Syndicalisme et Mawonaj: le cas de l'ugtg
-
Upload
yarimar-bonilla -
Category
Documents
-
view
214 -
download
0
description
Transcript of Syndicalisme et Mawonaj: le cas de l'ugtg
Le Progrès Social - n° 2718 - page 10
Axelle KAULANJAN-DIAMANT
Yarimar Bonilla : «La Caraïbe est en avance sur le monde»
Le Centre d’Analyse Géo-poli-
tique et Internationale (CAGI)
du campus de Fouillole a, décidé-
ment, cette année, une program-
mation très riche.
Vendredi dernier, à l’amphithéâ-
tre Descamps de l’UFR de Droit,
il recevait la Docteure portori-
caine en anthropologie, Yarimar
Bonilla.
Professeur à l’Université de
Virginie (USA), Yarimar Bonilla
était venue présenter sa thèse in-
titulée «A striking past» sur
«Syndicalisme et Mawonaj» - Le
cas de l’UGTG».
Apriori, rien ne destinait
Yarimar Bonilla à s’in-
téresser au concept de ma-
wonaj associé au monde syndical
guadeloupéen. Mais, lorsqu’elle
établit un parallèle entre les apo-
ries de l’autonomie portoricaine et
celles de la départementalisation
des DFA, des rapports des deux
îles caribéennes aux USA, pour
Puerto-Rico, et à la France, pour
la Guadeloupe, l’on comprend
mieux ce qui a intéressé Bonilla
dans le cas Guadeloupéen.
Ce sont, explique-t-elle, les simi-
larités anthropologiques relatives
au rapport à la loi des Portoricains
et des Guadeloupéens qui lui ont
fait «tilt».
C’est précisément cette défiance
vis-à-vis de la loi, à travers le ma-
wonaj (que les anciennes colonies
caribéennes ont en commun), qui
a poussé Bonilla à s’intéresser à la
lutte syndicale en ce qu’elle a de
«mawon».
Au fond, lorsque Bonilla expose
sa thèse, pour le Guadeloupéen
lambda, les faits qu’elle relate
n’ont rien d’exceptionnel. Par
contre, ce qui est extrêmement in-
téressant dans la démarche de
Bonilla, c’est l’inscription des
concepts de mawonaj et de kas-
kôd, des actions syndicales et so-
ciales de l’UGTG, dans une
logique systémique, qui aboutit à
la production historiographique
du présent et de l’avenir, à travers
l’utilisation du Créole, du Gwo-
Ka et des méthodes telles que le
piquet de grève et la grève mar-
chante.
Sa thèse principale réside dans le
fait, qu’en fait, l’UGTG pratique
un mawonaj qu’on pourrait définir
non pas comme une «simple rup-
ture avec le système», mais
comme une «rupture avec les
principes du système».
Elle démontre, avec une acuité ad-
mirable, en analysant la pensée
d’Aimé Césaire, et en se basant
sur les travaux d’anthropologues
tels que Richard Burton, Lanoir
Létang, Patricia Braflan Trobo,
entre autres, en quoi ce mawonaj
constitue une «rupture concep-
tuelle et épistémologique» qui
tend, au fond, à construire un syn-
dicalisme nouveau qui trouve ses
solutions dans la politique.
«Le mawonaj n’est pas qu’une
simple posture par rapport au
passé, ce n’est pas un simple acte
de mémoire, mais un projet idéo-
logique. Il s’agit d’une création
consciente et délibérée», précise
Bonilla.
Clôturant la présentation de sa
thèse sur le caractère progressiste
de la liberté et de la force de l’ac-
tion syndicale en Guadeloupe,
Bonilla a réaffirmé ce que beau-
coup avaient déjà pressenti : «la
Caraïbe, et singulièrement la
Guadeloupe, est en avance sur le
Monde».
Et, évoquant les limites de l’auto-
nomie portoricaine, et celles de la
départementalisation de la
Guadeloupe, elle a, en guise de
conclusion, formulé le vœu d’une
grande fédération politique des
pays de la Grande Caraïbe.
AKD
Syndicalisme et Mawonaj - Le cas de l’UGTG
Frantz Gumbs : «Il n’y a jamais eu de vraie instabilité politique à Saint-Martin»
Mercredi 20, Victorin Lurel recevait, à l’espace régional du
Raizet, Frantz Gumbs (UMP), le président du Conseil territo-
rial de Saint-Martin, afin de faire le point sur le transfert de
compétences de la Région Guadeloupe vers la nouvelle
Collectivité d’Outre-Mer (COM) de Saint-Martin.
Récemment réélu, après l’invalidation de son élection d’août
2008 et la déclaration d’inéligibilité du premier Président, Louis
Constant Fleming, Frantz Gumbs a aussi tenu à rassurer sur la vie
politique de Saint Martin et le «dossier Octroi de Mer».
Devenu Collectivité d’Outre-Mer, par la loi organique du 21
Janvier 2007, grâce à l’article 74 de la Constitution, Saint-Martin,
qui n’est plus, depuis, une commune guadeloupéenne, a acquis,
outre les compétences habituelles des communes françaises, des
compétences aussi dévolues au département et à la région.
Mais, depuis l’institution de la COM, Saint-Martin semble frappé
d’une «poisse politique» qui a placé les débuts de la nouvelle col-
lectivité sous le signe du scandale, de la polémique, voire même
de l’instabilité politique.
Flash back. 2007, Louis Constant-Fleming (UMP) est élu à la tête
du Conseil Territorial, mais, déclaré inéligible pour un an, après
l’invalidation de ses comptes de campagne par la commission ad
hoc. Il sera alors dans l’obligation de démissionner, le 25 juillet
2008, de la présidence du Conseil et de son poste de conseiller
territorial.
Après une nouvelle élection en août 2008, c’est Frantz Gumbs,
lui aussi UMP, qui remportera la présidence du Conseil…jusqu’à
ce que son élection soit, à son tour aussi, invalidée par le Conseil
d’Etat. En effet, Marthe Ougoundélé (UMP) et Alain Richardson
(PS) avaient alors déposé des recours d’annulation, contestant les
modalités du vote. Le 10 avril dernier, le Conseil d’Etat ira alors
dans le sens de ces recours en avançant le non respect du secret
du vote, « du fait que les bulletins de vote utilisés Tle 7 Aout 08,
ont rendu possible la reconnaissance du sens du vote des élec-
teurs du Conseil Territorial. »
Entre temps, avant la réélection de Gumbs au début du mois de
Mai 2009, la polémique quant à la perception de l’Octroi de Mer
guadeloupéen par Saint-Martin, avait largement enflé. En effet,
ne faisant plus partie des communes guadeloupéennes, Saint-
Martin ne pouvait, légitimement, plus prétendre à la perception
de cette taxe redistribuée aux communes.
Or, Yves Jégo, qui voulait à l’époque (trouver) «un soutien dans
la mise en place immédiate d'un dispositif fiscal», propre à Saint-
Martin, avait alors soutenu un amendement de la loi de finance
qui autorisait Saint-Martin à percevoir, durant encore 3 ans, une
partie de l’Octroi de Mer collecté en Guadeloupe.
Victorin Lurel était alors parti en croisade contre cette disposition
qui, finalement, sera censurée par le Conseil constitutionnel.
L’exécutif régional s’était alors même férocement opposé, par
média interposé, au Sénateur-maire de Basse-Terre, Lucette
Michaux-Chevry, accusant cette dernière d’avoir cosigné l’amen-
dement…
Aujourd’hui, après ces débuts difficiles de la COM de Saint-
Martin, Frantz Gumbs se veut avant tout apaisé et rassurant sur
les dossiers du transfert de compétences et de l’Octroi de Mer.
Pour ce qui est du transfert de compétences Région
Guadeloupe/COM de Saint-Martin, Victorin Lurel a réaffirmé les
engagements qu’il avait pris lors du changement de statut, pour
ce qui concerne l’aboutissement des chantiers en cours – débutés
avant le changement de statut, et relevant de la compétence de la
Région Guadeloupe.
«Le transfert de compétences se passe très bien, a déclaré un
Gumbs visiblement satisfait. On est là également pour faire le
point sur l’état d’avancement et l’état de finalisation des diffé-
rents chantiers. Il y a des routes nationales dont la Région avait
récupéré les compétences et le président Lurel avait dit, de ma-
nière claire, qu’il laisserait à St-Martin des routes en bon état, et
cet engagement est en train d’être respecté. »
Interrogé par le Progrès Social sur la situation politique de Saint-
Martin, Gumbs a déclaré qu’il « n’y a jamais eu de vraie instabi-
lité politique à Saint-Martin. »
Et il en veut pour preuve la majorité UMP maintenue, au fil des
diverses élections, à Saint-Martin, ainsi que la fiabilité du nou-
veau statut : « J’ai été élu par le même conseil majoritaire. Il y a
eu une annulation d’élection sur des motifs dont on aurait pu se
passer - enfin, je respecte le Conseil d’Etat dans son jugement…
J’ai été réélu, c’est toujours la même majorité, c’est toujours le
même programme, et en ce sens, il n’y a pas eu de vraie instabi-
lité politique. D’ailleurs le statut que nous avons adopté a des
Institutions qui fonctionnent, malgré les annulations et invalida-
tions. Le statut est suffisamment solide qu’il n’y ait pas de désor-
dre politique », a-t-il précisé.
Quand on l’interroge sur les pistes que la COM explorera afin de
récupérer les 12 millions de manque à gagner de l’Octroi de Mer,
Gumbs reste assez vague mais se veut clair quant au rôle de l’Etat
français et de la non implication de la Région Guadeloupe, à ce
niveau : «Quelque soit la piste, de toute façon, ça ne concerne pas
le budget de la région ni aucune parcelle de la fiscalité guade-
loupéenne. Les pistes pour ce qui concerne Saint-Martin repo-
sent sur le respect par l’Etat des dispositions de la loi
organique».
«Nous n’avons pas hérité d’une situation financière difficile. La
commune était même excédentaire, au moment où la transforma-
tion en COM est intervenue. Le bilan budgétaire de fonctionne-
ment de la collectivité, pour la première année, est positif. Nous
avons eu des excédents que nous avons réinjectés dans le budget
2009. La situation budgétaire de la collectivité de Saint-Martin
est absolument saine», a-t-il tenu à souligner. AKD
Yarimar BONILLA
Gaby CLAVIER et Charly LENDO, auditeurs attentifs
Victorin LUREL et Frantz GUMBS (au centre)