Sécurité de l’échocardiographie de stress : plutôt l’effort · A. Varga, 2nd Department of...

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E n une référence... En une référence... 34 La Lettre du Cardiologue - n° 401 - janvier 2007 Sécurité de l’échocardiographie de stress : plutôt l’effort RéFéRENCE Safety of stress echocardiography (from the International Stress Echo Complica- tion Registry). Varga A, Rodriguez Garcia MA, Picano E, from the International Stress Echo Com- plication Registry Am J Cardiol 2006;98: 541-3. LE FOND Le but de cette étude est l’évaluation de la sécurité de différentes modali- tés d’échocardiographie de stress dans notre pratique courante. De février 1998 à janvier 2004, 71 centres ont répondu aux questionnaires qui leur avaient été adressés, permettant d’analyser 85 997 échocardio- graphies de stress. Les complications rete- nues incluaient les événements majeurs survenus pendant l’échocardiographie de stress : tachycardies ventriculaires (TV) soutenues (> 30 battements), fibrillations ventriculaires (FV), infarctus du myocarde, blocs auriculo-ventriculaires du troisième degré, hypotensions requérant un traite- ment, dont la forme majeure du choc car- diogénique, asystolies, ruptures cardiaques, décès. Pour 26 295 patients (31 %), l’échocardio- graphie de stress était une échocardiogra- phie d’effort ; pour les 59 702 autres patients (69 %) explorés par un test pharmacologique, la dobutamine venait en première position (35 103 patients), l’exploration de la viabilité reposant sur l’utilisation de faibles doses (≤ 10 µg/kg/mn) et celle de l’ischémie recou- rant au protocole habituel (≤ 40 µg/kg/mn ± atropine). Le dipyridamole a été utilisé pour 24 599 patients à la dose de 0,84 mg/kg en 6 à 10 minutes ± atropine. Des complications majeures sont surve- nues pour 86 patients : 4 patients pour l’échocardiographie d’effort, 63 patients sous dobutamine (p < 0,01 versus effort), et 19 patients sous dipyridamole (p < 0,01 versus effort et versus dobutamine). Six décès ont été observés : 5 sous dobuta- mine (2 FV et 3 ruptures) et un sous dipy- ridamole (choc cardiogénique). Tous ces patients décédés avaient un antécédent récent (4 patients) ou ancien (2 patients) d’infarctus du myocarde. COMMENTAIRES En première analyse, ce registre confirme un niveau de sécurité satisfaisant pour la pratique de l’échocardiographie de stress : l’incidence des complications majeures est de 0,015 % pour l’effort, de 0,18 % pour la dobuta- mine et de 0,08 % pour le dipyridamole, avec un taux de mortalité globale de 0,007 %. Sans surprise, la comparaison des diffé- rentes modalités de stress privilégie l’effort en termes de sécurité. Les données de ce registre international confirment une plus grande sécurité de l’échocardiographie d’effort par rapport aux tests pharmacolo- giques, et en particulier par rapport à la dobutamine (plus utilisée en France que le dipyridamole). Ces résultats sont com- parables à ceux rapportés par le regis- tre allemand en 1999, qui avait analysé 60 448 examens : l’incidence des événements sévères était alors de 0,3 % pour l’échocar- diographie d’effort, de 0,2 % pour le dipy- ridamole et de 1 % pour la dobutamine. La majorité des complications survenues sous dobutamine est rythmique (38 TV ou FV), et un biais de recrûtement peut pénaliser la dobutamine par rapport à l’effort : patients plus sévèrement atteints et incapables de réaliser une épreuve d’effort ou recherche de viabilité s’adressant à des patients dont la fonction systolique ventriculaire gauche est altérée, souvent pluritronculaires (ils n’ont cependant pas été explorés ici par de fortes doses de dobutamine). Dans les recommandations de la Société française de cardiologie concernant la pratique des épreuves de provocation d’ischémie en cardiologie nucléaire (Arch Mal Cœur 2002;95:850-74), il est indiqué que “le choix doit prioritairement se por- ter sur l’épreuve d’effort chaque fois que celle-ci peut être valablement réalisée et analysée”. Cette règle s’applique aussi à l’échocardiographie de stress : pourra-t-elle inverser la tendance ? Lors de ce registre “de la vie réelle”, près de 70 % des tests étaient pharmacologiques... BIBLIOGRAPHIE Les vingt références comprennent plusieurs publications sur la sécurité des échocardio- graphies de stress pharmacologiques (Echo- Dobutamine International Cooperative Study Group et Echo-Persantine International Coo- perative Study Group menés par E. Picano, Multicenter Dipyridamole Safety Study...). Le registre allemand a été présenté au congrès de l’American Heart Association en 1999 : Beckmann S et al., Circulation 1999;100(Suppl.);3401A. MOTS-CLéS Échocardiographie de stress - Échocardio- graphie d’effort - Échocardiographie dobu- tamine - Sécurité. TIRéS à PART A. Varga, 2nd Department of Medicine and Cardiology Center, University of Sciences, Szeged, Hungary. E-mail : [email protected] C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil

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34 La Lettre du Cardiologue - n° 401 - janvier 2007

Sécurité de l’échocardiographie de stress : plutôt l’effort

RéFéRenCe

Safety of stress echocardiography (from the International Stress Echo Complica-tion Registry).Varga A, Rodriguez Garcia MA, Picano E, from the International Stress Echo Com-plication Registry ❏ Am J Cardiol 2006;98: 541-3.

le FonD

Le but de cette étude est l’évaluation de la sécurité de différentes modali-tés d’échocardiographie de stress dans notre pratique courante. De février 1998 à janvier 2004, 71 centres ont répondu aux questionnaires qui leur avaient été adressés, permettant d’analyser 85 997 échocardio-graphies de stress. Les complications rete-nues incluaient les événements majeurs survenus pendant l’échocardiographie de stress : tachycardies ventriculaires (TV) soutenues (> 30 battements), fibrillations ventriculaires (FV), infarctus du myocarde, blocs auriculo-ventriculaires du troisième degré, hypotensions requérant un traite-ment, dont la forme majeure du choc car-diogénique, asystolies, ruptures cardiaques, décès. Pour 26 295 patients (31 %), l’échocardio-graphie de stress était une échocardiogra-phie d’effort ; pour les 59 702 autres patients (69 %) explorés par un test pharmacologique, la dobutamine venait en première position (35 103 patients), l’exploration de la viabilité reposant sur l’utilisation de faibles doses (≤ 10 µg/kg/mn) et celle de l’ischémie recou-rant au protocole habituel (≤ 40 µg/kg/mn ± atropine). Le dipyridamole a été utilisé pour 24 599 patients à la dose de 0,84 mg/kg en 6 à 10 minutes ± atropine. Des complications majeures sont surve-nues pour 86 patients : 4 patients pour l’échocardiographie d’effort, 63 patients

sous dobutamine (p < 0,01 versus effort), et 19 patients sous dipyridamole (p < 0,01 versus effort et versus dobutamine). Six décès ont été observés : 5 sous dobuta-mine (2 FV et 3 ruptures) et un sous dipy-ridamole (choc cardiogénique). Tous ces patients décédés avaient un antécédent récent (4 patients) ou ancien (2 patients) d’infarctus du myocarde.

CoMMenTAIReS

En première analyse, ce registre confirme un niveau de sécurité satisfaisant pour la pratique de l’échocardiographie de stress : l’incidence des complications majeures est de 0,015 % pour l’effort, de 0,18 % pour la dobuta-mine et de 0,08 % pour le dipyridamole, avec un taux de mortalité globale de 0,007 %.Sans surprise, la comparaison des diffé-rentes modalités de stress privilégie l’effort en termes de sécurité. Les données de ce registre international confirment une plus grande sécurité de l’échocardiographie d’effort par rapport aux tests pharmacolo-giques, et en particulier par rapport à la dobutamine (plus utilisée en France que le dipyridamole). Ces résultats sont com-parables à ceux rapportés par le regis-tre allemand en 1999, qui avait analysé 60 448 examens : l’incidence des événements sévères était alors de 0,3 % pour l’échocar-diographie d’effort, de 0,2 % pour le dipy-ridamole et de 1 % pour la dobutamine. La majorité des complications survenues sous dobutamine est rythmique (38 TV ou FV), et un biais de recrûtement peut pénaliser la dobutamine par rapport à l’effort : patients plus sévèrement atteints et incapables de réaliser une épreuve d’effort ou recherche de viabilité s’adressant à des patients dont la fonction systolique ventriculaire gauche est altérée, souvent pluritronculaires (ils n’ont cependant pas été explorés ici par de fortes doses de dobutamine).

Dans les recommandations de la Société française de cardiologie concernant la pratique des épreuves de provocation d’ischémie en cardiologie nucléaire (Arch Mal Cœur 2002;95:850-74), il est indiqué que “le choix doit prioritairement se por-ter sur l’épreuve d’effort chaque fois que celle-ci peut être valablement réalisée et analysée”. Cette règle s’applique aussi à l’échocardiographie de stress : pourra-t-elle inverser la tendance ? Lors de ce registre “de la vie réelle”, près de 70 % des tests étaient pharmacologiques...

bIblIogRAPHIe

Les vingt références comprennent plusieurs publications sur la sécurité des échocardio-graphies de stress pharmacologiques (Echo-Dobutamine International Cooperative Study Group et Echo-Persantine International Coo-perative Study Group menés par E. Picano, Multicenter Dipyridamole Safety Study...).Le registre allemand a été présenté au congrès de l’American Heart Association en 1999 : Beckmann S et al., Circulation 1999;100(Suppl.);3401A.

MoTS-CléS

Échocardiographie de stress - Échocardio-graphie d’effort - Échocardiographie dobu-tamine - Sécurité.

TIRéS à PART

A. Varga, 2nd Department of Medicine and Cardiology Center, University of Sciences, Szeged, Hungary.E-mail : [email protected]

C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil