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1 SOUS LE VOLCAN Toneelhuis | Guy Cassiers MISE EN SCENE GUY CASSIERS TEXTE JOSSE DE PAUW D’APRES LE ROMAN DE MALCOLM LOWRY Première 24 septembre 2009 au Toneelhuis - Anvers No se puede vivir sin amar. On ne peut vivre sans aimer Reviens, Yvonne. J’arrêterai de boire, reviens. Ne serait-ce qu’un jour, écrit Geoffrey Firmin, consul britannique au Mex- ique, à Yvonne, la femme qui l’a quitté. Mais il n’envoie pas la lettre. Le 2 novembre 1938, Le Jour des Morts, au petit matin, Yvonne entre dans la cantina où il a passé la nuit à boire. La journée qui suit est une lutte acharnée pour sauver leur amour Avec Sous le volcan (1947) de Malcolm Lowry, Guy Cassiers porte une fois de plus à la scène l’une des grandes œuvres littéraires du XXe siècle. Les événements qui ont lieu dans Sous le volcan se déroulent au Mexique, dans la durée d’une seule journée : le 2 novem- bre 1938, la fête des Trépassés, le jour des morts mexicain. Le personnage principal est Geoffrey Firmin, ex-consul et al- coolique notoire, adonné à la tequila et au mezcal. Sa femme Yvonne l’a quitté, mais entreprend une dernière tentative pour sauver leur mariage. Elle a eu une relation amoureuse avec Hugh Firmin, le demi-frère du consul, et avec Jacques Laruelle. Hugh Firmin se soucie de la vieillesse imminente et se sent coupable de ne plus participer à la guerre d’Espagne. Geoffrey est trop abîmé, physiquement et mentalement, pour renouer avec Yvonne. Il entend des voix qui tour à tour l’enjôlent et lui adressent des remontrances. Il aboutit dans un état second, hors du temps, errant dans les méandres de son cerveau imbibé d’alcool et coupant peu à peu tous les liens avec le monde extérieur. Peu d’ouvrages de la littérature mondiale ont décrit l’univers hallucinant d’un alcoolique avec autant d’acuité et de sang-froid, de manière aussi captivante et déchirante. Sous le volcan est aussi l’histoire navrante et touchante de l’amour impossible de deux êtres qui s’aiment autant qu’ils se haïssent. Le jour des morts signifie pour le consul une descente fatale dans son propre enfer, auquel il ne réchappera pas. Le projet Sous le volcan se place dans la lignée de mises en scène de Guy Cassiers telles que De Wespenfabriek (Seigneur des Guêpes) - Iain Banks, Bezonken rood (Rouge décanté) - Jeroen Brouwers, Hersenschimmen (Chimères) - Bernlef et The Woman Who Walked Into Doors (La Femme qui se cognait dans les portes) - Roddy Doyle. À chaque fois, le monde est décrit à partir du point de vue subjectif d’une conscience traumatisée et torturée. C’est toujours la conscience d’un mar- ginal: la fille élevée comme un garçon du Seigneur des Guêpes, l’écrivain traumatisé par ses expériences dans les camps de Rouge décanté, Maarten atteint d’Alzheimer de Chimères et la femme terrorisée par la violence conjugale et l’alcool dans La Femme qui se cognait dans les portes. Cassiers examine comment un univers très personnel s’articule autour d’un vécu particulier. Ce monde intérieur se concrétise sur la scène par l’emploi sophistiqué de la technologie visuelle. Pour ce spectacle, Guy Cassiers est parti enregistrer des prises de vues au Mexique. L’adaptation a été faite en collaboration avec l’acteur/auteur Josse De Pauw, qui joue également le rôle du consul. Les autres rôles sont tenus par Katelijne Damen, Marc Van Eeghem et Bert Luppes, qui vient d’être élu meilleur acteur de l’année aux Pays-Bas. MISE EN SCÈNE GUY CASSIERS | TEXTE JOSSE DE PAUW | D’APRÈS LE ROMAN DE MALCOLM LOWRY | DRAMATURGIE ERWIN JANS | AVEC KATELIJNE DAMEN, JOSSE DE PAUW, BERT LUPPES, MARC VAN EEGHEM | CONCEPT ESTHETIQUE/ SCENOGRAPHIE ENRICO BAGNOLI, DIEDERIK DE COCK, ARJEN KLERKX | COSTUMES KATELIJNE DAMEN | TRADUCTION SURTITRES MONIQUE NAGIELKOPF | SURTITRES ERIK BORGMAN | PRODUCTION TONEELHUIS | COPRODUCTION THÉÂTRE DE LA VILLE PARIS / FESTIVAL D’AUTOMNE À PARIS (FR), MC2 GRENOBLE (FR), THÉÂTRE DU NORD, LILLE (FR), MAISON DE LA CULTURE D’AMIENS (FR), LE VOLCAN, LE HAVRE (FR), LA COMÉDIE DE REIMS (FR) BENJAMINVE RDONCK WAYNTRAUB SIDILARBICH ERKAOUIOLY MPIQUEDRAMATIQUEGUY CASSIERSDEFILMFABR IEKLOTTEVANDENBERG BARTMEULEMANABKE HARINGWAYN TRAUBSIDI LARBICHER KAOUIOLYM PIQUEDRAMA TIQUEDEFILM FABRIEKGUYCAS SIERSLOTTEVANDE NBERGBARTMEULE MANABKEHARIN GBENJA

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sous le volcanToneelhuis | Guy Cassiers

MISE EN SCENE GuY cassIeRs

TEXTE Josse De PauW D’APRES LE ROMAN DE MalcolM loWRY

Première 24 septembre 2009 au Toneelhuis - Anvers

no se puede vivir sin amar.On ne peut vivre sans aimer

‘Reviens, Yvonne. J’arrêterai de boire, reviens. Ne serait-ce qu’un jour’, écrit Geoffrey Firmin, consul britannique au Mex-ique, à Yvonne, la femme qui l’a quitté. Mais il n’envoie pas la lettre. Le 2 novembre 1938, Le Jour des Morts, au petit matin, Yvonne entre dans la cantina où il a passé la nuit à boire. La journée qui suit est une lutte acharnée pour sauver leur amour

Avec Sous le volcan (1947) de Malcolm Lowry, Guy Cassiers porte une fois de plus à la scène l’une des grandes œuvres littéraires du XXe siècle.

Les événements qui ont lieu dans Sous le volcan se déroulent au Mexique, dans la durée d’une seule journée : le 2 novem-bre 1938, la fête des Trépassés, le jour des morts mexicain. Le personnage principal est Geoffrey Firmin, ex-consul et al-coolique notoire, adonné à la tequila et au mezcal. Sa femme Yvonne l’a quitté, mais entreprend une dernière tentative pour sauver leur mariage. Elle a eu une relation amoureuse avec Hugh Firmin, le demi-frère du consul, et avec Jacques Laruelle. Hugh Firmin se soucie de la vieillesse imminente et se sent coupable de ne plus participer à la guerre d’Espagne. Geoffrey est trop abîmé, physiquement et mentalement, pour renouer avec Yvonne. Il entend des voix qui tour à tour l’enjôlent et lui adressent des remontrances. Il aboutit dans un état second, hors du temps, errant dans les méandres de son cerveau imbibé d’alcool et coupant peu à peu tous les liens avec le monde extérieur. Peu d’ouvrages de la littérature mondiale ont décrit l’univers hallucinant d’un alcoolique avec autant d’acuité et de sang-froid, de manière aussi captivante et déchirante. Sous le volcan est aussi l’histoire navrante et touchante de l’amour impossible de deux êtres qui s’aiment autant qu’ils se haïssent. Le jour des morts signifie pour le consul une descente fatale dans son propre enfer, auquel il ne réchappera pas.

Le projet Sous le volcan se place dans la lignée de mises en scène de Guy Cassiers telles que De Wespenfabriek (Seigneur des Guêpes) - Iain Banks, Bezonken rood (Rouge décanté) - Jeroen Brouwers, Hersenschimmen (Chimères) - Bernlef et The Woman Who Walked Into Doors (La Femme qui se cognait dans les portes) - Roddy Doyle. À chaque fois, le monde est décrit à partir du point de vue subjectif d’une conscience traumatisée et torturée. C’est toujours la conscience d’un mar-ginal: la fille élevée comme un garçon du Seigneur des Guêpes, l’écrivain traumatisé par ses expériences dans les camps de Rouge décanté, Maarten atteint d’Alzheimer de Chimères et la femme terrorisée par la violence conjugale et l’alcool dans La Femme qui se cognait dans les portes. Cassiers examine comment un univers très personnel s’articule autour d’un vécu particulier. Ce monde intérieur se concrétise sur la scène par l’emploi sophistiqué de la technologie visuelle.

Pour ce spectacle, Guy Cassiers est parti enregistrer des prises de vues au Mexique. L’adaptation a été faite en collaboration avec l’acteur/auteur Josse De Pauw, qui joue également le rôle du consul. Les autres rôles sont tenus par Katelijne Damen, Marc Van Eeghem et Bert Luppes, qui vient d’être élu meilleur acteur de l’année aux Pays-Bas.

MISE EN SCèNE GuY cassIeRs | TEXTE Josse De PauW | D’APRèS LE ROMAN DE MalcolM loWRY | DRAMATuRGIE eRWIn Jans | AVEC KatelIJne DaMen, Josse De PauW, BeRt luPPes, MaRc van eeGheM | CONCEPT ESTHETIquE/SCENOGRAPHIE enRIco BaGnolI, DIeDeRIK De cocK, aRJen KleRKx | COSTuMES KatelIJne DaMen | TRADuCTION SuRTITRES MonIque naGIelKoPf | SuRTITRES eRIK BoRGMan | PRODuCTION toneelhuIs | COPRODuCTION théâtRe De la vIlle PaRIs / festIval D’autoMne à PaRIs (FR), Mc2 GRenoBle (FR), théâtRe Du noRD, lIlle (FR), MaIson De la cultuRe D’aMIens (FR), le volcan, le havRe (FR), la coMéDIe De ReIMs (FR)

BENJAMINVERDONCKWAYNTRAUBSID ILARBICHERKAOUIOLY

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GBENJA

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touRnée sous le volcan

24 septembre 2009 Toneelhuis/Bourla Antwerpen (BE)

25 septembre 2009 Toneelhuis/Bourla Antwerpen (BE)

26 septembre 2009 Toneelhuis/Bourla Antwerpen (BE)

1 octobre 2009 Théâtre de la Ville Paris/Festival d’Automne à Paris Paris (FR)

2 octobre 2009 Théâtre de la Ville Paris/Festival d’Automne à Paris Paris (FR)

3 octobre 2009 Théâtre de la Ville Paris/Festival d’Automne à Paris Paris (FR)

4 octobre 2009 Théâtre de la Ville Paris/Festival d’Automne à Paris Paris (FR)

6 octobre 2009 Théâtre de la Ville Paris/Festival d’Automne à Paris Paris (FR)

7 octobre 2009 Théâtre de la Ville Paris/Festival d’Automne à Paris Paris (FR)

8 octobre 2009 Théâtre de la Ville Paris/Festival d’Automne à Paris Paris (FR)

9 octobre 2009 Théâtre de la Ville Paris/Festival d’Automne à Paris Paris (FR)

13 octobre 2009 30CC / Stadsschouwburg Leuven (BE)

15 octobre 2009 Toneelhuis/Bourla Antwerpen (BE)

16 octobre 2009 Toneelhuis/Bourla Antwerpen (BE)

17 octobre 2009 Toneelhuis/Bourla Antwerpen (BE)

21 octobre 2009 Théâtre du Nord Lille (FR)

22 octobre 2009 Théâtre du Nord Lille (FR)

23 octobre 2009 Théâtre du Nord Lille (FR)

24 octobre 2009 Théâtre du Nord Lille (FR)

25 octobre 2009 Théâtre du Nord Lille (FR)

28 octobre 2009 Cultuurcentrum Hasselt Hasselt (BE)

30 octobre 2009 Kaaitheater Brussel (BE)

31 octobre 2009 Kaaitheater Brussel (BE)

3 novembre 2009 Toneelhuis/Bourla Antwerpen (BE)

4 novembre 2009 Toneelhuis/Bourla Antwerpen (BE)

5 novembre 2009 Toneelhuis/Bourla Antwerpen (BE)

6 novembre 2009 Toneelhuis/Bourla Antwerpen (BE)

7 novembre 2009 Toneelhuis/Bourla Antwerpen (BE)

11 novembre 2009 Kunstencentrum Vooruit vzw Gent (BE)

12 novembre 2009 Kunstencentrum Vooruit vzw Gent (BE)

13 novembre 2009 Kunstencentrum Vooruit vzw Gent (BE)

14 novembre 2009 Kunstencentrum Vooruit vzw Gent (BE)

18 novembre 2009 MC2 Grenoble (FR)

19 novembre 2009 MC2 Grenoble (FR)

20 novembre 2009 MC2 Grenoble (FR)

24 novembre 2009 Maison de la Culture d’Amiens Amiens (FR)

25 novembre 2009 Maison de la Culture d’Amiens Amiens (FR)

28 novembre 2009 Rotterdamse Schouwburg Rotterdam (NL)

30 novembre 2009 Koninklijke Schouwburg Den Haag Den Haag (NL)

3 décembre 2009 Stadsschouwburg Amsterdam Amsterdam (NL)

4 décembre 2009 Stadsschouwburg Amsterdam Amsterdam (NL)

7 décembre 2009 Stadsschouwburg Groningen Groningen (NL)

9 décembre 2009 Stadsschouwburg utrecht utrecht (NL)

12 décembre 2009 Parktheater Eindhoven Eindhoven (NL)

15 décembre 2009 Le Volcan Le Havre (FR)

16 décembre 2009 Le Volcan Le Havre (FR)

19 décembre 2009 La Comédie de Reims Reims (FR)

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BIoGRaPhIes

le MetteuR en scene - GuY cassIeRs

Guy Cassiers (1960), directeur artistique de la Toneelhuis, a mis au point un vocabulaire théâtral d’une grande originalité, dans laquelle la technologie visuelle convole en justes noces avec l’émotion et la méditation. Parmi les sommets, on compte Bezonken rood (Rouge

décanté, 2004) d’après le roman de Jeroen Brouwers et les quatre volets du cycle Proust (2002-2004). Sa démarche n’a pas manqué d’être appréciée à l’international. Les dernières années l’ont vu se concentrer, dans son Triptyque du pouvoir – Mefisto for ever, Wolfskers et Atropa. La vengeance de la paix – sur les relations complexes entre l’art, la politique et le pouvoir. Continu-ant sur cette thématique, il prépare actuellement un nouveau triptyque basé sur le roman L’homme sans qualités de Robert Musil, dont le premier volet connaîtra sa première à la fin de la saison 2009-2010. Le fait que, outre l’image, la musique joue un rôle prépondérant dans les spectacles de Cassiers a encore été souligné par deux nouvelles créations d’opéra : House of the Sleeping Beauties (musique Kris De-foort) et Adam in Ballingschap (musique Rob Zuidam). Et ce n’est pas l’effet du hasard qu’on lui ait demandé de mettre en scène l’Anneau du Nibelung à Milan et Berlin. Cassiers ouvre la saison 2009-2010 avec un autre Götterdämmerung : Sous le volcan, d’après le roman de Malcolm Lowry, l’histoire de la déchéance tragique d’un consul alcoolique, au Mexique. Les projets de théâtre que Cassiers nourrit pour les années à venir se distinguent par une attention croissance pour l’histoire européenne et la conscience que cette histoire se trouve à un point de rupture.

l’auteuR De l’aDaPtatIon - Josse De PauW

Josse De Pauw (1952) a été l’un des membres fondateurs du groupe de théâtre Radeis International, en 1976. À dater de 1985, il travaille sous statut d’artiste indépendant et se met à l’écriture de textes de théâtre, pour lui-même et pour d’autres acteurs. C’est en 1989 qu’il

interprète son premier grand rôle à l’écran, et il a depuis joué dans plus de cinquante films dont Hombres Complicados et Iedereen Bero-emd, qui a été sélectionné pour les Oscars. Il a aussi dirigé deux films en personne : Vinaya et Übung. De Pauw écrit aussi de la fiction, des commentaires, des réflexions et des récits de voyages. Ses textes ont été réunis dans les livres Werk et Nog. Ses interprétations à l’écran et sur les planches d’une part, et son écriture de l’autre, ont plus d’une fois été couronnées.Depuis qu’il a assuré pour un an la direction artistique de la Toneelhuis, en 2005-2006, il est un compagnon d’armes par excellence. Il a interprété le rôle de Willy Loman dans Dood van een handelsreiziger et celui du Ministre de la culture dans Mefisto for ever. En 2007, il a monté RUHE au Muziektheater Transparant, en 2008 Liefde / zijn handen chez LOD et De versie Claus à la Toneelhuis. En 2009-2010 Guy Cassiers met en scène le classique Under the volcano de Malcolm Lowry en version néerlandaise, Sous le volcan. Josse De Pauw a adapté le roman pour la scène et tient le rôle du consul dans le spectacle.En tant qu’artiste indépendant, Josse De Pauw conserve des liens avec toutes les maisons précitées. Le KVS et le Théâtre National, à Brux-elles, et le Toneelhuis se sont engagés à soutenir de concert son travail théâtral à partir de 2010.

les acteuRs

Katelijne Damen a travaillé pour de nombreuses compagnies, dont Blauwe Maandag, Het Zuidelijk Toneel, Cie De Koe et le ro theater, et sous la houlette de metteurs en scène aussi différents que Luk Perceval, Erik De Volder, Ivo Van Hove, Alize Zandwijk, Dirk Tanghe, Guy

Joosten et Guy Cassiers, et de réalisateurs de télévision comme Guido Henderickx, Frank Van Passel, Jan Mathhys et Maarten Moerkerke. Récemment on a pu la voir sur le petit écran dans la série télévisée à succès De smaak van de Keyser, qui a été applaudie à l’international. Sur les planches, son interprétation de Strange Interlude lui a valu le Theo d’or en 1990, et en 1996, elle a reçu le prix Mary Dresselhuys pour « l’ensemble de son œuvre et son engagement pour le théâtre », en 2006 une nomination au prix Colombina pour son rôle dans Her-senschimmen. À la Toneelhuis, on a pu la voir dans De geruchten d’Olympique Dramatique et Guy Cassiers, et Mefisto for ever et Atropa. De wraak van de vrede de Guy Cassiers.

Marc Van Eeghem a terminé ses études au cours d’art dramatique Herman Teirlinck en 83 et joue du théâtre depuis plus de 20 ans en Belgique et aux Pays-Bas, chez Arca, De Tijd, Het Zuidelijk Toneel, Toneelhuis, DAS-theater, ‘t Arsenaal. À la Toneelhuis, on a pu le

voir dans De Geruchten d’Olympique Dramatique et Guy Cassiers, et dans Mefisto for ever et Wolfskers de Guy Cassiers. À la télévision, il a joué de nombreux rôles, les dernières années, dans des séries comme Katarakt, De Parelvissers, Matroesjka’s et Terug naar Oosterdonk.

Bert Luppes sort de la Toneelacademie Maastricht en 79. Il est alors l’un des fondateurs du groupe de théâtre Het Vervolg et on a pu le voir dans de nombreux films et séries télévisées sous la direction de Dick Maas, Paul Verhoeven et Willem van de Sande-Bakhuyzen.

Il a longtemps été lié au Theatergroep Hollandia, plus tard à ZT Hollandia et au Zuidelijk Toneel. En 2003, il a reçu le Louis d’Or pour son interprétation de Georges Vermeersch dans Vrijdag de ZT Hollandia. Au O.T. (Onafhankelijk Toneel) de Rotterdam, Bert Luppes a joué entre autres dans Platonov, De Woudduivel, Othello et Ivanov et interprété le rôle de George dans Wie is er Bang voor Virginia Woolf? En 2005, ce dernier rôle lui a valu une nomination au Louis d’Or. En 2009, pour le rôle de Martin dans De Geit of, Wie is Sylvia, toujours du O.T., il est une fois encore sélectionné pour ce prix prestigieux. Il a joué également dans diverses productions de théâtre jeune public, comme Vakman de Theater Artemis. Bert Luppes joue aujourd’hui pour la première fois dans une production de Guy Cassiers.

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l’auteuR De sous le volcan – MalcolM loWRY

Malcolm Lowry naît en 1909 dans le Cheshire. Il fait ses études à Cambridge, d’abord à la Leys School puis au St Catharine’s College. Lorsqu’il les termine en 1931, il a acquis un goût immodéré pour la littérature, mais aussi pour la boisson. Ces deux obsessions seront

nourries par le long voyage en mer qu’il fait en qualité de mousse. Ce périple lui inspire sa première publication importante, ultramarine (1933). En 1934, il épouse Jan Gabrial. Ils vivent en France, aux États-unis et au Mexique. Lowry écrit des nouvelles et s’attaque à ce qui deviendra Under the volcano. Mais le couple connaît des problèmes matrimoniaux, dus en bonne partie à l’alcoolisme de Lowry, et les époux finissent par divorcer. En 1939, Lowry se remarie avec Margerie Bonner et tous deux s’établissent dans la banlieue de Vancouver (Canada), où ils vivent dans une cabane au bord de la baie. Bien que Margerie ait une bonne influence sur la vie et l’écriture de Lowry, l’éthylisme de ce dernier continue à provoquer des difficultés. Le couple voyage beaucoup, sillonnant l’Europe, l’Amérique et les Caraïbes. Lowry finalise Under the volcano pendant la guerre. En 1954, Lowry et sa femme reviennent s’établir en Europe, où Lowry meurt en 1957, sans doute d’une overdose de somnifères et d’alcool. Plusieurs de ses œuvres sont publiées à titre posthume : Hear Us O Lord From Heaven Thy Dwelling Place (1961), Selected Poems (1962), Lunar Caustic (1968) et Dark as the Grave Wherein My Friend is Laid (1968).

Plus d’infos: http://www.otago.ac.nz/english/lowry/content/parent_frameset.html

DIstRIButIon

Josse De Pauw : Geoffrey Firmin, consul britannique au MexiqueKatelijne Damen : Yvonne Constable, ex-actrice et ex-épouse de GeoffreyMarc Van Eeghem : Hugh Firmin, journaliste et demi-frère de GeoffreyBert Luppes : Jacques Laruelle, cinéaste et ami d’enfance de Geoffrey

Fernando, la vieille femme de Tarasco, Dr Vigil, quincey, Señora Gregorio et Cervantes sont interprétés par Bert Luppes

la PlatefoRMe - DoctoRat Des aRts – le MoDÈle BRuxelloIs

Au cours de l’été de 2009, Guy Cassiers, Josse De Pauw, leur opérateur image et son et quelques autres ont passé dix jours à Mexico et à Cuernavaca. C’est là qu’ont été réalisées les prises de vues et de sons qui forment la toile de fond de l’adaptation du roman Under

the Volcano de Malcom Lowry par la Toneelhuis. La production du matériel d’images et de sons a été rendue possible grâce à l’accord de coopération entre l’universidad Nacional Autonomica du Mexique (uNAM) et Het Platform (La Plateforme), Doctorat es Arts, aussi connue sous le nom de « modèle bruxellois », dont Guy Cassiers et Josse De Pauw sont des agrégés. Het Platform a été créée voici trois ans dans le sein de l’UAB, l’association universitaire Bruxelles et sur l’initiative de la VUB, l’université libre flamande de Bruxelles. Son but est de stimuler l’entente et le rapprochement, de manière aussi pertinente que possible, entre le monde des arts, ses grandes écoles et l’université. Het Platform, qui compte entre-temps quelque soixante-dix agrégés – dont la moitié est constituée d’académiciens et l’autre d’artistes – s’efforce de créer un environnement légitime pour instaurer cette alliance souvent complexe de deux domaines d’expertise, portés par des traditions profondément divergentes. Notre souci constant est de veiller à ce que ces nouvelles formes de rapprochement se fassent au plus haut niveau, tant sur le plan de la teneur que de la qualité. Het Platform encadre entre autres des projets portant sur les arts plastiques, la littérature, le théâtre, la musique et le cinéma.

Pour plus d’informations sur Het Platform et ses projets : www.hetplatform.be

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“DeRRIÈRe” le volcanPar Erwin Jans, dramaturge

Under the volcano narre l’histoire du dernier jour tragique de la vie de Geoffrey Firmin, consul britannique au Mexique. Peu d’ouvrages de la littérature mondiale ont décrit l’univers d’un ivrogne avec autant de justesse et de dureté, mais aussi avec une fascination et une

émotion poignantes. under the volcano est aussi l’histoire touchante d’un amour impossible. Mais surtout, comme tous les grands romans, Under the volcano est bien plus qu’un simple roman.

Car ce n’est pas seulement un roman sur l’éthylisme et l’amour. C’est aussi un roman politique qui se déroule à l’ombre de la guerre civ-ile d’Espagne, du fascisme naissant au Mexique et de la menace de la Seconde Guerre mondiale. C’est un roman religieux sur la quête désespérée de rédemption d’une âme. Lowry est parvenu à rendre à travers la figure du consul ivre quelque chose de la confusion, des désirs et des angoisses du vingtième siècle. La petite ville mexicaine de quauhnahuac (le nom ancien de Cuernavaca) dans l’ombre des deux volcans, Popocatépetl et Ixtaccihuatl, est la version personnelle que donne Lowry du waste land, cette terre bréhaigne moderne de l’âme, à laquelle le poème du même nom de T.S. Eliot a donné sa stature littéraire. L’effritement de l’individu et de sa conscience torturée, aliénée, est le thème de Under the volcano. Tandis que lui-même implose, la langue explose en pure poésie. Car le roman est avant tout un chef-d’œuvre littéraire.

Josse De Pauw : ‘L’histoire parle d’amour, d’impuissance, de vanité, d’identité, de dépendance à l’alcool, d’attirance pour les ténèbres et même la mort, de la cocasserie de gens qui préfèrent la vision d’ensemble à la vision lucide, du fait de vouloir signifier quelque chose dans la vie sans savoir quoi au juste… Le livre traite d’une quantité de choses, et c’est ce qui lui confère son importance. On peut le lire et le relire, sans se lasser, il reste toujours quelque chose à découvrir. Dans ce qu’a écrit Lowry, chaque nom propre, chaque mot étranger, chaque théorie ou formule peut être soumis à une recherche et fouillé en profondeur. Il y a toujours quelque chose derrière. Lowry n’a rien écrit sans raison. Tout puise ses racines dans l’art, l’histoire, la science… Pouvoir jouer le rôle du Consul après avoir assuré l’adaptation théâtrale du livre de Malcolm Lowry, a fait de ce trajet une aventure très particulière. Je connaissais déjà très bien Geoffrey Firmin avant de commencer les répétitions. mais planter un personnage qui est cons-tamment sous l’influence de l’alcool, sans le réduire à un ivrogne chancelant, n’est pas simple. Pas plus que la nécessité de se mettre soi-même et son rôle en rapport avec le vocabulaire d’images de Guy Cassiers. Il s’agit toujours, pour un acteur, d’avoir l’audace et l’ouverture nécessaires pour comprendre son personnage et lui donner corps. Josse De Pauw est sur la scène, et le Consul doit en surgir.‘

Du roman au théâtre : un trajet

Pour Guy Cassiers, la décision de porter à la scène le roman Under the volcano (1947) de Malcolm Lowry n’est pas l’effet du hasard. Ce choix s’inscrit dans la longue série de romans que Cassiers a mis en scène au cours des dernières années, et dont À la recherche

du Temps perdu (Marcel Proust), Hersenschimmen/Chimères (J.Bernlef), Bezonken rood/Rouge décanté (Jeroen Brouwers) et Mephisto (Klaus Mann) sont sans doute aucun les plus importants. Cette saison, Cassiers s’attaque à un projet en trois volets autour du roman L’Homme sans qualités de Robert Musil. Le roman stimule l’imagination de Guy Cassiers bien plus que ne le fait un texte de théâtre : ‘ Comme Proust, Musil et Lowry, qui ont redessiné l’art romanesque et créé quelque chose d’incomparable, je veux toujours créer un spec-tacle qui n’a jamais été montré. Le roman m’en offre l’espace, précisément parce qu’il n’est pas conçu pour le théâtre. L’auteur d’un roman ne se restreint pas aux lois rigides du théâtre. Dans le texte de théâtre classique, toute l’information doit être contenue dans les dialogues, et il faut s’en tenir à un nombre limité de lieux. En fait, les lois dramaturgiques sont les séquelles des limitations techniques historiques. Aujourd’hui que ces limitations sont abolies, un espace plus libre se dégage sur la scène, dans lequel on peut faire entendre les pensées d’un personnage, sa réflexion intérieure. Il est aussi plus aisé de faire intervenir un narrateur qui entre et sort de l’action, et de changer le lieu de l’action. Tout comme dans un roman.‘

Katelijne Damen : ’Yvonne est une femme intelligente. Elle a fait des études d’astronomie, une formation loin d’être à la portée de n’importe qui. Elle a aussi été actrice, une donnée avec laquelle elle coquette tant soit peu. Cela définit sans doute sa manière de se présenter. Elle a aussi des zones d’ombre et de mystère. Sa « relation » émotionnelle et intuitive avec les trois hommes – car elle a eu une relation avec chacun d’eux – va aussi dans ce sens. Au début je la voyais comme une femme dépendante, une femme qui ne peut vivre sans amour, sans attention ou reconnaissance. Mais sa décision de retourner auprès de son mari témoigne d’un grand courage. Guy a dit à plusieurs reprises qu’Yvonne ne saurait être vue comme une victime. Quand est-on une victime et quand ne l’est-on pas ? Et en quelle mesure ? Je trouve son amour pour son mari sublime. C’est un amour inconditionnel. Le désir, l’aspiration sont des sentiments universels qui ne sont pas liés au genre ni

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à l’âge, ni par définition des signes de dépendance. Au contraire, cela peut être un signe de force, avoir quelque chose de magique et pourtant, d’ineffable. Elle n’attend pas de Geoffrey qu’il arrête de boire, mais que l’inconditionnel puisse revenir. Et peut-être est-ce précisément ce qu’il ne peut plus. La balance entre Yvonne et la boisson n’est plus en équilibre. Elle le voit et elle le reconnaît. Il est beau qu’elle ne se lance pas dans des arguments, qu’elle ne tente pas de « réparer ». Cela n’est pas nécessaire et n’aurait d’ailleurs aucun résultat. Mais elle est là. Elle donne. Reste la question de savoir comment vivre ainsi, et plus même, est-ce bien une vie ? Ou comme le dit le roman : qu’est-ce qu’une âme perdue ? Une âme qui erre dans l’obscurité du souvenir…’

Prises de vues au Mexique

L’histoire se déroulant en grande partie à Cuernavaca et dans les environs, Guy Cassiers a décidé d’aller filmer sur place. Accompagné de Josse De Pauw, Arjan Klerkx (prises de vues) et Diederick De Cock (son), il a visité les lieux les plus importants du déroulement

de l’action. C’est la première fois que Guy Cassiers va filmer en extérieurs pour un spectacle. « Je voulais explorer la littéralité. Le cadre exotique du Mexique est essentiel pour comprendre l’aliénation du consul. » L’équipe s’est donc rendue sur place pour opérer des prises de vues et de sons de cantinas, jardins, ruelles, maisons, une église, des musiciens, des rodéos de taureaux… sans pour autant vouloir donner une image documentaire du Mexique. Les images et les sons ne sont pas montrés au premier degré, mais retravaillés : « Je voulais filmer littéralement l’entourage mais pour l’intégrer d’une tout autre manière au spectacle. Dans le spectacle, les images du Mexique font partie d’une hallucination. Elles représentent la dégradation morale des quatre personnages principaux. Je pars du factuel pour mieux m’en défaire dans le spectacle » L’intention est de plonger le spectateur dans un monde insolite : « Pour évoquer l’atmosphère du Mexique, nous soumettons les spectateurs à un bombardement d’images. L’ingénieur du son a enregistré avec cinq micros, et dans la salle nous avons disposé un cercle de haut-parleurs pour renforcer l’effet spatial. On entend un avion à hélices vrombir, un taureau mugir, un orchestre de rue jouer la mélancolique chanson d’amour Flores negras : “Flores negras que el destino nos apartam sin piedad”. Les fleurs noires que le sort sans pitié nous a assignées. Nous avons demandé à tous les mariachis que nous avons rencontrés de jouer Flores negras, parce que le livre en parle. Dans la représentation, c’est Bert Luppes qui chante la chanson. Il joue le rôle de Jacques Laruelle, qui fait office de narrateur. un narrateur coupable : il a été l’amant de la femme du consul. »

Bert Luppes : ‘Je joue différents personnages : Laruelle, Fernando, Dr. Vigil, Quincey le voisin, señora Gregoria, la patronne d’une can-tina, Cervantes et une vieille femme de Tarasco. Pour moi, ils se fondent tous dans un seul et même personnage : Jacques Laruelle, ami d’enfance du Consul, ex-amant d’Yvonne et cinéaste. Josse a eu l’inspiration de donner plus d’importance à Laruelle dans l’adaptation théâtrale que celui-ci n’en a dans le roman. Il est devenu une sorte de narrateur, qui endosse plusieurs rôles dans l’histoire. C’est par le biais de ces personnages qu’il essaie de pénétrer le Consul. Physiquement, j’essaie de ne pas varier, de ne pas jouer l’un comme un bossu, ou l’autre faisant des moulinets de bras. J’essaie seulement de donner un autre ton à chaque scène, mais à partir d’un seul et même instru-ment, à savoir Laruelle. Cette ligne continue, c’est à l’acteur de la poser et de l’expliciter, car elle ne ressort pas totalement du texte. À mon avis, tout le spectacle se passe dans la tête du Consul. C’est son regard qui nous fait lire le monde. C’est à la visualisation de ce qui se passe dans sa tête que nous assistons. Quand le Consule s’adresse à moi en m’appelant « señora Gregorio », il fait de moi le personnage de cette femme. Une sorte de connivence s’établit, qui pose que Geoffrey lui-même sait qu’il s’agit toujours de Laruelle, et j’essaie de garder cette tension dans chaque scène. À travers l’histoire, Laruelle le suit comme un ange gardien qui le guide, l’avertit des dangers et lui offre son aide. Ce qui n’a d’ailleurs aucun sens, car Geoffrey continue sur sa propre lancée : il ne peut plus être sauvé. Laruelle est son meilleur ami et donc capable de lui dire la vérité de temps à autre. Venant de lui, Geoffrey l’accepte peut-être un peu plus que des autres. L’amour est à la base de leur relation et c’est ce qui rend leurs rapports si particuliers.’

volcan et explosion

Pour Cassiers, ce spectacle ne fait pas que traiter de la déchéance du consul, mais aussi de la déchéance du monde. ‘Le roman est situé à la fin des tragiques années trente du siècle dernier. Le volcan dans le titre est aussi la déflagration menaçante de la Seconde

Guerre mondiale. À la fin, lorsque le consul est tué par un groupe fasciste paramilitaire et jeté dans un ravin, il a une vision apocalyptique, celle de millions de corps en feu ! Dans les trois volets du Triptyque du pouvoir, je me suis aussi concentré sur la guerre. Le grand projet de L’Homme sans qualités auquel je m’attelle aujourd’hui se déroule en 1913, à la veille de la Première Guerre mondiale. Ce sont des moments dramatiques où toutes les valeurs sont remises en question. Musil le fait sous la forme d’une parodie, avec ironie et dérision grotesque. Chez Lowry, c’est l’élément lyrique et mélancolique qui domine.’

Marc van Eeghem : ‘Hugh est le demi-frère du Consul. Ce qui m’attire, chez Hugh, c’est sa complexité. On dit de lui qu’il tient du com-muniste de salon. Il se gargarise des idéaux de cette conviction, mais dans la pratique, il n’est qu’un pâle reflet du véritable commu-

niste. Hugh a aussi des allures de globe-trotter, il est un chevalier servant, cherchant à donner un sens à sa vie. Il éprouve des sentiments de culpabilité à cause de la relation qu’il a eue avec la femme de son frère. Il revient pourtant près de ce dernier pour l’aider à combattre la boisson. Hugh est bien plus que le cow-boy qu’il semble être. Il est aussi un révolutionnaire naïf, un fin limier qui veut prendre la vie avec optimisme mais est rongé par le doute. Je me reconnais en partie dans ces traits de caractère, car moi aussi j’affronte la vie avec une certaine naïveté. Josse et Guy m’ont aidé à caractériser mon personnage. Car « ich bin nur ein Schauspieler », comme le dit l’acteur dans Mefisto : j’essaie de réaliser aussi bien que possible ce que l’on me dit, et d’y mettre toute mon âme et ma vie.’

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Josse De Pauw en consul et en adaptateur

Guy Cassiers a demandé à l’auteur, acteur et metteur en scène Josse De Pauw d’interpréter le rôle de Geoffrey Firmin dans Under the volcano, mais aussi d’adapter le roman pour la scène. Josse De Pauw : « J’ai lu le livre pour la première fois vers mes 25 ans, mais

sans pouvoir le terminer. Ce qui me touchait à l’époque, c’était le côté bravache de son romantisme marginal, l’atmosphère « bukowski-enne » de l’alcool et du caniveau, mais dans un décor exotique. Plus tard, j’ai continué à le reprendre en mains et c’est devenu mon livre préféré. J’y découvre sans cesse plus de strates. S’il ne s’agissait que de boisson et d’autodestruction, le livre serait loin d’être aussi riche. ‘Que Josse De Pauw se soit vu confier cette mission ne tient pas du hasard. La solitude, la mélancolie, l’observation poétique, le mélange d’épique et de lyrique, le voyage, l’exotisme, l’aliénation, l’autodérision, la boisson, l’amour (impossible)… sont autant de thèmes que nous retrouvons dans ses propres œuvres, comme les pièces de théâtre Ward Comblez (1989) et Het Kind van de Smid/L’enfant du forgeron (1990), et dans nombre de ses notes et observations de voyage, réunies dans le recueil Werk (2000). La même sensibilité caractérise son jeu d’acteur. La préoccupation de De Pauw envers le pouvoir (et le fascisme) se dégage de textes comme Larf (2000) et du projet de 2002 bâti sur des témoignages d’anciens SS (sur la base du livre des écrivains hollandais Armando et Hans Sleutelaar). Josse De Pauw était donc tout désigné pour réaliser cette adaptation, compte tenu du fait qu’il en interprète le rôle principal. Son adaptation de Under the volcano ne saurait être dissociée du contexte scénographique : le texte n’a pas vu le jour en amont ou séparément de la réflexion sur la mise en scène, mais en son sein et en son cours. De Pauw en parle en ces termes : ‘Le livre déborde de données, et le public de théâtre n’a pas la possibilité de revenir en arrière pour relire. Impossible aussi de montrer des notes de bas de page sur la scène. J’ai donc dû beaucoup couper. Et puis, nous montrons beaucoup de chose par le biais des projections vidéo, des équivalents imagés de références littéraires. Il ne me serait jamais venu à l’idée d’adapter un roman aussi complexe pour la scène, mais lorsque Guy Cassiers me l’a demandé, je me suis dit : de cette façon-là, c’est peut-être possible. La méthode de Cassiers apporte de nombreuses solutions, on peut montrer en images tout ce qui est impossible à exprimer par les dialogues.’

un monde intérieur

Le spectacle commence par un grand vide. Il n’y a pas d’accessoires sur le plateau, à une simple chaise près. Les acteurs sont devant un grand écran en toile de fond, et derrière cet écran se trouvent encore quelques petits écrans mobiles. Les projections se déroulent

tant sur le grand que sur les petits écrans, souvent en même temps, donnant naissance à une image kaléidoscopique : le monde intérieur du consul. Sur la scène, les personnages ne font que parler. La plupart de leurs actions ont été filmées d’avance et sont projetées sur les écrans. Ainsi, on boit beaucoup dans l’histoire. Je ne voulais pas de bouteilles et de verres, concrètement, sur la scène. Ce réalisme était par trop réducteur. Les verres, le remplissage des verres, les verres vides que l’on repose : tout cela a été filmé. On ne voit pas les personnages, mais leurs mains autour des verres. Déconnecter les personnages sur la scène de leurs actions sur l’écran fait disparaître l’anecdotique. Car il ne s’agit pas d’une histoire sur la boisson et l’ivresse. L’alcool représente ici bien plus qu’une toxicomanie. Il s’agit d’une perspective, d’une certaine manière de voir le monde. La boisson n’équivaut pas seulement à l’autodestruction. Notre message n’est pas : après la représentation, précipitez-vous aux AA. La boisson offre aussi une solution au consul. C’est dans l’ivresse qu’il crée son propre monde, un monde supportable, loin du monde extérieur, inacceptable. Il en fait un monde agrandi à la puissance du mythe, une création littéraire.’

le spectateur à la table de montage

Dans le roman, le cinéma joue un rôle appréciable. Ainsi, Jacques Laruelle, un ami d’enfance du consul, est cinéaste, et Yvonne a eu son heure de gloire en tant qu’actrice à Hollywood. Laruelle est une figure importante. C’est lui qui fait renaître l’histoire en s’en souvenant.

Le roman s’ouvre sur la journée du 2 novembre 1939, exactement un an après la journée qui fut fatale tant au consul qu’à Yvonne. Dans une cantina, Laruelle se voit remettre des lettres –jamais envoyées – du consul à Yvonne. Voilà le début de l’histoire. Il se souvient alors des événements passés. ‘Pour moi, le grand écran en toile de fond est la table de montage et les images qui y sont projetées, des souvenirs qui n’arrivent pas à former une image cohérente. Laruelle n’arrive pas à comprendre ce qui s’est passé. Le collage d’images vidéo doit exprimer ce monde intérieur, et les images du monde extérieur sont dénaturées grotesquement jusqu’à en être hallucinatoires. C’est une déconstruction, à partir de laquelle le spectateur peut composer son propre spectacle.’

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le DelIRIuM qu’on noMMe la vIePar Erwin Jans, dramaturge

(Publié dans : Sous le volcan, Josse De Pauw pour Guy Cassiers, édité par Toneelhuis, 2009)

1. Un voyage qui ne finit jamais C’est en 1940, cette année sinistre de l’histoire européenne du vingtième siècle, que Malcolm Lowry (1909-1957) conçoit le plan d’un cycle épique de romans qui aurait pour titre The Voyage that Never Ends. Jusqu’à sa mort, Lowry s’attachera à placer les livres déjà écrits et ses nouvelles idées sous ce commun dénominateur, qu’il structure d’après le schéma de la Divina Commedia de Dante : enfer, purgatoire et paradis.

Under the volcano (1947), l’histoire du dernier jour tragique de la vie de Geoffrey Firmin, consul anglais au Mexique, occuperait une place centrale dans ce cycle. « une sorte de batterie au centre », ainsi Lowry décrit-il le lieu et la fonction de son roman. Dans le contexte du cy-cle, le consul serait une création littéraire de l’écrivain Sigbjørn Wilderness, un alter ego de Lowry. un livre dans un livre, un récit en abyme, donc. Lowry écrit à son éditeur : « Il se peut que la vie soit en effet une sorte de delirium, qui doit cependant être contemplée par un esprit sobre et “sain”. Par sobre et sain, je veux dire nécessairement limité. L’esprit n’est pas à même d’affronter la vérité en face. Les gens voi-ent peut-être parfois des bribes de cette vérité au niveau le plus bas, quand ils ont trop bu, ou quand ils perdent la raison et délirent, mais la vérité ne peut pas être assimilée, certainement pas de la position inversée. Non pas que la vérité soit “bonne” ou “mauvaise” ; elle est, tout bonnement, incompréhensible, et bien que nous en fassions partie, il y en a trop pour l’appréhender en une fois, elle est insaisissable, constamment protéiforme. » Les voyages et les contrées lointaines jouent un rôle important dans l’œuvre de Lowry, et ce n’est pas l’effet du hasard. Le voyage, la quête, l’aventure sont les moyens narratifs par excellence pour raconter la dynamique insaisissable et le polymor-phisme de la vie. L’un des livres fétiches de Lowry était Moby Dick d’Herman Melville. Bien que les romans de Lowry se situent toujours dans un cadre naturaliste reconnaissable, ils se transforment en voyages initiatiques de pèlerins torturés par le crime et le châtiment de l’âme, en quête d’une (im)possible Rédemption dans un paysage cauchemardesque.

The Voyage that Never Ends devait être la tentative la plus exhaustive de Lowry d’avoir prise sur ce delirium que l’on nomme vie. Mais comme il en est le cas de plus d’un projet littéraire, celui-ci était condamné à demeurer inachevé. De l’œuvre de Lowry nous sont restés des romans et des nouvelles, d’innombrables notes et schémas, et la conscience qu’un certain nombre de manuscrits ont été perdus. Et bien entendu Under the volcano, le roman qui devait constituer l’épicentre du cycle, mais qui est avant tout le cœur battant de l’œuvre de Lowry. Il en couche les premières notes sur le papier vers le milieu des années trente et en remanie le manuscrit – souvent de fond en comble – pendant dix ans. Au travers de ces années, Under the volcano passe d’un court récit à un roman impressionnant, entré au canon de la littérature moderne. Lowry n’était jamais pleinement satisfait de ce qu’il écrivait. Il retravaillait sans relâche des fragments, modifiant les fils de l’intrigue. La fébrilité du processus de création reflète la mouvance même de l’existence : tout comme la vie, un écheveau inextricable de croissance et de mort, le roman (et son écriture) est une tension indissoluble entre la construction et la destruction.

C’est au philosophe Ortega y Gasset que Lowry emprunta l’image de l’homme en tant qu’écrivain de sa propre vie. En 1951, Lowry écrit : “Not only the editor, but man himself is a cutter and a shaper; indeed as Ortega observes, a sort of novelist.” L’homme « monte » sa propre existence : il coupe et colle les fragments et séquences de sa vie. C’est cependant une image insolite pour celui qui observe avec attention les personnages de Under the volcano : ils paraissent bien plus livrés à des forces qui les dépassent qu’occupés à donner forme à leur propre vie. Leur sort, semble-t-il, est écrit ailleurs. Mais – et c’est là que l’image se recoupe – ce sort n’est pas un chemin tout tracé mais un concours de circonstances, un puzzle impossible à reconstituer. « Comment pouvait-il espérer se retrouver un jour, repartir à zéro, alors que la clé de son identité gisait peut-être dans l’une de ces bouteilles brisées ou perdues à jamais ? Comment pouvait-il retourner la chercher, fouiner parmi les tessons, sous les bars éternels, sous les océans ? », ainsi le consul médite-t-il sur sa situation. quoi qu’il en soit, Lowry est parvenu à rendre à travers la figure du consul ivre quelque chose de la confusion, des désirs et des angoisses du vingtième siècle. Geof-frey Firmin dégage une force littéraire et iconographique comparable à celle d’ulrich, l’homme sans qualités du roman du même nom de Robert Musil, de Marcel dans À la recherche du temps perdu de Marcel Proust, de Clarissa Dalloway dans Mrs Dalloway de Virginia Woolf, de Leopold Bloom de l’Ulysses de James Joyce, d’Hans Castorp de la Montagne Magique de Thomas Mann. La petite ville mexicaine de Quauhnahuac (un nom fictif pour Cuernavaca) dans l’ombre des deux volcans, Popocatépetl et Ixtaccihuatl, est la version personnelle que donne Lowry du the waste land, cette terre bréhaigne moderne de l’âme, à laquelle le poème du même nom de T.S. Eliot a donné sa stature littéraire. Et comme tous les grands romans, under the volcano de Malcolm Lowry est bien plus qu’un roman.

2. tequila et mescal : le roman d’une ivresse Le chef-d’œuvre de Lowry est sans doute aucun l’un des romans les plus connus sur le vécu d’une ivresse, vu de l’angle de l’ivrogne lui-même. Malcolm Lowry savait de quoi il parlait. Son autobiographie est le triste témoin du combat difficile contre la boisson, qui a lourdement pesé sur son écriture et ses relations, sa vie durant. Bien que l’éthylisme – le sien comme celui du consul – soit en partie responsable de la réputation du roman, il en allait pour Lowry de bien plus que d’une « étude de cas » littéraire. La boisson et l’ivresse sont, dans Under the volcano, tout à la fois péniblement réalistes et profondément symboliques. Lowry aurait dit un jour : “The real cause of alcoholism is

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the complete baffling sterility of existence as sold to you.” L’alcool est, pour le consul, un moyen de se tenir droit dans un monde stérile, littéralement « désenchanté » : « quelle beauté peut se comparer à celle d’une cantina dans le petit matin ? Les volcans, là-bas ? (…) Tous les mystères, tous les espoirs, toutes les déceptions, tous les désastres sont là, derrière ces portes battantes. (…) Comment, si l’on ne boit pas, espérer comprendre la beauté d’une vieille femme de Tarasco qui, à sept heures du matin, dans une cantina, joue aux dominos avec son poulet ? »

La bouteille est l’issue de secours du consul et en même temps, son poste d’observation le plus lucide. C’est sa tour d’ivoire, mais aussi sa façon de communiquer avec le monde, bien que cela se fasse plus souvent avec les bêtes qu’avec les gens, avec le passé qu’avec le présent, avec la littérature qu’avec la réalité. La boisson a tout détruit dans l’univers du consul – sa carrière, ses amours et ses amitiés – mais elle est aussi le seul moyen de redonner leur éclat aux fragments, et de les recoller, l’espace d’un instant. L’argument du consul est que s’il ne peut atteindre la pleine conscience qu’en buvant du mescal, il ne lui reste qu’à en boire. Il comprend cependant très bien que le prix à payer pour sa pleine conscience est l’isolation absolue. Son dilemme le plus pénible est de savoir si cette isolation comprend aussi le rejet de l’amour.

3.no se puede vivir sin amar: un roman d’amourLe roman raconte la tragique histoire d’amour de Geoffrey Firmin et d’Yvonne Constable, une ancienne actrice qui a connu la gloire à Hol-lywood. Le récit commence le 2 novembre 1938, le jour où Yvonne, sans s’être annoncée, retourne auprès de son ex-mari. Le couple avait divorcé à cause de l’éthylisme du consul, et des infidélités d’Yvonne, tant avec le demi-frère du consul, le journaliste Hugh Firmin, qu’avec Jacques Laruelle, un cinéaste. Le roman traite d’un complexe « ménage à quatre », et la tension et la jalousie indicibles prennent les per-sonnages dans leurs rets. Geoffrey et Yvonne auraient pu se réconcilier s’ils avaient été seuls, mais la présence des deux anciens amants les en empêche. Les entretiens entre les divers personnages sont hantés par les souvenirs (traumatiques) de ces relations anciennes. En même temps, le récit témoigne des liens intenses d’amitié qui unissent les quatre protagonistes.

Bien que l’on puisse avancer que certains personnages sont des ramescences de Lowry lui-même (Hugh pourrait être le jeune Lowry, et le consul, Lowry à l’âge mûr, par exemple), il arrive à donner un passé et une vie émotionnelle qui leur est propre. Ce sont quatre person-nages de chair et de sang dont le lecteur découvre les complexes relations psychologiques. Ainsi, le comportement de fuite du consul, en ce 2 novembre en question, s’explique par sa fureur vis-à-vis des infidélités passées d’Yvonne et le constat de son impuissance sexuelle (un moment intime avec Yvonne l’en convainc péniblement). Paré d’un chapeau et de bottes de cow-boy, et armé d’un revolver, Hugh est portraituré comme l’antipode vigoureux de son demi-frère le consul. Dans l’arène de Tomalin, Hugh chevauchera même un taureau ! Si l’écrivain Lowry a sans doute voulu se gausser de tant de virilité machiste, cela exacerbe le contraste avec le consul, certainement à un moment où Yvonne paraît se rapprocher de Hugh. Ce n’est que vers la fin du roman que le consul crache sa rancœur à la figure d’Yvonne et de Hugh. Peu après, Yvonne, à la recherche de son ex-mari, sera mortellement blessée par un cheval débridé, alors même que le consul est assassiné dans une cantina, tenant les lettres d’amour d’Yvonne à la main. Le premier chapitre du roman, le 2 novembre 1939, juste un an après les faits tragiques, décrit comment Jacques Laruelle reçoit un livre qui a appartenu au consul. Il y trouve une lettre – jamais envoyée – du consul à sa femme, dans laquelle il lui déclare son amour et la supplie de revenir. Des mots déchirants, mais qu’il n’a jamais prononcés lorsqu’elle lui est bel et bien revenue. L’inversion de la chronologie est l’une des grandes interventions de Lowry et s’avère avoir un puissant impact émotionnel sur la façon dont le lecteur perçoit le consul et interprète son comportement à l’égard d’Yvonne. Son amour pour Yvonne est aussi grand que son incapacité à vivre avec elle. Il prie pour qu’elle lui revienne et simultanément, il prie pour pouvoir rester seul. Bien que désirant ardemment la rédemption, il n’aspire en même temps qu’à sombrer encore plus bas.

4.la vierge pour ceux qui n’ont personne : un roman religieuxUnder the volcano est aussi l’un des plus grands romans religieux du vingtième siècle. Ceci ne tient pas tant au récit en lui-même, mais à la symbolique et aux métaphores religieuses que Lowry emploie en abondance. Peu d’auteurs modernes se sont penchés dans leur œuvre avec tant d’intensité et aussi explicitement sur les thèmes du ciel et de l’enfer, du paradis et de l’expulsion, de la souffrance et de la mis-éricorde, de la rédemption et de la perdition. L’une des trois citations en exergue du roman est de John Bunyan, l’écrivain de A Pilgrim’s Progress (1678), un célèbre récit allégorique sur la vie d’un chrétien. Elle exprime autant l’envie (impossible et donc douloureux) d’être un crapaud ou un chien, et donc d’échapper au péché et à l’enfer, que la peine encore plus grande de ne pas parvenir à désirer la délivrance de toute son âme.

Le consul erre comme un voyageur égaré dans le stérile paysage spirituel de la modernité. Le fait qu’il subit ce vide dans un cadre encore tout insufflé des rituels religieux archaïques, pré-modernes, exacerbe encore cet égarement. La fête mexicaine du Jour des Morts, le 2 novembre, si étrange aux yeux occidentaux, au cours de laquelle les familles pique-niquent dans les cimetières, les enfants jouent avec des squelettes de pacotille et s’échangent des brioches et des sucreries en formes d’ossements et de crânes, crée un environnement surréel au-quel le consul est intensément réceptif, et l’alcool n’en est pas la seule cause. Car le consul – et il partage ce trait de caractère avec Lowry – est particulièrement sensible aux signes et aux coïncidences. Il vit dans une réalité où tout ce qui l’entoure est porteur de messages secrets : les noms de rues, les graffitis, les affiches de publicité, les nombres, etc. recèlent des significations métaphysiques. Outre l’omniprésente mythologie chrétienne du paradis, de l’expulsion, de la perdition et de la rédemption, nombreuses sont les références à la Kabbale. Geof-frey écrit un livre sur la Connaissance Secrète, qu’il n’arrive cependant pas à terminer. Dans sa lettre jamais postée à Yvonne, il écrit : « Me

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vois-tu travaillant toujours à mon livre, essayant de répondre à des questions telles que : Existe-t-il une réalité ultime, extérieure, consciente, toujours présente, accessible par des voies acceptables pour toutes les religions et croyances et adaptables à tous les climats et pays ? »

5.la Guerre d’espagne : un roman politiqueOutre cette dimension métaphysique indéniable, le roman porte le sceau de l’histoire. Car il ne s’agit pas du deux novembre de n’importe quelle année, mais du 2 novembre 1938. La figure du journaliste Hugh fait se focaliser l’attention sur la situation politique mexicaine et internationale (la guerre civile d’Espagne, le fascisme, l’antisémitisme). Car c’est le 30 septembre 1938, quelques semaines avant le jour qui sera fatal au consul, que sont signés les accords de Munich par lesquels la France et la Grande-Bretagne accordent à Hitler d’annexer à l’Allemagne la Région des Sudètes, la partie germanophone de la Tchécoslovaquie. Le roman renvoie à Chamberlain, Hitler, Staline, Gan-dhi, Nehru, et l’invasion italienne de l’Abyssinie. En 1938, le Mexique est déchiré par de graves luttes politiques. Le président Cardenas, un socialiste populiste, soutient les forces démocratiques engagées dans la guerre civile d’Espagne, exproprie les holdings des compagnies pétrolières étrangères, offre asile à Trotski le proscrit, ferme les casinos et applique un programme radical de redistribution agraire. Mais le chaos règne dans certaines régions du pays, et des groupes fascistes et paramilitaires complotent contre le gouvernement socialiste. Le on-sul est abattu par une faction fasciste, parce qu’il est perçu comme un espion communiste. Geoffrey et Hugh répondent des deux positions que pouvaient adopter les intellectuels occidentaux dans les sombres années trente du siècle dernier : l’une contemplative, l’autre engagée. Cet engagement portait en premier lieu sur la Guerre d’Espagne, qui opposait les forces républicaines aux légions fascistes. La victoire de Franco fut le triste prélude de la Seconde Guerre mondiale. Le spectre de la défaite des républicains pèse comme une ombre menaçante sur le roman. La déchéance du consul s’en trouve dotée d’une dimension d’autant plus large. Pour le poète Stephen Spender (qui signe l’introduction de la réédition de 1967 du roman), la mort du consul n’a pas qu’une signification politique, mais aussi un aspect religieux : « under the volcano est une tragédie authentiquement moderne, parce que le meurtre du consul par la police fasciste transforme sa vie en une affirmation convaincante des valeurs qu’il a fondamentalement connues et qu’il n’a jamais reniées dans sa conscience. La conclusion ne peut qu’être religieuse : les contradictions d’un héros qui n’agit pas et ne réussit pas à être un héros, l’insistance implicite que le consul est l’écrivain, qu’il vit et meurt pour nous tous, le respect des valeurs éternelles dans un monde entièrement contemporain, se confondent dans le thème de la Divina Commedia, la progression de l’âme. »

6.la baleine blanche de la tradition : un roman « littéraire »Le roman est « hanté » par un passé littéraire. Lowry était un lecteur assidu, très conscient de la force de la tradition littéraire. Son roman déborde de références à d’autres écrivains, et non des moindres : Dante, Goethe, Shakespeare, Cervantes, Melville. Lowry voulait écrire un chef-d’œuvre qui puisse se mesurer avec les grands romans du passé, et c’est avec Under the volcano qu’il y réussit pleinement. Avec, d’ailleurs toutes les conséquences que cela implique : il restera à jamais à l’ombre de ce livre. Aussi, Lowry fait du consul un homme in-struit et d’une grande culture. C’est peut-être ce qui rend la réalité si complexe, pour lui : il la lit comme un entrelacs touffu de signes qui renvoient constamment les uns aux autres, et suggèrent une réalité cachée. Bizarrement, les associations poétiques et littéraires vont en parallèle avec l’interprétation que fait l’ivrogne de son environnement : la boisson fait surgir des liens insolites et des significations oubliées. Le consul est pris au piège de ce lacis de références et de signes. La force de passer à l’action lui manque, tant dans sa vie personnelle que sociale. D.H. Lawrence a exprimé en ces termes le malaise de la modernité : “Word perfect we may be, but deed demented.” Nous avons beau être parfaits dans les mots, nous sommes déments dans nos actions. Le consul est une figure exemplaire parce qu’il est un homme cultivé et sensible : son intelligence et sa sensibilité enregistrent le breakdown moral de toute une société. 7.lost in translation: un roman de l’aliénationIl est un moment où le consul monte à bord d’une grande roue, une attraction de la fête foraine, qui porte le nom de Machine Infernale. Il est projeté dans les airs et suspendu à l’envers. Toutes ses possessions tombent à terre : son agenda, sa pipe, sa canne, ses lunettes, son portefeuille, ses papiers, sa monnaie : « qu’est-ce que cela pouvait faire ? Laisse aller ! Il trouva une sorte de joie sauvage dans cette acceptation finale. Laisse tout aller ! Et surtout ce qui offrait des voies d’accès ou de sortie, donnait des garanties, un sens ou du caractère, un but ou une identité à ce foutu cauchemar effroyable qu’il était forcé de trimbaler partout sur son dos et qui allait sous le nom de Geof-frey Firmin, ancien officier de la Marine de Sa Majesté, puis au service consulaire de Sa Majesté, enfin à – ». C’est avec une autodérision mêlée de plaisir douloureux que le consul se laisse ici déplumer jusqu’à l’essence nue de son être : suspendu entre le ciel et la terre, il se déleste de tout sens et signification, comme d’un poids mort, dans une tentative désespérée de repartir à zéro. Cette aspiration à un nouveau commencement est le revers du thème de l’aliénation, un thème qui se décline à plus d’un niveau. Tous les personnages sont des « ex » : ex-amants, ex-mari, ex-consul, ex-actrice. Ils ne se sentent pas vraiment chez eux, au Mexique. Le monde qu’évoque Lowry dans under the volcano est hallucinant et irrationnel, c’est un monde onirique, mais cauchemardesque, encore renforcé par le choix de Lowry de situer le récit le Jour de Morts au Mexique. Dans ce paysage mexicain, surréel et théâtral, les protagonistes dépaysés errent comme des somnambules, accablés par le poids de leur passé. Mais cette aliénation personnelle est aussi l’écho d’une aliénation plus grande, sociétale. La névrose du consul est simultanément la diagnose d’une certaine phase de l’histoire européenne. Du fait même qu’il se déroule au Mexique, Under the volcano est un roman sur l’Europe et le déclin de ses valeurs.

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8. le spectacle en tant que table de montageÀ la demande du metteur en scène Guy Cassiers, Josse De Pauw a adapté Under the volcano pour la scène. Confier cette mission à Josse De Pauw ne découle pas du hasard : la solitude, la mélancolie, l’observation poétique, le voyage et l’exotisme, l’aliénation, l’autodérision, la boisson, l’amour (impossible)… sont autant de thèmes que nous retrouvons dans ses propres œuvres, telles les pièces de théâtre Ward Comblez (1989) et L’enfant du forgeron (1990), ainsi que dans les nombreux souvenirs et observations de voyage qu’il a réunis dans son recueil Werk (Gros œuvre) (2000). Le pouvoir (et le fascisme) est aussi l’une des préoccupations de De Pauw, comme le prouvent des textes comme Larf (2000) et Ruhe, son projet de 2002, basé sur des témoignages d’anciens SS (d’après le livre des écrivains hollandais Armando et Hans Sleutelaar). Nul n’était donc plus qualifié que Josse De Pauw pour écrire cette adaptation, ni mieux taillé pour en inter-préter le rôle-titre.

L’adaptation de Under the volcano ne saurait être dissociée de sa mise en scène, même si la pièce publiée conserve son autonomie propre, en dehors du spectacle monté par Guy Cassiers. Le texte n’a pas vu le jour en amont ou séparément de la réflexion sur la mise en scène, mais en son sein et en son cours. L’emploi que Guy Cassiers fait de la technologie visuelle pour porter un récit à la scène a directement influencé l’écriture du texte. L’adaptation d’un roman à la scène est en premier lieu une réduction drastique, mais indispensable, du récit et des informations. Cela vaut d’autant plus dans le cas du roman aussi volumineux, à la fois lyrique et épique, qu’est Under the volcano. L’adaptation se concentre d’une part sur le quadrilatère Geoffrey-Yvonne-Firmin-Laruelle et de l’autre sur les brèves rencontres du consul avec quelques personnages (le Dr Vigil, M. quincey, une vieille femme mexicaine, señora Gregorio, etc.). Mais dans le cas d’une adaptation théâtrale, penser en termes de « réduction » (restriction, abrégement, coupures, etc.) de l’original, c’est ignorer le véritable processus de transformation auquel est soumis le texte, surtout dans un spectacle total comme ceux de Guy Cassiers. Il ne s’agit pas à proprement parler d’une « restriction » mais d’une « redistribution » du récit et des informations, qui sont dès lors réparties en plusieurs vécus sensoriels et disciplines artistiques. L’entreprise théâtrale inclut et dispose toujours de la possibilité et des moyens d’en arriver à un Gesamtkunstwerk. Chez Cassiers, le spectacle est un jeu d’ensemble des corps, du texte, du son, de la musique et de la projection d’images. Voilà qui explique ses options pour le roman. Au con-traire d’une pièce de théâtre, un roman, pour Cassiers, est un véritable chantier : « Comme Proust et Lowry ont redessiné l’art romanesque et créé quelque chose d’incomparable, je veux toujours faire, dans un spectacle, quelque chose qui n’a jamais été montré. Le roman m’en offre l’espace, précisément parce qu’il n’est pas conçu pour le théâtre. L’auteur d’un roman ne se restreint pas aux lois rigides du théâtre. Dans le texte de théâtre classique, toute l’information doit être contenue dans les dialogues, et il faut s’en tenir à un nombre limité de lieux. En fait, les lois dramaturgiques sont les séquelles des limitations techniques historiques. Aujourd’hui que ces limitations sont abolies, un espace plus libre se dégage sur la scène, dans lequel on peut faire entendre les pensées d’un personnage, sa réflexion intérieure. Il est aussi plus aisé de faire intervenir un narrateur qui entre et sort de l’action, et de changer le lieu de l’action. Tout comme dans un roman. Le théâtre s’est libéré de l’art du dialogue. Les possibilités sont infinies. »

Les spectacles de Cassiers s’adressent à plusieurs sens à la fois. C’est au spectateur de monter ces informations sensorielles pour en faire un tout cohérent. La métaphore du montage était déjà mentionnée plus haut dans un contexte plus philosophique. Dans le cas du spectacle, ce montage est doté d’une signification très concrète. Dans le roman, le cinéma joue un rôle important. Les références aux films abondent, Yvonne est une ancienne actrice d’Hollywood et Jacques Laruelle est cinéaste. La dramaturgie du spectacle a donc recours à plusieurs reprises à la métaphore filmique. Ainsi, la toile de fond vide à l’arrière de la scène, sur laquelle sont projetées les images, fait of-fice de table de montage. Laruelle est le narrateur, qui, se basant sur ses souvenirs, essaie de reconstituer les événements du 2 novembre 1938. Vu sous cet angle, il est donc logique que dans cette mise en scène, l’acteur qui joue Laruelle joue également tous les petits rôles : car cela fait partie de sa tentative de reconstruction des faits. Mais le montage final du film incombe au spectateur.

L’usage de divers médias dans le spectacle n’implique pas que tous les médias doivent dispenser les mêmes informations. Au contraire. Le Mexique n’a pas besoin d’être évoqué dans les paroles et les répliques des personnages, il est présent dans les prises de vues que Guy Cassiers et Josse De Pauw ont réalisées sur place : les cantinas, les jardins, les rues, les maisons. Le Mexique est aussi présent dans les enregistrements de musique, de bruits de la rue et de sons de la nature. Ce spectacle est le premier pour lequel Guy Cassiers a pris des enregistrements d’images et de son in situ, s’attachant à inclure des endroits que Malcolm Lowry avait devant les yeux pendant qu’il écrivait son roman. Ceci à cause de la prééminence de l’élément autobiographique dans under the volcano. Mais la raison essentielle est le fait que le Mexique est bien plus qu’une toile de fond dans le roman. Le Mexique est le miroir de l’âme tourmentée du consul, une métaphore concrète de son aliénation (et de celle des autres personnages). Le Mexique est tout à la fois un monde intérieur et extérieur, le paradis et la damnation, la politique et la mystique.

Pour Guy Cassiers, Under the volcano s’intègre dans son étude d’un théâtre en tant qu’espace de l’intériorisation, du souvenir, de l’hallucination, du traumatisme, etc. Tout comme dans Bezonken rood (Rouge décanté), d’après le roman du même nom de Jeroen Brou-wers, le spectateur est entraîné dans la tête du consul par le biais des projections. L’alcool, la confusion émotionnelle et le vécu aliénant et poétique du Jour des Morts, etc. sont évoqués dans la multitude et la simultanéité des images et des sons. Outre ce vécu de l’intériorisation, le spectacle brosse le portrait de la confusion morale qui marque l’époque d’avant-guerre – juste avant son explosion – que Cassiers utilise souvent en métaphore de la situation actuelle.

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ResuMe De sous le volcan (aDaPtatIon theatRale)

Personnages :Geoffrey Firmin, consul britannique au MexiqueYvonne Constable, ex-actrice et ex-épouse de GeoffreyHugh Firmin, journaliste et demi-frère de GeoffreyJacques Laruelle, cinéaste et ami d’enfance de Geoffrey

1.Mexique. Le Jour des Morts, deux novembre 1939. Jacques Laruelle, attablé à la terrasse de l’hôtel, dresse le constat désabusé de sa vie au Mexique. Alors qu’il se dirige vers le centre de la ville, la pluie se met à tomber. Il se réfugie dans une cantina locale. L’aubergiste lui remet un livre, oublié jadis par son ami le consul britannique, Geoffrey Firmin et d’où s’échappent les feuillets d’une longue lettre à la femme de celui-ci, Yvonne.

2.Laruelle lit la lettre de Geoffrey à Yvonne. Elle parle de leur divorce, de son chagrin incommensurable et de son espoir de refaire sa vie avec elle. Il la supplie de revenir et promet d’arrêter de boire si elle le fait. Laruelle brûle la lettre à la flamme de la bougie sur la table de la cantina.

3.Jour des Morts, deux novembre 1938. Exactement un an plus tôt. Après une année d’absence, Yvonne revient sans s’annoncer à quauhna-huac. Elle trouve Geoffrey dans une cantina, où il boit de la tequila dès le petit matin. Les retrouvailles sont guindées, les sentiments trou-bles. Le consul dit que son demi-frère, Hugh, est venu tout spécialement au Mexique pour l’aider à se défaire de l’alcool. Ils se rendent à la maison, où Yvonne remarque que le jardin, jadis si beau, est retourné à la jungle. Elle propose à Geoffrey de quitter le Mexique ensemble, mais le consul ne veut pas en entendre parler. Malgré la tension qui les sépare, tous deux sont encore attirés l’un par l’autre. Mais l’ivresse du consul aidant, cela se termine par un moment gênant. Le consul laisse Yvonne seule, atterrée.

4.Dans la Calle Nicaragua, le Dr Vigil trouve Geoffrey étalé de tout son long sur la route et l’emmène à l’église de la Vierge pour les abandona-dos – ceux qui n’ont personne. Le Dr Vigil exhorte Geoffrey à prier pour qu’Yvonne revienne, car on ne peut pas vivre sans aimer.

5.Hugh voit Yvonne dans le jardin et est surpris par sa présence inattendue. Yvonne est mal à l’aise, elle aussi. Car tous deux ont eu une rela-tion, dans le passé. Hugh parle à Yvonne de son voyage au Mexique, de ses activités journalistiques et de son engagement dans la Guerre d’Espagne. Hugh demande à Yvonne si elle est vraiment revenue à Geoffrey. Mais la réponse qu’il reçoit est équivoque. Tous deux discutent l’éthylisme du consul et la difficulté qu’ils ont à le comprendre. Lorsque Hugh dit qu’Yvonne et Geoffrey devraient quitter le Mexique, Yvonne lui confie qu’elle aimerait acheter une ferme au Canada. Hugh la prend dans ses bras et lui décrit une existence simple mais idyllique au bord de la mer, et Yvonne se plaît à l’imaginer.

6Geoffrey, sous l’emprise de la boisson, vomit dans le jardin de quincey, son voisin. quincey lui demande des nouvelles de sa femme et dit l’avoir vue avec Hugh. Le consul fait mine de n’avoir rien entendu et continue à divaguer à propos de tigres, d’Indiens et d’Adam qui, selon lui, n’a peut-être jamais été chassé du Paradis.

7Tandis qu’il regarde les nuages filer dans le ciel mexicain, Hugh est plongé dans les réminiscences. Les années ont passé si vite, et il se sent un raté, un traître et un capon. Sa rêverie est interrompue quand le consul l’appelle à l’aide. Hugh aide son frère à se raser et Geoffrey lui fait lire une carte postale qu’Yvonne a envoyée un an plus tôt – juste après la séparation – mais qui ne vient que d’arriver. Le consul fait clairement comprendre à Hugh qu’il sait qu’Yvonne et lui sont allés se promener.

8Geoffrey, Yvonne et Hugh sont en route pour Tomalín, où doit se dérouler un rodéo sur taureaux, lorsqu’ils rencontrent Jacques Laruelle, un ami d’enfance du consul. Jacques les invite à boire un verre chez lui. Tandis que Hugh va sur le toit pour admirer la vue et que Laruelle prépare les cocktails, Yvonne et Geoffrey ont quelques minutes en tête à tête. Elle lui dit vouloir quitter la maison de Laruelle – un ancien amant, lui aussi – au plus vite. Hugh et Yvonne partent pour la ville, où la fête bat son plein, le consul et Laruelle les suivent un peu plus tard et ont en chemin une discussion tendue sur le retour d’Yvonne et le comportement de Geoffrey, et sur les dangers du mescal.

9Le consul entre dans une cantina et bavarde à bâtons rompus de la vie et de l’amour en buvant avec señora Gregorio, la patronne. Elle console Geoffrey et lui prédit que sa femme lui reviendra bientôt.

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10En route pour Tomalín, Yvonne se souvient de ses premiers succès de jeune actrice à Hollywood et de son come-back raté, des années plus tard. Dans l’arène, Hugh chevauche un taureau, au grand dam du consul. Pendant un moment d’intimité, Geoffrey et Yvonne réitèrent leur promesse d’amour et le consul admet qu’il vaut mieux quitter le Mexique. Leur entretien est interrompu par Hugh qui revient, tout fringant. Ils partent pour le Salon Ofélia.11Pendant que Hugh et Yvonne piquent une tête dans l’eau de la cascade, le consul boit du mescal au Salon Ofélia. Il prie pour Yvonne devant la statue de la Vierge. Hugh et Yvonne reviennent de leur baignade et parlent du fascisme au Mexique et ailleurs. Le consul s’oppose à Hugh au sujet de ses sympathies de gauche et du communisme, et critique l’interventionnisme qu’il prône. Il reproche même à Hugh et Yvonne leur manie de se mêler de sa vie à lui. Et il les accuse d’avoir encore une relation amoureuse. Il affirme avoir pris sa décision, et ne plus croire à la vision d’une vie sans alcool. Puis il quitte brusquement la cantina.

12Hugh et Yvonne, atterrés, restent seuls et boivent un mescal, puis partent à la recherche de Geoffrey. La tempête se déchaîne, et pendant que Hugh fait le tour des cantinas pour trouver Geoffrey, Yvonne est mortellement blessée par un cheval emballé. Simultanément, au bar du Farolito, le consul s’abrutit au mescal. Le patron lui remet une liasse de lettres d’Yvonne, et il en lit des fragments. une prostituée, à qui le consul trouve des ressemblances avec Yvonne, l’emmène dans une chambre. En sortant du bar, Geoffrey voit un cheval attaché à un arbre. Des vigiles l’accusent tour à tour d’être Juif ou espion communiste, et le fouillent, confisquant ses lettres. Le consul perd son sang-froid et menace les agents. L’un d’eux l’abat froidement. Le cheval, effrayé, se détache de ses liens et s’enfuit… et foulera Yvonne quelques instants plus tard. Le cadavre du consul est jeté dans un ravin.

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PResse

le MonDe - 26/09/2009 - BRIGItte salIno

sous le volcan, Dans la tête Du consul

Guy Cassiers a l’art d’être infidèle. Il le montre une nouvelle fois en adaptant au théâtre le roman de Malcolm Lowry (1909-1957), Sous le volcan, dont il fait un voyage sensoriel et hypnotique dans la conscience d’un homme au bout de la route, vivant son dernier jour, entre alcool et désespoir d’amour existentiel, dans une petite ville du Mexique, le 2 novembre 1938.

Pour le metteur en scène flamand, âgé de 49 ans, directeur du Toneelhuis d’Anvers, ce voyage est une suite naturelle à ceux qu’il a déjà entrepris, en mettant en scène de la littérature, de Proust (douze heures de spectacle pour La Recherche du temps perdu), à Jeroen Brou-wers (Rouge décanté), en passant par Klaus Mann, avec le Mefisto for Ever qui ouvrait la trilogie sur le pouvoir présentée au Théâtre de la Ville en 2008.

Certes, il est arrivé à Guy Cassiers de mettre en scène des pièces (en particulier, Angels in America, de Tony Kushner). Mais il préfère le ro-man, avec lequel il se sent plus libre. Il considère que les contraintes techniques sont à l’origine de l’écriture et de la construction des pièces, où tout doit être dit dans les dialogues. Selon lui, ces contraintes ayant aujourd’hui disparu avec l’apparition de la vidéo et la sophistication du son, il n’y a plus de raison de s’astreindre à la rigidité du théâtre.

Sous le volcan en est une illustration remarquable. Malcolm Lowry a mis dix ans (de 1947 à 1957) à écrire ce roman inspiré par l’histoire d’amour qu’il vécut avec sa première femme, Janine Vanderheim, rencontrée à Grenade, en Espagne, en 1933. Jan était une New-Yorkaise de 22 ans qui avait renoncé à une carrière d’actrice après une blessure au visage. Lowry le Britannique promenait en Europe un mal de vivre qu’il avait appris dès l’âge de 17 ans, en voyageant comme mousse sur les mers, à noyer dans l’alcool. Tous les deux voulaient écrire. Ils restèrent quatre ans ensemble, avant de se séparer, à Mexico, à l’Hôtel Granada, le 1er décembre 1937. Ce jour-là, Jan partit, usée par le combat qu’elle avait mené, en vain, pour que son mari cesse de se détruire.

Dans Sous le volcan, Jan devient Yvonne, une ancienne actrice qui n’a pas réussi à Hollywood, et Malcolm prend le nom de Geoffrey Firmin, un ex-consul écarté de ses fonctions pour inconduite. Ils se retrouvent à quauhnahuac, au Mexique, où Yvonne tente une dernière fois de reconquérir son mari.

C’est le 2 novembre, jour où les familles fêtent les morts. quand la nuit sera tombée, le corps d’Yvonne sera piétiné par un cheval, et celui de Geoffroy jeté dans un ravin, comme un chien, par des agents fascistes qui l’accusent tour à tour d’être juif ou communiste.

En voyant le spectacle de Guy Cassiers, vous entrez dans Sous le volcan comme si vous entriez dans la tête d’une femme, Yvonne, et de trois hommes, Geoffroy et Hugh son demi-frère, ex-amant d’Yvonne, et Jacques Laruelle, ami d’enfance et autre ex-amant d’Yvonne. Peu importe que vous ayez lu ou non le roman. Il est vécu, là, devant vous, par trois acteurs qui ne font que parler, comme s’ils soliloquaient, même quand ils s’adressent l’un à l’autre.

Leurs mots ne sont pas tous de Lowry. Mais ils plongent au coeur même de son oeuvre, dans ce combat de la onzième heure, où chacun approche seul sa mort. Ce qui traverse alors le quatuor, et surtout le Consul, vous est insufflé par des images inscrites sur un écran parfois traversé par les acteurs. Filmées par Guy Cassiers au Mexique, ces images sont retravaillées jusqu’au vertige éthylique, comme le son, réparti de façon telle qu’il est impossible de savoir d’où il vient, sinon de l’état second dans lequel vous transporte cette représentation dominée par le jeu exceptionnel de Josse De Pauw, par ailleurs auteur de l’adaptation.

lIBéRatIon - 06/10/2009 - René solIs

soûl le “volcan”

le metteur en scène belge Guy cassiers adapte au théâtre de la ville le roman de Malcolm lowry, sur fond de paysages mexicains.

Semaine mexicaine à Paris. Alors que l’exposition Teotihuacan, cité des Dieux vient dè s’ouvrir au musée du quai Branly, le festival d’Automne programme au Théâtre de la Ville Sous le volcan, nouveau spectacle du Belge Guy Cassiers, d’après le roman de Malcolm Lowry.

Visite des pyramides l’après-midi, confina et fête des morts le soir, ne reste plus qu’à remplacer la promenade en barque sur les jardins flottants de Xochimilco par un tour en bateau-mouche, et l’illusion sera presque parfaite.

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Encore que, question couleur locale, les spectateurs du Théâtre de la Ville seront peut-être déroutés. Sur scène, ni squelettes en papier découpé, ni têtes de mort en sucre, ni bouteilles derrière le comptoir, mais une chaise comme unique accessoire. Adepte de la pulsation lente, Cassiers prend son temps pour entraîner le public au coeur du roman et du cerveau de son héros alcoolique.

Placé au centre du plateau, un mur d’images illustre l’histoire. Cassiers, qui est allé les tourner à Cuernavaca (quauhnahuac dans le livre de Lowry), la ville à 70 kilomètres au sud de Mexico qui sert de cadre au roman, en fait la matière d’un antidocumentaire conçu comme un kaléidoscope hypnotique. Là où John Huston, dans son film avec Albert Finney et Jacqueline Bisset (1984), accumulait les cartes postales, Cassiers brouille les lignes ; les contours se fondent, se superposent ; ses bribes de Mexique (paysages ou intérieurs) baignent dans une ivresse brumeuse.

Cette double prise en charge de l’exotisme et de l’alcoolisme par le cinéma, les lumières (ombres et filtres variés) et la bande-son (siffle-ments répétés, bribes de chansons) permet aux comédiens de se consacrer à l’essentiel : les dialogues et le silence ; la langue comme bouée de sauvetage ou comme arme fatale. Plus qu’au-dessous, les personnages sont au bord du volcan, aimantés par le gouffre, papillons de nuit en orbite autour de l’enfer. Tout romantisme bu, ils apparaissent dépouillés de leur mystère : Hugh (Marc van Eeghem), le demifrère en chapeau texan, est plus vulgaire qu’idéaliste; Yvonne (Katelijne Damen), la femme prodigue, une beauté fanée ; Jacques Laruelle (Bert Luppes), l’ami narrateur, un brave type désabusé et Geoffrey (Josse de Pauw), le consul, un antihéros pas à la hauteur de son mythe.

De Sous le volcan, Guy Cassiers propose au final une lecture plus mélancolique que cauchemardesque. Soucieux de rappeler le contexte historique du roman (novembre 1938, à la veille de Tex plosion mondiale), il y projette une tristesse contemporaine d’autant plus troub-lante qu’harmonieuse.

the fInancIal tIMes - 06/10/2009 - claIRe shIne

sous le volcan, théâtRe De la vIlle, PaRIs

“Hot music, a poem, a song, a comedy, a farce ... superficial, profound, entertaining, and boring, according to taste.” That’s how Malcolm Lowry enigmatically described his novel Under the Volcano to his publisher – a hallucinogenic journey into the tortured mind of an alco-holic ex-consul in small-town Mexico in 1938 that rapidly won cult status.

It is a brave director who brings a text this well-loved and complex to the stage. But Guy Cassiers and his Flemish company Toneelhuis d’Anvers have a strong track record of creating distinctive theatre out of novels, freed from the conventions and constraints of set dialogue. The result here is so striking at every level that the set, the sound and the cast each deserve star billing.

Josse de Pauw has the Herculean task of inhabiting Firmin’s inner turmoil and also adapted the text. His portrayal of a man’s struggle with the inner demons of addiction and lost love is compelling, tender and disquieting, fusing physical disintegration with precipitous emotional mindsweeps. Yet never does he overshadow the rest of the cast. This production is like a finely calibrated string quartet, each voice resonat-ing with its own ambiguity and yearning: former wife Yvonne (Katelijne Damen), sensual, dreamy and quizzical; brother Hugh (Marc Van Eeghem), wry and watchful as the disillusioned leftie journalist; and Jacques Laruelle (Bert Luppes) as the piercing, soft-spoken narrator.

The stage is always bare but behind the backdrop becomes a living, breathing extension of Firmin’s psychological landscape. Simplicity conceals technical wizardry as video fragments light up layered screens at depths, shifting and blurring multiple perspectives, sliding im-perceptibly as characters flit across his consciousness. Leafy zen images accompanying good memories give way to the echoing volcanic contours of confrontation. Tangled tree roots emerge as Firmin shies away from reconciliation and emotional truth. And relentlessly, sunlight sparkles through poured tequila and the tinkle of icecubes against glass works its seduction.

The sound is equally hypnotic, with microphones for the actors’ voices drawing us into their hushed intimacy. The teeth-tensing razor scraped over skin holds us a hair’s breadth from disaster – until everything spirals out of control.

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le PaRcouRs aRtIstIque à venIR De GuY cassIeRs

Par erwin Jans, dramaturge

Toute l’œuvre théâtrale de Guy Cassiers peut être interprétée comme une tentative de déconstruire le moi et son identité – par rapport au soi, à son corps, son langage, sa mémoire, son histoire… La conscience de soi et la perception sont les thèmes centraux. On

peut considérer des productions telles que les quatre volets du Cycle Proust, Bezonken rood (Rouge décanté) et Hersenschimmen (Chimères) comme les points culminants de cette déconstruction. Par ailleurs, avec Triptiek van de Macht (Le Triptyque du Pouvoir), Cassiers amorce une nouvelle phase de son œuvre, dans laquelle la société et la politique jouent un rôle prépondérant. Il déconstruit non seulement la perception du monde intérieur et la conscience de soi des personnages, mais leur identité sociale et historique. L’idée d’une identité stable et entière se désintègre sous la pression de forces tant intérieures qu’extérieures : dans Hersenschimmen la maladie d’Alzheimer fait perdre au personnage principal son emprise sur sa mémoire, son passé, sa parole et au bout du compte sur sa personnalité, alors que le protagoniste de Mefisto for ever s’enfonce dans un abîme moral à force de choix éthiques ambigus..

La réalité n’est pas un ensemble synoptique que l’on peut présenter sans problème, c’est une conjonction complexe et en évolution permanente de projections, de désirs, de simulations, d’interprétations, de médiatisation et de données concrètes. Cassiers ne raconte pas ses fables de manière linéaire, narrative et dramatique. Ses spectacles constituent une analyse théâtrale de la relation complexe entre la technique visuelle et la perception, les projections et les faits, la construction et la représentation. Il est en quête d’un langage théâtral contemporain, avec pour toile de fond explicite notre environnement toujours plus médiatisé : l’évolution des technologies de l’information et de la communication, la manipulation idéologique et politique en découlant, la réalité qui se transforme en « réalité virtuelle » et en « virtualité réelle » et l’impact de tout cela sur la perception que nous avons de nous-mêmes et du monde. En procédant de la sorte, la déconstruction de Cassiers offre simultanément une possibilité de (re)construction. L’histoire n’est pas expliquée, mais démembrée : elle est partagée entre divers médias et sens. Au spectateur, placé face à une multitude d’informations, d’assumer la responsabilité de construire sa propre histoire.

Les projets théâtraux des années à venir – Sous le volcan, L’homme sans qualités, Der Ring des Nibelungen et Gilles et Jeanne – se caractérisent par une attention accrue pour l’histoire européenne et la conscience de vivre un moment de rupture. Il s’agit d’un sentiment « de crépuscule des dieux », d’un monde qui part à vau-l’eau. Pour Cassiers, cette désintégration n’est pas seulement liée à certaines évolutions politiques et économiques, mais résulte aussi de l’évolution des technologies et des médias, évoquée ci-dessus. que Triptiek van de Macht se situe en grande part autour de la Seconde Guerre mondiale n’est pas le fruit du hasard. Les événements relatés dans Sous le volcan se déroulent à cette même époque, alors que L’homme sans qualités se concentre sur l’année 1913, la veille de la Première Guerre mondiale. Chaque spectacle s’articule autour de situations de crises et de catastrophes qui dissolvent les certitudes existantes. Des personnages comme ulrich (L’homme sans qualités), le consul alcoolique (Sous le volcan), Jeanne d’Arc et Gilles de Rais représentent, chacun à leur façon, une attitude qui a marqué et marque encore la civilisation occidentale. Ils sont les métaphores d’une quête des extrêmes, tant dans la passivité de l’observation ironique (ulrich) que dans celle de l’ivresse mélancolique (le consul), tant dans l’antre du mal (Gilles de Rais) que dans l’exaltation de l’inspiration divine (Jeanne d’Arc).

Avec L’homme sans qualités de Robert Musil, Cassiers se concentre sur le monde social extérieur et poursuit son analyse de du rapport entre l’individu, la politique et le pouvoir. Le roman de Musil est d’une part un éventail de la sensibilité humaine et d’autre part le foyer dramatique de tout ce qui, à la veille de la Première Guerre mondiale, a mené au déclin d’une époque grandiose. Musil est tout à la fois un ingénieur de l’âme humaine et un artisan subtil qui met à nu les rouages de la vie politique et sociale. On peut y voir des parallèles évidents avec la mondialisation actuelle, dans laquelle les termes de démocratie, justice et droits de l’homme sonnent toujours plus creux, et avec l’impasse politique dans laquelle la Belgique a abouti.