SAUT A LA CORDE de la cour d'école à la compétition

PAR 0. GOMBEAU

Le rope skipping ou saut à la corde se veut d'abord une activité de mise en condition physique. Importée des Etats-Unis, elle devient une discipline de démonstration et même une activité sportive de compétition. Elle conquiert aujourd'hui les pays euro­péens.

Le saut à la corde peut être pratiqué individuelle­ment ou en groupe, avec une ou plusieurs cordes. La complexité des sauts, le maniement à diffé­rentes vitesses de rotation des cordes, la variété des manipulations dépendent des capacités d'adaptation de chaque individu ou du collectif. Chaque prestation s'appuie sur une musique dont le tempo est plus ou moins rapide selon le niveau d'habileté. Destiné à tous, petits, grands, sportifs ou non (plusieurs expériences ont été réalisées avec des non-voyants), cette activité offre des occasions non négligeables de participation, de répartition de rôles et de communication. Le saut à la corde peut aussi bien se pratiquer en salle qu'en plein air.

Participation Même avec des qualités physiques moyennes, on peut très vite réaliser un certain nombre d'exer­cices et prendre une part active au sein d'un groupe. Cette intégration est facteur de progrès tant dans les sauts que dans le maniement de la corde : elle facilite la régularité de la pratique et conduit aussi à prendre différentes responsabi­lités, à tenir différents rôles.

Communication Le travail commun débouchant sur une représen­tation nécessite au sein du groupe une réelle communication interne pour élaborer le projet, faire des choix et agir. Le spectacle, au cours duquel il s'agit de véhiculer l'image de la « bon­ne santé » (fitness). demande de véritables savoir-faire montrés aux membres du groupe et aux autres.

SAUT A LA CORDE ET EPS

Activité liée au maintien d'une bonne forme physique, à la lutte contre la sédentarité (point crucial aux U.S.A.), elle agit sur la santé et notamment la prévention des maladies cardio-vasculaires. Le saut à la corde développe égale­ment des qualités de base comme la coordination motrice, l'équilibre, la force musculaire (des jambes surtout), la souplesse, le sens du rythme et la détente verticale. Pratiquée pour elle-même ou comme préparation à d'autres sports (boxe, basket, volley. tennis, hockey, etc.) l'activité semble bien répondre au premier objectif général de l'EPS : « développer des capacités organiques, foncières et motrices ». Le saut à la corde offre aussi une « voie d'accès au domaine de la culture » en favorisant les interactions sociales, l'intégration, l'expression et la créativité. Elle assure aussi l'appropriation d'une pratique corporelle modulable, de la forme enjouée d'exercices aérobic à la recherche de la performance, pour son plaisir ou pour un épa­nouissement dans la compétition. Enfin, la philosophie qu'il exprime, les pro­grammes qu'il développe sont autant de moyens de s'approprier les connaissances fondamentales pour une bonne gestion de « ses potentialités et l'organisation de sa vie physique aux différents âges de l'existence ».

COMMENT PRATIQUER ?

La sécurité • Pour l'équipement : - une paire de chaussures de sport confortables, avec une semelle lisse et suffisamment épaisse pour amortir les chocs et éviter les blessures de type tendinite : - des vêtements souples. • Pour la pratique : - s'échauffer, c'est-à-dire commencer progressi­vement car le saut à la corde sollicite la fonction cardiaque de façon importante ; - être dans un espace pas trop restreint et suffi­samment aéré ; - sauter sur une surface plane et lisse ; - se réceptionner sur la plante de pieds puis le talon et non pas pieds à plat ; - être relâché et « économique » lors des sauts : - utiliser des cordes de longueur adaptée ; - terminer la séance par de la marche et des étire-ments.

Le matériel On distingue les exercices avec corde individuel­le, double corde et grande corde. La longueur doit être ajustée à la taille du sauteur (encadré 1) et selon les exercices. LA corde individuelle La « bonne » longueur se mesure en posant les deux pieds sur la corde : les poignées doivent arriver aux aisselles. La corde doit tourner faci­lement et être munie de poignées. Il en existe plusieurs types : - beeded skipping rope : ce sont des cordes de nylon tressé entourées de pièces de plastiques (succession de petits manchons). Elles gardent un bel arc lorsqu'elles tournent et permettent un bon travail aérobie. Elles sont ajustables mais

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dans certaines manipulations elles ne sont pas assez rapides. De plus elles peuvent faire mal quand elles heurtent le sauteur ; - speed style skipping rope : ce sont des cordes de vinyle (souple) attachées à une poignée de plas­tique. Elles sont plus légères que les cordes de nylon et tournent plus rapidement. LA double dutch rope Elle est utilisée pour les exercices à deux cordes, tournées par des partenaires : - speed style : elles ont l'avantage d'être légères et adaptées à la manipulation rapide. Cependant elles sont difficiles à contrôler et peuvent rebon­dir au sol ; - cloth : elles ne sont pas très lourdes et surtout faciles à contrôler. Elles gardent une belle forme lorsqu'elles sont tournées doucement et ne rebondissent pas au sol, ce qui représente un avantage dans beaucoup d'exercices de double : - beeded : elles sont lourdes mais gardent une belle forme surtout lorsqu'elles sont utilisées en extérieur. Le bruit qu'elles font lorsqu'elles rebondissent au sol aide à développer le sens du rythme. Les grandes cordes Elles peuvent être de type « speed » ou en vinyle.

La musique Elle est utilisée pour donner le rythme : il est pré­férable d'utiliser des musiques avec un tempo bien marqué et régulier. A titre indicatif, un élè­ve qui marque chaque temps d'un tempo de 100 battements par minute (2 pieds ensemble ou alternativement) saute 100 fois dans une minute. Ainsi, selon les niveaux nous conseillons : - 100 à 120 battements par minute pour les débu­tants ; - 120 à 130 pour les débrouillés : - 130 à 150 pour les perfectionnés.

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EXERCICES

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CORDE SIMPLE

Seul avec une corde IM cloche (schéma 1) - sauter devant et derrière une ligne, pieds joints

Le skieur (schéma 2) - sauter a droite et à gauche d'une ligne, pieds joints.

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3 LA spirale (schéma 3) - un tour avec la corde sur la droite. - ouvrir la corde et sauter, - un tour à gauche. - sauter, etc. Variante : la pagaie - un tour à droite suivi d'un tour à gauche avec la corde puis sauter.

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Le croisé-décroisé (schéma 4) - sauter une fois corde ouverte en tournant vers l'avant. - une autre fois en croisant les bras devant le corps.

L'écarté-serré (schéma 5) Sauter en tournant la corde vers l'avant en se réceptionnant : - une fois pieds joints, - une fois pieds écartés.

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Variante : (schéma 6), au lieu du « serré » : - croisé pied droit derrière pied gauche, - pied gauche derrière pied droit, - alterner.

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Le devant-derrière (schéma 7) Sauter et se réceptionner : - pied droit devant, pied gauche derrière. - l'inverse.

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Le pointé (schéma 8) - sauter sur le pied gauche en pointant le talon droit devant. - sauter sur les deux pieds. - puis pointer le talon gauche devant, etc.

Le french-cancan (schéma 9) - sauter en montant le genou droit. - rassembler les deux pieds, - sauter en lançant la jambe droite tendue devant. - idem avec la jambe gauche. Variante : idem, départ accroupi.

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Le jogger (schéma 10) - sauter d'un pied sur l'autre et passer la corde à chaque changement d'appui.

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Le demi-tour ( 180°) (schéma 11 ) - sauter vers l'avant pieds joints, - passer la corde à droite du corps en la tenant avec la main droite, - effectuer un demi-tour. - reprendre la corde à deux mains et enchaîner des sauts. - idem la corde à gauche. H

Les doubles sauts (schéma 12) - deux passages de corde pour un saut. Le tour complet (360°) - effectuer une volte et sauter dans la corde en même temps.

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La spirale croisée (schéma 13) - un tour de la corde à droite du corps. - sauter en croisant le bras droit sur le bras gauche.

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Par 2 avec une corde Une corde et deux sauteurs (schéma 14) - tenir la corde de la main droite pour le sauteur de droite, de la main gauche pour celui de gauche, sauter ensemble dans la même corde.

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Variantes - un sauteur tient la corde de la main droite, son partenaire tourne la corde à la place de la main gauche du sauteur (schéma 15), - sauter en même temps, le sauteur est devant le tourneur (schéma 16).

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Une corde, un sauteur, un visiteur (schéma 17) - faire entrer un partenaire devant soi, - sauter ensemble, puis passer sous le bras pour aller sauter derrière lui.

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Par 2 avec deux cordes La roue chinoise (schéma 18) - une corde en haut et une en bas. Chacun saute en même temps mais « décalé » ; dissociation du travail des bras.

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DOUBLE CORDE

Par 3 (schéma 19) - tenir une corde dans chaque main ; celle tenue dans la main gauche tourne dans le sens des aiguilles d'une montre, l'autre dans le sens inverse. - entrer pour sauter au milieu des deux cordes.

Variantes - sauter en plus avec sa propre corde, - entrer en effectuant une rondade, un saut de main. etc.

DESSINS : VÉRONIQUE SUSTRAC PHOT

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- réaliser les figures décrites en corde simple ou double corde (schéma 20).

LE ROPE SKIPPING AUX ÉTATS-UNIS

11 tient compte du public auquel il s'adresse et fait référence aux préoccupations de bonne santé cardiaque, forme physique, challenge personnel, esprit d'équipe, image de soi et propre estime, partage des responsabilités, etc. La pratique s'organise autour de trois grandes orientations : les exercices axés sur la régularité et la forme physique (fitness) ainsi que les chal­lenges, les stages d'entraînement et de démons­trations, enfin la compétition.

Les challenges Ils consistent soit : - à tenir un journal de son propre investissement pendant six semaines, selon les règles établies par un protocole (skipping diary) qu'il faut faire contrôler par son professeur ; - à s'engager avec un partenaire, et pratiquer régulièrement pendant au minimum quatre semaines, puis noter les progrès réalisés (skipa-long) ; - à faire signer lors d'une journée promotion­nelle son carnet par dix autres participants avec qui on aura totalisé 100 sauts (1000 skips challenge) : - à établir un record de sauts pendant un ou deux jours (skip to a million).

Les entraînements et les démonstrations Le saut à la corde peut être pratiqué dès l'âge de 7 ans. La constitution d'une équipe de démons­tration et de promotion permet, lors de stages par exemple, de former d'autres sauteurs ou des enseignants. Le recrutement est d'abord base sur les qualités psychologiques et morales des participants qui doivent présenter une attitude positive plus qu'un savoir-faire exceptionnel.

Les compétitions La fédération internationale a récemment été créée (octobre 1991). Elle regroupe des clubs pionniers originaires d'Indiana. du Tennessee et de Californie. Elle tente d'établir un « code de pointage ». décrivant les différents sauts ou maniements ainsi qu'un lexique unique, utili­sable pour classer et comparer les valeurs des démonstrations. La compétition peut se présenter sous deux aspects : - les « records days » : il s'agit de tenter de battre un record de sauts sans erreur, par exemple le plus de sauts avec la corde qui tourne en avant, en arrière, seul ou à plusieurs dans une grande corde (10 participants), le plus de sauts possible en un temps donné (30 sec.), le plus de sauts pen­dant 1 ou 2 minutes en double, etc. - la compétition : elle se déroule sur deux registres, les exercices de rapidité et les enchaî­nements libres. Les prestations peuvent se faire avec une seule corde, en individuel ou par deux, en double corde, en individuel ou par quatre, enfin en groupes.

Odile Gombeau Professeur EPS.

Lycée français Charles de Gaulle. Baden-Baden.

1 - La longueur des cordes Corde individuelle - pour une taille intérieure à 1 m 50: 2.13 m (7 pieds), - de 1 m 50 à 1 m 65: 2,44 m (8 pieds), - de 1 m 65 à 1 m 75 : 2,75 m (9 pieds), - adultes de plus de 1 m 75 : 3,05 m (10 pieds). Double corde de 3,10 m à 4,50 m (10 à 13 pieds). Grande corde de 9.80 m à 11 m (32 à 36 pieds).

La découverte du rope skipping Le service des sports de la direction de l'enseignement français en Allemagne a favorisé des contacts réguliers avec les collègues EPS des différentes nationalités exer­çant dans ce pays (canadiens ou américains facilités par la présence de leurs forces stationnées en ex-RFA). Chaque nation prend en charge l'organisation de séminaires au cours desquels de fructueux échanges pédagogiques, didactiques et humains sont l'occasion de découvrir d'autres pratiques physiques. C'est ainsi qu'en septembre 1991, nous avons approfondi nos connaissances du rope skipping, en assistant à des démonstrations et en prati­quant différents exercices. Un groupe de « jumpers » amé­ricains a effectué une tournée en Allemagne en janvier 1992 dont un passage au lycée de Baden-Baden. En avril et mai de la même année, deux groupes d'élèves (26 gar­çons et filles) accompagnés de trois enseignants d'EPS se sont rendus à deux reprises une semaine aux Etats-Unis pour s'entraîner avec les membres de la fédération mon­diale. Activité très développée au Canada et aux USA depuis une quinzaine d'années, le rope skipping prend souche en Allemagne et se répand dans toute l'Europe (Belgique. ex-RDA, Espagne, Danemark. Royaume-Uni, Hongrie). En octobre 1992, l'association française de rope skipping voit le jour et l'association sportive de lycée intègre ce nouveau sport dans son projet pour l'année scolaire 1992/93.

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