rem · 2) Choix des axiomes: la question de l'évidence . Les caractéristiques générales des...

81
. Journal pour les enseignants de mathématiques du premier cycle de l' secondaire Ouverture\vers les sciences et les technologies édité par N° 47 1 rem 1997 -1998 de Grenoble

Transcript of rem · 2) Choix des axiomes: la question de l'évidence . Les caractéristiques générales des...

. Journal pour les enseignants de mathématiques du premier cycle de l'el1~eignementsecondaire

Ouverture\vers les sciences et les technologies

• édité parN° 47 1rem

1997 -1998 de Grenoble

JOURNAL POUR LES ENSEIGNANTS DE MATHEMATIQUES DU

PREMIER CYCLE DE L'ENSEIGNEMENT SECONDAIRE

Ouverture vers les Sciences et les. Technologies

petit x

1997-1998 n° 47

Comité de rédaction

Denise Grenier IUFM d'Aquitaine Laboratoire Leibniz Centre de Pau

René Berthelot

Université 1. Fourier - Grenoble

Annie Bessot Paule Kober Laboratoire Leibniz IUFMdeNice Université J. Fourier - Grenoble Irem de Grenoble Alain Mercier

IUFM d'Aix-Marseille Antoine Bodin Collège d'Ornans Nadine Milhaud Irem de Besançon

I.P.R. Rectorat de Toulouse Bernard Capponi

Lycée Aristide Bergès, Seyssinet Laboratoire Leibniz Robert Noirfalise Irem de Grenoble Irem de Clermont-Ferrand

Gérard Chauvat Marie-Jeanne Perrin-Glorian IUT GE II Irem, Université Paris VII Tours Paris

François Conne Jean Portugais Chercheur en didactique des mathématiques

Didactique des mathématiques La Romanèche Université de Montréal Etoy (Suisse)

Ruhal Floris Jean-Claude Rauscher Collège Voltaire et FAPSE Université de Genève IUFM d'Alsace Carouge (Suisse) Irem de Strasbourg

Régis Gras I.R.M.A.R. Campus de Beaulieu Rennes

Rédacteurs en chef: Annie Bessot et Bernard Capponi Irem de Grenoble

B.P. 41 - 38402 Saint-Martin-d'Hères Cedex

© 1997-1998 - Irem de Grenoble - Tous droits réservés pour tous pays. ISSN 0759-9188. Directeur de publication le Directeur de l'Irem Claude Moser Composition, Annie Bessot et Bernard Capponi, Irem de Grenoble Gestion de la revue, Huguette Ghisolfi, Irem de Grenoble

petit x Abonnement : année 97-98 Irem de Grenoble B.P.41 nO 46-47-48 38402 Saint-Martin d'Hères cedex FRANCE

JOURNAL POUR LES ENSEIGNANTS DE MATHEMATIQUES DU

PREMIER CYCLE DE L'ENSEIGNEMENT SECONDAIRE Ouverture vers les Sciences et les Technologies

Abonnez-vous et faites abonner le centre de documentation de votre collège

Renouvellement D Premier abonnement D

abonnement pour France Etranger

1 an (97-98) 190 F 250 F

2 ans (97-98 et 98-99) 340 F 420 F

Renvoyez ce bulletin d'abonnement à l'adresse ci-dessus et joignez un bon de commande ou un chèque à l'ordre de M. l'agent comptable de l'Université Joseph Fourier - Grenoble 1

Nom n° d'abonné ..

Adresse .

A conserver : n° d'abonné

Je suis abonné pour D 1 an 97-98 (nO 46-47-48)

D 2 ans 97-98/98-99 (du n° 46 au n° 51) Donnez votre n° d'abonné dans toute correspondance Paiement par chèque n° banque ou CCP

La revue dispose de correspondants en Suisse et au Canada. Si vous résidez dans ces deux pays, adressez-vous directement à eux. En Suisse*, à François CONNE ou Ruhal FLORIS. Au Canada**, à Jean PORTUGAIS.

* François CONNE, Chercheur en didactique des mathématiques, La Romachère, Etoy. Ruhal FLORIS, Didactique des mathématiques, équipe de Jean Brun, FAPSE, Université de Genève, 9, route de

Drize, CH-1227 Carouge. Tél. (41) 22-705-98-36. Fax (41) 22-300-14-82. E-mail. [email protected] ** Jean PORTUGAIS, Université de Montréal, Faculté des sciences de l'éducation, Département de didactique, C.P. 6128, succursale Centre-ville, Montréal (Québec) H3C 3J7. Tél. (514) 343-7102. Fax (514) 343-7286. E-mail. [email protected]

SOMMAIRE

Les limites d'un enseignement déductif de la géométrie (G. Arsac)....... 5

Activité ... Ami chemin (G. Verplancke) '" 32

Les problèmes "concrets à mettre en équation" dans l'enseignement (L. Coulange) .

Le travail personnel des élèves (N. Milhaud). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59

Musée 71

Activité Encore un pliage 79

Liste des auteurs 80

«petit x» n° 47, p. 3, 1997 - 1998

Le journal « petit x » :un jouTIlal pour le collège

Le journal «petit x» a été créé en 1983 par l'IREM de Grenoble pour favoriser la diffusion œ réflexions, de comptes rendus de travaux et d'activités réalisés dans les classes du premier cycle œ l'enseignement secondaire principalement dans le domaine des mathématiques mais avec une ouverture

vers les sciences physiques et la technologie.

Le journal «petit x» s'intéresse aussi aux problèmes des transitions d'une part entre l'école

primaire et le collège, d'autre par entre le collège et le lycée. C'est pour cela qu'on pourra y trouver des

articles concernant le cycle moyen et le cycle de détermination (seconde)

Ses principaux objectifs sont: - en ouvrant largement ses pages à des approches diverses, de constituer un lieu d'échanges et œ

débats sur les problèmes soulevés par l'apprentissage et l'enseignement des sciences au collège. - d'ajouter un moyen nouveau de fonnation continue à ceux déjà disponibles dans les IREM, et œ

constituer ainsi un complément aux stages de fonnation et aux publications thématiques déjà existantes. La revue « petit x » est ainsi un outil précieux pour les professeurs enseignant dans les IUFM.

- de constituer plus particulièrement un moyen de diffusion des travaux sur l'enseignement notamment en ce qui concerne les recherches en didactique des mathématiques. La revue «petit x »

constitue un lieu d'interactions entre les enseignants et les chercheurs. Les articles publiés sont pour l'essentiel des types suivants: - Vécu dans les classes: présentation et description d'activités ou de séquences d'enseignement

effectivement réalisées dans les classes de collège. - Outils et documents : dans chaque numéro présentation d'activités directement exploitables

dans les classes et régulièrement de documents et de commentaires sur des aspects historiques de notions. - Recherches et réflexions : compte rendus de travaux portant sur des problèmes

d'enseignement ou d'apprentissages en mathématiques.

- Formation des enseignants La revue « petit x » examine aussi tous les articles qui rentrent dans le cadre de ses préoccupations

et décide ou non de leur publication, éventuellement sous la fonne de courrier des lecteurs ou de tribune libre.

PROPOSITION D'ARTICLE

Les articles soumis pour publication dans la revue « petit x» doivent être envoyés sous la fonne d'un fichier infonnatique (disquette ou document attaché à un courrier électronique1) dans un traitement de texte courant. (word 5 ou 6). Indiquer si l'article a déjà été publié ou s'il a été proposé à d'autres revues.

Les textes sont examinés par deux lecteurs au moins. Dans le cas où ils sont acceptés pour

publication, il est demandé à l'auteur de fournir le texte définitif également sous la fonne d'un fichier infonnatique.

1 à [email protected] ou [email protected]

Copyright: Le « copy right » de la revue est détenu par l'Irem de Grenoble qui accordera cependant aux auteurs, sur demande et sans frais, l'autorisation de faire ré-imprimer leurs articles. Ils devront mentionner « petit x» pour première publication, ainsi que le fait que c'est l'Irem de Grenoble qui détient le Copyright.

LES LIMITES D'UN ENSEIGNEMENT DEDUCTIF

DE LA GEOMETRIE.

Gilbert ARSAC Institut Girard Desargues,

Université Claude Bernard, Lyon 1

Introduction.

Cet article est divisé en quatre parties : les deux premières constituent une analyse théorique, les deux suivantes la mettent en œuvre pour analyser des observations de classe.

L'analyse théorique vise à montrer que des problèmes rencontrés dans l'enseignement de la géométrie, comme le rôle à attribuer respectivement à la lecture de la figure et à la démonstration, la place de l'évidence et de l'intuition, sont liés à la nature même du contenu à enseigner et surtout que cette affirmation assez banale peut être précisée en utilisant comme outil d'analyse le travail d'axiomatisation de la géométrie entrepris à la fin du dix-neuvième siècle et couronné par l'ouvrage de Hilbert "Les fondements de la géométrie".

Ces réflexions théoriques sont ensuite mises en œuvre pour interpréter les observations réalisées dans deux situations de classe, l'une expérimentale, l'autre "courante". On constate en particulier comment une analyse a priori presque exclusivement mathématique permet de comprendre la nécessité de certaines décisions de l'enseignant qui se traduisent par des manipulations du contrat didactique

«petit x» nO 47, pp. 5 à 31, 1997 - 1998

6

Plan détaillé

1)"Ce que peut être une axiomatique de la géométrie"

Partant de la remarque d'Aristote que dans une science démonstrative on ne peut ni tout démontrer, ni tout définir, ce qui introduit le problème des axiomes et des mots premiers, j'examine les solutions apportées par Pascal et Hilbert. Je montre ensuite que dans la mesure où le travail sur les fondements des mathématiques se conclut fmalement par une arithmétisation, le problème du rôle que jouent nécessairement l'intuition et l'évidence dans l'apprentissage de la géométrie est dévolu entièrement à l'enseignement.

2) Choix des axiomes: la question de l'évidence

Les caractéristiques générales des discours déductifs s'appliquent en particulier au contenu enseigné en géométrie aussi bien qu'au discours de l'enseignant. Ceci pose les questions suivantes: dans l'enseignement de la géométrie, quels sont les axiomes, les mots premiers? Quel rôle joue explicitement et implicitement la notion d'évidence?

Comme l'enseignement de la géométrie a été longtemps dépendant de la pratique euclidienne, je reviens sur la géométrie d'Euclide et je montre que l'axiomatisation de la géométrie, telle qu'elle a été effectuée par Hilbert, est un outil de réponse aux questions précédentes aussi bien en ce qui concerne Euclide que l'enseignement contemporain.

3) Contrat didactique et gestion de l'évidence

Le paragraphe précédent montre que l'évidence joue nécessairement un grand rôle dans l'enseignement de la géométrie, que ce soit explicitement pour les énoncés qui jouent dans les faits un rôle d'axiome, ou implicitement pour la lecture sur le dessin de certaines propriétés indispensables au raisonnement. Ceci pose les questions suivantes:

du point de vue du contrat didactique, quelle gestion de l'évidence dans la classe? Qui décide qu'un énoncé aura un caractère d'évidence et pourra donc être utilisé comme un axiome, même si ce mot n'est pas prononcé; quel est le rôle du dessin dans les évidences explicites et implicites? Ce qui est déclaré comme évident par l'enseignant l'est-il pour l'élève?

L'examen d'une situation de classe expérimentale, celle du "triangle aplati" permet de montrer que ces questions se posent effectivement.

4) Contraintes mathématiques sur la gestion de classe de l'enseignant

Il s'agit ici d'étudier les mêmes questions que dans le paragraphe 3, maIS avec plusieurs différences:

- la situation de classe observée n'est plus une situation expérimentale mais une situation de classe "réelle".

- l'étude précédente était centrée sur l'élève et avait surtout un caractère cognitif, même si des conclusions étaient tirées à propos du contrat didactique. Ici l'étude est centrée sur l'enseignant et vise à montrer comment certaines caractéristiques du contenu

7

mathématique lui-même l'amènent à manipuler les règles du contrat didactique. Ainsi l'étude est plutôt épistémologique et elle montre en particulier qu'une analyse a priori à base presque uniquement mathématique permet de prévoir le comportement de l'enseignant.

1. Ce que peut être une axiomatique de la géométrie

1.1. Termes primitifs et axiomes : le problème

Comme l'explique Pascal (1985) dans "De l'esprit géométrique", une théorie mathématique commence par le choix de mots premiers, d'axiomes et de définitions.

En effet, la définition du sens d'un mot utilise d'autres mots, donc si l'on veut n'employer que des mots bien définis, il faut aussi défmir les mots employés dans les définitions, ce qui amène à une régression à l'infini ou bien à la circularité bien connue des définitions des dictionnaires. Ainsi, il faut nécessairement renoncer à tout définir et

disposer d'un stock de mots que l'on ne défmira pas, que nous désignerons par mots premiers ou termes primitifs. De même, on ne peut démontrer la vérité d'un énoncé qu'à partir de celle d'autres énoncés déjà connus pour vrais, et si l'on veut tout démontrer, on sera conduit là aussi à une régression à l'infini, il faut donc admettre sans démonstration certains énoncés, ce seront les axiomes.

1.2. Termes primitifs et axiomes la solution de Pascal

"la géométrie [...] ne défmit aucune de ces choses, espace temps mouvement nombre égalité ni les semblables qui sont en grand nombre, parce que ces termes là désignent si naturellement les choses qu'ils signifient, à ceux qui entendent la langue, que l'éclaircissement qu'on en voudrait faire apporterait plus d'obscurité que d'instruction" (Pascal, de l'esprit géométrique, sectionl).

Ainsi, pour Pascal, les termes primitifs sont associés à des notions naturelles qui sont communes à tous ceux qui entendent une langue: "il y a des mots incapables d'être défmis", mais "la nature a suppléé à ce défaut par une idée pareille qu'elle a donnée à tous les hommes". Et Pascal se moque de la confusion dans laquelle on tombe en voulant défmir des mots comme celui de temps. Retenons cette idée essentielle que nous possédons naturellement un certain nombre de mots dont l'usage est commun à tous les hommes. Pascal résumera ce point de vue dans la première de ses trois règles pour les définitions que nous reproduisons ci-après:

Règles pour les définitions -1. N'entreprendre de défmir aucune des choses tellement connues d'elles-mêmes, qu'on n'ait point de terme plus clairs pour les expliquer. -2. N'admettre aucun des termes un peu obscurs ou équivoques, sans définition. -3. N'employer dans la définition des termes que des mots parfaitement connus, ou déjà expliqués. (Pascal, de l'esprit géométrique, section II)

8

Pascal n'ira pas plus loin, il ne donne pas de liste précise de tennes primitifs, dont on a vu d'ailleurs dans la citation ci-dessus qu'il souligne qu'ils sont lien grand nombre" : on pourra se pennettre d'employer sans autre fonne de procès, dans un texte mathématique, tous les mots satisfaisant à la règle 1 sans que le nombre en soit limité a pnon.

Ayant ainsi réglé par appel à la lumière naturelle le problème des tennes primitifs, Pascal donne une solution analogue au problème des axiomes:

Règles pour les axiomes.- 1. N'admettre aucun des principes nécessaires sans avoir demandé si on l'accorde, quelque clair et évident qu'il puisse être. -2. Ne demander en axiomes que des choses parfaitement évidentes d'elles-mêmes. (Pascal, de l'esprit géométrique, section II)

Ici aussi, l'appel à des connaissances communes à tous les hommes sert de base à la solution, ceci est repris négativement dans la première des règles pour les démonstrations:

Règles pour les démonstrations -1) N'entreprendre de démontrer aucune des choses qui sont tellement évidentes d'elles-mêmes qu'on n'ait rien de plus clair pour les prouver. -2)...(Pascal, de l'esprit géométrique, section II)

Cette règle énonce en somme que toute propriété évidente devra être prise comme aXlOme.

Notons que dans le bref fragment conservé des éléments de géométrie qu'avait entrepris d'écrire Pascal est amorcée une liste précise d'axiomes, désignés comme "théorèmes connus naturellement", alors qu'on ne trouve pas de liste précise de tennes primitifs: la pratique de Pascal est confonne à sa théorie et à la tradition euclidienne puisque les Éléments d'Euclide comportent une liste d'axiomes, mais pas de liste de tennes primitifs.

La position de Pascal est en fait assez proche de celle d'Aristote : mots premiers (tennes non défmis) et axiomes sont considérés comme évidents. C'est cette évidence qui rend non seulement illusoire mais superflue toute défmition pour les mots premiers et toute tentative de preuve pour les axiomes. Notons toutefois que chez Pascal, la lumière naturelle qui rend oiseuse la défmition des mots premiers conduit seulement à un accord sur le sens ordinaire du discours "ainsi, ce n'est pas la nature de ces choses que je dis qui est connue de tous; ce n'est simplement que le rapport entre le nom et la chose" (De l'esprit géométrique, section l, cf. aussi le commentaire de Chevalley, 1995, p. 35). Autrement dit, tout le monde sait de quoi on parle quand on parle de point ou de droite, mais ceci n'implique pas que tout le monde se fasse la même idée de la nature du point et de la droite.

9

1.3. Termes primitifs et axiomes : la solution de Hilbert

Pour Pascal, les mots premiers avaient un usage fixé par la lumière naturelle, et, en conséquence, n'avaient pas besoin d'être définis. Hilbert prend en quelque sorte cette conséquence comme caractérisation des mots premiers: ce sont ceux que l'on ne définira pas.

Pour Pascal, nous disposions d'un immense stock de mots premiers. Hilbert, lui, en donne une liste fmie et exhaustive qui dans le cas de la géométrie se réduit aux six mots : point, droite, plan, entre, incident. congruent. Notons tout de suite que le mot incident admet des équivalents linguistiques: au lieu de dire qu'un point est incident à une droite ou qu'une droite et un point sont incidents, on poun-a dire que le point est sur la droite ou que la droite passe par le point, etc..... Ces mots premiers n'ont a priori pas d'autres propriétés que celles que vont fixer les axiomes.

La légende raconte d'ailleurs qu'Hilbert s'était aperçu que fmalement on pouvait remplacer les mots premiers par n'importe quels mots du langage courant, comme bière ou chaise, pourvu qu'on leur impose les règles opératoires définies par les axiomes. Ainsi, les mots premiers sont en droit indépendants de l'intuition, mais Hilbert ne dissimule pas que, en fait, les axiomes qui les relient sont inspirés par l'intuition. Voici des extraits de son texte:

Comme l'arithmétique, la géométrie n'exige pour son élaboration qu'un petit nombre de propositions fondamentales simples. Ces propositions sont les axiomes de la géométrie. Depuis Euclide, l'établissement de ces axiomes et l'étude de leurs relations ont fait l'objet de travaux nombreux et excellents. Ce problème est celui de l'analyse de notre intuition de l'espace.[...]. (Hilbert, 1899, introduction, p. 10-11)

Voici maintenant la présentation des axiomes par Hilbert :

Définition: "Nous pensons trois systèmes différents de choses; nous nommons les choses du premier système des points ; nous les désignons par des majuscules A, B, C, ... ; nous nommons droites les choses du deuxième système et nous les désignons par des minuscules a, b, c, ... ; nous appelons plans les choses du

troisième système et nous les désignons par les caractères grecs, a, ~, X, ... Les points constituent les éléments de la géométrie linéaire; les points et les droites sont les éléments de la géométrie plane ; enfm les points, les droites et les plans sont ceux de la géométrie de l'espace ou de l'espace lui-même.

Entre les points, les droites et les plans, nous imaginons certaines relations que nous exprimons par des expressions telles que "être sur", "entre", "congruent"; la description exacte et appropriée au but des mathématiques de ces relations est donnée par les axiomes de la géométrie. [...] (cf. Hilbert, loc. cil., ch 1, §l, p. Il).

Ainsi, d'une part, Hilbert ne dissimule pas que son but est bien d'analyser l'intuition de l'espace, et d'autre part, sa présentation des axiomes et des mots premiers fait usage non seulement de mots de la langue courante, comme "penser", "majuscules", etc...mais aussi de mots à la frontière entre cette langue et la langue mathématique :

10

"système", "différent", "chose" en opposition à "relation", "espace"...Le statut de ces derniers mots est manifestement celui des mots premiers au sens de Pascal : par exemple, tout le monde doit être d'accord sur le fait qu'un point et une droite sont des "choses" mais que le fait que le point soit sur la droite est une "relation " entre ces choses qui s'exprime par le mot premier incident sous la fonne : le point A et la droite a sont incidents qui admettra pour expression synonyme le point A est sur la droite a, ou la droite a passe par A. Tout commentaire sur la nature des "choses" et des "relations" serait oiseux. L'usage courant de la langue, qui d'ailleurs ici, en ce qui concerne la notion de relation, présuppose un minimum de culture mathématique antérieure, fournit un réservoir inépuisable de tels mots. Il est vrai qu'au total, le langage mathématique, fort pauvre, n'en utilise pas beaucoup.

Ainsi, la compréhension du travail de Hilbert repose en partie sur une appréhension du sens courant d'un certain nombre de mots ce qui, pour certains d'entre eux, suppose manifestement une culture mathématique antérieure. Ceci souligne que cet exposé de Hilbert ne saurait être une initiation à la géométrie et met en évidence les limites de la rigueur de cet exposé. Cette limitation de la "rigueur" est inévitable pour toute science qui s'exprime dans un langage, or il semble difficile d'imaginer une science non exprimée dans un langage, c'est même, d'après Aristote, l'une des conditions pour qu'un savoir mérite le nom de science...(cf. Granger, 1994, ch.13 : l'explication dans les sciences sociales, p. 244).

1.4. Synthèse

1) Pour Hilbert, et pour tous les mathématiciens me semble-t-il, l'énoncé des axiomes de la géométrie se fonde sur les propriétés intuitives des points, droites etc... On pourrait dire que c'est la position d'Euclide et interpréter, en partie, l'histoire des débats sur les fondements de la géométrie comme celle d'une défiance croissante vis-à-vis des vérités considérées comme intuitivement évidentes, mais qui aboutit à la constatation qu'on ne peut pas s'en passer totalement.

2) Une fois les axiomes énoncés on doit vérifier que l'emploi des objets de la géométrie qui est fait dans la démonstration fmale d'une propriété (mais pas dans la recherche, qui, elle, fait appel à l'intuition) ne fait usage que des relations exprimées dans les axiomes et les définitions et est en droit indépendant de toute interprétation des objets de la géométrie. Cette idée est clairement exprimée par Pasch en 1882, et déjà présente chez Gergonne, au début du dix-neuvième siècle: les axiomes donnent en quelque sorte une définition implicite des objets mathématiques qui y figurent en disant ce que nous pouvons affirmer d'eux (cf. Kline, 1980, p. 349, et pour le texte de Pasch, Blanché R.(1955) p. 29-31, cité in Guichard J., 1993,). On peut dire que cette position est admise depuis par tous les mathématiciens à l'exception peut-être de certains intuitionnistes.

3) On peut alors fonnaliser entièrement la rédaction de la démonstration en créant en particulier un symbolisme pour la logique, éliminant ainsi tout recours à langue courante, et étudier les suites de symboles (objets concrets) que constituent alors les démonstrations, c'est le programme connu sous le nom de fonnalisme de Hilbert. Voici des extraits de la conférence de 1927 où il le précise:

11

[... ] Depuis cinq ans, j'étudie les fondements des mathématiques en élaborant une théorie nouvelle de la démonstration. Je voudrais réduire tout énoncé mathématique à la présentation concrète d'une formule obtenue rigoureusement et donner ainsi aux notions et déductions mathématiques une forme irréfutable montrant bien l'ensemble de la science.[ ... ] Comme toute autre science, la mathématique ne peut pas être construite sur la seule logique. Une donnée est indispensable, composée d'objets concrets, résultant d'une expérience antérieure à la pensée. [...] En mathématiques, les objets que nous examinons sont de signes qui pour nous sont clairs et reconnaissables.[...] L'idée fondamentale de ma théorie de la démonstration est la suivante.

Toutes les phrases qui énoncent des propriétés mathématiques seront traduites en formules. Celles-ci se distinguent des formules mathématiques par la présence, en plus des signes habituels, de signes logiques." (Hilbert, 1899, Rossier éditeur, appendice IX, p. 261)

Il me semble abusif de déduire de ce texte, qui expose une méthode de travail pour attaquer le problème du fondement des mathématiques, que Hilbert avait oublié ce qu'il écrivait au sujet de l'intuition dans son ouvrage sur les fondements de la géométrie, que nous avons cité plus haut, et qu'il n'a d'ailleurs pas modifié dans l'édition de 1930 (septième édition, la dernière publiée du vivant de Hilbert). Ainsi, il me semble légitime d'admettre que Hilbert était d'accord avec les points 1 et 2 de la synthèse ci-dessus tout en adoptant un point de vue formaliste quant au problème du fondement des mathématiques. Notons que Hilbert n'a jamais appliqué son programme aux fondements de la géométrie en ce sens qu'il n'a pas formalisé complètement les démonstrations de son ouvrage.

La position de Hilbert apparaît comme la conclusion de la chasse à l'évidence à laquelle se sont livrés les mathématiciens de la fm du dix-neuvième et du début du vingtième siècle, période dont Bouligand pourra parler comme celle du "crépuscule des évidences" (cf. Pont, 1995). Or l'évidence repose sur la référence à un donné "intuitif', la chasse à l'évidence apparaît donc comme une chasse à l'intuition, ce qui ne fut pas accepté sans débat. Voici ce qu'écrit Picard à propos de travaux de Lebesgue (cité d'après Gispert, 1995) :

Monsieur Lebesgue [...] n'est toutefois pas un intransigeant. On ne trouve pas chez lui cette méfiance de l'intuition qui est devenue une manie chez certains de nos contemporains.

Baire au contraire, écrit (cf. Gispert, loc. cit.):

[... ] certaines théories de physique, de chimie, de minéralogie, ne sont pas sans présenter quelque analogie avec le discontinu mathématique. Dans tous les cas, en dépit du vieil adage heureusement démodé, rien ne permet d'affirmer "que la nature ne fait pas de saut". Dans ces conditions, le devoir du mathématicien n'est-il pas de commencer par étudier, in abstracto, les rapports de ces deux notions, continu et discontinu ?

On remarque dans cette citation un double mouvement: le rejet de l'adage intuitif "la nature ne fait pas de saut" au profit d'une étude "in abstracto", mais en s'appuyant sur la

12

possibilité d'application aux sciences de la nature.

La chasse aux fondements des mathématiques s'achève comme on sait par une victoire partielle, car le théorème de Godel dit que cette victoire ne peut pas être totale. En ce qui concerne la géométrie, le sommet est atteint avec "Les fondements de la géométrie" de Hilbert cités plus haut qui fournissent pour la première fois une présentation de la géométrie fondée sur une liste précise et complète d'axiomes et de mots premiers. Toutefois, dans le même temps, la géométrie a perdu de son prestige en ce sens qu'on ne fait plus confiance à l'intuition géométrique pour fonder les mathématiques. C'est ce qu'on appelle l'arithmétisation car l'intuition qui sera considérée comme la plus sûre est celle du nombre entier. Dans l'ouvrage de Hilbert, ceci se manifeste par le fait que la non­contradiction du système d'axiomes de la géométrie est démontrée en faisant appel à des modèles numériques.

Mais ce règlement du problème des fondements par "l'arithmétisation" ne règle pas le problème des commencements des mathématiques chez un individu, c'est-à-dire de leur apprentissage: l'échec (partiel) de la réforme des mathématiques modernes montre sans doute qu'un point de départ intuitif en géométrie, indépendant de l'intuition du nombre entier, est inévitable. Mais il n'y a plus de référence mathématique "savante" pour légitimer ce point de départ intuitif.

1.5. Conclusion de la partie 1

L'un des problèmes fondamentaux de l'enseignement des mathématiques, mal résolu par la réforme des "mathématiques modernes", est de savoir quelles conclusions tirer de ce grand mouvement de rigueur, de remise en cause de l'évidence, du début du siècle. C'est un problème de transposition didactique. Il est particulièrement aigu en géométrie puisque l'une des caractéristiques des débats auxquels nous avons fait allusion, est la remise en cause des évidences géométriques et la recherche de fondements plus rigoureux par une arithmétisation qui fonde les mathématiques sur le nombre et non plus sur la géométrie. Par exemple, en définissant le plan comme espace affme réel de dimension deux muni d'un produit scalaire, on insère la géométrie euclidienne plane dans une progression qui repose au départ sur le nombre entier. Ainsi, l'enseignement élémentaire de la géométrie se retrouve "orphelin" scientifiquement parlant, quand il s'agit de fonder son contenu: c'est un problème réglé au niveau du savoir savant, mais ce règlement ne lui est pas d'un grand secours et a surtout des aspects négatifs.

Par exemple, dans les traités "classiques" d'enseignement de la géométrie de la première moitié de ce siècle figuraient des références à des expériences, certes purement fictives, comme:

Une feuille de papier peut nous donner une idée approchée d'une surface. Elle limite en effet deux régions de l'espace, celles qui sont situées des deux côtés de la feuille. [ ... ] On arriverait à la notion de surface en considérant une feuille de papier dont l'épaisseur diminuerait indéfiniment. (Hadamard, 1898, p.1).

Une ligne droite indéfinie tracée sur un plan sépare sur cette surface deux régions

13

situées chacune d'un côté de la droite et que l'on nomme des demi-plans. On ne peut passer par un chemin continu de l'une de ces régions à l'autre sans traverser la droite. Ces deux régions peuvent d'ailleurs être superposées l'une à l'autre en faisant tourner l'une d'entre elles autour de la droite donnée comme charnière. (idem, p.5)

Ce style de référence à la réalité (imaginée) a disparu, est-ce opportun ou pas? On peut se poser la même question à propos de la disparition du langage temporalisé et réglé sur la construction progressive de la figure suivant lequel on indiquait par exemple qu'on "prolongeait le segment [AB] jusqu'à ce qu'il rencontre la droite d en un point M", alors que maintenant on dit plutôt: "soit M le point commun aux deux droites d et (AB)". Voici un exemple où se combinent ce langage et l'appel à l'expérience imaginée:

Pour prolonger en ligne droite et en continuité une ligne droite limitée AB, on peut concevoir de prendre sur cette droite, entre ses extrémités, deux points intermédiaires C et D, et de faire glisser ensuite le système le long de ces deux points supposés fixes, comme une tringle supportée par deux clous, de façon que A et B se déplacent jusqu'en A' et B'. (Barbarin, 1928 p. 18)

Un aspect paradoxal des problèmes ainsi soulevés est le suivant: la recherche d'une rigueur plus grande dans l'exposé de l'analyse a souvent été motivée par des impératifs d'enseignement, où ce phénomène est d'ailleurs curieusement déclaré sans signification épistémologique véritable:

On peut évoquer plusieurs raisons pour rendre compte de ces besoins nouveaux. La première tient à un fait contingent, sans signification épistémologique véritable, à savoir l'obligation dans laquelle se trouvent les savants d'enseigner. Jusqu'à la fin du XIXème siècle, les manuels sortent de la plume de personnages plutôt secondaires; mais en particulier avec la création en France des grandes écoles, ceux qui construisent la science sont payés pour enseigner et cette activité occasionne une réflexion dont la pratique même de la science aurait pu se passer. (Pont, loc. cit. p. 121)

2. Choix des axiomes: la question de l'évidence

Remarquons tout d'abord que même le problème des mots premiers se pose dans l'enseignement, il suffit pour s'en convaincre de considérer la définition suivante, extraite d'un manuel de collège contemporain:

On dit qu'un quadrilatère est convexe si ses diagonales se coupent à l'intérieur

Ici le mot "convexe", ou l'expression "quadrilatère convexe" sont définis à l'aide des mots "diagonales", "se coupent" et "intérieur". Si "se couper" est une expression que comprennent certainement les élèves, on peut douter que la définition de "diagonale" et surtout d"'intérieur" soit plus facile à expliciter que celle de "convexe". En fait une telle définition d'un quadrilatère convexe, si elle est utilisée, ne peut l'être qu'en commentaire

14

d'un dessin qui montre la forme typique d'un quadrilatère convexe: ainsi les élèves savent de quel type de dessin il s'agit dans ce cas là et qui sert de référent pour l'usage solidaire des trois mots convexe, intérieur, diagonale.

De même, il est évident que tout exposé déductif ne peut que reposer, comme l'explique Pascal, sur des énoncés admis comme vrais et jouant donc le rôle d'axiomes. Toutefois, une difficulté se présente ici: les programmes mis en place en France après la réforme des mathématiques modernes ne présentent pas un ordre déductif clair pour l'enseignement de la géométrie. Il s'agit certes d'un enseignement déductif, mais localement déductif, pourrait-on dire, ne reposant sur aucune axiomatique globale implicite, contrairement à l'enseignement traditionnel de la géométrie, antérieur à la réforme des mathématiques modernes, centré sur l'usage des cas d'égalité des triangles et sous lequel se laissait encore apercevoir l'axiomatique euclidienne.

C'est pourquoi il n'est pas inutile de revenir d'abord sur les éléments d'Euclide: dans la mesure où l'axiomatique de Hilbert, comme nous l'avons dit plus haut, ne surgit pas sans antécédent historique, mais représente l'achèvement d'un travail entrepris par d'autres mathématiciens, tenant compte de l'ébranlement des géométries non euclidiennes, mais aussi d'une relecture critique de l'œuvre d'Euclide. C'est ainsi que le célèbre Axiome de Pasch, rappelé ci-dessous,

Soit ABC un triangle (c'est-à-dire trois points n'appartenant pas à une même droite) et d une droite coupant (AB) entre A et B, alors d rencontre aussi l'un des côtés [BC] ou [Ac]. Si C n'appartient pas à d, d ne rencontre que l'un des côtés [BC] ou [AC].

A

8 c

a été énoncé par ce mathématicien à partir de la remarque qu'Euclide y faisait appel implicitement. Hilbert commence d'ailleurs son ouvrage sur les fondements de la géométrie en rendant hommage aux travaux antérieurs, y compris ceux d'Euclide.

Cependant l'œuvre de Hilbert n'est pas une consolidation, mais bien plutôt une refonte de celle d'Euclide. Les axiomes y sont regroupés en cinq groupes: axiomes d'incidence, d'ordre, de congruence, de continuité et des parallèles, ce dernier groupe comportant un seul axiome, le célèbre "postulat d'Euclide" :

Soit une droite a et un point A extérieur à a ; dans le plan déterminé par a et A, il existe au plus une droite qui passe par A et qui ne coupe pas a.

Dans la suite, nous ferons référence essentiellement aux deux premiers groupes d'axiomes, en nous restreignant à la géométrie plane (pour un énoncé complet, cf. Arsac, 1996) :

15

Axiomes d'incidence

Il) Étant donné deux points P et Q distincts, il existe un~ unique droite incidente à P et Q (ce qu'on exprimera aussi par: passant par P et Q).

12) Étant donné une droite, il existe au moins deux points distincts incidents à cette droite (ce qu'on exprimera aussi par: deux points distincts sur cette droite).

13) Il existe trois points non alignés (c'est-à-dire tels qu'aucune droite ne soit incidente aux trois).

On notera (PQ) l'unique droite passant par les deux points distincts P et Q.

Axiomes d'ordre

Le but de ces axiomes est de régler l'emploi du terme premier "entre", on note A*B*C le fait que B est entre A et C.

01) Si A*B*C, alors A, B et C sont trois points distincts sur une même droite et C*B*A.

02) Étant donné deux points distincts B et D, il existe des points A, C, E appartenant à la droite BD tels que A*B*D, B*C*D, B*D*E.

03) Axiome de Pasch.

Cette classification en groupes permet d'identifier assez facilement les axiomes :implicitement utilisés par Euclide, précisons un peu ce que nous entendons par "implicitement utilisés".

a) L'analyse logique de chaque raisonnement d'Euclide permet de mettre en évidence des lacunes dans l'enchaînement des propositions, le cas archi-connu se présente dès la proposition 1 du livre 1: pour démontrer l'existence d'un triangle équilatéral de base [AB] donnée, Euclide considère les deux cercles de centres A et B passant respectivement par B et A, et leur point commun C. Mais il ne démontre pas l'existence de C. D'une manière générale, il faut souvent, pour obtenir un raisonnement déductif complet, ajouter aux démonstrations d'Euclide des prémisses logiquement indispensables, soit des définitions, soit des énoncés de propriétés (qui ont du point de vue moderne, soit un statut d'axiome, soit un statut de théorème) à celles explicitement utilisées par Euclide.

b) L'axiomatique de Hilbert permet de regrouper ces propriétés suivant le groupe d'axiomes auquel elles se rattachent, par exemple, la propriété d'intersection de deux cercles utilisée implicitement dans la proposition 1 ressortit au groupe des axiomes de continuité. On obtient ainsi une classification simple des prémisses implicites dans les démonstrations d'Euclide: elles relèvent du groupe des axiomes d'ordre et de continuité, mais aussi des deux axiomes d'incidence que nous considérons encore maintenant comme particulièrement évidents : 12 et 13.

Tout le monde est d'accord avec le fait que ces prémisses implicites étaient en fait lues sur le dessin, donc évidentes du point de vue d'Euclide, ce qui ne veut pas dire qu'Euclide était en possession d'une théorie de cet usage de l'évidence. Citons ici Dhombres, lors d'un récent cours d'Histoire des mathématiques à Tunis, qui qualifie l'épistémologie d'Euclide d"'épistémologie de l'évidence", en ajoutant que cette

16

épistémologie n'était pas consciente à Euclide.

Si l'on analyse maintenant les manuels de géométrie français actuels, on trouve que ce sont les mêmes propriétés qu'Euclide lisait sur le dessin qui vont encore y être lues : il n'y a jamais aucun emploi explicite des propriétés d'ordre, et ce sont les mêmes propriétés du groupe des axiomes d'incidence qui sont lues sur le dessin de façon implicite et donc considérées comme évidentes.

La coïncidence entre la part d'implicite chez Euclide et dans l'enseignement actuel s'étend par exemple à une notion beaucoup plus complexe comme celle d'aire, qui n'a fait que tardivement l'objet d'une axiomatisation. La notion utilisée par Euclide et dans l'enseignement, parente avec la notion intuitive de "place occupée dans le plan" est très éloignée d'une forme rigoureuse. On verra dans la partie 4 quels problèmes cela peut soulever pour un enseignant.

Ainsi, malgré les évolutions, il reste qu'un certain degré d'appel à la figure s'est maintenu à peu près, d'Euclide à nos jours, dans l'histoire de l'enseignement. Cette constance appelle une explication que je ne possède pas vraiment (elle pourrait être d'ordre cognitif). En tous cas, si l'on n'accepte pas ce geme de lecture sur le dessin, si l'on veut tout démontrer, on aboutit rapidement à une complication (cf. Arsac loc. cit.) qui exclurait la géométrie de l'enseignement élémentaire

Bien entendu, ce degré d'appel à la figure toléré dans le savoir enseigné n'est pas rigoureusement codifié (ce serait en fait impossible). Par exemple, lorsqu'on démontre que les médiatrices d'un triangle sont concourantes, ce qui est souvent la première démonstration proposée aux élèves, on considère d'abord le point commun à deux médiatrices pour montrer ensuite qu'il est aussi sur la troisième. Suivant les manuels, on constate que l'existence de ce point, c'est-à-dire le fait que ces deux médiatrices ne peuvent pas être parallèles, est démontrée ou non.

Des phénomènes beaucoup plus "fins" peuvent apparaître. Considérons par exemple Il, le seul des axiomes d'incidence qui soit assez fréquemment énoncé dans les manuels:

Par deux points distincts A et B, il passe une droite et une seule.

Cette droite est notée (AB), et même si cette notation normalisée n'est pas rattachée explicitement à cet axiome, elle n'a de sens que grâce à lui, en particulier, elle n'a pas de sens si A=B. Or on constate qu'avant de parler de la droite (AB) aucun professeur de l'enseignement du second degré ne prend la peine de démontrer que A:;t:B, ceci est toujours lu sur le dessin!

3. Contrat didactique et gestion de l'évidence

Voici un exemple, le "triangle aplati", montrant la pertinence de ces questions:

17

3.1. Présentation de la situation expérimentale

L'énoncé suivant a été proposé à des élèves: "Existe-t-il un triangle dont les côtés mesurent 5 cm, 9 cm et 4 cm ?"

Dans un premier temps, ces élèves travaillaient par groupes de quatre sur cet énoncé et produisaient une affiche donnant leur réponse et une justification, dans un deuxième temps un débat était organisé autour des affiches et de la recevabilité des arguments avancés (pour une description détaillée, cf. Arsac, Mante, 1996).

3.2. Analyse a priori

Une première stratégie pour les élèves consiste ici à construire le triangle en utilisant un algorithme enseigné dès l'école élémentaire: tracer un côté, puis chercher l'intersection des deux cercles centrés aux extrémités et ayant pour rayons les mesures des. deux autres côtés.

L'existence de cette stratégie fondée sur le constat graphique assure déjà la possibilité de dévolution du problème. L'instabilité des résultats du dessin pourrait laisser penser qu'elle devrait mener à des résultats aléatoires. En fait, il n'en est rien, pour deux raisons: d'une part, la manipulation du compas par des élèves de cet âge, en vue de tracer un cercle de rayon donné, produit de façon privilégiée des erreurs "par excès", d'autre part, quand le maître demande de tracer un triangle. c'est en général qu'il existe; les dessins dans lesquels les cercles ne se rencontrent pas, ou qui fournissent (exceptionnellement) un triangle aplati devraient donc apparaître comme surprenants aux yeux des élèves et être recommencés. Ainsi nous pensons que la plupart des tracés vont mener à un vrai triangle et que les dessins contradictoires seront non seulement minoritaires mais suspects aux yeux des élèves, ce qui rend très peu probable une réponse autre que "oui le triangle existe" dans cette stratégie.

Pour qu'apparaisse la réponse contradictoire "non le triangle n'existe pas", il faut donc qu'une autre démarche soit disponible s'appuyant sur l'évidence de l'alignement des points. Cet appel à l'évidence est, comme nous l'avons dit, inévitable dans l'enseignement de la géométrie, en particulier pour justifier le choix des axiomes. Historiquement également certains énoncés géométriques, et pas seulement l'énoncé des axiomes, ont été considérés comme évidents, ce fut le cas pour l'inégalité du triangle dont la démonstration par Euclide apparaît comme superflue aux Épicuriens (Euclide, tome l, p. 234) et à Arnauld (1674, ch IX) car le plus court chemin d'un point à un autre est la ligne droite. Nous nous intéressons ici à un énoncé voisin qui pourrait de même être considéré comme évident. Nous serons amenés à parler de "raisonnement intuitif' pour ce constat d'évidence car nous verrons que l'alignement est explicitement justifié par les élèves par le fait que 5+4=9.

Ainsi, cette situation apparaît comme un lieu où peuvent s'affronter le recours à l'expérience au sens propre, concrète, et l'expérience fictive ou imaginée qui donneront dans ce cas des résultats contradictoires. C'est donc bien une expérience permettant de tester si certains énoncés sont ou non évidents pour certains élèves.

18

3.3. Analyse a posteriori

Cette situation a été expérimentée dans 7 classes de 5ème, soit un total de 36 groupes. Nous compléterons nos analyses à l'aide des observations faites sur des binômes d'élèves.

3.3.1 - Phase de recherche en groupe

Les résultats amènent à distinguer trois types d'affiches:

- type 1 : affiches répondant "oui", d'après un constat graphique (18 réponses sur 36 de ce type, présent dans toutes les classes)

Ainsi: Oui, il existe un triangle dont les côtés mesurent 5 cm, Exemple:

4 cm et 9 cm. Explication : Nous traçons une hypoténuse de 9 cm.

Nous mettons la pointe du compas sur l'hypoténuse, ~ puis nous traçons un arc de cercle de 5 cm et nous

faisons la même chose pour 4 cm. Les deux arcs de

cercles forment un point et nous n'avons plus qu'à

rejoindre le point de l'hypoténuse au point des arcs de

cercles pour tracer le triangle. Aucune de ces affiches ne donne d'autre explication que le constat d'une possibilité

de tracé accompagné éventuellement de la description du procédé de tracé ou de remarques sur la forme du triangle (très aplati, ou bien de formes différentes suivant le côté par lequel on commence).

Dans tous les groupes observés qui ont produit une affiche de ce type, on constate, comme prévu, que ce sont des essais de construction qui conduisent les élèves· à conclure à l'existence du triangle. Parfois les dessins donnent un triangle aplati ou bien qui n'existe

. pas, mais la répétition des dessins conduit finalement à une réponse positive, conformément à l'analyse a priori. Dans certains de ces groupes apparaît une certaine perplexité quant à la nature de l'explication demandée par l'enseignant puisqu'un constat graphique suffit.

- type 2 : affiches répondant "non ", sur la base d'un raisonnement intuitif (14 réponses de ce type présent dans 6 classes sur 7, dont une répondant "oui le triangle existe mais il est plat"). Ainsi:

Non, il n'existe pas car si on additionne les deux plus petits nombres des trois, cela donne le même

nombre que le troisième.

Il faudrait que les deux plus petits nombres donnent un chiffre plus grand que le troisième : ex 9 cm, 5

cm, 6 cm (5+6=11)

Parmi les affiches de ce type, 10 justifient leur réponse par le fait que 9 = 5 + 4, et parmi celles-là, 5 énoncent l'inégalité triangulaire, 4 ne commentent pas leur réponse.

Dans les groupes observés qui ont produit une affiche de ce type il n'y a jamais eu

19

unanimité pour la réponse "non", il Y a toujours eu un débat entre les deux positions. L'argument fondamental en faveur de l'alignement des points a été l'égalité 9 = 5 + 4 et éventuellement l'inégalité triangulaire découverte à cette occasion.

- type 3 : Affiches répondant: "non" quand on commence à tracer le triangle par le côté 9 et "oui" si l'on commence par le côté 5 ou 4 (4 réponses de ce type rencontrées dans 3 classes). Ainsi:

Il en existe 2 si on prend comme base 4 ou 5 cm. Si on prend 9 cm comme base du triangle, les arcs ci:

cercle ne se croisent pas.

y

4 cm comme base 5 cm comme base 9 cm comme base

Les affiches de type 3 mettent en évidence un phénomène non prévu certains élèves pensent que l'existence du triangle dépend du côté par lequel on commence pour effectuer la construction. Ce phénomène apparaît dans toutes les classes au niveau des groupes mais il ne s'exprime pas toujours dans les affiches : il n'est jamais présent dans les affiches de type 2, mais parmi les affiches de type 1, deux précisent que le triangle obtenu ne dépend pas de l'ordre des côtés, la question a donc sans doute a été débattue dans le groupe, et trois précisent au contraire que le triangle obtenu n'est pas le même dans les trois cas. Ainsi, 9 affiches au total soulèvent ce problème.

Aucun des quatre groupes ayant produit une telle affiche n'a été observé. Mais les expérimentations avec des binômes d'élèves nous laissent penser que les affiches de type 3 ont certainement été produites après un débat dans lequel le raisonnement intuitif a conforté, ou même précédé, un constat d'aplatissement limité au cas où le premier côté tracé a pour longueur 9.

Conclusion sur cette étape. Comme prévu, tous les élèves rentrent facilement dans la résolution du problème et deux positions apparaissent : confiance dans le constat graphique ou appel au raisonnement intuitif, qui conduisent bien à des résultats incompatibles. Pour certains élèves, l'alignement des points est tellement évident qu'ils estiment le dessin inutile, ce qui donne lieu à des débats presque caricaturaux avec les partisans du constat graphique.

Cependant les observations font apparaître que les deux positions décrites ci-dessus sont les bornes extrêmes entre lesquelles s'inscrivent toutes sortes de positions intermédiaires dans lesquelles on cherche à concilier les deux points de vue, à les renforcer l'un par l'autre:

- contrôle du raisonnement intuitif par le dessin et réciproquement dans le cas où celui-ci a été induit par un constat graphique d'aplatissement;

- appel à l'intuition dans le seul cas où l'on commence par 9.

L'observation montre aussi que le dessin finit par jouer un rôle dans toutes les

20

argumentations.

Tout ceci precIse l'analyse a pnon, mais ajoute une nuance : les recours à l'expérience et à l'intuition sont conçus a priori comme complémentaires par les élèves, ainsi le conflit entre les deux positions ne saurait aboutir au rejet de l'une mais à leur mise en relation.

3.3.2 - Analyse a posteriori de la phase de débat

Le débat porte sur les thèmes suivants: - l'aplatissement du triangle en général; - l'aplatissement dans le seul cas où l'on commence par le côté de longueur 9 cm ; - le rôle de l'ordre des côtés; - le nombre de points communs à deux cercles tangents.

Cependant des invariants apparaissent: dans tous les cas, le débat oppose les deux positions, constat graphique et raisonnement géométrique, ce sont toujours les mêmes arguments qui apparaissent, et enfm le débat débouche fatalement sur le terrain du constat graphique. Cet aboutissement provient du fait que c'est le seul terrain sur lequel les partisans du raisonnement intuitif peuvent espérer convaincre les partisans du constat graphique. A partir de ce moment des contradictions apparaissent à l'intérieur même de l'exploitation du constat graphique. Il suffit de quelques extraits de débat pour illustrer ces constatations.

• Arguments fondés sur le constat graphique: - "oui, car le dessin est bon, les mesures sont bonnes ". - "çaforme un triangle, je suis désolé, cette fois, c'est pas moi, y se croisent les

points".

• Arguments a priori fondés sur le raisonnement intuitif: - "Non, car la somme des côtés 5 cm et 4 cm est égale à 9 cm, donc ça fait une

droite et pas un triangle". - "Pour que ça fasse un triangle il faudrait que les côtés de 5 cm et 4 cm soient

supérieurs à 9 cm" (allusion à l'inégalité triangulaire). -"c'est logique que ça se touche, parce que 5 et 4 çafait 9""

• Arguments exprimant le conflit entre les deux positions sur le terrain du constat graphique : les partisans du raisonnement intuitif contestent l'exactitude des dessins menant à un vrai triangle ou montrant plusieurs points communs aux deux cercles.

- Non, car le deuxième triangle estfaux, les arcs de cercle se coupent sur la droite (9 cm de base) donc ça nefait pas un triangle" ou encore "... Le deuxième triangle est faux car il est plus "large"".

-"Si on prend le haut on trouve pas un côté de 4 cm on trouve 3,9 oui on a vérifié...même sur le dessin"

• Inversement, les partisans du constat graphique contestent la possibilité de réaliser un dessin idéal traduisant les affirmations a priori des partisans du raisonnement intuitif, comme celle-ci :

21

Si on fait à partir des mesures normalement ça doit tomber pile dessus. Ils répondent en effet :

Oui, oui, mais ils n y sont pas arrivés.

3.4. Conclusion

L'expérience ci-dessus nous fait passer du registre épistémologique au registre cognitif: la chasse logique aux évidences, tout en rappelant que le rôle de l'évidence doit être maîtrisé dans les mathématiques, laisse ouverte la question du rôle nécessaire de l'évidence dans l'apprentissage de la géométrie.

La conclusion la plus frappante de ce qui précède est que l'évidence n'est pas la même pour tous les élèves. On peut en conclure qu'un enseignement de la géométrie doit avoir en particulier pour effet une éducation de l'intuition, celle-ci ne saurait donc être considérée comme conséquence de la perception seule.

4. Contraintes mathématiques sur la gestion de classe de l'enseignant

4.1. Présentation de la situation: buts, énoncé

. La situation étudiée ici n'a pas été conçue dans un but d'innovation ou d'expérimentation d'une théorie didactique. C'est une situation d'initiation à la démonstration en quatrième telle que la pratique un enseignant qui a eu l'amabilité de laisser enregistrer cette séance. Le décryptage complet de cet enregistrement est beaucoup trop long pour être reproduit ici.

Il s'agit d'une situation de classe classique dans laquelle l'enseignant va diriger dans un dialogue avec les élèves la résolution d'un problème et la rédaction collective de sa démonstration. Avant de décrire son déroulement et les conclusions qu'on peut en tirer, nous allons en faire une analyse a priori limitée à peu près exclusivement au point de vue mathématique, qui dans ce cas va nous permettre de prévoir en partie certains comportements de l'enseignant (alors que l'analyse a priori est en général utilisée pour étudier les comportements des élèves).

Voici le début du décryptage qui vous indique comment est gérée la classe et vous donne l'énoncé de l'exercice.

-Prof. Exercice 18 p. 65 (manuel Pythagore, classe de quatrième, éd. 1988, Hatier) vous avez un triangle

ABC et les milieux de ses trois côtés (le prof dessine la figure au tableau).

22

cB

D'après lajigure, vous avez 1 milieu de [AB], J milieu de [AC} et K milieu de [BC). La question qui vous

est posée est de démontrer que le périmètre du triangle IJK est la moitié de P, P étant le périmètre de ABC

(5 sec de silence). Donc P est le périmètre de ABC et on vous demande de démontrer que celui de IJK est la

moitié. Alors je vous écoute. Sandrine? (5 sec de silence) Tu n'as pas du tout vu comment faire cet

exercice? A quoi est égal le périmètre du triangle? (des élèves lèvent la main). Oui Bertrand!

-Bertrand. 1est le milieu de [AB}, J milieu de [AC} et K milieu de [BC). Le segment qui a pour extrémités

le milieu de deux côtés d'un triangle est égal à la moitié de celui du troisième.

-Prof. oui!

-Bertrand.IJ est la moitié de BC.

-Prof: (répète et écrit au tableau): Oui!

-Bertrand. KJ est la moitié de AB.

-Prof. (répète et écrit au tableau): KJ est la moitié de AB et ?

-Bertrand.IK est la moitié de AC.

-Prof. (répète et écrit au tableau) IK est la moitié de AC Oui!

-Bertrand. Ensuite, je n'ai pas pu terminer. [...]

Après la fin du traitement de cet exercice, l'enseignant demande; Et maintenant, est-ce que quelqu'un s'est posé la question qu'en est-il de l'aire du triangle IJK par rapport à

ABC? Alors oui? La moitié?

Pendant cette séance, la classe va traiter successivement les deux questions énoncées ci-dessus, c'est-à-dire, en résumé:

1) Démontrer que le périmètre de IJK est la moitié de celui, P, de ABC. 2) Comparer les aires de ces deux triangles.

4.2. Analyse a priori

4.2.1. Question 1

Il s'agit d'un exercice classique de démonstration: "démontrer que". L'outil essentiel est le théorème rappelé ci-dessus par Bertrand et dont l'enseignant citera lui­même l'énoncé qu'il écrira au tableau.

Théorème: Dans un triangle le segment qui a pour extrémités les milieux des deux côtés d'un triangle a pour longueur la moitié de celle du troisième côté.

A partir de là nous présentons ci-dessous quatre niveaux possibles d'explicitation de la rédaction:

niveau 1) C'est évident d'après le théorème.

1

23

niveau 2) D'après le théorème sur les milieux dans un triangle, on a: IJ=2"BC,

JK=.!-AB et KI=.!-AC d'où IJ+JK+KI=.!-(AB+BC+CA)=.!-P 2 2' 2 2

niveau 3) Comme 2, mais en détaillant: U+JK+KI=.!-AB+.!-BC+.!-CA=...222

niveau 4) Comme 3, mais en explicitant les règles de calcul algébrique utilisées.

Bien entendu, on peut encore raffiner ces distinctions en particulier en imposant des conditions de rédaction supplémentaires dans l'utilisation du théorème.

4.2.2. Question 2

Il s'agit d'une question ouverte, cependant une différence apparaît tout de suite: alors que le dessin ne suggère pas immédiatement la relation entre périmètres qui fait l'objet de la question l, ce qui explique sans doute que dans ce cas l'enseignant donne le résultat (il s'agit de "démontrer que..."), il montre de façon assez évidente que le triangle ABC se partage en quatre triangles de même aire donc que l'aire de IJK est le quart de celle de ABC. On peut donc s'attendre à voir apparaître, comme dans le cas du triangle aplati, des "raisonnements intuitifs" conduisant à considérer le résultat comme évident sans qu'aucune justification soit nécessaire, ce qui, après tout, serait conforme à des précédents hindous ou chinois bien connus dans le cas du théorème de Pythagore. Ceci soulève un double problème:

- du point de vue du contrat didactique: en cours d'apprentissage de la démonstration, l'enseignant peut-il autoriser cette simple lecture du dessin qui contraste complètement avec ce qu'on a fait dans la question 1 ? Il semble probable que non.

- du point de vue mathématique contemporain: la notion d'aire est mathématiquement une notion très élaborée, si l'on veut rendre rigoureuse l'évidence ci­dessus, il faudra un raisonnement du genre suivant :

Première démonstration (plan). 1) Le triangle ABC (considéré comme une partie du plan) est réunion des quatre

triangles AU, IBK, IJK et CJK. 2) Ces triangles ont deux à deux des intersections d'aire nulle (suivant le cas, ces

intersections sont vides ou réduites à un point ou à un segment). 3) L'aire est additive, donc l'aire de ABC est la somme des aires des quatre triangles

précédents. 4) Les quatre triangles ont même aire, d'où le résultat.

Bien sûr, cette rédaction n'est qu'un plan: il faudrait démontrer le point 1 si l'on n'admet pas de le lire sur la figure, de même du point 2 et enfm du point 4, lequel résulte du fait que les quatre triangles sont isométriques, car ils se déduisent les uns des autres par des transformations évidentes (translations et symétries), ou bien parce que la question 1 montre qu'on peut leur appliquer le "troisième cas d'égalité" car leurs côtés sont isométriques.

24

Ces dernières remarques suggèrent encore la possibilité de repérer que IJK est image de ABC dans une similitude de rapport 1/2.

Bien sûr, toutes ces démonstrations sont hors de portée des élèves, mais des parties d'entre elles sont accessibles. Il est bien difficile de préciser quelle est la bonne démonstration à ce niveau.

La notion sous-jacente à ces démonstrations est celle d'aire telle qu'elle est définie actuellement en mathématiques: c'est une mesure, c'est-à-dire une application définie sur un certain ensemble de parties du plan, les parties quarrables, à valeurs dans les nombres réels positifs ou nuls et vérifiant deux propriétés essentielles

- l'invariance par isométrie - l'additivité: l'aire de la réunion de deux parties quarrables disjointes est égale à

la somme des aires de ces deux parties. Cette propriété reste bien sûr vraie si les deux parties quarrables ont une intersection d'aire nulle.

Définie à une constante multiplicative près, l'aire est fixée dès qu'on fixe sa valeur pour une partie quarrable particulière; on choisit en général un carré qui est alors "l'unité d'aire", ce qui fixe du même coup le côté du carré comme unité de longueur; on démontre alors que toutes les parties bornées du plan que l'on est amené à manipuler dans l'enseignement secondaire sont quarrables puis les formules classiques sur les aires. Il en résulte en particulier que tout segment est d'aire nulle.

La caractérisation des parties quarrables est assez élaborée: il s'agit des parties bornées du plan dont la frontière est "de mesure nulle" ou encore une fois le plan rapporté à un repère orthonormé, dont la fonction caractéristique est intégrable au sens de Riemann.

Deuxième démonstration Il est possible de revenir sur l'analyse a priori pour une auto-critique: nous avons

employé une notion d'aire trop savante, qui date au plus du dix-neuvième siècle, qui est absente du cursus ordinaire des enseignants de mathématiques1, et sans laquelle les mathématiques ont fonctionné pendant la plus grande partie de leur histoire. Autrement dit, on a su calculer des aires, et bien plus compliquées que celles qui nous occupent ici, bien avant de savoir définir rigoureusement la notion d'aire. Plaçons nous donc à un niveau plus intuitif, connu des Grecs, des Hindous et des Chinois, qui l'emploient pour leurs démonstrations par découpage: chacun connaît au moins une démonstration "chinoise" du théorème de Pythagore.

Chez Euclide, le mot "aire" apparaît à la proposition 34 du livre 1 des éléments où il s'agit de démontrer que "l'aire parallélogramme" est coupée en deux parties égales par la diagonale.Vitrac commente ainsi cette introduction:

1. L'aire n'est pas une mesure au sens de la "théorie de la mesure" car elle ne vérifie pas la propriété d'additivité dénombrable (une réunion dénombrable de parties quarrables n'est pas forcément quarrable, même si elle est bornée), elle n'a donc qu'un intérêt marginal du point de vue mathématique, presque historique, ce qui explique que la théorie de l'aire ne soit pratiquement pas enseignée y compris aux futurs professeurs.

25

Quant au mot aire, il ne désigne pas ici une mesure (ce qui est son sens actuel en mathématiques), mais l'étendue intérieure d'une figure à deux dimensions susceptible d'être évaluée, le mot "surface" étant réservé à la limite d'un solide, [... ] (cf. Euclide, tome l, note 143, p. 259).

La notion d'étendue intérieure n'est évidemment pas mathématique, elle pourrait tout aussi bien être remplacée par celle de place occupée, mais l'important est que l'aire n'est pas un nombre. Non défmie par Euclide, elle apparaît comme une notion première dont l'usage est bien fixé:

- Euclide déclare égales deux figures qui pour nous sont simplement de même aire, par exemple l'énoncé du théorème de Pythagore est le suivant:

Dans les triangles rectangles, le carré sur le côté sous-tendant l'angle droit est égal aux carrés sur les côtés contenant l'angle droit.

- pour Euclide, deux triangles isométriques sont égaux; - pour démontrer les "égalités" entre figure, Euclide fait appel à des

démonstrations par "découpage". Ceci se retrouve dans la majorité des démonstrations du livre l, à partir de 33 et jusqu'à l'avant-dernière, celle du théorème de Pythagore;

- ces démonstrations par découpage utilisent deux méthodes fondées théoriquement pour Euclide sur les "notions communes" énoncées au début du livre 1 concernant l'égalité et l'inégalité des "choses" (cf. Euclide). La première méthode consiste à montrer que les deux figures dont on veut montrer l'égalité sont découpables en triangles isométriques, la deuxième utilise le fait qu'en retranchant à des figures d'aires égales des figures d'aires égales, on obtient encore des fibrures d'aires égales.

Hilbert (1899, ch 4) a donné une traduction mathématique rigoureuse' de cette théorie euclidienne des aires fondée sur le découpage en triangles; il aboutit ainsi à une notion "d'équicomplémentarité" qui est une relation d'équivalence définie dans l'ensemble des polygones et dont les classes sont simplement les polygones de même aire, mais qui permet de comparer les aires des polygones de façon géométrique, par une méthode effective de découpage, sans les calculer et donc sans choisir une unité.

Cette théorie de Hilbert "explique" donc et justifie a posteriori une pratique mathématique assez universelle qui s'appuie sur des pratiques de découpage invoqué, ou même effectué, car le problème qui nous intéresse pourrait se traiter "sans connaissance mathématique" en découpant les quatre triangles qui partagent ABC et en constatant qu'ils se superposent.

On retrouve la notion d'aire associée à cette pratique dans les programmes scolaires à partir de 1980 : "On distingue l'aire à la fois de la surface et du nombre qui la mesure" (Perrin-Glorian, 1992, chapitre 1, p. 7). Ce qui pourrait apparaître, pour reprendre le langage de Chevallard (1985) comme une "création didactique" apparaît plutôt comme un objet d'enseignement légitimé par une pratique mathématique historiquement dépassée mais bien fixée, munie avec la technique du découpage d'un outil de preuve "élémentaire", et rendant compte de pratiques sociales courantes (pour une analyse plus détaillée, cf. Perrin-Glorian, loc. cit.). Notons toutefois que l'étude de Hilbert montre bien que les preuves ne restent élémentaires que si l'on admet la lecture sur le dessin des

26

découpages pertinents, faute de quoi les démonstrations deviennent très complexes.

Revenons au problème qui nous intéresse. On peut le résoudre comme l'aurait sans doute fait Euclide conformément à l'analyse ci-dessus: lire le découpage et démontrer que les quatre triangles sont isométriques.

Troisième démonstration Les démonstrations précédentes soulèvent des problèmes délicats: les unes sont

manifestement trop abstraites pour la culture mathématique des élèves et pour un résultat évident, les autres supposent qu'on s'autorise à lire certaines choses sur la figure, mais pas toutes celles qu'on pourrait lire, et posent donc des problèmes de contrat didactique puisqu'on ne voit pas comment un critère d'ordre mathématique délimiterait ces droits de lecture.

Une issue possible consiste à revenir à la formule donnant l'aire d'un triangle: la

moitié du produit de la hauteur par la base. On sait déjà par la question 1 que IJ= l-BC. Il 2

reste à calculer la hauteur correspondante, ce qui peut se faire de différentes manières, par exemple en remarquant que IJK a même hauteur que BIK (ceci sera considéré comme évident, ou justifié...) puis que si l'on appelle H le pied de la hauteur issue de A dans

ABC et L le pied de la hauteur issue de l dans BIK, on a IL= l-AH, d'après le théorème 2

des milieux appliqué dans le triangle ABH.

Cette démonstration met en jeu la relation entre aire et longueur, cett~ dernière notion pouvant, comme l'aire, être traitée soit comme mesure, soit comme "grandeur" manipulable sans faire appel aux nombres, ce qui n'interdit pas l'emploi des formules utilisées ici (pour une justification de cette dernière affirmation, cf. Hilbert, loc. cit., ch 4). Elle a l'inconvénient d'être assez éloignée de ce qu'on lit sur le dessin.

Elle suggère toutefois une autre issue pour la deuxième démonstration: après lecture du découpage sur le dessin, au lieu de démontrer que les quatre triangles sont isométriques, on peut montrer simplement qu'ils ont même aire. Pour cela, on remarque d'abord que IJK, BIK et CJK ont même aire car ils ont même hauteur et même "base"

associée car IJ=1- BC=BK=KC, et on remarque ensuite que, pour la même raison, IJK,2

AIJ et CJK ont aussi même aire.

4.3. Analyse a posteriori

4.3.1. Les démonstrations proposées par l'enseignant

Voici les démonstrations que l'enseignant considère comme les bonnes réponses (elles résultent de son discours et dans le cas de la question l, de ce qui a été écrit au tableau).

• Démonstration de l'enseignant pour la question 1 (seule la première phrase a été écrite au tableau)

27

Dans un triangle le segment qui a pour extrémités les milieux des deux côtés d'un triangle a pour longueur

la moitié de celle du troisième côté.

alors on a ceci: le périmètre de IJK qui est égal à IJ+JK+KJ est encore égal à IJ c'est la moitié de Be.

plus JK la moitié de AB, plus IK la moitié de AC. BC AB AC

IJ+JK+KI=- + - +­222

Pour ajouter trois nombres qui ont le même dénominateur, on ajoute les numérateurs. Ce qui fait

AB+BC+AC le tout sur...

Un élève. 2

BC+ AB+AC 2

le numérateur de cettefraction, c'est exactement le périmètre du triangle ABC.

• Démonstration de l'enseignant pour la question 2 (entièrement orale)

Oui, vous avez ici effectivement, le triangle ABC est partagé en quatre triangles.

Ensuite l'enseignant suggère de démontrer que AIJ et IJK ont même aIre et il . continue:

Par le milieu du segment []J], les deux triangles se déduisent par symétrie centrale. Parce que vous avez le

segment [AK] qui a le même milieu que le segment []J]. La symétrie centrale conserve Les aires. Celui-là

vient sur celui-là, ils sont superposables. De même pour les autres. Ce qui montre que les quatre triangles

ont La même aire et par conséquent, l'aire de IJK est égale au quart de l'aire du triangle ABC.

4.3.2. Commentaire

Pour la question l, on remarque essentiellement, par rapport à l'analyse a priori, que l'enseignant apporte des justifications orales au calcul algébrique. Il est peu probable qu'il apporte encore ces justifications l'année suivante voire plus tard dans l'année: ce calcul pourra alors se dérouler sans commentaire. Ceci illustre le fonctionnement du contrat didactique: les obligations du maître et de l'élève ne sont pas les mêmes suivant qu'une connaissance est encore en cours d'apprentissage, ou qu'au contraire elle est considérée comme acquise; dans le premier cas, le maître exige davantage d'explicitation en cas d'usage par l'élève, et si l'élève se trompe, son erreur pourra être relevée mais aussi commentée par l'enseignant qui en recherchera peut-être même la cause, dans le deuxième cas, ces obligations réciproques s'atténuent. Ici, le type de calcul algébrique qui intervient est considéré comme un sujet "encore chaud" pour l'enseignant ce qui permet de constater que le problème des implicites dans une démonstration se pose tout autant pour le calcul algébrique que pour la géométrie et que son règlement se fait dans le cadre du contrat didactique.

Pour la question 2, l'enseignant choisit la deuxième démonstration: constat sur le dessin du fait que ABC est partagé en quatre triangles (donc considéré comme évident) et admission implicite de l'additivité de l'aire (donc considéré comme évident), mais démonstration du fait que les quatre triangles ont même aire. Ceci revient tout simplement

28

à lire sur le dessin tout ce qu'il ne peut pas démontrer à ce niveau et à démontrer ce qu'il est possible de démontrer. Cette situation est fixée dès les premiers échanges avec les élèves:

Prof!. Et maintenant, est-ce que quelqu'un s'est posé la question qu'en est-il de l'aire du triangle IJK JX1T

rapport à ABC? Alors oui? La moitié?

des élèves 1. non!

Prof2. pourquoi ce n'estpas la moitié?

Un élève 2. c'est un quart!

Prof3. pourquoi c'est un quart?

Elève 3. ça se voit.

Prof.4. Ca se voit (il sourit) Oui c'est le quart. Qui est-ce qui peut m'expliquer pourquoi? Vous pouvez

dire effectivement que ça se voit mais pourquoi?

Élève 4. le triangle ABC est partagé en quatre triangles.

Prof5. oui vous avez ici effectivement, le triangle ABC est partagé en quatre triangles. Comment est-ce

qu'on peut...AIJ et IJK. ..

Élève 5. c'est un rectangle ça

Prof.6. au départ le triangle ABC est quelconque. Est-ce que quelqu'un peut m'expliquer pourquoi ces deux

triangles ont même aire? (il s'agit de AIJ et de IJK).

Commentaire. Ce début de dialogue montre que effectivement des élèves ont vu que le résultat pouvait se voir directement sur le dessin, ce que l'enseignant confirme (Prof.4). Du coup il demande une démonstration pour expliquer (ProfA) ce qui est effectivement un des rôles de la démonstration qui peut viser d'abord à convaincre, comme dans la question 1, ou à expliquer (ou éclairer). En Prof.5, il institutionnalise le fait que ABC est partagé en quatre triangles, et en Prof.6 il pose le problème de l'égalité de l'aire de AIJ et lJK, il faut remarquer que ce ne sont pas les élèves qui posent cette question, et qu'une réponse positive n'entraîne le résultat cherché que grâce à l'additivité de l'aire, qui n'apparaîtra jamais explicitement : le passage où on en est le plus proche est la fin de la solution du prof quand il dit:

Ce qui montre que les quatre triangles ont la même aire et par conséquent, l'aire de IJK est égale au quart

de l'aire du triangle ABC.

On voit ici clairement combien peut être arbitraire la séparation entre: - ce que l'on a le droit de lire sur la figure en le disant: le partage en quatre

triangles; - ce que l'on a le droit de lire sur la figure sans le dire: les triangles ne se

chevauchent pas et donc la somme des aires sera l'aire du grand triangle; - ce qu'on n'a pas le droit de lire sur la figure: le fait que les quatre triangles ont

même aire.

Il arrive incidemment un phénomène supplémentaire: l'un des élèves voit apparaître sur la figure un rectangle (Élève 5 ci-dessus: il s'agit sans doute du parallélogramme AIKJ) et le professeur intervient brièvement pour rappeler qu'il ne faut pas utiliser des particularités de la figure tracée au tableau (Prof.6).

29

4.3.3. La gestion de la classe

L'analyse a priori, confIrmée par l'analyse a posteriori, montrait une grande différence entre les questions 1 et 2, du point de vue mathématique avec la probabilité d'apparition de problèmes de gestion du contrat pour la question 2. Cette différence mathématique induit effectivement une gestion différente par l'enseignant de ces deux questions.

- pendant la recherche de la question 1, le recours à la fIgure est très limité, il s'agit essentiellement d'un travail d'organisation des énoncés qui interviennent dans la démonstration;

- pendant la recherche de la question 2 au contraire, le professeur utilise le dessin de façon importante dès le départ (ProfA, Prof.5), ceci était parfaitement prévisible puisque plusieurs des résultats clés explicites ou implicites de sa démonstration ne peuvent se lire que sur le dessin: on peut imaginer à la rigueur d'ailleurs qu'on rédige sans fIgure la réponse à la question 1, mais pour ce qui est de la question 2 ... ! La diffIculté qui consiste à interdire la lecture de l'égalité des triangles apparaît bien lors d'une intervention ultérieure du professeur :

Prof. 18.... Comment peut-on démontrer que deux triangles ont la même...

Élève 18. ça se voit!

Prof.19. Ca se voit! Effectivement on peut dire que ça se voit. On voit quoi? Qu'est-ce qui se passe? On

voit très bien que celui-là on peut..

Élève 19. le comparer

Prof.2Ü. On peut le mener par dessus.

Commentaire. On comparera les échanges 18-19 avec les échanges 3-4. Dans le premier cas, le professeur admet le "ça se voit" mais n'en retient que ce qui l'intéresse: le partage en quatre. Dans le deuxième cas, le professeur va reprendre l'idée de voir mais pour faire voir qu'on peut "mener" un triangle (il n'est pas nommé car visiblement le professeur montre au tableau l'opération qu'il suggère) "par dessus" l'autre. Cet appel au dessin amènera presqu'immédiatement un élève à proposer d'utiliser la symétrie centrale, ce qui permettra de conclure.

Conclusion de la partie 4

On remarquera que l'analyse a priori mathématique rend compte de façon rationnelle du changement de comportement de l'enseignant par rapport au rôle du dessin entre les deux questions. C'est bien la nature du contenu mathématique qui commande ce changement et non un caprice ou un choix pédagogique de l'enseignant. Ce changement qui porte sur le contrat didactique souligne doublement la nature didactique de ce dernier:

- les règles de lecture du dessin sont des règles qui concernent uniquement les mathématiques;

-leur apparition dans la question 2 est provoquée par le statut très particulier, au sein des mathématiques de la notion d'aire, à la fois savoir commun répandu et

socialement utile et savoir savant susceptible d'une mathématisation poussée mais qui reste marginal par rapport à la théorie ensembliste de la mesure.

30

Remarque sur le raisonnement mathématique

L'usage de la logique pennet de fabriquer des énoncés vrais en partant d'autres énoncés vrais, de sorte qu'une démonstration mathématique est censée progresser en combinant logiquement des énoncés connus comme vrais soit COmme axiomes, soit comme énoncés antérieurement démontrés. Cette vision idéale est démentie par la pratique: en fait le raisonnement mathématique est bien fabrication à l'aide de la logique de vérités nouvelles à partir de vérités supposées connues, mais la fabrication de ces vérités supposées connues ne se résume pas à une collecte dans les axiomes et les théorèmes, dans les faits, elle implique presque toujours d'autres origines, en géométrie par exemple, l'appel à la lecture du dessin, on le voit clairement quand on réfléchit à la question 2 ci-dessus. Autrement dit, l'étude du raisonnement mathématique est tout autant étude de la fabrication des énoncés vrais, en particulier de la fabrication des évidences, qu'étude de la structure logique. Dans la question 1, c'est l'étude de la structure logique qui prédomine, dans la question 2 c'est celle de la fabrication des évidences. Cette dernière pose un problème difficile de gestion du contrat didactique.

Une dernière remarque

Ce n'est qu'après m'être imposé de faire cette analyse a priori mathématique approfondie que j'ai pu non seulement comprendre, mais même voir, certains des phénomènes apparus au cours de cette séance. Le type de dOlmées recueillies, à savoir les propos de l'enseignant et des élèves, nous a permis d'élucider certaines décisions de l'enseignant qui s'interprètent en didactique en tennes de contrat. Bien entendu, on pourrait aussi faire une étude cognitive comme dans la partie 3 en se posant les mêmes questions sur le statut pour les élèves des évidences nombreuses qui apparaissent au cours de cette séance, mais ceci nécessiterait un autre dispositif de recueil des données.

Conclusion générale

La nature des connaissances mathématiques à enseigner apparaît, au tenne de ce travail, que ce soit à partir de l'analyse théorique ou de l'observation, comme une source déterminante de contraintes sur les choix opérés en matière de transposition didactique et de règles du contrat didactique. Même le fonctionnement le plus courant de l'enseignement pennet d'observer les effets de ces contraintes.

Les travaux des mathématiciens sur les fondements de leur discipline, en particulier sur l'axiomatisation de la géométrie, depuis Euclide jusqu'à Hilbert, apparaissent comme des outils d'analyse indispensables pour comprendre ces phénomènes, y compris, ce qui peut paraître étonnant, à un niveau. élémentaire. Ils montrent en particulier que même en géométrie élémentaire plane, lieu traditionnel d'apprentissage de la démonstration, cette dernière ne saurait se résumer à un enchaînement logique fondé sur des axiomes mais comporte toujours de manière nécessaire des résultats issus de la lecture du dessin. Ils donnent aussi, à travers l'axiomatique géométrique, un moyen d'analyse et de classification de ces appels nécessaires au dessin qui devrait faire partie du bagage de l'enseignant de mathématiques à ce niveau. Ils laissent en revanche ouvert le problème du

31

fondement cognitif de l'appel à l'évidence nécessaire dans l'apprentissage de la géométrie.

Bibliographie

ARNAULD A., NICOLE P. (1674) La logique ou l'art de penser, Ed. PUF, Paris 1965.

ARSAC G. (1996) Cours sur l'axiomatique de la géométrie, Actes de l'université d'été de formation de formateurs en didactique des mathématiques, IREM de Clermont­Ferrand.

ARSAC G., MANTE M. (1997) Situations d'initiation au raisonnement déductif, Educational Studies in Mathematics, 33,21-43.

BARBARIN P., (1928) La géométrie non euclidienne, p. 18, Gauthier Villars, rééd. J. Gabay, 1990.

BLANCHÉ R. (1955) L'axiomatique, 5ème édition, 1970, PUF. CHEVALLARD Y (1985) La transposition didactique, réed. 1991, La Pensée

Sauvage, Grenoble, 240 pages. CHEVALLEY C. (1995) Pascal, contingence et probabilité, PUF, 1995, p. 35 EUCLIDE, Les éléments, tome 1, B. Vitrac éditeur, PUF, 1990, Paris. GISPERT H. (1995) la théorie des ensembles en France avant la crise de 1905 :

Baire, Borel, Lebesgue... et tous les autres, Revue d'Histoire des mathématiques, tome 1, fascicule 1, p. 39-82, Société mathématique de France, Paris.

GRANGER, G.G. (1994) Formes opérations objets, Vrin, Paris. GUICHARD J (993) Statut et fonction de la démonstration en mathématiques,

quelques repères, lREM de Poitiers. HADAMARD (1898) Leçons de géométrie, tome 1: géométrie plane, p.1, l3ème

édition, 1947, réimpression J. Gabay, 1988. HILBERT D. (1899) Les fondements de la géométrie, traduction de la dixième

édition, Paul Rossier éditeur, Dunod, Paris, 1971. KLINE M. (1980) Mathématiques, lafin de la certitude, trad française, 1989, Ch.

Bourgois éd, Paris, 664 pages. PASCAL, De l'esprit géométrique, réédité par A Clair, 1985, Flammarion. PERRIN-GLORIAN M-J (1992) Aire de surfaces planes et nombres décimaux.

Questions didactiques liées aux élèves en difficulté aux niveaux CM-sixième, thèse, Université Paris 7.

PONT, J. C. (1995) Aux sources du conventionnalisme, in Panza M. et Pont Les savants et l'épistémologie vers la fin du dixneuvième siècle, Albert Blanchard, Paris.

Activité ... AMI chemin

Guy VERPLANCIŒ Collège Val de l'Indre

A'"'= ~L

I~----------------VE

LAIE est un carré de côté 3 km ; RIE, MEL sont deux triangles équilatéraux. La Nationale supporte le côté AI ; je l'ai quittée en A pour pique-niquer en M. Après mon pique-nique, je décide de prendre un autre chemin que le chemin A-R-M pour retrouver la Nationale.

« De toute façon, j'ai fait mi-chemin à l'aller, je ferais donc mi-chemin au retour! »

Qu'en pensez vous?

«petit x» nO 47, p. 32, 1997 - 1998

LES PROBLÈMES "CONCRETS"

À "METTRE EN ÉQUATIONS" DANS L'ENSEIGNEMENT!

Lalina COULANGE Didactique des mathématiques, Laboratoire Leibniz

Université Joseph Fourier, Grenoble

Nous ne nous sommes pas intéressés de manière directe au sujet évoqué par le titre que nous avons donné à cet article. La "mise en équations" de problèmes "concrets" s'est présentée à nous par le biais de questions en rapport avec la modélisation mathématique et sa place dans l'enseignement, qui ont motivé notre travail. Pour éclairer le lecteur, il nous faut revenir au début de l'''histoire'' de notre recherche et expliciter les choix que nous avons faits au cours de cette étude.

Au travers de lectures préliminaires à notre recherche, nous avons pu constater deux directions dans les travaux en didactique des mathématiques en rapport avec la modélisation mathématique. Ce sont les directions: "enseigner par la modélisation" et "enseigner la modélisation ".

Dans la première (enseigner par la modélisation), les articles ou ouvrages sont nombreux autant en didactique des mathématiques qu'en didactique de la physique: il s'agit d'étudier l'utilisation de la modélisation comme façon de poser aux élèves des questions d'enseignement, c'est-à-dire leur faire acquérir une connaissance (nouvelle ou non) par l'intermédiaire de la construction de modèle en classe. On peut, par exemple, citer Di Martino, Legrand et Pintard (1995) qui ont explicitement travaillé dans ce sens à propos de l'introduction du concept de limite:

"La compréhension du jeu de modélisation est un préalable à la compréhension scientifique des concepts fondamentaux de toute science, son approfondissement "doit donc" (pour que le sens soit préservé) être explicite et pour le moins concomitant à l'introduction de ces concepts." (op. cité p. 285).

Notre étude s'inscrit dans la deuxième direction des travaux en didactique des mathématiques sur la modélisation (enseigner la modélisation) : il s'agit donc d'étudier l'enseignement de la notion de modélisation elle-même. Plus précisément, nous nous sommes fixés comme objectif de faire des recherches à ce propos sur l'enseignement des mathématiques en vigueur dans les classes de Seconde actuellement. Notons que c'est sur ce point que cet article diffère de ceux précédemment parus dans « petit x» en rapport avec la modélisation mathématique (Béguin, Gurtner, de Marcellus, Denzler, Tryphon,

1Cet article est inspiré de notre mémoire de DEA de didactique des disciplines scientifiques (Coulange, 1997)

« petit x» nO 47, pp. 33 à 58, 1997 - 1998

34

Vitale, 1994) où les auteurs étudient la mise en œuvre d'un processus d'enseignement de la modélisation qui n'existe pas habituellement dans les institutions actuelles2 au niveau de la Seconde.

Notre objectif est donc d'étudier un éventuel apprentissage de la modélisation dans l'enseignement actuel des mathématiques en classe de Seconde3 .

En préambule à une étude sur le sujet, il nous fallait dans un premier temps, éclaircir ce que nous entendions par "modélisation mathématique". Nous avons été amené ainsi à construire une description pragmatique de la démarche de modélisation mathématique à partir d'une situation "réelle". Cette schématisation que nous présentons n'a pas pour but de faire une description détaillée de ce qu'est la modélisation mathématique mais de nous fournir un point de vue particulier qui nous servira de référence pour étudier les faits observés au niveau d'enseignement considéré.

1. Une schématisation de la démarche de modélisation mathématique à partir d'une situation réelle

Pour élaborer ce schéma du processus de construction d'un modèle mathématique, nous avons préalablement consulté diverses définitions existantes.

Dans l'Encyclopedia Universalis, la définition de la modélisation mathématique ne donne pas beaucoup de précisions sur le "cœur" d'une démarche de construction d'un modèle mathématique. L'auteur de cette définition y insiste par contre beaucoup sur l'aspect "interdisciplinaire"4 de la modélisation mathématique : utilisée autant dans les sciences expérimentales comme la physique ou la biologie que dans les sciences humaines comme la sociologie, l'économie.

Nous nous sommes ensuite référés à deux travaux de didactique des mathématiques: Chevallard (1989) et Henry (1997) ont, avant nous, essayé d'établir un schéma du processus de construction d'un modèle mathématique. Notre modèle de la démarche de "modélisation" à partir d'une situation "réelle" en est assez directement inspiré. Nous réutilisons notamment la notion de "modèle pseudo-concret"5 introduite par Henry qui est une notion-clé de notre schématisation et, comme Chevallard, nous insistons sur le fait que la construction d'un modèle mathématique à partir d'une situation "réelle" se fait relativement à des questions (en rapport avec la dite situation)6.

Un modèle mathématique représente d'après nous, une interprétation mathématique

2 "Nous présentons ici les résultats d'une approche exploratoire à l'enseignement interdisciplinaire de la mathématique et des sciences." (Béguin, Gurtner, de Marcellus, Denzler, Tryphon, Vitale, 1994 p. 41) 3 Notons que bien que nous ayons choisi dans un premier temps la classe de Seconde comme terrain d'observation, l'étude que nous allons présenter dans cet article nous semble réutilisable, en continuité, au niveau de la classe de Troisième. Nous reviendrons sur cette remarque en conclusion de notre article. 4 Caractéristique d'ailleurs également bien mise en valeur par la série de 3 articles en rapport avec la modélisation précédant celui-ci dans Petit x : "Mots clefs: enseignement de la mathématique, enseignement des sciences, enseignement transdiciplinaire, modélisation... " (Béguin, Gurtner, De Marcellus, Denzler, Tryphon et Vitale 1994) 5 "Il s'agit de traduire cette description (de la situation réelle que l'on cherche à modéliser mathématiquement) en un système simplifié et structuré: c'est le niveau du modèle pseudo-concret" (Henry 1989, p. 3) 6 "On définit le système que l'on entend étudier (ou modéliser) en précisant les aspects "pertinents" par rapport à l'étude que l'on entendfaire de ce système..." (Chevallard, 1989)

35

liée à une situation "réelle" (qui peut éventuellement provenir d'autres disciplines de sciences expérimentales ou humaines) ou à sa description en langage naturel, relativement à des questions que l'on se pose sur cette situation.

On peut alors schématiser la démarche de modélisation mathématique de la manière suivante: en entrée, une situation "réelle" et des questions en rapport avec cette situation: Un modèle mathématique a pour "registre d'entrée" (pour reprendre les termes de Chevallard, 1989) une situation "réelle"7 et des questions que l'on se pose à l'intérieur de cette situation. La démarche de modélisation comporte ensuite schématiquement 4 phases (dont le contenu est explicité dans le schéma de la figure 1) qui sont en fait en interrelation les unes par rapport aux autres. Quand on construit un modèle mathématique, ces phases ne correspondent pas réellement à des étapes qui se succéderaient dans un ordre linéaire. Nous les dissocions ici pour mieux faire apparaître les différents types de tâches qui sont mises en œuvre dans une modélisation mathématique.

- Réduction du système à des aspects pertinents par rapport aux questions - Relations dégagées en rapport avec ces critères pertinents (liant ceux que l'on peut considérer comme des variables, faisant apparaître ceux qui correspondent à des contraintes sur ces "variables")

MODELES PSEUDO-CONCRETS plus ou moins proches

Domai e ''pseud -concret"

Figure 1. Schéma de la démarche de modélisation mathématique

Ces quatre phases sont les suivantes :

7 Nous considérerons cette situation "réelle" comme non-mathématique: nous n'avons en effet pas abordé la question de la modélisation intra-mathématique dans ce travail.

36

1. Passage de la situation réelle de départ à un modèle pseudo-concret On appelle modèle pseudo-concret un modèle intermédiaire (en langage naturel ou éventuellement sous forme d'un schéma) entre la situation réelle et le modèle mathématique à construire. C'est en quelque sorte un premier niveau d'abstraction de la "réalité" invoquée, qui n'est d'ailleurs pas fixe la plupart du temps: comme on le voit sur notre schéma, un modèle pseudo-concret peut être plus ou moins proche de la situation réelle considérée ou du modèle mathématique à construire.

2. Passage du modèle pseudo-concret au modèle mathématique 3. Phase de travail purement mathématique dans le modèle mathématique 4. Retour à la situation étudiée

A partir de ce "modèle", nos premières questions en rapport avec l'enseignement des mathématiques et la modélisation sont venues à se préciser:

(1) Où dans l'enseignement des mathématiques de Seconde peut-on éventuellement repérer l'existence de techniques enseignées en rapport avec la construction de modèles mathématiques 7 Ce savoir se rapproche-t-il de notre "modèle" de la démarche de modélisation 7

En articulation avec ces premières questions, nous sommes venus à nous en poser d'autres plus en rapport avec les comportements d'élèves et les pratiques d'enseignants en classe de Seconde :

(2) Quelles activités en rapport avec une démarche de modélisation mathématique (telle que nous la caractérisons) les élèves ont-ils à prendre en charge 7 Quelles sont les exigences qu'ils y attachent et qu'ils essaient de satisfaire 7 D'autre part quelles sont les attentes des enseignants liées aux productions de leurs élèves dans ces pratiques 7

Pour mieux cerner ces questions et y apporter des éléments de réponse, nous avons choisi de les reprendre sous l'éclairage de deux grandes perspectives théoriques de la didactique des mathématiques: le point de vue de l'écologie des savoirs et en articulation, celui du contrat didactique.

La perspective écologique nous est apparue judicieuse vls-a-vis des premières questions (1) qui sont en fait centrées sur la "vie" d'objets de savoir enseignés en rapport avec la démarche de modélisation mathématique en Seconde. En considérant les objets de savoir en interrelation les uns par rapport aux autres8, cette approche met à notre disposition des outils d'analyse pour mener à bien l'étude de leur "vie" dans le savoir enseigné:

- la notion d'habitat9, "lieu" occupé par un objet de savoir (où peut-on le trouver 7) - la notion de niche, place fonctionnelle occupée par un objet de savoir (quel rôle ou

"profession" joue-t-il 7) - l'idée de chaînes trophiques, chaînes reliant l'objet considéré à d'autres comme

8 La "loi écologique fondamentale" à retenir est la suivante: "Pour être viable au sein d'un corpus de savoirs (savant ou enseigné), un élément de savoir doit pouvoir y apparaître (...) comme partie d'un tout structuré" (Rajoson 1988,p. 135). 9 "Pour le dire en langage volontairement anthropomorphe, l'habitat, c'est en quelque sorte l'adresse , le lieu de résidence de l'organisme. La niche, ce sont les fonctions que l'organisme y remplit : c'est en quelque façon la profession qu'il y exerce" (Chevallard, 1994, p.14).

37

outil ou "utilisateur" de ces objets: pour vivre de manière stable, un objet de savoir doit être relié vers le haut (outil de) et vers le bas ("outillé" par) à d'autres objets du savoir considéré.

De même, le point de vue du contrat didactique nous a paru pertinent par rapport aux questions (2) centrées sur les comportements d'élèves et d'enseignants vis-à-vis des activités de modélisation mathématique en classe de Seconde. Il nous permettra en effet de décrire ces comportements en les inscrivant dans des règles "contractuelles" reconnues par enseignants et élèves.

Nous avons cherché dans notre étude à articuler ces deux perspectives théoriques 1o. Nous montrerons qu'à partir des résultats d'une étude en termes d'écologie des savoirs, il est possible de révéler en partie les règles du contrat didactique.

Notre point de départ est donc une analyse écologique du programme de Seconde actuel et de deux manuels d'édition récente.

II. Analyse écologique du programme et de manuels

L'étude écologique de deux ouvrages scolaires de mathématiques destinés à l'enseignement en classe de Seconde que nous allons maintenant présenter s'appuie sur notre schématisation de la démarche de modélisation présentée plus haut : nous l'utilisons comme une description de l'objet modélisation et de sa vie au sein d'un savoir de référence (que nous chercherons à comparer aux objets enseignés en rapport avec la modélisation et leur vie au sein du savoir enseigné en Seconde).

II.1. Étude des directives du programme

Nous avons commencé par consulter le programme de mathématiques de Seconde paru en 1990 et toujours en vigueur actuellement.

Dans un premier temps, comme l'évoque ChevallardII, ces directives officielles, semblent suggérer que la modélisation mathématique occupe une place importante dans l'enseignement actuel en classe de Seconde. Sa présence paraît répondre à une volonté d'ouverture des mathématiques sur ce que les auteurs du programme nomment la "vie courante" ou "l'environnement de l'élève" ou sur d'autres disciplines enseignées.

Ainsi dans les "Objectifs et capacités valables pour l'ensemble du programme", cette volonté est explicite :

10 Cette idée d'articuler les deux points de vue de l'écologie et du contrat didactique est inspirée d'un article d'Assude (1996) : De l'écologie et de l'économie d'un système didactique ou l'auteur montre clairement la richesse et l'intérêt de ce type d'articulation. II Dans la partie "Activités et modélisation" de son Dictionnaire de didactique des mathématiques, Chevallard affirme : "Bien que le terme de modélisation soit de promotion relativement récente, il n'en est pas moins présent dans les programmes de l'enseignement secondaire (...) La place ainsi accordée à la modélisation de situations du monde fort diverses semble répondre à une volonté délibérée de rendre sensible la "déraisonnable efficacité des mathématiques", c'est à dire leur capacité à produire des connaissances sur le réel [...]" (Chevallard, à paraître)

38

"L'enseignement des mathématiques est aussi à relier avec celui des autres disciplines [...]" (op. cité p. 357).

Cette ambition d'accorder de l'importance à la modélisation pour ouvrir les mathématiques vers "l'extérieur" resurgit également à plusieurs reprises dans la description des contenus du programme (au moins une fois dans chacun des 4 chapitres: Problèmes numériques et algébriques, Fonctions, Statistiques, Géométrie). Par exemple, on peut lire à propos de l'enseignement des Statistiques:

"Les documents nécessaires seront proposés en liaison avec les enseignements de sciences biologiques ou empruntés à l'environnement de l'élève [...]" (ibid. p. 358e)

A première vue, les auteurs du programme semblent ainsi accorder un habitat vaste et une niche confortable à la modélisation mathématique en classe de Seconde. Mais y a-t­il dans ce programme, des directives présentant explicitement une démarche ou une méthode en rapport avec la modélisation comme un réel enjeu d'apprentissage ? Les deux parties du texte consulté concernant l'enseignement des Statistiques et de la Géométrie n'y font pas allusion.

Dans les deux chapitres restants: "Fonctions" et "Calcul numérique et algébrique", le terme de modélisation reste absent. Mais on y trouve la description d'une méthode de mise en équations à appliquer pour résoudre des problèmes "concrets" qui paraît se rapprocher d'une démarche de modélisation mathématique. On peut lire

- dans le chapitre "Calcul numérique et algébrique" ou plus exactement dans la sous-partie "systèmes linéaires" :

"L'objectif est d'étudier les problèmes issus d'autres disciplines et de la vie économique et sociale en mettant en valeur les phases de mise en équations, de traitement mathématique et d'interprétation des résultats l2 " (ibid. p. 358).

- dans le chapitre "Fonctions" : "On exploitera largement des situations issues de l'algèbre, de la géométrie, des sciences techniques et de la vie économique et sociale, en marquant les différentes phases : mise en équations, traitement mathématique, contrôle et exploitation des résultats" (ibid. p. 358b).

Par ailleurs le programme reste assez flou sur la mise en œuvre par les élèves de manière autonome de ces méthodes et sur leur description (elles semblent schématisées en trois phases : mise en équations, traitement mathématique, et exploitation ou contrôle et interprétation des résultats).

Pour en savoir plus, nous avons donc choisi de consulter deux ouvrages destinés à la Seconde correspondant à ce programme.

II.2. Étude de deux manuels

Nous avons choisi d'étudier les deux ouvrages suivants13 :

- Mathématiques 2de collection FRACTALE, édition BORDAS 1994. - Math Seconde collection TERRACHER, édition HACHETTE 1994. Pour simplifier la lecture de l'analyse tirée de ces deux manuels, nous les désignons

12 C'est nous qui soulignons. 13 Nous avons pu constater a posteriori à travers un questionnaire à des enseignants (que nous présenterons en partie dans la suite) la pertinence de ce choix. En effet, la majorité des enseignants interrogés utilisent en priorité Terracher (71 % pour la partie cours et 80,9 % pour la partie exercices) et Fractale (71 % pour la partie cours et 76,2 % pour la partie exercices).

39

dans la suite respectivement par Fractale et Terracher. Ces deux ouvrages présentent une structure assez similaire avec une partie

identifiable à un cours composé d'Activités préparatoires, d'un Cours Théorique et de Travaux Pratiques et contenant des "Points Méthode" (dans Terracher) ou une "Fiche Méthode" (dans Fractale), et une partie réservée à des exercices (laissés à la charge de l'élève).

Nous avons décidé d'étudier de plus près dans ces deux ouvrages le chapitre "Systèmes linéaires". En effet ce chapitre représente un habitat commun14 (aux deux manuels) d'un objet de savoir enseigné en rapport avec la modélisation mathématique: la méthode de mise en équations de problèmes "concrets"·

On peut certes voir quelques différences entre les deux manuels : les auteurs de Terracher semblent accorder plus d'importance à l'aspect "modélisation de situations extra-mathématiques" que ceux de Fractale ; ils multiplient notamment un peu plus les exemples de résolution de problèmes "concrets" dans les Activités préparatoires (2 Activités sur 3) et dans les Travaux Pratiques (4 exercices résolus sur 4)

Mais finalement, l'étude approfondie du chapitre "Systèmes linéaires" en parallèle dans ces deux ouvrages permet de tirer des conclusions communes sur le rapport institutionnel à l'objet "méthode de mise en équations de problèmes concrets" (en rapport avec la modélisation mathématique).

Tout d'abord, on peut constater d'après les deux manuels que la mise en équations ne va pas vivre de manière annexe dans l'habitat des systèmes linéaires mais comme un réel enjeu d'apprentissage : dans les deux cas et dès la page d'entrée, elle est donnée comme un "objectif pédagogique" du chapitre. Citons par exemple Fractale:

"- Traduire géométriquement, en relation avec le chapitre précédent, une équation linéaire à deux inconnues, ou un système de telles équations. - Connaître les méthodes usuelles de résolution de systèmes et savoir la mieux adaptée à la situation proposée.

- Savoir mettre en équations un problème concret15 : en particulier choisir les inconnues; résoudre le problème mathématique et vérifier la pertinence des solutions trouvées." (op. cité, p. 267).

Un autre indice est la place assez importante que la mise en équations prend dans les "Activités Préparatoires" ou les "Travaux Pratiques" (au moins la moitié des exercices présentés dans ces deux parties du chapitre Systèmes linéaires sont des exemples de mise en équations de problèmes "concrets" dans les deux ouvrages)

Pourtant ni dans Fractale, ni dans Terracher, on ne trouve de traces de "vie" de la mise en équations de problèmes "concrets" dans le cours théorique du chapitre "Système linéaires". Celui-ci (dans les deux livres) est uniquement constitué de connaissances théoriques sur la résolution de systèmes linéaires : définition, interprétation graphique et méthodes numériques de résolution (substitution et combinaison linéaire).

C'est [malement dans un "Point Méthode" (pour Terracher) ou dans la "Fiche Méthode" (pour Fractale) qu'est décrite une méthode de mise en équations16.

14 On peut noter que dans le chapitre "Fonctions" de Fractale, on ne trouve pas trace de méthode en rapport avec la modélisation mathématique tandis que dans Terracher, dans le chapitre "Généralités sur les fonctions", on peut voir apparaître un Point Méthode où les auteurs précisent une méthode pour "mettre en œuvre une fonction pour décrire une situation, résoudre un problème". (op. cité, p.150). 15 C'est nous qui soulignons. 16 Pour reprendre les termes de Chevallard, la mise en équations vit en tant que notion paramathématique (et non comme notion mathématique) : "Les notions paramathématiques sont des notions-outils de ['activité

40

Dans les deux ouvrages, cette méthode est constituée de quatre étapes : choix des inconnues, mise en équations, résolution mathématique ou résolution du système et conclusion ou retour au problème posé.

La troisième phase de résolution mathématique ou de résolution du système apparaît, de façon claire, nourrie ou outillée par les connaissances introduites dans la partie de cours théorique :

"Résolution Mathématique: Appliquez l'une des méthodes vues dans le cours pour résoudre le système obtenu." (Fractale, p. 275). "Résolution du système: (cfcours)" (Terracher, p. 96).

Ceci nous permet d'inscrire la méthode de mise en équations dans le réseau trophique représenté par le schéma ci-dessous (figure 2).

Enoncés de problèmes "concrets" proposés

outil pour la résolution de

méthode de mise en équations (décrite dans "fiche méthode" ou "point méthode"

en quatre étapes :

1. choix des inconnues 2. mise en é

oblème posé ou conclusion

objets de savoir enseignés sur les systèmes linéaires

(dans la partie de cours théorique)

3. résolution mathématique ou résolution du système

4. retour au

Figure 2. Réseau trophique de la méthode de "mise en équation"

Ce schéma souligne le fait que les trois étapes restantes de la méthode: "choix des inconnues", "mise en équations" et "conclusion" ou "retour au problème posé" semblent étrangement vivre indépendamment de tout "outil" du cours théorique.

Mais en lisant plus attentivement la description de ces trois étapes, on peut

mathématique; elles ne sont pas normalement objets d'étude pour le mathématicien." (Chevallard, 1991 p. 50). Si on regarde des ouvrages plus anciens (datant d'avant la parution du programme de 1990), on s'aperçoit que la mise en équations ne semble pas vivre explicitement dans le texte du savoir. On peut penser que cet objet est passé du statut de notion protomathématique à celui de paramathématique : "Les notions paramathématiques (et à fortiori les notions mathématiques) sont des objets dont l'enseignant prend conscience, à qui il donne un nom (...) Il existe une strate plus profonde de "notions", mobilisées implicitement par le contrat didactique. Pour elles, j'ai proposé le qualificatif de "protomathématiques". (Chevallard, 1991 p. 51).

41

comprendre pourquoi cela ne rend pas pour autant "inconfortable" la vie de la méthode mise en équations. On s'aperçoit en fait qu'il semble exister des contraintes sur les énoncés de problèmes "concrets" permettant aux élèves de Seconde d'appliquer la méthode de mise en équations :

- Les inconnues à "choisir" semblent correspondre aux grandeurs cherchées ou sont marquées par des indicateurs linguistiques dans le texte des énoncés de "problèmes concrets" proposés". On peut reprendre en exemple, la "Fiche méthode" de Fractale:

"CHOIX DES INCONNUES Lisez très attentivement l'énoncé pour déterminer les grandeurs cherchées. Choisissez alors ces grandeurs comme inconnues..." (Fractale, p. 275).

- Or l'étape de "mise en équations" est directement suivie de celle de "résolution du système" ou de "résolution mathématique" (où il s'agit d'appliquer "l'une des méthodes dl

cours pour résoudre le système obtenu" (Fractale, p.275») : ces énoncés semblent donc toujours "cacher" un système d'équations linéaires connu (de taille "raisonnable" avec autant d'équations que d'inconnues) et résolvable par les méthodes du cours théorique. Ce que l'on pourrait schématiser par la figure 3, équivalent datl;s le savoir enseigné en classe de Seconde (dans l'habitat relatif aux systèmes linéaires) de la figure 1.

: : : :MOD LE P.sEtTt>O~CoNClŒt :

Jj:~o~c~ eJe pio~l+~e :e~n:a~m:a(h~~a(iqu~ : -> teS' inconnueS' et les "équations à déterminer sont· : '~dé.g~g~e~" Pa:n& l'~npQc~ : : : : : . . . . . . . (plus.ou moins apparent~s) ....

plus'ou moins l'roches'

.réponse à-la :qp.~stjo~ ~e: ·l'éOORCé .

Figure 3. Schéma de la modélisation mathématique comme savoir enseigné

Ce schéma met bien en évidence, si on se réfère à notre schématisation de la démarche de modélisation mathématique à partir d'une situation "réelle" (figure 1) qu'il ne semble pas y avoir dans la méthode de mise en équations décrite dans Fractale et

42

Terracher, l'équivalent d'un passage par l'intermédiaire d'un modèle pseudo-concret.

Cette constatation et nos hypothèses sur l'existence de contraintes sur les exercices de mise en équations nous amènent à avancer qu'en fait, ces énoncés de problèmes "concrets" ne représentent pas des situations "réelles" dans toute leur complexité mais plutôt des modèles pseudo-concrets assez proches du modèle mathématique (de forme prédéterminée) à construire.

Dans un deuxième temps, l'examen de la partie réservée aux exercices du chapitre "Systèmes linéaires" des deux ouvrages confirme ces suppositions.

La plupart des énoncés17 de problèmes "concrets" à mettre en équations répertoriés semblent bien respecter les contraintes énoncées et représenter des modèles pseudo­concrets quasi-mathématiques de situations "réelles". On trouve certes des contre­exemples dans Terracher : certains énoncés ne peuvent être ramenés directement à l'écriture d'un système linéaire mais s'y rapportent par l'intermédiaire d'un changement d'inconnues ou d'autres "cachent" des systèmes linéaires comportant plus d'équations que d'inconnues ; cependant ces particularités sont signalées par le titre de la catégorie

. auxquels ce type d'exercices appartient ("d'autres systèmes" ou "Systèmes se ramenant à un système linéaire) et leur résolution très souvent guidée par des indications.

On peut constater par ailleurs que quelques énoncés de problèmes "concrets" proposés pourraient être résolus par des techniques arithmétiques. Citons comme exemple un exercice tiré de Terracher:

"57 Un problème du XVIIIe (d'après Éléments mathématiques. M Rivard, 1760) Une personne ayant rencontré des pauvres, a voulu donner à chacun quatre sols; mais elle a trouvé en comptant son argent, qu'elle avait deux sols de moins qu'il ne fallait; c'est pourquoi elle a donné seulement trois sols à chaque pauvre, et il lui en est resté cinq. On demande combien la personne avoit de sols, et combien il y avoit de pauvres." (ibid., p.104)

On peut en réponse à cet exercice donner la solution de type arithmétique suivante: "En donnant 4 sols, 2 pauvres n'en ont que 3. Mais si on donne 3 sols à chaque pauvre, il reste 5 sols. C'est donc qu'il y a 2 + 5 = 7 pauvres (les deux qui n'avaient que 3 sols plus les 5 qui ont rendu un sol sur les 4 qu'ils avaient). Le nombre de sols que la personne avait étant égal au nombre de pauvres multiplié par 4

auquel on enlève 2, la personne avait 7 x 4 - 2 =26 sols." Cet exercice se trouve dans la catégorie "exercices" dans la rubrique intitulée

"Systèmes se ramenant à un système linéaire (2, 2)" et les auteurs du manuel ne précisent pas que ce problème ne nécessite pas forcément l'utilisation d'un système linéaire.

Cette possibilité de résoudre certains problèmes par l'arithmétique n'étant pas du tout évoquée, cela revient à privilégier la résolution de type algébrique. L'outil mis à la disposition de l'élève de Seconde pour résoudre les problèmes "concrets" de ce type est alors tout désigné: c'est le système linéaire. On ne le met fmalement jamais dans la position où il doit se poser la question du choix de l'outil mathématique le plus performant.

17 On considère les énoncés avec les éventuelles indications qui les accompagnent. Il est possible par exemple de trouver des énoncés en langage naturel où les inconnues ne sont pas marquées par des indicateurs linguistiques et ne correspondent pas à des grandeurs cherchées mais elles sont alors explicitement données par des indications du type : "Choisissez comme inconnues: x la part de chaque enfant, y l'héritage totaL" (Fractale, p. 282).

43

Si on revient maintenant à notre premier ensemble de questions (1) en rapport avec la vie de la modélisation mathématique dans l'enseignement en classe de Seconde, notre étude montre que celle-ci semble réduite à une méthode de "mise en équations" dans l'habitat relatif aux systèmes linéaires qui se rapproche plus d'une "pseudo-modélisation" que de la construction de modèles mathématiques à partir d'une situation réelle. La question que l'on vient à se poser est alors la suivante: que reste t-il à la charge de l'élève de Seconde comme tâche en rapport avec la modélisation dans la mise en équations des problèmes "concrets" qui lui sont proposés?

Il lui reste en/ait à écrire le bon système à partir de l'énoncé. Cette tâche (qui comprend notamment la désignation de grandeurs inconnues par

des lettres) peut paraître "élémentaire" et [malement très modeste par rapport à une activité de modélisation mathématique. Cependant, si on observe le niveau de difficulté associé aux énoncés de problèmes "concrets" indiqué par les auteurs de Fractale, on s'aperçoit que ces exercices sont considérés comme difficiles et notre travail va montrer qu'ils le sont effectivement. On ne doit donc pas sous-estimer la difficulté que génère cet espace de liberté laissé à l'élève de Seconde.

III. Règles de contrat didactique en rapport avec la mise en équations des problèmes "concrets"

Comme nous l'avons évoqué plus haut, nous avons choisi d'articuler les approches théoriques de l'écologie et du contrat didactique. Ainsi à partir de l'analyse que nous venons de faire, nous allons tirer des hypothèses de règles de contrat didactique décrivant les comportements respectifs des élèves et des enseignants en classe de Seconde pendant des activités de "modélisation-mise en équations".

De l'examen des exercices du chapitre "Systèmes linéaires" de Terracher, on peut supposer une première règle de contrat didactique. En effet, nous avons pu constater dans notre analyse, que certains énoncés de problèmes "concrets" présentent à la fois une solution de type algébrique par l'intermédiaire d'un système linéaire et une solution de type arithmétique qui est "passée sous silence" par les auteurs. Cela nous amène à penser qu'en réponse aux attentes de l'institution (ici, classe de Seconde) et des enseignants la représentant, un élève de Seconde va systématiquement recourir à l'écriture d'un système pour résoudre ce type d'énoncé. D'où l'hypothèse d'une première règle de contrat didactique spécifique à la résolution des problèmes "concrets" :

R J: Pour résoudre un problème "concret", il faut chercher à écrire un système

linéaire à partir de l'énoncé.

Nous venons d'autre part, de conclure de notre étude écologique que la seule tâche en rapport avec la modélisation mathématique laissée à la charge d'un élève de Seconde, dans la mise en équations de problèmes concrets, est celui l'écriture du bon système à partir de l'énoncé.

On peut alors supposer un ensemble de règles de contrat didactique qui vont permettre à l'élève de Seconde de gérer cet espace de liberté:

44

- Des règles spécifiques à l'écriture du système Du fait que les énoncés de problèmes "concrets" proposés à l'élève représentent des

modèles pseudo-concrets quasi-mathématiques où les inconnues à "choisir" sont désignées par des indicateurs linguistiques ou correspondent aux grandeurs cherchées, on peut supposer une règle de contrat didactique "principale" :

R 2 : Les grandeurs à prendre en compte comme inconnues apparaissent

explicitement dans l'énoncé et deux corollaires: R'2: Les grandeurs à prendre en compte comme inconnues sont les grandeurs

cherchées apparaissant dans le question à la fin de l'énoncé. R" 2 : Les grandeurs à prendre en compte comme inconnues sont "citées" dans

l'énoncé. - Des règles spécifiques au contrôle de la validité du système linéaire obtenu Du fait que les problèmes "concrets" à mettre en équations répertoriés dans Fractale

et Terracher "cachent" tous, sauf indication contraire, un système linéaire connu et résolvable par les méthodes du cours, on peut en déduire que les règles de contrat didactique suivantes peuvent expliquer les moyens de contrôle de l'élève de Seconde sur la validité du système écrit à partir de l'énoncé:

R 3 : Le système à écrire à partir de l'énoncé d'un problème "concret" est

résolvable par les méthodes de résolution de systèmes linéaires vues dans le cours. R'3 : Le système à écrire à partir de l'énoncé doit comporter autant d'équations

que d'inconnues, en nombre raisonnable l8.

Ces règles de contrat didactique tirées de notre étude écologique sont un outil pour comprendre et interpréter le comportement des élèves de Seconde en réponse aux injonctions didactiques des enseignants dans des activités de "modélisation-mise en équations" .

Nous les avons mises à l'épreuve en élaborant un questionnaire destiné aux enseignants et une expérimentation que nous allons maintenant présenter.

IV. Un questionnaire destiné aux enseignants et une expérimentation en classe de Seconde

Le questionnaire et l'expérimentation ont été construits dans une interrelation étroite sur la base d'énoncés de problèmes "concrets" en "rupture" avec les règles de contrat didactique que nous venons d'énoncer. Leur objectif commun est de déterminer si le comportement des élèves de Seconde et des enseignants est conforme à ces règles.

Nous n'en présenterons ici qu'une partie. Nous laissons notamment de côté un des 2 exercices communs au questionnaire et à l'expérimentation (le problème du "carrelage" tiré de Terracher : exercice 62, p. 105).

18 d'après le programme de 1990 : "On se limitera à des situations ne comportant pas plus de quatre inconnues (...] " (op. cité, p. 358 b).

45

IV.I. Présentation de l'expérimentation

Nous présentons donc deux des trois énoncés de problèmes qui constituent notre expérimentation.

a. La situation "La fleuriste"

Exercice "La fleuriste "19

Une fleuriste vend des bouquets de roses.

Du lundi au samedi, elle vend ses bouquets de roses à un tarif normal puis applique un tarif réduit pour

les vendre sur le marché du dimanche (ces deux tarifs sont les mêmes d'une semaine sur l'autre).

La première semaine, elle vend 65 bouquets au tarif normal et 18 bouquets au tarif réduit le dimanche.

Son bénéfice hebdomadaire est alors de 939 francs.

La deuxième semaine, elle vend 52 bouquets au tarif normal et 12 bouquets au tarif réduit le

dimanche. Son bénéfice hebdomadaire est alors de 756 francs.

Le tarif réduit représente-t-il un gain ou une perte pour la fleuriste? De combien?

Les élèves de Seconde ont à résoudre cet exercice de manière individuelle en temps limité (20-25 minutes pour résoudre ce problème et celui du carrelage non présenté ici).

Analyse a priori de la situation de "la fleuriste"

La difficulté de cet exercice ne réside pas dans l'écriture du "bon" système linéaire à partir de l'énoncé mais dans le choix des inconnues à faire pour résoudre correctement ce problème (la résolution mathématique du système obtenu étailt par ailleurs assez simple). En effet, les inconnues à choisir pour écrire le "bon" système: bénéfices au tarif normal et réduit, ne sont pas explicitement citées dans les phrases à "traduire" sous forme d'équations ("La première semaine, elle vend 65 bouquets au tarif normal et 18 bouquets au tarif réduit le dimanche") et ne correspondent pas non plus à des grandeurs directement demandées par la question en fin d'énoncé ("le tarif réduit représente-t-il un gain ou une perte pour la fleuriste? De combien ?").

Ainsi cet exercice se trouve-t-il en "rupture" par rapport aux règles R z, R'z et R"z :

l'élève de Seconde agissant dans le plus strict respect de ces règles va donc choisir comme inconnues les tarifs et non les bénéfices. Cependant si dans un premier temps, il obéit à ces règles, il est possible que l'incohérence de son résultat numérique20 (un tarif même "réduit" ne peut être négatif!) le conduise à un retour réflexif sur le choix des inconnues en doutant de la validité du système écrit. On en arrive ainsi à une typologie de réponses d'élèves de Seconde à ce problème que l'on peut résumer par le tableau suivant (tableau 1):

19 Cet énoncé est inspiré d'un exercice posé en classe de troisième au cours d'une étude en didactique des mathématiques (Vergnaud et al. 1988, pp. 259-280).

20 Les nombres du problème de la "fleuriste" (65, 18, 939, 52, 12, 756) font aboutir la résolution du système écrit à partir de l'énoncé (avec les bonnes ou mauvaises inconnues) à une solution négative.

46

Tableau 1. Deux types de réponses possibles a l'exercice "La fleuriste"

b. La situation de "la table"

Exercice ''La table ''2, 1

On dispose d'une table et de deux blocs

placés comme sur la figure 1. On trouve

que la longueur r est de 32 pouces. Après r s

la figure 2, on trouve que la longueur s

est de 28 pouces.

Quelle est la hauteur de la table?

avoir réarrangé les deux blocs comme sur

D figure 1

Les élèves interagissent en binômes pour résoudre cet exercice en 20-25 minutes.

21 Cet énoncé est tiré de la série d'exercices du manuel Terracher associée au chapitre "Systèmes linéaires" (exercice 71, p. 106).

figure 2

Réponse de type 1 Soit Pl le tarif normal et P2le tarif réduit. En traduisant les hypothèses de l'énoncé, on obtient le système

I65Pl + 18p2 =939 l 52pl +12p2 =756

Donc en résolvant ce système par substitution, on trouve: Pl = 15 et P2 = -2 D'où le tarif réduit représente une perte pour la fleuriste de 2 francs.

Réponse de type 2 Soit bIle bénéfice de la fleuriste au tarif normal· Soit, b2 le bénéfice de la fleuriste au tarif réduit. En traduisant les hypothèses de l'énoncé, on obtient le système

65b l + l8b2 = 939 {52bl + 12b2 = 756

D'où en résolvant ce système par substitution, on trouve

, b1 = 15 et b2 =-2 Donc le tarif réduit représente une perte pour la fleuriste de 2 francs.

Réponse incorrecte maiS conforme à la règle du contrat r2 et de ses corollaires r'2 et r"2

-> possibilité de rétroaction

Réponse correcte

47

Analyse a priori de la situation ''La table"

Cet énoncé de problème "concret" présente une résolution de type algébrique par l'intermédiaire de l'écriture d'un système à 2 équations et 3 inconnues (donc inhabituel pour un élève de Seconde) et une résolution de type arithmétique. L'élève se conformant à la règle RI (écriture d'un système à partir de l'énoncé) se retrouve en situation de "rupture" par rapport aux règles R3 et R'3' On peut donc supposer que certains élèves ne sauront pas résoudre cet exercice ou reviendront à une solution de type arithmétique se plaçant alors en situation de rupture avec RI' Des réponses d'élèves de Seconde à cet exercice nous donneront donc des indications sur la stabilité de leur comportement vis à vis des règles RI, R3et R'3'

De cette analyse, on peut trrer deux types de réponses pOSSl"bles: Réponse de type 1 On introduit deux inconnues auxiliaires, x et y dimensions des blocs. Soit h la hauteur de la table. L'énoncé conduit au système suivant:

{h~r-Y+x h=s+y-x

D'où en additionnant les deux équations de ce système, et en remplaçant r et s par leurs valeurs, on trouve h = 30.

Réponse de type 2 r est égale à la hauteur de la table diminuée de la largeur du bloc et augmentée de la longueur du bloc. s est égale à la hauteur de la table diminuée de la largeur du bloc et augmentée de la longueur du bloc donc r + s est égale à deux fois la hauteur de la table, c'est­à-dire r + s = 2h donc h = 30.

Réponse correcte en rupture avec la règle du contrat didactique R3 et R'3

Réponse correcte en rupture avec la règle de contrat didactique RI

Tableau 2. Deux types de reponses possIbles a l'exerCIce "La table"

IV.2. Présentation du questionnaire

Ce questionnaire destiné aux enseignants de niveau Seconde (voir en annexe I) est constitué de deux parties. La première s'appuie sur notre analyse de manuels (voir note 12). La deuxième partie est en interrelation avec notre expérimentation: nous y faisons apparaître l'exercice "La fleuriste" (et celui du "carrelage" que nous ne présentons pas dans cet article) en y associant les deux types de réponses tirées de notre analyse a priori. Nous demandons aux enseignants lesquelles ils pensent voir apparaître dans leurs classes, en quelle proportion, leurs remarques personnelles vis-à-vis de cet énoncé. Leurs réponses nous permettront de connaître leurs attentes et leurs prévisions relatives aux réponses d'élèves de Seconde à ce problème "conèret".

48

v. Analyse des résultats du questionnaire et de l'expérimentation

V.l. Analyse de réponses au questionnaire

Nous avons recueilli les réponses de 21 professeurs enseignant en classe de Seconde. Nous n'abordons ici que l'analyse des réponses aux questions associées à l'exercice de la "fleuriste".

Dix-huit enseignants (donc 85,7%) prévoient des réponses fausses du type 1 de la part de leurs élèves à cet exercice. Huit enseignants pensent que ce type 1 représenterait les réponses majoritaires dans leurs classes (très peu voire pas du tout de réponses de type 2 apparaîtraient) tandis que les dix autres pensent que des réponses de type 2 peuvent apparaître de manière non négligeable.

Les enseignants interrogés perçoivent donc la difficulté de cet exercice. On peut citer quelques-unes de leurs remarques personnelles à ce propos:

"Énoncé très délicat" "Je ne donnerai pas cet énoncé en devoir."

Dix enseignants justifient d'ailleurs cette difficulté en donnant des raisons qui vont dans le sens de la "rupture" présumée des règles de contrat didactique spécifiques au choix d'inconnues Rz ,R'z et R"z :

"les expressions "tarifnonnal" et "tarif réduit" apparaissent dans l'énoncé." "Le début du texte incite à choisir Pl et P2'" "La question posée donne en général des indications sur le choix des inconnues."

D'après les réponses à ces questions de notre questionnaire, les prévisions de la majorité des enseignants confirment donc que cet exercice représente une "rupture" avec les énoncés habituels (certains semblent même identifier d'où provient cette "rupture").

V.2. Analyse de résultats de notre expérimentation

L'expérimentation que nous avons élaborée et dont nous avons présentée en partie le scénario au lecteur, a été mise en œuvre le 10 avril 1996 dans une classe de Seconde au lycée de Pontcharra (Isère). L'effectif de la classe était de 30 élèves.

a. Productions d'élèves en réponse à l'exercice de "La fleuriste"

Cinq élèves n'ont pas du tout abordé cet exercice. Examinons les 25 copies et brouillons restants.

Trois élèves n'ont pas précisé le choix des inconnues: ils ont écrit des "x" et des "y" sans préciser à quoi ces lettres correspondent pour eux. 21 élèves ont amorcé une réponse incorrecte du type 2 (voir annexe II et III) en choisissant les tarifs comme inconnues. Une seule élève a choisi les "bonnes" inconnues correspondant aux bénéfices et commencé une résolution correcte du type 1.

Ces 25 élèves ont tous écrit le système: 65X + 18y = 939

{52x + l2y = 756 (avec x et y désignant les "bonnes" ou "mauvaises" inconnues)

Sept d'entre eux (dont l'unique élève ayant choisi les "bonnes inconnues"), se sont

49

arrêtés directement après cette étape de la méthode de mise en équations et n'ont pas résolu le système obtenu. Huit autres élèves ont fait des erreurs de calculs et aboutissent à des solutions numériques inexactes. Trois élèves n'indiquent sur leur copie que le résultat "Pl = 15" mais des calculs et des ratures sur leur brouillon nous suggère qu'ils ont en fait trouvé la solution "P2 =-2" mais que devant ce résultat négatif, persuadés d'avoir fait une erreur numérique, ils ont recommencé leurs calculs. Sept élèves indiquent les deux solutions trouvées "Pl = 15" et "P2 = -2" : parmi eux, deux élèves concluent par "impossible" ou "faux" (voir en annexe II) et les deux autres marquent leur étonnement ("C'est dingue! ").

Les difficultés des élèves de cette classe en réponse à l'exercice "La fleuriste" confIrme bien les prévisions de la majorité des enseignants interrogés et le fait que cet exercice est en rupture avec le contrat didactique spécifIque à la mise en équations de problèmes "concrets". Le comportement de pratiquement tous les élèves (21 sur les 25 qui ont répondu) a obéi aux règles de contrat Rz,R'z et R"z : les débuts dè réponses dites de type 2 dans notre analyse sont majoritaires. Ces règles semblent par ailleurs très stables : devant une solution négative, certains élèves ont remis en doute leur résolution numérique du système ou montré leur surprise mais aucun n'a douté de son choix d'inconnues.

b. Productions d'élèves en réponse à l'exercice de "la table"

La classe considérée étant organisée en 15 binômes, nous avons recueilli leurs productions écrites (copies, énoncés et brouillons)22.

Sur les 15 brouillons et copies récoltées, on peut voir que tous les élèves ont choisi de résoudre l'exercice "La table" par l'intermédiaire d'un système. Tous ont commencé une résolution du type 1 et ont écrit le "bon" système à 2 équations et 3 inconnues à partir de l'énoncé. Mais devant ce système, tous les élèves ont semblé perturbés.

Quatre binômes ont ensuite "tourné en rond" en essayant de résoudre ce système pour trouver les valeurs des grandeurs associées aux trois inconnues.

Six binômes ont considéré d'après le dessin (voir dessin en annexe IV) que "longueur du bloc = 2 largeur du bloc", se ramenant de cette manière à un système (2, 2) que deux d'entre eux ont résolu correctement (solution h =30).

Cinq binômes ont réussi à trouver la solution à partir du système de départ à 2 équations et 3 inconnues. Deux d'entre eux ont vu directement qu'ils suffisait d'additionner les 2 équations; les quatre autres ont fait des calculs intermédiaires (et ont eux aussi "tourné en rond" pendant un moment).

Beaucoup d'élèves ont semblé être très perturbés par la "rupture" que représente cet énoncé avec les règles R 3, R'3. Douze binômes interrogés (dont huit ayant fmi par trouver la solution et quatre n'ayant pas abouti) ont essayé au moins dans un premier temps de résoudre le système de la réponse de type 1 pour trouver la valeur des 3 inconnues par les méthodes numériques connues, tout en marquant leur surprise devant sa forme "inhabituelle". Six binômes ont également réagi par rapport à cette rupture en

22 Nous avons également enregistré les dialogues entre 8 binômes pour analyser les interactions entre les élèves pendant la résolution de cet exercice, ce qui dans notre mémoire de DEA donne lieu à une analyse œ protocole que nous laissons de côté ici.

50

essayant de ramener ce système "hors norme" -à un système "classique" (2, 2) et résolvable par les méthodes du cours, par l'intermédiaire d'informations qu'ils ont cru contenues dans le dessin .

D'autre part la description des productions d'élèves en réponse à cet exercice nous permet de constater une apparente grande stabilité de la règle de contrat RI puisque tous les élèves ont amorcé une réponse de type 1 sans envisager une résolution arithmétique du type 2 même par la suite: la situation de "rupture" avec R3, R' 3 ne leur a pas fait remettre en question pour autant l'utilisation d'un système pour résoudre le problème.

V.3. Conclusions tirées de ces résultats

Les résultats de notre questionnaire et de l'expérimentation confIrment le fait qu'en réponse aux attentes des enseignants, le comportement des élèves de Seconde dans la résolution de problèmes "concrets" s'inscrit dans les règles de contrat didactique RI' RB R,z, R"z, R3 et R '3 • En effet, les réponses d'élèves recueillies aux exercices "La fleuriste" et "La table" se rapprochent de celles envisagées par notre analyse préalable. En ce qui concerne le premier énoncé, elles correspondent par ailleurs aux prévisions des enseignants interrogés. Les deux énoncés présentés contiennent réellement une "rupture" du contrat didactique spécifIque à la "mise en équations de problèmes concrets" : ils ont provoqué des effets spectaculaires et publics dans la classe de Seconde observée: réactions de rejet et d'étonnement de la part d'une majorité d'élèves. Ces perturbations du comportement des élèves nous ont paru aller dans le sens d'une construction de connaissances : les deux situations de "La table" et de "La fleuriste" en provoquant des ruptures du contrat didactique, semblent ainsi représenter une source d'apprentissage pour l'élève de Seconde23 .

v. Conclusion

Ainsi, à travers cette étude, en partant de questions en rapport avec la modélisation mathématique et l'enseignement en classe de Seconde, nous avons abouti à l'étude du contrat didactique relatif à la "mise en équations de problèmes concrets".

En utilisant un schéma de la démarche de modélisation qui résume notre point de vue sur le sujet, nous en sommes arrivé à la conclusion que les activités de "mise en équations" ne représentent pas vraiment une activité de construction de modèles mathématique à partir de situations réelles: les énoncés de problèmes "concrets" proposés aux élèves sont en fait des modèles "pseudo-concrets" quasi-mathématiques de telles situations. La seule tâche laissée à la responsabilité de l'élève dans la résolution de ces problèmes et, en rapport avec la modélisation mathématique, est de procéder à l'écriture d'un "bon" système linéaire à partir de l'énoncé. Pour remplir cette tâche correctement, en réponse aux injonctions des enseignants et de l'institution, notre travail montre que l'élève de Seconde obéit à des règles de contrat didactique spécifIques aux activités de mise en équations de problèmes "concrets" (que nous avons énoncées). On s'aperçoit alors qu'il

23 "D'ailleurs, ce sont en fait les ruptures de contrat qui sont importantes (...) la connaissance sera justement ce qui résoudra les crises issues de ces ruptures." (Brousseau 1986, p. 51-52).

51

ne faut pas négliger cet espace de liberté restreint laissé à l'élève qui n'est pas sans lui poser des difficultés. Cependant pour en revenir à nos premières préoccupations, peut-on encore parler d'activité de modélisation?

D'autre part la stabilité du comportements des élèves vis-à-vis des attentes de l'enseignant (que nous avons interprété comme le respect de règles implicites) ne peut s'expliquer que par des pratiques déjà anciennes des élèves et des enseignants, c'est à dire des pratiques algébriques installées dès le collège. Rappelons le texte du programme actuel de la classe de Troisième :

"3. Équations et inéquations du premier degré:

Méthodes graphiques de résolution d'équations et d'inéquations du premier degré à deux inconnues à

coefficients numériques

Méthodes de résolution d'un système de deux équations ou inéquations du premier degré à deux

inconnues à coefficients numériques

Exemples variés de problèmes se ramenant au premier degré:

Les travaux se placeront dans le cadre des différentes parties du programme. Comme en

Quatrième, on dégagera sur les exemples étudiés, les différentes phases du traitement d'un problème: mise en équation, résolution, interprétation du résultat." (Op. cité, p.. 66)

L'objet système linéaire fait donc sa première apparition au niveau de la Troisième et apparaît ainsi, d'après l'extrait du programme cité, dès le départ, lié de manière forte à une méthode de mise en équations de "problèmes concrets" qui ressemble étrangement à celle qui vit dans les classes de Seconde. Il sera donc intéressant de regarder en continuité de cette étude, l'enseignement des systèmes linéaires en classe de Troisième. Nos travaux actuels vont dans ce sens.

52

BIBLIOGRAPHIE

ASSUDE T. (1996), De l'écologie et de l'économie d'un système didactique, Recherches en Didactique des Mathématiques, Vol. 16 nO 1, pp. 48-70.

BROUSSEAU G. (1982) Ingénierje didaçtique. D'un problème à l'étude a priori d'une situation didactique, Troisième Ecole d'Eté de Didactique des Mathématiques, Orléans.

CHEVALLARD Y. (1989) Le passage de l'arithmétique à l'algèbre dans l'enseignement des mathématiques au collège, Petit x, nO 19, pp. 45-75.

CHEVALLARD y. (1997) Dictionnaire de Didactique des Mathématiques 1996-1997, (à paraître).

CORTES A., FAVRE - ARTIGUE P., VERGNAUD G. Introduction de l'algèbre auprès de débutants faibles. Problèmes épistémologiques et didactiques, in Vergnaud G., Brousseau G. et Hulin M., Didactique et acquisitions des connaissances scientifiques, Paris, CNRS, 1988, pp. 259-280.

COULANGE L. (1997) Une étude sur la modélisation dans la classe de mathématiques en Seconde - un double point de vue à partir de l'écologie et du contrat didactique. Mémoire de DEA de didactique des disciplines scientifiques, Université Joseph Fourier, Grenoble. .

DI MARTINO H., LEGRAND M., PINTARD D. (1995) Modélisation et situations fondamentales, Actes de la VIIlème École d'Été de didactique des mathématiques, 1995 (pp. 279 - 290), éd. IREM de Clermont-Ferrand.

HENRY M. (1997) Expérience aléatoire et modélisation, séminaire Didatech du 5 février 1997, (à paraître dans les cahiers du Séminaire Didatech).

RAJOSON L. (1988) Analyser la transposition didactique: quelques problèmes, concepts et méthodes de l'abord écologique, Thèse, Université d'Aix-Marseille II, Marseille.

53

ANNEXE 1

QUESTIONNAIRE DESTINE AUX ENSEIGNANTS

Première partie

Utilisez-vous couramment un ou plusieurs manuels pour préparer votre cours : oui non

Si oui le(s)quel(s) :

Utilisez-vous couramment un ou plusieurs manuels pour choisir des exercices que vous proposez à vos élèves : oui non

Si oui le(s)quel(s) :

Deuxième partie

Dans cette deuxième partie, vous trouverez deux énoncés d'exercices24 .

Nous vous proposons des types de réponses possibles à ces exercices en vue de connaître votre avis sur celles que vous pensez voir apparaître le plus souvent dans vos classes et pour quelles raisons.

Donnez votre opinion, sur la feuille de réponse prévue à cet effet, annexée en fin de document.

Vous devez cocher pour chaque solution envisagée si cette réponse a des chances d'apparaître dans votre classe (attendue) ou si elle a peu de chance d'apparaître (non attendue).

24 Nous ne donnons ici que l'exercice 'La fleuriste"

54

Exercice 1

Énoncé

Une fleuriste vend des bouquets de roses. Du lundi au samedi, elle vend ses bouquets à un tarif normal puis applique un tarif

réduit pour les vendre sur le marché du dimanche (ces deux tarifs sont les mêmes d'une semaine sur l'autre).

La première semaine, elle vend 65 bouquets au tarif normal et 18 bouquets au tarif réduit le dimanche. Son bénéfice hebdomadaire est alors de 939 francs.

La deuxième semaine, elle vend 52 bouquets au tarif normal et 12 bouquets au tarif réduit le dimanche. Son bénéfice hebdomadaire est alors de 756 francs.

Le tarif réduit représente-t-il un gain ou une perte pour la fleuriste? De combien?

Solutions proposées

Solution 1:

Soit Pl le tarif normal et P2le tarif réduit, en traduisant les hypothèses de l'énoncé, on obtient le système

f65pI + 18p2 =939

l52PI +12p2 =756

En résolvant ce système par substitution, on trouve: Pl = 15 et P2 = -2 D'où on déduit que le tarif réduit représente une perte pour la fleuriste de 2 francs.

Solution 2:

Soit bIle bénéfice de la fleuriste au tarif normal et b2 le bénéfice de la fleuriste au tarif réduit

En traduisant les hypothèses de l'énoncé, on obtient le système

f65b l + 18b2 = 939

l52b l + 12b2 = 756

En résolvant ce système par substitution, on trouve: b l = 15 et b2=-2 D'où le tarif réduit représente une perte pour la fleuriste de 2 francs.

55

Feuille de réponse

Exercice 1

Solution 1 Attendue : oui - non Pourquoi:

Commentaire:

Solution 2 Attendue : oui - non Pourquoi:

Commentaire:

56

ANNEXE II

BROUILLON DE L'ELEVE 1

\. txER..(.-"t(;" L\

~~n._~<w, -=> "'ur: --~~ ~t:"~.4 -

'îb"~L-

"Â~~~ J 2.. 4 ~.

6S 52­ --~"i A'2..

13~ . "1St,. -\

65' ':C.. 1- ",,5 ~ _ '13~.

S~ ~ -,-.A2. )- - '+~.

B-.c. y1. ( 6 S- -:x. i""',Ag ~ -::- Cl 3Q. • )CL. (6S ~ .,.M} -:: ~~~. X 3 { $'2-% ..-A-z.;,.. = J.S'" . ~~f~ 5"2 x. +i'} :. --t-~~

4 ..{ \07<. or ~" ''}.::. .Ag,..!

..4 ~o;x:.. +- ;0 '} -:. A8"\ , ~ ': ~.-1z.

';!J 2'?C-:: 3~ 0 . '} :::.-2...

:;e. -:. A.:!"'" ..e.l- ~ 65" x.. 4- \8 ~ :=. ct ~q,

-"2'?C­ _ - a~o

l-] '5"AS+l&l= 1~·l. , . ~:r.r-t"'8~ ~ 13 .

tg':1- =-36 .

-P~ lÂ#~~~';~ ~ ~ ~ ~ feUl'- 'u~ ~<t.4~\' ~~~ 'f~ .

57

ANNEXE III

BROUILLON DE L'ELEVE 2

r;:nlfif Tsf (f,

011 lIo/tfJ =_ X lIJo,. t. L ~ . re ~ IJDrlJ1aP

d--i:;,.~ 5~ f~(5 2+./1 j -= 939 •., ~ l~'5Z~ + -I2 .s = ~S6 Fr~ ~

"er~ .

bSr' 13,'89 -1­ ~e, ~

@

6. \SI

f$ ~:::

Q:::

C33~-./g~ 6S

T~ _ .-#2 ~

>2 .......

@6) ,c ~ 18~-t. =~"3<)

:>C = ~3~+36

6S'

~ = 4I/Jft'!i ~ 'r'5"-65

58

ANNEXE IV

ENONCE DU BINOME 1

exercice J:On dispose d'une ulblc el de deux blocs plucés comme sur la figure 1. On trouve que la longueur r esl de 32 pouces. Après ~lvoirréarrangé les deux blocs comme sur la figure 2. on t~que la longueur s est de 28 pouces.

Quelle est la hauteur de la table'!

LE TRAVAIL PERSONNEL DES ELEVESl

Nadine MILHAUD IPR mathématiques, Toulouse

1. Une difficulté pour les professeurs et les élèves

Le travail personnel des élèves est une préoccupation et une source de difficultés majeures pour les professeurs. Au cours d'entretiens ou de discussions, ils expriment cela par des remarques du type suivant:

"Les élèves ne s'intéressent pas à ce que l'on fait en classe ils sont attentistes, ils n'écoutent pas ... Ils ne travaillent pas suffisamment; ils n'étudientpas leur cours ,. ils ne savent plus apprendre par coeur les leçons ,. ils sont incapables de réciter les définitions et les théorèmes '" Tant qu'on est avec eux ils arrivent àfaire mais dès qu'ils sont seuls ils ne savent plus ... "

En contrepoint de ces remarques, des réponses d'élèves, sur la façon dont ils préparent le travail à la maison, mais aussi sur les difficultés qu'ils rencontrent en mathématiques2 :

''Pourfaire les exercices j'ai lu la leçon et puis j'aifait les exercices"; ''J'ai essayé de faire les exercices et quandje n yparvenais j'ai lu la leçon. "

1 Cet article reprend pour l'essentielles termes d'une conférence de N.Milhaud, publiée dans "Le parcours diversifié, éléments théoriques" dans la collection "Savoir et faire" (éd. MAFPEN,CRDP de Toulouse). 2 Seules les réponses obtenues le plus fréquemment et qui paraissent significatives sont rapportées.

«petit x» n° 47, pp. 59 à 70 , 1997 - 1998

60

"Souvent je comprends en classe et je sais faire en classe mais en contrôle je n 'y arrive pas ,. " ''Je comprends le cours mais je ne sais pas l'appliquer dans les problèmes ... "

S'il Ya accord sur le manque d'autonomie des élèves par rapport aux tâches qu'ils doivent être capables de mener à bien, le désaccord apparaît à propos de l'existence et de la nature du travail des élèves à la maison.

Dans le cadre de la formation continue, ce problème est habituellement abordé de façon transversale à travers l'objectif" apprendre à apprendre". Certaines difficultés qui relèvent d'un déficit de méthodes générales de travail, s'inscrivent dans une problématique transversale, mais les plus nombreuses sont liées à des problèmes didactiques, propres au fonctionnement de chaque discipline.

Par l'instauration officielle d'horaires d'un nouveau type (modules, études, dirigées ou encadrées), l'institution affiche sa volonté de redonner une place reconnue au travail personnel de l'élève, tant en classe que hors de la classe. L'existence de ces horaires encourage les professeurs et nous oblige à examiner cette question du travail personnel des élèves de façon plus précise afm de concevoir des activités adaptées.

Dans l'article, la question du travail personnel des élèves est abordée dans une perspective didactique. Des observations de classes, constituent le point de départ de l'étude : entretiens avec les enseignants et les élèves, et des expérimentations, tout a fait empiriques, réalisées dans certaines classes avec quelques enseignants3 .

La réflexion a été soutenue par de nombreuses discussions avec des chercheurs en didactique des mathématiques4 L'analyse s'appuie sur des concepts de la didactique des °

mathématiques et plus précisément, sur la thèse développée par Chevallard (1995) sur la question de l'étude5. A ce jour, elle semble la plus éclairante pour l'étude de cette question.

2. L'École, lieu de formation : description générale

L'École a pour mission de donner aux jeunes générations une formation à certains savoirs, à certaines oeuvres reconnus comme socialement importants. Cette formation doit leur permettre de devenir autonomes dans le traitement d'un certain nombre de problèmes, l'étude de certaines questions et la réalisation de tâches qui leur sont liées.

3 Il s'agit des enseignants de collèges de l'Académie de Toulouse (Aurignac, l'Isle en Dodon et Lalande). 4 G.Brousseau, professeur à l'IUFM de Bordeaux, Y.Chevallard professeur à l'IUFM de Marseille, Cl.Margolinas Maître de conférences à l'IUFM de Clermont-Ferrand et A.Mercier Maître de conférences à l'ENFA de Toulouse. 5 Chevallard y. (1995) La fonction professorale: esquisse d'un modèle didactique" in Noirfalise, Perrin­Glorian (eds) Actes de la Bième école d'été de didactique des mathématiques, Irem de Clennond-Ferrand, 83­122.

61

• Ce qui caractérise la formation scolaire c'est qu'elle est pour l'essentiel une formation par l'étude, sous la direction de professeurs qui organisent et guident cette étude.

L'objectif de l'étude d'un thème particulier, dans un niveau de classe n, est de permettre à tous les élèves de devenir autonomes dans la réalisation d'un type de tâches T. En mathématiques, il s'agit de savoir résoudre des problèmes d'un type donné. Ces tâches, au départ, problématiques pour eux, doivent leur devenir routinières. Pour parvenir à cette routinisation, les situations didactiques organisées par le professeur doivent permettre aux élèves de construire et d'automatiser des techniques pour réaliser ces tâches. Ces techniques sont fondées et justifiées par les savoirs théoriques qui sont enseignés sur le thème, cette année là.

• L'étude du thème 0 dans un niveau n de classe doit donc aboutir à la construction par l'élève d'un complexe praxéologique lié à ce thème constitué par un type de tâche, les techniques pour les réaliser et les données théoriques qui les sous-tendent.

Complexe, par la variété des éléments qui le constitue, complexe aussi par les interrelations entre ces éléments qu'il suppose et nécessite. C'est seulement lorsque l'élève a compris et intégré ces relations que l'activité, qui lui est demandée dans le cadre d'une discipline donnée, lui devient intelligible. La simple juxtaposition des éléments est insuffisante.

Praxéologique, parce qu'il s'agit des diverses manières d'agir pour résoudre un problème donné, pour traiter une question posée.

Ce complexe "tâche, technique, théorie" autour d'un thème donné, s'enrichit et se réorganise au fur et à mesure que l'on avance dans l'étude. Il peut s'enrichir par le changement de thème d'étude, et sur un même thème, par un élargissement des résultats théoriques et par l'introduction de nouvelles tâches. Il se peut également que sur un même type de tâches soient apprises de nouvelles techniques.

En mathématiques, les tâches les plus communément répandues sont les problèmes. L'élève de la classe de quatrième, par exemple, doit être capable de résoudre des problèmes d'alignement ("montrer que des points sont alignés"). Il a déjà diverses techniques à sa disposition: des techniques fondées sur des résultats théoriques relatifs à la notion d'angle, d'autres relatifs aux transformations géométriques6...

• Le travail de l'élève, en classe ou hors de la classe, est donc un travail d'étude, pour construire de tels complexes praxéologiques.

Chevallard (1995) défmit ce travail d'étude par les moments obligés par lesquels doit passer l'étude d'un thème7, pour permettre ces constructions.

6 Les résultats théoriques sont par exemple ceux relatifs à la somme des angles d'un triangle, l'image d'une droite par une symétrie axiale ... 7 Chevallard 1995, op. cité

62

• Les moments de l'étude sont pour lui les suivants:

La première rencontre avec le type de tâches qui doit conduire à l'émergence d'un embryon de technique.

L'exploration du type de tâches (à l'aide d'un corpus adéquat de spécimens de ces tâches) et l'élaboration d'une technique relative à ce type de tâches.

L'élaboration de l'environnement technologico-théorique, c'est à dire des résultats qui fondent, justifient et rendent compréhensible cette technique.

Le "travail" de la technique, qui doit permettre à la fois de faire travailler la technique de façon à étendre sa portée, à accroître sa fiabilité, etc., et de faire que les élèves puissent travailler leur maîtrise de cette technique.

L'évaluation, qui n'est pas un artefact scolaire, mais un moment didactique nécessaire. L'institutionnalisation de l'organisation mathématique ainsi élaborée, autre moment

didactique nécessaire.

Ces moments doivent être prévus et organisés par le professeur dans le cadre de la classe, de façon à ce qu'ils requièrent un réel engagement de chaque élève dans des tâches déterminées.

3. Le travail de l'élève : l'étude des mathématiques

Le travail de l'élève comporte deux composantes: le travail en classe et le travail hors de la classe. Ces composantes ne sont pas indépendantes et toutes deux participent de la construction des complexes praxéologiques.

3.1. Le travail en classe

• Il doit permettre aux élevés de comprendre le travail qu'ils doivent faire, il doit rendre intelligible le travail d'étude que l'on attend d'eux.

Il doit aussi les aider à acquérir l'autonomie dans ce travail.

Si l'on s'accorde sur les divers moments de l'étude sus-cités, il est nécessaire que les élèves prennent conscience de ces divers moments, de leur l'importance et du rôle qu'ils jouent dans la construction de connaissances fonctionnelles.

Il incombe de ce fait, au professeur, la responsabilité de prévoir et d'organiser les activités correspondantes dans la classe mais aussi hors de la classe. Ces activités doivent donc porter, non seulement sur les objets d'étude qui figurent dans les programmes, mais également sur les tâches pour lesquelles les élevés doivent acquérir des compétences et sur les techniques associées. Elles doivent mettre les élèves en position de responsabilité face à des tâches déterminées par le professeur. C'est à ce prix qu'ils peuvent acquérir une certaine autonomie dans leur travail, par rapport aux compétences que l'on exige d'eux. Car, à la fin de l'enseignement, le système enseigné doit pouvoir faire face, à l'aide du savoir appris à des situations dénuées d'intentions didactiques.

63

a - Pour ce qui concerne les moments de l'étude

Les objets d'étude de l'enseignement des mathématiques, sont des notions mathématiques (c'est à dire pour lesquelles existent des définitions, des théorèmes, des propriétés ...). Cependant, les compétences que l'on souhaite développer chez les élèves concernent la résolution d'exercices et de problèmes.

Or, de façon générale8, un travail systématique, à propos des exercices et des problèmes, n'est pas conduit dans le cadre de la classe. On fait des exercices et des problèmes, mais on ne conduit aucune activité réflexive qui pennettraient aux élèves de repérer des familles de problèmes et de situer les problèmes rencontrés par rapport à ces familles. Cela suppose que, sur un corpus de spécimens bien choisis par le professeur, on fasse un travail de classification pouvant être conduit par le questionnement suivant :

Les exercices et les problèmes sont-ils différents 7 En quoi se ressemblent-ils 7 En quoi diffèrent-ils 7 Peut-on les regrouper dans des familles 7 Existe-t-il des techniques de résolution liées à ces familles 7

De cette absence découle que de nombreux élèves s'imaginent que les problèmes sont toujours nouveaux et que des solutions nouvelles sont chaque fois à inventer. Si par hasard un problème en évoque un autre, ils essaient de se souvenir de la ülçon dont celui­là avait été résolu, mais ce souvenir est souvent vague et mêlé à d'autres. C'est sans doute, que le travail sur les techniques de résolution d'une famille de problèmes, n'est pas organisé de façon systématique. Il n'apparaît pas, comme un travail indispensable et les élèves ne l'identifient pas comme un travail à part entière qui a une fonction essentielle dans la résolution des exercices ou des problèmes.

En outre, le plus fréquemment, lorsqu'on introduit une année donnée une nouvelle technique pour résoudre un type de problème, les techniques anciennes sont délaissées, on ne les travaille plus et elles finissent par disparaître. Cependant, cela fait partie intégrante du travail de la technique.

b - Pour ce qui concerne, la fonctionnalité des mathématiques

L'enseignement des mathématiques pennet rarement aux élèves d'en comprendre la fonctionnalité. On les entend d'ailleurs souvent demander "à quoi ça sert 7".

Les notions mathématiques ont été construites en réponse à des problèmes, et si elles sont parvenues jusqu'à nous, c'est que les communautés successives des mathématiciens et la société ont reconnu leur capacité a résoudre des problèmes pertinents. Ces notions prennent du sens par les problèmes qu'elles pennettent de résoudre et par les relations qu'elles entretiennent avec d'autres notions.

Mais, en général, le cours de mathématique ne fait que rarement allusion aux problèmes que telle ou telle notion va pennettre de résoudre. Les activités préparatoires ou

8 Quelques enseignants réalisent ce type de travail dans leurs classes.

64

les "révisions" qui essaient de jouer ce rôle n'y parviennent que fort mal. Par exemple, en examinant un manuel de sixième sur le chapitre de la symétrie axiale, la leçon commence par une rubrique "revoir et découvrir" . On propose aux élèves des activités de construction sur quadrillage, par pliage, en évoquant le miroir. Mais à aucun moment on ne dit le but que l'on poursuit, ce que l'on cherche à faire, les problèmes que cela va permettre de traiter: transformer, prévoir des propriétés de figures, les démontrer ...

Cela tient peut-être à la persistance d'un point de vue ancien dans l'enseignement des mathématiques. Le texte du savoir, sa structure et ses exigences logiques étaient l'objet principal de l'enseignement. Les problèmes apparaissaient comme des applications et très rarement comme des points de départ, des moteurs de la construction de ces savoirs, qui semblaient nés d'une révélation.

c - Pour ce qui concerne le développement de l'autonomie des élèves

Certains types de fonctionnement didactique peuvent faire obstacle à ce développement. Par exemple, dans certaines classes, le professeur après avoir donné un problème, explique comment le résoudre, avant même que les élevés n'aient compris de quoi il s'agissait, et se soient engagés dans sa résolution. Les élèves ont rapidement repéré ce qu'on attend d'eux, c'est à dire des règles d'un contrat didactique concernant les problèmes: leur tâche n'est pas de résoudre le problème, mais de comprendre ce que dit le professeur et ensuite de recopier ce qu'il écrit au tableau. Dans ce type de fonctionnement, les élèves vont abandonner l'habitude de se mettre au travail et de chercher. Un comportement attentiste se met très rapidement en place, si ces pratiques ne sont pas contrecarrées par d'autres. Certains élèves n'auront même pas repéré le problème posé, ils se contenteront le plus souvent d'écrire ce que dit ou ce qu'écrit le professeur, en se disant qu'ils auront le temps de comprendre chez eux. De cette façon, l'activité mathématique devient opaque pour un bon nombre d'élèves et on est loin de l'autonomie recherchée face à la résolution des problèmes.

Il en est de même, si de façon assez systématique un élève est envoyé au tableau pour chercher le problème pendant que les autres sont censés en faire autant à leur place. En réalité la plupart d'entre eux recopient ce qu'écrit le camarade au tableau.

Il y a des raisons à ces choix didactiques. C'est souvent une façon de gérer le temps didactique ("on perd du temps, on n'a pas le temps"). Parfois, c'est par crainte que les élèves soient en difficulté devant la tâche proposée. Mais, si de nombreux élèves ne peuvent s'approprier et entrer seuls dans le travail proposé, il est à penser que ce travail est inadapté. Il est alors préférable d'apporter des modifications à ce qui était prévu. Les élèves doivent pouvoir assumer la responsabilité du travail qui leur est proposé. Si on leur confie une tâche, pourquoi l'accomplir à leur place ? Mais, cela nécessite qu'ils aient les clés pour comprendre de quoi on parle, ce qu'ils ont à faire et que des habitudes de travail aient été mises en place dans la classe.

3.2. Le travail personnel hors de la classe des conditions de sa viabilité

Ce travail personnel hors de la classe, qui est un travail d'ordre privé, ne va pas de

65

soi pour tous les élèves. Les raisons en sont certainement nombreuses, et une certaine responsabilité de l'École, qui a ignoré pendant longtemps ce problème, n'est pas à négliger.

Quelles sont des conditions de viabilité de ce travail, sachant que le milieu, dans lequel il doit se dérouler, ne lui est pas toujours favorable et peut même lui être franchement hostile? Ou encore quelles sont les conditions pour qu'un contrat puisse se nouer autour de ce travail entre le professeur et chaque élève?

Une condition première est que l'institution, les professeurs et les élèves, soient persuadés de la nécessité de ce travail.

Aujourd'hui, dans le cadre de la rénovation des collèges et des Lycées en instituant de nouveaux temps "études" et "modules", de nouveaux lieux et un nouvel encadrement pour le travail des élèves, l'institution affiche le souci de restaurer ce travail.

Une deuxième condition est la capacité des élèves à avoir une activité rétroactive sur ce qui a été fait en classe. En effet le travail personnel hors de la cla~se nécessite une reprise de ce qui a été traité pendant le temps de classe. Or, de nombreux professeurs font état de la difficulté qu'ont certains élèves à revenir sur ce qui est passé. Il est donc nécessaire de s'interroger sur les moyens qui peuvent être mis en oeuvre pour développer

. une telle capacité.

Des conditions didactiques de viabilité du travail personnel hors de la classe me semble être les suivantes.

• La mise en responsabilité des élèves dans le travail en classe est une condition nécessaire, qui peut être déterminante, pour qu'un contrat autour de ce travail puisse ou non se nouer entre le professeur et chaque élève. Car, comment nouer un contrat de travail personnel hors de la classe qui est sous la responsabilité de l'élève si aucune tâche n'est sous sa responsabilité en classe, s'il n'a aucune expérience de cette responsabilité?

• L'intelligibilité de ce qu'est le travail d'étude, au sens où on l'a défini ci-dessus, est essentielle. Elle permet à l'élève de comprendre ce que l'on fait, de quoi l'on parle et ce que l'on doit faire pour avancer dans l'étude.

• Les manifestations de l'intérêt que le professeur porte à ce travail, de l'importance qu'il lui attribue, si modeste soit-il, et la relation personnelle qui se crée autour de ce travail entre le professeur et chaque élève, sont essentielles pour que ce travail soit reconnu.

• Enfin, l'étude du cours doit apparaître comme un réel travail. Des techniques doivent être construites en classe, apprises et utilisées par les élèves.

3.3. Le travail personnel hors de la classe : quelles fonctions ?

Quelles sont ou quelles peuvent être des fonctions de ce travail pour chacune des disciplines concernées ?

Sert-il au seul avancement du cours auquel cas il est le même pour tous, ou doit-il servir aussi à l'avancement des élèves ce qui suppose alors, qu'a côté de tâches communes il existe des tâches différenciées ?

,.

i

66

De façon habituelle ce travail est pensé par la plupart des professeurs, et par là même par les élèves et les parents, comme un prolongement du travail fait en classe. Sa signification, aux yeux de tous, est alors de servir à l'avancement de la classe et du cours.

Le contrat didactique que l'élève noue autour de ce travail est piloté par le professeur, dans le cadre de la classe. Sa mise en oeuvre est d'ordre privé, elle se fait hors de la classe. Selon l'environnement de l'élève, il y a une transfonnation de ce contrat, il peut s'agir d'une défonnation (par exemple, les élèves copient), ce peut être une exagération ou une réduction. De toutes les façons, ce type de travail va accentuer les différences entre les élèves.

Il est pourtant nécessaire de faire étudier des mathématiques à tous les élèves, sous des fonnes diverses, qui ne mettent pas nécessairement certains d'entre eux en difficulté, en situation d'échec par rapport aux autres. Dans cette perspective, il semble bien que l'on ne puisse faire l'économie d'un travail personnel hors de la classe qui servirait à l'avancement de l'élève dans l'étude.

3.3.1. Travail personnel hors de la classe comme moyen d'avancement du cours

Dans cette perspective, le travail personnel hors de la classe peut avoir di.fJerentes fonctions.

• Une fonction de "répétition" pour l'étude du cours

Il doit pennettre de lever les difficultés qui viennent de l'insuffisance9 de ce qui est làit êH classe. Le professeur a montré en classe, par exemple, un exercice d'application, les élèves vont devoir vérifier et montrer qu'ils ont compris en remettant en scène eux­mêmes ce qui a été montré en classe. Cela pennettra la mise en place d'un procédé algorithmique de résolution par la répétition d'exercices proches.

Le professeur peut alors donner une fiche d'exercices avec un exercice type dont il aura rédigé la solution, ou dont la résolution se trouve dans le cahier de cours. Certains de ces exercices seront obligatoires, d'autres seront laissés à la discrétion des élèves.

Ce travail de pur exercice, simple, aussi facile sinon plus que ce qui a été fait en classe, est à la portée de tous les élèves. Il pennet de négocier un travail qui est sous la responsabilité de l'élève. La viabilité de ce travail, modeste, est liée à l'importance que le professeur lui attribue et aux manifestations qu'il donne de cet intérêt.

• Une fonction d'entraînement à la résolution et à la 'rédaction de problèmes plus complexes.

L'activité de résolution de problèmes est au centre de l'activité des élèves, elle est aussi au coeur de l'évaluation de leurs compétences. Elle constitue donc un élément essentiel dans l'étude d'un thème du programme. Certains problèmes sont étudiés et résolus en classe, d'autres sont donnés à résoudre à la maison.

9 Pour raison de bonne gestion du temps didactique.

67

Les familles de problèmes sont constituées autour d'une question, par exemple, en mathématiques le parallélisme, l'orthogonalité, le calcul de distances, la comparaison de quantités, de mesures ...

Pour chacune de ces familles, il y a des problèmes plus ou moins complexes et difficiles. Une tâche non triviale des professeurs est donc de proposer des problèmes de formes diverses, de niveaux de difficulté différents, des problèmes dont les fonctions sont variées.

Si l'on souhaite que cette activité de résolution de problèmes puisse se dérouler et vivre à l'extérieur de la classe, il ne faut pas décourager les élèves en donnant des problèmes trop difficiles. Il faut également qu'elle donne du plaisir. Le travail personnel hors de la classe sur les problèmes doit comporter en majorité, le plus généralement, des travaux plus simples que ceux qui peuvent être faits en classe pendant les séances de cours ou de travaux dirigés. Les élèves doivent pouvoir les identifier comme des problèmes; des questions qu'ils ont déjà rencontrés.

Il est également important de leur donner, de chercher avec eux ou de les inviter à chercher eux-mêmes, les références de problèmes similaires.

• Quelques remarques sur des moyens de différencier les problèmes

Les moyens de différenciation des problèmes sont divers. Citon's en quelques uns.

- Forme des problèmes Peuvent être envisager des problèmes lacunaires ou à questions enchaînées, des problèmes ouverts, des problèmes de constructions ...

- Niveau de difficulté des problèmes se10n les objectifs poursuivis Par exemple il peut s'agir de faire fonctionner dans une situation d'application simple, un résultat théorique qui vient d'être institutionnalisé ou plusieurs résultats que l'on est en train d'étudier, de réinvestir des résultats anciens et nouveaux ;

- Fonctions des problèmes Les problèmes peuvent être donner

- pour entrer dans l'étude d'un thème - pour étudier le cours - pour se faire plaisir - pour une compétition, (par exemple pour l'établissement d'une preuve, pour

l'effectuation d'un calcul et la recherche de méthodes pour y parvenir) - pour chercher. La recherche peut durer plusieurs semaines (problèmes "fil

rouge"). Ces derniers problèmes permettent de faire vivre des types de problèmes déjà rencontrés et les techniques de résolution associées, de faire vivre les connaissances déjà anciennes, qui sans cela meurent très vite. Ils seront l'objet de compétitions sur les méthodes de résolution, et on les fera vivre par des échanges entre les élèves. C'est une façon de donner de l'intérêt et de la vie aux problèmes dans la classe.

68

3.3.2. Le travail personnel hors de la classe: un moyen d'avancement de l'élève.

Le problème qui se pose au professeur de mathématiques ou de tout autre discipline, est de créer un même type de rapport au savoir chez les élèves. Il s'agit donc de faire étudier des mathématiques à tous les élèves, y compris sous des formes diverses.

Le travail du professeur est de chercher tous les endroits où l'on trouve des mathématiques, les diverses formes sous lesquelles on les trouve afm de proposer aux élèves un travail personnel qui ne les mettra pas en échec et qui leur permettra de comprendre et de faire des mathématiques. Les mathématiques de ces activités individualisées doivent être pensées comme une remise en activité et une remise en forme de connaissances anciennes.

Ce travail doit permettre un rapport personnel de l'élève avec le professeur qui pilote le travail personnel hors de la classe.

Ces activités peuvent (et doivent) prendre des formes diverses. On peut :

• donner des textes mathématiques à lire; des bandes dessinées sur des thèmes mathématiques ; des textes historiques courts ... ;

• faire circuler des jeux mathématiques; donner des énigmes à résoudre ; lancer des défis mathématiques dans l'établissement;

• donner des listes d'exercices plus individualisés et mieux adaptés aux besoins des élèves: "tu ne sais pas calculer sur les fractions, je te donne ces exercices à faire, lorsque tu as avancé, tu me les montres et tu m'indiques ceux que tu as sus faire, ceux que tu n'as pas su faire. Tu essaieras aussi de me dire ce qui t'as gêné".

• On peut envisager pour certains élèves un "problème fil rouge" ouvert, plus complexe, qui met en oeuvre divers thèmes d'étude, dont la recherche peut durer plus longtemps avec de temps à autre, durant des séances de travaux dirigés ou d'autres temps qui sont à déterminer, un échange personnel avec le professeur ou avec des élèves qui travaillent sur le même problème. .

• Diverses autres possibilités sont envisageables, le but est de personnaliser le travail.

L'élève doit avoir la responsabilité de son travail. Pour l'aider à assumer cette responsabilité, il est important qu'on lui donne une bibliographie dans laquelle il pourra lui même choisir des activités. Le rapport de l'élève au professeur relativement à ce travail peut rester un rapport personnel et ne faire l'objet d'aucune communication en classe.

3.4. Le travail personnel hors de la classe : les relations avec le travail en classe.

. Considérons le~ exercices pour l'avancement du cours. La vie d'un tel travail personnel hors de la classe dépend du respect que le professeur sait montrer pour ce travail modeste, mais aussi de l'intérêt qu'il manifestera au retour en classe. Les formes peuvent être diverses. Un simple contrôle de la réalisation des exercices est déjà un premier signe de l'importance qu'il lui attribue. Le repérage des erreurs commises en est

69

un autre, l'organisation d'une activité autour de ces erreurs, aussi.

Les exercices qui ont été faits en sus des obligatoires, devraient pouvoir être l'objet d'une relation personnelle avec le professeur, lors de séances suivantes, à la fin du cours, en module, pendant un travail dirigé ... Là aussi diverses possibilités sont à inventer.

Pour les élèves en difficulté, ces exercices peuvent être repris en séance de soutien ou dans une autre structure. Par exemple au CDI ...

Les "corrections in extenso" au tableau, par le professeur ou un élève, risquent d'être sans effet pour la majorité des élevés si une tâche précise, autre qu'écouter et recopier, ne leur est pas confiée.

Les activités pour l'avancement des élèves, doivent être l'objet d'une relation personnelle avec le professeur autour des tâches spécifiques. Les formes et les lieux qui peuvent être divers sont à inventer.

Conclusion : le système éducatif, les professeurs et l'étude

Le traitement de la question du travail personnel de l'élève en classe et hors de la classe se heurte à deux obstacles, le premier lié aux représentations qu'en ont les enseignants, le second a l'idéologie égalitariste qui a traversé le système éducatif.

Les professeurs sont-ils en mesure de décrire les exigences spécifiques à l'étude de leur propre discipline, de façon à les faire partager aux élèves? Pensent-ils pouvoir y parvenir ?

En mathématique, la consigne de travail personnel hors de la classe qui est le plus fréquemment donnée est: "tu étudies ta leçon et tu fais tes exercices". Ce que les élevés traduisent par "je lis la leçon et je fais les exercices". Sommes-nous sûrs que cela suffise?

Étudier une leçon, c'est quoi? De même très souvent à un élève qui se plaint de ne pas avoir de bonnes notes et de ne pas réussir, bien qu'il ait "étudié", le professeur rétorque "qu'il n'approfondit pas suffisamment". Mais que met-il lui-même sous ce terme "approfondir" ?

Serait-il capable de donner des tâches precIses correspondant à cet approfondissement? Ce travail d'étude qui renvoie au modèle d'étude et aux divers moments de l'étude décrits ci-dessus est complexe. Sa complexité en rend la dévolution aux élèves difficile, voire impossible, à l'aide de simples consignes. N'est-il pas nécessaire d'effectuer ce travail d'étude avec eux durant le temps de classe pour leur en montrer la complexité et les exigences? Les séances de module ou d'études dirigées sont sans doute des moments privilégiés pour ce type d'activité. N'est-ce pas par la pratique que cette dévolution pourra peut-être s'effectuer?

Cette question est actuellement d'autant plus difficile à traiter, que pendant des

70

années elle a été plus ou moins occultée derrière une idéologie "égalitariste" mal conçue qui amenait à penser qu'un moyen de gommer en partie les inégalités, dues aux différences entre les milieux sociaux, était de limiter le travail personnel hors de la classe, (sauf dans les classes préparatoires aux concours).

Aussi, "au cours des dernières décennies, l'École a-t-elle été le siège d'un dépérissement de la culture et des savoir-faire didactiques en matière d'étude. Depuis le milieu des années quatre-vingts, ce dépérissement a affecté tout particulièrement la classe de mathématiques. Cette évolution est illustrée notamment par l'accroissement du rôle donné à la classe, qui tend à devenir le lieu privilégié et quasiment unique de l'étude - étude elle-même largement subordonnée à l'enseignement donné par le professeur - alors même que la "classe" en tant que structure, eut longtemps pour fonction d'être un moyen parmi d'autres au service de l'étude" (Chevallard, 199510).

Nous avons donc à retrouver la foi en l'étude, et à (re)construire des techniques qui permettront aux professeurs de la diriger et de négocier ce travail personnel avec chaque élève, de façon qu'à la fm de la formation, il soit capable d'accomplir, sans aucune aide, certaines tâches, qui antérieurement le tenaient en échec ou nécessitaient un guidage, une aide appropriée.

10 Chevallard 1995, op. cité

MUSÉE

Nous reproduisons dans ce musée un extrait du célèbre dictionnaire pédagogique publié, sous la direction de Ferdinand Buisson, au moment des lois Jules Ferry sur l'école obligatoire. Cet ouvrage en quatre volumes était destiné aux instituteurs. Une première partie avait l'ambition d'être "un vaste traité de pédagogie théorique" et la deuxième partie "un cours complet d'instruction primaire à l'usage de maîtres".

Nous avons choisi de présenter ici un article de la deuxième partie du dictionnaire. On peut voir qu'à l'époque on n'hésite pas à suggérer une initiation à l'algèbre dès l'école primaire, le passage à l'algèbre s'appuyant "naturellement" sur les pratiques de l'arithmétique élémentaire.

DICTIONNAIRE

DE PÉDAGOGIE

D'INSTRUCTION PRIMAIRE rVIILl1: aoc. LA DI .BÇTION nE

F. BUISSON :t.grâSo1 dd )'Uni .. oulloÎ

i""I,o.:,.ur Ken.rral d .. '· .. n.llIilftOmdnl primairft

AVRC Lg CONCOCkS D'eN GRA.:CD ~OnDRt-: Dl': COLLABORATt!:.URS

.K.lJaK:II DC L·I~:-Tl1'tT. l'l:IJLI':hTi::'•

•·O:'IIl:tloaS.&lbt:J. PIC L"I:lIUÂa:t:tl.':!c rrD\.I!Jt'E, IlC:lpr.,-"Tr.ra•• PIl""1t:51E\:1\16

r:T 1:'lI'J~IT\:T,:ç.:iI Ct.: rll.~:lIc.: &T n.: L'tTIU.""".

Il'' PA RTl E

TOME SECOND

PARIS LIB RA 1 RIE :loI AO.HETT E l!;T O'·

i:J. nUl:L";\".\nu IIAI:'fT~~ft:y..\I:!f. NI

« petit x» n° 47, p. 71 à 78, 1997 - 1998

72

CALCUIJ - 32:1.- CALCUL C.ALCl1L ALGÉnRl,QuE, Al.'l'LIQUÊ,AtlX.PRO­

BLE!lES n'ARITllllJE'l'IQUE ET DE ,GEUlllETJllE DE L'ENSEIGNElIII':NT l'n13IAIRI>. - Nous n'a­vons point à reraire ici ,le' .cours d'algèbre élémen­taire à l'\lsage des écolés hormules et supérieul'es, dont le plan et les développements. essentiels sont résumés dans ce dictionnaire même avec une si grando autorité. - lY, Algèbre et Egtùrt,ions.)

Mais nous croyons devoir indiquer ·plus :partlcu­lièrement' les procédés ·pratiques'.parlesèjiiels,mème dans l'école primaire p,opreiÛ'ent. dite :et. 11 plus forte raison dans les classes pourles 'ildultes' un peu avancés, dans 'les cours compléme~tiLire's, tels que ceux du volontariat, et. dans: la :préparil­tionpour l'admission aux écoles primaires"sllpé­rieures), on pourra, on devra am~ncr les élèves de plain-pied sur le terrain de l'àlgèbre èt 'leur faire résou~re des problèmes ,Poar des ,équations. sans leul' laisser soupçonner qu Ils font autre 'chose que de l'arithmétique,

Nous supposons d!ls élèves qui ne connaissent encore aucun des termes de la. langue algébrique, et nous allons voir comment peu à pe\l et sans pas­ser par l'ensllmble de l'enseignement méthodiquequi est nécessaire au m'aitre,' on' peut leur ap­pl'endre chemin faisant et les mots techniques et les règles dont ils llUl'Ont à se servir,

ProfJlëme i. - Nous prenons pour exemple un problème d'arithmétique comme en fait tous 'les jours un élève d'écoln primaire, un problème quel­conque dïntérClt simple. L'élève sait la règle;

POlI/' trouver l'illttirét d'lIrl capital, il faut multi­plier le capital pal' le tal/X et par le nombl'e de j('lIrs et diviser le P"oc!l/It pal" 360011. _

Demandon's-lui s'i! n'y aurait pas moyen d'écrire en abrégé cette longue phrase. Les mots fIlulli­plier, div;ser, lItc., peuvent Cltre remplacés par les signes qui lui sont familiers X, :, etc, Chacune des quantités qu'il doit passer en revue ne pourrait­elle pas aussi être désignée abréviath'ement par la le,tlre initiale de son Ilom; l'intérêt par !,. le ca­pital par c,le taux par t, le nombre de jours'par 7J? La r~gle pl'écédente peut donc Ile présenter ainsi:

i=c xt x ll , 3(;000

Cette expression aussi claire que concise est ap­peIlle formule; elle momre enmême temps ce que c'est qu'une égalite. On indique à ce moment 11~1I dénomi­nations de premie,. mcm(,I'e et de secolld membre données aux deux parties qui constituent l'égalité.

llaintenant sera-t-il besoin d'arr(!tp.r les élèves pour ·leur. faire, . avant de passer outre, l'exposé eomplet et théorique des propriétés d'une égalité? Non, cal' ils les connaissent déjà implicitement parl'arithmétique; ils les appliqueront pour ainsi dire par intuition 'au fur et à mesure qu'ellt!s vont se présenter; on va le voir. .

Dans l'égalité • cxtxn ~= 36000 '

qu'arrivcrait-'n si nous supprimions .Ie iiénomina­teur du second membre? 'fous les élèves le diront' aussitôt :. ce second membre serait multiplié p'ar 36000. Par conséquent que faut-j11a:ire pour i-éta: blir l'égalit.é? Multipliér aussi le ,premier.. nombre_ par 360uO. Voilà la. nouvelle égalité trouvée:

36000 i=cxtXn Ce qui signifie: leproduit du capital par le ta.= et

par le nombre de jours est égal à 36 000 fois fintérêt. • A cette :occasion on apprend aux élèves que lorsque,les facteurs d'un produit sont. représentés par des lettres, on peut. supprimer le signe X­entre eux, et écrire ctn au lieu de cx't X n. Ils ae-· qui èrent ainsi la règle dite ,'ëgle des lettres de la multiplication.

2' l'AIlTIll:.

Ds ont tout à l'heure affirmé. sans IJésiter qu'onpeut filllitipliel'les deux memfn'es d'tme é,ga/ilépar un mime nombre san~ a/t~t'er Ngalité. Ils ne se. l'ont pas p'lus embarrassés pour rllconllattre qu'on peut pareIllement les. divise" pal' wi mim~ nombre sans altérer l'égalité, Grâce 11 cette propriété, noUli allons pouvoir dégager et énoncer li part Iii. valeur de chacune des .trois quantités' en divisant succes­sivement les deux membres de l'égalité é, /, n, par tn;

ctn = 36 000 i,

puis par en et!?ar ct .La suppression de~ l!lt-tres qui /1­gurent à la fOlS au numérateul' et au dénominateur n'a rien qui les surprenne j ils entendent bien que ~:: = c: Donc' nous obtenons les trois égalités:

36000 i C=--t7-1-'

t=3GOO~) en

:IG 000 i n=--c-t-'

En traduisant·ces formules en langage ordinaire, les élèves,y trouvent les règles 11 suivre pour con­naltre, san:\ rép~ter de longs raisonnements, le ca­pital, ou le-taux. ou le 'nombre'da jours dans tous les problèmes d'intérêt simple.

A ce moment on dit aux é.lèv~s qu'on appelle équalioll une égalité dans laquelle se· trouvent une 011 plusieurs lettres représentant des quantités 'in~ coilllues; que ces lettres so'ntordinairement les dernières d,d'alphabet, x, f' z; que 'tirer la va­leur de l'inconnue de l'équatlon ou 'elle se trouve,c'est ce qu'on.appelle résoudre une équation. ' . ,

On les exercp.ra à regarder une éqUation' comme l'éll(~ncé d'un problème écrit eri langue algébrique, ~ le' traduh'e en langage yulgaire, Par e1emple l'é­quation

3x-2='2x+3

signifie; trouver un nombre tel .que son triple diminué de 2 soit égal Il son double augmenté de 3.

Ces deux autres équations

3y -7.r=~, 2y+5.r=22,

se' tl'aduiront ainsi: trouver. deux nombres tels que l'excès du triple du premier sur 7 fois le se­cond soit égal Il. ~ et que le double du premieraugmenté du quintuple du second soit égal à 22•..

Réciproquement on les habituera à écrire SQUS forme d'équation l'énoncé d'un problème, en s'at­tachant d'abord aux questions les plus faciles.

'A ce principe fondaIilental ; on peut multiplier ou diviser les deux m/!11lbres d'une' ég'alité ou d'une é~uat.ion sans altére7' fégatité! en joÎlidra avant .·d aller plus loin cet autre 'prmcipe ÎlUllsi évide'n t 'que le premiet; on peut augmenter ou diminuer d'une m~me quantité les (Jeux membres d'une égalité ou d'une liquation' sanS altérer l'éga­lité des deux membres. "On en fera l'application 11 la résolution d'une équation simple comme l'équation ci-dessus ;

Bx -2=2x+3.

Supprimant les 2x au deuxième membre pour que l~inconnuex ne se trouve qu'aù premier, on devra diminuer ce premier membre aussi de 2x, ce qui donne

3x-2X-2=3.

Pnis, pour faire disparaltre le terme connu - 2 qui est au premier membre, il .Ilufftt d'augmenter ce premier membre de 2; ca.r alors 2 - ~ se dO.

21

73

CALCUL - a22- CALCUL truisent; on augmenter!! aussi 10 dnuxième mumbl'u de '2 ct on a alors

3J: - 2x':- 2+ 2.

On deduit de HI la règlc dl) la transposition des termes: pour {(lire passel' !lll tel'lfle d'lm membre dans L'(lutl'e, on le sUPP"illle dans le membre oie ii est et 011 l'éCl'it dans l'aull'e at'ec tm signe COIl­tmÏl'e, .c'est, ù-dil'e en lui donnant + quand il avait -'- et - quand il avait +, , Du premier principn on déduit la règle par la­

quellu 011 peut chassel' les dunominateurs d'une équation, ce (lui rend les calculs plus faciles: pow' ch~lssel' ~es r;énomilwteul's ,,'une 1quation, ail I,t!dwt tous les tennes, les tCl'meS,entlCI'S aussi bien 'lUI! les tel'mes {l'actionnaircs, au même <léno­minatell/', et on slIp}Jl'ime ce (Icnominatcw' com­mun.

POUl' tel'miner la réSolution, il n'y a plus rjll'll. opérer la rédllction en un seul terme des nombres d'x qui sont dans un membre ct celle d~s nombres conllus qui sont dans l'autre' et" à tirer enfin la valeur de lïnconnue par une sinlplc- division,

Ce n'est pas le moment de· parler ,du cllange­ment qui survient dans la nature de l'équation, quand la 'Iuantité par laquelle on multiplie les deux membres est l'inconnue elle-mème ou Ull~ quantité qui contient l'inconnue. .

~Iai!ltenallt, pOUl' mettre de la pI'écisioll dans le lan;;age, il importe qu'on sache bien qne lesteJ'llll'. sont les quantilés séparées par les sign<!s + ou -, et qu'on ait une idue nette ùe l"origine <:t de la nature du te~me apllelti 1l~,fjrttif. C'est Qun prll­blèma familier 'luïl COO\'il,nt de la 'dë<luire, On supposera, pal; exemple, qu'un hOlllme I,'ayant ((lIe .') francs doi\'() II frallcs ; ce 'lu'il possède 11. ce mo­ment peut ètre représentu par 5 - 8. En donnant ses â francs, il n'a plus que zéro et une deite de 3 francs, ct on lui ôtera c~s 3 francs qu:mù cela sera possible; pour le monient on l'indi'iue en écril'am 0 - 3 ou plus simpll>meut - 3, puisque le zuro est ici tout il fait inutile. Le ternHl n';~atif - :1 représentu d'lllc le restc d'une soustraction dans laquelle hl plus gr'lIId uombre ':c\'ait "tr" retranchti du plus petit. Dalls cc ClIS cm l'etNllld,e le jJl.ll.~ J1etit (1/1 l'lus fjr/l1ul. et al! dOlllle lIll l'este le ,~I~lle -, t:n terme nég"tif peUL ètre re"nl'dti comme e:roprimam une dette, tandis que le t~rme positif e~prime un avoil'.

:\"ous pourrions suinc maintenant l'ordre mUlho­dique du cours d'algèbre pour joindre 11. cha'ln1j partie du cc cours les applications du calcul algG­brique 'lui s'y peuvent rapporter, Mais nous crorons faire mieux ressortil' la portée de ces ap­plkations. ct I.~ possibilité I)OUI' le maître d'en tirer les plus heUl'eux etfets, mème pour des élèves étrallgcrs à l'algèbre proprement dite, en donnan t quelques exemples de problèmes dans lesquels, comme dans le prucédent, le calcul algébrique abrège ou éclaircit siJtguIièrement les opérations de l'arithmétique pure. - V. aussi dans le Diction­naire. à la suite de l'article, Alyèhl'e, notre para, graphe sur la préparation aux examens.

P,'o"!ème 1. '- On veut faire de l'argent au titrc de O,S35 en' fondant ensemble de l'argent au titre> de 0,9 et du cÛÎvre. Combien faudra-,t-il prendre d'argent au titre de O,V e~ cl.e cuivre pour avoir 1 kilogramme d'argent a,u titre de 0,sa5? (Problème donné à Paris en 1877 aux a.pirantes; IJl'ccel s1I­pél-iew'. - (V. Dictionnaire, p.302.)

Soit x le nombre de grammes d'argent 11. o,n, Le poiùs d'argent pur qu'il renferme est x X o,n. Le quotiCllt cie cc nombre divisé pal' le poids total 1000 grammos dovant être le titre 0,835, on a l'é­quation:

xXO,!)lGOil = 0,835·

Multipliant les deux mesnùres pal' 1 000', puis par 10,011 trou\'e:

Vx= 8:15, " . 8:'150 X=T=V21,777.

Le poiùs d',argent j!st donc V2j·r,77 S, Celui du cuivro est '1UOO - V;lj,li8=72",~:22. Prohlémc,2. - On part:lge uno somme de 10,000

francs entre quatre personnes. La l" auro 2 fois autant que la2', moins 2000 francs; la 2' aura 3 fois autant qUB la3', moins.3 oao francs; la3' aura 0 fois autant que I.l 4', mo~ns 4000 francs. Quelle est la, part de chaque personne? -=- (Pl'oblème donué dans l'Académie de Besançolz, 1878. - AspÎrtmtes; brC1gt supérieur), -'Dict .• p. ail?

Désignons par .r le' nombre de francs que doit avoir la 4' pel'sonne; la part 'de la a. sera'O x ­4000.

La 2' aura (C,1: - -\ 000) X ::1 - 3000, Le produit de li x - .\ 0011 par ·3 doit être égal à ;J fois ({x, moins :1 fois 4 000 : car 0 x duvallt d'abord être di­minué de 400n, le produit 18:r: est tl'Op fort de ;\ fois 4000 ou de 12000, On a donc pOUl' la part de la 2':

l~x - 12000 - 30(1) ou ISX-15000,

La pl'ellli~rc aura

(IS.r -15000) X .'l- 21 l tJtJ

c"~st-'I-dil'e

:lG.r -:JO 000 - ~Oij\l

ou :JG:r:-32000.

La sommo des 'luatre parts de\'allt '::tl'e égale à IOUoo, on peut Ucrire :

x+ G.r- 400,)+ IS.r -)::. 000+ 36.1:- 1}2 000= 10 000.

Pal' la rédurtiou on a

GJ.r. - 51 000 = 10000,

puis Glx = 10000 + 51 000. (jl.c = 61 000,

.1:= GI(j~OO = 1000.d'où

La part de la 4' rst ùonc de 1 1100 fl'anes, 011 t;ouyera cnsnite: pour la :;' . 2000 franc:s, ­

pOil l' la 2', :J ouO francs, - pour la 1", .\ 1)00 francs. OD5EnnTlOS. - Des explications dOllnées plus

haut, il est bon ùe dédnir'l la rè~le suivan te: I"ml '

nlultipliel' pa!' IIIZIIOI/I/)re pf)sitil'~CIZ~ 'Jlumtité com­]Jo.;ée de plu.w?w·stCl'mes.. on IIHlIl/piLc c!lf1'luc tel'me dit JIlulliplic((/ldc, el! IUL.,cli"'iej·vCllzt son SI!/'le, par le mut/iplicClteur,

l'l'ofAème :}. - ,\ quel moment, .mtl'e :1 heu­res et :1 heures, les deux ~iguilles d'une montre sou t-elles en li gnc droite?

(P((l·i.~, 13in, - Aspirants; /;l'cvet simple.) DIGT", page :28 t.

Lcs deux aigllillcs pcU\'cnt être: 10 l'lIlle sur l'antre; 2" l'ulie sur la prolongcment de l'autre.

Premier cas, - Soit x le nombre de~ minutes du cadran qu'aura 11. parc,ourir l~ gr~nde ai.gnille à partir de 2 heures, c cst-à-ùtre a pal'tlr du n" 12, l'our atteindre ~a petite entre I,j n° 2 et le Il" 3. Le nombre de mHlutes parcouru~s par cette dernière aiguille sera x -.10, Or, la ntesse de la. I:l'ande aiguille ét:lnt 12 fOIS pl,!-s grande quo celll! de la petite, Je nom?re x de mlllutcs 'lue pa:court la première nut 12 fOIS le nombre x - lU ùenunutes parcourues dans le mème temps par la seconde.

On peut donc écrire l'é'luation

x= (x-IO)X 12.

74

CALCUL 323 - CALCUL En effectuant la multiplication. on tl'ouve

tr;=12.:c-120,

puis no== I1x,

d'où x=~=10.!!>li II

Les deux aiguilles sont donc rune sur l'autre 11 2h 10"W,

Deuxième cas. - Désignons par .:c le nombre de minutes comprises entre le n°·12 et le point où la ,grallde aiguille est sur le prolongement dt! la petite; le nombre .des miautes parcourues d:ms le même temps par la petite est :I: - 10 - 30 ou x - 40. Comme dans 'le cas 'précédent, :t: V;lut l:1 CQis x - 40, et 011 a l'é'1u:ltio~.·

%:=(:I:~40l X 12.

On trouve ensuite

X=U;1;- 480, 480= lb:.

x= 480 =4:12.11 . 11

Ainsi, les deu:!: aiguillllll sont "'une sur le pro· longement de l'autro' 11. 4b;.i3"' ft,

l'/'oûlême 4.- tné personne place les ~ d'un capital li ~.i5 0/0 et 10 reSlO IL 5,5 0'0 i elle retire ainsi ';93", i5 d'intérilt au bOllt de j~ jours. Qud est cc capital? - (l'roblèmo donné dans l'"!c(uie· mie de Lyon, 18i6. - Aspi"ants; orl!t:et simple. ­DICT., page )8G.)

RemuJ''luons d'abord que 7.2 jours sont la 3· par­tie de l'année, et représentons par x la capital

chel'c1lo : les ~ de cc e:tpital sont :x et le reste

est ::.4

D'après b r~gle ordinaire, l'intért1t de la 1" par­t" '. :lx X ,1;.5 le ser:lIt pour. an. • •.• • • 4 X 100 ; 0 •

pour j2 jours il sem ,,:lX ~ ,Ua. ~u 3,x~ 4,j~. X 1 Il Xa 2u ou

L'intérêt do ta 2' partie seraiL pour xX5,~0tan. • • • • • • • • • . . • 1'X1Oo;

pour 72 jours: • • • .,..;;;x..;X;.,;,,";,:':';'bO.:..,. ou ,x_X_"_,5_0. ~ X JOO X 5 :!O 000

La somine des deux intérêts étant 493",15 'on a l'êquation

3:I:X'4,75 :r:X5,50 . :l0 000 + 20iiiiü = 493,75·

POUl! la résoudl'e, supprimons d'abord les· vir­gules, cc (lui reyien~ ~ mUILiplip.r tous les termes par'100, et cllèCluons en même temps les mufti. pli~atiol1s indiquées dans les deu1 numérateUr!; nous aurons

~+~-4 3*';020000 20000 - 1) 1

l\lultipliant ensuite les deu.l membres par 20 000, on obtient

1425x+ 5S0x = 987 500 000. pais 19i5x=98i &00000

:t: = 087 500000et 1~ï&50000•

Le capital demandé est 50000 Crancs.

PI'Oblème 5. - Deux négociants ont chacun une

2' P"IITIE.

lacture: l'une do 980 Cranes, paY\lble dan!l20 joura l'autre de 1000 francs, payable ,dans 255 jours, Ils les échangent, mais à la condition que III secondë sera aUffmentée do 1<f',50. A combien pour cent s'élève 1escompte? .

(Seine, 1871. - 4spirantes; brevet simple.) OSSEaVAnoN. :-' Aux termos' du problème,.i1

sembic qull suffirait d'ajoutèr 12",70 aux l00q C.'ancs dB la seconde facture et de le 'traiter par 13 règte' de l'échéance moyerine. A ce point de'vue, la question proposée ne serait guère raisonnable. On comprendrait peu 'en clrot cette [ànlaisie de deux nëgociants ér.hangeant leurs ClIctures sans motiC apparent, comme deux enfants qui échange: raient deux images, On comprend encore moins que, ces fa~tures portant J'îndlc.ltioJl et le montant de marchandiscs livrells pnr les vendeurs, la se­condp. subisse une augmentation à laquelle le créancier reste étranger. .

La seule interpréution raisonnable consiste 11 anpposer que le premier né~ociant, ~'ayant pas d'argent di'lponible pour 1'4chéance prochaine de vingt jours, propose l'échange 11 l'autre, et que celui·ci ayant sa caisse mieux garnie accepte la ' proposition. Dans ce cas, ils calculent la valour Il . la'luelle se réduit chaque facture au moment do ré~h:tnge, par l'escomple commercio.l et ~ un cert.'iin lall:C: éon\'enu. Commo ils t~ouvent que le maillant de la facture, de 1 OUO francs est inférirmr de 12r~.;:0 11 celui de la Cucture de 980 francs après l'cscompte, la dilTé"ence est remise en espèces par le second négociant au premieT,

L'n peu 'plus de clarté dans l'ënoncé do la qucs-, tion <lUTait dispensé de ce long commemaire. Au manque de clarté il joint un amre déf:mt, celui d'ètre tl'OP élevo pour d,]s aspirnntes nu brevet obligatoire, en exigeant 'remplOI de l'algèbre,

En effet. soit x le taux demandé. L'escompte de la Ir. facture pour 20 jours cst

980 X x X ~W 196.r 36 UOO' ou 300'.

L'escompte de b 2' factul'C pour 255 jours est 1000 X x X 25i) 2550J:

3600u ou ~.

La nleur actueHo est donc pour la 1" facture

980 _ ~ ou 3;,2' 00 - JDCx. aGO 3(;0

La valeur actuelle pour la 2· facture est

1~00 '}~;,Ox 3110 000 - ~5s0,x - 3iiO ou 3110 •

Or la INde ce, valeurs surpassant l:r 2· de 12"',iO, on peut écrire l'équation

352800 - 19(1x :JÛO 000 - 2550x = 1.2 ~O 3110 allo ,1 ,

Pour la résoudre on peut d'abord effectuer' la soustraction des deux fl'actions qui ont Je môme dénominateur, et pour cela il faut retr::locller 360000 - 2550 x nurnérateur de la deuxième de <152800 - l!)ü x, numérateur de la première.

D'abord on retranchera 300000. du n' de la 1'" ce qui donne

3&2000 - t96x - 360000 Mais au paravant le nombre 360000 aurait du

être diminué de '550.'1: i on a donc ôté ?r.[,Qx de trop, et par suite le lOt reste est trop faillin de .2550x. En l'augmenbnt de <:e terme, on a pour Io!! Tests cherché

352000 - t!l6x - 360000 + 2550;1; De là. découle cette règle import.1nte : Pour ,'etrancher.une quanliié composée de plu-.

21"

75

CALCUL 324 ­

~ntlers. 011 snppllsllra p"UI'.'.' 1<:5 1I1111l!JreS ~I!tl~rs l,Ide .000 fl'allcs, ce capital est placl) :1 1 de.I,lus ~,etc.,cLon tl'oul'el';).lcsquatre SolutI011S~ull'alUes: (lour rent 'lt pl'o<luit il la lill lit: l':lIl1ll:C llll "C\:CIIU.

x= ~ x=~ ,l'=-1) ,>:=S sUJléri.~ur de SU [,':lIlCS ait "OI")IlU [ll·ÜCéÙ~lIt. 'I = 17 Y = 12 '1 = 7 1j = 2. ;\ u eanlll1CIlCCIIl(!lIt d" la troisiël1lc aunee, le

.' • ", ' . , capilai l'st augl11l'lU6 de :,00 fl':luCS et placé cnrOl", ,Pl'olJ,h/l1t! ":- D"~IX harrllllHls SO!lt (lkUlIlS d lin " 1 de plus pOUl' CCllt '{lIe 1';'llu,!e j1n!cédt.'ute ~ 'il

VIIl lj~' 1':lUt 8,;) C('J~II~11l:5 l" htr':. ,l',lks Sont YCI~- produit alors iO francs do plus 'lue pendant cette ùues a des prIX '1111 .hlf'mmt de 3(, fl'ancs. Ou salt année. . . 'lue les ~ de la capacité de ]a prel11i&rIJ l'al',nt les Calcule.' le capital primitif et le t~ux a.ul']ueI HHde la capacité de la dellxième. Quelle est la :!l'ait élé placé. - (:I~'~'~"'nie lU Salley; Brevet capacité de chacune de ces barriques, iJ. un décili. COl~II~lel; ,[,'/'lr~llts, III '("!" , . tt~ près? SOIt ,r, le capital. d':~~an~c, ct '1 le taux ,1~canDu

1/1cadcIIlie de D'Juai, lSiG. _ A.'piranISj ''''el'el <lu'luel Il CSt place, L IlIteret ùe cc cc ca,pltal au simple.; hout <l,' I":nmée cst X?I ,

Désignons pal' x le n:'mbre de litres de la pre- • 1IlIl miërC! et par ?Ile IIo01h1'1l d.~ litl'es d" la 1.lcuxi"llItl, LlJ rapital placé ail cOlllmencemc!nt.de la 2" an-

A la l'CIlIC 1:1 (l1'()llIii~l"l prcdnit ,1' fuis S,, centi- lIée cst.1' + IOUO, lc taux '!Sl.?j + 1; lïlltén;~ de 'mcs on !j',.I' {c:"nLiJl1'''.', La d'lnxi;'t1Il' pl'•• tluit !I CI, c")lital :1 la fin do,I.,:1' :lnll(:t: est dOliC

(ois 8" c~ntil11es on ~"!I' La .lilrél'enœ d'ls deux 'X+]l 00\ X Il'+ 1)somm<.Js eta"t :ICi fl'ancs 011 :lIiOO ccntimes, on a ,. " d'abord clHte pl'<)micl'l' (j'l""tioll 100

Or cct intérèt Snl'p:l~sallt de SO francs .l'intérêt8:'J; - 'S~!J = :l(;OO, (1) produit pcnda"t 1:1 Jll'cllliè're atl'iée, on a l'équation. D'après 1'6noncé on a CC,UI, :Iutrc équation (,1;+ IOOOlX [!I+l XII

(1),. 12 ;, r. 1211 10U Ïw:-= 80. -.r.=-1j 011 -=-. ('JI lj n (j ,:J -, 1 I.e capital au COll1lllenc()mcnt drl la ;;. 'anuée est

nédnisan,t ail ll~èll1/l d(j 111lllli 11 a,l? 111' ~ X l:l lr!S j .r. + t""Il; lc taux est !J + 2 j 1.ïllléJ,~t I~~)dll!t 'pen' .ltlllX ,fl'aClillIIS '11Il C(JlIlI'(l~<Jllt ll~'lllallllll (2) 'lt dam cette 3< al1née ':st uOlle (x + 1.,1)1)1 X l!l + 2). SIlI'I'I'I'l1""t Cil nlvlIle t<:lIIJl5 le uClluminatcul' com'I 100 lllll!l, lin troll\'C e,!t illté"èt ~ul'I'ass:lnt de· 7{)+ SO, ,c'r,.~-i<-dirc

c;~".('= i2y, (:1) dl, I;JI! r";II~C5 l'intél'èt ,le la 1'· '1I111é/l, ml' :~cette

co 'I,.j si!!;lIilit! : (;;, f.. :s la "',!':Icit " de la Pi'Clllii,,'c aulrc c,!uauoll vui<!rt" y~ flli>, la '::II,",:il'; d,! la <1"\l~ii'IlI". ' '.1" + 1:,00) X {y + 2),_ ~:If _ 1'0 (2)

U,! • l,r[Uat!OIl ';11 ct uc l'ë'ltl'llioll i,:l) (lui rclll- J JlJù' !li\) - ~ ,

rietl/'S termes d'Ilne alltre qllantité, on l'écrit à la ~uite dl! celle-ci CIl changeant ses signes + en ­et - ('Il +.

.D'apl'ès cette règlil on a ici

:l,,~ 800 - 19G.7: - 300 000+ 2550x -1'1 '0 360 - -,' •

Puis par la réduction, et en multipliant les deux membres pour cha.sser le dénominateur, on obtient

2354x - 7200 = 4572, 23543: = 4512 + 7200, 235;x= lti72 t

Il"-'1 x= ')3'.'.- = 5.

- ;)-t

l'nonLÈJlES EnRllI{:s l'An DES ÉOt:A.TIO:\S A DE:rX 1:\ ­CO:\:\l'E:S.

P,'oUhlle r.. - Cne bourse contient ·H [rancs-en lliëces dc 5 francs et en pi&ces d~ 2 frallcs; COIll­bien y a-t-il do pièces de chaque e~pèce '?

Soit ,1." le nombre de pièces de ,; fr:lncs ct li le 1I0mbre de pièces <ie 2 frallcs. Les x l'ii'ces font IIne solllllle é;.:ale " ;; :c; lcs .!J pi&ces fOllt IIlIe somlne l\lfale 1). 2 !J; 011 a pal' consé(IUcnt rc­'IU:ltioll

5x +.:!!J = H. L~ problëlllc se trouve ainsi exprimé p'r une

scul() ""Illation il deux inCOlltlU()S. '.' Pour la !"!'1lIl,h·c. on l''tisollne COnnll() "'il n'l

al'ait ljU'lIl1e illrl)III1I1C ('t 'l'le l'aut!'c x par cX"m­pic, fütconlluc. Tirant donc Îa l'al~ur rl'y, 011 troU\'e

H-5xy = 2

Ce résultat allprC'nd ljl1l! [,~ nom!,,'e dr,~ lJi,iresde 2 fl'l/Ilr.'S (",'t ,'ylll li lil '>Joilir de l'c:cc,;s dc H ml' le 1uilltllp/e tI" IlllIlll,I'I' "".~ pitie(',' ~Ie:. !i'aIlC,~.

L,oml11e les deux nOIll),rcs clterchl'S <l()I\'CI~t l'Ire

place avec Olle ferm e' pllls simple l'tlquatioll ,(2), tirons I~ valeur de l'incollnue 3:,. ëonime si y ôtah UI1 nombre connu, 110US aurons

x = 85!! + 31:00, 1I&

x= 72y. liS

Ces deux expressions représentent l'une.'et l'autre mais sous des formes différentes, la capaehé de I~ première. On peut donc écrh'e'l'équation

7211 8&11 + 3600 65 = 1I5 '

ou en divisant los deux dénominateurs pal' 5 'i':!..'1 fi,>!! + ~GOO T:J= li .

Dcs deux c'Illations 'lui étaient la traduc,tion du problè'me, 011 ;). ainsi til'é une éqnation IIU conte­nant plus '1I1'llnc' dl's lieux inronllucs. Il'IÇ s'agit plus qu~ d~ la résoudre. Voici le tablcau dès opé­rations.

72y X ti == S::'y X 13+ ;)(100 X 13, 12 -+- .:! 1.'/ = Ill'ij'f + i(i.~OO,

Il:!!,!! - 1105fl = ·j(iSOO, Il!Jy = ',tiSUU,

.I!;'~(){) ~!)~ ., •. !J =- 'ïï'!ï=" . ,- ,.

La C:lpaCilé de la deuxiëmc barri'lnc CH ~!)~ litres 2 d~cilitl'es. En employant l"é(llI:ltioll ,;J~ 011 aura pour trouyet' la Co'pa=citè de la prl~miëre

G5:r. = ~!l::J,~'; X i2., G:Jx=28:J1~.·j·,.

2S:J 1:•. H '3'1 G !I = -~ = .,. ", '

P,'oM"me S. - t'n cert:lÎn capital est pl:lcé à illl certain taux. netiré ail bout d'un ,li! ct all~Il1~,Ir.j

76

CALCUL - 325- CALCUL Il s'agit de résoudre les équations (1) et (2). Multipliant d'abord les deux membres par 100

dans chacunc, on a

(,~ +1000) X (y + 1) -xy= 8000. (3) (.x + 1f>00) X(Y+ 2}-xy=15000, (4)

Pour elTectuer la ulUltiplieation indiquée ail l" membre de chacune, on multiplie chaque terme <lu multiplicande pa: cluique terme du multiplica­teur, et on trouve amsi

xy+1000y+x+ 1000-$1J=8000, (5) xy+1500y+2.x+~UOO-X1J=15000, (6)

Supprimant xy - x.1/ qui se détl'uisent, puis dimi­nuant dp tOoo Ics deux membl'cs de l"é~u~tion (a) et de- 3000 les deux membres de réquatlon ((i) on obtient

1000y+x = 7000, (7) lSOOy + 2x = 12000,

ou en divIsant les deux termes ùe la 2' par.2

7:;0!/+,r= 6000, (8)

Les deux équations primitives sc trouvent ainsi réduites 11 leur plus simple es.prcssion d,lIls les équations (7) et (Il) <lt le problbnc proposé sc tronve transformé en celui-ci: un c<"\pital est placé ù un certain taux; trouver cc capital ct cc tain cil sa­chant que cc capit:tl augmellté de 1O1l0 fois le tanx vaut iOOO francs, Cl qu'aul;menté seulement de 750 fois le taux, il vaut (lOOO francs.

Pour résoudre ces denx équations 11 deux incon­nues, 011 pourrait, comme dans le problème prêcé­dent, tirer dans chacune la valeur d'x, comme si '1 était un nombre connu, et égaler l'un 11 l'autre les deux résultats. Ici il y a un mo,ren plus simple à employer parce qu'il yale mème nombre d',c dans les deux éCluaLions. En e!r'~t, si l'on retranche chaque membre de l'êquation (Il) du memhre correspon ~ant <le réquaLion (7), les l'estes seront encore egau x et on aura.

2:iOy = 1000, .et ""!l = 100,

100 •d'ou Y=-=·j· ~~

En remplaçant y par sa valeur 4 dans réqua­tian (i) on aura.

4000+,r=iOOO,

.d'où x= JOOO - 40DO,

et x=3000.

Ainsi le capital est 3000 francs; le taux est 4 0/•. ProUème !J. - On a deux lingots de mèma poiùs

et de titres différents. Si on fond le 1" lingot avec un quart du ze, on obtient un· alliage au titre de 0,936; si on .fond Je 1'1' lingot avec la lIloitié du 2'. on obtient un alliage au titre de 0,920. Quoi est le titre de chaque lingot?

(Aeau. de ~'lI71C!l, 1876. ~.AspÏ7'ants; brevet eo'uplet. - DIt:T., pago 301.) .

!'our simplifier le langage, désignons par p le pOIds commun des' deu:\: ;ingot5, quoiqu'il ne soit pas demandé. ~ommons x le nombre de millièmes !lui exprime le titre du 1"', ct y le nombre de mil· lIèmes du titre du 20. .

Le poids de métal tin contenu dans le 1" est en millièmes px; lè poids contenu dans le quart du

second est Pi, Le titrc du premiel' mélange sera

py+P1 ·donc ---'

p+e4

Comnle il doit ~tre égal!l 93C millièmes, on ciCl'it l'éqllation

(1 )

Sans répéter la même explic:l.tion sur le 2' mé­lange, on voit qu'il donne cette autre équation

px+~; .----- = 920. (2)

~ .J...l!11 ~l

En multipliant le nllmérateUl' et le dénominateur de (1) pal' !I. ceux de (2) par 2, ct en les di\'isan t par P, on trou\'c

~.r+!1 =9:16 ou 'tx7-!f =936, (3)4+ 1 ;)

2.r"+ .11 = D20 ou 2,r + '1 = D20. l";)2+1 3

Chassant le ùénominateur des équations (3) ct ~~), 011 a

tx +!l = -iG~O, (:i) 2'/:+!l = 2i60. (GJ

Retranchant membre à mcmbl'e l'équation «(l) de l'équation (5). on obtient

2,r= 1920,

d'où r = 1!l'21l = 960,2

Le titre du 1·' lingot est donc ùe 960 millièmes, Pour a,'oÏl' le litre du 2' on remplace dans l'équa­

.tion (1;) le tcrme :lx par sa "aleur 1920, cc qui donne

1921\ +!J = 27GO, y = 27GU - 1020,

y=SiO.

Le titre du 2" lingot est Sin millièmes. OI,serl'atùiIl. - 'Le poids incollnu p ùe chaque

Iin~ot ayant (li~pitrlt d,)s c:'1uations, on en conclut qu'il est inutile au problemc ct qu'il est quel­conqne, pour\'u qu'il soit le mèm<l pour les deux lingots;. [G. Uo\·ier-Lapierre.l

CALCl'L )IE~T.\L, - Arithmétique I-L, - Le calcul mental est applicable il 101lS les degrris de renseignement arithmétique. 11 forme en quc\que sorte un petit cours d'arithmétique élêmenlail'e parâllèle 11 l'autre. :\"ous ne 1'ou\:OI1S présenter ici le tableall détaillé de cd enseignement purement oral: nous nous bornerons à cn (~Srluisser le plan.

l" Au d<ibu t les élèves énoncel1 t l()s dix premiers nombres. en comptant dl~s olJjets \'isibles, ù leur l'ortée, comme des jetons, ùc petits ca iIlou:\: , de.lI haricots, les doj~ts, ()tc., ct en ajouunt successI­vement ·un objet de plus au nombre. précédent; de la mème'manière les nombres depUIS onze, douze, jusqu'à vinl;t; depuis v'ingt-un jusqu'à. trente,et ainsi de suite jusqu'ù cent.

Le maître appell~ leur attcn tian sur les ditai­nes. II leur Cil donne une image sensible, maté­rielle, par de petits paquets composés par exemple de dix bâtonnets comme ceux des allumettcs ; il ~o sert aussi de la pièce do dix centimes qu'il mllt it la place de dix pièces d'un c(mtim~, Cil lui rendant ~on nom de décime qu'on a cu tOrt de lui enlever. Dans la dénomination des dizaines, on cmploi<l l'n­cor.e ell tiuisse ct dans Ulle partie de la France I()s t(~rmes septante, huitante, IWlllllde: II) maitre .!,ourra s'cn sèrvir sans scrUpltl1l pour rétablir la ré­

77

CALCUL - 326 CALCUL gularité de la nomenclature, sauf il indiquel" bien­tût après les termes qu'un usage capricieus leur a substitué~.

2" Il exerco ensuite les élèl'es à trouver les va­leurs que prenù chaque nombre, quand il est au~­mFlnté de deus, de troi.~, de quatre, etc., salls toutefois dépasser cent, Il leur apprend le nom de ropération qu'ils ont effectllée SUI" les divers pro­blèmes qui leur avaient éllÎ posés et le Dom par lequel 011 dési!J;ne le rûsultat, Qu'il ne se presse pas trop de venil" au secours de l'enfant dans une addition où les nombres sc composent de dizaines Ct: d'ullitû!;. Celui-ci, guidé par son boll sens, parvielHlrn toujours 11 sortir d'embarras, Ct décou­vrira mènlc la voie la plus naturelle.

Pour m<.'ttl'e plus de val'iété dans ces esercices, le maitl'e fera entrer dans les problùmes, outl'e les objets déji1 indiqués plus haut, les mesures de temps, telles que le jour, l'heuro ct la minute; le gramme, en disant llue c'est le poids de la. pièce d'un centime; le fl'anc, en ajoutant que cette pièce pose cinq :;rammes ct qu'elle vaut aut.1nt que cent centimcs; le mètre, le décimètre, et le cen­timètre en nloutrant.iI 'l'aide d'un metre de bois ou de cuinc que le mètre se di\'ise en di:.: déci­mètres Ct en cent centimetres; le litre cn mcttant sous leul's yeux une boite cubique ayant un d,'ej­mètre SUI' ses trois tlim<.'nsious. C'est ainsi qu'il amènera les élè"es à faire connaissance a\'oc le système métriqul!, sans Ic leUl' présenter 5011< l:1 fOl'me d'un tableau scit!nti(j(lUe, oil les dh'cl'ses mesures sont énumérées al'ec des étiquettes pro­pres il efi'arout'lIer lcs enf~nB.

3" Pal' des problèmes :ln~logucs aU~ précédents, ils apprendl'ollt :\ diminucr de nn, d~ deux, d': trois, etc.. I1n nombre donné, sans exc<.'pter le cas où dans le nomill'e à retrancher il y ~urait plus d'unités que dans l'autre. Dcmandez il l'un d'entr'~ eu~ pal' e:.:emple cc qui l'cste de' soixante-trois centimes, apri:s qu'il Cil a dépensé vingt-huit. JI est presque cel'tain qn'après un instant de ré· l1e~ion. il "tel'a "'abord \'in!!t-trois centimes de soixante-tl'ob, ce 'lui lui dOllli~ quarante centimes pour l'eSt<.', puis 'Iuïl "tera encol'e cinq c1mtilJ1cs de cc l'('::HC~ POUl" arl'ivel" ;l tI"ou\"er ll'cnte ..ciIHI centimes, l'U moins de temps (Jue nous n"]11 met­tons ici " l'exillilluer.

4" Ayant ainsi acquis la pratique intelligente de l'additioll Ht de la soustraction, pour des nombres qui ne SUl'passent pas cent, les élèves vont l!tre mis en face de nouveaux problcmes, saus être­avertis qu'il s'agit d'une nouvelle opération, la multiplication,

Pour procéder méthodiquement, le maitre leur fait d'abord décounir combien valent 2 fois 1, 2 fois 2, 2. fois :3 ... jusqu',,:! rois ~), au moyen de deu:.: groupes composés chacun du deux petits cail­lom: par exemple, co.mJlosés de trois, de quatre, etc. I! répètera les mêmes questions, en les appliquant IL d'autl'es objets, ct quand il sera assuré que les élèves n'cprouyent plus d'hésitation pour énonccr les résultats. il leur enseigne de la mèm(J maniêr!! cc que valeilt ;1 fois, !i fok ... !) fois chacun des neuf premiers nombres. Interro.~és ensuite plu­sieurs fois sur des problèmes où les nombrilS sont pris dans un orùl'e 'luelcoJ1(lue, ils gravent les pro­duits dans leul' l11~moire d'une manière aussi sùre et aussi rapidc que l'ancienne méthode était lente ct fastidieuse.

Ils remarqueront d'eux-mêmes «(ll'en tout cela ils n'ont fait autre chose que d'effectuer ,ks addi­tions dans l',s(luelles les nombres lÎtaient é;;au.... A cc moment, on prononce l'l nom donnû iL ·c.~tt(· addition ,\lm:;.:,;e en pl'cnant la prlÎcaution d,: dis­tinguel' biell illlttement le multiplicateur rlu mul­tiplicande: mJ.i~ on démontre ([u'ils donnent le mÎllDe produit quand ils sont mis ('nn il la plac!! de l'autra, ct pour c<Jla il suffit de faire voir que

3 groupes de 5 haricots peuvent êÎl'c·'remplacés. par il groupes composés de 3 haricots,

Au moyen de questions' conveuablemc-lit choi­sies, ils apprcndront qUI) .Ie 'produit de·deu~ l'al" teurs devient double, triple, quadruplc,'ctCo> quand l'un de~ facteurs devient lui-inème double, triple ou quadruple, Si on leur dit par exemple.l]Ql! cha­que jour Pierre a écrit 3 pages at son' frèl'(l: Paul li pages, il n'en est aucun qui ne dise qu'à 111 fin de la semain'J le trayail de Paul est douhle de celui de Pierre. Ils aurollt ainsi un moyen de· trou\,er plus promptement un produit SUI' le.quel ils pourraient être un peu emb:l.rrassés. Aussi un élû\'e, 11 qui on demande combien font 4 fois 16, sc rappelant qne 4 fois 8 valent 32, double il.u~si. tôt cc premier produit pour arriver 11 tH, .1prés avoir obsené que 1ü est le double de 8. Ils ac~ quièrent de cette manière la pratiqu'e dc cet hu­portant pl'incipe : l}Om' Tllllltil'/içr WI llolJllJI'~ par IlIl autl'e q llÎ cst le p"ocluil de' d~tl,l: {ordcw'.. a1/, peut lJlultiplie,' cc Homo/'e paT' le premier factcuT" et le résultat ensuit'! pf/l' le second.

o· Les élè\'es, sachant mainteliant t1'011\'er le produit de deu~ nombl'es, vont Mre condnirs, tou­jours p:lr les questions rlu mait}'!!, à elfcctuer 1'0­pél'atioo inverse. On propose à l'un d'entre eux de partager par l):.:empl'l S billes..!!. ~ camarades, 11 billes !!.:\, etc. Quand ils nuront résolu une suite­de problèmes semblables, ils 'connaitrout cc que c'est que b division. On IcuI' indique alors les termes de dividcnde ct d(, J/i1:i3eur; m~is"ou ne citera le nom de 'lltotiCilt (Iu'apl'ès :n"oir montré 'lue le résultat de la di\'ision exprime combien de fois le diyitlendll contIent le diliseur. Cc ."'l'a lei Ic moment de dirc cc qu'on anpel\e demie, tiers, ']lI'11't, cil/'flli~ml!, ClC,

Ils ne trou\"('ront pas pins de difficultés pour <1iYiser par un nOll1bl'(J ù'unités un di\'id<.'ndo où t.~ nombre des .li7.~ines no serait pas diyisible pàr le diyiseur. par exenl"le Ga francs à. dh'iser entre i personnes. Ell regard:1l1t celln somme COml!le formée de 6 pii:ccs de lU francs ct· .Ie ;; pi,~ces de 1 franc, l'élè\'e' chal"~é d'elfllctuer le partage, donnel'a d'abOl'd un'! piece tl,~ lU fl'ancs 11 cilaq1)e p'!rsollne; puis, remplacallt les 2 pièces de 10 francs (lui resten t par 2U pièces de 1 fl'anc, il a encore il partagllr 2;' f,'ancs. <:e qui fait Il francs pour chaque pel"sonne, arec 1 franc de reste. En remplaçant aussi cc frauc pal' 10 pièces de 1 décime, il donne :2 d,jcil1les:l chacunc, ct enfin, s'il remplace encore les ~! dûcimcs qui lui restent par 20 centimes, il il. terminé la di\"i.~ion 'lt troul'é 16 francs ct 25 centimes pI/ur cha(IUe pan.

60 '\'ous :ne pou\'ons indi'lner ici les dh'crs moyens par lesquels Ics opé,'ations peun~nt èt're abrégé.!s dans ce~tains cas; la sa~acité des maitrès saura les découvrir ct les mettre an profit de l'élè\'e. Nous appeilerons plutôt [CUI' attention sur lïmportance ct la simplicité des moyens «(lI 'ils a,l't :1 leUl' disposition pOUl' rendre les calcuL~ sur I~s fractions aussi f:lciJes que ceux' qui Ollt été eITec­tués précédemment. Qu'ils SIl gardent bien de cummencer pal' parler de l1umt'rateur I!t dp- dGno­minateur; qu'ils ne prononcent pas m"me le nom <le fraction j mais qu'ils proposent une suite de petits problèmes, tels que les .~uivants :

Combien une demicheure. vaut.-elle de quarts d'heure?

Combien 2 heures ct quart font-elles de quarts d'heure?

Comhien ya-t-ii de mètres dans une longueur é"alc 11. 8 tilJrs de mètre?

o Quelle est la longueur formée par trois rèp;les. ayant,l'une 3 1tuitiemes de mètre. 1'aut'·c 1 huitième de metre. ct ln dernière :2 huitièmes do mëtre?

Aucun élève ne sera' embarrassé pour donner la rl;pl)nse. ]Is la trouveront aussi facilc.nient pour ces au~res problèmes:

78

CALENDRIE.R -:321 CALENDRIEn Emile doIt. prendre les 3 quarts d'un sac de 2!

billes; combien en aura-t·il·: On demandait son âge IL une jeune fille; elle

répondit: les S ·huitièmes de mon Age (ont 10 ans. Dans .Ie premier'i1s diront: le quart de 2\ .est 6;

donc Emile aura 3 fols·6 billes ou 18 billes, Dans le second : puis<]ue S huitièmes de l'âge chercbé font 10 ans, 1 limtième vaut S fuis ·moins. ou 2 ans; donc 1':ig6 est égal à 8 fois 2 an~ ou 16 .ans. .. .

C'est maintenant qu'il y a. utilité. "lI employer le~ noms de fl'ac/ion, de 'n1l1llél'ateu7' et de déllomina~ ttW'. - On pourra llussi llborder la réduction des fracthms au même donominateur, en apprenant il cOllvertir des demies et des quart~ en huitièmes, des demies et des tiers ell sixièmes, etc. - V. l'ar­ticle"Calcul dans la 1'·P.l.II.TIE.

[G"Bovier-Lapierre,l Lectures et exercices. - On I?ourra quelquefois

piquer l'émulatiolJ et la curiOSité des élèves en leur racontant quelques exemples de ces. tours ·de. force de calcul mental accomplis. par des enfants; El! voici un ou deux que la très,grande majorité do nos élèves ne résoudrait que la jllume il la main.

En 1820, on entendit parler d'un enfant italien de sept ans, Vincent Zuccaro, qui arait une .éton' nautefacilité de c:ùcul et 'lui, cn quelques instants. résolvait de tête des problèmes comllJiqués, (jnE! expél'ience publique fut faite à Palerme sous b. sur.veillance de deux proCesseurs de mathématiques en p~ésenca de plus da quatre. ce'nts personnes, Voici deux des problèmes qui Cu'rentposésll l'enCant :

l or pl'o~lème, - Gn navire est parti. d6.Naples pour Palerme il midi, a Cait 10 milles par heure. t'l.l autre, qui fait 7 milles par beure,' est parti au mème moment do Palerma pour Naples. A .quelle !leure se rencontreront-ils ct combien de milles aura (ait cllacun d'eux, la distanèe entre les villes étant de 16tJ milles? '. . .

Vincent Zuccaro l'épond aussitôt: Le premier navire aUl'a fait 105 milles H; .le. deuxième, 7-i 1''1'

- Oui, môlis 11 quelle heure .101..rencontre? .... - Cela s'entend: à 10 beures·etH iÏprès le départ. L'eofant, ayant aperçu la liaison eiltre las ·dellx

parties de III réponse, pensait que Iris assistants l'avaient comprise comme iui ct qu'il ·él.llit inutile de l'énolicer, . 20 probleme. - Dans trois rittaques successh'es onl péri le quart, puis le cinquièma, puls le sixième des assaillants qui se trouven·t alors réduits il 138. Combien étaient-ils d'abord? .

L'enfant répond: 360. D, Comment aveZ-l'bus trouvé cc nombre? n. S'ils avaient été 60, il' en serait resté 23 aprb

les attaques; mais 23 est le sixième de 13S, donc les assaillants étaient d'abord six fois GO, c'est-â­dire 36tJ. .

D. lIIais pourquoi avez-vous suppos·tS 60· plutôt' que SO ou 10?

R, Parce que ni 50 ni 70 ne sont divisibles pill'~ i ni par O.

(D'après la ReVUeeIlCl/clop4diqlle, t, XLIII, p. 230. j . CALE~DnU:R, - Connalssan~es Usuelles, ·VIII.;

Cosmographie, IX. - i:tym. : au lati!) calenda~t:ium, tableau des calendes. Les calendes ..:(d'un piot grec q.ul signifie appel) étaient le.,l~' jo.ur,.duJl1ois, celUI où les prêtres annonçaient' au peupleassemblé les fêtes du mois,

Nous savons déjà ce que c'est que l'cmnêé.~:.Si nous considérons une étoile placée, comme l'étoile polaire; par· exemplé, d'un côté de la route que 8uit la Terre autour du Soleil, nous recoDnalt~ens qu'au commencemellt du printemps et au com­mencement de l'automne, la terre est Il la même

.distance de cette étoile; Qu'au commencement de fété;la terre est un peu plus loin! et au commen­éement de l'hiver, un peu plus pres de l'étoile po­lilire.

Dans cette révolution, il arrive que l'équllt-eur de la terre, prolongé jusqu'au soleil,: conServe toujours dans le ciel la même direction et passe, au commencement du prlntempa; exactement par le centre du soleil.; au eommence'mént de l'éto, 23 degrés et demi environ a1]-de~sous du soleil p!1r rapport 11 l'ét~lIll pol~re; rel)(lSse au commen­cement de l'automue,.exaetemont par le centre du soleil, .et,·au cam!'nencement de l'hiver, se dirigeil 23 degrés et demi. environ· au-dessus d.u ·soleil, entre 'celui-ci et l'étoile polaire

On' nomme année tropique le temps (fui s'écoule depuis le printemps ou l'équateur- de la terre est dirigé vers le centre du soleil jusq-u'alLprintempa suivant,'où cet équateur est de llouvéau· diriJ!:~ vers le même centre du soleil, oC'est cette· année tropi­quo qUi règlo le calendrier parco- qOBe! est elle qui ramène les saisons dans 'le même' ardi'i! a'Vec une régularité parfaite. On conçoit CacilemèDt la néces­sité, pour la vie ordinaire, de ramener tes mllmes saisons continuellement llU;o; mêmes mois de l'an­née,ot, autant que possible, aux mêmeS'quantièmes de ces mêmes mols,Le trouble qu'apporterait dans les tranux·agricoles la présence, au bout de cinquante ou soh:an.te ans, de l'été llU mois de mai, pal' exem­ple,·et· plus tard au mois d'avril, frappera tous les esprits,. Le jour solaÏ/·t est produit par la rotation de la

terre sur elle-même: c'est l'intermlle de temps qui s'écoule depuis le moment où, par suite de cette rol.lltion, un point de la terre est amené. en face du centre du Soleil, jusqu'au moment où il revient pOlir la deu:tième fois en face du centre du soleiL

SI l'année tropique contenait un nombre exact de jours solaires, la question do calendrier serait bien simple, le calendrier d'une année ressemble­rnit toujours Il celui de l'année pracédente ; surtout 3i le J)ombr~ de jôurs solaires de l'année tropique coritcn:LÏt un nombre exact do semaines.

Mais IIn'eo est pas ainsi. Dans l'année tropique, i1.ya 3G5 jours 242 millièmes 216 millionièmes et 6 dix·nliIliollnièmes de jour. Les usages dela vic ne peul'ent pliS s'arrangel·. d'urie année Cractionnalre comme celle-Ill, qui conduirait à commencer un.e année â minuit, l'année suh'ante 11 S lleures 48 ou­nutes 47 secondes et demie du matin, la suiyallte, à 11 heures 37 minutes 33 secondes du maLin, et ainsi de suite. Depuis longtemps, les peuples. ont reconnu la nécessité de eréer UllO anné~ cit'ile. tO,m­posé!! d'un nombre exact de jours lot il en résulte l'annae civile comnlU7le, de 3Ga jours.

Cette annae est trop courte dll 0 jour, 21221C6, et comme 0;2422166 X 4 = O,0688f16·~ou tout près d'un jour, 011 est COll\'ellU de (ail'c, tOIlS les quatre ans, une année ch'i1e de :166 jours par l'additiQn d'un jour au mois de Cél"rier. On nommo cette qua­trième année; année bissextile.

Puisqu'on était en retard de 0 jour 968866\ et qu'on vient d'ajouter un jour, 1-0,96Sn664,donnant 0,0311336, chaque période da 4 ans se trouve trop longue de 0 jour, 0311336. 11 en résulte qu'au bout de 100 ans ou de 25 folS 4 ans, on se trouve ~n avance qe 0,0311336X2i> ou de 0,7i834, Cette Cir­constance a fait admettre que chaque année de siècle 17011 1800 lll00 serait une année commune au lie~ d'êt~e un~ annde bissextile, cc qui revient à retran·cher· un jour de chaque ·ptlriode de cent ~ns. . On 8e trouve ainsi en retard de 1 - 0,7783/,. Jour

ou 0,22166 jour· tous les· cent ans, soit, ~u bout de qllatre siècles·, de 0,22166 X -i ou .0,88664 Jour.AI~rs il a été décidé que chaque quatI'lème année de Siè­cle,: 1600,2000,2400.. etc., serait un·e année bisllex­tHe, contrairemcint à la convention précédente

TOlls les quatre cents ans donc, on se retrou:ve en avance de 1- 0,88064 ol:. 0,11 :136.11 faut donc ô1tten­dre 10.fois 400 ou 4000 anspourque l'/fIlance soit de Q,1133G X 10 ou 1 Jour, 13~G, m~~.nous .avons bien le droit de ne 1J\' nous préocl;uper de 81 loin.

ACTIVITÉ ... ENCORE UN PLIAGE

Philibert Clapponi Irem de Grenoble

Prendre une feuille de format A4 (21x 29,7 cm) représentée ICI par ABCD (figure 1).

A'o-~ -----p,B

DO-i --------------'c

Figure 1

Plier cette feuille en plaçant C sur A et on obtient la figure 2

B ............_ \•.

....-. ....-. ··············· A .......

,,)K

,, /

/ /

/

,,,,,

,,

/

/ /

/

,

,,,,

,/

/ /

..........•

M

Figure 2

Construire le pentagone ABKDM avec la règle et le compas sur la figure 11.

Calculer l'aire de ce pentagone.

INous préférons utiliser Cabri-géomètre avec les élèves.

« petit x» n° 47, p. 79, 1997 - 1998

LISTE DES AUTEURS AYANT PARTICIPE A CE NUMERO

Gilbert Arsac Institut Girard Desargues - UPRES-A 5028 du CNRS UFR de mathématiques, bât 101 Université Claude Bernard Lyon-I 69622 Villeurbanne Cedex

Latina Coulange Équipe de didactique des mathématiques Laboratoire Leibniz, U.M.R. CNRSfUJF/INPG 46 avenue Félix ViaIlet 38031 Grenoble

Nadine Milhaud IPR de mathématiques Rectorat de l'académie de Toulouse

Guy Verplancke Collège Val de l'Indre rue Honoré de Balzac 37260 Monts

IMPRIMERIE EYMOND 37, rue du Vercors, 38000 Grenoble

Tél. 04 76 84 03 03 - Fax 04 76 48 53 48 Dépôt légal nO 34866 - Avril 1998

Imprimé en France