Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des...

38
Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX DACTUALISATION Ce document constitue une contribution à la réflexion sur un thème d’évaluation majeur. Les conclusions qui sont présentées dans ce document sont celles d’un groupe de travail et ne sauraient engager la SFEV en aucune manière. SEPTEMBRE 2013

Transcript of Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des...

Page 1: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

Société Française des Evaluateurs

SFEV

GROUPE DE TRAVAIL

PRISE EN COMPTE DU RISQUE

DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

Ce document constitue une contribution à la réflexion sur un thème d’évaluation

majeur.

Les conclusions qui sont présentées dans ce document sont celles d’un groupe de

travail et ne sauraient engager la SFEV en aucune manière.

SEPTEMBRE 2013

Page 2: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 1/38

SOMMAIRE

Avant-propos

Chapitre I

Rappel des fondements théoriques de l’évaluation

1 - La pratique usuelle en matière d’évaluation

2 - Le coût du capital

3 - Le coût du capital dépend-il de la structure financière ?

Chapitre II

Les limites inhérentes au modèle actuel

1 - Le CMPC et la structure financière

2 - Une pluralité de CMPC

Chapitre III

Le risque lié à la dette, son coût et sa valeur

1 - La valeur comptable de la dette peut-elle être retenue en évaluation ?

2 - La valeur réelle de la dette

3 - La valeur réelle de la trésorerie

Chapitre IV

La prise en compte du risque spécifique

1 - Le risque spécifique : une multitude de réalités

2 - Taille, liquidité … et volatilité

3 - Le risque de faillite

4 - Le risque lié à l’absence de taille critique

5 - Le risque lié aux flux

6 - Les autres risques spécifiques

Bibliographie

Page 3: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 2/37

Composition du groupe de travail

Daniel Beaumont – Associés en Finance

Sonia Bonnet-Bernard – Ricol Lasteyrie

Thomas Bouvet – Defix

Edouard Camblain – Société Générale

Roland Clère – BMA

Jean-Pierre Colle – Grant Thornton

Alain Frydlender – BDO

Damien Le Berre – Ricol Lasteyrie

Jean-Michel Moinade – Oddo Corporate Finance

Henri Philippe – Accuracy

Jean-Florent Rérolle – KPMG

Didier Saintot - KPMG

Page 4: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 3/37

AVANT-PROPOS

La méthode d’évaluation par l’actualisation des flux, appelée méthode DCF

(« Discounted Cash Flows ») est devenue prédominante dans la pratique des

entreprises, que ce soit dans le cadre du choix de projets d’investissement, de

projets d’acquisition d’entreprises ou de la mise en œuvre des normes IFRS,

notamment s’agissant des tests de dépréciation. Le contexte actuel d’incertitude

économique a contribué au succès de l’approche par les flux futurs dans la mesure

où elle permet de mieux appréhender la valeur d’utilité dans une perspective à

moyen ou long terme.

Cette méthode repose sur deux piliers :

les flux de trésorerie prévisionnels ;

le coût du capital attaché aux flux d’exploitation.

L’estimation des flux de trésorerie est généralement du ressort du management de

la société qui a défini au préalable des orientations stratégiques et des objectifs

chiffrés. Le contexte d’incertitude économique doit cependant rendre prudent dans

cette estimation et les flux doivent être révisés très régulièrement. Cette question

n’est pas abordée dans le présent document.

Si la détermination du coût du capital relève de la compétence de l’évaluateur, il

n’en existe pas de mesure directe. Les seules références observables sur le marché

sont le coût des capitaux propres des sociétés cotées et le coût de leur dette. A

partir du coût des fonds propres, il est établi le modèle d’actualisation des flux

futurs attribuables aux actionnaires (« DCF to equity »). En intégrant le coût de la

dette au taux d’actualisation plutôt qu’aux flux, il est établi un second modèle

d’actualisation qui appréhende les flux futurs communs aux actionnaires et aux

créanciers (« DCF to the firm ») en les actualisant au coût moyen pondéré du

capital (CMPC), le WACC en anglais (« Weighted Average Cost of Capital »).

Le taux d’actualisation employé dans ces modèles est généralement issu du

MEDAF1. Ce dernier s’est en effet imposé comme le modèle de référence

permettant d’associer le rendement d’un investissement au risque qu’il supporte.

Néanmoins, la pratique a mis en exergue un certain nombre de limites, tant au

regard de l’hypothèse d’efficience des marchés que des difficultés de mise en

œuvre (diversification limitée, instabilité du bêta, évolution de la structure

financière…). Le MEDAF ne tenant compte que du risque systématique,

considéré comme non diversifiable, certains évaluateurs intègrent un risque

spécifique dans le taux d’actualisation en le majorant de primes spécifiques.

1 Modèle d’Equilibre des Actifs Financiers ou Capital Asset Pricing Model en anglais,

initialement développé par William Sharp, John Litner et Jack Treynor, qui établit la relation

entre le risque et la rentabilité exigée par les investisseurs.

Page 5: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 4/37

L’objet de cette contribution consiste à comprendre quel type de risque peut être

appréhendé par le CMPC et, à l’inverse, quels types de risques devraient être

appréhendés par un ajustement des flux.

Dans le contexte actuel de volatilité des valeurs, pouvant engendrer un décalage

significatif entre valeurs de marché et valeurs d’utilité, il semble aujourd’hui

important de revenir sur les fondements sous-jacents du CMPC et sur sa

détermination. Que prend-on en compte dans les modèles actuels de référence ?

(chapitre 1 : Rappel des fondements théoriques de l’évaluation).

Le modèle du MEDAF s’est imposé comme un modèle de référence dans la

théorie financière moderne, néanmoins, la pratique a mis en exergue un certain

nombre de limites, tant au regard des questions théoriques (équilibre et

inefficience des marchés, évolution de la structure financière, etc.) que des

difficultés de mise en œuvre (diversification limitée, instabilité du bêta).

Les limites du MEDAF ont conduit certains praticiens à utiliser des modèles

alternatifs, telles que les méthodes multifactorielles de type APT2 ou le modèle de

Fama-French. Il convient donc d’identifier les limites du modèle dominant

(chapitre 2 : Les limites inhérentes au modèle actuel).

Par ailleurs, la prise en compte du risque lié à l’endettement est devenue un enjeu

important de l’évaluation, tant pour calculer le coût du capital, qu’au niveau du

passage de la valeur d’entreprise à la valeur des capitaux propres. Beaucoup

d’évaluateurs utilisent des méthodes consistant à déterminer en premier lieu une

valeur d’entreprise, puis à déduire de cette valeur la dette nette. Or, dans le

contexte actuel de crise des dettes souveraines et de volatilité des spreads de

crédit, la valeur des dettes financières des entreprises fait débat. La troisième

partie de ce document traite ainsi de l’alternative entre la valeur comptable ou

contractuelle de la dette (et son taux facial), et la valeur de marché théorique de la

dette (et le taux de marché spot), (chapitre 3 : Le risque lié à la dette, son coût et

sa valeur).

L’approche du MEDAF distingue risque systématique, considéré non

diversifiable, et risque spécifique. Outre le risque lié à la dette, qui accroît le

risque systématique d’un titre et peut aussi engendrer un risque de faillite

spécifique, les risques spécifiques identifiés peuvent s’appréhender de différentes

manières. Certains évaluateurs appliquent des primes supplémentaires au coût du

capital pour tenir compte des risques spécifiques de liquidité ou de taille par

exemple. D’autres praticiens ajustent les flux futurs de la société en appliquant

des décotes ou des pondérations aux différentes prévisions de résultats. Certains

vont même jusqu’à inclure l’ensemble du risque dans le flux en raisonnant en

équivalents certains et en actualisant les flux au taux sans risque. Il convient

d’analyser cette multiplicité de pratiques en fonction des types de risques

identifiés (chapitre 4 : La prise en compte du risque spécifique).

2 Arbitrage Pricing Theory, ou modèle d’évaluation par d’arbitrage initialement développé par

Steve Ross selon lequel la rentabilité de chaque action est influencée par des facteurs

macroéconomiques.

Page 6: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 5/37

CHAPITRE I

RAPPELS DES FONDEMENTS THEORIQUES DE L’EVALUATION

1 - La pratique usuelle en matière d’évaluation

Il est d’usage en finance d’entreprise de distinguer deux décisions complexes

auxquelles les dirigeants d’entreprise ont à faire face :

- La décision d’investissement : « dois-je investir dans cette activité ? S’agit-il

d’un actif intéressant dans mon portefeuille ? »

- La décision de financement : « une fois ma décision d’investissement prise,

comment dois-je financer cet actif ? »

Cette distinction résulte des nombreuses difficultés que pose la question du

financement à la théorie financière :

- La structure financière a-t-elle un impact sur la valeur des actifs ?

- Quelle est la structure financière optimale ?

La théorie financière n’ayant pas apporté de réponse définitive à ces questions,

une approche simplifiée consiste à séparer la question de l’évaluation des actifs

(décision d’investissement) et la question de la structure financière (décision de

financement).

Il en ressort une démarche d’évaluation en trois étapes :

- Estimation de la valeur de marché de l’actif d’exploitation, aussi appelée

« valeur d’entreprise » (VE) ;

- Estimation de la valeur de marché de l’endettement financier net (Vd) ;

- Par soustraction, détermination de la valeur de marché des capitaux propres

V(FP).

Graphiquement, on peut représenter la démarche de la façon suivante :

Goodwill

V(FP)

V(FP) = VE - Vd

Dette nette

Actif

d'exploitation

Capitaux

engagés

à la valeur de marchéDe la valeur comptable …

Vd

Valeur de marché

des actifs VE

Valeur de marché des

capitaux propres

Immobilisations

BFR

Capitaux

propres Valeur

comptable

des actifs

Page 7: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 6/37

Cette démarche appelle les commentaires suivants :

La valeur d’Entreprise qui correspond à la valeur de marché de l’actif

d’exploitation, est égale à la somme des valeurs de marché des fonds propres et

de l’endettement : VE = V(FP) + Vd :

- On s’intéresse à la valeur de « marché » de l’activité, c’est-à-dire à ses

perspectives de développement futures. Dès lors, on ne peut se reposer,

pour l’estimer, sur des valeurs comptables, qui sont représentatives du

passé, que ce soit pour l’estimation de la valeur des capitaux propres ou de

la dette3.

- Le cadre d’analyse sous-jacent est que l’on considère que l’ensemble de

ces éléments sont des actifs financiers (fonds propres, dettes, trésorerie,

couvertures, etc.) qui pourraient être échangés sur des marchés efficients.

Cette démarche en trois étapes ne doit pas masquer le fait que les questions sur

la structure financière sont irrésolues et qu’elles posent toujours des difficultés

à l’évaluateur. En particulier, la question de l’impact du levier financier sur la

valeur d’entreprise peut recevoir des réponses diverses. Depuis les travaux de

Modigliani et Miller, il existe une abondante littérature sur la question du

surcroît (ou de la destruction) de valeur qui résulte de l’existence d’un levier

d’endettement générant des intérêts financiers fiscalement déductibles4.

2 - Le coût du capital

Le Coût moyen pondéré du capital, ou CMPC, est le taux d’actualisation le plus

fréquemment utilisé dans la mise en œuvre de la méthode d’actualisation des flux

de trésorerie disponibles (ou DCF).

Il est généralement déterminé conformément au MEDAF (ou Modèle d’Equilibre

des Actifs Financiers), selon lequel l'équilibre des prix résulte de la constitution de

portefeuilles efficients, éliminant le risque diversifiable propre à chaque actif, et

où la prime attendue au-delà de la rémunération d’un actif sans risque est

directement proportionnelle au bêta5 ( de chaque titre. Le coût des fonds propres

Ke (pour K(FP)) décrit de la sorte ce qu’il est convenu d’appeler « la droite de

marché » et est égal à :

Ke = rf + x [ E(rM) – rf ]

Où E(rM) désigne l’espérance de rendement du marché, rf le rendement des actifs sans

risque, [ E(rM) – rf ] désignant la prime de risque du marché (pM).

3 La question de la valeur de marché de la dette faisant l’objet d’un développement spécifique

infra. 4 Par exemple, la prise en compte de ce surcroît de valeur (valeur du « bouclier fiscal ») conduit

à une valeur d’entreprise avec levier plus élevée que la valeur d’entreprise à dette nulle.

Certains évaluateurs ne prennent pas en compte cet éventuel surcroît de valeur, considérant

qu’il est absorbé par le risque de faillite, qui augmente avec le levier.

5 Voir infra pour la définition du bêta.

Page 8: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 7/37

Le MEDAF suppose l’efficience du marché : un marché suffisamment large où

l'information se répand instantanément, comme c'est théoriquement le cas pour le

marché boursier, où les opérateurs réagissent rationnellement et quasi

immédiatement aux informations, les cours reflétant à tout instant le juste prix des

actifs financiers tel qu’attendu selon la droite de marché.

Le coût du capital (fonds propres et endettement) peut se calculer de plusieurs

façons :

La méthode directe : elle consiste à calculer directement le coût du capital sur

la base du bêta de l’actif économique. Le taux de rentabilité exigé correspond

au loyer de l’argent sans risque majoré d’une prime de risque liée à l’activité

de l’entreprise mesurée par le bêta désendetté. Le taux d’actualisation issu de

cette approche ne tient pas compte d’une éventuelle interaction entre levier

d’endettement et valeur d’entreprise.

La méthode indirecte : elle consiste à reconstituer le coût du capital à partir

des exigences de rentabilité des différentes sources de financement. Le coût

du capital correspond ainsi à la moyenne pondérée par les poids respectifs des

ressources financières du coût des fonds propres et du coût de la dette. La

pondération des exigences de rendement repose sur les valeurs de marché des

différentes sources de financement et sur une structure financière normative

cohérente avec les rentabilités exigées. Dans la mesure où le bêta servant au

calcul du coût des fonds propres est généralement considéré comme affecté

par le levier d’endettement, l’approche indirecte de calcul du coût du capital

est elle aussi tributaire de la structure financière.

Méthode directe et méthode indirecte conduisent au même coût du capital pour

autant que l’on tienne compte d’un bêta de la dette pour désendetter le bêta de

l’action (ou pour endetter le bêta de l’actif) et que l’on fasse abstraction de la

valeur du bouclier fiscal.

Méthode directe : T = actif x pM + rf

Méthode indirecte : T = (FP x pM + rf) x [

] + (rf +spread) x [

]

Avec : actif = (FP + [

] x [

]) / [ ]

Par ailleurs, peut se poser la question de la valeur des économies fiscales liées à la

déductibilité des frais financiers sur la dette.

Page 9: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 8/37

3 - Le coût du capital dépend-il de la structure financière ?

La question fait l’objet d’un débat théorique ancien :

1ère

hypothèse : En l’absence d’impôts, la dette est sans impact sur la valeur des

actifs (Proposition de Modigliani & Miller, 1958).

Absence d’impact du levier L sur le coût du capital (wacc ou cmpc)

Dans un univers sans impôt et avec une information parfaite, Modigliani et Miller

(1958) ont montré que le coût du capital de l’entreprise était indépendant de sa

structure financière. Il correspond simplement au coût des capitaux propres en

l’absence de dette.

2ème

hypothèse : en présence d’impôt sur les bénéfices et de déductibilité fiscale

des intérêts d’emprunt, la valeur des actifs est une fonction croissante du levier

financier (Proposition II de Modigliani & Miller, 1963).

Impact favorable du levier L sur le coût du capital

Dans une seconde proposition (1963), les mêmes auteurs ont montré qu’avec

l’existence de l’impôt sur les bénéfices, le coût moyen pondéré du capital

(CMPC) était inférieur au coût d’opportunité du capital, en raison des économies

fiscales générées par les frais financiers. Ils ont montré également que le CMPC

pouvait être calculé de deux manières distinctes :

directement à partir du coût d’opportunité du capital (méthode directe), en

ajustant ce taux à la baisse pour intégrer l’impact des économies fiscales sur

frais financiers ;

indirectement à partir du coût des capitaux propres et du coût de la dette après

impôts, en calculant une moyenne pondérée de ces deux taux (méthode

indirecte).

Page 10: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 9/37

3ème

hypothèse : Les coûts implicites de la dette viennent contrebalancer les

économies fiscales générées par les frais financiers.

Limitation de l’impact favorable du levier L sur le coût du capital

La dette engendre un certain nombre de coûts plus ou moins implicites : coûts de

faillite, coûts d’agence liés à la gestion des conflits d’intérêts, coûts des covenants

(options implicites cédées par l’entreprise) coûts d’opportunité liés aux projets qui

ne pourront être mis en œuvre faute de financement disponible.

Les avantages attribués à la dette sont également remis en question par l’analyse

empirique : en effet, on observe qu’un certain nombre de grandes sociétés cotées,

particulièrement rentables, sont peu endettées. A titre d’exemple, à fin juillet 2013

parmi les 100 premières capitalisations boursières, les 38 groupes mondiaux

bénéficiant d’un PBR6 supérieur à x3, témoin d’une forte création de valeur, ont

un ratio moyen « dette / EBE » de 0,14 : Apple est à – 0,4, Microsoft à -2,0,

L’Oréal est à -0,4, Coca Cola est à 1,2.

Certaines entreprises préfèrent maintenir un faible niveau d’endettement afin de

conserver la possibilité de s’endetter en cas d’opportunité ou d’imprévu. Une

entreprise peu endettée peut obtenir plus facilement et plus rapidement un

financement bancaire qu’une entreprise déjà très endettée souvent soumise à des

covenants bancaires stricts.

Un faible endettement offre donc plus de flexibilité financière et permet plus de

réactivité, notamment pour saisir des opportunités d’investissement créatrices de

valeur.

Le niveau d’endettement des entreprises est également sujet aux effets de mode :

on constate depuis le début de la crise financière une tendance au désendettement

des entreprises, le levier étant perçu comme un handicap plutôt que comme un

signe de bonne gestion et de dynamisme.

6 Price to book ratio : rapport de la capitalisation boursière aux capitaux propres consolidés part

du groupe.

Page 11: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 10/37

CHAPITRE II

LES LIMITES INHERENTES AU MODELE ACTUEL

Fondé sur le MEDAF, le calcul du CMPC d’apparence relativement simple, se

heurte à la complexité du monde réel et pose des problèmes d’application

pratique. En dépit du cadre conceptuel reconnu, il n’existe toujours pas de

consensus à son sujet.

Ainsi que rappelé au chapitre I ci-avant, le MEDAF repose sur une hypothèse

d'efficience et sur l’existence d’une droite de marché, hypothèses qui ont pu être

mises à mal par des tests empiriques.

La finance comportementale a montré que des erreurs cognitives et émotionnelles

collectives faussaient la formation des prix et pouvait conduire à certains

moments à des situations de krachs ou de bulles.

Les désaccords méthodologiques des évaluateurs se traduisent en pratique par la

multiplicité des CMPC observés dans les évaluations.

1 - Le CMPC et la structure financière

Comme évoqué dans le chapitre I, la mise en œuvre du MEDAF nécessite que soit

déterminée la structure financière de la société pour autant que le CMPC soit

affecté par le levier d’endettement. Si le débat théorique concernant l’impact de

l’endettement sur le coût du capital oppose encore aujourd’hui les praticiens, force

est de constater que le MEDAF, modèle mono-périodique, n’est pas conçu pour

appréhender des changements de structure financière sur la durée d’un plan

d’affaires.

Invariabilité dans le temps de la structure financière dans le modèle MEDAF

La méthode indirecte permettant de calculer le coût du capital nécessite de

déterminer au préalable la structure financière de l’entreprise. En effet, le calcul

du bêta endetté, et donc celui du coût des fonds propres, puis du coût moyen

pondéré du capital repose sur un levier d’endettement unique.

Pour cette raison, le levier d’endettement instantané de l’entreprise ne sera retenu

qu’en l’absence d’hypothèse de changement de structure bilancielle dans le plan

d’affaires. Le calcul de la structure financière reposant sur des valeurs réelles et

non des valeurs comptables, il est possible en pratique d’avoir recours à des

formules itératives permettant de déterminer le CMPC et la valeur des capitaux

propres liée7.

7 En effet, la valeur des fonds propres dépend d’un taux d’actualisation qui repose sur un levier

d’endettement calculé à partir de la valeur des fonds propres résultant de ce même calcul. Ceci

implique de répéter le calcul jusqu’à ce que ce dernier converge vers une valeur des fonds

propres d’équilibre et donc un seul levier d’endettement cible.

Page 12: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 11/37

Dans le cas d’un changement prévisible de la structure financière actuelle, et dans

le cas le plus général qui consiste à retenir une valeur terminale par calcul d’une

rente à l’infini, le levier d’endettement à privilégier serait, par approximation, le

levier cible de cette rente à l’infini.

La détermination de la structure cible pose deux problèmes :

- elle peut être significativement éloignée de la structure actuelle. Dans ce cas,

il pourrait être tenu compte sur la période de convergence du levier le plus

prudent, en retenant le coût moyen pondéré du capital le plus élevé entre la

valeur instantanée et la valeur du calcul de rente. Il est également

envisageable d’opter pour l’utilisation d’un taux d’actualisation évolutif sur

l’horizon de prévisions en fonction du levier attendu ;

- il peut être difficile pour certaines sociétés de maintenir une structure

d’endettement figée dans le temps et donc de définir une structure cible

unique. Celle-ci peut être relativement erratique en fonction de déterminants

propres à l’activité, ou en raison de l’existence de cycles d’investissement.

Dans de tels cas, le levier cible retenu pour le calcul de la valeur terminale

pourrait refléter une situation normative de milieu de cycle.

Il est toujours nécessaire de s’assurer de :

- la cohérence de la structure financière cible retenue avec l’évolution des flux

sur la période du plan d’affaires. L’évolution de l’investissement doit

notamment être rapprochée de celle de l’endettement et, tout particulièrement,

pour la valeur terminale ;

- la cohérence du coût des capitaux propres et du coût de la dette avec la

structure cible. Il convient de rappeler que le coût des capitaux propres et de

l’endettement varient en fonction de la structure financière. Les praticiens ne

doivent donc pas tomber dans l’écueil des formules prédéfinies en modifiant

le niveau d’endettement d’une société sans modifier parallèlement les niveaux

de coût de la dette et de coût des fonds propres.

Pour les sociétés importantes, il convient de se référer à l’objectif de rating

d’agence, lui-même lié à la probabilité de défaut.

Pour les sociétés « non notées » il est toujours possible d’examiner la structure

financière des sociétés d’activité et de taille comparables hors opérations

exceptionnelles (croissance externe, cession, rachats d’action significatifs …).

L’alternative pour pallier ces difficultés pourrait être d’opter pour la méthode dite

« directe » consistant à déterminer le CMPC sans poser d’hypothèses sur les

exigences de rentabilité des différentes sources de financement. Cette approche

suppose toutefois que la valeur éventuelle d’un bouclier fiscal (cf. supra) ne soit

pas prise en considération, ou estimée séparément de la valeur des actifs (méthode

dite de l’APV, Adjusted Present Value).

Page 13: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 12/37

2 - Une pluralité de CMPC

En l’absence de consensus sur les modalités de calcul du coût du capital, des

niveaux de CMPC très divers peuvent être observés en pratique.

Les modalités d’estimation de la prime de marché et du coefficient bêta sont les

principaux responsables de la grande dispersion des CMPC observés dans la

pratique.

Nous présentons ici pour les principaux déterminants du CMPC, les alternatives

qui se présentent aux praticiens.

Les aspects relevant du coût de la dette étant principalement abordés dans le

chapitre III, nous étudions ci-après les différentes sources de divergences dans la

détermination du coût des fonds propres, à savoir :

- le taux sans risque ;

- la prime de risque du marché actions ;

- le calcul du bêta.

Il doit être rappelé que la prime de risque du marché actions représente l’écart

entre le rendement attendu du marché E(rm) et le taux sans risque de référence.

Selon les observateurs de marché et selon les périodes de référence, le taux de

rendement attendu du marché actions s’établit entre 8 et 10%. Taux sans risque et

prime de marché doivent ainsi être déterminés de manière cohérente, leur somme

s’inscrivant, dans la généralité des cas, dans la fourchette évoquée ci-dessus.

2.1 La détermination du taux sans risque

La plupart des modèles financiers comme le MEDAF prennent en compte

l’existence d’un actif sans risque, c’est-à-dire d’un actif dont la rentabilité

effective est toujours égale à la rentabilité espérée et donc non corrélée au marché.

Dans cette approche théorique, l’actif sans risque est le bon du Trésor à trois mois,

qui allie certitude sur le revenu espéré et garantie de valeur par remboursement au

pair à échéance courte. Il présente toutefois l’inconvénient de refléter un taux

« administré » par la Banque Centrale.

S’agissant de l’actualisation de flux dont l’échéance est supérieure à 3 mois, il

semble fondé de retenir comme taux sans risque, un taux figurant sur la courbe

des taux zéro coupon des emprunts d’Etat.

Dans la pratique, on utilisait jusqu’à récemment comme approximation de cette

rentabilité, le taux des obligations d’Etat à dix ans du fait de leur grande liquidité,

d’autant que ce taux n’était pas alors administré par les Banques Centrales. En

outre, c’est sur la base de ce taux à 10 ans que sont calculées les primes de marché

actions dans la plupart des études. On assure ainsi la cohérence entre taux sans

risque et prime de marché évoquée plus haut.

Page 14: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 13/37

La dégradation de la note des Etats-Unis par Standard & Poor’s en août 2011 et

celle de pays européens comme la France en janvier 2012 a relancé un débat

parmi les auditeurs et les évaluateurs sur la question de savoir si le taux des

obligations à long terme des Etats (taux spot ou moyenne courte) pouvait encore

être utilisé dans le calcul du coût du capital. La question est d’autant plus cruciale

pour les pays qui ont vu leurs taux d’intérêt s’envoler avec la crise des dettes

souveraines, en particulier la Grèce dont le taux d’intérêt sur les obligations à long

terme a dépassé 15% ou l’Espagne, l’Italie ou le Portugal dont les taux à 10 ans

ont dépassé le seuil critique des 6%, ou pour les pays les mieux notés (Allemagne,

France) qui inversement ont bénéficié du mouvement dit de « flight to quality ».

Dans ces conditions, quel taux sans risque prendre en compte dans le calcul du

coût du capital ? Le sujet est d’importance pour les entreprises qui évaluent des

opportunités d’acquisition ou qui effectuent des tests de dépréciation d’activités

situées dans des pays mal notés. Il est très sensible pour les entreprises dont les

opportunités de croissance dans ces pays constituent une part essentielle de la

valeur.

Afin de déterminer le taux sans risque, les évaluateurs ont aujourd’hui recours au :

- taux de rendement des obligations long terme des Etats notés triple A, tels que

le Bund 10 ans, largement utilisé en Europe ; il évolue entre 1,2% et 1,8% au

cours des derniers mois. Dans les pays émergents, on estime en général que la

signature de l'Etat est ce qui se rapproche le plus d'un taux sans risque ;

- taux de rentabilité exigé sur un actif considéré sans risque dans le pays

d’origine s’il n’intègre pas de risque de défaut. Il peut être ajusté par le

différentiel d’inflation anticipée avec le pays investisseur en appliquant la

formule de la parité des pouvoirs d'achat ;

- taux des obligations de l’Etat étranger après retraitement de la prime de défaut

qu’il comporte sur la base du spread correspondant à ce risque. Ce spread peut

être déterminé soit sur la base des spreads observés sur les obligations d’Etat

classées par notation, soit de ceux observés sur le marché des CDS ;

- taux d’emprunt de grandes entreprises locales qui empruntent à un taux plus

faible que l’Etat. Dans ce cas, et si leur business model est éprouvé et que leur

levier est raisonnable, certains n’hésitent pas à utiliser ces taux, voire à les

réduire de quelques points pour approcher un taux sans risque (Damodaran

conseille 0,5% mais n’apporte pas de véritables justifications).

Notons qu’il est difficile de s’affranchir de l’horizon sur lequel est calculée la

prime de risque des actions pour déterminer la période pertinente pour

l’observation de taux sans risque qui a lui-même servi à la détermination de

la-dite prime de risque.

2.2 La prime attendue par les investisseurs du marché actions

La prime de risque des actions représente l’écart de rentabilité entre le rendement

attendu d’un placement en actions et le rendement d’un placement sans risque.

Page 15: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 14/37

Bien qu’il y ait consensus sur la définition de la prime de risque, on note une forte

hétérogénéité dans les approches et modes de calcul retenus. Cette hétérogénéité

s’est accentuée avec la hausse significative depuis 2008 de cette prime, en raison

d’une plus forte aversion pour le risque (et donc une plus forte exigence de

rentabilité attendue sur les actions).

On rencontre deux approches de détermination de la prime de marché :

la prime de risque historique : cette prime de risque est parfois retenue sans

ajustement, considérant que la période écoulée est révélatrice de la prime de

risque anticipée ou prospective. Dans d’autres cas, certains ajustements sont

réalisés par exemple afin de tenir compte d’un changement de contexte

économique et d’une plus grande exigence de rémunération pour les actifs à

risque comme les actions. Cette prime peut varier selon les sources (Ibbotson,

Barra, Elroy Dimson et al., Aswath Damodaran...)

la prime de risque prospective : cette approche est théoriquement la plus

pertinente dans la mesure où elle est censée refléter les anticipations des agents

économiques. Le niveau de cette prime est déterminé à partir du taux

nécessaire (TRI) pour que la valeur actualisée des flux futurs perçus par

l’actionnaire à moyen et long terme (dividendes, rachats d’actions …) soit

égale au cours actuel de chaque société. L’ensemble de ces TRI est ensuite

agrégé pour déterminer le TRI du marché, la prime de risque de marché

s’obtenant en lui retranchant un taux sans risque. La difficulté de cette

approche tient à l’absence de consensus (hypothèses centrale dans le MEDAF)

et donc à la dispersion de son niveau d’un fournisseur à un autre.

2.3 Le calcul du bêta

Afin de prendre en compte le risque de la société évaluée, la prime de risque du

marché est affectée d’un coefficient bêta, . Ce coefficient permet de traduire le

risque systématique, non diversifiable, de chaque société. En effet, le niveau de

risque n’est pas le même pour toutes les sociétés du marché (sociétés plus ou

moins cycliques, bien installées ou sensibles aux crises, aux taux de change, aux

taux d’intérêt, etc.). L'investisseur n'en attend donc pas la même rémunération, et

exige une prime de risque supérieure pour les titres qu'il juge plus risqués.

Le coefficient bêta d’une action mesure la sensibilité de son cours à l’évolution du

marché en général. Il correspond au rapport i) entre la prime de risque de la

société évaluée (surcroît de rendement attendu sur ce titre par les investisseurs par

rapport à un placement sans risque) et ii) la prime de risque du marché (surcroît de

rendement attendu du marché de référence).

Détermination du bêta d’une société cotée sur une base historique

Le bêta peut être calculé sur la base des cours historiques de la société,

considérant qu’il conserve une certaine stabilité dans le temps et qu’il constitue

une bonne approximation du bêta anticipé par les agents économiques.

Page 16: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 15/37

Le bêta est calculé à partir des rentabilités boursières (retraitées des coefficients

d’ajustement et des distributions de dividendes) selon un pas (quotidien,

hebdomadaire, mensuel) sur des périodes telles que l’on dispose d’un nombre

suffisant d’observations, par exemple une cinquantaine d’observations.

Le coefficient historique est obtenu arithmétiquement par la régression des taux

de rentabilité de l’action contre les taux de rentabilité du marché :

Taux de rentabilité de l’action = constante + ß x taux de rentabilité du marché +

Dès lors, le est égal à la covariance des rentabilités de l’action et du marché

divisé par la variance de la rentabilité du marché8 9.

Il n’existe pas de consensus sur l’indice de référence mesurant le « marché ».

Ainsi, il est généralement représenté par un indice large de type Eurostoxx 600.

Parfois, certains retiennent un indice small caps correctement diversifié pour le

calcul du bêta de sociétés small caps10

.

Plutôt que résulter d’un calcul mécanique fondé sur les variations de cours

relevées sur une période donnée, le bêta doit être fixé après une analyse fine de

l’historique du cours de la société (et de celles du secteur) ainsi que de sa

situation. Pour cela, il convient d’analyser les bêtas constatés sur des périodes

historiques différentes (1 an, 2 ans, 3 ans, …) afin de détecter les éventuelles

anomalies des cours de bourse historiques.

Les paramètres propres à la société susceptibles d’influer sur le niveau du bêta

sont notamment :

le levier opérationnel qui résulte des charges fixes et des marges sur coûts

variables ;

la sensibilité des marges au cycle économique ;

le levier financier qui accroît les frais fixes de l’entreprise.

Cette approche implique une part de subjectivité qui n’est pas absente non plus

des autres travaux d’évaluation tels que la détermination de la marge

opérationnelle normative ou encore la formulation d’une hypothèse de croissance

perpétuelle pour le calcul d’une valeur terminale.

Le calcul d’un bêta peut être affiné en suivant une approche segmentée par

branche d’activité (le bêta de la société étant alors la moyenne pondérée des bêtas

des branches qui la composent, ces derniers étant déterminés sur des échantillons

de sociétés comparables).

8 On retient généralement les logarithmes népériens des variations de cours plutôt que les

variations elles-mêmes. 9 S’agissant de calcul statistique, un coefficient de corrélation d’au moins 40% est en principe

nécessaire pour considérer le résultat obtenu comme satisfaisant. Ce seuil n’est pas pertinent

pour certains secteurs où le bêta est particulièrement faible (induisant un coefficient très

faible), tel que celui des foncières. 10

Il s’agit dans ce cas d’une adaptation du MEDAF afin de tenir compte du déphasage souvent

observé entre indices small caps et indices généraux qui, du fait du poids des principales

sociétés, reflètent principalement les cours des grandes entreprises.

Page 17: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 16/37

Détermination du bêta sur une base analogique

Le bêta d’une société cotée ou non, peut être déterminé par analogie, sur la base

d’un échantillon de sociétés cotées comparables représentatives du secteur. De

même que pour les approches analogiques de valorisation, il est important

d’analyser les sociétés de l’échantillon retenu (qui peut être différent de celui

retenu pour le calcul des multiples boursiers) au regard des paramètres détaillés

ci-après, afin de maintenir une certaine homogénéité des coefficients.

Comme indiqué ci-avant, un coefficient de corrélation d’au moins 40 % est en

principe nécessaire pour considérer le résultat obtenu comme satisfaisant.

Toutefois, en pratique, il est courant que les sociétés cotées comparables

représentatives du secteur affichent des coefficients de corrélation inférieurs à

40%. Dès lors, dans certains secteurs où les bêtas sont faibles, l’évaluateur peut

être conduit à abaisser ce seuil, quitte à privilégier dans l’échantillon retenu les

bêtas dont les coefficients de détermination sont les plus élevés.

Plusieurs paramètres conditionnent les niveaux de bêta :

- Le secteur : les coefficients bêta peuvent fortement varier selon les secteurs

en fonction de leur caractère cyclique, capitalistique, leurs « drivers » ou la

visibilité de l’activité.

Certains secteurs sont plus cycliques et démultiplient structurellement les

variations de l’activité économique générale comme le transport ou le BTP

qui enregistrent des coefficients élevés. D’autres secteurs, tels que la

distribution de gaz et d’électricité ou l’immobilier de bureaux dont les cash

flows sont relativement récurrents, les atténuent et affichent de ce fait des

bêtas faibles.

- La taille : au sein d’un même secteur, l’effet taille peut réduire la sensibilité à

la conjoncture et donc le coefficient bêta. Les petites capitalisations

pourraient présenter des bêtas plus élevés que les plus grands acteurs du

secteur, sauf effet de la liquidité des titres sur les bêtas (cf. infra).

- La structure des coûts, entre coûts fixes et coûts variables. Plus les coûts fixes

sont élevés, plus les marges de l’entreprise sont sensibles à la conjoncture et

plus son devrait être élevé.

- La liquidité : le manque de liquidité qui se traduit par un faible nombre

d’échanges conduit à un cours moins représentatif qui réagira beaucoup

moins aux variations de marché. Ceci peut conduire à des bêtas indûment

faibles avec des coefficients de détermination r² peu significatifs.

- Le taux de croissance des résultats : plus le taux de croissance des résultats

est élevé, plus le bêta sera élevé. En effet, dans ce cas, l’essentiel de la valeur

de l’entreprise s’explique par des flux éloignés dans le temps, donc très

sensibles à toute variation du marché.

- L’endettement : d’une part, les frais financiers sont assimilés à des coûts

fixes, d’autre part, la dette fait peser un risque supérieur pour l’investisseur.

S’il n’existe pas de formule théorique mathématique pour modéliser les effets des

cinq premiers paramètres évoqués, de nombreux experts ont proposé des formules

associant le bêta et les niveaux de dette.

Page 18: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 17/37

Impact de la dette sur le bêta

Le bêta d’une société endettée étant supérieur à celui d’une société non endettée,

il convient de « désendetter » le bêta de l’action pour déterminer celui de l’activité

sous-jacente. A titre d’illustration, nous reprenons ici deux formules parmi celles

fréquemment rencontrées.

Formule de Robert Hamada

La pratique a consacré la formule simplifiée d’Hamada qui permet de

« désendetter » les bêtas des sociétés comparables puis de « réendetter » le bêta

médian ou moyen de l’échantillon sur la base du levier cible de la société évaluée

pour calculer le coût de ses fonds propres. La formule retenue est qualifiée de

simplifiée, car elle suppose que le bêta de la dette est nul. La valeur de

l’endettement financier est ici supposée stable et décorrélée du marché des

actions.

[

] [

]⁄

Où FP désigne le bêta de l’action de la société endettée et actif celui de l’actif

économique (ou de la société sans endettement financier).

Formule de Pablo Fernandez

Selon la formule de Fernandez, il est tenu compte du bêta de la dette ( , ce qui

introduit le risque lié à la volatilité de la valeur de la dette :

( )

Ou bien : (

[

]

)

[

Pablo Fernandez démontre que cette formule générale demeure valide avec une

dette perpétuellement refinancée et dont le montant évolue avec l’actif

d’exploitation.

Dans le cas où le bêta de l’endettement tend vers zéro, alors la formule de

Fernandez est équivalente à la formule simplifiée d’Hamada.

Le concept de bêta de la dette est développé ci-après au chapitre 3.

Page 19: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 18/37

CHAPITRE III

LE RISQUE LIE A LA DETTE, SON COUT ET SA VALEUR

Le but de cette partie est d’identifier les limites de la pratique consistant à retenir

soit la valeur comptable (et le taux facial) de la dette, soit sa valeur de marché

théorique (et le coût de marché), tant pour apprécier le montant à déduire de la

valeur d’entreprise, que pour déterminer le taux d’actualisation. Dans les deux

cas, ce qui suit suppose que le montant retenu pour la dette (ou la trésorerie)

tienne compte d’un besoin en fonds de roulement normatif (saisonnalité de

l’activité, pratiques de paiements conformes, stocks en valeur et en quantité

normales…).

Tout travail d’évaluation pose les questions suivantes :

- Peut-on approcher la valeur de la dette en retenant le montant figurant au

bilan comptable ?

- Comment déterminer la valeur de marché de la dette ?

- Comment prendre en compte le levier et le coût de la dette dans la

détermination du taux d’actualisation ?

1 - La valeur comptable de la dette peut-elle être retenue en évaluation ?

De nombreux évaluateurs utilisent la valeur comptable de la dette, considérée

comme une première approximation de sa valeur financière11

.

1.1 Qu’est-ce que la valeur comptable

Avant d’apprécier cette pratique, il convient de rappeler ce que peut recouvrir la

notion de valeur comptable, selon le référentiel utilisé :

- A l’origine : la valeur de remboursement (à distinguer de la valeur nominale)

- En IFRS : le coût amorti (sur la base d’un taux d’intérêt effectif) ou la juste

valeur (sur la base d’un taux de marché spot)

- Les instruments de couverture : il est difficile d’ignorer la valeur de certains

dérivés au bilan qui devraient permettre de traduire directement la valeur de

marché instantanée de la dette dans un certain nombre de cas : dette à taux fixe

couverte par des swaps taux fixe / taux variable

- Certains dérivés à caractère de dette financière

11

Par exemple, dans une étude récente de Frank Bancel : « A majority of respondents consider

that the book value of the net debt is a good approximation of its value » extrait de : Valuation

Practices and CAPM implementation – Franck Bancel (ESCP) and Usha Mittoo (Manitoba

University) – June 19, 2012

Page 20: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 19/37

Malgré des tentations avouées, l’IASB n’a pas retenu, sauf exceptions que nous

examinerons plus loin, la juste valeur pour l’évaluation des dettes financières au

bilan. Les dettes sont donc normalement en coût historique. Le lecteur pourra

néanmoins trouver la juste valeur des dettes indiquées dans l’annexe.

Les dettes en coût historique

Les IFRS ont retenu une présentation des dettes financières selon la méthode du

coût amorti (ou du taux d’intérêt effectif -TIE). La méthode consiste à établir un

tableau d’amortissement financier fondé sur le taux d’actualisation qui annule tous

les flux financiers nets liés à l’emprunt. Ainsi la valeur d’origine est la valeur

nominale de l’emprunt diminuée des frais d’émission et des éventuelles primes

d’émission (prix de la transaction). La valeur de remboursement, elle, est

augmentée des éventuelles primes de remboursement. Les primes de

remboursement et les frais d’émission apparaîtront en frais financiers au fur et à

mesure de l’amortissement de la dette selon le plan d’amortissement préparé par

la comptabilité. La valeur qui apparaîtra au bilan sera celle du plan

d’amortissement à la date de clôture des comptes, soit la valeur initiale augmentée

des charges financières calculées au taux de la comptabilité et réduite des

décaissements (remboursements éventuels et intérêts effectivement payés depuis

l’origine jusqu’à la date de clôture des comptes). Elle ne correspondra pas à la

valeur de remboursement sans toutefois s’en écarter significativement pour un

emprunt conclu à des conditions normales.

L’enregistrement initial des dettes s’effectue toujours à la juste valeur, laquelle

correspond à sa valeur au coût historique si la dette a été contractée à des

conditions de marché. Dans les cas exceptionnels où la dette n’est pas émise au

taux de marché (par exemple un prêt accordé par l’Etat à un taux inférieur au taux

de marché), le plan d’amortissement est établi sur la base du taux d’intérêt de

marché. La différence entre la valeur d’origine ainsi calculée et le montant de

liquidités est inscrite en résultat. Dans le cas du prêt d’Etat pris pour exemple, elle

constituera une subvention constatée en profit selon les dispositions de la norme

sur les subventions (IAS 20).

Ces dispositions sont en ligne avec les normes US GAAP.

Les règles françaises adoptent aussi une présentation en coût historique, mais la

dette est inscrite au bilan en valeur de remboursement. Ainsi les frais d’émission

et les primes de remboursement sont inscrits à l’actif et étalés sur la durée de

l’emprunt (avec la possibilité d’une inscription immédiate en charges pour les

frais d’émission). L’étalement s’effectue généralement au prorata des intérêts

courus.

Page 21: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 20/37

Les dettes en juste valeur

Les passifs financiers classés en juste valeur par résultat

Il s’agit des dettes encourues à des fins de transaction (trading liabilities), c’est-à-

dire des dettes liées à des ventes à découvert d’actifs financiers, des dettes émises

avec l’intention de les racheter à court terme (ou comprises dans un portefeuille

ayant ces caractéristiques) et des instruments dérivés (sauf s’ils sont désignés en

couverture). Certains instruments peuvent être classés sur option dans cette

catégorie :

les instruments hybrides (lorsque la dette contient des dérivés incorporés) font

normalement l’objet d’une séparation (split accounting) de manière à permettre

l’évaluation de la dette en coût historique et celle des instruments dérivés en

juste valeur par résultat ;

Lorsqu’on applique le « split accounting » on calcule d’abord la juste valeur du

dérivé, la valeur du contrat hôte (donc de la dette) étant obtenue par différence.

L’option juste valeur permet de ne pas séparer en classant l’ensemble de

l’instrument en juste valeur par résultat. Le classement en juste valeur par

résultat est ainsi obligatoire lorsque l’on ne sait pas séparer les dérivés

incorporés ;

lorsque le classement en juste valeur permet de réduire une distorsion de

traitement entre la dette et un instrument dérivé ou un actif financier ;

lorsque la dette fait partie d’un portefeuille géré en juste valeur ;

pour des raisons évidentes les coûts de transaction sont comptabilisés

immédiatement en charges lorsque la dette est comptabilisée en juste valeur par

résultat.

La juste valeur (selon IFRS 13) est définie comme le prix qui serait payé pour

transférer une dette dans le cadre d’une opération conclue à des conditions de

marché normales par des intervenants de marché, à la date de l’évaluation. La

vente est supposée intervenir sur le marché principal où l’élément se négocie ou

sur le marché le plus avantageux.

La juste valeur d’une dette prend en compte le risque de défaut de l’émetteur. Il

s’ensuit que la dégradation du risque de crédit propre à l’entreprise entraîne la

constatation d’un profit (ou d’un OCI). Lorsqu’un instrument de rehaussement de

crédit fait l’objet d’une comptabilisation distincte il n’est pas pris en compte pour

l’évaluation de la juste valeur de la dette.

Pour la détermination de la juste valeur, les normes IFRS 13 et IFRS 7 imposent

une hiérarchisation des méthodes :

niveau 1 – les cours cotés sur un marché actif pour des instruments

identiques, ces cours étant accessibles à la date d’évaluation ;

niveau 2 – juste valeur déterminée à partir d’un modèle d’évaluation intégrant

les données directement ou indirectement observables sur un marché ;

niveau 3 – juste valeur déterminée à partir de données non observables sur un

marché.

Page 22: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 21/37

Les données utilisées doivent être celles qu’un intervenant de marché prendrait en

considération.

Dans certains cas la juste valeur ainsi déterminée diffère du prix de transaction.

Cet écart appelé « day one profit » peut, suivant les cas, être comptabilisé

directement en résultat, différé ou étalé.

Les passifs financiers faisant l’objet d’une couverture de juste valeur (Fair

Value Hedge)

La comptabilité de couverture en IFRS n’est pas systématique, bien au contraire

elle suppose un choix de la part de l’entreprise dès l’initiation de la couverture et

elle n’est acquise que pour les couvertures suffisamment efficaces selon les

critères de la norme IAS 39.

Les IFRS distinguent trois types de couvertures :

la couverture de juste valeur (par exemple un swap de taux fixe contre

variable) – l’instrument de couverture (qui, sauf pour les couvertures de

change est nécessairement un dérivé) est comptabilisé à sa juste valeur par

résultat et la valeur comptable de l’instrument couvert est ajusté de la valeur

de la composante risque couvert en contrepartie du résultat ;

la couverture de flux de trésorerie (par exemple un swap de taux variable

contre fixe) - l’élément couvert ne fait l’objet d’aucune écriture spécifique

mais l’instrument de couverture est évalué en juste valeur avec des variations

de valeur inscrites en capitaux propres recyclables (OCI) pour la part efficace

de la couverture ;

la couverture d’un investissement net en devises – traitement similaire à celui

d’une couverture de flux de trésorerie.

Le fait d’opter ou non pour la comptabilité de couverture, de répondre ou non aux

critères de comptabilité de couverture et le type de relation de couverture ont une

influence sur le montant de la dette au bilan.

La distinction dettes/capitaux propres et les instruments composés

Selon la norme IAS 32 un instrument doit être qualifié de dette dès lors que

l’entité ne dispose pas d’un droit inconditionnel de se soustraire à la remise de

trésorerie ou d’actif financier pour satisfaire à ses obligations contractuelles. Un

instrument de capitaux propres est un instrument qui représente une quote-part de

l’actif net d’une entité. Il se définit en pratique par opposition à la notion de dette.

Il existe des instruments composés, comme certains emprunts convertibles, qui

relèvent à la fois des deux catégories. Ces instruments sont comptabilisés pour

partie en dette, pour partie en capitaux propres. On procède à l’évaluation de la

part correspondant à la dette, le reste étant affecté aux capitaux propres. Pour un

emprunt convertible par exemple la part correspondant à la dette est la valeur

d’une dette équivalente mais ne comportant pas de possibilité de conversion. Elle

s’obtient par actualisation des flux financiers à un taux correspondant au taux

d’intérêt que porterait une dette équivalente sans option de conversion.

Page 23: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 22/37

En comptabilité française l’obligation convertible figurerait en dette pour sa

totalité. En règle générale les règles françaises ne feront pas apparaître autant de

dettes que le référentiel IFRS. Un put sur minoritaires entraînera par exemple en

IFRS la constatation d’une dette à hauteur de l’engagement, elle figurera en

engagement hors bilan dans la comptabilité française.

Présentation au bilan

Le référentiel IFRS prévoit une présentation des dettes au bilan en distinguant

dettes courantes et dettes non courantes, soit pour les passifs financiers les dettes

et part de dette à plus d’un an et à moins d’un an.

En règles françaises, les dettes sont classées selon leur durée à l’origine. La part à

moins d’un an des emprunts figure dans l’annexe.

Les informations de l’annexe

Les informations à fournir sur les passifs financiers comprennent notamment :

Indication de la juste valeur des passifs financiers par classe de passif et

information sur les méthodes retenues pour le calcul ;

Mesure de l’impact du risque propre sur la valeur des dettes

Information sur les méthodes de comptabilisation des passifs financiers, en

particulier la nature des passifs financiers soumis à l’option de juste valeur et

les critères de désignation retenus par l’entité ;

Information sur les défauts de paiement et les « breaches of covenants » ;

Informations sur les événements postérieurs à l’exercice concernant des dettes

classées à court terme lorsqu’un refinancement à long terme est intervenu

après la clôture ou qu’une régularisation est intervenue relative au respect des

covenants ;

Information (valeur comptable) sur les actifs financiers donnés en garantie de

passifs financiers ;

Information sur le « day-one-profit » par classe d’actifs financiers

Information sur l’exposition de l’entité aux risques et sur la gestion des

risques

Page 24: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 23/37

1.2 Une première approximation de la valeur financière

Même s’il a été émis à un taux de marché, avec le temps, la valeur réelle d’un

emprunt peut évoluer et différer de sa valeur contractuelle ou de

remboursement12

:

- la qualité de la signature de l’émetteur peut évoluer, ce qui affectera le spread

exigé par les créanciers. Ce phénomène s’applique aux emprunts émis à taux

fixe comme à taux variable ;

- la valeur des emprunts à taux fixe est affectée par la réduction progressive de

leur durée résiduelle et par l’évolution générale des taux : à qualité de

signature donnée, les taux ne sont pas constants dans le temps, et à une date

donnée, ils varient en fonction de la maturité des dettes (courbe des taux).

Pour des sociétés ne présentant pas une structure financière excessive et dans

des contextes de marché peu volatiles (spreads stables), la valeur au bilan

peut valablement servir d’approximation de la valeur financière de la dette. Implicitement, on considère que la société se refinancera dans des conditions

similaires aux conditions historiques.

En revanche, il est indispensable dans certaines situations de réaliser un travail

d’évaluation de la dette, notamment :

- lorsque les taux d’intérêts historiques divergent significativement des taux

actuels ou anticipés ;

- lorsque le profil de risque induit par le business plan (et la structure financière

nécessaire pour le réaliser) diverge radicalement de l’historique, notamment

lorsqu’une opération d’acquisition ou de cession est envisagée.

Si l’évaluateur considère que la dette est arbitrable, ces divergences se traduiront

par une réévaluation de l’endettement à son taux de marché (en tenant compte le

cas échéant des coûts de restructuration de l’endettement, couvertures comprises,

cf. infra).

Si la dette n’est pas considérée comme arbitrable ou renégociable, il sera tenu

compte des charges prévisionnelles d’intérêt résultant des emprunts existants

jusqu’à leur refinancement éventuel à un taux de marché.

2 - La valeur réelle de la dette

La valeur de l’endettement net est théoriquement égale à la valeur actuelle des

flux futurs à payer aux créanciers (commissions, intérêts, capital) actualisés au

coût de marché de la dette, diminuée de la valeur de marché des placements

financiers.

12

Capital restant dû et intérêts courus non échus.

Page 25: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 24/37

Le travail d’évaluation de la dette doit cependant reposer sur une étude

approfondie des conditions dans lesquelles la société pourrait renégocier sa dette,

soit à l’échéance, soit de manière anticipée : il ne s’agit pas d’une simple

actualisation des flux de la dette historique au taux spot de marché mais il

convient d’analyser, selon le type de dette :

- si la société peut renégocier sa dette ou la racheter et si elle a intérêt à le

faire ;

- si elle n’a pas d’autre choix que de restructurer sa dette ;

- dans quelles conditions de coût, de maturité.

2.1 Les flux relatifs aux différents types de dettes

L’évaluation des dettes est rendue complexe par l’hétérogénéité des sources de

financement - et des exigences de rentabilité liées :

La dette bancaire, à taux fixe ou variable, peut comporter différents niveaux de

subordination. Les flux futurs relatifs à la dette doivent prendre en compte :

- les flux liés à la dette actuelle jusqu’à l’échéance : commissions, intérêts

attendus et remboursement du capital ;

- si une renégociation est nécessaire (et que la société a effectivement la

possibilité de renégocier) ou envisageable (et que la société a intérêt à

renégocier) : les coûts annexes (pénalités pour remboursement anticipé, coûts

générés par le refinancement (commissions d’engagement, etc.) ;

- Les flux liés au refinancement à l’échéance intégrant la marge de manœuvre de

la société dans la négociation (selon le profil de risque attendu à l’échéance).

Les instruments de dette désintermédiés, notamment obligataires, cotés ou non.

Cette dette est plus liquide et peut être plus facilement rachetée.

Pour une dette facilement négociable, et si la société a intérêt à racheter sa dette,

le cours coté (plus prime éventuelle) peut constituer une bonne approximation de

la valeur financière de la dette (selon la profondeur du marché).

La valeur des instruments de couverture de la dette, notamment les swaps de

taux doit être prise en compte. Par exemple, dans le cas de l’existence d’un swap

destiné à couvrir une dette émise à taux fixe, c’est bien la somme de l’endettement

et de la valeur de la couverture qu’il convient de retenir, la valeur du swap

pouvant être un actif (en diminution de la dette nette) comme un passif

(augmentant l’endettement), comptabilisé selon les normes IFRS. Comme

précédemment, s’il est retenu un scénario de restructuration de la dette, les coûts

éventuels liés au débouclage des couvertures doivent être pris en compte pour

établir la valeur de l’endettement net.

Page 26: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 25/37

2.2 Quel coût de la dette retenir pour déterminer sa valeur financière ?

Le coût de la dette est un élément complexe à déterminer ou à rationaliser en

pratique, notamment dans des contextes de fortes variations des taux ou dans des

situations de quasi-insolvabilité. En théorie, il doit représenter le taux de

rentabilité qui serait exigé par les créanciers d’une entreprise pour refinancer

l’ensemble de son passif financier (non couvert par les fonds propres).

Peut-on retenir le taux facial de la dette existante ?

En pratique, et en période de moindre volatilité des spreads, certains évaluateurs

retiennent un taux facial, déterminé en rapportant les charges financières au

montant de la dette portée au bilan :

- cette approche simplificatrice est peu compatible avec un calcul de rente à

l’infini qui reposerait sur un levier cible, le coût normatif de l’endettement

associé à ce levier ne pouvant durablement demeurer différent du taux de

marché ;

- elle ne doit pas être utilisée, par exemple, lorsque la dette arrive à maturité et

doit être renégociée dans des conditions très différentes du passé.

Faut-il retenir un taux de marché spot ?

D’autres prennent en compte un coût spot de la dette (approche IFRS).

- La détermination d’un coût « de marché » repose sur une analyse précise de la

situation et dépend de la maturité et du montant de la dette, ainsi que de la

capacité réelle de la société évaluée à renégocier sa dette à terme plus ou moins

rapproché, date à laquelle un refinancement devra être négocié ;

o Entreprise en quasi-faillite : une valeur décotée de la dette a un sens dans un

contexte de quasi-faillite où la valeur des fonds propres peut être négative

(en raison d’une prime de risque particulièrement élevée) ;

o Entreprise dont le spread s’accroît mais qui reste solvable : les conditions de

refinancement sont à étudier ;

- Le taux de marché pour des dettes désintermédiées peut également être estimé

sur la base des spreads des comparables ayant des dettes cotées ou sur la base

d’une notation synthétique de la société rapportée à des niveaux de spread

2.3 Détermination du bêta de la dette

Le concept constitue une extension de la théorie du MEDAF. Il suppose que l’on

peut placer dans un même univers rentabilité/risque les titres de dettes et les

actions. Cette approche suppose que l’endettement est arbitrable contre des titres

de fonds propres, la distinction entre les deux catégories étant d’ailleurs parfois

ténue (certain types d’actions privilégiées, sans droit de vote ou avec des droits

différenciés se rapprochant de titres de dette).

Page 27: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 26/37

(i) L’utilité d’un bêta de la dette

L’évaluateur recherche le bêta des actifs de la cible.

Le calcul de désendettement d’un bêta boursier en retenant un bêta de la dette nul

peut engendrer une sous-évaluation du risque de l’actif sous-jacent, et donc une

sur-évaluation de la cible.

A titre d’exemple, en appliquant la formule d’Hamada simplifiée, communément

utilisée pour neutraliser l’effet de l’endettement sur les bêtas des actions de

sociétés cotées comparables, à une société qui présente les caractéristiques

suivantes :

- bêta de l’action : 1,5

- levier de financement : 75%

- taux d’impôt : 35%

on aboutit à un bêta de l’actif de 1,01.

[ ]

Or en tenant compte d’un bêta de la dette (par hypothèse égal à 0,4), le bêta de

l’actif ressort à 1,14

[ ]

Cet éventuel écart doit bien sûr être mis en parallèle du niveau de prime de risque

et des éventuelles décotes de taille ou de risques spécifiques utilisés.

(ii) Des cas extrêmes de structure financière

Il est nécessaire de porter une attention toute particulière aux sociétés très

endettées. En général on peut parler de surendettement lorsque les frais financiers

représentent plus d’un tiers du bénéfice d’exploitation (calcul qui se fait sur

plusieurs exercices historiques et/ou sur les prévisions), ce ratio étant préférable à

celui de la structure financière rapportant l’endettement net au montant des

capitaux propres comptables.

En cas de surendettement, la valeur de la dette peut être très sensible aux

fluctuations de marché et le bêta de la dette est très élevé.

Le CMPC et la valeur des capitaux propres deviennent très volatiles

(capitalisation boursière dépréciée). Tous les indicateurs d’alerte se cumulant

(réduction des crédits fournisseurs liée à la défiance envers la société, hausse du

coût de la dette,…), la valeur d’entreprise diminue généralement brutalement.

Bien évidemment il est déconseillé de prendre comme comparables des sociétés

dans cette situation.

Page 28: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 27/37

(iii) Cas médians

On peut considérer que la valeur d’entreprise n’est pas affectée par le levier

d’endettement (hors valeur du bouclier fiscal), et le bêta de la dette peut être

déterminé par l’une des approches suivantes.

La première consiste à rapporter la volatilité des indices obligataires (ou de CDS)

à celle des indices actions. L’évolution des deux marchés est asynchrone. La

détente des spread obligataires précède un mouvement de hausse des actions,

l’accroissement des spread précédant la baisse des actions.

Le rapport des volatilités doit se faire sur des indices larges : iBOXX (obligations)

ou iTRAXX (CDS), d’une part, STOXX large 600 (actions) d’autre part. Le

calcul peut être affiné en ne retenant que les indices obligataires (ou de CDS) de

rating comparable à celui des sociétés examinées.

La seconde approche consiste à comparer les spread obligataires et les primes de

risque de marché actions. Ainsi, le bêta de la dette d pourrait être estimé en

rapportant le spread instantané de la dette à la prime de risque des marchés

actions.

Enfin, une approche forfaitaire peut être envisagée, nécessitant de fixer une

échelle de coefficients (par exemple entre 0 et 0,4) par classe de notation ou de

levier.

A titre indicatif, ces approches permettent d’approcher un bêta de dette notée

BBB+ à 0.35/0.40.

Premières conclusions

Le coût de la dette pourra être déterminé à partir des éléments suivants :

- le coût historique, pour une entreprise mature, dont le profil de risque n’est pas

appelé à évoluer et en période de stabilité des spreads

- les opportunités actuelles de refinancement de la société sur une durée

homogène avec celle des actifs

- en majorant le coût actuel des obligations d’Etat d’un spread tenant compte du

différentiel de risque, pour le prêteur, entre l’entreprise évaluée et l’Etat de

référence. Le spread, qui est notamment fonction du secteur d’activité, du ratio

d’endettement et du ratio de couverture des frais financiers par l’EBITDA ou

l’EBIT, peut être apprécié sur la base de celui ressortant des instruments déjà

émis ou d’instruments de même maturité présentant des caractéristiques

similaires, notamment en termes de subordination, émis par des entreprises

comparables (après éventuels ajustements pour tenir compte de situations de

marché atypiques).

Compte tenu du poids de la valeur terminale (rente perpétuelle) dans la valeur

d’une entreprise, le coût moyen pondéré du capital devrait être celui de la

structure cible retenue pour le calcul de rente. Une approche consistant à faire

évoluer le taux d’actualisation en fonction du levier d’endettement anticipé sur la

période du plan peut également être envisagée.

Page 29: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 28/37

3 - La valeur réelle de la trésorerie

Il est d’usage de retenir le montant de la trésorerie et des équivalents de trésorerie

figurant au bilan consolidé de la société évaluée. Une attention particulière doit

toutefois être portée à l’analyse des caractéristiques de cette trésorerie.

Il convient de s’assurer que la trésorerie est disponible : peut-elle être distribuée,

peut-elle être affectée au remboursement d’emprunts existants, peut-elle

rémunérée à un taux de marché ?

Deux analyses sont généralement menées :

- La trésorerie finance-t-elle des besoins opérationnels ?

o Si une partie de la trésorerie consolidée est nécessaire pour financer le

cycle d’exploitation de la société (i.e. pour faire face à la saisonnalité des

flux de trésorerie ou pour satisfaire des normes prudentielles), il convient

de ne considérer que la partie de la trésorerie non affectée à l’exploitation

comme disponible pour les actionnaires. La valeur de la part non

distribuable de la trésorerie affectée à l’exploitation, assimilée à une

immobilisation, s’appréhende par les revenus qu’elle génère, les

variations d’assiette étant traitées comme un investissement. Par ailleurs,

les actionnaires d’une société dont l’exploitation génère des excédents

structurels de fonds de roulement (par exemple en raison des avances

clients) pourront bénéficier d’un surplus de valeur lié aux produits

financiers sur ladite trésorerie excédentaire ;

- La trésorerie est-elle localisée au niveau de la société holding consolidante ?

o Si la trésorerie consolidée est localisée au niveau de la société holding

consolidante, elle est généralement considérée comme disponible pour

les actionnaires, sauf contraintes juridiques ou fiscales ;

o Si la trésorerie est localisée dans une filiale située dans un pays émergent

qui applique un strict contrôle des changes, il est généralement difficile

de la faire remonter vers la société holding consolidante sous forme de

dividendes. Le même cas de figure se présente si la trésorerie est

localisée dans une filiale dont la gouvernance ou dont certains

mécanismes juridiques contraignants limitent la distribution de

dividendes.

Page 30: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 29/37

CHAPITRE IV

LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE SPECIFIQUE

Comme rappelé aux chapitres 1 et 2, le MEDAF repose sur une hypothèse de

diversification du portefeuille permettant d’éliminer le risque spécifique et de ne

prendre en considération que le risque dit systématique (non diversifiable car

corrélé au marché), rémunéré selon la droite de marché qui établit le lien de

proportionnalité, le coefficient bêta, entre la prime exigée d’un titre et la prime

moyenne du marché.

Ce modèle théorique élaboré pour définir l’exigence de rentabilité d’un titre (et

non d’un actif ou d’une activité) peut ne pas être adapté dans le cas d’entreprises

et notamment de PME souvent spécialisées sur un segment d’activité ou sur une

zone géographique limitée et/ou sur une clientèle spécifique.

Est-il possible ou nécessaire d’adapter le MEDAF de façon objective afin de

prendre en compte des risques spécifiques à l’entreprise ? Certains risques

peuvent-ils être appréhendés dans les flux, plutôt que dans le taux

d’actualisation ? Comment les risques spécifiques d’un actif influencent-ils le

risque attaché à un titre ?

1 - Le risque spécifique : une multitude de réalités

L’analyse du risque financier est un facteur d’ajustement à la hausse ou à la baisse

du risque opérationnel des actifs.

Le risque opérationnel est essentiel dans l’appréciation du risque spécifique.

Le guide de mission d’évaluation publié par le CSOEC en mai 2012 expose une

démarche d’analyse du risque spécifique, notamment dans sa dimension

qualitative.

Le risque d’une entreprise peut être évalué au travers d’une grille d’analyse.

Toutefois celle-ci n’a de valeur qu’en termes de comparaison. Cette démarche

suppose donc au moins une analyse identique des sociétés retenues comme

comparables.

Le risque opérationnel recouvre le risque de prévision, c'est-à-dire l’appréciation

de la fiabilité des prévisions sous-jacentes aux travaux de l’évaluateur ou de

l’analyste. Celles-ci doivent être comparées aux réalisations passées de la société

évaluée et de ses comparables, et aux prévisions disponibles sur des sociétés

comparables cotées. La correction éventuelle de prévisions jugées volontaristes

s’effectue via une hausse du taux d’actualisation, ou via la correction des flux

comme indiqué ci-après en partie 5.

A titre d’illustratif, la démarche d’analyse du risque suivie par Associés en

Finance est indiquée ci-après au travers de l’examen d’une série de critères

qualitatifs ou quantitatifs.

Page 31: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 30/37

Certains critères relèvent du secteur d’activité :

Critères réduisant le risque :

- Présence de barrières à l’entrée du marché,

- Forte croissance

Critères augmentant le risque :

- Modification de l'environnement technologique et du business model à

moyen terme

- Cyclicité du chiffre d'affaires

- Volatilité des coûts de production (prix et disponibilité de matières premières,

technologies, main d'œuvre, terrains, gisement)

- Si pertinent, risque juridique et réglementaire (par exemple santé)

- Si pertinent, risque systémique (par exemple assurances)

- Si pertinent, risque de création (fort pour la mode, les nouveaux produits)

D’autres critères relèvent des avantages compétitifs de la société

- Part de marché (leader)

- Mix produits innovant

- Diversité de l'offre en termes de produits et de marchés

- Capacité à maintenir les marges en environnement moins favorable

- Gouvernance, transparence, fiabilité des informations

- Si pertinent, capacité à gérer la croissance externe (prix d'achat et intégration

des acquisitions)

- Si pertinent, originalité de l'activité

- Sensibilité aux parités monétaires (ventes et frais de production dans des

monnaies différentes)

2 - Taille, liquidité … et volatilité

La littérature académique et la pratique de l’évaluation des titres financiers faisant

référence à la liquidité utilisent des principes voisins que les raccourcis de

raisonnement ou de présentation peuvent amalgamer à tort.

La liquidité est présente dans deux grands thèmes :

- La taille des actifs et la liquidité des titres financiers ;

- La liquidité et la volatilité desdits titres.

Page 32: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 31/37

D’un point de vue d’analyse stratégique, l’importance du concept de taille des

actifs s’explique facilement puisqu’une société détenant de nombreux (et/ou

importants) actifs bénéficie sur le plan du risque opérationnel d’une

diversification objective géographique (régionale ou internationale) en termes

d’accès aux facteurs de production et aux débouchés commerciaux (clientèle,

gamme de produits et de services). Une « grosse » société bénéficie de plus d’un

meilleur accès à l’ensemble des marchés de capitaux et présente de ce fait un coût

global des capitaux moins élevé. Cet effet de taille a été mis en valeur dans de

nombreuses études (cf. les résultats sur les sites Damodaran, Ibbotson). Ces études

ne sont basées que sur les rentabilités boursières constatées « ex-post ».

D’un point de vue boursier, une « grosse » société cotée offre à ses actionnaires

une meilleure liquidité qu’à ceux d’une « petite » société. Les raisons sont

multiples : meilleure efficience des cours compte tenu d’un suivi accru des

analystes et des investisseurs, possibilité d’intervention de teneurs de marchés ou

d’arbitragistes …

Taille et liquidité sont donc liées, une taille plus importante ayant pour

conséquence une liquidité meilleure (au flottant près, c’est-à-dire le pourcentage

de la capitalisation négociable, ainsi que la typologie des actionnaires).

Le modèle d’Associés en Finance mesure l’effet de taille / liquidité en mettant en

valeur la relation qui existe entre d’une part la rentabilité espérée, ex ante

(calculée pour chaque société de l’échantillon (environ 500 aujourd’hui) sur la

base de plans d’affaires prévisionnels), et d’autre part le risque relatif (fonction du

risque opérationnel et du risque financier), et la liquidité du titre. Les résultats

obtenus ne diffèrent pas des conclusions tirées des calculs fondés sur les

rentabilités boursières. La rentabilité exigée est plus forte sur les titres moins

liquides par rapport aux titres plus liquides.

La liquidité structurelle s’exprime par le rapport de l’inverse du logarithme du

flottant d’un groupe coté à la moyenne des inverses des logarithmes du flottant de

chacune des sociétés de l’échantillon.

La liquidité conjoncturelle est appréhendée par l’inverse du logarithme du

montant de capitaux négociables pour une variation de 1 % du cours.

Les sociétés sont classées par ordre de liquidité décroissante – ou illiquidité

croissante – afin d’obtenir une pente positive comme dans le cas de la prime de

risque. Les valeurs très liquides ont un coefficient d’illiquidité inférieur à 1, les

valeurs peu liquides ayant un coefficient d’illiquidité supérieur à 1. Le tableau

suivant indique les valeurs extrêmes au 28 juin 2013 pour les valeurs françaises de

l’échantillon d’Associés en Finance.

Page 33: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 32/37

L’intégration de la liquidité boursière dans la valorisation accroît sensiblement la

qualité statistique des modèles de valorisation de sociétés cotées : un modèle du

type MEDAF classique (régression entre rentabilité attendue et risque) affiche

actuellement un coefficient de détermination de la régression d’environ 65% (67%

au 20 août 2013) tandis qu’un modèle à trois facteurs (régression entre rentabilité

attendue, risque et liquidité boursière des titres) affiche un coefficient de

détermination d’environ 80% à 85% (80% au 20 août 2013). Même si ces

coefficients de détermination varient dans le temps, ils sont systématiquement

plus élevés lorsque l’on intègre la liquidité boursière comme facteur explicatif

supplémentaire de la valorisation des titres.

L’effet taille / liquidité ainsi mis en exergue est tout sauf constant dans le temps.

En effet, cet effet est très lié à la conjoncture instantanée. Un crédit bancaire

accommodant facilite le financement des ETI, le financement d’opérations de

croissance externe, le financement des hedge funds ou des LBO. Un

environnement financier sous stress va au contraire limiter les financements, donc

geler les opérations financières, encourager les intervenants à augmenter leurs

marges de sécurité vis-à-vis de leurs propres contraintes réglementaires (marge de

solvabilité des assureurs, Fonds propres « durs » des banques) et financières

(liquidité des bilans). Les investisseurs modifient leurs anticipations et renforcent

leurs propres exigences de sécurité, ce qui se matérialise par une aversion au

risque qui touche en priorité l’investissement dans les petites sociétés.

Le graphique suivant indique que cette prime a varié de -0.30 % à 3 % sur les

douze dernières années. Cette prime s’applique aux coefficients indiqués plus

haut.

A titre d’illustration de l’effet taille, au 28 juin 2013, l’écart de WACC estimé

après impôt entre des sociétés de même secteur et de taille significativement

différente est le suivant :

• 430 bp dans les cas d’Alès Groupe et de L’Oréal à respectivement 9,82 % et

5,51% ;

• 310 bp dans les cas de Le Noble Age et de Orpéa à respectivement 9,64% et

6,56%.

Montant absorbable Coeff.

Pays Société (Rang) (M€) (M€) (Rang) (M€) Illiquidité

FR Sanofi 44 239.4 108.9 29 94 651 0.65

FR Total 60 192.1 108.2 35 75 514 0.66

FR LVMH 97 109.5 52.8 71 32 594 0.70

FR EADS 92 122.2 52.1 111 20 639 0.72

FR Air Liquide 131 75.0 47.5 79 29 039 0.71

FR Foncière des Murs 469 0.1 0.05 461 106 1.55

FR Somfy 479 0.0 0.04 451 180 1.45

FR Laurent-Perrier 473 0.1 0.04 454 170 1.46

FR Bastide le Confort 480 0.0 0.03 484 29 1.99

FR Vranken-Pommery 478 0.0 0.03 477 49 1.80

FR Lanson BCC 482 0.0 0.02 485 28 2.02

FR Devoteam 476 0.0 0.02 468 73 1.72

FR Audika 477 0.0 0.02 479 34 1.98

FR Groupe Open 487 0.0 0.01 486 27 2.12

FR Le Noble Age 485 0.0 0.01 487 26 2.14

FR Groupe Flo 481 0.0 0.01 482 29 2.09

Transactions Flottant

Page 34: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 33/37

Prime d’illiquidité entre 2001 et 2013

La liquidité d’un titre est indépendante du concept de minorité. En effet, la mesure

de l’incidence de la liquidité sur des titres cotés se fait sur la base de transactions

entre actionnaires minoritaires.

L’actionnaire minoritaire dans une société non cotée n’a pas, à la différence du

majoritaire, l’initiative de la cession de la société. La possibilité d’une transaction

est par ailleurs très dépendante du contexte financier, de l’appétence plus ou

moins grande des investisseurs ou des industriels pour une acquisition et de

l’accord plus ou moins facile de leurs banquiers pour accompagner l’opération.

C’est cette dernière constatation qui permet de relier décote pour des actions non

cotées et décote observée sur les marchés boursiers.

La volatilité du cours d’un titre mesure à la fois son risque systématique relatif

(l’exposition aux variations de la conjoncture économique et / ou financière) ET

l’étroitesse relative de son marché boursier (impact d’un ordre de bourse sur le

déplacement des fourchettes d’achat / vente). C’est pourquoi les « bêtas » calculés

doivent être utilisés avec précaution, le calcul mathématique n’affranchissant pas

l’évaluateur d’une réflexion appropriée quant aux résultats obtenus.

Prime De Liquidité 2001-2013

-0.5

-0.3

-0.1

0.1

0.3

0.5

0.7

0.9

1.1

1.3

1.5

1.7

1.9

2.1

2.3

2.5

2.7

2.9

13

/11

/20

01

13

/03

/20

02

13

/07

/20

02

13

/11

/20

02

13

/03

/20

03

13

/07

/20

03

13

/11

/20

03

13

/03

/20

04

13

/07

/20

04

13

/11

/20

04

13

/03

/20

05

13

/07

/20

05

13

/11

/20

05

13

/03

/20

06

13

/07

/20

06

13

/11

/20

06

13

/03

/20

07

13

/07

/20

07

13

/11

/20

07

13

/03

/20

08

13

/07

/20

08

13

/11

/20

08

13

/03

/20

09

13

/07

/20

09

13

/11

/20

09

13

/03

/20

10

13

/07

/20

10

13

/11

/20

10

13

/03

/20

11

13

/07

/20

11

13

/11

/20

11

13

/03

/20

12

13

/07

/20

12

13

/11

/20

12

13

/03

/20

13

13

/07

/20

13

Page 35: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 34/37

3 - Le risque de faillite

3.1 Le risque de faillite et le MEDAF

Il n’est pas tenu compte du risque de faillite dans le MEDAF, sauf à utiliser

certaines adaptations.

Pour rappel, Fernandez démontre que la valeur du « tax shield », V(TS), est

indépendante du coût de la dette (et donc du risque de non-remboursement

rémunéré par le spread). Ainsi dans le calcul de valeur terminale par une formule

de rente à l’infini, la valeur du « tax shield » est égale à :

Où Ku désigne le coût du capital à dette nulle et g le taux de croissance à l’infini

des flux.

On remarque que par cette approche, il n’existe pas de limite à l’accroissement du

bouclier fiscal engendré par l’augmentation du levier d’endettement (hormis le

cash flow disponible).

Pour sa part, la formule d’Hamada simplifiée conduit à la prise en compte d’une

perte de valeur liée au levier d’endettement, qui s’assimile de facto à une décote

pour risque de faillite :

( )

Où Kd désigne le coût de la dette et rf le taux sans risque, Kd – rf désignant par

conséquent le spread rémunérant le risque de non remboursement.

3.2 Le risque de faillite selon une approche alternative

L’évaluation du crédit d’une société est le métier des agences de rating, des

départements de crédit des banques, des analystes obligataires et de chaque

créancier. C’est une discipline complexe qui ne se laisse pas facilement modéliser,

même si chacun comprend bien que le crédit se détériore lorsque le levier

d’endettement augmente, lorsque la profitabilité baisse ou lorsque la visibilité du

secteur se dégrade.

Ce risque ne doit cependant pas être négligé. Dans le cas d’entreprises en

difficulté notamment, ce risque vient majorer les exigences de capital et doit donc

être pris en compte dans le taux d’actualisation.

Robert Merton a proposé un modèle assimilant le créancier à un vendeur de puts

sur l’actif de la société. De ce modèle, le marché a conservé l’esprit mais pas la

formule, car ses résultats diffèrent trop de la réalité du marché du crédit.

Page 36: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 35/37

En faisant évoluer le modèle de Merton, on peut toutefois se rapprocher de la

réalité de marché. Les évolutions nécessaires consistent :

- à considérer le crédit non pas comme un put, mais comme une option à barrière

(le processus de faillite n’est pas continu)

- à ne pas estimer les actifs purement à leur valeur de marché ou à leur valeur

comptable, mais à une moyenne entre les deux (à structure financière donnée,

la faillite est d’autant plus probable que le ratio valeur de marché / valeur

comptable est faible).

Avec ces précautions, on obtient des résultats réalistes, même s’ils ne sont pas

suffisamment fiables pour servir de base à une activité d’arbitrage.

L’intérêt de cette approche est qu’elle prend en compte un paramètre déjà utilisé

dans le calcul du CMPC (le ratio de levier) ainsi qu’un autre paramètre qui est la

volatilité du secteur, ce qui confirme bien l’intuition selon laquelle le risque est

d’autant plus grand que la volatilité est importante (secteur de la technologie vs

utilities pour forcer le trait). Par ailleurs, cette approche rend bien compte de la

réalité de marché lorsque l’aversion pour le risque augmente avec une hausse

générale des volatilités de marché.

4 - Le risque lié à l’absence de taille critique

Il a été observé que les sociétés de petite taille faisaient souvent l’objet d’une

exigence de rentabilité supérieure, les principales raisons en étant la concentration

des actifs, l’accès limité au financement, ainsi qu’une structure de coûts moins

favorable et une plus grande sensibilité à la conjoncture. On pourrait aussi

invoquer les coûts liés à l’investissement dans ce type de structures et la faible

liquidité des fonds placés, les grandes structures (notamment cotées) permettant

aux investisseurs de réaliser d’importantes économies d’échelle.

Le montant de cette prime peut s’observer par comparaison des multiples

ressortant de petites et de grosses sociétés dans un secteur.

La prime de taille n’est pas systématique, certaines sociétés de niche pouvant au

contraire bénéficier de visibilité, croissance et marges plus élevées que des

sociétés plus importantes, sans risque supplémentaire identifié, ou pouvant par

leur présence dans un portefeuille apporter une meilleure diversification.

Il est ainsi impératif pour une entreprise donnée d’analyser les déterminants réels

expliquant une éventuelle exigence supérieure des investisseurs et de les prendre

en compte dans les flux ou dans le taux. En effet, la prime de risque liée à l’effet

taille ne doit pas être redondante avec la prise en compte des autres risques déjà

appréhendés par ailleurs, soit dans les flux, soit dans le taux (via le coefficient

bêta par exemple).

Page 37: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 36/37

5 - Le risque lié aux flux

Certains évaluateurs ajoutent une prime spécifique au coût du capital pour tenir

compte des incertitudes pesant sur la réalisation du plan d’affaires du

management. Il est néanmoins recommandé de prendre en compte ce risque dans

les flux (méthode des équivalents certains ou par scenarios probabilisés) ou de

corriger, le cas échéant, le plan d’affaires.

Par exemple, une plus grande sensibilité à la conjoncture pourra être modélisée

dans des cycles économiques aboutissant à une croissance moyenne des ventes

plus modérée que celle des comparables. S’il s’agit du poids des coûts fixes, le

plan devra prendre en compte une structure de coûts fixes plus importante que

celle des comparables côtés de taille supérieure. Si l’inquiétude porte sur les

conditions de financement, cela doit avant tout se traduire dans le coût de la dette

et/ou dans le levier.

L’ajustement du plan d’affaires n’est toutefois pas toujours possible pour des

profils d’entreprise atypiques. Ainsi, la pratique de place en matière de capital

investissement conduit bien à s’affranchir du MEDAF et des taux d’actualisation

communément requis sur les marchés boursiers.

6 - Les autres risques spécifiques

Certains évaluateurs ajoutent au coût du capital un ensemble de primes ayant

vocation à refléter :

- une structure organisationnelle plus lourde (conglomérats)

- un risque de marché non reflété dans la prime de marché actions

- …

L’ensemble des primes spécifiques ajoutées au CMPC conduit souvent à des

niveaux très divers de coût du capital. Ce constat vient remettre en question le

modèle du MEDAF.

Page 38: Société Française des Evaluateurs SFEVde+travail... · 2017. 3. 22. · Société Française des Evaluateurs SFEV GROUPE DE TRAVAIL PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS LE TAUX D’ACTUALISATION

SFEV GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DANS L’EVALUATION

Note de travail

Septembre 2013 37/37

Bibliographie

1- Ouvrages

P. Fernandez – « Valuation Methods and Shareholder Value Creation » -

Academic Press Publishers, 2002

A. Damodaran – « The Little Book of Valuation: How to Value a Company,

Pick a Stock and Profit », 2011

P. Vernimmen – « Finance d’entreprise » – Dalloz 11ème édition

2- Articles

Pablo Fernandez – « Equivalence of ten different discounted cash flow

valuation methods » - IESE Working Paper n°549 - mars 2004

Pablo Fernandez – « Levered and Unlevered Beta, IESE Working Paper

n°488 - janvier 2003

Pascal Quiry - « Bêta des capitaux propres, Bêta de l’endettement et Bêta de

l'actif économique »

Bruno Husson et Henri Philippe – « Le WACC est-il le coût du capital ? »

Jean-Florent Rérolle – « Le taux sans risque lorsque plus rien n’est sûr » - 28

août 2011

Pascal Quiry et Yann Le Fur – « Un euro de trésorerie d’Apple peut-il

raisonnablement être valorisé pour un euro ? » - Lettre Vernimmen n°115 -

mai-juin 2013

Pascal Quiry et Yann Le Fur – « Le taux de l’argent sans risque : le

changement, c'est maintenant ! » - Lettre Vernimmen n°111 - décembre 2012

Thomas Bouvet – « La dépréciation de ses propres dettes ne crée pas de

valeur, sauf pour les comptables » - DFCG - 13 mars 2012

2- Autres sources

Site internet La Lettre Vernimmen : http://www.vernimmen.net/

Site internet Damodaran : http://www.stern.nyu.edu

Le blog de Jean-Florent Rérolle : http://www.rerolle.eu/