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39 Bull. Soc. Pharm. Bordeaux, 2002, 141, 39-52 SÉPARATION DES NOUVEAUX ANTIDÉPRESSEURS PAR CLHP EN PHASE INVERSE ET ÉLECTROPHORÈSE CAPILLAIRE DE ZONE (*) L. LABAT, P. DALLET, E. KUMMER, J.P. DUBOST (**) Nous avons utilisé deux techniques analytiques pour étudier la séparation des antidépresseurs de nouvelle génération, la chromatographie liquide haute performance en phase inverse (CLHP) et l’électrophorèse capillaire de zone (ECZ). Les molécules sont au nombre de douze : huit principes actifs de différentes spécialités pharmaceutiques (citalopram, fluoxétine, fluvoxamine, paroxétine, sertraline, milnacipran, venlafaxine, mirtazapine) et quatre métabolites pharmacologiquement actifs (déméthylcitalopram, déméthylmirtazapine, déméthylvenlafaxine et norfluoxétine). Chacune des techniques est couplée à un détecteur à barrette de diodes. En CLHP, l’analyse est réalisée en mode isocratique sur deux colonnes de nouvelle génération (Satisfaction ® RP 18 AB et Satisfaction ® C8+, 250 mm x 4,6 mm, 5 µm). En ECZ, la séparation est obtenue sur un capillaire en silice fondue (600 mm x 75 µm) en appliquant une tension de 15 kV à chaque extrémité. L’étude de l’influence de différents paramètres (composition de la phase mobile en CLHP ou du tampon de migration en ECZ, température) sur la séparation a permis d’optimiser les conditions (*) Manuscrit reçu le 08 avril 2002. (**) Laboratoire de Chimie Analytique, UFR des Sciences Pharmaceutiques, Université Victor Segalen Bordeaux 2, 146, rue Léo Saignat, 33076 Bordeaux cedex. [email protected], [email protected], [email protected], [email protected] bordeaux2.fr

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Bull. Soc. Pharm. Bordeaux, 2002, 141, 39-52

SÉPARATION DES NOUVEAUXANTIDÉPRESSEURS PAR CLHP EN PHASE

INVERSE ET ÉLECTROPHORÈSE CAPILLAIREDE ZONE (*)

L. LABAT, P. DALLET, E. KUMMER, J.P. DUBOST ( * *)

Nous avons utilisé deux techniques analytiques pour étudierla séparation des antidépresseurs de nouvelle génération, lachromatographie liquide haute performance en phase inverse(CLHP) et l’électrophorèse capillaire de zone (ECZ). Lesmolécules sont au nombre de douze : huit principes actifs dedifférentes spécialités pharmaceutiques (citalopram, fluoxétine,fluvoxamine, paroxétine, sertraline, milnacipran, venlafaxine,mirtazapine) et quatre métabolites pharmacologiquement actifs(déméthylcitalopram, déméthylmirtazapine, déméthylvenlafaxine etnorfluoxétine). Chacune des techniques est couplée à un détecteurà barrette de diodes.

En CLHP, l’analyse est réalisée en mode isocratique surdeux colonnes de nouvelle génération (Satisfaction® RP 18 AB etSatisfaction® C8+, 250 mm x 4,6 mm, 5 µm). En ECZ, laséparation est obtenue sur un capillaire en silice fondue (600 mmx 75 µm) en appliquant une tension de 15 kV à chaque extrémité.L’étude de l’influence de différents paramètres (composition de laphase mobile en CLHP ou du tampon de migration en ECZ,température) sur la séparation a permis d’optimiser les conditions

(*) Manuscrit reçu le 08 avril 2002.

(**) Laboratoire de Chimie Analytique, UFR des Sciences Pharmaceutiques,Université Victor Segalen Bordeaux 2, 146, rue Léo Saignat, 33076 Bordeauxcedex. l . labat@chru-l i l le . f r , Phi l [email protected],[email protected], [email protected]

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d’analyse pour les deux méthodes. Une excellente séparation desdouze molécules en CLHP est obtenue en 20 minutes sur lacolonne Satisfaction® RP 18 AB à 45 °C avec une phase mobilecomposée d’un mélange de KH2PO4 25 mM + TEA 10 mM(pH 4,8) et d’acétonitrile (65 : 35, v/v). En ECZ, la séparation estréalisée pour une durée d’analyse comparable, avec un tampon demigration composé de tampon borate 42 mM (pH 9,5) et deméthanol (80 : 20, v/v).

Les résultats obtenus montrent que les deux techniquespeuvent être utilisées pour l’étude de la séparation de moléculesappartenant à la famille des antidépresseurs de nouvellegénération.

INTRODUCTION

Depuis une dizaine d’années, une nouvelle générationd’antidépresseurs est utilisée dans le traitement des troubles dépressifs.Doués de propriétés pharmacologiques différentes des composés utilisésauparavant (tricycliques, IMAO ou lithium), ils sont aussi généralementmieux tolérés et possèdent moins d’effets secondaires [1,2].Chronologiquement, la première classe thérapeutique apparue sur le marchéest représentée par les inhibiteurs spécifiques de la recapture de lasérotonine ou ISRS. Cinq molécules en font partie, le citalopram, lafluoxétine, la fluvoxamine, la paroxétine et la sertraline. Une deuxièmeclasse comprend le milnacipran et la venlafaxine. Ce sont des inhibiteurs dela recapture de la sérotonine et de la noradrénaline, regroupés sousl’appellation IRSNa. Le dernier antidépresseur de nouvelle générationcommercialisé est la mirtazapine. Son profil pharmacologique se singularisede celui des ISRS ou des IRSNa. C’est un antidépresseur noradrénergique etsérotoninergique spécifique, seul représentant à l’heure actuelle de la classedes NaSSA.

De nombreuses méthodes d’analyse ont été développées pour ledosage de ces composés dans certaines spécialités pharmaceutiques ou dansles milieux biologiques. À côté de la spectrophotométrie UV [3] ou de lachromatographie en phase gazeuse (CPG) [4], la chromatographie liquidehaute performance (CLHP) en phase inverse demeure la méthode de choixdans la majorité des cas [5-7]. La phase mobile est le plus souvent constituéed’un mélange d’acétonitrile et d’un tampon phosphate contenant parfois dela triéthylamine (TEA) pour améliorer la symétrie des pics et minimiser les

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interactions silanophiles avec la phase stationnaire [8-11]. L’emploi decolonnes de nouvelle génération à base de silice B ultra pure et moins acidedonne aussi de meilleurs résultats [12]. Parmi les nouvelles techniquesanalytiques, l’électrophorèse capillaire (EC) a été quelquefois utilisée [13].

Cependant, dans la majorité des cas, particulièrement en EC, lesméthodes décrites ne permettent pas la détermination simultanée del’ensemble des antidépresseurs. Il nous a donc paru intéressant dedévelopper des méthodes de séparation de l’ensemble de ces moléculesfaisant appel à deux techniques séparatives différentes : la CLHP [14] etl’électrophorèse capillaire de zone (ECZ), en étudiant l’influence de diversparamètres sur les résultats obtenus. Ainsi, de telles méthodes pourraientêtre utilisées dans le cadre de recherches larges de médicaments dans ledomaine de la toxicologie.

MATÉRIEL ET MÉTHODES

Produits chimiques

Tous les produits chimiques et solvants sont de qualité analytique.L’acétonitrile (ACN) provient de chez Baker (Deventer, Hollande). Ledihydrogénophosphate de potassium (KH2PO4) et l’acide phosphorique(H3PO4) de chez Merck (Darmstadt, Allemagne), la TEA de chez Lancaster(Morecambe, Grande-Bretagne) et le tétraborate de sodium (Na2B4O7, 10H2O) de chez Riedel-de Haën (Seelze, Allemagne).

Le citalopram (CIT) (HBr) et le déméthylcitalopram (DMCIT) ontété gracieusement fournis par Lundbeck A/S (Copenhague, Danemark), lafluvoxamine (FLUV) (maléate) par Solvay Pharma (Suresnes, France), lemilnacipran (MIL) (HCl) par Pierre Fabre (Castres, France), la mirtazapine(MIR) et la déméthylmirtazapine (DMMIR) par Organon (Oss, Hollande), laparoxétine (PAR) (HCl) par Smith Kline Beecham (Nanterre, France), lasertraline (SER) (HCl) par Pfizer (Amboise, France), la venlafaxine (VEN)(HCl) et la déméthylvenlafaxine (DMVEN) (HCl) par Lederle (Pearl River,N.Y., États-Unis). La fluoxétine (FLUO) (HCl) et la norfluoxétine(NFLUO) (HCl) proviennent de chez Sigma (Saint Quentin Fallavier,France). L’étalon interne (EI) F2570 nous a été gracieusement fourni parPierre Fabre (Castres, France). Les structures chimiques des moléculesétudiées sont présentées dans la Figure 1.

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O

F

NCH3

CH3

NC

O

F

NHCH3

NC

O CH

NHCH3

F3C

O CH

NCH3

F3C

CH3

NHCH3

ClCl

O

O

NH

F

O

NO

NH2

OCH3

F3C

NH2ON

CH3

CH3

N N

NCH3

N N

NH

N(CH3)2

OCH3

OH

N(CH3)2

OH

OH

MIL

CIT DMCIT FLUO

NFLUO SER PAR

MIR

DMMIRDMVENVEN

FLUV

Fig. 1 : Structure chimique des molécules étudiées.

Des solutions mères à 1 mg/ml de chaque antidépresseur et del’étalon interne sont préparées dans du méthanol et conservées à -20 °C.Parallèlement, une solution mère contenant l’ensemble des molécules à desconcentrations respectives de 1 mg/ml est préparée dans du méthanol. Lessolutions de travail (20 µg/ml pour chaque molécule) sont préparéesextemporanément par dilution des solutions mères dans de la phase mobileen CLHP et dans de l’eau en ECZ. Elles sont filtrées avant leur injection(filtres nylon de 0,45 µm).

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Appareillage et conditions d’analyse

CLHP

Nous avons effectué les séparations sur un chromatographe équipéd’une pompe SpectraSystem P1000 (San José, CA, États-Unis), d’uninjecteur manuel de type Rhéodyne 7125 muni d’une boucle d’injection de20 µl, d’un chauffe-colonne de type CROCO-CIL® (CIL, Sainte-Foy-la-Grande, France) et d’un détecteur à barrette de diodes modèle 990 (Waters,Saint-Quentin-en-Yvelines, France). Nous avons testé deux colonnesSatisfaction®, une RP 18 AB et une C8+ (250 x 4,6 mm, 5 µm) (CIL). Sur lapremière colonne, la séparation des douze composés a été optimisée à unetempérature de 45 °C avec une phase mobile constituée par un mélange deKH2PO4 25 mM + TEA 10 mM (pH 4,8) et d’ACN (65 : 35, v/v). Le débitest de 1 ml/min [14]. Avant utilisation, la phase mobile est filtrée (0,45 µm)et dégazée aux ultrasons.

ECZ

Les analyses sont réalisées sur un appareil d’électrophorèsecapillaire de type P/ACE MDQ (Beckman, Fullerton, CA, USA) avec unedétection par barrette de photodiodes. La séparation a été optimisée sur uncapillaire en silice fondue (long. totale = 60 cm, long. efficace = 50 cm,d.i. = 75 µm) maintenu à une température de 15 °C. Le tampon de migrationest un mélange de tampon borate (42 mM, pH 9,5) et de méthanol (80 : 20,v/v). On applique une tension de 15 kV entre l’anode et la cathode pendantl’analyse. Les échantillons sont analysés après injection en modehydrodynamique pendant 10 secondes à 0,5 psi [15]. Les conditions strictesde conditionnement du capillaire ont été décrites par ailleurs [16].

RÉSULTATS ET DISCUSSION

CLHP

Dans un premier temps, nous avons optimisé les conditionsopératoires pour obtenir une séparation satisfaisante des douzeantidépresseurs sur la colonne RP 18 AB. L’influence de la composition dela phase mobile et de la température a été étudiée. Nous avons fixé la valeur

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du pH du tampon aqueux à 3,5 pour diminuer l’ionisation des sites silanols,limitant ainsi les interactions avec les composés basiques. L’utilisation desels de potassium pour la préparation du tampon et le choix de l’ACNcomme solvant organique sont également recommandés [12]. Nous avonstravaillé à 25 °C et fait varier le pourcentage d’ACN de 30 % à 50 %. Lesrésultats obtenus (variations des valeurs du facteur de rétention k de chaqueantidépresseur en fonction du pourcentage d’ACN) sont présentés dans laFigure 2. Pour le calcul de k, nous avons pris comme temps de rétention (tR)la moyenne des valeurs de 3 mesures consécutives et comme valeur dutemps mort la perturbation de la ligne de base due à la présence de méthanoldans l’échantillon (2,40 ± 0,03 min.). Dans une séparationchromatographique, il est souhaitable que la valeur de k soit comprise entre0,5 (pour que le premier pic soit élué après le temps mort) et 10 (pour éviterun temps d’analyse trop long et un élargissement des pics) [17]. Ainsi, unpourcentage en ACN de 35 % donne les meilleurs résultats, avec cependantune élution un peu rapide de la DMVEN et de la DMMIR. Dans cesconditions, le tR du dernier pic correspondant à la SER est de 18,3 ± 0,06min. (k = 6,63).

0

2

4

6

8

10

12

14

16

30 35 40 45 50

% ACN (Temp. 25 °C, pH 3,5)

Fac

teu

r d

e ré

ten

tio

n (

k)

DMVENDMMIRMIRMILVENEIDMCITCITPARFLUVNFLUOFLUOSER

Fig. 2 : Influence du pourcentage d’acétonitrile sur la rétention.

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Nous avons ensuite étudié l’influence du pH de la phase mobile surla rétention des différentes molécules après avoir fixé le pourcentaged’ACN à 35 % et la température à 25 °C. Nous présentons les résultats(log k en fonction du pH) dans la Figure 3. On peut noter l’importanceparticulière de ce paramètre sur les tR de la MIR et à un degré moindre de laDMMIR. L’influence de la variation de pH sur la rétention de l’ensembledes dix autres antidépresseurs est beaucoup moins marquée. Les propriétésacido-basiques particulières de la MIR (et de la DMMIR) sont certainementresponsables de ce comportement. En effet, ces deux composés possèdentun groupement 2-amino pyridine substitué pour lequel nous avons trouvéune valeur de pKa de 3,50 ± 0,10 (mesures spectrophotométriques etpotentiométriques) [15]. Il est donc tout à fait normal que les propriétéschromatographiques (rétention et sélectivité) de ces deux molécules soienttrès dépendantes du pH dans la zone étudiée. Nous avons obtenu lameilleure séparation de l’ensemble des composés à pH 4,80, mais larésolution entre la VEN et la MIR est insuffisante. Pour des pH > 4,85, laMIR et l’EI commencent à coéluer en raison de l’asymétrie élevée du pic deMIR (1,70).

-0,6

-0,4

-0,2

0

0,2

0,4

0,6

0,8

1

3 3,2 3,4 3,6 3,8 4 4,2 4,4 4,6 4,8 5

pH (Temp. 25 °C, 35 % ACN)

log

k

DMVENDMMIR

MIRMILVEN

EIDMCITCITPAR

FLUVNFLUOFLUO

SER

Fig. 3 : Influence du pH sur la rétention.

Fac

teu

r d

e ré

ten

tio

n (

k)

Une fois le pH du tampon fixé à 4,80 et le pourcentage d’ACN à35 %, nous avons étudié l’influence de la température entre 25 et 50 °C. Lesrésultats obtenus sont présentés dans la Figure 4. En général, la températurediminue la rétention et n’a que peu d’effet sur la sélectivité. Toutefois, elle

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agit sur l’équilibre d’ionisation et modifie les propriétés de rétention de lacolonne vis-à-vis des solutés ionisés. On peut alors observer desmodifications de sélectivité permettant l’amélioration de la séparation [18].Lors de cette étude, c’est effectivement ce que l’on constate, principalementpour la MIR. Alors que le tR de la plupart des molécules diminue lorsque latempérature d’analyse varie de 25 à 50 °C, celui de la MIR augmente. Cetteconstatation peut s’expliquer par l’influence de l’équilibre acido-basique liéà la fonction amino-2-pyridine de la MIR dans la zone de pH choisie [15].

-0,65

-0,45

-0,25

-0,05

0,15

0,35

0,55

0,75

0,95

25 30 35 40 45 50

Température (°C) (35 % ACN, pH 4,8)

log

k

DMVENDMMIRMIRMILVENEIDMCITCITPARFLUVNFLUOFLUOSER

Fig. 4 : Influence de la température sur la rétention.

Ainsi, dans les conditions décrites précédemment (températured’analyse de 45 °C (ou 50 °C) et phase mobile ACN – tampon pH 4,8 (35 :65, v/v)), on obtient le chromatogramme représenté dans la Figure 5. Pourune durée d’analyse de l’ordre de 20 minutes, toutes les molécules sontparfaitement séparées avec une résolution et des facteurs de rétentionsatisfaisants.

On notera cependant le manque de robustesse de la méthode en cequi concerne le choix du pH de la phase mobile. Il doit être parfaitementajusté à 4,8 pour obtenir une bonne séparation entre la VEN, la MIR et l’EI.D’autre part, la DMVEN a son tR proche du temps mort, ce qui impose desolubiliser le mélange dans la phase mobile ou dans un solvant quin’absorbe pas à la longueur d’onde de mesure (225 nm) pour éviter lacoélution du pic de DMVEN avec celui du solvant.

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Fig. 5 : Chromatogramme du mélange d’antidépresseurs.

La même démarche analytique a été réalisée sur une colonneSatisfaction® C8+. Malgré un profil d’élution comparable, nous n’avons paspu obtenir la séparation complète des 13 molécules. À pH < 5, on observeune coélution de la SER et de la FLUO. Une résolution correcte entre ces 2composés n’est possible qu’au-delà de pH 6, mais la durée de l’analyse estalors très longue et d’autres coélutions apparaissent (entre la MIR et la PARet entre la DMMIR et le MIL) avec une dissymétrie du pic de la MIR.Contrairement à la colonne Satisfaction® RP 18 AB, la C8+ ne convient paspour la séparation de cette série de molécules.

ECZ

Parallèlement à l’étude chromatographique, nous avons développéune méthode de séparation de l’ensemble des antidépresseurs en ECZ. Dansles conditions opératoires décrites dans le paragraphe matériel et méthodes,la séparation de onze molécules est possible en moins de 18 minutes. Unexemple d’électrophorégramme est donné dans la Figure 6. On peutobserver la séparation de la majorité des molécules entre la 12e et la 16e

minute alors que la MIR et la DMMIR ont des temps de migration (tM) plusimportants, respectivement de 17,06 et 17,54 minutes. Ces deux moléculesmigrent à proximité du flux électroosmotique (FEO), qui correspond à la

Molécules tR (min.)

01 DMVEN02 DMMIR03 MIL04 VEN05 MIR06 EI07 DMCIT08 CIT09 PAR10 FLUV11 NFLUO12 FLUO13 SER

3,163,634,264,745,145,896,987,6610,2412,4415,2217,9420,00

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migration des composés non chargés [16]. En effet, au pH du tampon demigration (pH 9,5), la MIR et la DMMIR sont très faiblement ionisées (pKamesuré pour la MIR à 7,5) expliquant ainsi leurs migrations proches du FEOet leur excellente séparation d’avec les autres antidépresseurs [15]. À ce pH,ces derniers se retrouvent par contre dans un état d’ionisation comparable,ont des mobilités électrophorétiques voisines et migrent plus rapidement queles molécules neutres. Seule la présence d’un modificateur organiquecomme le méthanol additionné au tampon de migration permet de lesséparer en ECZ.

Fig. 6 : Électrophorégramme du mélange d’antidépresseurs.

Molécules tM (min.)

01 DMCTI02 FLUO03 PAR04 MIL05 VEN06 CIT07 SER08 DMVEN09 FLUV10 DMMIR11 MIR

12,6713,0113,2213,4513,6514,4714,6514,7815,3817,0617,54

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Comme en CLHP, nous avons étudié l’influence sur les tM desdifférentes molécules de plusieurs paramètres comme le pH ou lepourcentage en méthanol dans le tampon de migration, la températured’analyse et la tension appliquée entre l’anode et la cathode.L’augmentation du pH du tampon de migration (9,2 à 9,9) ralentit lamigration de l’ensemble des antidépresseurs et ne permet pas la séparationdu pic de la MIR et du FEO. Pour cela, il faudrait opérer à des pH beaucoupplus acides pour augmenter l’état d’ionisation de ce composé, mais rendantalors la séparation des autres molécules impossible en ECZ [19]. De lamême façon, l’augmentation du pourcentage de méthanol de 0 à 20 % dansle tampon de migration, la diminution de la température d’analyse de 40 à15 °C ou la diminution de la tension appliquée pendant l’analyse de 30 à12 kV entraînent une augmentation des tM de l’ensemble des molécules.

En aucun cas, les conditions optimales de séparation des différentesmolécules ne permettent de séparer correctement la MIR et le FEO. Ceci apour conséquence la perte de symétrie du pic de MIR, rendant difficile uneanalyse quantitative satisfaisante de ce composé.

CONCLUSION

Dans cette étude, nous avons optimisé les conditions de séparationen CLHP et en ECZ d’un mélange d’antidépresseurs de nouvelle génération.

En CLHP, une bonne séparation de l’ensemble des molécules estobtenue en mode isocratique sur une colonne Satisfaction® RP 18 AB. Lasélectivité et la robustesse de la méthode sont toutefois dépendantes du pHde la phase mobile.

En ECZ, l’état d’ionisation comparable des différents composés aupH du tampon de migration rend nécessaire l’adjonction de méthanol afin deles séparer. La MIR et la DMMIR dont les propriétés acide-base sesingularisent de celles des autres molécules migrent près du FEO. Cetteétude illustre la difficulté de séparer les membres d’une même famillechimique en ECZ quand les composés présentent des pKa et des massesmolaires similaires. Il faut alors utiliser d’autres techniquesélectrophorétiques et opérer, par exemple, en mode micellaire oùl’adjonction d’un détergent dans le tampon de migration est à l’origine de laformation d’une nouvelle phase séparative. Les premiers résultats obtenusdans notre laboratoire par cette technique montrent une amélioration de laséparation de l’ensemble des molécules pour des temps d’analyse pluscourts [20]. Aussi, de nouvelles études mettant à profit les performances de

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l’électrophorèse capillaire en mode micellaire sont en cours de réalisationpour optimiser la séparation de ces nouveaux antidépresseurs.Remerciements : les auteurs remercient la société CIL Cluzeau Info Labopour le prêt des colonnes chromatographiques.

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ABSTRACT

Separation of new antidepressants by reversed-phase liquidchromatography and capillary zone electrophoresis

Two methods using reversed-phase liquid chromatography (RPLC)and capillary zone electrophoresis (CZE) with diode array detection weredeveloped for the separation of eight new antidepressants, five selectiveserotonin reuptake inhibitors (fluvoxamine, fluoxetine, sertraline, paroxetineand citalopram), two serotonin noradrenergic reuptake inhibitors(venlafaxine and milnacipran), one noradrenergic specific serotoninergicantidepressant (mirtazapine) and four active metabolites (norfluoxetine,desmethylcitalopram, desmethylvenlafaxine and desmethylmirtazapine).The chromatographic analysis was carried out under isocratic conditions ontwo new-generation columns (Satisfaction® RP 18 AB and Satisfaction®

C8+, 250 mm x 4.6 mm, 5 µm). The electrophoretic separation wasoptimised on an uncoated fused-silica capillary (600 mm x 75 µm i.d.) at anoperating voltage of +15 kV. The effect of mobile phase composition forRPLC, running buffer composition for CZE and temperature on theresolution allowed to select the best analysis conditions for both methods.With RPLC, a baseline resolution of all the antidepressants was obtained at45°C (or 50°C) in 20 minutes on the RP 18 AB column with a mobile phaseconsisting of a mixture of KH2PO4 25 mM + TEA 10 mM (pH 4.8) andacetonitrile (65 : 35, v/v). The CZE separation was achieved using amethanol - 42 mM borate buffer (pH 9.5) (80 : 20, v/v) as running buffer.Both methods provided good results and are well suited for a rapidscreening of these drugs.

Key-words: antidepressants, capillary zone electrophoresis,reversed-phase liquid chromatography.

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