(L-a-b), le marché se divise entre les 2 vendeurs en un

point déterminé par la condition que le baigneur localisé en ce point est10indiffèrent entre acheter chez le vendeur 1 ou le vendeur 2.

10 Si x (resp. y) désigne la distance entre ce baigneur et le vendeurlocalisé en a (resp. b), la frontière entre les deux marchés est déter­minée par le système d'équations

x + y = L - a - b ex + P x = cy + p2,

dont les solutions sont données par x = -j(L- a-b) + 2~ ( P 2 ” Pj) et

y = y (L - a - b) + (pj - p 2) .

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- 14 -

A localisations données, le graphe des fonctions de demande (condition­

nelle au prix annoncé par l'autre vendeur) est caractérisé par un

segment linéaire et deux points de discontinuité apparaissant aux prix

où un groupe entier de consommateurs "bascule" d'un vendeur à l'autre.

La figure 3 illustre la demande s'a^resse au vendeur 1,

conditionnellement au prix "p2 pratiqué par le vendeur 2.

Figure 3

Le caractère remarquable de l'analyse précédente est de permettre la prise

en compte de deux types de stratégies qui sont simultanément ouvertes

aux marchands opérant sur un marché à produits différenciés : les carac­

téristiques du produit d'une part, et leur prix d'autre part. Lorsqu'un

consommateur est confronté au choix d'une marque particulière au sein

d'une gamme finie de produits substituts, il détermine généralement pour

chacune d'elles le rapport "prix-qualité", et son choix se porte sur la

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marque qui l'emporte au vu de ce critère. Les baigneurs d'Hotelling opè­

rent leur choix exactement de cette façon, si la localisation des vendeurs

est assimilée à la caractéristique qualitative du produit vendu. Comment

les vendeurs, quant à eux, déterminent-ils les prix du produit et leur

localisation ? Pour répondre à cette question, Hotelling imagine une

procédure en deux étapes. Tout d'abord, il suppose les localisations fixées

et décrit le mécanisme de détermination des prix. Incorporant ensuite ces

prix dans les fonctions de profit, il examine la sensibilité de ceux-ci

aux paramètres de localisation. Les localisations a et b étant données,

Hotelling suppose que les prix se fixeront à l'équilibre non coopératif du

jeu dont les stratégies sont les prix. Ces prix d'"équilibre" seront

caractérisés par la propriété qu'ils constituent mutuellement la meilleure

"réponse" de chaque vendeur, étant donné le prix fixé par l'autre. Si les

deux vendeurs sont suffisamment "éloignés" l'un de l'autre, on peut mon­

trer qu'il existe effectivement un équilibre non coopératif en prix.11

11 Si les conditions (i), (h + L(a + 2b), et (ii), ^L + >

L(b + 2a), portant sur les paramètres de localisation a et b, sont simultanément vérifiées, l'équilibre non coopératif en prix est donné par p* = c^L + — 3 ^“)» P* = c(^~ "^3“ )* ^es valeurs d'équilibre s'obtiennent en multipliant les fonctions de demande par les prix et en dérivant les conditions nécessaires de premier ordre pour un maximum.Ces conditions ne sont "a priori" valides que pour les domaines de stra­tégies (Pj,P2) conduisant aux segments linéaires des fonctions de demande, i.e., |P1 ~ P 2| < c ( L - a - b ) . Elles demeurent cependant valides pour l'entièreté des domaines (p , p2) pour autant que les conditions(i) et (ii) soient vérifiées. Ces conditions sont non seulement néces­saires, mais aussi suffisantes; cfr. [6],

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De surcroît, en incorporant ces prix d'équilibre dans les fonctions de

profit, on constate que ceux-ci, croissent de façon monotone pour le

vendeur qui modifierait de façon unilatérale sa localisation en s 'appro­

chant de l'autre. Par contre, il apparaît que si les localisations a et

b ne sont pas suffisamment "éloignées" l'une de l'autre, la meilleure

réponse d'au moins l'un des deux vendeurs consiste, dès l'instant où le

prix du concurrent est suffisamment élevé, à pratiquer un prix qui permet

de rafler à celui-ci la totalité de sa.demande (par exemple, si le ven­

deur 2 choisit p- , le vendeur 1 choisit = p^ - c ( L - a - b ) - e, où

e est un très petit nombre positif). Le concurrent peut alors répliquer

en choisissant à son tour un prix légèrement inférieur à celui de son

adversaire, et récupérer ainsi la totalité de la demande à son propre

compte. Cette procédure qui consiste à brader le prix du concurrent,

dans le cas où les localisations sont proches, n'est pas sans rappeler

celle qu'avait imaginée Bertrand [4] pour le duopole en prix portant sur

un bien homogène. Mais alors que chez Bertrand les prix finissent par

se stabiliser autour des valeurs nulles, il n'en va pas de même chez12 • • • •Hotelling. On peut montrer que, faute d'une différenciation suffisante

13en localisation, il n'existe pas d'équilibre non coopératif en prix.

La conséquence de cette analyse est non négligeable du point de vue

du rôle joué par la différenciation des produits sur le degré de la

12 •Sauf dans le cas a = b, où les duopoleurs de Hotelling deviennent desduopoleurs de Bertrand (produits homogènes) et les prix d'équilibresont nuls.

13i.e., si la (les) condition (i) ou/et (ii) est (sont) violée(s).

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- 17 -

concurrence. Lorsque à la fois le prix et le choix de la qualité des

produits sont des stratégies ouvertes aux concurrents sur un marché dif­

férencié, tout se passe comme si deux forces jouaient en sens opposé.

Une première qui pousse chaque concurrent à "copier" le produit de l'autre,

afin d'attirer vers lui la clientèle de ce dernier, au risque d'entrer

dans une guerre de prix "à la Bertrand"; une seconde qui, au contraire,

conduit chaque concurrent à "personnaliser" son produit par rapport à

celui de l'autre, à la fois pour saisir un créneau de la clientèle totale

par 1'"identité" de sa marque et pour éviter la guerre des prix qui peut

être simultanément préjudiciable aux deux concurrents. Laquelle de ces

deux forces apparaît-elle la plus tenace dans la réalité des marchés ?

Une réponse plus précise à cette question pourrait conduire à mieux

comprendre les mécanismes qui conditionnent la diversité des choix

ouverts aux consommateurs en matière de produits substituts. Elle per­

mettrait aussi de jeter une lumière nouvelle sur les phénomènes de

"non-price compétition", par lesquels les concurrents s'entendent par

collusion sur le niveau des prix, mais transportent sur d'autres varia­

bles stratégiques la conquête et le maintien de leurs parts de marché.

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3. LA CONCURRENCE POTENTIELLE

Je voudrais enfin traiter brièvement de certaines questions liées

à la notion de concurrence potentielle. Les analyses précédentes con­

cernaient la concurrence existante, par opposition à une concurrence

non encore réalisée, mais potentiellement présente dans le chef des

agents s'apprêtant à entrer sur le marché. La notion de concurrence

potentielle est liée à l'hypothèse de libre entrée sur le marché. Pour

de multiples raisons toutefois (existence de brevets, délais techniques,

protections politiques, stratégies des firmes en place), cette hypo­

thèse est rarement vérifiée à l'état pur dans la réalité. On observe

plus fréquemment une chronologie d'entrée. Une première firme occupe

le marché et bénéficie au début de barrières à l'entrée, du type de

celles évoquées plus haut. Ensuite, des firmes nouvelles, attirées par

la perspective de profit, envahissent progressivement le marché, érodant

les profits existants, et ralentissant de facto le processus d'entrée.

Ces phases successives peuvent s'étendre sur des périodes de temps fort

longues au cours desquelles les firmes déjà installées ont la possibi­

lité de freiner le processus d'entrée en pratiquant des politiques

appropriées. Au premier rang de celles-ci figure la politique dite du i *♦"prix-limite" . Par définition le prix-limite est le prix le plus

lkLa théorie du prix-limite a été introduite par J. Bain [3], et exposée ensuite par F. Modigliani [12]. La dynamique sous-jacente au mécanisme d'entrée décrit plus haut a fait l'objet de travaux récents : [8], [7].

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élevé que la firme installée peut pratiquer, tout en se garantissant

qu'aucune firme nouvelle ne peut entrer sur le marché.

Sous sa forme originale, la possibilité de pratiquer le prix-limite

a été liée aux différences existant entre les coûts de production de la

firme déjà installée, et ceux des entrants potentiels. La figure 4

décrit la formation du prix-limite dans ce cas.

Figure 4

Soit D(p) la fonction de demande, CM le coût moyen d'un intrant

potential et Gm le coût marginal de la firme installée. Si cette

dernière était en monopole pur (sans concurrent potentiel), elle pra­

tiquerait le prix p̂ j pour lequel la recette marginale Rm est égale

au coût marginal C A ce prix cependant, des possibilités de profit

existent encore pour des intrants potentiels. Par contre, en vendant

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Ql au prix p^, le monopoleur se garantit que, quelle que soit la quantité

que 1'intrant envisagerait de vendre sous l'hypothèse que lui-même ne

modifie pas Q^, le cout de production en résultant serait supérieur à

la recette. Il interdit ainsi l'entrée, et pratique le prix le plus

élevé qui soit compatible avec la réalisation de cette condition.

Une autre situation où la notion de prix-limite apparaît adéquate

est liée au prix que pratique le vendeur d'un bien, vis-à-vis des con­

currents essayant d'entrer sur le marché au moyen de produits substituts.

Considérons le vendeur d'un produit A vendant celui-ci à un marché

d'acheteurs que nous conviendrons de représenter par l'intervalle

T = [0, 1] . Nous supposerons que les acheteurs sont rangés dans l'inter­

valle par ordre croissant de revenus et que le revenu de l'acheteur t,

t G T, est donné par R(t) ,

R ( t ) = R 1 + R 2 t; Rj > 0, R2 > 0 .

De plus, nous supposerons que les acheteurs ont tous les mêmes préféren­

ces représentables par la fonction d'utilité définie par

u(0, R(t)) = uQ • R(t) si aucune unité du bien A n'est achetée, et par

u(A, R(t) - p^) = • (R(t) - p^) si une unité du bien A est achetée au

prix pA , uA > u0 > 0.15 Enfin, on suppose que la production se fait

150n suppose implicitement que le bien A est vendu en unités indivisibles et qu'une unité au plus sera achetée : cette hypothèse est généralement vérifiée pour les achats en biens durables, comme les voitures, les réfrigérateurs, les pianos, etc.

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à coût nul. Pour mesurer la demande D(p^) au prix pA » il suffit de

noter que cette dernière est égale à la longueur de l’intervalle

{t €T |uA • (R(t) -pA) > uQ . R(t)}, i.e.,

D(pA) = 1 - t(pA) si t(pA) > 0

= 1 si t(pA) = 0,

où t(pA) est la solution de l'équation u^0&j + ̂ 2 ~ P^) = u0 * ^ + ^ 2 t)»

La figure 5 illustre la détermination dec<pA) = î(u. - u )R. R_

UAPA0 2

la demande au prix . Aussi longtemps que seul le produit A occupe le

marché, le vendeur peut pratiquer le prix de monopole p* . Ce dernier

est donc solution de

Max pA . Min { 1, 1 - t(pA >} , i.e.,

----— (R + R t)u. - u. i 2

Figure 5

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u - u R u - u R- - - i 5̂ (R. + V * s i R 7 < ' ' et ' “ 57 > '• <'>Pé

Supposons alors qufun produit B, de moindre qualité, soit introduit à

cout nul sur le marché, produit qui apparaît comme un substitut du pro­

duit A. Supposons de plus que les consommateurs, s’ils décident d ’acheter

une unité d ’un des 2 produits, n ’achètent jamais simultanément l’autre.16

Soit u(B, R(t) “ Pg) = Ug • [R(t) - Pg] l’utilité d ’un consommateur si17une unité du produit B est achetée au prix pD (uB < u.; u„ > u ) . Sous^ b B A B 0

ces conditions, on peut montrer que, si — > 1, la paire de prix qui2

constitue un équilibre non coopératif après l’entrée du vendeur B est

définie par

uA - u u_ /u - u \PA = R i - ; et Pb = ° -A A \ B /

De surcroît, on peut montrer que la part de marché du vendeur B est nulle

à ces prix, et que le prix p"̂ est le plus haut prix que le vendeur A

puisse proposer tout en se garantissant que le produit B n ’entre pas sur

le marché.18 Ainsi, non seulement p- est un véritable prix-limite, mais

16Cette hypothèse est à nouveau fréquemment vérifiée pour les achats de biens durables, où l'achat d'un produit d'une marque exclut automati­quement l'achat simultané d'une autre marque.

17Cette hypothèse reflète le fait que B est un produit "standard" par rapport au produit A.

18Pour une analyse plus détaillée, cfr. [il].

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de plus il apparaît ici comme la stratégie d'équilibre d'un jeu, ce qui

le dote d'une propriété de stabilité supplémentaire.

L'existence d'un prix-limite dans le cas présent repose sur le

degré de différenciation des revenus. On peut montrer que R est pro-2 R

portionnel à 1'écart-type de la distribution de revenus. Si ~ est2

supérieur à 1, la distribution de revenus est suffisamment "égalitaire"

pour qu'il soit impossible au vendeur du produit "standard" d'obtenir

un créneau non négligeable de clientèle, même parmi les moins riches, et

alors même qu'il pratiquerait un prix nul (pi = 0)19. En choisissantble prix p , le vendeur du produit de luxe s’attribue la totalité duAmarché, mais ce prix est cependant inférieur au prix p* du monopole pur :

la menace d'entrée du produit "standard" l'oblige à abaisser son prix

au niveau p^ pour conserver intacte sa part de marché.

Même si l'exemple précédent apparaît comme anecdotique, il met en

lumière l'importance de la concurrence potentielle sur l'attitude des

firmes déjà présentes sur le marché. Il n'y a pas de doute qu'il y a là

un vaste champ d'investigation dont le défrichement vient à peine de

commencer.

Cette conclusion n'est valable que si l'hypothèse de coûts de produc­tion nuls est vérifiée.

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APPENDICE

Nous démontrons cette propriété pour l’allocation représentée par

le point C, i.e., l'allocation qui assigne x(t) = (3, 3), V t 6 A et

x(t) =(1,1) V t £ [1,2], mais la démonstration s'applique pour tout

point du segment BC.

Supposons que x n'est pas dans le noyau. Soit S la coalition qui

bloque x et y(t), t € S, les complexes de biens, tels que V t € S,

u (y(t) ) > u (x(t)) . Puisque S bloque on a aussi

On voit aisément qu'aucune coalition formée uniquement de consommateurs t

dans [1,2] ne peut bloquer l'allocation proposée : le syndicat A doit donc

être inclus dans S. D'autre part, l'allocation proposée est un optimum

de Pareto, de sorte que la coalition formée de tous les consommateurs ne

bloque pas. Il nous reste à montrer qu'aucune coalition S formée d'un

sous-ensemble propre de [l, 2] et de A ne peut bloquer.

Au système de prix p = [l, 1], x(t) rend maximales les préférences

de chaque consommateur t sur l'ensemble {y | p*y < p . Par

conséquent, V t € S',

(1)

u (y(t>) > u(x(t)) ==> p . y(t) > p . x(t)

!> P • / y ( t ) d y > p . J x(t)dy . (2)S S

De plus, V t € T ^ S

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p • x(t) = 2 < p • w(t) = 4

puisque T ̂ S n'inclut que des consommateurs t £ [1,2]. Dès lors, par

(2) et le fait que x est une allocation,

P • / y(t)dy + p - / w(t) dy > p • J x(t)dy + p • / x(t)dy S T^S S ISS

= p • / w(t)dy = p • / w(t)dy + p • / w(t)dy.T S TNS

Cette dernière inégalité contredit cependant l'égalité (1).

- 25 -

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REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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