STATIONNEMENT ET MOBILITÉ URBAINE SPÉCIAL PARKOPOLIS · locales avec le stationnement. « Avec la...

12
ÉDITO La 14 e édition des Rencontres Parkopolis a une nouvelle fois mis en avant le dynamisme des métiers du stationnement au service des politiques locales de mobilité. Les nombreux visiteurs de ces Rencontres ont ainsi pu découvrir les nombreuses innovations présentées par les exposants et participer aux quatre conférences plénières qui répondaient à des grandes questions d’actualité en matière de mobilité, d’urbanisme et de vie des centres villes. Le stationnement occupe une place centrale dans ces politiques locales. La présence de nombreux élus nationaux et locaux représentants des villes moyennes, des grandes villes et des métropoles en atteste. La participation de députés à la table-ronde consacrée aux grands chantiers de l’aménagement urbain en est une autre illustration. Organisées en partenariat avec le groupe InfoPro Digital, et pour la première fois en partenariat avec l’Association des Maires de France, les Rencontres Internationales du Stationnement et de la Mobilité, Parkopolis, répondent ainsi aux préoccupations des décideurs publics pour la mise en œuvre de leurs politiques locales. Nous vous donnons d’ors et déjà rendez vous pour une 15 ème édition pleine de nouveauté dans deux ans ! Jean-Laurent Dirx, Président de la FNMS Selon un expert de PWC France, qui s’exprimait lors du dernier Mondial de l’Automobile, d’ici 2030, la mobilité dans les villes sera : autonome, électrique, partagée et connectée. Soit quatre perspectives qui ont en commun l’intégration de nouvelles technologies pour permettre son essor. Des révolutions qui vont également en entraîner d’autres, notamment du côté des constructeurs automobiles, des acteurs publics… En d’autres termes, le secteur de la mobilité se retrouve en pleine mutation, ce qui impactera forcément celui du stationnement. Mais de quelle manière ? Comment roulerons-nous d’ici 5 ou 10 ans ? Nos intervenants esquissent les contours des mobilités de demain. VOITURES CONNECTÉES, VÉHICULES AUTONOMES ET OUTILS DIGITAUX : VERS QUELLE RÉVOLUTION ? LA VOITURE AUTONOME SERA D’ABORD PARTAGÉE Premier à apporter un début de réponse : Jean-Laurent Dirx – Président de la Fédé- ration Nationale des Métiers du Station- nement (FNMS). Évoquer la question de la mobilité de demain est forcément pertinent pour le monde du stationne- ment. En revanche, si l’arrivée des voitures autonomes dans le paysage urbain est inéluctable, la façon dont elles occuperont l’espace reste pour l’heure incertaine. En effet, parler de voiture autonome pour le transport individuel d’ici 5 à 10 ans, c’est encore prématuré. « Les véhicules autonomes seront d’abord collectifs », temporise-t-il. « Mais dans 15 ou 20 ans, la question des véhicules autonomes à usage individuel se posera et il faudra bien les accueillir dans nos parkings ». Selon Jean-Laurent Dirx, la réflexion doit être menée à court mais aussi à moyen terme. Du côté des acteurs publics, le sujet est déjà sur la table des discussions. Laura Brun – Chef de projet Compte Mobilité – Pôle Mobilités et Transports – Mulhouse Alsace Agglomération (m2A), témoigne au nom de sa commune. « À Mulhouse, nous répondons actuellement à un appel à projet Interreg baptisé FAVAS. Celui-ci STATIONNEMENT ET MOBILITÉ URBAINE SPÉCIAL PARKOPOLIS Juillet 2019 STATIONNEMENT ET MOBILITÉ URBAINE SPÉCIAL PARKOPOLIS Août 2019

Transcript of STATIONNEMENT ET MOBILITÉ URBAINE SPÉCIAL PARKOPOLIS · locales avec le stationnement. « Avec la...

Page 1: STATIONNEMENT ET MOBILITÉ URBAINE SPÉCIAL PARKOPOLIS · locales avec le stationnement. « Avec la transition énergétique, la voiture particu - lière a eu tendance à être diabolisée.

ÉDITO

La 14e édition des Rencontres Parkopolis a une nouvelle fois mis en avant le dynamisme des métiers du stationnement au service des politiques locales de mobilité. Les nombreux visiteurs de ces Rencontres ont ainsi pu découvrir les nombreuses innovations présentées par les exposants et participer aux quatre conférences plénières qui répondaient à des grandes questions d’actualité en matière de mobilité, d’urbanisme et de vie des centres villes.Le stationnement occupe une place centrale dans ces politiques locales. La présence de nombreux élus nationaux et locaux représentants des villes moyennes, des grandes villes et des métropoles en atteste. La participation de députés à la table-ronde consacrée aux grands chantiers de l’aménagement urbain en est une autre illustration.Organisées en partenariat avec le groupe InfoPro Digital, et pour la première fois en partenariat avec l’Association des Maires de France, les Rencontres Internationales du Stationnement et de la Mobilité, Parkopolis, répondent ainsi aux préoccupations des décideurs publics pour la mise en œuvre de leurs politiques locales. Nous vous donnons d’ors et déjà rendez vous pour une 15ème édition pleine de nouveauté dans deux ans !

Jean-Laurent Dirx, Président de la FNMS

Selon un expert de PWC France, qui s’exprimait lors du dernier Mondial de l’Automobile, d’ici 2030, la mobilité dans les villes sera : autonome, électrique, partagée et connectée. Soit quatre perspectives qui ont en commun l’intégration de nouvelles technologies pour permettre son essor. Des révolutions qui vont également en entraîner d’autres, notamment du côté des constructeurs automobiles, des acteurs publics… En d’autres termes, le secteur de la mobilité se retrouve en pleine mutation, ce qui impactera forcément celui du stationnement. Mais de quelle manière ? Comment roulerons-nous d’ici 5 ou 10 ans ? Nos intervenants esquissent les contours des mobilités de demain.

VOITURES CONNECTÉES, VÉHICULES AUTONOMES ET OUTILS DIGITAUX : VERS QUELLE RÉVOLUTION ?

LA VOITURE AUTONOME SERA D’ABORD PARTAGÉE

Premier à apporter un début de réponse : Jean-Laurent Dirx – Président de la Fédé-ration Nationale des Métiers du Station-nement (FNMS). Évoquer la question de la mobilité de demain est forcément pertinent pour le monde du stationne-ment. En revanche, si l’arrivée des voitures autonomes dans le paysage urbain est inéluctable, la façon dont elles occuperont l’espace reste pour l’heure incertaine. En effet, parler de voiture autonome pour le transport individuel d’ici 5 à 10 ans, c’est encore prématuré. « Les véhicules

autonomes seront d’abord collectifs », temporise-t-il. « Mais dans 15 ou 20 ans, la question des véhicules autonomes à usage individuel se posera et il faudra bien les accueillir dans nos parkings ». Selon Jean-Laurent Dirx, la réflexion doit être menée à court mais aussi à moyen terme.

Du côté des acteurs publics, le sujet est déjà sur la table des discussions. Laura Brun – Chef de projet Compte Mobilité – Pôle Mobilités et Transports – Mulhouse Alsace Agglomération (m2A), témoigne au nom de sa commune. « À Mulhouse, nous répondons actuellement à un appel à projet Interreg baptisé FAVAS. Celui-ci

STATIONNEMENT ET MOBILITÉ URBAINE SPÉCIAL PARKOPOLIS

Juillet 2019

STATIONNEMENT ET MOBILITÉ URBAINE SPÉCIAL PARKOPOLIS

Août 2019

Page 2: STATIONNEMENT ET MOBILITÉ URBAINE SPÉCIAL PARKOPOLIS · locales avec le stationnement. « Avec la transition énergétique, la voiture particu - lière a eu tendance à être diabolisée.

2

a pour objectif de définir la place que l’on souhaite laisser aux véhicules autonomes en ville ». Pour le moment, en tant qu’ag-glomération, Laura Brun reconnaît que « si l’on souhaite aller dans le sens de la transition énergétique, nous avons plutôt intérêt à favoriser les véhicules autonomes collectifs plutôt que la voiture particulière ».

Le constat est également partagé par Nadège Faul, de l’Institut VEDECOM du véhicule décarboné et communicant et de sa mobilité – Institut pour la Transition Énergétique (ITE) – Institut pour la ville en mouvement (IVM) – Chef de projet « Nouveaux espaces de la ville pour l’éco-mobilité ». Pour cette dernière, peu de chances de voir des voitures autonomes déferler de manière individuelle et massive dans un horizon prévisible. Et d’assurer, à l’instar de Jean-Laurent Dirx, que les premiers véhicules autonomes seront bien partagés.

LE PARKING, FUTUR HUB DE SERVICES ?

Alors que l’arrivée de la voiture autonome appartient à un avenir encore lointain, « la

voiture connectée, elle, fait déjà partie de notre paysage ». Christophe Meunier-Jacob, Chargé de la mobilité connectée – Alliance des Mobilités – Conseil National des Professions de l’Automobile (CNPA), en est convaincu. Celle-ci « se développera de plus en plus dans les dix ans à venir ». Quant à son stationnement, des services nouveaux peuvent être imaginés, certains sont même déjà créés. C’est le cas avec ce service de robot-voiturier autonome, conçu par la start-up Stanley Robotics, mis en place sur un parking de l’aéroport de Lyon-Saint Exupéry. Plus besoin de tourner de longues minutes pour trouver une place, « Stan » se charge de tout.

Au tour de Nadège Faul d’exposer sa vision de la voiture connectée et de l’écosys-tème qui l’entoure. Pour l’experte, celle-ci est avant tout « un objet technologique avec son intelligence et sa connectivité, mêlé à une infrastructure au sein d’un écosystème qui l’accompagne comme les usagers, les villes et les opérateurs ». Au niveau du stationnement, le parking pourrait être plus encore un véritable hub de services connectés, c’est-à-dire avec de l’information en temps réel et des offres de mobilité (location de vélos,

trottinettes, véhicules électriques...). De leur côté, les collectivités pourront y voir un outil de valorisation territoriale, et les entreprises, un atout pour développer la mobilité de leurs employés. En d’autres termes, le parking « nouvelle génération » ressemblerait à un écosystème, certes complexe, mais qui prendrait en compte des besoins différenciés.

PREMIERS PAS DE MAAS À MULHOUSE

Envisager le parking comme un hub de services, « c’est une petite révolution », commente Laura Brun, et de reconnaître qu’il y a toujours eu des problématiques locales avec le stationnement. « Avec la transition énergétique, la voiture particu-lière a eu tendance à être diabolisée. C’est une erreur », considère-t-elle, avant d’ex-pliquer l’arrivée dans sa municipalité d’un concept émergeant. « À Mulhouse, nous sommes les premiers en Europe à avoir lancé un Compte Mobilité, qui s’appuie sur le MaaS (Mobility as a Service) ». Soit la possibilité de se déplacer en bus ou en tramway, de louer un vélo ou une voiture, ou encore de stationner dans un parking

De gauche à droite : Christophe Meunier-Jacob, Chargé de la mobilité connectée, Alliance des Mobilités, Conseil National des professions de l’Automobile (CNPA) - Nadège Faul, de l’Institut VEDECOM du véhicule décarboné et communicant et de sa mobilité, Institut pour la Transition Énergétique (ITE), Institut pour la ville en mouvement (IVM), Chef de projet « Nouveaux espaces de la ville pour l’écomobilité » - Jean-Laurent Dirx, Président de la Fédération Nationale des Métiers du Stationnement (FNMS) - Animatrice : Nelly Moussu, Rédactrice en chef adjointe, Smart City Mag - Laura Brun, Chef de projet Compte Mobilité, Pôle Mobilités et Transports, Mulhouse Alsace Agglomération (m2A)

Page 3: STATIONNEMENT ET MOBILITÉ URBAINE SPÉCIAL PARKOPOLIS · locales avec le stationnement. « Avec la transition énergétique, la voiture particu - lière a eu tendance à être diabolisée.

3

Stationnement et Mobilité Urbaines - Spécial ParkopolisJuillet 2019

du centre-ville, avec un seul compte, une seule application, une seule carte. Unique en France, ce nouveau projet a été mis en place pour développer l’utilisation des modes de déplacement alternatifs à la voiture en solo et pour réduire les consom-mations énergétiques, les émissions de gaz à effet de serre et la pollution. Réso-lument tourné vers l’épanouissement de l’usager, le MaaS est finalement davantage multimodal qu’intermodal. « La clé de son succès repose sur le fait que la collecti-vité reste le chef d’orchestre », souligne Laura Brun.

LA QUESTION SENSIBLE DES DONNÉES

Difficile d’évoquer la connectivité sans s’at-taquer au sujet sensible de la transmission des données. Christophe Meunier-Jacob se veut rassurant : « Chaque constructeur automobile développe sa propre connec-tivité. Et pour le moment, sur les voitures connectées, il s’agit de connexion proprié-taire… il n’y a pas de crainte à avoir ». Pour le projet MaaS à Mulhouse, le discours de Laura Brun, aussi, est apai-

sant : « La collectivité est propriétaire des données. Ce qui veut dire que les données des usagers ne sont partagées qu’avec les partenaires. Nous sommes obligés, pour construire ce projet modal d’accéder à un certain nombre de données. L’essentiel est de trouver le bon équilibre entre sécurité et service pour l’usager ».

À la FNMS, la question de la transmis-sion des données personnelles dans le cadre du stationnement reçoit un accueil plus réservé. Jean-Laurent Dirx rappelle que le véhicule crée de la donnée sans que l’automobiliste s’en rende compte. « Lorsque vous choisissez un parking, que ce soit en fonction de sa proximité ou de son prix, vous restez autonome dans votre décision. Or, avec un véhicule connecté, c’est la solution qui va vous proposer le parking. Un intermédiaire se crée – entre l’automobiliste et l’exploitant du station-nement – qui va essayer de capter une partie de la valeur et d’avoir une relation directe avec le client », alerte-t-il. Le président de la FNMS appelle ainsi tous les acteurs du stationnement à la vigilance : « Il faut vraiment que l’on garde la maîtrise de notre clientèle, afin

de conserver notre capacité à offrir du service ».

ÉVALUER LES IMPACTS

Avec ces nouveaux modes de transport, de mobilité, de services, d’outils... Quelle place sera accordée aux routes dans nos villes ? Christophe Meunier-Jacob mentionne en ce sens les chiffres de l’enquête menée par l’Observatoire de la mobilité en Île-de-France (Omnil) en 2015, selon lesquels une voiture est garée 95% du temps. Quel enseignement en tirer ? « Cela veut dire que les places de parking sont bien plus nécessaires que les routes. Faut-il avoir moins de voitures mais qui roulent plus ? », interroge-t-il. De son côté, Nadège Faul, estime qu’il faut d’abord évaluer les impacts. Une évalua-tion qui est rendue difficile puisque les modèles de voitures autonomes n’existent pas encore réellement. « Il faut prendre le temps et ne pas se précipiter sur l’in-frastructure. Changer tout trop vite et à tout prix pourrait avoir des conséquences désastreuses », conclut avec sagesse l’experte en mobilité urbaine.

Page 4: STATIONNEMENT ET MOBILITÉ URBAINE SPÉCIAL PARKOPOLIS · locales avec le stationnement. « Avec la transition énergétique, la voiture particu - lière a eu tendance à être diabolisée.

4

CHANGEMENT DE CAP AVEC LA LOI MAPTAM

Le stationnement s’avère un outil straté-gique d’aménagement de territoire urbain, particulièrement dans les villes moyennes, qui représentent 26% de la population française, 200 villes et 160 intercommu-nalités. Anne Pons, Directrice générale de l’ADEUS – Agence de Développement et d’Urbanisme de l’Agglomération Stras-bourgeoise, abonde dans ce sens : « la question du stationnement est tout aussi en lien avec l’habitat que l’économie. Il revêt même une dimension transversale dans la ville. Quand on parle de stationne-ment, on pense immobilité, or c’est tout le contraire ! Les choix que l’on fait autour du stationnement sont absolument décisifs en termes d’ambiance, d’usage de la ville, de ségrégation socio-spatiale ». Autrement dit, il est impératif de tenir compte des liens de la ville concernée avec l’ensemble des villes aux alentours (petites ou grandes) qui formeront ainsi un écosystème territo-rial. Même chose pour le stationnement, notamment autour des gares : pour qu’il soit pertinent, il faut le traiter à l’échelle de cet écosystème territorial dans lequel la ville moyenne s’inscrit. Patrice Pattée – Vice-Président Autolib’ Vélib’ Métropole, représentant de l’As-

sociation des Maires de France et des présidents d’intercommunalité – Adjoint au Maire de Sceaux délégué à l’Urba-nisme, à l’espace public et à la mobilité, explique que la ville a revu la politique de stationnement depuis la loi de Moderni-sation de l’Action Publique Territoriale et d’Affirmation des Métropoles (MAPTAM). « Pendant longtemps, les élus, représentés par le GART (Groupement des Autorités Responsables de Transport), ont demandé à avoir la main sur le stationnement. Avec la loi MAPTAM, en particulier ses articles 63 et 34, les élus ont le pouvoir de gérer et maîtriser cet espace limité du centre-ville pour en améliorer l’attractivité ». La ville de Sceaux (Hauts-de-Seine, environ 20 000 habitants) a fait le choix de déléguer ce service dans sa globalité à un opérateur privé qui traite toute la chaîne du stationnement payant sur voirie, allant du contrôle jusqu’à la gestion du RAPO (Recours Administratif Préalable Obligatoire). Le stationnement gratuit, qui relève toujours du champ pénal, est géré cette fois par la police municipale. Les résultats positifs de ce nouveau système commencent à être mesurés, fait valoir l’élu : « si toutes les places de stationne-ment qui se situent à deux ou trois minutes à pied du centre-ville sont payantes, le prix reste raisonnable (1,20€/h) et limité à

deux heures pour permettre la rotation et alimenter le centre commerçant ».

DÉVELOPPER LA MULTIMODALITÉ

Quel regard porte Serge Clémente, Président d’Indigo Group, sur le stationne-ment en ville moyenne ? « Avec la transition énergétique, l’un des enjeux actuels est de segmenter davantage le parcours indi-viduel que l’on peut faire au quotidien ». Pour répondre à la problématique de la ville moyenne, le groupe Indigo a fait mener une enquête auprès de citoyens pour savoir, entre autres, ce qu’ils n’aimaient pas dans les services proposés par leur ville. Une majorité de sondés a répondu : l’offre de transport. À partir de ce constat, l’opé-rateur a essayé de comprendre comment se passaient les déplacements entre villes moyennes et grandes villes. Et les chiffres sont éloquents : 80% des trajets sont monomodaux et vont du domicile au travail. À Paris, 32% des voitures sont individuelles, contre 79% pour l’urbain en général et 89% pour le péri-urbain et le rural. Enfin, seulement 25% des employés sont indemnisés pour l’usage de leur véhi-cule personnel. Et s’ils devaient utiliser les transports en commun ? Les répondants déclarent que leur temps de déplacement

En mars 2018, Jacques Mézard, alors ministre de la Cohésion des territoires, déclarait: « j’ai la conviction que les villes moyennes sont un vecteur essentiel de développement de nos territoires », et d’ajouter que « leur vitalité est indispensable car elle profite à l’ensemble de leur bassin de vie, et plus largement aux territoires urbains et périurbains environnants ». En effet, si l’objectif est de faciliter leur accessibilité et de développer l’attractivité économique, il convient désormais de repenser les mobilités et le stationnement, non plus à l’échelle locale mais intercommunale. Voici les idées de nos participants pour revitaliser le cœur de ces villes… qui n’a jamais cessé de battre !

STATIONNEMENT ET MOBILITÉ POUR LES VILLES MOYENNES. QUELS AMÉNAGEMENTS URBAINS FACE AUX ENJEUX DE L’ATTRACTIVITÉ DES TERRITOIRES ?

Page 5: STATIONNEMENT ET MOBILITÉ URBAINE SPÉCIAL PARKOPOLIS · locales avec le stationnement. « Avec la transition énergétique, la voiture particu - lière a eu tendance à être diabolisée.

5

serait multiplié par deux. Cette étude met bien en lumière le conflit entre voiture particulière et transports collectifs dans les villes moyennes. Ainsi, à l’exception de la capitale française, le véhicule personnel reste un mode privilégié, et les équipe-ments pour le stationnement continuent de croître, constate également le Président d’Indigo. Selon ce dernier, la tendance est d’aller vers un parc décarboné en développant le multimodal, mais aussi de mieux gérer l’espace public entre la voirie et l’ouvrage avec des politiques tarifaires adaptées. Pour ce faire, « il faudrait plus d’offres MaaS comme celles développées à Mulhouse et dans d’autres collectivités ».

De son côté, Rollon Mouchel-Blaisot, Préfet, Directeur du programme national « Action cœur de ville », estime que pendant des décennies les villes moyennes

ont été occultées et qu’il est temps de les réhabiliter : « cessons le misérabilisme autour de ces villes. Au contraire, elles ont le plus souvent un confort de vie enviable. Le problème est que l’on a pendant long-temps privilégié un mode de vie urbain trop gourmand en terre agricole et en biodiversité. Aujourd’hui, on constate les dégâts en termes économiques, sociaux et écologiques », considère le haut fonc-tionnaire. Puis, il rejoint les propos d’Anne Pons sur la pertinence du prisme de la transversalité pour considérer les villes moyennes : « il faut traiter ces villes avec une politique globale, cohérente et trans-versale ». L’échec des politiques menées auparavant tient au fait, selon lui, que les villes moyennes se sont longtemps ignorées entre elles. Il donne en ce sens plusieurs conseils. Le premier objectif est d’arrêter la dépopulation et le trans-

fert en périphérie, et de repeupler les centres-villes qui se sont paupérisés. Ces derniers doivent être dotés de services attractifs et utiles à la population, avec une offre de stationnement. « Après une période où la voiture fut reine, puis ensuite ennemie, il faut retrouver un équilibre entre tous les usagers, et dédramatiser l’idée que la circulation en centre-ville est compliquée. Arrêtons aussi de faire culpabiliser l’automobiliste », poursuit-il. Rollon Mouchel-Blaisot incite également au développement de mobilités intelli-gentes, innovantes, prenant ainsi l’exemple de la ville de Colmar, où des navettes-relais électriques ont été installées pour desservir le centre-ville avec des parkings postés à l’entrée de celui-ci : « c’est un succès ! Non seulement les visiteurs extérieurs utilisent ce service, mais en plus les habitants du centre-ville eux-mêmes se le sont appro-

De gauche à droite : Serge Clémente, Président d’Indigo Group - Patrice Pattée, Vice-Président Autolib’ Vélib’ Métropole, représentant de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité, AMF, Adjoint au maire de Sceaux délégué à l’Urbanisme, à l’espace public et à la mobilité - Anne Pons, Directrice générale, ADEUS, Agence de Développement et d’Urbanisme de l’Agglomération Strasbourgeoise - Animateur, Jacques Paquier, Rédacteur en chef, Le Journal du Grand Paris - Rollon Mouchel-Blaisot, Préfet, Directeur du programme national « Action cœur de ville » - Martial Chevreuil, Président - ATEC ITS France

Stationnement et Mobilité Urbaines - Spécial ParkopolisJuillet 2019

Page 6: STATIONNEMENT ET MOBILITÉ URBAINE SPÉCIAL PARKOPOLIS · locales avec le stationnement. « Avec la transition énergétique, la voiture particu - lière a eu tendance à être diabolisée.

6

priés ». Et de lancer un appel aux acteurs publics et privés : « investissez dans ces villes, elles sont un pari pour l’avenir ! ».

LE PARKING DU FUTUR, BIENTÔT UN LIEU DE VIE ?

À l’instar des autres intervenants de cette table ronde, Martial Chevreuil, Président de l’ATEC ITS France, rejoint l’idée que « le stationnement est la clé de l’inter-modalité ». Par ailleurs, cet ingénieur de formation invite les différents acteurs de la mobilité à se saisir davantage du numérique pour mieux comprendre les comportements et faire passer des messages. Aussi, il déplore que les besoins en mobilité durable ne soient pas suffi-samment pris en compte.À ce sujet, quelle place pour le vélo, alors que celle de la voiture reste prépondérante

dans les villes moyennes ? « Celle-ci est centrale pour des raisons de transition énergétique et de santé », répond Anne Pons. « On attend des opérateurs une offre qui facilite la question », ajoute-t-elle. Autre thématique abordée: celle du parking de demain. À quoi ressem-blera-t-il ? Une question très à propos puisque Serge Clémente annonce que le groupe Indigo est justement en cours de signature avec un grand architecte français pour travailler sur le parking du futur. Celui-ci sera évolutif, technologique (pour recevoir les voitures autonomes) et capable d’accueillir un centre de services dédié à la voiture mais aussi au quartier. « L’usager est prêt à être multimodal mais, pour que cela marche, il faut qu’il ait une expérience client simplifiée notamment en termes de passage d’un mode à un autre. Or aujourd’hui c’est encore compliqué », reconnaît Serge Clémente.

En ce qui concerne la question tarifaire du stationnement, Rollon Mouchel-Blaisot juge que « l’on revient un peu sur ce qui a été fait avec le tout gratuit ». Selon lui, l’expérience n’a pas été très concluante, comme le montre le phénomène des voitures ventouses. C’est pour cette raison que la collecte des données est extrê-mement importante. La connaissance des besoins actuels et futurs vient ainsi éclairer la décision politique, mais aussi économique, afin de trouver le bon équi-libre entre les différents usages. D’ailleurs, l’un des intérêts de la loi d’orientation des mobilités (LOM), « c’est qu’elle est aussi tournée vers les villes moyennes et les territoires ruraux, afin de rendre accessible un certain nombre d’outils à ces collec-tivités », souligne le préfet. Multimodale et transversale ? Bientôt, la ville moyenne aura tout d’une grande.

Page 7: STATIONNEMENT ET MOBILITÉ URBAINE SPÉCIAL PARKOPOLIS · locales avec le stationnement. « Avec la transition énergétique, la voiture particu - lière a eu tendance à être diabolisée.

7

LE STATIONNEMENT, UN OUBLIÉ DE LA LOM

Avant d’aborder le sujet, un mot sur la Loi d’Orientation des Mobilités (LOM), récemment examinée à l’Assemblée nationale, avec deux parlementaires présentes à cette table ronde. En effet, Valérie Lacroute, députée de la 2e circons-

cription de la Seine-et-Marne, membre de la Commission du Développement Durable et vice-présidente du Groupement des Autorités Régulatrices de Transport (GART), a ainsi souhaité l’évoquer en intro-duction. L’élue rapporte que la question du stationnement n’y a été finalement abordée qu’en « demi-teinte » alors qu’elle avait été au cœur des débats lors des Assises de la

mobilité, qui se sont tenues de septembre 2017 à début 2018. « Même s’il est temps d’avancer sur l’idée de partage de véhi-cules dans les zones rurales, admet Valérie Lacroute, il y a beaucoup de territoires où les Français n’ont pas d’autres choix que de prendre la voiture ». Ce constat sur la loi LOM est également partagé par Laurianne Rossi, députée

Grâce aux projets d’aménagement du Grand Paris, les territoires métropolitains commencent à développer des infrastructures et des solutions de mobilité, tout en prenant en compte l’évolution des technologies énergétiques des futurs véhicules dits « propres ». Solutions techniques, nouvelles pratiques, nouveaux usages, etc. : les mobilités seront protéiformes. Mais quelle place pour le stationnement ? Et quel aspect revêtira-t-il dans le futur Grand Paris ? Sera-t-il relais, réversible ? Pour tenter de répondre à ces questions, nos participants apportent leurs points de vue et expertises d’acteurs publics et privés.

MOBILITÉ, INTERMODALITÉ, STATIONNEMENT : LES GRANDS CHANTIERS ET L’AMÉNAGEMENT URBAIN (MÉTROPOLE DU GRAND PARIS - HORIZONS 2024)

De gauche à droite : Alain Devès, Directeur général, Saemes - Valérie Lacroute, Députée, 2e circonscription de la Seine-et-Marne, membre de la Commission du Développement Durable et vice-présidente du GART (Groupement des Autorités Régulatrices de Transport) - Animateur : Jacques Paquier, Rédacteur en chef, Le Journal du Grand Paris - Ghislain Delabie, Cofondateur du Lab Ouishare, connecteur mobilité, Lab Ouishare - Laurianne Rossi, Députée de la 11e circonscription des Hauts-de-Seine, membre de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, Questeure de l’Assemblée nationale

Stationnement et Mobilité Urbaines - Spécial ParkopolisJuillet 2019

Page 8: STATIONNEMENT ET MOBILITÉ URBAINE SPÉCIAL PARKOPOLIS · locales avec le stationnement. « Avec la transition énergétique, la voiture particu - lière a eu tendance à être diabolisée.

8

de la 11e circonscription des Hauts-de-Seine. « Le stationnement est souvent un impensé alors qu’il est un levier majeur de la mobilité. Bien que cela semble paradoxal à première vue, il active pour-tant l’intermodalité. Il faut des parkings de rabattement ! », affirme l’élue. Selon Laurianne Rossi, l’immobilité du véhicule doit faire partie de l’aménagement urbain.

LA GRANDE COURONNE TROP LOIN DU GRAND PARIS Qu’en est-il avec le Grand Paris ? Quel regard portent les intervenants sur ce projet d’infrastructures qui devrait aboutir dans les décennies à venir à 68 nouvelles gares, 200 kilomètres de nouvelles voies et 140 km2 d’aménagements ? D’entrée, Valérie Lacroute pointe du doigt un dysfonctionnement : « on paye la taxe spéciale équipement mais on ne bénéfi-ciera jamais directement du Grand Paris alors que la Seine-et-Marne représente en superficie la moitié de l’Île-de-France ». La raison ? Le département se situe trop loin

de la métropole. La seule gare qui pour-rait susciter un réel avantage serait celle du Mesnil-Amelot, explique la députée, mais sa construction a été repoussée et ne verra finalement le jour que d’ici une dizaine d’années. Et d’ajouter : « il y a une vraie difficulté pour la Seine-et-Marne à trouver un intérêt et les vraies connexions au Grand Paris. Le maillage est fait de telle sorte que le projet n’est finalement vraiment pertinent que pour la petite couronne mais pas au-delà. ».

Autre constatation : la question du stationnement est quasiment absente du projet du Grand Paris, comme dans la loi d’Orientation des Mobilités. Alain Devès, directeur général de Saemes, l’observe : « prenons l’exemple de la nouvelle gare de Créteil l’Échat. Il y a bien un parking public qui est prévu, mais il ne compte que 190 places, alors que la gare s’apprête à accueillir 90 000 voyageurs par jour. C’est parfaitement sous-dimensionné », fait-il remarquer. « On a l’impression que l’automobile est taboue. Tout le monde ne peut pas venir à vélo ou à trottinette ! Il faut

des infrastructures de stationnement », commente Alain Devès. Il rejoint ensuite la position de Valérie Lacroute selon laquelle le gouvernement fait payer les collectivités et les acteurs du stationnement pour un projet dont ils ne feront pas partie ou du moins de façon éloignée : « nous aussi, nous subissons la loi de finances 2019… sans bénéficier des effets du Grand Paris », s’étonne-t-il.

Le directeur général de Saemes dit comprendre la réticence des maires à l’idée de voir des nuées de « commu-teurs », autrement dit des usagers qui viennent dans leurs communes unique-ment pour prendre le train. « C’est une crainte légitime », reconnaît-il. Mais pour justement absorber la demande, Alain Devès conseille la construction d’in-frastructures de stationnement, comme des parkings relais, qui permettraient certainement de « désaturer » l’espace. La société du Grand Paris commence déjà à se préoccuper de ces problèmes, selon l’opérateur, en voulant développer des zones de stationnement « intelligent ».

LE PARKING RÉVERSIBLE, POTENTIELLEMENT RISQUÉ ?

Pour Ghislain Delabie, du Lab Ouishare du projet du Grand Paris, expert qui conseille régulièrement les collectivités dans la mise en place de mobilités intermodales, il s’agit en effet d’un grand défi pour le stationnement : « nous passons d’une industrie d’infrastructure traditionnelle à une industrie intelligente ». Aujourd’hui, les parcs relais constituent une solution valable pour désengorger les villes.

Seulement, une contradiction persiste. « D’un côté, lorsque vous mettez des parcs relais, ils se remplissent très vite, à moins d’être très mal placés ; et, de l’autre, ils posent un problème à l’échelle locale, au niveau de la gare elle-même et de son quartier, poursuit Ghislain Delabie. Quand vous êtes dans une zone dense, si vous rajoutez un parking de taille importante, c’est un problème économique parce qu’il coûte cher. Donc, si vous êtes maire de première couronne, par exemple, ce n’est pas dans votre intérêt immédiat d’installer une infrastructure de stationnement, alors

Page 9: STATIONNEMENT ET MOBILITÉ URBAINE SPÉCIAL PARKOPOLIS · locales avec le stationnement. « Avec la transition énergétique, la voiture particu - lière a eu tendance à être diabolisée.

9

que vous essayez d’avoir une ville apaisée. Soit on construit une gare entourée de parkings relais, mais il n’y aura pas de ville autour ; soit il n’y a que la ville, mais il n’y a plus de connexions… Est-on capable de trouver une voie intermédiaire ? »

L’expert en mobilités évoque également une alternative technique au parc de stationnement classique qui fait son entrée sur le marché : le parking réversible. Il s’agit d’un parc doté de la possibilité de se transformer en un immeuble d’habitation. Mais cette solution n’a pour le moment, semble-t-il, pas fait ses preuves : « je ne connais pas encore de parc réversible qui se soit encore renversé », poursuit-il.

« Avec ces nouveaux parcs, les contraintes sont plus fortes et les coûts plus élevés », met en garde Alain Devès. Représentent-ils un pari osé pour l’avenir ? « Oui, il ne faut pas se tromper ! ». Même positionnement sceptique sur l’arrivée « imminente » des voitures autonomes. « On n’y est pas », estime le directeur général de Saemes. En revanche, une difficulté majeure subsiste en ce qui concerne l’accueil des véhicules décarbonés dans les infrastructures de stationnement en sous-sol : celui-ci est soumis à une réglementation très contrai-gnante et financièrement lourde à mettre en œuvre, alerte Alain Devès.

LES VÉHICULES PROPRES, ATTENTION À LA JUSTICE SOCIALE Quid de la question sur la zone à faibles émissions (ZFE), déjà mise en place par la Ville de Paris, est-ce qu’elle peut engendrer un risque d’ostracisme ?À cette question, Laurianne Rossi estime

qu’il est certes important d’accélérer la transition écologique et d’aller vers des mobilités plus propres, mais attention à l’aspect justice sociale. « Les véhicules décarbonés restent très coûteux. Et les péages urbains, j’y suis opposée parce que cela ne va pas dans le sens d’une équité à laquelle je suis attachée. Réserver aujourd’hui des voies ou des places de stationnement à des personnes qui ont les moyens d’acquérir un véhicule à faibles émissions n’est pas très juste… On permet aux gens les plus aisés d’aller plus vite sur des voies réservées et de se garer aussi plus vite, et donc de gagner du temps », fait valoir la députée.

À quelques minutes de la fin, une ques-tion dans l’auditoire émerge : « même électrique, elle est une catastrophe, alors pourquoi ne pas se préparer à la dispa-rition totale de la voiture individuelle ? ». En réponse, Laurianne Rossi précise : « il est possible de se passer à terme de la voiture thermique, mais il me paraît plus difficile de se séparer complètement de l’automobile. Pensons à la démobilité, et favorisons plutôt les solutions de proximité, comme l’autopartage par exemple ».

Valérie Lacroute, Députée, 2e circonscription de la Seine-et-Marne, membre de la Commission du Développement Durable et vice-présidente du GART et Laurianne Rossi, Députée de la 11e circonscription des Hauts-de-Seine, membre de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, Questeure de l’Assemblée nationale

Catherine Sachreiter, Commissaire Générale, Jean-Laurent Dirx, Président de la Fédération Nationale des Métiers du Stationnement, Frédéric Barbier, Député de la 4e circonscription du Doubs, Pierre Philipps, collaborateur parlementaire et Édouard Lecomte, Directeur Général de la FNMS

Stationnement et Mobilité Urbaines - Spécial ParkopolisJuillet 2019

Page 10: STATIONNEMENT ET MOBILITÉ URBAINE SPÉCIAL PARKOPOLIS · locales avec le stationnement. « Avec la transition énergétique, la voiture particu - lière a eu tendance à être diabolisée.

10

LE STATIONNEMENT, L’AUTRE VIE DE LA VOITURE

La parole est à Olivier Asselin, animateur du groupe de travail « Stationnement » – Association des ingénieurs territoriaux de France (AITF). Après avoir décrit en quelques mots les missions de l’AITF, l’ingénieur territorial expose sa concep-tion du stationnement. Selon lui, celui-ci « occupe une certaine emprise » sur l’es-pace public, puisque les véhicules sont stationnés 95% du temps. « La vraie vie

de l’automobile finalement, c’est le station-nement », résume-t-il avant de constater qu’avec « la réforme de la dépénalisation, on diminue le nombre de voitures mais, à la place, on crée du vide ». « Qu’en fait-on ? Voulez-vous gagner en capacité de station-nement pour accroître l’attractivité du centre-ville ou bien souhaitez-vous utiliser cet espace qui s’est libéré pour d’autres usages ? », demande Olivier Asselin aux politiques. Pour mieux illustrer ses propos, il compare le stationnement « au fil qui dépasse de la pelote ». Et qu’advient-il

lorsque l’on commence à tirer dessus ? « Tous les éléments qui constituent la ville apparaissent », explique-t-il.

Pour continuer à dérouler le fil de la confé-rence, voici le point de vue de Nicolas Frasie, Responsable du Développement et des Relations Publiques - Communauto Mobizen. Le représentant de la société d’autopartage de véhicules, créée en 1994 à Montréal, estime que « nous assistons à une modification des comportements. Les gens finalement se déplacent au jour

Les mobilités au sein de l’espace urbain et péri-urbain se diversifient aussi bien en termes d’offres de services que de pratiques de la part des usagers. Plusieurs concepts trouvent leur place et leur marché, comme l’autopartage selon l’approche du free-floating (voiture, vélo, scooter, trottinette) qui permet une mobilité flexible, pour l’utilisateur comme pour l’opérateur. Il n’en demeure pas moins que ces solutions trouvent leurs limites. L’un des enjeux pour les collectivités est la gestion parcimonieuse de l’espace public, sans oublier la place du parking en ville qui reste l’un des grands défis de l’urbanisme de demain. Qu’en pensent nos intervenants ?

QUEL PARTAGE DE L’ESPACE PUBLIC POUR QUELLES MOBILITÉS ? ENJEUX ET PERSPECTIVES.

De gauche à droite : Olivier Asselin, animateur du groupe de travail « Stationnement », Association des ingénieurs territoriaux de France (AITF) - Bertrand Barthélémy, Président de Flowbird - Animateur : Nicolas Braemer, Rédacteur en chef, La Lettre du Cadre Territorial - Patrice Pattée, adjoint au maire de Sceaux délégué à l’Urbanisme, à l’espace public et à la mobilité, vice-Président Autolib’ Vélib’ Métropole, et représentant de l’AMF - Nicolas Frasie, Responsable du Développement et des Relations Publiques, Communauto Mobizen

Page 11: STATIONNEMENT ET MOBILITÉ URBAINE SPÉCIAL PARKOPOLIS · locales avec le stationnement. « Avec la transition énergétique, la voiture particu - lière a eu tendance à être diabolisée.

11

le jour et n’utilisent la voiture que lorsqu’ils en ont vraiment besoin ». Un constat déjà établi par l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie. (ADEME), fait-il remarquer. Nicolas Frasie en est convaincu : une des clés de la mobilité alternative passera par la gestion de l’es-pace public, et notamment par la question du stationnement. D’ailleurs, qu’apporte le partage de véhicule au stationnement ? « En 2016, nous avions calculé qu’une voiture d’autopartage libérait six places de stationnement », affirme-t-il. Et de conclure : « l’autopartage, c’est un accé-lérateur de nouvelle mobilité ».

LE CURBSIDE MANAGEMENT, UNE SOLUTION POUR GÉRER L’ESPACE

Au tour de Bertrand Barthélémy, président de Flowbird, de présenter son entreprise : « notre savoir-faire est de fournir aux villes, qui sont nos clientes, une plateforme de paiement de mobilité ouverte et interopé-rable ». Il explique ensuite que « l’organisa-tion actuelle dans les villes est que chacun des modes de transport est géré en silo, et que ces silos se sont maintenant digita-lisés ». Désormais, les villes ressentent le besoin de mettre de la transversalité entre

ces silos afin de simplifier le parcours des usagers. « Aucun moyen de transport n’a la solution à lui tout seul. La vraie solution, c’est la transversalité des moyens », insiste le président de Flowbird. Ce dernier prend en exemple la ville de New-York : là-bas, le département en charge du stationne-ment de voirie a été rattaché à celui des flux de trafic routier. Ce qui signifie que la partie bitumée de la route peut servir à la fois à faire stationner des véhicules et à les faire circuler. Une question en découle : comment optimiser cet espace public ? C’est tout le principe du curbside management : apporter aux villes des solutions technologiques pour les aider à optimiser leur propre territoire. Cela passe également par la compréhension des usages possibles que l’on peut faire de la chaussée : planter des arbres, installer des terrasses de café, faire stationner des voitures de façon alternée ou non, etc. En d’autres termes, il s’agit de réfléchir à une utilisation dynamique de la voirie.

UN PROBLÈME PLUS RÉGLEMENTAIRE QUE TECHNIQUE

Quel est l’avis de Patrice Pattée, adjoint au maire de Sceaux délégué à l’Urba-

nisme, à l’espace public et à la mobilité, vice-Président Autolib’ Vélib’ Métropole, et représentant de l’AMF ? Pour l’élu local, le partage de l’espace public est évidemment une question éminemment politique. « Il y a quelques années, on ne se posait pas la question du partage de l’espace, explique-t-il, mais aujourd’hui nous sommes enfin en train de devenir raisonnables : nous n’allons quand même pas tuer nos villes ? Depuis les années 1970, nous avons laissé la voiture envahir nos villes, et nous ne nous sommes pas aperçus que nous courions à notre perte. Il peut y avoir des réactions brutales comme avec la taxe carbone, reconnaît-il, mais il existe aussi des solutions plus douces comme les voies réservées aux vélos ». En somme, tout cela ne se fait pas « sans traumatisme », estime l’adjoint au maire. « Ce n’est finalement pas un problème technique mais plutôt un problème réglementaire », ajoute-t-il. « Pour preuve, la rue la plus commerçante de Sceaux a mis 15 ans avant de devenir piétonne. Mais aujourd’hui, personne ne souhaiterait revenir en arrière », renchérit-il.

Selon Patrice Pattée, le sujet de la voiture est toujours aussi prégnant dans le débat : « il n’y a pas une réunion publique, sans que les débats finissent sur la voiture.

Stationnement et Mobilité Urbaines - Spécial ParkopolisJuillet 2019

Page 12: STATIONNEMENT ET MOBILITÉ URBAINE SPÉCIAL PARKOPOLIS · locales avec le stationnement. « Avec la transition énergétique, la voiture particu - lière a eu tendance à être diabolisée.

12

Con

cept

ion

et r

édac

tion

: Age

nce

90

c - cr

édit

phot

os :

© P

arko

polis

201

9

FNMS - 18, avenue des Champs Élysées - 75008 Paris - Téléphone : 01 42 25 55 37 - Internet : www.fnms.fr - Mail : [email protected]

À Sceaux, nous avons un théâtre et, à chaque représentation, le quartier pavillon-naire est envahi de voitures qui s’installent un peu partout sur les trottoirs. On ne parle que de ça ». À ce sujet, un auditeur fait signe pour poser une question à l’adjoint au maire : « vous parlez de problèmes récurrents dans votre ville, quelles solu-tions adoptez-vous ? ». « Nous favorisons les méthodes douces », répond Patrice Pattée. « À Sceaux, le piéton est privilégié et la mobilité à vélo la bienvenue. Dès que nous pouvons élargir un trottoir et l’améliorer, nous le faisons ».

QUID DU STATIONNEMENT DES VÉLOS ?

Alors que la mobilité à vélo ou en trottinette est de plus en plus encouragée par les

municipalités, qu’en est-il de leur station-nement sur l’espace public ? Force est de constater que l’offre est souvent sous-es-timée. Il n’y a qu’à voir les problèmes causés dans les grandes villes par les engins en free-floating. « Existe-t-il une demande aujourd’hui en France de station-nement pour les nouvelles mobilités ? », demande Nicolas Frasie. Bertrand Barthélémy s’empare de la ques-tion : « encore récemment, la politique des villes concernant le stationnement des vélos ou autre objet n’était pas prio-ritaire. Mais depuis quelques temps, nous assistons à une prise de conscience des élus et des administrations à ce sujet. Il faut s’en occuper ». Pour le moment, la réponse traditionnelle est le parc relais autour des stations de métro ou de bus. À Londres, des réponses sur la sécuri-sation des vélos commencent à appa-

raître avec, par exemple, des systèmes collectifs fermés. Ceux-ci ne sont pas plus grands qu’une place de voiture, et il est possible d’y parquer son vélo avec un antivol. « D’ici cinq ans, nous devrions avoir plus d’exemples de ce type », affirme le président de Flowbird. C’est déjà le cas à Lille et à Grenoble où il existe des consignes sous la forme de parcs à vélos, box ou minibox pour garer sa bicyclette en toute sécurité. Patrice Pattée rebondit sur la circulation des vélos et le partage de la chaussée : « la vitesse limitée à 30 km/h arrange la mobilité. Cela permet de faire circuler un vélo en sens inverse. Aucun accident n’est à déplorer ». En somme, si nous souhaitons parvenir à une modification des comportements, il faut offrir une alterna-tive, qu’elle soit du côté de l’aménagement de l’espace public ou du stationnement.

Stationnement et Mobilité Urbaines - Spécial ParkopolisJuillet 2019