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Plan International: Rapport d’évaluation des besoins humanitaires dans le Logone et Chari Rapport d’évaluation des besoins humanitaires dans le Département du Logone et Chari Mai 2017

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Plan International: Rapport d’évaluation des besoins humanitaires dans le Logone et Chari

Rapport d’évaluation des besoins humanitaires dans le

Département du Logone et Chari

Mai 2017

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Table des matières ABREVIATIONS ................................................................................................................................... ii

1- Résumé analytique ....................................................................................................................... 1

2- Contexte de l’étude et revue documentaire ................................................................................ 2

3- Objectifs et utilisation prévue des résultats de l'évaluation ....................................................... 5

4- Zone géographique ....................................................................................................................... 6

5- Description de l’activité d’évaluation, méthodologie et limites .................................................. 7

6- Résultats de l’évaluation .............................................................................................................. 9

a. Sécurité et stabilité de la situation ........................................................................................... 9

b. Moyens, stratégies de subsistance et opportunités d’emplois des groupes vulnérables . 11

1. Activités socioéconomiques des ménages ....................................................................... 11

2. Revenu annuel global dans les ménages ......................................................................... 13

3. Principales sources de dépenses des ménages .............................................................. 14

4. Moyens de subsistance des déplacés ............................................................................... 16

5. Stratégies d’adaptation des populations hôtes ................................................................. 18

c. Analyse sectorielle des produits de consommation et des infrastructures commerciales 20

d. Profils socioéconomiques de la population cible .................................................................. 23

1. Profil professionnel des chefs de ménages ...................................................................... 23

2. Types et niveaux d’éducation des chefs de ménages ..................................................... 24

3. Catégories les plus vulnérables ......................................................................................... 26

4. Scolarisation des enfants, jeunes et adultes ..................................................................... 27

e. Besoins prioritaires, opportunités et contraintes locales d’accès ....................................... 34

1. Niveau de satisfaction des enquêtés ................................................................................. 34

2. Analyse des besoins et des gaps ...................................................................................... 35

f. Opportunités d’emploi/auto-emploi pour hommes, femmes, jeunes .................................. 42

g. Les capacités de réponses locales et nationales ................................................................. 43

h. Les acteurs et institutions opérant ou offrant des services dans la zone ........................... 44

7- Conclusion ................................................................................................................................... 45

8- Recommandations ...................................................................................................................... 46

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ABREVIATIONS

ACEEN: Association Camerounaise pour l’Education Environnementale

ADES: Association pour le Développement Economique et Social

AHA: Association Humanitaire Africaine

ALDEPA: Action Locale pour un Développement Participatif et Autogéré

ALIMA: Alliance for International Medical Action

ALVF: Association de Lutte contre les Violences faites aux femmes

CMPJ : Centre Multifonctionel de Promotion des Jeunes

CPFF: Centre de Promotion de la Femme et de la Famille

CFPK: Centre de Promotion de la Femme de Kousseri

ECAM: Enquête Camerounaise Auprès des Ménages

FNE/ Fonds National de l’Emploi

PAJER-U: Projet d’Appui à la Jeunesse Rurale et urbaine

PIAASI: Projet d’Appui aux Acteurs du Secteur Informel

PDRI/LC: Projet de développement Rural intégré-Chari Logone

MINEPAT ; Ministère du Plan et de l’Aménagement du Travail

MINEPIA: Ministère de l’Ekevage, des Pêches et des Industries Animales

MINEDUC: Ministère de l’Education de Base

MINEDUB: Ministère de l’Education de Base

MINEE: Ministère de l’Eau et de l’Energie

MINEFOP : Ministère de l’Emploi et de la Formation Professionnelle

SAR/SM: Section Artisanale Rurale/Section Ménagère

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1- Résumé analytique L’évaluation des besoins humanitaires dans le Département du Logone et Chari, Région de l’Extrême-Nord, a été réalisée pour le compte de Plan International Cameroon courant janvier 2017. L’évaluation a concerné particulièrement les localités de Goulfey, Kousseri et Makary qui reçoivent des milliers de réfugiés non enregistrés, des déplacés internes et des retournés. La mobilisation des aides au profit des déplacés a été retardée par divers facteurs, en particulier les difficultés d’accès. L’exploitation des outils d’enquêtes, la compilation des données documentaires et l’observation sur le terrain ont permis de dégager les tendances en matière de sécurité, d’habitat, d’accès aux services sociaux de base, de protection et de capacités de réponses. Des recommandations ont été formulées. Au plan sécuritaire, la zone d’étude est relativement stable mais reste exposée aux risques d’attentats et de mines antipersonnel, ainsi qu’à la résurgence des frictions intercommunautaires basées sur les clivages enfouis et l’accès aux ressources. La plupart des déplacés vivent dans des communautés hôtes, un peu plus d’un quart résidant dans des maisons de location, des centres collectifs et des abris précaires. La promiscuité est très répandue, avec des ménages assez épais qui viennent s’ajouter à des familles hôtes souvent nombreuses comparativement à leurs moyens de subsistance. Déplacés et hôtes pratiquent habituellement l’agriculture, le commerce, l’élevage, la pêche, l’artisanat et le transport qui leur procurent les aliments et/ou des revenus somme toutes modestes au plan individuel. Mais ces activités sont limitées par les restrictions à la circulation interurbaine par motocyclettes, aux difficultés d’accès à la terre, aux intrants, aux outils aratoires, ainsi qu’aux zones de pêche. Une frange très importante des déplacés particulièrement, ne pratique aucune activité. Cette tendance est également perceptible chez les jeunes et les femmes concentrés sur le petit commerce. L’essentiel des revenus des ménages va à la nutrition, à l’éducation et à la santé. Les déplacés surtout reçoivent de l’assistance, mais les aliments sont très insuffisants. Les communautés hôtes récriminent contre ce qu’elles estiment être une sélectivité de l’émotion de la part des donateurs, elles également subissant les effets de la crise. L’éducation, l’eau et les soins de santé sont accessibles, mais les enquêtés sont presqu’unanimes à décrier la qualité des services offerts. Des pesanteurs socioculturelles et socioéconomiques inhibent encore l’éducation de la jeune fille, laquelle n’a que de rares opportunités d’accès à une formation professionnelle alors qu’elle est déscolarisée assez tôt. L’offre de formation professionnelle est en effet insignifiante, peu fréquentée et peu diffusée. Peu d’ateliers existent pour offrir des apprentissages non formels. Femmes, jeunes et handicapés apparaissent comme les groupes les plus vulnérables, sujets aux violences basées sur le genre, à l’errance, à l’exploitation dans le cadre du petit commerce notamment. La plupart des jeunes en âge scolaire n’ont pas d’actes de naissance et éprouvent des difficultés à s’acquitter des frais exigibles pour l’écolage et l’inscription aux examens et concours.

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2- Contexte de l’étude et revue documentaire Depuis 2014, l’Extrême-Nord du Cameroun est rentré dans le périmètre des zones à risque terroriste élevé. Frontalière du Nord-Est du Nigeria que Boko Haram a en partie sanctuarisé depuis son expulsion de Maiduguri en 2009, la Région administrative dont le chef-lieu est Maroua a subi les effets directs et collatéraux des modes opératoires de l’organisation islamiste et des exigences de la lutte contre un phénomène de violence polysémique et combinatoire des actions militaires conventionnelles et des formes asymétriques de dissémination de la terreur. Si Maroua, à travers les trois attentats kamikazes dont il a été victime et l’arrestation d’autres porteurs d’explosifs, a vécu la paranoïa sécuritaire pendant de longs mois, c’est bien dans les zones frontalières, contiguës aux sphères de circulation des militants radicalisés et extrêmement violents, que les effets de la crise sont les plus notables.1

Du fait de leur proximité des camps et refuges de Boko Haram en territoire nigérian, les Départements du Mayo Tsanaga et du Mayo Sava ont été, au début, les plus amplement touchés par les violences et leurs répercussions que sont notamment l’afflux des réfugiés et des personnes déplacées d’une part et la désagrégation des modes de production et des tissus sociaux dans les zones frontalières. De Mabass à Amchidé en passant par Tourou, Aschigachia, Kerawa, Kolofata, Limani, etc., les migrations forcées ont emporté avec elles des modes de production socioéconomique basées sur l’itinérance, à savoir la circulation du bétail, la fréquentation des marchés périodiques, le commerce transfrontalier dit de contrebande, le négoce de plein air sur les kermesses hebdomadaires que sont les marchés, le commerce ambulant des détaillants qu’ils soient jeunes garçons ou jeunes filles.

A Mokolo et Mora principalement, devenus les premiers réceptacles de ces populations sinistrées, endeuillées, dépourvues du minimum vital, les images sont encore là pour témoigner de la misère matérielle et du dépaysement des humains camerounais et nigérians qui se sont un temps confondus dans leur errance pour ensuite être séparés entre réfugiés et déplacés internes. Si le camp de Minawao a été assez rapidement mis en place pour recevoir les réfugiés de plus en plus nombreux, l’émotion envers les personnes déplacées internes (PDI) a tardé à s’exprimer. C’est à peine si l’on n’assistait pas à une sorte de réticence à reconnaitre que des nationaux étaient sans abris. La réponse humanitaire s’est d’abord focalisée sur le Mayo Tsanaga où, du fait d’une accessibilité plus aisée et d’un environnement plus sécurisé, les organisations internationales ont accouru, donnant l’impression d’un embouteillage et d’une duplication de mêmes projets sur les mêmes bénéficiaires. Par exemple, divers intervenants ont développé des activités HIMO dans l’arrondissement de Mokolo au profit des jeunes de cette unité administrative. De façon récurrente, c’est vers cette même zone que la plupart des appuis venant de donateurs bilatéraux et rapportés par la presse (Cameroon tribune, l’œil du Sahel), sont allés.

L’extension au Mayo Sava, c’est-à-dire à Mora et ses environs immédiats s’est faite par la suite, avec des aides aux PDI, dans une ville sans grandes opportunités d’emplois pour des milliers de jeunes, de femmes et d’hommes adultes vivant habituellement du commerce et de l’agriculture. C’est aussi une population très peu scolarisée et une jeunesse ayant un accès limité à la formation professionnelle qui doit s’entasser dans des abris de fortune ou gérer la promiscuité

1 Le journal L’œil du Sahel focalisé sur l’actualité des Régions septentrionales du Cameroun rend fréquemment compte de l’essentiel de la situation sécuritaire et des effets de la crise. Cette base de données a été consultée.

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de maisons exiguës dont elle peine à assurer le loyer.2 La plupart des études, des évaluations périodiques et des discussions d’ateliers faites sur les conditions d’installation et de vie des PDI concordent à dire qu’elles sont précaires, tout en relevant cependant que les aides aux déplacés ont atténué le manque et contribué à apaiser les rapports entre les populations hôtes et déplacées.3 Mais à Mokolo et à Mora, une tendance à l’exploitation sexuelle des femmes libres, les mariages de jeunes filles (au grand soulagement de nombreux parents interviewés) et la disponibilité de la main d’œuvre juvénile bon marché ont notamment été relevés.4

Jusqu’en 2016, le Logone et Chari est resté presqu’à l’écart des interventions. La raison principale en est les difficultés d’accès, la route nationale n°1 dans son tronçon Waza-Maltam étant non seulement particulièrement détériorée, mais aussi et surtout une zone à risque élevé d’attaques, d’enlèvements et d’exposition aux mines terrestres.5 En effet, des attaques contre des véhicules de transport public et des privés, des braquages de camions remplis de marchandises, des enlèvements (famille Moulin-Fournier près de Dabanga, Chinois à Waza) ont été enregistrés. Bref, le Logone et Chari était une no go zone pour les humanitaires, davantage encore pour les ressortissants de la plupart des pays occidentaux qui avaient fortement déconseillé à leurs ressortissants de se rendre dans l’Extrême-Nord du Cameroun. Pourtant, c’est bien ici qu’au plan purement statistique, la crise impactait le plus sur les nationaux.

D’une part, le Logone et Chari est enserré entre le Nigeria et le Tchad dont dépend l’essentiel de son activité économique. Avant 2014, les produits de la pêche, de l’agriculture et de l’élevage étaient surtout écoulés vers ces pays. Les contrées des abords du Lac dépendaient de la stabilité économique et politique du Nigeria, vacillant au gré des fermetures de la frontière. Kousseri dépendait des importations du Nord-Est du Nigeria et des échanges avec N’Djamena. Outre le transport par camions, c’est par les motocyclettes que les marchandises arrivaient à Kousseri et en sortaient. Les revenus des jeunes particulièrement dépendaient de la liberté de circulation desdits engins. La frontière nigériane leur est encore fermée, la circulation interurbaine par motocyclettes a été interdite, l’accès du Pont Ngueli menant à N’Djamena leur est proscrit, tout comme d’ailleurs la pêche et le transport par pirogues sur le fleuve Logone. D’autre part, sur les 198 889 PDI recensés dans la Région de l’Extrême-Nord en octobre 2016, 95 911 étaient dans

2 IOM, Bureau Maroua, Matrice de suivi des déplacements, n° 5, octobre 2016 ; Care, Analyse rapide genre – Déplacement de populations dans les arrondissements de Tokombéré et Mora – Extrême Nord du Cameroun, juillet 2015. 3 Plusieurs évaluations multisectorielles et périodiques disponibles en ligne rendent compte de l’évolution des conditions humanitaires dans la Région de l’Extrême-Nord. Des études spécifiques sont conduites par les intervenants pour des besoins de programmation et concernent entre autres les réponses d’urgence, le relèvement précoce et la promotion de la cohésion sociale. Voir notamment : UNICEF, The Impact of Boko Haram and Armed Conflict on Schooling in Cameroon’s Far North, February 2015 ; WFP, Evaluation rapide de la sécurité alimentaire en situation d’urgence, juin 2015; Cameroon, Rapport intersectoriel sur la situation dans l’Extrême-Nord, (1-30 novembre 2016). 4 Voir notamment les comptes rendus de plusieurs ateliers et forums organisés par le PNUD et GIZ entre 2015 et 2017 à Maroua, Mokolo et Kousseri. 5 Quelques études pertinentes à citer dans la revue documentaire sur le Logone et Chari concernant les interventions : African Humanitarian Agency (AHA), Rapport de lancement des activités sanitaires et d’identification des besoins non couverts dans le Département du Logone et Chari du 27 août au 17 septembre 2016 ; PNUD, Conflits et mécanismes de résolution des crises à l’Extrême-Nord du Cameroun, earlyrecovery.global/.../rapport_de_letude_sur_les_conflits_et_mecanismes_final.pdf

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le Logone et Chari. Il faut y ajouter 12 770 réfugiés non enregistrés et 16 604 retournés.6 Les évaluations de l’IOM fournissent les données démographiques suivantes au sujet des PDI dans la Région :

« La population déplacée est composée à 50.7% de femmes et à 49.3% d’hommes. 67% de la population déplacée a moins de 18 ans. Parmi cette population, 37% est âgé de 0 à 5 ans. Les personnes de plus de 60 ans représentent 4% de la population. La taille moyenne d’un ménage déplacé est 8.5. 98% des ménages déplacés ont des enfants. Pour ces familles avec enfants, le nombre moyen d’enfants par ménage est 5.8 ».

Le rapport précise les pourcentages suivants par sexe pour les enfants de 0 à 17 ans :

Age Homme Femme 0-2 7 9 3-5 17 16 6-12 23 23 13-17 21 18

Comme l’indique le tableau suivant, le nombre des déplacés en général est en croissance, suggérant que même si le front militaire décroit en intensité, les paramètres socioéconomiques en revanche suscitent de plus en plus de déplacements de la part de familles en quête non plus seulement de sécurité, mais aussi de commodités de survie. En effet, entre août et octobre 2016, plus de 6000 nouveaux déplacés internes, réfugiés et retournés ont été recensés, principalement à Makary dont le nombre de PDI est passé de 28 890 à 34 533.7

Evolution des effectifs des déplacés dans l’Extrême-nord du Cameroun Dates Nov 2015 Fév 2016 Avr 2016 Aoû 2016 Oct 2016 Réfugiés non enregistrés

11 482 8 108 8 251 14 871 26 743

PDIs 158 316 169 970 190 591 181 215 198 889 Retournés 30 585 35 434 39 833 32 023 36 068

Source : OIM, Bureau Maroua, Matrice de suivi des déplacements (DTM), Numéro 5, octobre 2016, Cameroun

L’imbrication de ces facteurs de vulnérabilité et le temps pris pour commencer à y déployer

des réponses, donnent aux problèmes humanitaires dans le Logone et Chari un visage particulier, ce d’autant plus qu’on peut constater qu’il s’agit d’un environnement économique et socioculturel différent du reste de la Région de l’Extrême-Nord. Cette différence a été mise en exergue dans des travaux scientifiques qui montrent que les clivages enfouis et les pesanteurs socioculturelles

Notes 6 IOM, Bureau Maroua, Matrice de suivi des déplacements, n° 5, octobre 2016, p.2. 7 IOM, Bureau Maroua, DTM_CMR_Annex_Round5_Oct2016. Données de la population par arrondissement ; OCHA, UNHCR, INTERSOS, WFP, ALDEPA et al, Evaluation multi sectorielle rapide, Département du Logone et Chari, Extrême-Nord Cameroun, 1er- 7 juin 2016.

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influencent les relations sociales et politiques dans le Logone et Chari plus qu’ailleurs dans l’Extrême-Nord.8 Cependant il est constaté que très peu d’analyses ont été faites sur l’impact transversal de la crise sur les zones cibles de cette étude, le contexte sécuritaire ayant été limitatif.

3- Objectifs et utilisation prévue des résultats de l'évaluation L’ambition de cette étude, telle que formulée dans les termes de références, est manifestement encyclopédique. L’objet de la mission est libellé comme suit:

“The assessment aims to identify specific needs of vulnerable groups, specifically women, children and youth, from refugee, internally displaced (IDP) and host community populations currently residing in the department of Logone-et-Chari, Far North Region of Cameroon. The assessment will focus on Livelihoods and employment, and will mainstream Education and Child Protection in Emergencies. The assessment will provide final, clear recommendations on gaps to befilled in these sectors and a clear description and representation of the main findings. The desired outputs of the assessment include, but are not limited to:

- Assess the livelihoods and employment context in the target areas, with a particular focus on key livelihood trades and food items, with data disaggregated by age and gender;

- Assess the security and stability of the situation, and constraints on physical movement and access, both for the target populations and aid workers;

- Identify the socio-economic profile of the target populations (main wealth-groups characterised in terms of household composition; livelihood assets; income sources; food-security status, etc.);

- Assess the differences between displaced and host populations in terms of livelihood opportunities; - Assess the impact (including severity) of population displacement due to recurring natural disasters

and chronic conflict on food security and livelihoods/resilience, and identify the worst affected groups and areas;

- Assess the local and national response capacity as well as who are the main actors on the ground - Identify and assess the livelihood strategies / coping mechanisms to the emergency of the most

vulnerable households, with particular attention to the different roles of men and women, and the impact of livelihood strategies / coping mechanisms on intra-household and community dynamics – including violence against women and children;

- Assess local priorities surrounding needs, and identify local capacities and capacity-gaps for accessing employment / self-employment opportunities for both men and women, including youth.

- Identify the actors and institutions operating in or delivering services to the area; the accessibility of markets for goods and services; and the accessibility of vocational training, financial services, and business services providers;

- Assess the contribution of children to the household economy, and identify the type of work these children are involved in, with data disaggregated by age and gender;

- Identify and assess the types of educational facilities that are available to children and youth in the region to support livelihoods in the long term (primary, secondary, catch-up, alternative / non-formal, agricultural / technical skills development, vocational, etc.);

- Identify the types of educational support that children and youth would like to participate in, particularly for out-of-school children who are not eligible for formal education;

8 Voir Alawadi Zelao, « Conflictualité interethnique et régression scolaire dans la ville de Kousseri », www.rocare.org/Zelao.pdf. Voir également les références des notes 9 et 10.

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- Identify the types of skills that women and youth require for engagement in demand-driven employment activities, and assess whether illiteracy is an issue that requires addressing;

- Assess whether an intended intervention would exacerbate tensions or put any group at risk of violence (e.g. would the intervention increase intra-household conflicts, preventing parents from providing care to their children and forcing older children to take care of their siblings and deal with domestic chores?);

- Identify / assess the availability of state and community-based child protection services ; - Define vulnerability criteria that will allow the most vulnerable groups to be distinguished during the

course of an intervention, with a particular focus on children engaged in exploitative activities, children who were associated with armed forces and children in alternative care, adolescent girls and boys

- Assess whether cash/voucher programming is a feasible modality for a response in t the target areas

- Recommend an appropriate response to support and protect livelihoods in the long term, including to reinforce and develop displaced populations’ capacities, livelihood assets and outcomes, address capacity gaps, and enhance their access to employment / self-employment opportunities. A response should consider education and child protection outcomes, including how a Livelihoods response has contributed to improved education and child protection in the target areas.”

4- Zone géographique Le Logone et Chari est l’un des six Départements de la Région de l’Extrême-Nord. Limité à l’Est par le Tchad, à l’Ouest par le Nigeria, au Nord par le Lac Tchad (dont il partage les eaux) et au Sud par le Département du Mayo Sava, c’est une zone écologique contrastée. Entre les plaines inondables de Zina, la réserve de faune du parc national de Waza, les terres exondées humides et pâturables des abords du Lac, s’étalent de vastes espaces ingrats, desservis par une pluviométrie très faible au cours des saisons de pluies de plus en plus courtes. Les gens y vivent des activités traditionnelles que sont l’agriculture, l’élevage, la pêche et le commerce. Bien que toutes les communautés s’adonnent indistinctement à tous ces modes de production, les représentations restent perceptibles quant à la spécialisation communautaire : l’élevage aux Arabes Choa, le commerce aux Kanouri, la pêche aux Kotoko et aux Mousgoum, l’agriculture à tous. A ces groupes, s’ajoutent les Mandara, les Massa, les Peuls et les Haoussa en nombres réduits.

C’est l’accès à l’espace qui fut la pierre angulaire des conflits qui, depuis l’époque coloniale, n’ont cessé d’opposer les Arabes Choa et les Kotoko autour des chefferies traditionnelles, des mares, de l’emplacement des marchés, faisant perdurer une situation de paix belliqueuse qui, au début des années 1990, dégénéra en affrontements interethniques meurtriers inscrits sous le registre des hoquets de l’ouverture démocratique.9 Goulfey, Kousseri et Makary sont situés dans la zone la plus aride du Département. L’Arrondissement de Kousseri est celui qui a la plus petite superficie, se réduisant presque à la ville et à ses faubourgs. Si Goulfey et Makary sont plus vastes, ce sont aussi des zones de fortes rivalités entre Arabes Choa et Kotoko.

9 Voir Saïbou Issa, Ethnicité, frontières et stabilité aux confins du Cameroun, du Nigeria et du Tchad, Paris, l’Harmattan, 2012 ; Franz S. Hagenbucher, « Les Arabes dits Suwa du Nord-Cameroun », Cahiers ORSTOM, séries sciences humaines, vol XIV, n°3, 1973.

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La juxtaposition des chefferies territoriales kotoko et des chefferies ethniques arabes qui se sont arrogées une emprise de fait sur les terres qu’elles occupent, laisse une situation de fait accompli que l’Etat gère à l’usure. La prééminence démographique et politique des Arabes Choa inhibe la prééminence historico-coutumière que les Kotoko revendiquent sur leurs terres ancestrales.10 Ceci sans tenir compte des rivalités foncières interarabes dues aux arrivées de migrants/pasteurs arabes venus du Nigeria et du Tchad au gré des crises écologiques et des guerres depuis le début des années 1990.

5- Description de l’activité d’évaluation, méthodologie et limites Le Consultant a perçu cette évaluation comme un travail essentiellement empirique destiné à fournir à Plan International des données de terrain permettant de sous-tendre la planification de ses interventions en faveur des groupes vulnérables, particulièrement les femmes, les jeunes et les enfants (filles et garçons). Par conséquent, tout en combinant des outils de collecte de données quantitatives et de données qualitatives, l’attention a été focalisée sur la recherche des éléments socioéconomiques, éducatifs/formatifs, socioculturels permettant tout au moins de percevoir les insuffisances qui structurent la vulnérabilité des groupes diversement affectés par la crise due à l’avènement de Boko Haram. La matrice méthodologique jointe en annexe de ce rapport détaille les modalités de mise en œuvre de cette mission d’évaluation dont l’exécution a mobilisé des enquêteurs à Goulfey, Kousseri et Makary.

Au départ, il était prévu de déployer respectivement 6, 4 et 4 enquêteurs dans les localités cibles. Cependant, les contraintes de temps, la multiplicité des outils de collecte des données et le temps imparti à chaque session, ont requis l’implication d’une dizaine d’autres personnes ressources chargées notamment d’organiser des rendez-vous, de servir d’interprètes ou de guides le cas échéant, de préparer les focus groups, etc. L’évaluation s’est basée sur plusieurs outils de collecte, à savoir : les guides-types de focus groups avec les jeunes fournis par Plan International, un questionnaire et des guides d’entretien à l’intention des autorités (administratives, traditionnelles et communales), des chefs de communautés déplacées et de responsables d’organisations de la société civile opérant sur le terrain. Au total, 983 ménages ont été enquêtés, soit 433 à Kousseri, 264 à Goulfey et 286 à Makary. 35 groupes de discussions ont été réalisés avec des garçons et des filles séparément, en groupes mixtes et avec des parents, soit 15 à Kousseri, 8 à Goulfey et 12 à Makary. Après traitement, 954 questionnaires ont été validés.

L’observation a été souvent convoquée pour combler les silences des personnes interviewées ou nuancer leurs propos lorsque des évidences visuelles permettaient de se rendre compte que les réponses n’étaient pas toujours conformes au vécu. Il en fut ainsi de la scolarisation des élèves ou du travail des enfants pour lesquels les parents ont cru, parfois, devoir réserver leur réponse, si ce n’est de nier l’implication des tout jeunes dans les activités de production. A ce propos, les enquêtés se sont par moments sentis jugés dans leurs choix éducatifs ou dans la mise à contribution de leur progéniture dans les activités de production. 10 Voir Saïbou Issa, « Arithmétique ethnique et compétition politique entre Arabes choa et Kotoko dans le contexte de l’ouverture démocratique au Cameroun », Afrika Spektrum, n° 40, 2005 ; Harouna Barka, « Les batailles de mémoire dans le Logone et Chari et leurs enjeux identitaires et politiques » www.rhus.association.usherbrooke.ca/wp-content/articles/612.pdf

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Il a également été ressenti une ambivalence de la perception des agences d’intervention, car si les populations fondent davantage leurs espoirs sur les aides des organisations humanitaires et de leurs relais sur le terrain, des interrogations viennent de certaines autorités manifestement pas assez informées des activités projetées voire menées dans les localités. D’où des réserves sur les effectifs déclarés de PDI, réfugiés ou retournés et la crainte de voir s’installer une mentalité d’assistanat nuisible aux efforts de résilience, qu’ils soient individuels, étatiques ou internationaux.

Les variables socioculturelles n’ont pas été suffisamment explorées pour permettre de mesurer plus amplement l’influence des atavismes sur la réception des politiques et actions de santé, les pratiques éducatives ou les relations parents-enfants ou les survivances des rudesses sournoises ou manifestes dans les rapports de genres et les interactions intergénérationnelles. Quelques recensions documentaires et des échanges libres avec des membres de différentes communautés ont laissé transparaître des indices de « démocratie socioculturelle » variables selon les groupes ethniques et qui ne dépendent pas toujours de la confession religieuse. Entre condition socioéconomique et conditionnement socioculturel, il reste toujours à identifier lequel des facteurs prime dans la façon d’interagir avec les femmes et les enfants chez les Arabes, les Kotoko, les Kanouri et les Mousgoum qui composent le gros de la population présente dans la zone d’étude.

La population de l’étude renvoie aux habitants des localités de Kousseri, Goulfey et Makary. Celle ciblée est constituée des populations déplacées et hôtes identifiées dans des quartiers et les sites spécifiques. La technique d’échantillonnage est non aléatoire de type raisonné. Sur la base des informations clés et des indicateurs préalables collectés dans la phase brève de la préenquête menée au niveau des trois localités arrêtées, l’échantillon a été déterminé. Le souci de la représentativité de cet échantillon a permis de définir des grappes dans chaque localité en tenant compte des caractéristiques sociologiques et physiologiques. A ce titre, deux éléments ont déterminé la taille de l’échantillon par localité : le nombre d’habitants selon le recensement de 2010 et le nombre de déplacés accueillis dans chaque localité. Ainsi, avec une population cumulée rurale/urbaine estimée à 101.246 habitants pour Kousseri, 58117 pour Goulfey et 104843 pour Makary11, l’échantillon a été défini à partir d’une basse moyenne de 200 enquêtés par localité, représentant des ménages, non pas des individus. Le second déterminant des choix étant le nombre de déplacés par localités, il apparait que Makary, puis Kousseri reçoivent les plus grands effectifs. La localité de Goulfey en a reçu moins. Sur la base de ces déterminants, l’échantillonnage choisi a focalisé une grande part d’enquêtés à Kousseri pour comprendre les déterminants de la vulnérabilité dans une zone urbaine ou péri-urbaine offrant, en principe, plus d’activités de subsistance que les zones rurales. Ce qui justifie que l’échantillon de Kousseri soit plus important que celui de Makary, pourtant plus peuplé et plus sollicité par les déplacés. Avec une bonne connaissance de ces caractéristiques, les enquêtés au niveau de chaque localité ont été choisis par convenance. Les facteurs ethniques, de cohabitation déplacés/hôtes, de religion, de sexe, d’âge ont été pris en compte au prorata des caractéristiques connues des populations des localités étudiées. Du reste, sur la base de la pré-enquête qui a précédé le démarrage effectif de l’administration du questionnaire, le seuil de redondance des réponses a été fixé à un effectif maximal de 200 répondants.

11 Données BUCREP, 2010

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Le traitement et l’interprétation des données ont suivi une démarche quantitative et qualitative. Les questionnaires ont subi une analyse statistique par le logiciel Spss. Les résultats obtenus ont été interprétés sur une base thématique, c’est-à-dire en fonction des centres d’intérêt définis par les TDR et du canevas de rédaction stipulé par le commanditaire de l’étude. Compte tenu de la diversité des thèmes abordés et du recours aux interviews et aux groupes de discussion, une approche qualitative a été mise à contribution. Çà et là, les études sociohistoriques ont été mises à contribution notamment dans l’analyse du contexte et la compréhension des contraintes locales à l’insertion des déplacés ou à la protection des couches vulnérables.

6- Résultats de l’évaluation

a. Sécurité et stabilité de la situation Le moins qu’on puisse dire, c’est que le Logone et Chari reste soumis à la menace diversifiée de Boko Haram. De janvier à juillet 2016, 25 attaques, 3 attentats suicides et 5 explosions de mines ont été enregistrés dans le Département. L’arrondissement de Makary a été la cible de 3 attaques, un attentat suicide et deux cas de passage sur les mines terrestres. Quatre attentats simultanés à Bodo le 25 janvier 2016, ont fait 32 morts et 67 blessés.12 Dans la nuit du 21 au 22 novembre 2016, une attaque a coûté la vie à 6 militaires camerounais et un membre du comité de vigilance de Darak.13 Outre les nombreux morts enregistrés, les menées de Boko Haram ont visé le bétail et les réserves alimentaires des populations. Kousseri quant à elle reste une ville fragile, ayant servi de zone de transit d’armes et d’adeptes entre le Tchad et le Nigeria.14 Les échanges avec diverses catégories de personnes avisées (militaires, administrateurs, hommes politiques…) suggèrent que l’on est conscient de la nécessité d’y rester vigilant, particulièrement face aux risques d’attentats. Les problèmes socioéconomiques que le Tchad voisin connaît suscitent également des inquiétudes, notamment par rapport à la recrudescence des actes de banditisme urbain dus au désœuvrement de nombreux praticiens des échanges quotidiens entre Kousseri et N’Djamena. Sur le front de la cohésion sociale, le Département est sujet aux conflits intercommunautaires :

- « En procédant au lancement officiel du projet de développement rural intégré du Chari-Logone (PDRI-CL) à Kousseri ce 17 février 2010, le ministre de l’économie, de la planification et de l’aménagement du territoire (MINEPAT) s’est plutôt livré à une messe de pacification. Et pour cause, la désignation du coordonnateur de ce projet a fait couler beaucoup d’encre et de salive au sein des deux principales communautés ethniques qui peuplent le département du Logone et Chari. Arabes Choas et Kotoko, habituellement sur le pied de guerre lorsqu’il s’agit de défendre un intérêt quelconque se sont disputé le fauteuil de coordonnateur malgré l’appel à candidature dont ce poste a fait l’objet. Cette polémique a d’ailleurs retardé le lancement du projet de près de deux ans ».15

12 Opération Alpha, récapitulatif des incidents survenus dans la zone d’opération, situation au 30 juillet 2016. 13 Sources ouvertes. 14 Sources sécuritaires. 15 http://www.tchadactuel.com/?p=3212.

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- « Les Kotoko et les Musgum, deux peuples du département du Logone et Chari ont encore fait parler d’eux vendredi dernier à Kousseri. Les deux communautés qui se regardaient en chiens de faïence depuis des lustres au sujet du leadership social en sont venues aux mains lors d’un conflit foncier. Selon les témoignages des riverains, vendredi, 3 juillet 2015, alors que les Musgum et les Massa s’affairaient à défricher une parcelle de terrain ayant jadis appartenu à la Société d’expansion et de modernisation de la riziculture de Yagoua (Semry), les Kotoko ont alerté les leurs au motif qu’on est en train d’arracher leur champ. Commencent alors des échauffourées sur la parcelle située non loin du pont de Nguéli, au bord du fleuve Logone qui sépare le Cameroun et le Tchad. Le bilan des affrontements fait état de 18 blessés dont 14 chez les Kotoko. La prompte réaction des forces de maintien de l’ordre a permis de ne pas enregistrer de pertes en vies humaines. Selon une source policière, cet autre affrontement intervient au lendemain d’un autre similaire du 7 juin 2014 où l’on a enregistré un mort et une dizaine de blessés sur le même site ».16

- « Lundi 28 Novembre 2016- Un homme a trouvé la mort ce dimanche à Makari, dans le département du Logone-et-Chari, région de l’Extrême-Nord, au cours d’affrontements inter communautaires ayant opposé Kotokos et Arabes Choa, selon des témoignages recueillis par KOACI, auprès des sources oculaires et au sein des différentes communautés. D’après nos informations, un jeune Kotoko de Makari rentrant de marché d'un village voisin, a fait escale dans une localité dénommée Dougoum Mango pour recouvrer sa dette auprès de son débiteur, un Arabe Choa. Après des échanges, le créancier n’est pas rentré en possession de son argent. Le ton monte. S’ensuivra une bagarre entre les deux hommes. Des hommes présentés comme proches de celui qui devait de l’argent (débiteur), dont le montant ne nous a pas été communiqué, se sont impliqués dans la bagarre qui avait visiblement dégénéré. Les coups assenés de toute part ont causé la mort du jeune créancier. En représailles, des jeunes venus de Makari ont organisé une expédition punitive, contre les ressortissants du village arabe Choa où leur frère est décédé ».17

Comme annoncé plus haut, l’accès à la terre reste le pont d’orgue des conflictualités intercommunautaires. Le cosmopolitisme urbain, la spéculation foncière et les résistances communautaires s’imbriquent pour complexifier chaque jour davantage le statut et le contrôle de l’espace. La communautarisation est aussi perceptible à Kousseri où les gens socialisent par affinités ethnolinguistiques et par contrées d’origines, aussi bien sur les marchés que dans les zones d’habitation. Il a été observé que l’arrivée des déplacés internes dont la grande majorité est reçue dans les familles d’accueil, contribue à renforcer le sentiment identitaire, chacun se dirigeant naturellement vers « un frère, un cousin, un oncle… ».

Un point positif à mettre en évidence est la reprise progressive de la circulation de marchandises sur l’axe Fotokol-Kousseri à partir de novembre 2016. L’armée et la douane veillent à la fiabilité des chargements et à la sécurité le long de la route. Ce desserrement semble avoir amélioré l’approvisionnement du marché de Kousseri.

16 http://www.cameroun24.net/blog/?pg=actu&ppg=1&pp=&id=21545. 17 http://koaci.com/cameroun-makary-mort-deux-boutiques-calcinees-dans-affrontements-inter-communautaires-104169.html

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b. Moyens, stratégies de subsistance et opportunités d’emplois des groupes vulnérables

L’évaluation des moyens de subsistance des populations hôtes et déplacées des localités de Kousseri, Goulfey et Makary est axée sur les activités de survie menées et les revenus des ménages.

1. Activités socioéconomiques des ménages Les activités économiques des ménages enquêtés Effectifs Pourcentage Agriculture 370 41,90% Pêche 9 1,20% Petit commerce/services 324 36,69% Transport 21 2,38% Artisanat 1 0,11% Plusieurs à la fois 158 17,89% Total

883 100

Source: Enquêtes de terrain, Janvier 2017

Il se dégage des données recueillies et traitées, que les populations vivent essentiellement des secteurs traditionnels de production rurale ne nécessitant pas une formation qualifiante. L’observation tend à suggérer qu’on est en présence d’un modèle social et socioéconomique transmissif dont la reproduction est aussi due au manque d’alternatives locales. La pratique de l’agriculture, de l’élevage, de la pêche, du commerce, s’acquiert par apprentissage mimétique. Avec l’essor urbain et la croissance de la demande en ouvriers qualifiés et compétences associées, il y a des secteurs d’opportunités qui s’ouvrent, comme il sera discuté plus bas. Les activités industrielles n’ont pas été citées, confirmant du reste qu’aucune entreprise de transformation n’est présente dans la zone d’étude. C’est le lieu de relever que le secteur de la petite transformation agricole et pastorale est en croissance dans toute la Région, impliquant des

41.90%

0.68% 0.34%

36.69%

2.38% 0.11%

17.89%

0%10%20%30%40%50%

Pour

cent

age

Activité économique du ménage

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associations de producteurs, des organisations féminines dans le cadre de GIC qu’accompagne particulièrement le MINEPAT à travers le PDRI. En effet :

- les ménages sont majoritairement consacrés aux activités agricoles dans le cadre d’exploitations plus familiales qu’associatives (41.90%). Les produits sont surtout destinés à la subsistance, une partie étant revendue pour satisfaire aux besoins additionnels : compléments alimentaires, soins, scolarité des enfants, remboursement des dettes, etc. C’est près du lac Tchad que la production agricole est diversifiée et rentable du fait d’un rendement élevé et des débouchés qu’offre notamment le marché nigérian. - le petit commerce qui comporte, entre autres, les étals précaires dans les espaces marchands par hommes et femmes, le commerce itinérant des enfants, les services de sous-traitance rendus aux commerçants, représente près de 40% des activités des ménages enquêtés. Il s’agit cependant du petit commerce routinier, limité à ‘acheter et revendre pour suivre le bénéfice par unité de marchandise’. Ce sont pour l’essentiel des détaillants qui s’approvisionnaient soit au Nigeria ou à N’Djamena, soit auprès des grossistes arabes choa, kanouri et kanembou qui dominent le secteur commercial. Fruits de saison, arachides, oignons, vivres frais, petit matériel de quincaillerie sont parmi les principaux produits du commerce ambulant dans lequel se retrouvent les jeunes.18 - plus de 17% des ménages mènent à la fois plusieurs activités : agriculture, élevage, commerce, artisanat. - une catégorie faible des ménages vivent des activités de pêche, de l’artisanat, du transport (chauffeurs et moto-taximen). Ce faible taux est inhabituel, s’expliquant probablement par le fait que l’insécurité et les restrictions à la circulation interurbaine ne permettent pas d’accéder à toutes les mares poissonneuses et à tous les marchés périodiques. Photo 1 : Jeunes détaillants de canne à sucre au marché de Makary

18 Observations à Kousseri

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2. Revenu annuel global dans les ménages

Revenu annuel global Effectifs Pourcentage Moins de 50000 76 8,13% Entre 50000 et 100000 98 10,48% Entre 100001 et 150000 166 17,75% Entre 1500001 et 200000 90 9,63% Entre 200001 et 250000 93 9,95% Entre 250001 et 300000 97 10,37% Entre 300001 et 350000 131 14,01% Plus de 300000 184 19,68% Total 935 100

Source: Enquêtes de terrain

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Source : Enquêtes de terrain Deux tendances se dégagent : près de 20% des ménages ont un revenu global de plus de 300.000. Ces ménages mènent généralement des activités génératrices de revenus (père, femme et enfants) ; plusieurs ménages par contre (17.75%) ont un revenu annuel global égal ou inférieur à 150.000. Dans l’ensemble, plus de 70% des ménages ont un revenu annuel global de moins de 300.000. Ce montant se situe en dessous du seuil de pauvreté. Il est à noter qu’il s’agit des revenus par ménage et non par individu adulte. Avec environ 820 F CFA par jour, les ménages sont en deçà des 931 F CFA par adulte que les résultats de l’enquête auprès des ménages de 2014 (ECAM) fixent comme étant le seuil de pauvreté monétaire au Cameroun. Ce seuil annuel se situe à 339 715 F CFA.19

3. Principales sources de dépenses des ménages Les principales sources de dépenses Effectifs Pourcentage Education 3 0,32% Santé 2 0,21% Nutrition 134 14,18% Habitat 1 0,11% Education; Santé 16 1,69% Education; Santé 48 5,08% Education; Santé; Nutrition 278 29,42% Education; Santé; Nutrition; Habitat 69 7,30% Education; Santé; Nutrition; Habitat; Transport 3 0,32%

19 INS, Quatrième enquête camerounaise auprès des ménages : tendances, profils et déterminants de la pauvreté au Cameroun de 2001 à 2014, Yaoundé, décembre 2015, p. 15.

8.13%

10.48%

17.75%

9.63% 9.95% 10.37%

14.01%

19.68%

0%2%4%6%8%

10%12%14%16%18%20%

Moins de50000

Entre 50000et 100000

Entre 100001et 150000

Entre1500001 et

200000

Entre 200001et 250000

Entre 250001et 300000

Entre 300001et 350000

Plus de300000

Pour

cent

age

Revenu annuel global dans le ménage

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Education; Santé; Nutrition; Habitat; Transport; Non food items

4 0,42%

Education; Santé; Nutrition; Habitat; Non food items 31 3,28% Education; Santé; Nutrition; Transport 14 1,48% Education; Santé; Nutrition; Non food items 6 0,63% Education; Santé; Habitat 20 2,12% Education; Nutrition 12 1,27% Education; Nutrition; Habitat; Non food items 2 0,21% Education; Nutrition; Non food items 2 0,21% Santé; Nutrition 118 12,49% Santé; Nutrition; Habitat 130 13,76% Santé; Nutrition; Habitat; Transport; Non food items 1 0,11% Santé; Nutrition; Habitat; Non food items 8 0,85% Santé; Nutrition; Transport 2 0,21% Santé; Nutrition; Non food items 2 0,21% Nutrition; Habitat 30 3,17% Nutrition; Habitat; Transport 2 0,21% Nutrition; Transport 7 0,74% Total 945 100

Source : Données de terrain Le traitement des données montre que les ordres de priorité sont variables d’un enquêté à un autre, au gré des besoins spécifiques des ménages. Les postes de dépenses donnent les combinaisons suivantes :

- Education, Santé, Nutrition : 29.42% - Santé, Nutrition, Habitat : 13.76% - Santé, Nutrition : 12.49%

Dans certains ménages, des postes de dépenses restent dominants à l’instar de la nutrition 14.18%. D’autres par contre subissent le poids de la location (personnes déplacées). Pour l’ensemble des ménages, les articles non alimentaires « non food items / NFI», l’éducation, la nutrition et la santé restent des postes de dépenses invariables. Il est cependant manifeste que la santé, la nutrition et l’éducation émergent comme les principales préoccupations des parents. Il est en revanche inquiétant de se rendre à l’évidence que c’est la vie quotidienne, non pas l’avenir des enfants qui mobilise le plus l’attention. Cela s’explique davantage par l’épaisseur des familles, de nombreux ménages étant polygames, recevant des déplacés avec leurs familles, en tout cas plusieurs enfants à charge. Lors des discussions, il est apparu que les dépenses d’éducation concernent essentiellement le paiement des frais exigibles dans les lycées et collèges, quelques cahiers, cartables et tenues (de classe, de sport) ; peu de parents ont évoqué l’achat des livres qui reste hors de portée. Dans de nombreux cas, les parents ont évoqué la transmission des manuels des aînés aux cadets si le programme ne change pas, ou alors ils font « la balance », c’est-à-dire donner les anciens livres et ajouter un peu d’argent pour s’en procurer de nouveaux.

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Photo 2 : Des veuves et leurs enfants au quartier Mawack à Kousseri

4. Moyens de subsistance des déplacés

Localités

Catégories

Activités menées avant

Activités menées après

Appuis communautés

hôtes et partenaires

Contraintes/ Défis

KO

US

SE

RI

Hommes

Agriculture, élevage, petit commerce, chauffeur, pêche

Menuiserie, petit commerce, maçonnerie, mécanique, pêche

- Espaces agricoles ou marchands -Accueil dans les familles -Assistance alimentaire

Location des espaces, récriminations contre les faveurs aux seuls déplacés, insécurité, très faible assistance humanitaire, suspension temporaire des activités de pêche sur le fleuve Logone, promiscuité

Femmes

Petit commerce transfrontalier et local, restauration, ménage conjugal,

Petit commerce (légumes et fruits), main d’œuvre champêtre, poterie, artisanat divers

-Accueil dans les familles -Assistance alimentaire

Système social peu favorable à l’autonomie des femmes, assistanat de leur époux, pas d’actions spécifiques en faveur des femmes chefs de ménages, tentations indécentes

Enfants/Jeunes

Garçons : Elèves, mototaxi, agriculture, élevage

Garçons : Elèves, Mototaxi, petit commerce au marché, commerce

-Accueil dans les familles -Assistance alimentaire Errance (53 enfants non

Peu de structures d’insertion professionnelle des jeunes, insécurité, très faible assistance humanitaire, structures

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Filles : petit commerce ambulant, élève formel et/ou coranique

ambulant, mendicité Filles : petit commerce ambulant, élève formel et/ou coranique, artisanat

accompagnés identifiés à Kousseri en 2016)

de formation non fonctionnelles (2 CMPJ) ou sous équipées (CPFF), saturation des secteurs d’activités

GO

ULFE

Y

Hommes

Agriculture, Elevage, Commerce, Pêche, Artisanat

Petit commerce, maçonnerie, mécanique, pêche, ‘maraboutage’

- location des terres cultivables et espaces marchands aux IDPs -Accueil dans les familles

-Coût élevé de la location des parcelles -non maitrise des circuits de production et de commercialisation, insécurité, promiscuité dans les familles d’accueil

Femmes

Ménage, petit commerce, poterie, artisanat divers

Ménagère, petit commerce, maîtresse coranique

-Accueil dans les familles

Absence de dispositifs associatifs ou de production capables de les intégrer

Enfants/Jeunes

Garçons : Elève formel, élève coranique, mototaxi, agriculture, élevage, contrebande Filles : petit commerce ambulant, élève formel et/ou coranique

Garçons : Elève formel, élève coranique, mototaxi, agriculture, élevage, mendicité, commerce itinérant Filles : petit commerce ambulant, élève formel et/ou coranique

-Accueil dans les familles -Assistance alimentaire

-Jeunes analphabètes et très peu qualifiés -Projets et programmes d’insertion très peu connus -Insécurité

MA

KA

RY

Hommes

Elevage, agriculture, commerce, transporteurs, pêcheurs

Agriculture, commerce à l’étalage, aide-commerçant au marché

-Mise en location des terres cultivables, des surfaces de pâturages et des espaces marchands aux IDPs -Accueil dans les familles

-Coût élevé de la location des parcelles -non maitrise des circuits de production et de commercialisation, insécurité

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Femmes

Ménagère, petit commerce, poterie, artisanat

Ménagère, petit commerce, maîtresse coranique, main d’œuvre agricole

-Accueil dans les familles -Assistance alimentaire

-Faible tissu associatif des femmes -Insécurité

Enfants/Jeunes

Garçons : Elève formel, élève coranique, mototaxi, contrebande, agriculture, élevage, pêche Filles : petit commerce ambulant, élève formel et/ou coranique

Elève formel, élève coranique, mototaxi, agriculture, élevage, mendicité, commerce itinérant Filles : petit commerce ambulant, élève formel et/ou coranique

-Accueil dans les familles -Assistance alimentaire

-Jeunes analphabètes et très peu qualifiés -Projets et programmes d’insertion très peu connus -Pas de structures de formation professionnelle -Insécurité

Source : Synthèse des données de terrain

L’arrivée des déplacés a accru les problèmes de subsistance que connaissaient déjà les populations des localités d’accueil qui ont d’abord partagé leurs réserves avec eux, avant que les aides commencent à arriver. Les dispositifs socioéconomiques d’encadrement et d’insertion professionnelle des jeunes restent déficitaires en termes de ressources humaines, logistiques et matérielles. Les déplacés ne peuvent plus exercer pleinement leurs activités initiales. Aucune stratégie de reconversion n’a été mise sur pied pour leur réhabilitation. L’on observe aussi une compétition avec la main d’œuvre locale qui se plaint de la concurrence déloyale des déplacés appliquant des tarifs réduits.

5. Stratégies d’adaptation des populations hôtes

Localités

Catégories sociologiques

Activités initiales Effets de la présence

des déplacés Contraintes/

Défis

KOUSSERI GOULFEY MAKARY

Hommes Femmes Enfants/Jeunes

Petit commerce, agriculture, élevage, métiers de surface (maçons, menuisiers, mécaniciens,…) Elèves,

-Baisse des activités commerciales du fait de l’insécurité -propension des hôtes à attendre l’assistance humanitaire -Vol et viol -Tensions sporadiques entre hôtes et déplacés

Insécurité, pas d’assistance humanitaire,

Source : Synthèse des données de terrain

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L’environnement socioéconomique offre en réalité peu d’opportunités de recasement lorsque les secteurs habituels de production subissent les effets d’une crise, qu’elle politique, économique, écologique ou sécuritaire. La redondance des activités génératrices de revenus d’une localité à une autre, a créé la saturation dans tous les secteurs, car tout le monde fait la même chose, vend parfois les mêmes produits, attend la même clientèle. Le fait que les parents aient tendance à employer/former leurs enfants à leurs propres métiers, notamment dans le commerce, l’artisanat et le transport, laisse une faible marge à l’innovation. On constate toutefois à Kousseri qu’à côté de la boutique de l’intérieur du marché, s’étendent rapidement les boxes des jeunes qui investissent entre autres dans le numérique et le marché de la contrefaçon (téléphones et produits dérivés, consoles de jeux, musique, films, montres, casquettes, parfum, seaux et gobelets, etc.). Cette économie du paraître s’adapte aux fluctuations de la mode et rendent compte des aptitudes d’une jeunesse qui a du flair et qui confesse reproduire ici ce qu’elle voyait faire à Maiduguri, Mubi et ailleurs au Nigeria avant que Boko Haram ne perturbe les routes.

L’artisanat local (menuiserie moderne et traditionnelle, fabrication de matériels aratoires et d’ustensiles divers), le petit élevage profitant de la baisse des prix du bétail et la petite agriculture domestique connaissent un regain d’activités. Il a été possible d’observer des poulaillers, des petites étables, de la culture maraîchère irriguée qui, selon les interlocuteurs à Kousseri, se sont davantage développés pour soutenir les charges des ménages et faire quelques revenus. Ils ont cependant relevé les contraintes de production suivantes : le manque de matériel aratoires adéquats rendant le travail pénible et limitant par conséquent les espaces à mettre en valeur ; l’impréparation à faire face aux maladies aviaires ; les difficultés d’accès à la provende ; la vétusté des outils de menuiserie bois et métallique.

Photo 3 : Chef de ménage hôte dans son atelier de production des marmites à Makary

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c. Analyse sectorielle des produits de consommation et des infrastructures commerciales

• Les marchés à Kousseri

Quartier

Type d’infrastructures

Équipement existant

Marchés Comptoir Boutique Hangar Boucherie Poissonnerie Chambre

froide Sokoto Marché central 252 235 02 01 00 00

Souk halla Marché du mil 00 50 03 01 01 00

Pont Nguéli Pont Nguéli Marché de fortune

Total 252 285 05 02 01 00

Source : Diagnostic participatif Canal de Développement 201320

• Le Cheptel à Kousseri Espèces Effectifs Races Bassins de production

Bovins 5128 Zébu arabe choa Ngoumati; Ndjagaré Ovins 9944 Oudah, peulh, Queue grosse Kawadji, fachar, Ngoumati Caprins 10593 Chèvre de sahel Ngoumati, Madagascar, Kawadji Porcins 1646 Race locale métissée Madana, Lacka Volaille 19102 Poulet villageois, Canards, Pintades et Oies Ngoumati, Ndjagaré

Sources : DD MINEPIA à Kousseri • Les principales cultures céréalières à Kousseri

Indicateurs/Paramètres

Principales cultures

Maïs Sorgho sp Sorgho ss Riz Nombre d’actifs agricoles 16887 8679 10132 7011 Superficies (ha) 1500 770 900 632 Rendements/ha 2,5 t 1,7 t 02 t 4,5t

Variétés CMS 905 TZEE 9001 ZOMAYE 535

LOCAL LOCAL IR 46 NARICO

Nombre de groupes engagés21

03 05 05 50

Sources : DDMINADER Logone et Chari

• Les principaux produits de consommation à Goulfey

20 Aucun nouveau décompte n’est disponible pour la période après 2013. L’observation permet de voir que les installations fixes telles que les boutiques et les hangars sont les mêmes. Des échanges informels avec des commerçants suggèrent que le nombre de comptoirs anciens mais non utilisés s’est accru, tandis que quelques jeunes déplacés s’insèrent timidement sur des espaces déjà assez saturés. 21 Les groupes impliquent des hommes, des femmes et des enfants qui participent tous au cycle de production et exécutent des tâches spécifiques dans la conservation et la distribution.

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Item Production annuelle

Revenu annuel (en F cfa)

Revenu Potentiel estimé (en F cfa)

Emplois pourvus

Emplois Potentiels22

Bovins 30 000 4 500 000 000 6 000 000 000 500 1200

Caprins 42 000 630 000 000 100 000 000 250 400 Volaille 25 000 50 000 000 80 000 000 120 250

Pêche (en Kg) 120 240 000 5 000 000 50 120 Source : Enquêtes de terrain, Janvier 2017

• Les principaux produits de consommation à Makary

22 Dans l’emploi potentiel nous avons pris en compte les différents emplois qui pourraient être générés autour de chaque type d’élevage pratiqué. A cela s’ajoutent les emplois dérivés du commerce, du transport, de la santé animale, etc.

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Il ressort des tableaux ci-dessus que les céréales, la viande, le poisson et les légumes composent l’assiette alimentaire des populations hôtes et déplacées qui sont issues du même environnement socioculturel. C’est une alimentation fréquemment perturbée par les aléas naturels, en l’occurrence les épizooties, l’insuffisance des pâturages et la concentration des zones agricoles dans les vallées du Logone, de l’El Beid, à proximité des mares et aux abords du lac Tchad.

Produits Principaux bassins de production

Marchés (général)

Production Chaînes de

valeur / Transformation

Contraintes et défis

Céréales (mil, riz, maïs, etc.)

Makary, Digam

1) Mada (7 km de Makary) 2) Amchoulga 2)Makary 3) Biamo (12 km de Makary) NB: Principal marché à bétail à Blangoua (Madé)

/ / -Fermeture de la frontière ; - difficulté de transport surtout en saison des pluies ; -débouchés difficiles compte tenu de la fermeture des frontières avec le Nigéria (la situation se rétablit peu à peu) ; -Absence d’intrants et subsides pour appuyer les agriculteurs ; -Insécurité qui a causé la perte de milliers de têtes de bœufs (plus de 4000 arrachées par la Secte BH) ; -Absence de moyens et techniques modernes afin de booster la production

Oignons Makary et Ngouma

/ -Brut pour la plupart -Séchage

Produits maraîchers (légumes, haricot, etc.)

Makary et tous les villages environnants

/ /

Poisson Lac-Tchad / -Frais -Fumage (pour vente)

Bovins

Makary pour son pâturage. Beaucoup de troupeaux y viennent en transit.

4 000 têtes env.

/

Petit bétail (mouton et chèvres)

Makary, Amchoulga, Mada, Gomo, Abbachari

300 000 env.

/

Volaille Makary, Mada, / /

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d. Profils socioéconomiques de la population cible 1. Profil professionnel des chefs de ménages

Principales occupations Effectifs

Pourcentage

Agriculteur 179 50,85%

Chauffeur 2 0,57% Coiffeur 1 0,28%

Commerçant 80 22,73% Bucheron 1 0,28%

Couturier 1 0,28%

Débrouillard 35 9,94% Fonctionnaire 5 1,42%

Eleveur 1 0,28% Artisan 1 0,28%

Gardien 1 0,28% Enseignant 7 1,99%

Maçon 8 2,27%

Mécanicien 2 0,57% Ménagère 24 6,82%

Moto-taximan 2 0,57% Tailleur 2 0,57%

TOTAL 352 100

Source: Enquêtes de terrain

Plus de la moitié des enquêtés ayant répondu à la question relative à leur emploi, sont agriculteurs. Les commerçants sont près du quart des chefs de ménages interrogés, hôtes et déplacés confondus. 10% n’ont pas une activité précise, faisant dans ce qui est communément appelé la débrouillardise. La majorité des 6.82% des ménagères est constituée de femmes déplacées chefs de ménages dont les époux ont été tués dans le cadre des attaques de Boko

0%

10%

20%

30%

40%

50%

Pour

cent

age

Principale occupation

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Haram à Fotokol, Afadé, Blamé, Bodo, Darak, Waza, etc. il est à noter que sur 954 questionnaires traités, seuls 352 ont décliné leur occupation. Parce que gênés ou oisifs, la plupart ont gardé le mutisme sur cet aspect. Encadré 1 : La vie quotidienne de Mariam et les 30 enfants à charge Agée de 57 ans, Mariam Ali, tenancière d’un restaurant à Fotokol pendant 33 ans, vivait en parfaite harmonie avec son entourage, s’occupant volontiers des enfants de sa défunte grande sœur et des voisins nécessiteux. Sa vie bascule le 04 février 2015 suite au massacre de Fotokol perpétré par Boko Haram, faisant des centaines de morts. A pied puis aidée par des motocyclistes généreux, Mariam quitte Fotokol en compagnie d’une trentaine d’enfants qu’elle tente d’encadrer, y compris ceux qu’elle ne connaissait pas. Grâce à son frère aîné, elle s’installe dans une maison de fortune à Kousseri au quartier Mawak. En plus des enfants dont elle avait déjà la charge, Mariam décide d’offrir sa protection et son affection à d’autres, orphelins et non accompagnés qu’elle a aidés à rejoindre Kousseri. Depuis 2015, Mariam survit entre le petit commerce du bois de chauffe et une assistance alimentaire mensuelle de IEDA (1 sac de riz, 5 litres d’huile, 1 sceau de 20 kg de légumineuses, 3 kg de sel). Les enfants fréquentent les écoles environnantes. Mais ils ne bénéficient d’aucune assistance spécifique en matière d’éducation, de santé et de WASH. Elle vit aujourd’hui avec sa trentaine d’enfants dans une sorte de camp de location où vivent plusieurs autres déplacés et plus 50 autres enfants.

Mariam entourée de « ses » enfants

2. Types et niveaux d’éducation des chefs de ménages

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Niveau scolaire de l'enquêté Pourcentage

Aucun 19,41% Ecole coranique 18,42%

Primaire 38,49% Secondaire 23,36%

Supérieur 0,33%

Total 100 Source : Enquêtes de terrain, janvier 2017.

Les types d’éducation des chefs de ménages se distribuent entre une tendance dominante de l’école formelle de type occidental avec des variables du niveau primaire (38.49%), secondaire (23.36%) et une très faible portion du supérieur (0.33%). L’éducation de type traditionnel coranique reste tout aussi importante dans le profil des chefs de ménages qui n’ont reçu que cette forme d’éducation (18.42%). En fait, la quasi-totalité de ceux qui sont allés à l’école formelle, sont passés également par une école coranique. On constate également que près de 20% des chefs de ménages ne présentent aucun profil en rapport avec un type d’éducation. Ce qui n’est pas surprenant vu l’éparpillement des villages, les mobilités pastorales et la précocité de l’apprentissage du métier des parents qui persiste encore dans le Département. Les chefs de ménages âgés de plus de cinquante ans n’ont pas toujours eu l’occasion, à leur jeune âge de vivre à proximité d’une école, fût-elle coranique. L’école nomade n’a jamais été opérationnalisée ici, contrairement au Tchad voisin. La compilation des archives administratives et de travaux académiques portant sur les années 1960, laisse percevoir que la volonté politique apparente ne s’est pas accompagnée d’actions persévérantes. L’administration semble avoir baissé les bras face aux réticences des parents dans un contexte général de réserve des sociétés musulmanes vis-à-vis de l’école occidentale. On était alors dans les années 1960. Dans un rapport de 1969, une mission d’inspection avait relevé les plaintes de l’Inspecteur provincial de l’éducation nationale, Ali Kirna, à propos des difficultés à mettre en œuvre l’école nomade. A posteriori, les Arabes Choa ont pointé du doigt les élites kotoko (Gouverneur de la grande Province du Nord et Inspecteur provincial de l’éducation nationale) comme responsables de leur sous-scolarisation, se référant du reste à la répression sanglante de Dollé en 1979 contre des villages arabes choa qui avaient exprimé violemment leur mécontentement contre les pouvoirs publics qui tardaient à affecter des enseignants dans l’école qu’ils avaient construite de leur propre initiative.23 Le contexte a changé. Depuis l’ouverture démocratique, on observe davantage d’engouement scolaire chez les Arabes, l’élite ayant sensibilisé les parents. L’école nomade reste pertinente, mais nécessite d’être contextualisée pour prendre en compte toutes les catégories d’enfants : formation de maîtres spécialisés ; itinérance des enseignants avec les enfants ; création d’écoles dans les zones de transhumance où se séjournent pendant quelques mois plusieurs groupes de nomades…

23 Libération, 30 octobre et 6 novembre 1979.

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3. Catégories les plus vulnérables Les enquêteurs ont expliqué la notion de vulnérabilité à leurs interlocuteurs, en focalisant l’attention sur les difficultés à prendre personnellement en charge leurs besoins sanitaires, alimentaires, éducatifs, d’habitat ou de protection contre les abus. Les catégories de vulnérables avaient été pré-identifiées lors d’une enquête préliminaire ayant précédé la confection du questionnaire. Il restait à dégager les catégories les plus défavorisées à travers les combinaisons proposées aux répondants.

Catégorie Pourcentage

Femmes 0,22% Autres 0,22%

Femmes ; Jeunes ; Personnes de 3ème âge ; Enfants ; Handicapés 0,22%

Femmes; Jeunes 2,28% Femmes ; Jeunes ; Personnes de 3ème âge ; Handicapés 0,22%

Femmes; Jeunes; 2,61% Femmes ; Jeunes ; Personnes de 3ème âge 1,09%

Femmes ; Jeunes ; Personnes de 3ème âge ; Enfants 7,60%

Femmes ; Jeunes ; Personnes de 3ème âge ; Enfants ; Handicapés 9,23% Femmes ; Jeunes ; Personnes de 3ème âge ; Enfants ; Handicapés ; Autres 0,54%

Femmes ; Jeunes ; Personnes de 3ème âge ; Enfants ; Autre 0,11% Femmes ; Jeunes ; Personnes de 3ème âge ; Handicapés 0,11%

Femmes; Jeunes; Enfants 11,18% Femmes; Jeunes; Enfants; Handicapés 0,43%

Femmes ; Personnes de 3ème âge 0,11%

Femmes ; Personnes de 3ème âge ; Enfants 9,55% Femmes ; Personnes de 3ème âge ; Enfants ; Handicapés 1,41%

Femmes ; Personnes de 3ème âge ; Handicapés ; Autres 0,11% Femmes; Enfants 7,82%

Femmes; Enfants; Enfants 0,11%

Femmes; Enfants; Handicapés 0,11% Jeunes ; Personnes de 3ème âge 3,80%

Jeunes ; Personnes de 3ème âge ; Enfants 1,95% Jeunes ; Personnes de 3ème âge ; Enfants 0,22%

Jeunes; Enfants 12,05% Jeunes; Enfants; Handicapé 0,11%

Personnes de 3ème âge ; Enfants 0,11%

Personnes de 3ème âge ; Enfants ; Handicapé 1,85% Personnes de 3ème âge ; Enfants ; Handicapé 0,22%

Personnes de 3ème âge ; Autres 0,11% Enfants; Handicapés 0,11%

Enfants 6,08%

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Femmes 15,42%

Handicapés 0,11% Jeunes 2,06%

Personne de Personnes de 3ème âge 0,54% Total 100 %

Source : Enquêtes de terrain

La tendance dominante est que les femmes, les jeunes, les enfants, les personnes de 3ème âge et les personnes handicapées représentent plus de 90% des plus vulnérables des communautés d’accueil, déplacées et refugiés non enregistrés. Femmes et jeunes, pris de façon générique, sont les plus exposés aux discriminations basées sur le genre et la génération. Quelques entretiens suggèrent néanmoins que la société arabe choa serait plus ouverte à l’expression du point de vue de la femme par rapport aux autres communautés musulmanes de la zone d’étude. Les raisons évoquées sont : l’endogamie qui amène parfois à rapprocher les rapports conjugaux et familiaux ; le type d’habitat réduisant l’écart entre l’homme et la femme ; le nomadisme saisonnier dont les contraintes requièrent de la flexibilité ; la participation de la femme aux charges du ménage à travers le commerce du lait notamment. On ne peut cependant tirer des conclusions péremptoires, la discussion n’ayant pas été expressément structurée et comparative. Il y a là tout de même matière à élaborer davantage afin de déceler le potentiel qu’offrirait le statut de la femme dans la mise en œuvre des actions porteuses d’un meilleur accès des filles à l’éducation.

4. Scolarisation des enfants, jeunes et adultes • Structures d’éducation maternelle (année 2016/2017)

Localités

Nombre d’écoles Effectif des élèves Effectif des enseignants Public Privé Garçons Filles Maitres

titulaires Maitres des parents ou communaux

KOUSSERI

05 (EM) 03 (EMA) 01 (Bil.)

01 (catho) 1 (laïque)

448 398 31 03

Total 09 02 846 34 dont aucun homme Goulfey 01 / 78 144 03 Total 01 192 03 Makary 03 (EM)

01 (Bil.) 1 (laïque)

94 93 3 5

Total 5 187 7 Source : Synthèse des données de terrain ; IAEB de Kousseri, Goulfey et Makary

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En dehors de Kousseri qui dispose de plusieurs écoles maternelles de type public et confessionnel, les localités de Goulfey et Makary ne possèdent qu’au plus deux écoles maternelles. Les effectifs sont insignifiants, en particulier à Goulfey et à Makary où l’encadrement des enfants souffre encore de la désertion des enseignants qualifiés pour cause d’insécurité.

• Structures d’éducation primaire (année 2016/2017)

Localités

Nombre d’écoles Effectif des élèves Effectif des enseignants Enseignants absents au poste de travail

Public Privé Garçons Filles Maitres titulaires

Maitres de parents ou communaux

Kousseri

29 (EP) 09

(EPA) 01 (Bil.)

01 (catho) 01 (protes) 07 (islamiq) 1 (laïque)

16588 13187 168 123 45

Total 38 10 29875 353 dont 164 femmes Goulfey 19 (EP)

01 (Bil.) / 10486 5804 121 13

Total 20 16290 121 dont 27 femmes Makary 19 (EP)

01 (Bil.) 1 (laïque)

13472 8488 85 45 13

Total 20 21960 130 71 Source : Synthèse des données de terrain ; IAEB de Kousseri, Goulfey et Makary

Kousseri dispose de plusieurs écoles primaires publiques et privées (48). Le ratio enseignant/élève est très déséquilibré à Makary par rapport aux deux autres localités. Avec des effectifs de 29 875 élèves, Kousseri dispose de 353 enseignants, soit un ratio de 87 élèves/1 enseignant. Makary compte 130 enseignants pour un effectif de 21960 élèves, soit un ratio de 168/1. Plusieurs dizaines d’enseignants sont absents de leurs postes de travail. Si l’insécurité liée à la crise Boko Haram a justifié la désertion des postes de travail, il apparait que près de la moitié des enseignants absents le sont depuis 2013, donc avant la vague d’attaques de Boko Haram. La tendance à quitter les zones rurales et les zones reculées est observée de longue date. Selon les responsables de l’éducation de base et des enseignements secondaires interviewés, les femmes en particulier s’en vont après leur mariage ou suite à l’affectation de leur conjoint. D’autres enseignants au statut précaire (maîtres des parents non contractualisés) cherchent de meilleures opportunités ailleurs. Nombreux sont retournés à l’école, en l’occurrence à l’Université de Maroua (Ecole Normale Supérieure surtout). Les maîtres contractualisés qui sont obligés de rester à leur poste sont peu nombreux. Sans que cela puisse être vérifié, il ressort d’autres échanges que les « affectations négociées » seraient une des causes du départ des enseignants. L’on cite du reste les récentes mesures prises par le ministre des enseignements secondaires, visant à annuler les affectations irrégulières et à flécher les élèves professeurs sortis des écoles normales supérieures vers des établissements à besoins précis, généralement dans les zones rurales.

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• Scolarisation de la jeune fille Sur les 954 ménages enquêtés, 99 filles ont été recensées comme allant à l’école maternelle soit 10,4% des ménages. Dans ces ménages, ces filles se distribuent en 1, 2, ou 3 par ménage.

- Dans le primaire, 384 ménages ont des filles qui vont au primaire soit 40,3 % des ménages. Ces derniers ont entre 1 à 10 filles qui sont dans cette tranche. 56,3 % des ménages ont au moins 1 fille dans le primaire, 27,1 en ont 2, environ 3 % en ont de 5 à 6.

- Dans le secondaire, 116 ménages affirment avoir une fille au secondaire soit environ 12,2 %. Ces ménages ont entre 1 à 4 filles avec la majorité (80,2 %) ayant 1 à 2 filles soit respectivement 46,6 % et 33,6 %. Les ménages ayant 4 filles au secondaire sont assez rares car ne présentant que 0,9 % de l’ensemble.

- Dans le supérieur, 10 ménages affirment avoir des filles allant à l’Université, soit 1% de la population étudiée. Ces ménages ont au plus 2 filles dans ce cycle.

Lors des discussions avec les filles, il est apparu que les parents priorisent l’éducation des garçons, tandis que les tâches ménagères et le mariage précoce inhibent la fréquentation, voire la réussite scolaire des filles. Les parents quant à eux évoquent les coûts pour une progéniture nombreuse. La tendance est en fait à penser que la femme étant destinée à aller en mariage, il est plus avantageux pour la famille de s’occuper des garçons qui reprendront les responsabilités sociales du père de famille à son vieil âge ou à sa disparition.

• Centres d’alphabétisation fonctionnelle (année 2016/2017)

Localités Structures Nombre Effectif des élèves ou

des Alphabétisés Effectifs des

Alphabétiseurs Ratio

élèves/ enseignant Garçons Filles Total Hommes Femmes Total

Kousseri

CAF NSAKALO

1 00 12 12 01 / 01

30/1 FRANCO

NSALAKO 1 53 04 57 01 / 01

PARPAR 1 15 05 20 01 / 01 Total 3 68 21 89 03 / 03

Goulfey

ASLANAG 1 41 00 41 01 00 01

46/1 FEMAD 1 00 25 25 00 01 01 SENAPLAM 1 00 72 72 00 01 01 Total 3 41 97 138 01 02 03

Makary

MADA MAKARY

1 18 00 18 01 00 01

17/1

MADJO MAKARY

1 13 05 18 01 00 01

WELIO MAKARY

1 00 15 15 00 01 01

MADA VILLAGE

1 15 03 18 01 00 01

Total 4 46 23 69 03 01 4

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Source : Synthèse des données de terrain ; IAEB de Kousseri, Goulfey et Makary

Les CAF sont opérationnels avec des effectifs dominés par les jeunes garçons à Kousseri et Makary et par les jeunes filles à Goulfey. Le ratio élèves/alphabétiseurs est très faible faute d’enseignants qualifiés et de motivation. Pourtant, c’est un outil idoine d’apprentissage de la langue (français/anglais), d’une activité génératrice de revenus et, selon les cas, un espace de coaching social.

• Education coranique

287 ménages soit 30,1 % affirment envoyer leurs filles dans les écoles coraniques. Ces ménages envoient entre 1 à 16 filles. La plupart des ménages qui envoient leurs filles à l’école coranique (90,3 %) ont entre 1 à 4 filles qui y vont. Ce type d’éducation représente 31,9 % pour les garçons. Ici les familles ont de 1 à 15 enfants s’y rendant avec la majorité possédant 2 à 4 garçons, soit 76,4 % de ces ménages. Selon la Délégation départementale de l’éducation de base du Logone et Chari, 315 écoles coraniques encadrant 8299 élèves ont été recensées en 2015 dans les trois localités dont les 4/5 à Kousseri. Avec seulement 28 écoles répertoriées, Makary abritait la moitié des effectifs des élèves.

• Scolarisation des enfants déplacés au primaire (année 2016/2017) Localités Inscrits Ecoles d’accueil Types d’appuis observations Kousseri

135224

-EMA bilingue ; EMA I et II -EMA Garoua ; EM Ardebe I et II; EM Kawadji; EM Lacka -EM Ndjamena; EP Adjaine -EP Alaya; EP Arkis -EP Babou I et II; EP Djagare -EP Harazaya; EP Kousseri I A et B; EP Kousseri II A et B; EP Krouang; EP Madagascar; EP Mawack

-Assistance alimentaire et médicale - fournitures scolaires - établissement des actes de naissance

Ces écoles accueillent aussi des élèves tchadiens. L’arrondissement reçoit la moitié des élèves déplacés inscrits du Département.

Goulfey 182

E Ecoles publiques de : Doumgoura, Mougallam, Fadjé,

Pas d’assistance spécifique en faveur des enfants des déplacés

La plus grande part des enfants déplacés ne sont pas scolarisés

24 Une « Liste des élèves déplacés, année scolaire 2016-2017 » disponible à l’Inspection de Kousseri suggère que les chiffres sont aussi dynamiques que l’évolution croissante du nombre de PDIs. Ce sont 3349 élèves qui sont nommément cités, avec une différence d’environ 200 entre garçons et filles (décompte manuel).. Les données consolidées pour l’ensemble du Logone et Chari en octobre 2016, donnent un effectif global de 6570 inscrits pour 3884 garçons et 2686 filles. Le nombre total de déplacés à cette date dans le Logone et Chari était de 95 911 pour une population scolarisable au primaire d’environ 2/5 de ces effectifs au niveau régional. En l’absence de données précises, ces tendances donnent une idée de l’ampleur de la « non scolarisation » parmi les déplacés internes.

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Doumgouia, Sao, Goulfey1, Goulfey2, Goulfey Gana, Ngram

inscrits. Ils sont confondus aux déplacés en général

Makary

527

Ecoles publiques Groupe I, Groupe II, Bodo, Afadé

-Suivi psychosocial à travers activités ludiques - Actes de naissance -Appuis matériels : couverture, non food items

La plus grande part des enfants déplacés ne sont pas scolarisés

Source : Synthèse des données de terrain ; IAEB Kousseri, Goulfey, Makary

• Scolarisation des jeunes déplacés au secondaire (année 2016/2017)

Localités Etablissements d’accueil Inscrits Types d’assistance Structure d’appui

Kousseri

Lycée mixte de Kousseri 208

-58 sacs de maïs (50kg) -150 sacs de riz (50kg) -871.5 kg de sucre -2091.62 morceaux de savon -1743.01 sachets de tomate -208 pots de bouillie enrichie

PAM

Fournitures scolaires UNICEF

Lycée bilingue de Kousseri 188

-53 sacs de maïs (50kg) -135 sacs de riz (50kg) -787.7 kg de sucre -1890.5 morceaux de savon -1575.41 sachets de tomate -188 pots de bouillie enrichie

PAM

Fournitures scolaires UNICEF

Lycée de Amchidire 36

-10 sacs de maïs (50kg) -27 sacs de riz (50kg) -159.88 kg de sucre -362.01 morceaux de savon -301.67 sachets de tomate -36 pots de bouillie enrichie

PAM

Fournitures scolaires

Lycée de Lacka 26

-7 sacs de maïs (50kg) -19 sacs de riz (50kg) -108.93 kg de sucre -261.45 morceaux de savon -217.87 sachets de tomate -26 pots de bouillie enrichie

PAM

Fournitures scolaires UNICEF

Goulfey Lycée de Goulfey 12

-03 sacs de maïs (50kg) -09 sacs de riz (50kg) -50.27 kg de sucre -120.67 morceaux de savon

PAM

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-100.57 sachets de tomate -12 pots de bouillie enrichie Fournitures scolaires UNICEF

CETIC de Goulfey 4

-01 sac de maïs (50kg) -03 sacs de riz (50kg) -16.75 kg de sucre -40.22 morceaux de savon -33.51 sachets de tomate -04 pots de bouillie enrichie

PAM

Fournitures scolaires UNICEF

CES de Maltam 21

-06 sacs de maïs (50kg) -15 sacs de riz (50kg) -87.98 kg de sucre -211.17 morceaux de savon -175.97 sachets de tomate -12 pots de bouillie enrichie

PAM

Fournitures scolaires UNICEF

Makary Lycée de Makary 92

-26 sacs de maïs (50kg) -66 sacs de riz (50kg) -385.47 kg de sucre -925.13 morceaux de savon -770.94 sachets de tomate -92 pots de bouillie enrichie

PAM

Fournitures scolaires UNICEF Source : DDES, Kousseri

Les enfants déplacés inscrits dans les établissements scolaires d’accueil reçoivent une assistance alimentaire et des fournitures scolaires. L’assistance alimentaire n’est pas régulière et souffrirait d’un problème d’organisation. Encadré 1 : Ahmat Anass, jeune réfugié de Centrafrique abandonné à Kousseri Ahmat Anass âgé de quinze ans (15) ans, est un enfant réfugié centrafricain installé à Kousséri avec sa grande sœur depuis 2014. Il était en classe de cinquième lorsqu’il est arrivé à Kousseri. Il a réussi à se trouver un porte tout pour le transport des marchandises des usagers du pont Ngueli (entre Kousseri et N’Djamena). C’est avec l’argent gagné qu’il a réussi à payer ses études jusqu’en classe de troisième. Sa grande sœur aujourd’hui âgée de trente ans a décidé de s’installer à Douala pour faire le petit commerce, abandonnant Anass dans une famille de réfugiés venus de Bangui. C’est l’une des raisons qui l’ont poussé à abandonner ses études en classe de troisième. Le père d’Anass, Kanuri originaire du Tchad, est un ancien propriétaire de mines artisanales d’extraction de diamant. Il a deux épouses et dix-huit enfants. Pendant les émeutes de Bangui, il a tout perdu : ses boutiques, ses maisons et autres avoirs ont été calcinés. Il a vu mourir brulés vif cinq membres de sa famille. C’est dans le sauve-qui-peut qu’Anass et sa sœur ont suivi la foule en exode, à l’insu des parents. Anass a réussi à renouer des liens avec son père en 2016. Ce dernier l’a instruit d’abandonner ses activités au pont Ngueli qui, selon lui, pourrait le transformer en délinquant et bandit de grand chemin. Il doit se

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consacrer à l’école coranique. Or, cesser ses activités du pont voudrait dire cesser de financer ses études. Anass ne va plus à l’école et n’a pas pu déposer les dossiers de BEPC pour l’année académique 2016-2017. Anass est aujourd’hui abandonné à lui-même : il doit choisir entre obéir à son père et arrêter ses études ou désobéir et se voir rejeter par la communauté qui lui offre un toit et quelques repas par jour sous le regard lointain mais présent du père qui vivrait avec ses deux femmes et ses seize enfants à la mosquée centrale de Bangui depuis 2014.

• Accès aux services sociaux de base (année 2016/2017)

Localités % d’accès à l’Education

% d’accès aux soins de santé primaire

% d’accès à l’eau potable domestique

% d’appartenance à une org. de prod

Kousseri 74,83% 67,62% 77,58% 9,98% Goulfey

Makary Source : Synthèse des données de terrain

Paradoxalement, l’on note une forte tendance des populations à exprimer leur satisfaction par rapport à l’accès aux services sociaux de base. Une tendance qu’il faut relativiser pour les cas de l’accès à la santé et à l’éducation compte tenu du fait que les enquêtés n’ont pas intégré les

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critères de qualité dans les services dont ils bénéficient. L’accès ou la satisfaction de l’enquêté étant ici conditionné par la proximité et donc l’accessibilité physique de la ressource ou du service. La proximité d’un dispensaire ou d’une école est assimilée à tort à un service de qualité. Pourtant, l’insuffisance des médicaments dans les dispensaires, l’insuffisance du personnel et du plateau technique ont été relevés lors des entretiens. Pour l’accès à l’eau potable, on peut bien observer que les localités de Kousseri, Goulfey et Makary sont bien desservis par de nombreux forages. Il a été relevé que peu d’enquêtés appartiennent à une organisation de production (09.98%)

• Enfants inscrits à l’école ne disposant pas d’actes de naissance (année 2016/2017)

Localités Effectifs total (maternel

et primaire) Nombre d’enfants

sans actes Mesures prises

Kousseri 29875

3.106 enfants hôtes 460 enfants IDPs

-Dans son programme de protection de l’enfant en situation d’urgence, ALDEPA est en cours d’établissement des actes de naissance à environ 2500 enfants issus des communautés hôtes et IDPs -Soutien collaboratif de la commune, du parquet et du District de Santé de Kousseri à cette cause

Goulfey 16.482 5.448 Makary

22.147 16.960

Source : Synthèse des données de terrain ; IAEB Kousseri, Goulfey et Makary

Le manque d’actes de naissance des enfants est aussi préoccupant chez les IDPs que chez les populations hôtes. A Makary, ce sont environ 70% des enfants inscrits à l’école aux niveaux maternel et primaire qui n’en disposent pas. Les principales raisons évoquées pour l’expliquer sont : accouchement à domicile et naissances non déclarées ; absence de mariage civil et malaise des pères de ne pas voir leur nom inscrit sur l’acte de naissance ; ignorance de l’importance de l’acte du fait d’une faible sensibilisation ; faible sensibilisation sur les droits des enfants ; illettrisme des mères ; pauvreté pour supporter les coûts ; faible activité de recensement et d’accompagnement par les mairies et les comités de développement.

e. Besoins prioritaires, opportunités et contraintes locales d’accès 1. Niveau de satisfaction des enquêtés

Satisfaction des besoins essentiels Pourcentage Oui 3,62% Non 96,38% Total 100

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On constate qu’il y a bien une différence entre la disponibilité des services et leur rendement. Le degré d’insatisfaction est manifestement partagé par tous, indépendamment de ce que chacun reçoit ou ne reçoit pas de l’Etat et des partenaires.

2. Analyse des besoins et des gaps 2.1 Kousseri

Localités Moyens de subsistance

Conditions d’éducation

Protection de l’enfant/jeune fille

Gaps

Kousseri 1. Populations hôtes - le commerce (33,44%), l’agriculture, élevage et pêche (26.5%), les services (23%) constituent les moyens de subsistance des populations d’accueil. -Forte pression sur les ressources disponibles (terres agricoles, pâturages, espaces marchands -Pression sur les services de base (éducation, soins primaires, infrastructures marchandes) -Une très forte portion de la population active n’appartient à aucune organisation de producteurs -Expression de frustration vis-à-vis des PDIss assistés ce qui constitue une menace à la cohabitation pacifique 2. PDIs -Espaces cultivables et marchands rares -Sous-traitance et marchandage des terres et espaces

1. Populations hôtes -Déclin de la qualité de l’éducation à cause d’une capacité d’accueil déficitaire -Près de la moitié des enfants ne possède pas d’acte de naissance pour poursuivre sereinement leurs études -Structures de formation et d’insertion professionnelle insuffisantes et très peu connues -la majorité des jeunes reste très peu qualifiée et surtout éduquée à l’école coranique 2. PDIs -Enfants traumatisés par les conditions d’exode avec plusieurs déscolarisés -Les enfants relocalisés dans des salles de classe surpeuplées

1. Populations hôtes -Enfants exposés aux risques de viol et de violence -Enfants exposés aux tensions inter-communautaires sporadiques -Exploitation des enfants et des jeunes à des fins économiques 2. PDIs -Insertion difficile des enfants dans les écoles d’accueil -La majorité des enfants ne dispose pas d’actes de naissance -Enfants exposés aux violences et tensions entre communautés -Jeunes filles exposées aux mariages précoces et aux cas de viol -Multiplication des enfants orphelins, non accompagnés -Enfants utilisés par les parents dans les activités de production. Des relents de mendicité

1. Moyens de subsistance -96.38% de répondants ne sont pas satisfaits de leurs conditions de vie - Seuls 16% de la population totale des PDIs ont accès aux moyens de production dans la communauté hôte. -Seulement 32% des ménages hôtes accèdent de manière satisfaisante aux moyens de subsistances -91.02% des foyers enquêtés n’appartiennent à aucune organisation de producteurs - seul 71% des populations d’accueil ont accès aux soins de santé. -72% des ménages ont accès à l’eau potable. Toutefois, on observe des conditions d’insalubrité découlant des mauvaises pratiques d’usage des toilettes dans les trois arrondissements. - seul 67%, des PDIs ont accès à l’eau - 90% d’enquêtés n’appartiennent à aucune organisation de producteurs 2. Education

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marchands aux déplacés -Main d’œuvre des déplacés disponible, mais exploitée et parfois abusée -Reconversion professionnelle forcée

-Les élèves déplacés bénéficient de l’assistance alimentaire et en fournitures scolaires

- l’école n’est pas disponible et accessible à tous. seul 83% y ont accès - seuls 68% des IDPs ont accès aux soins de santé en termes de disponibilité. Les variables qualité et coût d’accès à ces services n’ont pas été mesurés. -Les écoles maternelles et primaires ont des effectifs d’enseignants insuffisants. -seul 61% des ménages IDPs ont accès aux infrastructures scolaires -Les deux CMPJ de Kousseri sont non fonctionnels -Centres de formation et structures d’insertion professionnelle non visibles - besoins détaillés en infrastructures, équipements, enseignants et en prise en charge des maîtres communaux : salles de classe, infirmerie, latrines, clôture, électricité, etc. (voir annexe) 3. Protection des enfants Besoins en actes de naissance : -3.106 enfants hôtes 460 enfants IDPs

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2.2 Makary Localités Moyens de subsistance Conditions

d’éducation Protection de l’enfant/jeune fille

Gaps

Makary

1. Populations hôtes - agriculture : culture de l’oignon, du riz, du maïs, du haricot… ; difficultés d’accès à l’eau limitent le rendement, d’où la suggestion des populations de construire un barrage ou un canal au niveau de Maltam pour drainer l’eau de l’El Beid qui se perd en saison pluvieuse ; - élevage : Opportun de développer la transformation laitière, la production du foin et l’embouche bovine ; - pêche : un poste de contrôle de pêche à Makary qui couvre la zone du Lac (Balgaram, Ngouma et Chahok) pour réguler le secteur ; mais insécurité dans les zones poissonneuses. Développer pisciculture dans les mares existantes et artificielles à créer. - difficile reconversion des commerçants habitués aux transactions avec Nigeria et usage du Naira avec tendance au désengagement des jeunes vis-à-vis de ce secteur périlleux et devenu peu rentable ; - commerce : Petite économie informelle en éclosion : vente à la sauvette ; vente de petits produits de consommation ; transport de marchandises avec

1. Populations hôtes - Difficiles conditions : insuffisance infrastructures, équipements et enseignants : ratio élèves/enseignant très élevé : 282/1 ; - précarité de la formation : difficultés de paiement des frais exigibles ; insuffisance de matériels didactiques ; pression des élèves déplacés, l’arrondissement recevant la majorité des PDI du département ; - compétition entre école coranique et école formelle ; - école coranique non qualifiante, maîtres démunis, sans formation pédagogique et sans outils didactiques, enseignements dispensés sous des hangars ou des arbres - préférence pour l’éducation des garçons ; - déscolarisation précoce des filles faute de sensibilisation

1. Populations hôtes- Nombreux enfants sans actes de naissance ; mais rivalités politiques inhibent l’engagement des élites à accompagner la délivrance systématique des actes indépendamment des appartenances ; - Sensibilisation contre l’errance et l’exposition des enfants aux risques d’enrôlement par Boko Haram ; cependant message peu diffusé auprès des jeunes filles faute d’implication des femmes enseignantes notamment dans les écoles coraniques ;

- Inscription des enfants dans des écoles coraniques reconnues, mais sans apprentissage de métiers ;

- Présence des services déconcentrés des ministères en charge de la

1. Moyens de subsistance - la plupart des retournés qui étaient commerçants au Nigeria sont en disruption économique et les plus jeunes éprouvent des difficultés d’insertion à cause des difficultés d’expression ; - Des membres des communautés hôtes se font passer pour PDIs, ce qui donne l’impression aux PDIs que leur ration est réduite ; - comme structure formelle de formation, les jeunes ne disposent que du Centre de formation en agriculture - très peu des personnes enquêtées appartiennent à une organisation de producteurs fonctionnelle - 06 Centres Zootechniques et Vétérinaires (Makary, Woulky, Afadé, Maltam, Amchoulga, Kokio)

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charrette, vente de produits proscrits (tramol, carburant frelaté, etc.) ; quelques activités d’auto emploi (agriculture, forge, pêche, maçonnerie, charpenterie,

- Contraintes : peu d’opportunités d’emploi pour les populations de manière générale et les jeunes de manière spécifique.

2. PDIs

- Difficile accès à la terre utile ;

- Saturation du secteur commercial ;

- Tendance au départ des jeunes vers Kousseri et N’Djamena

- L’offre de formation en métiers non formels quasi-nulle, l’environnement économique morose inhibant les emplois dans le secteur du bâtiment notamment (menuisier, charpentier, maçon…).

- Habitat précaire (camp de déplacés).

efficiente des parents et de soutien à la scolarisation des filles (formation qualifiante, fournitures scolaires, frais de scolarité) ; - faible taux d’accès au secondaire pour raisons de pauvreté, de défaut d’actes de naissance, d’attractivité du commerce ; - arrondissement le plus touché, après Fotokol, par la destruction et l’abandon des écoles. 2. PDIs Comme à Kousséri : - Enfants traumatisés par les conditions d’exode avec plusieurs déscolarisés. Les focus groups et l’observation montrent que les déscolarisés sont relativement plus nombreux ici compte tenu des effectifs des déplacés et de la précarité des conditions d’apprentissage ; -Les enfants relocalisés dans des salles de classe surpeuplées

jeunesse, des affaires sociales, de la promotion de la femme et de la famille, mais faible activité du fait de l’insuffisance de ressources, de structures d’encadrement et de personnel

2. PDIs - besoins en rétablissement de documents précieux perdus ou abandonnés dans la fuite (actes de naissance, carnets médicaux, diplômes) ; - besoins en actes de naissance pour la plupart ; - Nécessité de prévenir contre l’automédication (tradi-praticiens, médicaments de la rue, incantations et amulettes…) pour mieux gérer les maladies infantiles ; - détresse psychosociale due à la perte de parents ; conditions d’encadrement difficiles par des familles d’accueil qui limitent leur aide à la nutrition et à l’hébergement ;

encadrent l’élevage, cependant mis en péril par l’insécurité qui impacte le secteur élevage (vol, mévente, baisse des prix, limites d’accès aux pâturages). 2. Education - Population scolarisable : 46 500 et dont 21 960 inscrits (47,22%) dans 71 écoles primaires publiques et privées. - 04 centres d’alphabétisations fonctionnelles (seulement 74 apprenants) ; - 05 écoles maternelles (187 élèves) dénotant un très faible taux d’inscription à ce cycle ; - 06 écoles des parents prises en charge par des communautés frappées par la crise ; des enseignants démotivés pour salaires très bas et irréguliers ; - besoins détaillés en infrastructures, équipements, enseignants et en prise en charge des maîtres communaux : salles

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-Les élèves déplacés bénéficient de l’assistance alimentaire et en fournitures scolaires

- nombreux enfants guenilleux, sales, nu-pieds rencontrés suggérant d’inclure la distribution de vêtements, des chaussures et des kits d’hygiène corporelle dans l’aide aux enfants PDIs et leur sensibilisation conséquente dans les activités d’éveil.

de classe, infirmerie, latrines, clôture, électricité, etc. (voir annexe) 3. Protection des enfants -16.960 enfants sans actes de naissance - errance d’enfants déplacés dans les rues où ils offrent des prestations de

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- Mêmes constats

que Kousseri par rapport à l’accès à la terre et notamment à cause du nombre élevé de PDI ;

- Faibles opportunités d’emplois par rapport à Kousseri ;

- Commerce désorganisé et donc peu rentable.

service comme plongeurs dans des restaurants, le petit commerce, les commissions diverses, etc. - plaintes des populations hôtes au sujet de la croissance de la délinquance juvénile et la baisse du contrôle parental. - tendance à encourager le mariage précoce et/ou non consenti parmi les parents PDIs pour réduire les charges d’une progéniture nombreuse. - absence d’un centre social et d’un centre mulfonctionnel de promotion des jeunes ; - exposition à la délinquance du fait du désœuvrement et de la rareté de loisirs sains

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2.3 Goulfey Localités Moyens de

subsistance Conditions d’éducation

Protection de l’enfant/jeune fille

Gaps

Goulfey 1. Populations hôtes -Populations encore fragilisées par les inondations -Forte présence des déplacés dans la localité -En dehors de l’eau potable domestique, l’accès aux services de base n’est pas toujours garanti -Forte pression sur les ressources disponibles (terres agricoles, pâturages, espaces marchands -Pression sur les services de base (éducation, soins primaires, infrastructures marchandes) -Une très forte portion de l population active n’appartient à aucune organisation de producteurs -Expression de frustration vis-à-vis des PDIs assistés 2. PDIs -Habitat précaire (camp de déplacés) -Espaces cultivables et marchands rares

1. Populations hôtes -Abandon de certaines écoles primaires -Désertion des enseignants en poste dans les localités -Pression sur certaines écoles maternelles et primaires -Déclin de la qualité de l’éducation à cause d’une capacité d’accueil déficitaire -Près de la moitié des enfants ne possède pas d’acte de naissance -Structures de formation et d’insertion professionnelle inexistants -la majorité des jeunes reste très peu qualifiée et sont éduqués à l’école coranique - Baisse de la fréquentation scolaire du fait de l’insécurité -Déperdition scolaire des enfants hôtes

1. Populations hôtes -Enfants exposés aux risques de radicalisation -Jeunes garçons et filles affectés par l’insécurité -Augmentation des veuves qui restent seules à encadrer les enfants -Les structures étatiques de protection des enfants et des vulnérables sont peu actives 2. PDIs -Difficile adaptation des enfants dans les écoles d’accueil -La majorité des enfants ne dispose pas d’actes de naissance -Enfants exposés aux violences et tensions entre communautés -Jeunes filles exposées aux mariages précoces et aux cas de viol -Multiplication des enfants orphelins, non accompagnés

Besoins en actes de naissance : -5.448 enfants sans actes (Goulfey) -la plupart des peu enquêtés n’appartiennent à aucune organisation de producteurs -Ratio élèves/enseignant : 181/1 ; - besoins détaillés en infrastructures, équipements, enseignants et en prise en charge des maîtres communaux : salles de classe, infirmerie, latrines, clôture, électricité, etc. (voir annexe)

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-Sous-traitance et marchandage des terres et espaces marchands aux déplacés -Main d’œuvre des déplacés disponible, mais exploitée et parfois abusée -Reconversion professionnelle forcée -Récurrence des tensions entre agriculteurs et éleveurs

-Enfants utilisées par les parents à l’exploitation et à la mendicité -Enfants exposés aux risques de radicalisation

f. Opportunités d’emploi/auto-emploi pour hommes, femmes, jeunes

Structures de formation et d’insertion professionnelle

Catégories Corps de métiers

Structures de formation professionnelle

Opportunités d’emploi

Structures d’insertion

professionnelle

Hommes et femmes

La localité regorge

environ 70 corps de

métiers (PDC)

-CPFF -Centre d’Education et Actions Communautaires

Aménagement des espaces rizicoles

-PIAASI -PDRI/LC -FNE -PAJER-U -ACEFA -PADAV -PADPR -PACA

Jeunes (24-35 ans)

-SAR/SM - Centre International pour la formation en Action Humanitaire -Centre de Formation Professionnelle de Kousseri en abrégé CFPK) -Salam Institute -CMPJ (non fonctionnels) -Lycée technique -CETIC de Goulfey -Centre de formation en agriculture de Makary

-Début de mise en œuvre du Plan Triennal Jeunes -Bitumage de l’axe Maroua-Kousseri -Extension du programme HIMO dans le Logone et Chari

Adolescents (18-24 ans)

Enfants (moins de 18

ans)

Source : Commune de Kousseri ; Synthèse des données de terrain

Il ressort des données recueillies que 5,13% affirment avoir un emploi décent, contre 94,87% qui espèrent mieux, attendent leur premier emploi, une formation ou un financement leur permettant

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de démarrer une activité. 4,6 % des ménages estiment avoir des jeunes formés sans emploi soit 44 individus. Les actions d’encadrement des populations pour la production économique ont permis de recenser :

- à Kousseri : 102 GICs dont un réseau de 42 associations et de GICs des femmes appelé « AVODACK » sur les 82 enregistrés à la DDPROFF ;

- à Goulfey : 200 GICs recensés dans l’arrondissement ; 10 Unions de GICs et 20 coopératives simplifiées.

g. Les capacités de réponses locales et nationales

Localités Secteurs d’action Dispositifs de réponse locale Dispositifs de

réponse nationale

Kousseri Goulfey Makary

Education et formation

-Facilitation du transfert des élèves déplacés vers les écoles en sécurité (DDMINEDUB, DDMINESEC) -Dotation en matériels didactiques des écoles d’accueil des déplacés (DDMIEDUB, DDMINESEC) -Renforcement du Centre de Promotion de la Femme et de la Famille (DDMINPROFF) - Création prévue de 08 Equipes Mobiles d’Animation Populaire Urbaine et Rurales (EMAPUR) dans l’arrondissement de Makary (Makary, Woulky, Afadé, Bodo, Amchoulga, Maltam, Mada, Ngardougoum) : relai entre les populations et l’administration ; causeries éducatives, éducation civique et intégration nationale, insertion socioéconomique et professionnelle, éducation populaire et vie associative

-Programme spécial de construction de 45 salles de classe dans les zones sous crise

Protection et assistance

-Facilitation de l’enregistrement des naissances des hôtes et déplacés (Commune, Hôpital et centres de santé) -Audiences foraines pour actes de naissance (Parquet de Kousseri) -13 réunions organisées pour lutter contre les Violences Basées sur le Genre avec les chefs religieux, élus locaux, organisations de la société civile, partenaires et leaders de femmes (DDMINPROFF à Kousseri et Goulfey) -Assistance aux personnes vulnérables (DDMINAS) -L’élite locale (dons divers et assistance scolaire, médicale et santaire…)

-Dons divers issus de la solidarité nationale (MINATD)

Cohésion sociale et relèvement

précoce

-Sensibilisation des leaders religieux, traditionnels et politiques (Préfecture)

-Plan triennal d’urgence (MINEPAT)

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- PDRI (MINEPAT)

Sécurisation communautaire

Mise en place des comités de vigilance (Préfecture, Sous-préfecture, chefs traditionnels)

Appuis réguliers du Chef de l’Etat en matériels de travail et engins de mobilité

Source : Synthèse des données de terrain

Quatre secteurs d’intervention occupent l’agenda des réponses locales et nationales. Il est mal aisé d’évaluer ces actions faute de résultats probants. Les acteurs des réponses locales sont constitués principalement des services déconcentrés de l’Etat territorialement compétents. Il y est tout autant difficile de percevoir la cohérence entre les actions locales et celles nationales. Si dans l’ensemble, près de 95% de répondants estiment que les jeunes ne sont pas décemment occupés, il reste que les possibilités d’insertion varient d’une localité à l’autre. En matière de protection, on a enregistré dans la localité de Kousseri pour l’année 2016, 39 cas de viols, 07 cas de mariages forcés, 53 enfants non accompagnés, 08 cas de mutilations génitales féminines, 15 cas de répudiations et 21 cas de conflits conjugaux.

h. Les acteurs et institutions opérant ou offrant des services dans la zone

Localités Acteurs et institutions

Domaines d’action Cibles spécifiques

Kousseri Goulfey Makary

INTERSOS

-Documentation, écoute et suivi psychosocial des déplacés -Inscription des enfants déplacés au concours d’entrée en 6ème -L’apaisement post traumatique des IDPs

PDIs

ALDEPA Enregistrement et établissement des actes de naissance aux enfants hôtes et déplacés

Enfants hôtes et PDIs (2.500 enfants suivis en ce moment)

PAM Assistance alimentaire Communautés de déplacés et

PDIs IEDA Assistance alimentaire aux déplacés Communautés PDIs

AVLF Assistance aux femmes victimes de violences

Femmes et jeunes filles hôtes et PDIs

ADES Assistance alimentaire aux déplacés Communautés PDIs PLAN

International Assistance alimentaire sous forme de cash transfer

Communautés PDIs (10.000)

MSF Assistance médicale Populations hôtes et PDIs

UNICEF Assistance multiforme à l’enfant (santé, nutrition, éducation, protection)

Enfants PDIs et hôtes

PNUD, UNESCO

Cohésion sociale, relèvement précoce, éducation à la paix

Actions ponctuelles d’éducation, de sensibilisation et de formation

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auprès des populations d’accueil et PDIs

UNFPA Encadrement des populations, en particulier des jeunes

Populations hôtes et PDIs

AHA Assistance médicale et sanitaire Enfants PDIs, hôtes et

vulnérables de 0 à 59 mois ALIMA Assistance médicale et sanitaire PDIs ACEEN Education environnementale Populations hôtes et déplacées

CROIX ROUGE

Premiers secours mors des inondations, catastrophes et crises sécuritaires, campagnes de vaccination, hygiène et salubrité des

Populations hôtes et PDIs

FAO

Appui au relèvement de l’élevage par un don de petits ruminants

350 ménages PDIs

Source : Synthèse des données de terrain

La plupart des organisations œuvrant dans les trois localités sont focalisées sur les déplacés internes. Cette concentration suscite les récriminations des populations hôtes qui estiment être aussi dans les mêmes besoins que les déplacés. Lors des entretiens avec certaines autorités, la question du trafic d’identité a été soulevée, à savoir des membres des communautés hôtes se faisant passer pour des déplacés afin d’obtenir de l’assistance. Aucune organisation n’est encore engagée dans l’accompagnement des PDIs à retourner dans leurs localités d’origine relativement sécurisées. A en croire quelques sources locales, plusieurs autres organisations sont en train de commencer des activités ou de les planifier. Les populations hôtes craignent que ces organisations se concentrent également sur les déplacés internes, souhaitant du reste que l’aide aux PDIs hébergés dans les familles soit accrue pour accompagner également leurs hôtes.

7- Conclusion L’évaluation rapide des besoins humanitaires à Goulfey, Kousseri et Makary a permis de dégager des indicateurs sociaux et socioéconomiques ui rendent comptent de la vulnérabilité de toutes les catégories de populations affectées par la crise sécuritaire due à Boko Haram. Entre conditions d’installation, accès aux services sociaux de base, moyens de subsistance et protection, la différence entre les besoins et les réponses sont importantes. En effet, les attaques de Boko Haram ont causé l’exode et l’installation de près de cent mille déplacés internes dans le département du Logone et Chari. Entre PDIs, réfugiés non enregistrés et retournés, ce sont plus de 120 000 déplacés qui y sont recensés. Les déplacés sont arrivés démunis. Leurs activités de production, essentiellement basées sur l’agriculture, le commerce et l’élevage, sont considérablement perturbées par l’insécurité et les restrictions à la circulation interurbaine. Dans les lieux d’accueil, ils sont pour la plupart recueillis dans des familles, mais nombreux sont ceux qui vivent dans des pseudo-camps sous des abris précaires ou dans des maisons de location en toute promiscuité. Déjà soumis à des conditions de vie précaires, les populations hôtes connaissent le même ralentissement des activités productives, hébergent les déplacés avec qui elles ont partagé les repas jusqu’à ce que l’assistance humanitaire vienne au secours des

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déplacés. Hôtes et déplacés pratiquent l’agriculture, l’élevage et le petit commerce pour soutenir leurs charges quotidiennes, mais les déplacés font face aux difficultés d’accès à la terre tandis que tous, peinent à assurer une éducation et une formation adéquates aux enfants ;

L’éducation et la formation étaient déjà à un niveau critique dans ce Département parmi les plus sous-scolarisés du Cameroun, où le taux d’abandon au secondaire était déjà élevé, où la scolarisation des filles bute contre les pesanteurs culturelles et l’indigence des parents, où il n’y a que quelques centres d’alphabétisation fonctionnelle au demeurant peu fréquentés. Si l’offre d’éducation primaire et secondaire est appréciable, il reste que les facteurs inhibiteurs sont encore nombreux. La crise sécuritaire actuelle est un facteur de déscolarisation. L’accès aux soins de santé est globalement apprécié des populations, mais la qualité de l’ensemble des services sociaux de base est décriée. C’est pourquoi d’ailleurs la nutrition, l’éducation et la santé émergent comme étant les principaux besoins des déplacés et hôtes. Les femmes, les jeunes et les handicapés sont les plus vulnérables. La protection reste cependant superficielle au plan local. C’est avec la crise actuelle que les enfants allant à l’école surtout, commencent à obtenir des actes de naissance dans le cadre des actions menées par les partenaires. Des cas de VBG et d’enfants non accompagnés notamment ont été recensés.

8- Recommandations Education, formation et protection A PIC :

- S’impliquer dans la délivrance systématique des actes de naissance à tous les enfants déplacés et hôtes, notamment en aidant à définir et financer une stratégie communale d’établissement des actes de naissance intégrant les différents acteurs (Centres secondaires d’Etat civil, Tribunal, Hôpitaux et centres de santé, chefs des villages ou quartiers, chefs des communautés déplacés) au bénéfice de tous les enfants ne disposant pas d’acte de naissance ; recenser les naissances avec l’appui des chefs de communautés pour les cas d’accouchement à domicile ;

- Développer un programme d’appui aux enfants délaissés intégrant la création des cours de rattrapage ou du soir, l’encadrement psychosocial post-traumatique, la réintégration familiale et sociale, la formation de base et l’apprentissage des métiers ;

- Faire un plaidoyer au niveau régional afin que les programmes étatiques d’insertion socioprofessionnelle des jeunes privilégient la cible sous crise, en particulier les jeunes déplacés, retournés, hôtes ainsi que d’autres jeunes ne remplissant pas les critères de sélection ;

- Organiser des campagnes de sensibilisation sur la protection de la jeune fille en utilisant les radios communautaires, les leaders et autres communicateurs religieux, les associations féminines, les affiches, les cartes mémoires préenregistrées, les sms, les réseaux sociaux ;

A l’Etat et aux acteurs humanitaires

- Mettre en place un plan de formation intégrée des jeunes en renforçant les capacités (formation et outils de travail) des services techniques locaux (délégations départementales, délégations d’arrondissement (MINPROFF, MINJEC, MINAS,

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MINEDUB, MINESEC), structures d’encadrement socioéducatives de proximité à l’élaboration des stratégies d’identification précoce et d’alerte des cas de violence ou de traite sur les enfants et les femmes ; en réhabilitant les structures de formation des jeunes les moins scolarisés : CMPJ de Kousseri, CPFF, SAR SM ; en transformant les SAR/SM en centres de métiers ; en améliorant les capacités d’encadrement et les équipements des centres d’alphabétisation fonctionnelle.

Moyens de subsistance

A l’Etat et aux acteurs humanitaires

- Renforcer la capacité d’absorption et d’employabilité des filières locales de production afin d’insérer les jeunes (pêche, élevage, artisanat, stylisme & mode, culture de l’oignon, production fruitière, petite transformation des produits dérivés de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche…) ;

- Aider à la petite mécanisation de l’agriculture et à la mise en place des unités de transformation du lait ;

Santé

A l’Etat et aux acteurs humanitaires

- Améliorer le plateau technique des structures sanitaires, et approvisionner les dispensaires et centres de santé en médicaments essentiels et le personnel soignant pour améliorer ses capacités de réponse face aux urgences et ses aptitudes à soutenir la résilience sanitaire des populations encore portées vers l’automédication et les traitements traditionnels;

- Organiser des campagnes de prévention et de dépistage des maladies courantes dans les domiciles de toutes les populations vulnérables et dans les camps de déplacés.