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Organisation mondiale du commerceprincipes et cause

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  • ORGANISATION MONDIALEDU COMMERCE

    COMMERCE, FINANCESET CRISES FINANCIRES

  • Cette tude est galement disponible en anglais et en espagnol Prix: 30 francs suisses.

    Les commandes sont adresser :

    Publications de l'OMCCentre William Rappard154 Rue de LausanneCH-1211 GenveTl.: (41 22) 739 5208/5308Tlfax: (41 22) 739 5458Courrier lectronique: [email protected]

    ISBN 92-870-2210-4Imprim en SuisseX-1999, 1 000 Organisation mondiale du commerce, 1999

  • iI. Introduction et rsum 1

    II. Les liens entre le commerce et le secteur financier 3

    A. Importance du financement pour le commerce et la croissance 3

    B. Instruments financiers lis au commerce 5

    C. Les agences de crdit l'exportation et le rle de l'tat dans le financement des changes commerciaux 10

    Annexe du chapitre II: commerce et politique de change 15

    III. Crises financires et commerce 21

    A. Pourquoi s'inquiter des crises financires? 21

    B. Causes des crises financires 24

    C. Retombes conomiques, sociales et commerciales d'une crise financire 27

    D. Rle du commerce dans la prvention et le rglement des crises 31

    Annexe du chapitre III: stratgies permettant de prvenir et de rgler une crise financire

    en dehors du cadre de la politique commerciale 35

    IV. Aperu historique des crises financires et de leurs incidences conomiques et commerciales 39

    A. La grande dpression 39

    B. Crises financires survenues entre la fin des annes 70 et le milieu des annes 90 41

    C. La crise asiatique 52

    V. Le commerce, les finances et le rle de l'OMC 61

    A. Distorsions des changes attribuables aux liens entre commerce et finances, et disciplines de l'OMC 61

    B. Le systme commercial multilatral et la stabilit financire 63

    VI. Conclusion 67

    Bibliographie 69

    Table des matires

  • Liste des tableaux

    Annexe Tableau I.1: Les principaux rgimes de change et leurs caractristiques 19

    Tableau III.1: Projections de croissance depuis le dbut de la crise asiatique 28

    Tableau III.2: volution des changes dans un pays touch par une crise financire 30

    Tableau III.3: Projections du commerce de marchandises depuis le dbut de la crise asiatique 31

    Tableau IV.1: Indicateurs conomiques de certains pays industriels pendant la grande dpression 40

    Tableau IV.2: Valeur et volume des exportations de marchandises dans le monde, 1929-1937 41

    Tableau IV.3: Causes et cot de diffrentes crises financires entre la fin des annes 70 et le milieu des annes 90 43

    Tableau IV.4: Solutions adoptes et politiques de taux de change dans le cadre de crises financires,entre la fin des annes 70 et le milieu des annes 90 46

    Tableau IV.5: Ouverture commerciale et crises financires, par groupes de pays, entre les annes 70 et le milieu des annes 90 51

    Tableau IV.6: Variation du taux de change dans les pays asiatiques en crise et les pays en dveloppementconcurrents, entre juin 1997 et septembre 1998 53

    Tableau IV.7: Incidences conomiques et sociales de la crise financire asiatique 55

    Tableau IV.8: Structure des importations de marchandises de la Rpublique de Core,de 1996 1998 56

    Tableau IV.9: Enqutes antidumping ouvertes contre les exportateurs d'Indonsie, de la Rpublique de Core,de la Malaisie, des Philippines et de la Thalande (Asie des Cinq), 1993-1997 59

    Liste des figures et graphiques

    Graphique II.1: Protection contre les divers risques engendrs par le commerce international 7

    Graphique II.2: Transfert du risque conomique (commercial) entre l'exportateur et l'importateur,selon le type de contrat 8

    Figure III.1: Exemple de bilan 22

    Figure IV.1: La contraction du commerce mondial de janvier 1929 mars 1933 42

    Graphique IV.1: Crises financires et volution de l'conomie dans 25 pays, entre la fin des annes 70 et le milieu des annes 90 47

    iii

  • Graphique IV.2: Incidences conomiques des crises financires dans quelques groupes de pays,entre la fin des annes 70 et le milieu des annes 90 48

    Graphique IV.3: Crise financire et chmage dans quelques pays, entre la fin des annes 70 et le milieu des annes 90 49

    Graphique IV.4: Crises financires et volution des changes, entre la fin des annes 70 et le milieu des annes 90 50

    Graphique IV.5: Production et inflation dans les pays d'Asie en crise, 1994-1998 54

    Graphique IV.6: volution des changes dans les pays d'Asie en crise, 1994-1998 56

    Graphique IV.7: Le commerce des marchandises en Rpublique de Core, en Malaisie et en Thalande selon l'origine et la destination, 1996-1998 57

    Liste des encadrs

    Encadr II.1: Asymtrie de l'information, antislection et risque moral sur les marchs financiers 4

    Encadr II.2: Le commerce et la finance au moyen ge, prcurseurs du systme commercial et financier international actuel 5

    Encadr II.3: Les agences de crdit l'exportation dans les pays en dveloppement et dans les pays industriels 11

    Encadr II.4: Coopration internationale entre socits d'assurance-crdit 12

    Encadr II.5: Arrangement de l'OCDE relatif aux crdits l'exportation 13

    Encadr II.6: Principes d'une bonne politique de financement des changes 13

    Encadr IV.1: Exemples de crises financires 44

    iv

  • 1Un secteur financier dvelopp et stable et un systme com-mercial international ouvert sont deux des lments essentiels la prosprit des pays. Il existe entre les finances et le commer-ce de nombreux liens qui ne sont pas toujours vidents. Les liensentre l'Organisation mondiale du commerce et le secteur finan-cier sont probablement encore moins vidents. La prsente tudea pour objet de montrer que le commerce ne peut s'panouirsans un systme financier stable et que la stabilit financire estcompromise en l'absence d'un systme commercial qui fonction-ne bien.

    Cette tude commence par expliquer ce qui lie fondamenta-lement le commerce au secteur financier, avant d'analyser lesinteractions entre les crises financires et le commerce. On ymontre comment les flux de biens et services souffrent de la fai-blesse des systmes financiers et de l'instabilit financire, etpourquoi le protectionnisme est prjudiciable la stabilit finan-cire. Nous avons voulu aller plus loin qu'un dbat thoriquesur ces rapports d'interdpendance pour examiner les preuvesempiriques des interactions entre commerce et finances. Pourfinir, nous avons tudi la contribution du cadre de rgles com-merciales multilatrales de l'OMC l'existence d'un ordre co-nomique international sain.

    Le reste de l'tude se divise en quatre chapitres. Au dbut duchapitre II, nous examinons brivement en quoi l'ouverture deschanges et le dveloppement du secteur financier contribuent la croissance, mais ce chapitre a principalement pour but d'ex-pliquer pourquoi le commerce ncessite un secteur financier quifonctionne correctement. Premirement, le crdit permet d'at-tendre entre le moment de la passation d'une commande et sonrglement de sorte qu'une transaction peut se faire mme siaucune des parties ne possde suffisamment de liquidits pourla financer. Deuximement, le secteur financier aide couvrir dif-frents risques courus par les ngociants, comme les risquescommerciaux, les risques de transport, les risques de change etles risques politiques. Beaucoup d'instruments financiers spci-fiques ont t mis au point pour cela, et les tats aident parfois supporter des risques particulirement lourds ou imprvisiblespar l'entremise d'agences de crdit l'exportation. Vu l'impor-tance du risque de change et des turbulences traverses par lesmarchs des changes au cours des deux dernires annes, nousavons ajout une annexe au chapitre II pour passer rapidementen revue les principes de la dtermination des taux de change etpour comparer les avantages et les inconvnients des divers rgi-mes de change et mcanismes d'allocation de devises.

    Les crises financires sont parmi les principales causes deperturbation des changes internationaux. Pendant ces crises, lecrdit li au commerce peut devenir coteux ou disparatre, et lesperturbations de l'conomie font baisser la demande de biens etservices marchands. Le chapitre III traite de la nature des crisesfinancires et de leurs causes. Nous avons notamment cherch comprendre le rle jou par les banques, acteurs-cls des syst-mes financiers nationaux. Le chapitre se poursuit par un examen

    des effets conomiques et commerciaux de ce genre de crise. Ily est expliqu que le commerce fait partie des remdes ces cri-ses et n'en est pas une des causes. Le commerce est gnrale-ment un facteur trs important du maintien et du rtablissementde la stabilit financire, et le maintien d'une politique d'ouver-ture commerciale tant par les pays frapps par une crise que parleurs partenaires commerciaux, contribue beaucoup au redresse-ment de ces pays. Enfin, ce chapitre se termine par une annexequi prsente brivement des stratgies de prvention et de rgle-ment des crises en dehors de la sphre commerciale.

    Le chapitre IV se compose d'tudes de cas portant sur descrises financires passes. Nous y passons en revue les causesdes crises, les manifestations empiriques de leurs retombes co-nomiques, sociales et commerciales, et la faon dont les poli-tiques commerciales peuvent contribuer, et contribuent parfois, leur propagation et leur aggravation. Nous nous sommesconcentrs sur la grande dpression, sur plusieurs crises surve-nues entre la fin des annes 70 et le milieu des annes 90, et,enfin, sur la crise asiatique rcente. La plupart des facteursaggravant les crises financires se sont rpts au cours des70 dernires annes, l'exception du protectionnisme qui n'ajou un rle important que pendant la grande dpression. Noussoutenons que l'absence de ractions protectionnistes fortesdans la priode qui a suivi la seconde guerre mondiale est l'unedes principales raisons pour lesquelles ces crises ne se sont pastendues toute la plante. Il ressort aussi que, dans plusieurspays, le commerce et l'adoption d'une politique d'ouverturecommerciale ont favoris dans une large mesure la reprise co-nomique au sortir des crises financires.

    Pour finir, nous analysons au chapitre V le rle jou par lesystme commercial multilatral en ce qui concerne les interac-tions entre commerce et finances. Nous y montrons que lesrgles de l'OMC limitent d'une faon importante les interven-tions indsirables du secteur public dans le financement deschanges, notamment au moyen de dispositions visant les res-trictions qui entravent les paiements, les transferts et le com-merce des services financiers, la pratique de taux de change mul-tiples et le rationnement des devises, et les subventions l'ex-portation. Deuximement, le systme commercial multilatralcontribue la stabilit financire en favorisant une libralisationnon discriminatoire du commerce, des politiques commercialesfondes sur des rgles et prvisibles, et un rglement harmo-nieux des diffrends commerciaux. Par ailleurs, une libralisationbien pense du commerce des services financiers peut aussicontribuer la stabilit financire, et donc profiter indirectementaux changes commerciaux.

    En rsum, la prsente tude apporte la dmonstration quele cadre de l'OMC et le systme financier international consti-tuent des lments interdpendants d'un seul et mme ordreconomique mondial, o le commerce ne peut s'panouir sansun secteur financier dvelopp et stable, et o la stabilit finan-cire est improbable si les changes commerciaux sont entravs.

    I. Introduction et rsum

  • Le prsent chapitre traite des interactions entre le commerceinternational et le secteur financier. Nous y verrons que, de nosjours, les acteurs du commerce ont besoin de crdits et d'autresservices financiers essentiels pour financer les dpenses et seprotger contre les risques lis leurs activits. Dans la partie A,nous expliquons en quoi le systme financier favorise le com-merce et la croissance. La partie B prsente certains instrumentsfinanciers lis au commerce, et la partie C porte sur le rle joupar les organismes de crdit l'exportation, y compris par lestats dans ce domaine. Compte tenu de l'importance que rev-tent les politiques de change pour le commerce, nous examine-rons brivement en annexe ce chapitre le fonctionnement desmarchs des changes, ainsi que les avantages et les inconv-nients de divers rgimes de change et mcanismes d'allocationde devises.

    A. Importance du financement pour le commerce et la croissance

    Grce l'adoption de politiques commerciales et financireslibrales, conjugue aux progrs technologiques, l'essor des changes internationaux et du secteur financier a t un important moteur de croissance aprs la seconde guerremondiale

    L'un comme l'autre, le commerce international et les servicesfinanciers constituent des moteurs de croissance importantsdans les conomies d'aujourd'hui. Pour preuve de leur impor-tance croissante, leur part dans la production est en augmenta-tion depuis quelques dcennies. Le ratio commerce internationalde biens et de services/PIB mondial est pass de quelque 8 pourcent au moment de la cration du GATT en 1947 environ25 pour cent actuellement. Le dveloppement des transactionsfinancires au cours des dernires dcennies a t aussi specta-culaire. Aux tats-Unis, le secteur financier (banques, valeursmobilires, assurance et immobilier) reprsentait 19,4 pour centde la production en 1997, contre 10,9 pour cent en 1950. Dansles autres pays industriels et en dveloppement, les servicesfinanciers (immobilier y compris) reprsentent entre 4 et 13 pourcent du PIB. Les transactions financires internationales se sontdveloppes encore plus rapidement; beaucoup d'entre elles sesont multiplies par trois dix pendant les annes 90 (pour plusde prcisions, voir Kono et al., 1997).

    Depuis la seconde guerre mondiale, le commerce internatio-nal s'est dvelopp beaucoup plus vite que la production mon-diale (OMC, 1998). Cela s'explique principalement par la dispa-rition de nombreux obstacles au commerce et une nette diminu-tion du cot des transactions. Les obstacles tarifaires et non tari-faires au commerce ont t rduits dans le cadre de sept cyclesde ngociations du GATT et de diffrentes politiques d'intgra-tion rgionale, essentiellement en Europe occidentale. La chute

    des frais de transport et de communication a galement stimulles changes. De mme, la croissance rapide du secteur financierest lie la prsence d'un environnement institutionnel favora-ble et aux progrs technologiques. Plus que jamais, l'adoption depolitiques financires librales, au niveau national et internatio-nal, conjugue au dveloppement acclr des technologies destlcommunications et de l'information et la mise au point denouveaux instruments financiers, a permis une expansion ph-nomnale des services financiers et des mouvements de capitaux l'intrieur et l'extrieur des frontires.

    Sans trop entrer dans le dtail, voyons rapidement en quoi lecommerce international et le secteur financier contribuent lasant et la croissance conomiques. En ce qui concerne le com-merce international, la spcialisation en fonction de l'avantagecomparatif de chaque pays peut entraner des gains d'efficienceimportants. Deuximement, la spcialisation permet de raliserdes conomies d'chelle. Troisimement, le commerce interna-tional largit le choix des biens et services disponibles. cesgains dits statiques, il faut ajouter le fait que le commerce inten-sifie la concurrence et stimule les transferts internationaux decomptences et de technologie, ce qui peut avoir ( long terme)des effets dynamiques positifs sur la sant et la croissance co-nomiques. Des tudes empiriques font apparatre, en matire decroissance, des diffrences marques entre les pays ouverts et lespays ferms sur eux-mmes. Sachs et Warner (1995) constatent,par exemple, que le rythme de croissance annuel des conomiesouvertes dpasse de 2 2,5 pour cent celui des conomies fer-mes, tendance confirme par d'autres tudes (voir OMC,1998b).

    Il y a seulement quelques dcennies, notre comprhensiondu rle jou par le secteur financier tait trs limite. Aujour-d'hui, nous savons que la spcialisation prsente un grand int-rt dans le domaine des finances comme dans celui du commer-ce. La raison d'tre du secteur financier tient en particulier au faitqu'il peut grer l'asymtrie de l'information entre les crancierset les emprunteurs, c'est--dire le fait que le crancier ignore laqualit de l'emprunteur (voir encadr II.1).1 Les emprunteurspeu susceptibles de rembourser leur dette (emprunteurs dou-teux) s'efforcent de dissimuler leurs faiblesses et sont prts accepter des taux d'intrt plus levs que les emprunteurs quiprsentent peu de risques. Il en rsulte un phnomne dit d'an-tislection, du fait que la demande de crdit manant d'em-prunteurs douteux tend tre disproportionne. Une fois qu'uncrdit a t accord, l'emprunteur est invit agir d'une faonqui rduit la probabilit de remboursement. C'est ce qu'onappelle le risque moral.

    Or une banque a pour spcialit de prter de l'argent et,donc, de vrifier la solvabilit des emprunteurs avant de s'en-gager, puis de surveiller leur comportement une fois le crditaccord. En tant que spcialiste, la banque peut faire ce travail

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    II. Les liens entre le commerce et le secteur financier

    1 Dans les pays industriels, les prts bancaires demeurent pour les entreprises la forme dominante de financement extrieur. La part des prts bancaires varie de plusde 50 pour cent prs de 70 pour cent dans les cinq plus grands pays industriels (selon Mishkin (1998b), page 197). Les missions d'actions et d'obligations ne jouentqu'un rle secondaire.

  • un cot moins lev qu'un crancier priv. En outre, elle peutrpartir le risque de dfaillance sur un plus grand nombre detransactions et exiger diffrentes garanties et clauses restrictives.Il existe d'autres instruments financiers qui permettent aussi derduire les frais de transaction et d'information et d'amliorerl'allocation des ressources dans l'espace et dans le temps (pourplus de prcisions, voir Levine, 1997). En consquence, lorsque lesystme financier est efficace, les intermdiaires financiers peu-vent accorder aux pargnants un meilleur taux d'intrt comptetenu du risque, et les emprunteurs peuvent obtenir un crditmoins coteux et adapt leurs besoins.

    Des tudes empiriques confirment l'hypothse que la libra-lisation des marchs financiers et leur ouverture sur le mondecontribuent la sant et la croissance conomiques par unemeilleure intermdiation entre pargnants et investisseurs. SelonLevine (1997), la prsence d'un systme financier suffisammentdvelopp pourrait avoir sur la croissance un effet direct quiva-lant au moins 1 pour cent du PIB. Selon Franois et Schuknecht(1999), le renforcement de la concurrence provoqu par l'ouver-ture sur le monde stimule la croissance conomique dans uneproportion comparable. En rsum, les pays qui possdent unsystme financier sous-dvelopp et repli sur lui-mme et ceuxdont l'conomie est ferme au commerce international croissentgnralement moins vite.

    L'essor du commerce international est favoris par l'existencedes services financiers essentiels

    Certes, l'existence d'un systme commercial ouvert et d'unsystme financier libralis engendre d'normes avantages co-nomiques, mais l'un ne va pas sans l'autre. Le commerce inter-national se porte beaucoup mieux lorsque le secteur financier estdvelopp et fonctionne correctement, et rciproquement. Nousverrons que le commerce international requiert d'importants ser-vices financiers, en l'absence desquels le cot des transactionscommerciales risque d'augmenter fortement. En d'autres termes,les services financiers sont un lubrifiant aux changes inter-nationaux. En mme temps, le commerce cre une demanded'institutions et de services financiers et en favorise l'essor.

    Fondamentalement, le commerce international fait partie duprocessus d'investissement. Un entrepreneur, par exemple, inves-tira dans des produits destins aux marchs d'exportation dansl'espoir de raliser un bnfice. Le secteur financier l'aidera dequatre faons faire des affaires avec l'tranger. Premirement,il lui permettra de tenir entre le moment o il a besoin d'argentpour ses activits de production, le transport, etc., et le paiementde ses produits par l'importateur, en finanant son fonds de rou-lement. Les banques jouent un rle prpondrant cet gard enprtant aux investisseurs et aux ngociants. Pour cela, elles doi-vent recueillir des dpts. Les banques ne sont pas seulement un

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    Encadr II.1: Asymtrie de l'information, antislection et risque moral sur les marchs financiers

    Sur les marchs financiers, il arrive souvent qu'une partie ne soit pas suffisamment renseigne sur l'autre partie pour prendre unebonne dcision. Ce dsquilibre est appel asymtrie de l'information. L'emprunteur, par exemple, est habituellementmieux inform que le prteur sur la rentabilit attendue de l'investissement auquel les fonds sont affects et sur les risques qui luisont associs. Ce manque d'information est source de problmes pour le systme financier, tant avant qu'aprs la conclusion de latransaction.

    Le problme dit de l'antislection est d l'asymtrie de l'information obtenue avant la conclusion de la transaction. Sur lesmarchs financiers, ce problme survient lorsque les candidats emprunteurs les plus douteux sont ceux qui dpensent le plusd'nergie pour obtenir un prt et qui ont donc le plus de chances d'tre slectionns. Comme l'antislection augmente la proba-bilit que des prts soient accords des emprunteurs insolvables, les cranciers peuvent dcider de ne plus octroyer aucun prtmme s'il y a des emprunteurs solides sur le march.

    Imaginons deux entrepreneurs qui vous pourriez faire un prt. Le premier est une personne prudente et comptente qui emprun-te uniquement quand son investissement promet d'tre rentable. Le deuxime, en revanche, est un spculateur. Il est prt saisirun plus grand nombre d'occasions d'investissement, et est donc plus susceptible de demander un prt. Mais supposons que vousne connaissiez pas trs bien ces entrepreneurs. Par crainte de vous tromper, vous dciderez peut-tre de ne prter aucun des deuxmme si le plus prudent aurait t un bon risque.

    On entend par risque moral le problme engendr par l'asymtrie de l'information aprs la conclusion de la transaction. Il s'agitdu risque que l'emprunteur entreprenne des activits juges indsirables (immorales) par le crancier parce qu'elles rduisent laprobabilit de remboursement. Face ce risque moral, certains cranciers prfreront ne pas s'engager. l'origine, cette expres-sion a t employe par le secteur de l'assurance pour dsigner le cas o, par exemple, des gens deviennent moins prudents dslors qu'ils ont contract une assurance contre le vol ou l'incendie.

    Le problme de l'asymtrie de l'information est probablement plus grave dans les pays en dveloppement que dans les conomiesplus dveloppes, pour deux raisons: l'information est plus difficile obtenir et les instruments conus pour protger les parties nesont pas toujours disponibles. Les marchs boursiers, les marchs des obligations mises par les socits et les agences de nota-tion y tant moins dvelopps, il est plus difficile d'obtenir les informations ncessaires et d'viter l'antislection. L'offre de servi-ces financiers est souvent extrmement limite cause des carences du systme juridique, qui rendent longues et coteuses lesprocdures visant faire excuter les contrats. Cela limite par exemple la possibilit de recourir un nantissement pour attnuerle risque moral.

    Source: Mishkin, 1998b.

  • intermdiaire entre les pargnants et les investisseurs, mais aussiun moyen de concilier les prfrences divergentes des dposants(qui veulent souvent placer leur argent court terme) et desemprunteurs (qui ont souvent besoin de capitaux moyen oulong terme).

    Deuximement, le secteur financier fournit des services quiaident l'exportateur se faire payer de la faon la moins coteu-se et la moins risque possible. Les tablissements financiersfacilitent le flux de l'argent, que ce soit sous la forme de simplestransferts d'argent entre deux comptes d'une mme banque oude services financiers plus complexes comme des services decrdit-bail ou de change.

    Troisimement, les tablissements financiers fournissent desinformations prcieuses aux investisseurs et aux ngociants. Ilsrenseignent leurs clients sur la situation prsente et future desmarchs montaire et financier. Ils ngocient des contacts com-merciaux, font des tudes de march et vrifient la solvabilitdes clients (et de leur banque).

    Quatrimement, le secteur financier couvre certains risquesengendrs par les changes commerciaux, en offrant descontrats d'assurance pour le transport des marchandises et lecrdit l'exportation, mais aussi des contrats de change terme(pour se prmunir contre les variations des taux de change).D'autres dispositifs permettent de s'assurer contre une dfaillan-ce du vendeur et contre les risques rsultant d'un changementde la politique gouvernementale. Sans ces instruments finan-ciers, dont nous traiterons plus en dtail ci-dessous, il existeraitbeaucoup d'entraves au commerce international. Depuis tou-

    jours, le dveloppement du commerce international et celui dusecteur financier vont de pair.

    L'interaction entre le commerce et le secteur financier n'est pas sens unique: si un systme financier bien dvelopp favorise leschanges, le commerce cre aussi une demande de services financierset contribue, par-l mme, l'essor des systmes financiers. L'histoiredes innovations financires montre que la gestion des risques extraor-dinaires dcoulant des changes effectus sur de longues distances asouvent t l'origine de nouveaux instruments financiers (voir enca-dr II.2). La cration de socits par actions a permis de rpartir sur denombreux pourvoyeurs de capitaux le risque engendr par de grandesoprations commerciales (comme la cration d'une flotte marchande).Le rglement par traite a permis d'liminer le risque engendr par letransport de monnaie. En consquence, au fil du temps, les grandscentres commerciaux de la plante en sont aussi devenus les centresfinanciers les plus importants. Qu'il s'agisse des villes italiennes laRenaissance (Venise, Gnes et Florence), ou de Londres, New York,Hong Kong Chine et Singapour aujourd'hui, les marchs financiers lesplus volus ont t, toutes les poques, les principaux centresd'change de biens et de services. Quand le commerce prospre, lesecteur financier en profite, et inversement. Il convient de garder l'esprit ce lien de dpendance rciproque mais,dans la suite de ce cha-pitre, nous nous pencherons surtout sur le rle jou par le secteurfinancier dans le dveloppement du commerce.

    B. Instruments financiers lis au commerce

    Nous avons vu rapidement plus haut que le secteur financierconstitue un important lubrifiant du commerce international.

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    Encadr II.2: Le commerce et la finance au moyen ge, prcurseurs du systme commercial et financier international actuel

    Beaucoup de relations commerciales et financires actuelles remontent des innovations survenues en Europe occidentale entrele XIVe et le XVIe sicle. l'poque, les villes italiennes sont devenues les plus avances de l'Europe et les principaux centres detransactions commerciales et financires entre parties loignes. Gnes et Venise, en particulier, aides par leur puissance maritime,se sont imposes comme les grands centres du commerce et des finances.

    La remarquable expansion du commerce au long cours pendant cette priode a t aide non seulement par une chute du cot dutransport maritime, mais aussi par la mise au point d'instruments juridiques, l'amlioration de l'organisation des entreprises et denouvelles techniques financires. Le droit commercial international d'aujourd'hui a eu pour prcurseurs la lex mercatoria, la jus mer-catorum et la Law Merchant. Le transport maritime a t rglement par des textes comme le Rle d'Olron et le Consolado delMar. Ces lois et rglements ont t appliqus par divers tribunaux comme les tribunaux du commerce des grands centres com-merciaux. Les premires formes d'assurance maritime sont aussi nes cette poque.

    La comptabilit en partie double, innovation importante, est ne Pise en 1336. Les lettres de pouvoir et les socits anonymesou responsabilit limite sont apparues Florence en 1408. L'avnement du papier-monnaie (chques, lettres de change, etc.),des livres comptables et de la compensation bancaire a eu pour effet de rduire le cot de transactions financires qui deman-daient jusque-l le transport, trs risqu, de pices d'or et d'argent. Ces progrs ont aussi contribu l'expansion du crdit mmes'il tait toujours officiellement interdit de prter de l'argent contre le versement d'un intrt. D'autres villes d'Italie et d'Europecentrale et occidentale ont suivi le mouvement.

    En ce temps-l, le commerce et la finance taient peut-tre encore plus troitement lis qu'aujourd'hui. Toutes les grandes mai-sons de ngoce faisaient aussi office de banque: en plus de recueillir des dpts qu'elles rmunraient un taux fixe, elles propo-saient diffrents services pour les paiements internationaux et des facilits de crdit intressantes pour le transport maritime et lecommerce au long cours. Le progrs des techniques financires a aussi contribu la rvolution commerciale qu'a t la sdenta-risation des marchands aventureux, qui se sont mis utiliser un rseau d'agents, de transporteurs ou d'employs bass dans lescentres commerciaux trangers.

    Source: Bernard (1971).

  • Le crdit aide les exportateurs tenir entre le moment o ilsengagent des dpenses ( la suite d'une commande, par exem-ple) et le moment du paiement. Les tablissements financiersfacilitent les paiements et mouvements de fonds transfrontires,fournissent des renseignements sur les pays et les partenairescommerciaux trangers et les risques qu'ils prsentent, et assu-rent les risques lis au commerce. Il importe de se rappeler qu'enprincipe ils remplissent les mmes fonctions pour les activitsstrictement intrieures, mais le commerce international se diff-rencie des changes intrieurs sur des points importants, et cer-tains instruments ont t conus prcisment pour remdier auxproblmes que cela pose. Dans les paragraphes qui suivent, nousnous pencherons un peu plus longuement sur le rle du secteurfinancier dans le financement du commerce international et lacouverture des risques associs.

    Importance des crdits commerciaux

    Un lment-cl du financement des changes: le crdit

    La forte croissance du commerce mondial observe au coursdes dernires dcennies a t facilite par une expansion rapidedes instruments de financement des changes. Les crdits com-merciaux, notamment, aident les parties une ngociation tenir entre la passation d'une commande l'exportation et lepaiement des biens et services produits. Si le paiement se fait aumoment de la livraison ou aprs, il appartient l'exportateur detrouver le fonds de roulement et les moyens de financementdont il a besoin. Il arrive que le paiement de certaines importa-tions s'tale sur plusieurs annes, auquel cas la priode definancement est d'autant plus longue. Si le paiement s'effectue la commande, c'est l'importateur qui doit financer la transac-tion. De nombreux facteurs, dont la nature du produit et de larelation commerciale et la surface financire de chaque partie,dterminent qui est le plus apte et dispos financer la transac-tion. L'exportateur qui possde beaucoup de liquidits et quivend depuis longtemps un produit standardis un client fidlen'exigera peut-tre pas de paiement avant la livraison, tandisque l'exportateur install dans un pays o le crdit est rare et quivend un produit trs spcialis un client inhabituel pourra exi-ger de l'importateur un paiement la commande.

    Environ 90 pour cent des changes mondiaux sont rgls aucomptant ou au moyen de crdits moins de 180 jours(Stephens, 1998a). Les changes de matires premires et debiens de consommation, qui font souvent l'objet de transactionsrptitives entre les mmes acteurs, ainsi que les changes inter-nationaux de plus en plus importants entre filiales de multina-tionales, sont en grande partie rgls ainsi. Les financements moyen et long termes sont plus frquents dans les secteurs desbiens d'quipement durables et des projets d'amnagement.2

    Les exportations de grande valeur, tales sur une longuedure, en particulier, obligent souvent l'exportateur demanderdes facilits de crdit. Le montant de l'opration et la longueur

    de la priode de crdit ainsi que l'importance des divers risques(imputables par exemple la situation conomique et politiquedu pays de l'importateur) peuvent augmenter sensiblement lecot du financement ou mme rendre difficile l'obtention d'uncrdit.

    Gestion des risques lis aux changes commerciaux internationaux

    La disponibilit et le cot des crdits commerciaux dpen-dent beaucoup de quatre types de risques: le risque conomiqueou commercial, le risque de change, le risque de transport et lerisque politique (graphique II.1). Ces risques sont soit beaucoupplus limits, soit carrment inexistants dans les changes int-rieurs. Le genre d'instrument financier choisi pour se protger estfonction de trois facteurs:

    la perception que l'on a de la nature et de l'importancedu risque pos par la transaction;

    la rpartition du risque et des mesures de rduction durisque entre les exportateurs, les importateurs et leursbanques;

    le cot de la rduction du risque.

    De faon plus gnrale, on peut probablement dire sans setromper que plus un systme financier est dvelopp et efficace,plus les ngociants ont une chance de trouver un instrumentfinancier qui rponde peu de frais leurs besoins en matirede crdit et d'assurance (rduction du risque).

    La rduction du risque conomique ou commercial dans le cadre d'changes internationaux est parfois difficile

    Les changes tant intrieurs qu'internationaux donnent lieu ce qu'on appelle un risque conomique ou commercial. Pourl'exportateur, ce risque rside essentiellement dans la possibilitque l'importateur n'accepte pas la marchandise livre ou qu'ilrefuse de la payer aprs l'avoir rceptionne. Quant l'importa-teur, il court le risque que l'exportateur ne livre pas dans lesdlais un produit de la qualit convenue. Dans les deux cas, lescapitaux engags qu'ils proviennent des fonds propres de l'en-treprise ou d'une facilit de crdit sont exposs.

    Le risque commercial est li au problme de l'asymtrie del'information, problme qui peut tre beaucoup plus importantdans le contexte international. L'exportateur et sa banqueconnaissent moins bien la situation des entreprises trangres(importateurs ou banques), et la situation conomique et lalgislation du pays importateur que celles de leur propre pays etdes clients nationaux. C'est pourquoi les grandes banques s'ap-puient souvent sur des correspondants autres banques ou suc-cursales installs l'tranger, pour obtenir les renseignementsncessaires sur les clients trangers, le systme juridique et lescueils ventuels.

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    2 En 1996, plus du tiers des exportations de marchandises des tats-Unis et plus de 40 pour cent de leurs importations correspondaient des oprations internes demultinationales. Cependant, la faible proportion des financements moyen et long termes (environ 10 pour cent pour l'ensemble des pays, mais sensiblement plusleve pour beaucoup de pays en dveloppement) est assez tonnante compte tenu de la part croissante prise par les biens d'quipement (machines, etc.) dans leschanges internationaux. La forte croissance de l'IED (dont les importations de biens d'quipement reprsentent un volet important) depuis dix ans porte aussi pen-ser que la part des biens d'quipement dans les changes mondiaux va en augmentant, ainsi que, par consquent, la demande de crdits commerciaux long terme.

  • On souligne souvent que le risque commercial est accrulorsque les droits de proprit, le droit des contrats, les procdu-res d'arbitrage, la Loi sur les faillites et les tribunaux ne sont pasadapts. Un environnement juridique dficient porte prjudiceau commerce international, les parties ne pouvant faire respec-ter leurs droits, de sorte que les frais engager pour limiter cesrisques augmentent ou peuvent mme devenir prohibitifs. Leschanges internationaux peuvent donc tre trs pnaliss par lescarences du cadre juridique, comme par celles du secteur finan-cier.

    Pour attnuer le risque commercial, il est capital de bienchoisir son instrument de financement des changes.L'entreprise qui recourt au crdit pour financer ses exportationspeut demander une garantie ou une assurance contre le risque prvoir auprs d'un tablissement commercial ou public (pourplus de prcisions, voir la partie suivante). En outre, diffrentsinstruments ont t mis au point qui diffrent principalement ence qui concerne le moment o le risque commercial est transfrde l'exportateur l'importateur (voir graphique II.2).

    Les ngociants peuvent choisir entre diffrents instrumentsselon l'importance du risque commercial et le moment retenupour transfrer ce risque de l'exportateur l'importateur

    On distingue principalement quatre instruments de finance-ment des changes, au moyen desquels le risque commercial esttransfr de l'exportateur l'importateur diffrents stades dela transaction: compte ouvert, encaissement (de la somme due)contre remise de documents, lettre de crdit, et paiement la

    commande. Les trois premiers sont les plus frquemmentemploys (pour plus de prcisions, voir le CCI, 1997).

    Si l'importateur dsire assumer le risque commercial le plustard possible, il demandera payer aprs la livraison. Dans cecas, l'opration se rgle habituellement sous la forme d'uncompte ouvert. L'acheteur paie le vendeur par transfert aprsrception des documents. La formule du compte ouvert est utili-se pour les changes entre filiales, ou pour les exportationsd'une valeur relativement petite destines des entreprises aveclesquelles l'exportateur entretient depuis longtemps des liensimportants. Dans ce cas, la modicit des transactions, leur carac-tre rptitif et la relation existant entre l'acheteur et le vendeurfont que le risque est limit. Les oprations rgles au moyend'un compte ouvert n'entranent que des frais administratifsminimes. Si l'exportateur a besoin de liquidits avant d'trepay, il peut demander un crdit ou une ligne de crdit sabanque.

    Si l'exportateur veut rester en possession de la marchandisetant que lui-mme ou son agent n'ont pas t pays (au comp-tant, par traite ou par tout autre moyen), il devra penser l'en-caissement contre remise de documents. Cette for-mule est conseille quand l'exportateur et l'importateur seconnaissent et que le risque commercial n'est que modr.Habituellement, l'exportateur demande au transporteur de nedcharger les marchandises dans l'entrept en douane du porttranger que contre remise d'une preuve de paiement. Aveccette mthode, l'exportateur transfre le risque commercial

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  • l'importateur au moment de la livraison de la marchandise et desjustificatifs pertinents.3

    Dans le cas des transactions commerciales juges assez ris-ques eu gard la solvabilit de l'importateur, il est recom-mand de transfrer le risque commercial plus tt. L'exportateurdispose de divers moyens pour se faire payer. Il demandera habi-tuellement l'importateur de lui fournir une lettre de crditde sa banque.4 Une lettre de crdit garantit l'exportateur ques'il remplit lui-mme certaines conditions, il sera pay par labanque de l'importateur. C'est maintenant cette banque quiprend en charge le risque de dfaillance de l'entreprise importa-trice. Si l'exportateur doute de la solvabilit de la banque de l'im-portateur, il peut demander sa propre banque de confirmer lalettre de crdit. Cela lui permettra d'tre pay mme si la banquede l'importateur est dfaillante. Une autre faon de limiter lesrisques, pour l'exportateur et sa banque, est d'obtenir une garan-tie publique l'gard de la banque de l'importateur qui a tablila lettre de crdit.

    La lettre de crdit peut prsenter des avantages importantspour les deux parties moyennant un cot relativement faible:pour l'exportateur, premirement, le risque de non-paiementdisparat si la banque jouit d'une rputation sans faille.Deuximement, le risque politique (voir ci-dessous) est souventattnu, la banque trangre connaissant en principe parfaite-ment les restrictions de paiement et autres risques politiquesexistants ou craindre. Troisimement, l'exportateur connatdans le dtail toutes les conditions qu'il doit remplir pour trepay intgralement et rapidement. Il conomise du temps et del'argent du fait que la banque vrifie pour lui la solvabilit del'importateur. Le financement de son fonds de roulement estfacilit du fait qu'il peut prouver que le paiement est garanti. Del'autre ct, l'observation, par l'exportateur, des conditionsnonces dans la lettre de crdit donne l'importateur l'assu-rance que les marchandises sont effectivement expdies unmoment dtermin, ce qui sera attest par un connaissement bord. En outre, la banque se charge de veiller ce que les mar-

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    3 Normalement, l'exportateur remet sa banque la facture, une traite tire sur l'importateur et les documents de transport qu'il a reus de son transitaire. Labanque de l'exportateur transmet ces documents son agent ou la banque destinataire du pays de l'importateur. L'agent ou la banque trangre en questioninforme l'importateur qu'il pourra se procurer au port ou l'aroport les documents ncessaires la livraison de la marchandise sous rserve qu'il donne un ordrede paiement sa banque ou qu'il accepte la traite tire sur son compte. Une fois reu l'ordre de paiement, l'agent ou la banque trangre envoie les fonds labanque de l'exportateur, qui crdite le compte de ce dernier.

    4 La lettre de crdit est une lettre tablie et signe par une banque, adresse un exportateur (vendeur), dans laquelle la banque s'engage lui verser une cer-taine somme condition qu'il se conforme exactement ce qui est stipul dans la lettre. De manire gnrale, la banque remet l'argent lorsque l'exportateur a pufournir diffrents documents attestant qu'il a assum la part du contrat de vente qui lui revient. Il peut s'agit d'une lettre de transport, de certificats d'assurance,de factures, etc. En d'autres termes, l'engagement d'un rglement de l'importateur est substitue, pour l'exportateur, une quasi-garantie de paiement apportepar la banque. Si la lettre de crdit fait tat d'un rglement vue, l'exportateur est pay immdiatement contre remise de la traite vue la banque tire. Sil'exportateur reoit une traite terme, il pourra facilement l'escompter.

  • chandises soient conformes aux conditions fixes. Les banquesdisposent de spcialistes mieux aptes vrifier les justificatifsqu'un importateur moins habitu aux documents utiliss pour lecommerce international. L'importateur s'vitera aussi ventuelle-ment de puiser dans sa trsorerie pour verser une avance enespces la demande de l'exportateur.

    Lorsqu'une transaction est trs risque (ou que l'exportateurest allergique au risque), le paiement la commandepeut tre la forme de financement conseiller. Elle fait courir l'importateur l'essentiel du risque li la transaction et sonfinancement. On peut donc dire qu'un systme qui donne accs ces instruments financiers essentiels favorise les changesinternationaux en contribuant diminuer le risque commercial.

    Un systme financier efficace peut apporter une protectioncontre les trois autres risques importants engendrs par le commerce international: le risque de change, le risque de transport et le risque politique

    Risque de change: l'exportateur et l'importateur cou-rent le risque que, entre la commande et la livraison, la situationconomique volue de telle manire que l'opration perde deson intrt pour au moins l'une des parties. Le risque de changepeut provoquer ce genre d'volution car de grandes variationsdu taux de change peuvent augmenter ou diminuer sensible-ment la rentabilit d'une transaction commerciale. Tel importa-teur qui passe, par exemple, une commande de 1 million de dol-lars EU profitera beaucoup moins de l'opration (ou n'en profi-tera pas du tout) si la devise de son pays se dprcie subitementde 20 pour cent et si, du mme coup, il doit payer ses importa-tions 20 pour cent plus cher.

    Dans une grande mesure, le risque de change est fonction durgime de change. Dans les pays o le taux de change est fixe,ce risque tient la possibilit que la parit ne puisse tre main-tenue et qu'il y ait une dprciation ou une apprciation de lamonnaie. Les rgimes de taux de change flottants, et donc trsinstables, crent un risque norme.5 Plusieurs dispositifs de pro-tection contre le risque de change ont t mis au point, qui per-mettent de limiter ce risque pour un cot relativement faible.Dans le cas d'un contrat important, l'exportateur peut demander sa banque de vendre terme les devises qu'il s'attend rece-voir. Comme les oprations terme portent habituellement surun montant suprieur 1 million de dollars EU, les petits expor-tateurs doivent se rabattre sur les marchs des contrats termeo ils peuvent acheter des options de vente, c'est--dire desoptions leur permettant de vendre pendant un certain temps desdevises un taux dtermin. Le cot d'une telle opration decouverture consiste en une commission (d'environ 0,3 pour centselon le montant et la devise) en plus du prix de l'option (quidpend du taux de change du moment, du taux d'exercice del'option, de la dure pendant laquelle l'option peut tre leve,des taux d'intrt relatifs et de la volatilit historique du taux dechange). Si la valeur de la devise tombe au-dessous du coursd'exercice, l'exportateur lvera son option et recevra l'quivalent

    convenu dans la monnaie de son pays. Sinon, il ne lvera pas sonoption mais convertira ses devises sur le march au comptant autaux en vigueur, plus lev. Dans le cas d'une transaction pluslongue chance, l'exportateur peut faire un swap de devises. Ils'agit d'une formule particulirement intressante (et peucoteuse) lorsque l'exportateur attend des rentres rgulires dedevises qui pourront tre changes contre sa monnaie.

    Dans certains cas, par exemple pour la fourniture de ptrole,la monnaie de facturation est impose et les parties peuvent ounon se couvrir contre le risque de change. Dans d'autres cas, lamonnaie dans laquelle le march est libell peut dpendre del'aptitude des partenaires se couvrir contre le risque de chan-ge et de leurs prfrences cet gard. Allen, Carse et Fujio(1987) ont constat que les exportateurs britanniques prf-raient facturer en livres anglaises dans la premire moiti desannes 80. Le risque de change s'en trouvait ainsi rduit, encontrepartie de quoi ils acceptaient frquemment d'assouplir lesconditions de paiement. l'inverse, les exportateurs japonais semontraient trs souples concernant la devise de facturation maisextrmement fermes sur les dates de paiement, ce qui leur per-mettait de se couvrir contre le risque de change. En cons-quence, plus de 85 pour cent des exportations des deux payschappaient au risque de change.

    En 1992, la moiti environ du commerce mondial se rglaiten dollars EU. Les autres principales devises utilises pour factu-rer des transactions internationales taient le mark (16 pourcent) et le yen, la livre sterling et le franc franais (5 pour centchacun) (Hartmann, 1996). Il se peut que la part des diffrentesdevises volue avec l'avnement de l'euro. Les monnaiesinconvertibles sont rarement employes. Souvent, les pays dontla monnaie est inconvertible ont aussi un systme financier sous-dvelopp qui n'offre que des possibilits de couverture limitesou nulles. Les ngociants de ces pays sont donc trs dsavanta-gs par rapport ceux des pays qui disposent d'une monnaieconvertible et d'un march des changes dvelopp.

    Risque de transport: les ngociants peuvent subir despertes si la marchandise est endommage ou dtruite pendantson acheminement. Ce danger est augment dans les transac-tions internationales parce que la distance et la dure du voya-ge sont souvent plus longues, les navires peuvent sombrer et lamarchandise peut tre bloque en douane. Elle peut aussi sedtriorer sous l'effet de la chaleur, du froid et de l'eau, ou nepas arriver destination la suite d'un vol ou d'une erreurd'acheminement. L'assurance transport permet de se prmunircontre ces pertes, et les compagnies d'assurance couvrent cerisque pour une prime infrieure 1 pour cent de la valeur desmarchandises et du fret, en fonction du risque de la destination.

    Risque politique: enfin, le risque politique peut tre lasource de pertes pour les parties. Ce risque est beaucoup pluslimit, voire presque inexistant, dans le cas des transactionsnationales. l'chelle internationale, en revanche, une guerre ouun embargo peut empcher la marchandise de parvenir

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    5 Au XIXe sicle, ce risque tait absent pour les grandes nations commerantes car les taux de change taient fondes sur l'talon-or. Dans les annes 50 et 60,le rgime de taux de change fixes mais modifiables adopt Bretton Woods a limit le risque de change certaines priodes de correction. Cependant, du fait del'inconvertibilit de plusieurs devises (la livre, le mark et le franc franais jusqu'en 1958), les ngociants taient exposs un risque de modification de la rgle-mentation des changes.

  • l'acheteur, ou l'acheteur de la payer. De mme, une rvolte ouune guerre civile peut empcher l'achvement d'une transactioncommerciale. Font aussi partie des risques politiques les change-ments de politique conomique qui interdisent les transferts dedevises et qui empchent par consquent l'importateur de payerce qu'il a achet. Le risque politique est gnralement couvertpar une agence de crdit l'exportation, comme on le verra ci-aprs.

    C. Les agences de crdit l'exportation et le rlede l'tat dans le financement des changescommerciaux

    Nous avons vu dans la partie qui prcde que le crdit ban-caire et plusieurs instruments financiers facilitent dans une gran-de mesure le commerce international, mais nous avons aussimontr que le risque commercial et politique li aux transactionscommerciales internationales est souvent beaucoup plus impor-tant que dans le cas des transactions nationales, parce que lesentreprises sont mal renseignes sur leurs partenaires commer-ciaux trangers, que le cadre juridique n'est peut-tre pas suffi-samment complet et qu'une guerre, une situation de crise oul'application soudaine de restrictions de paiement peut emp-cher l'excution d'un contrat.

    Le problme pos par l'asymtrie de l'information, aggravau niveau international (surtout dans les pays qui possdent unsystme financier peu dvelopp), et l'impossibilit ou le refusdes banques commerciales d'assumer certains risques cono-miques et politiques (notamment pour des marchs importantset de longue dure) sont souvent considrs comme une justifi-cation conomique de l'intervention de l'tat dans le finance-ment des changes. Le soutien de l'tat est gnralement appor-t par l'intermdiaire d'agences de crdit l'exportation (ACE).De faon gnrale, ces dernires proposent diverses formes definancement des changes, recueillent et fournissent des infor-mations, offrent l'tat et aux entreprises un moyen de pressionpour inciter les gouvernements et ngociants trangers respec-ter les contrats, et mettent les risques en commun. Cependant,des tablissements privs et des banques de dveloppementsont aussi de plus en plus prsents sur ce march.

    La plupart des pays industriels et en dveloppement ont sousune forme ou une autre une ACE pour promouvoir les exporta-tions. Les agences participent au financement des changes aumoyen de trois principaux types d'instruments: des crdits pourdes transactions qu'il serait difficile (ou beaucoup plus coteux)de financer par des prts purement commerciaux; des garantiesde remboursement des crdits, qui permettent aux exportateursde bnficier de conditions plus favorables de la part de leursbanques; et des assurances qui protgent les exportateurs cont-re les risques commerciaux et politiques. Aux tats-Unis, parexemple, l'Eximbank demande environ 0,5 pour cent pour lesprts, 0,125 pour cent pour les garanties et applique un tauxuniforme de 1/16me de 1 pour cent pour son programme d'as-surance-crdit.

    La composition du portefeuille et la structure des ACE enrevanche varient sensiblement d'un pays l'autre. Dans certainspays, les ACE sont des organes gouvernementaux, mais elles

    sont de plus en plus souvent gres comme des entreprisespubliques ou commerciales qui administrent un compte au nomde l'tat. Pour soutenir le commerce, les gouvernements propo-sent des crdits des taux d'intrt infrieurs aux taux du mar-ch, des conditions de remboursement avantageuses ainsi quedes garanties et des assurances pour un cot infrieur au prix derevient. De plus en plus, les ACE doivent couvrir leurs frais (ycompris leurs pertes normales), mais bnficient d'une garantiede l'tat. L'ACE peut couvrir la totalit du montant du crdit l'exportation, mais beaucoup appliquent une franchise, 10 ou15 pour cent de la perte devant tre supports par l'exportateurou sa banque (encadr II.3).

    Depuis quelques annes, les ACE subissent de fortes pres-sions concurrentielles, les agences prives et les banques dedveloppement multilatrales assurant une part croissante dufinancement des changes internationaux. De nouveaux instru-ments financiers apparaissent, l'valuation des risques interna-tionaux s'amliore, et le financement des projets particulire-ment importants se fait dans le cadre d'une coopration. LaBanque mondiale, par exemple, soutient frquemment des pro-jets qui sont cofinancs par des ACE. Cette coopration est avan-tageuse parce que les ACE allgent le fardeau financier de laBanque mondiale tandis que cette dernire leur fournit des infor-mations que, sans elle, elles ne pourraient se procurer.

    Des ACE nationales ont constitu des associations inter-nationales pour changer des savoir-faire et des renseignementstechniques (concernant, par exemple, l'valuation des risques) etpour dfendre leurs intrts au niveau supranational (UE, OCDE,ONU) (CCI, 1997). Les principales associations sont l'Associationpanamricaine de cautionnement (130 membres dans lemonde), l'ALASECE, la Confrence arabe des assureurs de crdit,l'Union de Berne (44 membres), l'Association internationale desassureurs-crdit (43 membres) et l'Union de Dakar (18 mem-bres) (encadr II.4).

    Comme dans toute activit commerciale faisant intervenirl'tat, le danger existe que les objectifs initiaux de cette inter-vention soient dtourns. Stephens (1998b) a tabli une liste dece que les ACE doivent faire et ne pas faire. Selon lui, les ACE ont jouer un rle important de couverture du risque politique pourlimiter les problmes poss par une interruption des transferts dedevises, la guerre, la dfaillance d'acheteurs du secteur public,etc. Il convient de ne pas sous-estimer non plus le risque com-mercial, qui est particulirement prsent en priode de rcession.Au sujet de ces deux types de risque, les ACE sont gnralementbien informes. Une bonne information, mais aussi l'acquisitiondes comptences et de la formation ncessaires par l'interm-diaire des ACE peuvent aider les exportateurs conclure desmarchs rentables. Grce leurs effectifs et leur poids com-mercial, les ACE peuvent aussi tre mieux armes que des entre-prises isoles pour exercer des pressions afin de rduire lesrisques politiques et commerciaux.

    Souvent, grce leurs rseaux internationaux, leur capaci-t de mettre en commun les risques et aux garanties gouverne-mentales, les ACE peuvent financer les exportations dans dessituations qui, sans elles, seraient extrmement dlicates, commec'est le cas lorsqu'il s'agit de vendre des clients situs dans unpays haut risque et en proie une crise financire. Nous ver-

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  • rons plus loin que la crise financire asiatique a eu pour effet derestreindre l'offre de financement du commerce et de faire par-fois des ACE le seul recours restant cet gard. Dans de tellesconditions, il arrive aux tats d'tre sollicits pour fournir descrdits commerciaux et maintenir des lignes de crdit par desgaranties partielles ou totales.6

    Il est beaucoup question des difficults rencontres par lesexportateurs des pays industrialiss dans les pays en dveloppe-ment et du rle utile jou par les ACE cet gard. Il convientcependant de souligner que les exportateurs des pays en dve-loppement ont probablement encore plus besoin d'ACE effica-ces. Ces entreprises (et leurs banques) sont souvent relativementpetites et, donc, moins en mesure de s'informer sur les risquescommerciaux et politiques existant l'tranger. Par ailleurs, lesconditions de financement qu'elles obtiennent sont frquem-ment moins favorables cause de la mfiance des importateursdes autres pays. En consquence, les ngociants des pays endveloppement doivent payer plus rapidement leurs importa-tions (parfois mme la commande) tout en tant pays plustard (parfois seulement aprs la livraison); du coup, leurs besoinsde financement sont plus importants que ceux de leurs homolo-

    gues des pays industrialiss. Les ACE des pays industrialiss peu-vent tre d'un secours dans ce domaine en garantissant lesexportations destines aux pays en dveloppement et en rdui-sant par-l mme les besoins de financement de leurs importa-teurs.

    Parmi les choses que les ACE ne devraient pas faire, Stephensmentionne la poursuite d'objectifs officiels pour lesquelsd'autres instruments conviendraient mieux. Les ACE ne doiventpas contribuer au financement d'exportations qui ne seront pro-bablement jamais payes. Comme, au bout du compte, l'tat doitassumer les crances douteuses des ACE, sa situation financirepeut s'en trouver fragilise. Les ACE ne doivent pas subvention-ner de crdits moyen ou long terme, qui sont gnralementplus coteux et causent plus de distorsions que les crdits court terme (pour une mme bonification d'intrts). cetgard, l'Arrangement relatif aux crdits l'exportation imposedes restrictions importantes aux membres de l'OCDE (voir enca-dr II.5). De mme, les ACE ne doivent pas subventionner lefonds de roulement des entreprises, qui doit tre financ par desbanques commerciales. Elles ne doivent pas se substituer auxinstruments d'aide directe, ni soutenir des entreprises nationales

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    Encadr II.3: Les agences de crdit l'exportation dans les pays en dveloppement et dans les paysindustriels

    Lesotho National Development Corporation

    Avec l'aide du Programme des Nations Unies pour le dveloppement et du Centre du commerce international, le gouvernement duLesotho a cr un ensemble complet de services de financement des exportations. La Lesotho National Development Corporation(LNDC) fournit une garantie aux exportateurs qui empruntent en s'engageant rembourser l'institution prteuse un certain pour-centage de la perte subie en cas de dfaillance de l'emprunteur. La responsabilit de la LNDC est cependant limite 5 pour centde la valeur de la perte, tandis que les 95 pour cent restants sont supports par le Fonds de dveloppement des exportations (grpar la Division du financement des exportations de la Banque centrale). Ce systme d'assurance-crdit est surtout destin auxexportateurs de produits fabriqus au Lesotho et aux produits lis l'exportation ayant pour effet d'accrotre la production locale.

    Les exportateurs peuvent aussi obtenir du crdit avant et aprs expdition. La formule du crdit avant expdition est conue pourles entreprises qui fabriquent des produits destins des marchs extrieurs. Une avance peut leur tre accorde, dans une cer-taine limite, sous la forme d'un prt ou, parfois, d'un dcouvert pour une dure maximale de 180 jours. La formule du crdit aprsexpdition permet d'obtenir un financement jusqu' ce que l'acheteur tranger ait pay les marchandises expdies.

    Hermes Kreditversicherungs (Allemagne)

    La Hermes Kreditversicherungs-AG, entreprise prive, est la plus ancienne socit d'assurance-crdit de l'Allemagne et l'une desplus grandes d'Europe. Entre autres choses, elle propose aux exportateurs et aux banques commerciales, en son nom propre ou aunom du gouvernement fdral, des services d'assurance et de garantie des crdits l'exportation. Ils sont ouverts tous les expor-tateurs allemands, publics et privs, ainsi que les exportateurs trangers installs dans des pays o elle a des succursales.

    La Hermes couvre la fois le risque commercial et le risque politique et offre deux types de garantie l'exportation: laExportgarantie, dans le cas o le partenaire tranger est une entreprise du secteur priv, et la Exportbrgschaft, lorsque lepartenaire tranger appartient au secteur public. Elle garantit les crdits commerciaux octroys par les banques commerciales etelle assure directement aux exportateurs une couverture avant et aprs expdition.

    Les garanties l'exportation fournies au nom du gouvernement allemand ont pour objet de stimuler les exportations du pays, maispeuvent aussi tre accordes pour des biens et des services comportant jusqu' 10 pour cent d'lments trangers, voire plus pourcertains pays (notamment ceux de l'UE). Entre 10 et 15 pour cent du risque restent la charge des exportateurs. La Hermes assure ou garantit approximativement 5 pour cent des exportations de l'Allemagne, mais elle occupe une part beaucoup plusimportante, d'environ 20 pour cent, dans les exportations effectues vers les pays en dveloppement.

    Source: CCI, 1997.

    6 Les crises de ce type peuvent mettre les ACE rude preuve. Il leur est plus difficile d'valuer les risques du fait que la proportion d'affaires douteuses peut aug-menter alors que leurs services sont de plus en plus demands.

  • inefficientes et assurer ainsi la survie d'exportateurs prcaires.Nous verrons en dtail au dernier chapitre en quoi le systmecommercial multilatral modre les gouvernements tents desoutenir (et de fausser) certaines activits conomiques et com-merciales par le biais du systme financier.

    En rsum, nous avons examin dans ce chapitre les grandescaractristiques d'un systme financier efficace pour financer les

    changes et pour limiter les risques du commerce ou aider lesmarchands les grer. Une tude du CCI (CCI, 1997) relative auxaspects pratiques du financement des exportations apporte desrenseignements plus complets sur beaucoup de ces questions, etpeut servir de guide aux gouvernements pour valuer le fonc-tionnement du lien entre commerce et finance dans les pays endveloppement et en transition (voir encadr II.6).

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    Encadr II.4: Coopration internationale entre socits d'assurance-crdit

    Union de Berne

    L'Union de Berne est une association internationale d'organismes d'assurance du crdit l'exportation. Fonde en 1934, elle com-prend actuellement 44 membres, soit 43 assureurs de 35 pays et une organisation internationale, l'Agence multilatrale de garan-tie des investissements (AMGI) du Groupe de la Banque mondiale. Quinze de ses membres viennent de pays non-membres del'OCDE. Elle a pour vocation de promouvoir l'chelle internationale le respect de principes sains en matire d'assurance du cr-dit l'exportation, ainsi que de faciliter l'change d'informations, de donnes d'expriences et de comptences et d'tre le porte-parole de ses membres. Le statut des organismes de crdit l'exportation varie, puisqu'on trouve aussi bien des administrationspubliques que des entreprises prives.

    Les membres de l'Union assurent et financent chaque anne pour environ 400 milliards de dollars EU d'exportations et 10 milliardsd'investissements l'tranger. Il s'agit pour 70 pour cent de transactions au comptant ou de crdits court terme et, pour 75 pourcent du total, d'exportations destines des pays de l'OCDE. Les 100 milliards restants correspondent des exportations desti-nes des pays non-membres de l'OCDE. Les principales activits de la plupart des membres sont les suivantes: garantir les par-ticuliers et leurs banques contre les risques de dfaut de paiement et contre le risque politique, octroyer des crdits moyen oulong terme (sous la forme de garanties ou de prts directs) et aider leurs clients investir l'tranger sous diverses formes.

    Pour devenir membre, il faut remplir certaines conditions: tre en activit depuis au moins trois ans, fournir une couverture contreles risques politiques et commerciaux ( court, moyen et long termes) et assurer des marchs d'une valeur minimale d'environ500 millions de francs suisses ou collecter au moins 5 millions de francs suisses de primes. L'Union de Berne soutient aussi la cra-tion de nouveaux organismes d'assurance du crdit l'exportation et fournit une assistance technique, des conseils et des rensei-gnements aux organismes trop jeunes ou petits pour pouvoir devenir membres.

    Association internationale des assureurs-crdit (AIAC)

    Fonde en 1928, l'AIAC est une association comparable l'Union de Berne. En 1995, elle comptait 43 membres de 28 pays. Elleoffre un cadre pour l'change d'informations, de donnes d'expriences et de comptences, facilite l'instauration de bonnes rela-tions entre ses membres, et tudie les questions relatives l'assurance-crdit et l'assurance-caution. L'adhsion est rserve auxcompagnies d'assurance qui fournissent directement des services d'assurance-crdit ou caution. La plupart des membres couvrentles risques commerciaux court et moyen termes et certains membres assurent aussi contre les risques politiques et de trans-fert. En 1995, les membres de l'AIAC ont assur des crdits commerciaux pour une valeur totale de quelque 1000 milliards dedollars EU.

    Union de Dakar (Association d'assureurs de crdit l'exportation et d'organisations de promotion des exportations)

    Cette association, aujourd'hui forte de 18 membres, a t fonde en 1984 Dakar (Sngal) par des organismes d'assurance-crdit des pays ACP (Afrique, Carabes et Pacifique) et mditerranens. Elle a pour objet de promouvoir la coopration entre lesorganismes qui s'occupent de l'assurance et du financement des crdits l'exportation dans les pays ACP et les pays voisins et depromouvoir l'change d'informations sur les dbiteurs et le recouvrement des crances. En 1989, elle a ouvert ses portes auxassureurs europens de crdits l'exportation pour renforcer la coopration entre les pays ACP et l'UE.

    Source: CCI, 1997.

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    Encadr II.5: Arrangement de l'OCDE relatif aux crdits l'exportation

    Il y a environ 20 ans, les membres de l'OCDE ont dcid de chercher des moyens de limiter le soutien apport par les tats cer-taines activits d'exportation, en raction au fait que les pays industriels au dbut des annes 70 avaient tendance aider de plusen plus leurs exportateurs, par des subventions publiques, obtenir des marchs. L'arrangement qui en a rsult tablit des rglespour les crdits l'exportation bnficiant d'un soutien public (y compris les garanties, les assurances et les arrangements de finan-cement pour le report de paiements) afin que la concurrence joue en fonction de l'efficience conomique et non des aidespubliques. Pour les crdits l'exportation d'une dure suprieure deux ans (except dans les domaines militaire et agricole), lesmembres de l'OCDE sont aujourd'hui tenus d'appliquer des taux d'intrt et des primes minimums sur la base de valeurs de rf-rence, et d'exiger un versement initial d'un certain montant. En outre, l'arrangement fixe des dlais de remboursement maximumset prvoit des limites en matire d'aide lie.

    Source: OCDE (1998).

    Encadr II.6: Principes d'une bonne politique de financement des changes

    Une tude du Centre du commerce international (CCI) renferme un petit aide-mmoire permettant aux pays de vrifier si leur envi-ronnement financier est propice aux changes internationaux. Premirement, les tats doivent s'assurer que les entreprises com-merciales locales sont saines et solvables, et qu'elles possdent un encadrement, des pratiques comptables et une infrastructurefinancire adquats. Deuximement, ils doivent se doter d'un systme juridique efficace pour assurer l'excution des contrats.Troisimement, il faut que le systme bancaire soit suffisamment sain et bien gr pour pouvoir fournir de bons services en mati-re de crdit commercial, d'assurance et de change. Quatrimement, les services d'assurance-crdit et de garantie proposs par lessocits de crdit l'exportation doivent fonctionner correctement et tre suffisamment capitaliss. Cinquimement, il convient queles gouvernements rduisent le risque politique li aux paiements, aux procdures douanires, la fiscalit et au rgime de change.

    Source: CCI, 1997.

  • Dans la prsente annexe, nous traiterons brivement desavantages et inconvnients de divers rgimes de change etmcanismes d'allocation des devises.7 Dans les pages qui prc-dent, il a t question de l'importance du risque de change pourle commerce international. Ce risque peut rsulter d'une rva-luation ou d'une dvaluation au rgime de taux de change fixes,ou de l'instabilit d'une parit flottante. C'est pourquoi le coursd'une devise et le rgime selon lequel il est fix sont des facteurspolitiques fondamentaux pour les ngociants. Par ailleurs, lespolitiques de change peuvent avoir des effets indirects impor-tants sur le commerce lorsqu'elles provoquent ou aggravent unecrise financire. Toutefois, la formation des taux de change et lechoix d'un rgime de change sont des questions trs complexeset difficiles. Les paragraphes qui suivent devraient aider mieuxsaisir certains des lments intervenant dans le choix entredivers rgimes.

    Les retombes de la politique des changes sur le commercene se limitent pas au cours des devises. Si les oprations dechange font l'objet de restrictions, et si les devises sont allouesd'une manire qui gne ou empche certains types d'changespar l'instauration de taux de change multiples ou de mcanismesde rationnement, le commerce s'en ressentira galement. Unbrusque changement d'orientation cet gard constituera unrisque politique. Pour les ngociants, il est aussi important, voireplus important, de pouvoir compter sur un mcanisme d'alloca-tion de devises qui soit efficace, transparent et souple, que d'ob-tenir un bon taux de change (Collier, 1998).

    Formation et instabilit des taux de change

    Lorsque les taux de change ne sont pas fixes, ils sont dter-mins par le march des changes. Le taux de change au comp-tant est dtermin par les transactions au comptant. Les contratsconclus pour l'change de devises une date ultrieure dter-minent le taux de change terme. La plupart des transactions endevises ne se font pas en billets de banque mais sous la formede dpts bancaires. Le taux de change, comme n'importe quelautre prix, dpend de l'offre et de la demande. Plus une mon-naie est demande, plus elle s'apprcie; une diminution de lademande entrane une baisse de sa valeur.

    Sur une longue priode, les variations des taux de changetendent quilibrer les prix pratiqus pour un mme produitchangeable dans les diffrents pays

    Les conomistes font la distinction entre les facteurs en jeuselon qu'ils dterminent le taux de change long ou courtterme. Si les taux de change peuvent varier librement, leur vo-lution long terme est fortement influence par la loi du prixunique et le principe de la parit de pouvoir d'achat. Cela signi-fie que, sur des marchs comparables, des biens et des services

    identiques devraient coter la mme chose. Si ce n'est pas le cas,ces biens et services quittent le pays bon march pour un payscher, jusqu' ce que les prix soient quilibrs par une correc-tion de leur niveau, ou du taux de change, ou des deux la fois.

    Plusieurs facteurs peuvent faire varier les prix entre les pays,de sorte que la parit de pouvoir d'achat n'est pas toujoursrespecte mme sur une longue priode. Cela tient principale-ment aux carts des prix pratiqus pour des produits qui ne fontpas l'objet d'changes commerciaux, comme la terre. Quand leprix de produits non changeables augmente dans un pays, leniveau gnral des prix varie mme si la loi du prix unique conti-nue de prvaloir pour les produits changeables. Cependant,comme le prix des produits non changeables (tels que lesloyers) influe sur le prix des produits changeables (par le biaisdes marges des dtaillants, par exemple), une certaine disparitdans le prix des produits changeables peut subsister. La persis-tance des carts de prix d'un pays l'autre peut aussi s'expliquerpar l'application de taux d'imposition (y compris les droits dedouane et contingents) ou de rglements (tels que les normes descurit) diffrents.

    Les variations des taux de change sur le long terme peuventtre provoques par n'importe quelle mesure qui agit sur l'offreet la demande de devises, par exemple la hausse d'un droit dedouane, qui rduit la demande d'importations, et donc lademande de devises ncessaires leur achat. Il s'ensuit unedprciation des monnaies trangres et une apprciation de lamonnaie nationale. Il est noter que cette dernire, mme s'il luifaut un certain temps pour se produire, annulera une partie sinonla totalit des gains de comptitivit dcoulant de la protection.Autrement dit, taxer les importations, c'est aussi taxer les expor-tations.8

    Il est un autre facteur important qui influence l'volution destaux de change long terme: l'inflation. Quand les prix intrieursaugmentent davantage que les prix extrieurs, les produits natio-naux deviennent moins comptitifs. Il en rsulte un accroisse-ment de la demande de produits imports, qui entrane un gon-flement de la demande de devises et une dprciation de lamonnaie nationale. Ce mouvement se poursuit normalement jus-qu' ce que les variations des taux de change compensent lescarts de taux d'inflation.

    court terme, les taux de change tendent tre dterminspar les disparits de taux d'intrt et par les anticipations,ce qui peut engendrer une surraction

    court terme, cependant, il est plus frquent que les taux dechange soient dtermins par des facteurs en rapport avec lesmarchs financiers, facteurs qui expliquent aussi en grande par-tie l'instabilit des taux de change. Nous avons indiqu que les

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    Annexe du chapitre II: commerce et politique de change

    7 Pour une tude thorique dtaille des questions en rapport avec ce sujet, voir Mishkin (1998), et pour une analyse plus pousse, voir Visser et Smits (1997). Pourune vision plus politique des choses, on se reportera Eichengreen et al. (1998) et Balio et Enoch (1997).8 Par consquent, l'application d'un droit de douane aide les producteurs en concurrence avec des importations mais nuit aux exportateurs. Ce deuxime effet estparfois oubli.

  • transactions en devises portent gnralement sur des dptsbancaires. tant donn qu'il s'agit l d'une forme de capital, lerendement espr est dterminant dans la fixation du prix. Toutcomme la loi du prix unique sous-entend, pour des marchandi-ses identiques, une uniformisation des prix entre les pays, lesdpts bancaires donneront des rendements semblables, ind-pendamment de la monnaie dans laquelle ils sont libells, s'ilspeuvent traverser librement les frontires. Les conomistes utili-sent donc l'analyse du march des actifs pour expliquer les varia-tions des taux de change court terme. Fondamentalement,l'volution des taux de change court terme est dtermine pardes flux d'actifs ayant pour but d'galiser entre les pays les ren-dements ajusts en fonction des risques.

    La mthode de l'analyse du march des actifs peut expliquerpourquoi des facteurs en rapport avec les marchs financiers,conjugus aux fluctuations des anticipations relatives certainesvariables, peuvent entraner des surractions des taux de change court terme, c'est--dire des corrections plus fortes que cellesncessaires pour rquilibrer le march des changes longterme. Les variables qui influent sur les prvisions concernant lestaux de change comprennent l'inflation dans le pays et l'tranger, la masse montaire et le niveau des prix, mais aussiles droits de douane et les contingents d'importation.

    La mthode de l'analyse du march des actifs est un bonmoyen d'expliquer les fluctuations des taux de change de courte dure et les surractions

    Cette mthode repose fondamentalement sur l'ide que lesactifs internationaux doivent donner approximativement lemme rendement. Prenons un exemple pour illustrer l'interactionexistant cet gard entre les taux d'intrt et les taux de chan-ge. Supposons qu'au dpart les tats-Unis et les pays de l'euroont un mme taux d'intrt rel de 3 pour cent et que leurs tauxde change soient quilibrs. Brutalement, les tats-Unis se lan-cent dans une politique montaire expansionniste en abaissantle taux d'intrt 2 pour cent. Supposons que, en consquence,on table, pour un an, sur une inflation plus forte de 1 pour centaux tats-Unis qu'en Europe.

    long terme, nous savons que le dollar devrait perdre 1 pourcent de sa valeur par rapport l'euro pour que la loi du prixunique reste respecte. court terme, en revanche, ce sont lesmouvements de capitaux qui dterminent le taux de change,lequel fera l'objet d'une surraction. Dans notre exemple, aprsla baisse du taux d'intrt, les investisseurs achtent des dptsen euros, qui rapportent des intrts plus levs. Il en rsulte unedprciation du dollar, mais celui-ci perd 2 pour cent de sa valeurau lieu de 1 pour cent parce que les investisseurs continuentd'acheter des actifs en euros tant qu'ils ne peuvent pas tabler surune apprciation de 1 pour cent du dollar. C'est seulement cemoment-l que le rendement escompt des actifs en dollars(2 pour cent plus 1 pour cent d'apprciation) est gal au rende-ment des actifs en euros (3 pour cent). Autrement dit, la dpr-ciation initiale de 2 pour cent (surraction) et l'apprciation ult-rieure de 1 pour cent quivalant, sur le long terme, une dpr-ciation de 1 pour cent qui rquilibre les marchs des changes.

    L'exprience montre tout l'intrt que prsente la mthodede l'analyse du march des actifs. Elle a permis d'expliquer en

    partie, par exemple, la forte apprciation du dollar au dbut desannes 80, lorsque le dollar tait trs recherch cause des tauxd'intrt rels levs pratiqus aux tats-Unis. L'apprciation dudollar s'est poursuivie (au-del du point d'quilibre) jusqu' ceque les intrts rels et la perte de valeur prvue quivalent auxrendements escompts dans les diffrents pays.

    Cette mthode ne permet cependant pas d'expliquer la sur-raction ou l'instabilit des taux de change dans toutes les situa-tions. Certaines imperfections du march nes de problmesd'information peuvent aggraver l'instabilit, surtout sur les mar-chs financiers sous-dvelopps. Sur ces marchs, il arrive queles investisseurs ne peuvent ou ne veulent pas acheter et vend-re des actifs libells dans certaines monnaies, notamment enpriode de crise, ou exigent des primes de risque trs leves. Lasurraction du taux de change pourra mme dpasser le niveaujustifi par les carts de taux d'intrt.

    Choix du rgime de change

    Il existe une multitude d'options pour les responsables de la politique de change, des taux entirement libres aux tauxplus ou moins fixes, mais chaque formule a ses inconvnients

    Compte tenu de l'importance du taux de change pour lecommerce et pour la mise en uvre de diffrentes autres poli-tiques, les pays n'ont pas la tche facile lorsqu'il s'agit d'arrterleur politique de change. Ils peuvent opter pour des taux enti-rement fixes ou des taux variables sans restrictions, et il existe denombreux rgimes offrant plus ou moins de souplesse (on entrouvera une rcapitulation au tableau II.1). Il existe aussi deuxformes d'union montaire auxquelles les pays peuvent recou-rir: plusieurs pays peuvent adopter une monnaie unique au seind'une union montaire entre partenaires gaux, comme l'ontfait rcemment onze des 15 membres de l'UE, ou bien un pays(habituellement petit) peut adopter la monnaie d'un autre pays(plus grand). C'est une solution que l'Argentine a envisage parrapport au dollar amricain lors de la crise financire de la fin1998.

    Les taux de change peuvent tre entirement fixes, commeen rgime de caisse d'mission, ou tre rattachs un talon,tout en pouvant fluctuer dans une certaine proportion autourd'un niveau dtermin. Les fourchettes de fluctuation consti-tuent des contraintes rigides quand la banque centrale estoblige d'intervenir pour viter que les limites soient franchies.Elles peuvent aussi tre lastiques quand la banque centralea le choix entre intervenir ou non. Cette deuxime formule cor-respond plutt un rgime souple comportant des zones d'in-tervention. Les tats-Unis possdent probablement l'un des rgi-mes de change les plus libres, les interventions tant extrme-ment rares. l'inverse, Hong Kong, Chine et l'Argentine ont unrgime de caisse d'mission, soit le rgime de change le plusrigide aprs celui de l'union montaire.

    Avant de choisir un rgime de change, un pays doit rflchir ses objectifs. Un rgime de taux de change fixes, par exemple,peut aider crer un environnement prvisible pour le commer-ce international. Il peut aussi contribuer la stabilit des prix endisciplinant la politique montaire. Mais l'attachement de telsobjectifs empche le pays de poursuivre certains autres objectifs.

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  • C'est ainsi qu'il devra renoncer dvaluer pour amliorer sacomptitivit, par exemple, car il s'ensuivrait une hausse des prixdes importations et, par contrecoup, une forte pousse de l'in-flation. Les avantages et les inconvnients des rgimes de tauxde change fixes sont expliqus ci-aprs plus en dtail. Il est noter que beaucoup d'inconvnients des taux fixes sont le miroirdes avantages des taux variables, et inversement, ce qui n'estpas toujours dit explicitement dans l'expos qui suit.

    Les taux fixes rendent les prix internationaux plus prvisibles,et peuvent favoriser une stabilisation macro-conomique, maisils entranent une perte d'autonomie politique et demandentdes rserves extrieures suffisantes

    Comme on l'a indiqu, l'un des principaux avantages d'unrgime de taux de change fixes tient au fait qu'il rend plus pr-visible la rentabilit des changes internationaux.9 Cet avantageest surtout sensible entre les pays qui entretiennent des lienscommerciaux importants. En outre, les pays dont le marchfinancier est sous-dvelopp et les possibilits de couvertureinsuffisantes pourront aussi rduire le risque de change courupar leurs exportateurs et importateurs. Enfin, un taux de changefixe peut contribuer la stabilisation macro-conomique dansles pays ayant un pass de forte inflation. L'Argentine, par exem-ple, a pu, grce au rgime de caisse d'mission, rendre plus cr-dibles les rformes annonces et faire disparatre les anticipa-tions inflationnistes.

    Cette thorie ne tient que si le taux de change choisi est peu prs correct, ce qui est plus facile dire qu' faire, car per-sonne ne sait quel est le taux de change correct. La question nese pose pas avec les taux variables, mais beaucoup d'observa-teurs pensent que ces taux de change sont quasiment imprvisi-bles, du moins court terme, ce qui accrot d'autant le risque dechange dans le commerce international.

    Un rgime de taux de change fixes exige une trs grande dis-cipline en matire de politique montaire et budgtaire. Quandune politique montaire laxiste engendre une inflation plus forteque dans le pays sur lequel le taux de change est align, la com-ptitivit des producteurs nationaux peut s'en ressentir, avec lesconsquences que cela entrane pour l'conomie. La conjugaisond'un dficit budgtaire excessif et de taux de change fixes peutse traduire par des taux d'intrt rels trs levs, une faiblecroissance et un dficit courant intenable. Une dvaluation pour-ra alors tre rendue ncessaire par le gonflement de la dette et,ventuellement, une perte de confiance des investisseurs.

    Quand les taux de change sont fixs entre pays gaux(dont aucun ne peut arrter sa politique d'une faon complte-ment indpendante), une certaine coordination s'impose pourobtenir des taux d'inflation comparables et viter des dficitsbudgtaires excessifs, ce qui est actuellement le cas dans lespays membres de l'Union montaire europenne.

    Des taux de change fixes demandent aussi des rservesinternationales suffisantes, au cas o, pour une raison quel-conque, il serait ncessaire de combler un dficit de devises. Sanscela, l'insuffisance des rserves pourrait forcer le pays renon-

    cer la parit fixe. Une situation de ce genre a plus de chancesde se produire quand une forte inflation entrane une survalua-tion et un dficit des transactions courantes, et fait anticiper unedvaluation. La mobilit des capitaux internationaux et l'intgra-tion financire allant en s'accentuant, le principal indicateur duniveau des rserves n'est plus, comme dans le pass, le taux decouverture des importations (estimation des rserves en moisd'importations) mais le taux de couverture de la dette extrieu-re et notamment du passif extrieur court terme de la banquecentrale (Eichengreen et al., 1998). L'importance de ce passifexplique en grande partie pourquoi le baht thalandais a dcro-ch du dollar EU, vnement qui a officiellement dclench lacrise asiatique en juillet 1997.

    La gestion de la masse montaire et l'adaptation aux chocsextrieurs deviennent plus difficiles avec des taux de changefixes, et une survaluation peut susciter des pressionsprotectionnistes

    L'adoption d'un rgime de taux fixes rend difficile la poli-tique montaire quand un afflux de capitaux ou une augmenta-tion de l'inflation l'extrieur pousse la hausse le taux dechange. La banque centrale peut alors tre contrainte d'acheterdes devises. Si elle ne prend pas de mesures de strilisation, ils'ensuit une augmentation de la masse montaire et de l'infla-tion. Mais les politiques de strilisation ne donnent pas toujoursd'excellents rsultats car elles font grimper les taux d'intrt, cequi attire encore plus de capitaux. Les petits pays pourront trou-ver particulirement difficile d'absorber des afflux de capitauximportants et irrguliers.

    Un taux de change fixe peut gner l'adaptation aux chocsintrieurs et extrieurs. Les exportateurs de produits de base, parexemple, constatent souvent une corrlation entre les variationsdes termes de l'change et l'activit intrieure. Quand les prix etles salaires ne sont pas suffisamment souples et que le taux dechange est fixe, des dsquilibres profonds peuvent apparatre siles prix et les salaires ne sont pas revus la baisse aprs unedtrioration des termes de l'change. Quand les prix des pro-duits primaires et l'activit reculent, la rigidit des salaires entra-ne du chmage et des difficults pour les entreprises, comme entmoigne, par exemple, la situation vcue aprs la deuximecrise ptrolire dans beaucoup de pays importateurs de ptrole.Mais la rigidit des prix et des salaires peut aussi causer des ds-quilibres dans les pays industriels, ayant un taux de change fixe(ou regroups dans une union montaire), car elle provoque descarts de taux d'inflation et un dclin de la comptitivit.

    Un taux de change fixe peut aussi susciter un renforcementdes pressions protectionnistes si la monnaie devient survalue.De nombreux pays ayant adopt un rgime de taux de changefixes recourent des mesures de protection pour prserver lacomptitivit de leurs producteurs (comme les pays de la zoneCFA en Afrique occidentale dans les annes 80 et au dbut desannes 90).

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    9 L'instabilit des taux de change semble tre en augmentation depuis quelques annes, mais les ngociants disposent aussi de meilleurs moyens pour y remdier(oprations de couverture).

  • L'abandon en catastrophe d'une parit devenue intenable peutcoter trs cher

    Nous avons vu qu'un taux de change fixe peut aider att-nuer les incertitudes dans les pays dont le march financier estsous-dvelopp et les moyens de couverture limits. Mais ledveloppement du march financier est essentiel pour amliorerla stabilit du taux de change, que le pays suive un rgime detaux fixes ou variables. Dans les pays taux fixes, notamment, letaux de change peut fluctuer fortement quand la parit doit treabandonne la hte et la perte de confiance et l'troitesse dumarch provoquent un effondrement du taux de change. C'est cequi s'est pass en Indonsie entre la fin de 1997 et le dbut de1998. La prsence d'un secteur financier bien dvelopp attnueles inconvnients des rgimes de taux variable grce, entre aut-res choses, aux oprations de couverture rendues possibles parde nouveaux instruments. L'largissement et l'approfondisse-ment du march peut aussi tre facteur de stabilit.

    Il rsulte de ce qui prcde que, du fait de leur plus grandeprvisibilit, les taux de change fixes peuvent prsenter desavantages importants pour les marchands. Mais il n'en reste pasmoins que leurs inconvnients l'emportent souvent sur leursavantages, ds lors qu'ils entranent des dsquilibresmacro?conomiques et des ractions de protection, surtout si lepays est contraint un jour d'abandonner son taux fixe. Une pari-t fixe peut amener des importateurs renoncer se couvrircontre le risque de change, et une dvaluation inattendue peutalors causer des pertes considrables (comme on l'a vu en Asieen 1997). L'abandon d'une parit peut aussi porter durablementatteinte au crdit d'un gouvernement. Quand un gouvernementlie sa crdibilit la parit de la monnaie et en fait une affairede fiert nationale, une dvaluation a souvent pour effet de pr-cipiter sa chute (Visser et Smits, 1997). Compte tenu de ces ob-servations, des tudes rcentes montrent qu'il importe d'assou-plir suffisamment et sans tarder la politique en place dans lespays o les conditions d'une parit fixe n