Sida Un · 2019-08-29 · Sida était, le I C' décembre, la quatorzième jour née mondiale du...

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BI-MENSUEL DIRECTEUR POUTIQUE BERTRAND RENOUVIN. —^505^ Sida était, le I C' décembre, la quatorzième jour née mondiale du sida. Elle a été marquée par des discours pétris de bonnes intentions. C'est ainsi chaque année, et chaque année les chiffres pu bliés indiquent l'augmenta tion terrifiante des infections e t d e s d é c è s - s u r t o u t d a n s les pays pauvres d'Afrique, d'Asie et d'Europe. L'année prochaine, si rien ne change, on fera le même constat éploré, en brandis sant des chiffres encore plus catastrophiques. Cela signifie que la compassion est inopérante, que les mises en garde sont insuffisantes, que l'admirable travail des bénévoles est par trop limité. Que faire ? Politiser la lutte, dans tous les pays, sur tous les fronts. Contraindre les États riches à porter une assistance massive et gratuite aux pays pauvres. Interdire que les « programmes d'a justement » imposés à ces mêmes pays impliquent le sacrifice des structures et des politiques sanitaires. Dénon cer l'attitude criminelle des multinationales pharmaceuti ques et les contraindre au don de médicaments. C'est compliqué ? Cela coûte cher? En effet. Mais la vie n'a pas de prix. Or vingt millions d'êtres humains sont morts du sida. Et quarante millions vont en mourir dans les prochaines années. ÉCOLOGIE Un combat politique dées Politique et religion p. 9 Deui Frédéric Grendel L 2 DU 10 DÉCEMBRE AU 23 DÉCEMBRE 2001 - BP année • Numéro 783 20 F

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B I - M E N S U E L DIRECTEUR POUTIQUE BERTRAND RENOUVIN.

— 5̂05̂S i d a

é t a i t , l e I

C' décembre, laquatorz ième journ é e m o n d i a l e d us i d a . E l l e a é t é

marquée par des discourspé t r i s de bonnes in ten t ions .C'est ainsi chaque année, etchaque année les chiffres publiés indiquent l 'augmentat i o n t e r r i fi a n t e d e s i n f e c t i o n se t d e s d é c è s - s u r t o u t d a n sles pays pauvres d'Afrique,d'Asie et d'Europe.

L'année prochaine, si rienne change, on fera le mêmeconstat éploré, en brandissant des chiffres encore pluscatastrophiques. Cela signifieq u e l a c o m p a s s i o n e s tinopérante, que les mises engarde sont insuffisantes, quel ' a d m i r a b l e t r a v a i l d e sbénévoles est par trop limité.

Que fa i re ? Pol i t iser lalutte, dans tous les pays, surtous les f ron ts . Con t ra ind reles États riches à porter uneassistance massive et gratuiteaux pays pauvres. Interdireque les « programmes d'ajustement » imposés à cesmêmes pays impliquent lesacrifice des structures et despolitiques sanitaires. Dénoncer l ' a t t i t ude c r im ine l l e desmultinationales pharmaceutiques et les contraindre aud o n d e m é d i c a m e n t s .

C'est compliqué ? Celacoûte cher? En effet. Mais lavie n'a pas de prix. Or vingtm i l l i o n s d ' ê t r e s h u m a i n s s o n tmorts du sida. Et quarantemill ions vont en mourir dansles prochaines années.

ÉCOLOGIE

U n

c o m b a t

p o l i t i q u e

dées

Polit iqueet religion

p. 9

Deui

F r é d é r i cG r e n d e l

L 2

DU 10 DÉCEMBRE AU 23 DÉCEMBRE 2001 - BP année • Numéro 783 ■ 20 F

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3eui

F r é d é r i c G r e n d e l

Ancien directeur politique de Notre République, l'hebdomadaire desgaullistes de gauche, Frédéric Grendel est mort le 25 novembre. Le soutien

passionné qu'il portait depuis leur naissance à notre journal et à notremouvement nous honorait et nous confortait. Parmi nous, Régine Judicis etBertrand Renouvin étaient ses plus proches amis. Ils témoignent de notre

a f f ec tueuse fi l i a t i on .

avons accompagnék F r é d é r i c G r e n d e l a u\ cimetière de Maussane\ par une journée iumi-^ neuse et froide del'automne provençal.

Dans l'église et autour ducercueil, il n'y avait que desamis. Pas de porte-drapeaupour ce Résistant, ni de princepour ce royal iste, pas dehiérarques pour le ferventcompagnon du général deG a u l l e , n i d ' h o m m e s d elettres, de cinéastes ou de vedettes pour l'écrivain, pour lescénariste qu'il fut. Rien quedes amis, différents par lasensibilité, l'âge, le métier, lesengagements, tous aussi discrets que lui, et réunis dans lemême chagrin d'avoir perdu« l'ami incomparable » quePhilippe de Saint Robert évoquait au terme de la cérémoniereligieuse. Il est vrai queFrédéric alliait incomparablement la fidélité et l'insolence,l ' e x t r ê m e d é l i c a t e s s e e t l adure franchise, l 'existence

royaliste vb.^ ( W i c u i * K X j r o . * a a n T M M )

SOMMAIRE : p.2 : Frédéric Grendel -p.3 : Démocratiser l'OMC - Islam -p.4 ; Medef où est ta victoire ? - p.5 :Guerre de trente ans ? - p.6/7 : Lapolitique de précaution - p.8 ; Copieur -Faut-il supprimer les prisons ? - p.9 :Religion et politique - p.10 ; Vulgo.net -p.11 : Action royaliste - p. 12 ;Editorial : Formulons nos projets I.

RÉDACTION-ADMINISTRATION17, rue des "etits-Ctiamps,

75001 ParisTéléphone: 01.42,97.42.57Télécopie : 01.42.96.05.53

Dir. publication ; Yvan AUMONT

v.̂om. parit. 51700 - ISSN 0151-577̂

dans les marges et la présenceau cœur des choses.

Dans le milieu littéraire,dans les hautes sphèrespolitiques, les gens importantss'empressaient d'oublier cethomme inc lassab le , i r récupérable, l i t téralementintenable, quand son intelligence et son dévouement neleur étaient plus utiles. Le Jugement de l'histoire ne leursera pas nécessairementf a v o r a b l e . Q u ' i m p o r t e .F r é d é r i c s e t e n a i t d a n sl'essentiel. A vingt ans, ilcombattait pour la libérationde Paris. Son oeuvre littérairene do i t r i en aux modes del'après-guerre. Son engagement politique l'a conduitauprès des plus grands, selonune démarche rigoureuse enchacun de ses moments .

O n l e d é f i n i t c o m m e« gaulliste de gauche et mit-terrandiste », ce qui mérited'être précisé.

Le « gaullisme de gauche »est une étiquette qui désigne et

cache à la fois le gaullismeauthentique, tel qu'il se manifesta dans Notre Républiquequi était le journal du généralde Gaulle, celui qui exprimaitle plus exactement sa penséeet son projet et qui disparutdès que le fondateur de laV R é p u b l i q u e q u i t t a l epouvoir, en avril 1969. Et le« mi t ter randisme » de Frédér icGrendel ne doit rien à l'espritpartisan et aux ambiancesc o u r t i s a n e s . A l a s u i t e d ' u n edure polémique contre l'animateur de l'Union de gauche,lors de la campagne présidentielle de 1965, Frédéric nouaavec François Mitterrand uneamitié trop solide pour êtreaffectée par l'élection du 10mai 1981. Le gaulliste historique et l'antigaulliste patentéa v a i e n t e n c o m m u n l e m ê m eamour de la patrie, diversement vécu et exprimé.

N o u s a v o n s t r o u v é d a n s c e taccord profond une justification majeure à notre engagement auprès de François

Mitterrand. Pendant quatorzeans, cet engagement fut, quantà nous, strictement politique,h o r s d e t o u t e r e l a t i o n d ' a m i t i épersonnelle. C'est Frédéric quiorganisa la première rencontreentre le représentant de laNouvelle Action royaliste et leprésident de la République etqui, par la suite, veilla au bond é r o u l e m e n t d e s c h o s e s . C ' e s tencore lui qui se- fit, commeéditorialiste d'Europe I, l'ardent propagandiste de la Nouvelle Action royaliste, en vuede sa participation, au sein dela majorité présidentielle, auxélections législatives de 1986.L'arrogance et le sectarismed e l a d i r e c t i o n s o c i a l i s t e fi r e n téchouer ce projet...

P a r l a s u i t e , F r é d é r i c n ecessa de soutenir notre cause,a v e c u n e d é t e r m i n a t i o n e t u nenthousiasme qui surprenaients e s i n t e r l o c u t e u r s . U n« gaulliste de gauche » allié àdes royal is tes « de gauche » dans la République mit-terrandienne ? Ce qui paraissai t b izarre aux t rès hauts conseillers relevait pour nous del ' é v i d e n c e . A v e c s o n s o u r i r elégèrement moqueur, FrédéricGrendel se proclamait volont i e r s « l e s e u l v r a i m i l i t a n t d el a N A R » - l e s e u l m i l i t a n taccompli, oeuvrant dans lap l e i n e i n t e l l i g e n c e d e sorigines, des moyens et desf i n s . N o u s c o n s i d é r i o n s a v e cun respect filial l'homme quis'était chargé de nous transmettre la pensée du Général etde veiller à ce que Royalistese tienne dans la ligne depensée et d'action de NotreRépublique. L'aide qu'il nousa apportée est inestimable.Son affection nous a permisd e s u r m o n t e r m a i n t e sépreuves. Nous serons fidèlesà sa mémoi re .

Tribune

Régine JUDICISB e r t r a n d R E N O U V I N

B u l l e t i n d ' a b o n n e m e n tN o m / P r é n o m :

A d r e s s e :

P r o f e s s i o n : D a t e d e n a i s s a n c e ;

souscrit un abonnement de ;□ trois mois (125 F) □ six mois (200 F) □ un an (300 F) □ soutien (600 F)ROYALISTE, 17, rue des Petits-Champs, 75001 PARIS - CCP 18 104 06 N Paris

D é m o c r a t i s e r l ' O M C

Nos lecteurs connaissent bien Pierre Bitoun dontnous suivons avec intérêt et sympathie les

recherches et les enquêtes depuis de nombreusesannées. Nous sommes heureux de l 'accue i l l i r à

nouveau dans nos colonnes (1).

Depuis quelques armées,les institutions économiques mondiales(FMI, CMC, G7, Forum de Davos) font

l'objet d'une contestation citoyenne grandissante dontl'enfermement sécuritaire del a n o u v e l l e c o n f é r e n c e d el'OMC, à Doha, au Qatar,fournit un énième indice. Cemouvement, dont nul observateur n'avait prévu l'irruption,a d'ores et déjà remporté dessuccès significatifs : abandonde l'AMl, échec de la conférence de Seattle en décembre 1999, mise en débat duprojet de taxe Tobin, etc. Deplus, il paraît bénéficier d'unfort courant de sympathie dansl'opinion publique, bien au-delà du cercle des mil i tantsactifs, donnant ainsi à penserque les « anti-mondialisationnéo- l i bé ra le » - e t non les« an t i -mond ia l i sa t ion » tou tcourt comme se plaît à lerépéter la presse - ont l'avenirdevant eux .

11 faut cependant resterprudent. Car fait encoredéfaut, me semble-t-il, à cemouvement, un atout majeur :une vision prospective, claireet précise, de la façon dont onpourrait démocratiser ces institutions mondiales qui ne disposent d'aucune légitimité populaire directe alors même queleur pouvoir de gouvernementdes Etats, et donc des peuples,est devenu énorme. Af in decombler ce manque et sepréparer, aussi, à faire échecaux inévitables stratégies derécupération consultative déjà

formulées ici et là, on trouveraci-dessous, à titre de contribution au débat, un projet de réforme de l'OMC. Inspiré parles principes de la démocratiep a r t i c i p a t i v e , i l s e r a i tapplicable, moyennant certaines modif icat ions, à biend ' a u t r e s i n s t i t u t i o n s i n t e r n a t i on a l e s e t d e m a n d e , b i e nentendu, à être amélioré, précisé ;

1 - abolition du principe denomination, par marchandageset tractations secrètes entre lesÉtats, des organes dirigeantsd e l ' O M C : C o n f é r e n c eministérielle. Conseil général,Secrétariat général ;

2 - c réa t i on de deux assemblées ou collèges, l'un des représentants des Etats, l'autredes représentants de la sociétéc i v i l e . L e u r n o m b r e s e r a i téquivalent, les membres seraient élus au suffrage universel direct au niveau national,comme cela se pratique déjà,par exemple, pour les parlementaires européens. Les décisions seraient prises au coursde réunions plénières des deuxassemblées, suivant le principed'un homme une voix, avecdes variantes (majorité des 2/3ou des 3/4) pour certaines décisions ;

3 - en ce qui concerne ledirecteur général de l'OMCqui occupe une fonction stratégique tant dans les relationsentre États que dans la sélection du personnel permanentde l'OMC, on peut penserqu'il serait bon d'appliquer leprincipe de rotation des charges : le poste serait obligatoi

rement attribué, le temps d'unmandat, à un représentant del'État, le suivant reviendrait àun représentant de la sociétécivile, et ainsi de suite.

4 - o u v e r t u r e d e s c o m i t é s

d'experts de l'OMC, chargésn o t a m m e n t d e l ' i n s t r u c t i o ndes différends entre les pays, àdes membres de l a soc ié té c ivile ;

5 - enfin, comme ni l 'élection ni la démocratisation ausommet ne sont des garantiess u f fi s a n t e s , s o u m i s s i o nrégulière aux peuples, parexemple à chaque fin de cyclede négociations, des accordsconclus par l'OMC via desr é f é r e n d u m s d a n s l e s d i fférents pays-membres.

En 1942, le philosophe MaxH o r k h e i m e r é c r i v a i t d a n sEclipse de la raison que « levrai pluralisme appartient auconcept d'une société à ven i r » . P r è s d e s o i x a n t e a n s

plus tard, je crois qu'il estgrand temps que nous donnions à ce « concept » la forcedes idées et des propositionsc o n c r è t e s . A u n i v e a u i n t e rnational, national ou local cartout, indubitablement, aujourd'hui se tient. Et sans souffrird e l a m o i n d r e d o s e d enaïveté : le « vrai pluralisme», il faudra le leur impos e r . . .

P i e r r e B I T O U N

(I) Outre plusieurs entretiensPierre Bitoun nous avait déjàdonné une tribune « Plaidoyerpour une contribution financièregénéralisée » (Royaliste n° 654 du11/12/1995), i l est venu récemment aux Mercred is de la NARprésenter son dernier livre« Éloge des fonctionnaires -Pour en finir avec le grand matraquage » (Calmann-Lévy, prixfranco : 95 F) sur lequel nousr e v i e n d r o n s .

ntérieur

I s l a m

A l'heure toute proche desbilans, Danie l Vai l lants e r a s a n s a u c u n d o u t ec o n s i d é r é c o m m e l ' u ndes plus calamiteux mi

n i s t r e s d e l ' I n t é r i e u r d e l aV République. On sait que ceproche de Lionel Jospin a tournécontre lui une écrasante majoritéde policiers et qu'il ne maîtriseabsolument pas la sécuritépublique. Depuis que le pays estsoumis au plan Vigipiraterenforcé, que de tués et de blessés graves parmi les policiers etles gendarmes...A cet insupportable et sanglantparadoxe, s'ajoute l'échec probable de la représentation des musulmans français auprès des pouvoirs publics. Cette représentation nationale est là une nécessitédont on parle depuis plus d'unedouzaine d'années, et les ministres de l ' In tér ieur successi fs ses o n t e f f o r c é s d e l a m e t t r e e nœuvre - notamment Charles Pasqua et Jean-Pierre Chevènement.On croyait le projet en bonnevoie lorsque Soheib Bencheikh,mufti de Marseille, a lancé un crid ' a l a r m e d a n s L i b é r a t i o n(22/10). L'attitude-du ministèrede l'Intérieur, explique-t-il, est« irresponsable, dangereuse »car elle consiste à favoriser, lorsdes élections qui auront lieu audébut de l'année prochaine, dessectes intégristes - ce qui entreexactement dans la stratégie delégitimation des islamistes.Comment en es t -on a r r i vé là ?En choisissant le système antidémocratique du scrutin établi àpartir des lieux de culte. Pourquoi a-t-on fait cela ? « Jec r a i n s , d é c l a r e S o h e i bBencheikh, qu'on ait sacrifiél'autonomie de l'islam de Franceau profit d'obscurs intérêtsdiplomatiques, de vagues considérations électoralistes ».

il faut que Daniel Vaillants'explique.

Jacques BLANGY

Roya l i s te 783 R o y a l i s t e 7 8 3

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Euro

Pan iques

Ce qui est fascinant, dansl'affaire de l 'euro, c'estla man iè re don t les concepteurs et les propagandistes de l'opération s'ingénient à créer les condi

tions de la panique.Des sommes folles ont été dé

pensées en publicités infantilis a n t e s e t i n e f fi c a c e s .M a i n t e n a n t , t o u t e c e t t e« commun i ca t i on » es t comba ttue par les petites nouvelles quicirculent dans la grande presseécrite et télévisée. Que de reportages sur les faux euros qui seront mis en circulation à partirdu 1" janvier, en même tempsque les vrais ! On nous prévientmême que les faux-monnayeursse déba r rasse ron t de l eu r f auxbillets en francs, marks, lires,d r a c h m e s . . .

Aux faux billets, s'ajouterontles pièces qui donnent desb o u t o n s . C ' e s t L e P a r i s i e n d u26 novembre qui prévient seslecteurs que « selon une étudemédicale suédoise, l'alliage cuivre-nickel contenu dans la piècede 2 € pourrait déclencher deseczémas ». Le fait est qu'ontrouve dans les arch ives bruxello ises tou te une l i t té ra ture concernant ce risque, et que le commissaire européen Emma Bo-nino avait diffusé des photos decaiss ières aux mains crevasséespar la monnaie allergisante.

Après avoir semé ces éléments de panique, on tente derassurer le public en l'incitant àla vigilance. Bien dit ! Outre leconvertisseur franc-euro, quechacun s'équipe d'un détecteurde faux b i l le ts et de la mal let tedu petit chimiste aguerri. Onimagine l'ambiance dans lesgrands magasins quand les consommateurs procéderont, avecles caissières, aux opérations decomptage, de change et de vérifi c a t i o n . . .

A n n e t t e D E L R A N C K

Socia

M e d e f o ù e s tt a v i c t o i r e ?

Westohalie

Sur trois années d'exercie, le bilan du Medef serévèle plutôt maigre. Mais sa stratégie est peut-être beaucoup plus subtile que ses revers actuels

ne le laissent paraître.quel jeu joue le Medef légal de départ à la retraite.

A (Mouvement des entreprises de France) ? Depuis sa création, àStrasbourg, en 1998, onne peut pas dire que ses

projets aient été couronnés desuccès. Il n'a pas, contrairement à ce que laissait entendreson président, Ernest-AntoineSeillière, dès sa nomination,été capable de faire capoter laloi sur la réduction du tempsde travail hebdomadaire à 35heures. Le patronat n'a pasplus réussi dans son projet derefondation sociale, moins àcause des syndicats (dont troislui étaient acquis d'avance), oudu gouvernement (rappelonsle coup de téléphone entreLionel Jospin et Ernest-Antoine Seillière qui a permis, enoctobre 2000, de résoudre lacrise liée à la nouvelle convention d'assurance chômage),que du fait de ses querellesinternes. Enfin, tous les observateurs s'accordent à dire queson projet de privatisation dusystème de protection socialeprésenté par Denis Kessler,son éminence grise, le 20 novembre dernier, toujours àStrasbourg, ne devrait pas voirle jour de si tôt.

Pour faire court, disons quece dispositif conduirait toutd r o i t à l a d e s t r u c t i o n d usystème de protection sociale,mis en place au lendemain dela Seconde Guerre mondiale,et à la fin de sa gestionparitaire. Celle-ci ne se justifierait plus que pour la couverture des risques des accidents du travail et des maladies profes-sionnelles, et pourles retraites. Un système deretraite par point serait imposésupprimant la notion d'âge

Tout ce qu i concerne lafamille, l'assurance maladie etle recouvrement incomberait àl'État. Un système minimald'assurance maladie dépendrait désormais de l'impôt parl'extension de la Contributionsociale généralisée (CSG).Avantage immédiat pour leMedef : le gouvernementpourrai t augmenter lesprélèvements sans peser sur lecoût du travail. La rechercheet la formation des professionnels de santé serait égalementd e l a c o m p é t e n c e d ugouvernement. En revanche,la distribution des soins seraitc o n f i é e à d e « v é r i t a b l e sopérateurs de soins », placése n s i t u a t i o n d e c o n c u r r e n c e .Ceux-ci pourraient être des organismes publics, mais aussides mutuelles, des sociétés deprévoyance et « pourquoi pasdes entreprises ». Les entreprises pourraient alors choisirleur opérateur de soin, en conc e r t a t i o n a v e c l e u r s s a l a r i é s .En résumé, les nantis auraientun système de protection sociale béton. Les autres pourra ien t c rever.

Si un tel projet se réalisaitaujourd'hui, parions que c'estla France entière qui descendrait dans la rue.

Alors à quel jeu joue le Medef ? A qui perd gagne ! Si, entrois ans, il n'a pas réussi àfaire aboutir ses projets, dumoins est-il parvenu à se positionner pour l'après 2002 et àse présenter comme le parten a i r e i n c o n t o u r n a b l e d e n ' i mporte quel gouvernement. Il aégalement réussi à introduiredans le débat électoral le sujetqui fâche : la réforme dusystème français de protection

sociale. Nombre de gouvernements s'y sont cassé les dents,notamment celui d'Alain Juppé.Plus malin ou plus lâche, Jospin s'est contenté d'amorcer uneréflexion... Aujourd'hui, tousl e s c a n d i d a t s v o n t d e v o i r s eprononcer par rapport au projetd u M e d e f . C ' e s t s a m a n i è r e àlui de faire de la politique sansen faire et de s'immiscer dansle débat électoral tout en paraissant rester neutre.

11 n'ira probablement pas jusqu'à prendre position pour telou tel candidat, mais se content e r a d ' o r i e n t e r l e s d é b a t s . C efaisant, il prend date et, enattendant, distille un peu pluschaque jour, le poison néo-libéral dans la société française.Demain, nous verrons fleur i rles sondages et les études montrant que le système actuelcourt à sa perte, les éditorialistes en conclurons qu'une réforme devient indispensable, etpuisque aucun projet alternatifà celui du Medef n'existe, i lc o n v i e n d r a d e s e s e r v i r d e c eprojet comme d'un point dedépart.

Des é tudes récen tes ne confi r m e n t - e l l e s p a s q u e l esystème français de protectionsociale, tout ringard qu'il soit,e s t u n d e s m e i l l e u r s d umonde ? A contrario, une com-paraison avec le systèmea m é r i c a i n , e n t i è r e m e n tprivatisé, montre que les dépenses de santé représentaient,en 1998, 12,9 % du PIB auxÉtats-Unis contre 9,4 % enFrance.. . Une réforme de cesys tème es t , en e f fe t ,nécessaire, mais la situationn'est pas aussi catastrophiqueque le prétendent les patrons etles idéologues du tout-marchémus, non par le souci du biencommun, mais par le seul appâtdu gain et l'ambition d'être à lapointe de la modernité.

G u e r r e d e t r e n t e a n s ?

Le parallèle entre l'Afghanistan actuel etl'Allemagne des guerres de religion du XVIP

siècle doit conduire à s'interroger sur lescaractères de la paix mondiale. Quelle coexistencei n t e r n a t i o n a l e i n s t a u r e r d e m a i n e n t r e c h r é t i e n s e t

m u s u l m a n s ?

N i c o l a s P A L U M B O

- - e politologue FrançoisHeisbourg dans le premier livre, écrit à chaud,sur l'hyperterrorisme de-

„ ̂ puis le 11 septembre ( 1 )tente implicitement un

rapprochement entre l'empireaméricain de George Bush etl'empire d'Autriche de Ferdinand II de Habsbourg. Le pre-rnier voudrait extirper de sesÉtats l'islamisme comme le sec o n d l e v o u l a i t d u p r ot e s t a n t i s m e . L e c o n fl i t e n t r e1618 et 1648 oppose unEmpire, des Royaumes, desPrincipautés mais aussi des associations civiles et militaires,voire des bandes, dans desa l l i a n c e s i n s t a b l e s e tc o n t r a d i c t o i r e s . L e c o n fl i t e nf i n es t mond ia l i sé .

Nous ne sommes pas dansune guerre classique d'État àÉtat. On dit que le systèmeinterétatique est une créationdes traités de Westphalie quimirent fin à cette guerre ditede trente ans. Depuis desdécennies, on nous fatigue deschémas post-westphaliensdans lesquels l'État perdraitson exclusivité au profit den o u v e l l e s e n t i t é s i n f r a o u s upra étatiques. Le retour d'unmixte de politique et de religieux nous rappelle l'irnpor-tance de l'invention de l'État.

Entre États, des compromissont possibles qui sont interdits entre des civilisations oudes cul tures vécues commedes absolus. Contrairement àce que pensent d'aucuns, l'Étatmédinois du Prophète est entré

dès l'origine dans des alliancesavec des tr ibus juives oumême des non-croyants. Leprésident pakistanais a longuement recouru à ce précédenthistorique pour justifier devantson peuple en septembre l'attitude de son gouvernement.

L'accord se noue internationalement non plus dans le cadre d'une autorité spirituelleuniversellement reconnue,mais dans le renoncement àcelle-ci. La Papauté est excluede Westphalie qui marque lafin de la Chrétienté. L'Oummane peut pas plus servir deréférence. Pour autant des alliances temporaires et changeantes ne suffisent pas àcréer un ordre international.

Entre un ordre impérial, uneorthodoxie religieuse et l'anarchie tribale, sur quels fondements imaginer une paix durable entre musulmans et non-musulmans ? Dire que chacundoit adhérer aux même principes de démocratie ou d'égalitédes droits ne suffit pas. C'estconsidérer le problème commerésolu. La question est plutôt :comment fait-on coexister desÉtats idéologiquement outhéologiquement différents.Elle se posait déjà entre Étatscommunistes ou révolutionnaires et États capitalistes etbourgeois. On ne l'a pas traitéeau fond mais agi sur lessymptômes par la guerrefroide et l'endiguement. Peut-être en ira-t-il de même entreÉtats occidentaux et Étatsislamistes. Mais il n'y a pas de

raison pourtant que l'on nepuisse aller plus loin.

Le précédent de Westphaliet r o u v e r a i t i c i t o u t e s a v a l e u r .Car qu'a-t-on fait alors sinoncontraindre la religion pourqu'elle rentre dans les limitesde la raison, comme le développera Emmanuel Kant aprèsle philosophe et fondateur dudroit international moderne,Hugo Grotius ? Ce Hollandaisréfugié en France (à l'inversede Descartes) va passer sontemps à limer les aspérités ducalvinisme extrémiste, triomphant alors aux Pays-Bas,pour rendre les convictions religieuses compatibles avec,n o n s e u l e m e n t l e s n é c e s s i t é sde la vie en société, mais surtout celles de la paix internationale (2).

On entend souvent parler dubesoin d'un Luther de l'islam,voire d'un saint Augustin. L'islam qui connaît ses calvinistesextrémistes aurait simplementbesoin d'un Grotius. Couperles ailes d'un islam qui, en soi,s e r a i t p r é s e r v é , i n s t itutionnalisé, deviendrait religion établie, reconnue, au seind ' u n r é e l c o n c e r t m o n d i a lcomme il y eut le concerteuropéen.

L'heure n'est donc pas à lasortie de Westphalie. 11 s'agitau contraire d'y revenir et d'yfaire entrer le Turc qui n'enfaisait pas partie, qui, quelques années plus tard (le siègede Vienne suit de trente-cinqans la paix de Westphalie) futprès d'en avoir raison et quidonc ne l'a jamais intériorisé.

Y v e s L A M A R C K

( ! ) « L ' h y p e r t e r r o r i s m e : l anouvelle guerre » - Éd. OdileJacob - prix franco 131F.(2) Son traité de la paix et de laguerre, écrit à Seniis en 1635.

B R E V E S♦ J A P O N - F e u x d ' a r t i f i c e e tmanifestations de joie populaireo n t s a l u é l a n a i s s a n c e , t a n tattendue, de l'enfant du princehéritier Naruhito et de son épousela princesse Masako. Après plusde huit ans de mariage, une petiteprincesse est venue rassurer lesJaponais sur la continuité de leurdynastie. 11 faudra néanmoins uneréforme législative pour que l'enfant puisse, un Jour, monter sur letrône du chrysanthème puisque àl'heure actuelle, selon la « loi surla maison impériale », adoptée en1947, seu ls les garçons sontsuccessibles. Cette réforme, souhaitée par une grande majorité desJaponais, a également le soutiend u P r e m i e r m i n i s t r e J u n i c h i r oKoizumi, bien que ce dernier estime que rien ne presse et que« nous devons y réfléchir avecsoin, mais qu 'il est trop tôt pourt i r e r d e s c o n c l u s i o n s i m m é d i at e s » .

♦ B H O U TA N - P o u r s u i v a n t s o nplan de réforme des institutions dupetit royaume bouddhiste del'Himalaya, le roi Jigme SingyeWangchuck a inauguré les travauxd'une commission chargée derédiger une Constitution écritepour le pays, « Le Bhoutan doitévoluer avec son temps pour s'assurer que la nation surmonte nonseu lement tou tes les menaces extér ieures et in tér ieures mais cont inue de prospérer dans uneatmosphère de paix et de stabilité » a-t-il déclaré, ajoutant que lan o u v e l l e c o n s t i t u t i o n d e v r a i n c a rner les espérances et les aspirations du peuple et se calquer sur lasagesse du système existant. Endépit d'une forte inquiétude de lapopulation très attachée aux anciennes traditions, le roi poursuitavec ténac i té sa vo lon té de do te rson royaume d'institutions démocratiques indispensables à sa survie à long terme,♦ LIECHTENSTEIN - Depuisles élections de février qui ont vul ' a r r i v é e d ' u n n o u v e a ugouvernement, le projet de réforme constitutionnelle, présentépar le prince Hans-Adam II, n'estplus un sujet de conflit et devraitê t r e s o u m i s à r é f é r e n d u m . L eprince avait, dans le passé, menacéd'abdiquer si ce projet n'aboutissait pas. Il est néanmoins vraisemblable que le Prince passera lamain à son fils le prince héritierAlois, dès que les réformes seronteffectuées,

♦ M A L A I S I E - L e r o i d e l af é d é r a t i o n d e G r a n d e - M a l a i s i e ,S a l a h u d d i n A b d u l A z i z S h a h , e s tdécédé à l'âge de 75 ans. Il avaitété élu roi pour cinq ans en 1999,La Constitution du pays prévoit eneffet que le monarque est élu pourcette durée par les neuf sultansrégnant sur neuf des treize États dela Fédération, Officiellement chefdes armées et des trois branches dupouvoir, il a un rôle essentiellement honorifique bjen qu'il dispose d'un droit de veto sur toutesles décisions prises par le parlement ma la is ien .

Roya l is te 783 R o y a l i s t e 7 8 3

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co n t r e l e s f a u x -s e m b l a n t s d e l a« communication »,c o n t r e l ' a b s u r d eséparation entre la« pensée » et le

« terrain », nous appelons sansrelâche à une reprise d'un dialogueapprofondi entre les philosophes et lespolitiques, dans l'espoir qu'il feranaître les réformes authentiques et lesrévo lu t i ons e f f ec t i ves don t l a F ranceet le monde ont beso in . La ré f lex ionmenée par Corinne Lepage, ancienministre de l 'Environnement, et parFrançois Guery, doyen de la facultéde philosophie de Lyon III, répond ànos vœux : leur débat sans complaisance pose enfin les conditionsconcrètes d'une politique del'écologie.

La politiqueprécaution

Grandeur de l'homme qui se donnepour tâche d'aménager la naturepour habiter le monde. Ce quisuppose que ce monde continue àexister, et qu'il soit organisé en

vue du b ien-êt re de tous et de chacun. La

pensée écologique {oikos : habitation) estde tous les temps, comme la politique del'écologie qui fit naître les premières cités (polis).

Misère de l'écologisme, réaction fondéesur un bon sentiment (« sauver la nature ») et vite tombée dans les filets del'intrigue politicienne. En France commedans le reste du monde développé, l'idéologie écologisante a fait perdre un tempsprécieux, car la montée des périls écologiques n'a pas été retardée par les motions des Verts français et des Crimenallemands, ni par la participation de leursm i l i t a n t s a u x g o u v e r n e m e n t s« s o c i a l i s t e s » o u « s o c i a l - d é m o c r a t e s »ni à la constitution de cette « Europerose » don t on nous d isa i t merve i l l e .

Du moins, le temps de l'attente a étéconsacré à des réflexions approfondies,que de récents désastres sont hélas venuss t i m u l e r . L e s c a n d a l e d e l a « v a c h efolle », les cas nombreux et de plus enp l u s i n q u i é t a n t s d e p o l l u t i o nagroalimentaire, le réchauffement climatique et la pollution de la mer ont etauront, à long terme, des conséquencesnéfastes, voire désastreuses, sur notresanté. Ceux qui douteraient encore de lagravité de la situation, sur la planèteentière, doivent lire les pages bien documentées que Corinne Lepage et FrançoisGuery consacrent à ces catastrophes.Cette dénonciation est d'autant plus saisissante que tous deux mettent nommém e n t e n c a u s e d e s m u l t i n a t i o n a l e s e t d é

noncent explicitement la complaisance decertains États.

Le rôle des multinationales

Ainsi, la transnationale américaineMonsanto, qui a produit pendant la guerredu Viêt-nam « l'agent Orange » (un défoliant qui a intoxiqué d'innombrablespersonnes) et qui commercialise à la foisun herbicide puissant (« Round Up ») etdes organismes qui sont génétiquementmodifiés... afin de résister à ce produit.Monsanto, qui a activement soutenu BillClinton et ses amis, a obtenu l'autorisation de fabriquer les OGM et les diffusemassivement dans les pays pauvres, sansaucun souci des conséquences écologiques et sociales de cette commercialisation massive : « ta dépendance des paysans ne fait que s'accroître : au

i l ? ; . ' -

♦ Le scandale de la "vache folle" estv e n u t r i s t e m e n t i l l u s t r e r l ' a b s e n c e d ' u n epolitique de précaution.

caractère limité de leurs ressources, s 'a-joute l'obligation d'acheter semences etproduits phytosanitaires aux mêmesfirmes. En Inde, cette situation se traduitdéjà par de nombreux suicides. Certainspaysans veulent même vendre leurs organes parce qu 'ils sont incapables de rembourser leurs dettes » (44). Nous sommeslà au-delà du débat technique sur les.éventuels risques des OGM en matière desanté et d'environnement : la catastrophehumaine est avérée, ses artisans sont connus mais demeurent impunis.

En toute pertinence, Corinne Lepage etFrançois Guery étendent leur dénonciation à la pollution financière. Pour eux,pas de bonne éco-logie sans bonne économie - pas de bonne administration desd e m e u r e s d e l ' h o m m e e t d e s d o m a i n e s

(les villes, les champs, les nations, lesensembles continentaux, le monde entier)sans lois (nomoï) justes et respectées.

L'argent saleCe principe moral et politique se con

fond avec la simple logique ; l'argent quicorrompt les hommes pourrit les institutions et impose ses normes implicites, quisont en tous points contraires à la protection de l'environnement, de la santé et del a v i e d e s ê t r e s h u m a i n s . S e l o n l a d o ctrine libérale, le « bien » économique estl'objet ou le service susceptible d'unéchange profitable. Or le commerce decertains « biens » (drogue, femmes,enfants) rapporte des sommes colossalespour un investissement minime. Selon leFMI, ent re 500 et 1 500 mi l l ia rds dedollars sont blanchis chaque année dansle monde - ce qui signifie que l'argentsa le es t devenu un é lémen t mo teu r de l a

spéculation boursière, et le crime organisé une pièce maîtresse du capitalismefi n a n c i e r .

Impuissance des jugesL'énormité des sommes en jeu, les acti

vités « performantes » des organisationsde l'économie mafieuse et la discrète efficacité des réseaux de corruption provoquent un sentiment de désarroi. L'appelde Genève, lancé le 1" octobre 1996 parsept magistrats européens chargés de lalutte contre la délinquance financière a euun large écho médiatique mais les mesures préconisées par les juges (levée dusecret bancaire, disparition totale de l'exception fiscale...) n'ont pas été mises enœuvre, ou si faiblement qu'elles n'ont pasenrayé le développement de la délinquance financière. De même, les lois relatives à la santé publique et à la sécuritéalimentaire sont parfois ignorées, souventcontournées et les sanctions sont lentes àvenir. C'est que les liens entre les pouvoirs politiques et les milieux financiers,n o r m a u x o u m a fi e u x , c o n t i n u e n td'exister, f^omme la presse écrite ettélévisée du monde développé est entre

1 les mains de groupes industriels et' financiers, l'information est défaillante et

^ les campagnes de mobilisation de l'opinion publique sont difficiles à organiser.Se vérifient le caractère dérisoire descampagnes de « responsabilisation » dupublic (tri d'ordures ménagères, journéesans voiture) et les limites de l'engagement associatif, aussi sympathique et nécessaire soit-ii.

Alors, baisser les bras, en espérant êtrepersonnellement épargné par le futur« Tchernobyl alimentaire » et la pro

chaine « tempête du siècle », due audérèglement du climat ? Certes non, maisil faut avoir tous les courages, à commencer par celui, intellectuel, qui consiste àposer les principaux généraux qui permettront les engagements utiles.

La première question, philosophique etjuridique, porte sur la responsabilité entant que telle et sur ses conditions d'exerc ice dans une soc ié té décr i te comme ce l ledu risque. De la riche discussion entreFrançois Guery et Corinne Lepage, retenons ce que dit cette avocate sur le décalage qui existe actuellement entre la responsabilité morale vis-à-vis de l'humanitéet de chaque homme et la responsabilitéjuridique qui n'existe qu'à certainesconditions. Comment prouver à un jugeque telle activité (par exemple dans letransport maritime) fait peser une menacede troubles graves et irréversibles ? Lerisque est inscrit dans un ensembled'aléas, et le fait d'exiger une preuve,impossible à fournir de manière absolument convaincante, conduit à punir lescomportements fautifs lorsque les catastrophes irréversibles se sont produites.Les exemples du Torrey Canyon et deVErika ne prouvent pas qu'un pétroliervieux et rouillé va immanquablementcouler l'année prochaine dans la Manche.

Principe de précautionD'où la nécessité de poser un principe

de précaution qui « conduit à considérerque la technique nouvelle ne bénéficiepas d'une présomption d'innocuité» et àremplacer celle-ci par une « présomptionde nocivité ». Cette prudence (car le principe de précaution reprend la vertu deprudence si bien pensée par Aristote) quipermetlralt d'éviter les catastrophes nerisque pas de nous replonger dans tel outel obscurantisme anti-scientifique et anti-technicien : le concept de précaution estétroitement lié à la philosophie contemporaine des sciences qui récuse l'empirisme naïf (observer les faits pour enindu i re des l o i s f i xes e t des vé r i t ésindiscutables) pour faire valoir les approches précautionneuses de chercheurs quise méfient des théories infalsifiables etqui savent que l'observation modifie laréalité de la chose observée.

Prudence, donc, mais dans l'engagement politique. S'appuyant sur les travaux de Blandine Kriegel, les auteurs deLa politique de précaution s'interrogentlonguement et de manière très positivesur les conditions d'une renaissance del'autorité politique, bien souligné par Corinne Lepage invoquant « un besoind'autorité chargée de dire et de faireprévaloir (...) l'intérêt général» qui implique effectivement la reconstitution

d'un bon gouvernement des hommes,ayant pour souci « la recherche encommun d'un sens et d'une règle deconduite à opposer, pour l'encadrer, àune mondialisation sans règles autresque celles du profit maximisé dans ledélai le plus court » (168).

Encore faut-il que le responsablepolitique soit capable de décision, alorsqu'il est intimidé par les scientifiques ets a n s c e s s e c o n f r o n t é à l a d i c t a t u r e

médiatique de l'expert. François Guerym o n t r e q u e l ' e x p e r t n ' e s t p a s l amarionnette bavarde et poly-compétentequi apparaît régulièrement sur nos écrans,mais un homme qui parle de sa propreexpérience, de son propre passage autravers des périls. 11 y a des professeursd'économie, il n'y a pas d'experts enéconomie mais seulement des gourousqui vaticinent sur un futur qui ne relèved'aucune expertise. Cette critique fondéelibère les hommes d'État de leur angoissede ne pas en « savoir assez » pourdécider. Elle conduit Corinne Lepage àproposer une réforme de l'expertise, afinque celle-ci devienne indépendante desg r o u p e s d ' i n t é r ê t s , p u b l i q u e e tproblématique (grâce à la publication desopinions minoritaires). Ceci dans le cadred'un État de justice dont il conviendra depréciser les modalités politiques.

Quelques réserves...Le dialogue entre Corinne Lepage et

François Guery soulève maintes réserveset critiques (l'éloge immodéré de HansJonas, les attaques portées contre LucFerry, l 'ut i l isation du concept anti-politique de « gouvernance », lesi l lus ions subs is tantes sur l 'Europe deBruxelles) qui n'entament pas notreaccord sur ce que leur démarche a defondamentale : républicains, royalistes ounon, il nous faut mettre en œuvre lapolitique de l'écologie.

Sylvie FERNOY

R é f é r e n c e s

• Corinne Lepage et François Gueiy, «La politique de précaution ». PUF, 2001.prix franco : 131 F. Toutes les citations sontt i r é e s d e c e l i v r e , l e s c h i f f r e s e n t r eparenthèses renvojent aux pages de celui-ci,• Pierre Aubenque, « La Prudence chezAristote », PUF, 1993, prix franco : 77 F.• Catherine Chaiier, « L'Alliance avec lanature », Cerf, 1989, prix franco : 171F.• Marcel Conche, « Présence de la nature», PUF, 2001, prix franco : 129 F.• Luc Fer ry, « Le nouve l o rdreécologique », Grasset, 1992, prix franco :

R o y a l i s t e 7 8 3 R o y a l i s t e 7 8 3

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Mine

Copieur !

Nr OS lecteurs ne se souviennent sans doute pasdu livre que l'éminen-t i s s i m e A l a i n M i n eavait daigné consacreren 1999 à Spinoza. Us

ont raison, car la chose ne valaitpas tripette. Les plus irrespectueux de nos amis avaient remarqué qu'un professeur deBordeaux, Patrick Rodel, auteurd'une biographie du philosophe,a v a i t i n t e n t é à A l a i n M i n e u nprocès en contrefaçon. Certes,c e d e r n i e r a v a i t f a i t v a l o i rqu'ayant lu l'ouvrage du sieurRodel, il en avait été tout imprégné et que cette imprégnationintellectuelle ne pouvait êtreconfondue avec le copiage.Le tribunal de Paris en a jugéautrement. L'auteur pillé ayantrecensé trente-six emprunts allant de deux mots à vingt-septlignes, Alain Mine a été condamné pour contrefaçon et devra payer 100 000 F. de dommages et intérêts à PatrickRodel, ainsi que les dommageset intérêts que Gallimard a étéégalement condamné à verser(soit 20 000 F) aux termes ducontrat qui garantissait cet éditeur méf iant cont re les condamn a t i o n s r é s u l t a n t d e s é c r i t s d es o n a u t e u r .Il est à craindre que cette condamnation ne nuise en rien ausuccès du prochain livre de cepolygraphe, ni à l'excellente réputat ion dont l 'homme duMonde jouit dans la classedirigeante. Pétrifiés de respect,nous osons cependant poser unemisérable question : si le présiden t du conse i l de su rve i l l ancedu quo t i d ien na t i ona l deréférence est un contrefacteur,autrement dit un escroc, qui sur-ve i l le ra le surve i l lan t -chef ?Merci de nous répondre, cherEdwy Plenel, cher Jean-MarieC o l o m b a n i , a u n o m d e l atransparence.

infermement

M a r i a D A S I L V A

Faut-il supprimerles prisons ?

L'animation autour de la prison n'est guèreretombée depuis la parution de Médecin-chef à la

prison de la Santé de Véronique Vasseur enjanvier 2000, mais cela faisait bien plus

longtemps qu'une approche non réformiste, maisabolitionniste, philosophique, radicale de cette

institution n'était sortie des presses.

Ciest chose faite parI Alain Brossât, professeur de philosophie àParis V qui, s'il n'apas la prétention de

dépasser Surveiller et Punir deMichel Foucault, s'inscrit trèso ffic ie l l emen t dans ce t te l ignée pour tirer à boulets rouges sur les hauts murs, « pouren finir avec la prison ».

Pourquoi en 2001, alors quen o t r e i n t o l é r a n c e à t o u t e a tteinte au corps est si élevée,suppo r te - t - on enco re « ceslieux banals de l'enfermementpénal qui sont autant de fabriques d'une sous-humanité » ?Parce que, même si « noussommes déjà visiblementinstallés sur cette ligne def rac tu re où la p r i son es tpassée, pour nombre decontemporains, du côté del'intolérable », la prison est« une institution fondamentalement politique (...) vouéeavant tout à la mise sous séquestre des corps déviants etdangereux le po in t decondensation le plus serré decet enjeu disciplinaire ».

La prison doit « produire del'effroi (...) le caché suggérant le terrible avec davantage de force que s'il le montra i t » e t , ins t rument de« vengeance sociale », safonction est d'accueillir « lesvaincus des opérations de division à l'intérieur du peu

ple » (prolétariat /lumpenproletariat, jeunes méritants/sauvageons, etc).Par opposition aux châtimentscruels \cruor = sang) des pouvoirs souverains, la prison,ins t rument des pouvo i rsmodernes, « substitue la duréeà l'intensité, le secret à l'exhibition théâtrale, l'infini de lapeine à la douleur superlativedu supplice (...) On ne tuepas, on laisse mourir ».O u t r e l e s e n s - m ê m e d e l aprison, Alain Brossât critiquesévèrement son fonct ionnement et ses' acteurs. La prison«s'obstine à survivre», l'État« s'enfonce toujours plus lourdement dans les ornières dutout-pénitentiaire sans alternative », l'administration pénitentiaire est « engluée dansson délire de persécution », etinstaure « un régime de pureet simple gestion disciplinaire,technicienne et minimaliste dela masse vivante, tel que jamais l'institution n'a à se soucier de l'intégrité des personnes humaines », les organisations professionnelles sont des« b u n k e r s » e t l e u r t o n« obsessionnellement sécurita i re ».

L'ouvrage est passionnantmais l'auteur y va un peu fort.Surtout, il termine mal, couvrant une certaine béance pardes principes peut-être fausse

ment exigeants. En effet, esquivant largement les quest i o n s d e d é l i n q u a n c e e td'insécurité, il délivre « cettedouce prescription du citoyenéclairé et du philosophe : vivez de façon à ne pas avoirgrand chose du voleur et vousvous verrez soulagés d'uneforte part de vos hantises sécuritaires ». Cette prescriptionquelque peu légère, et mêmeinjonction à la résignation,tient au fait que le rôle desintellectuels serait de penser« c o m m e B e n j a m i n o uF o u c a u l t , d u c ô t é d e sperdants, des sans voix et desvaincus de l'histoire », et quela question de l'alternative à laprison « vise à faire occuperau citoyen la place ordinairede l'État, à lui faire adoptersur la société le regard del'autorité, de la police, lepoint de vue inconditionnel del ' o r d r e » .

Et alors, a-t-on envie derépondre, en quoi le citoyenserait-il dispensé de réfléchircomme l'État, c'est-à-dire aubien commun ? Et si la prisonsemble à ce point consubstan-tielle à l'État, et s'il faut cependant « en finir avec la prison », quelles conclusions surl'État sommes-nous invités àt i r e r ? . . .

J e a n - M i c h e l D E J E N N E

Alain Brossât, « Pour en finiravec la prison », La Fabriqueédi t ions , oc tobre 2001, pr ixfranco : 85 F.

P o u r a c h e t e r t o u sv o s l i v r e s f a i t e s

a p p e l à n o t r es e r v i c e l i b r a i r i e .

RoyaSiste 7838

dees

Religion etpo l i t i que

es événements ont ravivé une querelle ancienne, quitraverse l'histoire de la philosophie politique depuis leXVP siècle. Nous l'avons évoquée ici-même à proposde l'étonnant petit livre du théologien américainWilliam Cavanaugh (1), qui mettait à mal les idéestoutes faites sur la naissance de l'État séculier et

l'apparition de la laïcité. Mais le phénomène islamiste renforce l'interrogation sur les rapports du religieux et dupolitique. Faut-il se résigner à l'idée que « dans le cas del'islam, l'espace du politique ne peut être que celui del'acceptation de la loi divine » ? C'est l'avis de JacquesRollet, dont la double compétence enscience politique et en théologie renforcela crédibilité, et qui conclut à « l'aspiration à la fusion, à la dédifférenciation dessphères ». Le point de vue religieux seraitd'autant plus déterminant qu'il commanderait l'impossibilité à concevoir une sorte dedomaine intermédiaire dévolu à la libertéhumaine. « Les régimes arabes étant à lafois religieux et politiques sont enfermésdans un monisme qui induit un ordre consensuel dans lequel le conflit est a priorirefusé. » Ce serait vrai dans tous les cas defigures, même lorsque les régimes recouvrent une certaine forme de laïcité.

On peut répondre à Jacques Rollet queles choses évoluent, notamment dans lesmentalités de toute population immigréedans des pays comme la France, et mêmedans des pays musulmans, qui ont vécul'absurdité du modèle islamiste commel'Iran. Mais il répond à cela que la plupartdes politologues-islamologues sont dans l'incapacité d'intégrer « l'analyse proprement théologique dans leur étudepolitologique ; ce qui est pourtant capital quand on étudiela manière dont une religion induit les attitudes et lescomportements politiques ». La comparaison avec le christianisme lui semble éclairante, parce qu'en dépit de ladifficulté du catholicisme à intégrer au XIX' siècle la nouvelle donnée libérale, l'évolution était rendue possible par« une claire distinction de la transcendance divine d'avecl'ordre de la création ».

Pourtant, l'histoire de la pensée politique occidentale montre une difficulté certaine à concilier le domaine autonomede la politique avec les registres du théologique. DèsMachiavel, il est patent que la séparation des domaines ne sefait pas sans violence et rejet. Pour Hobbes la subordinationdu religieux au politique est une nécessité. La position deSpinoza est à peu près équivalente et si Locke est plussensible à la liberté des hommes et à la tolérance en matièrereligieuse, il exclut les catholiques et les athées de cettetolérance. En poursuivant son parcours philosophico-politique, Jacques Rollet est forcément confronté auxambiguïtés et aux apories de la Révolution française.Comme Blandine Kriegel, il marque bien la différence avecla révolution américaine, plus proche de Locke dans soninspiration. C'est la volonté générale qui décide de la loi,dans le cas français, et cette dernière s'impose contre le droitnaturel des individus. D'où la phrase plutôt terrifiante deRobespierre : « Il n 'appartient à aucune puissance de laterre d'expliquer des principes, de s'élever au-dessus d'unenation et de censurer ses volontés. »

N'y a-t-il pas là un des motifs de l'opposition de l'Églisecatholique à la Révolution et à ses conséquences ? La constitution civile du clergé n'est pas sans raison le premier sujet derupture avec le nouveau régime. Par ailleurs, l'antichristia-nisme qui apparaîtra dans la phase suivante ne fera qu'ajouterà une brouille qui répercutera ses effets durant tout le dix-neuvième siècle. C'est peut-être sur ce point que nous exprimerions un désaccord de nature historique avec JacquesRollet. 11 nous semble notamment que sa lecture du fameuxSyllabus de Pie IX est trop expéditive, le texte étant d'unelecture beaucoup plus difficile qu'on ne le dit d'ordinaire, lesordres de préoccupation se chevauchant et les considérationsdoctrinales se mélangeant avec l'appréciation de situationspolitiques contingentes. Quoiqu'il en soit, il est vrai que leconcile Vatican II reformulera entièrement les problématiqueset qu'il aura été précédé d'efforts de conceptualisation théolo-gique et politique qui ont réintroduit un certain libéralismedans un climat qui n'était pas le sien à l'origine. JacquesRollet insiste à juste titre sur la pensée de Jacques Maritain,du moins la pensée du dernier Maritain, celui qui a intégré

l'expérience américaine et tenté bien avantJohn Rawls de définir-une charte démocratique dans laquelle les différentes famillesspirituelles ou intellectuelles pourraient seretrouver « par recoupement ».

Néanmoins l'effort de Maritain n'est pasentièrement concluant pour beaucoup de libéraux qui ne sont pas prêts à se reconnaîtredans une sorte de rationalisation morale dela démocratie. 11 y a là un malentendu quioblige à mesurer a posteriori la gravité duschisme qui s'est accompli depuis Machiavel et qui est beaucoup plus difficile à surmonter qu'on ne croit. C'est le grand méritede Jacques Rollet d'assumer le schisme etde montrer comment les contradictions qu'ilrecèle peuvent être fécondes et comment lapensée chrétienne peut apporter à la modernité des éclairages que la tradition libéralene lui fournit pas. Lui aussi serait assezd'accord avec René Girard pour souligner àquel point la pensée politique méconnaît la

question du mal. Avec le Kant du Mal radical et avec leRicœur de Finitude et Culpabilité, Rollet insiste sur la faillibi-lité humaine liée à la subordination de la loi morale à l'amourde soi.

Ce retour à une pensée chrétienne du politique ne clarifiepss forcément la question de la place du religieux dans lasociété, question éminemment complexe qui oblige un MarcelGauchet à repréciser de livre en livre, ce qu'il entend par« sortie du religieux » et qui est beaucoup moins évident quecertains l'imaginent. D'où la position d'un Pierre Manent quiest à contre-courant de l'effacement du pouvoir spirituel.Jacques Rollet se définit par rapport à Gauchet et à Manent enrécusant la disparition du religieux dans l'espace public et toutautant son affirmation autoritaire. 11 me semble qu'il estbeaucoup plus proche de Pierre Manent qu'il consent à lereconnaître, parce que son recours à l'apport spirituel duchristianisme repose pour le moins sur une visibilité socialede celui-ci et sur une capacité à témoigner publiquement dansle débat contemporain de ses propres convictions. Sinon comment confier quelque efficacité à la dimension symboliquequ'il revendique ? Sans doute craint-il qu'un retour du religieux ne coïncide trop bien avec « la revanche de Dieu » donts'emparent les fondamentalistes pour refuser la démocratie.Encore faudrait-il préciser le statut de la visibilité du religieuxdans la cité moderne. Un sujet qui n'est pas sans rejoindre lespréoccupations d'un Régis Debray. ^Jacques Rollet, « Religion et politique ; le christianisme, l'Islam,la démocratie », coll. Collège de philosophie, Grasset, prixf ranco : 131F.(\)Cf. Royaliste n° 775.

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A u s o m m a i r e d u n ° 4 3

♦ Témoignage sur Françoisd'Orléans

♦ Éditorial : Lilium et tripi-cum repens

♦ Des Royalistes dans laRésistance

♦ Les trois lys (étude surles Lys rouge) :♦ Le Lys rouge de Jean-MarcBourquin♦ Le Lys rouge de ChristianM a s s o n

♦ « Les » Lys rouge de laNouvelle Action Royaliste

♦ Hommage au défuntcomte de Paris

♦ Revue de presse : Marocet Jordanie, la transmission♦ Bulgarie : document♦ Les monarchistes italiens

♦ La Corse :♦ Document : une affiche desa n n é e s 7 0

♦ Débat : Les thèses de laN.A.R. et la réponse d'un milit a n t a u t o n o m i s t e

BON DE COMMANDE

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Adresse :

commande le n° 49 du LysRouge et verse pour cela lasomme de 35 F (à l'ordre deRoyaliste)

Vu lgo.net

Hebdomadaire culturel et philosophique tchèquesur internet, Vulgo.net a été créé il y a à peine un

an et son succès est grandissant. Notre amiMartin Hybler, qui en est un des animateurs,nous présente ici l'esprit de cette entreprise.

Vuigo.net n'est tributaired'aucune o r i en ta t i on ,d'aucun courant, d'aucunmouvement , d 'aucuneécole et d'aucune con

ception (y compris celle àvenir) ; ce qui lui manque c'est ledrapeau.

Vulgo.net repose sur la penséeindividuelle, sinon originelle aumoins critique. Une pensée quin'applique rien qui ne développerien et qui ne veut rien (si possible même pas des honoraires).

En bref, nous ne voulons niexpliquer le monde (quelle horreur ! Qu'est-ce qu'il y auraitaprès ?) ni le changer (nous ser ions d 'abord ob l i gés del'expliquer).

Ce n'est certes qu'une attitudeidéale et si nous l'avions appliquée avec rigueur, nous aurionsfini bientôt asphyxiés, voire nousn ' a u r i o n s m ê m e p a s p ucommencer. C'est pourquoi nousacceptons tout le monde : lesmonarchistes et les maoïstes, lesmachistes aussi bien que lesféministes, même les académiciens et \'establishment - à condition qu'ils soient capables de regarder leur chapelle avec un certain recul : de temps en temps,on en trouve ! C'est pourquoi ilest indispensable que Vulgo.netsoit international, parce que labêtise, elle l'est aussi.

C'est sur cette base simple qu'ily a un an, nous avons créé, avecquelques amis réunis au sein del'association Europen Dumplink,le site internet tchèque Vulgo.netsous la forme d'un hebdomadaireculturel et philosophique. Ce quinous rassemblait aussi, c'était lesen t imen t d 'écœuremen t devan tle niveau déplorable et la dégradation constante de la presse

post-communiste en Tchéquie.Nous avons espéré en ouvrantcette plate-forme, indépendanteet tout à fait libre des contrainteséconomiques, aux journalistes,universitaires, écrivains, de ranimer la vie intellectuelle du pays.Pari réussi puisque notre site,après un an de fonctionnement,approche 60 000 visiteurs et lafréquence de connexions ena u g m e n t a t i o n c o n s t a n t e(actuellement autour de 500-1000 par jour) nous a obligés àplusieurs reprises à changer leserveur-hôte pour en agrandir lacapacité d'accueil. Les rangs desa u t e u r s e t d e s a m i s s e s o n tétoffés.

Depuis le mois de septembre2001, nous avons abordé le voletinternational de notre projet. Descorrespondants indépendantsrédigent les pages de notre siteen italien et en espagnol. Lespages en allemand et en françaissont aussi ouvertes mais au stadedu balbutiement (repérage des erreurs techniques et le contenu estpour l'instant bien maigre).

Le lecteur du Royaliste y trouvera un choix des textes du bimensuel et de la revue Cité. Pouraccéder aux pages en français, ilsuffit de cliquer sur le drapeaucorrespondant en haut de l'écran.L'adresse complète du site esthttp://w\vw.vulgo.net.

Si vous souhaitez devenir notrecollaborateur, vous pouvezad resse r vo t re con t r i bu t i on(article, annonce de spectacles,d'expositions, notes de lecture,etc.) soit à la revue ou encore àm o n a d r e s s e c o u r r i e l :[email protected].

Crime parfait

M a r t i n H Y B L E R

An tho log ie

SI il est un thème revenantI de manière récurrente' dans la mythologie du ré

cit policier, c'est bien celui du crime parfait.N o m b r e u x é t a n t l e s

auteurs à l'avoir traité pour leplus grand divertissement desa m a t e u r s .

Une anthologie des textes lesplus inventifs du genre s'imposait donc. C'est chose faite et onaurait tort de bouder son plaisirtant les auteurs réunis par Rol a n d L e c o u r b e f o n t p r e u v ed'imagination.

Placé sous le patronage deThomas de Quincey, l'ouvrageoffre un choix de nouvelles réparties sous un vocable les introduisant par style. On y trouve lesmaîtres du genre américain ouanglais ; Edmund Crispin, JohnDickson Carr, Edward D. Hoch,Pat Me Gerr, Roald Dahl ou JackRitchie pour ne citer que les plusnotables. Selon les textes la morale est préservée ou hardimentmalmenée. L'humour, le bongoût, le cynisme dans l'art d'assassiner artistiquement son prochain sont de mise. L'inventivité,l'astuce pour passer au traversdes mailles de la justice deshommes ne peut être que naturellement reconnue et appréciée àsa juste valeur. L'ensemble suscitant la sourde adhésion dul e c t e u r .

Écrite à l'âge d'or du récit policier classique, ces nouvelles apportent la preuve, si besoin enétait encore, que ce genre littéraire trouve sa place parmi 1erfleurons de cet art.

Le lecteur éclairé ou néophytetrouvera en fin de volume uropportun dictionnaire des auteunlui permettant de resituer chacurdans la riche histoire du crimesur papier.

B r u n o D I A 2« Trente recettes pour crime:parfaits ». Une anthologie de Roland Lacourbe - L'Atalante, pri;f r a n c o ; 1 3 9 F.

A nos correspondants étrangersLe "passage à l'euro" était sensé rendre plus aisées lestransactions entre les ressortissants européens. Il n'en estrien. Bien au contraire, les taxes exorbitantes qui sontperçues pour encaisser les chèques domiciliés sur desbanques hors de France (plus de 100 F par chèque !) nousconduisent à ne plus pouvoir accepter ce mode derèglement.Nous demandons donc à nos correspondants à l'étrangerd'effectuer leurs règlements soit par virement postalinternational sur notre compte chèque postal (CCP)"Royaliste" 18.104.06.N Paris, soit par mandat international adressé à "Royaliste" 17, rue des Petits-Champs, 75001Par is .

IMERCRF.DI .S DE LA NAR

C O N G R E S

Le Congrès de la NAR aural i e u l e d i m a n c h e 1 4 a v r i l .Rappelons que le Congrès rassemble les membres du Comité directeur, ceux du Conseil national ainsi que descadres du mouvement dés ignés par le Conseil national,'es tfièmes retenus pour lecongrès de cette année sont

a b o n n e m e n t - e s s a i

Royaliste ne doit compterque sur ses lecteurs pour toucher de nouvelles personnes.Pour cela, quel meilleur ambassadeur que le journal lui-même ? Ouvrez donc votrecarnet d'adresses et envoyez-nous les noms et coordonnéesde ceux de vos amis susceptibles d'être intéressés parRoyaliste. Nous leur ferons unabonnement d'essai pendanttrois mois. Prix de chaqueabonnement : 25 F.

« Le système d'enseignem e n t : Q u e l l e s o r i e n t a t i o n schoisir : » et « Réflexion surla fonction présidentielle ».Tous les adhérents sont invités à participer aux travauxpréparatoires du Congrès et enparticulier à ceux de la Commission Nationale du Projetqui se réunira le 13 avril.

F A N I O N S

Nous proposons des petitsfanions de table aux armes deFrance. En rayonne de format12 X 14 cm, surmonté d'unelance en plastique, sur unsocle en bois verni de 50 mm.hau teu r to ta le 28 cm. P r i xfranco : 50 F.

Le même modèle existe aussiavec les armes du dauphin :50 F franco également.

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KRACH OEIEORO

Le livre de SylvieF e r n o y e t B e r t r a n d

R e n o u v i n e s t e nv e n t e à n o t r e

s e r v i c e l i b r a i r i e a upr i x de 90 F

( f r a n c o )

Communiquer avec la N.A.R.y Adresse postale : 17, rue des Petits-Champs,

75001 Paris

■/ Adresse électronique : [email protected]

y Site internet : http://www.multimania.com/royaliste

^ Téléphone : 01.42.97.42.57

V Télécopie/répondeur : 01.42.96.05.53

y Règlements à l'ordre de :Royaliste - CCP 18.104.06.N Paris

♦ A Paris, chaque mercredi, nousaccueillons nos sympathisants dansnos locaux (17, rue des Pet i ts-Champs, Paris 1". 4' étage) pour undébat avec un conférencier, personnalité politique ou écrivain.♦ La conférence commence à 20heures très préeises (accueil à partir de 19 h 45 - Entrée libre, uneparticipation aux frais de 10 F estdemandée), elle s'achève à 22 h.l'ne carte A'"abonné des mercredis"annuelle (50 F) permet d'assistergratuitement à toutes les conférences et de recevoir chaque mois lep rog ramme à dom ic i l e .♦ Après la conférence, à 22heures, un repas amical est servipour ceux qui désirent poursuivreles discussions (participation auxfrais du dîner 30 F).

♦ Mercredi 12 décembre :Comment un modeste employé de banque, père de cinqenfants, patriote de tendanceroyaliste mais pas vraimentm i l i t a n t , e s t - i l d e v e n u« L'agent secret n°l de laFrance libre ? ». C'est ce queGuy PERRIER, historien dela Résistance, nous fera découvrir en retraçant l'histoirede Gilbert Renault, dit« Rémy », chef du réseau derenseignement La ConfrérieNotre Dame, organisé dès octob re 1940 en t e r r i t o i r eoccupé. L'histoire de cethomme intelligent et courageux ne se termine pas à laLibération puisque Rémyrompt avec le général deGaulle au scandale de beaucoup de ses camarades, lorsqu'il réclame que le maréchalPétain soit amnistié. La question posée par Rémy ressurgitaujourd'hui à propos d'autres

tragédies collectives, au sortird'autres guerres civile. La réponse est toujours aussi diffici le à donner.

• M e r c r e d i 1 9 d é c e m b r e :Comme que lques au t resjournalistes, B. La Richardaiss 'es t e f fo rcé de fa i re connaî t re(dans le n° 780 de Royaliste)Stanko CEROVIC, Yougosl a v e d e P a r i s , n a t i f d uMonténégro, dont le livre récemment publié n'a pas eu leshonneurs des directeurs parisiens de l'opinion publique.C'est que cet écrivain est.comme Bernanos, irrécupérable par la mode « humaniste »comme par la réaction « politiquement incorrecte ». Notreinvité est de ceux qui, à lamanière de Bernanos, dénoncent toutes les impostures :celle du moralisme qui aboutitaux guerres humanitaires, dudémocratisme qui engendreun despotisme doux, de ladéfense de l'Occident quio u v r e s u r l e s a b î m e snih i l is tes. « Comment sor t i rdes gr i ffes des humanistes ? » De Belgrade à Kaboul,de Paris à Washington, laq u e s t i o n s e p o s etragiquement. Nous tenteronsd'envisager un commencement de réponse.

P o u r r e c e v o i r_ réguHèrcméiit le

programmé des<< meréri^is »: éf avoir:;l'accéjs grétûit à touf|M

les rënnions,^ prenez unè"alrte d!abonné" (50 F

P H O T O S

Des photos de la Famille de France sont disponibles. Sursimple demande de votre part (tél. : 01.42.97.42.57) nous vousenverrons le petit catalogue illustré qui vous permettra dechoisir et de les commander.

Demande de documentationintéressé, si vous désirez avoir plus de renseigne-

Diihlmnc rPm activités, les livres et brochures que nouspublions, remplissez le bulletin ci-dessous sans engagement de votre

Nom :Prénom :

Date de naissance ; Profession :Adresse :

engagement de ma part, une documentation sur lemouvement royaliste. Bulletin à renvoyer à ;« Royaliste », 17, rue des Petits-Champs, 75001 Paris

R o y a l i s t e 7 8 31 0 11

R o y r t l i s t e 7 8 3

Page 7: Sida Un · 2019-08-29 · Sida était, le I C' décembre, la quatorzième jour née mondiale du sida. Elle a été marquée par des discours pétris de bonnes intentions. C'est ainsi

Éditoria

F o r m u l o n snos projets !

Nous avons la chance, nousautres Français, d'être citoyens d'une nation puis

sante et riche qui est seulementc o n f r o n t é e à l a f a i l l i t e d e s e sdirigeants et à une crise économiq u e p o i n t t r o p d i f f i c i l e àsurmonter. Nos difficultés, aussisérieuses soient-elles, ne sauraient nous dispenser de l'aideque nous devons aux amis de laFrance, pays ruinés et peuplesmartyrisés. Dans l'espoir d'unerenaissance commune, j'ai rappelé (1) les principales conditionsde celle-ci, que l'on redécouvreaujourd'hui, à Sofia et à Kaboul,et depuis peu à Paris, mais demanière encore trop partielle.

Tout le monde a compris, maisbien tard, que le salut public étaitune question politique, à laquelleil fallait répondre politiquementpar le choix primordial d'un chefd'Etat ou de gouvernement capable d'unifier un peuple dans laliberté et d'arbitrer en vue de lajustice.

Cette condit ion nécessaire n'estpas suffisante. Il n'est pas bonque celui qui incame le pouvoirsouverain soit laissé seul, au nomdes fictions paresseuses du rois a u v e u r o u d e l ' h o m m eprovidentiel. La lutte des forcespolitiques est le concours indispensable à toute œuvre de redressement ; elle suppose l'existencede citoyens organisés en diverspartis et mouvements politiques.

Aussi banale soit-elle, cette certitude est très mal accueillie dansles milieux dirigeants. Élevésdans la crainte des grandes formations idéologiques, habitués àmépriser les programmes et lesprojets, les maîtres actuels du jeupoliticien préfèrent l'investissement financier au rassemblement

mil i tant, la communicat ionmédiatique aux campagnes deréunions publiques, les machinesélectorales aux partis d'idées.

Ces préjugés ont conduit lesformations classiques de droite etde gauche au même désastre. Ausein de l'oligarchie, les chefs detendance en sont réduits à rivaliser dans le « travail d'image »,tandis que les électeurs sont invités à choisir sur critères psychopathologiques. Et les program

mes des équipes rivales se résument à la récupération de métauxidéologiques usés et bricolés(huisme, jospinisme, chira-quisme), afin de conforter la domination d'un appareil (RPR,PS) et de ses groupes de soutien,qu'il s'agisse du Medef, de laFNSEA ou de la CFDT. La v iecivique s'en trouve considérablement appauvrie, ce qui facilite leprocessus de sortie de la démocratie auquel nous sommes deplus en plus nettement exposés.

Ces perversités et ces dérives nesauraient décourager les citoyensfrançais. Abandonnées par lesmilitants, les vieilles structurespartisanes sont en train des'effondrer. La vacuité totale des« discours » chiraquien et jospi

niste sera bientôt confirmée. Lemouvement en faveur de Jean-Pierre Chevènement, qui se renforce de semaine en semaine,dépasse les frontières de la droiteet de la gauche pour rassemblerl e s m e m b r e s d e f a m i l l e spolitiques. Celles-ci peuvent-elles donner naissance à des formations politiques nouvelles ?C'est pour moi une convictionancienne, que les prochaines batailles politiques devraientrenforcer. Si l'oligarchie politicienne est défaite, les partis politiques déjà moribonds (RPR, PS)et leurs satellites (PC, UDF,Verts) n'y survivront pas. Aprèsune très longue attente, il deviendra possible de recomposer la viepolitique, en recréant des formations politiques à partir de nosgrandes familles de pensée. Al'intérieur d'une tradition res-pu-blicaine solidement rétablie, unenouvelle génération militantepeut à strictement parler « tirerparti » des doctrines libérale,marxiste, sociale-chrétienne, etse nourrir de l'esprit du gaullismecomme de la mémoire du socialisme français. C'est à partir deces pensées maintenues vivantespar quelques-uns (je pense augaullisme authentique deFrédéric Grendel et de Philippede Saint-Robert) ou profondément rénovées qu'il sera possibled'articuler les programmes et lesprojets dont la France a besoin.

Je ne peux en dire plus, car il yaurait risque d'ingérence... Maisnous autres royalistes, qui accueillons dans ces colonnes etdans nos réunions toutes les tendances démocratiques, sommespersuadés que l'esprit politiquefrançais peut très vite retrouverson expression concrète,militante, pour le bien de notrepays et pour celui des nationsamies, partout dans le monde.

Ber t rand RENOUVIN

(I) c/ dans Royaliste les éditoriaux desnuméros 779, 781, 782.

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