RECherche APpliquà e en Sciences Sociales corrigé … · Programme Bachelor !!!!...
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Programme Bachelor
RECherche APpliquée en Sciences Sociales – RECAPSS BRL n°01: L'économie circulaire, c'est maintenant!
Le recyclage humanitaire des médicaments
2013 -‐ 2014
Frédéric Rémy Camille Exare Loïc Battini Kim Banerjee
Sous la direction de Éric Vogler
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Table des matières Remerciements ............................................................................................... Erreur ! Signet non défini. Table des matières .................................................................................................................................. 2 Introduction générale ............................................................................................................................. 3 Partie 1 : Revue de littérature ................................................................................................................. 5
1. Le dispositif Cyclamed ................................................................................................................. 5 1.1 Comment se fait le tri des médicaments non utilisés (MNU) par Cyclamed ....................... 5
1.2 La gestion financière du dispositif Cyclamed……………………………………………………………………….6 1.3 Les améliorations en cours du dispositif……………………………………………………………………………..7
1.4 Les doutes du recyclage du médicament par Cyclamed ........................................................ 10 2. L'Histoire de Cyclamed et les dérives liées au don de MNU……………… ………………………………..15 2.1 L'Histoire de Cyclamed……………………………………………………………………………………………………….15 2.2 Les dérives liées au don des MNU………………………………………………………………………………………20
3. Le point de vu des parties prennantes ...................................................................................... 33 3.1 Les associations françaises, en particulier PSF ....................................................................... 33 3.2 Les pays recepteurs ................................................................................................................ 35
4. Cyclamed ou le mauvais objectif du recyclage humanitaire français……………………………………..36 4.1 Retour sur la consommation de médicaments en France …………………………………………………38 4.2 Le bilan de Cyclamed, une valorisation loin d'être réussie………………………………………………….43
Conclusion de la partie ..................................................................................................................... 48 Partie 2 : Enquête terrrain .................................................................................................................... 49
1. L’Objectif de l’enquête de terrain ............................................................................................. 49 2. Est-‐il pertinant de reintroduire le recyclage humanitaire des médicaments en France ?.......Erreur ! Signet non défini.
2.1 Une politique de réduction prévaut sur une politique de réutilisation. Mais cela ne peut pas être le rôle de l’industrie pharmaceutique .................................................................................. 50 2.2 Restreindre le don aux populations démunies situées sur le territoire français, permet d’évacuer un grand nombre de dérives liées au MNU ................................................................. 51 2.3 Un réel besoin d’accès aux soins des plus démunis existe en France .................................... 53
3. Circuit de récupération des MNU et de mise à disposition aux populations les plus démunies en France…………………………………………………………………………………………………………………………………………55 3.1 Description de notre modèle fictif de recyclage humanitaire des médicaments…………………55 3.2 Vérifications de notre modèle sur le terrain……………………………………………………………………….58 Conclusion générale .............................................................................................................................. 63 Bibliographie ......................................................................................................................................... 65 Annexe .................................................................................................................................................. 71
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Remerciements Nous tenons à remercier les personnes suivantes pour leur temps précieux qu’ils nous ont accordé. Eric Vogler Martine Augé Odette Pion Francis Maquet Guillemette Eichemelaub Tous les pharmaciens et pharmaciennes intérrogés
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Introduction générale Le premier avril 1992 est signé un décret qui oblige toutes les entreprises du secteur privé «de contribuer ou de pourvoir à l’élimination de l’ensemble des déchets d’emballage ». Pour répondre à cette obligation, a été créé un système commun de tri et de recyclage des déchets d’emballage, Eco-‐Emballages. Ainsi chaque entreprise est tenue de payer une cotisation à Eco-‐Emballages qui varie en fonction des efforts qu’elle entreprend pour réduire ses emballages et favoriser les matières recyclables. Cependant, l’industrie pharmaceutique décida à l’époque de répondre aux prérogatives du décret par ses propres moyens en mettant en place un dispositif indépendant, Cyclamed. Les principales raisons de cette indépendance sont de deux ordres. Tout d’abord le médicament n’est pas un bien comme les autres, consommé de manière inapproprié, il peut devenir paradoxalement très dangereux pour la santé et il est potentiellement toxiques pour l’environnement et notamment les nappes phréatiques. Ensuite, la mise en place d’un dispositif restreint au secteur pharmaceutique permettait de perpétuer et d’encourager une pratique déjà ancienne, le recyclage humanitaire des médicaments, c’est à dire le don de médicaments non utilisé (MNU) aux populations les plus démunies que ce soit en France ou à l’étranger. Il s’agissait donc d’une initiative très louable de la part du secteur pharmaceutique, de créer Cyclamed afin de répondre à des défis humanitaires. De plus, cela répondait parfaitement aux exigences écologiques du décret de 1992, puisque ce système encourageait la réutilisation plutôt que le recyclage ou l’incinération. Dès lors, on ne peut être qu’étonné d’apprendre que le 26 février 2007, l’article 32 de la loi n° 2007-‐248 a interdit la pratique du recyclage humanitaire des médicaments. C’est donc ce paradoxe, l’interdiction d’un dispositif qui apportait une solution à des problématiques écologiques et humanitaires, qui a orienté notre recherche. Ainsi nous avons voulu comprendre Pourquoi le recyclage humanitaire des médicaments fut-‐il interdit? Et s’il était possible de réintroduire un circuit de recyclage humanitaire des médicaments à l'échelle de la France? La première question est traitée en Revue de Littérature tandis que la seconde est étudiée en Enquête Terrain.
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Partie 1 : de littérature
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Partie 1 : Revue de littérature
1. Le dispositif actuel Cyclamed
1.1 Comment se fait le tri des médicaments non utilisés (MNU) par Cyclamed ? A la fin d’un traitement, tous les médicaments non consommés, ainsi que les blisters, flacons ou boites doivent être rapportés par le patient chez le pharmacien. Cela doit être fait même s’il ne reste qu’une gélule ou bien que le flacon, le tube ou tout autre récipient ne contenant que peu de produit. Cette obligation répond à deux exigences : d’une part il s’agit d’éviter le risque d’intoxication, notamment des enfants, par ingestion inappropriée de substances médicamenteuses. En effet, sur le marché pharmaceutique on constate un grand nombre de médicaments dont la consommation est interdite avant un certain âge. D’autre part il s’agit de prévenir tout risque de contamination de l’environnement car de nombreux médicaments présentent des substances nuisibles pour celui-‐ci. Ainsi jeter les médicaments avec les autres ordures ménagères c’est prendre le risque que ces médicaments se retrouvent enfouis et contaminent par la suite la terre et les nappes phréatiques. De plus, jeter des substances médicamenteuses liquides dans les canalisations contamine directement les eaux usées, sachant que les stations d’épuration sont parfois incapables de traiter certaines molécules issues des médicaments. A ce titre, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) et à l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) ont déjà mené plusieurs études d’une multitude d’échantillons d’eaux potables mettant en évidence des traces de substances de médicaments. (Nous n’avons pas encore traité l’ensemble des rapports des ces deux agences concernant la contamination des eaux par les médicaments, ceux-‐ci est à venir). Une fois les médicaments ramenés à l’officine, le pharmacien est chargé de vérifier que les sacs qui lui sont rapportés ne contiennent pas d’éléments non pris en charge par le dispositif Cyclamed. Le dispositif prend en charges les sirops, les solutions, les aérosols, les sprays, les suppositoires, les patchs, les comprimés, les gélules, les poudres, les pommades, les crème, les gels ainsi que tous leurs emballages. Cependant il ne prend pas en charge les seringues et les aiguilles (le pharmacien est chargé de les collecter mais au travers d’un autre dispositif), les produits vétérinaires, les produits parapharmaceutiques et les compléments alimentaires. Une fois la vérification effectuée, le pharmacien dispose l’ensemble des MNU récupérés dans des cartons Cyclamed prévu à cet effet. (Voir ci-‐dessous)
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Depuis le premier janvier 2009, conformément à la loi du 26 février 2007, la redistribution des MNU récupérés par les pharmaciens à des fins humanitaires est interdite. Par conséquent il n’existe plus qu’un seul type de carton Cyclamed et non plus deux comme autrefois afin de séparer les MNU périmés (destinés à être détruit) et non périmés (destinés au don). Puis c’est au tour des grossistes répartiteurs d’entrer dans le circuit. Ils sont les intermédiaires entre l’industrie pharmaceutique et les officines en approvisionnant ces dernières en médicaments. Lors de leurs livraisons de médicaments aux officines, les grossistes sont chargés de récupérer les cartons Cyclamed puis de les entreposer dans de grands conteneurs situés dans les établissements de chaque grossiste répartiteur de France. Ensuite ces conteneurs sont acheminés dans des stations d’incinération en partenariat avec Cyclamed (cinquante-‐et-‐un à ce jour) qui sont des centres de valorisation énergétique. C’est-‐à-‐dire que la chaleur issue de l’incinération des déchets est utilisée pour générer de l’électricité. Ainsi le dispositif Cyclamed permet chaque année d’alimenter plusieurs milliers de foyers métropolitains en électricité.
1.2 La gestion financière du dispositif Cyclamed En 2013, Cyclamed possède un budget d’environ six millions d’euros pour l’année. Ce budget est financé en très grande partie par l’industrie pharmaceutique. En effet, les entreprises du secteur ont obligation de contribuer à un tel dispositif conformément au principe de responsabilité sociale des entreprises. Ainsi Chaque entreprise du médicament verse 0,0019 centimes d’euros à Cyclamed pour chaque boite mise en vente sur le marché. Actuellement Cyclamed compte 161 laboratoires pharmaceutiques partenaires.
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Le rapport de l’IGAS de janvier 2005 sur le dispositif Cyclamed nous renseigne sur l’utilisation du budget en 2003.
Sans surprise, on constate que les deux tiers du budget de Cyclamed sont consacrés au financement du dispositif de tri des médicaments non utilisés (transport et achat des cartons). La majeure partie du reste du budget, soit 24% de celui-‐ci, est consacrée à la communication. Il s’agit essentiellement de la communication concernant les particuliers (15% du budget) dans le but de les inciter à ramener leurs MNU chez le pharmacien et les sensibiliser aux risques sanitaires et environnementaux. Même si le tableau date de 2003, la répartition du budget n’a guère changée puisque le directeur général de Cyclamed Thierry Moreau-‐Defarges affirmait dans un entretien avec le cabinet de conseil en stratégie Nextep le 3 juin 2013 que les deux tiers du budget de Cyclamed étaient encore consacrés au transport et aux cartons. En outre en 2012, Cyclamed c’est 14 271 tonnes de MNU collectées par les pharmacies françaises et revalorisés dans des centres d’incinération. De manière générale, Cyclamed collecte chaque année en peu plus de 14 000 tonnes de médicaments non utilisés pour 175 000 tonnes de médicaments vendus. Toutefois, pour le directeur générale de Cyclamed (entretien du 03/06/2013 avec Nextep), on ne peut pas parler de 8% de médicaments gaspillés chaque années dans la mesure où dans les sacs ramenés par les patients il peut rester plus ou moins de médicaments (dans les emballages) et que le poids de l’emballage peut varier considérablement d’un médicament à un autre (exemple des sirops en comparaison aux comprimés).
1.3 Les améliorations en cours du dispositif
1.3.1 Le nouvel étiquetage
L’Adelphe est une société en charge de la gestion du tri et du recyclage des emballages ménagers. Initialement restreinte au secteur du vin et se focalisant donc essentiellement sur le verre, Adelphe a élargi son champ d’action et est depuis 2005 en partenariat avec Eco-‐emballage. En 2013,
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Adelphe à travailler en partenariat avec Cyclamed et Leem (l’association des entreprises du médicament) afin de mettre en place en septembre dernier un nouvel étiquetage pour mieux informer le consommateur en ce qui concerne le tri du médicament et de son emballage. Cette initiative est réalisé dans le cadre du grenelle de l’environnement pour atteindre l’objectif de 75% de recyclage fixé par celui-‐ci.
Ce nouvel étiquetage rappelle dans un premier temps au patient/consommateur que les médicaments non utilisés doivent être rapportés chez le pharmacien. Dans un deuxième temps, si les médicaments sont intégralement consommés, alors l’étiquetage nous rappelle qu’il faut trier nos emballages à l’aide de la vignette verte accompagné du point vert, puis il nous indique précisément comment trier les différentes composantes de l’emballage. Ainsi pour l’exemple d’une boite de comprimés, la plaquette plastique VIDE est à jeter avec les ordures ménagères. Quant à l’étui en carton, celui-‐ci est jeté dans bac de tri sélectif. L’étiquetage est modulable en fonction de l’emballage du médicament (boite de comprimé, flacon, tube en aluminium etc.)
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Il existe quatre versions de ce nouvel étiquetage : la version standard présentée ci-‐dessus, une version éco-‐encrée, une version monochrome (noir et blanc) et une version monochrome compacte (avec une police fine afin d’adapter l’étiquetage aux petits emballages). L’info-‐tri médicament ne peut être apposée sur des matériaux perturbateurs du recyclage et doit donc être affichée soit sur l’emballage carton, soit sur la notice. La mise en place de cet étiquetage par les entreprises du médicament sera récompensée à partir du premier janvier 2014 par un bonus de 8% sur la contribution Point Vert. Pour être éligible à ce bonus l’étiquetage mis en place devra impérativement être validé par Adelphe.
1.3.2 Les nouveaux cartons Cyclamed. Même si cela ne semble pas évident, les anciens cartons Cyclamed (pourtant des cartons
ordinaires) présentaient plusieurs inconvénients. Tout d’abord ils posaient un problème de place de part leur taille importante pour les petites officines à l’espace restreint. Mais le problème le plus important concerne la sécurité et le confort des grossistes répartiteurs qui transportent ces cartons. La sécurité avant tout car certains grossistes se sont plaints de contacts avec des seringues (qui n’ont pas à être dans les cartons Cyclamed) qui transperçaient les cartons. Le confort car certains cartons s’éclataient durant le transport et devenaient intransportables. Ainsi les cartons Cyclamed ont subi une importante transformation. Leur taille ont été réduite de 25% afin d’être moins encombrants pour les pharmaciens. Il sont également plus pratiques pour ces pharmaciens grâce à un nouveau système de montage et de fermeture sans adhésif. Leur solidité a été considérablement renforcée pour assurer la sécurité des grossistes. Ils ont en effet été soumis à des tests techniques de perforation, de pression latérale et d’éclatement. Le transport est également facilité par la mise en place de deux poignées. Ancien carton Nouveau carton
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Les nouveaux cartons sont livrés aux pharmaciens depuis fin octobre 2013.
1.4 Les doutes du recyclage du médicament par Cyclamed
1.4.1 La pollution des eaux par les médicaments... un faux problème? NB: cette partie traitera surtout de la pollution de nos rivières, (estuaires compris) et non de celles des milieux marins ou terrestres, puisque cela n'est pas au centre de notre sujet, et puisque l'eau de nos rivières est utilisée pour l'agriculture et est parfois filtrée pour donner des eaux de boissons. Agriculture et industrie sont connues pour injecter dans nos eaux des substances dites "polluantes" car ayant un effet modificateur sur celles-‐ci. À côté de cela, un certain nombre de médicaments sont issus de nos consommations et sont également présents dans nos eaux. Mais comment déterminer la dangerosité de ces substances qui ont potentiellement un effet néfaste sur nos environnements? Pour se faire, la législation européenne a fixé 2 types de législations (directive 2001/83/EC): -‐ Une liste des substances dangereuses pour l'environnement. -‐Des seuils de concentration pour déterminer si oui ou non nos rivières étaient en danger. Pour se faire, le législateur calcule la concentration dans les eaux de nos rivières de chaque substance suivant la procédure de l'agence européenne du médicament. Ils utilisent ainsi le ratio entre l'indice "PEC" (= "Predicted Environmental concentration"), qui correspond à la concentration que l'on s'attend à retrouver dans l'environnement d'un produit dans le "pire des cas", et l'indice "PNEC" (="Predicted No Effect Concentration"), correspondant à la concentration maximale pour laquelle la substance n'a
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aucun effet seule.
Source : les dialogues de l'ASEF Ainsi, si ce ratio PEC/PNEC constaté par mesure est supérieur à 1, c'est à dire qu'il y a effectivement une concentration de substances dites dangereuses supérieures à la dose maximale de non effectivité, alors il y a danger pour l'environnement. Il est intéressant de noter qu'il n'existe pas de législation concernant les rejets de médicaments dans l'environnement, surtout du fait qu'une partie des rejets proviennent de nos urines et de nos excréments, agrémentés de médicaments... du fait même des traitements!
source : rapport de Agroparitech en partenariat avec l'ONEMA Fort de ces méthodes, nos rivières sont-‐elles en danger? Si oui, sommes-‐nous aussi en danger? D'abord, il faut bien réaliser que la concentration en substances polluantes dans nos rivières (et particulièrement médicamenteuses) est variable en fonction de la position géographique où est faite
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la mesure. En effet, non seulement tout dépend de notre position sur la rivière, mais également de la proximité d'une ville, d'une station d'épuration, .... Avant de se lancer dans de quelconques généralités sur la pollution de nos eaux par les substances médicamenteuses, encore faut-‐il réaliser la relativité de l'ensemble des mesures effectuées (puisqu'il n'en existe pas de statistiques généralisées concernant la pollution par les médicaments, et les études existantes donnent souvent des résultats différents du fait de la finesse des mesures à effectuer). Néanmoins, de 2004 à 2008 une campagne exploratoire de contamination des eaux de surface et souterraines par 76 substances médicamenteuses fut lancée dans le cadre du plan national santé environnement. Ce plan prit ainsi 3 bassins pilotes (Rhône-‐Alpes, Seine-‐Normandie, Adour-‐Garonne) dans lesquels 141 sites furent sélectionnés pour les prélèvements: le résultat est sans appel: tous les cours d'eaux de surfaces sont contaminés par au moins une de ses 76 substances. Les produits les plus présents sont le Carbamazépine (anticonvulsants) et les lopromides (utilisés en radiologie), avec de concentration de l'ordre du nanogramme : ce qui ne pose pas de réel problème écotoxicologique. Néanmoins, aux abords des stations d'épurations, des produits tels que l'anti-‐inflammatoire Diclofénac sont présents de manière 100 à 1000 fois plus importantes que le seuil où des effets sur l'environnement sont constatés (troubles de la reproduction chez les animaux de rivières également due aux produits hormonaux...). Aux abords des hôpitaux, ce sont les concentrations en produits anti-‐cancéreux qui sont plus préoccupants du fait de leur potentiels influences sur l'ADN des animaux qui y seraient en contact... Néanmoins, il faut tout de même réaliser que seules des expositions prolongées, et conséquentes peuvent commencer à nuire à nos organismes, sachant que nos eaux de boissons sont filtrées avec des sources contrôlées. Le danger réel est donc plus présent pour les organismes de nos rivières et donc pour l'ensemble de leur chaine alimentaire, même si peu d'études furent menées, le danger reste potentiel (et présent en certains points localisés). La question des "cocktails de substances" Une question reste néanmoins en suspens lorsqu'on évoque les risques potentiels liés à la présence de substance médicamenteuse au sein de nos eaux (et de tout notre environnement): celui de l'effet des "cocktails de substances". En effet, alors que les études existantes font souvent des hypothèses sur les risques réels de la présence de telles ou telles substances, peu s'intéressent à l'impact de la présence simultanée d'une multiplicité de substances médicamenteuses. À cela s'ajoute que l'exposition prolongée à un certain nombre de substances médicamenteuses, notamment antibiotiques, peut potentiellement augmenter la résistance de souche bactérienne. Dès lors, recycler les médicaments non utilisés devient une nécessité si on applique le principe de prévention, et surtout pour éviter l'interférence des produits médicamenteux qui se retrouveraient dans nos déchetteries avec les autres produits présents dans l'eau. Mais il faut bien réaliser que nous ne sommes uniquement dans l'hypothétique, un hypothétique qui apparaît bien utilisé par Cyclamed...
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1.4.2 Les intoxications domestiques: les MNU sont-‐ils un vrai danger à la maison? Cette partie s'intéresse aux intoxications accidentelles par les médicaments et non aux intoxications volontaires. Il est intéressant de noter que l'évolution des comportements a peu varié récemment, nous nous baserons surtout sur des chiffres assez anciens, mais donc toujours valables. Epidémiologie: Entre 1987 et 1995, l'enquête CNAMTS recensa une moyenne annuelle de 20 400 intoxications médicamenteuses accidentelles en France. En moyenne, ce sont surtout les enfants de 0 à 10ans qui sont touchés. L'enquête du "European Home and Leisure Accident Surveillance System" rapporte quant à elle que la majorité de ses accidents se produisent dans la cuisine, par le biais d'une plaquette laissé sur la table, ou par un parent lorsque l'enfant a moins de 1an (surdosage-‐mauvaise prescription)... Ces accidents menaient globalement à une hospitalisation de courte durée (moins de 48 heures) lorsqu'il y avait hospitalisation. À cela s'ajoute que les médicaments ingérés accidentellements sont par ordre de prise (suivant un rapport d'activité de CAP de Bordeaux en 2001): les médicaments fluorés (fluocaryl par exemple), l'éosine, les pilules contraceptives, et le paracétamol. On réalise dès lors que ce sont plus les médicaments dits de consommations courantes qui sont en cause dans les intoxications médicamenteuses accidentelles. Ainsi, cela nous pourrait soulager notre crainte principale: ces produits vont rarement amener un état létal chez l'enfant qui a ingéré une dose trop importante de médicament. En effet, une enquête épidémiologique des services d'urgence (département pédiatrie) de Trieste montrait que sur la période 1975-‐1994, la mortalité due à des ingestions de médicaments accidentelles était de 0,27/100 000. Fort de ce constat assez simple, on réalise le danger en terme d'intoxication que représentent les médicaments non-‐utilisés laissé à la maison. Néanmoins, on peut nuancer cette affirmation par le fait assez simple que l'enfant ne va pas aller chercher de lui même dans l'armoire ce qu'il prendrait pour un "bonbon", mais ces intoxications sont globalement dues à une inattention de la part des parents lors de leur propre prise de médicaments. À cette nuance s'en ajoute une nouvelle: ces intoxications conduisent rarement à la mort des personnes touchées. Conclusion de cette partie: Dès lors, l'argument de Cyclamed concernant le "danger" des médicaments non-‐utilisés pose problème: en plus d'être à fortement nuancer, on pourrait avoir l'impression que la rhétorique de Cyclamed tend à pointer un danger qui n'en est pas un. Que ce soit la pollution de l'environnement, ou les dangers supposés des MNU à la maison, les études statistiques menées sur ces points sont pourtant sans appel, le danger n'est que potentiel, et la transformation de cette potentialité en réalité n'est que très ponctuelle. À cela s'ajoute les
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nombreuses interrogations qui pèsent sur la pollution, et le fait qu'une bonne partie des intoxications médicamenteuses sont volontaires... Oui, Cyclamed semble vouloir détruire des médicaments en se basant sur des hypothèses attrayantes et louables au premier abord, mais dont une étude un minimum approfondie montre les faiblesses. À quoi bon détruire des médicaments qui pourraient donc être valorisés autrement que par leur destruction?
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2. L’histoire de Cyclamed et les dérives du recyclage humanitaire des médicaments.
Si nous traitons dans une même partie l’histoire du dispositif Cyclamed et les dérives du recyclage humanitaire des médicaments c’est parce que l’évolution de Cyclamed ainsi que les polémiques qui ont tourné autour du dispositif sont étroitement liées aux différents problèmes causés par les dons de MNU.
2.1 L’histoire de Cylamed
2.1.1 La signature du décret n°92-‐377 du 1er avril 1992 oblige les entreprises à assurer la gestion des déchets issus de leurs emballages. Le 14 octobre 1991, le président de Danone Antoine Riboud et le président de Saint-‐Gobain Jean louis Beffa rendent au ministre de l’écologie un rapport sur la valorisation des déchets d’emballages domestiques. Ce rapport s’attache à mener une réflexion sur comment améliorer le système de recyclage en France et sur la contribution que pourraient apporter les industriels pour résoudre le problème des déchets ménagers. Ce rapport débouche sur la signature du décret n°92-‐377 le 1er avril 1992. Ce décret prévoit que « tout producteur de déchets résultant de l’abandon des emballages servant à commercialiser des produits consommés ou utilisés par les ménage… est tenu de contribuer ou de pourvoir à l’élimination de l’ensemble des déchets d’emballage, dans le respect des dispositions des articles L373-‐2 à L373-‐5 du code des communes.» A savoir que ce décret s’inscrit dans la droite ligne de l’article L541-‐10 du code de l’environnement qui pose le principe de responsabilité élargie du producteur (REP) qui répond lui même au principe de pollueur-‐payeur. Dès lors, il est logique d’obliger les entreprises à assurer la gestion des déchets ménagers dans la mesure où le producteur est l’agent économique qui pollue le plus. L’application du décret devait passer soit par une contribution aux systèmes communs de récupération et de traitement des emballages (Eco-‐emballage ou Adelphe), soit par ses propres moyens.
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2.1.2 Pour la création du dispositif Cyclamed au lieu d’une participation au système commun Eco-‐emballage ? L’industrie Pharmaceutique décida de répondre aux prérogatives du décret par ses propres moyens pour plusieurs raisons. Commençons par mentionner les raisons techniques. En premier lieu, le système commun de traitement des déchets Eco-‐emballage avait pour but, outre d’inciter les entreprises à réduire la quantité d’emballage et favoriser les matières recyclables pour celui-‐ci, d’inciter le consommateur à opter pour des produits plus respectueux de l’environnement. Cet objectif n’est clairement pas compatible avec le marché du médicament où une grande partie des produits sont prescrits par les médecins et donc imposés au patient qui ne choisit pas ce qu’il consomme. En deuxième lieu, l’industrie pharmaceutique voulait tirer avantage de ce décret pour mettre en place un système qui permettait de préserver et d’améliorer une pratique déjà bien encrée chez de nombreux pharmaciens : le don de MNU (médicaments non utilisés) au profit des personnes nécessiteuses que ce soit en France ou à l’étranger. Enfin cette indépendance vis à vis d’Eco-‐emballage était rendu nécessaire par la spécificité du produit vendu. En effet les médicaments présentent un fort potentiel de toxicité pour l’environnement et un risque d’intoxication en cas de mauvaise utilisation notamment pour les enfants. En plus des raisons techniques, on peut également observer des raisons financières. En effet, d’après le tableau ci-‐dessous réalisé par l’Inspection générale des Affaires Sociales (IGAS) en 2005, il apparaît clairement que l’industrie pharmaceutique allait économiser plusieurs millions d’euros de cotisations en finançant son propre système de collecte et de valorisation des déchets qu’en participant au système commun Eco-‐emballage. Ainsi en 2003 les entreprises du médicament auraient économisé pas moins de 4,215 millions d’euros.
Enfin, la mise en place d’un tel système (indépendant) répondait également à des intérêts personnels. Pour les entreprises pharmaceutiques, la visibilité de Cyclamed allait contribuer à donner une bonne image du secteur en tant que contributeur à la préservation de
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l’environnement et acteur humanitaire. De plus, d’après l’IGAS (2005), la mise en place de Cyclamed aurait permis aux grossistes de négocier avec les autorités publiques un maintien du niveau de leur marge puisque la mise en place du système correspondait à une charge de travail supplémentaire les concernant.
2.1.3 Le dispositif Cyclamed Ainsi, pour des raisons aussi bien techniques, financières que d’intérêts personnels, l’association Cyclamed a été créée en 1993. Cette association est à but non lucratif conformément à la loi de 1901. Elle regroupe l’ensemble de la profession pharmaceutique, pharmacien d’officine, grossistes répartiteurs et industrie pharmaceutique, dans le but de collecter et de valoriser les médicaments à usage humain non utilisés, périmé ou non. Durant les premières années, le tri des médicaments comportait deux dimensions. D’un coté les médicaments périmés étaient incinérés dans le but d’une valorisation énergétique, de l’autre côté Cyclamed se chargeait de distribuer les médicaments non utilisés et non périmés à des organisations humanitaires afin de les mettre à dispositions des populations démunies en France et à l’étranger. Le pharmacien qui triait bénévolement les médicaments qui lui étaient ramenés, les plaçait soit dans les cartons rouges pour les déchets non utilisables soit dans les cartons verts pour les médicaments non utilisés jugés encore valorisables à des fins humanitaires. Le dispositif Cyclamed était donc pleinement satisfaisant car en plus de répondre parfaitement aux exigences du décret de 1992 (sur la prise en charge des déchets ménagers par les entreprises privées), il était porteur d’une mission humanitaire.
2.1.4 Un système vite contesté.
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Et pourtant, moins de dix ans après sa création, Cyclamed se voyait déjà être soumis à une double critique. La première concernait des réseaux frauduleux de revente de MNU de la part de certains pharmaciens. La deuxième faisait référence à la mauvaise gestion et aux conséquences désastreuses de l’envoie de MNU par certaines ONG vers les pays en développement. L’ensemble de ces dérives commencent à être dévoilées au début des années 2000 par les médias, ainsi dans un article publié par Le Monde le 17 janvier 2002 on pouvait lire que : « la collecte humanitaire a donné lieu à des abus qui posent un problème déontologique. « Des bonnes volontés envoient parfois n'importe quoi », regrette Marie-‐Agnès Cros, directrice générale de Pharmaciens sans frontières. Qu'elle s'exerce à l'égard de l'Algérie ou de la Roumanie, la générosité européenne est parfois désordonnée. De la Nivaquine ou des patchs antitabac ont ainsi été envoyés en Bosnie et des crèmes contre les coups de soleil en Afrique noire. Ailleurs, des stocks ont été détournés par les belligérants ou des potentats locaux qui les revendent sur des marchés parallèles. ». Mais déjà quelques années auparavant, en 1999, l’Organisation Mondiale de la Santé avait mis à jour les principes directeurs applicables au don de médicaments dans lesquels elle avait explicitement interdit l’utilisation des MNU à des fins humanitaires. Le 19 juin 2004, la revue spécialisée Le Moniteur des Pharmacies publie un article choque sur le scandale de revente des MNU de la part des pharmacies d’officine après que leurs clients soient venus ramener leurs médicaments. L’article dénonce ainsi la généralisation du phénomène et montre à travers plusieurs témoignages comment les gérants d’officine mettent la pression à leurs employés pour garder le silence. Voici deux témoignages issus de l’article :
-‐ « J'ai donné ma démission car je me sens bafouée, confie Annie, 47 ans (Seine-‐et-‐Marne). Ma titulaire avait organisé le recyclage comme activité lucrative. Les clients conciliants, souvent âgés, étaient sollicités pour donner à Cyclamed, "l'association qui redistribue aux nécessiteux et aux pays pauvres". C'est la honte quand les clients viennent se plaindre que des blisters étaient entamés. Elle m'a menacée de supprimer mes mercredis si je protestais. Je démissionne car je me sens bafouée. »
-‐ Yves, adjoint, 48 ans (93) « Pendant plusieurs mois, mon titulaire n'a jamais commandé de Séresta parce qu'un centre médical en avait donné à la pharmacie pour Cyclamed. Un autre titulaire disait qu'en l'absence de collaboration à cette activité, les emplois ne pourraient être conservés. Lorsque des réclamations des clients avaient lieu, le titulaire se déchargeait de sa responsabilité en imputant la faute à ses salariés incompétents. »
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2.1.5 Un rapport de l’inspection générale des affaires sociale qui va changer la donne C’est cet article, du Moniteur des Pharmacies, qui tirera la sonnette d’alarme et poussera le ministre de la santé de l’époque, Philippe Douste-‐Blazy, à confier, le 8 septembre 2004, à l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) une mission de contrôle et d’inspection du système Cyclamed. Ce rapport sera remis au ministère de la santé en janvier 2005 par Etienne GRASS et Françoise LALANDE et rendu public le 9 février de la même année. Le rapport s’avère accablant et fait états de nombreux et divers cas de dérives du système Cyclamed et conclut même en recommandant la fin totale de celui-‐ci. Il est toutefois intéressant de noter que les principales critiques du rapport portent sur la surconsommation et le gaspillage qu’encourage le système Cyclamed ainsi que les dérives liées à l’expédition des MNU vers l’étranger plutôt que sur la revente de ceux-‐ci par les pharmaciens. Ce rapport amorcera un grand questionnement au sein du gouvernement sur le maintien ou non du dispositif Cyclamed et sera à l’origine de nombreux débats au parlement. Toutefois, le ministre Philippe Douste-‐Blazy décide néanmoins de maintenir le système avec la volonté de le faire évoluer vers plus de transparence et de sécurité dans la gestion des MNU et de leur envoi dans les pays en développement. L’argument mis en avant à l’époque par le gouvernement était « de ne pas décourager l’élan humanitaire de la population française » Ce maintien de Cyclamed sera très vite contesté par plusieurs associations. En effet, en réponse aux vingt et une poursuites devant le conseil de l'ordre des pharmaciens concernant les recyclage des MNU et au rapport de l’IGAS, en avril 2005, quatre associations de consommateur (CLCV, CGL, Unaf, UFC-‐Que choisir) et quatre associations de lutte pour la protection de l’environnement (Agir pour l'environnement, France nature environnement, Les Amis de la Terre, le Mouvement national de lutte pour l'environnement.) réclament la fin du système de récupération des MNU géré par Cyclamed. A cela s’ajoute plusieurs grandes ONG tels que Pharmaciens sans Frontière (PSF), Médecin sans Frontière ou la Croix Rouge qui avaient déjà pris la décision d’arrêter d’expédier des MNU dans les pays en développement et qui était en faveur de la suppression de Cyclamed.
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2.1.6 La fin du recyclage humanitaire des médicaments et les changements apportés au système Cyclamed. Il faudra attendre la loi n° 2007-‐248 du 26 février 2007 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament et l’article numéro 32 de cette loi pour que soit interdit le don à des fins humanitaires des MNU récupérés par les pharmaciens d’officines. En effet la loi stipule que : « Toute distribution et toute mise à disposition des médicaments ainsi collectés sont interdites. Ces médicaments sont détruits dans des conditions sécurisées. ». Le délai d’application de cette directive était de dix-‐huit mois. Cela laissait à Cyclamed le temps de réorganiser son système de collecte mais permettait surtout de mettre en place de nouveaux systèmes d’approvisionnement de médicaments (neuf cette fois-‐ci) pour les associations humanitaires qui géraient l’envoi des MNU dans les pays en développement. En effet ces dernières, avec l’application de la loi ce voyaient maintenant privées de leur plus grande source de médicaments. Ainsi, à titre d’exemple, l’ONG Pharmacie Humanitaire Internationale (PHI), qui effectuait le recyclage humanitaire des MNU jusqu’en 2008 a due repenser toute son organisation et se consacre désormais au don de médicaments neufs aux centres de précarité à l’échelle nationale uniquement Désormais, depuis le premier janvier 2009, l’ensemble des médicaments non utilisés qui sont récupérés par les pharmaciens sont détruits dans des centres d’incinération à valorisation énergétique et cela qu’ils soient périmés ou non. Malgré cette loi de février 2007 qui est venue mettre fin aux ambitions humanitaires du projet Cyclamed, le dispositif n’a pas été supprimé contrairement aux attentes de certaines associations (de consommateurs, de protection de l’environnement ou de pharmaciens).
2.2 Les dérives liées au don de MNU
La question de la gestion des déchets ménagers tourne autour du principe des trois « R ». Ainsi l’optimisation de cette gestion passe en premier lieu par la réduction des déchets ménagers notamment en luttant contre l’obsolescence programmée et en réduisant l’emballage des biens de consommation. Dans deuxième temps il s’agit de la réutilisation en s’efforçant de trouver une utilité à tout
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déchet au lieu de le détruire. Enfin, si on ne peut pas réutiliser un bien il faut essayer de trouver un moyen de le recycler dans le but de réintroduire les déchets dans le cycle de production. On l’aura compris les trois « R » se situent pas sur un pied d’égalité, la Réduction prime sur la Réutilisation qui elle-‐même prime sur le Recyclage. On pourrait logiquement terminer le schéma en disant que le Recyclage prime sur l’incinération ou l’enfouissement. Ainsi le don de MNU, en plus d’avoir une vocation humanitaire tout à fait louable, constitue une manière de traiter les déchets issus du médicament (DIM) plutôt optimale puisque cela correspond à de la réutilisation. Le don de MNU est donc plus écologique par leur incinération. Si le recyclage humanitaire des médicaments a été supprimé alors qu’il était éthiquement et écologiquement plus souhaitable, les raisons invoquées pour mettre fin à cette pratique ont dû être conséquentes et méritent des études attentives. Dans cette sous-‐partie nous allons donc tenter de mettre en évidence l’ensemble des problèmes causés par l’envoie de MNU vers les PED.
2.2.1 L’inadéquation entre les médicaments envoyés dans les pays en développement et les besoins des populations locales. Les pays du Sud, pour des raisons climatiques et de développement, n’ont pas les mêmes besoins que les pays développés. Les maladies dans les pays en développement sont le plus souvent des maladies infectieuses telle que le Choléra ou parasitaire telle que le Paludisme. L’accès généralisé à l’eau potable (en ce qui concerne le Choléra) et les zones climatiques tempérées (pour ce qui est du Paludisme) font que ces maladies n’existent pas dans les pays développés. A l’inverse, des maladies telles que les ulcères, la constipation, les dépressions ou les maladies cardiaques liées au Cholestérol, donnent respectivement lieu à une consommation importante d’antiulcéreux, de laxatifs, d’anxiolytiques et d’hypolipémiants dans les pays développés. Or ces maladies sont caractéristiques des pays riches et sont quasi inexistantes dans les pays du Sud. Il est donc très clair que les pays développés et les pays en développement ne consomment pas les mêmes médicaments. Ainsi, peu de médicaments non utilisés en France sont susceptibles d’être vraiment utiles pour les pays du Sud ou de l’Est. D’autre part, au niveau de la conservation, beaucoup de médicaments destinés aux pays riches ne sont pas adaptés aux conditions climatiques des pays du sud. Par exemple, les suppositoires résistent mal à la chaleur.
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L’inadéquation aux besoins ne se restreint pas seulement au type de médicaments mais également à la quantité de ceux-‐ci. Par définition, les associations ne choisissaient les quantités de MNU qu’elles recevaient puisque cela dépendait de ce que les particuliers ramenaient chez le pharmacien. Or un traitement incomplet peut s’avérer complètement inefficace et peut causer plus de mal que de bien dans la mesure où en plus de ne pas soigner le patient, il peut générer chez lui des résistances induites. Enfin cette inadéquation aux besoins des populations locales se traduit par une absence de conformité des MNU envoyés à la « liste des médicaments essentiels ». Cette liste est édictée par l’OMS depuis 1976 et est révisée régulièrement. Il s’agit d’une liste de médicaments « qui répondent aux besoins de santé prioritaires d’une population. ». Chaque pays est tenu d’ajuster cette liste de l’OMS en fonction de ses besoins particuliers. Or la plupart des médicaments collectés en France par Cyclamed ne font pas partie de cette liste. Ainsi, une étude effectuée en 1998 dans le département du Puy de Dôme a révélé que parmi les MNU étant en mesure de faire l’objet de dons, seulement 43,4% d’entre eux correspondaient à liste des médicaments essentiels de l’OMS.
2.2.2 Des MNU qui sont inconnus du personnel médical des pays en développement. Premièrement, un même médicament, peut être distribué sous différents noms de marque. Il existe une dénomination commune internationale (DCI) pour chaque médicament, mais toutes les boites ne comportent pas cette indication. Ainsi, dans de nombreux cas, les professionnels de santé locaux faisaient face à des noms de médicaments qui leur étaient totalement inconnus, ce qui posaient un risque de mauvaise utilisation aux conséquences potentiellement graves pour la santé des patients. Deuxièmement, le problème de la langue des notices d’utilisation posait des risques identiques. Dans de nombreux cas on a constaté des dons de MNU où la notice d’utilisation ne comportait pas la langue du pays destinataire. Il est vrai que ces deux problèmes, l’absence de dénomination commune internationale et la langue de la notice d’utilisation, ne sont pas intrinsèquement liés aux MNU mais concernent le don de médicament de manière générale (neuf ou non). Toutefois, par définition, le MNU est un médicament vendu sur le marché français et donc destiné à des consommateurs français. Des lors les MNU sont plus à même de ne pas comporter de DCI et d’avoir des notice d’utilisation en français uniquement. De ce fait, l’envoie de MNU augmentait la probabilité que le personnel de santé local soit confronté à des présentations pharmaceutiques inconnus avec tous les dangers que cela peut générer.
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2.2.3 Les MNU ont souvent présenté des problèmes de date de péremption. Contrairement au don de médicaments neufs, où les médicaments envoyés dans les pays du Sud sortent directement de l’usine pharmaceutique, les dons de MNU concernent des médicaments qui ont été stockés plus ou moins longtemps chez le patient. Dès lors la date de péremption est souvent beaucoup plus proche pour les MNU que pour des médicaments neufs. C’est ainsi que dans de nombreux cas, la date de péremption des MNU envoyé dans les pays en développement était, une fois arrivée sur place, dépassé ou bien sur le point de l’être. Or la consommation de médicaments périmés comporte évidemment des risques. Dans le meilleur des cas, l’utilisation de médicaments périmés ne soigne pas le patient. Une date de péremption dépassée signifie alors que le principe actif du médicament s’est détérioré au point de plus être efficace. Mais parfois le principe actif ne se contente pas de se détériorer mais se transforme au point de devenir nocif. Dès lors les médicaments ne sont plus un remède mais un poison. Enfin, selon l’OMS, la consommation de médicaments périmés, constituent l’une des raisons les plus importantes du développement de la résistance antibactérienne dans les pays du Sud.
2.2.4 Ces raisons précédemment évoquées engendrent des couts pour les PED. Nous avons montré que le MNU, en comparaison au médicament neuf, avait beaucoup plus de chance de ne pas correspondre aux besoin des populations locales, d’être inconnu du personnel de santé local et d’arriver périmé une fois sur place ou proche de la date de péremption. Tous ces problèmes rendent les MNU envoyés inutilisables. Dès lors c’est aux pays destinataires qu’il
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revient de gérer la destruction de ces médicaments qui peuvent représenter un danger sanitaire et environnemental non négligeable. Ces couts peuvent être relativement importants pour ces pays qui possèdent peu de centres d’incinération. Le don de MNU est susceptible de générer des couts financiers pour les PED en ce qui concerne la destruction des dons de médicaments inutilisables.
2.2.5 Ces problèmes sont-‐ils pour autant irréversibles ? Les arguments mentionnés ci-‐dessus ont été relatés par de nombreuses ONG et organisations internationales telle que l’OMS pour justifier l’interdiction du recyclage humanitaire des médicaments. Cependant, si on applique les principes directeurs applicables au don de médicaments édictés par l’OMS en 1999 au don de MNU, alors il serait possible de résoudre ces problèmes. Ainsi, si les associations françaises s’efforçaient de faire un tri très minutieux en amont des MNU récupérés chez le pharmacien, tous les problèmes cités ci-‐dessus n’existeraient plus. Il s’agirait donc de bien identifier les besoins des populations locales, de n’envoyer que des MNU avec une date péremption supérieure à deux ans et les envoyer uniquement dans des pays francophones. Or, quand on regarde de plus près, on se rend compte que les grandes ONG françaises qui continuaient le recyclage humanitaire des médicaments au début des années 2000 appliquaient des méthodes de tri très strictes. Il s’agissait entre autre de Médecin du Monde, Pharmacie Humanitaire Internationale (PHI), l’Ordre de Malte ou encore Solidarité Internationale. D’après le rapport de l’IGAS de 2005, l’association PHI ne redistribuait que 19% des MNU qu’elle récupérait, Solidarité Internationale réexpédiait quant à elle seulement 16% de ces MNU. Enfin, L’Ordre de Malte était encore plus rigoureuse puisqu’elle expédiait seulement 5% des MNU qu’elle collectait. Cette association effectuait trois séries de tri sélectif puis transférait les MNU triés à un centre d’emballage informatisé afin d’assurer une conservation optimale. Quant à Médecins du Monde, elle expédiait 48% des MNU qu’elle collectait, cependant une grande d’entre eux leur était livré par des associations PHI qui avait déjà effectué une série de tri. Mais les dérives mentionnées ci-‐dessus ne sont pas le fait de ces ONG qui faisaient preuve d’un véritable professionnalisme. Le tableau ci-‐dessous, tiré du rapport de l’IGAS de 2005, indique le pourcentage de médicament redistribué par les associations.
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Ainsi on constate que des associations comme ACCTEM, Enfance et vie ou bien Enfants du Monde, redistribuent respectivement 40%, 36% et 29% des médicaments collectés. Or, quand l’on regarde les problèmes d’adéquation des besoins, de date de péremption et d’absence de dénomination commune internationale liée aux MNU, la rigueur du tri effectué par ces associations semble clairement insuffisante. C’est là une des affirmations de l’IGAS à la lecture du tableau ci-‐dessus. Toutefois la plus grande source de dérives venait du fait que l’autorisation du recyclage humanitaire des médicaments permettait à n’importe qui d’expédier des MNU à l’étranger. Pour être plus précis sur ce point, voici l’article l’article L 4211-‐2 du code de la santé publique en vigueur entre le 22 juin 2000 et le 27 février 2007 : « Les médicaments inutilisés ne peuvent être collectés auprès du public que par des organismes à but non lucratif ou des collectivités publiques sous la responsabilité d'un pharmacien, par les pharmacies à usage intérieur définies à l'article L. 5126-‐1 ou par les officines de pharmacie. Les médicaments ainsi collectés peuvent être mis gratuitement à la disposition de populations démunies par des organismes à but non lucratif, sous la responsabilité d'un pharmacien. Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent article. » La dernière ligne fait état d’un décret sensé encadrer juridiquement cette mise à disposition des MNU aux populations démunies. Plus précisément il devait mettre en place les critères d’éligibilité autorisant les associations à s’adonner à cette pratique.
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Ce décret n’a jamais eu lieu, voilà donc pourquoi n’importe quelle association était en mesure de pratiquer le recyclage humanitaire des médicaments. La seule contrainte imposée par loi était que le don de MNU se fasse sous la responsabilité d’un pharmacien. Dans les faits, l’ANPCM (association nationale pharmaceutique pour la collecte des médicaments), sous la direction de l’Ordre des pharmaciens, avait dressé une liste des ONG agrée à effectuer cette pratique mais n’avait aucun moyen coercitif de la faire respecter. En conséquence de nombreuses petites associations à l’échelle communale ou départementale, ainsi que des particuliers, envoyaient des MNU à l’étranger L’inspection générale des affaires sociales montre que ces petites structures se voyaient confier des MNU récupérés par le dispositif Cyclamed. Ces personnes ou entités faisaient preuve d’une générosité et d’un dévouement à la cause humanitaire indéniable mais manquaient clairement de professionnalisme et de connaissance dans le domaine du médicament. Plus encore, Olivier BALLU, dans son mémoire de 2003 de l’Ecole Nationale de Santé Publique intitulé Statut des médicaments non utilisés (MNU), explique que beaucoup de petites organisations (de travailleurs immigrés ou simplement associatives) se passaient de la supervision d’un pharmacien pourtant rendue obligatoire par l’article L 4211-‐2 du CSP. C’est donc en grande partie ces associations et particuliers qui sont à l’origine des dérives mentionnées plus haut. Nous avons eu à cet effet un témoignage significatif de Martine Augé, pharmacienne à Draveil dans l’Essonne (91). Elle nous a expliqué qu’au début des années 2000, elle était tenue de superviser les préparations de colis de MNU d’une petite association de la ville (elle ne se souvenait plus du nom). En tant que pharmacienne, elle savait ce qu’il ne fallait pas envoyer que ce soit du fait de l’inadéquation des besoins, de la date de péremption ou bien de l’absence de quantité suffisante pour constituer un traitement complet. Dès lors, elle obligeait le personnel de l’association à restreindre le contenu des colis. Elle remarqua très vite qu’une fois partie, les bénévoles de l’association remplissait de nouveau les colis des médicaments que Martine leur avait interdit d’envoyer. Enfin de compte le personnel n’acceptait pas qu’une personne extérieure à l’association vienne restreindre leur bonne volonté. D’autre part, elle nous expliquait que lorsque l’association recevait des subventions et s’en servait pour acheter des médicaments neufs, alors la composition des colis envoyés était plus pertinente en ce qui concerne l’adéquation aux besoins des destinataires. Preuve que le don de médicament neuf est plus efficace. Martine Augé a donc été témoin direct du manque de professionnalisme des petites associations et des risques que comportait le recyclage humanitaire de médicaments. Plus encore, le manque de professionnalisme ne se répercutait pas seulement sur le tri des MNU collectés mais aussi sur le plan de la traçabilité des médicaments envoyés. Ces petites associations et particuliers se contentaient d’envoyer les colis puis de recevoir une simple lettre de remerciement comme accusé de réception. Or cette absence d’effort de traçabilité a largement alimenté les réseaux de trafic de médicaments dans les pays destinataires. Cela d’autant plus que les
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médicaments en provenance des pays développés sont perçus comme un gage de qualité, ils sont donc prisés par les revendeurs au marché noir. Beaucoup de colis de médicaments venant des pays riches ont été détournés depuis leur arrivé à l’aéroport et ont permis d’alimenter les « pharmacies de gazon ». Il s’agit de vente à la sauvette de médicaments par des personnes totalement incompétentes dans le domaine pharmaceutique. Ce marché noir du médicament est l’un des problèmes sanitaires les plus importants en Afrique. Pour ne citer qu’un exemple, nous vous mentionnons ici une expérience qu’Odette PION, présidente de Pharmacien sans Frontière Rhône-‐Alpes, nous a conté lors de notre entretien avec elle. Durant l’un de ces nombreux voyages au Burkina-‐Faso, un ami lui présente fièrement un médicament qu’il s’est procuré en ville comme un remède très efficace pour « améliorer la virilité ». Quand ce dernier lui présenta le « médicament », elle explosa de rire en voyant qu’il s’agissait de pilule contraceptive… Il est donc assez facile d’imaginer l’ensemble des dangers que peuvent représenter ces « pharmacies de gazon » pour les populations des pays en développement. Ainsi, le recyclage humanitaire des médicaments, en permettant à n’importe qui d’expédier des MNU, alimente ce marché noir dans les pays du Sud de part le manque d’effort de traçabilité. De plus, le développement de ce marché parallèle de médicaments n’engendre pas seulement des problèmes sanitaires mais également économiques. Les médicaments vendus sur ce marché étant beaucoup moins chère que partout ailleurs, les « pharmacies de gazon » concurrencent directement les pharmaciens et grossistes locaux qui travaillent à partir des circuits nationaux d’approvisionnement de médicaments et vendent des médicaments neufs de qualité. De ce fait, en favorisant les circuits parallèles de vente de médicaments, les MNU viennent ralentir les efforts des pays du Sud dans l’élaboration de politiques de développement sanitaire. Nous avons donc vu que l’envoi de MNU dans les PED a causé une multitude de problèmes, et son interdiction depuis le 26 février 2007 semble entièrement justifié. Toutefois, tous ces problèmes que nous avons mis en évidence ne sont pas nécessairement liés au fait que les médicaments envoyés soient des MNU. Ce que nous avons montré, c’est que les MNU présentent une probabilité beaucoup plus forte de générer ces dérives que les médicaments neufs. Tout le monde s’accorde à dire que des associations comme l’Ordre de Malte ou PHI effectuaient un recyclage humanitaire des médicaments de manière très professionnelle (aussi bien en ce qui concerne le tri que la traçabilité), de telle sorte que cela permettait d’éviter les problèmes d’inadéquation aux besoins, de date de péremption, de langue des notices d’utilisation, d’élimination des médicaments inutilisables, d’émergence de marché illicites etc. Ces conséquences négatives de l’envoie de MNU n’étant pas irréversible on en vient à la partie suivante.
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2.2.6 Le don de MNU, avec un tri exigeant en amont et un suivit rigoureux des exportations, n’est-‐il pas souhaitable ? Comme nous l’avons montré précédemment, le recyclage humanitaire des médicaments était, à première vue, la manière la plus efficace de traiter les MNU puisqu’il s’agissait de réutiliser ces MNU au lieu de les incinérer. De plus cela permettait de servir une cause humanitaire. Cette pratique était donc bien la plus souhaitable sur le plan écologique et éthique. Si en plus l’ensemble des dérives mentionnées jusqu’ici n’est pas irréversible, ne fallait-‐il pas continuer à autoriser le recyclage humanitaire des médicaments et l’encadrer de manière plus rigoureuse plutôt que de l’interdire ? Tout d’abord est ce que cela en valait-‐il la peine ? La question est légitime puisqu’un tri efficace qui permettrait de respecter les principes directeurs applicables au don du médicament édictés par l’OMS, nécessiterait de garder pas plus de 10% des MNU. En effet une étude réalisé en 1998 et publiée en 2001 dans la Revue Epidémiologique de Santé publique, intitulé Description des Médicaments Non Utilisés (MNU) dans les pharmacies du Puy de Dôme, illustre notre propos. Pendant trois périodes d’une semaine durant l’année 2008, un cinquième des pharmacies du Puy de Dôme ont collectée 10 254 MNU (soit 717 kg). Parmi ces MNU collectés, l’enquête estime que seulement 20% peuvent être distribués aux populations les plus démunies. De plus, parmi ces 20%, seulement 43,4% étaient conformes à la liste des médicaments essentiels de l’OMS de l’époque. En fin de compte, sur les 10254 MNU collectés, seulement 890 (soit 8,7%) pouvaient faire l’objet d’un don de qualité qui aurait correspondu réellement aux besoins des populations des PED. Cela vaut-‐il donc la peine que les industries pharmaceutiques payent des cotisations à Cyclamed et que les ONG se donnent autant de mal à trier les MNU collectés si seulement 8,7% d’entre eux sont en mesure d’être mis à disposition des populations démunies ? Ce temps et cet argent ne serait il pas mieux investit dans l’achat et l’expédition de médicaments neufs ou bien dans des politiques de développement sanitaire ayant pour but d’améliorer les circuits de distribution de médicaments des PED ? Nous nous posons d’autant plus la question que l’Ordre de Malte nous a confié, lors d’un échange par courrier électronique, que l’association avait arrêté le don de MNU non seulement à cause de la loi du 26 février 2007 mais également à cause du fait que le tri des
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MNU récupérés leur demandait énormément de temps et que celui-‐ci pouvait surement être mieux utilisé. La faiblesse du nombre de MNU revalorisables et les couts induits par un tri rigoureux ne sont pas les seules raisons qui justifient l’interdiction du recyclage humanitaire des médicaments plutôt qu’un encadrement plus strict. Premièrement, les MNU présentent une caractéristique qui leur est propre. Contrairement aux médicaments neuf le MNU sort du circuit de la chaine pharmaceutique puisqu’il est conservé chez le patient. Or tant qu’il est à l’intérieur de la chaine pharmaceutique, le médicament (qui est donc neuf) est minutieusement contrôlé, notamment en terme de conservation : le médicament est toujours dans son emballage, conservé à une température adéquate et à l’abri de la lumière du soleil. Or une fois passé la porte de la pharmacie et stocké chez le patient, il n’y a plus aucun moyen de vérifier que les médicaments ont été conservés d’une manière optimale. Le problème est qu’évidemment un médicament conservé dans de mauvaises conditions est un médicament qui a de fortes chances d’être toxique pour celui qui le consomme. Ainsi, mettre gratuitement à disposition des MNU, c’est prendre le risque de distribuer un médicament qui peut s’avérer inefficace voir nocif du fait d’une absence de traçabilité du médicament après ça sorti de l’officine. Il s’agit là d’un problème intrinsèquement lié au MNU et difficilement solvable. Deuxièmement, dans les pays riches, les médicaments sont vendus sous différentes formes. Par exemple le paracétamol est vendu en pharmacie sous la forme de poudre, de comprimé ou de comprimé effervescent. Certaines de ces formes sont plus couteuses que d’autres. Ainsi le comprimé effervescent de paracétamol est plus cher qu’un comprimé classique. Dans le cas du Doliprane, l’écart n’est pas important mais il existe tout de même : une boite de 8 comprimés simples est à 1,90 euros contre 2,02 euros pour un tube de 8 comprimés effervescents. D’autre Part, seulement 22% des médicaments vendus en France en 2011 sont des génériques (étude de la mutualité française de 2012). Autrement dit 78% des médicaments consommés sont des médicaments de marques. Or les entreprises pharmaceutiques, comme toute entreprise qui vend un bien, effectuent des dépenses en marketing concernant l’apparence de leur emballage. En résumé, tandis que le médicament générique se vend le plus souvent sous la forme la plus économique et présentent le strict minimum en terme d’emballage, les médicaments de marque se vendent sous une forme et/ou un emballage plus couteux. Au regard de la consommation française de générique, cela signifie que la plupart des MNU envoyé était des médicaments de marques (en effet, excepté l’année 2011, la
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consommation des génériques n’a pas cessé de croitre, ce qui signifie que leur consommation était encore plus faible à l’époque du recyclage des MNU). Quelle conséquence pour les pays en développement ? Le problème est que dans ces pays, le développement de la chaine pharmaceutique se construit en grande partie autour du médicament générique. Ainsi, envoyé des MNU de marques dans ces pays, c’est habituer les populations locales à des présentations pharmaceutiques couteuses. Cette accoutumance nourrit le doute des populations locales en ce qui concerne la qualité des génériques vendus dans les pharmacies d’Etat. Lors de notre entretien, Odette PION (présidente de PSF-‐Rhône Alpes) nous a confié un documentaire réalisé par PSF comité international sur les marchés parallèles de médicament au Burkina-‐Faso. Dans ce film, on peut voir cinq hommes débattre sur les médicaments génériques. L’un d’entre eux explique aux quatre autres que le principe de la vente de générique est de vendre un médicament identique aux autres mais moins chère. Et il est assez frappant de constater que les autres participants sont dubitatifs et ont du mal à croire que la différence de prix ne change en rien la qualité du médicament. Les MNU, parce qu’ils habituent ces populations à une présentation pharmaceutique couteuse, contribuent à alimenter le doute envers les génériques. Et pourtant les génériques sont ceux sur quoi s’appuie le développement de l’industrie pharmaceutique dans les pays du Sud comme le montre l’intitulé d’une conférence organisé au Cameroun en avril 2012 par la Fondation Chirac : « Médicament générique : enjeu de santé publique en Afrique ». Troisièmement, un problème plus discutable mais qui vaut néanmoins la peine d’être mentionné. Les MNU sont des médicaments récupérés, ils ne peuvent donc être revendus, cela serait éthiquement inacceptable. Dès lors les MNU font obligatoirement l’objet de dons et ils habituent ainsi les populations à la gratuité des médicaments. Le risque est que ces populations n’accepteront pas plus tard de dépenser de l’argent pour des biens qu’ils ont eu l’habitude de recevoir gratuitement. Cela peut nuire à leur santé dans la mesure où ils dépenseraient moins que ce qu’il faudrait en terme de médicament. Nous avons donc montré que malgré un encadrement plus rigoureux du recyclage humanitaire des médicaments, des problèmes difficilement solvables persisteraient.
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2.2.7 Quelques exemples concrets de dérives liées au don de médicaments. Audit effectuée par l’OMS durant le moi de mai 1999 sur les dons de médicaments à destination de l’Albanie, dans un contexte de guerre du Kosovo. Durant cette période, l’Albanie connaît un fort afflux de réfugiés kosovars. En conséquence le pays reçoit une aide humanitaire importante. L’OMS a ainsi estimé que durant le moi de mai 1999, 50% des médicaments envoyés en Albanie ne correspondaient pas aux besoins de la population réfugiée et qu’ils devaient être détruit. Plus précisément, « 4 000 comprimés, 1 200 ballons de perfusion de grand volume et 16 000 tubes de pommade à usage externe étaient périmés avant même d’arriver dans le pays. Deux millions de comprimés, 85 000 flacons pour injection et 16 000 tubes de pommade à usage externe seront par ailleurs périmés avant la fin de 1999. » Situations mise en évidence par l’OMS en annexe des principes directeurs applicables au don de médicaments (1999).
-‐ En 1988, à la suite d’un tremblement de terre, l’Arménie avait reçu plus 5000 tonnes de médicaments. Cette quantité surpassait largement les besoins sur place et était tellement importante qu’il a fallu 6 mois pour en faire l’inventaire. En fin de compte, parmi ces 5000 tonnes, 8% était périmé et seulement 42% étaient adéquates à l’urgence de la situation.
-‐ En 1999, durant la guerre d’indépendance en Erythrée, il a été fait état de certains scandales concernant le don de médicament. Entre autre, le pays a reçu sept conteneurs remplis d’aspirine périmée qui a nécessité plus de 6 mois pour les incinérer. A également été envoyé, un conteneur de médicaments cardio-‐vasculaires qui n’était pas demandé et qui en plus allait être périmé dans 2 mois.
-‐ L’exemple du Soudan est surement l’un des plus emblématiques en ce qui concerne les dérives liées au don de médicaments. En 1990, alors le pays était ravagé par la guerre, des solutions pour lentilles de contact, des stimulants de l’appétit et des hypolipémiants contre le cholestérol ont été envoyé en quantité importante.
-‐ En 1993, en Lituanie, onze femmes ont décédé après avoir consommé un médicament en provenance d’un don. Il s’agissait d’un médicament à usage vétérinaire qui avait été livré sans aucune notice d’utilisation. Les médecins l’avaient prescrit pour soigner une endométrite en comparant son nom à d’autre médicament qu’ils connaissaient.
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-‐ Entre 1994, parmi les dons de médicament reçu par le bureau e l’OMS de Zagreb, 15% étaient inutilisable, 30% ne correspondaient pas aux besoins.
Bosnie Herzégovine Une des études les plus rigoureuses en ce qui concerne les dérives du don de médicaments a été mené en Bosnie Herzégovine dans les années 1990 par P. Berckmans, V. Dawans, G. Schmets, D. Vandenbergh, et P. Autier. L’article a été publié au New England Journal of Medecine et est intitulé : Inappropriate Drug-‐Donation Practices in Bosnia and Herzegovina, 1992 to 1996. Cette étude montre notamment qu’entre 1992 et 1996, la Bosnie Herzégovine a reçu plus de 17000 tonnes de médicaments inappropriés aux besoins sur place. L’élimination des ces médicaments a couté d’après leur estimation plus de 34 millions de dollars. Etude sur les dons de médicaments dans la province d’Aceh en Indonésie (Pharmacien Sans Frontière Comité International). Le 26 décembre 2004 un tremblement de terre dans l’océan Indien déclenche un Tsunami sans précédent en Asie du Sud Est. L’Indonésie est l’un des pays les plus touchés et plus particulièrement la région d’Aceh. L’enquête réalisée par PSF a duré du 20 mai au 20 juillet et a porté sur 6 hôpitaux, 6 entrepôts, les stocks de médicaments dans les ports et les aéroports, 36 centres de santé et 124 ONG. PSF a estimé les dons de médicaments à 4000 tonnes pour une population de 2 millions de personnes. En ce qui concerne l’inadéquation aux besoins, parmi ces médicaments 60% ne correspondaient pas à la liste nationale des médicaments essentiels, 70% étaient libellé dans une langue autre que celle locale, 25% étaient soit périmés, présentaient soit une date de péremption proche ou alors n’avaient aucune date de péremption. Pour ce qui est des dons appropriés de médicaments, beaucoup d’entre eux ont été reçu en trop grande quantité. Ainsi la région d’Aceh disposait d’un stock de sel de réhydrations oral (pour lutter contre les diarrhées liées au manque d’eau potable) de 5 à 8 ans et d’un stock de Dextrométhorphan pour 6 ans. Une grande partie de ces médicaments allaient donc être périmés avant d’être consommés. Le manque de coordination de l’aide humanitaire et le don massif de médicaments ont causé des problèmes de stockage. Ainsi 3 hôpitaux sur 6 ont dû sacrifier des bureaux et des chambres de patients pour y entreposer des dons de médicaments. 30 tonnes de médicaments ont été stockées dans des cours ou des hangars à ciel ouvert. Enfin 84% des entrepôts et hôpitaux n’avaient pas de système de climatisation adéquate qui permettait une bonne conservation des médicaments stockés. Pour finir, en raison des conditions d’incinération dans la région, le cout moyen de la destruction d’un kilogramme de médicament était estimé à 4 euros. Si l’on considère seulement les médicaments présentant un problème de date de péremption (soit 25% des 4
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000 tonnes), le cout de la gestion des déchets issus des dons de médicaments était évalué à 4 millions d’euros. Conclusion : Il est vrai que ces études sur les problèmes causés par les dons inappropriés de médicament ne concernent pas seulement les MNU mais également les médicaments neufs. Cependant, comme nous l’avons montré, les MNU sont plus susceptibles d’alimenter ces dérives que les médicaments neufs. Notamment, ils sont destinés aux marchés des pays riches et ont été conservés chez les patients. De ce fait il est beaucoup plus probable, que les MNU ne correspondent pas aux besoins des populations locales et présentent un problème de date de péremption. Ainsi au regard de l’ampleur de ces dérives, l’interdiction du recyclage humanitaire des médicaments semble justifié.
3 Le point de vue des parties prenantes.
3.1 Les associations françaises, en particulier PSF. En 1987, lors du sommet de Bamako (Mali) qui réunissait 35 ministres de la santé africains ainsi que l'OMS (pour son 37e comité régional) et l’UNICEF, la problématique autour des MNU fut largement débattu. Lors des première missions de PSF Clermont-‐Ferrand en Mauritanie et au Mali, il est clairement apparu le fait que les MNU en France ne correspondent pas aux besoins des pays en développement pour combattre les pathologies locales, et que de plus, le personnel de santé sur place connaissait des difficultés à les utiliser (problème de langue, de compétence…). Cette “initiative” a alors défini une stratégie dans le but de donner accès à toutes les populations aux médicaments essentiels, soit une liste établie par l’OMS recensant environ 300 molécules ayant le potentiel de soigner 98% des maladies). Un cadre commun aux pays participants est alors établi, visant à mettre en place des circuits à l’échelle nationale de distribution et d’approvisionnement de Médicaments Essentiels.
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En 1990, les pays en développement adoptent une Politique Pharmaceutique Nationale qui implique la création d’une Liste Nationale de Médicaments Essentiels qui doit correspondre au modèle de l’OMS et être adaptée aux pathologies spécifiques du pays ainsi qu’aux compétences du personnel sanitaire. Une Centrale Nationale d’approvisionnement en Médicaments Essentiels (très souvent il s’agit de médicaments génériques) est alors mise en place, de façon à regrouper les diverses commandes des Dépôts Régionaux fournisseurs des différentes structures de santé. De plus, il apparaît aussi nécessaire qu’un système de recouvrement des coûts soit installé, qui implique l’ensemble de la communauté dans la gestion de son Centre de Santé en fonction des moyens locaux, le but étant de trouver les fonds suffisants pour renouveler les stocks de Médicaments Essentiels du Centre.
PSF Clermont-‐Ferrand réagit alors en conséquence, par la création d’une Centrale d’Achat en Médicaments Essentiels Génériques de façon à répondre aux besoins des programmes d’urgence. De plus PSF Clermont-‐Ferrand soutient dans le cadre de ses programmes de développement, la mise en place des Politique Pharmaceutiques Nationales. Les problèmes causés par les dons de médicaments donnent lieu à des rapports qui circulent parmi les organismes intergouvernementaux, gouvernementaux et non gouvernementaux de l’aide humanitaire.
Entre 1996 et 1999, PSF contribue à la révision des Principes Directeurs de l'OMS applicables aux dons de médicaments. Puis 1999 marque un tournant pour l’association, du point de vue de son activité, qui s’engage alors dans la lutte contre les dons de médicaments inappropriés et qui en fait sa priorité. Ce tournant se traduit par une division de l’association en deux en 2000. D’un coté les membres de l’association qui veulent arrêter le recyclage humanitaire des médicaments se regroupent sous le nom de Pharmaciens Sans Frontières Comité International (PSF-‐CI). De l’autre coté, ceux qui veulent perpétuer cette pratique constitue Union Pharmaciens Sans Frontière (UPSF) qui deviendra officiellement Pharmacie Humanitaire internationale en 2004.
En effet PSF-‐CI étant témoin de problèmes de grande envergure causés par les dons de médicaments non appropriés dans des pays en développement qui gardent une certaine fragilité vis à vis des catastrophes, l’association va mettre fin à l’exportation de MNU. De plus en 2003, PSF-‐CI a tenté de sensibiliser les populations locales aux divers dangers que présentent les médicaments vendus dans la rue par la production d’un film intitulé Tiim.
Le parlement français, le 26 février 2007, vote l’arrêt de la collecte de MNU en se basant sur l’article 32 de la loi n°2007-‐248, portant sur certaines dispositions au droit communautaire dans le domaine des médicaments. La loi sera mise en application deux
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ans plus tard, le 1er janvier 2009. Or cela s’avère être une victoire pour PSF-‐CI, qui après 21 ans à dénoncer les problèmes causés par le recyclage humanitaire des MNU trop souvent inadaptés à la situation locale, voit enfin une mention légale les interdire.
A partir de 2008, PSF-‐CI devient l’unique association européenne à être spécialisée en pharmacie d’urgence de développement. Toutefois, en 2009, l’association est en dépôt de Bilan, le siège de Bordeaux doit fermer ses portes. L’association sera rachetée la même année par Acted. Désormais, seules les antennes de Rhône-‐Alpes et de Vendée son encore actives.
3.2 Les pays récepteurs. Le 9 novembre 2006 se déroula la journée annuelle de l’Ordre des pharmaciens de France, au lendemain de l’assemblée générale de la CIOPF (Conférence internationale des Ordres de pharmaciens francophones) Lors de ce sommet, M. Fodé Oussou Fofana, alors président de l’IOPA (Inter-‐Ordre des pharmaciens d’Afrique), interpella pendant son discours Xavier Bertrand, qui était l’actuel ministre de la santé français. Il tente de sensibiliser le ministre aux dangers de l’envoi des MNU vers les pays africain, en soulignant tout d’abord les divers problèmes que pouvaient poser les phénomènes de “marché noir” localement : « Les pharmaciens africains, organisés au sein de leurs Ordres, luttent avec détermination contre le marché illicite des médicaments et la contrefaçon dans leurs pays. Ce marché illicite génère, pour des acteurs non pharmaceutiques peu préoccupés par des questions de santé publique, des revenus importants. Ses conséquences sur la santé des populations locales ne sont plus à démontrer : conseil inadapté de médicaments par des néophytes, mauvais usage des médicaments, médicaments dont les conditions de conservation n’ont pas respecté les précautions élémentaires… Pour alimenter ce marché, plusieurs sources sont utilisées : vols dans les entrepôts des centrales d’achats, recours à l’importation de médicaments contrefaits ou via la récupération de MNU par les pays développés ».
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Il ajouta ensuite que les pays africains préféraient condamner ce recyclage humanitaire des médicaments, en essayant d’attirer l’attention sur les problèmes de fond de cette pratique, et en expliquant que selon lui et son organisation, ce n’est pas une forme de réelle solidarité entre pays riches et pauvres : « Pour qu’une illusion de solidarité ne se fasse pas au détriment de la santé et du bon usage des médicaments », l’IOPA renouvelle « son appel pour que cessent ces expéditions de MNU depuis la France » et réitère « la déclaration des pharmaciens africains adoptée le 4 novembre 2004, sur les dangers de l’expédition des restes thérapeutiques en provenance des pays du Nord, à travers la coopération entre associations humanitaires du Nord et du Sud ». Il conclut enfin son discours en déclarant que même si au-‐delà des conséquences négatives des actions des associations humanitaire sur le plan des dons de médicaments, il est normal de les remercier pour leur travail, mais qu’il est indispensable de changer de système. Il suggéra notamment le don de médicaments génériques comme moyen de répondre à une demande constante : « Tout en reconnaissant la bonne foi de la plupart de ces associations, nous faisons observer que ces médicaments déjà difficilement gérables en Europe, causent beaucoup plus de problèmes en Afrique qu’ils n’en résolvent. Il est temps que la France, à l’instar des autres pays européens, mette un terme à cette activité. Par ailleurs, nous lançons un appel pour que soit plutôt favorisée une politique de médicaments essentiels et de génériques accompagnée de sécurité médicamenteuse adéquate ». M. Fofana rappela alors que « ces demandes ne font que reprendre les mesures préconisées par l’OMS en terme de dons de médicaments », en référence à l’article de 1995.
4 Cyclamed ou le mauvais objectif du recyclage humanitaire français.
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Le système Cyclamed avait autrefois pour but de collecter les médicaments non utilisés et non périmés afin de les redistribuer, soit à des associations où soit aux particuliers à des fins humanitaires. Après l'interdiction du recyclage dit humanitaire des médicaments ( en 2009 en France, encouragée par les directives de l'OMS et de l'Union Européenne ) le système s'est reconverti exclusivement dans la destruction des médicaments. L'organisation se concentre aujourd'hui sur la collecte des médicaments dans le but de les incinérer et de les valoriser énergétiquement. A première vue, l'idée de supprimer le recyclage humanitaire a pu sembler contestable et remettre en cause l'existence même du dispositif Cyclamed. Cependant de nombreux rapports parlementaires ainsi que des études approfondies sur les bases du système Cyclamed, c'est-‐à-‐dire se concentrer sur la récupération et la redistribution des médicaments non utilisés, était en soi une erreur sur plusieurs plans. L'erreur principale était, comme l'ont citée l'OMS où l’Union Européenne dans leurs directives, les fins du recyclage humanitaire et les différentes dérives souvent incontrôlées auquel ce dernier était confronté. Cependant, cette dernière erreur, la plus notable aux yeux du grand publique et suscitant le plus d'émotion, ne fait que cacher les carences d'un système de recyclage partiel et même contre-‐productif. En effet, en terme de recyclage et d'économie de matériaux à la production, le système social français en matière de médicaments ainsi que l'industrie pharmaceutique elle-‐même se révèlent être très onéreuses. Ainsi le système Cyclamed et la polémique liée en général au recyclage humanitaire ne font que cacher plusieurs réalités : le système social français encourage à la surconsommation de médicaments, cela est dû en partie à l'Etat dit "providence", de plus les professionnels de la santé ont parfois tendance à prescrire des médicaments plus qu'il ne le faudrait et le fait que certains médicaments sont remboursés incite le particulier à en consommer ( où plutôt à en obtenir ). Cette surconsommation engendre deux principaux problèmes : il y a d'une part le danger pour le consommateur, qui consomme trop de médicaments, et dont l'usage est parfois injustifié, mais il y a aussi le souci lié au conditionnement des boites de médicaments. Il s'agit là d'une surconsommation "passive" dénoncée dans un rapport parlementaire de 2010 publié au Journal Officiel ( voir annexe ), en effet pour certains médicaments, en particulier pour les antibiotiques, les traitements sont souvent courts et ne correspondent pas aux quantités fournies dans les plaquettes de conditionnement. Ce rapport parlementaire met en lumière le fait que pour certaines catégories de médicaments, près de une unité sur deux n'est pas consommée, ce qui représente un perte colossale en matière de molécules mais aussi un véritable gâchis des matériaux liés au conditionnement. Notons aussi que chaque année, la sécurité sociale française publie une liste de médicaments dont l'efficacité est mise en cause ou dont l'inefficacité est prouvée. Cette liste comporte généralement des médicaments biens connus du grand public qui sont souvent très consommés. Ici se pose aussi le problème des médicaments inefficaces, qui indirectement pousse à la surconsommation des particuliers.
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Ainsi, les problèmes les plus importants liés au recyclage des médicaments se trouvent en amont du système Cyclamed lui-‐même. Ce sont les problèmes de surconsommation, conditionnement et prescription en particulier. Si Cyclamed semblait être un système de valorisation efficace du médicament non utilisé, ce dernier se révéla être coûteux et aux effets parfois très paradoxaux malgré des fins respectables. De plus les économies et amélioration de la chaîne du médicament passe avant tout par des progrès en amont pour réduire entre autre le gaspillage. En résumé il est intéressant de voir que le système Cyclamed prend sa source dans la surconsommation et le gaspillage de médicaments.
4.1 Retour sur la consommation de médicaments en France, chiffre et coûts.
4.1.1 La consommation de médicaments en France, un marché de premier plan
La consommation de médicaments en France est une des plus élevées au monde et représente un marché interne
très important. En moyenne, les français consomment 48 boites de médicaments ( toutes catégories confondues ) par an. Depuis 2000 la consommation de médicaments des français est en augmentation de 4%, et 5% pour l'ensemble du marché pharmaceutique. Même si la croissance de la consommation semble ralentir en terme de quantité, le marché reste toutefois très important. Ainsi en France en 2010, près de 3
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milliards d'unité médicamenteuses sont vendues ( source journal Le monde 2011 ). Sur le plan économique, la consommation de médicaments par les français représente un budget équivalent à près de 2% de PIB du pays. En France, ce marché à la particularité d'être divisé en deux catégories. Il y a d'une part les médicaments nécessitant une ordonnance médicale, dans le but de suivre un traitement donné par un médecin et uniquement disponibles en officine, et d'autre part les médicaments en libre accès dans les pharmacie, ne nécessitant aucune mesure d'obtention. D'autre part, nous pouvons aussi remarquer qu'en France, les médicaments ne peuvent être vendus qu'en pharmacie. Cependant, depuis le 2 janvier 2013, pour contrer les contrefaçons et contrebandes, un nouvel article ( L5425-‐39) publié au Code de la Santé Publique prévoit d'encadrer de manière stricte le commerce de médicaments en ligne. Ainsi seuls les pharmaciens qualifiés seront aptes à vendre des médicaments sur Internet et les médicaments proposés de pourront qu'être des médicaments ne nécessitant pas d'ordonnance ou étant soumis à une législation stricte.
4.1.2 Une législation propice à la consommation. "Les médicaments achetés en pharmacie peuvent être remboursés par l’Assurance maladie à condition que certaines conditions (liées au médicament, à sa prescription et à sa délivrance) soient respectées. Le taux de remboursement dépend du type de médicament. [...]" ( source site Internet officiel de l'administration française" Le système de sécurité sociale français est un système qui prend en charge financièrement, en partie ou en totalité les coûts des traitements et autres services médicaux aux particuliers. En France, le coût du système de protection social avoisinait les 600 milliards d'euros, soit plus d'un quart du PIB du pays, et ce montant est en constante augmentation depuis de nombreuses années. De manière simplifiée, il existe trois types de remboursement du médicament en pharmacie pour les particuliers. Il y a les médicaments ne nécessitant pas de prescriptions médicales,
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ces médicaments peuvent être achetés de manière libre par le particulier. Il s'agit de médicaments visant à soigner certaines maladies courantes. Ces médicaments là ne sont pas remboursés et sont exclusivement aux frais du particulier. Les médicaments soumis à la prescription par ordonnance sont généralement soumis au second ou troisième type de remboursement des médicaments, ces derniers peuvent être soit remboursés intégralement par l'assurance maladie soit partiellement ( il existe une classification établie par l'assurance maladie des médicaments en fonction de leur taux de remboursement ). De plus, la liste des médicaments partiellement remboursables tend à s'accroître chaque année depuis 2000, ceci est dû a des fins financière pour réduire le déficit croissant de la sécurité sociale française.
4.1.3 La surconsommation de médicaments, un problème bien réel.
"La surconsommation de médicaments ou surmédication désigne, d'un point de vue médical et sociétal, le fait qu'un individu ou une collectivité prenne une médication de façon excessive ou non nécessaire. Selon les critères d'évaluation de l'Organisation mondiale de la santé, la surconsommation de médicaments est lien avec un usage incorrect des médicaments, ce qui se manifeste sous la forme d’une consommation exagérée, insuffisante ou erronée des médicaments sur prescription ou en vente libre.
Le sujet de la surconsommation de médicaments est généralement étudié au travers de la dispensation de médicaments comme les antibiotiques, les antidépresseurs, ...
Dans un rapport sur la santé dans le monde en 2010 et sur l'usage rationnel des médicaments, l'Organisation mondiale de la santé rapporte que 50 % des médicaments ne sont pas prescrits, délivrés ou vendus comme il convient." ( source wikipédia, extrait du rapport de l'OMS de 2010 sur la surconsommation de médicaments dans le monde ).
Un médicament est considéré comme surconsommé, lorsque le particulier consomme plus d'unités que ce qu'il est prescrit ou que le médicaments est "mal" consommé c'est-‐à-‐dire utilisé sans respecter les indication
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de professionnels de la santé, ou encore sont utilisés de manière aléatoire par les consommateurs. L'automédication, ou l'utilisation de médicaments non détruits après traitements et un cas courant en France. Malheureusement dans de nombreuses situations, les particuliers utilisent leurs anciens médicaments sans réellement connaître leur effet exact ou les effets secondaires. L'intoxication par les médicaments est de ce fait une des premières causes d'accidents domestiques en France. Le rapport de l'OMS de 2010 estime que, dans le monde, en moyenne 50% des médicaments ne sont pas utilisés de manières correcte ou à leur fins. Le rapport insiste sur le fait que toutes les parties sont responsables de cette surconsommation. Les prescriptions abusives de certains médecins sont mises en cause au même niveau que les non observances des traitements par les patients. (source rapport de l'OMS sur la surconsommation de médicaments dans le monde, 2010 )
Le cas des médicaments sans utilité prouvée sur la marché représente lui aussi un réel gaspillage de molécule, ce qui représente un coût environnementale à la création, au conditionnement, mais aussi pour le particulier et pour l'Etat quand ces derniers sont soumis à un régime de remboursement. En France, d'après les données de l'assurance maladie, certaines molécules dont l'effet est mis en cause sont en tête des prescriptions. En 2002, 21% des médicaments dont l'efficacité était mise en question représentaient 16,6 % molécules prescrites et contribuaient pour 128,9 millions aux dépenses de l'assurance maladie.
4.1.4 Les pertes liées au conditionnement
Ici encore un problème majeur vient faire obstacle une utilisation modérée des médicaments et engendre un gaspillage très important. Les médicaments les plus concernés par ce problèmes sont les médicaments destiné à soigner sur un traitement de courte durée, les principaux et plus connus d'entre eux sont les antibiotiques. Les antibiotiques disposent de durée de conservation relativement courte et sont souvent prescris par le médecin sur des intervalles court voir très court ( parfois 2 à 3 jours seulement ). Cependant les médicaments de ce type sont conditionnés par plaquette, ce qui fait que le nombre de médicaments présent dans la plaquette ne correspond que très rarement aux nombres de médicaments nécessaire au traitement pour le patient.
En 2009 le débat est soulevé à l'assemblée nationale par le député M. Jean-‐Claude Mathis. Dans sa question au ministre de la santé est abordé le fait que, en France, chaque habitant utilise en moyenne 40% de médicaments de plus que dans les autres pays européens, ce qui représente un coût
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d'environ 40% supérieur pour la sécurité sociale française. D'après les études de l'IGAS ( inspection générale des affaires sociales ), 1 médicaments prescrit au particulier sur 2 ne serait pas consommé. Pour expliquer cela, l'IGAS s'appuie sur le fait que le conditionnement des médicaments, en particulier les antibiotiques, se fait en France de manière standardisée, pour presque la totalité des médicaments sur le marché français, il est en effet impossible d'obtenir un traitement personnalisé en terme d'unité de médicaments, à l'exception de certains traitement spécifiques, tels que ceux liés au cancer L'IGAS souligne en outre que ce système de conditionnement conduit à la perte de plus d'1 milliard d'euros pour la sécurité sociale, ainsi qu'à un bilan environnemental catastrophique. En 2010, le gouvernement répond à la question de l'amélioration de la chaîne de conditionnement des médicaments de manière positive en affirmant que le gaspillage lié au conditionnement est une réalité tout en gardant une certaine réserve quant aux chiffres fournis par l'IGAS.
"L'adéquation de la taille du conditionnement aux indications, posologie et durée de traitement de chaque médicament est nécessaire pour des raisons de protection de la santé publique, de bon usage du médicament et pour des raisons économiques. Elle constitue à ce titre un objectif prioritaire des autorités de santé. Différentes mesures ont été prises ces dernières années par les pouvoirs publics pour lutter contre le « gaspillage » de médicaments en améliorant l'adaptation des conditionnements. À ce titre, la loi relative à l'assurance maladie du 13 août 2004 prévoit l'obligation pour les industriels de se conformer aux recommandations de la commission de la transparence (CT) pour adapter les conditionnements aux principales pathologies visées par ces traitements. D'une part, la prescription médicale doit comporter les éléments nécessaires pour le choix du conditionnement le plus adapté, d'autre part, la délivrance pharmaceutique doit correspondre au conditionnement le plus économique, compatible avec la posologie et la durée du traitement. Le code de la santé publique (CSP) et le CSS comprennent en outre différentes règles de dispensation permettant de ne délivrer que les bons conditionnements et d'éviter au maximum les gaspillages. Il en va ainsi par exemple, de l'obligation pour le pharmacien, lorsqu'un traitement est prescrit pour une durée d'au moins trois mois et qu'un grand conditionnement est disponible pour le médicament concerné, de délivrer ledit conditionnement (cf. dispositions de l'article L. 5125-‐23 code de la santé publique).[...] En matière d'observance, l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) estime, dans son rapport de janvier 2005 sur le dispositif de recyclage des médicaments, que près d'un médicament remboursé sur deux n'est pas consommé. Il convient d'être extrêmement prudent quant à cette estimation. En effet, ce taux d'observance est extrait des actes d'un colloque organisé en 2001 par le comité régional d'éducation pour la santé d'Île-‐de-‐France. Ce taux ne peut donc en aucun cas être
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généralisé et appliqué à l'ensemble des médicaments sans distinction par catégorie et sans étudier l'origine de l'inobservance. L'IGAS nuance elle-‐même ce chiffre en estimant que la réalité du taux d'observance se situe sans doute entre 50 % et 80 %. Peu d'études ou d'enquêtes existent sur l'observance des traitements, ou alors de manière très éparse." ( extrait de la réponse du gouvernement au députe M. Jean-‐Claude Mathis, 27/04/2010 ). De cette manière nous pouvons constater qu'il existe un vrai problème de gestion des ressources en amont du système Cyclamed. Avec pour objectif honorable de redistribuer les médicaments non utilisés aux associations humanitaires où aux particuliers dans le besoin, ce système ne faisait que masquer en partie un marché du médicament basé sur la surconsommation et le gaspillage.
4.2 Le bilan de Cyclamed, une valorisation loin d’être réussie.
4.2.1 Cyclamed, un système aux origines discutables. Pour mieux comprendre en quoi le système Cyclamed était si critiqué par les autorités, il est intéressant de s'intéresser à la genèse même du dispositif. En 1992 survient un décret majeur pour les entreprises en France, il s'agit de l'article L541-‐10 du code de l'environnement. Ce décret a créé un responsabilité élargie de producteur en matière de gestion des déchets ( déchets liés à la production mais aussi à la fin de vie des produits finis ), et incite les entreprises a prendre notamment en charge la gestion des emballages après utilisation par les particuliers. Après ce décret les entreprises ont eu pour obligation soit de prendre en charge elles même leur filières de récupération des emballages et déchets liés aux produits finis, soit financer une société agrée qui s'occupe de la récupération de manière indépendante ( c'est à cette période que les sociétés telles que Eco-‐Emballages ont été créés ). Ainsi, les grandes entreprises pharmaceutiques se sont concertées et Cyclamed a été créée en tant qu'organisation
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chargée de gérer les emballages liés à la consommation de médicaments sur le territoire français. C'est pour répondre à ces fins que Cyclamed a été fondée en juillet 1993. Pour faciliter les actions de Cyclamed, et unifier les collectes d'emballages de médicaments, les grandes entreprises du secteur pharmaceutique ont alors commencé à standardiser les emballages de médicaments ( cartons de formats commun, blister et plaquettes de conditionnement d'un format et de matériaux communs, ... ), mais elles ont aussi fait le choix que le dispositif prendrait aussi en charge les médicaments non utilisés. En juillet 1993, un accord signé entre les grandes entreprises et d'autres partis ( ministère de l'environnement, de la santé, ...) officialisait le rôle de Cyclamed, et par la même occasion y intégra d'autre branches de la filière du médicaments, telles que les grossistes, mais aussi les pharmacies. Par la suite Cyclamed a aussi cherché à faire du recyclage humanitaire une de ses activités principales. Il faut noter qu'entre 1992 et 2007 ( fins des activités humanitaires ) l'activité de Cyclamed était de redistribuer les médicaments ou de les détruire. La fonction de Cyclamed a alors était perçu comme un avantage par tous les acteurs du dispositif. Pour les grandes entreprises cela permettait de montrer au grand public l'intérêt pour les soucis environnementaux, certains grossistes ont pu réaliser des marges ( la participation à Cyclamed était moins coûteuse que ce qu'un traitement des déchet a charge de leur entreprise aurait coûté ), et les pharmacies ont pu avoir un système de récupération clair et précis, contrairement à ce qu'elles connaissaient avant. En outre, l'image Cyclamed a permis de donner une bonne image à tous ces secteurs, dans une période où les considérations environnementales prenaient de plus en plus d'importance aux yeux des consommateurs. Dès sa création Cyclamed est apparu comme un compromis entre les grandes entreprises du secteur pharmaceutiques pour se plier à la législation française en matière de prise en charge des déchets. Cependant le relatif succès du dispositif peut, selon le rapport de l'IGAS de 2005, s'expliquer par une mauvais interprétation de l'action de Cyclamed. Le rapport met en avant le fait que si le dispositif peut collecter autant de médicaments, c'est avant tout car il existe des problèmes en amont du système de recyclage. L'IGAS insiste sur le fait que de nombreuses boites de médicaments reviennent intactes lors de la collecte par Cyclamed, cela peut selon le rapport s'expliquer par plusieurs raisons : d'une part les prescriptions excessive de la part des organisation de la santé, la non observances des traitements par les patients, ou encore les systèmes de conditionnement ne correspondant pas au durée des traitements ( événement encore aggravé par la standardisation des emballages liée à l'apparition de Cyclamed ). Ainsi le succès de Cyclamed résidait sur un paradoxe du système pharmaceutique et de santé en France : les quantités collectées par Cyclamed ne sont qu'uniquement là car le système se fonde sur une surconsommation de médicaments en France ainsi que des problèmes de conditionnement et de distribution du médicament.
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4.2.2 Un bilan environnemental discutable. Aux yeux de l'opinion publique, le bilan environnemental de Cyclamed apparaît comme bon. En effet, pour beaucoup, le fait de collecter les médicaments est apparu comme un progrès et s'encrait dans une époque ou le tri sélectif et autre considérations environnementales étaient en plein essor. Le recyclage humanitaire est lui aussi apparu comme un argument de qualité pour justifier l'action de Cyclamed. Selon le rapport de l'IGAS, le système de collecte Cyclamed est devenu omniprésent en France et a eu une bonne image auprès de la population avant tout car il empêchait la mise en décharge de médicaments parfois polluants ou toxiques ( protection des sols et des nappes phréatiques ), permettait de valoriser un produit, en l'occurrence le médicament, de manière nouvelle ( valorisation énergétique ou humanitaire ). Cependant, l'IGAS met en doute le caractère environnemental du dispositif et en particulier la mise en incinération ( seule activité de Cyclamed depuis la loi du 26 février 2007 ). "Le principal argument environnemental du dispositif CYCLAMED est qu’il permet d’orienter vers des unités d’incinération l’ensemble des produits collectés par les pharmaciens, même si ce choix n’a jamais été étayé par de véritables études. Le principe d’une incinération systématique des MNU relève plus de la précaution que de la certitude scientifique" ( rapport IGAS 2005 page 24 ) En effet, lors de la création de Cyclamed, la décharges sauvages étaient au nombre de 6000 en France et l'enfouissement était la méthode la plus utilisée pour ce qui était de la gestion des déchets. De plus le manque de connaissance des médicaments a conduit Cyclamed à préférer l'incinération systématique. Aujourd'hui les compétences techniques en matière d'enfouissement et d'incinération ont considérablement augmentées en France, et désormais il semble que certains médicaments présentent plus de danger pour l'environnement lorsqu'ils sont présents dans les fours d'incinération que dans des centres d'enfouissement sécurisés. En outre, même si le dispositif Cyclamed permet la gestion des médicaments non utilisés en tant que déchets, l'enfouissement et l'incinération restent des méthodes souvent polluantes présentant
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chacune des avantages et inconvéniants ( voir tableau IGAS ), mais pour des questions d'image et par manque de connaissances l'incinération est encore préférée aujourd'hui par Cyclamed.
( tableau issu du rapport de l'IGAS de 2005 sur le bilan de Cyclamed )
4.2.3 L’echec inavoué de Cylamed sur les plans humanitaires et environnementaux. Les études de l'IGAS montre que malgré un apparent succès, dont les chiffres de collecte des médicaments non utilisés peut sembler prometteurs ( 14.000 tonnes en 2012, source www.cyclamed.fr ). Le taux affirmé de collecte par l'entreprise de plus de 50% en 2005 lors de la publication du rapport peut être mis en cause. Selon l'IGAS, en 2005, moins de la moitié de ces médicaments non utilisés n'ont pas été rapportés et ont finis dans des décharges conventionnelles sans être triés préalablement. En outre le système n'incite pas les entreprises des médicaments à améliorer la gestion des déchets et surtout ne les incite pas à effectuer des recherches en amont pour réduire le gaspillage de médicaments et de matériaux liés aux méthodes de conditionnement. De plus l'IGAS dénonça aussi le cumul d'objectif de Cyclamed. Cette dernière lui reproche de justifier ses mauvais résultats de collecte mais aussi ses mauvaises performances en matière d'environnement par la justification du recyclage humanitaire, en
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lieu d'axer les recherches sur la conception des nouvelles boites de médicaments par exemple. Sur le plan humanitaire, la redistribution des médicaments non utilisés n'était plus une nécessité, et sa disparition est paradoxalement perçue comme un progrès selon l'IGAS. La qualité des médicaments était souvent plus que discutable. De plus, l'IGAS souligne que de nombreuses associations à but humanitaire ne déclarent pas les médicaments collectés et donc les stocks fournis par Cyclamed entraient en "concurrence" avec les stocks des association et perdaient ainsi en utilité. En conclusion, le système Cyclamed est bien plus imparfait qu'il ne le semblait et le recyclage humanitaire que Cyclamed réalisait était souvent plus cause de problème qu'autres chose. Le rôle actuel de Cyclamed est lui aussi encore très discutable, le bilan environnementale est en effet mauvais, mais le principal souci réside dans le fait que le rôle actuel de Cyclamed empêche les entreprises de réaliser des recherches sur la conception des emballages, ou encore les autorités à faire des réformes pour empêcher la surconsommation des médicaments.
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Conclusion de la partie
À travers cette revue de littérature nous avons pu constater plusieurs choses: -‐Premièrement, le dispositif CYCLAMED actuel est insuffisant et doit être repensé. Dès lors, le recyclage humanitaire des médicaments était d'autant plus une alternative souhaitable. -‐Dans un second temps nous avons vu que l'exportation de MNU a posé énormément de problèmes aussi bien sanitaires qu'écologiques. -‐Dans un troisième temps nous avons vu un certain nombre de politiques et de professionnels de santé s'opposaient au recyclage humanitaire des médicaments. -‐Enfin, nous avons constaté que la priorité devait être avant tout de réduire la quantité de MNU en France.
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Partie 2 : Enquête terrrain
2.1 L’Objectif de l’enquête de terrain Les recherches sur internet et en bibliothèque se sont révélées fructueuses au sujet du recyclage humanitaire des médicaments et des MNU de manière générale. Le rapport de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) de 2005, la thèse de Joëlle Baaklini de 2009 et le rapport d’Olivier Ballu de 2003 couvraient de manière très exhaustive le sujet. Quant aux organismes tels que l’OMS ou les ONG comme Pharmaciens Sans Frontière, un nombre assez important d’information est présent sur leur site internet. Ainsi notre bibliographie nous a largement suffit pour traiter les question du recyclage des médicaments, des problèmes causés par l’exportation de MNU ou encore ceux de la sur-‐prescription et de la surconsommation. Pour ces raisons, nous avons décidé d’orienter nos enquêtes de terrain vers un sujet que ne traitaient pas les différents rapports et débats autour des MNU, ou du moins très peu. Il s’agit de la possible réintroduction d’un circuit de don des MNU aux personnes les plus démunies. Ce circuit de distribution serait semblable dans les grandes lignes à l’ancien dispositif Cyclamed en vigueur avant 2007. La grande différence entre l’ancien dispositif et celui que nous avons envisagé est que la distribution des MNU serait limitée aux centres de soins situés sur le territoire national et gérés par des ONG. Mais avant d’exposer plus en détails ce système de distribution des MNU que nous avons imaginé, il est essentiel de justifier une telle démarche. Notre revue de littérature n’a cessé de mettre en évidence les problèmes causés par le recyclage humanitaire des médicaments. Ainsi nous avons vu que :
-‐ les MNU exportés dans les PED étaient très souvent inappropriés aux besoins des populations locales.
-‐ qu’ils étaient plus susceptibles de présenter un problème de dates de péremption que les médicaments neufs.
-‐ Destinés exclusivement aux marchés des pays riches, ils sont très souvent inconnus du personnel de santé sur place.
-‐ Inutilisables, les MNU induis des coûts de traitements (en terme de stockages et de destruction) pour les PED
-‐ Les MNU alimentent les marchés parallèles de vente de médicaments à la sauvette, causant de graves problèmes sanitaires et économiques pour les pays concernés.
-‐ Ils habituent les populations locales à des présentations pharmaceutiques couteuses -‐ Le don MNU accoutume les habitants des PED à la gratuité des médicaments.
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-‐ Les MNU font face à un manque de traçabilité, il est très difficile de savoir dans quelles conditions les médicaments ont été conservés chez le patient. Dès lors ces médicaments peuvent être potentiellement dangereux pour le futur bénéficiaire.
-‐ Enfin, la réutilisation des MNU n’est la manière la plus efficace de traiter leur cas. Nous l’avons vu, il faudrait avant tout mener une politique de réduction de MNU dans la mesure où ils sont les symptômes d’une sur-‐prescription de la part des médecins et d’une non observance des traitements de la part des patients. Ainsi les efforts devraient se concentrer sur la réduction des MNU et non leur réutilisation.
Il semble donc incohérent qu’à la suite de cette revue de littérature qui met en évidence l’ensemble de ces problèmes, notre enquête de terrain cherche à savoir comment il serait possible de réintroduire le recyclage humanitaire des médicaments. Et pourtant notre démarche ne relève nullement du hasard ou d’un choix arbitraire. Ce choix est entièrement justifié.
2.2 En quoi est-‐il pertinent de réintroduire le recyclage humanitaire des médicaments en France ?
2.2.1 Une politique de réduction prévaut sur une politique de réutilisation. Mais cela ne peut pas être le rôle de l’industrie pharmaceutique.
Nous l’avons montré, les médecins ont tendance à prescrire plus qu’il ne faut à leurs patients et ces derniers ne suivent pas leur traitement dans leur intégralité. D’autre part la France s’avère être le pays d’Europe qui consomme le plus de médicament. Ces faits sont les causes d’un gaspillage énorme des médicaments et contribuent pour une part non négligeable au déficit de la sécurité sociale. Voilà pourquoi il faut avant tout se concentrer sur une politique de réduction des MNU plutôt que de réutilisation. Toutefois, il serait absurde de forcer Cyclamed, dispositif financé par l’industrie pharmaceutique, à orienter son activité vers la lutte contre la sur-‐prescription et la surconsommation de médicaments. Cela reviendrait à demander aux entreprises pharmaceutiques de financer un dispositif qui pousse à diminuer la demande qui leur est adressé. Bien qu’une telle politique doive être impérativement mise en place, il semble clairement logique que celle-‐ci ne puisse être menée par les entreprises du médicament et qu’elle doit être le fait du ministère de la santé. On ne peut pas demander à une entreprise privée de faire en sorte de réduire la demande qui lui est adressée. D’autre part, l’industrie pharmaceutique, en raison du décret n°92-‐377 le 1er avril 1992, est tenue de financer un système de traitement des déchets issus du médicament (DIM). Les médicaments ne peuvent être recyclés à proprement dit, c’est-‐à-‐dire être réintroduits dans un processus de production. Dès lors deux solutions pour Cyclamed : soit privilégier la réutilisation soit favoriser l’incinération dans un but de revalorisation énergétique. Or nous l’avons vue lors de la revue de
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littérature (cf-‐ partie 1, II, 2), la réutilisation est une manière de gérer le problème de déchets ménager écologiquement et économiquement plus efficace. Même si le don de MNU sur le territoire national diminue indirectement la demande adressée aux entreprises du médicament (car les bénéficiaires de ces dons n’achète donc leur médicament en pharmarcie), cela permet au secteur pharmaceutique, comme l’avait très bien souligné le rapport de l’IGAS en 2005, de mettre en avant un rôle humanitaire en finançant un tel dispositif. Le besoin d’une telle image n’est pas à négliger pour un secteur qui fut au centre de certaines polémiques au début des années 2000. En effet, l’organisation mondiale du commerce (OMC) faisait face aux plaintes des PED, car les brevets détenus par les entreprises pharmaceutiques empêchaient les pays du Sud d’accéder à des traitements à des prix abordables, en particulier pour des maladies graves comme le Sida. En résumé, la politique de réduction des MNU doit être menée par les autorités publiques. Même si l’objectif est de réduire au maximum la quantité de MNU, il en restera toujours. Le médicament étant un bien particulier présentant des risques écologiques et sanitaires, la question du traitement des MNU ne doit pas être laissée de côté. C’est aux entreprises du médicament de s’en charger conformément au décret de 1992. Et du point de vue écologique et économique, mais également des intérêts du secteur, la meilleure façon de gérer les quantités de MNU persistantes est de les réutiliser. Et cela passe par le don.
2.2.2 Restreindre le don aux populations démunies situées sur le territoire français, permet d’évacuer un grand nombre de dérives liées au MNU. -‐L’inadéquation aux besoins des personnes bénéficiaires : -‐Le problème de dates de péremption : Les MNU ne circuleraient que sur le territoire national, la distance que parcours les MNU mais également les moyens techniques mise en place pour effectuer les dons sont considérablement réduits. Les colis de MNU ne passeraient désormais plus la douane par exemple. Tout cela fait que le temps entre le moment ou les MNU sont ramenés chez le pharmacien et celui où ils sont prescrits de nouveau à des patients est réduit. Dès lors il est possible d’être un peu plus laxiste sur les critères de tri des MNU concernant la date de péremption. Encore une fois, l’avantage est une augmentation de la quantité de MNU pouvant faire l’objet de don. Les médicaments inconnus du personnel de santé et les notices d’utilisation dans une langue inconnue.
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Comme nous l’avons expliqué dans la partie, les MNU étaient des médicaments destinés aux marchés français et connu des professionnels de santé français mais également des consommateurs français. Ainsi, si la distribution des MNU se cantonne à l’échelle nationale, les mauvaises prescriptions (songeons alors aux onze femmes lituaniennes décédées après ingestion d’un médicament à usage vétérinaire) ou utilisations des médicaments disparaissent. Même dans le cas où le patient ne parle pas le français, le fait que le recyclage humanitaire soit limité à la France assure la délivrance des MNU par des professionnels de santé français qui connaisse parfaitement ces médicaments et peuvent donc les prescrire de manière optimale.
-‐ La distribution des MNU habitue à des présentations pharmaceutiques couteuses. Ce problème n’a plus lieux d’être dès lors que le don de MNU s’effectue seulement en France. En effet, les MNU, puisqu’ils proviennent des consommateurs français, sont les mêmes médicaments que ceux neufs présents en pharmacie. Dès lors il n’y a pas de différences entre les médicaments faisant l’objet de dons et ceux qui sont mis en vente sur le marché nationale. On ne serait plus amener à constater le même genre de problème que dans les PED où cette accoutumance à des présentations pharmaceutiques couteuses alimentait le doute des populations locales envers les médicaments génériques alors même que le développement du secteur pharmaceutique dans ces pays s’appuie sur ce type de médicaments.
-‐ Le don de MNU accoutume les personnes à la gratuité des médicaments. Lors de la revue de littérature nous avons vu que le don de MNU habitue les populations locales des PED à la gratuité des soins. La conséquence, bien que discutable, est qu’une fois ces populations sorties de la précarité, elles refuseraient de consacrer une partie de leur budget pour quelque chose qu’elles obtenaient gratuitement auparavant. En conséquence les habitants des PED se soigneraient moins (thèse défendue par des économistes du développement tel que William Easterly). Ce problème ne se poserait pas en France puisqu’une grande partie des médicaments sont remboursés par la sécurité sociale. De plus, cette quasi gratuité de l’accès aux soins en France empêche l’implantation de tout marché parallèle de vente de médicaments, si dommageable dans les pays en développement. En conclusion, nous voyons bien que le recyclage humanitaire des médicaments, s’il se limite à la France, ne génère pas toutes les dérives qui ont été dénoncés par tant d’associations et institutions internationales. Toutefois, il est vrai qu’un problème persiste, celui de la traçabilité des médicaments et donc des difficultés à savoir dans quelles conditions le patient a conservé les MNU qu’ils ramènent chez le pharmacien. Bien que non négligeable, c’est l’unique problème qui perdure en ce qui concerne le don de MNU quand celui-‐ci se restreint au territoire national. Voilà pourquoi nous jugeons pertinent d’essayer de chercher un moyen de réintroduire le recyclage humanitaire des médicaments en limitant de MNU aux centres de précarité située en France. Cette démarche est d’autant plus justifiée quand on sait que Cyclamed a récolté pas moins de 14 271 tonnes de médicaments chaque année.
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2.2.3 Un réel besoin d’accès aux soins des plus démunis existe en France
a. L’Etat français est l’un des plus généreux en termes d’accès gratuit à la santé aux plus démunis.
La France possède l’un des systèmes de sécurité sociale les plus généreux au monde. La couverture maladie se décline ainsi en trois parties :
-‐ L’assurance maladie couvre toutes les personnes qui par le biais de leur travaille payent leurs cotisations. L’assurance maladie de base, c’est à dire sans complémentaire santé, garantit à tous les assurés sociaux le remboursement d’une partie de leurs frais de santé. Ainsi, selon les soins, ce dispositif rembourse entre 15 et 100% des frais de santé. Par exemple, pour une consultation médicale de 23 euros, l’assurance maladie rembourse 15,10 euros. Pour le reste, la complémentaire santé peut rembourser jusqu’à 6,90 et une participation forfaitaire de 1 euros est forcément à la charge du patient. Tous les travailleurs, les étudiants et les retraités sont couverts par l’assurance maladie.
-‐ La couverture maladie universelle (CMU) concerne toutes les personnes qui n’ont pas accès à l’assurance maladie. Elle rembourse exactement les mêmes dépenses de santé que l’assurance maladie. L’exemple de la consultation médicale ci-‐dessus est donc valable pour la CMU. Pour avoir accès à la CMU il faut résider de manière régulière en France, c’est-‐à-‐dire avoir la nationalité française ou bien détenir un titre de séjour. Il faut également résider sur le territoire national de manière stable. Enfin, il ne faut ne pas pouvoir accès à l’assurance maladie (ce qui traduit le plus souvent par le fait de ne pas travailler).
-‐ La couverture maladie universelle complémentaire (CMU-‐c), est comparable à la CMU de base à la différence qu’elle prend en charge les dépenses initialement assurées par les complémentaires santés et que le titulaire n’a pas besoins d’avancer les frais. Ainsi, dans l’exemple de la consultation médicale, le titulaire de la CMU-‐c ne paye plus que la participation forfaitaire de 1 euro. De plus la CMU-‐c, inclut des forfaits de prise en charge des soins dentaire, de lunettes ou encore de prothèse auditive. Les conditions d’accès à la CMU-‐c sont les mêmes que celles de la CMU, toutefois, pour en bénéficier les ressources du postulant ne doivent pas dépasser un certain plafond (8 593 euros par ans).
-‐ L’aide médicale d’Etat (AME), est destinée aux étrangers en situation irrégulière qui réside sur le territoire français. Elle couvre 100% des frais de santé (même les participations forfaitaires sont exonérées) et dispense le titulaire de l’avancement des frais. Il existe cependant des conditions pour pouvoir bénéficier de l’AME. Il faut résider en France depuis plus de trois mois, posséder des documents qui attestent que des démarches pour l’obtention d’un titre de séjour sont en cours et avoir des ressources inférieures à 8 593 euros par ans.
b. Malgré une couverture maladie généreuse en France, Médecin du Monde constate
chaque année des difficultés d’accès aux soins.
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Chaque année, l’ONG Médecin du monde publie un rapport annuel sur l’accès aux soins des plus démunis en France. Le rapport de 2013, porte sur l’année 2012, l’ensemble des statistiques qui seront mentionnées ci-‐dessous en ce qui concerne l’accès aux soins des plus démunis, sont réalisées à partir des données recueillis par les centres de soins de Médecins du Monde situé dans 29 grandes villes françaises. Ces centres de soins, sont appelés des Caso (Centre d’accès aux soins et d’orientation) et accueillent des personnes en situation de précarité, quel que soit leurs statuts (français ou étranger, en situation régulière ou non, sdf ou domicilié, avec ou sans emploi etc). Les Caso dispensent ainsi des consultations médicales gratuites, délivrent gratuitement des médicaments, si nécessaire, et font de la prévention contre les maladies les plus graves comme le sida ou les hépatites. Ce rapport montre que malgré des dispositifs comme la CMU, la CMUc ou bien l’AME, beaucoup de personnes en situation de précarité, ne bénéficie de ces différents systèmes. Ainsi parmi les personnes reçues par les Caso dans toutes la France, 23% ne peuvent prétendre à aucune couverture maladie. Pour 72,4% d’entre eux cela s’explique par le fait qu’il réside depuis moins de 3 mois en France ou bien qu’ils ont des difficultés à prouver leur présence depuis plus de trois mois sur le territoire. les 77% des personnes restantes accueillies chaque année par les Caso sont en mesure de bénéficier d’une couverture maladie telles que la CMU ou l’AME. Cependant, seulement 12,3% d’entre eux ont des droits effectifs à la couverture maladie lors de leur première consultation dans un Caso. Au total 90% de ceux qui se sont présentés pour la première fois à un centre de soin de Médecin du Monde en 2012, soit 31 623 personnes, ne disposaient d’aucune couverture maladie. Ce chiffre est tout de même équivalent à la population d’une ville telle que Montbéliard et est loin de comptabiliser l’ensemble de la population n’ayant pas d’accès gratuit à la santé sur le territoire français. En effet, seulement un peu plus de 80% des personnes qui se sont présentés à un Caso en 2012 ont pu être comptabilisé. Les statistiques n’ont pris en compte que les personnes se présentant à un Caso et ne tiennent pas compte des personnes que Médecins du Monde vient assister dans les rue et les camps de réfugiés grâce à leurs camions qui sillonnent les grandes de villes de France. De plus, Médecin du Monde n’est pas présent sur l’ensemble du territoire mais dans 29 grandes villes (ce qui n’est certes pas négligeable). Enfin il s’agit seulement des personnes prises en charge par Médecins du Monde et celles qui s’en remettent à d’autres ONG comme le Samu Social ou les Croix Rouge par exemple. Toutes ces personnes qui n’ont pas de droits ouverts à une couverture maladie ou bien qui ne remplissent pas les conditions pour en bénéficier, ne peuvent avoir accès gratuitement à des médicaments. Ainsi, malgré l’assurance maladie, la CMU ou l’AME, le don de médicaments en France demeure nécessaire. D’autant plus que les personnes en situation de précarité, de part leurs conditions de vie, sont beaucoup plus susceptibles de présenter des problèmes de santé.
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Le témoignage de février 2012 paru dans le journal la Croix du Centre Portes Ouverte (CPO) à Tours vient confirmer les affirmations du rapport annuel de Médecin du Monde. Le CPO est un centre de soins semblable au Caso de médecin du monde et situé dans le quartier populaire de Sanitas. La pharmacie du CPO est gérée par Pharmacie Humanitaire Internationale (PHI) qui alimente gratuitement le centre en médicaments neufs. Toutefois les moyens du CPO sont clairement insuffisants, le centre accueille plus de 7000 personnes par ans pour un budget de 45 000 euros. D’autant plus que selon la vice-‐présidente du centre Anne Fresneau, le centre accueille chaque année 1400 patients supplémentaires. En conclusion, la réponse à la question du grand II est la suivante : la meilleure politique de traitement des déchets que puisse mettre en place l’industrie pharmaceutique pour appliquer le décret de 1992 est celle qui consiste à encourager la réutilisation des MNU plutôt que leur incinération (une politique de réduction des MNU semble être la priorité mais on ne peut l’exiger de la part du secteur pharmaceutique). Le fait de limiter le recyclage humanitaire des médicaments à la France permet d’enrayer la majorité des dérives constatées par le passé. Enfin il existe un réel besoin de médicaments en France à des fins de dons pour les plus démunis bien que le système de sécurité sociale soit généreux. Nous avons donc montré qu’il est pertinent de réintroduire un dispositif du recyclage humanitaire des médicaments à l’échelle de la France. Nous pouvons donc nous intéresser plus en détail à celui-‐ci et vérifier sa faisabilité.
2.3 Circuit de récupération des MNU et de mise à disposition aux populations les plus démunies en France.
2.3.1 Description de notre modèle fictif de recyclage humanitaire des médicaments Voici un Schéma simplifié de notre modèle fictif.
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Les médicaments non utilisés par les patients seraient comme d’habitude ramenés chez le pharmacien. Plus encore, ce dernier serait l’unique personne autorisée à récupérer des MNU de la part des patients. Comme pour le dispositif qui prévalait avant 2009, les pharmaciens disposeraient de deux cartons Cyclamed, l’un (vert) pour disposer les MNU qui sont en mesure de faire l’objet de don et l’autre (rouge) pour regrouper les MNU inutilisables et devant être incinérés. Toutefois, au niveau du pharmacien, une différence majeure serait mise en place par rapport à l’ancien dispositif. On demanderait aux pharmaciens d’effectuer un tri beaucoup plus rigoureux qu’auparavant. Pour les aider, Cyclamed établirait une liste des médicaments autorisés à faire l’objet de dons et des critères d’éligibilité. Les médicaments que les pharmaciens seraient autorisés à mettre dans le carton vert seraient seulement ceux que les centres de soins comme les Caso utilisent au quotidien. Cependant, serait exclu tout médicament qui exige des conditions de conservations particulières, c’est à dire autre que la simple conservation à température ambiante et la mise à l’abri de la lumière du soleil. En ce qui concerne la date de péremption, les pharmaciens ne retiendraient seulement les MNU dont la date de péremption serait supérieure à un an. Enfin, le pharmacien serait tenue de vérifier tant que possible (puisque cela reste en partie subjectif) la bonne conservation du
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médicament notamment en jetant un coup d’œil sur l’état de l’emballage carton et en s’assurant que les blister sont intacts. Quels sont les avantages de mettre autant l’accent sur le rôle du pharmacien ? Le pharmacien est par définition le professionnel du médicament, c’est la personne la plus qualifiée pour trier les médicaments et c’est notamment celle qui peut avoir un regard le plus objectif possible sur la bonne conservation ou non d’un MNU (ce qui est essentiels pour assurer un don de qualité). De plus le pharmacien est le plus a même à se plier aux exigence d’une fiche délivré par Cyclamed qui indique les critères à respecter pour le tri. En effet, parce qu’il a conscience mieux que quiconque que le médicament n’est pas un bien comme les autres, comprend qu’on ne peut pas se permettre de donner n’importe quels MNU dans n’importe quel état. Enfin, demander aux pharmaciens de réaliser le tri permet de réaliser des économies. Il y a actuellement 22 545 officines en France. Ainsi on aurait une « armée » de pharmacien qui trierait chacun les MNU qui leur sont rapportés au lieu d’avoir les quelques ONG qui seraient autorisés à effectuer le don de MNU en train de trier des quantités considérable de MNU. Rappelons à ce titre que si l’Ordre de Malte a arrêté le recyclage humanitaire des médicaments c’était en partie à cause du temps que leur demandait le tri des MNU. Quant aux grossistes répartiteurs, ils continueraient à acheminer les cartons Cyclamed vers leur établissement régional. Depuis 2009, les grossistes entreposaient les cartons Cycalamed dans un conteneur au niveau de leur établissement, puis Cyclamed se chargeait transporter ces conteneurs vers les centres d’incération partenaires. Avec le nouveau dispositif, cette pratique persisterait mais les grossistes n’entreposeraient que les cartons rouges dans ces conteneurs. Quant aux cartons verts (contenant les MNU à des fins de don) les grossistes les entreposeraient dans les dans un second conteneur. Celui-‐ci serait acheminé par Cyclamed à l’établissement pharmaceutique de Pharmacien Humanitaire Internationale à Nîmes. Pharmacie Humanitaire Internationale vérifierait que le tri a été effectué correctement par les pharmaciens et se chargerait de mettre ces MNU à disposition des centres de soin en France. Pourquoi travailler avec PHI ? L’ONG est l’une des rares associations humanitaires, parmi celle qui pratiquait le don de médicaments de manière très sérieuse, à avoir continué d’exporter des MNU jusqu’en 2009, c’est à dire jusqu’à l’interdiction. L’association à travailler avec le gouvernement français pour assurer la reconversion et à obtenue de l’Etat de devenir l’unique grossiste répartiteur à vocation humanitaire en France. C’est à dire que PHI est la seule ONG autorisé à livrer des dons de médicaments neufs, non pas donc aux pharmacies, mais aux centres de soin comme les Caso de Médecins de Monde, le Samu sociale, la Croix Rouge où les centres indépendant come CPO (centre portes ouvertes) de Tours. Ces centres de soins mettent ensuite gratuitement à dispositions des populations en situation de précarité ces médicaments neufs. Pour se faire PHI possède un établissement
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pharmaceutique à Nîmes qui regroupe l’ensemble des dons de l’entreprise pharmaceutiques. Le but serait donc que les MNU récupérés par le système Cyclamed intègrent le dispositif mis en place par PHI depuis 2009. PHI disposerait ainsi d’une double source de médicaments pour alimenter les centres de soins, les dons de médicaments neufs de la part des entreprises du médicament et les MNU. Quels en sont les avantages ? Cela permet d’éviter d’avoir besoin d’établir tout un nouveau système de distribution des MNU. En effet la distribution des MNU serait assurée par un dispositif (celui de PHI) qui a su faire ses preuves et assure un approvisionnement efficace de la quasi-‐totalité des centres de soins en France. De plus cela permettrait de confier l’ensemble des MNU récupérés et triés à une association qui a toujours soutenu le recyclage humanitaire des médicaments et qui le faisait d’une manière extrêmement professionnelle et responsable jusqu’en 2009.
2.3.2 Vérifications de notre modèle sur le terrain Maintenant que nous avons réfléchis au dispositif de recyclage humanitaire des médicaments qui pourrait être le plus réalisable possible, il nécessaire d’en vérifier la faisabilité.
2.3.2.1 les pharmaciens sont-‐ils prêts à se soumettre aux exigences d’un tel modèle ?
Le premier point important à vérifier dans notre modèle est le rôle du pharmacien. Nous lui avons en effet attribué un rôle essentiel dans ce nouveau dispositif, il faut savoir s’il est prêt à accepter les conditions d’un tel système. Pour cela nous avons soumis un questionnaire aux pharmaciens. Questionnaire aux pharmaciens. Objectif général : tester la faisabilité de notre circuit de récupération et de distribution des MNU aux personnes en situation de précarité. Objectif précis du questionnaire : vérifier que les pharmaciens sont prêts à se soumettre aux exigences de notre circuit. Plus précisément nous voulons savoir si le pharmacien est disposé
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à trier de manière rigoureuse les MNU qui leur sont ramenés par les patients. Le pharmacien devra effectuer le tri en fonction de critères très strict (sur la date de péremption, l’état de l’emballage des médicaments etc.) et sera également dans l’obligation de respecter une liste des MNU autorisés à faire l’objet de don. A titre de rappel, nous avons décidé dans notre circuit de déléguer une grande partie du tri des MNU aux pharmaciens, car en tant que spécialistes des médicaments, ils sont les plus à même de juger de la bonne conservation ou non d’un médicament par le patient (même si ce jugement reste pour partie subjectif). Très nombreux cela serait économiquement plus efficace que si seulement quelques ONG s’occupaient de trier l’intégralité des MNU. Méthodologie : L’objectif est évidemment que le pharmacien réponde sincèrement à nos questions et non en fonction de l’image qu’il souhaiterait donner de lui. Or un questionnaire qui cherche à savoir si les pharmaciens sont prêts ou non à donner de leur temps pour une bonne cause (celle de la mise à disposition des MNU aux populations démunies), est largement susceptible d’être faussé. En effet, le pharmacien sera tenté de répondre positivement à un tel questionnaire pour véhiculer une bonne image de lui. Pour essayer d’avoir une réponse la plus sincère possible nous avons décidé, lors de la présentation de notre démarche au pharmacien, de lui montrer que nous avons conscience des contraintes de temps et de sécurité que représente le dispositif Cyclamed pour eux. Plus précisément, nous avons jugé nécessaire d’insister sur la sécurité (certains patients qui rapportent des objets dangereux tels que des seringues ou bien alors des compresses usées). En lui montrant que nous sommes conscients de ces contraintes, le pharmacien est sensé ne ressentir aucune gêne quant à l’image qu’il donne de lui dans le cas où il ne serait pas enclin à se soumettre à notre dispositif. La première question cherche à savoir si le pharmacien cautionne d’emblée un tel dispositif et est prêt à s’y plier naturellement. En cas de réponse négative à la première question, les autres questions essayent de comprendre les motivations de ce refus. Questions 1) Si un tel système (assez contraignant) était sur le point d’être mis en place, le cautionneriez-‐vous et seriez-‐vous disposés à effectuer un tri aussi rigoureux que le demande le dispositif ? 2) Si vous aviez le temps de le faire, alors le feriez-‐vous?
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(C’est à dire qu’en cas de problème suite à la consommation de MNU consommé par un patient, le pharmacien ne peut pas être poursuivit) 3) Si on omettait le problème de sécurité, c’est-‐à-‐dire que les sacs de MNU rapportés par les patients ne présenteraient aucun danger, alors seriez-‐vous prêt à effectuer un tel tri ? Résultats : Nous avons interrogés 32 pharmaciens, essentiellement sur Lyon mais également en région parisienne et à Nice. Une remarque intéressante, est que la position des pharmaciens était rarement hésitante mais plutôt très claire. D’autre part, ce qui normalement était un simple questionnaire s’est constamment transformé en petit entretien de 10 à 15 min. En effet les pharmaciens, quel que soit leur position sur la question, portait toujours un intérêt au sujet. Cela nous a permis de récolter plus d’informations que prévu. Sur les 32 pharmaciens interrogés, seulement quatre cautionnaient notre modèle fictif et étaient prêts à y participer, soit 12,5% des pharmaciens interrogés. Tous les pharmaciens ont admis, sans même qu’on leur demande, qu’un nombre assez important de boites non ouvertes était récupéré puis placés dans les cartons Cyclamed et que cela représentait un gâchis non négligeable. Toutefois 87,5% d’entre eux ne sont pas prêt à participer à un tel dispositif. Quelles en sont les raisons ? Parmi les 28 pharmaciens qui ne se disaient pas prêts à se soumettre à un tel système, 6 sont contre le recyclage humanitaires des médicaments, soit en raison du problème de traçabilité, soit à cause de leur expérience passée (avant 2009, il s’agissait donc de pharmaciens âgés). Pour les 22 restants, ils invoquaient à la fois le problème de la sécurité (les sacs rapportés par les patients représentent parfois trop de dangers de contamination en cas de manipulation) et celui du temps. 16 pharmaciens sur 28, soit 72,7% de ce qui s’oppose à notre dispositif, estiment que la question de la sécurité est primordiale, le 27,3% autres, estiment que c’est le temps qui pose problème. Quand on fait l’hypothèse d’absence de contrainte de temps, les 22 pharmaciens évoquent le problème de sécurité et inversement. Tout naturellement l’ensemble de ces 22 pharmaciens étaient prêts à se soumettre à un tel système si l’on omettait la contrainte de temps et le problème de sécurité. En conclusion, notre enquête terrain auprès des pharmaciens a montré qu’ils ne sont pas prêts à un retour en arrière d’autant plus si cela leur demande un tri encore plus exigeant qu’auparavant. Cette enquête vient donc invalider notre modèle de recherche, d’autant plus que les obstacles à un tel dispositif mis en avant pas les pharmaciens (la sécurité et le temps) sont difficilement solvables.
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2.3.2.2 l’avis des professionnels de la cause humanitaire.
Odette Pion Présidente de Pharmacien Sans Frontière Rhône-‐Alpes Elle est entièrement favorable pour la mise en place d’un nouveau circuit de recyclage humanitaire des médicaments à l’échelle de la France. Selon elle, au regard de l’époque qu’on est en train de traverser, il y a un réelle besoin de médicaments pour les plus démunies, il suffit pour ça de se rendre dans un centre de soin. Ajouter à cela, un gâchis considérable constaté au jour le jour par les pharmaciens qui disposent dans les cartons Cyclamed des boites de médicaments toutes neuves. Enfin, elle reçois trois à quatre fois pas semaines des appels de personnes qui essayent de trouver une meilleure issue à leur MNU que la simple incinération que propose actuellement Cyclamed. Or si ces personnes font l’effort de chercher la meilleure solution pour leur MNU, c’est que normalement elles les ont conservés de manières adéquates. Cependant, cette recherche d’un nouveau dispositif de recyclage humanitaire des médicaments ne peut se faire sans une discussion avec l’industrie pharmaceutique sur la question de la traçabilité qui reste essentiel. Il faudrait voir s’il est possible d’élaborer un système permettant de s’assurer d’une conservation correcte du MNU. Elle avait essayé avec PSF au début des années 2000 (alors que l’association avait arrêté l’exploration des MNU) de mettre en place un tel système à Chambéry. Elle voulait mettre en place une pharmacie d’urgence dans un centre de précarité, qui aurait été alimenté par des MNU que PSF Rhône Alpes aurait trié. Malheureusement elle s’est mise à travailler sur ce sujet au moment ou le scandale de revente des MNU par le pharmacien a éclaté. Dès lors, il fallait plutôt se faire discret à l’époque en tant que pharmacien. Mais elle pense vraiment que sujet doit être traiter à partir d’une diversité de personnes et non seulement des pharmaciens. Industrie pharmaceutique, grossistes, hommes politiques et économiste doivent être également conviés à la discussion. Cela dans le but d’essayer de voir si les MNU peuvent participer à cette lutte contre l’explosion de la précarité ces dernières années, avec des personnes qui n’ont soit pas accès aux dispositif d’Etat soit qui n’ont plus les moyens de se payer une mutuelle. Francis Maquet Pharmacien de production dans les laboratoires Boiron. Actuellement dans le département de l’homéopathie. Il était auparavant pharmacien et chef de projet chez PSF. Pour Francis Maquet, il est inconcevable de remettre en place un dispositif de recyclage humanitaire des médicaments même à l’échelle nationale. Il a tellement constaté de dérives quand il travaillait à pharmaciens sans frontière qu’il s’agit vraiment pour lui de quelque chose à oublier. Toutefois voici les remarques dont il nous a fait part sur notre dispositif : Tout d’abord il faut un système qui ne recycle que les formes orales et pas les formes injectables, car cela comporte beaucoup moins de dangers.
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Il faut ensuite accentuer l’effort de traçabilité, de manière à être certain que les médicaments ont été conservés dans des conditions réglementaires. Il apparaitrait toujours fiable de distribuer les MNU vers des structures de soin comme MSF, médecins du monde, croix rouge, secours catholique, par un réseau de dispensaire. Il est pertinent de se limiter seulement une redistribution à l’échelle nationale, visant les populations les plus démunies où dépourvues de protection sociale sur le territoire français. Il y a énormément de besoins à l’échelle nationale, c’est une priorité de se focaliser dessus en premier. Les personnes fréquentant des associations comme les Resto du coeur ont aussi besoin de se soigner. Guillemette Eichenlaub Etudiante en Pharmacie à Lyon 1 Nous pouvons tirer plusieurs enseignements de cet entretien avec cette étudiante en 6ème année de pharmacie. D'abord, la traçabilité du médicament est assurée par un système très contrôlé: les laboratoires produisent un médicament, les revendent en général à des grossistes agréés (Phoenix, ou OCP par exemple) qui les redistribuent aux pharmacies. Un tel système fut mis en place dans l'objectif d'assurer au maximum la sécurité du patient, en s'assurant de la qualité du produit d'autant que les pharmacies sont livrées deux fois par jours. Cette traçabilité est également assurée par une codification des médicaments (boîte portant des codes dits CIP, permettant les rappels en cas de problème sur le produit). De même, le don des médicaments tel qu'il se fait aujourd'hui suit également une procédure précise; les laboratoires font don des médicaments à TULIPE qui les redistribue surtout aux grandes associations même si Guillemette avait réussi à en obtenir. C'est justement sur ce problème de traçabilité que Guillemette s'est longuement arrêtée pour nous faire comprendre qu'instaurer un système de recyclage humanitaire, même à l'échelle nationale. C'est donc là qu'il faudra réfléchir.
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Conclusion générale
Nos espoirs et désillusions Le refus… Voici ce à quoi nous avons été confrontés de la part des professionnels de santé. Que ce soit par un ancien dirigeant de Pharmacie Humanitaire Internationale (ONG qui pratiquait auparavant le recyclage humanitaire), ou de la part des pharmaciens eux-‐mêmes. En effet, les pharmaciens refusaient d’endosser une responsabilité qu’ils prenaient pourtant par le passé. Les raisons de ce refus sont assez simples: Le problème de la traçabilité du médicament une fois sorti de l’officine n’est toujours pas résolu et reste un point de blocage. En effet, comment savoir si un patient a conservé son médicament dans des conditions de température, de lumière qui seraient « optimales »? De plus, la peur de « l’individu malintentionné » existe chez certains pharmaciens. Cela nous est apparu plus comme une forme de psychose du fait du conditionnement des médicaments, mais les pharmaciens n’ont pas entièrement tort sur cette possibilité. Parmi les autres désillusions auxquelles nous avons été confronté, une des plus notable et paradoxale fut celle de la contestation du recyclage humanitaire à l’international et du système Cyclamed lui-‐même par les professionnels de la santé. En effet au-‐delà de l’image idyllique que nous avions eue , du recyclage humanitaire à l’international, aux premiers abords, une étude approfondies des rapports parlementaires ainsi que des séries d’entretiens nous ont permis de découvrir que le recyclage humanitaire à l’international était loin d’être ce que nous avions imaginé. Derrière le système opaque du recyclage humanitaire à l’international se cache en fait un système subversif en proie aux dérives nombreuses avant son interdiction et, fait sans doute plus étonnant, un système néfaste économiquement et très souvent contre-‐productif. Enfin, nous faisons face à un paradoxe: d’un côté nous nous positionnons clairement en faveur de la remise en place d’un système de recyclage humanitaire des médicaments à l’échelle nationale… mais dans le même temps, une telle position présuppose un « soutien » à l’existence des MNU, c’est à dire au « gaspillage », un gaspillage utile en somme. Néanmoins, le système de récompense n’est pas écarté par les pharmaciens, et certains seraient prêts à effectuer un tel tri s’ils n’étaient pas jugés comme responsable des éventuels problèmes découlant d’un accident potentiel suite à ce tri. L’échelle nationale
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permettrait pourtant d’éloigner un certain nombre de problèmes logistiques… Un système de récompense financier serait néanmoins très coûteux pour l’ensemble de la filière pharmaceutique. C’est pourquoi nous avons pensé à la mise en place possible d’un « label recyclage humanitaire » pour les pharmaciens, attribué par Cyclamed lui-‐même (qui prendrait enfin ses responsabilités…). Un tel label, pourrait ainsi inciter les patients à venir chez certains pharmaciens (il faudrait néanmoins demander une dérogation à l’état pour permettre de mettre en place un tel label qui mettrait en valeur certaines pharmacies). Qui plus est, nous ne sommes pas les seuls à penser que l’instauration d’un débat à l’échelle nationale pour réinstaurer une forme de recyclage humanitaire du médicament serait une bonne chose, en réunissant politiques, pharmaciens, économistes, et les gérants de Cyclamed, ainsi que les grossistes, et les industriels… C’est notamment une ancienne directrice de Pharmacie humanitaire internationale qui était enjouée à cette idée lors d’un entretien que nous avons réalisé avec elle. Ce débat s’inclut dans un problème systémique de grande échelle, nous espérons que ce sujet sera repris par les promotions à venir
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Bibliographie Cf. documents disponible sur Incipio pour rédiger une bibliographie. -‐ Site officiel de l'administration française, rubrique sécurité sociale et médicaments -‐ www.ameli.fr -‐ I. Fatiha NOUSSEIR (2005). Médicaments achetés, remboursés et non utilisés en France : Aperçu d'un gaspillage. Mastère M2. Analyse et gestion des établissements de santé. Faculté de médecine LARIBOISIERE. [Internet] [2014]. Disponible sur : URLhttp://www.memoireonline.com/12/08/1699/Medicaments-‐achetes-‐rembourses-‐et-‐non-‐utilises-‐en-‐France-‐Apercu-‐dun-‐gaspillage.html#_Toc114909438 -‐ Miguel Medina(2013). En 2010 chaque Français a consommé 48 boîtes de médicaments. Le Monde, 29.10.2013. [en ligne] [2014]. Disponible sur : http://www.lemonde.fr/societe/article/2011/09/28/en-‐2010-‐chaque-‐francais-‐a-‐consomme-‐48-‐boites-‐de-‐medicament_1579278_3224.html -‐ Rapport de l'Institut Général Affaires Sociales de 2005 sur le bilan de Cyclamed. -‐Extrait de question de l'assemblé nationale ( question 59525 par M. Jean-‐Claude Mathis, 29/09/2009 ) -‐ Rapport Ifremer,Maude Colette Bregand, Alices James, Catherine Munschy, Gilles Bocquéné (2008)."Contamination des milieux aquatiques par les substances pharmaceutiques et cosmétiques".44 pages. -‐Pierre Le Hir(2009). "L'alarmante pollution de l'eau par les médicaments". Le Monde. [en ligne] [2014]. Disponible sur : abonnes.lemonde.fr/planete/article/2009/02/02/l-‐alarmante-‐pollution-‐de-‐l-‐eau-‐par-‐les-‐medicaments_1149551_3244.html Sophie Landrin (25.03.2013). L'eau minérale n'est plus épargnée par la pollution. Le Monde , [en ligne] [2014]. Disponible sur : abonnes.lemonde.fr/planete/article/2013/03/25/l-‐eau-‐minerale-‐n-‐est-‐plus-‐epargnee-‐par-‐la-‐pollution_1853686_3244.html -‐Dialogue de l'ASEF, 2009, "Quand les médicaments polluent notre eau..." -‐Rapport de l'Office nationale de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA), "Les substances émergentes dans l'environnement", Octobre 2009 -‐Fiche de l'ONEMA, "Contamination des eaux par les résidus médicamenteux"
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Thomas Laurenceau (2013). Qualité de l’eau potable : difficile d’échapper aux polluants. 60 millions de consommateurs. [en ligne] [2014]. Disponible sur : www.60millions-‐mag.com/actualites/articles/qualite_de_l_eau_potable_nbsp_difficile_d_echapper_aux_polluants -‐Rapport de l'ONEMA "Impacts des substances pharmaceutiques sur l'eau et les milieux aquatiques" -‐www.cyclamed.fr ELIANE PATRIARCA (2005), Huit associations réclament la fin de Cyclamed, Libération, disponible sur: http://www.liberation.fr/societe/2005/04/30/huit-‐associations-‐reclament-‐la-‐fin-‐de-‐cyclamed_518230 -‐ Benoît Hopquin (2013). Les collectes humanitaires de médicaments pourraient être restreintes. Le Monde. [en ligne] [2014]. Disponible sur : http://abonnes.lemonde.fr/cgi-‐bin/ACHATS/ARCHIVES/archives.cgi?ID=01c3a3bd908f903d8e538afc44093657fcb921564326e42a&print=1 -‐ Xavier BERNARD(2013). A Tours, un centre de soins accueille les exclus du système de santé.La Croix. [en ligne] [2014]. Disponible sur : www.la-‐croix.com/Actualite/France/A-‐Tours-‐un-‐centre-‐de-‐soins-‐accueille-‐les-‐exclus-‐du-‐systeme-‐de-‐sante-‐_NP_-‐2012-‐02-‐22-‐771052 -‐ OBSERVATOIRE DE L’ACCÈS AUX SOINS DE LA MISSION FRANCE RAPPORT 2012 -‐ Cécile Prieur (17/11/2013). Une inspection diligentée contre le trafic de médicaments.Le Monde,. [en ligne] [2014]. Disponible sur : http://abonnes.lemonde.fr/cgi-‐bin/ACHATS/ARCHIVES/archives.cgi?ID=e1d3917fec8756e149254a801f3c0d76ae5a7020c62bbb6f&print=1 -‐ Joëlle BAAKLINI (2009). LES PROBLEMES ENGENDRES PAR LES MEDICAMENTS NON UTILISES (MNU) EN FRANCE ET A L’ETRANGER. Doctorat. Discipline. A L’UNITE DE FORMATION ET DE RECHERCHE « FACULTE DE PHARMACIE DE CHATENAY-‐MALABRY » de L’UNIVERSITE PARIS-‐SUD XI, 156 pages. -‐Paul Benkimoun (17/11/13). M. Douste-‐Blazy maintient un dispositif controversé de collecte de médicaments pour le tiers-‐monde. Le Monde [en ligne] [date de consultation]. Disponible sur : http://abonnes.lemonde.fr/cgi-‐bin/ACHATS/ARCHIVES/archives.cgi?ID=d56d0c6ae6ffe5e6628065ea6d65837aea9ab648167e42d4&print=1
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-‐ Marina Benedik, Yacine Louz ,Hlima Razkaoui, Véronique Sauloup, Rapport Pharmacie Humanitaire internationale, Etude sur le don de médicaments dans la province de Banda Aceh, 2006. -‐Texte de loi: Loi n° 2007-‐248 du 26 février 2007: http://legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000613381 -‐Texte de loi, Code de la santé publique L4211-‐2: http://legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=3690A670B01E95B43883340394C6F865.tpdjo14v_2?cidTexte=LEGITEXT000006072665&idArticle=LEGIARTI000006689008&dateTexte=20131102&categorieLien=id#LEGIARTI000006689008 -‐, Pharmacien Inspecteur de Santé Publique 15 avril 2003 Olivier BALLU (2003). "STATUT DES MÉDICAMENTS NON UTILISÉS (M.N.U.)".
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Table des annexes
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Annexe 1 : Martine Augé, Pharmacienne à Draveil (Essonne). La gestion des médicaments avant la mise en place de Cyclamed Avant Cyclamed il y avait un grand des petites associations qui s’occupaient de récupérer les médicaments chez les pharmaciens pour ensuite les envoyer vers les pays en développement. Les pharmaciens triaient les médicaments récupérés entre périmés et non périmés et les associations venaient récupérer les sacs de non périmés. Dans chaque ville on pouvait trouver une associations qui s’occupait de se genre de mission.
L’une des dérives que Martine Auger a pu constater concernant le recyclage humanitaire des médicaments et cela même avant la mis en place de Cyclamed : Les personnes qui géraient ses associations et qui donc se chargeaient d’envoyer des colis de médicaments en Afriques (Concernant l’association de Draveil, il s’agissait de quatre colis par semaines pour quatre missions différentes toutes situées en Afrique), étaient plein de bonne volonté mais ne se rendaient pas compte qu’il ne suffisaient pas d’envoyer un colis de médicaments pour réellement aider les populations en manque de traitements médicaux. Ainsi Martine Auger à constater trois types de problèmes. Premièrement, l’association était souvent amener à envoyer des médicaments qui ne correspondaient absolument pas ou alors partiellement aux besoins de la population. Deuxièmement, ils envoyaient quelque fois des médicaments dont la date de péremption était proche, ce qui représentait un risque pour les futurs consommateurs en Afrique. Troisièmement, le manque de connaissance en pharmacologie les amenait à répartir les médicaments dans les colis sans prendre en compte les impératifs de prescription, Mme Auger donne un exemple à ce titre : L’association de Draveil récupérait par exemple quatre boites d’amoxicilline (antibiotique) et mettait donc une boite dans chacun des quatre cartons. Le problème c’est que pour bien traiter le patient, le médecin prescrit toujours deux boites d’amoxicilline. Avec une seule boite le patient ne peut être guérit et le traitement peut s’avérer inefficace. Cela débouche sur un mauvais usage du médicament car le traitement n’est pas complet. Dès lors pour palier ses dérives, l’état avait déjà pris quelques mesures et avait notamment ordonné que la préparation des colis s’effectue sous la supervision d’un pharmacien (C’est en prenant part à cette directive que Mme Auger s’est rendu compte des dérives mentionnées ci-‐haut). Mais Mme Auger qui a jouer ce rôle pendant plus d’un an, c’est vite rendu compte que les personnes qui s’occupaient de ce projet, pleines de bonnes volonté, étaient très réticentes à écouter ceux qui « savent ». ces personnes voyaient les pharmaciens qui les supervisaient comme une contrainte qui les restreignaient dans leur mission humanitaire. Souvent, une fois partie, les intervenants de l’association faisaient l’inverse de ce qu’elle leur avait dit de faire.
Toutefois, l’association de Draveil recevait également de l’argent de l’Etat pour acheter des médicaments neufs. Dans ce cas là les colis envoyés étaient cohérents puisque les médicaments achetés étaient choisis en fonction des réels besoins des populations sur place.
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Concernant Cyclamed et le geste de tri. Il y a eu récemment une grève des grossistes de l’OCP (office commercial pharmaceutique) de Melun car plusieurs grossistes se sont blessé lors du transport des cartons Cyclamed car ceux-‐ci comportait des seringues. Or il est pourtant strictement interdit de jeter les seringues dans les cartons Cyclamed. Ceci montre l’approximation du tri de certains pharmaciens ou de certains consommateurs qui viennent rendre leurs médicaments. D’ailleurs pour des raisons de sécurité Cyclamed va changer les cartons (voir annexe). Les cartons seront plus solides et avec des poignés pour facilité la tâche des grossistes. Mme Auger explique clairement que pour sa sécurité elle ne fouilles pas dans les sacs qui lui sont rendu avec les médicaments non utilisés ou périmés. Plus précisément, elle vérifie bien qu’il n’y pas d’objet interdit mais ne va jusqu’à ouvrir les boites de médicaments. En effet ils leur arrive de récupérer des sacs avec des compresses tachées de sang par exemple. Selon Mme Auger, c’est au consommateur de faire le tri entre le médicament et l’emballage, car cela évite au pharmacien le danger de manipulation. Elle affirme qu’elle récupère une quantité assez conséquente de médicaments et que beaucoup de personnes on quand même le reflexe de tri en rapportant le médicaments chez le pharmacien (elle récupère plus d’un sac de médicaments pas jours). Toutefois, selon elle, si elle récupère autant de médicament c’est à cause d’une part de la sur-‐prescription de la part des médecins et d’autre part du fait que les patients ne finissent quasiment jamais leur traitement. Le recyclage des seringues est réalisé séparément avec des petits bacs jaunes donnés au patient lors de l’achat de la seringue. Ensuite le patient ramène le bac jaune hermétiquement fermé avec la ou les seringues à l’intérieur. Le dispostif cyclamed ne lui prend pas énormément de temps mais indique toutefois que les cartons sont assez encombrant compte tenu de la taille de son officine. Elle aborde le recyclage des médicaments comme le recyclage domestique des déchets ménagers mais à l’intérieur du cadre professionnel. La vente à l’unité des médicaments : Martine Auger est clairement opposée à ce projet de loi. Pour les antibiotiques il existe dejà des boites de 3, 5, 6, 12, 14 etc. Ainsi le problème du gâchis des médicaments provient soit du fait que le médecin prescrit trop, soit que les patients ne prennent pas leur traitement en jusqu’au bout. Si on vent à l’unité, il n’y aura pas de numéro de lot et de date de péremption sur le blister du cachet, d’où un problème de traçabilité. Ensuite à partir du moment où l’on vent à l’unité, cela devient une préparation puisque le pharmacien doit reconditionner le médicament, donc ça coute plus chère d’une part et ça prend plus de temps d’où un possible problème de temps d’attente dans les officines d’autre part.
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Le principe actif d’un médicament est irrécupérable parce que :
-‐ Soit le principe actif se transforme dans le temps, par exemple l’aspirine qui est de l’acide acétylsalicylique se transforme en acide acétique (vinaigre). Les molécules se dégradent, se transforment en d’autre molécules et même parfois en molécules toxiques.
-‐ Soit le principe actif se dégrade et devient moins efficace. dans tous les cas il est impossible de recycler un médicament comme on recycle une
bouteille de vers.
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Annexe 2 : Entretien avec Odette Pion, Directrice de Pharmacien Sans Frontière Rhône Alpes.
Quels sont pour vous les causes des dérives du recyclages humanitaires des médicaments ? Les dérives liées au don de médicaments à l’échelle internationale sont les clairement les conséquences d’une générosité mal contrôlée. Les petites structures associatives qui se sont un formée un peu partout en France manquait cruellement de professionnalisme en ce qui concerne la composition des médicaments. Ajouter à cela, l’envoie de MNU par les particuliers, le plus souvent à leur famille ou leurs amies. Ce sont des personnes qui ne sont pas au courant des politiques de santé mené dans leur pays. Or la quasi totalité des pays en développement s’efforce de mettre en place une telle politique pour devenir autonome dans le domaine du médicament. Des ONG comme la notre au contraire s’efforçait d’effectuer un tri rigoureux des MNU, on avait à l’époque un petit livret avec la liste des médicaments qu’on s’autorisait à envoyer, on faisait très attention à la date de péremption car l’acheminement des MNU pouvait parfois prendre beaucoup de temps. Ce que je pense également, c’est que toutes ces dérives que l’on connaît bien sont, de manière plus générale, la conséquence d’une chose : on a fait du médicament un bien comme un autre, qui peut faire l’objet de don au même titre que la nourriture. Les conséquences d’un don inadéquates peuvent être catastrophique. Par exemple, un jour je me suis retrouvé au Burkina-‐Faso dans la voiture d’un ami. Il me présente fièrement un médicament qu’il s’est procuré sur le marché et qui soit disant améliorait la « virilité ». Il me demande tout de même confirmation, et là il me tend une boite de pilule contraceptives… Qu’est ce qui cause réellement des problèmes ? Les MNU ou le don de médicament ? C’est là une très bonne question, il est vrai que le don de médicament neuf peut lui aussi être en inadéquation avec les besoins, ne pas être dans la langue du pays destinataire etc. Par exemple, quand je gérais une pharmacie d’Etat en Guinée lors de l’indépendance, je recevais des dons de médicaments neufs de la part de l’industrie pharmaceutique et il m’est arrivé, je m’en souviens très bien, de recevoir de sirops contre le cholestérol alors que je ne les avais pas demandé et qu’évidemment je n’en avais pas besoins. Cependant les MNU sont plus à même d’alimenter ces dérives et présente le problème de la traçabilité. Un système de recyclage humanitaire pour la France ? Je suis entièrement favorable pour la mise en place d’un nouveau circuit de recyclage humanitaire des médicaments à l’échelle de la France. J’estime qu’au regard de l’époque qu’on est en train de
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traverser, il y a un réelle besoin de médicaments pour les plus démunies, il suffit pour ça de se rendre dans un centre de soin. Ajouter à cela, un gâchis considérable constaté au jour le jour par les pharmaciens qui disposent dans les cartons Cyclamed des boites de médicaments toutes neuves. Par exemple, il y a quelques mois, j’ai reçu un appel d’une femme dont le mari est décédé d’un cancer et qui m’a demandé ce qu’elle pouvait faire du traitement de chimiothérapie non utilisé. J’ai été obligé de lui dire de le rapporter au pharmacien pour Cyclamed le prenne en charge alors même que ce traitement coute extrêmement cher. Enfin, je reçois trois à quatre fois pas semaines des appels de personnes qui essayent de trouver une meilleure issue à leur MNU que la simple incinération que propose actuellement Cyclamed. Or si ces personnes font l’effort de chercher la meilleure solution pour leur MNU, c’est que normalement elles les ont conservés de manières adéquates. Cependant, cette recherche d’un nouveau dispositif de recyclage humanitaire des médicaments ne peut se faire sans une discussion avec l’industrie pharmaceutique sur la question de la traçabilité qui reste essentiel. Il faudrait voir s’il est possible d’élaborer un système permettant de s’assurer d’une conservation correcte du MNU. J’avais essayé avec PSF au début des années 2000 (alors que l’association avait arrêté l’exploration des MNU) de mettre en place un tel système à Chambéry. Je voulais mettre en place une pharmacie d’urgence dans un centre de précarité, qui aurait été alimenté par des MNU que PSF Rhône Alpes aurait trié. Malheuresement je me suis m’y à travailler sur ce sujet au moment ou le scandale de revente des MNU par le pharmacien a éclaté. Dès lors, il fallait plutôt se faire discret à l’époque en tant que pharmacien… Donc si vous voulez j’étais mal tombée… Mais je pense vraiment que sujet doit être traiter à partir d’une diversité de personnes et non seulement des pharmaciens. Industrie pharmaceutique, grossistes, hommes politiques et économiste doivent être également conviés à la discussion. Cela dans le but d’essayer de voir si les MNU peuvent participer à cette lutte contre l’explosion de la précarité ces dernières années, avec des personnes qui n’ont soit pas accès aux dispositif d’Etat soit qui n’ont plus les moyens de se payer une mutuelle.
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Annexe 3 : Entretien avec Guillemette Eichenlaub, étudiante en pharmacie (par email) J'ai effectivement été présidente d'une association humanitaire étudiante. Notre mission était d'amener au Maroc des médicaments ainsi que des vêtements, jouets.. et d'effectuer sur place des caravanes médicales ainsi que des formations sur l'hygiène, les MST et compagnie aux populations locales. Voici mes réponses à tes questions: Organisation en France: Comment s’organisait la récolte des médicaments vous concernant? (Qui la gérait? Où était-‐ce fait/géré? Quels étaient vos demandes/vos stocks/ vos manières de stocker les médicaments…) Dans le cadre de notre mission humanitaire, nous avons pu bénéficier de médicaments qui nous ont été donnés par l'organisme TULIPE. Tu pourras chercher sur internet mais c'est une association qui redistribue aux assos humanitaires les médicaments qui lui ont été légués par les laboratoires pharmaceutiques. Nous avons pu récolté plus de 15 000 euros de médicaments à l'époque (il y a 5 ans). C'était une folie. Nous étions une petite asso étudiante certes reconnue par la préfecture mais bon… Maintenant ils ne donnent qu'à des grosses ONG je crois, genre pharmaciens sans frontières ou autre. Etait-‐ce des médicaments non-‐utilisés, rapportés en pharmacie, ou des dons des laboratoires pharmaceutiques? C'était des médicaments donnés par les labos. Mais je ne sais pas si les labos ont des quotas à donner ou autre. Pourquoi ne pas utiliser des médicaments non-‐utilisés? Tout simplement car c'est interdit. Tout comme lorsque tu ramènes à la pharmacie un médicament non-‐utilisé, les pharmaciens ne peuvent pas le reprendre et le réutiliser. Le médicament suit un circuit bien défini et règlementé. Du laboratoire pharmaceutique qui produit le médicament et le commercialise, il passe par un grossiste (Phoenix, OCP ..) qui ensuite le distribue aux pharmacies. (Le laboratoire pharmaceutique peut aussi vendre directement aux pharmacies des médicaments en vente libre et non remboursés par la sécurité sociale. Le circuit permet d'assurer la qualité des médicaments (pas de contrefaçons) et permet de vérifier la chaîne du froid (ex pour les vaccins ou certains produits injectables). Le pharmacien délivre ensuite le médicament au patient qui est sur de bénéficier d'un médicament de bonne qualité. Dès que le médicament sort de la pharmacie, tu ne peux pas t'assurer qu'il va être bien conservé, que l'emballage ne sera pas abimé… L'objectif final est d'assurer la SECURITE du patient.
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Le problème de traçabilité des médicaments une fois sortie de l’officine est-‐il insolvable? Si non, quelles solutions seraient possibles? Donc le médicament une fois sorti de l'officine est attribué à un patient donné. Sur les médicaments tu trouve un code barre contenant des informations sur le produit ainsi que depuis peu de temps un code datamatrix qui contient d'avantage d'infos que le code barre. Je te laisse te renseigner sur ce code datamatrix qui permet de suivre le médicament du labo jusque l'officine. Le médicament sort de l'officine et est remis au patient. La traçabilité existe encore par notamment les codes CIP qui permettent de rappeler les lots défectueux. Lors d'un rappel de médicaments, l'ANSM qui est l'Agence Nationale de Sécurité des Médicaments et des produits de santé en France, en collaboration avec le laboratoire concerné, envoie un courrier aux officines (qui passe par les grossistes livrant 2 fois par jour les officines) pour leur demander de rappeler les lots défectueux en donnant le nom du médicament, le code CIP, le numéro de lot et la date d'expiration. Le pharmacien vérifie alors dans ses stocks s'il n' a pas le médicament concerné et vérifie dans son système informatique quel patient a pris ce médicament. En réalité je n'ai jamais vu un pharmacien regardé quel patient a pris ce médicament, souvent le médicament est déjà pris par le patient… A part pour les gros scandales comme TEVA et le furosémide cet été où dans ce cas l'affaire est médiatisé et les patients ont pu vérifié d'eux même s'ils n'avaient pas le médicament concerné par le rappel de lots. Penses-‐tu que l’initiation d’un réseau de distribution humanitaire des médicaments non utilisés est possible à l’échelle française? (pour ceux qui ne bénéficient pas de couverture maladie suffisante par exemple.) Donc comme je t'ai expliqué c'est impossible de distribuer les médicaments sortis de l'officine même s'ils ne sont pas utilisés. Les médicaments non utilisés et périmés sont rendus aux pharmacies par les patients et sont recyclés par l'association CYCLAMED. Quels médicaments récoltiez-‐vous? Pourquoi? Nous ne demandions pas de médicaments précis. On récupérait de grosses cantines de médicaments contenant des antibiotiques, anti douleurs… Des produits pouvant être conservés à 25°C environ. Distribution au Maroc: Comment s’organisait la distribution de médicament au Maroc? Au Maroc , nous étions en partenariat avec une association locale dirigée par un infirmier. Nous faisions dons aux hôpitaux de tous les dispositifs médicaux que nous avions rapporté (c'est à dire: compresses, seringues… ) et l'association gardait les médicaments dans les cantines dans un local. Ensuite nous faisions des caravanes médicales avec un médecin qui faisait des ordonnances et nous (étudiants en pharma et personnes de l'asso) délivrions les médicaments. Pourquoi le Maroc et non pays d’Afrique subsaharienne par exemple? On allait au Maroc parce que ça faisait plusieurs années que ce partenariat était établi avec l'association. J'ai été présidente un an seulement. On s'est rendu compte que le président de l'asso qui était aussi l'infirmier profitait de ces médicaments et abusait de ce pouvoir et de cette richesse. Notre séjour ne s'est pas très bien fini donc j'ai conseillé à l'équipe d'étudiants qui reprenait l'asso de changer complètement de projet. Ils partent maintenant au Burkina, n'amène plus de médicaments. Ils reconstruisent des jardins botanique et forment les populations à reconnaitre le paludisme.
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Comment les médicaments étaient conservés au Maroc? Ils étaient conservés dans des énormes caisses (les cantines) dans le local de l'association. Il n'y avait pas de régulation de la température bien sur. Avec le recul je me dis que ça craint un peu. Explication; les industriels réalisent des études de stabilité sur leurs médicaments pour proposer une date de péremption dans des conditions précises: 25°C. Il est donc approuvé que le médicament est stable pendant x années à une température précise. Or au Maroc il ne fait pas 25°C. Les médicaments se dégradent donc plus rapidement. De toute façon vu le besoin qu'il y avait, je pense que le stock de médicaments est descendu rapidement. Y-‐avait-‐il de problèmes de notice (la langue ne correspondant pas à celle des médecins locaux. Même si le maroc est francophone on ne sait jamais)? Notre mission se déroulait dans le Haut Atlas, les populations ne parlaient pas français. Ces mêmes populations ne savaient de toute façon pas lire. Pour les formations qu'on réalisait nous avions une traductrice. Y-‐avait-‐il des problèmes d’adéquation entre les médicaments que vous importiez au Maroc et les besoins réels des populations locales? Je ne pense pas. Le médecin délivrait beaucoup d'anti douleurs et d'antibiotiques. Mais comme les consultations se faisaient en arabe, nous ne comprenions pas grand chose aux pathologies. Donc je n'en ai aucune idée. Avez-‐vous été confronté à des problèmes de marchés noirs des médicaments? (Du genre les fournisseurs passés de médicaments étaient des faussaires… ou vos médicaments étaient-‐ils volés?) Nos médicaments provenaient de l'associations TULIPE donc pas de pb de vols ou autres. Par contre si nous avions acheté des médicaments directement sur place nous aurions pu être confronté à des médicaments contrefaits, sous-‐dosés, sur-‐dosés ou contenant un autre principe actif!
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Annexe 4 : Entretien avec Francis Maquet (Pharmacien aux laboratoires Boiron) Son avis : Utiliser à bon escient le médicament, il est plus adepte du contrôle strict de la prescription. Ceci s’ancre dans un mouvement actuel, où l’on parle beaucoup de renforcer ses défenses naturelles. Il nous renvoie à un livre “Le meilleur médicament c’est l’Homme” Il a participé à des opérations humanitaires dans le cadre de son engagement chez PSF : Il était alors représentant de PSF pendant quelques années à Lyon. Activité des laboratoires Boiron : ils ont un accord d’entreprise, ce qui facilite l’implication dans une association comme PSF. Ce qu’il faisait dépassait l’homéopathie. PSF avait centre de tri basé à Lyon, où ils essayaient de reconstituer des unités de médicaments de types antalgiques, anti-inflammatoires, tout ceci en lien avec des associations ou congrégations religieuses. Ils envoyaient des produits vers ses structures, (surtout vers les dispensaires religieux) et ils avaient des structures d’accueil des gens, par des infirmiers ou médecins aptes à délivrer un traitement adéquat. Les dons de médicaments sont parfois mal contrôlés, il y a des problèmes de logistique, surtout lors de leur transport en Afrique (à l’époque). De plus, sur place il n’y a pas forcément de structures médicales aptes à recevoir les médicaments envoyés. PSF était en accord avec des associations là bas, des gens aptes, avec des gens qui accompagnent les médicaments sur le trajet et qui suivent leur administration sur place là bas. Le problème c’est qu’ils (PSF) recevaient des demandes mais ils ne pouvaient pas forcément y répondre si il n’y avait pas de validation préalable, de manière à minimiser les dérives et à maîtriser l’administration des médicaments sur place. Il y a eu une évolution politique au niveau de PSF avant l’interdiction légale du recyclage des MNU : elle était de privilégier les médicaments essentiels, et d’arrêter de recycler des MNU. Ils achetaient alors des médicaments qu’ils donnaient. Cela passait par des interventions auprès de gros laboratoires, et donc par des dons des gros laboratoires, c’est d’ailleurs ce dont s’occupe actuellement Tulipe (émanation, en prise direct avec les gros laboratoires, issue de l’association pharmaceutique, en fonction des demandes Tulipe peut répondre à des besoins). Les MNU n’étaient donc déjà plus réutilisés, puis il y a eu une interdiction légale, il n’y avait donc plus d’envois de MNU, mais certaines associations comme médecins du monde ont continué à exporter certaines molécules recyclées. La loi a fait qu’on a tout arrêté. Par rapport aux pathologies à traiter, souvent les MNU ne sont pas compatibles, voire ne correspondent pas du tout.
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Il faut des médicaments essentiels : certains types d’antibiotiques de première ou de deuxième génération, inefficaces contre les gros fléaux comme la tuberculose et le sida, par exemple les antituberculeux ne sont pas trouvés dans les MNU. Il faut des molécules particulières, et donc passer par des laboratoires. La structure mise en place pour les recycler, Cyclamed, a progressivement utilisé les réseaux déjà existants. C’est mieux d’avoir une structure qui va récupérer et détruire ces produits. le vrai problème c’est pourquoi les MNU ? Il y a une forte tendance en France à la consommation de médicaments en trop, les pharmacies familiales sont importantes, et souvent on ne va pas au bout des traitements. Pour réagir en cas d’urgence, il faut alimenter des pharmacies de dispensaires souvent, c’est plus l’idée qu’on rend service, mais le système reste quand même relativement inefficace dans ces cas là. Ce sont des grosses problématiques, de gros besoins, le recyclage humanitaire des médicaments n’a pas pu répondre. On récolte des médicaments mais on arrive pas à résoudre le problème. Il faut des kits d’urgence (cf Tulipe) adapté à des pathologies d’urgence. C’est alors une réponse efficace à des besoins urgents. Mr Maquet n’est pas pour une remise en place du recyclage des MNU, mais plutôt de maîtriser la consommation de médicaments. En attendant il vaut mieux que ce soit fait par Cyclamed. Il est important de récolter des fonds pour des kits d’urgence. Par exemple à l’image du téléthon, adapter à la problématique, il faut lancer des opérations pour réaliser l’achat du produit adapté. (Interroger les spécialistes d’urgence.) Il suggère éventuellement de recycler les MNU en France, recycler les validés par les pharmaciens et les donner dans des prisons par exemple, sans les envoyer loin (pas de coûts de logistique, et moins de problèmes de contrôles). Il faut trouver le temps pour les pharmaciens de faire ça, cela coûte beaucoup surtout parce que tout est codifié. Selon lui la vrai question est : Comment faire pour continuer à recycler chez nous ? Exemples précis de recyclage humanitaire des MNU : Aspirine, molécule qui peut servir dans beaucoup de cas. Les antibiotiques, comme l’amoxicilline, la pénicilline pour tout ce qui est infections pulmonaires, il était possible de les garder. Les produits qui venaient de pharmacies familiales, il y avait un contrôle au niveau des boites, avec ainsi une forte probabilité d’avoir un produit en bon état, même si on ne peut pas assurer qu’il avait toujours été stocké dans des conditions optimales. Les formes orales étaient moins dangereuses que les formes injectables (celles ci non récupérées). On cherchait à limiter les risques.
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Commentaires sur la réintroduction d’un circuit de recyclage humanitaire : Premier élément : comment le médicament a été conservé ? Dès qu’il sort du circuit c’est difficile d’être sûr qu’il a été bien conservé, par les bonnes pratiques de conservation, on récupère un MNU est-ce qu’il a été bien conservé ? On ne sait pas. On n’est jamais sûr. Même si c’est écrit les gens ne lisent pas. Il y a un gros risque en cas d’intoxication, les pharmaciens ne prennent pas le risque. La famille peut attaquer. Dès que le produit sort on ne peut plus le garantir. En France on a un des circuits des meilleurs au monde, mais la meilleure façon d’être efficace c’est éviter les MNU. Aucun pharmacien ne cautionnerait cela, même si on l’a fait des situations extrêmes, du genre “quitte à ce que les gens meurent on tente”, cela a donné lieu à de longs débats lors de la période d’arrêt des récupérations des MNU. Cela va être compliqué de revenir en arrière. C’est tout à fait fiable de distribuer vers des structures de soins, MSF, médecins du monde, croix rouge, secours catho, par un réseau de dispensaire. Mais la loi est là, on peut plus remettre ça en place. Il faudrait réfléchir à limiter ce nouveau circuit seulement à une redistribution à l’échelle nationale pour les populations les plus démunies où dépourvues de protection sociale. Il y a tellement de besoins à l’échelle nationale, c’est déjà bien se focaliser là dessus. Les gens qui vont au resto du coeur ont aussi besoin de se soigner. Même si on a une couverture universelle, le médecin prescrit des médicaments à quelqu’un qui n’a pas de couverture.
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Annexe 5 : Questionnaire aux pharmaciens Nous avons décidé de vous présenter en annexe, seulement quelques questionnaires réalisés auprès des pharmaciens, qui sont représentatifs des tendances que nous avons constatées. Nous ne mettons pas les 32 questionnaires pour une question de place mais surtout d’intérêt, les réponses étant très souvent les mêmes. Pharmacie de l’Aigle 26 Avenue Jean Jaurès 69007 Lyon Questions 1) Si un tel système (assez contraignant) était sur le point d’être mis en place, le cautionneriez vous et seriez vous disposé à effectuer un tri aussi rigoureux que le demande le dispositif ? Non il serait difficile de mettre ça en place pour une question temps. Nous n’avons pas du tout le temps pour faire ce genre de tri. A la limite on pourrait déléguer cela aux étudiants en pharmacie qui viennent faire leurs stages chez nous mais je ne vois vraiment pas comment pouvoir gérer un tel tri. Certes je suis entièrement d’accord avec vous sur le fait que si on est amené à réintroduire le recyclage humanitaire, il faudrait faire un tri très rigoureux mais alors ça demanderait beaucoup de temps. 2) Si on appliquait l’immunité légale, alors le feriez-‐vous? Je ne pense pas que c’est une bonne idée, cela n’inciterait pas du tout à effectuer un bon tri. 3) Si on omettait le problème de sécurité, c’est-‐à-‐dire que les sacs de MNU rapportés par les patients ne présenteraient aucun danger, alors seriez-‐vous prêt à effectuer un tel tri ? Non plus car comme je vous l’ai dit nous n’avons pas le temps. Mais c’est clairement un problème supplémentaire qui vient compromettre la faisabilité de votre dispositif.
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PHARMACIE AUGÉ 15, place St Rémy 91210 DRAVEIL Questions 1) Si un tel système (assez contraignant) était sur le point d’être mis en place, le cautionneriez vous et seriez vous disposé à effectuer un tri aussi rigoureux que le demande le dispositif ? Non pas du tout, l’idée est louable, mais il y a vraiment un problème de risque. Les patients, nous rendent souvent des sacs avec des seringues, des compresses tachetés de sang, de boites de médicaments humides etc. Manipuler ces médicaments comporte un réel risque de contamination. 2) Si on appliquait l’immunité légale, alors le feriez-‐vous? Non je ne pense pas. Je trouve ça vraiment trop risqué d’effectuer un tri rigoureux. 3) Si on omettait le problème de sécurité, c’est-‐à-‐dire que les sacs de MNU rapportés par les patients ne présenteraient aucun danger, alors seriez-‐vous prêt à effectuer un tel tri ? Oui à ce moment là pourquoi pas, ça serait même très intéressant mais il faut donc mettre en place une grande campagne de sensibilisation auprès des patients.
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Pharmacie Perrache-‐Carnot. 55 rue Auguste Comte 69002, Lyon Questions 1) Si un tel système (assez contraignant) était sur le point d’être mis en place, le cautionneriez vous et seriez vous disposé à effectuer un tri aussi rigoureux que le demande le dispositif ? Non nous ne sommes pas prêt à le faire. Je pense que cela serait plus le rôle de Cyclamed ou des ONG. C’est au pharmacien des récupérer les MNU puisqu’après tout c’est lui qui les vents et que j’estime que les médicaments ne doivent pas être manipulés par n’importe qui. Cependant le métier de pharmacien n’a pas de vocation humanitaire comme celle-‐ci. 2) Sion appliquait l’immunité légale, alors le feriez-‐vous? Oui cela serait une bonne chose, mais je pense vraiment que ce n’est pas au pharmacien d’effectuer un tri aussi strict. 3) Si on omettait le problème de sécurité, c’est-‐à-‐dire que les sacs de MNU rapportés par les patients ne présenteraient aucun danger, alors seriez-‐vous prêt à effectuer un tel tri ? C’est là un vrai problème, certains patients nous ramènent toute sorte de choses qui peuvent être dangereuses comme des seringues par exemple.