HERCULE VALJEAN

Qui est mort ?

BeQ

Hercule Valjean

Les aventures policièresd’Albert Brien # 095

Qui est mort ?

détective national des Canadiens-français

La Bibliothèque électronique du QuébecCollection Littérature québécoise

Volume 651 : version 1.0

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Qui est mort ?

Collection Albert Briengracieuseté de Jean Layette

http ://www.editions-police-journal.besaba.com/

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I

Toto

Toto, le jeune fils d’Albert et de Rosette Brien fit une triomphale entrée dans la pièce où se tenaient Rosette et son père, et dit :

– Papa, j’ai trouvé la solution comme toi.– Explique-toi, détective Toto, dit Albert en

souriant.L’enfant prit une expression grave qui était la

seconde édition de celle que prenait son père quand il réfléchissait, édition rajeunie par exemple.

– Avant-hier, vers 9 h. a.m., dit le petit, une balle de baseball défonça la vitre la plus basse de la fenêtre du salon. Vous m’avez alors dit : Fiston, vas, fais une enquête et ramène-moi le vandale... J’avais localisé les jeunes propriétaires

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de deux balles, quand le désastre se produisit.– En effet, dit Albert en souriant, une seconde

vitre venait de voler en éclats. Je te reprochai ton retard à trouver la solution.

Toto reprit :– Alors je me plantai et je marquai

secrètement toutes les balles de mes amis de leurs initiales à coups d’épingle dans le cuir.

– Et puis... ?– Bien, tu sais, notre voisin, le gros Théo

Belœil...– Oui...– Eh bien, il vient de se faire casser une vitre.

Je pénétrai en éclair dans sa maison. Il avait la balle dans la main. Je la lui arrachai et regardai les coups d’épingle qui allaient me révéler le nom du coupable. Je dis à l’oncle Théo : « Le coupable, je le connais ; c’est A. L. »

Brien éclata de rire :– Je vois d’ici l’air ahuri de Belœil, mais

continue, fiston.

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– Belœil me demanda ce qu’A.L. représentait. Je lui dis que c’était Antoine Labrie, le vandale. Il s’écria : « J’en avais assez de me faire damer le pion par le père sans que le fils se mette de la partie. »

Rosette dit :– Toto, sois sage aujourd’hui, car je te laisse

seul à la maison.– Pourquoi ?Albert répondit :– Comme ma secrétaire est en vacances, ta

mère la remplace.Rosette consulta sa montre et reprocha :– Voyons, mon mari, dit-elle, dépêche-toi ;

nous allons arriver en retard à notre bureau.– Je n’ai plus que ma cravate et mon gilet à

mettre.Avant de partir, la petite mère Brien dit :– Toto ?– Oui, maman...

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– Il y a une tarte aux fraises dans la boîte à pain. Tâche, mon petit, de manger ta part de la croûte et rien que ta part des fraises.

– O. K., maman.À son papa, Toto souhaita en guise d’adieu :– Je te souhaite un beau meurtre pour

aujourd’hui, le paternel.– Merci, fiston, mais les meurtres, sache-le, se

mesurent en termes de laideur et non en norme de beauté.

Quand les deux époux arrivèrent au bureau, le téléphone numéro un sonna sur le pupitre d’Albert.

– Allô.C’était sa téléphoniste.– M. Brien, un homme désire s’entretenir avec

vous.– Son nom ?– Ernest Carmin.Rosette murmura alors dans

l’intercommunication :

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– Albert ?– Oui, chaste épouse...– L’homme est un beau garçon de 35 ou 40

ans, soigneusement mis comme un homme d’affaires prospère... Je te conseille de prendre cette cause ; car je pressens dans cette affaire un autre manteau de fourrure pour moi.

– Espèce de gold-digger, va.Il dit :– Faites entrer.Ernest Carmin était tout ce que Rosette venait

de dire.Et plus encore.Sa physionomie décelait la dureté ; mais cette

dureté d’affaires étaient amoindrie et corrigée par un air de justice inné.

– Asseyez-vous, M. Carmin ; quelle cause désirez-vous m’offrir ?

– Je veux retracer un homme du nom de Joseph Mattelotte.

– Affaire de routine probablement... ?

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Carmin hocha négativement la tête.– J’ai bien peur, dit-il, que ce ne soit beaucoup

plus difficile que cela.– Ah...– Oui.– Expliquez-vous, voulez-vous...– Voici, je vais vous faire chronologiquement

le récit de l’aventure à laquelle je suis mêlé.« Cela remonte au plus creux de la crise.« En 1935.« J’avais perdu par la force des circonstances

une bonne position de comptable.« En quelques mois, j’épuisai mes réserves

monétaires.« J’avais un petit appartement. Le propriétaire

me mit dehors parce que je ne pouvais plus payer mon loyer.

« Je me mis alors à déménager de chambre en chambre pour finalement aboutir dans une lamentable lézarde du quartier interlope.

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« Puis je dus accepter la suprême ignominie du secours direct qui me permettait de vivre à demi comme on devait faire quelques années plus tard dans les camps allemands de concentration.

« J’avais adopté le carré Viger comme lieu où passer mes jours dans le désœuvrement.

« Un jour, je vis une automobile s’arrêter rue Craig, près du banc vert où j’étais assis.

« Un homme descendit de la voiture.« Je fus tout de suite frappé par la

ressemblance qu’il y avait entre nous.« Je murmurai les deux vers fameux de

Musset :

Deux hommes vêtus de noirQui se ressemblaient comme des frères...

« L’étranger s’approcha de moi et me dit :– Il y a longtemps que je vous cherche...Je tressaillis :

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– Hein ? fis-je.– Oui, j’ai enfin trouvé mon sosie.– Que faites-vous ? a jouta-t-il.– Rien.– Sous le secours direct ?L’étranger reprit :– Si je vous offrais gratis un laboratoire

chimique prospère ?Je pensai : J’ai très certainement affaire à un

fou.Il poursuivit :– Je vous offre ma personnalité et mon

laboratoire en échange de la vôtre.– Comment vous appelez-vous ?– Joseph Mattelotte, propriétaire du

laboratoire qui porte son nom.Je remarquai, incrédule :– Et vous voulez échanger votre nom contre

celui d’une épave comme moi ?– Oui.

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– Pourquoi ?– Pour deux raisons ; j’en ai assez de ma

femme, de sa tête de linotte et de son cœur sec ; et je veux suivre mon irrésistible vocation...

– Vocation ?– Oui, monsieur, je ne suis pas heureux tant

que je n’ai pas un pinceau et une palette aux mains.

– Et vous me proposez... ?– Nous nous ressemblons assez pour que vous

preniez ma place et mon nom et pour que, moi, je peigne sous le nom d’Ernest Carmin.

– Mais je ne pourrai jamais décevoir votre femme.

– Oui, vous le pourrez ; il y a plus de deux ans que je ne lui ai adressé même pas la parole. Elle est actuellement en Californie pour 5 ou 6 mois. Vous serez à son retour si solidement installé dans la place qu’elle ne se doutera de rien. Si vous consentiez à la favoriser de vos attentions, elle avalerait l’appât, l’hameçon et la ligne avec ; elle est tellement sotte...

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Ernest Carmin regarda Brien.Celui-ci lui dit :– Vous avez accepté la proposition ?– Naturellement, c’était le Pérou pour un gas

sous le secours direct comme moi.– Et madame Mattelotte s’est-elle aperçu que

quelque chose clochait ?– Non.Il ajouta :– Je crois, M. Brien, avoir agi habilement.

Mattelotte, ma seconde personnalité, avoua ses erreurs et ses péchés et se les fit pardonner.

– Ah, ah..., et dans quel but spécifique venez-vous me voir aujourd’hui ?

– Dans le but de me retracer Mattelotte, je vous l’ai d’ailleurs dit au début de notre entretien.

– Oui, mais pourquoi ?– Parce que je veux reprendre ma personnalité

numéro un.– Je vous demanderai encore : Pourquoi ?

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– Parce que je suis en amour avec une jeune fille.

Albert déclara alors :– Je ne vois pas la nécessité qu’il y a de

retracer Mattelotte simplement parce que vous êtes en amour.

– Eh bien, voici : Les Mattelotte Laboratories, grâce à la guerre et à une habile direction de ma part sont devenus très prospères. J’ai eu une alléchante offre de vente. Je suis honnête, M. Brien, et je crois que Joseph Mattelotte a droit à la moitié des bénéfices que donnera la vente.

Carmin ajouta :– Je crois que ces deux moitiés nous

permettront, à Mattelotte et à moi, de vivre le reste de nos jours, dans une large aisance.

– Enfin, je comprends. Carmin demanda :– Vous acceptez de me retracer Mattelotte ?– Oui.Le client se leva.Albert lui dit en souriant :

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– Vous n’oubliez pas quelque chose ?– Quoi donc ?– Le principal, du moins pour moi.– C’est à mon tour de ne pas comprendre.Brien frotta son pouce contre l’index et le

majeur de la même main.Carmin dit :– Vous avez raison ; je saisis ; combien ?– $500 si je manque mon coup ; $1500 si je

réussis à retracer votre Mattelotte.Carmin sourit :– Comme je suis sûr de votre réussite, je vais

vous faire immédiatement un chèque de quinze cents.

– Je ne le refuserai certes pas.Quand le client eut fait le chèque et l’eut

donné au détective, celui-ci dit :– Dites-moi, de quel truc vous êtes-vous servi

pour opérer sans avarie le transport bancaire initial en 1935 ?

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– C’est très simple. Mattelotte me remit un chèque en blanc signé par lui, chèque dont je me servis pour transférer le capital du laboratoire, de la banque où il se trouvait à une autre succursale de mon choix où je laissai un facsimile de ma signature. Ainsi le tour est joué.

Carmin demanda :– Pouvez-vous me dire combien de temps ça

vous prendra pour retracer Mattelotte ?– C’est plutôt difficile à dire ; ces causes de

pistage sont imprévisibles. On peut réussir aujourd’hui, mais d’un autre côté ça peut prendre une dizaine de jours.

– Bien, je m’en vais...Albert fit alors une chose qu’il ne faisait que

très rarement.Était-ce un pressentiment ?Il ne le savait pas au juste.Toujours est-il qu’il offrit un verre de scotch à

Carmin. Celui-ci accepta, but et déposa le verre vide sur l’épaisse vitre qui recouvrait le bureau du détective privé.

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– Au revoir, M. Carmin ; aussitôt que j’aurai du nouveau, je m’empresserai de communiquer avec vous.

– Ah, oui, j’oubliais...– Quoi donc, M. Carmin ?– À cause de madame Mattelotte, je vous

prierais de ne pas m’appeler à ma résidence privée.

– Très bien, je vous appellerai à vos laboratoires.

Quand il fut seul, Brien parla dans l’intercommunication :

– Rosette...– Oui, chéri de mon cœur ?– Viens ici.Elle arriva presque tout de suite.– Tiens, dit Brien, en lui présentant le chèque,

ouvre une page neuve de notre ledger et entre ces quinze cents tomates au crédit de Ernest Carmin.

Rosette examina longuement le chèque.

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Puis elle dit :– Tu en perds, mon mari.– J’en perds ?– Oui, voilà que tu te mêles dans les noms de

tes nouveaux clients.– Je ne comprends pas.– Le signataire du chèque n’est pas Ernest

Carmin, c’est Joseph Mattelotte.– As-tu déjà entendu parler des alias, petite

sotte ?Il ajouta :– Des alias et du roman Dr Jekyll & Mr Hyde,

de Stevenson ?– Ah, Carmin est Mattelotte et vice versa ?– Justement.Brien vit le verre vide sur son pupitre. Il

l’enveloppa soigneusement dans une des pièces de soie qu’il réservait pour ces occasions et dit :

– Rosette...– Oui ?

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– Tu vas aller porter ce verre à Paulot, l’expert de la provinciale ; tu lui demanderas de relever et décalquer les empreintes qu’il y a dessus et de garder le tout bien précieusement.

– Pourquoi ?– Pour futures références.Elle dit en riant :– Tu es lumineux de précision, mon mari.Et sortit.Soudain Albert s’aperçut qu’il avait oublié

quelque chose.– Il appela sa téléphoniste :– Voulez-vous, dit-il, me mettre en

communication avec Ernest Carmin, des Mattelotte Laboratories.

– Certes.Quelques instants plus tard, la téléphoniste

appela son patron et lui dit :– Personne ne connaît de Carmin aux

laboratoires...

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– Hein ? ? ?Puis Albert comprit son erreur :– On peut difficilement être plus bête que moi,

Mademoiselle...– Oui... ?– Appelez de nouveau les laboratoires et

mettez-moi cette fois en communication avec Joseph Mattelotte.

À celui-ci, le détective privé demanda :– Pensez-vous que votre sosie est actuellement

à Montréal ?– Je crois bien que oui, mais je ne saurais vous

le garantir.– Merci.

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II

Pistage

Les honoraires élevés que venait de payer Carmin encouragèrent Brien qui tout de suite se mit à la besogne.

Il appela de nouveau sa téléphoniste :– Prenez un annuaire Lovel, dit-il à

l’employée, et voyez si vous ne trouveriez pas le nom Mattelotte Joseph...

Il sacra :– Ce maudit mélange de noms m’emmerde à

la fin...– Plait-il, M. Brien ?– Excusez-moi, mademoiselle. Ce n’est pas

Mattelotte que vous devez chercher dans le Lovel mais Carmin, Ernest.

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– Bien, monsieur.Brien appela alors ses deux meilleurs pisteurs,

les détectives Mackenzie et Perrotte.– Venez tout de suite à mon bureau, ordonna-

t-il aux deux, successivement.Le flic national des c. f. attendait l’arrivée des

deux pisteurs quand sa téléphoniste l’appela.– M. Brien, dit-elle, il y a un Ernest Carmin

qui est supposé rester dans une maison de chambres de la rue Saint-Paul, près du marché Bonsecours.

– Bien, merci.Elle ajouta :– Mackenzie et Perrotte arrivent.– O. K., dites-leur d’entrer.S’adressant à Mackenzie, Brien dit :– Va me chercher un nommé Ernest Carmin,

artiste-peintre, qui loge dans une chambrée de la rue Saint-Paul.

Il ajouta :

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– Ma téléphoniste te donnera l’adresse exacte.– Et moi ? demanda Perrotte.– Toi, tu vas t’occuper de Jos. Mattelotte et de

sa femme. Obtiens le plus de renseignements possibles à leur sujet.

– Oké, boss.Seul, Albert se plongea dans ses réflexions.Dès le début, le détective avait douté que

c’était par honnêteté stricte que Carmin voulait retracer l’artiste.

Non.Il devait y avoir anguille sous roche.L’honnêteté n’était pas le mobile...Il n’était pas sûr.La cause était trop jeune encore...Il se demandait...À ce moment, la sonnerie du téléphone le fit

tressaillir.– Allô.C’était Mackenzie.

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Le pisteur y alla brutalement :– Il y a, dit-il, un cadavre dans la chambre de

Carmin.– Un cadavre ?– Oui, de jeune fille, et une fille d’une très

grande beauté.Il demanda :– Que dois-je faire, M. Brien ?– Tu es dans la chambre ?– Oui.– Eh bien, attends-moi là et ne touche à rien,

ne dérange rien de place.Il raccrocha et appela tout de suite après, le

détective Théo Belœil, en charge de l’escouade des homicides de la sûreté provinciale,

– Mon gros Théo, dit-il, tu vas venir ici avec ton expert Paulet et ton médecin-légiste Leduc.

– De quoi s’agit-il ?– Ô candeur ambulante, puisque tu es le chef

provincial du département des homicides,

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pourquoi penses-tu que je t’appelle ?– Un meurtre ?– Non.– De quoi ?– Un assassinat, viens.Comme il déposait l’acoustique dans son

berceau, Albert éclata de rire de son semblant de farce.

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III

Le cadavre

La chambre d’Ernest Carmin alias Jos. Mattelotte était située sous les combles d’une très vieille maison qui ne devait pas être jeune, il y a un siècle.

Elle était toute petite, ne contenant qu’une chaise, une petite table et un lit simple.

Cependant sous les vieux papier-tenture des murs et du plafond, il devait y avoir une nombreuse, une astronomique population de coquerelles et de punaises.

Le cadavre de la jeune fille reposait sur le lit.Le médecin légiste étudiait minutieusement les

blessures à la tête.– Et ton verdict, Leduc ? demanda Belœil qui,

avec l’aide d’Albert, de Paulot et de Mackenzie,

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remplissait la pièce.– Un quelconque instrument contondant lui a

fendu la boîte crânienne, lui écrasant la matière grise du cerveau, entraînant la mort instantanée.

Leduc ajouta :– Il y a quelque chose qui ne va pas dans la

mise en scène.Brien intervint :– Je sais, dit-il.Leduc, pincé, Remarqua :– Alors, docteur Brien, nouveau Pic de la

Mirandole, daignez donc nous expliquer ce qui, selon vous, cloche.

– Il n’y a pas assez de sang ici.– Ça parle au diable, fit le médecin légiste, il

l’a, l’animal...– Naturellement, fit Albert avec une

malicieuse négligence ; il n’y a pas assez de sang de répandu. Mais ce n’est pas tout.

– Non ?

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– Non, le coup qui a été asséné sur la tête de la victime a été assez formidable pour faire ricocher des gouttelettes un peu partout dans cette petite pièce ; or je ne vois de ces gouttelettes rouges nulle part.

Le docteur Leduc s’écria :– Le génial Brien me bat sur mon propre

terrain médico-légal.Le gros Théo revint alors en arrière :– Donc, dit-il, le pisteur Mackenzie, en

recherchant Joseph Mattelotte, a trouvé le cadavre de cette fille... Mackenzie lui-même termina la phrase :

– ... dans la chambre de Mattelotte où nous sommes présentement.

Brien conclut :– D’où, dit-il, il serait prématuré de présumer

le pire...– Le pire ? fit Belœil.– Oui, naturellement, quelle est la première

chose que l’on soupçonne quand on voit une fille

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couchée dans la chambre d’un homme ?Théo questionna :– Ainsi, Albert, tu crains que cette première

déduction qui saute aux yeux n’est pas la bonne ?– Oui, je prétends que cette présomption est

fausse.– Pourquoi ?– Parce que cette fille était déjà morte quand

elle a pénétré dans cette pièce.– Ah, oui, je comprends, c’est à cause de

l’absence des gouttelettes rouges que tu en arrives à ce raisonnement.

Paulot, l’expert, dit alors :– Albert, puisque tu es la dernière édition

ressuscitée du vieux magazine français JE SAIS TOUT, serais-tu assez aimable de vêtir ce cadavre anonyme de son nom... ?

– C’est vrai, fit le gros Théo, nous ignorons l’identité de cette fille.

Albert suggéra :

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– Si nous questionnions le concierge de cette maison de chambres, il pourrait sans doute identifier le cadavre.

– Paulot, amène donc cet homme ici.Quelques instants plus tard, Paulot revenait

avec un bossu dont la laideur était accentuée par la peur visible sur sa figure.

Belœil questionna, délibérément bourru :– Votre nom, ?– Anselme Lebeau.LEBEAU !Ils pouffèrent tous de rire.Belœil reprit :– Votre occupation ?– Concierge ici.– Regardez le cadavre sur ce lit.

Reconnaissez-vous cette femme ?– Oui.– Qui est-elle.– C’est Suzanne.

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– Suzanne qui ?Embarrassé, le bossu dit :– Je ne connais pas son dernier nom.– Comment se fait-il... ?– Bien, les filles qui exercent le métier de

Suzanne sont plutôt économes de leurs noms de famille.

Théo remarqua :– Ah, je comprends.À son tour Brien questionna :– Cette chambre où nous sommes

actuellement est celle de Mattelotte ?– Mattelotte ? fit le bossu, connais pas.– Ah, le maudit mélange de noms. Je veux

dire, concierge, que cette chambre est louée à Ernest Carmin ?

– Oui, Carmin, l’artiste.– Connaissait-il cette Suzanne ?– Oui, c’était une paire d’amis.– Savez-vous où demeurait Suzanne ?

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– Mais oui, puisqu’elle demeurait ici.Le bossu ajouta :– Sa chambre est en face, de l’autre côté du

corridor.Belœil dit :– Allons voir.La chambre de Suzanne était une réplique de

celle de Mattelotte alias Ernest Carmin.Il y avait une mare de sang coagulé sur

l’oreiller qui portait encore le trou où avait reposé la tête de la jeune fille.

Leduc remarqua :– Cette fois les gouttelettes rouges ont giclé un

peu partout dans la chambre. C’est bien ici que le crime a été commis.

Paulot, qui était en train de relever les empreintes digitales sur les meubles, s’écria soudain :

– Brien, tu es en ligne avec les puissances des ténèbres,

– Comment ça ?

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– Tu te rappelles avoir envoyé Rosette me porter un verre pour cataloguer les empreintes qu’il y avait dessus.

– Oui.– Eh bien, je viens de retrouver les empreintes

du verre sur cette petite table de chevet.Belœil demanda :– De qui sont ces empreintes du verre ?– D’Ernest Carmin.– Le peintre ?– Non, du vrai Carmin.– De celui qui marche et opère sous le nom de

Mattelotte ?– Oui.Albert reprit :– Ces empreintes nous permettent de conclure

que le vrai Carmin avait des quelconques relations avec Suzanne.

Belœil accusa :– ... et qu’il est notre meurtrier.

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Mais Brien protesta :– Pas si vite, Théo, pas si vite. N’oublie pas

que Carmin est mon client. Je me dois de le protéger tant que les doutes contre lui ne seront pas plus forts, plus puissants que ça.

Après un silence le détective privé reprit :– Ce client à moi peut fort bien être la victime

d’un frame-up, comme cela peut aussi être le contraire.

– Le contraire ?– Oui.– Que veux-tu dire ?– Que le vrai Mattelotte peut avoir essayé de

framer celui avec lequel il a changé de personnalité il y a quelques années.

Belœil demanda à son ami :– Que veux-tu que je fasse alors ?– Que tu donnes de la corde à Mattelotte et à

Carmin.– Tu veux dire : Que je ne les arrête pas tout

de suite ?

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– Oui, c’est en plein ça ; entendu ?– Entendu !

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IV

Judith

Une surprise attendait Brien à son arrivée à son bureau. Rosette lui dit :

– Devine qui t’attend ?– Tu sais bien, ma femme, que je suis

exactement bon à rien dans les devinettes. Qui m’attend ?

– Une femme, 5.8 pieds, cheveux teints, visage d’une beauté étrange, louche, formes penchant du côté de ma maturité, 40 et quelques années, bien conservée par les cosmétiques et les produits de beauté...

Albert interrompit :– A-t-elle été baptisée, cette femme étrange ?– Oui, dev...

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– Encore !– Elle prétend s’appeler Judith Mattelotte.– Hein ?Le détective venait de bondir :– Où est-elle ?– Dans ta bibliothèque de criminologie.– Sors-la de là et fais-la entrer dans mon

cabinet particulier.– Bien.Quand cela fut fait, Brien demanda à Judith :– L’objet de votre visite, madame ?– Je viens, monsieur, de m’apercevoir que

depuis des années je vis dans une situation fausse, horrible.

– Comment ?– L’bomme que je croyais être mon mari ne

l’est pas, ne l’a jamais été.– Quel est votre vrai mari, madame ? fit Albert

jouant à la candeur.– Joseph Mattelotte.

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– Et l’autre ?– Vous le savez, M. Brien, puisque Ernest

Carmin est votre client.– Ainsi vous êtes au courant... Qui vous a dit ?– Je ne puis révéler le nom de l’informateur ;

il désire garder l’anonymat.Brien résuma :– Ainsi, madame, sachant que celui qui vit

avec vous maritalement est mon client, vous n’avez pas hésité à venir quand même à moi...

– Oui, monsieur, car vous avez une haute réputation de justice ; vous ne persisterez pas quand vous saurez tout, à enlever un coupable à la potence.

– Ainsi celui qui se fait passer pour Mattelotte est un criminel ?

– Oui.– À qui en veut-il ?– À ma vie et à celle de mon vrai mari.– Pourquoi ?

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– Parce que nous lui barrons tous deux la route de la fortune.

– Comment ?– Bien, les laboratoires appartiennent à mon

mari véritable et à sa mort, ils me reviennent à moi d’après notre contrat de mariage.

– Ainsi ce contrat est au dernier vivant les biens.

– Oui.Judith reprit :– Que dois-je faire ?– Si ce que vous m’avez dit est la vérité...– Je jure sur la tête de...Imperturbablement, Brien répéta :– Si ce que vous me dites est la vérité, votre

vie, madame, ne vaut pas la moitié d’un trente sous.

– Vous allez me protéger ?– Certainement.Albert appela dans l’intercommunication :

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– Rosette...Presque immédiatement celle-ci parut dans

l’entrebâillement de la porte.Il lui dit :– Rosette, je te charge de protéger cette femme

j. n. o. Ne la lâche pas d’une semelle et couche avec elle la nuit.

– Très bien, boss.Comme elle prenait Judith par le bras et

l’entraînait au dehors, Albert dit à sa femme Rosette :

– Tiens-toi constamment armée jusqu’aux dents.

– Il y a danger ?– Oui, danger grave.Il amplifia :– Grave et imminent.– Brrr, fit Rosette, c’est pas des farces...– Non, à moins que tu considères les meurtres

comme sujets de comédie, ma très chère épouse.

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V

Fuite

Brien était à réfléchir à cette cause compliquée dans laquelle s’entremêlaient deux noms.

Carmin-Mattelotte.Mattelotte-Carmin.C’était une nouvelle tour de Babel moderne où

la confusion des langues faisait place à la confusion des noms.

Soudain son téléphone numéro un sonna.Il le prit et dit :– Allô.À l’autre bout de la ligne, son interlocuteur

s’identifia :– Mackenzie, boss.

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– Oui, du nouveau ?– Oui, j’ai localisé le vrai Mattelotte.– Où ça ?– Chez Dupuis Frères.– Hein ? ? ?– Vous avez bien compris, boss.– Qu’est-ce que l’artiste fait chez Dupuis ?– Il tient une exposition de ses peintures,

exposition qui obtient d’ailleurs un franc succès.– Continue, Mac, je t’écoute.– Quand je lui eus révélé le meurtre de

Suzanne et la découverte du cadavre dans sa chambre à lui, il a pris peur et s’est enfui...

– Tu n’as pas perdu sa piste, j’espère ?– Non.– Où es-tu en ce moment ?– En face d’un drive-yourself.– Et l’artiste, lui ?– Je le vois d’ici ; il est en train de se louer une

automobile.

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– L’adresse ?Mackenzie la donna à Brien qui dit :– Je saute immédiatement dans mon char et je

vais te rencontrer ; mais si le peintre part avant moi, suis-le sans m’attendre et rappelle-moi à la première occasion.

– Oké, boss.Comme Albert arrivait à l’adresse donnée,

l’artiste sortait du garage dans la voiture qu’il venait de louer.

Mackenzie sauta dans celle du détective privé.Mattelotte alias Carmin tourna à gauche, de

l’avenue des Pins à l’avenue du Parc.Il accéléra jusqu’à 70 et arrêta à la lumière

rouge de la rue Mont-Royal, dans un vacarme de crissements de freins.

De nouveau, il tourna à gauche pour prendre le chemin de la côte Sainte-Catherine qu’il suivit jusqu’à son extrémité.

Il prit alors le boulevard Décarie, traversa ville Saint-Laurent en trombe, s’engagea sur le pont de

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Cartierville, modéra à temps devant la petite station de la police de la route, de l’autre côté du pont, puis reprit sa vitesse sur le boulevard du curé Labelle lisse, large et droit.

Bientôt le poursuivi et les poursuivants derrière eurent dépassé Saint-Martin, Sainte-Rose, et le clocher de Sainte-Thérèse parut à leur gauche.

À ce moment une sirène retentit.Mackenzie regarda dans le rétroviseur :– Un officier de vitesse nous court après, boss,

dit-il.– Qu’il soit le bienvenu.Albert dit :– Mac...– Oui, patron ?– Sors ta badge, montre-la à l’officier quand il

passera et demande-lui d’arrêter la voiture en avant.

Ce qui fut dit fut fait.L’officier de vitesse dut barrer la route à

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l’artiste avant que celui-ci ne stoppât.Albert descendit de voiture et s’identifia.– Enfin, s’écria l’officier, je vois le grand

détective Brien en chair et en os.Avec un sourire, Albert dit :– Sans fausse modestie, je ne me savais pas si

célèbre.Il ajouta :– Officier ?– Oui ?– J’ai un service à vous demander.– Accordé d’avance. Que désirez-vous ?– Que vous oubliez l’offense commise par

l’artiste.– L’artiste ?– Oui, l’homme dans ce drive-yourself.

Laissez cet homme entre mes mains.– Volontiers.L’artiste dit, bourru :– Que me voulez-vous ?

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Du tac au tac Albert rétorqua :– Ce que je veux, mon ami ? Tout simplement

vous sauver de la corde que vous vous mettez vous-même au cou.

Il ajouta :– Alors je désirerais au moins une intonation

de voix non plus bourrue mais reconnaissante.Le peintre regarda longtemps le détective

privé qui soutint ce regard sans broncher.– M. Brien, dit l’homme à la fin, je crois

pouvoir placer ma confiance en vous.– Commandez et j’obéirai.– Très bien, alors montez dans ma voiture.– Mais la mienne ?– Laissez faire, mon employé Mac ira la

reconduire au garage.Après avoir pris congé de l’officier de vitesse,

Albert dit :– Aussitôt la voiture remisée, Mac, viens à

mon bureau, je t’attendrai.

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– Bien, boss.Albert et l’artiste montèrent dans la voiture du

premier et revinrent vers Montréal.Quand ils furent confortablement installés

dans le cabinet particulier du détective, ce dernier dit :

– Mattelotte, pour calmer nos émotions récentes, si nous prenions un petit coup...

– Ça, c’est une vraie bonne idée.Brien sortit une bouteille de rye de bonne

marque d’un des tiroirs de son pupitre.Il jeta un regard curieux sur la bouteille qu’il

tenait encore dans sa dextre.Puis il la déposa précieusement sur la vitre du

pupitre.Alors il sortit de sa poche de veston une loupe

avec laquelle il examina soigneusement la bouteille du culot au goulot.

– Ça parle au diable, s’écria-t-il.– Quoi donc ?– Il n’y avait plus une seule empreinte sur

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cette bouteille au moment où je viens d’y apposer les miennes.

– Hein ?...– Oui, il en est ainsi.– Qu’est-ce que ça veut dire ?– Que nous ne prendrons pas de ce scotch.– Pourquoi ?Brien ne répondit pas.Il déboucha la bouteille, plaça son nez sur le

goulot et sentit :– Je ne me trompais point. Ça sent l’essence

de ratafia.– Ratafia... ?– Oui, et cela veut dire que mon scotch a été

traité à l’arsenic.L’artiste s’écria :– Empoisonné ; on a voulu vous assassiner ?– Oui, et l’assassin a effacé ses empreintes sur

la bouteille avant de déguerpir.– 19 –

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Albert sacra :– Il n’arrive que très rarement que des

assassins s’attaquent à ma vie ; la cause devient de plus en plus intéressante.

Le flic appela sa téléphoniste et lui demanda :– Qui est venu en mon absence ?– Personne.– Personne ne m’a appelé non plus ?– Si, monsieur.– Qui ?– Votre pisteur Perrotte.– Que voulait-il ?– Il m’a dit de vous dire qu’il se tenait

toujours aux aguets et qu’il n’y avait rien de nouveau.

– Bien.En raccrochant, Albert dit à son interlocuteur :– Oublions pour le moment cet attentat contre

ma vie et venons-en à vous. Parlez, je veux tout savoir.

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– J’avais échangé ma personnalité contre celle de Carmin, à la condition expresse qu’il me laisse tranquille ad aeternam.

– Carmin a-t-il tenu cette promesse ?– Non.– Quand l’a-t-il rompue ?– Hier.– Comment ?– Il s’est servi de sa ressemblance avec moi

pour abuser de ma blonde.– Il a réussi à se faire passer pour vous ?– Oui, le goujat ; mais Suzanne s’est vite

aperçu qu’il y avait quelque chose qui clochait quelque part.

L’artiste ajouta :– Je l’ai pris sur le fait.– Que lui avez-vous dit ?– Je l’ai menacé de reprendre possession de

mes laboratoires et de le laisser figurativement tout nu dans la rue s’il ne laissait pas Suzanne

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tranquille.– Qu’a-t-il dit à cela ?– Qu’il aimait, qu’il adorait Suzanne, qu’il

l’avait dans la peau, que c’était plus fort que lui, qu’il ne pouvait pas abandonner... À cela je répondis qu’il avait assez de ma fortune sans que je lui sacrifie ma blonde.

– Et ensuite ?– Ensuite il a tué ma Suzanne et arrangé les

choses pour que je sois, moi, accusé de ce meurtre.

Albert dit alors :– Vous avez raison, mon ami.– Vous me croyez ?– Oui, et je vais vous dire pourquoi : Carmin a

laissé ses empreintes PAR-DESSUS DU SANG, sur la table de chevet dans la chambre de Suzanne.

– Par-dessus du sang ?– Oui, et cela fait de Carmin, votre sosie, le

meurtrier de Suzanne. Mais je me demande une chose.

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– Quoi donc ?– Le mobile du crime ?Brien réfléchit, puis il dit : :– Ce doit être un double mobile, jalousie et

vengeance ; la jalousie lui fit tuer Suzanne parce qu’elle résistait à ses avances ; et en même temps il se vengeait de vous en transportant le cadavre dans votre chambre pour vous frémer et vous faire passer pour le meurtrier.

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VI

Les deux sosies

Le téléphone sonna.C’était Perrotte, le pisteur.Il dit à Brien :– Je suis au rez-de-chaussée de l’édifice où est

situé votre bureau.– Oui ?– Et Carmin monte vous voir actuellement.– Merci.Il ne ferma pas la ligne et dit à la téléphoniste :– M. Carmin doit entrer d’un instant à

l’autre...– Justement le voici.– Dites-lui qu’il peut entrer.

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Carmin ne parut pas trouver étrange la présence de Mattelotte dans le cabinet particulier de Brien.

Sa figure dénonçait qu’il avait peur.Horriblement peur.Silencieusement l’artiste sortit de sa poche un

bout de papier et un crayon et sketcha la tête de Carmin.

Quelques traits et ce fut fini. Mattelotte dit alors :

– Quand cette œuvre sera finie, je l’appellerai la VENGEANCE DE SUZANNE.

Carmin ignora le sarcasme. S’adressant au détective privé, il lui dit :

– Je suis venu vous demander protection.– Protection ? Contre qui ?– Contre Judith..– Comment ça ?– Elle a voulu m’empoisonner à l’arsenic.Brien fit :

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– Ah, ah, l’arsenic a été placé dans une bouteille de boisson sans doute ?

– Comment savez-vous ?– Parce que j’ai failli être victime du même

stratagème meurtrier.– Ah...Albert reprit :– Avez-vous des preuves directes qui accusent

Judith ?– Oui ; quand je sentis l’odeur d’amandes

brûlées, je pensai à l’arsenic. Alors je me versai un verre que je jetai dans le bol des toilettes ; puis je me couchai et fis le mort.

– Alors ?– Alors Judith vint et vit le verre sur la table ;

elle le sentit et murmura : « Tout va bien, il est mort. » Elle prit la bouteille et le verre et disparut avec. Je ne doutai point qu’elle allait les faire disparaître.

– Et puis ?– Je suis venu ici pour vous demander votre

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protection.Brien dit alors à brûle-pourpoint :– Parmi nous trois se trouve l’assassin de

Suzanne.– Hein ?– Quoi ?Les deux sosies venaient de parler ensemble.– Examinons d’abord le cas de Mattelotte. Il a

pu tuer sa maîtresse, Suzanne, parce qu’elle le trichait avec Carmin.

Mattelotte ricana :– Et j’aurais après l’assassinat transporté le

cadavre dans ma propre chambre pour me faire accuser de ce meurtre ?

– Pourquoi pas ? Je sais que Belœil le moron ne vous croit pas coupable parce qu’apparemment seul un imbécile aurait tué une fille pour ensuite transporter le cadavre chez lui.

Brien ajouta :– Mais nous sommes ici en présence d’une

épée à 2 tranchants.

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– Que voulez-vous dire ?– Que nous ne sommes peut-être pas en

présence d’un imbécile, mais d’un meurtrier infernalement habile...

– Comment ça ?– Ma réponse réside dans le raisonnement que

s’est fait le gros Belœil.– Donc, reprit Albert, Mattelotte peut fort bien

être notre assassin. Et vous aussi d’ailleurs, Carmin.

– Mais quel mobile m’aurait poussé... ?– Le plus vieux des mobiles, l’amour charnel.

Et aussi un autre mobile, l’argent. Ah oui, j’oubliais...

– Quoi ?– Il y en a un troisième. Carmin ?– Oui ?– Pourquoi m’avez-vous donné la tâche de

retracer Mattelotte quand vous saviez fort bien où il se trouvait ?

– Parce que je voulais le persécuter de vos

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attentions.– Pourquoi ?– Pour qu’il me signe à mon vrai nom le

transfert légal des laboratoires et de ses autres biens.

– C’est maigre comme explication, mais ça tient debout.

S’adressant à Mattelotte, le détective privé dit :

– Carmin vous a-t-il demandé de signer ce fameux transfert ?

– Oui.– Et vous avez... ?– J’étais enragé à propos de Suzanne, et j’ai

carrément refusé.Albert dit à Carmin :– Quatrième mobile, et le plus plausible, le

plus puissant de tous : Vous aviez intérêt à ce qu’il disparaisse dans le silence de la mort, car Mattelotte vivant, pouvait avoir des velléités de vous enlever les laboratoires.

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Brien termina :– Ainsi vous êtes tous deux suspects.Il regarda Carmin longuement.– Autre chose...– Quoi encore ?– Pouvez-vous m’expliquer la présence d’une

empreinte de votre pouce droit, empreinte imprimée dans le sang sur la table de chevet de la morte ?

– Certainement ; je me coupe toujours les ongles avec mon canif.

– Une habitude ?– Oui.– Alors, reprit Carmin, la dernière fois que je

me suis coupé les ongles, je me suis par inadvertance coupé le bout. Quand je me suis appuyé le pouce sur la table de chevet de Suzanne, ma plaie s’est rouverte et a saigné.

– Plausible, mais faites donc voir votre pouce.Quand ce fut fait, Albert dit en souriant :

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– Saint Thomas est satisfait.Après un silence, le détective national des c. f.

ordonna :– Carmin, vous pouvez vous retirer.– Vous refusez de me protéger ?– Que non ; au contraire ; vous ne vous en êtes

pas aperçu ; mais un de mes employés vous suit partout et ne perd pas un seul de vos mouvements ; vous êtes bien protégé.

– Oh merci.Ernest Carmin sortit.À peine quelques instants s’étaient-ils écoulés

que le téléphone sonna de nouveau sur le pupitre d’Albert.

– Allô...– Boss ?– Oui, Perrotte ?– Carmin vient d’être assassiné d’une balle

pratiquement sous mon nez.– HEIN ?

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– As-tu vu le meurtrier ?– Malheureusement non.– Très bien, monte ici tout de suite.Mackenzie entra en même temps que Perrotte.– Je me rapporte, dit le premier.– Bien.Albert s’adressa à Mattelotte et désignant

Perrotte, dit à l’autre :– Vous pouvez partir avec lui ; il vous servira

de garde-du-corps.Quand le fameux flic fut seul avec Mackenzie,

il lui parla longuement, très longuement à l’oreille.

À la fin Mac dit :– Je comprends, patron.– Tu suivras fidèlement mes instructions ?– Vous pouvez en être assuré.– Alors dispose.Quand Mac l’eut quitté, Albert murmura :– Ce ne devrait pas être long à présent. Je n’ai

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plus qu’à me résigner à subir le supplice régulier du détective : L’attente.

Une demi-heure plus tard le téléphone sonnait.

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VII

– Allô.– Albert ?– C’est Rosette.– Oui, indigne mère de Toto, que veux-tu ?– Judith Mattelotte m’a échappé.– Elle est disparue ?– Oui, que dois-je faire ?– Viens au bureau.– Immédiatement ?– Oui, tout de suite.Rosette demanda :– Albert ?– Oui, épouse de ma cardiacité ?– Tu es sans doute prêt pour la grande finale,

du drame Carmin-Mattelotte ?

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– Tu l’as en plein, trésor de déduction. Bonjour.

Albert allait disconnecter quand sa téléphoniste lui dit :

– Vous avez, fini, M. Brien ?– Oui.– Attendez, voulez-vous, j’ai un autre appel de

M. Mackenzie.Mac dit à son patron :– Tout s’est passé tel que vous l’avez prévu.– Oui ? Où es-tu dans le moment ?– À l’hôpital.– J’espère que la blessure de Mattelotte n’est

pas grave.– Non, la balle s’est logée dans la chair de

l’avant-bras.Brien demanda :– Tu as vu Judith, n’est-ce pas ?– Oui.– Où est-elle en ce moment ?

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– Ici.– Et Perrotte ?– Ici aussi.Mac demanda :– Que dois-je faire ?– Quand le pansement de Matelotte sera

complété tu t’en viendras au bureau avec la bande.

– Bien, boss.– Au revoir.Au lieu de raccrocher Albert cria à sa

téléphoniste :– Mamzelle ?– Oui...– Vous n’avez sans doute pas perdu un mot de

ma conversation avec Mac...– Oh...– Bien, appelez le gros Belœil et dites-lui de

venir ici immédiatement avec l’expert Paulot et le docteur Leduc.

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– Entendu, mais, M. Brien, je vous prie de croire que je ne prête pas l’oreille à vos conversations.

– Non ?– Non.Elle se reprit :– Non, ou du moins presque pas.– Ô digne fille d’Ève !Il raccrocha et attendit.

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VIII

La grande finale

Ce fut Rosette qui arriva la première.– Oh, la vipère, s’écria-t-elle en entrant.– Qui ça ?– Judith.– Elle t’a glissé entre les doigts ?– Oui.– Tu ne sais pas où elle est ?– Non.– Eh bien, moi, je le sais.– Où est-elle ?– À l’hôpital.– Blessée ?– Non, le blessé est Mattelotte.

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– Qu’est-il arrivé ?– J’ai mis les marionnettes en place, tiré les

ficelles et les marionnettes du meurtre ont obéi à mes directives.

Rosette dit :– Tu parles comme si la cause était terminée.– Elle l’est.Il ajouta :– Je n’ai plus qu’à la servir à Belœil sur un

plat d’argent.– M’expliqueras-tu... ?– Non.– Non ?– Pas avant que les autres acteurs du drame

arrivent.Le silence se fit dans le bureau de

l’extraordinaire détective.Brien ruminait.Rosette, elle, attendait.Puis, peu à peu les acteurs arrivèrent.

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Mackenzie.Perrotte.Mattelotte,Judith...Rébarbative.Puis enfin Belœil.Flanqué de Leduc et de Paulot.Brien demanda :– Que tous ceux qui ont des revolvers sur eux

les donnent à Paulot.Rosette, Leduc, Perrotte et Mackenzie

obtempérèrent.Belœil questionna :– Moi aussi ?– Naturellement que oui.– Alors, Albert, tu me soupçonnes ?– À cela je ne réponds ni oui ni non.Rosette dit en riant :– Puisqu’il soupçonne sa propre femme, n’a-t-

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il pas le droit de soupçonner son meilleur ami ?Brien coupa court :– Trêves de plaisanteries.Il ajouta :– L’affaire Carmin-Mattelotte aura accouché

de deux meurtres, celui de Suzanne et Ernest Carmin, et de trois tentatives d’assassinat contre Joseph Mattelotte, Carmin et moi-même.

Ébahi, Belœil dit :– Contre toi, Albert ?– Oui, contre moi ; ta bêtise proverbiale te

protège toujours contre les assassins.– Hein ?– Tu n’en sais jamais assez long pour que ça

vaille la peine de te tuer.– Merci.Brien regarda tout le monde.

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IX

Coroner

Il dit après avoir appesanti son regard sur chacune des personnes autour de lui :

– Supposons que je suis le coroner et que je préside j’enquête sur les morts violentes de Suzanne et de Carmin.

Théo dit :– O. K., supposons, et après... ?– Mon premier témoin sera Joseph Mattelotte.Celui-ci se leva.Brien questionna :– Mattelotte est bien votre nom ?– Sous quel alias viviez-vous ?– Sous celui d’Ernest Carmin.

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– La seconde victime ?– Oui.À ce moment Paulo qui était à examiner les

revolvers confisqués, poussa un grognement de satisfaction.

Brien demanda :– Tout va bien, Paulot ?– Oui, tout va bien dans le meilleur des

mondes. Le détective national des c. f. reprit son

interrogatoire :– Pourquoi, Mattelotte, avez-vous changé de

personnalité avec Carmin ?– Pour me débarrasser de ma satanée femme et

pour réaliser le rêve de ma vie : la peinture.– Ce changement de personnalité fut effectué

il y a plusieurs années ?– Oui.– Avez-vous revu Carmin depuis ?– Oui.

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– Récemment ?– Oui, très.– Que voulait-il ?– M’enlever ma blonde,– La victime Suzanne ?– Oui.– Bien.Albert dit :– Paulot...– Oui ?– Tu as examiné l’empreinte du pouce de

Carmin dans le sang sur la table de chevet dans la chambre de la défunte ?

– Certainement.– Y avait-il une marque de coupure

transversale à l’empreinte ?– Non.– Tu en déduis... ?– Que la coupure est subséquente à

l’empreinte.

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– Continue ta déduction.– Cette empreinte par dessus le sang de

Suzanne revête clairement que l’assassin n’est nul autre que Carmin.

– Je suis de ton avis.Mattelotte dit alors :– Carmin a tué ma blonde, faisant d’une pierre

deux coups, se vengeant de Suzanne qui résistait à ses avances et me frément pour le meurtre.

– Vous avez raison.Brien reprit :– Passons au meurtre de l’assassin ; car la

seconde victime n’est autre que le meurtrier de Suzanne... Judith Mattelotte, approchez-vous..

La femme obéit.Albert mentit alors effrontément :– Madame, dit-il, faites ce que vous m’avez

promis et qui vous évitera la corde.– Éperdue, Judith dit :– Mais je ne vous comprends pas, M. Brien.

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– Révélez-moi le nom de l’assassin de Carmin.

Alors Perrotte le pisteur sortit un second revolver et, rapide comme l’éclair, tira.

Judith s’écroula au plancher, une balle entre les deux yeux.

Leduc se pencha sur la victime, l’examina et dit :

– La mort a été instantanée.Albert dit :– Théo ?– Oui ?– Tu peux arrêter Perrotte.– Pourquoi ?– Pour le meurtre de Carmin et naturellement,

aussi pour celui de Judith... Perrotte ?– Oui, M. Brien ?– Parlerai-je ou parleras-tu toi-même ?– Je parlerai.– Bien, pourquoi as-tu tué Carmin ?

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– À cause du coup de foudre.– Tu aimais Judith ?– Oui, à la folie ; elle me proposa de faire

disparaître Carmin et Mattelotte afin que nous jouissions ensemble de la fortune des laboratoires.

– Ainsi c’est toi qui as abattu Carmin comme il venait de quitter mon bureau, et c’est aussi toi qui as blessé Mattelotte à l’avant-bras ?

– Oui.Mac intervint alors.Il dit :– Dans le dernier cas je suis témoin oculaire et

auditif.Le détective national des c. f. reprit :– Perrotte ?– Oui ?– Il y a derrière moi une porte secrète dont tu

connais l’existence.L’assassin baissa la tête.

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– Après avoir manqué ton coup avec ta complice Judith, dans une vaine tentative d’empoisonner Carmin, tu tentas de répéter le même stratagème contre moi en plaçant de l’arsenic dans ma bouteille de scotch ; oui ou non ?

– Oui.– Pourquoi ?– Parce que je me doutais que vous me

soupçonniez.Brien ne put alors s’empêcher de craquer

Belœil :– Voilà ce qui ne t’arrivera jamais à toi, mon

pauvre Théo, dit-il.Le détective privé résuma :– Ainsi, Perrotte, tu t’étais ligué avec Judith

pour faire disparaître tous les obstacles humains entre ton amante et la fortune ? C’est bien ça ?

– Oui, M. Brien.Celui-ci se tourna vers Paulo.– Tu as examiné les revolvers confisqués ?

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– Oui.– Avec quel résultat ?– L’arme de Perrotte a tiré les deux balles,

celle qui a tué Carmin et l’autre qui a blessé Mattelotte.

Belœil remarqua :– Ce n’est d’ailleurs pas important. Perrotte a

tué Judith Mattelotte sous nos yeux. Or comme il ne peut pas être pendu deux fois...

Sarcastique, Albert questionna :– Ainsi tu es satisfait, Théo ?– Mais oui.– Alors prends l’affaire sur ton plat d’argent

habituel. Moi, comme d’habitude j’aurai eu le travail...

– ... l’argent...Brien termina :– Et toi, Théo, tu vas maintenant convoquer

les reporters et leur expliquer comment, grâce à tes phénoménales qualités de déduction tu as finalement réussi à solutionner cet embrouillé

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problème de substitution de personnalités.Belœil dit :– Je t’en prie, Albert, ne tourne donc pas tant

le bistouri dans la plaie.– Ainsi tu l’admets ?– Admettre ? Admettre quoi ?– Que tu es une plaie.– Oh, tu auras bien toujours le mot de la fin.Rosette intervint alors :– Théo, dit-elle.– Oui, Rosette...– Toto réclame un bâton de baseball de vous.– Hein ? Pourquoi ?– Pour avoir solutionné votre problème de la

balle et du cassage de vitre.– Il l’aura, le petit diable.Rosette éclata de rire :– Ainsi pour une fois, Albert, c’est moi qui ai

le mot de la fin.

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– Et moi, comme je me meurs d’envie de manger, je vais me contenter du mot de la faim...

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Cet ouvrage est le 651e publiédans la collection Littérature québécoise

par la Bibliothèque électronique du Québec.

La Bibliothèque électronique du Québecest la propriété exclusive de

Jean-Yves Dupuis.

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