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Au père Lasfargues et aux frères Tardé et Cointepas qui viennent de partir en mission en Amérique, à Québec, le frère Clément Myionnet leur écrit ces mots d’encouragement :

« Vous avez une belle mission à remplir, Dieu vous y a appelés, à vous de vous en rendre dignes. Mais sachez bien, mes bons et excellents frères, que c’est par l’humilité, l’abnégation, la petitesse, la mortification, la prière, qu’on arrive à faire quelque chose de bon pour la plus grande gloire de Dieu. Adieu, mes bons frères. Adieu, dans les Cœurs de Jésus et de Marie, vivons, travaillons et mourons.Votre vieux père qui vous aime. Clt Myionnet » (L. 190, 1885-01-10)

mars 2013 – Vol. 37, numéro 1

Merci Merci Merci

Madame, Monsieur,

C’est avec beaucoup de plaisir que nous venons vous remercier pour vos généreux dons à l’occasion du temps des fêtes de l’année 2012 en faveur de nos missions. Au nom de nos missionnaires du Congo et du Brésil et en mon nom personnel, recevez nos remerciements les plus sincères.

Votre participation pour soutenir nos missions nous encourage à continuer notre action missionnaire dans des milieux très pauvres et pas toujours faciles. Les Religieux de Saint-Vincent-de-Paul canadiens font leur large part pour les aider avec des fonds limités. Étant donné l’aide financière de chacun(e), nous devenons un élément de transformation et de progrès pour ces différents pays où nous œuvrons.

La solidarité est le nom actuel de la charité dans une société d’inégalité ; surtout entre les pays du premier monde, au bien-être assez généralisé, et ceux du tiers-monde, où la misère est trop présente chez des millions de gens semblables à nous. Que Dieu Notre Père, auteur de tout bien, vous comble de paix pour ce beau geste de partage, nous souvenant « qu’il y a plus de joie à donner qu’à recevoir ».

Soyez, d’autre part, assuré(es) que nos missionnaires vous gardent une large part dans leurs prières et à la messe que nous célébrons chez nous, à vos intentions, à tous les mois.

Veuillez agréer, Madame, Monsieur, notre reconnaissance et croire en nos sentiments les meilleurs.

Rodrigue Morin, s.v. Trésorier.

Port de retour garantiLES CHARITÉS R.S.V.2555, chemin Ste-FoyQuébec (Québec) G1V 1T8– Société canadienne des postes– Envoi de publication canadienne– Numéro de convention 40051831– Imprimé à taxe réduite– Port Payé à Québec

Missionnaires au Brésil : PP. Léo Ducharme, Gabriel Fortier, Clet Leclerc, Julien Masson, Michel Proteau, F. Paul-Aimé Hamel.

Missionnaires au Congo : PP. Marc-André Couture, Michel Legendre, FF. Michel Lavoie, Jacques Viger.

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Terres d’espérance — Les Religieux de Saint-Vincent-de-Paul2

Terres d’espéranceRevue publiée par :

LES CHARITÉS R.S.V.

2555, chemin Sainte-Foy

Québec (Québec) G1V 1T8

Téléphone : 418 653-2179

Télécopieur : 418 650-5459

Équipe de rÉalisation

Jean-Claude arseneault, s.v.Supérieur provincial

roger Boulet, s.v.Rédacteur en chef

Florent tremblayCorrection

rodrique Morin, s.v.Administration et finances

raymond Bédard, s.v.Photocopie de la revue

alphatekConception et mise en page

allez visiter le site chaque semaine pour des nouvelles de l’afrique, du Congo, du Brésil, … www.r-s-v.org

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[email protected]

[email protected]épôt légal – Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 2013Membre de l’ACPC (Association Canadienne des Périodiques Catholiques)

Sommaire

2 NouvelleTDE

3 ÉditorialRoger Boulet, RSV

4 Bienvenue à Kimbondo !Marc-André Couture, RSV

6 Les Associés à KinshasaEpiphanie Thomas Boonga, RSV

7 L’Étranger a des gros yeux mais il ne voit pas

Bertin Sanon

8 60 ans de vie religieuse bien remplie Frère Réal Lacoursière

Roger Boulet, RSV

9 Bois sec ou arbre vivantConstant Lamoureux, RSV

10 L’insécurité généralisée à l’est de la Rd du Congo

Gélase Katembo, novice

12 ÉricMichel Legendre, RSV

14 Joseph (2e épisode)Michel Legendre, s.v.

15 Un an d’histoire à Sao GonçaloMichel Proteau, RSV

Nouvelle

Nos missionnaires Florent et Michel au CongoLe frère Florent Binet et le père Michel Legendre – C’est le jeudi 31 janvier, à 18 h 30, que les deux confrères Florent et Michel ont atterri à l’aéroport de Ndjili (à Kinshasa). Ils ont été bien accueillis par trois jeunes confrères à l’aéroport (les frères Hervé, Nestor et Éric) qui les ont conduits à la Maison provinciale où le père provincial les a accueillis. Le père Michel voyagera, dans les jours qui viennent, pour Isiro où il est attendu comme curé de la paroisse St-Rosaire.

Portal (8 février 2013)

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Éditorial DE RoGER BouLET, RSV

Bon carême !

C’était un dimanche de juin de l’an 2000 à Fortaleza au Brésil. Je terminais la messe de 18 heures. L’église était remplie (près de 600 fidèles). Après la prière et la bénédiction finale, un groupe s’approchait de l’autel en vitesse. un peu surpris je croyais qu’ils venaient me saluer. Mais non, ils venaient toucher la statue de Marie. C’était leur façon de dire bonjour à la Vierge Marie. Les Brésiliens ont une façon candide de prier.

Pour nous du Canada, comment allons-nous « faire notre carême » en 2013. on est invité à suivre Jésus par trois gestes évangéliques : prière, sacrifice et aumône. En lisant ces pages de « Terres d’Espérance » vous allez constater les faits et gestes de nos missionnaires du Congo et du Brésil. Fidèles à leur vocation depuis 15, 25 ou 40 ans, Michel, Florent, Marc-André, Réal, Thomas, Bertin et Michel B. trans-mettent leur témoignage et méritent notre encouragement pour évangéliser les pauvres. Merci pour votre générosité, qui permet ainsi de continuer leur excellent travail. Bon carême !

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Bienvenue à Kimbondo !par Marc-André Couture, RSv

Si vous le voulez bien, prenez le temps d’une petite visite guidée dans notre « parcelle » de Kimbondo, quartier calme en banlieue de Kinshasa, la grande capitale de R.D.C.

Notre maison porte en fait le nom de « Fraternité Saint-François-de-Sales » en l’honneur du patron secondaire de notre congrégation et grand maître de la vie spiri-

tuelle. Notre communauté accueille depuis vingt ans environ des candidats en formation. Mais avant de vous présenter les personnes qui forment le cœur de notre communauté, voici quelques éléments qui vous décri-ront le décor agréable où nous sommes plantés.

Le quartier Kimbondo est situé au milieu des Monts de Cristal, ce qui nous vaut une fraîcheur particulière

qu’on ne retrouve pas ailleurs à Kinshasa. Nous avons de l’air, de l’espace et surtout, de la tranquillité. Ce qui n’est pas toujours le cas pour les quatre autres communautés de RSV à Kinshasa qui connaissent bien souvent le tapage, aussi bien diurne que nocturne, provenant des bars et des lieux de culte environnants.

Nous disposons d’une grande propriété avec jardin, arbres fruitiers, paillottes et même porcherie et poulailler. En plus de concourir à la qualité de la vie, ces éléments nous aident un peu pour l’autofinance-ment. Notre demeure comprend 22 chambres dont la moitié seulement est occupée, ce qui nous permet d’accueillir facilement les visiteurs. Ainsi, c’est à l’inté-rieur de nos murs, que se déroulent nos récollections mensuelles et plusieurs grands rassemblements de l’ensemble des confrères de Kinshasa qui peuvent tous trouver place dans la chapelle, la salle communautaire et aussi la cour intérieure sous les branches d’un bel arbre-parasol.

Marc-André Couture, rsv

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Venons-en au cœur de ce beau site qui est la commu-nauté formée de onze personnes, huit aspirants aux études et trois religieux de St-Vincent-de-Paul. Commençons par nos jeunes candidats qui sont la raison première de cette maison. La moitié est origi-naire d’Isiro, à deux milles kilomètres à l’est, là où la communauté est implantée depuis la fondation en 1985. Les quatre autres proviennent de Kinshasa ou des provinces voisines de la capitale. Dans le groupe, nous trouvons cinq candidats frères et trois candidats prêtres, tous engagés dans un cycle d’études de trois ans. Lucien, Hilaire et François étudient en pre-mière année à l’ISPR (Institut de Spiritualité et de Pédagogie Religieuse), Innocent, en deuxième année à l’ISPR, Didier, en troisième année à la Faculté de Psy-chologie de l’uSAKIN (université St-Augustin de Kinshasa) et enfin, Pascal, Crispin et obed, en troisième année de philosophie à l’uSAKIN.

Pour nos quatre finissants, l’étape du postulat se dessine déjà à l’horizon de 2013. En effet, au mois de mars, au plus tard, ils pourraient devenir postulants et franchir ainsi la dernière étape avant l’admission au noviciat. Depuis six ans, nos novices se rendent à Nasso au Burkina Faso pour y vivre leur noviciat avec ceux de Côte d’Ivoire et du Burkina.

Le frère Michel Lavoie, économe local et économe vice-provincial, le frère Jean-Marie Kupa, ingénieur employé au Ministère des Télécommunications et moi-même, responsable de la communauté, sommes heureux de vivre avec ces jeunes et de les accompa-gner durant leurs années de formation à Kimbondo. Vous êtes toujours les bienvenus pour un temps de visite et de repos dans notre milieu accueillant au milieu de la belle nature congolaise !

Bien sûr, on ne peut pas tout avoir dans notre petit paradis. Le fait d’habiter en périphérie de la ville nous prive de l’accès à certains services, notamment l’eau courante. Toutefois, pour compenser ce manque, nous sommes équipés de tout un système de gouttières et de caniveaux qui déversent l’eau de pluie dans trois citernes, obtenues grâce à un don de l’Ambassade du Canada. Donc, on s’en tire assez bien pendant les huit mois de pluie. Au début de la saison sèche, nous vivons sur nos réserves mais ensuite, il nous faut trans-porter l’eau, ce qui est moins intéressant. Mais finale-ment, on apprécie davantage ces choses qui ne vont pas de soi ici. Il en est de même pour le courant, qui, tel un visiteur imprévu, nous arrive et nous quitte à tout moment. Là encore, nous avons la chance de bénéfi-cier d’une bonne génératrice qui nous permet, surtout le soir, d’alimenter l’éclairage et les ordinateurs des étudiants en cas de panne d’électricité.

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Les Associés à Kinshasapar Epiphanie Thomas Boonga,

Ce témoignage donne une idée de ceux et celles qui, sous la houlette de nos fondateurs, essayent d’emboîter le pas en collaboration avec les Religieux de Saint-Vincent-de-Paul. Ce groupe d’Associés est un projet du frère Jacques Viger, RSV, communément appelé « coach » avec la permission du père Pierre Lévesque, alors supérieur provincial de la Vice-province

du Congo, d’heureuse mémoire. Ils sont au total huit : cinq hommes et trois femmes : Pascaline Bapeli, Laurette Kuhuna, Emérance Loteno, Jean-Bosco, Lucien Nitu, Chaplin Mvuama qui en est le président, Lydien Lukoki et Charles Bukwangama. Ces hommes et femmes congolais de bonne volonté partagent volon-tiers leur foi mais aussi leurs implications. Ils expriment leur proximité et leur solidarité au service des autres en suivant les pas de Vincent de Paul afin d’améliorer le bien des nécessiteux, des sans-amours et de ceux et celles qui n’ont pas d’argent, bref des gens à haut risque dans leur milieu, et c’est par eux que Jésus nous parle. Notre charisme RSV n’est pas une réalité démodée ni une simple théorie sans ancrage sur le concret, mais il est d’actualité. Ces Associés ont eu toujours des occasions favorables pour créer des moments d’unité, d’intimité, de discernement et d’écoute attentive, accompagnés d’un RSV, avec un enthousiasme renouvelé. Je m’aperçois cependant que les amorces des actes de charité que posent les Associés peuvent éclairer le cœur de ceux et celles qui les entourent. Je dirais tout simplement que l’authenti-cité de leur présence et leur implication se mesurent à la qualité de leur engagement et à celle de leur accueil des plus démunis. Les Associés congolais rencontrent beaucoup de situations difficiles, plusieurs d’entre eux n’ont pas la sécurité matérielle. Ils sont pauvres et c’est pour cela qu’ils aiment les pauvres. En vivant auprès d’eux et en étant eux-mêmes pauvres, ils arrivent à

comprendre l’angoisse de ceux et celles qui n’ont rien, de ceux et celles qui sont rien. En parlant des Associés, on ne peut secourir les autres si on ne se laisse pas évangéliser par ceux et celles qu’on aide. Mais la crédi-bilité de leur témoignage est ancrée dans la joie malgré tout. Ils ne remplacent pas les religieux ni ne travaillent pour eux, mais ils composent avec eux et manifestent leur amour des pauvres par des actions concrètes. Leur amour des pauvres vient avant le service. C’est donc ensemble, engagés dans un même objectif, avec leur limite et leur possibilité, qu’ils travaillent pour la promo-tion humaine. Les Associés des RSV, au Congo, ont bien pris conscience du fait que ce sont les pauvres qui les interpellent.

Thomas Boonga, rsv

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L’Étranger a des gros yeux mais il ne voit paspar Bertin Sanon, décembre 2012

la liturgie. Le prêtre célébrant principal n’est pas en reste. Il a bien préparé son homélie. Il n’a cédé en rien à l’improvisation ou encore, à l’envie de réchauffer ses vieux sermons d’il y a vingt ou trente ans. Aucun de nos anciens ne semble avoir une banque de sermons. on a du plaisir à les entendre.

Après la messe, ils disparaissent tous dans leur chambre au séniorat. Que font-ils ? Là n’est pas la bonne question, car ils ne sont plus à l’heure du faire mais de l’être. J’imagine qu’après avoir puisé des forces dans l’eucharistie, chacun vit dans le silence de sa chambre son oblation à Dieu pour le salut du monde. Ils se sont donnés hier avec la force de leur jeunesse, aujourd’hui ils redonnent encore et chaque jour sans jamais se rependre.

Il est 12 h. Les voilà tous rassemblés de nouveau pour le repas de midi. un grand rendez-vous de partage fraternel s’il en est. Le frère Y ne manque pas d’humour. Il dit que son supérieur est bon, parce qu’il ne lui a jamais refusé une permission…mais seulement, précise-t-il, lui n’a jamais demandé de permission. Il a toujours présumé ! A bon entendeur salut.

Après le repas, ils pourraient laisser là leurs assiettes et profiter d’une bonne sieste ou d’une bonne marche de santé. Mais non, à ma grande surprise, ils sont là, qui pour débarrasser, qui pour essuyer, qui pour ramasser les couverts, qui pour les placer sur le comp-toir. Pour l’ancien maître des novices que je suis, il y a là le signe d’un bon noviciat.

Je rends grâce au Seigneur pour la fidélité de ses anciens.

Dans la sagesse africaine, on dit : les pintades en marchant regardent toujours la nuque de celles qui les précèdent. « Entende qui a des oreilles ».

La sagesse africaine qui ne manque pas de réalisme et de pertinence affirme : « l’étranger a des gros yeux mais il ne voit pas ». Ce qui signifie que l’étranger peut être porté vers l’apparence des choses dans un pays et passer à côté de l’essen-tiel. C’est dans ces sentiments d’humilité que je voudrais par-

tager mon expérience de vie communautaire avec les anciens de la Maison provinciale à Québec.

Ma présence avait fait baisser la moyenne d’âge. Cependant j’avais l’impression d’être un ancien parmi les anciens. Dans cette communauté, disons-le tout de suite, il ne se passe rien d’extraordinaire. Mais l’extraordinaire de cette communauté est son ordi-naire ! Du haut de leur âge, mes aînés dans la religion sont tôt levés. En arrivant à la chapelle le matin, j’ai toujours trouvé les lumières ouvertes, comme diraient les bons québécois. Signe d’une présence qui avait précédé la mienne. Après un temps de prière person-nelle, les premiers pas s’annoncent dans l’église. Ils diffèrent tous les uns des autres. Je pourrais même identifier chacun de ses pas. Cela importe peu, mes aînés pourraient aussi bien identifier les miens car en communauté, nous nous connaissons.

Péniblement, chacun à son rythme, ils sont tous au rendez-vous pour les laudes et la messe. un temps privilégié et unique dans la journée. Il est 7 h 30. L’animateur, bien à l’heure, introduit l’office. Loin de céder à la routine, il semble avoir bien préparé son affaire. Il chante son Dieu avec conviction et amour. Cette même ferveur est observable pendant la messe. Le frère X, malgré le peu de souplesse de ses doigts et de ses pieds raidis par les ans, joue à l’orgue pour la gloire de son Dieu, ajoutant ainsi un plus à la beauté de

Bertin sanon

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Et, en 1964, Dom Hugo, évêque du diocèse, lui offre la responsabilité de CARITAS, une œuvre de bienfaisance qui distribue nourriture et vêtements provenant des États-unis. Nous sommes en période de dictature mili-taire et, les militaires ont les Canadiens à l’oeil. Même que Dom Hugo a cru bon d’en faire la remarque au padre Claude. « Rappelez-vous que vous êtes venus en mission pastorale et non en politique, sans quoi, votre expulsion est possible. »

C’est ici que le Frère Réal me raconte une anecdote du début de son arrivée à Marilia. Alors qu’il retournait au Brésil pour les fêtes du 50ième anniversaire de la province brésilienne, en 2008, Antonio Ambrosio (alias « Tato ») lui a rappelé ses débuts en construction. Alors qu’il débutait son métier en fer forgé, il demanda au Frère Réal la possibilité d’utiliser un local au Patro pour son travail. Il fabriqua même une porte en métal qu’il a dû livrer, à pieds, à deux kilomètres du Patro. Et son travail connaît aujourd’hui une réputation à la grandeur du Brésil. Et en reconnaissance de ce support, Antonio lui remit une somme de 1000 R $ que Réal s’empressa de donner aux œuvres paroissiales. un exemple qui prouve que la Province du Brésil pourrait s’autofinancer !

Parque Domingos

C’est en 1970 que le frère Lacoursière fait son premier séjour à la paroisse de St-Dominique à Parque Domingos (SP). Il demeura dans cette paroisse 5 ans. En 1975, il fait un court séjour à notre paroisse de Presidente Prudente pour revenir à Parque Domingos en 1977. C’est dans cette paroisse qu’il développa ses talents en différentes pastorales (baptême, accom-pagnement des gens de l’âge d’or, catéchèse, etc. »

Le frère Réal Lacoursière est l’un des nombreux reli-gieux RSV originaires de Shawinigan. Le résultat de nos terrains de jeux des années ’40. Né en 1928, Réal a prononcé ses premiers vœux en 1952. Il compte 60 ans de vie religieuse. Bravo !

Dès les débuts il retourne dans sa région natale, c’est-à-dire Trois-Rivières, en 1953. Il est nommé au Patro. Cette œuvre était plutôt un orphelinat qui accueillait près de 160 jeunes de 13 à 18 ans. En se servant d’anecdotes, le frère Réal me raconte ses quatre années passées au milieu des jeunes plus ou moins abandonnés par leurs parents. Les religieux étaient responsables de l’orphelinat 24 heures, 7 jours semaine.

C’est en 1957 qu’il commence la ronde des obédiences en déménageant au Patro de Lévis. Il s’occupe des adolescents. Et comme c’était autrefois il doit s’orga-niser avec les moyens du bord : salle ; jeux ; patinoire ; etc. Et en 1959 il est nommé au Patro d’ottawa., la Capitale nationale, où s’illustre un autre p’tit gars de Shawinigan, Jean Chrétien.

BRÉSIL

Le frère Réal se donne corps et âme dans tout ce qu’il fait. Qualifié d’une telle réputation, il se voit offrir la mission du Brésil qu’il accepte avec joie. Il part donc en juillet 1961 avec le père Claude Trudelle pour Marilia. Cette ville de l’État de Sao Paulo comprend alors une population de 90,000 habitants. une fois de plus, il est nommé au Patro où il apprend le portugais par immer-sion (sur le tas). Quelques sœurs grises, qui demeu-raient à l’hôpital (voisin du Patro), s’offrent à lui apprendre la langue avec le père Claude.

60 ans de vie religieuse bien remplie Frère réal Lacoursière

par Roger Boulet, RSv, 28 janvier 2013Frère

réal Lacoursière

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Il a œuvré avec les padres Donizetti, Lambert, Trudelle. Réal se donne corps et âme dans tout ce qu’il fait. Je peux vous l’affirmer après deux heures d’entrevue avec lui.

Un retour pénible au Canada

En 1999, il revient au Canada pour une opération à la hanche et, au cours d’une réunion de communauté, au Lac Simon, il apprend qu’il est nommé au Patro Roc-Amadour. Réal a toujours été un religieux digne et obéissant et ses 60 ans de vie religieuse l’ont prouvé. Il a beaucoup souffert en se soumettant à cette obé-dience parfois jusqu’aux larmes, me disait-il. Il m’a raconté cet incident avec beaucoup d’émotion et d’au-thenticité. Et je m’incline devant sa soumission durant cette période de vie triste pour lui et la congrégation. Bravo Réal, tu mérites toute notre admiration.

Patro Roc-Amadour

Le Frère Réal est aujourd’hui âgé de 84 ans et continue à se donner entièrement à ses activités communau-taires. Il contribue au P’tit Bonheur, une activité auprès des handicapés ; le dépannage alimentaire. Cette œuvre a distribué 225 paniers de Noël en décembre 2012. Et finalement, il accompagne un groupe de l’Âge d’or dont certains membres sont plus jeunes que lui. De plus, auprès de sa fraternité, il s’implique à la cuisine, etc.

Et en terminant cette entrevue il me disait avec toute sa sincérité : « J’aime mon travail. Je demande pardon à ceux que j’aurais pu offenser, et je pardonne à ceux qui m’ont offensé, sans oublier de prier pour eux tous.

Parabens Réal. Muita Felicidade

Muitos anos de vida.

Bois sec ou arbre vivanton me disait dernièrement : « Il y a deux façons d’exister dans le paysage ; ou comme poteau de téléphone (piquet sans racine), ou comme un arbre verdoyant qui tire du sol la sève nourricière, il grandit et rapporte de bons fruits. »

Jésus dirait peut-être : « Le Royaume des cieux est comparable à un arbre qui pousse sans bruit et constamment. Il se nourrit par ses racines et s’élance vers le ciel. Il procure de l’ombre aux passants, enjolive la nature et produit des fruits savoureux. Regardez les oiseaux du ciel ; ils viennent nicher dans ses branches. »

Toi, es-tu piquet sec ou arbre vivant dans le grand Jardin de ton Dieu ?…

Constant Lamoureux, RSV

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L’insécurité généralisée à l’est de la rd du Congopar Gélase Katembo, novice

les conséquences de cette politique, l’Est du pays aboutira, plusieurs années plus tard, à des problèmes d’identité, notamment à la revendication de la nationa-lité congolaise comme si la nationalité pouvait s’obtenir collectivement ! Disons tout de suite que les droits, aussi bien fonciers que politiques, réclamés par ces réfugiés, avaient été formellement interdits par le gouvernement belge.

Autre raison, en 1994, pendant le génocide du Rwanda, les deux Kivu ont reçu d’autres réfugiés hutus et tutsis. Le Rwanda, qui craignait la vengeance des Hutus chassés du pouvoir, a continué à insécuriser la région, ce qui, pour des raisons politiques et géostratégiques, a provoqué la guerre du Rwanda au Congo.

Enfin, on peut se demander pourquoi ce ne sont que les Tutsis qui sont cités majoritairement dans ces conflits à l’Est ? Ces questions semblent très perti-nentes pour la compréhension sérieuse de ce dossier. En effet, depuis longtemps dans cette région des grands lacs, les Tutsis se sont servis d’un « mythe Hamite » selon lequel les Tutsis seraient supérieurs aux Hutus et aux autres Bantous parce qu’ils seraient les véritables descendants des Blancs. Cela justifierait leur raison d’agression du Congo, peuplé de Bantous. Ainsi la question qui était jadis la recherche de l’espace vital et de l’identité va se transformer en une revendication d’un État qui serait sous contrôle de la race supérieure tutsie, car le Congo est trop grand et trop riche pour appartenir et être dirigé par des ignares Bantous !

Face à ce racisme exacerbé, les autochtones du Kivu se mobilisèrent et continuent à se mobiliser pour tenir en échec ce projet impérialiste qui viserait la balkanisa-tion du pays. Il faut dire que les Kivutiens ont toujours manifesté le désir de conserver l’intégrité territoriale de ce pays avec leurs organisations locales. C’est

J’arrive tout juste de l’Est de la République Démo-cratique du Congo où l’insécurité règne en maître absolu comme si ce peuple s’était voué à des espiègle-ries criminelles. Je profite de cette occasion pour remercier les RSV qui m’ont accordé un temps de vacances en famille. C’est dans cette partie du pays marqué par le cycle infernal des guerres que je suis né et que j’ai grandi avant de connaître les RSV. Depuis une décennie, cette région est secouée par des guerres qui dérangent tout le monde. C’est pour dire que cette question n’est pas nouvelle ! Peut-être que l’origine de ces conflits est-elle mal comprise dans l’opinion aussi bien nationale qu’internationale. Certains pensent que la cause se trouve dans le triba-lisme, dans une cohabitation qui serait sans issue entre Tutsis, Hutus et d’autres ethnies du Nord et Sud Kivu. D’autres, par contre, estiment que cette guerre n’est pas particulière au Congo ; elle nous serait imposée par le Rwanda qui utiliserait la protection de la tribu minori-taire tutsie comme prétexte pour expliquer l’agression du Congo par le Rwanda et par ses alliés, l’ouganda et le Burundi. À l’issu de la présente lecture, le lecteur pourra se demander pourquoi une telle instabilité se retrouve encore et toujours, à l’Est de la RDC.

Cette interrogation peut nous aider à trouver des inter-prétations plus objectives à la présence des immigrés ou réfugiés rwandais « au cœur de la crise congolaise ». Disons d’abord que ce sont les deux Kivu qui, entre 1920 et 1950, ont accueilli des Rwandais en quête de pâturages pour leur bétail et de travail agricole salarié dans les agro-industries congolaises. Il s’en est suivi, au Congo, une insécurité causée par la présence rwan-daise dans ces régions hospitalières. Cette transplanta-tion de Rwandais au Congo était organisée par la politique coloniale belge qui voulait créer des colonies de peuplement. La Belgique, n’ayant pas bien évalué

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à l’armée nationale de « reculer » pour laisser aux assaillants la priorité de prendre le territoire sous leur contrôle et l’administration semblent avoir priorité.

C’est le cas actuellement du Territoire de Rutsuru qui est entre les mains des mutins appelés « M. 23 » qui l’occupent depuis déjà plusieurs mois, faisant payer des taxes douanières aux opérateurs économiques comme si l’on se trouvait déjà dans un autre pays ! Dans des situations bizarres comme celles-ci, la terreur est si grande que l’on ne sait pas à quel moment on peut être visité par des bandits armés. Qu’on se trouve aux champs, à l’église, en réunion quelconque, personne n’est assuré de son retour tranquille et paisible à son domicile. Dans sa propre maison, on n’est pas en sécu-rité, dehors non plus car, après 18 h, il ne faut plus y rester par crainte d’être assassiné ou pillé.

Enfin, l’objet de notre communication a consisté en la description et en l’analyse de la situation sécuritaire aux Nord et Sud Kivu, deux provinces de la RDC dans sa partie Est. En parlant de l’insécurité généralisée, nous voudrions dire par là que ce peuple vit dans une psychose totale due aux menaces perpétuelles dans son vécu quotidien. Les gens sont devenus des réfu-giés dans leur propre pays suite au manque de paix : le pillage des biens des civils, les enlèvements et assassi-nats ciblés, les femmes et filles violées sont autant de maux qui constituent la détérioration de la situation humanitaire dans ces provinces. Tout cela entrave la libre circulation dans le pays. on peut voir cette réalité dans un tronçon, par exemple de plus ou moins 40 km où l’on est obligé d’exhiber la carte d’électeur (l’équiva-lent de la carte d’identité au Congo) plus de 6 fois et chaque fois, moyennant une somme d’argent. Ce genre de tracasseries militaires s’accompagne toujours de menaces de mort ; le fouet et les tortures corporelles étant considérés dans ce cas comme le moindre mal.

En raison de cette insécurité, on déplore plus d’une personne tuée, d’une femme violée et plusieurs biens pillés par jour. Il revient donc aux Nations unies, aux gouvernements congolais et rwandais de gérer ce dossier avec plus de responsabilité afin que la dignité humaine soit respectée et que l’Est retrouve la paix, la sécurité sans condition. Tel est le vœu que nous formu-lons en faveur de nos frères et sœurs qui meurent chaque jour à cause da la méchanceté humaine et de la méconnaissance du Dieu-amour.

l’auto-défense contre les étrangers qui veulent la parti-tion du pays. Mais le constat amer qu’on peut faire, c’est que ce peuple a déjà perdu la confiance en son gouvernement en vue de la résolution de cette crise. Pire encore, il soupçonne les autorités congolaises d’être des traîtres, même au plus haut sommet de l’Etat.

Le monde soi-disant libre, n’est pas en reste dans cette trahison. Car selon les victimes de la guerre, l’on ne peut pas comprendre la détérioration de la vie humaine dans une région sur-inondée d’agents de l’oNu et par des oNG qui sont aussi accusées de participer au ravi-taillement des rebelles par des armes et par le trafic illégal des minerais de la région. En conséquence, parce qu’on ne sent pas la volonté sincère des gouver-nements congolais et rwandais ni de la communauté internationale à chercher une solution à ces conflits, et aussi longtemps que les auteurs de ces crimes restent impunis, tant au plan national qu’international, il ne pourra pas y avoir de paix.

Tout se déroule comme si l’on voulait maintenir la population dans cette instabilité perpétuelle en vue de susciter en eux un découragement et favoriser ipso facto la balkanisation du pays. Comment le gouverne-ment congolais peut-il échapper au soupçon d’être complice dans la déstabilisation de l’Est ? Des considé-rations très simples, faciles à comprendre et par les intellectuels et par les innocents prouvent à suffisance son degré de complicité. Par exemple, on peut remar-quer que les frontières entre le Rwanda et la RDC ne sont pas protégées alors que l’on sait très bien que c’est le Rwanda qui déstabilise la région.

une autre considération concerne la question de l’identification dans le recensement des citoyens congolais. on vit dans une confusion totale. on ne sait pas qui est Congolais et qui ne l’est pas. Alors on iden-tifie les personnes suivant leur aspect physique. Ce mode d’identification suscite de nouvelles polémiques. Enfin, l’incompréhensible cas demeure celui des mili-taires non salariés sur le front à l’Est et le détourne-ment de leur nourriture par les généraux qui restent malgré tout les protégés du gouvernement central de Kinshasa, la capitale. À cela s’ajoute la mutation immé-diate des généraux qui semblent maîtriser les rebelles ; en revanche, le maintien des généraux qui n’affrontent pas réellement les rebelles et préfèrent donner l’ordre

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Terres d’espérance — Les Religieux de Saint-Vincent-de-Paul12

Éricpar Michel Legendre, RSv

au dispensaire, on lui appliqua une potion de produits naturels et on protégea la plaie avec un linge attaché à la jambe.

Pendant qu’Éric pleurait, je compris que l’infection était entrée. L’inflammation en était le signe. Je lui demandai d’attendre un peu.

Je suis allé parler avec le P. Richard pour l’informer de la situation et lui proposai que j’étais prêt à aller avec lui à la Clinique de l’Est, notre hôpital pour le diocèse et pour la communauté. Richard, par prudence, avant d’accepter, me suggéra de prévenir sa mère pour avoir son assentiment. un jeune partit en courant pour aller à la maison porter le message, heureux d’accomplir cette mission. C’est la grande sœur d’Éric qui revint avec l’envoyé, la maman étant occupée à préparer le repas du soir. Je demandai à la grande sœur, Éric avait douze ans, de venir avec nous. Nous montâmes dans la « land-rover » pour nous diriger vers la clinique. Le soir, entre chien et loup, approchait lentement.

Le service de jour était terminé à la clinique. un infir-mier et une infirmière de garde nous reçurent dans un appartement d’accueil. Étant connu par eux, ce ne fut pas compliqué. Seul problème, il ne leur restait aucune injection d’anti tétanos. on me suggéra d’aller, à dix minutes de là, à la Clinique Tély, acheter une fiole pour l’injection. Le responsable de nuit à la clinique m’in-forma, après vérification, qu’on n’en avait plus, ayant donné la dernière dans l’après-midi. L’infirmière de garde me recommanda d’aller à la pharmacie située sur la rue qui conduit chez les Pères de la Consolata, à côté de la compagnie d’aviation « Air Service ».

Il fait maintenant nuit. En arrivant à l’endroit indiqué, nos doutes et nos peurs disparaissent au moment où j’entends une réponse affirmative : il y en a ! une fois le paiement effectué, nous rentrons à la Clinique de l’Est pour faire le travail.

C’était tout près de la tombée du jour : 17 h 30. Habituellement, les groupes avaient terminé leurs réunions, les élèves de l’École étaient passés pour lire les nouvelles ou regarder les photos sur le tableau d’affichage de la paroisse, les mamans de retour du marché ou les papas rentrant du travail coupaient sur le terrain de la mission pour regagner leur maison.

Ce jour-là, un groupe de jeunes, les Kizito-Anurite, traî-naient encore au bord de la barza, tout près de mon bureau. Je les entendais parler. Y avait-il un problème entre eux ? Intrigué, je me présentai dehors et, les ayant approchés, un des leurs me montra Éric qui pleu-rait. Me penchant vers lui, il était en bas de la galerie, il me fit signe qu’il était blessé, sur le devant de la jambe droite, au niveau du tibia.

Deux ou trois de ses amis commencèrent à me raconter, à tour de rôle, chacun ajoutant un élément à l’histoire, pour que je comprenne bien de quoi il s’agissait. La veille dans l’après-midi, ils étaient en train de jouer. Ayant découvert que c’était lui, l’auteur du méfait, ils se mirent à le poursuivre pour le rattraper. Ne faisant ni un ni deux, comme une antilope, il se dirigea au bas de la pente de la source qui coule dans le quartier et se trouva obligé, pour échapper à ses joyeux adversaires, de passer à l’endroit où on avait jeté des palmes séchées, ornées de grosses épines de chaque côté de la nervure centrale. L’une d’elles lui entra sous la peau, devant le tibia, et y déposa, bien sûr, des saletés. La « bête » était vaincue. on le laissa entrer à la maison en boitant.

Sa maman fit sortir l’épine (un pouce et demi), et, comme on n’avait pas d’argent pour aller soigner cela

Michel Legendre, rsv

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Les Religieux de Saint-Vincent-de-Paul — Terres d’espérance 13

le félicitons et lui manifestons notre satisfaction. Le sourire est revenu sur ses lèvres. À son âge, Éric vient de vivre une étape qui le fait grandir, un moment important qui fait partie de son initiation à la vie. Il peut entrer dans l’âge adulte.

Nous avons, nous aussi, vécu une expérience impor-tante : la force de la parole, la parole efficace, qui porte fruit. Sans violence, seulement avec nos mots, nous l’avons conduit à l’acceptation. Grande et vivante est la parole pertinente.

L’infirmier complète la démarche en nous donnant une prescription d’antibiotique pour arrêter et éliminer l’infection dans sa jambe. un autre apprentissage pour Éric. Dans la nuit, nous rentrons à la mission St-Rosaire et lui, avec sa sœur, fait le chemin à pieds, pour rentrer à la maison, dans la paix. Expérience initiatique.

Éric était un jeune discret. Quelques mois plus tard, nos regards se sont croisés et, voyant un léger sourire sur son visage, je compris qu’il était heureux, qu’il me disait merci et qu’il pouvait avancer dans la vie.

Dans la petite salle d’accueil de nuit, comme il n’y a pas d’électricité, nous en sommes réduits à la lampe à pétrole, dite ici « lampe tempête », car on peut marcher sur la route et dans le vent sans que la flamme ne s’éteigne. Cette lumière au milieu de nous, fait des ombres sur les murs : mystère.

Nous sommes en cercle. Éric est à côté de sa sœur, d’un ou deux ans plus âgée, lui en a douze. L’infirmier prépare l’aiguille en faisant, par une chiquenaude, sortir des bulles d’air. Au moment où il s’approche, Éric commence à manifester bruyamment son refus, sa peur, son opposition à cet acte violent. L’Infirmier se retire un peu. Alors commence la ronde des paroles pour sécuriser Éric, faire fuir la crainte. « Nous sommes venus pour te soigner, il n’y a pas de danger, ça ne te fera pas mal. » Deuxième essai de la part de l’infirmier : deuxième échec devant les cris et les gestes de refus. « Tu dois recevoir cette injection c’est pour te guérir. Ta sœur est là, ta maman pense à toi », lui dis-je. Troisième essai : impossible. Je me concerte avec l’infirmier, en aparté : « Au besoin, nous allons, à plusieurs, l’immobi-liser, s’il résiste encore. » un temps de calme. Je lui dis : « Éric, si tu ne reçois pas cette injection, tu peux mourir. Ce sera une grande peine pour nous tous. » L’infirmier se met tout à côté d’Éric. Grand temps de calme : aucun bruit. Voyant que notre jeune semble tranquille, l’infirmier lui prend doucement le bras et fait l’injection au niveau de l’épaule. Comme un agneau, Éric a vécu ce moment tant redouté. C’est la joie pour tous et nous

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Terres d’espérance — Les Religieux de Saint-Vincent-de-Paul14

Joseph (2e épisode)par Michel Legendre, s.v.

passer à autre chose pour gagner sa vie. Joseph se forma une équipe de plus jeunes qui à leur tour pren-draient la route, pilotés et encadrés par lui, petite PME commerciale dans un pays où règne l’économie infor-melle qui repose sur l’initiative à portée de main.

Joseph devient ainsi une référence pour sa famille élargie, capable d’assumer des responsabilités, comme à l’occasion des deuils, des naissances, entraide, conseils dans des décisions importantes.

La conservation prit tout son temps pour se retrouver et renouer les liens d’amitié.

un jour que je passais en vélo dans son quartier, il me fit signe. Je m’arrêtai et il me demanda un rendez-vous, que nous avons convenu pour le lendemain.

Quand il arriva au rendez-vous, son air sentait la préoc-cupation, l’épreuve. Il me raconta que, ayant fait une mise de côté de petits profits se montant à deux cent cinquante dollars en argent américain, il le dissimula dans un coin de la maison que lui seul connaissait. À Isiro, il n’y a pas de banque. Il y eut un deuil dans la famille. Le soir du deuil, qui dure toute la nuit et jusqu’à l’inhumation le lendemain, il y alla avec sa femme et les enfants en fermant la porte de la maison avec un cadenas, comme d’habitude. Au retour, le lendemain, vers midi, il constata qu’on avait volé son argent et son vélo pendant la nuit. Imprudence de sa part ? Il se retrouvait à zéro. La solution a encore été, une fois de plus, la solidarité et l’entraide secours pour un temps et la poursuite du travail avec sa petite équipe de « trans-porteurs à vélo ». Souffrance. Il ne m’a rien demandé en don, seulement ma présence et mon amitié. Il y a des « grands » qui tiennent le monde debout.

À la demande du père Pierre Lévesque, provincial, j’étais retourné à Isiro, à la Paroisse St-Rosaire, au début du mois d’août 2003. or, un beau jour de novembre suivant, je vois arriver à mon bureau, mon bon ami Joseph, qui avait appris que j’étais de retour. Si la joie des retrouvailles existe, c’en fut toute une !

Devenu père de famille, après sa guérison et pour gagner sa vie, il joignit une équipe de « transporteurs à vélo » qui faisaient en trois semaines environ, aller-retour, la distance Isiro-Ariwara, six cent trente kilo-mètres aller, avec une charge de bidons d’huile de palme à vendre là-bas, à la frontière de l’ouganda et, avec cet argent de la vente, acheter des biens de première nécessité : piles pour radio et lampe torche, allumettes, cure-oreilles, diachylons, bics, articles scolaires, bonbons, etc. Ces articles se vendent dans les petits comptoirs du marché ou des rues de la ville.

Il faut faire partie d’une équipe de cinq ou six pour se protéger et se défendre devant les militaires non-payés qui se présentent comme des responsables du main-tien de l’ordre et qui rançonnent à qui mieux mieux. Sur la route de terre, de sable, de gravillon, d’argile, travaillée par les pluies (mars à novembre), les routiers se tracent une piste zigzagante pour éviter les affleure-ments de pierres, les trous d’eau et garder l’équilibre dans les zones argileuses, montant les côtes à pied à côté du vélo chargé.

Les étapes de repos, pour boire, pour manger ou pour passer la nuit sont prévues parce qu’on connaît les gens où on arrête, qui s’offrent par solidarité à l’accueil de ces expéditions, témoignage d’un sens humain merveilleux : c’est l’évangile de Jésus, sans toujours le nommer.

Dix ans de ces voyages, cela devient un avertissement sérieux pour les jambes et les genoux : usure. Il faut

Michel Legendre, s.v.

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Les Religieux de Saint-Vincent-de-Paul — Terres d’espérance 15

Un an d’histoire à sao Gonçalopar Michel Proteau, RSv

Après un an de cette aventure, le groupe est en démarche pour se transformer en coopérative. Le groupe, qui est maintenant bien vu et reconnu dans la petite commu-nauté, et qui suscite beaucoup d’intérêt, a contribué à une meilleure conscientisation pour protéger l’environ-nement et, au cours de l’année, a pris l’initiative d’orga-niser quelques événements dans le quartier.

Comme résultat tangible, nous commençons la nouvelle année avec une douzaine de nouveaux membres. C’est certainement un signe que la petite fabrique a bien rempli sa mission.

Mais voilà de nouveaux défis : l’espace ne supportera pas autant d’associés en même temps ; et, une plus grande production (entre vingt et trente douzaines de balais par semaine) nécessitera davantage de bouteilles, notre matière première. Il nous faudra améliorer le système de cueillette et voir à ce qu’une si grande équipe puisse travailler avec cohésion.

Merci à nos vincentiens de Québec, collaborateurs discrets de ce projet.

Quelques femmes, prenant conscience de leur temps libre, et questionnées par l’attitude d’un professeur de la petite école qui éveille ses étudiants à la nécessité de protéger le milieu ambiant, décident de faire équipe pour, ensemble, élaborer un projet.

Le P. André, curé à ce moment là, me demande de leur venir en

aide. Ainsi en octobre 2011, je me rends dans cette petite communauté de la paroisse Sao Gonçalo, avec Suzanne (une québécoise en stage) pour donner une initiation à la fabrication de balais à partir de bouteilles de plastique recyclables, en l’occurrence, des bouteilles Pepsi.

L’équipe initiale était composée de 7 femmes et un homme. À mon arrivée à Sao Gonçalo en avril 2012, je me joins à la petite équipe qui, malgré plusieurs diffi-cultés rencontrées, demeure très fidèle. L’année 2012 se termine avec 7 de ses membres fondateurs, le huitième ayant été remplacé au cours de l’année.

La principale difficulté a été de vivre avec les préjugés : sortir de la routine commune et de l’individualisme pour s’engager dans un travail d’équipe ; travailler au recyclage, en échange d’un revenu minime. un autre défi fut de trouver un local approprié (ils en sont au troisième local) et de garantir l’équipement nécessaire pour travailler. Sur ce point, nos vincentiens de Québec ont garanti le nécessaire. Enfin, la mise en marché demeure toujours un défi pour une unité de production.

Michel Proteau, rsv

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Au père Lasfargues et aux frères Tardé et Cointepas qui viennent de partir en mission en Amérique, à Québec, le frère Clément Myionnet leur écrit ces mots d’encouragement :

« Vous avez une belle mission à remplir, Dieu vous y a appelés, à vous de vous en rendre dignes. Mais sachez bien, mes bons et excellents frères, que c’est par l’humilité, l’abnégation, la petitesse, la mortification, la prière, qu’on arrive à faire quelque chose de bon pour la plus grande gloire de Dieu. Adieu, mes bons frères. Adieu, dans les Cœurs de Jésus et de Marie, vivons, travaillons et mourons.Votre vieux père qui vous aime. Clt Myionnet » (L. 190, 1885-01-10)

mars 2013

Vol. 37, numéro 1

Merci Merci Merci

Madame, Monsieur,

C’est avec beaucoup de plaisir que nous venons vous remercier pour vos généreux dons à l’occasion du temps des fêtes de l’année 2012 en faveur de nos missions. Au nom de nos missionnaires du Congo et du Brésil et en mon nom personnel, recevez nos remerciements les plus sincères.

Votre participation pour soutenir nos missions nous encourage à continuer notre action missionnaire dans des milieux très pauvres et pas toujours faciles. Les Religieux de Saint-Vincent-de-Paul canadiens font leur large part pour les aider avec des fonds limités. Étant donné l’aide financière de chacun(e), nous devenons un élément de transformation et de progrès pour ces différents pays où nous œuvrons.

La solidarité est le nom actuel de la charité dans une société d’inégalité ; surtout entre les pays du premier monde, au bien-être assez généralisé, et ceux du tiers-monde, où la misère est trop présente chez des millions de gens semblables à nous. Que Dieu Notre Père, auteur de tout bien, vous comble de paix pour ce beau geste de partage, nous souvenant « qu’il y a plus de joie à donner qu’à recevoir ».

Soyez, d’autre part, assuré(es) que nos missionnaires vous gardent une large part dans leurs prières et à la messe que nous célébrons chez nous, à vos intentions, à tous les mois.

Veuillez agréer, Madame, Monsieur, notre reconnaissance et croire en nos sentiments les meilleurs.

Rodrigue Morin, s.v. Trésorier.

Port de retour garantiLES CHARITÉS R.S.V.2555, chemin Ste-FoyQuébec (Québec) G1V 1T8– Société canadienne des postes– Envoi de publication canadienne– Numéro de convention 40051831– Imprimé à taxe réduite– Port Payé à Québec

Missionnaires au Brésil : PP. Léo Ducharme, Gabriel Fortier, Clet Leclerc, Julien Masson, Michel Proteau, F. Paul-Aimé Hamel.

Missionnaires au Congo : PP. Marc-André Couture, Michel Legendre, FF. Michel Lavoie, Jacques Viger.