RÉCITS DE CRÉATION ; CRÉATION...

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76 © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 6 e – Livre Ressources THÈME 3 RÉCITS DE CRÉATION ; CRÉATION POÉTIQUE « Au commencement, il y avait… » ou plutôt, on pense qu’il pouvait y avoir… Le discours scientifique lui-même se livre encore à de multiples conjectures. Alors, comment aborder, sans heurter les consciences, la notion de création du monde, sans en faire une simple mythologie, sans, non plus, lui donner un caractère « sacré » et catégorique qui n’appartient qu’à la sphère privée de la religion ? La manière dont les programmes proposent l’étude des récits de création nous ouvre une voie, dans la mesure où les univers imaginés par les poètes s’intègrent dans le même thème. Il importe donc de trouver un équilibre satisfaisant dans la manière de présenter des légendes fondatrices propres aux cultures polythéistes et les livres de référence des trois principales religions monothéistes, à savoir la Bible, essentiellement l’Ancien Testament, et le Coran. Notre choix est clair : conformément aux textes officiels, nous proposons d’aborder tous les textes, quels qu’ils soient, sous l’angle littéraire et culturel. Or, la Bible a influencé l’art et la littérature en Occident, y compris dans des expressions du langage courant. Construire une culture commune à tous les élèves qui fréquentent l’école, leur donner le bagage nécessaire pour qu’ils puissent, par exemple, poursuivre des études en sciences humaines, littéraires en particulier, c’est faire en sorte qu’ils aient accès à des contenus qui, pour certains d’entre eux, sont loin d’une culture d’origine. Les manuels Jardin des Lettres ont comme ambi- tion de donner à tous les élèves qui les utilisent ces contenus permettant de comprendre des textes dont l’implicite leur échappe s’ils ne reconnaissent pas certaines allusions bibliques – au lycée, lire Voltaire sans connaitre la Bible n’est guère possible ! Par ailleurs, des siècles d’art restent inaccessibles si la lecture des œuvres, qu’il s’agisse d’architecture, de peinture ou de sculpture, ne s’accompagne pas d’une connaissance des principaux épisodes de la Bible. C’est d’ailleurs sous cet angle culturel et intertextuel qu’il est intéressant de mettre en parallèle certains passages du Coran, afin que les élèves mesurent bien à quel point des ponts existent entre ces textes. En posant d’emblée et de manière claire le cadre de notre étude, il est alors possible d’étudier un nombre conséquent d’ex- traits, en lien direct avec l’histoire des arts. Un dossier consacré à l’empreinte biblique dans les expressions du quotidien permet aux élèves de s’approprier des textes qui peuvent leur sembler éloignés de leur langage et de leur imaginaire. Rendre aisée la circulation dans ces extraits, leur donner une familiarité, créer une proximité culturelle pour tous, tel est notre but. Mais c’est aussi une volonté sans cesse réaffirmée pour Jardin des Lettres d’ouvrir à toutes les cultures, et d’en montrer la richesse littéraire. Aussi avons-nous choisi une étude de la première épopée connue, celle de Gilgamesh, car il est intéressant que les élèves sachent à quel point le berceau mésopotamien a été une source de civilisation à laquelle nous pouvons encore puiser. Le dossier sur les récits de création à travers le monde répond à ce même besoin de montrer qu’à travers tous les continents, des récits riches de poésie, d’imagination, avec parfois des convergences, ont été produits par les hommes. Il nous semble important, en effet, de ne négliger aucun continent car ce sont bien des citoyens du monde que nous formons à l’école. Il est alors logique que la création poétique fasse suite à ces récits de création car sa dimension sensible, imaginative, est aussi un éclairage sans cesse renouvelé sur le monde qui nous entoure. Nous avons mis l’accent sur la dimension sensorielle de la poésie, trop souvent proposée de manière technique. L’entrée thématique par les éléments, l’appropriation des textes avant tout par le rythme et la voix, la dimension visuelle mise en valeur par les calligrammes mais aussi par la proposition d’une anthologie illustrée sont autant de pistes pour rendre sensible la poésie, en faire la traduction directe d’une émotion fixée par les mots, à la manière des haïkus. Notre souhait est qu’un tel thème, en rassemblant les récits des origines, en faisant découvrir les textes fondateurs, en montrant que l’univers de la poésie est sans limites, fasse partager à tous les élèves l’espace de l’imaginaire par-delà les dogmes et les certitudes.

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THÈME 3

RÉCITS DE CRÉATION ; CRÉATION POÉTIQUE

« Au commencement, il y avait… » ou plutôt, on pense qu’il pouvait y avoir… Le discours scientifi que lui-même se livre encore à de multiples conjectures. Alors, comment aborder, sans heurter les consciences, la notion de création du monde, sans en faire une simple mythologie, sans, non plus, lui donner un caractère « sacré » et catégorique qui n’appartient qu’à la sphère privée de la religion ? La manière dont les programmes proposent l’étude des récits de création nous ouvre une voie, dans la mesure où les univers imaginés par les poètes s’intègrent dans le même thème. Il importe donc de trouver un équilibre satisfaisant dans la manière de présenter des légendes fondatrices propres aux cultures polythéistes et les livres de référence des trois principales religions monothéistes, à savoir la Bible, essentiellement l’Ancien Testament, et le Coran.

▶ Notre choix est clair : conformément aux textes offi ciels, nous proposons d’aborder tous les textes, quels qu’ils soient, sous l’angle littéraire et culturel. Or, la Bible a infl uencé l’art et la littérature en Occident, y compris dans des expressions du langage courant. Construire une culture commune à tous les élèves qui fréquentent l’école, leur donner le bagage nécessaire pour qu’ils puissent, par exemple, poursuivre des études en sciences humaines, littéraires en particulier, c’est faire en sorte qu’ils aient accès à des contenus qui, pour certains d’entre eux, sont loin d’une culture d’origine. Les manuels Jardin des Lettres ont comme ambi-tion de donner à tous les élèves qui les utilisent ces contenus permettant de comprendre des textes dont l’implicite leur échappe s’ils ne reconnaissent pas certaines allusions bibliques – au lycée, lire Voltaire sans connaitre la Bible n’est guère possible ! Par ailleurs, des siècles d’art restent inaccessibles si la lecture des œuvres, qu’il s’agisse d’architecture, de peinture ou de sculpture, ne s’accompagne pas d’une connaissance des principaux épisodes de la Bible. C’est d’ailleurs sous cet angle culturel et intertextuel qu’il est intéressant de mettre en parallèle certains passages du Coran, afi n que les élèves mesurent bien à quel point des ponts existent entre ces textes.

▶ En posant d’emblée et de manière claire le cadre de notre étude, il est alors possible d’étudier un nombre conséquent d’ex-traits, en lien direct avec l’histoire des arts. Un dossier consacré à l’empreinte biblique dans les expressions du quotidien permet aux élèves de s’approprier des textes qui peuvent leur sembler éloignés de leur langage et de leur imaginaire. Rendre aisée la circulation dans ces extraits, leur donner une familiarité, créer une proximité culturelle pour tous, tel est notre but.

▶ Mais c’est aussi une volonté sans cesse réaffi rmée pour Jardin des Lettres d’ouvrir à toutes les cultures, et d’en montrer la richesse littéraire. Aussi avons-nous choisi une étude de la première épopée connue, celle de Gilgamesh, car il est intéressant que les élèves sachent à quel point le berceau mésopotamien a été une source de civilisation à laquelle nous pouvons encore puiser. Le dossier sur les récits de création à travers le monde répond à ce même besoin de montrer qu’à travers tous les continents, des récits riches de poésie, d’imagination, avec parfois des convergences, ont été produits par les hommes. Il nous semble important, en eff et, de ne négliger aucun continent car ce sont bien des citoyens du monde que nous formons à l’école.

▶ Il est alors logique que la création poétique fasse suite à ces récits de création car sa dimension sensible, imaginative, est aussi un éclairage sans cesse renouvelé sur le monde qui nous entoure. Nous avons mis l’accent sur la dimension sensorielle de la poésie, trop souvent proposée de manière technique. L’entrée thématique par les éléments, l’appropriation des textes avant tout par le rythme et la voix, la dimension visuelle mise en valeur par les calligrammes mais aussi par la proposition d’une anthologie illustrée sont autant de pistes pour rendre sensible la poésie, en faire la traduction directe d’une émotion fi xée par les mots, à la manière des haïkus.

Notre souhait est qu’un tel thème, en rassemblant les récits des origines, en faisant découvrir les textes fondateurs, en montrant que l’univers de la poésie est sans limites, fasse partager à tous les élèves l’espace de l’imaginaire par-delà les dogmes et les certitudes.

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THÈME 3 RÉCITS DE CRÉATION ; CRÉATION POÉTIQUE

PARCOURS UNE ŒUVRE INTÉGRALE L’Épopée de Gilgamesh p. 128 à 135

OBJECTIFS ET DÉMARCHE DU PARCOURSProblématique : Comment un grand texte fondateur amène-t-il le lecteur à réfl échir sur la condition humaine ?▶ Le texte de L’Épopée de Gilgamesh s’inscrit de façon naturelle dans le troisième grand thème du programme de 6e, « Récits de création ; création poétique ». En eff et, il s’agit du premier récit de création de l’histoire de l’humanité. Il met en jeu des mythes qui irriguent les récits grecs comme la Bible. Il s’interroge sur ce qu’est la création d’un homme, Enkidu, et sur l’orgueil des humains.▶ La traduction choisie rend compte de l’aspect incantatoire du texte. Les refrains qui le ponctuent lui donnent une puissance poétique qui n’est pas nécessairement présente dans les versions plus simplifi ées.▶ Les extraits sélectionnés peuvent facilement être mis en regard avec des textes de la Bible (création d’un homme, découverte de la connaissance, déluge, perte de l’immortalité…) Les petits encadrés « Le sais-tu ? » le rappellent régulièrement. On peut choisir, si on le souhaite, d’étudier ce chapitre après avoir étudié des extraits de la Bible. Cela permet ainsi de situer le texte sacré dans une continuité historique et culturelle et de s’éloigner, par ce biais, des analyses religieuses.▶ Ce chapitre vise à permettre aux élèves :– de découvrir le genre de l’épopée ;– d’enrichir leurs connaissances de l’Antiquité ;– de travailler sur les fi gures de style ;– de repérer des faits de style récurrents et structurants (refrains, appositions…) ;– de saisir la portée morale d’un mythe ;– de réfl échir à sa réécriture et à sa transmission.

ORGANISATION DU CHAPITRE ET CHOIX DES AXES DE LECTURELes textes de ce parcours sont essentiellement centrés sur l’amitié entre Gilgamesh et Enkidu et la quête personnelle de Gilgamesh. Les élèves peuvent en eff et facilement s’asso-cier aux personnages et à leurs motivations. Les sentiments des personnages sont universels : rivalité, aff ection, tristesse, peur, déception… On peut, à la fi n du parcours, demander aux élèves de résumer à l’oral les grandes étapes du récit en se fondant sur les émotions ressenties par les personnages.Les extraits choisis dessinent le parcours de Gilgamesh et font réfl échir à son destin. Gilgamesh est initialement présenté comme un être unique, « à la force accomplie ». Fils d’une déesse, il est presque aussi puissant qu’un dieu. On s’aperçoit, au fur et à mesure des textes, que Gilgamesh n’est au fond, malgré ses exploits, qu’un être humain confronté à ses limites. Il doit faire face à la mort de ses proches et accepter sa condi-tion de mortel.

Gilgamesh, un roi quasi divin p. 128

● Pistes didactiquesCet extrait présente le monarque Gilgamesh en le valorisant de façon très nette. Il contrastera avec le dernier extrait du parcours, qui insistera sur la fragilité du personnage. On peut travailler ici sur les adjectifs qualifi catifs, et notamment sur leur dimension méliorative. Une réfl exion peut s’amorcer sur leur position par rapport aux noms qu’ils qualifi ent : contraire-ment à l’usage habituel de la langue, ils les précèdent souvent dans le texte et sont ainsi particulièrement mis en valeur.

● Proposition d’hypothèse de lectureComment décrire un demi-dieu ?

La création d’un homme : Enkidu p. 129

● Pistes didactiquesCet extrait se prête à la comparaison avec la Bible : Enkidu est un homme créé à partir de l’argile, de la même manière qu’Adam. On peut, lors de l’étude de cet extrait, comparer Enkidu à Gilgamesh tel qu’il était représenté dans l’extrait pré-cédent. Gilgamesh et Enkidu deviendront en eff et les meil-leurs amis du monde. Rien pourtant ne les prédestinait à le devenir : Gilgamesh, demi-dieu, est plus qu’un homme, tandis qu’Enkidu est proche des animaux.

● Proposition d’hypothèse de lectureQuelles sont les caractéristiques d’un récit de création ?

Enkidu, de l’animalité à l’humanité p. 130

● Pistes didactiquesUne fois de plus, on peut tirer parti ici de la comparaison avec la Bible : Enkidu acquiert la parole – et donc une cer-taine forme de conscience et de connaissance – à partir du moment où il rencontre la Courtisane Lajoyeuse. Même si la rencontre est très charnelle et dénuée de toute idée de faute dans L’Épopée de Gilgamesh – contrairement à ce qui se passe dans la Bible –, la connaissance est liée à la présence d’une femme. L’extrait se signale par la présence massive de dialogues. Les paroles d’Enkidu font directement écho aux propos de la Courtisane, dont il reprend certaines for-mules. On peut faire repérer aux élèves ces similitudes, qui soulignent à quel point la Courtisane a de l’infl uence sur le jeune homme.

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● Proposition d’hypothèse de lectureComment un dialogue peut-il faire évoluer une intrigue ?

Le combat contre le géant Humbaba : l’épreuve de l’amitié p. 131

● Pistes didactiquesCet extrait a été choisi parce qu’il scelle l’amitié entre Enkidu et Gilgamesh, et surtout parce qu’il présente toutes les carac-téristiques de l’épopée. Les élèves devront particulièrement être attentifs aux procédés d’exagération et à la façon dont le poète introduit de la tension dans le texte.

● Proposition d’hypothèse de lectureQu’est-ce qu’un récit épique ?

De la perte d’un ami à la peur de la mort p. 132

● Pistes didactiquesL’extrait est constitué par les lamentations de Gilgamesh sur le corps d’Enkidu, son ami. Les élèves doivent percevoir un changement dans l’attitude et les sentiments de Gilgamesh. Se sentant auparavant invincible, il est saisi désormais par l’angoisse de la mort. Ce constat peut amener une discussion en classe sur l’intérêt du personnage de Gilgamesh : le lecteur s’associe-t-il plus facilement à lui lorsqu’il est présenté comme un héros invincible ou lorsqu’il commence à connaitre la peur ? Pourquoi ?

● Proposition d’hypothèse de lectureComment le personnage de Gilgamesh exprime-t-il sa dou-leur ?

La fi n d’un déluge p. 133

● Pistes didactiquesL’extrait a été une nouvelle fois choisi pour les similitudes qu’il présente avec un récit de l’Ancien Testament et du Coran. Il décrit en eff et un déluge et la façon dont un être humain, ici Utanapishtî, a survécu sur une arche avec sa famille, sauvant toutes les espèces animales qu’il a pu rassembler. On peut, à ce moment de la lecture, renvoyer aux textes p. 148 et 149 du manuel, qui racontent l’histoire de l’Arche de Noé dans la Bible et dans le Coran et discuter de l’infl uence de L’Épopée de Gilgamesh sur ces textes sacrés.

● Proposition d’hypothèse de lectureQuels sont les procédés poétiques qui permettent de mettre en valeur une histoire mythique ?

La perte de l’immortalité p. 134

● Pistes didactiquesCe dernier extrait donne sens à l’ensemble du récit de Gilga-mesh : le héros surhumain est confronté à la certitude qu’il va mourir un jour. Son orgueil disparait pour laisser place à la conscience de sa fi nitude. On peut réfl échir, à cette occasion, à la morale de l’épopée dans son ensemble.Une fois de plus, on peut rapprocher ce texte de la Bible : comme dans l’Ancien Testament, c’est un serpent qui est à l’origine de la perte de l’immortalité pour les hommes.

● Proposition d’hypothèse de lectureQu’est-ce qui rend Gilgamesh très humain ?

CORRIGÉS DES QUESTIONNAIRES ET DES EXERCICES

Gilgamesh, un roi quasi divin p. 128

Découvrir la présentation élogieuse d’un personnage1. Ce texte est écrit en vers. Il n’y a pas de strophes. Certains vers sont décalés.2. Voici des adjectifs qualifi catifs se rapportant à Gilgamesh : « exceptionnel » (v. 1), « célèbre, prestigieux » (v. 2), « preux » (v. 3), « puissant » (v. 9), « parfait, éblouissant » (v. 18). Ce ne sont que des adjectifs mélioratifs qui soulignent les grandes qualités du personnage.3. Les mots surlignés se rapportent tous au pronom person-nel « il » (v. 5) et sont séparés de lui par une virgule. Ils consti-tuent donc des appositions.4. Gilgamesh est le « Preux rejeton d’Uruk, / Buffl e à la corne terrible » (v. 3-4). Il est le « fi ls de Lugalbanga » (v. 13) et « l’en-fant de la Vache sublime : / Ninsuna-la-Buffl esse » (v. 15-16). Son origine est hors du commun : il est le fi ls d’un homme, Lugalbanga, et d’une déesse animale, Ninsuna-la-Buffl esse. Il s’agit donc d’un demi-dieu.5. On apprend que Gilgamesh est capable d’ouvrir « les passes des montagnes » (v. 20), de « creus[er] des puits / sur la nuque des monts » (v. 21-22), et qu’il a « explor[é] l’univers entier » (v. 26). Il cherche à atteindre l’immortalité, puisqu’il est « en quête de la vie-sans-fi n » (v. 27). Bilan 6. L’objectif de cette question est de mettre en jeu l’esprit de synthèse des élèves et leur capacité à reformuler le contenu d’un texte. Les élèves doivent souligner la force et la puissance exceptionnelles du héros, indiquer qu’il s’agit d’un

roi (« Le Roi, c’est moi, moi seul ! » v. 37) et rappeler son origine divine.

Ressource numérique Représentation du monde selon GilgameshCette activité permet de voir une carte du monde tel

qu’il est représenté dans l’épopée de Gilgamesh. On

demande aux élèves de déduire où se trouve un des

personnages, Utanapishtî, présent «  là d’où sort le

Soleil » (v. 25). Les élèves doivent se souvenir que le

Soleil se lève à l’Est. D’après la carte, Gilgamesh a donc

traversé la mer, l’eau mortelle, et a retrouvé Utanapishtî

en Orient.

ACTIVITÉ

La création d’un homme : Enkidu p. 129

Réfl échir sur l’humanité1. Pour créer Enkidu, la déesse Aruru donne forme à de l’ar-gile : « S’étant alors / Lavé les mains, / Elle prit un lopin d’argile / Et le déposa en la steppe : / Et c’est là, dans la steppe, / Qu’elle forma Enkidu-le-Preux » (v. 5-10). On peut lire avec les élèves, au moment de la correction de cette question, l’encadré « Le sais-tu ? », qui insiste sur le caractère récurrent de ce mythe et fait le lien avec la création d’Adam dans la Bible.

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2. Les vers 17-18 contiennent une comparaison. Les cheveux d’Enkidu sont comparés à un « champ d’épis » grâce à l’outil de comparaison « comme ». Enkidu est un personnage sau-vage et proche de la nature.3. Enkidu ressemble à un animal : il est « abondamment velu / Par tout le corps » (v. 13-14). Il ne vit qu’avec des bêtes au point de se saisir d’un comportement animal : « Il broutait » (v. 24).4. La fi n de l’extrait est structurée par la présence d’un refrain : « En compagnie des gazelles » (v. 23), « En compagnie de sa harde » (v. 25), « en compagnie des bêtes » (v. 28). Le poète insiste sur le fait qu’Enkidu se comporte réellement comme un animal. Bilan 5. Enkidu n’est pas tout à fait un être humain car il n’a jamais été au contact d’autres hommes. Il ne sait pas ce que c’est que vivre en société : « Ne connaissant ni concitoyens, / Ni pays » (v. 19-20). Il ressemble aux êtres avec lesquels il est en contact, les animaux.

▶ Lecture d’image

Étudier une illustration d’Enkidu1. Sur l’illustration de Julie Ricossé, Enkidu est représenté comme un animal. Ses mains sont griff ues et il se déplace à quatre pattes. Ses cheveux ressemblent à une crinière. Il montre ses dents comme le fauve qui avance à ses côtés.2. La composition de l’image lui confère du mouvement. Le bas de l’illustration est vide, tandis que le haut est occupé par des animaux multicolores. Les bras d’Enkidu débordent vers le bas de l’image, montrant que cet espace vide est prêt à être envahi. Un bras d’Enkidu est posé à terre, tandis que l’autre est relevé, en suspens : on devine qu’il est en train d’avancer à vive allure. Le fauve à côté de lui fait le même mouvement. Des traits de plume sous les personnages soulignent égale-ment leur vitesse. Ils sont tous orientés dans la même direc-tion.3. La dessinatrice a choisi de montrer les animaux en plon-gée. Le spectateur les surplombe, comme s’il était à hauteur d’homme, debout, et qu’il observait les animaux ramper et s’avancer vers lui. Les animaux semblent d’autant plus mena-çants.4. On demande ici aux élèves d’indiquer leur opinion : tous les points de vue sont donc acceptés à partir du moment où ils sont justifi és. Certains diront qu’Enkidu est bien représenté dans la mesure où, comme dans le texte, il ressemble à un animal. D’autres pourront dire que la dessinatrice l’a assimilé à un fauve alors qu’il semble plutôt adopter le comportement des « gazelles » (l. 23) dans l’épopée.

Enkidu, de l’animalité à l’humanité p. 130

Comprendre une métamorphose grâce à un dialogue1. À partir du moment où Enkidu a rencontré Lajoyeuse, les animaux s’en éloignent : « à la vue d’Enkidu, / Gazelles de s’en-fuir, / Et les bêtes sauvages / De s’écarter de lui » (v. 3-6). Tout se passe comme si les animaux sentaient qu’il était redevenu un homme. Ils ne le reconnaissent plus comme l’un des leurs.2. Enkidu semble immédiatement convaincu par les mots de Lajoyeuse. Il réutilise exactement ses mots dans son propre discours en évoquant Gilgamesh « À la vigueur accomplie, / Qui, pareil à un buffl e, / L’emporte sur les plus gaillards » (v. 25-28 et v. 38-41). Cela forme un refrain à la gloire de Gil-gamesh.3. Enkidu, dans sa réponse, utilise surtout le futur de l’indica-tif : « Je me mesurerai » (v. 42), « la lutte sera sévère » (v. 43),

« je proclamerai » (v. 44), « j’y changerai » (v. 47). Cet emploi montre qu’Enkidu est très déterminé et sûr de lui : il est cer-tain de pouvoir se mesurer à Gilgamesh.4. Enkidu veut prouver qu’il est plus fort que Gilgamesh : « Et je proclamerai, en plein Uruk : / “Le plus puissant, c’est moi ! ” » (v. 44-45). Il veut changer l’Histoire : « J’y changerai le cours-des-choses » (v. 47) en prenant sa place. Cependant, Enkidu sait au fond de lui que Gilgamesh ne sera pas un ennemi pour lui : « Clairvoyant, / Il se pressentait un ami » (v. 31-32). Bilan 5. Lorsque la Courtisane dit à Enkidu qu’il ne « savai[t] pas vivre » (v. 53), elle sous-entend, qu’avant de la rencontrer, il ne vivait pas comme un être humain. C’est le fait d’avoir rencontré un autre être humain qui lui permet de sortir de sa condition animale, de communiquer, d’apprendre l’usage de la parole et de la raison : « il avait mûri : / Il était devenu intelligent » (v. 9-10). On peut orienter les élèves, lors de cette question Bilan, vers l’encadré « Le sais-tu ? » : la thématique de l’homme devenant savant grâce à une femme est présente dans de nombreux mythes et religions.

Le combat contre le géant Humbaba : l’épreuve de l’amitié p. 131

Percevoir les étapes d’un combat surnaturel1. Humbaba n’est pas immédiatement visible, mais les traces qu’il a laissées derrière lui montrent qu’il est de taille impres-sionnante : « Allées et venues de Humbaba, / Y avaient laissé des pistes : / Des sentiers tracés droit, / Des chemins bien mar-qués. » (v. 7-10)2. Le temps utilisé dans les quatorze premiers vers est l’impar-fait de l’indicatif. Il a une valeur durative : il permet de décrire des actions qui durent longtemps. On imagine ici que les personnages ont passé du temps à observer le paysage, cher-chant les marques du passage d’Humbaba. Lorsque le géant apparait, le poète emploie le passé simple : « Gilgamesh, face à Humbaba, / Le frappa à la tête » (v. 15). Ce temps permet de rendre compte d’une action brève et brutale.3. Les vers 27 à 31 sont marqués par une répétition : le même mot, « vent », revient en tête de chaque groupe de mots. On peut donc parler d’anaphore. L’anaphore renforce l’eff et de liste de l’énumération des types de vents.4. Enkidu encourage Gilgamesh à tuer Humbaba avant que les dieux, furieux de les voir combattre leur protégé, ne s’en prennent à eux : « Écrase-le, / Avant qu’Enlil-le-Premier / N’en-tende son appel, / Et que les grands dieux / Ne soient furieux contre nous […] » (v. 44-48).5. L’illustration de Frantz Duchazeau souligne l’aspect mons-trueux et gigantesque d’Humbaba. Trapu et massif, il avance les poings fermés, menaçant. Son visage ressemble à un masque et est particulièrement inquiétant. Il est mis en valeur par la couleur et la lumière. Les silhouettes de Gilgamesh et d’Enkidu sont beaucoup plus petites et se situent juste sous le poing du géant, dans la partie inférieure gauche du dessin : les deux personnages semblent d’autant plus fragiles. Bilan 6. On devine souvent, dans cet extrait, la présence des dieux : « Et l’on voyait au loin / La Montagne des Cèdres, / Rési-dence de dieux, / Sanctuaire de la sainte Irnini. » (v. 11-14). Lorsqu’Enkidu commence à attaquer Humbaba, le dieu Sha-mash lui vient en aide : « Et Shamash contre Humbaba, / Fit lever de grandes tempêtes » (v. 25-26). Enkidu sait, de son côté, que le dieu Enlil protège Humbaba (v. 45). Lorsque Gil-gamesh tue le géant, les éléments naturels réagissent comme s’ils étaient animés par une divinité : « Aussitôt, d’épaisses ténèbres / S’abattirent sur la Montagne ! » (v. 55-56).

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De la perte d’un ami à la peur de la mort p. 132

Exprimer la douleur1. Gilgamesh donne des noms d’animaux à Enkidu : « Mulet vagabond, / Onagre du désert, / Panthère de la steppe » (v. 7-9). Cela lui convient bien dans la mesure où, lorsqu’il est né, il ne vivait qu’avec des bêtes.2. Au début de son discours, Gilgamesh s’adresse d’abord aux « Anciens de la cité » (v. 1), puis à Enkidu lui-même : « À pré-sent, quel est ce sommeil / Qui s’est emparé de toi ? » (v. 19-20).3. Gilgamesh répète souvent le nom d’Enkidu et insiste sur le fait qu’il s’agit de son ami : « mon ami » (v. 4, 7 et 10). Il prononce également plusieurs fois les noms qui le désignent : « Mulet vagabond, / Onagre du désert, / Panthère de la steppe » (v. 7-12). Gilgamesh a besoin de répéter ces mots pour mieux exprimer sa douleur et pour célébrer celui qui lui était si cher.4. Lorsque Gilgamesh comprend qu’Enkidu est mort, il mani-feste violemment sa douleur en s’agitant : « Il lui tournait autour » (v. 29). Il témoigne physiquement de son déses-poir : « Il arrachait et semait / Les boucles de sa chevelure ! / Il dépouillait et jetait / Ses beaux habits, / Comme pris en hor-reur ! » (v. 33-39). Cette attitude ressemble aux pratiques du deuil développées dans de nombreuses cultures. Les mani-festations violentes de la douleur lors de la mort d’un proche étaient ainsi courantes et ritualisées dans l’Antiquité. Bilan 5. À la fi n du texte, Gilgamesh ressent une grande appréhension : « L’angoisse / M’est entrée au ventre ! / C’est par la peur de la mort / Que je cours la steppe » (v. 46-49). La mort de son ami le plus cher lui fait prendre conscience qu’il est lui aussi mortel. Il craint désormais sa propre disparition.

La fi n d’un déluge p. 133

Comprendre un moment-clé1. Entre le début et la fi n du texte, il y a environ quatorze jours. Le déluge prend place pendant « Six jours / Et sept nuits » (v. 1-2). Les éléments se calment le septième jour (v. 6). Par la suite, le bateau accoste au mont Nisir, qui le retient de nou-veau pendant six jours. Utanapishtî se rend compte, le « sep-tième jour » (v. 41), que l’eau commence à se retirer.2. Il y a une comparaison et une métaphore dans la phrase soulignée. L’expression « la plaine liquide » est une métaphore qui désigne une grande étendue d’eau. On trouve exacte-ment la même formule chez Homère. Cette étendue d’eau est comparée à un « toit-terrasse ». Le verbe « semblait » est un outil de comparaison. Ces images soulignent l’inhospitalité du lieu, complètement envahi par les fl ots ; seule « une langue de terre » (v. 26), qui se trouve être une montagne (« le mont Nisir », v. 27) surgit des eaux envahissantes.3. Certains vers font penser à des refrains de chanson : « Le Nisir le retint, / Sans le laisser repartir : / Un premier jour, un deuxième, / Le Nisir le retint, / Sans le laisser repartir. / Un troi-sième, un quatrième jour, / Le Nisir le retint, / Sans le laisser repartir. / Un cinquième, un sixième jour, / Le Nisir le retint, / Sans le laisser repartir » (v. 29-39). Le décompte des journées peut même faire songer à une comptine.4. Utanapishtî lâche des oiseaux dans le ciel pour voir si l’eau a commencé à baisser : si un oiseau ne revient pas, cela signifi e qu’il a trouvé de quoi se poser et se nourrir ailleurs. Dans le mythe de Gilgamesh, l’oiseau le plus important est le corbeau, puisque c’est grâce à lui qu’Utanapishtî découvre que la mer est descendue (v. 56-59). On peut, à l’occasion de cette ques-

tion, renvoyer les élèves à l’encadré « Le sais-tu », qui souligne que dans la Bible, c’est la colombe qui joue le rôle du corbeau. Bilan 5. Utanapishtî a dû être eff rayé pendant le déluge, puisque « Bourrasques, Pluies battantes, / Ouragans et Déluge / [saccagent] la terre » (v. 3-5). Lorsque la tempête s’arrête, il semble désespéré : « Je tombai à genoux, immo-bile / Et pleurai » (v. 19-20). Ses larmes sont peut-être aussi des larmes de soulagement, la pluie s’étant enfi n interrom-pue. Lorsqu’Utanapishtî se rend compte que le corbeau n’est pas revenu, il célèbre cette nouvelle en faisant un « banquet-pour-les-dieux » (v. 61). Il doit donc ressentir de la joie et de la reconnaissance.

La perte de l’immortalité p. 134

Comprendre ce qui fait de Gilgamesh un héros humain1. Pour parler de l’immortalité, Utanapishtî utilise l’expression suivante : « la vie-prolongée » (v. 11). Il s’agit d’une périphrase : au lieu d’utiliser un mot précis, il emploie sa défi nition.2. On a l’impression que Gilgamesh trouve très facilement la plante de l’immortalité. Il agit sans réfl échir et semble très bien savoir ce qu’il fait : « Gilgamesh / Creusa un trou / Pour déterrer / De grosses pierres, / Lesquelles l’entraînèrent au fond de la mer, / Où il trouva la plante » (v. 12-17). Il ne cherche pas la plante mais la découvre immédiatement. Toutes ses actions sont résumées en une seule phrase, très courte. L’écri-ture même insiste sur l’aisance avec laquelle le problème est résolu.3. Gilgamesh veut faire essayer sa plante à un vieillard pour vérifi er son effi cacité. Si le vieillard rajeunit, cela signifi e que la plante donne bien l’immortalité : « J’en ferai absorber à un vieillard : / Car son nom est : / “Le-vieillard-rajeunit” ! »4. Gilgamesh perd sa plante à cause d’un serpent qui la lui vole. On peut, au moment de la correction de cette question, revenir sur le fait que le serpent, dans la Bible, prive Adam et Ève d’une autre forme d’immortalité lorsqu’il leur fait manger la pomme.5. On comprend que la plante que le serpent a volée était bien celle qui pouvait lui conférer l’immortalité. En eff et, lorsque le serpent la prend, il mue immédiatement : « Et, en s’en retournant, / Il rejeta une peau » (v. 49-50). On peut alors supposer qu’il a rajeuni. Bilan 6. Les élèves pourront faire plusieurs propositions à partir du moment où ils justifi ent leur choix. Certains diront qu’il ne faut pas chercher à tout prix l’immortalité, mais accep-ter sa condition de mortel. D’autres insisteront sur le fait qu’il faut faire attention à ce qui nous semble précieux ou ne pas être négligeant tant qu’une tâche que l’on doit eff ectuer n’est pas tout à fait accomplie.

Activités d’expression p. 135

▶ Reconstituer un récit épiqueLes élèves ont le choix entre deux sujets d’écriture.Le premier s’inspire directement de l’encadré « Récapitu-lons » : il s’agit de faire comprendre aux élèves que le texte de Gilgamesh est fascinant parce qu’il en manque une partie. Ils doivent essayer de reconstituer la partie manquante en cher-chant, le plus possible, à s’inspirer des extraits qu’ils viennent d’étudier.On peut lire avec eux les conseils d’écriture et parcourir à nou-veau les extraits en retrouvant les faits de style évoqués. On trouve ainsi de nombreux refrains dans les extraits 1, 5 ou 6.

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Les heures sont comptées dans l’extrait 6. Il y a des apposi-tions très visibles dans les extraits 1 ou 5. Le deuxième sujet s’appuie sur la description d’une image. Les conseils d’écriture peuvent aussi s’y appliquer. Les élèves pourront travailler sur l’apposition en s’inspirant de l’illustra-tion (par exemple : Tiomat, semblable à un oiseau…) On invi-

tera les élèves à réfl échir sur ce que peut être une « divinité du chaos ». Que cherche-t-elle à faire ? Comment peut-on la combattre ?

DOSSIER Récits de création à travers le monde p. 136 à 139

OBJECTIF ET DÉMARCHE DU DOSSIER▶ L’objectif principal de ce dossier est de compléter l’étude du thème des récits de création. Avant les explications du discours scientifi que, les hommes ont cherché à comprendre l’ordre du monde et, de tous temps, ils ont essayé de répondre à des questions existentielles multiples.▶ Que doivent en retenir les élèves ? Ce souci de trouver une explication à l’existence est universelle, tant dans le temps que dans l’espace. De l’Égypte millénaire au récit des Peuls, ce sont près de trois-mille ans de récits qui s’interrogent sur l’origine du monde. Des lacs de l’Europe nordique, en passant par les forêts d’Amérique centrale, jusqu’aux bords de la mer de Chine, tous les peuples ont tissé avec la nature un lien divin.▶ Les créateurs (ou démiurges), les dieux des origines, sont autant masculins que féminins, comme le montrent Nout, Izanami ou Luonnotar. Le caractère masculin du dieu de la Bible ne doit pas faire oublier que le rôle des femmes (ou du féminin) dans la création est souvent important. La présence du lait primordial du conte peul nous invite à ne pas en douter.▶ Si la création ex nihilo à partir d’une béance ou d’un chaos originel est un motif courant, l’élément liquide est aussi à l’œuvre dans les récits de création. Habituelle est aussi la représentation d’un monde clos sur lui-même que des forces intérieures travaillent jusqu’à en écarter les limites, à en séparer les trois niveaux, le ciel, la terre et l’espace du milieu : que ce soit un œuf matriciel, un géant qui s’étire, une déesse qui enfante, la perfection divine des origines est appelée à être brisée, rompue.Et l’homme dans cette création ? Il doit se montrer bien humble. Il n’est que puces sur le corps de P’an Kou ; il manque de sagesse comme Pandore, car seuls sont sages et omniscients les dieux comme les dieux mayas du Popol-Vuh.▶ Les huit textes de ce dossier sont mis en écho avec d’autres textes du manuel : les élèves sont appelés à mener l’enquête seuls – les récits accessibles par le lien numérique permettent en partie de répondre aux questionnaires des pages 136 et 137 – ou avec l’aide de leur professeur. Ce dernier dispose d’adresses Internet pour aller un peu plus loin.▶ Ce dossier est aussi l’occasion, lors de l’activité fi nale, de s’approprier les textes par l’illustration, un moyen facile et souvent agréable pour les élèves de montrer leur compréhension.

CORRIGÉS DES QUESTIONNAIRES ET DES EXERCICES

1. La lumière contre les ténèbres

V. Koenig, Dieux et génies de l’Égypte ancienne p.136

▶ DevinetteL’œil de Rê représente en réalité le soleil.

▶ Mène l’enquête !On pourra faire utiliser le lien numérique, à la page suivante, pour trouver une aide.1. Le soleil levant s’appelle Khépri.Le soleil couchant s’appelle Atoum.2. Seth, jaloux, a tué son frère le dieu Osiris. On dit que, par ruse, il persuada Osiris d’entrer dans un coff re. Avec l’aide de complices, le coff re fut rapidement refermé et jeté dans le Nil. Ensuite Seth s’empara du pouvoir, mais il dut lutter contre Horus, fi ls d’Osiris et d’Isis.

▶ Mène l’enquête !On pourra faire utiliser le lien numérique, à la page suivante, pour trouver une aide.1. Geb, dieu de la terre, succède à son père avec diffi culté : il doit renoncer aux symboles royaux dont il veut s’emparer, l’uræus et la perruque de Rê. Sobek, le dieu crocodile né de la perruque de Rê, lui permettra d’assoir son pouvoir.Nout, déesse du ciel, porte sur son corps toute la voute céleste et le soleil. Comme il lui est interdit d’avoir un enfant avec son mari Geb dans l’année, le dieu Thot gagne cinq jours supplé-mentaires en jouant avec la Lune. Nout pourra enfanter Osiris, Horus l’Ancien, Seth, Isis et Nephtys.Shou, dieu de l’air, est le père de Geb et Nout. Son rôle est de les séparer de manière à ce que le soleil puisse accomplir sa course.2. Nout porte sur son corps la barque de Rê.3. L’œil de Rê se situe entre les bras de Shou sous le ventre de Nout.

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2. L’origine des fl éaux

Hésiode, Les Travaux et les Jours p.137

▶ Mène l’enquête !1.

Khaos

Gaia Érèbos Éros Tartaros Nyx+

OuranosAither Hémèrè

Le Tartare est souvent évoqué comme lieu infernal le plus profond, mais n’entre pas toujours en tant que tel dans une généalogie2. L’épisode de Deucalion et Pyrrha est un épisode de sub-mersion et de déluge. Ce couple préservé a pour tâche de faire renaitre les hommes en lançant des pierres par-dessus ses épaules – on pourra utiliser le lien numérique pour trou-ver une aide.3. Pandore, la femme par qui le malheur arrive, peut être rap-prochée de l’Ève biblique.

Ressource numériqueRécits de création à travers le mondeLe lien permet d’accéder à une présentation qui

propose trois entrées :

1. Seth, le dieu rouge.

2. Nout, Shou et la barque du soleil.

3. L’histoire de Deucalion et Pyrrha  : de l’origine du

genre humain.

ACTIVITÉ

O. Besson, H. Gougaud, Contes d’Asie p. 137

▶ Mène l’enquête !1. Leur première union fait naitre une sangsue, la deuxième un ilot d’écume. Ces deux naissances ne satisfont pas le jeune couple.2. Izanami est la mère du monde : elle a enfanté les terres, les saisons, les végétaux, les animaux et l’Esprit du feu.3. L’Esprit du feu est une entité destructrice. Izanagi le détruit, parce qu’il a brulé sa mère, mais de son sang naissent « les plus indomptables parmi les créatures du monde ». L’Esprit du feu (Kagutsuchi) est démembré en huit morceaux qui deviennent des volcans ; de son sang naissent huit divinités, dont Watat-sumi, le dragon dieu de la mer, et Kuraokami, le dragon dieu de la pluie et de la neige.

3. L’élément liquide et la vie

J. Varenne, Mythes et légendes extraits des Brahmana p. 138

▶ Mène l’enquête !1. L’eau est l’élément primordial, source de vie. Les Eaux et l’Océan font naitre l’œuf primitif (d’une forme vague vient une forme parfaite) : le traducteur crée le verbe « arder », au sens d’« émettre une chaleur suite à une ascèse », tout en jouant avec les sonorités du mot « ardeur » pour signifi er l’élan créa-teur à l’œuvre. Pour un éclaircissement sur la notion de tapas, voir http://stehly.chez-alice.fr/tapas.htm

2. Prajâpati nait de l’œuf d’or. La forme parfaite de l’œuf et sa matière sont deux caractéristiques de la perfection divine de Prajâpati (son nom signifi e le seigneur des créatures).

M. Piquemal, Petite anthologie de la mythologie p. 138

▶ Mène l’enquête !1. La Finlande est un pays de lacs glaciaires, l’eau est un élé-ment important de son paysage.2. Jean Sibelius (1865-1957) a composé son poème sympho-nique Luonnotar en 1913.

U. Beier, Comment le monde fut créé d’une goutte de lait p. 138

▶ Mène l’enquête !1. Pour un peuple de pasteurs, le lait est le produit du trou-peau, il se substitue à l’eau diffi cile à trouver parfois dans les déplacements. Il est source de vie, comme le lait maternel l’est pour le nourrisson.2. En Europe, les quatre éléments sont l’air, l’eau, le feu et la terre ; dans le conte, la pierre se substitue à la terre et le fer s’ajoute à la liste.

4. La destruction d’un géant

C. Helft, La Mythologie chinoise p.139

▶ Mène l’enquête !1. La disparition d’Izanami, puis celle de l’Esprit de feu assurent la suite de la création dans la mythologie japonaise (voir le texte sur Izanagi et Izanami, p. 137).2. Selon la légende, P’an Kou donne naissance aux hommes grâce aux puces qui infestent sa pilosité. Pour aider à la recherche des élèves, voir notamment le blogue Sinoiseries :https://sinoiseries.wordpress.com/2014/09/13/histoires-de-chine-pangu-le-demiurge/3. La métamorphose de P’an Kou fait penser à celle d’Atlas, mais ici l’expansion du corps englobe l’ensemble de la création.

Pop Wuh, Le Livre des événements d’A. I. Chávez

▶ Mène l’enquête !1. Le premier élément nommé est l’eau (« il y avait seulement l’océan »). Puis le Ciel est créé.2. Le texte rappelle aux hommes que les premiers êtres sont les dieux et qu’ils sont doués de savoir et de puissance. Il leur inculque le devoir d’humilité.3. La vie sur terre est née dans les océans : bactéries, puis organismes cellulaires, puis multicellulaires se sont dévelop-pés pendant des millions d’années avant que des animaux ne puissent sortir de l’eau. Pour une explication simplifi ée, on pourra se reporter au site du magazine Hominidés :http://www.hominides.com/html/chronologie/chronoterre.php

▶ Deviens illustrateur (-trice)De la même façon que faire représenter le corps à diverses étapes de l’apprentissage des données physiques humaines permet de comprendre la représentation qu’ont les élèves du fonctionnement interne de la machine humaine, faire repré-senter un texte par une illustration permet de savoir quels éléments ont semblé essentiels et dignes de représentation.

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C’est à la fois un mode de résumé, mais aussi de révélation des liens qui se tissent entre les éléments du texte. La qualité esthétique du dessin n’est pas en jeu : si les élèves désirent ajouter du texte comme dans une bande dessinée pour être

plus explicites, libre à eux. On peut organiser dans le groupe-classe un moment de débat où seraient attribuées diverses « médailles » : celle du plus beau dessin, celle de la meilleure traduction du récit de création...

PARCOURS UN THÈME Récits de la Création p. 140 à 155

OBJECTIFS ET DÉMARCHES DU PARCOURSProblématique générale : Comment les récits de création expliquent-ils l’ordre du monde en nourrissant notre imaginaire ?▶ Lire des extraits marquants d’un grand récit fondateur, c’est examiner sans parti pris un texte qui a infl uencé et infl uence encore notre vie sociale, nos préceptes moraux et notre imaginaire littéraire.Le texte de la Genèse s’inscrit dans la continuité de l’interrogation universelle des origines du monde, de l’existence de l’homme ou du mal. La lecture du dossier qui précède ce parcours contribue à cette mise en perspective.▶ C’est un texte sacré pour les juifs et les chrétiens, qui expose les rapports diffi ciles entre le Créateur et ses créatures : rapport qui est fait de désobéissances et de punitions jusqu’au moment où s’établissent un lien de confi ance, une foi et une alliance. Nous l’étudions ici en tant que texte fondateur d’une culture, pour en comprendre l’infl uence sur la littérature, les arts, le langage, certaines valeurs de la société (que l’on retrouve en particulier au Moyen Âge). C’est aussi sa propre dimension littéraire que nous abordons – l’emploi des images par exemple – en dehors de toute interprétation religieuse de l’ordre du privé.▶ Les passages présentés appartiennent tous au livre de la Genèse, à l’exception du texte du Décalogue (p. 155) qui appartient au livre de l’Exode.Les quatre premières doubles pages (p. 140 à 147) évoquent les origines du monde et de l’humanité, les deux suivantes (le Déluge et la Tour de Babel, p. 148 à 151) montrent la diffi culté pour les humains à se montrer respectueux de leur Créateur. Les deux dernières (p. 152 à 155) mettent en lumière le rôle des patriarches, en particulier Abraham et son descendant Joseph, dont l’histoire installe les prémices de l’Exode.▶ Ce parcours vise à permettre aux élèves :– de repérer des informations dans un texte à partir d’éléments implicites ou explicites ;– d’utiliser ses capacités de raisonnement ou ses connaissances pour lire ;– de dégager par écrit ou oralement l’essentiel d’un texte lu ;– de rédiger un texte bref en réponse à une question ou une consigne donnée ;– d’exercer sa réfl exion sur des problèmes éthiques ;– de lire et interpréter des images ;– d’établir des liens avec d’autres œuvres ou procédés narratifs ;– de situer des œuvres dans l’histoire littéraire et culturelle ;– de se construire une culture en connaissant diverses fi gures bibliques.

ORGANISATION DU PARCOURS ET CHOIX DES AXES DE LECTURE

1. Un récit du commencement

La Création p. 140-141

● Pistes didactiquesL’entrée dans le récit de la Création peut se faire par le biais de l’iconographie : on peut mettre en rapport l’image du Créa-teur au milieu de l’ensemble des animaux avec les représenta-tions d’Orphée qui attire les animaux en les charmant de son chant ; on peut aussi penser au rapport qu’a entretenu Fran-çois d’Assise avec les oiseaux. Les mosaïques de la page 141 viennent d’une coupole de l’entrée de la basilique Saint-Marc de Venise, un dossier sur leur restauration est accessible par ce site italien :https://pilloledarte.wordpress.com/2013/04/12/il-restauro-del-mosaico-la-basilica-di-san-marco-a-venezia/Le lien le plus approprié est cependant celui à faire avec l’en-luminure de la Bible de Souvigny, étudiée à la page 146.Le récit de la Création est étudié en deux moments : la page 141 est consacrée à la création des cinq premiers jours.

Notre présentation du texte permet aux élèves d’observer la structure récurrente du texte. La parole créatrice (le Verbe) est ainsi observée dans les étapes successives de chaque jour : prise de parole, énonciation, eff ectivité de la création, déno-mination et satisfaction. Le dernier paragraphe est l’amorce du sixième jour avec la création des animaux terrestres que va compléter la création de l’homme.

● Proposition d’hypothèse de lectureComment le retour de phrases formulaires peut-il structurer un texte fondateur ?

2. L’origine de l’humanité

Premier récit de la création de l’homme p. 142

● Pistes didactiquesLe second moment de l’étude du récit de la Création est consacré aux sixième et septième jours. Ce premier récit de la création de l’homme est encore un texte équipé : les cou-leurs employées sont les mêmes qu’à la page 141. S’y ajoute

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cependant la couleur violette qui souligne la manière dont Dieu organise la nourriture de ses créatures au paradis. L’étude comparative des deux versions du récit montre la grande dis-crétion sur la naissance de la femme dans le premier récit. L’in-terprétation picturale de l’épisode biblique par Michel-Ange est beaucoup plus proche du récit de la page 143.

● Proposition d’hypothèse de lectureComment ce récit de la création de l’homme explique-t-il aussi notre quotidien ?

La création de l’homme p. 143 ● Pistes didactiques

Le point principal du récit de la création de la femme est de faire déterminer aux élèves les implications sociales de ce texte : la femme est seconde (étymologiquement, elle « suit », elle « vient après » l’homme), elle est subordonnée (« une aide », l. 18). L’explication du mariage est donnée dès l’origine. La dernière phrase du passage qui évoque l’absence de honte face à la nudité est à rappeler lors de l’étude du péché origi-nel : c’est la honte de la nudité qui révèle la faute (p. 144-145).

● Proposition d’hypothèse de lectureComment ce récit de la création de l’homme explique-t-il les rapports entre les hommes et les femmes ?

3. Une faute pour expliquer le destin humain

Le paradis perdu p. 144-145 ● Pistes didactiques

L’épisode du paradis est la suite directe du texte précédent (p. 143). La lacune de la ligne 34 fait abstraction des trois malédictions lancées par Dieu, contre le serpent (la repta-tion), contre la femme (l’enfantement dans la douleur), contre l’homme (le travail du sol pour se nourrir). Le texte est l’occa-sion de réfl échir au sens des mots qui relèvent du lexique du mal – se tromper sur l’orthographe d’un mot, est-ce une faute ou une erreur ? –, à l’existence du sentiment de la honte et de l’apprentissage social de la pudeur – la nudité et son degré d’acceptabilité selon les cultures ? –, au refus de l’expérience des fruits de l’arbre de vie. En chassant l’homme du jardin d’Éden, Dieu le prive du bénéfi ce de l’immortalité, mais Adam ne meurt pas immédiatement, car les Patriarches d’avant le Déluge bénéfi cient d’une très longue vie : Adam de neuf-cent-trente ans, Mathusalem de sept-cent-quatre-vingt-deux ans, par exemple. L’activité de débat peut s’organiser comme une conversation collective, où les arguments sont inscrits au tableau par le professeur modérateur, ou de façon plus ludique sous la forme d’un petit procès : un personnage est défendu par un groupe d’élèves, tandis que l’autre se charge de l’accusation.

● Proposition d’hypothèse de lectureComment ce récit permet-il de réfl échir au sort de l’huma-nité ?

4. Représenter des épisodes de « La Genèse »

La Bible de Souvigny p. 146 ● Pistes didactiques

L’étude de cette image est à mettre en rapport avec les textes des pages 141 à 145. L’entrée dans le chapitre peut se faire par la page 146 : dans un premier temps, la légende de l’il-lustration oriente la lecture de l’enluminure, mais, même

si les élèves ont une culture religieuse leur permettant de reconnaitre le thème de chaque vignette, il est plus diffi cile d’entrer dans les détails et de connaitre la chronologie : quand Adam et Ève goutent-ils le fruit défendu ? Est-ce le septième jour, pendant lequel Dieu se repose ? Le travail de cette page peut être enrichi par l’observation du manuscrit d’origine de l’illustration. Les activités proposées en lien numérique mettent en lumière le caractère exceptionnel de cette image dans l’économie générale du livre. C’est aussi l’occasion de faire un peu d’histoire de la langue et d’initiation au latin.Pour voir l’ensemble des enluminures sans feuilleter le manus-crit, se référer au site du ministère de la Culture à l’adresse sui-vante :www.culture.gouv.fr/documentation/enlumine/fr/BM/mou-lins_001-01.htm

● Proposition d’hypothèse de lectureComment l’enluminure parvient-elle à illustrer le récit de la Création ?

L. Cranach l’Ancien, Paradis p. 147 ● Pistes didactiques

D’un point de vue narratif, le tableau de la page 147 déve-loppe la partie inférieure de l’enluminure de la Bible de Sou-vigny. Il est à mettre en rapport avec les textes des pages 142 à 145. Le parti pris animalier du premier plan insiste sur la richesse de la création plus que sur l’épisode relégué en arrière-plan. L’identifi cation des divers types d’animaux est plus facile que celle des petits mis au second plan pour jouer sur un eff et de profondeur. L’examen du tableau sur la page Web accessible par lien numérique permet d’identifi er les oiseaux (cygnes, hérons, cigognes) ou les lapins. La compa-raison avec la fresque de Michel-Ange, p. 145, fait apparaitre l’habillement identique de Dieu avec une inversion des cou-leurs. Les élèves remarqueront que la chronologie du récit ne semble pas être liée à une linéarité de la composition : la posi-tion centrale de l’interdit avec le geste de Dieu en direction de l’arbre de la connaissance montre le sujet réel du tableau. Ils remarqueront aussi la ressemblance du couple représenté avec les deux modèles du diptyque des pages 144 et 145. Il est intéressant de noter que le souci de la pudeur du XVIe siècle fait utiliser une branche qui vient opportunément cacher les nudités humaines avant que la honte ne naisse.• Proposition d’hypothèse de lectureComment le peintre raconte-t-il l’histoire du péché originel ?

5. Le Déluge

L’Arche de Noé p. 148 ● Pistes didactiques

Dans les passages choisis, sont évoquées la volonté de Dieu, la durée du déluge et les tentatives pour obtenir la certitude de la décrue. Ce récit de destruction est aussi un récit d’espé-rance : en préservant Noé le juste et sa famille, le Créateur donne une nouvelle chance aux hommes. En choisissant de préserver des couples d’animaux, il renouvèle leur création. La durée du déluge, c’est-à-dire de l’arrivée des eaux du sol et du ciel, est de quarante jours. Dans le passage coupé à la ligne 23 est évoquée la durée de la navigation durant la lente décrue qui fi nit par immobiliser l’arche au sommet du mont Ararat. La lenteur du retour à la normale est prouvée par les trois ten-tatives pour obtenir la certitude du retrait défi nitif des eaux. Les dimensions de l’arche, le rôle des couples et la durée chif-frée de la punition et de l’attente sont là pour appuyer la force

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de la colère divine. Le chiff re 40, dans la Bible, est celui qui correspond au passage d’une période à une autre. De nom-breux autres exemples le prouvent, ainsi la durée du séjour de Moïse sur le mont Sinaï, celle de l’errance des Hébreux dans le désert... La symbolique de ce chiff re perdure dans l’expression « mettre en quarantaine » ou dans « carême » – le mot vient de l’expression latine quadragesima dies (« quarantième jour »), qui débute eff ectivement le quarantième jour avant Pâques.

● Proposition d’hypothèse de lectureComment l’usage des chiff res rend-il compte du caractère exceptionnel du déluge ?

L’Arche de Noé selon le Coran, texte écho p. 149 ● Pistes didactiques

L’épisode du déluge est un des points de rencontre du texte biblique et du texte coranique. Ces derniers suivent une trame narrative identique : Dieu prévient un homme juste de la punition réservée aux hommes, il lui confi e une mission de préservation, le bateau s’arrête quand la décrue arrive.Cependant le texte du Coran met en avant la foi en Dieu : un simple relevé du vocabulaire religieux suffi t à le montrer. Il pré-sente aussi la vaine tentative de Noé pour sauver son fi ls, dont le sort a pourtant été fi xé : l’opiniâtreté de son fi ls dans l’erreur est une cause de son engloutissement. La puissance divine se montre implacable et sans concession, même pour un juste qui ne parviendra pas à sauver son impie de fi ls. Les illustra-tions des pages 148 et 149, venues de deux horizons culturels diff érents, montrent les parentés des grands monothéismes.

● Proposition d’hypothèse de lectureComment le récit coranique montre-t-il un rapport de Dieu et de Noé diff érent du texte biblique ?

6. L’origine de la diversité des langues

La Tour de Babel p. 150 ● Pistes didactiques

Ce texte de la Genèse est une autre illustration de la colère divine. Cependant, ici, ce ne sont pas les hommes qui sont détruits, mais leur capacité à vivre unis dans un même projet. Les élèves doivent découvrir le chemin parcouru de l’unité (l. 1 : « tout le monde », « même langue », « mêmes mots ») à la dispersion et à la confusion (l. 13 et suivantes : « confondons », « dispersa »). C’est aussi l’occasion de voir apparaitre le confl it entre le « dessein » humain et le « dessein » divin – un travail sur l’homonymie est alors possible entre ce terme, probable-ment nouveau pour les élèves, et le mot « dessin ».

● Proposition d’hypothèse de lectureComment ce texte montre-t-il que la réconciliation avec Dieu n’est jamais acquise ?

P. Brueghel l’Ancien, La Tour de Babel p. 151 ● Pistes didactiques

Le cadrage de l’illustration a fait disparaitre la carrière de pierres située au premier plan en bas à gauche. La présence de la Tour s’en trouve renforcée et la présomption humaine n’en est que plus évidente. Une comparaison des deux illus-trations de la double page rend visible la diff érence d’imagi-naire architectural : une vision liée à la pratique quotidienne pour le manuscrit du Moyen Âge, une architecture plus nour-rie d’architecture antique pour le tableau de Brueghel. Or, la construction du texte biblique fait référence à une architecture mésopotamienne en brique et bitume (la fameuse ziggourat).

On lira avec profi t le petit dossier proposé par un conseiller pédagogique en Arts Visuels à l’adresse suivante :http://www.ac-nice.fr/ia06/eac/file/PDFAV/La%20Tour%20de%20Babel%20Pieter%20Breughel.pdf

● Proposition d’hypothèse de lectureComment le peintre parvient-il à représenter l’orgueil humain ?

V. Hugo, Soleils couchants, texte écho p. 151 ● Pistes didactiques

Ce texte de Victor Hugo est une illustration de la puissance de l’image de la Tour de Babel dans l’imaginaire hugolien. Ici, l’image de Babel est ascendante, elle s’élève vers Dieu et l’in-fi ni. Les nuages, par leur forme éphémère, sont à la fois image de puissante élévation et image de la ruine annoncée, car voués à la disparition : d’où l’oxymore « édifi ce de nuées » (l. 6).Sur le sujet, voir l’article suivant :http://crdp.ac-paris.fr/parcours/fondateurs/index.php/cate-gory/babel?paged=1

● Proposition d’hypothèse de lectureComment un épisode biblique peut-il inspirer une création poétique ?

7. L’obéissance à un ordre divin

Le sacrifi ce d’Abraham p. 152 ● Pistes didactiques

L’épisode du sacrifi ce d’Abraham suscitera probablement une réaction au premier degré de la classe. Un infanticide, fût-il un sacrifi ce humain religieux, est un acte révoltant. C’est en acceptant ce mouvement de révolte que l’on peut faire remar-quer l’étrange acceptation d’Abraham. Pourquoi agit-il ainsi ? Que veut dire cette obéissance aveugle ? Cette épreuve dont Abraham sort vainqueur lui assure la bénédiction divine et l’assurance d’une descendance nombreuse. D’un point de vue narratif, le texte évoque un sauvetage in extremis, c’est-à-dire au moment où la mort va frapper (cf. le sauvetage de Bilbo évoqué p. 84-85 ou celui de Mrs Aouda au chapitre 13 du Tour du monde en 80 jours). Les deux premières images, le tableau d’Andrea del Sarto et l’illustration persane, jouent sur cet ins-tant de l’apparition de l’ange qui arrête le geste d’Abraham.

● Proposition d’hypothèse de lectureComment une mise à l’épreuve peut-elle être l’occasion de l’expression de la soumission à Dieu ?

Le sacrifi ce d’Abraham selon le Coran, texte écho p. 153

● Pistes didactiquesLe texte coranique permet d’éclairer le rôle d’Isaac dans l’épi-sode : le texte biblique le montre interrogatif et ignorant de ce qui se trame, alors que l’Isaac du Coran affi rme tout autant sa foi que son père par son acceptation énergique. De la même façon que Noé, Abraham est présenté comme un bon croyant. L’image chrétienne d’Abraham accueillant en son sein juifs et musulmans est une image de l’accueil des justes au paradis céleste.L’enluminure est visible dans le manuscrit de la Bible de Souvi-gny, voir p. 146 du manuel, puis chercher dans le menu dérou-lant de la Bible numérisée : « Premier livre des Chroniques-Lettre historiée-Abraham », ou aller au folio MS_001_0256R.

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86 © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 6e – Livre Ressources

Pour trouver un commentaire succinct de l’enluminure, voir : http://expositions.bnf.fr/parole/grand/005.htm

● Proposition d’hypothèse de lectureComment le Coran représente-t-il le même épisode que la Bible ?

8. Un interprète de la volonté divine

Joseph et les songes de Pharaon p. 154 ● Pistes didactiques

Joseph, arrière-petit-fi ls d’Abraham, petit-fi ls d’Isaac, fi ls de Jacob, est confronté trois fois aux rêves. La première fois, il raconte à ses frères deux rêves qu’il a faits, où sa position est supérieure à la leur ; ils en conçoivent de la jalousie et, de leur complot, résulte l’esclavage de Joseph en Égypte. La deuxième

fois, il interprète les rêves de deux compagnons de prison et l’un d’eux se souviendra de lui quand Pharaon aura ces rêves inquiétants. C’est Joseph qui fait le lien entre l’histoire de la lignée d’Abraham et l’histoire de Moïse, puisqu’il est à l’ori-gine de l’arrivée de son peuple en Égypte. Ce passage de la Bible est à l’origine de l’expression « une période de vaches maigres ».L’interprétation de la volonté divine a valeur prophétique : le texte emploie le futur qui inscrit la vision dans l’avenir. Joseph joue aussi le rôle de conseiller, son pragmatisme (sa sagesse) fera qu’il deviendra celui-là même dont il dresse le portrait idéal.

● Proposition d’hypothèse de lectureComment un message divin énigmatique doit-il être inter-prété ?

CORRIGÉS DES QUESTIONNAIRES ET DES EXERCICES

1. Un récit du commencement

La Création p. 140-141

Étudier une chronologie de la créationEntrer dans la lecture. Le rôle des cinq couleurs est de bali-ser la lecture pour rendre visible la langue formulaire du texte biblique. Le jaune met en lumière le Verbe divin en action par la répétition de « dit » – p. 146, une activité à propos de la Bible de Souvigny demande de repérer le terme latin Dixit (« Il dit ») dans le texte du manuscrit. Le rose repère toutes les paroles créatrices au subjonctif d’ordre. Le bleu donne la formule qui montre l’eff ectivité de la création. Le vert signale la « satisfac-tion » de Dieu. L’orange note la puissance de dénomination divine : Dieu nomme les éléments de la Création.1. Le premier jour, Dieu sépare les ténèbres de la lumière : le texte utilise les antonymes « nuit » et « jour » en parallèle aux termes « ténèbres » et « lumière ». Sans « jour », il ne peut y avoir de « premier jour » (l. 5 à 10).2. Le fi rmament sépare les eaux d’en-haut des eaux d’en-bas, il permet l’apparition du ciel (l. 11 à 17).3. Le regroupement des eaux d’en-bas (« sous le ciel ») permet l’apparition du « continent », c’est la séparation des mers et de la terre (l. 18 à 22).4. « Luminaire » est aujourd’hui employé pour désigner toute source de luminosité artifi cielle (lampe, lustre...). Dans le texte, il désigne un objet céleste qui déverse sa lumière : le « petit luminaire » est la lune, le « grand luminaire » le soleil. Le texte biblique rappelle le rôle calendaire et religieux de ces astres. À noter que l’existence du jour n’est pas liée à la présence des luminaires (l. 32 à 40).5. Le cinquième jour sont créés les oiseaux (l. 47), les monstres marins et les êtres vivants qui glissent (l. 50-51). C’est le peu-plement des airs et des eaux. Le sixième jour naissent les bes-tiaux (les animaux utiles aux hommes), les bestioles du sol (insectes, batraciens, vers...) et les bêtes sauvages, fauves et grand gibier (l. 58-64). Bilan 6. Chaque jour de création suit le même déroulement : Dieu prend la parole (jaune), il émet un ordre (rose), l’ordre s’accomplit (bleu), Dieu donne un nom à la création (orange) et il est satisfait du travail accompli (vert).

2. L’origine de l’humanité

Premier récit de la création de l’homme p. 142

S’interroger sur l’existence de l’humanitéEntrer dans la lecture. La création de l’homme arrive le sixième jour.1. Dieu accorde à l’homme la domination des animaux, mais l’homme, pour se nourrir, a droit aux semences et aux fruits de la végétation. La mort des animaux pour la nourriture n’a pas lieu d’être au temps paradisiaque. D’ailleurs toutes les bêtes se nourrissent elles-mêmes de verdure.2. Dieu crée l’homme, puis il crée le couple humain (« homme et femme » l. 8) et à ce couple, il ordonne de peupler la terre.3. Ici le mot « chôma » a le sens de « se reposer ». Étymologi-quement, « chômer » est à rapprocher de la pleine chaleur du milieu du jour (kauma, en grec ancien), c’est-à-dire cesser le travail quand le soleil est au zénith, ce qui revenait pour les Romains à la sixième heure (sexta (hora) → siesta → sieste). Bilan 4. Le principal personnage de ce récit de création est Dieu, auquel on peut à juste titre donner le nom de « Créa-teur ».

▶ Faire une descriptionIl s’agit d’une description orale sur le mode du volontariat. Il faut cependant préciser que le travail ne peut se faire sans méthode, que le regard doit se déplacer (de gauche à droite ou de droite à gauche), que certaines lignes de construction peuvent apparaitre : le lien entre le créateur et sa créature suit une diagonale faiblement inclinée, les corps des personnages sont représentés de manière contrastée : nu/habillé, au sol/dans les airs, seul/accompagné, légèreté/massivité...Propositions de descriptions :• Michel-Ange, Création d’Adam (1510)Adam est allongé nu au sol, appuyé sur son coude droit, le corps de face, mais la tête de trois quarts tournée vers Dieu, sa jambe gauche est repliée, sa jambe droite passe par-dessus le pied gauche au premier plan. Le bras gauche, posé sur le genou gauche, tend une main alanguie à l’index à peine levé vers Dieu.

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Dieu s’approche d’Adam par la droite, il vole de côté, le bras droit et l’index tendu vers Adam, son bras gauche entourant les épaules d’une jeune femme. Groupés autour d’eux, rete-nus dans une draperie rosâtre gonfl ée en coque, une dou-zaine de putti (enfants nus ou angelots) soutient Dieu dans son vol. Une écharpe verte fl otte en dessous du groupe.• Michel-Ange, Création d’Ève (1510)La scène de la naissance d’Ève est une scène au décor bien moins aérien. Les trois personnages se placent dans un triangle rectangle – la scène de la p. 142 est de construction plus complexe : un triangle à gauche, une ligne, une forme ovoïde. Dieu, à droite, porte un vêtement rose caché par une cape bleue ; il penche la tête vers Ève. Son aspect général est plus hiératique, seul son bras droit, la main ouverte, se tend en un geste qui semble demander à la femme de se lever.Le corps d’Ève est dans une position dynamique : son pied droit semble encore sortir du fl anc d’Adam, ses mains se tendent vers Dieu en un geste de prière. Adam, appuyé contre un tronc d’arbre, dort au premier plan. La rousseur semble le point commun des chevelures d’Adam et Ève.Le texte biblique ne donne pas de précision sur la création de l’homme sinon que le souffl e de vie est entré par les narines (l. 3, p. 143). Michel-Ange préfère un geste plus théâtral, quoique diffi cile à interpréter puisque Adam semble vivant avant le contact du doigt de Dieu. La scène de la naissance d’Ève diff ère aussi du texte biblique : certes Adam dort encore de la torpeur suscitée par Dieu (l. 19, p.143), mais, sur la fresque, Ève sort presque du fl anc d’Adam, alors que le texte évoque une création séparée à partir d’une côte (l. 21-22, p.143).

La création de l’homme p. 143

Découvrir la création de l’homme et de la femmeEntrer dans la lecture. Dans ce texte, le nom du Créateur est Yahvé Dieu.1. Dieu modèle l’homme avec la glaise du sol (l. 2).2. L’homme trouve de nombreux arbres « séduisants à voir et bons à manger » (l. 9), « l’arbre de vie » (l. 10) et « l’arbre de la connaissance du bien et du mal » (l. 11).3. Lignes 18 à 21 : Dieu façonne la femme à partir d’une des côtes de l’homme. L’homme nomme la « femme », selon le même commandement qui lui donnait le pouvoir de nommer les animaux. Bilan 4. Il est interdit à l’homme de manger de l’arbre de la connaissance du bien et du mal.

3. Une faute pour expliquer le destin humain

Le paradis perdu p. 144-145

▶ Graine de savoirLe contraire de transgression peut se déduire de l’emploi répété de « désobéir ». Transgresser, c’est désobéir ; le contraire de la désobéissance est l’obéissance. Les élèves peuvent mon-trer par cet exercice leur capacité à raisonner sur la langue.

▶ Débattre et réfl échirPour ce problème « philosophique », il n’est pas nécessaire d’être grand clerc. Dans un premier temps, les élèves doivent

retrouver ce qui est le bien et ce qui est le mal tels que les défi -nit le texte biblique : une connaissance divine, une connais-sance qui est un mal puisqu’elle voue le couple à l’exil… Ils devront défi nir des mots simples et jouer avec les degrés et la synonymie apparente : le péché, la faute, l’erreur... Ils établi-ront des listes d’actes relevant du bien ou du mal et travaille-ront sur la notion de loi et de sa transgression. Ils réfl échiront à l’obéissance aux parents, aux adultes du collège. Tous ces sujets et bien d’autres n’épuiseront pas le débat éthique, et dans le cadre d’une séance à l’horaire limité, il faudra faire le deuil de l’aboutissement du débat. Des liens peuvent être tissés avec les préoccupations de l’Enseignement Moral et Civique.Pour approfondir, voir les travaux de Michel Tozzi ou, pour une approche plus rapide, son site Internet : www.philotozzi.com

Comprendre les conséquences d’une désobéissanceEntrer dans la lecture. La désobéissance d’Adam et Ève a pour conséquence leur expulsion du paradis terrestre. Ils sont renvoyés « du jardin d’Éden pour cultiver le sol » (l. 42).1. Le serpent s’adresse seulement à Ève.2. Ève sait que l’arbre est « désirable pour acquérir le discer-nement » (l. 14-15).3. Ève mange du fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, et en off re à manger à Adam.4. Ils se rendent compte de leur nudité, en ressentent de la honte et se fabriquent des pagnes en feuilles de fi guier : elles sont bien plus larges que les feuilles de vigne. Sur le tableau de Cranach, p. 144, Adam utilise les feuilles du pommier.5. Adam incrimine Ève, qui incrimine le serpent, coupable de la séduction originelle. Bilan 6. L’homme a acquis la connaissance du bien et du mal, le sentiment de la honte. La crainte de Dieu est qu’il n’acquière l’immortalité en mangeant le fuit de l’arbre de vie. Chassé du paradis terrestre, l’homme doit se nourrir à partir du travail de la terre.

4. Représenter des épisodes de « La Genèse »

La Bible de Souvigny p. 146

▶ Lecture d’image

Étudier un récit en images1. L’illustration se lit comme les vignettes d’une bande des-sinée : de gauche à droite, ligne après ligne en commençant par le haut.2. Première ligne à gauche : séparation des ténèbres et du jour ; à droite : création du fi rmament.Deuxième ligne à gauche : séparation des mers et de la terre ; à droite : création de la lune et du soleil.Troisième ligne à gauche : création des poissons et des oiseaux ; à droite : création des animaux terrestres.Quatrième ligne à gauche : Ève sort du fl anc d’Adam ; à droite : la tentation et le péché originel.3. Dieu, le Créateur, est le personnage le plus représenté.4. Les deux dernières scènes se passent au jardin d’Éden, au paradis terrestre.

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88 © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 6e – Livre Ressources

Ressource numériqueVersion numérisée de la Bible de SouvignyPour accéder à la Bible :

1. Cliquer sur le lien La Bible de Souvigny numérisée.

2. Sur la page de la médiathèque communautaire

(médiathèque communautaire de Moulins), cliquer sur

Accéder à la Bible de Souvigny en ligne.

3. sur la page MS 1 - Bible de Souvigny : Biblia Sacra,

cliquer sur Livre numérique.

Le livre numérique se feuillète. Sous les pages qui

tournent apparait la numérotation des pages du

manuscrit. Notre image, sur la page de gauche, est

numérotée MS_001_0004V. On fera remarquer aux

élèves que le numéro de la page de droite se termine

par 5R : notre illustration est au verso (V) de la page 4.

Si on continue de tourner les pages, on se rend compte

que cette illustration est unique dans le livre de la

Genèse, la majorité des illustrations sont des lettrines.

Le livre de l’Exode, qui suit, a une petite lettre ornée,

mais pas à sa première page, ce qui prouve le caractère

exceptionnel de cette représentation de la Création.

Sans accéder au livre numérique, l’élève peut utiliser la

loupe de zoom de l’Activité + afi n de répondre aux deux

questions posées. Il travaillera ainsi à une initiation au

latin en cherchant à déchiffrer quelques mots.

• L’expression dans le bandeau marron In Principio

signifi e « Au commencement ».

• Le mot Dixit signifi e « Il dit ».

ACTIVITÉ

L. Cranach l’Ancien, Paradis p. 147

Ressource numériqueParadis de Lucas Cranach l’Ancien (1530)Pour mieux voir les détails du tableau, consulter le

lien numérique. L’onglet L’œuvre permet d’accéder, en

cliquant sur le tableau, au grossissement de six parties

différentes pour le jardin d’Éden. Pour la partie le péché

originel, les six scènes de l’épisode sont marquées d’un

chiffre suivant l’ordre du récit.

Ce tableau est à mettre en rapport avec les deux

panneaux (cf. p. 144 et 145) conservés au Museum

der bildenden Künste de Leipzig (Allemagne) :

lucascranach.org/gallery

ART

▶ Lecture d’image

Identifi er les diff érentes scènes d’un épisode bibliqueCes travaux sont à réaliser à l’aide de la présentation du tableau par lien numérique.1. Les animaux sont présentés par couples, ils sont appelés à croitre et à multiplier. Ils sont dans la même situation de couple que l’homme et la femme. Cette situation trouvera son écho au moment du déluge, quand il faudra tout recommen-cer. On distingue au premier plan un taureau et une vache, un cerf et des biches, une chèvre et probablement un bouc, un

daim et une daine, un renard et une renarde, un cheval et une jument, un couple de licornes, un couple de singes, un couple de paons, une brebis et un bélier...2. Dieu apparait à la création d’Adam, à la création d’Ève, lorsqu’est prononcé l’interdit sur l’arbre de la connaissance et dans les nuages, quand Adam et Ève ont peur à son approche.3. La scène centrale est celle de l’interdit absolu, celui dont la transgression va sceller le destin de l’humanité.4. Le serpent est un monstre hybride à buste de femme et à queue de serpent bleue.5. L’ange chasse Adam et Ève du paradis terrestre, il brandit son épée. Bilan 6. Ce tableau présente l’épisode biblique en arrière-plan, les six étapes doivent être données dans la chronolo-gie du récit. Ce qui est mis en avant, au premier plan, c’est la richesse de la Création. Un autre tableau sur le même sujet a été peint en 1530 par le même auteur, mais les scènes sont au premier plan. Il est conservé au Kunsthistorisches Museum de Vienne (Autriche).

5. Le Déluge

L’Arche de Noé p. 148

Étudier le récit d’une punition divineEntrer dans la lecture. Le déluge est l’extermination de tout ce qui a souffl e de vie sur terre, à l’exception de la famille du juste Noé et des animaux qu’il a embarqués. Le déluge (c’est-à-dire les pluies) dura quarante jours.1. Dieu ordonne à Noé de construire une arche aux dimen-sions précises (l. 1 à 10), dans laquelle il doit faire entrer un couple de chaque espèce vivante (l. 17 à 20). Il doit aussi y faire entrer sa famille (l. 15 à 17).2. Dieu désire détruire toute vie, car les hommes se com-portent mal.3. Le chiff re deux représente le chiff re du couple (mâle et femelle). Le retour de la vie nécessite la présence de couples animaux féconds.4. Une hypothèse plausible : la hauteur de l’eau doit dépasser celle des montagnes.5. Noé lâche d’abord un corbeau, puis fait un premier essai avec une colombe. La colombe rapporte le rameau d’olivier au second essai. Bilan 6. Le retour de la colombe prouve que le retrait des eaux laisse les arbres à l’air libre. La colombe a été utilisée ultérieurement comme symbole de la paix. Picasso crée ce symbole en 1949 pour le Mouvement de la Paix ; dans les églises, la colombe est le symbole du Saint-Esprit.

L’Arche de Noé selon le Coran, texte écho p.149

Comprendre une autre version du déluge1. La puissance divine s’exprime dans la répétition du mot « ordre » aux versets 40, 43 et 44.2. Plus qu’une inondation ou une pluie diluvienne, le déluge est surtout présenté comme une submersion marine aux vagues « semblables à des montagnes » (verset 42).3. Le dialogue de Noé et de son fi ls donne à ce passage un caractère plus dramatique : le père, bon croyant, tente de détourner son fi ls de l’incrédulité, et par là même du châti-ment divin. Le fi ls ne peut se sauver s’il ne mesure pas que la puissance divine est plus « haute » que la montagne.

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89© Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 6e – Livre Ressources

La description des vagues du verset précédent montre l’ina-nité de ses espoirs.

▶ Faire le récit d’un délugePour ce travail d’écriture, on peut s’inspirer du début des Contes du chat perché de Marcel Aymé. Il met en scène des petites fi lles qui imaginent qu’il pleut à cause de leur chat. La Prophétie des grenouilles de Jacques-Rémy Girerd, une fable pour enfants, illustrée par un fi lm d’animation, peut être aussi un déclencheur d’écriture. Le récit ne doit pas dépasser une vingtaine de lignes. Il aura pour personnages des enfants et leurs parents. Le vocabulaire du champ lexical de l’eau doit être travaillé.

6. L’origine de la diversité des langues

La Tour de Babel p. 150

Comprendre un récit explicatifEntrer dans la lecture. Dieu rétablit l’ordre en provoquant le désordre des langues.1. Ils bâtissent « une ville et une tour » (l. 5-6).2. La tour doit avoir le sommet qui « pénètre les cieux » (l. 6).3. Dieu descend sur terre pour examiner les constructions des hommes.4. Les hommes montrent de l’orgueil et souhaitent rivaliser avec Dieu, quand ils cherchent à atteindre le ciel avec leur tour.5. Les hommes ont oublié le commandement de Dieu de peupler la terre. En restant tous unis dans la ville, ils contre-viennent à son ordre. Bilan 6. Le mélange des langues provoque l’arrêt de la construction et aussi la mésentente ou l’incompréhension entre les hommes – cf. polysémie du verbe s’entendre, l. 13-14, en faisant la diff érence entre le sens propre et le sens fi guré.

▶ Débattre sur la richesse des languesCe débat prend sa source dans l’analyse du texte biblique : la diversité des langues a pour origine une malédiction divine. Quelles sont les implications de cette diversité ? Incompré-hension et incapacité à mettre en œuvre un projet commun. On pourra faire retrouver les institutions où la diversité des langues est le lot commun dans le monde actuel : ONU, UNESCO, institutions de l’Union Européenne... Cela permettra de faire découvrir aux élèves comment les hommes peuvent pallier cette diversité : présence de traducteurs, personnes polyglottes... On fera repérer les situations quotidiennes où l’usage de deux langues au moins est un avantage : rencontre d’un touriste étranger, rencontre amicale de vacances... Les élèves peuvent réfl échir à la problématique d’une langue universelle – inventée ou choisie car dominante, comme l’anglais – ou aux langues qu’ils aimeraient connaitre tout en justifi ant leur choix.

P. Brueghel l’Ancien, La Tour de Babel p. 151

▶ Lecture d’image1. La masse énorme du bâtiment occupe presque toute la lar-geur du tableau, son sommet traverse les nuages.2. Pour montrer l’immensité du bâtiment, la taille des hommes est réduite. En bas à gauche, des dignitaires semblent

observer l’avancée du chantier. Le bâtiment s’élève entre un port actif et un paysage cultivé. Sur la totalité de la tour, on voit des hommes s’activer au chantier, en particulier avec des instruments de levage.3. Ce nuage semble annonciateur d’orage, il est pourtant éclairé par l’arrière. Est-ce Dieu qui s’avance ?

V. Hugo, Soleils couchants, texte écho p. 151

Étudier l’infl uence poétique de la Bible1. Appartiennent au champ lexical du ciel les termes sui-vants : « nuages » (l. 1), « air » (l. 2 et 8), « vapeurs » (l. 2), « vent » (l. 3), « brouillards » (l. 4), « nuées » (l. 6), « cieux » (l. 7), « l’éther » (l. 9), « ciel » (l. 10).2. Appartiennent au champ lexical de la construction les termes suivants : « brèches » (l. 2), « étages » (l. 5), « escaliers » (l. 11), « ponts » (l. 11), « tours » (l. 11).3. Les nuages, qui s’étagent les uns au-dessus des autres, évoquent par leur assemblage des formes architecturales (escaliers, ponts, tours) qui naissent des mouvements et des empilements. La répétition du verbe « monter » (l. 10) entraine le regard vers le ciel dans une immense contreplongée.

▶ Décrire en s’inspirant de la Tour de BabelCe travail d’écriture s’appuie sur l’image que Victor Hugo a employée dans l’extrait de poème proposé. Les élèves étu-dient le rapport métaphorique entre la forme des nuages et les éléments de l’architecture de la Tour de Babel. Décrire un paysage de montagne permet l’emploi d’un lexique polysé-mique (arche, gradins, s’étager...) pour faciliter la superposi-tion des images. L’impression principale, quand on se situe au pied d’un lieu aussi dominant, est celle de l’écrasement : l’observateur regarde vers le haut ; il est, par ce regard en contreplongée, presque eff rayé par la grandeur ou la majesté du paysage et sa propre petitesse.

7. L’obéissance à un ordre divin

Le sacrifi ce d’Abraham p. 152

Comprendre un ordre divinEntrer dans la lecture. Abraham se montre obéissant envers Dieu. Il éprouve crainte et respect, comme le lui rappelle l’Ange aux lignes 31-32.1. Dieu ordonne à Abraham de sacrifi er son fi ls unique Isaac.2. La relation d’Abraham à Dieu est personnelle, les serviteurs pourraient interférer dans le sacrifi ce et empêcher Abraham de mener à bien sa tâche.3. Isaac fait preuve de bon sens, il se rend compte que l’agneau sacrifi ciel manque pour honorer Dieu. La réponse d’Abraham est pleine d’ambigüité : c’est eff ectivement Dieu qui a choisi celui qui doit être sacrifi é. Elle est également porteuse de vérité, car un bélier sera trouvé pour le sacrifi ce (l. 33).4. La succession rapide des actions montre la détermination d’Abraham à off rir son propre fi ls en sacrifi ce à Dieu.5. Le sacrifi ce d’Isaac est arrêté par l’Ange de Dieu et un bélier découvert non loin de là sera off ert en holocauste. Bilan 6. Abraham n’a pas douté de la volonté de Dieu. Il a fait la preuve de sa crainte et de sa foi.

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90 © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 6e – Livre Ressources

Le sacrifi ce d’Abraham selon le Coran, texte écho p. 153

Comparer deux récits du même épisode1. Dieu parle à Abraham dans un songe – sur ce point, voir aussi p. 154 sur le rôle du rêve dans la révélation de la volonté divine.2. Isaac, sollicité par Abraham, accepte volontiers le sacrifi ce de sa vie pour Dieu : tous deux font preuve de « soumission » (verset 103).3. Un fi ls est accordé à Abraham, mais Abraham doit sacrifi er celui-ci à la demande de Dieu. Le sacrifi ce est arrêté au dernier moment par la volonté de Dieu. La trame du récit est com-mune. Les points de divergence sont : la façon dont Abraham a reçu la volonté de Dieu, la présence de personnages secon-daires (les serviteurs, l’Ange), le rôle que joue Isaac, le sacrifi ce eff ectif d’un animal...

8. Un interprète de la volonté divine

Joseph et les songes de Pharaon p. 154

Interpréter un avertissementEntrer dans la lecture. Pharaon obtient l’aide de Joseph, fi ls d’Isaac, esclave jeté en prison à cause de la dénonciation calomnieuse de la femme de Potiphar (ou Putiphar).1. Pharaon a fait deux rêves : l’un avec sept vaches grasses et sept vaches maigres, l’autre avec de beaux épis aux grains nombreux et des épis « grêles et brûlés » (l. 2 à 7).2. Pharaon n’obtient pas de réponse à ces songes énigma-tiques : il ignore ce qu’ils disent de la volonté divine.3. Joseph révèle que Dieu va off rir sept années d’abondance, puis sept années de disette à l’Égypte.4. Joseph conseille de nommer un haut fonctionnaire qui organisera un impôt en nature sur les bonnes récoltes de façon à créer des réserves pour les mauvaises années. Bilan 5. Joseph est « un homme intelligent et sage » (l. 17-18). Le texte dresse le portrait d’un conseiller avisé de Pharaon. Or, en interprétant les songes, il fait son propre portrait. Joseph deviendra le ministre de Pharaon.

Activités d’expression p. 155

▶ Imaginer un nouvel édenCe travail d’écriture est un jalon qui peut faire le lien avec des thèmes de 5e : « Le voyage et l’aventure, pourquoi aller vers l’inconnu ? », ou encore « Imaginer des mondes nouveaux ». Les élèves peuvent s’appuyer sur les images du paradis que donnent les peintres, mais ils sont libres aussi de laisser vaga-bonder leur imagination jusqu’à inventer des êtres ou des plantes d’un genre nouveau. Le choix de lancer une expédi-tion d’exploration avec 3 à 6 membres est une invitation à un travail de co-écriture : chaque réalisation individuelle pourrait être rassemblée dans un dossier que le chef d’expédition pré-senterait sur Terre. Le travail d’écriture se transforme alors en activité orale.

▶ Comprendre la transmission d’un enseignement

Ressource numériqueLecture d’un extrait de la Bible : les dix commandements de l’Exode

AUDIO

Les élèves doivent distinguer l’ordre (phrase de forme affi rma-tive) de l’interdit (phrase de forme négative). Pour faciliter la lecture du passage, voici les références des dix commande-ments :1. Exode, 20, 2-3 (interdit) ;2. Exode, 20, 4-6 (interdit) ;3. Exode, 20, 7 (interdit) ;4. Exode, 20, 8-11 (ordre) ;5. Exode, 20, 12 (ordre) ;6. Exode, 20, 13 (interdit) ;7. Exode, 20, 14 (interdit) ;8. Exode, 20, 15 (interdit) ;9. Exode, 20, 16 (interdit) ;10. Exode, 20, 17 (interdit).Les quatre premiers commandements forment la table rela-tive à Dieu, les six autres forment la table relative au prochain. Le travail de transposition du Décalogue dans l’univers quo-tidien du collégien est aussi un exercice de lecture et d’ap-propriation du règlement intérieur qui permet de valider des compétences du domaine 3 du socle commun.

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DOSSIER Le vocabulaire des textes fondateurs p. 156 à 159

OBJECTIFS ET DÉMARCHE DU DOSSIER▶ L’objectif de ce dossier est de dessiner une histoire des textes sacrés en réfl échissant à leurs supports et en découvrant l’infl uence qu’ils ont eue sur la langue quotidienne. Il permet de répondre aux interrogations de certains élèves sur l’opportunité d’étudier la Bible au collège.▶ Nous avons choisi de consacrer deux pages à l’observation des manuscrits en eux-mêmes. Les textes sacrés sont pris ici dans leur matérialité. Ils permettent de découvrir les langues de la Bible (hébreu, grec, latin…) et du Coran (arabe), les supports d’écriture (codex, livre imprimé ; tessons…) et d’inscrire la diff usion des textes dans une chronologie.▶ La deuxième double page fait étudier la Bible selon un point de vue linguistique : elle revient sur les expressions issues de récits bibliques et montre que la Bible a constitué un fonds culturel commun qu’il est intéressant d’aborder.▶ Ce dossier vise à permettre aux élèves :– de situer les textes sacrés dans une chronologie ;– de réfl échir à la question de la traduction ;– de repérer diff érents supports d’écriture ;– d’enrichir leur vocabulaire par la découverte de nouvelles expressions ;– de comprendre l’infl uence de textes sacrés sur la langue.

CORRIGÉS DES QUESTIONNAIRES ET DES EXERCICES

▶ Mène l’enquête ! p. 158– Texte A : vieux comme Mathusalem.– Texte B : être le bouc émissaire.– Texte C : faire sa traversée du désert.– Texte D : œil pour œil, dent pour dent.

– Texte E : c’est David contre Goliath.– Texte F : un jugement de Salomon.– Texte G : pauvre comme Job.

– Texte H : des jérémiades.

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PARCOURS UN GENRE

Chanter, enchanter le monde p. 160 à 171

OBJECTIFS ET DÉMARCHE DU PARCOURSProblématique : Comment les mots des poètes réinventent-ils le monde par la musique et les images ?▶ Ce chapitre présente des poèmes célébrant le monde et manifestant le pouvoir créateur de la parole poétique. Il s’agit de faire percevoir aux élèves le rapport particulier que le poète entretient avec la nature. Il la chante pour ses beautés et l’enchante en jouant avec les mots, leurs sens, leur rythme et leurs sonorités, créant ainsi des images nouvelles. Sous les yeux du poète, la nature s’anime et prend un relief tout particulier.▶ La première double page replace la poésie dans une perspective mythologique avec le personnage d’Orphée, premier des poètes. À l’origine, la beauté du chant d’Orphée avait le pouvoir de charmer même les êtres les plus cruels.▶ Les pages suivantes montrent comment le poète, à la manière d’Orphée, chante et enchante le monde avec ses mots. Il célèbre la nature parce qu’elle est pour lui source d’inspiration. Il la chante sans avoir besoin d’accompagnement musical parce que les mots sont ses instruments : il joue avec leurs sonorités et leur rythme. Il enchante le monde parce qu’il le transforme avec ses mots, créant des images nouvelles et surprenantes. Enfi n, en plus de nous faire voir la réalité autrement, il en crée de nouvelles en jouant avec la disposition des mots sur la page.▶ Les textes choisis permettent d’appréhender la poésie autrement que sous l’angle ludique souvent privilégié en 6e. Il s’agit au contraire de rendre accessibles des textes dont la dimension musicale, les images, doivent donner aux élèves le gout du langage poétique.Ce sont des poèmes d’origines et d’époques variées pour off rir aux élèves un panel assez large du genre poétique. De même, chaque double page propose des poèmes de forme régulière en regard de poèmes à la forme plus libre.▶ Les tableaux qui accompagnent les textes ne sont pas de simples illustrations ; ils doivent aider les élèves à mieux comprendre les images générées par les mots du poème.▶ L’appareil didactique qui accompagne les textes encourage les élèves à exprimer leur sensibilité tout en les incitant à justifi er leurs impressions par des citations. Il les aide à comprendre les procédés utilisés par le poète pour créer des images, susciter des émotions, faire chanter les mots… On propose aux élèves de lire les poèmes à haute voix pour mieux entendre la musicalité des vers, de faire des dessins pour mieux visualiser les images poétiques, et un travail de production écrite, permettant de réinvestir les procédés stylistiques étudiés, clôt chaque page.▶ Les éléments théoriques et le vocabulaire spécifi que sont disséminés au fi l des textes sous forme de schémas ou dans un encadré « Repères littéraires ». Ils sont au service de l’étude du texte. Une leçon complète, synthétique et visuelle reprend tous ces éléments en fi n de parcours.▶ Ce chapitre vise à permettre aux élèves :– d’être conscients du rôle que tient la nature dans l’inspiration du poète et du lien fort qu’il entretient avec elle ;– de comprendre que le poète nous donne à voir le monde sous un jour diff érent ;– de percevoir le pouvoir créateur du langage poétique ;– d’être sensible au travail du poète sur le sens, le rythme, les sonorités et la forme des mots ;– de se familiariser avec un vocabulaire technique ;– d’ouvrir leur imaginaire ;– d’exprimer leur sensibilité et leur créativité ;– de faire des liens entre texte et peinture.

ORGANISATION DU PARCOURS ET CHOIX DES AXES DE LECTURE

1. Orphée, premier des poètes

Cette première double page replace la poésie dans sa généa-logie divine et créatrice. Avec le personnage d’Orphée, les élèves prennent conscience du lien fort qui unit poésie et musique, et de la longue tradition des poètes musiciens. Mais il s’agit surtout de montrer le pouvoir quasi divin qu’attri-buaient les Grecs à la poésie, le chant d’Orphée étant capable de charmer les êtres les plus implacables. Le poète chante et enchante par la force de ses mots.

La poésie : un chant p. 160

● Pistes didactiquesLes élèves découvrent le personnage d’Orphée à travers une œuvre picturale qui devrait susciter leur curiosité. La lecture du court texte informatif placé sous le tableau leur permet de découvrir l’origine divine du héros grec et son gout pour la musique.

● Proposition d’hypothèse de lectureComment F. Boucher représente-t-il la force du chant d’Or-phée ?

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La force des mots p. 161

● Pistes didactiquesIl s’agit d’insister sur le pouvoir enchanteur de la poésie. Le chant d’Orphée, en plus des bêtes sauvages et des êtres inani-més, peut faire plier les divinités les plus implacables et même ramener les morts à la vie.L’histoire d’Eurydice est amputée de sa fi n tragique parce que celle-ci n’apportait rien au sujet du pouvoir de la poésie. Si l’on veut développer la vie du héros, on peut se reporter à l’album d’Yvan Pommaux.

● Proposition d’hypothèse de lectureQuel moment de la présence d’Orphée aux Enfers Frans Francken le jeune représente-t-il ?

2. Le poème pour célébrer le monde

Cette double page présente des poèmes dans lesquels le poète « chante » le monde au sens où il en célèbre les beautés. Il s’agit d’abord de montrer la communion qui unit le poète à la nature, source d’inspiration, puis de faire découvrir aux élèves ce que sont une ode et un hymne, formes poétiques directement inspirées du chant.

Victor Hugo,« Le poète s’en va dans les champs » p. 162

● Pistes didactiquesOn entre dans ce thème avec un poème de Victor Hugo extrait des Contemplations qui évoque la complicité, l’harmonie exis-tant entre le poète et la nature. L’arrivée du poète se prome-nant dans les champs, heureux et absorbé par sa « lyre » inté-rieure, provoque l’émoi de la nature.

● Proposition d’hypothèse de lectureComment le poète met-il en scène le lien étroit qui l’unit à la nature ?

Pablo Neruda,« Ode à la vague »

Auguste Lacaussade, « À l’île natale » p. 163

● Pistes didactiquesDans ces deux poèmes, on découvre un véritable hymne à la nature.Or hymne et ode sont deux formes poétiques de célébration qui étaient à l’origine chantées ou accompagnées de musique. Il s’agira donc d’observer comment les caractéristiques orale et musicale de ces poèmes concourent à célébrer l’élément naturel, source d’inspiration pour le poète.On présentera les deux poètes, en particulier pour faire remar-quer que le poème de Neruda est une traduction.

● Proposition d’hypothèse de lecturePourquoi peut-on dire que ces deux poèmes sont des célé-brations ?

3. Le poème et la musique des mots

Après avoir montré que le poète chante la nature pour la célé-brer et en tire son inspiration, cette double page a pour objec-tif de faire découvrir aux élèves que le poème est musique en lui-même, par ses sonorités et son rythme.

On étudiera la musique des mots dans les deux poèmes pré-sentés en insistant davantage sur les jeux des sonorités chez Verlaine et sur le rythme des mots chez Verhaeren.

Paul Verlaine, « Marine » p. 164

● Pistes didactiques« Marine » est le troisième poème de la seconde section inti-tulée « Eaux fortes » dans les Poèmes saturniens. Le vers impair court et les jeux sur les sonorités donnent au poème une dimension musicale qui fait entendre la tempête et le déchai-nement des éléments.« De la musique avant toute choseEt pour cela préfère l’Impair », dira ensuite le poète dans son Art poétique (1874).

● Proposition d’hypothèse de lectureComment le poète fait-il voir et entendre l’agitation de la mer ?

Émile Verhaeren, « Le Vent » p. 165

● Pistes didactiquesAprès l’analyse d’un poème de forme très classique même si le vers est impair, il s’agit de proposer aux élèves un extrait du long poème de Verhaeren en vers libres. Ils verront ainsi comment la disposition du texte sur la page, nous fait « voir » le vent, en plus de nous le faire entendre.

● Proposition d’hypothèse de lectureComment le poète nous fait-il entendre le souffl e du vent ?

4. Les mots enchanteurs

Le poète célèbre la nature, il la chante et fait chanter les mots, mais son pouvoir est plus grand encore : il change notre regard sur le monde en créant des images nouvelles. Sa sensi-bilité, son regard particuliers donnent un pouvoir enchanteur aux mots.Cette double page vise donc à faire comprendre aux élèves le propre du langage poétique : donner à voir le monde sous un jour nouveau. Cocteau dit de la poésie qu’« Elle dévoile dans toute la force du terme. Elle montre nues, sous une lumière qui secoue la torpeur, les choses surprenantes qui nous envi-ronnent et que nos sens enregistraient machinalement. »Il s’agira de moyens utilisés par le poète pour nous donner à voir un monde nouveau : il donne vie aux éléments en les personnifi ant et il nous les fait voir autrement en créant des images par des associations nouvelles de mots.Les deux poèmes proposés en page 167 reposent sur la per-sonnifi cation d’éléments naturels. Le premier nous montre un vent taquin agaçant le vieil océan fatigué tandis que le second présente une lune coquette ayant fait tomber son éventail dans la mer. Milosz fait parler le vent à la première personne tandis que T. Gautier se met en scène admirant une lune si envoutante qu’il lui donne des traits féminins. Les deux poètes transforment les paysages qu’ils ont observés en saynètes imagées et vivantes. Il s’agira de faire percevoir aux élèves le rôle de la personnifi cation dans l’enchantement poétique.La deuxième page vise à montrer aux élèves le regard particu-lier que le poète porte sur le monde. Arthur Rimbaud se disait « voyant » : « Je dis qu’il faut être voyant, se faire voyant. Le Poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérè-

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glement de tous les sens. » Les élèves découvriront donc la nature transformée selon Queneau, Eluard et Supervielle. Le procédé de la comparaison permettra d’introduire la mise en relation des mots pour former des images nouvelles.

Oscar Venceslas de Lubicz-Milosz, « Le Vent » p. 166

● Pistes didactiquesOscar Venceslas de Lubicz-Milosz nait en « Lituanie histo-rique », aujourd’hui la Biélorussie. À onze ans, il arrive à Paris. Il fait ses études à l’École du Louvre et adopte le français comme langue d’écriture. Ses premiers poèmes paraissent en 1899. Ensuite, il ne cesse plus d’écrire : poésie, roman, théâtre, tra-ductions, essais politiques et métaphysiques. « Milosz, c’est le plus beau cadeau que l’Europe ait fait à la France », dira le poète français Paul Fort. « Le Vent » est extrait du recueil Les Éléments publié en 1911.Après lecture, on pourra demander aux élèves de comparer ce poème à celui de Verhaeren pour qu’ils expriment le carac-tère très diff érent du vent dans chacun des poèmes.

● Proposition d’hypothèse de lectureDe quelle manière le poète nous présente-t-il le vent ?

Théophile Gautier, « Au bord de la mer » p. 166

● Pistes didactiquesCe poème de jeunesse, frais, ciselé et plein de délicatesse, met en scène un poète amoureux d’une lune coquette, doux conte inventé en regardant le refl et de la lune sur la mer.L’objectif du questionnaire est de faire comprendre aux élèves comment le regard du poète a transformé la réalité.

● Proposition d’hypothèse de lecturePourquoi le poète se met-il en scène avec la lune ?

Raymond Queneau, « Apprendre à voir » p. 167

● Pistes didactiquesCe poème a été publié en 1968 dans le recueil Battre la cam-pagne, qui succède à un an d’intervalle à Courir les rues. Que-neau y reconstruit souvent une campagne qui serait selon son cœur. Ici, il joue avec les couleurs.

● Proposition d’hypothèse de lecturePour quelle raison le poète a-t-il changé les couleurs de la nature ?

Jules Supervielle, « Un sapin, la nuit… » p. 167

● Pistes didactiquesDans ce poème, Supervielle nous livre ses visions nocturnes presque fantastiques. Le paysage est transformé à la fois par le manque de lumière et par l’imaginaire du poète. Il s’agit pour les élèves de comprendre que le poète peut transformer la réalité par sa sensibilité particulière et par ses mots.

● Proposition d’hypothèse de lecturePour quelle raison le poète associe-t-il le sapin et la barque ?

5. Le poème comme un monde

Le parcours se clôt avec une double page présentant de très courts poèmes qui peuvent être considérés comme de petits mondes en eux-mêmes. Le poète associe les mots pour créer des images qui transforment le monde, il joue sur leur rythme et leurs sonorités pour le chanter, mais il peut aussi jouer avec leur disposition sur la page pour faire naitre de nouvelles images.À travers des haïkus et un très court texte de Jules Renard, les élèves découvrent, d’une part la force créatrice de la méta-phore, et de l’autre la manière dont le poète parvient à saisir un instant de vie, traduire une émotion fugace en quelques mots seulement. Le papillon sert de thématique à toute la page.Les calligrammes proposés en page de droite associent aux images mentales créées par les fi gures de style les images visuelles formées par la disposition des mots sur la page. Les élèves sont invités à saisir la richesse de ce double pouvoir d’évocation.

Jules Renard, « Le Papillon » p. 168

● Pistes didactiquesLes Histoires naturelles est un recueil de portraits d’animaux croqués sur le vif. Dans une courte narration ou un seul vers, l’auteur nous présente insectes, animaux des bois ou des basses-cours sous un trait drôle, inattendu, mais toujours juste. Un sens du détail et de l’observation, une langue poé-tique, donnent à chaque sujet une présence vibrante d’émo-tion.Ces portraits d’insectes sont si poétiques que les images créées nous les montrent sous un jour complètement nou-veau. Leur étude permettra aux élèves de prendre conscience du pouvoir créateur de la métaphore.En prolongement, on pourra leur faire écouter la mise en musique de certaines de ces histoires par Maurice Ravel en 1906.

● Proposition d’hypothèse de lectureComment le texte poétique, sous une apparente simplicité, dit-il plus qu’il ne montre ?

Haïkus : l’art de peindre un instant p. 168

● Pistes didactiquesLe haïku est un genre importé dont la brièveté crée la force évocatrice. En japonais, il suit un modèle de structure régu-lière (5-7-5 syllabes) que les traducteurs ne peuvent respecter. Dans son contenu, il peut évoquer une saison, un instantané sensible (image, son, odeur, gout, sensation de froid ou de chaud…), une émotion ; son point de vue relève toujours de l’étonnement et de l’émerveillement. L’idée de célébration du monde se retrouve également ici.La page présente trois haïkus évoquant des papillons.

● Proposition d’hypothèse de lectureComment une poésie de l’instant et de la brièveté peut-elle exprimer la profondeur des sensations et des émotions ?

Calligrammes de Daniel Brugès p. 169

● Pistes didactiquesL’étude de calligrammes a pour objectif de faire comprendre aux élèves le lien étroit qui existe entre le texte et le dessin des

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calligrammes. Le jeu de la disposition des mots sur la page vient ici renforcer les images créées.Le questionnement s’attache à attirer l’attention des élèves sur la facture inhabituelle du poème et l’eff ort de lecture qu’elle nécessite.

● Proposition d’hypothèse de lectureComment le poète fait-il de la typographie et de la mise en page les signes visuels de la réalité à retranscrire ?

CORRIGÉS DES QUESTIONNAIRES ET DES EXERCICES

1. Orphée, premier des poètes

La poésie : un chant p. 160

Étudier une représentation d’Orphée1. Orphée est reconnaissable à sa lyre. Il charme les animaux par sa musique et son chant.2. Les diff érents animaux qui entourent Orphée sont d’ori-gines variées et semblent vivre en harmonie alors que les prédateurs côtoient les proies. Ils paraissent tous apaisés et attirés par la musique du héros.3. Orphée regarde vers le ciel et il est éclairé par un rayon de soleil qui pourrait être un rayon divin. Cette lumière peut être interprétée comme l’inspiration ou la force créatrice envoyée par ses parents divins.4. Le chant d’Orphée charme les animaux et semble apaiser même les plus sauvages puisque le lion se couche devant lui.◗ La voix d’Orphée apaise les bêtes sauvages, mais elle a également le pouvoir d’émouvoir les êtres inanimés. On dit qu’il charmait aussi les arbres et les rochers au point qu’ils se déplaçaient pour le suivre et l’écouter.

▶ Autres représentations à proposer éventuellement aux élèves– Orphée jouant de la lyre devant le public d’animaux, mosaïque du IIIe siècle, Turquie.– Domenico Brandi (1683-1736), Orphée charmant les ani-maux au son de sa lyre, huile sur toile (142 x 220 cm), Palais Fesch, musée des Beaux-Arts, Ajaccio.– Orphée a infl uencé de nombreux artistes, notamment des poètes et musiciens. On peut faire écouter aux élèves un extrait de l’opéra de C. W. von Gluck, Orphée et Eurydice, com-posé en 1762.

La force des mots p. 161

▶ Mène l’enquête !Demander de trouver le nom de ces personnages est une manière ludique d’aider les élèves à mieux comprendre le texte de Virgile et à saisir la force du chant d’Orphée.Chacun des noms à trouver est en gras dans les textes.a Eurydiceb Ixion sur sa rouec Orphée tenant sa lyred La déesse des Enfers, Proserpinee Le dieu des Enfers, Plutonf Cerbère, le chien à trois têtes, gardien des EnfersL’étude du tableau peut être prolongée par des recherches sur les êtres peuplant les Enfers de la mythologie greco-latine.

Comprendre le choix du jeune héros1. On reconnait que le texte de Virgile est un poème parce qu’il est disposé en vers sur la page et que ces vers riment.2. Tout semble s’arrêter sur les pas d’Orphée parce qu’il joue de la lyre. Les êtres des Enfers cessent toute activité et ne font plus aucun bruit pour mieux l’écouter : « Cerbère au triple mufl e a cessé d’aboyer » (v. 3) ; « Sur sa roue Ixion s’arrête de tourner » (v. 5).3. Orphée est venu chercher sa femme Eurydice et elle le suit alors qu’il est en train de revenir vers le monde des vivants : « Enfi n, grâce à son luth, vainqueur du noir trépas, / L’aède harmonieux revenait sur ses pas. » (v. 8-9)4. Avec sa voix, Orphée parvient à charmer Cerbère, le chien monstrueux gardien des Enfers, les impitoyables Euménides, cruelles divinités des Enfers, les dieux eux-mêmes et enfi n la mort. Bilan 5. D’après ce récit, la poésie a le pouvoir de charmer les êtres les plus cruels, de faire plier les êtres les plus impla-cables et d’attendrir les dieux. Elle est aussi et surtout capable de vaincre la mort.

2. Le poème pour célébrer le monde

Victor Hugo,« Le poète s’en va dans les champs » p. 162

Comprendre le lien entre le poète et la natureEntrer dans la lecture. Cette première question personnelle incite les élèves à faire appel à leur expérience et à convoquer des images intérieures pour mieux comprendre le texte. Ils pourront ainsi comparer leur ressenti avec celui du poète.1. L’idéal est d’off rir aux élèves une lecture expressive qui les aidera à mieux percevoir le rythme, les sonorités et la poly-phonie du poème. La poésie ne se chante plus que rarement, mais elle doit se donner à entendre ; or il est diffi cile pour les élèves d’entendre sans une lecture à haute voix.Il s’agit d’identifi er ce texte en tant que poème. Les élèves ont déjà lu et étudié des textes poétiques en primaire. Ils doivent faire appel à leurs connaissances pour répondre à ces premières questions. Ce texte est un poème parce qu’il est disposé en vers et que ces vers riment. Il est bien entendu que ces deux critères ne défi nissent pas le langage poétique, d’autant plus qu’on proposera aux élèves des textes en vers libres, mais ils leur donnent des points de repère qui peuvent ensuite être modulés.Le repérage de ces éléments visuels et auditifs est facilité par la présence des accolades violettes à la fi n des premiers vers. On peut demander aux élèves de retrouver toutes les rimes.2. Cette question assez simple demande aux élèves de démê-ler la syntaxe complexe qui retarde l’expression du groupe verbal. On les aidera en leur demandant de réduire ces phrases très longues à leurs éléments essentiels.

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Les fl eurs se font belles à l’approche du poète parce qu’elles sont amoureuses de lui : « Prennent, pour l’accueillir agitant leurs bouquets, / De petits airs penchés ou de grands airs coquets » (v. 7-8).Les arbres le saluent en se courbant en avant parce qu’ils le respectent comme « rêveur » : « Lui font de grands saluts et courbent jusqu’à terre / Leurs têtes de feuillée et leurs barbes de lierre » (v. 17-18).3. Le poète semble ne s’apercevoir de rien : « c’est le rêveur » (v. 20) perdu dans ses pensées. Cependant, il n’est pas indif-férent à la nature, bien au contraire : « il admire, / Il adore » (v. 1-2). La nature est un sujet d’admiration et de bonheur qui réveille en lui une musique intérieure (« il écoute en lui-même une lyre », v. 2), symbole de l’inspiration.On attirera l’attention des élèves sur le mot « lyre », référence directe à Orphée. Si le chant du poète ne s’accompagne plus d’un instrument de musique, la musique n’a pas disparu, elle est intériorisée. Bilan 4. Les élèves sont invités à réfl échir sur le lien qui unit le poète à la nature. Leurs propositions doivent faire état d’une complicité, d’une communion avec la nature qui est source d’inspiration pour le poète.On pourra expliquer aux élèves que de nombreux poètes (comme les romantiques) évoquent la nature comme refl et de leurs sentiments.

▶ Dessiner pour comprendreLe dessin va permettre aux élèves de percevoir la personni-fi cation des éléments naturels auxquels le poète prête des actions et des pensées humaines. Cet élément stylistique sera développé p. 166.

▶ Lecture d’image1. Le tableau de Claude Monet illustre bien le poème de Vic-tor Hugo parce qu’il présente un personnage qui se promène dans un champ de fl eurs bordé d’arbres. On voit « Les petites fl eurs d’or, les petites fl eurs bleues » (v. 6) et des coquelicots « qui des rubis font pâlir les couleurs » (v. 4).Cette observation du tableau peut également être l’occasion d’enrichir la culture botanique des élèves en leur faisant réa-liser un herbier imagé des espèces de fl eurs et d’arbres évo-qués par le poète.2. Cette question renvoie au dessin qu’ont fait les élèves. S’ils ont bien compris, ils ont représenté des fl eurs et des arbres humanisés (avec des yeux, des bouches...). C’est cet aspect vivant, animé qui manque dans le tableau pour illustrer fi dè-lement le poème de Victor Hugo.

Pablo Neruda, « Ode à la vague »

Auguste Lacaussade, « À l’île natale » p. 163

Comprendre comment les poètes célèbrent ce qu’ils aiment1. L’idéal est toujours d’off rir une lecture expressive qui aidera les élèves à mieux percevoir le rythme, les sonorités et le sens du poème.2. Voici une liste des éléments aidant à savoir quel ton employer :– « Ode à la vague » : les répétitions et la disposition du texte.– « À l’île natale » : les points d’exclamation et la ponctuation en général.

3. Les poètes montrent la force de leurs émotions notam-ment en utilisant des phrases exclamatives. Ils s’adressent directement à la vague ou à l’ile en les interpellant avec des interjections et ils montrent leur caractère obsédant par des répétitions.4. Voici le vocabulaire de la musique et les éléments de chaque poème qui les rapprochent de la chanson :– « Ode à la vague » : « chanter » (v. 6). Par ailleurs, la répétition, qui marque comme un refrain, montre le caractère obsédant de la vague pour le poète.– « À l’île natale » : « chants » (v. 2) ; « À toi mes chants ! à toi mes hymnes et ma lyre » (v. 7). Par ailleurs, Lacaussade inter-pelle son ile à trois reprises par l’interjection « ô » comme dans une litanie. Bilan 5. Pablo Neruda célèbre la vague parce qu’elle est pour lui source d’inspiration. C’est en la chantant à de nombreuses reprises qu’il lui exprime son amour.Auguste Lacaussade célèbre son ile natale parce qu’il y est très attaché. Il l’aime pour sa beauté, parce qu’elle est musique par le chant des oiseaux, de la mer et du vent, parce qu’il y a vécu son enfance. Il lui exprime son amour en s’adressant à elle comme à une femme aimée, en la tutoyant et en énumérant ses beautés.

▶ Célébrer à la manière de…Il s’agit de réutiliser les éléments analysés par les deux poètes pour écrire à son tour un poème de célébration. L’encadré « Grammaire pour lire et pour écrire » doit les y aider.Les élèves, après avoir choisi l’élément qu’ils veulent célé-brer, feront une liste de ses qualités et de mots ayant trait à la musique, composeront une phrase refrain et feront en sorte de s’adresser directement à cet élément en utilisant au moins une fois l’interjection « ô » et des phrases exclamatives. On veillera à ce qu’ils disposent leur texte en vers. Quelques vers suffi ront.

3. Le poème et la musique des mots

Paul Verlaine, « Marine » p. 164

Comprendre comment le rythme et les sons font entendre le sens1. L’idéal est d’off rir aux élèves une lecture expressive qui les aidera à mieux percevoir le rythme et les sonorités du poème.Les vers très courts confèrent au poème son rythme saccadé. Les consonnes r, t, z ou g donnent aux mots un caractère rude qui peut rappeler la violence de la tempête. Le son [s] mime le souffl e du vent :« Tandis qu’un éclairBrutal et sinistreFend le ciel de bistreD’un long zigzag clair »2. Le verbe « palpiter » signifi e être agité de mouvements plus ou moins réguliers rappelant ceux de la vie, par leur rythme régulier ou leur précipitation. Le cœur palpite lorsqu’il bat.Le poète dit que l’Océan palpite à cause du mouvement des vagues qui vont et viennent. Cela lui donne un aspect vivant.On pourra faire relever aux élèves tous les mots appartenant au champ lexical du mouvement, notamment dans la troi-sième strophe, afi n qu’ils perçoivent la violence des vagues pendant la tempête.

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3. Le rythme du poème est régulier mais rapide parce que les vers sont courts et qu’ils contiennent le même nombre de syl-labes. Ce rythme mime celui des vagues agitées dont le ressac est cependant régulier.On encouragera les élèves à lire eux-mêmes à haute voix pour entendre et faire entendre le rythme des vers.Le repère littéraire est donné pour que les élèves perçoivent le lien entre le rythme d’un poème et son nombre de syllabes. On pourra ensuite travailler la métrique, mais ce n’est pas le but ici.4. Les mots du champ lexical du bruit sont les suivants : « sonore » (v. 1), « palpite » (v. 2 ; v. 4), « clame » (v. 12), « rugit le tonnerre » (v. 15). On demandera aux élèves si ces bruits sont doux ou forts, et ce qu’ils évoquent pour eux.On entend le son [r] aussi bien à la rime qu’à l’intérieur des vers 14 et 15. C’est un son assez dur :« Où l’ouragan erre,Rugit le tonnerreFormidablement »Le poète a certainement cherché à faire entendre le gronde-ment du tonnerre en multipliant les r.On peut éventuellement lire toute la strophe en roulant les r pour les mettre en valeur. Bilan 5. Le poète nous fait entendre le bruit de l’océan déchainé à travers le rythme et les sonorités des mots qu’il emploie. La régularité des vers mime le ressac des vagues agi-tées tandis que les consonnes r, t, z ou g donnent aux mots un caractère assez dur qui peut rappeler la violence de la tem-pête. Le son [s] mime le souffl e du vent.À ce stade, on peut proposer aux élèves de préparer en groupes une lecture expressive et rythmée du poème.

▶ Lecture d’imageCette analyse d’image a un double objectif : donner des images mentales aux élèves afi n qu’ils puissent se représen-ter une tempête en mer, et les amener à expliciter les images poétiques employées par Verlaine. Elle peut être proposée avant ou après le travail sur les sonorités.Pour les élèves qui ont des diffi cultés à se construire une représentation mentale, on pourra aussi montrer Marine de Claude Monet (1881) et leur demander quel tableau leur semble illustrer le mieux le poème.Le tableau de W. Turner illustre bien le poème parce qu’il pré-sente une scène de tempête nocturne. La lune est « en deuil » (v. 3) parce qu’elle est voilée par les nuages. On voit l’Océan « palpiter » grâce au creux formé par les vagues. Le jeu des couleurs et des lumières nous montre chaque lame qui « Va, viens, luit et clame » (v. 12). Il manque l’éclair, mais « le ciel de bistre » (v. 7) apparait menaçant pour les malheureux pêcheurs qui entendent certainement « rugir le tonnerre » (v. 15).

Émile Verhaeren, « Le Vent » p. 165

Comprendre que le poète joue avec le rythme et les sonorités1. Le poète évoque un vent violent puisqu’il « se déchire et se démembre » (v. 5), qu’il est qualifi é de « sauvage » (v. 8), qu’il « rafl e » (v. 16), qu’il « mord dans les branches » (v. 19) et qu’il agit « rageusement » (v. 23 ; v. 24).Le repérage de ces qualifi catifs et de ces verbes d’action doit conduire les élèves à comprendre que le vent est personnifi é

et présenté comme une sorte de bête monstrueuse qui vio-lente ou malmène tout ce qui se trouve sur son passage.2. Les mots qui évoquent des sons ou des bruits sont les sui-vants : « cornant » (v. 2), « souffl es lourds » (v. 6), « grincent et crient » (v. 14), « râpe du fer » (v. 21). Ce sont des sons désa-gréables et discordants.Ces bruits sont liés aux éléments que rencontre le vent et sur lesquels il déchaine sa fureur. Les repérer doit amener les élèves à mieux comprendre où se trouve le vent et ce qu’il fait dans chaque strophe. Les élèves peuvent, avec leurs mots, expliciter chacune des strophes afi n d’en comprendre les images.3. L’écoute de l’enregistrement du vent est un autre moyen de permettre aux élèves de se créer des images mentales (ici auditives) pour mieux comprendre.On entend des rafales, c’est-à-dire des coups de vent subits et brutaux, qui se répètent, vont et viennent.Une tempête est un vent furieux et destructeur ; une bour-rasque est un coup de vent violent et de courte durée ; un tourbillon est un vent tournant qui fait tourbillonner les feuilles mortes.4. Dans chaque strophe, un vers ou une partie d’un vers revient, modifi é ou à l’identique. Des anaphores renforcent cette idée de répétition, de retour, telles les rafales qui vont et viennent (« Voici le vent… », v. 2, 4 et 7 ; « Aux puits des fermes » / « Aux citernes des fermes », v. 9 et 12 ; « Le vent », v. 16, 18, 19, 21 et 25).5. Quand on regarde la disposition du texte sur la page sans le lire, on remarque une alternance irrégulière de deux vers longs, puis d’un vers court qui rappellent le souffl e irrégulier du vent. Cette disposition du texte infl ue sur le rythme donné à la lecture.Ce sera l’occasion de constater que les strophes ne com-portent pas le même nombre de vers, et d’évoquer les vers libres.6. Les sons [B], [U], [s] et [v] reviennent sans cesse dans la première strophe parce qu’ils imitent le souffl e du vent. Les deux consonnes en font entendre le siffl ement tandis que les sons [v] et [B] rappellent le mot « vent » lui-même.Après repérage de l’écho que forment ces sons à l’intérieur des vers, on peut introduire le vocabulaire spécifi que de l’as-sonance et de l’allitération proposé dans le repère littéraire. Ce sera l’occasion de leur faire rechercher les allitérations pré-sentes dans le poème de Verlaine (quatrième strophe).Si les élèves ne l’ont pas encore remarqué seuls, il peut être intéressant d’attirer leur attention sur l’irrégularité des rimes (vers libres).7. Les élèves ont déjà été sensibilisés au rythme donné par la métrique du vers dans le poème de Verlaine. Le découpage syllabique proposé les aide à percevoir plus précisément le rythme de ce poème.La lecture peut se faire de diff érentes manières : rapidement pour faire entendre la course du vent qui crée l’agitation et balaye tout sur son passage, ou lentement, en adoptant un ton grandiloquent, comme le poète, pour montrer la force du souffl e du vent. On peut aussi faire alterner lenteur et accélé-rations en suivant le mouvement du texte (vers longs et sus-pensifs, puis courts et rapides) pour mimer les rafales qui vont et viennent. Bilan 8. Comme pour le texte de Verlaine, on peut demander aux élèves de préparer cette lecture seuls ou en groupes et de la présenter à la classe.

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On pourra ensuite leur faire écouter Émile Verhaeren lui-même, récitant « Le Vent ».

▶ Écrire quelques vers sonoresLe travail proposé demande aux élèves de réinvestir ce qu’ils ont découvert dans les deux poèmes. Il peut être l’occasion d’une recherche de vocabulaire sur les sons et les bruits en leur faisant réaliser, par exemple, des corolles lexicales ou cartes mentales.

Ressource numériqueComment construire une carte mentale ?lienmini.fr/jdl-002

VIDÉO

Il s’agira de partir d’une liste de mots évocateurs et de sons caractéristiques. Les élèves doivent faire entendre le bruit de l’eau et jouer avec ces sonorités aussi bien à la rime qu’à l’inté-rieur des vers. On les encouragera à travailler la longueur des vers et leur disposition sur la page.En prolongement, on peut leur montrer « Il pleut », dans les Calligrammes d’Apollinaire (1918).

4. Les mots enchanteurs

Oscar Venceslas de Lubicz-Milosz, « Le Vent » p. 166

Théophile Gautier, « Au bord de la mer » p. 166

Comprendre comment le poète donne vie aux élémentsTexte 61. Le dessin en trois vignettes doit permettre aux élèves de comprendre la structure narrative du poème. La nécessité de représenter le vent et l’océan doit les aider à percevoir leur personnifi cation.On peut imaginer une première vignette dans laquelle les élèves présentent un vent anthropomorphe au visage doré et au manteau recouvert de soleil, qui rit ou fait une moue ennuyée. La deuxième vignette pourrait montrer le vent volant au-dessus d’un océan humanisé endormi et le réveil-lant de son pied. La troisième pourrait, enfi n, montrer le vieil océan assis, s’étirant avec un visage renfrogné, et le vent riant un peu plus loin.Cette mise en image rend « concrète » l’image poétique de la personnifi cation.2. Le vent est « joyeux » et « rapide » (v. 1) ; il est taquin (« moqueur », v. 7), insouciant (« insoucieux passant », v. 8) et rieur (« souffl e son rire », v. 8). Il parait jeune et dynamique.Au contraire, l’océan est présenté comme un « vieillard » (v. 6) « maussade » (v. 5), plongé dans le sommeil.Le vent est un élément que l’on ne perçoit que lorsqu’il est en action ; son souffl e donne du mouvement aux autres élé-ments, fait envoler les feuilles, chuter les arbres et provoque les tempêtes en mer. L’océan reste immobile sans vent, la mer est d’huile et semble immobile. C’est la raison pour laquelle on peut penser qu’il dort.Cette analyse des caractéristiques du vent et de l’océan doit permettre aux élèves de surmonter la diffi culté que pré-sentent leurs désignations multiples, le repérage de la chaine

anaphorique étant encore, en 6e, un véritable obstacle à la compréhension.Si les élèves ne l’ont déjà remarqué, on abordera la question du point de vue : la personnifi cation du vent est d’autant plus visible que le poète a choisi de le faire parler.Texte 73. C’est l’histoire de la lune qui fait tomber son éventail dans la mer et qui ne peut le rattraper. Le poète aimerait bien le lui rapporter.4. Le dessin, à nouveau, aidera les élèves à comprendre la per-sonnifi cation de la lune qui est assimilée à une jeune femme coquette. Ils peuvent la représenter en train de « tendre son bras d’argent » (v. 6) pour essayer de rattraper son éventail qui fl otte sur la mer.5. Le tableau doit aider les élèves à comprendre les méta-phores utilisées par le poète : les soirs de pleine lune, celle-ci se refl ète sur la mer et son rayon pâle peut être pris pour son bras argenté, tandis que sa lumière diff ractée par l’eau mou-vante ressemble à un éventail pailleté.On pourra aussi montrer le tableau de Jacques Van Gingelen (1801-1864), Pleine lune sur la baie, qui présente un refl et très proche de « l’éventail à paillette ». Bilan 6. Après la lecture de ces poèmes, on ne considère plus le vent, l’océan et la lune de la même manière. Le vent est un jeune homme taquin, l’océan, un vieillard fatigué aux « yeux obscurcis par les larmes de sel » (v. 9), et la lune qui se refl ète dans la mer devient une jeune femme coquette essayant de ramasser l’éventail qu’elle a laissé tomber.Ces éléments naturels semblent plus familiers parce qu’ils sont personnifi és ; leurs caractères humains nous les rendent plus proches.

▶ Utiliser des personnifi cationsCet exercice d’écriture demande aux élèves de réinvestir ce qu’ils ont découvert dans les deux poèmes. Il s’agit de person-nifi er un objet ou un élément naturel. En préparation, on fera imaginer aux élèves les traits de caractère de l’élément choisi (enjoué, grincheux, mélancolique, facétieux…), son âge (jeune ou vieux), son état d’esprit. On leur fera observer que le sujet impose un texte à la première personne, à la manière du poème de Milosz.

Raymond Queneau, « Apprendre à voir » p. 167

Comprendre que le poème nous fait voir autrement1. Ce poème est surprenant parce que le poète s’amuse à changer toutes les couleurs de la nature. S’il voyait « norma-lement », il aurait évoqué des champs de blés jaunes, des prés verts, des troncs d’arbre marron, des agneaux blancs, des chèvres blanches ou grises, des vaches blanches, marron ou noires, des ruisseaux et des mares bleus et une ferme couleur pierre.2. Le mercure est un métal argenté brillant. Le plomb est gris-bleuâtre.« Le ruisseau argenté et la mare gris-bleuLa ferme rouge et l’étable marron »On s’aperçoit que le poète a choisi de garder les couleurs réelles de ces éléments mais qu’il en a changé la matière, nouvelle façon pour lui de présenter le paysage sous un jour diff érent.3. En répétant « pourquoi pas », le poète affi rme son droit de voir le monde comme il l’entend, avec son regard particulier.

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4. Le dessin va, cette fois encore, permettre aux élèves de visualiser le monde nouveau proposé par le poète. On pourra leur faire comparer leur œuvre avec celles des fauvistes ou leur montrer Paysage à l’Estaque III, de Georges Braque (1906). Bilan 5. « La terre est bleue comme une orange »Paul Eluard fait une comparaison surprenante entre la Terre et l’orange. Ces deux éléments ont en commun leur forme ronde mais s’opposent par leur couleur. Or c’est justement cette opposition de couleur que le poète choisit comme point com-mun. Cette association surprenante nous interpelle et nous fait voir la Terre diff éremment.Il est possible de proposer un travail d’écriture demandant d’uti-liser des comparaisons :La pluie est froide comme …La nuit est … comme …Le matin est clair comme …Le soleil me réchauff e comme …

Jules Supervielle, « Un sapin, la nuit… » p. 167

Comment le poète transforme la réalité1. Il s’agit de faire comprendre aux élèves que le poète ne crée pas des images ex nihilo, mais qu’il s’appuie sur des res-semblances qu’il a remarquées. Il peut associer le sapin à une barque, la nuit, à cause de sa forme allongée qui fl otterait dans un ciel foncé ressemblant à une rivière. L’assimilation du ciel à de l’eau se poursuit tout au long du poème.2. Le poème donne une impression d’étrangeté car les vers très courts (5 syllabes) lui donnent un rythme saccadé, qui peut créer un certain malaise. Les mots du poème participent de cette étrangeté avec l’image de la barque qui n’a ni « rame ni bras » (v. 4), l’eau qui « s’eff arouche » (v. 7), et cette méta-morphose qui s’opère à l’abri des regards (« Quand nul ne le voit », v. 2), comme si le sapin était devenu un être fantastique.3. La représentation de Van Gogh de la nuit étoilée n’est pas réaliste car les étoiles surdimensionnées semblent tournoyer pour envouter le spectateur. Le peintre donne ainsi un carac-tère fantastique à son paysage. Bilan 4. Queneau, Eluard et Supervielle portent un regard nouveau sur le monde. Ce sont des « voyants » (comme les défi nit Rimbaud) qui nous font accéder à une dimension cachée, secrète, du monde. Pour cela ils utilisent des images créées par des associations nouvelles de mots. La comparai-son est l’un de ces procédés.

▶ Créer des images poétiquesPour faciliter la réalisation de ce travail d’écriture, les élèves peuvent reprendre la structure du poème et ne modifi er que certains mots. Il faudra bien sûr qu’ils s’appuient sur des res-semblances entre l’élément choisi et ce qu’il devient.

5. Le poème comme un monde

Jules Renard, « Le Papillon » p. 168

Comprendre une métaphore1. L’auteur associe le papillon au billet doux à cause de la res-semblance que l’on peut trouver entre un petit papier plié en deux et un papillon qui referme ses ailes. Tous les deux cachent une beauté intérieure : les magnifi ques couleurs du papillon sont comme les mots tendres et amoureux.

2. Le papillon cherche une fl eur pour s’y poser ; la fl eur que le billet doux recherche est la femme aimée.3. Il s’agit ici d’encourager les élèves à réagir sur cette asso-ciation d’idées qui crée des images nouvelles et à chercher eux aussi de nouvelles correspondances qui créeront d’autres images.

Haïkus : l’art de peindre un instant p. 168

Comprendre le lien entre la forme d’un poème et ce qu’il veut exprimer1. Ces poèmes sont composés de trois vers uniquement.2. Haïku n° 1 : Le poète croit qu’une fl eur tombe de l’arbre, mais il est très surpris de la voir s’envoler et retourner sur la branche. Ce qu’il prend pour une fl eur est en fait un papillon…Haïku n° 2 : Le poète voit un arbre mort recouvert de papil-lons. Il s’imagine alors que l’arbre est fl euri.Haïku n° 3 : Le poète voit un fragile et délicat papillon battre des ailes et pense combien les êtres sont fragiles et éphémères.3. Ces poèmes saisissent un instant de vie, une émotion. Le poète nous fait part d’émotions furtives lors de ses prome-nades dans la nature. C’est une vision fugace, l’impression d’un instant, une pensée brève, exprimées avec fraicheur et concision.4. Haïku n° 1 : b ; haïku n° 2 : c ; haïku n° 3 : a.5. Il s’agit de faire apparaitre dans sa lecture l’émerveillement, la surprise ou la méditation.6. La concision de ces poèmes traduit la brièveté de l’émotion ressentie.

▶ Écrire un haïkuCet exercice d’écriture demande aux élèves de réinvestir ce qu’ils ont découvert dans les trois poèmes. Il s’agit de réussir à évoquer un instant de vie en trois vers seulement. Pour les aider, on peut leur proposer de reprendre la structure syn-taxique de l’un des poèmes. On leur fera également remar-quer la présence de ponctuation expressive.

Calligrammes p. 169

Comprendre comment sens et forme font sensQuand l’enfant1. a. La particularité de ce poème est qu’il forme un dessin.b. Le texte parle d’un enfant, ce que montre le dessin.2. L’enfant a le pouvoir de faire arrêter le temps, de consoler le vent et de faire parler le soleil.3. a. Ce texte est un poème parce qu’il joue sur les images, le rythme et les sonorités des mots. Le vent, le temps et le soleil sont personnifi és, et on distingue nettement à l’écoute du texte un quatrain d’octosyllabes à rimes croisées (« jardin », « tourments », « prochain », « instant »).b. Cette disposition du texte particulière aide à s’imaginer les images créées par le texte. Les mots forment un enfant fi gé sur la page car le vent et le temps se sont arrêtés et le soleil « résonne des mille mots cachés » dans le poème.Araignée4. Pour Daniel Brugès, l’araignée est une « funambule en équi-libre sur le fi l bleu du rêve » alors que pour Jules Renard c’est « une petite main noire crispée sur des cheveux ». Elle appa-rait plutôt sympathique, mais un mot de chaque poème vient assombrir leur ton : « prison » chez Brugès, et « crispée » chez Renard.

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5. Jules Renard associe l’araignée à une main à cause de ses pattes qui pourraient former des doigts. La main est crispée puisque ses doigts-pattes sont sous elle. Les cheveux repré-sentent la toile.6. a. Le poème de Daniel Brugès n’a pas la forme d’une arai-gnée, mais celle de sa toile. Cette toile est celle que l’araignée tisse dans le poème. Comme l’araignée, le lecteur doit se tenir en équilibre sur le fi l tracé par les mots.b. Comme le funambule, l’araignée marche sur un fi l et peut tomber, soumise aux caprices du vent.c. La dentelle est un tissu délicat souvent tissé en fi l de soie formant un dessin et ajouré de nombreux trous. La dentelle que tisse l’araignée a une « odeur de prison » parce qu’elle lui servira à attraper ses proies et à les retenir prisonnières.7. Le poète a choisi de placer le mot « prison » au centre du poème car il symbolise le cœur de la toile. Le lecteur, en sui-vant le fi l formé par les mots, se retrouve lui-même prisonnier au centre de la toile !

▶ Inventer un calligramme• La première consigne invite les élèves à jouer sur la dispo-sition des mots d’un texte déjà existant. Cette activité gra-phique et ludique les prépare au second exercice.• Il s’agit ici d’inventer texte et forme en pensant au lien qui doit unir texte et dessin. On incitera les élèves à jouer sur les associations d’idées, à la manière des poètes étudiés.

Activités d’expression p. 171

Il s’agit de développer la sensibilité esthétique des élèves et de les encourager à échanger sur leurs lectures. On pourra organiser une séance au CDI, et leur proposer divers recueils. Choisir un poème plutôt qu’un autre, c’est déjà exprimer un gout esthétique. Réussir à expliquer la raison de ce choix amène les élèves à faire preuve de discernement. La réalisa-tion d’illustrations leur permet de mettre en images les mots lus et de s’approprier les textes.

ATELIER D’EXPRESSION Lire et écrire des poèmes exprimant des sensations p. 172 à 175

OBJECTIFS ET DÉMARCHE DE L’ATELIER

▶ L’objectif de cet atelier est d’amener les élèves à écrire un poème à partir de leurs sensations. Ce poème sera illustré de manière à mettre en valeur les sensations exprimées et donnera lieu à une restitution valorisante. Il s’agit donc de proposer un travail d’écriture exigeant accompagné d’une illustration créative et ludique qu’aff ectionnent les élèves.▶ Les trois poèmes proposés les guident dans leur écriture. Le questionnement se concentre sur les procédés et le vocabulaire utilisés par les poètes pour exprimer leurs sensations de manières variées ; ainsi, les élèves pourront les réinvestir dans leurs pro-ductions. Chaque poème est accompagné de courts exercices d’écriture préparatoires à la rédaction fi nale : il s’agit d’employer un procédé stylistique, d’enrichir son vocabulaire ou de s’entrainer à illustrer un poème de manière olfactive ou sonore.▶ Les deux poèmes d’Anna de Noailles développent les sens de la vue, du toucher, de l’odorat et même du gout, tandis que celui de Victor Hugo s’attache à l’ouïe. « Chaleur » sera étudié pour la multiplicité des sensations évoquées et l’utilisation des comparaisons ; « Le jardin et la maison » nous fait sentir et ressentir la fraicheur du soir à travers la personnifi cation de la nature ; « Fenêtres ouvertes » est entièrement construit sur l’évocation de bruits présentés par petites touches, produites par l’utilisation de phrases très courtes.▶ Cet atelier invite les élèves à :– exprimer leurs émotions ;– employer des images (comparaisons, personnifi cations) dans leurs écrits pour créer un eff et ;– jouer sur les sonorités et le rythme des mots ;– faire preuve de créativité.

▶ Compétences travaillées– Connaitre le vocabulaire des sensations.– Lire un texte de façon expressive.– Savoir rédiger un texte poétique.– Savoir exprimer ses sensations.

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CORRIGÉS DES QUESTIONNAIRES ET DES EXERCICES

1. Ressentir la chaleur

Anna de Noailles, « Chaleur » p. 172

L’étude de ce poème doit amener les élèves à comprendre comment Anna de Noailles nous fait ressentir la chaleur grâce à des comparaisons convoquant tous les sens. Aucune pré-sence humaine ne vient troubler cette nature accablée de soleil : la chaleur transparait dans l’aspect du paysage.

Comprendre1. Les élèves sont libres de répondre comme ils le souhaitent à cette question. Il s’agit de les faire réagir aux nombreuses images du poème.2. Cet exercice vise à soulever les diffi cultés de vocabulaire sans apporter une défi nition toute faite aux élèves. On les encourage à trouver seuls le sens des mots inconnus en ayant recours aux mots de la même famille.Miroir / miroiter • lumière / luire • bruit / bruire3. En relevant le vocabulaire ayant trait aux sensations, les élèves s’aperçoivent qu’il est omniprésent dans le poème et que les cinq sens sont évoqués. Ils se constituent aussi une réserve de mots qu’ils pourront ensuite utiliser dans leurs pro-ductions.

Visuelle Auditive Tactile Gustative Olfactive

– « Luit »,

« bleuit »

(v. 1)

– « miroite »

(v. 5)

– « jaune et

bleu » (v. 8)

– « oscille »

(v. 9)

– « blés

roses »

(v. 12)

– « bruit »

(v. 2)

– « grésille »

(v. 9)

– « brûlant »

(v. 2)

– « chaude »

(v. 4)

– « fruit

[…] cuit »

(v. 2-3)

– « reine-

claude »

(v. 6)

– « parfum »

(v. 6)

4. Vers 2, 7 et 12, la poétesse fait des comparaisons pour nous permettre de mieux imaginer la sensation décrite.5. Le « soleil » est le sujet du verbe « pleuvoir » au vers 7. Cette association est surprenante mais s’explique aisément : les rayons du soleil sont si ardents qu’ils « arrosent » littéralement le paysage jaune off ert par les champs de blé. La couleur bleue évoque ici le ciel sans nuage. Le grésillement rappelle le bruit que produit un aliment qui frit ; la chaleur du soleil est si intense qu’elle « cuit » le pays. L’oscillation évoquée fait référence aux émanations de chaleur qui, comme des tâches d’huile dans l’air, troublent la vision.6. Le cuivre est un métal de couleur brun-rougeâtre. Il n’est donc pas rose, pas plus que les blés. Cette association surpre-nante de couleurs suit deux vers évoquant le plaisir de vivre et l’ivresse qui, associés à une très grande chaleur, peuvent troubler la perception. Bilan 7. Anna de Noailles convoque toutes les sensations pour évoquer la chaleur. Elle décrit un paysage si dardé de soleil qu’il « cuit », avec les bruits, les senteurs et les goûts associés à la cuisson. Chaque strophe comporte une compa-raison surprenante qui nous donne à voir ce paysage sous un aspect nouveau.

▶ Écrire des comparaisonsCet exercice demande aux élèves de réinvestir ce qu’ils viennent de découvrir dans le texte. On peut les encourager à décliner les eff ets de la douceur, du froid ou de l’amertume selon les cinq sens en multipliant les comparaisons.

2. Sentir le soir

Anna de Noailles, « Le Jardin et la Maison » p. 173

Contrairement au poème précédent, « Le Jardin et la Maison » fait ressentir une sensation de fraicheur et de bien-être dans un jardin le soir. Ces sensations, comme dans « Chaleur », sont perçues par le paysage, mais cette fois-ci la nature, person-nifi ée, est animée et vivante. Chaque strophe présente un élément du jardin qui s’anime, écoute, respire. Le poème se clôt sur une intervention de la poétesse, sensible à tous ces humbles mouvements, ces bruits et surtout ces odeurs qui s’exhalent de son jardin. Elle nous montre la communion qui l’unit à la nature.L’exercice d’illustration olfactive proposé est une activité ludique que les élèves pourront utiliser dans leur production fi nale.

Comprendre1. Ce poème dégage une impression générale d’apaisement et de bien-être, comme le montrent les mots et parties de phrases suivants : « doux » (v. 2), « bruit rafraîchissant » (v. 6), « paisible » (v. 7), « s’apaise et se détend » (v. 10), « mon cœur s’emplit d’ombre, de paix, de rêve et de fraîcheur » (v. 13-14).2. Nous sommes dans un jardin, à la fi n d’une journée enso-leillée, au moment du coucher du soleil.3. Le jardin et la maison paraissent animés parce que l’auteur emploie des verbes caractérisant les actions humaines :– Les arbres et les fl eurs « soupirent » (v. 2).– Les baies du lierre « se couchent » (v. 4).– La maison « respire » (v. 7).– Le feuillage « boit, s’apaise et se détend » (v. 9-10).– La maison « entr’ouvre ses fenêtres » (v. 11), « où tout le soir vivant […] pénètre » (v. 12).Chaque élément du jardin est personnifi é, même la maison, ce qui montre une grande intimité de la poétesse avec le milieu qui l’entoure. On sent une tendresse dans ce poème plein de délicatesse.4. Tous les sens sont à nouveau convoqués dans ce poème, mais l’odorat est le plus présent : « odeurs » (v. 2), « La paisible maison respire […] les petits orangers » (v. 7-8), « le soir vivant et parfumé » (v. 12).5. Dans la dernière strophe, la poétesse dit qu’elle ressent la même paix intérieure, le même bien-être que son jardin et sa maison. On peut dire qu’elle vit en harmonie avec la nature parce qu’elle est sensible à chaque élément (végétal, miné-ral…) présent dans son jardin. On peut l’imaginer assise dans l’herbe comme dans le tableau de Manet, ou penchée à son balcon, attentive aux signes du soir. Les sens en éveil, elle hume l’air, écoute, regarde et sent la fraicheur descendre. Elle semble en communion avec la nature qui l’entoure.

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On pourra inviter les élèves à rapprocher ce poème de celui de Victor Hugo (▶ p. 162). Bilan 6. Anna de Noailles se trouve dans son jardin le soir. Elle observe, écoute et sent tout ce qui se trouve autour d’elle. Attentive au moindre frémissement du feuillage, elle nous fait découvrir une nature vivante en personnifi ant les végétaux ou minéraux de son jardin. Chaque élément fait une action propre aux êtres vivants, comme soupirer, se coucher, respirer, boire, et le soir est parfumé par les fl eurs et les petits orangers.

▶ Enrichir son vocabulaireIl s’agit, à travers ces exercices, de donner du vocabulaire aux élèves afi n qu’ils puissent caractériser leurs sensations et réu-tiliser ces mots dans leurs productions.1. Les bonnes odeurs : délicieuse, douce, sucrée.Les mauvaises odeurs : nauséabonde, pestilentielle, fétide.2. Les odeurs fortes : tenace, enivrante, pénétrante, capiteuse, entêtante, suff ocante.Les odeurs faibles : légère, subtile, douce.3. a. et b.

Élément Odeur

Fruits de mer iodée

Moutarde piquante

Barbe à papa sucrée

Fumée âcre

Lavande fl eurie

Menthe fraiche

▶ Créer une illustration olfactiveIl s’agit d’aider les élèves à mieux percevoir toutes les sensa-tions évoquées dans le poème grâce à une activité ludique et pratique. Le fait de travailler sur les odeurs les obligera à solliciter leurs sens et à faire preuve de créativité. Ils devront également travailler l’expressivité de leur lecture à haute voix pour, en plus de l’odorat, satisfaire l’ouïe de leurs auditeurs.

3. Entendre le matin

Victor Hugo, « Fenêtres ouvertes » p. 174

Le dernier poème nous fait entendre les sons du matin. En dehors de l’originalité du poème, il s’agit de repérer la pré-sence de nombreuses phrases non verbales ou de phrases très courtes qui donnent l’impression d’une scène présentée par petites touches. Les élèves devront utiliser ce procédé dans leur production fi nale. De même, l’exercice d’illustration sonore est une activité ludique qu’ils pourront utiliser par la suite.

Comprendre1. Le poète se trouve dans sa chambre, allongé sur son lit, au moment de son réveil, le matin.Il reste allongé, les paupières à demi fermées et il écoute les bruits qui lui parviennent de sa fenêtre ouverte.2. Plusieurs classements sont possibles : voix humaines/bruits d’animaux/bruits d’objets, ou bruits doux/bruits stridents, ou bruits proches/bruits lointains…En faisant cette liste, les élèves s’apercevront que le poème est entièrement composé de bruits.

3. Victor Hugo entend les bruits provenant d’une ville (cloche, truelle sur un toit, rumeurs, couvreurs, chevaux qui passent dans une ruelle). Cette ville a un port et une plage (baigneurs, bruits du port, quai, steamer, mer). Une garnison se trouve à proximité (musique militaire) ainsi qu’une forge. Le fran-çais n’est pas la langue de cette ville parce qu’il précise qu’il entend des « voix françaises ».Guernesey est en fait une ile anglo-normande où V. Hugo s’était exilé, et où il revient avec ses petits enfants.4. Ces phrases ne contiennent pas de verbe conjugué : ce sont des phrases non verbales. Elles peuvent contenir un mot ou plusieurs. Elles donnent l’impression que les images sur-viennent sans lien entre elles, par petites touches, comme des impressions fugitives.5. Le poète met en scène les bruits entendus en jouant sur les sonorités des mots.Les sonorités en [t] et [r] miment le bruit strident de la truelle sur le toit. Les [f ] et les [ch] reproduisent le chuintement des machines à vapeur. Bilan 6. Le poète a entièrement construit son poème avec des sensations auditives : il nous fait entendre des voix, des cris d’animaux, des bruits d’objets, de la musique... dans un poème rythmé et sonore qui fait la part belle aux allitérations. L’utilisation de phrases non verbales donne l’impression que la scène est montrée par petites touches, impression justifi ée puisque, ne voyant pas la scène, il ne peut faire de liens entre les diff érents éléments entendus.

▶ Créer l’illustration sonore du poèmeCette activité ludique permettra aux élèves de donner corps au poème par un travail sur les bruitages. Ils peuvent repro-duire des sons eux-mêmes, utiliser des objets pour créer les bruits de manière artisanale ou utiliser les banques de sons proposés sur Internet.Elle permettra également de travailler l’expressivité de la lec-ture à haute voix, notamment en mettant en valeur les allité-rations.Si les élèves ont pris plaisir à ce travail, ils pourront faire la même chose avec « Le Vent » d’Émile Verhaeren (▶ p. 165).Les travaux des élèves pourront être valorisés en étant, par exemple, publiés sur le site du collège.

▶ Activité fi naleLes élèves doivent créer leur poème en se servant des textes étudiés et des activités préparatoires, puis ils doivent l’illus-trer de façon visuelle, sonore, olfactive et tactile. Plusieurs contraintes sont données pour leur permettre de réussir leur texte : employer un vocabulaire riche et varié, jouer sur le rythme et les sonorités des mots, créer des images en utili-sant des comparaisons. La consigne demandant d’utiliser des phrases courtes ou non verbales à la manière de Victor Hugo facilitera le travail de rédaction. Les rimes sont recomman-dées, mais pas obligatoires pour ne pas brider la créativité des élèves.Deux grandes étapes sont donc proposées : le travail du texte, puis celui des illustrations.Le brouillonLe travail du brouillon permettra aux élèves de rassembler leurs idées, de les travailler, de planifi er leur écrit. Ils doivent prendre conscience qu’un texte réussi est le fruit d’un travail de collecte d’idées, d’ajouts, de suppression, de modifi cations.Les contraintes étant nombreuses, le travail est volontai-rement très guidé. Il peut être intéressant de proposer aux

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élèves de disposer leurs diff érentes idées sous forme de carte mentale, comme cela est proposé sur l’illustration.Pour ne rien oublier, chaque étape de travail devra apparaitre sur le brouillon. Les élèves doivent ensuite rédiger leur poème en organisant leurs idées et en veillant à bien y intégrer les comparaisons et le jeu sur les sonorités... On leur rappellera de bien disposer leur texte en vers, en faisant éventuellement des strophes.Le professeur peut relever ces brouillons pour réorienter les élèves qui sortiraient du sujet ou pour donner des conseils

d’amélioration. On peut aussi proposer aux élèves de lire les travaux de leurs camarades pour les conseiller.Les illustrationsLes élèves ont déjà une expérience d’illustration olfactive (▶ p. 173) et sonore (▶ p. 174). L’ajout de dessins, peintures ou collages complétera leur travail.La restitutionUn tel travail doit être valorisé. On pourra prévoir une restitu-tion orale au CDI, devant la classe ou d’autres élèves. On peut aussi enregistrer les lectures sonores et exposer les poèmes illustrés.