STVDIA GRATIANA - MGH-Bibliothek · Fieschi, devenu lepape Innocent IV. Sascience,sa personnalite,...

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STVDIA GRATIANA POST OCTAVA I)ECl\ETl SAECVLARIA XI. CVRANTIBVS lOS. FORCHIELLI - ALPH. M. STICKLER Ell. IVR. ECCLES. PROF. RIST. IVR. CAN. PONT. ATHEN. SALES. ROIIAE VNIVERSITATIS BONONIAE INSTITVTVM GRATIANVM BONONIAE MCMLXVII

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  • STVDIA GRATIANAPOST OCTAVA I)ECl\ETl SAECVLARIA

    XI.

    CVRANTIBVS

    lOS. FORCHIELLI - ALPH. M. STICKLEREll. IVR. ECCLES. PROF. RIST. IVR. CAN.

    PONT. ATHEN. SALES. ROIIAEVNIVERSITATIS BONONIAE

    INSTITVTVM GRATIANVMBONONIAE MCMLXVII

  • INNOCENT IV ROMANISTEExamen de l'Apparatus

    GABRIEL LE BRASParis

    20. Studia Gratiana - vol. XI.

  • SOMMAIRE:L'Eglise debitrice et creanctere du droit romain. - I. Innocent IV et son Appa-ratus. - H. References au droit romain dans les Commentaires d'Innocent sur les sour-ces, sur ('organisation de l'Eglise, de la societe civile et des rapports supranatureIs.Caracteres de ces references. - Ill. Sources d'Innocent. Part de la religion dans un mo-nument d'apparence profane. Conclusion: Influence romaine d'Innocent [G. Le B.l.

    SUMMARIUM:Introductio: Ecclesia ex iure romano hausit eique retribuit. - I. De Innocen-tio IV eiusque Apparat",. - 11. In Commentis Innocentü IV ad ius romanum remittiturcirca fontes, circa Ecclesiam, societatem civilem, relationes supernaturales ordinandas.De indole harum citationum. - Ill. De fontibus Innocentii IV; qualern partem habue-rit religio in hoc opere quod profanum apparet. - Conclusio: quantopere ius romanum,quatenus Innocentius IV eo usus est, influxerit.

    Tandis que les Canonistes reconnaissent que le droit romain foumita l'Eglise toute la technique de son droit (1), les historiens du droit ro-main au moyen äge accordent peu d'attention au droit canon. Ils sem-blent meconnaitre la part des pontifes dans la restauration de l'autoritelegale du droit romain; celle des canonistes dans la diffusion.I'interpre-tation, l'organisation en systeme des textes justiniens; celIe des tri-bunaux ecclesiastiques dans l'application de ce corpus ressuscite (2)_

    Nous avons entrepris de mesurer cette triple action de l'Eglise etnos premieres observations ont porte sur la doctrine (3). Aucun cano-niste n'appelle notre attention avec plus de seduction que Sinibaldo deiFieschi, devenu le pape Innocent IV. Sa science, sa personnalite, soninfluence, le mettent au premier rang de nos temoins. L'analyse deson principal ouvrage nous permettra d'apprecier avec une justice ri-goureuse les relations entre les deux droits au milieu du Xlne siede.

    Un tel sujet, ne le dissimulons pas, ne peut interesser que les his-toriens attentifs a la destinee du droit romain dans l'Eglise et dansla civilisation occidentale: au premier rang de ce brillant cortege, lescanonistes, unanimes, placeraient Stephan Kuttner.

    (r) PIERRE LEGENDRE, LA phta"ation dv Moit "OfIIIIin dam le d"oit ca_iqtu, de G"ati4fta I"nount IV (U40-U54), Paris, 1964. STEPHANKUTTNER,Some ComidMations Oll '116Roleof SeCtlla" LAw and Im'itutiom in '116History of Ca_ LafIJ (SCf'itti ... ill _e tli Lvi,i 5''''''0,Bologne, 1953).

    (a) De Savigny a Koschakercette meconnaissance nous etonne cbez les plus grands au-teurs. Nous eherehons a la reparer dans un article de la R.H.D., 1966, n, a, dans une commu-nication au Lincei (19 avril 1966) et dans j"s roman"", Metlii Am (I.R.M.A.E.).

    (3) TUologü et droit roma.n dam l'oe"vre III H_i de Sus, (E'utles ... Ditlie" 1960).

  • Gabriet Le Bras

    I.

    Sinibaldo dei Fieschi avait fait ä. Bologne de fortes etudes dedroit romain. Dans que I ordre, selon que I progres, nous connaissonsmal la formation d'un canoniste de ce temps (4). 11est probable qu'au-cun programme strict n'etait prevu, La vie universitaire permettaitun choix d'exercices et un echange constant de vues entre les elercsstudieux (5). Il a pu entendre les lecons de tous les rnaitres illustresqui enseignaient a Bologne, dans les premieres annees du XIIle sie-de: Laurent, Vincent et Jean le Teuton; Azo et Accurse (6). Son on-ele, eveque de Parme, qui l'avait initie aux etudes, lui procura uneprebende, d' oü il ne tarda pas ä. s' evader pour commencer ä. Romeune prestigieuse carriere: auditeur des Lettres contredites en 1226,legat, eveque d' Albenga, vice-chancelier de l'Eglise romaine, cardinal(en 1227), il fut elu pape le 25 juin 1243. Le 7 decembre 1254, il mou-rait a Naples (7).

    Legislateur, codificateur, regulateur et docteur, son oeuvre ea-nonique est l'une des plus considerables et des plus varices de l'ägeelassique. 11 presida le premier concile de Lyon et publia des de-cretales fameuses (8), qu'il rassembla dans trois collections (9). Sa

    (4) Plusieurs bistoriens, comme Kurtscheid. ont rassernble les rares informations quinous sont parvenues.

    (5) Tel est l'avis que m'ont exprime Kuttner, Wieacker, preoccupes par ce probleme.(6) Innocent n'allägue aucun martre, mais la liste que nous proposons d'apres Diplova-

    taccws est vraisemblable. On pense reconnaltre leur enseignement en bien des passages de I'Ap-paratus et cela est plus important que la presence aux cours, 11serait surprenant qu'un etu-diant appele a si brillante fortune ait ignore une si savante equipe de professeurs, 11cite Alain,Laurent, Sylvestre, Vincent, Jean, et, parmi les romanistes Azon. Ad Extra I, 5,4; I, 29, 28.J. OCHOASANZ, Vincent ius Hispanus, Rome-Madrid, 1960 et A. GARclA, Laurentius Hispa-nus, Rome-Madrid, 1966 n'ont pu rien ajouter sur ce point it Diplovataccius. A. M. STICKLER,II Decretista Lauremius Hispanus (Studia Gratiana, vol. IX), Institutum Gratianum, Bono-niae, 1966,461-599, vient de montrer la place eminente de Laurent dans I'equipe bien soudeedes decretistes et plus precisement parmi les asserteurs de la puissance pontificale. S. souhalteque l'on etudie son influence sur Innocent IV. Aucun recours, chez Laurent, au droit romain.

    (7) Biographie dans la Geschichte de SCHULTE, et dans le D.D.C. (Mgr LEFEBVRE).(8) La plus celebre est Romana ecclesia, Sur la presence d'Innocent it Lyon, et. PHIL.

    POUZET,Le pape Innocent IV Li Lyon. Le Concile de 1245, dans Revue d'histoire de l'Eglis« deFrance, 1929, p. 281-318.

    (9) CH. LEFEBVREdans HiskJire du droit et des institutions de l'Eglise en Occidetü; (H.D.I.E.O.) t. 7, Paris, 1965, p. 243-245. La premiere collection (1245) contient d'abord les consti-

  • Innocent IV Romaniste

    correspondance compte 8352 lettres, trait ant de tous les sujets dudroit (10). Enfin, son commentaire des cinq Livres passe pour rundes chefs-d'oeuvre de la Doctrine c1assique (II).

    C'est dans cet ouvrage celebre, publie apres le concile de Lyon,vers 1250, que nous nous proposons de rechereher la part du droitrornam.

    * * *Le titre lui-meme appelle commentaires. 11ne s'agit point d'un

    veritable Apparatus, c'est-ä-dire d'une glose complete et continue.Bien plutöt, il s'agit d'un melange de tres longues et de longues dis-sertations, de notes breves ou tres breves (12).

    La suite du titre est aussi equivoque. In quinque libros decretaliumne signifiepoint: Gregoire IX. En fait, Innocent IV commente, apreses textes reunis par Raymond de Pennafort, les canons du premierConcile de Lyon et les fragments de la lettre Romana mater qui serapportent au titre (rzbis}. De telle sorte qu'il est le premier glossa-teur du Sexte, un demi-siecle avant la publication de ce code.

    * * *Nous ne pourrions, sans le secours des chiffres, donner une juste

    idee de cette oeuvre monumentale. Aussi bien que personne, nousconnaissons les limites et les pieges de la statistique: mais nous la

    tutions du concile de Lyon. Cf. ST. KUTTNER,Die Konstitutionen des ersten Konzils von Lyon,dans Studia et documenta historiae et juris. t. 8, 1940, p. 70 et s. La decretale Romana, sur lepouvoir metropolitain, est la partie essentielle de la deuxieme collection. Dans la troisierne(1253),8 capitules sont ajoutes aux vingt-deux de la le et aux onze de la lIe. Cf. P. J. KESSLER,Untersuchungen iiber die Novellen-Geset,gebung Papst Innocenz IV. dans Z.S.S., K.A., 1942,1943, 1944·

    (10) Les historiens du regime beneficial, du mariage, des relations entre le Pape et lespouvoirs politiques y ont trouve ample matiere. Nous bomons notre enquete a !'Apparatuset nous excluons tous les sujets traites sans reference au droit romain, par exemple les di-spenses matrimoniales, les affaires beneficiales,si importantes pour le droit et pour la politique.

    (Il) Anterieur a la lIIe collection de Novelles et a la Somme d'Hostiensis (H.D.I.E.O.,VII, 3II), l'Apparatus a ete plusieurs fois imprime au XVI' siecle (1505, 1525, 1570). La Va-ticane en a 9 manuscrits, la Bibliotheque Nationale de Paris, 16. - Nous utiJisons un exem-plaire de l'edition de Lyon, 1578 (aimablement preie par I'Universite de Louvain), la plusmaniable et qui ne me semble pas moins conforme qu'auoune autre aux manuscrits que i'aiconsultes,

    (12) C'est aussi le caractere de plusieurs autres commentaires: ainsi ceux d'Henri Bohic.(rzbts) 39 textes: la lettre Romana est notamment dans Z.S.S., K.A., 1942, p. 156-182.

  • 310 Gabriel Le Bras

    crayons indispensable a un examen scientifique (13). Sur chaque pointnous ne manquerons pas de mesurer la valeur des nombres, de de-clarer leurs merites et leurs imperfections.

    La comptabilite des colonnes consacrees a chaque texte ne nousrevele point toujours la profondeur d'une analyse: comme tous lescanonistes, Innocent IV laisse beaucoup de champ a sa pensee, quibien souvent, s'ecarte de la lettre et meme du sujet de la decretale,commentee: le texte sert de pretexte a des refiexions disparates. Ainsiune decretale d'Innocent III sur la restitutio in integrum en faveurd'une eglise lesee par la. negligence de son procureur suggere a Inno-cent IV une suite de remarques sur les elections, la possession et lespeines (14). Mais ces digressions, reelles ou apparentes, sont nees dela meditation sur un texte precis et la brievete ou l'omission d'uncommentaire signifie son moindre interet pour le glossateur. Ainsinous est revelee l'attention portee par Innocent IV a chaque Livre,a chaque titre, a chaque capitule.

    Les Livres I et II tiennent les deux tiers du volume (15). Certainstitres sont privilegies: en premiere ligne, De electione, De officro etpotestate iudicis delegati, De rescript is (I6). Environ 70 capitules del'Apparatus sont commentes en trois colonnes ou davantage, des-quels une dizaine remplissent 7 colonnes au moins (I7). Contrastentavec ces riches developpements, des lacunes considerables; le LivreIV a He quasiment delaisse (18); des titres, des series de titres sontreduits a petite part (I9). Nombre de capitules appellent seulementquelques lignes (20), la mention de leur incipit, ou meme sont ornis.

    (13) Ap6tre de la statistique, nous en avons toujours indique, en mäme temps que la ne-cessite, les pieges, On nous accordera qu'elte est eclairante sur le chapitre qui nous occupe.

    (14) Ad ExtrA, I, 41, 2. Les exemples de pot-pourri sont innombrables. Voyez encoreAd Extra, I, 6, 7.

    (IS) Sur 374 feuillets, le L. I en occupe 12S, le L. 11, 101.(16) Ces titres ont respectivement 120, 68, 61 colonnes du Livre I pour 132 capitules.

    Trois autres titres d6passent sensiblement la moyenne: De settlmtia excommuKielltionis (48),De accusatioKibus (33), De concessione praebe1fdAe (31).

    (17) Le maximum, 10 colonnes, est atteint par le c. 21, E%t"4, I, 29; les e. 17, E%t,4,3, 8 et 7, Extra, 3, 35 ant 8 colonnes. Les c. 20, E%t,a, I, 3; S4, ibid., I, 6; S, ibid., 2, 6; 48et 61, ibid., S, 39: 7 colonnes.

    (18) Livre IV: 17 feuillets. Les Livres III et V ont, respectivement, 73 et S8 feuillets.(19) Au Livre I: tit. la, 17, 20, 24 la 28; au Livre V: tit. S, 6, 13 la IS, 20, 23 la 26,

    35 et 36.(20) Beaucoup de capitules appellent I öl 5 !ignes; enviran 80 sont seulement signales

    par l'incipit: un seul pour le L. I; S pour L. 11; 19 pour le L. Ill; u pour le L. IV et 43 (plus

  • Innocent IV Romaniste 3II

    ... ... .La methode d'Innocent IV est celle de tous ses contemporains.

    Sauf de tres rares exceptions, il suit l'ordre des textes. Plusieurstitres sont commentes, dans un Proemium, avant la serie des capitules(21). De ceux-ci sont detaches Jes mots qui semblent appeler expli-cation et ce simple choix nous eclaire sur les preoccupations d'Inno-cent et il nous etonnerait si nous ne savions que les preoccupationsd'un savant du XIIIe siecle ne sont pas celles d'un historien du XXesiecle. Ainsi le canon du IVe concile du Latran qui cree, au profitde la Papaute, le monopole de l'imposition des biens ecclesiastiquesle retient a peine et ce n'est pas le Romanus pontifex qui I'interesse,mais la responsabilite des magistrats qui violent I'immunite fiscale(22). Nous y voyons aujourd'hui un moment de l'ascension ponti-ficale, une defense des biens d'eglise que les eveques sont impuissantsa proteger contre les autorites civiles. Pour Innocent IV I'interven-tion pontificale dans toute demande de subsides etait une regle bienassise et l'actualite posait le problerne de la responsabilite des sue-cesseurs de gouvernements qui l'avaient violee.

    On n'attend point davantage d'un canoniste medieval une cons-tante ni meme une frequente originalite: Innocent IV expose lesopinions diverses (Alii dicunt), hesite parfois a se prononcer (Dievel die) et signale que sa decision souleve des doutes (23).

    L'esprit d'Innocent est cl la fois rigoureux et equitable, autori-taire et liberal. 11lui arrive d'infiechir la regle par souci d'equite,de relächer les renes qu'il serait, d'ordinaire, enc1in a serrer (24).Juriste et non theologian i1 est plus pres d'Ulpien que de Jeröme.

    La discussion est parfois conduite selon la forme scolastique:questions, pro et contra, solution appuyee sur references; le plus sou-vent, ces etapes ne sont pas annoncees, l'explication et les autorites

    de la moitie) pour le L. V. La moitie des eapitules du De CQfIsecrlltiolU (S sur 10) et 8 sur 20du De ]wJ4eis (3 autres n'ont qu'l1J1eligne) sont dans ce lot. Une demi-douzaine d'omissions:les plus importantes seraient au titre De ""ivilegiis, on est eliminee la dkretale Super sPeC1lla.Eztf'., S, 33, 28.

    (:n) Ainsi le De officio jflllieis et le De lIS""".(22) Ad Eztf'lI, 3, 49, ,.(23) Ad Eztf'lI, 4, ,. I; 3, 26, 13. Les exempl" sont tr~ nombreux.(24) Ad Ezt"" 3, 26, IS n, 4; 2, 2, 12. Naturellement, il est soucieux des jnter~ts eccle

    siastiques. EJdrll, I, 36 par exemple.

  • 312 Gabriel Le Bras

    se presentent sans appareil didactique. On est loin de l'architecturede saint Thomas (25)·

    * * *A la difference d'Hostiensis (26), Innocent IV ne fait aucune pro-

    fession de foi sur le droit canon (27), aucune declaration de principea l'occasion des decretales Oll les papes avaient pris parti. 11 estremarquable que les trois decretales qui incitaient a la reflexion surle droit civil, aient ete si peu commentees (28).

    Ce qui frappe, cependant, c'est le nombre des references au Cor-pus justinien. lei encore, il y a des titres privilegies. Dans les troistitres consacres aux sources, pour 67 textes, nous avons compte en-viron 200 renvois au Digesie, au Code, aux Novelles.

    11 y a aussi des capitules privilegies, a I'interieur d'un commen-taire, un passage privilegie, all l'on compte autant de references audroit romain que de lignes, beaucoup plus que de references au Cor-pus canoniques (29). Digeste et Code foumissent la plupart des tex-tes (30).

    En revanche, beaucoup de titres sont peu nourris de droit romain.On n'en est guere surpris quand il s'agit des dimes ou des Reguliers,du pallium ou de l'ordination, davantage aux titres de l'election,des ternoins ou de l'appel (31).

    (2S) Voyez par exemple Ad Extra; I, 31, I3i I, '41, IOj I, 42, 5 et IOj 2, 33, I2j3, 5, 28j 3, 34, 8.

    (26) Dans ses Commenla,ja ad c. I (Fi,miter) Extra, I, I. Voyez notre article des EtudesN oil Didie" cite note 3.

    (27) 11s'attache peu au droit naturel, dont il se borne a professer I'inviolabihte. Ad Est,.,1,2, 7 n. 3.

    (28) Ad c. Cleric" Est,.a, 2, I, 8: simple reference a la Novelle Ut clerici. Ad c. S.t-spectdum, Ext,a, 3, 50, 10: ne s'occupe que de I'interdiction scolaire et de ses sanctions, Cf.S. KUTTNER, Papst Htmorius und das Studium des Ziuil,eclsts (Festschrift für Marlin Woll,Tübingen, 1952). Ad c. lntelle%imus, Eztra, 5, 32, I: rien sur la fameuse decision de LuciusIll, declarant le caractere auxiliaire du droit romain.

    (29) Extr«, 2, 12, '1, n. 5: 8 references en 71ignes; I, 4, 2, n. I: 8 en 8 lignes; 2, Ill, Ill:12 en 9 !ignes. Dans ces trois passages, les renvois au COI'{>us canonique sont, respectivement:I, r et 2.

    (30) Pour Estra, I, tit. 2, 3 et 4: Dig.: 132j Cod.: 132; Nou. I7j lnstit.: 8.(31) Des stries de titres n'ont que de rares niferences au droit romain. Ainsi E%I""I L. V,

    tit. 9 a 26.

  • I nnocent IV Romanisie 313

    Ir.Nous nous rendrons un compte exact de la part du droit romain

    dans l'Apparatus en suivant fordre que nous avons toujours proposepour l'etude du droit canon: conception des sources, puis de l'orga-nisation de l'Eglise, de la societe civile, des rapports supranaturels (32).

    * * *Toute la notion de la loi est appuyee sur des textes remains, dans

    les titres 2 et 3 du Livre premier. La concordance est parfaite sur lanature et sur les caracteres de la constitution et du rescrit, sur laformation et l'application des regles (33).

    La theorie de la coutume a de solides fondements romains: unproemium de 2 co'onnes emprunte 26 references au droit romain(34). La preuve que la coutume peut s'introduire sans formalite sejustifie par analogie avec la possession, qui peut s'acquerir sans au-cun acte solennel: 17 textes romains s'alignent en une demi-colonne(35). Que la coutume soit soumise a des conditions rigoureuses, 19textes romains le precisent sur le capitule 10. Le p'us important estde Julien (36) qui, liant le pouvoir de fonder la coutume au pouvoird'edicter la loi, about it en droit canon a subordonner au consente-ment de la hierarchie la validite non seulement de la coutume con-traire au droit naturel et au droit divin (37) qui serait mort-nee pardefaut de raison (capitule r r, explique par 4 textes romains) maistoute coutume contraire aux canons, en somme, aux interets de

    (32) Cet ordre que nous avons souvent justifie, notamment dans les Proltgomenes deH .D.f.E.a. est tripartite: organisation autonome de l'Eglise, rapports de l'Eglise et des fide-les avec la societe civile, relations d'ordre supranatureI. Interieur, exterieur, superieur: telssont nos trois plans. En introduction: les sources.

    (33) CH. LEFEBvRE, dans H.D.1.E.a., t. 7, Paris, 1965. La theorie de la dispense estdeveloppee, Extra I, r r , IS, et 3, 35, 6 sans recours au droit remain. Presque partout aitleurs,le droit romain est imite, copie,

    (34) Ad Extra, x, 4.(35) Ad Extra, I, 4, 2.(3(» Ad Extra, I, 4, 10 n. 3 quod non aliter consuetudo derogat legi; nisi sit inducta de

    comensu UlitIS qui habet jurisdictionem et potestatem faciendi legem municipalem super illa re..."rg. D. de leg. de quibt4s (D., I, 3, 32).

    (37) Qu'elle puisse pourtant ajouter, retrancher a la lettre des Evangiles l'acceptationdes lois romaines sur le nombre des ternoins le prouve.

  • 314 Gabriel Le Bras

    l'Eglise: 9 textes du Code, en 12 lignes, le font entendre aux Poi-tevins (38).

    * * *Lois et coutumes reglent la vie de toute personne et de toute col-

    lectivite. Comme tout canoniste, Innocent IV s'attache a definircapacite et responsabilite de chaque personne physique. Avec uneoriginalite bien connue, i1 decouvre l'identite, les caracteres, la con-dition des epersonnes morales» (39). Ce qui nous interesse ici, c'estle fondement romain de sa construction (40).

    Dans sa vigoureuse dissertation sur les privileges de l'Eglise uni-verselle traitee comme une personne juridique, Innocent allegue unetrentaine de textes romains (41). Pour etablir que, privee d'eveque,l'eglise diocesaine survit avec sa personnalite intacte, il se reierenon point an Corpus canonique, mais au Digeste (42). Le monastereest un collegium dont le droit romain a prevu la nature et les droitspropres (43). Pour determiner la responsabilite civile et penale despersonnesjuridiques, Innocent IV accordeaut ant d'attention au droitromain qu'ä la theologie morale (44). En somme, la theorie canoni-que de l'institution se fonde, en technique, sur le droit romain (45).

    La multiplicite des personnes morales dans l'Eglise, aussi bienque des affaires que devaient traiter par interrnediaire pape, eve-ques, abbes, expliquc la place considerable des problemes de la re-presentation dans l'oeuvre d'Innocent IV. Ils apparaissent tres sou-vent dans des titres speciaux (46) mais encore a propos de mainte

    (38) Ad Extra, I, 4, 3.(39) F. RUFFINI, La classificazio1le delle persone giUl'idic1se ill Sini.baldo dei. Fiese"i (1,.·

    nocen,ro lV) ... dans S"jltj Scaduto, vol. H, Turin, 1898. Le röle d'Innocent est reconnu dansde nombreux travaux recents, Cf. R. ORESTANO, L'assi.milazio1le caM1li.stica degli enti eccle·siastici. ai PNPilli e la sua derivazio1le rOtrflJltistica, dans Etudes Le Bras, II, 1353·13.57. - Surla personnalite de ces enti. cf. P. TIIIBAL, La flU ;uridiqtu des personnes fIfOI'ales eccUsias'iqtusen F,ance aN XIII' et XIV' sücle, ibid., 11, 14:2.5·144.5. L'ouvrage de P. MICHAUD-QUANTIN,Universitas, eclairera I'ensemble et le detail de la doctrine.

    (40) Ad Extra, .5, 31, 14; 5, 39, 5:2.(4J) In c. 49 (Noverit) Extra,5, 39.(4Z) Ad c. I. Extra, 3, 9. Le regime des universitates civiles, precisement des cites, lui

    sert de modele; a un problerne purement canonique, iI donne des solutions romaines.(43) Ad c. 57, Extra, :2, :20.(44) Ad c. 30, Extra,S, 3.(45) A. ROTTA, Natura giuridica e 1000tnedella istituJione nella tloItrina Ili SinibaUo dei

    Fiese"; (Papa 1nlfOC4lt60 VI), dans Arcllivio KlN"idico, 6' serie, rol. 19, fase. 1-2, p. 67-139'(46) Le pr(Xv,rator, It. qui un titre special est consacre, Extra, 1, 38, apparalt dans de nom-

    breux autres titres.

  • Innocent IV Romaniste 315operation juridique, Innocent etend volontiers le cercle des inter-mediaires (47).

    Dans les difficultes quotidiennes entre legats et hierarchie locale,entre delegues et parties au proces, la doctrine comme la Curie pon-tificale ne cesseront de recourir au droit romain. L'etendue des pou-voirs (ou plutöt ses limites) trouvait la des arguments: les reservespontificales correspondaient cl l'intransmissibile merum imperium (48).Tres minutieusement, Innocent developpe les regles de la subde-legation (49).

    Toutes ces relations dependaient de la conception de l'echellehierarchique. Innocent IV reconnaissant au Pape les pouvoirs del'Empereur: legislatif, administratif, judiciaire, executif, allegueles textes romains. 11appuie sur le droit romain la notion de pou-voir ordinaire et il eherehe dans les offices romains une correspon-dance aux legations (50), encore qu'il refuse la soumission des digni-tes ecclesiastiques au droit civil (SI).

    Les elements de la puissance ont pour support les textes romains,qu'il s'agisse de l'autorite, de la richesse ou des prestiges. Innocent IVleur emprunte la notion de jurisdictio, d'imperium (52), avec tousses attributs, l'explication de tous les actes de la procedure et le sta-tut des personnes qui y sont impliquees: le regime des biens eccle-siastiques et jusqu'ä I'idee des honneurs..

    Innocent IV declare qu'aucun droit seculier ne s'occupe des cho-ses ecclesiastiques, 11exagere. La division des choses, I'inalienabilitedes biens ecclesiastiques suggeraient quelques recours au droit ro-main (53).

    On pourrait tirer d'Innocent IV un traite romain De actionibus

    (47) Sa preoccupation est qu'aucun droit ne reste sans detense.(48) Ad Extr4, I, 29, 37 Renvoi a D. I, 21, I.(49) Ad Extra, I, 29, 27. G. G. PAVLOJrF, Papal judge delegates at tll$ time Of the Corpus

    tINis callOftiei, Diss. de la Cath. Univ. Washington, 1963.(50) Ad Extr4, 1,30, 3, n. 2: legatus emm est judex ordinarius C. de ou. rec. pravi". qui ord.

    pia 1t4be# imperium. fJ. tU o{fi. prtHX1ff. I. et itUQ. legatum enim si est ex C4rdinalÜJ1l&simile diet-",," prOCOflSwiM. de o{fi. pro. COfI. I. I et wt. alios autem legatos singldos similes diei",us pru-sitlibus Mp. O. de o{fi. praesid.l. I La comparaison se poursuit avec 5 autres textes du Digeste.

    (SI) Ad c. 7, Extr4, I, 23, n, 2.(S2) Ad Extr4, I, 29, 27: distinction du merum et du mixt"m imperium. EpiscoPi qU4si

    _um imperium 1I4bml: c'est un de leurs traits specifiques.(53) Voyez ad Extra, 3, 26, 5. Le titre 13 du L. 3, De ,ebus ecclesiAe no" alimandis, sug-

    gm une cinquantaine de textes romains.

  • Gabriel Le Bras

    (54). Aueune dissertation aussi purement romaine que celle qui con-ceme l'office du juge (55): 65 references au Code et au Digeste (en unecolonne et demie). Plusieurs capitules au titre des preuves, en part i-culier du serment; telles difficultes mineures sur l'appel, sur la pur-gation vulgaire ou le desistement, sont farcies de droit romain (56).Les peines qui frappent le pecheur sont doublees de celles qui frap-pent le delinquant (57). En matiere civile, le droit romain fournit lesregles de la restitutio in integrum (58).

    * * *Sur les rapports de l'Eglise avec la societe civile, de la structure

    et de la vie de la Chretiente, Innocent professe, outre certaines opi-nions communes, quelques doctrines originales bien connues (59):nous y releverons la part du droit romain.

    La jurisdiction du Pontife romain s'etend a l'univers. D'abord,cela va sans dire, a tous les chretiens, qui peuvent recourir a lui,omisso medic (60). Plus etroitement aux princes, qui, de jure, lui sontsubordonnes, fussent-ils empereurs, comme l'eprouva Frederic II (61).Plus largement, a tous les hommes, fussent-ils infideles (62).

    (54) Non seulement le commentaire du Livre II mais celui de tous les capitules qui pre-voient une sanction se conforment au droit romain, sauf sur quelques points qu'enumerentles Differentiae. Cf. J. POR-TENER,Recu,ches sur les Ditlerentiae juris civilis et canonici ... Paris,1946. Il serait interessant de relever les options d'Jnnocent: par exemple, son usage de la con·dictio e:f canone, imitee de la condictio e:f lege.

    (SS) Ad Extra, 1, 32, 2 n. 2. Cette remarquable dissertation enumere, sur le mot P,inci·paliter tous les cas d'intervention du juge.

    (56) Ad Extra, 2, 28, 42 et 72; 5, 35, 2; S, 22, 2.(S7) ST. KUTTNER, Kanonistische Schuldleh,e, Cittil del Vaticano, 1935·(58) Ad Extra; I, .p, 3.(59) J. A. C....NTINI, De avtonomia ;udicis secula,is a de Romani PonIi/icis plenitudine po·

    testa/is in temporalifJus secundum Innocent;um IV dans Salesianum, 1961, p. 407'480; M. P ....•CAUT, L'autorit8 ponti{icale selen Innocent IV, dans Moyen Age, 66 (1960), p. 85-lIS. Voyezaussi ULLMANN dans Atti del Gonvegno interna8ionale di studi federiciani, Palerme 1952 etF. KEMPF, Die päpstliche Gewalt in der miltelalt. Welt, qui date d'Jnnocent IV la plenitudede la hierocratie (contrairement iI Ullmann, qui remonte bien plus haut). Cf. encore B. TIER·NEV, The Continuity 0/ papal political Theot'" in the X/lIth Cent",,,, dans Mediaeval Studies,1965, p. 227-245. - A. RIVERA DAllAS, Pensamiento politico de Hostiensis, Zürich, 1964,tient au contraire Hostiensis pour duaJiste.

    (60) 11est Ordinaire de tous les chretiens.(6I) Ad Exu«, 2, 2, 10.(62) Le fameux c. S Ad En,a, 3, 34, qui traite des rapports de l'Eglise ave

  • Innocent IV Romaniste 3I7

    A la Chretiente, nul ne peut etre contraint d'adherer par le bap-teme. Mais la liberte religieuse n'existe qu'au profit des non-bapti-ses: les baptises, s'ils versent dans l'heresie ou le schisme, peuventHre contraints selon la loi romaine (63).

    Les princes sont soumis aux regles du droit canon dans la guerreet dans la paix. Et ces regles concordent avec celles du droit romain,pour le declenchernent et la conduite de la guerre (64); pour le gou-vernement pacifique des Etats (65).

    Si les conceptions politiques d'Innocent IV sont clairement de-finies, leur place dans le developpement de la hierocratie reste con-troversee (66). A-t-il depasse la position d'Innocent Ill, directementinspire Boniface VIII? Le droit romain n'apparait guere dans lecommentaire des decretales oü Innocent III pose les principes desrelations entre les deux Puissances (67). Toutefois, on ne trouveraitguere en d'autres ecrits du XIIIe siede, une dissertation mieux nour-rie sur les libertes ecclesiastiques (68): 30 lois du Code et du Digestejustifient les privileges spirituels et temporeis accordes de droit divinou par le Pape et les princes - de droit humain, a l'Eglise hierarchi-que et a la communaute des fideles et, d'autre part, les peines por-tees contre les violateurs de ces privileges (69).

    En adopt ant les maximes romaines du pouvoir supreme, Innocents'attribuait dans la Chretiente, composee de tous les baptises, uneautorite qui ne pouvait Hre moindre que dans l'Eglise. Cette con-clusion etait impliquee, nous l'avons dit, dans la formule irenique

    caractere politique. Cf. G. VISMARA,[",piu", joedus, Milan, 1950. Voyez pour la periode ante-rieure: FR. MARGIOTTABROGLlOdans Etudes ... Le Bras, H, 1071-1085. - Ad Extra,S, Z, I:Canonum condiiori et creatoris »icario subdita est omnis creatura.

    (63\ Accord naturel entre Extra,S, 7 et C. J, I, 5.(64) Innocent justifie la guerre de recuperation (surtout quand iI s'agit de recuperer la

    Terre Sainte) et l'appropriation des biens dans la terre occupee, 11Pissue d'une guerre juste.Ad Extra, z, 13, 12: 8 textes de droit romain; 3, 42, 4; 2, 24, 28.

    (65) Ex.: ad Extra, 2, 2, 8: Cogendi sunt seculares potestates censuris ecclesiasnci« iusti-tiam ministrare. Sur I'Etat, Innocent ne professe d'opinion que concern ant les rapports avecI'Eglise, eventuellement les devoirs de la puissance.

    (66) Voyez, l'excellent article de l.A.WATT, The Theory of papal Monarchy in the thirteenthCentury: the Contribution Of the Canonists, dans Traditio, vol. XX, 1964, oü l'originallte d'Jn-nocent IV est reduite au profit d'Tnnocent Ill, p. 2, 236-25°.

    (67) Ad Extra, I, 6, 34; I, 33, 6; 2, I, 13; 2, z, 10.(68) Ad Extra,s, 39, 49. Texte capital, sans equivalent sur ce point dans la litterature

    canonique.

    (69) Si les lalcs ne peuvent legif6rer en mattere eCclesiastique, le pape a le pouvoir de ra-tifier.

  • Gabriel Le Bras

    de Gelase et, depuis Gregoire VII, elle avait regulierement progresse.Boniface VIII ne fera qu'en donner une expression rigoureuse (70).

    Structure et vie de la societe civile n'ont point suscite chez In-nocent beaucoup de pensees originales.

    La conception canonique de la famille est, naturellement, con-fortee par des textes romains. Dans son rapide commentaire du qua-trieme Livre, Innocent n'allegue le droit romain que sur trois points:la filiation, le regime des biens et les secondes noces. La preuve de lalegitimite, la competence du juge ecclesiastique les suites immedia-tes de sa sentence evoquent, en moins de 4 colonnes environ 70 tex-tes romains (7I). Une discussion serree sur les personnes qui ne peu-vent sans mandat, impetrer des lettres apostoliques souleve le pro-bleme des agnats et des cognats, et met en cause les opinions contradictoires des Romains sur les enfants naturels: Innocent se declarepour la plus humaine (72). Dot et donation nuptiale ant He si bienreglementees par le droit romain, qu'Innocent IV se borne a rappe-ler cette facile concordance (73). Au contraire, la legislation sur lessecondes noces presente des discordances: Innocent IV explique lerejet par l'Eglise des peines infligees a celui qui se remarie pendantl'annee de deuil (74).

    Pour determiner le rang dans la societe, Innocent IV recourt audroit remain, qui definit maiores et minores (75). Renommee, fonc-tions, dignites classent parmi les majores. Les minores appartiennentsurtout aux professions viles qu'enumere une constitution de Valen-tinien et Marcien (76). Dans le clivage et la protection des misera-biles personae, Innocent IV se souvient de Constant in (77).

    Dans le domaine des affaires, Innocent s'abandonne presque corn-pletement, comme les Decretales, au droit romain. Les nombreuses

    (70) Notre art. Btmi/ace VIIJ, symplwntsle et modefateur, dans Mllanges HlÜp1len.(71) Ad Eztra, 4, 17, 5 et 7.(7z] Ad Extra; I, 3, 28, n. 8 et 9. Une dizaine de textes remains en une demi colonne.

    Innocent rejette la solution dure qui refuse aux enfants natureis le nom de fils, les aliments,les droits de succession.

    (73) Ad Eztra, 4, 20, 7 et 8: moins de deux col., une trentaine de references au droitromain. Cf. P. VACCARI, dans E,tuks Le Bras, n, 1005.

    (74) Ad E-ara, 4, 21, 5.(75) Ad Extra, I, 3, 15·(76) Ad Ezt,a, 3, I, 12 (histrions); 3, 50, 1 (eommereants deshonnetes), Cf. C. J., S· S, 7.(77) Ad Extra, 1, 29, 38, cf. C. 3, 14, I; Etdra, 5, 41, 26.

  • Innocent IV Romaniste

    decretales qui concernent les obligations sont une copie presque in-tegrale des lois romaines qu'Innocent IV rappelle copieusement.TOllte la legislation des contrats consensuels et reels est fondee surle Code et le Digeste (78).

    On ne s'etonnera point que (malgre les dissonances) le De testa-mentis s'inspire longuement du meme titre au Corpus (79): mais onpeut etre surpris de l'abondance des commentaires d'Innocent IVsur la succession legitime, veritable traite des lois et senatusconsultes,particulierement du Trebellien (80).

    * * *Au sacre, le droit romain offre peu de concours dans l'Apparatus.La Sainte Trinite, les Saints, la garde eucharistique, sujets de ti-

    tres dans les Decretales de Gregoire IX font peu d'echo au Code etau Digeste. Point davantage, les pratiques religieuses: assistance clla messe, communion pascale, jeüne, pelerinages (8r).

    En revanche, les relations privees avec les puissances suprana-turelles ayant preoccupe les Romains, leurs lois offraient cl la doctrinecanonique du voeu l'appui de quelques textes et cl la doctrine dusennent, d'un nombre important. Les 7 Capitules du titre De jura-mento calumniae evoquent 51 textes romains, dont vingt pour le seulcapitule 7 (82). On s'etonnerait que le voeu, si familier aux Romains,n'eveillä.t jamais chez Innocent IV leur souvenir si l'ori ne conside-rait le caractere profane du De poUicitationibus au Digeste et memedu De voto aux Decretales (83).

    11 est important de marquer l'absence du droit romain dans ledomaine du sacre, Tandis que la Glose ordinaire invoque le droitromain aux titres De sepulturis et De reliquiis et venerauone sancta-rum, l'Apparatus d'Innocent s'y rapporte cl peine (84).

    (78) Ad Enra,1, titres 14 a 21. 1I s'agit d'un veritable repertoire des textes romains,auxquels les papes sont constamment fideles. Tous les textes romains concemant les condi-tions tacites sont enwneres ad Extra, 2, 24, 25.

    (79) Ad Extra. Comparez Extra, 3, 26 et C. l-, 6, 23.(80) Ad En,a, 3, 26 c. 16 et 18. Sur ce c. 18 (Raynaldus), plus de 30 textes de droit remain,(81) Son laconisme est remarquable sur les sujets oü le droit romain ne lui fournit aucun

    texte, en general, tous les titres qui sont speci6.quement chretiens,(82) Ad En,a. 2, ,.(83) Les dieux sont caches dans ce titre du Digeste, 50, 12. Et dans Extra, 3, 34 oü le

    principal sujet est la commutation.(84) Extra, 3, 28 c. 45. Rares references, en de copieux döveloppements.

  • 320 Gabriel Le Bras

    * * *Explicatives, extensives DU simplement ornementales: les refe-

    rences au droit romain alternent ces roles. Tantöt, il s'agit d'expli-quer un mot ou une regle ou une institution.

    Les explications par le droit romain forment le groupe le plusdense. 11 s'agit de definitions, d'identifications, de veritables g'oses.Toutes les definitions du Digeste sont acceptees (8S): ce qui signifieun langage commun aux deux droits: par le vocabulaire, Innocent IVse lie etroitement a la jurisprudence cIassique. Il constate un lienetroit dans les emprunts textuels de lois ou de petits fragments duCode et du Digeste (86). Plus souvent, taus les textes romains quiprecisent ou limitent, appuient ou contredisent une decision sontenumeres: la glose est fournie par le droit romain (87).

    Dans taus ces cas, Innocent IV, ne fait qu'incorporer le droitromain au droit canon. 11y a des cas, plus rares, oü il dilate le droitromain au profit du droit canon. Un exemple de cette extension nousserait donne par l'assimilation du praeceptor des Templiers a l'in-stitor (88). Chaque fois qu'il decouvre une analogie, l'enrichissementdu droit canon par le droit romain, et, a vrai dire, de l'utrumqueest manifeste (89).

    Parfois, la decretale est si peu sujette a discussion que les textesromains sont comme un decor, un luxe d'erudition (90)? Quand lesdeux droits semblent en desaceerd. Innocent IV le constate ou lesignale avec delicatesse ou meme suggere un accord discret. Le si-lence peut nous surprendre. Ainsi, la prohibition de l'usure justifieepar les deux Testaments, fait l'objet de developpements theologiques,sans aucune allusion aux dispositions contraires du droit romain(91). De meme, la necessite de la bonne foi continue est referee' au

    (85) Voyeznotamment, le De verborum significatione. II y a cependant, des elargissementspar exemple sur le sens d'alienafio.

    (86) Ad Extra, 5, 3~, 26.(87) Ad Extra, 2, 2, 4.(88) Ad Extra, 2, I. 16,V. Praeceptores: hos comparo institoribus. Innocent compare le

    praeceptor ill'institor et renvoie a Dig. 14, 3; texte tres interessant pour I'adaptation de l'ad-ministration des biens eccleslastiques a des regles du droit romain.

    (891 Ad Extra, 2, 2, 12.(go) P. LEGI!NDRE a fait de ces references de luxe une des classes dans la typologie des

    gloses, Innocent IV en fournirait beaucoup d'exemples.(91) Ad Extra, 5, 19,

  • Innocent IV Romaniste 321

    for interne (92), la simplification du testament, au for ecclesiastique(93). La sanction du pacte nu se presente comme un accord avec lejus civile (94). Il arrive que la difference entre les deux droits soit,d'un mot, annoncee. La sollicitude d'Innocent IV va jusqu'ä eher-eher des attenuations, des conciliations, voire des justifications laoü semblait regnet la discorde.

    III

    D'oü provient ce magnifique florilege de droit romain?On ne peut supposer qu'Innocent IV avait en memoire tout le

    Corpus justinien! Disposait-il de repertoires, de tables (95)? Le cer-tain, c'est qu'il pouvait avoir sous les yeux des comrnentaires duDecret, des Quinque (96) et des Decretales de Gregoire IX. Il connais-salt Geoffroy de Trani, Vincent d'Espagne, Guillaume Naso. D' A-zon, il possedait sürement Summa et Lectura (97); d'Accurse, la gbseordinaire. Il est difficile de savoir, dans la plupart des cas, le modelequ'il a exploite, a cause de la parente normale entre tant d'auteursdont la coutume est de se faire des emprunts generalement inavoues.Le vrai problerne (que nous avons eherehe a eclairer) est de discernerla part originale - menue chez les plus celebres - de la critique etde l'originalite,

    Bernard de Parme avait public les deux premieres formes de saGlose, il elaborait la troisieme au moment oü Innocent composait sonApparatus (98). Comment determiner les rapports entre ces deux ou-

    (92) Ad Extra; 2, 26, 5 et 20.(93) Ad Extra, 3, 26, 10: ad Pills causas; 3, 26, 1I: la piete selon certains, s'etend aux

    legs faits aux proches; il serait grave que le pape s'opposät d'un mot, a un droit civil; plusieurspensent que le canon ne vise que le for ecclesiastique.

    (94) Ad Extra; I, 35, I vG Pacta legitima: le preteur est draccord; 36, 4: A utkoritas pyin-ciPis sive legis ex nudo pacto dat actionem.

    (95) Les repertoires ne paraissent qu'au XIV' siecle dans la litterature canonique. MaisiI y avait des le XIe siecle des florileges, extraits, recueils de references au droit remain cf.J. GAUDEMET, Le dmit romain dans la pratique et eke! les docteurs aux XIS et XII' siecles.

    (96) Quelques sondages nous ont indine it croire qu'Tnnocent est plus proehe de Tauerede-Ainsi, sur le c. Quemadmodum, Extra; 2, 24, 25, les references sont identiques. Cf. Tancrede,B. N., 3931 A, f. 169, recto: Rien de commun avec Laurent B. N. 15 398, f. 145.

    (97) 11 cite Am ad Extya, 2, 25, 6. Une comparaison entre les textes communs ou pa-ralleles semble exclure une parsnte proche.

    (98) ST. KUTTNI!R et B. SMALLEY, The Glossa ordinaria to the Gregorian. Decretals; dansThe English Historical Review, 1945, p. 97-105.

    21. Studia Gratiana - vol. XI.

  • 322 Gabriel Le Bras

    vrages? Une comparaison des textes montre ala fois des differences (99)et des ressemblances qui denoncent une parente: a savoir si elle estdirecte ou collaterale, c'est-ä-dire issue d'auteurs communs? Nousne pouvons proceder que par sondages: dans chacun des cinq Livres,nous avons choisi quelques textes pour cette operation.

    Notre premiere certitude est que l'ampleur des commentairesest tres differente dans les deux ouvrages: Bernard proportionne sesexplications au texte de chaque capitule, sans lacune et sans gon-flement: il s'agit d'un apparat exernplaire. La Glose explique les mats,tandis qu'Innocent developpe les idees que lui suggere le texte et qui,parfois, n'ont aucun rapport direct avec lui: on n'en trouverait meilleurexemple que le commentaire de la lettre d'Innocent III a I'archeve-que de Canterbury au sujet des voeux de croisade qui ne peuventetre executes (100). Les mats gloses par Bernard et par Innocentties souvent ne sont pas les memes (101).

    Toutes differentes sont leurs preoccupations. Pour nous en tenira quelques textes OU domine le droit canon dans le c. 37 du IVe conciledu Latran la Glose ordinaire s'attache a determiner les cas oü un man-dat special doit s'ajouter a la procuratio; Innocent, les personnes dequi un mandat ne doit etre exige (ID2).

    En la plupart des cas, les references au droit romain sont plusnombreuses dans la Glose; mais il arrive qu'Innocent soit plus eo-pieux (ID3). Entre Ies maximes de la Glose et ce1les d'Innocent IVpresqu'aucun rapport, soit pour les titres soit pour les capitules (104).Certains textes, de caractere pratique, sont minutieusement expli-ques ou justifies par la Glose ordinaire: leur insignifiance doctrinaleles a fait negliger par Innocent (alors qu'il semble avoir la la glose)(105)·

    (99) Dans une quarantaine de canons des L. I et 1I, pris au hasard, les diff~rencessont presque totales.

    (lOO) Extra, 3, 34, 8.(101) Des mots importants (ainsi legitime praesC1'ipta, dans Extra r, 4, Ir) que la Glose

    ordinaire interprete par une masse de textes romains ne sont point gloses par Innocent. Lesexemples sont nombreux de ces discordances.

    (IOZ) Ad Extra, I, 3, 28.(103) Innocent, ad Extra, I, 32, 2: 75 references au droit romain, Glose ordinaire: 20;

    Innocent ad Extra, 5, 39. 49: 25 rt!ferences, Glose ordinaire: I.(104) Exemple: Extra, I, 36, I; 4, 10; 6, 3; 7, 2; 11, I, 14; 2, 12; 2, 26; Ill, IS, I;

    17, 4 et 7·(105) Exemple: ad Extra, I, 13, 21.

  • I nnocent IV Romaniste 323

    Cependant, il est des cas OU l'analogie, voire l'identite, des refe-rences est patente. Ainsi, le c. 4, Extra, 3, 17 evoque, chez Bernardet chez Innocent, en quelques lignes et sous des mots divers, les me-mes lois au Code justinien: les II appels d'Innocent correspondentaux appels de Bernard (106). Pour justifier les exceptions au prin-cipe de l'initiative personnelle en justice, Innocent invoque les me-mes textes romains: avec peu de variantes (107). Les cas de trans-fert sans formede la possessionsont enumeres de facon identique (108).De telles identites sont rares. Elles laissent supposer un emprunt. Laprecision plus grande de la Glose autorise a la considerer commecreanciere. Probablement peut-elle invoquer le rneme titre dans descas nombreux Oil le parallelisme des references, la richesse superieurede la Glose eveillent pour le moins le soupcon (109). Parfois, la ren-contre etait inevitable parce que les canons s'inspiraient de textesprecis du droit romain et aussi, on peut supposer une source com-mune plutöt qu'un secours mutuel.

    D'emprunts de la Glose a l'Apparattts nous n'avons releve aucunepreuve solide: les dernieres formes, qui auraient pu s'inspirer d'In-nocent, ne renvoient qu'ä ses decretales.

    ... ... ...

    L'Apparatus nous donne une bonne mesure de la penetration dudroit romain dans la doctrine canonique, un exemple saisissant del'utmmque. I1 n'est qu'un des exemples illustres de l'alliance entreles deux droits (lIO).

    Cette invasion du droit romain signifie-t-elle que le droit canonest devenu science profane?

    Si l'on compare l'oeuvre d'Innocent IV au premier monumentde la science canonique, le Decret de Gratien, on est frappe de ladifference des matieres et des sources. Gratien ne fait guere de placeau pur profane: legitimation, arbitrages ou contrats; les Ecritureset les Peres sont au premier rang de ses autorites. Innocent traite

    (106) Ad Extra, 3, 17, 4·(107) Ad Extra, Z, I, 14.(108) Ad Extra, I, 4, 2.(log) Exernple: Ad Ext,a, 1, 35, 1; 2, 2, 4, aux mots Compellat et Lege.(IIO) Voyez ma communication a PAcademie des Lineei Droit ,omain et d,oit canon au

    X/lIe sikle et ma contribution a /RMAE .• Y a-t-il distinction plus fioue que la separationdes auteurs en romanistes et canonistes s LEGENDRE,dans Etudes Le Bras, p. 919.

  • 324 Gabriet Le Bras

    taus les sujets du droit civil; il invoque tres rarement les Ecritureset ne cite presque jamais les Peres (Ill).

    On s'etonnerait de la rarete des recours aux Ecritures, si les ca-nonistes n'avaient depuis longtemps separe le juridique et le bibli-que (IIZ). Des institutions inspirees droitement des Livres saints,comme la denunciaiio euangelica sont commentees sans appel auxtextes de base; les principes tires de l'Ancien Testament ne sont pointrapportes a leur source (1I3). De la lettre des Evangiles, le Pape peutdispenser, pourvu qu'il respecte i'esprit (II4).

    * * *Cependant, Innocent ne se distingue pas seulement des roma-

    nistes professionnels par l'objet de son travail, qui est la disciplinede l'Eglise et par son fondement qui est le code de Gregoire IX.11est preoccupe du dogme et surtout de la morale du christianismeDans le Proemium, il declare son dessein et dans tout son ouvrage,il le suit (lIS).

    Moins preoccupe de la science que de la foi, il rappelle a taus ledevoir d'une adhesion au mains implicite aux verites essentielles,qu'il definit sobrement dans les titres relatifs aux sacrements (n6).Ses preoccupations morales se manifestent toutes les fois que le

    (Ill) Depuis un siecle, la Papaute a dü traneher des difficultes sur tous les sujets du droit;son autorite, qu'elle fonde sur les Ecritures, s'est substituee a celle, purement morale, des Peres.Cependant, si les Peres sont unanimes, il faut les suivre, usque ad unum iota. Ad Extra, I, 2, 5.

    Innocent declare l'autorite des Prophetes, Ad Extra, 2, 25, 6; explique, de Luc, le Com-pelle intrare, Ibid., 3, 42, 4; demande a Paul le sens Cl'alienatio;Ibiä., 3, 13, 4; aux deux Tes-taments la condamnation de l'usure Ibid., 5, 19, Proemium et a toute I'histoire sainte le fon-dement du pouvoir pontifical (ibid., 2, 2, 10), qu'iJ appuie sur Matthieu. Ad Extra, I, 4, 4.Simple allusion ad Extra, I, 6, 4.

    (112) Voyez notre article des Melanges ehenu (I967).(113) Ainsi, dans le long commentaire sur la denonciation evangelique, ad Ext,.a, 2, I, 13,

    aucune reference a l'Evangile.(1)4) Sur les rapports du droit canon avec le droit naturel, (id est: le droit des gens) et

    l'Evangile cf. ad Extra, 1, 2, 7, le pape ne peut tollere, mais iI peut distinguere, detrahere; ad-dere et adjuvare. Ainsi exiger plus de deux temoins. I1 doit respecter non la lettre mais I'esprit:Ad Extra. 1,9, 11. De merne a l'egard de Paul, 1,21,2: Major est papa quam Paulus in admi-nistrtüione. La theologie ne paralt principalement dans le premier titre des Decretales, Desumma Trinitaie et de fide caibolica et elle est sous-entendue presque partout ailleurs. Innocentla fait surgir parfois de farron inattendue, ainsi Ad Extra, 2, 7, 7 oil est rappelee la distinctionaugustinienne de la croyance et de la science.

    (lIS) 11 veut faire penetrer dans l'esprit et la conscience des chretiens, specialement desjuges, i'esprit des Ecritures et des decretales.

    (II6) Voyez, par exemple, Ad Extra,S, 38, 4·

  • Innocent IV Romaniste 325salut de l'äme est mis en cause par le peche. 11insiste naturellement,sur les manquements a la discipline. Mais il n'exclut point certainsaspects de la theorie generale et de la casuistique: permission com-parative, tolerance, dissimulation du peche pour eviter le scandale(Il7)·

    Un de ses soucis constants est la sauvegarde du spirituel. Lesengagements envers Dieu l'emportent sur ceux qui sont pris enversles hommes. Meme illicite, un serment doit etre tenu: celui qui a jurede payer un supplement usuraire y sera contraint et le creancier seracontraint a le restituer (Il8).

    Ainsi, la science canonique s'etant detachee de la science globalede la Divinite, garde son caractere de science religieuse. Son allianceetroite avec le droit romain n'a point rompu ses liens etroits avecla theologie. Dans l'utrumque subsiste un element sacre, qui distinguele droit canon de tous les droits profanes.

    * * *Quelles furent, pour le droit romain, les consequences de l'oeu-

    vre dInnocent?Par sa diffusion et son autorite. elle imposa l'etude et la medita-

    tion des textes romains dont elle assortissait les textes canoniques.Aucun lecteur ne pouvait utiliser 1'Apparatus sans une connaissanceapprofondie du Corpus justinien. Comment les successeurs, les ad-mirateurs d'Innocent auraient-ils pu meconnaitre la place conside-rable du droit romain dans la formation et l'interpretation du droitcanon (II9)?

    Les commentateurs du Sexte avaient sous les yeux la penseed'lnnocent sur ses propres decretales, avec tout leur florilege de droitromain. Quel usage en a fait Jean Andre dans la Glose qui devintordinaire? Qu'il eut sous les yeux l'Apparatus d'Innocent, cela vasans dire. Qu'il en fasse quelque usage, il le declare incidemment(120). Il lui arrive de transcrire des passages brefs (121). Mais, en

    (117) Ad Extra, 5, 19, 3·(IlS) Ad Extra; 2, 24, 20.(119) Us canonistes obligeaient leurs lecteurs a se faire romanistes. Cf. L'Eglise Me-

    diJvale au service du droit Tomain, dans R.H.D., I966.(120) Fece,it et Recusare ad Sextum, I, 3, 3; Prouisionem, I, 6, I; Vel extra, 2, IS, I;

    Exf'ressa, 2, IS, 3; Plene, 3, 20, I; Tractaius; 3, 9, I.(121) Ainsi sur le mot Plene, 3, 20, I; Conseruaiores, I, I4, I.

  • Gabriel Le Bras

    general, i1 Y a peu de ressemblance entre les commentaires de JeanAndre et ceux d'Innocent IV: la disproportion du volume est consi-derable (122), les mots gloses sont differents (123), les preoccupationstout autres (124), et aussi, les references au droit romain (125).

    Pour bien mesurer l'influence d'Innocent IV une triple enqueteserait necessaire: chez tous les canonistes, jusque dans les tempsmodernes; chez les principaux romanistes; dans la pratique judi-ciaire (126). On aboutirait sans doute a la conclusion que la renommeed'Innocent fut au moins egale et probablement superieure a sa ve-ritable originalite,

    • • *L'important est qu'il eut, au milieu de tant de plagiaires, une

    certaine originalite et au milieu de tant d'oublies une veritable re-nommee, qu'il ait contribue, par son autorite. a la construction del'utrumque, cl l'alliance etroite des deux droits qui, intimement unis,ont regi les demiers siecles du moyen age, et dont l'alliance a posequelques-unes des fondations des droits contemporains.

    (I22) Tantöt beaucoup plus long ehe>: Innocent [Voyez , pax exemple ad Extra; I, 6, 6et Glose ad Sextum: I, 6, I; ad Extra, I, 29, 44 et Glose ad Seuum, I, I4, I; ad Extra,s, 39;61 et glose ad Sextum, 5, II, 2; tant6t beaucoup plus bref (ad Extra, I, 6, 62 et glose ad Sex-tum, I, 6, 2; ad Extra, 5, 39, 66 et glose ad Sextum, 5, II, 7.

    (123) Compares, par exemple, la glose ordinaire du Sexte et l'Apparatus, au titre DeSente1ltia excommunicati