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1 RAPPORT D’ACTIVITÉ INTERSESSION (MAI-OCTOBRE 2019) ET RAPPORT SUR LES VIOLS, LA GUERRE ET LA TORTURE EN AFRIQUE Présenté à l’occasion de la 65 ème Session ordinaire de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples Banjul, Gambie, 21 octobre - 10 novembre 2019 Commissaire Hatem Essaiem Président du Comité pour la prévention de la torture en Afrique Membre du Groupe de Travail sur les droits économiques, sociaux et culturels Membre du Comité consultatif chargé des Affaires relatives au budget et au personnel

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RAPPORT D’ACTIVITÉ INTERSESSION (MAI-OCTOBRE 2019)

ET

RAPPORT SUR LES VIOLS, LA GUERRE ET LA TORTURE EN

AFRIQUE

Présenté à l’occasion de la 65ème Session ordinaire de la Commission

africaine des droits de l’homme et des peuples

Banjul, Gambie, 21 octobre - 10 novembre 2019

Commissaire Hatem Essaiem

Président du Comité pour la prévention de la torture en Afrique

Membre du Groupe de Travail sur les droits économiques, sociaux et

culturels

Membre du Comité consultatif chargé des Affaires relatives au budget et

au personnel

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Table des Matières

I. INTRODUCTION ................................................................................................................................................. 3

II. ACTIVITES INTERSESSION ......................................................................................................................... 3

III. LE VIOL COMME ARME DE GUERRE ET FORME DE TORTURE ......................................................... 6

IV. DEVELOPPEMENT POSITIF ................................................................................................................. 19

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I. INTRODUCTION

1. Le présent Rapport a été élaboré en application des articles 23 (3) et 72 du Règlement

intérieur de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (la

Commission), aux termes desquels chacun des mécanismes subsidiaires de la

Commission présente à chaque session ordinaire un rapport pour rendre compte de

ses activités et chaque Commissaire soumet également un rapport sur les activités de

promotion menées au cours de la période d’intersession. Je soumets le présent

Rapport en mes qualités de Membre de la Commission, de Président du Comité pour

la prévention de la torture en Afrique (CPTA ou Comité), de Membre du Groupe de

travail sur les droits économiques, sociaux et culturels (ECOSOC) et de membre du

Comité consultatif chargé des Affaires relatives au budget et au personnel.

2. Ce rapport couvre la période d’intersession comprise entre les 64ème et 65ème Sessions

ordinaires de la Commission, soit de mai à octobre 2019. Il fournit aussi un aperçu

sur les viols, la guerre et la torture en Afrique.

3. Le Rapport comprend une introduction, rend compte de mes activités intersession,

présente un aperçu du viol, de la guerre et de la torture en Afrique et formule des

recommandations.

II. ACTIVITES INTERSESSION

A. Activités en qualité de Président du CPTA

i. Journée internationale de soutien aux victimes de la torture

4. J’ai supervisé la publication du communiqué de presse du CPTA commémorant la

Journée internationale de soutien aux victimes de la torture (26 juin 2019) et

appelant l’attention sur la situation des migrants et réfugiés africains exposés au

risque de tortures et de traitements cruels, inhumains et dégradants, conformément

au thème de l’Union africaine (UA) pour 2019, « Année des Réfugiés, Rapatriés et

Personnes déplacées : Pour des solutions durables aux déplacements forcés en

Afrique »

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ii. Table ronde avec les principales parties prenantes sur la fourniture de

réparations aux Rapatriés gambiens ayant subi des tortures et autres mauvais

traitements

5. J’ai présidé une Table ronde, qui s’est tenue le 15 juillet 2019, à Banjul, en Gambie,

avec les principales parties prenantes sur la fourniture de réparations aux Rapatriés

gambiens ayant subi des tortures et autres mauvais traitements. Cette Table ronde a

réuni vingt-quatre (24) participants, notamment des représentants de

gouvernements, de l’Organisation internationale pour les migrations et d’institutions

nationales et non-gouvernementales.

6. Au cours de la rencontre, l’accent a été mis sur les tendances générales de la migration

des ressortissants gambiens, ainsi que sur la torture et les autres mauvais traitements

dont sont victimes les migrants gambiens. La Table ronde a pris note du cadre

législatif, administratif et institutionnel existant en ce qui concerne les réparations en

Gambie, identifié les lacunes du cadre, convenu des initiatives à prendre pour

combler ces lacunes et identifié les parties prenantes concernées. La Table ronde a,

par ailleurs, précisé ce que l’on entend par réparation pour les victimes de la torture

et des autres mauvais traitements et insisté sur l’obligation, pour l’État, de fournir

réparation aux victimes.

iii. Panel sur la Situation relative aux disparitions forcées en Afrique

7. Le 22 octobre 2019, j’ai présidé un panel sur la Situation relative aux disparitions

forcées en Afrique. Ce Panel a été organisé par le CPTA, en collaboration avec le

Groupe de travail sur la peine de mort, les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou

arbitraires et les disparitions forcées en Afrique et REDRESS.

B. Activités en qualité de Membre de la Commission

8. Du 3 au 5 juillet 2019, j’ai participé à l'atelier de renforcement des capacités sur le

système africain des droits de l'Homme et les techniques de plaidoyer, organisé à

l'Institut Driss Ben Zekri pour les droits de l'Homme, à Rabat, au Maroc. J’ai été une

personne ressource pour la formation des jeunes africains participant à l’atelier.

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9. Du 16 au 30 juillet 2019, j’ai participé à la 26ème Session extraordinaire de la

Commission, réunie à Banjul, en Gambie.

10. En ma qualité de Commissaire Rapporteur sur la Situation des droits de l’homme à

Maurice j’ai effectué, du 13 au 17 août 2019, une Mission de Promotion en République

de Maurice, en compagnie de la Présidente de la Commission et du Commissaire Rémy

Ngoy Lumbu. Cette mission a fait l’objet d’un travail de préparation et de coordination

avec les autorités de Maurice depuis l’année 2018.

11. Les 18 et 19 septembre 2019, j’ai participé à une réunion organisée à Tunis (Tunisie)

par le Samu social international, en partenariat avec l'Office français de l'immigration

et de l'intégration, autour du thème : « Face aux défis de la protection internationale

: humanité, dignité, solidarité avec les personnes en situation d'exil. » La journée du

19, les participants ont pu visiter des projets lancés par des migrants et des

demandeurs d’asile tunisiens, rentrés de France.

12. Du 1 au 4 octobre 2019, j’ai pris part à la Mission de Promotion de la Commission à

Sao Tomé-et-Principe, avec la commissaire Maria Teresa Manuella, commissaire

rapporteur pour ce pays. Cette mission est la première dans cet Etat depuis son

adhésion à la Charte. Elle a permis de faire connaitre la charte et la commission et de

s’informer sur l’état des droits de l’Homme sur cette ile. Suite à cette mission l’INDH

de Sao-tomé a soumis sa demande s’octroi du statut d’affilié auprès de la CADHP.

13. Le 18 octobre 2019, j’ai participé à la 8ème Réunion annuelle entre la Commission et

la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (la Cour), qui s’est tenue à

Banjul, en Gambie.

14. Le 19 octobre 2019, j’ai participé au 15ème Dialogue Union africaine-Union

européenne, qui s’est tenu à Banjul, en Gambie.

C. Lettres d’Appel/de Remerciement

15. Le 8 octobre 2019, en ma qualité de président du CPTA, j’ai adressé une Lettre de

Remerciement à Son Excellence Muhammadu Buhari, Président de la République

fédérale du Nigeria après la remise en liberté de centaines de garçons et jeunes

hommes qui étaient retenus dans un établissement de l’État de Kaduna, où ils étaient

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soumis à diverses formes de tortures et autres traitements ou peines cruels,

inhumains et dégradants.

16. Le 17 octobre 2019, en ma qualité de Président du CPTA, j’ai adressé une Lettre de

remerciement à Son Excellence Joao Lourenco, Président de la République d’Angola,

pour le féliciter de la ratification, par son pays, de la Convention des Nations Unies

contre la torture (CCT).

III. LE VIOL COMME ARME DE GUERRE ET FORME DE TORTURE

a. Introduction

17. Le CPTA est chargé de faciliter la diffusion et la mise en œuvre des Lignes directrices

et Mesures d’interdiction et de prévention de la torture, des peines ou traitements

cruels, inhumains ou dégradants en Afrique (Lignes directrices de Robben Island) ;

Les Lignes directrices de Robben Island développent l’article 5 de la Charte africaine

des droits de l’homme et des peuples (la Charte africaine) qui interdit toutes les

formes d’exploitation et de dégradation des êtres humains, en particulier l’esclavage,

le commerce des esclaves, la torture, les peines et traitements cruels, inhumains ou

dégradants.

18. Aspiration de l’Agenda 2063 : L’Afrique que nous voulons aspire à une Afrique

pacifique et sûre et s’engage à mettre un terme aux « conflits armés, au terrorisme, à

l’extrémisme, à l’intolérance et à la violence fondée sur le sexe. »1 L’Agenda 2063

reconnaît également que « la bonne gouvernance, la démocratie, l’intégration sociale

et le respect des droits de l’homme, la justice et l’état de droit sont les conditions

nécessaires à un continent en paix et exempt de conflit.»2

1 Agenda 2063 de l’UA : L’Afrique que nous Voulons 2015, par. 37. 2 Comme ci-dessus, par. 35.

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19. Au plan international, on considère que le viol et les autres actes de violence sexuelle

sont utilisés comme armes,3 stratégies4 ou instruments5 de guerre ayant pour finalité

« d’humilier, de dominer, d’intimider, de disperser ou de réinstaller de force les

membres civils d'une communauté ou d'un groupe ethnique ».6 Le viol et les autres

formes de violence sexuelle peuvent aussi constituer « une catégorie distincte de

tortures. »7 Ainsi, le viol peut constituer une violation du droit humanitaire

international, du droit pénal international et de la législation internationale des droits

de l’homme.

20. Malgré le renforcement des efforts de sensibilisation et de mobilisation, les pays en

situation de conflit luttent encore pour créer un environnement permettant de faire

de telle sorte que les auteurs de violences sexuelles rendent compte de leurs actes et

de prévenir l’utilisation du viol comme arme de guerre.

21. Le rapport thématique met en évidence l’utilisation, sur le continent, du viol comme

arme de guerre et forme de torture. Il étudie le cadre juridique existant, fait une

analyse de la situation et, enfin, formule des recommandations.

b. Cadre juridique

i. Interdiction absolue de la torture

22. Les Lignes directrices de Robben Island insistent sur l’interdiction absolue de la

torture, des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (torture et autres

mauvais traitements), indépendamment des circonstances, comme l’état de guerre,

3 Lignes directrices de la CADHP sur la lutte contre la Violence sexuelle et ses conséquences en Afrique 2017, p. 6. 4 ONU La Violence liée aux conflits : Rapport du Secrétaire général des Nations Unies 29 mars 2019, par. 13, consultable à https://www.un.org/sexualviolenceinconflict/wp-content/uploads/2019/04/report/s-2019-280/Annual-report-2018.pdf. 5Observation générale N° 4 de la CADHP sur la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples : Le Droit à réparation des Victimes de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (article 5) 2017, par. 58. 6 Conseil de Sécurité des Nations Unies - Résolution S/RES/1820 (2008) : Femmes, Paix et Sécurité, 19 juin 2008, préambule, consultable à https://www.securitycouncilreport.org/atf/cf/%7B65BFCF9B-6D27-4E9C-8CD3-CF6E4FF96FF9%7D/CAC%20S%20RES%201820.pdf. 7 UN Human Rights Council Report of the Special Rapporteur on torture and other cruel, inhuman or degrading treatment or punishment: Addendum 5 février 2010, par. 53, consultable àhttps://www2.ohchr.org/english/bodies/hrcouncil/docs/13session/A.HRC.13.39.Add.5_en.pdf.

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l’instabilité politique ou toute autre urgence publique.8 Ce principe est affirmé par

l’Observation générale N° 4 sur la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples :

Le droit à réparation des victimes de la torture et autres peines ou traitements cruels,

inhumains ou dégradants (Article 5) (Observation générale N° 4) qui mentionne que

les États parties ne peuvent déroger à leur obligation d’interdire la torture et les

autres mauvais traitements quelles que soient les circonstances, y compris en temps

de guerre.9

23. Par ailleurs, dans sa jurisprudence, la Commission a reconnu le caractère non-

dérogeable et absolu de l’interdiction de la torture et des autres mauvais traitements,

notamment en temps de conflit, d’urgence publique ou dans le cadre de la lutte contre

le terrorisme.10 L’interdiction de la torture et des autres mauvais traitements a aussi

été établie comme une règle du droit international coutumier et elle a évolué pour

devenir l’une des rares normes impératives, ou jus cogens, auxquelles aucune

dérogation n’est permise, même en temps de conflit ou autre urgence publique.

ii. Le viol comme forme de torture

24. La torture désigne « tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës,

physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne aux fins

notamment d'obtenir d'elle ou d'une tierce personne des renseignements ou des

aveux, de la punir d'un acte qu'elle ou une tierce personne a commis ou est

soupçonnée d'avoir commis, de l'intimider ou de faire pression sur elle ou d'intimider

ou de faire pression sur une tierce personne, ou pour tout autre motif fondé sur une

forme de discrimination quelle qu'elle soit, lorsqu'une telle douleur ou de telles

souffrances sont infligées par un agent de la fonction publique ou toute autre

8 Lignes directrices de Robben Island, par. 9. 9 Observation générale N° 4, par. 62 10 Communication 288/04 : Gabriel Shumba c/ Zimbabwe (2012) CADHP par. 164 ; Communication 368/09 : Abdel Hadi, Ali Radi & Autres c/ Soudan (2013) CADHP par. 69 ; Communications 279/03-296/05 : Sudan Human Rights Organisation & Centre on Housing Rights and Evictions (COHRE) c/ Soudan (2009) CADHP par. 165 ; Communication 224/98 : Media Rights Agenda c/ Nigeria, 6 novembre (2000) par. 70 ; et Communication 266/03 : Kevin Mgwanga Gunme et auiul c/ Cameroon (2009) CADHP par. 114.

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personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès

ou tacite. »11

25. Selon le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), « le viol

occasionne de vives souffrances physiques et psychologiques. Les souffrances

psychologiques subies par les personnes victimes de viol peuvent être exacerbées par

leurs conditions sociales et culturelles et être particulièrement aiguës et durables. »12

Le TPIY a ajouté que les éléments de « la punition, la coercition, la discrimination ou

l’intimidation » sont inhérents aux situations de conflit armé.13

26. Aux termes de l’Observation générale N° 4 « les actes de violence sexuelle et sexiste,

ainsi que l’absence d’action de la part des États pour les prévenir ou de réaction à leur

égard, peuvent constituer des actes de torture ou de mauvais traitement, en violation

de l’article 5 de la Charte africaine. »14 Cette Observation indique, en outre, que

« toute personne, indépendamment de son genre, peut être victime de violence

sexuelle ou sexiste. »15

27. Les auteurs de viol peuvent être des acteurs étatiques ou non-étatiques.16 L’État a

l’obligation de veiller à ce que ses propres représentants ou des acteurs non-étatiques

ne soient pas auteurs de viols.17

iii. Interdiction du viol dans le droit humanitaire international

28. En vertu du droit humanitaire international, les quatre Conventions de Genève de 1949

et les deux Protocoles additionnels interdisent tous la torture et les autres formes de

11Article 1 de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (CCT). 12 Procureur c. Delalić et Autres (1998) TPIY (IT-96-21-T) par 495. Voir également Procureur c. Kunarac et Autres (2001) TPIY (IT-96-23-T & IT-96-23/1-T), par. 557, 655, 669 et 711. 13 Procureur c. Delalić et Autres ci-dessus. 14 Observation générale N° 4, par. 57. C’est le point de vue reflété dans l’Observation générale N°2 des Nations Unies sur la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Observation générale N°2 du CCT) 2008, par. 18. 15 Observation générale N° 4, par. 59. 16 Les acteurs non-étatiques sont des individus, organisations, institutions et autres organismes agissant en dehors de l’État et de ses organes. Voir Observation générale N° 4, par. 72. 17 Observation générale N° 4, par. 62.

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mauvais traitements, qui sont considérés comme des crimes de guerre.18En outre,

l’article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949, qui se rapporte précisément

aux conflits armés non-internationaux, interdit « les atteintes portées à la vie et à

l'intégrité corporelle, notamment le meurtre sous toutes ses formes, les mutilations,

les traitements cruels, tortures et supplices » et « les atteintes à la dignité des

personnes, notamment les traitements humiliants et dégradants ».

29. Le viol des femmes est expressément interdit en vertu de l’article 27 de la Quatrième

Convention de Genève. Le Protocole N° 1 des Conventions de Genève de 1949, qui régit

les conflits armés internationaux, requiert la protection des femmes contre le viol.19

Le Protocole N° 2 des Conventions de Genève de 1949, relatif aux conflits armés non-

internationaux, interdit le viol contre des personnes qui n’ont pas pris directement

part ou qui ont cessé de prendre part aux hostilités, que leur liberté ait été restreinte

ou pas.20

c. Analyse

Vue d’Ensemble

30. L’Observation générale N° 4 indique que « les actes de violence sexuelle, en

particulier le viol, sont également systématiquement utilisés comme outil de guerre

dans les conflits armés. »21 Le viol peut être utilisé comme tactique pour réaliser les

objectifs militaires ou comme moyen de répression, de terrorisme, de punition, pour

détruire un ennemi ou le contraindre de fuir22 ou pour prendre le contrôle de terres

contestées ou d’autres ressources.23 En ce qui concerne le terrorisme, le viol peut être

utilisé pour déplacer des populations, obtenir des informations, promouvoir des

18Article 50 de la Première Convention de Genève ; article 51 de la Deuxième Convention de Genève ; article 130 de la Troisième Convention de Genève ; et article 147 de la Quatrième Convention de Genève. 19 Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la Protection des Victimes des conflits armés internationaux (Protocole I), 8 juin 1977, article 76. 20 Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la Protection des Victimes des conflits armés non-internationaux (Protocole II), 8 juin 1977, article 4. 21 Observation générale N° 4, par. 58. 22 Lignes directrices sur la lutte contre la Violence sexuelle et ses conséquences en Afrique, par. 3. 1. d. 23 Rapport sur la Violence sexuelle liée à un conflit (n 4 ci-dessus), par. 13.

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idéologies extrémistes et déstabiliser des structures sociales en terrorisant les filles

et les femmes.24

31. Il est bien établi que les femmes, les filles, les hommes, les garçons et la communauté

LGBTI sont tous vulnérables à la violence sexuelle,25 en particulier au cours des

conflits, où elle est utilisée comme moyen « de domination, de subordination ou

d’humiliation de la victime et/ou du groupe auquel elle appartient. »26

32. Le principal obstacle à la lutte contre le viol au cours des conflits armés touche au

faible taux de dénonciation dû au climat de peur engendré par la stigmatisation au

sein de la famille et de la communauté. D’autres obstacles à la lutte contre le viol

résultent de la méfiance des victimes à l’égard du système juridique, de la culture de

l’impunité dont bénéficient les auteurs et de l’absence des moyens de prise en charge

médicale et psychosociale.27

Les auteurs de la violence sexuelle

33. la majeure partie des incidents de violence sexuelle perpétrés dans des États

impliqués dans un conflit sont le fait d’acteurs non-étatiques, comme les milices

locales, les éléments criminels et les groupes armés.28 Le nombre de parties non-

étatiques à des conflits intra-étatiques contribue au climat de peur, les victimes vivant

au milieu d’auteurs potentiels. Selon le Comité international de la Croix-Rouge (CICR),

90 groupes armés, environ, ayant des tailles et des formes d’organisation différentes

sont impliqués dans le conflit en RDC.29

34. Cependant, on note également l’existence d’un nombre important de viols commis

par des agents de la fonction publique. On entend, notamment, par fonctionnaires et

autres « les agents, entrepreneurs privés et d'autres personnes agissant à titre officiel

24 Comme ci-dessus, par. 14. 25 Observation générale N° 4, par. 59. 26 Lignes directrices sur la lutte contre la Violence sexuelle et ses conséquences en Afrique, par. 3. 2. c. 27 Rapport sur la Violence sexuelle liée à un conflit (n 4 ci-dessus), par. 50, 75 et 114. 28 Comme ci-dessus, par. 12. 29 ICRC Special Appeal 2019: The ICRC’s Response to Sexual Violence 2019, p. 33, consultable à https://www.icrc.org/sites/default/files/topic/file_plus_list/2019_specialappeal_sv_final.pdf.

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ou agissant pour le compte de l'État, en collaboration avec l'État, sous sa direction ou

son contrôle, ou sous couvert de la loi ».30

35. En temps de conflit, les civils se sentent souvent vulnérables au viol par toutes les

parties et en tous lieux, à la maison, au cours de leur vie quotidienne, lors des

déplacements pour se mettre à l’abri, sous la protection du gouvernement ou en

détention. En RDC, sur les 1 049 affaires touchant à la violence sexuelle liée à un

conflit, documentées par la Mission de stabilisation de l’ONU en RDC (MONUSCO) en

2018, 308 avaient été perpétrées par les Forces armées de la RDC et les Forces de

police congolaises.31 Par ailleurs, en Somalie, en 2018, la Mission d’assistance des

Nations Unies en Somalie (UNSOM) a confirmé les cas de viol et de viols collectifs

commis par des membres de l’Armée nationale de Somalie sur 48 individus (3

femmes, 44 jeunes filles et 1 garçon), ainsi que les cas de viols perpétrés par des

fonctionnaires de la police somalienne sur 5 femmes et 12 jeunes filles.32

36. L’Observation générale N° 4 reconnaît que « aux termes de l’article premier de la

Charte africaine, les États parties sont tenus de veiller au respect de l’obligation

positive de prévenir, de mener des enquêtes, de poursuivre et de punir, avec

diligence, les acteurs non-étatiques qui commettent des actes de torture et autres

mauvais traitements, mais également de réparer tout préjudice subi. Cette obligation

s’étend également aux actes commis par des acteurs non-étatiques sous l’instigation

ou avec le consentement exprès ou tacite de l’État. »33

La violence sexuelle contre des hommes et des garçons

37. Les actes de violence sexuelle commis sur des garçons par des membres des forces

armées et des enfants soldats de sexe masculin sont très rarement signalés. La

violence sexuelle contre les hommes et les garçons n’a pas fait l’objet de recherches

ou d’investigations et, par conséquent, leurs besoins n’ont pas été systématiquement

30 Observation générale N° 2, par. 15. 31 Rapport sur la Violence sexuelle liée à un conflit (n 4 ci-dessus), par. 46. 32 Comme ci-dessus, par. 74. 33 Observation générale N° 4, par. 73. Voir également CCT - Observation générale N° 2, par. 18.

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intégrés dans les stratégies de protection ou la formulation et la mise en œuvre des

interventions au profit des victimes.34

38. Le projet All Survivors et le Groupe d’experts du Comité des sanctions des Nations

Unies sur la République centrafricaine ont dénoncé l’utilisation de la violence sexuelle

contre les hommes et les garçons en RCA.35 L’une des victimes interrogées par le

projet All Survivors a expliqué qu’elle avait été enlevée par des membres de l’UPC, une

faction des ex-Sélékas, avec d’autres hommes, et qu’elle avait subi quotidiennement

des viols et autres violences sexuelles au cours de la vague de violence qui avait

frappé Basse-Kotto, en 2017.36 Une Institution qui fournit un soutien psychosocial et

médical aux survivants, à Obo (RCA), a signalé que 86 hommes et 35 garçons qui

s’étaient présentés à son siège, entre janvier et octobre 2017, se disaient victimes de

violences sexuelles.37

Réfugiés et déplacés internes

39. Les réfugiés et les déplacés internes se retrouvent particulièrement vulnérables au

viol dans des situations dans lesquelles ils sont peut-être sous le contrôle ou sous la

prétendue protection des autorités de l’État, groupes armés, contrebandiers,

trafiquants ou de ceux qui contrôlent les ressources.38 Il s’agit d’une source

particulière de préoccupation, les déplacements des personnes au sein ou à partir de

la région Afrique étant fréquents sur le continent.39 En outre, plusieurs pays dont sont

originaires de nombreuses personnes déplacées suite à un conflit ou à des violences,

comme le Soudan du Sud, abritent un nombre significatif de réfugiés.40

Situations nationales

34 All Survivors Project “I don’t know who can help”: Men and boys facing sexual violence in Central African Republic 2018, p. 5, consultable à https://allsurvivorsproject.org/wp-content/uploads/2018/03/ASP-Central-African-Republic.pdf. 35 Comme ci-dessus. Voir également, Rapport final du Groupe d’experts de l’ONU sur la République centrafricaine, 2018, par. 166, consultable à https://undocs.org/S/2018/1119. 36 Projet All Survivors (n 34 ci-dessus), p. 20. 37 Comme ci-dessus, p. 22. 38 Rapport sur la Violence sexuelle liée à un conflit (n 4 ci-dessus), par. 15. 39 Rapport 2018 de l’OIM sur les Migrations dans le monde, p. 48, consultable à http://publications.iom.int/system/files/pdf/wmr_2018_en.pdf. 40 Comme ci-dessus.

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40. Dans le Soudan du Sud, entre avril et mai 2018, des villages de l’État d’Unité ont subi

des attaques aveugles lancées par les troupes gouvernementales et leurs alliés.41 Il

s’en est suivi des viols et des viols collectifs sur 120 femmes et filles, au moins, des 40

villages ciblés. Il s’agissait de filles parfois âgées de tout juste quatre ans et de femmes

enceintes.42 Ces attaques auraient eu pour motivation de démontrer le pouvoir des

agresseurs sur leurs victimes, de les humilier et de détruire leur dignité, de fracturer

les communautés, les femmes étant parfois déshabillées et dénudées de force avant

de subir des viols collectifs.43

41. Malgré la signature le 12 septembre 2018, par les parties, de l’Accord revitalisé pour

la résolution du Conflit au Soudan du Sud (R-ARCSS), qui a permis de réduire

globalement la violence, les violences sexuelles demeurent endémiques dans l’État

d’Unité, situé dans le nord du pays.44

42. Du fait de la résurgence, dans le Djebel Marra, du conflit entre forces

gouvernementales et la faction de l’Armée de libération du Soudan dirigée par Abdul

Wahid, la violence sexuelle demeure une préoccupation, provoque le déplacement de

civils obligés de quitter leurs maisons et empêche leur retour.45 En 2018, l’Opération

hybride UA/ONU dans le Darfour a documenté 122 incidents de violence sexuelle,

dont les 31 pour cent pouvaient être attribués aux forces de sécurité.46

43. Selon un rapport de la Commission d’enquête internationale sur le Burundi, de

nombreux cas de viols attribuables à la ligue des jeunes du parti au pouvoir, les

Imbonerakure, ont été signalés au Burundi, depuis mai 2018.47 Les victimes étaient

essentiellement des femmes, ciblées parce qu’étant considérées, elles ou un membre

41 UNMISS & OHCHR Indiscriminate Attacks Against Civilians in Southern Unity April-May 2018, (2018) paras 60 – 62, consultable à https://unmiss.unmissions.org/sites/default/files/unmissohchr_report_on_indiscriminate_attacks_against_civilians_in_southern_unity_april-may_2018.pdf. 42 Comme ci-dessus, par. 30. 43 Comme ci-dessus, par. 31. 44 UNMISS & OHCHR Conflict-related Sexual Violence in Northern Unity September - December 2018 (2019), par. 2 et 3. 45 Rapport sur la Violence sexuelle liée à un conflit (n 4 ci-dessus), par. 85. 46 Comme ci-dessus, par. 86. 47 Conseil des droits de l’homme - Rapport de la Commission d’enquête sur le Burundi, 2019, par. 42 – 46, consultable à https://undocs.org/en/A/HRC/42/49.

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de leur famille, comme soutenant l’opposition ou parce qu’elles avaient refusé de

rejoindre les rangs des forces gouvernementales ou des Imbonerakure.48 Le rapport

précise, en outre, que « de tels actes commis dans un but précis d’intimidation ou de

punition en raison d’une opinion politique supposée constituent des actes de

torture. »49

44. La Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en

République centrafricaine (MINUSCA) a recensé 239 cas de viol ou de tentative de

viol, parmi lesquels 101 étaient le fait de multiples acteurs non-étatiques.50 Le Groupe

d’experts sur la RCA « a également constaté qu’une grande partie des actes de

violence dont il était fait état avaient été recensés dans les régions rurales, où les

victimes avaient souvent été assaillies par plusieurs agresseurs armés. »51

Responsabilité

45. Les auteurs de viol en période de conflit, que ce viol ait été commis par des acteurs

étatiques ou non-étatiques, répondent rarement de leurs crimes. Les acteurs

étatiques accusés de viol sont rarement, voire jamais, poursuivis et cela est vrai pour

tous les conflits en cours ou passés.

46. De même, les membres des groupes terroristes qui utilisent le viol à des fins

stratégiques ne sont pas poursuivis. C’est ainsi que les membres de Boko Haram qui

ont enlevé des filles d’une école secondaire du Nord-Est du Nigeria et les ont soumises

à des violences sexuelles, notamment à des viols, ont essentiellement été jugés en

vertu de la Loi de 2013 portant prévention du terrorisme (amendée) et n’ont pas été

accusés de violence sexuelle.52 De même, les procédures ouvertes au Mali dans le

cadre de la lutte contre le terrorisme n’ont pas tenu compte des crimes sexuels.53

47. Dans la Côte d’Ivoire post-conflit, aucun cas de violence sexuelle commise au cours de

la crise post-électorale 2010–2011 n’a été jugé.54 Par ailleurs, un décret présidentiel

48 Comme ci-dessus. 49 Comme ci-dessus. 50 Rapport sur les Violences sexuelles liées aux conflits (n 4 ci-dessus), par. 36. 51 Comme ci-dessus. 52 Comme ci-dessus, par. 120. 53 Comme ci-dessus, par. 25. 54 Comme ci-dessus, par. 104.

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daté du 8 août 2018, a suscité des inquiétudes car accordant l’amnistie aux « individus

poursuivis ou condamnés pour des infractions en lien avec la crise post-électorale. »55

Même si le Président a fait comprendre que les auteurs de crimes graves ne

bénéficieraient pas d’une impunité, des préoccupations ont été exprimées concernant

la protection accordée aux officiers militaires de haut rang, aux membres des groupes

armés et aux leaders politiques.56

Réparation pour les victimes

48. L’Observation générale N° 4 reconnaît l’existence d’importants obstacles qui

empêchent les victimes d’obtenir réparation dans les situations de conflit ou post-

conflit.57 Les États parties sont tenus de garantir l’existence d’un environnement

favorable aux agences humanitaires et autres parties prenantes qui disposent d’un

mandat pour documenter, faire rapport, enquêter et fournir une assistance aux

victimes.58 En outre, il incombe aux groupes armés non étatiques organisés qui sont

parties à un conflit armé de garantir le libre accès, en particulier aux agences

humanitaires qui fournissent protection et assistance aux communautés touchées, y

compris aux victimes de tortures et d’autres mauvais traitements.59

49. L’accès au soutien médical et psychosocial nécessaires aux victimes de viol est

particulièrement réduit en temps de conflit. Les efforts consentis par les travailleurs

humanitaires à l’effet d’offrir un appui médical et psychologique aux victimes

déplacées internes qui trouvent refuge dans les zones rurales se heurtent à

d’importants obstacles.60 Les difficultés d’accès sont exacerbées par le risque, pour

les travailleurs humanitaires, d’être attaqués par des groupes armés.61

55 Comme ci-dessus. Voir également, Ordonnance présidentielle N° 2018-669. 56 Comme ci-dessus n. 4, par. 104 57 Observation générale N° 4, par. 14. 58 Comme ci-dessus, par. 65. 59 Comme ci-dessus. 60 UNOCHA Humanitarian Response Plan Summary: Cameroun 2019, p. 7, consultable à https://reliefweb.int/sites/reliefweb.int/files/resources/2019_cmr_hrp_20190219_summary_print.pdf. 61 ICRC’s Response to Sexual Violence (n 29 ci-dessus), p. 28

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50. Le 1 octobre 2018, le Burundi a suspendu les activités des organisations

internationales non-gouvernementales, ce qui a entravé la fourniture de soins

médicaux et psychologiques.62

51. En règle générale, l’accès des victimes de viol en situation de conflit aux réparations

est rendu difficile par l’absence des infrastructures permettant d’accéder aux

services, l’absence desdits services et le déficit d’information sur ces services, ce qui

signifie que les victimes ne bénéficient généralement pas de l’assistance dont elles ont

besoin.

d. Recommandations

52. Le CPTA appelle :

i. Les États qui ont ratifié la CCT et l’OPCAT à incorporer les traités dans leur

droit interne et à les mettre en œuvre et les États n’ayant pas encore ratifié ces

instruments à diligenter leurs processus de ratification, d’incorporation et de

mise en œuvre ;

ii. Les États parties à criminaliser les actes de violence basée sur le sexe et le

genre, y compris le viol, et à reconnaître que ces actes peuvent être

assimilables à la torture et aux autres mauvais traitements, aux crimes de

guerre ou aux crimes contre l’humanité, conformément aux normes régionales

et internationales ;

iii. Les États parties à reconnaître et à garantir, dans leur législation interne,

l’interdiction absolue de tous les actes de torture et autres mauvais

traitements, notamment du viol ;

iv. Les États parties à respecter leurs obligations en interdisant à leurs

représentants de commettre des actes de torture et autres mauvais

traitements et à intervenir lorsque des acteurs non-étatiques impliqués dans

un conflit armé commettent des violations similaires ;

62 Rapport sur les Violences sexuelles liées aux conflits (n 4 ci-dessus), par. 114.

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v. Les États parties et les acteurs non-étatiques à créer un environnement

favorable aux agences humanitaires et autres parties prenantes qui disposent

d’un mandat pour documenter, faire rapport, enquêter et fournir une

assistance aux victimes ;

vi. Les États parties à enquêter et à poursuivre les auteurs d’actes de torture et

autres mauvais traitements, notamment de viols, et à offrir réparation aux

victimes dans les conflits armés (sans tenir compte du statut des victimes en

tant que demandeurs d’asile, réfugiés ou autres couverts par la protection

internationale) ;

vii. Les États parties à prendre des mesures afin de faire de telle sorte que les

victimes de violences sexuelles et basées sur le genre, notamment les victimes

de viol, obtiennent réparation :

a. en veillant à une bonne documentation des faits ;

b. en fournissant aux victimes un soutien, à toutes les étapes de la

procédure légale ;

c. en identifiant les causes et conséquences de la violence sexuelle et

basée sur le genre et en prenant toutes les mesures nécessaires à sa

prévention et à son éradication ;

d. en sensibilisant afin d’éliminer la stigmatisation, le sentiment de

culpabilité, de honte, de crainte et l’absence d’informations sur les actes

de violence sexuelle et basée sur le genre ;

e. en intégrant systématiquement les besoins des hommes, des garçons et

des LGBTI dans les activités de sensibilisation et autres programmes de

protection des victimes de la violence sexuelle et basée sur le genre ;

f. en mettant en place des programmes de réparation efficaces et

accessibles et en garantissant la participation des victimes à

l’élaboration, à l’adoption et à la mise en œuvre des programmes ;

g. en fournissant un accès sans restriction et régulier aux soins de santé

intégrés, notamment aux services de santé sexuelle et de la

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reproduction, à la réhabilitation physique, psychologique et à l’appui

psychologique ainsi qu’au soutien socioéconomique ; et

h. en reconnaissant la nécessité de garantir la dignité et la sécurité des

victimes ainsi que l’importance du respect de la confidentialité et de la

vie privée.

IV. DEVELOPPEMENT POSITIF

53. Le CPTA se réjouit de la ratification, le 2 octobre 2019, de la CCT par la République

d’Angola. Cette nouvelle ratification par l’Angola permet à l’Afrique de se rapprocher

de la ratification universelle de la CCT au plan régional, seuls trois (3) États africains

n’ayant pas encore ratifié la Convention. La CPTA encourage la ratification régionale

universelle de la CCT et se dit disposée à aider tout État partie dans le cadre du

processus de ratification.