ÊTES-VOUS SÛR DE TOUT CONTRÔLER · 2012-10-02 · on peut achopper mais aussi agir...

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www.legeneraliste.fr DOULEUR ET SI ON EN FAISAIT TROP AVEC LES OPIOÏDES… PLFSS CE QUE MARISOL TOURAINE VOUS RÉSERVE ISSN0183 4568 - CPPAP N° 0212 T 81255 N°2615 LEGÉNÉRALISTE FMC UROLOGIE Le diagnostic précoce du cancer de la prostate Lire notre cahier SPL/PHANIE N°2615 Vendredi 28 septembre 2012 ÊTES-VOUS SÛR DE TOUT CONTRÔLER ? ÊTES-VOUS SÛR DE TOUT CONTRÔLER ? Dossier spécial santé des enfants SÉCURITÉ DES SOINS Le livre événement des Drs Brami et Amalberti SÉCURITÉ DES SOINS Le livre événement des Drs Brami et Amalberti

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UROLOGIELe diagnostic précoce du cancer de la prostate

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ÊTES-VOUS SÛRDE TOUT

CONTRÔLER ?

ÊTES-VOUS SÛRDE TOUT

CONTRÔLER ?

Dossier spécial santé des enfants

SÉCURITÉ DES SOINSLe livre événement des

Drs Brami et Amalberti

SÉCURITÉ DES SOINSLe livre événement des

Drs Brami et Amalberti

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Vendredi 28 septembre 2012 Nº 2615

L’ÉDITORIAL

Sécurité des soins Êtes-vous sûr de tout contrôler ? P. 8

Douleur Opioïdes, d’unexcès à l’autre ? P. 20

Informatique Les servicesproposés pour le P4P P. 30

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Sécurité routinièreDans un domaine quasi vierge en médecine générale, cesdeux-là font un peu figure de pionniers à l’assaut d’un conti-nent inexploré. Certes, Jean Brami, généraliste parisien, et RenéAmalberti, spécialiste en psychologie cognitive, n’en sont pas àleur première tentative pour populariser la sécurité des soins. Ily a trois ans, leur premier ouvrage dressait un état des lieux iné-dit de l’erreur médicale en médecine de ville. Avec ce second livre, c’est à des travaux pratiques qu’ils invitent les médecinsgénéralistes. La proposition est audacieuse, car il faut un cer-tain culot pour proposer à une profession de s’interroger surla rigueur des services qu’elle délivre. Et la dynamique estinédite, chaque praticien étant invité à passer du livre, qui dé-taille les « onze dimensions du risque » en médecine générale,au test en ligne qui évalue sa pratique en 110 questions.Mais ce qui fait du « Brami-Amalberti » un livre-événe-ment pour la profession, c’est qu’il inaugure une démarche com-plètement nouvelle en matière de qualité des soins. À l’heuredes recos et de l’Evidence based medicine, on attendrait de deuxconseillers à la HAS qu’ils assènent à leurs confrères, guidelines,digests et arbres de décision. Pas du tout ! C’est autour du sa-voir-être, plus que du Savoir avec un grand S que tourne leur« Audit de sécurité des soins en médecine de ville ». Le diablese cachant toujours dans les détails, nos deux auteurs traquentl’incident médical dans la routine du praticien et dans l’organi-sation du cabinet. Pas dans la compétence du généraliste qui,paraît-il, est rarement en cause.La conséquence de cette approche est plutôt optimiste. Onparle encore peu d’erreur en médecine générale, peut-être parcequ’elle est moins fréquente en soins primaires que dans des spé-cialités techniques, moins redoutée en ville qu’en médecine hos-pitalière. Pourtant, Jean Brami et René Amalberti montrent quetout le monde se trompe plus ou moins ; surtout quand on tra-vaille seul ; a fortiori quand on est débordé… Leur démonstrationest intéressante et, pour tout dire, « oxygénante », parce qu’ellen’est pas le moins du monde moralisatrice et qu’elle repose surl’idée que chacun, là où il se trouve, peut agir ici et maintenant

sur les processus. L’erreur est humaine…L’association « La Prévention Médicale » enfaisait hier jeudi tout un colloque à Paris.Cela méritait bien que Le Généraliste enfasse à son tour tout un dossier ! �

JEAN PAILLARD,directeur de la rédaction

A LA UNE

La semaine du généraliste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

Sécurité des soins Le livre-événement des Drs Brami et Amalberti . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8Médecine de proximité Quand Marisol Touraine lèvera-t-elle le suspense ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

Pédiatrie Tout se joue-t-il avant la naissance ?. . . . . . . 14

Douleur Les temps forts du congrès mondial à Milan . 20

Urologie Le diagnostic précoce du cancer de la prostate. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27

Informatique Êtes-vous équipés pour le P4P ? . . . . . . . 30

. . . . . . . . . . . . . . . 31

Crète Thalasso, thalasso ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35

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LES ÉDITIONS DU MÉDECINGÉNÉRALISTE1, rue Augustine-Variot, 92245 Malakoff CedexTél. : 01.73.28.14.70. Fax de la direction : 01.73.28.14.71.http ://www.legeneraliste.frS.A.S. au capital de 150000 eurosDurée : 60 ans à compter du 24 décembre 1975

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Directeur de la rédaction: Jean Paillard (14.74)[email protected]

Dépôt légal : à parution. Commission paritaire : 0212 T 81255ISSN : 0183 4568Copyright Le Généraliste

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Cette semaine sur >« Généralistes, qui êtes-vous, que voulez-vous ? »

Répondez à notre grande enquête 2012. Les

résultats seront publiés dans un prochain numéro

du Généraliste. N’attendez pas ! Il suffira de

quelques clics pour vous faire entendre.IMA

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DOSSIER

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Dossier médical ouvert au nom d’un homonyme,résultat de biologie laissé sans suite, compterendu de radiologie introuvable, mauvais clicdans la prescription… L’erreur médicale,

ça n’arrive vraiment pas qu’aux autres. Hier, jeudi, à Paris,un colloque, à l’invitation de « La Prévention Médicale »,de la MACSF et de la HAS, a fait le point sur la question.

Et les Drs Jean Brami et René Amalberti, dans un récent ou-vrage, montrent que, en médecine générale aussi, méprise,inexactitude, étourderie ne sont pas si rares. Rarementgraves, elles seraient néanmoins le lot d’à peu près tout pra-ticien, disent les deux experts qui signent leur deuxième ou-vrage sur le sujet. En soins primaires, il y aurait, selon la lit-térature internationale, entre 0,004 et 240 erreurs pour 1 000consultations, le plus souvent liées au diagnostic ou au trai-tement, rapporte l’ouvrage. Vous en doutez ? Alors, regar-dez-vous un peu travailler et notez ce que vous faites pen-dant 72 heures, conseillent les auteurs de ce livre pas commeles autres : « Dès que l’on prend l’habitude de repérer les

erreurs commises, mais rectifiées immédiatement, on constate

que leur nombre est élevé », expliquent d’expérience JeanBrami et René Amalberti qui affirment qu’ainsi 60 à 83 %des erreurs pourraient être évitées en médecine générale.

Lesquelles et comment faire pour les empêcher ? Cet « Audit de sécurité des soins en médecine de ville » qui vientde paraître aux éditions Springer pose des constats et proposedes recettes. Il s’agit de la première démarche systématiquepour optimiser la sécurité des soins au cabinet. Trois ans aprèsleur premier livre qui avait sonné comme une magistrale prisede conscience, les auteurs sont, en quelque sorte, passés auxtravaux pratiques.

La gestion de son temps par le praticien souvent en causeL’ouvrage s’apparente pourtant avant tout à un manuel desavoir-être pour le médecin. Les auteurs ont décortiqué toutesles dimensions du risque en médecine de ville sur lesquelleson peut achopper mais aussi agir préventivement. Un pre-mier constat frappe le lecteur : nombre des bévues rele-vées ont un rapport étroit avec le surmenage du médecin et,d’une manière générale, la gestion de son temps. Il suffit delire le chapitre sur le dossier médical et la gestion des pres-criptions pour se faire une idée des risques que court un mé-decin débordé qui sera tenté de rédiger vite fait son

SÉCURITÉ DES SOINS

OSEZ L’AUDIT DEVOTRE PRATIQUE !C’est sans doute l’événement de cette rentrée ! Deux experts de la HAS proposent à leurs confrèresun audit de la sécurité des soins qu’ils dispensent. La démarche est inédite et à double détente.Leur livre dresse un état des lieux des risques en médecine de ville et des moyens de les éviter. Et le généraliste est parallèlement invité à faire son propre test en ligne à partir d’un questionnaireen 110 points. Vous êtes tentés ? Alors, suivez le guide !

DOSSIER RÉALISÉ PAR JEAN PAILLARD ET LE DR LINDA SITRUK ([email protected]) AVEC EMMANUEL DANIEL

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LE GÉNÉRALISTE Pourquoi cedeuxième ouvrage, trois ans aprèscelui sur la sécurité des soins ?

René Amalberti Lepremier était une pré-sentation générale duconcept de sécuritédes soins. Cette foison essaie de descen-dre une marche, de

se rapprocher des confrères et de leurproposer de décliner cette idée dansleur vie de tous les jours au cabinet.

Quand on évoque l’erreurmédicale, on pense volontiersincompétence. Dans votre livre, aucontraire, vous insistez sur lesvices de procédure. Pourquoi ?R. A. Si l’on prend toutes les statis-tiques, ce qui cause le risque c’est l’or-ganisation, beaucoup plus que l’incom-pétence technique. Donc, la cible de l’«Audit » porte surtout sur l’organi-sation et pratiquement pas sur les tech-niques médicales.

Le Généraliste : En vous lisant, on a l’impression que beaucoupd’incidents proviennent dusurmenage du praticien. Le risqued’erreur en médecine généralevous semble-t-il accru par la crisedémographique ?

Jean Brami C’est évi-dent. Quand desconfrères sont instal-lés dans des zones oùil y a peu de méde-cins, ils aimeraienttravailler moins, mais

ne le peuvent pas. Le temps est un ou-til de l’organisation : quand il n’est pasmaîtrisé, il devient l’outil de la désor-ganisation. Ce lien au temps, si impor-tant, n’est pas quelque chose qui est en-

seigné. Certains médecins vont savoirgérer leur temps spontanément, maisce n’est pas le cas de tous.R. A. On enseigne la relation duelle avecle patient, mais pas le pilotage de la pa-tientèle. Nous sommes le pays d’Europeoù le temps de consultation est le pluslong. Certaines consultations vont prendre le double de temps d’uneconsultation classique.Mais comme on n’apprendpas aux médecins à gérerleur temps, le vrai risqued’erreur survient plusieursheures plus tard lorsque lemédecin se rend comptequ’il a pris du retard.

Vous relevez que les consultationsles plus longues ne sont pasforcément les plus sûres.Comment expliquer ce paradoxe ?J. B. Ce n’est pas du tout paradoxal !Quand des gens viennent, ils présen-tent souvent trois ou quatre motifs deconsultation. Parmi ces plaintes, le mé-decin va choisir car il ne pourra pastoutes les traiter. Le patient va s’en ren-dre compte et conclure que les ques-tions auxquelles il n’a pas obtenu deréponses n’intéressent pas son méde-cin. Du coup, il ne va pas lui en repar-ler lors des consultations suivantes. Etsi jamais le problème s’aggrave, le pa-tient aura beau jeu de dire : « Docteur,

je vous en avais parlé il y a plusieurs

mois et vous n’avez rien fait… » À l’in-verse, en dessous de 8 minutes, c’estdangereux. Le patient n’a pas le tempsde se déshabiller et le médecin n’a pasle temps de l’ausculter.

Et les nouveaux moyens decommunication ? Sont-ils un « + »ou un danger pour le praticien ?R. A. Ce n’est pas l’outil en lui-même qui

est bon ou mauvais, mais la façon dontle médecin va s’en servir. Ces nouvellestechnologies seront un « plus » quandelles seront maîtrisées. L’apprentissagede ces technologies est nécessaire.J. B. Quand un patient envoie par e-mail une photo au médecin pour luidemander conseil, les clichés sont sou-vent de mauvaise qualité. Donc, il y a

un risque pour le pa-tient. Cela dit, quandon aura domestiquéces technologies, celadébouchera sur unemédecine de meilleurequalité. On va recourirde plus en plus à cesnouveaux moyens de

communication, c’est inévitable. Il estdonc essentiel de savoir s’en servir à titre professionnel.

Pour une sécurité optimale des soins, la première qualité du praticien n’est-elle pas d’êtreobsessionnel ?J. B. Il faut que les médecins soient ré-flexifs, qu’ils arrivent à se regarder tra-vailler. Le problème, c’est qu’ils n’ontplus le temps de le faire. Ils ne se ren-dent même pas compte qu’ils prennentdes risques. Pour réfléchir à leurs pra-tiques, les groupes de pairs peuvent êtreutiles. Mais il faut des objectifs bien dé-finis pour que l’échange ne parte pasdans toutes les directions.

Qu’allez-vous faire de cet audit en ligne ?J. B. On pense que cet audit est un ou-til important à la disposition de la pro-fession. Et, si les praticiens font vrai-ment leur deuxième tour d’audit, ilsauront accompli leur DPC. Pour lereste, c’est bien entendu une mine d’oren termes de recherche. �

« Il faut que les médecins soient réflexifs ! »

Et vous, quelle est votre stratégie pour éviter l’erreur médicale ?Ecrivez-nous, rubrique AVLP, sur :

[email protected]

ENTRETIEN AVEC LES AUTEURS

« Le temps est un outil de

l’organisation… ou de la

désorganisation »

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ordonnance ou de classer prestement les retours des la-bos d’analyse. « Le mauvais suivi des examens complémen-

taires des patients est une source majeure d’événements in-

désirables », pointent les deux médecins, qui soulignent queles logiciels informatiques, en l’état actuel de la technolo-gie, ne sont pas forcément la panacée pour les éviter. Au to-tal, « 14 à 25 % de toutes les erreurs rapportées par les géné-

ralistes dans la littérature sont des erreurs en lien avec la

prescription, la communication des résultats ou l’exploitation

de résultats anormaux ».Le livre consacre de longs développements

sur la gestion du temps pour un médecin etce jonglage permanent avec le calendrier si fa-milier au généraliste : cette visite qui ne pa-raît pas si urgente et qu’on remet au lendemain,cette personne âgée qu’on ne prend pas letemps de faire déshabiller, cette ordonnancequ’on délivre entre deux portes et entre deuxconsultations… À chaque fois, c’est quelquesminutes gagnées sur son agenda, cela permettrapeut-être de prendre plus son temps pour s’oc-cuper d’un cas complexe, mais c’est inévitable-ment prendre le risque d’un oubli ou d’une bou-lette… Même chose lorsqu’on doit arbitrer entrearrêter sa consultation pour une urgence ou unappel téléphonique et interrompre la consulta-tion de l’autre, au risque de perdre le fil du col-loque singulier…

Le couple médecin-patient pour le meilleur et pour le pireLa relation au patient est aussi pointée commegénératrice d’événements indésirables. « Lais-

ser plus de temps pour s’exprimer au patient

n’est pas une perte de temps », martèlent les au-teurs qui citent des études américaines pourillustrer leur propos : seuls 23 % des patientsparviendraient à exposer la totalité de leurssymptômes lors du colloque singulier, un dé-lai très court de 23 secondes s’écoulant enmoyenne avant que le patient soit interrompu par le mé-decin ! Et, pour le praticien peu écoutant, le risque existealors de passer à côté du diagnostic.

Le « Brami-Amalberti » fait d’ailleurs un peu le mêmeconstat dérangeant concernant la compliance du malade.Non, le défaut d’observance du patient n’est pas une fata-lité, explique-t-il, s’appuyant sur des études qui lient l’at-

titude de ce dernier à la plus ou moins grande communi-cabilité du médecin traitant. Comme quoi la qualité derelation au sein du « couple patient-médecin » entre aussien ligne de compte pour expliquer les incidents.

Au cabinet ou en visite, les risques ne sont pas les mêmesQuestion de personnes, mais aussi de lieu. Au risque dedéplaire à certains confrères, les Drs Brami et Amalberti por-

tent un regard sans complaisance sur l’hygièneet l’aménagement des cabinets médicaux, mêmes’ils concèdent que les années Sida ont bienchangé la donne et les mentalités.

Hors les murs, c’est sur la visite à domicileque se concentre leur attention. Le saviez-vous ?Dans 14 % elle est l’occasion d’une perte d’in-formations, concernant, par exemple, examensde laboratoires, courriers, résultats d’examensou médicaments pris par le patient. Un contre-temps fâcheux évidemment, mais il y a pluspréoccupant : une fois sur deux, cela se solderapar un incident susceptible d’affecter la sécu-rité du patient. Alors, faut-il regretter la visite àdomicile si fréquente autrefois ? Nos deux expertsne nourrissent guère de nostalgie : « Elle consti-

tue, disent-ils, le lieu où se concentrent tous les

dangers d’une information insuffisante et d’une

coordination des soins périlleuse ».

Indispensables NTIC… dont il faut pourtant se méfier !Si la visite prend de moins en moins de placedans l’agenda de nombreux médecins, tel n’estpas le cas des nouvelles technologies de l’in-formation et de la communication. Indispen-sables NTIC ! Fax, messages téléphoniques, e-mails et SMS facilitent la vie de nombreuxmédecins, mais ne remplacent pas le colloquesingulier. Les consultations virtuelles font de

facto partie du quotidien de la plupart des mé-decins de famille. Et, en soi, ce n’est pas pour déplaireaux deux auteurs. Mais à condition pour le médecin d’enconnaître les limites, soulignent-ils : attention, par exem-ple, à cet appel au secours qui pourrait moisir plusieursjours sur votre répondeur ou sur votre boîte mail ! Et c’estpour ne rien dire de la confidentialité parfois toute relative de ce dernier média si un peu naïvement vous lui

>

> Dans 45 à 76 % des cas, lesévénements indésirablesétaient évitables. On

comprend mieux l’importance

de mettre en place

des procédures qui permettent

de les réduire. Une de ces

procédures est la check-list.

> L’art dont on parle est celui

d’un compromis professionnel

maîtrisé qui permet de

piloter des dizaines, voire

des centaines de trajectoiresde patients simultanément,

pour amener chacun à bon

port, sans perdre soi-même

le contrôle économique du

cabinet médical et sans

souffrir de conséquences

personnelles et familiales.

> Nous faisons ces choix àtout instant… Renoncer à faire

déshabiller le patient âgé qui

vient pour un renouvellement

d’ordonnance, éviter une

discussion psychologique

incertaine avec un patient à la

vie compliquée, mais rester en

revanche plusieurs minutes

au téléphone, pour joindre un

correspondant hospitalier

dont on souhaite un avis

urgent.

> On risque de répéter l’erreur

si ses causes n’ont pas étéanalysées et si des mesures

de correction n’ont pas été

prises.

MORCEAUX CHOISIS

Pour leur ouvrage

« Audit de sécurité des soins

en médecine de ville »,

les Drs René Amalberti et

Jean Brami ont collaboré

avec deux juristes

du Sou Médical,

Nicolas Loubry

et Brigitte Sicot,

qui explorent

le versant responsabilité

médicale et juridictionnel

de l’erreur médicale.

éditions Springer, 180 p., 29 euros.

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confiez un diagnostic, un pronostic ou un conseil…Au final, l’un des mérites du « Brami-Amalberti » est de

montrer que le risque existe un peu partout en médecine gé-nérale, même s’il est, à ce jour, beaucoup moins documentéqu’en médecine hospitalière. Pour autant, le praticien ne re-fermera pas cet « Audit de sécurité des soins en médecinede ville » avec l’impression d’être submergé. Car le livremontre aussi que le zéro défaut n’existe pas en médecine.

Il fourmille, par ailleurs, de conseils pratiques pour évi-ter l’erreur, autant que faire se peut. Au plan méthodolo-gique, on découvre les conseils de la Mayo Clinic de NewYork pour planifier son agenda. Et, à plusieurs reprises,l’ouvrage invite son lecteur à garder des traces écrites de son activité, surtout quand elles sont impromptues :un conseil téléphonique, un renseignement glané en visite,un patient qu’on n’a pas fait déshabiller, etc.

Et si vous preniez le risque d’écouter un peu plus vos pa-

tients, suggèrent encore les auteurs, qui assurent que la « perte

de temps » à laisser s’exprimer complètement un patient, dansla majorité des cas, ne rallonge pas la consultation de plus dedeux minutes. Le conseil vaut pour le site Internet préféré devotre patient, sur lequel, on vous suggère de surfer avec lui, aumoins une fois, pour discuter ensemble du contenu. La paradepour le médecin tient aussi dans l’anticipation (indispensablevérification de sa trousse d’urgence), mais aussi dans la forma-tion (communiquer avec son patient, savoir domestiquer lesnouveaux moyens de communication, ça n’est pas forcémentinné…). Et s’il fallait ne retenir qu’un conseil de ce livre, cepourrait être d’éviter de tout faire seul : en amont, la piste dutriage téléphonique par des paramédicaux, fort peu pratiquéeen France, a la faveur des deux auteurs ; en aval, ils conseillentde s’ouvrir à des confrères des incidents. Et pourquoi pas dansle cadre de groupe de pairs, suggèrent les deux hommes ? Quandon est conseiller à la HAS, on ne se refait pas ! �

L’audit en ligne est

anonyme, alors nous

avons conservé

l’anonymat du

« Docteur F ». Cette

médecin généraliste

installée dans la

banlieue ouest de Paris

qui pilote une

patientèle conséquente, n’en est pas à sa première

démarche de formation et d’évaluation. Elle a testé l’audit

que proposent, sur un site web sécurisé, les Drs Brami et

Amalberti en complément de leur ouvrage. « C’est

incroyable de se voir pratiquant la médecine ! , résume cette

généraliste d’une soixantaine d’années. Nous sommes sans

cesse le nez dans le guidon et notre hantise est celle du retard

diagnostic ou de l’erreur. Et nous

résumons la sécurité du patient à ces

deux notions.Nous remettons sans

cesse en questions nos compétences de connaissances, mais jamais

nos compétences de fonctionnement ! » Au travers de

110 questions, ce sont 11 dimensions critiques qui sont étudiées,

de la conduite de la consultation, aux relations avec les

confrères, des problèmes de conformité d'accès ou d'hygiène,

à la gestion du temps et des urgences. Au final, un bilan

personnalisé est proposé avec des pistes d’amélioration.

Pour le Dr F, le remplissage du questionnaire a duré une

bonne heure : « C’est assez chronophage, mais c’est

indispensable si on répond honnêtement, sans auto-censure, ni

complaisance. J’ai aussi hésité longtemps avant de cocher les

réponses car bon nombre de choix proposés ne correspondaient

pas exactement à ma pratique. Or il faut forcément répondre pour

avancer dans le test ».

Cette praticienne, présidente d’une association de FMC

agréée depuis des années et participant à des groupes

de pairs s’étonne de l’analyse finale de l’audit :

« Je ne vérifie pas assez les dates de péremption des médicaments

de ma sacoche ; je n’ai pas de protocole d’urgence écrit et

immédiatement disponible, moi qui, pourtant, passe mes soirées

en réunions de formation ! Je n’ai pas de reminders de suivi des

examens complémentaires . Je ne me suis pas assurée de la

couverture vaccinale de la personne qui s’occupe du ménage à

mon cabinet. Je n’ai aucune

certitude sur les compétences

médicales du secrétariat

téléphonique à qui je confie la gestion des appels au cabinet :

recommande-t-il bien à un patient qui cherche à me contacter

pour une douleur thoracique de faire le 15 ? Je ne le sais pas et je

suis pourtant responsable ». Rendez-vous dans six mois pour

le Dr F : cette omnipraticienne est invitée à refaire alors

l’audit pour vérifier l’amélioration de ses pratiques.www.moncabinetsasecurite.com

L’AUDIT EN LIGNE TESTÉ POUR VOUS PAR UN CONFRÈRE...

« Assez chronophage, mais indispensable »

> La relation médecin-patient

fonctionne comme leséléments d’un couple.Chacun peut entraîner le

dysfonctionnement de

l’autre.

> Il n’y a pas de patients

difficiles, il n’y a que desrelations médecins-patientsdifficiles.

> Les médecins sont

interrompus 6,6 fois parheure et dans 11 % de leurs

tâches. Ces interruptions

causent beaucoup d’erreurs

sur le patient en cours…

et sur les suivants.

> La moitié des messageslaissés sur le répondeur du

médecin sont suffisamment

inquiétants et auraient justifié

une visite le jour même aux

heures ouvrables.

> Les vraies urgences

sont rares et prennent

souvent au dépourvu.

Beaucoup de connaissances

sont anciennes

et l’état émotionnelparticulier qui accompagne

l’urgence peut faire perdre

tous ses moyens au médecin.

Disposer sous la main

de protocoles précis est

indispensable.

> Le mauvais suivi du retour des examens

complémentaires des patients

est une source majeure

d’événements indésirables.

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