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le château de versailles consacre une exposition à la place des sciences à la cour des rois. sciences véritables ou curiosités ? Sous la direction de béatrix saule, Directeur général de l’Établissement public du musée et du domaine national de Versailles, et catherine arminjon, Conservateur général honoraire du patrimoine. 1 leS LIEUX DE SCIENCES à versailles En introduction, sous une reproduction du globe céleste de Coronelli, symbole d’une science au service du pouvoir puisqu’il présente l’ état du ciel au moment de la naissance de Louis XIV, un film « full HD 360° » montre que le Château, ses dépendances, ses jardins et parcs, ses environs, ont accueilli toutes les formes de l’ activité scientifique : l’application, l’ expérimentation, l’enseignement, la pratique et la démonstration. Chacune fait l’ objet d’une section de l’exposition. Cependant, Versailles est d’ abord le lieu du pouvoir. 2-1 & 2-2 Sciences et pouvoir Siège officiel de la monarchie absolue pour plus d’un siècle, de 1682 à 1789, Versailles exerce une tutelle sur les sciences par l’ entremise notamment de l’ Académie royale des Sciences. La période, qui couvre la fin de l’ âge classique et le temps des Lumières, connaît l’ essor d’une véritable politique scientifique. sciences et curiosités à La cour de versailles Parcours de l’exposition par Béatrix Saule 4 3 6 5 2 2-2 l'exercice de la tutelle du pouvoir À Versailles, les ministres en charge de la tutelle des sciences interviennent dans la nomination des académiciens, suscitent des « enquêtes » à travers le royaume et des expéditions lointaines, accordent des subsides aux savants. Ils favorisent les disciplines qui répondent aux objectifs du pouvoir : l’astronomie pour la navigation, la géométrie et la chimie pour l’artillerie, la géodésie et la cartographie à des fins cadastrales et fiscales, la médecine et l’apothicairerie pour la santé publique, la botanique et l’agronomie pour lutter contre les famines, la physique pour ses applications techniques... Accompagnant la promotion des arts utiles et des techniques, les premières écoles d’ingénieurs sont fondées : Ponts et chaussées, Génie maritime, Génie de Mézières pour les fortifications, Mines. Parallèlement sont créées l’Académie de chirurgie, les Écoles vétérinaires de Lyon et d’Alfort, les Sociétés d’agriculture et la Société royale de médecine. Bien des savants, parmi les plus renommés, sont à la Cour comme officiers de santé ou enseignants des princes. Cette présence de savants en attire d’autres. Quesnay, médecin de Madame de Pompadour, reçoit dans son logement au château Diderot et d’Alembert. Si le pouvoir interdit l’ Encyclopédie, c’est en raison des positions philosophiques qu’elle adopte, non pour le recensement des savoirs et des techniques qu’il n’ a cessé d’encourager depuis Colbert. plan Salle 1 Lieux de sciences à Versailles Salles 2-1 & 2-2 Sciences et pouvoir Salle 3 Versailles, lieu d’application des sciences et des techniques Salles 4-1 & 4-2 Versailles, terrain d’expérimentation Salle 5 Versailles, lieu d’enseignement des sciences et des techniques Salles 6-1 & 6-2 Versailles, lieu de pratiques princières Salle 7 Versailles, lieu de démonstrations entrée 3 7 2-2 2-1 4-1 4-2 5 6-2 6-1 travaux d'adduction d'eau et hydraulique Pour offrir à Louis XIV le plaisir des fontaines, il faut 35 292 muids d’eau (env. 9500 m 3 ) pour 2 heures et demie de spectacle. Entre 1670 et 1685, temps de la création du grand réseau versaillais, les questions hydrauliques mobilisent savants et ingénieurs. Ce qui était jusqu’alors empirique devient scientifique : Perrault, Mariotte, La Hire, Gobert, Picard, Römer se livrent aux premiers calculs de débits a priori, aux études des frottements et de résistance des matériaux pour les conduites. Avancée technologique, des canalisations en fonte de fer constituées d’éléments standardisés qui s’emboîtent sans soudure remplacent les tuyaux de terre cuite, bois ou plomb. Les ajutages, qui donnent aux jets leur forme, sont perfectionnés par les Francine et, selon les conseils de Huygens, la consommation en eau est réduite. Le système fonctionnant par gravitation, il faut non seulement beaucoup d’ eaux mais des eaux élevées. Tout un ensemble de pompes, d’aqueducs, de réservoirs est alors créé. La gigantesque machine de Marly puise les eaux de la Seine grâce à 14 roues à aube. Trop ambitieux, allant jusqu’à 70 km de Versailles, l’aqueduc par Vauban, conseillé par les académiciens, ne sera pas achevé. Sciences et techniques sont aussi à l’ œuvre sous les formes les plus variées au service de l’embellissement et du confort de la résidence royale. En retour, elles se trouvent glorifiées par leur évocation dans les décors des Grands Appartements (où chaque salon est dédié à une planète) jusqu’à l’appartement intérieur du Roi (garde-robe de Louis XVI). 16 17 18 3 versailles, lieu d'application des sciences et des techniques C’est par son ampleur sans précédent que le chantier de Versailles pose de nouveaux problèmes. Il sollicite, outre les savoir-faire traditionnels, de nouvelles connaissances scientifiques et techniques. Plus que les bâtiments, ces besoins nouveaux concernent les jardins. arpentage et nivellement Le terrain ne se prête pas naturellement aux projets du Roi : il n’est pas structuré et il n’offre aucune eau utilisable pour les fontaines. Avant de réaliser les travaux, il convient de dresser la figure du terrain et des environs grâce à l’arpentage et au nivellement. Trouver des eaux nécessite d’aller si loin que de nouveaux instru- ments et des calculs prenant en compte la rotondité de la terre sont mis au point puis perfectionnés au fil des pratiques par une équipe d’académiciens autour de l’astronome, l’abbé Jean Picard. Inspirée de ses lunettes astronomiques, la lunette de visée de Picard est capable de mesurer les angles et les niveaux. Grâce à elle, il prouve l’impossibilité de dériver les eaux de la Loire, solution dont Riquet, réalisateur du Canal du Midi, avait convaincu Colbert. Outre l’ économie qu’il fait ainsi faire au Trésor royal, Picard préconise des solutions pratiques et pérennes tant pour les eaux d’agrément que pour les eaux bonnes à boire. Parallèlement au travail des académiciens, Le Nôtre et ses aides font de même à l’intérieur du domaine, mais avec des instruments et un savoir en géométrie et optique qui remontent pour la plupart à la fin du XVI e siècle mais qui, dès lors, s’ affinent et se théorisent. 2-1 la fondation de l'académie royale des sciences Autrefois, partout en Europe, les savants se groupaient autour de mécènes qui les rétribuaient. Colbert entreprend de les rattacher au Roi, dans l’idée de faire servir les sciences au bien de l’État. En 1666, il réunit une douzaine de savants autour du hollandais Huygens. Peu à peu sont attirées d’autres célébrités, tel le bolonais Jean-Dominique Cassini qui va diriger l’Observatoire créé l’année suivante. Le grand tableau de Testelin célèbre la fondation de l’Académie et de l’Observatoire, sous la forme d’une visite du Roi à la Compagnie. Le Roi est entouré de son frère, Monsieur, et des seigneurs de sa suite. Colbert, au centre de la composition et agissant comme intermédiaire, lui présente les académiciens. Il s’agit toutefois d’une représentation imaginaire puisque la peinture est antérieure à l’unique visite du Roi à l’Académie, le 5 décembre 1681. Ce n’est qu’en 1699 que le pouvoir accorde à la compagnie le titre officiel d’Académie royale ainsi qu’un règlement qui définit 6 sections : la géométrie, l’astronomie, la mécanique, l’anatomie, la botanique et la chimie. En début d’année, l’Académie se rend à Versailles pour y présenter ses publications. Ce rituel souligne que l’Académie royale des Sciences offre au Roi un gage tangible des travaux qu’il a subventionnés. Les liens entre Paris et Versailles sont désormais définis, et l’Académie devient l’instrument de la science officielle. 7 9 8 10. Jean Le Rond d’Alembert (1717-1783), mathématicien, directeur de « l’Encyclopédie » jusqu’en 1757, d’après Maurice Quentin de La Tour, 1773 11. Louis XIV, protecteur des Arts et des Sciences, Jean Garnier, 1672 12. Portrait présumé d’Antoine-Laurent de Lavoisier, (1743-1794), chimiste, François-Louis Brossard de Beaulieu, 1784 13. Anne-Robert-Jacques Turgot, (1727-1781), contrôleur général des Finances (1774-1776) Antoine Graincourt, d’après François Hubert Drouais, 1782 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 14. Colbert présente à Louis XIV les membres de l’Académie des sciences créée en 1666, (détails), Henri Testelin 15. Graphomètre à pinnules, Michael Butterfield, avant 1700 16. Vue de la machine de Marly, Pierre Denis Martin, 1722 17. Boussole, Cabinet de la Garde-robe de Louis XVI, 1788 18. Char de Saturne, esquisse pour la peinture du plafond du salon de Saturne, Noël Coypel, 1672 1 1 10 12 13 14 15 11

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le château de versailles consacre une exposition à la place des sciences à la cour des rois. sciences véritables ou curiosités ?

Sous la direction de béatrix saule, Directeur

général de l’Établissement public du musée

et du domaine national de Versailles,

et catherine arminjon, Conservateur général

honoraire du patrimoine.

1leS LIEUX DE SCIENCES à versailles

En introduction, sous une reproduction

du globe céleste de Coronelli,

symbole d’une science au service

du pouvoir puisqu’il présente l’ état

du ciel au moment de la naissance

de Louis XIV, un fi lm « full HD 360° »

montre que le Château, ses

dépendances, ses jardins et parcs,

ses environs, ont accueilli toutes

les formes de l’ activité scientifi que :

l’application, l’ expérimentation,

l’enseignement, la pratique et la

démonstration. Chacune fait l’ objet

d’une section de l’exposition.

Cependant, Versailles est d’ abord

le lieu du pouvoir.

2-1 & 2-2

Sciences et pouvoir

Siège offi ciel de la monarchie absolue

pour plus d’un siècle, de 1682 à 1789,

Versailles exerce une tutelle sur

les sciences par l’ entremise notamment

de l’ Académie royale des Sciences.

La période, qui couvre la fi n de l’ âge

classique et le temps des Lumières,

connaît l’ essor d’une véritable politique

scientifi que.

sciences et curiosités à La cour de versaillesParcours de l’exposition par Béatrix Saule

4

3

6

5

2

2-2

l'exercice de la tutelle du pouvoir

À Versailles, les ministres en charge

de la tutelle des sciences interviennent

dans la nomination des académiciens,

suscitent des « enquêtes » à travers

le royaume et des expéditions lointaines,

accordent des subsides aux savants.

Ils favorisent les disciplines qui répondent

aux objectifs du pouvoir : l’astronomie

pour la navigation, la géométrie

et la chimie pour l’artillerie, la géodésie

et la cartographie à des fi ns cadastrales

et fi scales, la médecine et l’apothicairerie

pour la santé publique, la botanique

et l’agronomie pour lutter contre les

famines, la physique pour ses applications

techniques...

Accompagnant la promotion des arts

utiles et des techniques, les premières

écoles d’ingénieurs sont fondées : Ponts

et chaussées, Génie maritime, Génie

de Mézières pour les fortifi cations, Mines.

Parallèlement sont créées l’Académie

de chirurgie, les Écoles vétérinaires

de Lyon et d’Alfort, les Sociétés

d’agriculture et la Société royale

de médecine. Bien des savants, parmi

les plus renommés, sont à la Cour comme

offi ciers de santé ou enseignants

des princes. Cette présence de savants

en attire d’autres. Quesnay, médecin

de Madame de Pompadour, reçoit

dans son logement au château Diderot

et d’Alembert. Si le pouvoir interdit

l’Encyclopédie, c’est en raison des positions

philosophiques qu’elle adopte, non pour le

recensement des savoirs et des techniques

qu’il n’ a cessé d’encourager depuis Colbert.

planSalle 1Lieux de sciences

à Versailles

Salles 2-1 & 2-2

Sciences et pouvoir

Salle 3Versailles,

lieu d’application

des sciences

et des techniques

Salles 4-1 & 4-2

Versailles, terrain

d’expérimentation

Salle 5Versailles, lieu

d’enseignement

des sciences

et des techniques

Salles 6-1 & 6-2 Versailles, lieu

de pratiques princières

Salle 7Versailles, lieu

de démonstrations

entrée

3

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2-2

2-1

4-1 4-2

5

6-2 6-1

travaux d'adduction d'eau et hydraulique

Pour off rir à Louis XIV le plaisir

des fontaines, il faut 35 292 muids d’ eau

(env. 9500 m3) pour 2 heures et demie

de spectacle. Entre 1670 et 1685, temps

de la création du grand réseau versaillais,

les questions hydrauliques mobilisent

savants et ingénieurs.

Ce qui était jusqu’alors empirique devient

scientifi que : Perrault, Mariotte, La Hire,

Gobert, Picard, Römer se livrent

aux premiers calculs de débits a priori,

aux études des frottements et de résistance

des matériaux pour les conduites.

Avancée technologique, des canalisations

en fonte de fer constituées d’éléments

standardisés qui s’emboîtent sans soudure

remplacent les tuyaux de terre cuite,

bois ou plomb. Les ajutages, qui donnent

aux jets leur forme, sont perfectionnés

par les Francine et, selon les conseils

de Huygens, la consommation en eau

est réduite.

Le système fonctionnant par gravitation,

il faut non seulement beaucoup d’ eaux

mais des eaux élevées. Tout un ensemble

de pompes, d’aqueducs, de réservoirs

est alors créé. La gigantesque machine

de Marly puise les eaux de la Seine

grâce à 14 roues à aube. Trop ambitieux,

allant jusqu’ à 70 km de Versailles,

l’aqueduc par Vauban, conseillé par

les académiciens, ne sera pas achevé.

Sciences et techniques sont aussi à l’ œuvre

sous les formes les plus variées au

service de l’embellissement et du confort

de la résidence royale. En retour, elles

se trouvent glorifi ées par leur évocation

dans les décors des Grands Appartements

(où chaque salon est dédié à une planète)

jusqu’ à l’appartement intérieur du Roi

(garde-robe de Louis XVI).

16

17 18

3 versailles, lieu d'application des sciences et des techniques

C’est par son ampleur sans précédent

que le chantier de Versailles pose

de nouveaux problèmes. Il sollicite,

outre les savoir-faire traditionnels,

de nouvelles connaissances scientifi ques

et techniques. Plus que les bâtiments,

ces besoins nouveaux concernent

les jardins.

arpentage et nivellement

Le terrain ne se prête pas naturellement

aux projets du Roi : il n’ est pas structuré

et il n’ offre aucune eau utilisable pour

les fontaines. Avant de réaliser les travaux,

il convient de dresser la figure du terrain

et des environs grâce à l’arpentage et au

nivellement. Trouver des eaux nécessite

d’aller si loin que de nouveaux instru-

ments et des calculs prenant en compte

la rotondité de la terre sont mis au point

puis perfectionnés au fil des pratiques

par une équipe d’académiciens autour

de l’astronome, l’abbé Jean Picard.

Inspirée de ses lunettes astronomiques,

la lunette de visée de Picard est capable

de mesurer les angles et les niveaux.

Grâce à elle, il prouve l’impossibilité

de dériver les eaux de la Loire, solution

dont Riquet, réalisateur du Canal

du Midi, avait convaincu Colbert. Outre

l’ économie qu’il fait ainsi faire au Trésor

royal, Picard préconise des solutions

pratiques et pérennes tant pour les eaux

d’agrément que pour les eaux bonnes

à boire. Parallèlement au travail des

académiciens, Le Nôtre et ses aides font

de même à l’intérieur du domaine, mais

avec des instruments et un savoir

en géométrie et optique qui remontent

pour la plupart à la fi n du XVIe siècle

mais qui, dès lors, s’ affi nent et se théorisent.

2-1

la fondation de l'académie royale des sciences

Autrefois, partout en Europe, les savants

se groupaient autour de mécènes qui

les rétribuaient. Colbert entreprend

de les rattacher au Roi, dans l’idée de faire

servir les sciences au bien de l’État.

En 1666, il réunit une douzaine

de savants autour du hollandais Huygens.

Peu à peu sont attirées d’autres célébrités,

tel le bolonais Jean-Dominique Cassini

qui va diriger l’Observatoire créé l’ année

suivante. Le grand tableau de Testelin

célèbre la fondation de l’Académie

et de l’Observatoire, sous la forme d’ une

visite du Roi à la Compagnie. Le Roi

est entouré de son frère, Monsieur,

et des seigneurs de sa suite. Colbert,

au centre de la composition et agissant

comme intermédiaire, lui présente

les académiciens. Il s’ agit toutefois d’une

représentation imaginaire puisque

la peinture est antérieure à l’unique visite

du Roi à l’Académie, le 5 décembre 1681.

Ce n’ est qu’ en 1699 que le pouvoir

accorde à la compagnie le titre offi ciel

d’Académie royale ainsi qu’un règlement

qui défi nit 6 sections : la géométrie,

l’astronomie, la mécanique, l’anatomie,

la botanique et la chimie. En début

d’année, l’ Académie se rend à Versailles

pour y présenter ses publications.

Ce rituel souligne que l’ Académie royale

des Sciences off re au Roi un gage tangible

des travaux qu’il a subventionnés.

Les liens entre Paris et Versailles sont

désormais défi nis, et l’Académie devient

l’instrument de la science offi cielle.

7

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10. Jean Le Rond d’Alembert (1717-1783), mathématicien, directeur de « l’Encyclopédie » jusqu’en 1757, d’après Maurice Quentin de La Tour, 1773

11. Louis XIV, protecteur des Arts et des Sciences, Jean Garnier, 1672

12. Portrait présumé d’Antoine-Laurent de Lavoisier, (1743-1794), chimiste, François-Louis Brossard de Beaulieu, 1784

13. Anne-Robert-Jacques Turgot, (1727-1781), contrôleur général des Finances (1774-1776) Antoine Graincourt, d’après François Hubert Drouais, 1782

1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 14. Colbert présente à Louis XIV les membres de l’Académie des sciences créée en 1666, (détails), Henri Testelin

15. Graphomètre à pinnules, Michael Butterfi eld, avant 1700

16. Vue de la machine de Marly, Pierre Denis Martin, 1722

17. Boussole, Cabinet de la Garde-robe de Louis XVI, 1788

18. Char de Saturne, esquisse pour la peinture du plafond du salon de Saturne, Noël Coypel, 1672

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Horaires

Le Château est ouvert

tous les jours, sauf

le lundi et certains jours

fériés, ou lors de

cérémonies offi cielles :

haute saison de 9h à 18h30,

dernière admission : 18h.

basse saison de 9h à 17h30,

dernière admission : 17h.

Crédits

© Château de Versailles,

Jean-Marc Manaï

© Château de Versailles,

Christian Milet

© RMN, Franck Raux

© RMN, René-Gabriel

Ojéda

© RMN, Gérard Blot

© RMN, Michèle Bellot

© RMN, Droits réservés

© RMN, Hervé

Lewandowski

© RMN, Daniel Arnaudet

© Musée des arts

et métiers-Cnam, Paris,

photo Philippe Hurlin

© Musée des arts

et métiers-Cnam, Paris,

photo Michèle Favareille

© Musée Lorrain, Nancy,

photo C. Philippot

© RMN, Agence Bulloz,

Musée Carnavalet

© Des Signes, Paris

L’exposition est organisée par l’Établissement public du musée et du domaine national de Versailles. Grâce au mécénat

du groupe Alten

et de la Compagnie de Saint-Gobain

ÉTABLISSEMENT PUBLIC DU MUSÉE ET DU DOMAINE NATIONAL DE VErSAILLESRP 834 78 008 Versailles cedex

Information et réservation au 01 30 83 78 00

www.chateauversailles.fr

6-2pratiques et collections scientifiques de louis xvi

Louis XVI dépasse son grand père

Louis XV dans sa démarche scientifique.

Confrontée à l’inventaire de ses

cabinets privés dressé à la Révolution,

l’image du « roi serrurier » apparaît

bien caricaturale. Sa pratique des sciences

et surtout des techniques révèle, au-delà

de l’intérêt personnel, la volonté de

hisser la puissance militaire, économique

et industrielle du royaume au premier

rang en Europe.

À Versailles, dans l’appartement privé

du Roi, les collections royales de curiosités

et d’instruments scientifi ques s’enri-

chissent de nouveaux chefs-d’œuvre :

meubles mécaniques, baromètres,

pendules astronomiques… Une ancienne

salle à manger est transformée

en conservatoire de curiosités. Expert

en matière de marine (contrairement

à Louis XV), Louis XVI s’entoure

de maquettes et de plans d’exécution

de vaisseaux, de vues des ports de France,

dont celui de Cherbourg, l’une des

grandes réalisations du règne. Expert

également en cartographie, le Roi corrige

lui-même les cartes. Ayant suivi

les voyages de Cook et leur tragique fi n,

il décide et participe à la préparation

de l’expédition scientifi que de La Pérouse.

Au-dessus de l’appartement privé,

Louis XVI dispose de dix laboratoires,

ateliers et bibliothèques dont un cabinet

de chimie, une galerie de physique

où il se livre à des expériences d’électricité,

un cabinet d’artillerie pour l’étude

des nouveaux fusils et canons, deux pièces

pour abriter ses cinq tours et une forge

auprès des ateliers de serrurerie

et de menuiserie.

22

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25

et spécialiste des serres chaudes, qui

va constituer, avec son fi ls Antoine, la plus

grande collection botanique d’Europe

(4000 variétés). Trianon devient alors un

véritable centre de recherche en botanique.

Durant plus de 30 ans, des plantes arrivent

du monde entier, rapportées par des

botanistes voyageurs ou échangées avec

des savants étrangers, tel le botaniste

suédois Linné. Ces nouvelles plantes sont

acclimatées dans trois types de jardins :

le fruitier, le fl euriste et le botanique, dotés

de serres chaudes et de bassins pour

les plantes aquatiques. En 1759, Bernard

de Jussieu, démonstrateur de botanique

au Jardin du Roi, réalise le catalogue

de ce jardin où les plantes se trouvent

distribuées suivant sa nouvelle méthode

dite « naturelle ». Duchesne y conduit

ses expériences sur le croisement

des fraisiers, études fondamentales

sur l’évolution des espèces.

agronomie

À partir de 1740, on assiste à un véritable

engouement pour l’agronomie et

l’économie rurale. À l’initiative personnelle

de Louis XV, des expériences agricoles

s’installent à Trianon contre la corruption

des blés, pour l’amélioration des cultures

fourragères et légumières. Par ailleurs, dans

son entresol du Château, Quesnay collecte,

avec ses amis physiocrates, des données

agricoles et économiques afi n d’établir

le Tableau œconomique (1758), représen-

tation schématique de l’économie

du royaume.

4-1 & 4-2

médecine, chirurgie, apothicairerie

En la matière, la Cour n’est pas le cadre

de véritables expérimentations, mais,

faisant appel aux meilleurs praticiens

et promouvant de nouvelles techniques,

elle participe à l’avancée des sciences

médicales. Les médecins du Roi Fagon,

Chirac, Helvétius, Sénac, Lassone

et Vicq d’Azyr, les chirurgiens Félix,

Maréchal, Dionis, La Peyronie,

La Martinière, les apothicaires Lémery

et Boulduc ont marqué leur époque

par leurs publications ou leurs pratiques.

Quand rois et princes soumettent leur

corps sacré et leur sang royal à l’acte

médical, ils lui confèrent valeur d’exemple

et de garantie : opération de la fistule

de Louis XIV, usages de nouveaux

remèdes à base d’antimoine, d’ipéca,

de quinquina, inoculation des princes

contre la variole après la mort de Louis XV.

Contre les charlatans et les empoison-

neurs, Louis XV crée la Commission

des remèdes secrets dont les membres

sont en majorité officiers de la Cour,

jusqu’à la création de la Société royale

de médecine (1778) qui prend le relais.

20

21

7 versailles, lieu de démonstrations

Présentation au Roi et démonstration

devant la Cour constituent la consécration

suprême, équivalente à un Prix Nobel.

Elles sont aussi destinées à être acquises

par la Couronne et à faciliter les débouchés

vers les manufactures ; les capitaux,

tant ceux du Trésor royal que ceux

des particuliers, sont concentrés à la Cour.

Comme on se méfie des charlatans

ou des fous, l’autorisation royale

n’est pas aisée à obtenir. Cependant

les présentations au Roi sont très

fréquentes ainsi que l’attestent La Gazette de France et Le Journal des Savants.La démonstration devant toute la Cour

est plus rare et tient davantage

de la science-spectacle. Elle divertit,

satisfait la curiosité pour les nouveautés ;

elle peut aussi servir au prestige

du royaume.

huit exemples de présentation au roi ou de démonstration devant la cour

- Le miroir ardent présenté par Villette en vue

de son acquisition par Louis XIV (1669) ;

- L’ expérience d’électricité de Nollet

dans la galerie des Glaces, cas typique

de science-spectacle (1746) ;

- La pendule de La Création du monde, présentée

à Louis XV pour servir la notoriété de son

inventeur Passemant, car elle a déjà un acquéreur

(1754) ;

- La carte de Cassini, afin de convaincre le Roi

de trouver les finances qui manquent à son

achèvement (1785) ;

- Le procédé de fabrication de la porcelaine dure,

pour promouvoir la production de la manufacture

de Sèvres (1769) ;

- La joueuse de Tympanon, acquise par la Reine

comme curiosité, et finalement remise

à l’Académie des sciences en considération

de sa valeur scientifique (1784) ;

- Le baquet de Mesmer, un exemple à la limite

du charlatanisme (1781) ;

- Enfin la Montgolfière des frères Montgolfier,

la plus célèbre des démonstrations devant

la Cour, qui assure à son inventeur le soutien

du Roi et sert le prestige du royaume

car tous les ambassadeurs des pays étrangers

y assistent (1783).

28

23. Pendule astronomique de Passemant (détail),1749-1753

24. Machine pneumatique de l’Abbé Nollet, 1750-1755

25. Microscope off ert par Louis XV au roi Stanislas, Alexis Magny, 1751

26. Louis XVI donnant ses instructions au capitaine de vaisseau La Pérouse, le 29 juin 1785, Nicolas André Monsiau, 1817

27. Pendule de la création du mondede Passemant, (détail), 1754

28. La joueuse de tympanon, Peter Kintzing et David Roentgen, 1784

26 octobre 2010 - 27 février 2011

4-1 & 4-2 Versailles, terrain d'expérimentation

Versailles off re, sur place et dans

ses dépendances, des ressources pour

la recherche : des espaces, des

collections, des équipements coûteux.

4-1

zoologie

À partir de 1660, l’anatomie animale

connaît un essor sans précédent.

La Ménagerie de Versailles y participe

en fournissant aux savants les cadavres

de ses animaux. En vue de la publica-

tion par l’Académie de l’Histoire naturelle des animaux, projet soutenu

par Colbert, Claude Perrault et

Du Verney procèdent aux dissections

qui ont parfois lieu sur place. En 1681,

Louis XIV assiste à celle d’un

éléphant et d’un crocodile. Plus tard,

La Peyronie, Premier chirurgien

de Louis XV, puis Buffon, le directeur

du Jardin royal à Paris (futur Jardin

des plantes), tirent profit du zoo

royal, notamment de la présence

du rhinocéros de Louis XV, pour leurs

études. Inspiré par Madame de

Pompadour, grande amie de Buff on,

Louis XV fait aménager à Trianon

de 1749 à 1751 une nouvelle ménagerie

« domestique », qui comporte une

vacherie, une bergerie, des poulaillers

et une volière. Elle est créée pour

la distraction, mais aussi pour l’utilité :

l’acclimatation de races étrangères,

notamment de vaches hollandaises,

et l’ amélioration des races autochtones.

À son tour, Louis XVI crée une ferme

modèle dans le domaine de

Rambouillet qu’il vient d’acquérir

pour l’acclimatation des mérinos,

en lien avec les études de Daubenton

sur le croisement du mouton.

Maréchaux-ferrants à la Petite Écurie,

de père en fi ls, les Lafosse, spécialistes

en hippiatrie, y font évoluer la

maréchalerie, l’anatomie et les sciences

vétérinaires.

4-2

botanique

Créé pour fournir les tables royales,

le Potager du Roi, de 9 hectares,

est aussi un lieu d’expérimentation

scientifique sous la direction

de La Quintinie. Plus que dans

la culture des melons, pêches, poires

ou petits pois où pourtant il fait

merveille, ses réelles innovations

concernent celle des asperges

et des figuiers ainsi que l’emploi

en grand nombre de cloches

et de châssis en verre de grand prix.

Au XVIIIe siècle, les Le Normand

y acclimatent le caféier et l’ananas.

Lorsque Louis XV décide en 1750

d’aménager à Trianon de nouveaux

jardins, il en confi e la direction

à Claude Richard, horticulteur

19

5 versailles, LIEU d'enseignement des sciences et des techniques

De Louis XIV à Louis XVI, l’ enseignement

princier des sciences – jusqu’alors,

enseignement « curieux » de phénomènes

scientifi ques et acquisition de connais-

sances pratiques de métiers –

se transforme en un enseignement

méthodique dispensé par les plus grands

savants, à la pointe des connaissances.

Les matières scientifi ques privilégiées sont

la géométrie pour l’art des fortifi cations

et l’artillerie, la géographie pour l’analyse

des cartes et des plans militaires,

et l’astronomie estimée digne des rois.

Au milieu du XVIIIe siècle, les sciences

expérimentales (physique, chimie)

prennent vraiment leur place à Versailles.

La connaissance des animaux

et la botanique s’enseignent au cours

de promenades à Trianon.

Puis les mathématiques s’émancipent

de la castramétation (art de choisir

et de disposer l’emplacement d’un camp

ou d’une place forte), et la marine devient

l’objet d’une science à part entière.

Sous Louis XIV, l’enseignement théorique

est complété par des déplacements

à l’Académie, à l’Observatoire, au Jardin

du Roi. Le jeune Louis XV visite

également des cabinets de particuliers.

À son retour à Versailles en 1722,

bibliothèques et laboratoires se dévelop-

pent. En 1744, Louis XV transforme

le prestigieux Cabinet des médailles

de Louis XIV pour le mettre à disposition

de l’abbé Nollet, savant électriseur, avant

que celui-ci ne se transporte à l’Hôtel

des Menus-Plaisirs et forme le Cabinet

de physique des Enfants de France.

À la veille de la Révolution, le cabinet de

curiosités ethnographiques du marquis

de Sérent est acquis pour les princes.

À côté d’instruments scientifi ques

(globes, trousses de mathématiques)

et de traités dédiés aux jeunes princes,

apparaissent les premiers instruments

pédagogiques, au premier rang desquels

fi gurent ceux de l’abbé Nollet.

6-1 & 6-2 versailles, lieu de pratiques princières

Dans les cabinets de Louis XIV, au milieu

de ses collections précieuses, rares

sont les instruments, textes ou manuscrits

scientifi ques ; car s’il protège les sciences,

Louis XIV ne les pratique pas, au contraire

de ses successeurs dont les cabinets

scientifi ques se développent sur trois

niveaux autour de la cour des Cerfs.

6-1pratiques et collections scientifiques de louis xv

La culture de Louis XV est nettement

à dominante scientifique. Dès 7 ans,

il se passionne pour la géographie et la

cartographie ; à 11 ans, il découvre

l’astronomie. En marge de son instruction,

il aborde l’anatomie et la chirurgie ;

de la médecine, il en vient à s’intéresser

à la botanique. Il lit beaucoup, consulte

assidûment les cartes de sa galerie

de géographie, assiste à des dissections,

herborise à Trianon, observe le ciel,

ne manquant aucun événement

astronomique. Dans le parc de son petit

château de La Muette, un Cabinet

d’optique et de physique abrite le plus

grand télescope existant alors.

Il recherche la compagnie des savants :

les astronomes Cassini II et son fi ls

Cassini de Th ury, les frères Lemonnier,

l’un astronome et l’autre médecin-

botaniste, le chirurgien La Peyronie,

et parmi les courtisans, le duc d’Ayen,

le duc de Croÿ, le duc de Chaulnes.

Ce dernier surtout est un savant

renommé, inventeur d’instruments

de mesure. Les collections d’art de

Louis XV ne sont plus des peintures,

des sculptures ou des pierres dures

mais des instruments scientifi ques dont

la pendule de Passemant est le plus

beau fl euron.

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19. Un ananas en pot, Jean-Baptiste Oudry, 1733

20. Antoine Parmentier (1737-1806), agronome et botaniste, François Dumont, l’Aîné, 1812

21. L’ Ange anatomique, Jacques Gautier Dagoty, 1746

22. Louis XV enfant recevant une leçon de mathématique en présence du Régent et du cardinal de Fleury, École française, début du XVIIIe siècle ©

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