Programme 2009 - Livre 4 : Pour une société qui se développe

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LIVRE IV Pour une société qui se développe Introduction Introduction Introduction Introduction Chapitre 1 hapitre 1 hapitre 1 hapitre 1 : Finances publiques Chapitre 2 Chapitre 2 Chapitre 2 Chapitre 2 : Régulation Chapitre 3 Chapitre 3 Chapitre 3 Chapitre 3 : Economie verte Chapitre 4 Chapitre 4 Chapitre 4 Chapitre 4 : Indépendants et PME Chapitre 5 Chapitre 5 Chapitre 5 Chapitre 5 : Recherche et Innovation P ROGRAMME ÉLECTIONS 2009

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Programme pour les élections régionales et européennes du 7 juin 2009. Livre 4. Thèmes : finances publiques, régulation, économie verte, indépendants et PME, recherche et innovation.

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LIVRE IV

Pour une société qui se développe

IntroductionIntroductionIntroductionIntroduction

CCCChapitre 1hapitre 1hapitre 1hapitre 1 :::: Finances publiques

Chapitre 2Chapitre 2Chapitre 2Chapitre 2 :::: Régulation

Chapitre 3Chapitre 3Chapitre 3Chapitre 3 :::: Economie verte

Chapitre 4Chapitre 4Chapitre 4Chapitre 4 :::: Indépendants et PME

Chapitre 5Chapitre 5Chapitre 5Chapitre 5 :::: Recherche et Innovation

PROGRAMME ÉLECTIONS 2009

Programme Ecolo2009 - Livre IV « Pour une société qui se développe » - Introduction – p 3/77

PROGRAMME ECOLO ELECTIONS 2009

Livre IV - Pour une société qui se développe

Introduction

Vers une économie de projets : stimuler, orienter, redistribuer

Mettre la Belgique sur la voie d’un développement économique durable

Pour Ecolo, l’économie est un moyen, pas une

fin. C’est un moyen pour avancer vers l’idéal d’un développement durable qui est, selon sa définition internationale, un mode de développement qui répond aux besoins du présent tout en garantissant la capacité des générations futures de répondre aux leurs.

Nous nous plaçons ainsi aux côtés de ceux qui

estiment que la « main invisible » du marché ne conduit pas nécessairement vers le mode de développement recherché. Aux côtés de ceux également qui souhaitent remonter aux sources des problèmes, de sorte qu’on ne doive plus, au mieux (option sociale-démocrate), multiplier les rustines sociales et, au pire (option néolibérale), les réduire progressivement à néant, en faisant du travailleur et de la travailleuse le seul paramètre d'ajustement.

Pour construire pas à pas cet « à venir », nous

estimons nécessaire d’utiliser les outils économiques et politiques de régulation pour « stimuler », « orienter » et « redistribuer ».

Stimuler, parce que pour Ecolo, rien de durable

ne se fera sans la mobilisation des acteurs. Qu’ils soient entrepreneurs, fonctionnaires, chercheurs, politiques, salariés, étudiants, coopérateurs, indépendants, bénévoles, administrateurs …, qu’ils appartiennent au secteur marchand ou non, qu’ils soient « petits » ou « plus imposants », c’est eux qui sont et seront à la manœuvre. Le rôle premier du politique consiste alors à soutenir et plus encore stimuler le développement de leurs initiatives.

Orienter, parce que la plupart des ressources

naturelles sont « finies » et que la prise en compte de la durabilité ne va pas de soi : si tout le monde

devait consommer comme nous, Belges, il faudrait trois planètes ! Il faut orienter parce qu’une alternative existe et qu’il y a derrière les « secteurs verts » un fort potentiel, encore trop peu exploité, d’emplois localisables chez nous.

Redistribuer, parce que la satisfaction des

besoins dont il est question ne peut se limiter à la satisfaction des besoins « de quelques-uns ». Redistribuer parce qu’on ne peut se complaire dans une situation où près de 600 000 travailleurs sont au chômage et ou près de 1 600 000 de nos concitoyens et concitoyennes vivent sous le seuil de pauvreté. L’équité que nous recherchons se joue tant entre générations qu’à l’intérieur de celles-ci.

Certes, il n'y a pas de paradis social sur un cimetière économique. Mais un paradis économique de court terme ne peut pas non plus se construire sur un cimetière social et environnemental. C’est au politique qu’il revient de l’éviter en pensant simultanément aux trois facettes du développement : l’économique, le social et l’environnemental. C'est sur cette seule base que nous avancerons vers une économie de projets.

Créer de la valeur en pensant conjointement liberté, justice et durabilité

Pour progresser, pour se développer et pour

redistribuer, il faut créer de la valeur. Sur ce point, notre formulation rejoint celle des économistes les plus classiques. Mais nous nous en différencions immédiatement en ce que, pour nous, créer de la valeur, ne vient pas que par le « plus ». On ajoute également de la valeur à un bien par le « mieux » qu’on y impulse.

Pour Ecolo, la « valeur » renvoie davantage à

l’utilité d’un bien ou d’un service, notion davantage qualitative, non réductible à la seule valeur monétaire. Bref, dans notre conception, créer de la

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valeur est essentiel mais ce n’est pas uniquement au « marché » qu’il revient de dire ce qui a de la « valeur » et ce qui n’en a pas.

C'est pourquoi Ecolo propose de substituer à

une économie centrée sur la question du « comment produire toujours plus ? », un autre modèle économique centré sur la question du « pour quoi ».

Ce que nous voulons, ce que nous

recherchons, le « pour quoi » nous nous battons, c’est l’égalité des chances de réalisation de vie : que chacun puisse choisir sa vie et être heureux dans ce choix, tout en respectant le choix des autres, présents et à venir, ici et là-bas. Cette option solidaire, fondamentalement émancipatrice, est tout l’inverse d’une mise sous tutelle ou en dépendance de chacun.

Redonner la primauté aux choix politiques et passer d’une économie « de marché » à une économie « de projets »

La recherche de l’égalité des chances de

réalisation de vie nécessite le passage d’une économie de marché à une économie « de projets » orientée vers le développement durable.

Ce nouveau paradigme économique doit bien

entendu se structurer « sur » un marché mais également « avec » un Etat (régulateur), « avec » des acteurs industriels et sociaux qui sont à l’initiative et, surtout, « avec » les citoyens et citoyennes des régions et territoires concernés.

Face aux catastrophes désormais rendues

visibles d’un système financier incapable de s’autoréguler, l’enjeu est bien de restaurer la primauté des choix politiques. Comme l’écrit Jean Peyrelevade1, « La seule, l’unique solution pour fabriquer de la régulation est de réinventer le politique ». A défaut, le cycle de la finance reprendra rapidement le dessus et se réimposera au cycle de l’économie.

Mais, pour Ecolo, cette restauration de la

primauté des choix politiques ne veut pas dire l’émergence de pouvoirs politiques forts, autocratiques voire dictatoriaux. Que du contraire !

Pour nous, la primauté des choix politiques

implique, de la part de celui qui exerce le pouvoir politique, des efforts d’humilité tout particuliers. Il doit définitivement comprendre qu’il ne trône pas

1 « Le Capitalisme total », Editions du Seuil, Collection La République des Idées, 2005.

au sommet de la pyramide démocratique mais qu’il est le metteur en réseau de l’action publique. Il n’a pas vocation à tout maîtriser mais il se doit d’avoir une ambition sociale forte et une réelle volonté de « réguler » l’économie.

Ecolo renvoie ainsi dos à dos partisans du

« tout au marché », satisfaits de la seule « charité » et défenseurs d’une vision « ultraplanificatrice » de l’économie.

Notre philosophie réserve une place réelle et

centrale aux acteurs (industriels, mais aussi citoyens, sociaux, culturels, etc.) et à leurs initiatives (petites, moyennes ou grandes) tout en confiant à l’Etat un rôle de régulation du marché en fonction des objectifs politiques définis par les élus et par l’intermédiaire des instruments qui sont les leurs : la fiscalité, les subventions (régionales ou européennes), l’aménagement du territoire, le système éducatif, les infrastructures, le système social, le droit pénal, les divers contrats de gestion et autres cahiers des charges …

En ce sens, tout appel idéologique à plus de

« dérégulation » est inacceptable à nos yeux. Au contraire, c’est bien au politique qu’il revient, par ces divers instruments, de stimuler, d’orienter, de redistribuer. En un mot : de réguler. Ce qui s’impose, c’est une nouvelle description des tâches de l’Etat et la définition de nouveaux objectifs. Ecolo propose de passer d’une croissance tirée par les exportations et l’hyperconsommation à un développement du marché intérieur fondé sur le rééquilibrage régional, le progrès social et la soutenabilité environnementale.

Un outil central pour le développement : notre plan d’investissements

Les systèmes économique et financier actuels

font peser une hypothèque de plus en plus lourde sur la qualité de notre environnement de vie et sur notre système de protection sociale basé sur la solidarité.

Nous pensons que la situation

environnementale et socioéconomique ne doit pas être laissée sous la seule influence du marché, mais qu’elle doit être le reflet de choix démocratiques, résultant de l’activité de régulation et d’orientation des gouvernements et parlements.

Partant de ce constat, face à l’incapacité des

politiques habituellement mises en œuvre à résoudre ces problèmes en intégrant les dimensions sociales et environnementales, Ecolo

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propose un projet d’action alternatif, s’appuyant sur un plan d’investissements orienté par les gouvernements vers des secteurs à haute valeur environnementale et sociale.

Ce projet, qui intègre l’enjeu de l'allongement

de la durée de la vie et du développement durable, a pour objectif de créer les conditions d’un cercle vertueux entre protection sociale, production de richesse et amélioration de l’environnement. Il propose une politique de long terme :

qui tienne compte de la dimension globale des défis environnementaux et sociaux ;

qui ne lèse aucune génération ;

qui soit légitimé par un processus de décision démocratique dans lequel les agents concernés participent activement.

Notre projet s’appuie donc sur un plan de

relance des investissements publics, entraînant la création d’emplois de qualité en Wallonie et à Bruxelles. Ces investissements permettront de répondre à la fois à des besoins sociaux non rencontrés mais aussi au défi écologique. Ces investissements, orientés vers des activités soutenables (au Nord comme au Sud) et répondant à une demande existante, permettront de créer de l’emploi dans le secteur industriel (durable) et dans le non-marchand. Ils favoriseront également une croissance équilibrée à long terme grâce au renforcement qualitatif d’une compétitivité basée sur un capital humain performant et sur la maîtrise de technologies vertes de pointe, tout en assurant le respect des engagements de Kyoto.

Ces investissements sont dirigés vers le

développement :

de l’emploi dans le non-marchand : santé, service aux personnes ;

de l’économie sociale ;

de la recherche et développement, de l’enseignement et de la formation ;

des techniques d’utilisation rationnelle de l’énergie ;

d’un marché du logement de qualité et accessible à tous ;

des infrastructures écologiques avec un effort particulier pour promouvoir la multimodalité ;

d’une agriculture de qualité ;

des éco-industries.

Pour Ecolo, l’écologie est ainsi une opportunité pour le développement direct de nombreux pans de notre économie. Il s’agit notamment de promouvoir les secteurs éco-industriels « à triple dividende » : créateurs d’activité donc d’emploi, favorables à l’environnement donc à la santé et permettant des économies pour les consommateurs.

Les divers ingrédients de ce plan

d’investissements sont détaillés au fil de nos propositions programmatiques, que ce soit en matière strictement économique, mais également pour ce qui concerne le logement, l’énergie, la protection de l’environnement ou l’aménagement du territoire.

La redistribution : un autre pan de la régulation

Notre approche de la régulation est ainsi

« d’enchâsser » l’économique dans le social et le politique et de créer, ce faisant, les conditions d’un développement de l’activité économique qui soit soutenable socialement et environnementalement.

Mais, à côté de cette relance économique

orientée vers le développement durable et l’emploi de qualité, nous voulons également mettre en place des mécanismes permettant de renforcer la cohésion sociale.

Même si un des facteurs majeurs d’exclusion

est l’absence d'emploi, travailler sur la redistribution et en faire bénéficier le système socioéconomique dans son ensemble implique de prendre en considération les trois sphères de la répartition :

la répartition sociale, qui s’opère à travers les transferts sociaux ;

la répartition économique, qui se manifeste à travers l’emploi et les salaires ;

la répartition domestique, qui renvoie principalement à la solidarité familiale et de proximité.

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PROGRAMME ECOLO ÉLECTIONS 2009

Livre IV - Pour une société qui se développe

Chapitre 1 « Finances publiques »

Pour des finances publiques saines, responsables, transparentes

Les finances publiques aujourd'hui : Etat des lieux et analyse d’Ecolo

Pour jouer efficacement leur rôle de régulation

de l’économie2 et concrétiser leurs choix politiques, les pouvoirs publics doivent disposer de moyens financiers suffisants. Dans cette optique, Ecolo préconise une nette amélioration de la façon dont sont gérées les finances publiques.

Cette amélioration passe impérativement par

l’arrêt des ventes pour raisons budgétaires des actifs de l’Etat, une réelle transparence des finances publiques, un renforcement de l’administration fiscale (visant notamment à améliorer les résultats de la lutte contre la fraude fiscale et à assurer une perception plus juste de l’impôt) et, en période de conjoncture positive3, par le dégagement d’un surplus structurel (destiné à rencontrer les enjeux du vieillissement).

Amorcer le désendettement structurel

Si le Gouvernement fédéral continue de

présenter chaque année un budget à l’équilibre, cet exercice devient de plus en plus virtuel, à coups de trucs et ficelles. La réalisation de cet équilibre n’a été possible sous la Violette que jusqu’en 2006, grâce à une conjoncture internationale plutôt favorable et une charge de la dette réduite grâce à la baisse continue des taux d’intérêt ; le déficit restant était alors comblé chaque année par des opérations one-shot. Il a suffit d’une conjoncture économique un peu moins bonne que prévue pour que le vernis ne craque et laisse apparaître un déficit en 2007 (- 0,2 % PIB), en 2008 (- 1,1 % PIB) et un déséquilibre de 3,4 % PIB pour 2009 !

2 Voir à ce sujet l’introduction de ce Livre IV « Pour une société qui se développe ». 3 En période de ralentissement économique, l’Etat doit en effet exercer sa fonction contra-cyclique.

Dans le même temps, le Gouvernement fédéral a passé sous silence la réduction drastique d’année en année du solde primaire4 du budget de l’Etat : le solde primaire 2008 (2,7 % du PIB) est 60 % inférieur à celui de 2000 (6,7 % PIB). Il devrait tomber à 0,5% PIB en 2009.

Or le dégagement d’un surplus structurel

tendanciel est une composante essentielle de la réponse à apporter au défi de l’allongement de la durée de vie : c’est la contribution des générations actuelles au financement de la sécurité sociale de demain.

Les choix effectués ces dernières années au

niveau fédéral sont tout sauf ceux d’une équité intergénérationnelle. Ils incarnent l’échec d’une stratégie de long terme, sacrifiée sur l’autel de la consommation immédiate, et ce malgré une croissance économique plus importante que prévue pour les années 2004, 2006 et 2007. Par ailleurs, sur ces mêmes années, le résultat budgétaire est resté en-deçà de la trajectoire fixée afin de pouvoir rencontrer le défi budgétaire qu’engendre l’évolution démographique attendue ces prochaines années, et le constat est malheureusement identique pour les années 2008-2009 du Gouvernement actuel. La conséquence première est que le fonds de vieillissement reste désespérément sous-financé. Sur 2007-2008-2009, on peut évaluer ce sous-financement à 14 milliards €.

Cette stratégie du court terme montre toutes

ses limites au moment où le pays entre dans une période d’instabilité financière et de difficultés économiques. En effet, il apparaît aujourd’hui difficile d’amorcer ce désendettement structurel au risque de rendre encore plus précaires les conditions de vie d’une partie toujours croissante

4 Le solde primaire est la différence entre les recettes et les dépenses hors charges de la dette. Le stock de la dette diminue seulement lorsque le solde primaire est supérieur aux charges de service de la dette.

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de la population ; en période de ralentissement économique, l’Etat doit exercer sa fonction contra-cyclique et soutenir, par des investissements ou des politiques d’intérêt public5, la relance de notre économie ; le Gouvernement violet n’ayant pas voulu utiliser les années de bonne conjoncture pour assainir nos finances publiques, il faudra le faire sans plus aucun report dès la première éclaircie conjoncturelle.

Les entités fédérées semblent quant à elles

agir avec une certaine discipline budgétaire depuis maintenant plusieurs années, respectant les trajectoires pluriannuelles proposées par le Conseil Supérieur des Finances. Ceci leur permet, bon an mal an, de tendre vers l’équilibre budgétaire6.

Il faut néanmoins regretter l’utilisation trop

fréquente et parfois excessive, en particulier au niveau de la Région wallonne, de financements débudgétisés, qui ont pour effet d’extraire des charges du budget, de les financer par l’emprunt et de faire porter amortissements et intérêts par les budgets futurs7. Une telle politique nuit à la transparence requise en matière budgétaire, puisqu’elle pré-affecte une partie des recettes futures et produit par ailleurs un endettement caché8.

La dette budgétaire ne constitue toutefois pas notre seule dette. Au fil des années, nous avons créé une « dette environnementale » phénoménale, nous vivons « à crédit ». La facture ne sera envoyée que plus tard, mais il faut bien être conscient que nous n’échapperons pas à son remboursement. En matière de « gestion des dettes », la passivité est la pire des choses. Malheureusement, à ce stade, aucun dispositif, aucun mécanisme n’est mis en place pour enrayer cette dynamique négative. Nous proposons dès lors de créer une « inspection du développement durable » qui, à l’instar de « l’inspection des finances » en matière budgétaire, aurait pour mission de remettre systématiquement un avis sur les projets ayant un impact sur notre « dette environnementale ». Cette mesure est davantage développée dans le programme environnement9.

5 Voir à ce sujet nos propositions du Livre IV, Chapitre 3 « Economie verte ». 6 Voire d’entamer un léger désendettement, à tout le moins de façon relative (exprimé en % par rapport à leurs recettes). 7 La Cour des comptes définit cette technique comme suit : « Ce mécanisme consiste à faire préfinancer des dépenses par des institutions tierces qui contractent des emprunts dont les charges d'intérêts et d'amortissements sont supportées par le budget (en l’espèce) de la Région. Il s'ensuit que des dépenses qui, normalement, devraient incomber au budget de l'exercice considéré sont reportées sur des exercices ultérieurs. 8 La dette débudgétisée de la Région wallonne peut ainsi être estimée à un montant quasi équivalent à sa dette directe ! 9 Voir à ce sujet nos propositions du Livre I, Chapitre 2 « Environnement ».

Réaliser un transfert vers une fiscalité plus verte et plus juste

Si Ecolo s'oppose à toute nouvelle coupe dans

les finances publiques, nous ne prônons pas pour autant un accroissement du niveau général de la fiscalité en Belgique, mais plutôt la réalisation de transferts fiscaux à travers des mesures plus ciblées, visant à soutenir l’économie et la redistribution, et se traduisant principalement par un allègement des impôts pesant sur les bas et les moyens revenus, une augmentation des prélèvements sur les pollutions et sur le capital, des incitations fiscales à la mobilité verte et des sanctions fiscales de la mobilité « noire », un soutien fiscal aux économies d’énergie et aux investissements verts dans le secteur du logement.

Les recettes budgétaires sont nécessaires non

seulement pour assurer la résorption de la dette accumulée par l'Etat, mais également pour lui donner les moyens de sa politique. Ces moyens financiers pourraient avoir des retombées sociales et environnementales plus conséquentes s'ils étaient utilisés à des fins de réduction de dette, de renforcement de la cohésion sociale ou de la redistribution des revenus, ou d'amélioration environnementale.

Or, la réforme des intérêts notionnels pourrait

coûter annuellement jusqu’à plus de 2 milliards € à l’Etat, sans aucune garantie en termes de création d’emplois. De même, le projet10 de réforme de l'impôt des personnes physiques du Gouvernement fédéral (en particulier, la suppression d’un des barèmes fiscaux) aurait eu également pour effet de réduire substantiellement les recettes de l'Etat en affaiblissant par ailleurs la redistribution des revenus : à titre illustratif, cette réforme aurait donné au contribuable ayant un revenu de moins de 20 000 € par an (un peu moins de 1500 € net par mois) un gain cinq fois inférieur au contribuable ayant un revenu de plus de 40 000 € par an, pour un coût total de plus de 2 milliards € en vitesse de croisière.

Mettre fin au pillage des avoirs de l’Etat

Le dégagement d’un surplus structurel

budgétaire passe aussi par l’arrêt des opérations financières non récurrentes (one shot) et coûteuses à terme, qui ont été légion ces dernières années : reprise du fonds de pension Belgacom, vente (souvent à des prix trop bas) et relocation (souvent à des prix trop élevés) d’immeubles publics, DLU,

10 Ce projet qui faisait consensus au sein du Gouvernement est à ce stade tombé à l'eau suite à la crise économique.

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titrisation de l’arriéré fiscal ... et plus récemment ponction sur les réserves de la SNCB (se risquant ainsi à fragiliser le secteur public au moment où les gens en ont le plus besoin !).

Qui plus est, certaines de ces politiques

engagent les générations futures puisque les recettes immédiates sont très rapidement absorbées par des dépenses futures : il faudra par exemple relouer les bâtiments que l’on a vendus, il faudra payer les pensions complémentaires aux travailleurs à la place de Belgacom le moment venu, etc.

Clarifier les comptes de l’Etat pour en assurer la transparence

Il est également de la responsabilité de l’Etat

d’assurer la transparence de ses comptes et objectifs budgétaires pour permettre un contrôle démocratique efficace de ceux-ci ainsi que les ajustements nécessaires.

Pour y parvenir, il faudrait commencer par

renoncer à la politique des « trucs et ficelles » qu’on a connue sous la législature violette – et qui semble se développer sous l’actuel Gouvernement – mais qui n’a qu’un effet cosmétique sur le budget, tout en jetant un brouillard sur l’analyse des comptes. Le budget 2009 initial en est encore l’illustration parfaite : surestimation de la croissance économique, surévaluation des recettes, opérations one-shot … Une politique responsable ne peut se construire sur un budget en trompe l’œil.

Il est important également d’assurer que la

transmission des comptes à la Cour des Comptes s’améliore, de façon à ce qu’elle puisse exercer sa mission de contrôle le plus efficacement possible. Ainsi dans son 165e cahier, remis au Parlement fédéral en novembre 2008, la Cour des Comptes relevait que bon nombre des services à gestion séparée n’avaient pas encore remis leurs comptes 2007. Certains organismes d’Intérêt public peinent également à respecter les délais légaux de transmission.

Il est par ailleurs essentiel que les

parlementaires puissent faire correctement leur travail en ce qui concerne les décisions de fixation des normes budgétaires et leur respect. Or, à ce jour, les travaux et décisions des comités de concertation, notamment en matière de budget et finances, ne sont pas rendus publics. Ceci est d’autant plus critiquable en termes de bonne gouvernance que certaines décisions prises lors de ces comités contournent la loi, comme, par

exemple, le remplacement du revenu national brut (RNB) par le produit intérieur brut (PIB) (sans modification de la loi spéciale de financement) en ce qui concerne l'adaptation de certaines dotations de l’Etat fédéral vers les entités fédérées.

Gérer les finances publiques de façon responsable, transversale et cohérente

La gestion des finances publiques se doit

d’être responsable afin de ne pas hypothéquer le bien-être des générations futures en reportant sur les budgets à venir les efforts qui devraient être réalisés aujourd’hui (voir les exemples ci-dessus). Mais elle doit aussi être responsable vis-à-vis de l’activité économique d’aujourd’hui.

En effet, pour investir durablement, les

entreprises ont besoin d’une stabilité juridique. Il faut donc adopter des mesures fiscales claires et qui ne changent pas continuellement. A contrario, le Gouvernement fédéral précédent a longtemps tergiversé avant de se conformer à l’injonction européenne de mettre fin aux systèmes des centres de coordination. Il applique par ailleurs des politiques contradictoires comme l’introduction des intérêts notionnels (qui vise à augmenter les fonds propres des entreprises) et la taxation à taux réduit pour les réserves immunisées qui seraient utilisées en 2007 (qui poussent les entreprises à utiliser leurs fonds propres).

Une administration fiscale soutenue et efficace

L’arriéré fiscal, les faibles résultats de la lutte

contre la fraude fiscale, les récents dysfonctionnements relatifs à l’envoi des avertissements extraits de rôle pour les revenus 2004 (trou budgétaire de 883 millions € au budget 2006) montrent à quel point l’administration fiscale est mal gérée et manque d’effectifs et de matériel. Et l’actuel Gouvernement prévoit de ne remplacer qu’une partie des fonctionnaires partant à la retraite : on peut s’attendre à une perte de 5 000 emplois d’ici 2011 !

Ces carences de l’administration fiscale

fédérale ont notamment amené, le Parlement et le Gouvernement bruxellois à prévoir la création d’une administration fiscale régionale permettant la perception directe des impôts régionaux ; une démarche similaire est en cours en Région wallonne.

Selon les propres propos de l’ancien

Secrétaire d’Etat à la Lutte contre la fraude fiscale, le montant des non-déclarations fiscales, des

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contrefaçons, du travail au noir … s’élève au bas mot à 70 milliards € par an ! Un rapport Mc Kinsey en la matière va dans le même sens, pointant la Belgique parmi les économies souterraines les plus florissantes de l’Union. L’étude estime qu’elle pèse la bagatelle de 22 % du PIB. Les auteurs soulignent l’impact colossal de ce marché souterrain sur nos finances publiques : le Gouvernement perdrait, rien qu’en recettes fiscales, 30 à 35 milliards € par an. Le manque de détermination dans la lutte contre l’économie clandestine est à mettre en lien avec l’absence de volonté politique de fixer des règles claires et justes quant à la régularisation des personnes sans-papiers. En effet, le pourrissement de la situation maintient des dizaines de milliers de personnes dans une clandestinité ou des situations administratives difficiles qui obligent ces travailleurs à subir les honteuses conditions d’exploitation de l’économie souterraine pour pouvoir survivre.

Donner plus de moyens à l’administration

fiscale, c’est se donner les moyens d’augmenter les recettes de l’Etat mais également d’assurer l’égalité des citoyens face à l’impôt ! Se donner plus de moyens, c’est aussi, bien évidemment, assurer par des formations efficaces, une meilleure adéquation entre les compétences des fonctionnaires et les tâches toujours plus complexes qui leurs sont assignées.

Plus de respect pour les entités fédérées

Restant en déficit, et ne parvenant dès lors pas

à respecter ses objectifs budgétaires, l’Etat fédéral demande, chaque année depuis 2004, aux Régions et Communautés de réaliser un effort budgétaire supérieur à celui qui avait été convenu dans le cadre des trajectoires budgétaires. Le but de cette demande est de compenser le résultat négatif de l’Etat fédéral et d’arriver à l’équilibre des finances publiques dans leur ensemble.

Nous pensons qu'il est logique et sain, à

l'intérieur d'un Etat fédéral, que toutes les entités participent à l'effort d'assainissement des finances publiques. L’Etat fédéral doit toutefois assumer la part de l’effort qui lui incombe.

De façon plus générale, dans le cadre d’une

hypothétique réforme de la loi spéciale de financement, Ecolo veillera à ce que chaque entité conserve des moyens appropriés à la bonne conduite de ses politiques propres. C’est pourquoi tout transfert éventuel de compétences doit aller de pair, pour les entités non demanderesses, avec

un transfert des moyens financiers correspondants.

Les finances publiques demain : Propositions d’Ecolo

PRIORITE N°1 : RENDRE LA FISCALITE PLUS VERTE ET

PLUS JUSTE Ecolo propose d'opérer un transfert fiscal

partiel du prélèvement sur le travail vers des taxes sur la pollution. La fiscalité écologique permet, à un niveau global de prélèvements obligatoires inchangé, de réorienter la structure des prélèvements vers une forme plus favorable au bien-être collectif, à l’emploi et à la protection de l’environnement.

Trop souvent les réformes fiscales, qu'elles

engendrent une hausse ou une baisse des revenus, ne sont pas orientées au service d’un projet politique particulier. Certains proposent un jour une réforme fiscale à la baisse, pour flatter leur électorat ; le lendemain, les mêmes sont obligés d’adopter de nouvelles mesures d’économie ou de rechercher des recettes complémentaires pour réduire le déficit budgétaire causé par la réforme fiscale précédente. Ecolo propose d’agir à partir d’une vision plus globale et plus cohérente.

Proposition : Optimaliser l’impact d’une fiscalité verte

Pour Ecolo, la fiscalité, et notamment la fiscalité verte, est un moyen de réorientation des décisions vers des choix plus respectueux de l’environnement, plus qu’un moyen (par ailleurs trop souvent peu social) de renflouer le budget général de l’Etat. C’est la raison pour laquelle, au-delà de l’application générale du principe « pollueur - payeur », Ecolo privilégie le volet « incitatif » de cette fiscalité spécifique, qu’il ne convient d’ailleurs d’actionner que s’il existe des alternatives praticables et plus écologiques par rapport aux produits ou aux comportements visés. Malgré l’intérêt du déploiement de tels outils, également en termes de stimulation de l’innovation et de la recherche qui y conduit,

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nous devons bien constater qu’à l’heure actuelle, la part de la fiscalité verte dans l'ensemble des prélèvements fiscaux reste, en Belgique, en-deçà de ce qui est pratiqué dans de nombreux pays européens. En Belgique, en 200611, la fiscalité environnementale ne représentait que 4,85 % des taxes alors qu’aux Pays-Bas ou au Danemark ce taux atteint respectivement 10,37 et 12,21 % par exemple.

Proposition : Encourager fiscalement les comportements énergétiques responsables

Par ailleurs, Ecolo propose d'introduire un mécanisme incitatif « carbone ». Selon ce mécanisme, les investissements réalisés par les entreprises entre 2009 et 2012 pour réaliser des économies d’énergie et développer leur part d’utilisation d’énergies renouvelables seront soutenus fiscalement. A partir de 2013, l’absence d’investissements serait pénalisée au travers de la création d’une cotisation carbone spécifique, dont seraient exonérées les entreprises soumises au mécanisme d’achat aux enchères de quotas CO2. Ce mécanisme constituerait le prélude à l’instauration, idéalement au niveau européen, d’un mécanisme liant l’impôt des sociétés à l’évolution de l’empreinte écologique de l’entreprise concernée.

Proposition : Assurer l'immédiateté de l'avantage fiscal afférent aux investissements en économies d'énergie

Certains travaux (isolation, chauffage, panneaux solaires ...) donnent droit à des réductions d’impôt et / ou à des déductions fiscales. Le mode de perception de l'impôt en Belgique induit une durée assez longue (un an et demi en moyenne) entre le moment où la dépense est consentie et celui où le contribuable bénéficie de son avantage. Ce laps de temps tend à transformer cet avantage fiscal en « aubaine » dans la mesure où il faut d'abord avoir la capacité à consentir la dépense avant d'en être remboursé longtemps après. Ecolo propose donc d’assurer l’immédiateté de cet avantage afin d’aider les ménages à bas ou moyens revenus à réaliser également ces investissements.

11 Dernière année disponible à ce jour dans la base de données Eurostat.

Proposition : Rééquilibrer la fiscalité en faveur des revenus du travail

Ecolo propose de rééquilibrer la fiscalité en faveur des revenus du travail par une plus juste prise en compte fiscale des patrimoines, autres revenus, avantages voire privilèges. Il est évident que les prélèvements (impôts et cotisations) qui pèsent sur les revenus du travail restent élevés. Une des raisons du poids de ces prélèvements est une taxation plus faible, voire parfois inexistante, sur d’autres revenus (par exemple certaines plus-values) ou d’autres assiettes fiscales (par exemple les patrimoines). C’est pourquoi il faut rééquilibrer la fiscalité en faveur des revenus du travail et donc rechercher une contribution plus équitable des autres revenus et du patrimoine, via par exemple un impôt sur les plus-values sur actions, un impôt sur les gros patrimoines, le remplacement du régime de taxation relatif aux stocks options.

Proposition : Rendre le système fiscal plus juste et plus solidaire

Ecolo entend renforcer l’équité et la solidarité de notre système fiscal. En ce sens, Ecolo souhaite que les personnes aisées contribuent plus largement au financement des services publics dont elles bénéficient largement. En revanche, une telle reforme représenterait une économie d’impôt pour une grande partie des contribuables : concrètement, tous ceux qui bénéficient d’un revenu annuel brut inférieur à 35 000 € (soit environ 1 650 € nets par mois) auraient droit à un bonus fiscal. Cet avantage serait maximal pour les personnes ayant un revenu annuel brut autour de 23 000 € (environ 1 350 € nets par mois). Ecolo reste favorable à une meilleure redistribution des revenus. En plus des pistes figurant dans le chapitre "Protection et action sociales" de son programme, Ecolo propose de revoir le taux d'imposition à l'impôt des personnes physiques à la hausse pour les tranches de revenus supérieures à 100 000 €. Plus largement, Ecolo propose de généraliser à l'ensemble des réductions d'impôt et des dépenses déductibles l'application d'un taux fixe de réduction.

Programme Ecolo 2009 - Livre IV « Pour une société qui se développe » – Chapitre 1 « Finances publiques » - p 12/77

Ecolo propose enfin de supprimer les taxations forfaitaires (telles que la redevance TV en Région wallonne) et de les remplacer par une contribution prenant en compte la capacité contributive et / ou la charge polluante.

PRIORITE N°2 : AMELIORER LE RENDEMENT DE L’IMPOT

Proposition : Introduire un impôt sur les patrimoines importants

Ecolo propose de lutter contre le « shopping fiscal » qui fait de la Belgique un paradis fiscal, notamment pour les rentiers français voulant échapper à l’impôt sur les fortunes ou sur les plus-values. En ce sens, Ecolo entend introduire en Belgique un impôt sur les patrimoines les plus importants, tel qu’il existe dans les pays voisins. Cet impôt ne viserait que les patrimoines les plus importants, c’est-à-dire supérieur à 1,25 millions €, tout en exonérant la maison d’habitation pour un montant maximum de 200 000 € par habitant (ainsi, un bien valant 1 million € et occupé par 4 personnes sera pris en compte pour un cinquième de sa valeur, soit les 200 000 € "excédentaires"), l’outil de travail, ainsi que les biens culturels ou écologiques. Il pourrait aussi être modulé en fonction de la nature des biens imposables (ainsi, les biens immobiliers seraient moins imposés que les actifs purement financiers). Pour s’inscrire dans la moyenne des taux pratiqués par de nombreux pays européens, son taux serait progressif jusque 1 %, de sorte que, même pour des patrimoines importants, il resterait assez marginal tout en apportant d'importantes recettes à l’Etat permettant une baisse des taux de l'imposition des bas et moyens revenus. La mise en œuvre d'un tel impôt irait de pair avec la fin de l'utilisation fiscale du secret bancaire individuel ou se réaliserait via un prélèvement à la source, par les banques. Dans le même esprit, Ecolo propose de taxer les plus-values boursières et les opérations boursières spéculatives. Ces différentes mesures s'inscrivent en outre dans notre volonté de rendre notre système fiscal plus équitable en faisant participer tous les revenus

(et pas seulement ceux du travail) au financement des services collectifs12.

Proposition : Revoir en profondeur le système des intérêts notionnels13131313

Dès le départ, Ecolo s’est montré très critique vis-à-vis du système des intérêts notionnels. Force est de constater que, à ce jour, rien n’est venu contredire ces arguments. Ecolo a déposé une proposition de loi visant à corriger et encadrer ce dispositif d’une série de balises permettant à la fois de contrer les abus, de lier les avantages à la création d’emploi ou au développement de l’activité, de soutenir davantage les secteurs innovants, d’introduire une sélectivité pour ceux qui en ont vraiment besoin (principalement les PME) et, ce faisant, de supprimer cet avantage pour les entreprises qui ne font que thésauriser. L’ensemble des modifications proposées par les Verts permettra de retrouver d’importantes marges budgétaires (pouvant aller jusqu’à 1,5 milliard €) pour les politiques de solidarité et de développement durable.

Proposition : Renforcer l’action de l’administration fiscale

Pour Ecolo, il est crucial de renforcer le Service public fédéral (SPF) Finances qui, tout en étant constamment mis sous pression, a été laissé à l’abandon en termes d’investissements sous l’autorité de l’actuel Ministre des Finances : le nombre d’engagements n’atteint que timidement 60 % des départs naturels ; l’équipement informatique est insuffisant et dépassé ; le besoin de formations et de recyclage est immense ; les bureaux régionaux se ferment en nombre. Ecolo propose dès lors, à l’inverse de ce que prévoit le budget fédéral 2009, de réinvestir en moyens humains (1 000 emplois supplémentaires) et matériels dans les services de l'administration des finances. Parallèlement, il importe que les administrations fiscales en voie de constitution au sein des Régions wallonne et bruxelloise reçoivent les moyens nécessaires au bon exercice de leurs missions.

12 Voir à ce sujet nos propositions du Livre IV, Chapitre 2 « Régulation ». 13 Voir à ce sujet notre proposition développée dans le Livre IV, Chapitre 2 « Régulation ».

Programme Ecolo 2009 - Livre IV « Pour une société qui se développe » – Chapitre 1 « Finances publiques » - p 13/77

Proposition : Lutter contre la fraude fiscale14141414

Les investissements voulus par Ecolo doivent permettre au SPF Finances de concentrer ses efforts sur la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales qui, chaque année, coûtent des milliards d’euros à l’Etat belge et qui sont source d’inégalité entre les citoyens. Ecolo a d’ailleurs été à la base de la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire chargée d’examiner les grands dossiers de fraude fiscale. En particulier, Ecolo préconise que des moyens supplémentaires soient mis à la disposition de l'Inspection Spéciale des Impôts (ISI), organisme particulièrement efficace. Ecolo propose l'élargissement des compétences de certains fonctionnaires de l'ISI qui pourraient constater eux-mêmes des infractions fiscales à caractère pénal et qui, par définition, sont en lien direct avec des opérations de blanchiment. Ils recevraient la qualité d'officier de police judiciaire, avec cette finalité spécifique de recueillir les informations nécessaires. Les substituts du Procureur du Roi, spécialisés en matière fiscale, constitueraient leurs interlocuteurs privilégiés. Dans l'état actuel de notre législation, ces affaires doivent être prises en charge par des tiers, occasionnant pertes de temps et d'efficacité. Sans compter le manque récurrent d'effectifs et de moyens à disposition dans ce secteur. En prenant cette mesure opérationnelle, couplée à une offre de formation adéquate, les enquêtes portant sur ces cas de fraude fiscale grave et organisée passeraient du niveau administratif au niveau judiciaire, permettant ainsi de prendre des mesures d'instruction plus efficientes. Ecolo propose en outre de multiplier les accords de coopération avec les administrations fiscales des autres pays. C'est grâce à l'existence de ce type d'accord avec la France que le fisc a, par exemple, pu relever que sur 29 000 Belges possédant une deuxième résidence en France, seuls 12 000 la déclarent. Par ailleurs, la signature de tels accords ne suffit pas ; il faut aussi qu'ils soient mis en œuvre. Dans l'exemple précité, l'activation de l'accord n'a malheureusement pas été immédiate mais a nécessité un long travail de pression.

14 Voir à ce sujet nos propositions du Livre II, Chapitre 1 « Protection et action sociales ».

Ecolo propose par ailleurs de mettre en place des mesures anti-abus qui permettraient de taxer les bénéfices délocalisés « artificiellement », notamment dans des paradis fiscaux. Il conviendra au préalable d’amender la liste actuelle des paradis fiscaux afin de l’élargir à tous les paradis fiscaux repris dans la liste OCDE. Ecolo préconise d'interdire à toute institution financière belge toute transaction financière de et vers les paradis fiscaux listés. Le Gouvernement belge doit demander aux autres membres de l’Union européenne d'en faire de même. Il conviendra également de développer les outils législatifs permettant une lutte efficace contre le blanchiment : en octobre 2008, la Commission européenne a traduit la Belgique devant la Cour européenne de Justice pour non-transposition d’une directive de 2005, sur la lutte contre le blanchiment et qui aurait dû être transposée pour fin 2007. La lutte contre la fraude fiscale ne se limite évidemment pas à la Belgique, mais doit également porter sur la fraude et le crime économique au niveau international. Dans ce cadre, Ecolo propose :

d’établir un contrôle public international sur les sociétés de clearing et de rooting financier ;

de démanteler les paradis fiscaux, pour éviter la fuite des capitaux et la concurrence fiscale entre Etats ;

de rendre la Cour pénale internationale compétente pour les grands crimes économiques.

Parallèlement à ces différentes propositions, Ecolo entend mettre fin aux politiques d'amnistie fiscale. Il semble en effet inconcevable d’annoncer, d’une part, vouloir lutter efficacement contre la fraude fiscale et, d’autre part, mener des opérations d’amnistie fiscale à répétition (DLU, DLU bis, amnistie du secteur des diamants).

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PRIORITE N°3 : GERER LES FINANCES D’UNE MANIERE

PLUS RESPONSABLE

Proposition : Garantir des finances publiques saines

Pour Ecolo, il faut viser à terme un délai raisonnable de paiement par les pouvoirs publics, sous peine d'un dédommagement aux fournisseurs lésés. Ainsi, l’Etat fédéral met en moyenne 75 jours à payer ses factures, soit plus que les 60 jours recommandés par l’Union européenne. Si, on intègre dans ce calcul les conséquences de la technique « de l’ancre » utilisée régulièrement depuis 2002 au niveau fédéral (l’Etat a postposé le paiement de 1 milliard € de 2007 vers 2008), ce délai atteint alors 135 jours. A côté de cela, les mêmes fournisseurs ne peuvent souffrir de retard dans le paiement de la TVA ou de l’impôt des sociétés, sous peine de sanctions… de l’Etat ! D’un côté, le Gouvernement dit vouloir soutenir activement l’économie belge et, de l’autre, il cause avec cette opération purement cosmétique un sérieux préjudice à cette même économie. Nous voulons donc que les pouvoirs publics paient leurs factures dans un délai acceptable, sous peine de devoir payer des dédommagements (au-delà des habituels intérêts de retard) aux fournisseurs lésés ou de leur octroyer des facilités dans le paiement de leurs taxes et impôts. Ce paiement à temps et à heure doit être une mesure habituelle de saine gestion et pas un one-shot comme le prévoit le Gouvernement dans son plan de relance pour 2009. Il en est de même de la liquidation des subventions octroyées par les pouvoirs publics, en particulier au niveau des entités fédérées, dont le versement avec retard conduit le plus souvent les associations bénéficiaires à solliciter des crédits bancaires coûteux et énergivores, quand il ne les contraint pas à licencier, voire à mettre la clé sous le paillasson. Pour Ecolo, il faut également arrêter le pillage des actifs de l'Etat à des seules fins d'équilibre budgétaire (factice) à court terme. Toute décision concernant la vente d'un actif appartenant à l'Etat doit tenir compte d'une perspective à long terme. Elle doit intégrer les coûts qu'implique une telle vente pour les années futures et non uniquement les rentrées

directes. La cession de l'actif ne pourra se faire que si les bénéfices directs excèdent les coûts futurs. De même, il est irresponsable de tenter de maquiller les comptes en faisant jouer les vases communicants, en définançant certains secteurs publics (pensons par exemple à la ponction prévue sur les réserves de la SNCB) pour approcher un équilibre de court terme du budget général mais en fragilisant par la même occasion un service collectif dans lequel l’Etat a désinvesti. Enfin, l’Etat fédéral ne peut pénaliser les entités fédérées pour réussir les objectifs budgétaires qui lui ont été assignés. Le recours devenu systématique, en dehors des accords conclus quant aux trajectoires budgétaires pluriannuelles, aux Communautés et Régions pour corriger le non-respect de ses objectifs budgétaires, doit prendre fin.

Proposition : Assurer la transparence

Ecolo propose de rendre publics les travaux et décisions du Comité de concertation afin de permettre aux parlementaires d'exercer pleinement leur rôle de contrôle. Parallèlement, Ecolo demande d'assurer une remise des comptes de l’Etat et des entités fédérées, des organismes d’Intérêt public et des services à gestion séparée auprès de la Cour des Comptes dans le délai légal prévu. Ecolo estime également que les techniques de débudgétisation doivent être réservées au financement ciblé d’investissements dont l’intérêt public est manifeste et prioritaire et ne peuvent être utilisées que sous le contrôle du Parlement (avec l’appui de la Cour des Comptes) et dans la plus grande transparence. Enfin, Ecolo préconise une révision du plan comptable de la Régie des bâtiments qui, en son état actuel ne permet pas de donner une évaluation correcte de la valeur des bâtiments dont la gestion a été confiée à l'Etat. Cet état de fait empêche non seulement un contrôle efficace des comptes, mais entrave aussi toute prise de décision éclairée concernant la gestion du parc de bâtiments de la Régie.

Programme Ecolo 2009 - Livre IV « Pour une société qui se développe » – Chapitre 1 « Finances publiques » - p 15/77

PRIORITE N°4 : CONSIDERER LE FINANCEMENT DES

COMMUNES COMME UN REEL LEVIER DE

SOLIDARITE ET DE DEVELOPPEMENT

DURABLE Pour Ecolo, il est essentiel, au niveau régional,

de renforcer la solidarité entre toutes les communes. Il est également indispensable de leur attribuer les moyens correspondant aux nouvelles missions qui leur sont confiées.

Ecolo propose, de longue date, de réformer le

fonds des communes dans un triple but : prendre davantage en compte les différences entre communes en termes de capacité fiscale ; considérer le rôle de pôle joué par les métropoles, villes et centres ruraux afin d’intégrer les externalités et coûts de centralité et lutter contre l’étalement urbain ; améliorer sa transparence et sa prévisibilité et moderniser certains critères devenus obsolètes.

En Wallonie, une réforme est intervenue,

refinançant les communes et poursuivant en partie ces objectifs. Il conviendra de tenir un monitoring des finances communales, d’évaluer la mise en œuvre de cette réforme et d’en optimaliser certains éléments. Ecolo veillera, dans ce cadre à renforcer la prise en compte de ces critères de solidarité et de développement territorial.

En Région de Bruxelles-Capitale, Ecolo

poursuivra les mêmes objectifs, en veillant par ailleurs à augmenter également le financement des communes.

Ecolo propose en outre de régionaliser une

part des taxes additionnelles communales (IPP et Précompte immobilier), afin de la redistribuer entre les communes à l’intérieur du fonds des communes à travers une clé de répartition fondée sur la solidarité.

Ecolo est également favorable à une meilleure

objectivation des flux entre Régions et communes, notamment, en Wallonie, en transformant les travaux subsidiés en un système de droit de tirage, comme c’est déjà le cas à Bruxelles. Ceci, en plus d’éviter le saupoudrage des moyens et le clientélisme, garantira une meilleure prévisibilité des dépenses et/ou investissements tant pour les autorités communales que pour les éventuels fournisseurs ou maîtres d’œuvre.

Ecolo se soucie par ailleurs de l'impact budgétaire pour les communes des décisions prises par les autorités supra-communales. Sur base d'une analyse préalable de l'impact de la politique en cause sur les finances communales, l'entité responsable de la décision devra dès lors, lorsque cela s'avère nécessaire, s'acquitter d'une compensation pérenne et dynamique (tenant compte de l'évolution des prix notamment). Il convient entre autres d’assurer effectivement la neutralité budgétaire de la réforme des polices afin de permettre le développement d’une vraie police de proximité15. Il en est de même de la réforme des services d’incendie, dont la neutralité budgétaire doit être garantie et qui doit, à l’inverse, être l’occasion d’un meilleur équilibre des contributions fédérale et communale. Dans le même sens, il importera de compenser l’impact éventuel qu’une régionalisation du Fonds de sécurité routière pourrait avoir, le cas échéant, sur les moyens des zones de police.

Dans le même esprit, les Régions ne peuvent

s’engager pour des objectifs de trajectoire budgétaire portant sur les finances communales sans concertation préalable avec les représentants des autorités communales.

Enfin, Ecolo soutient les propositions de

l’Union des Villes et des Communes des trois Régions et reprises par ailleurs par le Conseil Supérieur des Finances, de mettre en place un système permanent d’avance pour le versement des additionnels à l’IPP (versement mensuel à chaque commune d’un montant équivalent à 1/6 de 95 % du montant que le SPF a estimé lui revenir pendant les 6 premiers mois de l'année). Ceci inciterait par ailleurs l’Etat fédéral à accélérer l'enrôlement.

Pour terminer, les subsides européens – et

plus particulièrement les fonds relatifs à la politique de cohésion – constituent des outils non négligeables parmi les sources de financement potentielles à l'intention des villes et communes, qui sont du reste de nature à favoriser les efforts dans les domaines de la revitalisation du tissu économique. Il apparaît cependant que les mandataires et agents communaux n'ont parfois qu’une connaissance partielle de ces possibilités de financement et des conditions d'éligibilité. A la lumière des moyens octroyés dans le passé, il s’avère par ailleurs que ces financements sont surtout concentrés dans certaines grandes villes.

15 Voir à ce sujet nos propositions du Livre II, Chapitre 8 « Sécurité – Police – Incendie ».

Programme Ecolo 2009 - Livre IV « Pour une société qui se développe » – Chapitre 1 « Finances publiques » - p 16/77

Ecolo propose dès lors de mettre en place des programmes régionaux visant à diffuser l'information relative aux différentes possibilités de financement européen et aux conditions d'éligibilité auprès des mandataires et des agents communaux et à organiser des formations spécifiques à leur attention. Ecolo propose également de procéder à une évaluation annuelle au sein des assemblées régionales de la mise en œuvre de la politique de cohésion.

Programme Ecolo 2009 - Livre IV « Pour une société qui se développe » - Chapitre 2 « Régulation » - p 17/77

PROGRAMME ECOLO ELECTIONS 2009

Livre IV - Pour une société qui se développe

Chapitre 2 « Régulation »

Passer d’une économie de marché à une économie de projets

La régulation aujourd'hui : Etat des lieux et analyse

Ecolo se refuse à croire depuis longtemps que

le libre-marché puisse accoucher naturellement et sans régulation externe d’une société solidaire, respectueuse de l’environnement et génératrice d’emplois de qualité. C’est pourquoi, avec d’autres, Ecolo affirme la nécessité et la possibilité d’un autre ordre économique construit sur l’initiative, la participation, la solidarité, l’équité, le bien-être et le développement durable pour tous, pour une économie juste et dynamique.

Les constats que l’on peut actuellement tirer

de l’observation des crises engendrées par une économie mondiale globalisée et libéralisée, dont l’objectif principal consiste à maximiser le taux de profit, nous confortent dans cette analyse. Jamais, les impasses du système actuel n’ont en effet été aussi criantes : dérèglements climatiques, pollutions en tous genres, épuisement des ressources, fracture sociale dans les nations riches et dénuement total dans les pays les moins favorisés, tensions internationales, crises financières à répétition et d’ampleur toujours plus grande.

La philosophie de la politique économique

d’Ecolo vise dès lors à passer d’une économie de marché à une économie de projets, des projets qui placeront la Belgique sur la voie d’un développement durable. Notre volonté est ainsi de construire une alternative pragmatique et crédible au mode de croissance actuel. Dans cette optique, nous affirmons que l’écologie est une nécessité pour l’économie. Le développement durable n’est pas une contrainte nouvelle pour les entreprises, mais une opportunité pour l’activité et pour l’emploi et une nécessité pour éviter demain, des coûts bien plus élevés. Le développement durable n’est pas une contrainte pour les consommateurs mais une source d’économies qui améliore notre pouvoir d’achat et

une source de bien-être qui améliore l’état de notre environnement et donc notre santé.

La crise économique globale démontre

aujourd'hui, s'il le fallait, que l'Etat dont le rôle a été réduit depuis 20 ans, a une responsabilité essentielle à exercer comme acteur de marché, stimulateur et régulateur. Il s'agit donc pour nous, d'orienter et d'encadrer le marché plutôt que de subir ses diktats. Nous refusons donc que l'économique s'installe au-dessus ou à la place du politique. Au contraire, nous pensons que le développement économique, même dans une économie globalisée, doit se retrouver dans le champ du débat politique car, c'est à la société tout entière de forger un destin valable pour tous et d’être au service du développement durable et du bien être de la société.

L’Etat comme acteur sur le marché

Un plan d'investissements L'Etat peut tout d’abord intervenir directement

dans l’économie par le biais d’investissements publics – que nous voulons orientés vers un développement riche en valeur ajoutée environnementale et sociale – ainsi que par la fourniture de services de qualité à la collectivité16. L’Etat ne pourra toutefois pas rencontrer correctement cette mission sans avoir au préalable, opté pour une gestion transparente et efficace de ses finances publiques17.

Des marchés publics durables Par ailleurs, les marchés publics constituent un

excellent levier pour imprimer un sens durable à la politique économique du pays18. Le volume annuel

16 Voir à ce sujet nos propositions du Livre V, Chapitre 3 « Service public ». 17 Voir à ce sujet nos propositions du Livre IV, Chapitre 1 « Finances publiques ». 18 Voir à ce sujet nos propositions du Livre V, Chapitre 3 « Service public ».

Programme Ecolo 2009 - Livre IV « Pour une société qui se développe » - Chapitre 2 « Régulation » - p 18/77

des marchés publics lancés par les acheteurs publics de l'Europe des 25 s'élève, en moyenne, à 16 % du PIB de l’Union19. Ramenés à l'économie belge, on peut évaluer ces marchés (en y intégrant aussi les investissements publics) à un montant compris entre 15 et 50 milliards €.

Outre le fait d'approvisionner l'Etat en services,

biens et travaux, les marchés publics représentent un formidable outil économique. Pourtant, la façon dont l'Etat achète stimule encore trop peu l'innovation environnementale, sociale et éthique. En effet, une récente étude réalisée pour le compte de la Commission européenne confirme que les critères environnementaux ne sont pas assez pris en compte lors de la passation des marchés publics. Dans 18 des pays de l'Union (dont la Belgique), moins de 30 % de ces appels exigent le respect de critères environnementaux.

Force est de constater que ce sont

actuellement les petits marchés (les fournitures de bureaux, le café … en bref, quelques miettes du PIB) qui intègrent les avancées environnementales, sociales et éthiques. Il est temps d'étendre aux gros marchés publics (l'immobilier, les véhicules, l'énergie, les gros contrats de fournitures, les concessions, etc.) les avancées en termes de durabilité : l'impact économique dans les filières porteuses d'emplois en sera démultiplié et permettra d'importantes innovations environnementales et sociales.

En outre, si les gouvernements ne désirent

pas que les entreprises wallonnes, bruxelloises et belges prennent du retard à proposer des produits plus écologiques, il est temps que les pouvoirs publics passent du stade de projet « pilote » à une relative systématisation, sans quoi la majorité des produits écologiques seront importés des pays du Nord et de l'Est. Des pays comme l'Autriche, le Danemark et la Finlande ont 10 à 15 ans d'avance en matière d'achats écologiques, et l'économie de ces pays a donc aussi, sous l'impulsion de l'Etat, pris une belle longueur d'avance.

L'Etat comme initiateur de projets durables

L'Etat peut également faciliter l’émergence

d’un cadre propice au développement d’initiatives privées et publiques dans une optique de développement durable, afin d’améliorer la qualité de la vie humaine tout en respectant les capacités de charge des écosystèmes.

19 Source : http://www.europarl.europa.eu/facts/3_4_1_fr.htm.

A ces fins, il dispose de différents leviers permettant de mettre en place les conditions optimales à la construction d’une société durable, solidaire, émancipatrice, démocratique et planétaire.

Un de ces leviers est l’outil fiscal. Ainsi, le

choix des politiques fiscales ne doit-il pas se limiter à un choix d’efficacité et/ou d’équité, il doit aussi être réfléchi sous l’aspect incitatif. Les mesures fiscales incitatives touchent aussi bien l’offre (favoriser les investissements dans les secteurs que nous jugeons prioritaires / réduire les productions non soutenables) que la demande (orienter les choix de consommation vers des produits verts et solidaires / abandonner des modes de consommation non soutenables). Ces propositions fiscales ne font pas l’objet du présent programme, mais sont détaillées dans les programmes ad hoc (logement, R&D, énergie, environnement, mobilité, etc.).

L'Etat comme régulateur pour un encadrement efficace des marchés

Enfin, l’Etat peut établir des règles pour éviter

toute concurrence non durable au niveau belge, européen ou international.

Les raisons des échecs et dysfonctionnements

de l’actuel système de libre-échange sont à trouver, pour l’essentiel, dans un modèle de croissance économique non durable et dans une régulation insuffisante.

Dans le contexte d’une économie de marché

mondialisée et de plus en plus dérégulée, les bénéfices réalisés par les entreprises ne se traduisent plus suffisamment en investissements (ou alors, le plus souvent en investissements… de rationalisation) et encore moins en emplois.

Par la régulation que nous prônons, c’est ce

lien entre bénéfices, investissements, emplois et respect de l’écosystème que nous voulons renforcer. Il nous faut donc retravailler ce lien et conditionner davantage toute nouvelle forme d’aide publique à un engagement clair en termes de création d’emplois et d’impact sur l’environnement, suivant un mécanisme à déterminer avec les partenaires sociaux.

Il nous faut également, et d’un point de vue

plus international, mettre en place les mécanismes qui permettent de sortir des impasses liées à la financiarisation de l'économie. Il s'agit de canaliser le crédit vers des projets à haute valeur ajoutée en termes de durabilité sociale et environnementale.

Programme Ecolo 2009 - Livre IV « Pour une société qui se développe » - Chapitre 2 « Régulation » - p 19/77

Une autre caractéristique des marchés financiers, régis par l’exubérance et le mimétisme, est qu’ils sont pro-cycliques : les fonds affluent, souvent de manière excessive, quand la croissance est là, mais ils refluent, de façon tout aussi excessive, dès que l’horizon se couvre. Malheureusement, les outils publics, au premier rang desquels il faut placer la Banque centrale européenne (BCE), vont dans le même sens20.

La régulation ne concerne évidemment pas

que les seuls marchés financiers. Nous pensons en effet qu’une conduite des affaires économiquement et socialement responsable dépend, d’une part, de comportements privés éthiques et, d’autre part, d’une législation qui, en forçant à la transparence, à une véritable et saine concurrence ou encore à la responsabilisation en matière d’activités dangereuses, conduit à une économie plus efficace, au bénéfice de tous : consommateurs, travailleurs et entrepreneurs.

L’inscription de l’économie dans le

développement durable est une responsabilité qui doit et peut être portée par les pouvoirs publics. L’expérience montre qu’un marché soutenu (par exemple via les programmes de recherche), orienté (via les incitants économiques directs ou indirects) et régulé (via des normes à atteindre progressivement) peut favoriser la production et l’usage de techniques et produits de qualité.

La régulation demain : Propositions d’Ecolo

PRIORITE N°1 : ORIENTER LES MOYENS DISPONIBLES

VERS LES SECTEURS DURABLES

Proposition : Orienter l'argent des fonds de pensions vers le développement durable

L’argent des fonds de pension ne dort pas. Il est investi dans l’économie mondiale. Malheureusement, ces moyens colossaux (plus de 60 milliards € pour la seule Belgique) servent davantage à la spéculation et, partant, à la dérégulation économique, qu’à la relance d’une économie régionale et orientée vers le développement durable. Parfois même, les

20 Voir à ce sujet nos propositions du Livre VI, Chapitre 1 « Europe » et Chapitre 2 « Relations internationales ».

investisseurs qui gèrent ces fonds agissent contre l’intérêt des travailleurs cotisants ! Pour répondre à ce paradoxe et favoriser une économie plus « durable », nous défendons l’idée d’une loi visant à « réguler les investissements des fonds de pension ». A cet effet, le groupe Ecolo-Groen! de la Chambre a déposé une proposition de loi visant à une orientation durable des fonds de pension du deuxième et du troisième piliers et des réserves du fonds de vieillissement. Il s’agirait par là de lutter contre leur politique de placement à court terme et d’orienter peu à peu leurs placements vers des secteurs durables et équitables. Ainsi, l’adoption de cette loi permettrait de simultanément lutter contre le « court-termisme » des marchés financiers tout en dirigeant l’épargne disponible vers des activités porteuses d’améliorations sociales et environnementales, elles-mêmes créatrices d’emploi et de richesse.

Proposition : Favoriser les placements éthiques

La finance est à l’origine ou aggrave de nombreux fléaux dans le monde. A titre d’exemple, alors que des millions de personnes souffrent de faim dans le monde, certaines banques proposent aux épargnants des produits qui spéculent sur les denrées alimentaires. La spéculation sur les matières premières est ainsi en partie responsable de la perte de pouvoir d’achat des ménages. L’appréciation des prix provoquée par cette spéculation est alors répercutée dans les prix des denrées alimentaires et augmente le coût de la vie. Aussi, un nombre croissant d’épargnants s'interrogent à juste titre sur la destination réelle de leur épargne et veulent lui donner du sens, une plus-value éthique ou sociale. Pour toutes ces raisons, Ecolo propose de favoriser fiscalement les placements éthiques. Par ailleurs, il n’est pas toujours aisé pour les entreprises de concilier respect du développement durable, rentabilité à court terme et accès au marché des capitaux. De plus, les sociétés non cotées en bourse éprouvent des difficultés pour éveiller l’intérêt des intermédiaires financiers. L’émergence des produits financiers éthiques et des placements durables répond à cette préoccupation grandissante de financement.

Programme Ecolo 2009 - Livre IV « Pour une société qui se développe » - Chapitre 2 « Régulation » - p 20/77

Malgré ses bonnes performances financières, le marché des fonds éthiques/durables reste toutefois une goutte d'eau dans l'océan des fonds de placement. Afin d’encourager les épargnants à investir davantage leur épargne dans ce type de projet, nous proposons d’introduire une réduction ou un crédit d’impôt basé sur le mécanisme utilisé actuellement dans le cadre de l'épargne-pension ou dans celui de la corbeille « épargne long terme »21. Cette réduction d’impôt serait octroyée aux personnes physiques en cas de placement direct de capital dans des sociétés à finalité sociale ou de placements dans des SICAV et des comptes à terme éthiques/durables. Comme pour la mise en œuvre de la loi visant à orienter les fonds de pension, le caractère éthique/durable des produits financiers fiscalement récompensés devrait être certifié par un organisme indépendant. Les fonds placés dans les SICAV et comptes à terme éthiques/durables devraient être réinvestis à concurrence d’un certain pourcentage, dans des sociétés non cotées en bourse.

Proposition : Systématiser les clauses environnementales, sociales et éthiques

Ecolo propose que le pouvoir adjudicateur utilise de manière plus systématique la possibilité d’imposer des conditions de marché permettant de tenir compte d'objectifs sociaux et éthiques. Une résolution a été adoptée à l’initiative d’Ecolo en décembre 2002 et transposée sous l’arc-en-ciel dans un article de la loi-programme d'avril 2003. Cet article précise que les pouvoirs adjudicateurs peuvent imposer des conditions de marché permettant de tenir compte d'objectifs sociaux et éthiques. Malheureusement, très peu d’autorités publiques utilisent cette latitude. Dans la même logique, Ecolo souhaite que les directives européennes transposées en droit belge et qui intègrent des critères environnementaux dans la définition des objets des marchés publics, soient effectivement et systématiquement prises en compte dans toutes les phases de passation des marchés. Nous proposons aussi la mise sur pied, à destination des collectivités locales et des

21 Voir à ce sujet nos propositions du Livre II, Chapitre 1 « Protection et action sociales ».

services techniques des différentes entités fédérées et fédérale, de formations visant à améliorer les performances environnementales, sociales et éthiques des marchés publics, dans le but de protéger les travailleurs et les travailleuses ainsi que la planète, tout en luttant contre toute forme de dumping.

Proposition : Favoriser les produits du commerce équitable

Ecolo propose de réserver les marchés de certains achats publics à des produits issus du commerce équitable. Tout comme il a été possible d'intégrer des critères sociaux dans notre législation en matière de marchés publics, il est possible d'élargir cette volonté aux petits producteurs du Sud. Les critères du commerce équitable incluent non seulement le respect de l'environnement et des droits des travailleurs, mais également des critères sociaux au bénéfice de ces petits producteurs. Les produits issus du commerce équitable sont également des vecteurs de développement durable dans les relations commerciales (et non charitables ou d'assistance) entre le Nord et le Sud. Le Gouvernement actuel, pas plus que le Gouvernement précédent, n’a agi conformément à ses déclarations d'intention. Pour Ecolo, la législation relative aux marchés publics doit introduire le commerce équitable parmi les critères de sélection.

PRIORITE N°2 : LIBERER L’ECONOMIE DE LA DICTATURE

DE LA FINANCE

Proposition : Changer d’objectif et de règles du jeu

Depuis les années ‘90, la finance internationale est en proie à des crises financières récurrentes. Dans cette série, la crise révélée à partir de la problématique des subprimes est incontestablement la plus grave depuis le krach de 1929. Les conséquences sont d’une ampleur inédite : les pertes des banques pourraient s’élever à quelques 2 000 milliards $22. Cette crise financière mondiale

22 Le professeur Roubini de l’Université de Washington qui avait prédit la survenance de la crise des « subprimes » a estimé que le total des pertes financières pourrait s’élever à un montant compris entre 1 000 et 2 000

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induit un étranglement de l’activité économique. En définitive, ce seront les autorités publiques – et donc les contribuables et l’économie réelle ou dit autrement, les travailleurs et consommateurs – qui devront assumer la plus large part des conséquences des excès de la finance dérégulée. Nous assistons ni plus ni moins qu’à la faillite d’un modèle, celui du laisser-faire, de l’économie casino et du profit à court terme. Un modèle déconnecté de la réalité des citoyens mais aussi de nombreuses entreprises. La crise systémique, qui s’est brutalement étalée à la une de l’actualité en septembre 2008 mais qui couvait depuis déjà bien longtemps, requiert une solution tout aussi systémique. La question qui se pose est celle de la soutenabilité du paradigme de la financiarisation. Les exigences du retour des marchés financiers ont été supérieures aux taux de croissance de l'économie depuis une vingtaine d'années. Cette tendance lourde de régulation par les taux de profit entraîne une modification de la répartition du PIB, en faveur du capital et au détriment du travail. Mais ces exigences de retour démesuré débouchent aussi sur une impasse dont nous sommes aujourd’hui les témoins. Pas question pour les écologistes d’un quelconque relifting de façade. Sauver un système qui privatise les bénéfices et collectivise les pertes n’est pas notre objectif. Il faut en sortir au plus vite et se donner pour objectif de reconnecter l’économie avec notre projet de développement durable. Pour atteindre cet objectif transversal, il faut oser s’attaquer au cœur du système, à ses règles de fonctionnement. Les propositions qui suivent en sont la preuve : Ecolo ne se satisfera pas de mesures prises dans l’urgence et parfois dans la précipitation.

Proposition : Distinguer clairement les métiers bancaires

Une des réponses à la crise de 1929 avait été dès le milieu des années 30 de séparer les métiers bancaires. D’un côté, la banque commerciale qui récoltait l’épargne et octroyait

milliards $. Certaines de ces études et analyses sont disponibles gratuitement sur www.rgemonitor.com.

les crédits et de l’autre, la banque d’affaires qui plaçait ces fonds dans des produits financiers plus complexes. Depuis le début des années 1990, cette frontière s’est estompée : les banques commerciales se sont lancées dans des activités de plus en plus spéculatives, davantage découplées de l’économie réelle et toujours plus sophistiquées. Ecolo juge indispensable de réinstaurer des frontières étanches entre ces deux types d’acteurs. Pour cela il faut renforcer la mission sociale qui était à la base de la création des banques – conserver et gérer l’argent de tout un chacun tout en donnant la possibilité d’emprunter avec des modalités de remboursement correctes – et interdire aux banques commerciales de prêter des fonds aux banques d’affaires ou d’acheter des produits structurés de ces banques d’affaires. Les banques commerciales se concentreraient donc à nouveau sur leur métier de base : récolter l’épargne et accorder des crédits aux particuliers et entreprises. Les banques d’affaires ne pourraient donc en aucun cas obtenir de dépôts ni de particuliers, ni de banques. Seules les banques commerciales seraient protégées par des garanties d’Etat en cas de faillite. La faillite éventuelle de banques d’affaires n’aurait plus de conséquences sur les banques commerciales. Cela implique une redéfinition du rôle des banques centrales en tant que prêteurs de dernier ressort, rôle à différencier en fonction de la nature de la banque.

Proposition : Mieux protéger les épargnants

Ecolo estime que les banques qui vendent à leurs clients des placements à capital garanti émis par des tiers doivent se porter garantes du capital lorsque le tiers garant de ce capital ne respecte pas ses engagements. Autrement dit, des clients qui ont acheté des placements à capital garanti devront être indemnisés par la banque qui leur a vendu ses produits lorsque le garant initial ne peut rembourser le capital.

Programme Ecolo 2009 - Livre IV « Pour une société qui se développe » - Chapitre 2 « Régulation » - p 22/77

Proposition : Créer des agences de notation publiques et indépendantes

Les agences de notation ont joué un rôle déterminant dans la propagation de la crise financière et bancaire : en donnant des notes trop favorables aux titres émis par leurs clients, elles ont occulté une partie des risques aux acheteurs de ces titres. Le mode de rémunération de ces agences génère également des conflits d’intérêts évidents qui ont contribué à la situation catastrophique dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui. Une agence de notation des produits financiers publique et indépendante du secteur financier est donc nécessaire. Cette agence devrait idéalement être créée au niveau international, mais rien n’empêche la Belgique, associée ou non à d’autres Etats, de prendre l’initiative. Toutefois, il ne s’agit pas de financer cette agence avec de l’argent public, car les profits sont pour le secteur privé. Ecolo entend que l’agence soit financée par le secteur financier lui-même (via une contribution minime automatique et proportionnelle à la valeur des titres émis).

Proposition : Améliorer les normes comptables

L’adoption en Europe des normes comptables IFRS est également un facteur qui a contribué à la crise. Les normes comptables ont imposé une valorisation des actifs financiers à la valeur de marché (mark-to-market), ce qui entraîne une plus grande volatilité des résultats. Ce mode d’évaluation peut même provoquer des pertes comptables potentielles (pas réelles tant que les actifs ne sont pas vendus avec une moins-value) qui peuvent dépasser les fonds propres et, partant, entraîner la faillite virtuelle d’une institution financière. Inversement, dans le contexte d’inflation des actifs financiers que nous avons connu, ces normes ont généré des profits virtuels. Ils sont même l’une des bases des scandales à répétition du début du millénaire (le cas Enron en étant l’emblème). Les anciennes normes belges permettaient aux banques d’adopter des méthodes d’évaluation moins sensibles à l’évolution des marchés financiers, ce qui avait pour effet de lisser le résultat. Ces normes belges permettaient aussi de constituer plus facilement des réserves pour faire face à des coups durs. Les résultats

comptables étaient donc moins spectaculaires dans un contexte de marchés haussiers, mais aussi moins mauvais dans un contexte de marchés baissiers. L’application à toutes les entreprises et aux activités non spéculatives des entreprises financières de nouvelles normes comptables moins volatiles est donc indispensable pour stabiliser les résultats de ces entreprises à un niveau plus réaliste.

Proposition : Ramener toute opération dans le bilan

La crise bancaire a révélé des pratiques dans le chef des banques visant à dissimuler une partie du passif notamment en ayant recours à des véhicules d’investissement situés dans des paradis fiscaux ou des places financières non régulées. En l’absence de régulation, ces filiales ont pu mener toutes sortes d’opérations risquées à l’insu des autorités, des actionnaires et des épargnants du pays de la maison-mère. Ecolo entend qu’à l’avenir, les normes comptables empêchent la constitution d’engagements importants hors du bilan des banques (de manière complémentaire aux règles CFC, Controlled Foreign Capital23).

Proposition : Obliger la détention d’actifs sûrs

Dans le schéma écologiste de séparation des métiers bancaires, les banques commerciales devraient être limitées dans la détention d’actifs à risques élevés. Ci-dessous : un bilan simplifié d’une banque commerciale fictive (moyenne de la situation des banques belges). Actuellement, les banques détiennent divers actifs financiers, dont certains ont un degré de risque élevé (participation dans ou prêt à des hedge funds, titres « supbrimes », produits structurés, etc.), pouvant atteindre jusqu’à 23 % du total de l’actif. Ce type d’actifs a été regroupé dans le poste « autres titres » du tableau ci-dessous. La détention de ce type d’instruments a été jusque récemment (tant que tout allait bien…) plus lucrative pour la banque que l’octroi de crédits à ses clients (ce qui est pourtant son métier de base). En revanche, la détention de titres non risqués est minime (5 %), car ces titres sont en théorie

23 Voir plus loin.

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moins rémunérateurs. Comme le montre le tableau ci-dessous, le financement des clients (particuliers et entreprises) ne représente que

40 % de l’actif de la banque, ce qui est trop faible.

Tableau 1 : Bilan actuel (moyenne des banques belges)

Actif Passif

Créances banques 30 Capital 4

Prêts clients 40 Réserves 3

Titres sûrs 5 Dépôts 45

Autres titres 23 Dettes banques 40

Divers 2 Divers 8

TOTAL 100 TOTAL 100

D’ailleurs si l’on observe le compte de résultat des banques belges on constate qu’elles réalisent, en moyenne, 56 % de leur résultat en revenus divers et seulement 44 % en résultats d’intérêts (marge d’intermédiation et différentiel de taux)24. La rentabilité sur fonds propres des banques belges est passée de 8,7 % en 1993 à 21,4 % en 200625. Cela peut s’expliquer à la fois par les opérations plus risquées menées par les banques et par l’insuffisance des fonds propres au regard des risques encourus, mais cela s’est fait au détriment de la sécurité et du long terme. Il est indispensable de réduire les risques pris par les banques commerciales. La stabilité financière, la fonction sociale de financement de l’économie et la sécurité des épargnants doivent primer sur une rentabilité à court terme des banques qui peut conduire à des situations catastrophiques telles celles que nous connaissons aujourd’hui. Idéalement, Ecolo estime qu’il faudrait limiter la détention de titres financiers à 15 % du total du bilan et ce pour des titres totalement sûrs (selon des notes attribuées par des agences de notation publiques et indépendantes). De plus, les banques commerciales doivent se recentrer sur leur métier de base, c'est-à-dire l’octroi de crédits (cela se traduirait par une augmentation de ce poste d’actif dans leur bilan) : une banque commerciale a pour objectif de prêter de l’argent et pas d’investir dans des titres risqués.

Tableau 2 : Bilan restructuré (hypothèse)

Actif Passif

Créances banques 25 Capital 8

Prêts clients 60 Réserves 7

Titres sûrs 15 Dettes banques 25

Dépôts 60

TOTAL 100 TOTAL 100

24 Febelfin, Vade-mecum statistique du secteur bancaire 2006, p. 9. 25 Ibidem, p. 10.

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Proposition : Limiter la titrisation

La titrisation est au cœur de la crise actuelle. Ce mécanisme permet aux banques de revendre leurs crédits à d’autres sous la forme de titres (cela leur permet de prêter plus avec les mêmes fonds propres, ce qui revient à contourner les règles de bonne gestion). Les banques qui ont octroyé le crédit n’assument plus le risque de défaut de l’emprunteur. Or, les banques connaissent le client et sont les seules à vraiment pouvoir évaluer correctement ce risque de défaut. La titrisation, qui est un des mécanismes principaux à l’origine de la crise actuelle, est trop dangereuse et doit donc être strictement limitée. Concrètement, Ecolo propose d’introduire une double limitation. Il s’agit de limiter, d’une part, la détention de titres de crédits « titrisés » à quelques 5 % maximum des actifs de la banque et, d’autre part, la vente d’une titrisation par une banque à 50 % des crédits couverts par la titrisation. Ainsi, cette

proposition réduira la demande et l’offre de ce type d’instruments financiers dangereux. Une option plus radicale serait d’interdire purement et simplement le mécanisme de titrisation.

Proposition : Renforcer les exigences de solvabilité des banques

Ecolo estime que les normes actuelles en matière de fonds propres sont trop peu exigeantes. Les nouvelles normes Bâle II ont été améliorées pour refléter plus fidèlement le risque de crédit, tenir compte du risque opérationnel et du risque de marché. {Fonds propres de la banque > 8 % des [risques de crédits (75 % en moyenne) + risque de marché (5 % en moyenne) + risques opérationnels (20 % en moyenne)]}. Toutefois, les grandes banques dites « systémiques » établissent leurs propres modèles de risque qui sont validés par le régulateur (la CBFA en Belgique) et déterminent donc le niveau de fonds propres nécessaires sur base de ces modèles.

En théorie, depuis Bâle II, les fonds propres sont plus adaptés aux risques. Mais en réalité, les risques sont devenus plus opaques et les fonds propres sont insuffisants face aux risques réels. La preuve en est que de nombreuses banques éprouvent aujourd’hui de graves problèmes de solvabilité. Ecolo veut dès lors augmenter le minimum requis de fonds propres à 15 % du total du passif pour les banques commerciales. Ces fonds propres se composeraient de capitaux propres et de réserves qui seraient constituées progressivement par prélèvement sur les bénéfices (avant distribution des dividendes). L’exigence de fonds propres serait relevée en fonction des risques de crédit, des risques de

marché et des risques opérationnels des banques commerciales.

Proposition : Limiter l’effet de levier

Il est possible aujourd’hui de prendre des positions sans avoir les fonds nécessaires, c'est-à-dire en s’endettant. Empêcher ce type d’excès est du ressort des chambres de compensation qui doivent, théoriquement exiger des dépôts de marge significatifs pour qui se lance dans des opérations financières. Aujourd’hui, cette marge est parfois réduite à quelques pourcents. C’est évidemment trop faible, car si les positions prises entrainent une

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perte, il n’y a aucune garantie que le spéculateur dispose des fonds pour assumer cette perte. Ce qui peut entrainer des pertes en cascade. Il convient donc d’exiger pour toutes les institutions financières, un dépôt de marge, suffisamment élevé et d’au moins 50 %. Actuellement, il est possible dans certains cas de spéculer avec une mise de 1 %, ce qui correspond à effet de levier de 100. Ces pratiques fortement spéculatives sont réservées à certains acteurs et ne sont heureusement pas accessibles aux particuliers.

Proposition : Interdire la vente à découvert

Un des cas de figure de l’utilisation du levier d’endettement est la vente à découvert. Cette pratique consiste à vendre un titre que l’on rachète ultérieurement. Par cette opération, le spéculateur espère racheter le titre moins cher que ce qu’il l’a vendu dans un premier temps et donc empocher la différence. Cette pratique a amené à ce que, au cours des dernières semaines, davantage d’actions de certaines sociétés cotées ne soient vendues que le total des actions émises par la société (situation absurde qui a conduit à un effondrement de certains cours et à l’interdiction temporaire de la vente à découvert de certains titres financiers). La vente à découvert doit être purement et simplement interdite. Aux Etats-Unis, elle a été réadmise au lendemain du vote du plan Paulson.

Proposition : Supprimer les parachutes dorés

Dans le contexte actuel de crise financière et bancaire gravissime et de faiblesse du pouvoir d’achat des travailleurs, les indemnités de départ, plus communément appelés « parachutes dorés », versées aux dirigeants d’entreprise suscitent une profonde et légitime indignation auprès de la population qui subit actuellement les conséquences néfastes des erreurs commises par ces mêmes dirigeants. En pratique, les parachutes dorés constituent très souvent et de façon paradoxale une récompense pour les mauvaises prestations des dirigeants d’entreprise. Le versement de ces primes de départ astronomiques constitue

une pratique immorale, d’autant plus que les salaires des dirigeants qui bénéficient de ces primes sont déjà en soi bien souvent disproportionnés par rapport à la valeur ajoutée réelle des dirigeants précités. L’argument selon lequel les primes de départ compensent le risque de licenciement pris par le dirigeant, est infondé. En effet, cet argument est déjà avancé pour justifier les rémunérations exorbitantes dont ils bénéficient. En outre, personne n’est aujourd’hui à l’abri du risque de licenciement, d’autant plus que ce sont les salariés et les contribuables qui payent in fine le prix des mauvaises décisions des dirigeants. Il faut mettre fin à la pratique aberrante et injuste des « parachutes dorés ». Concrètement, notre proposition de loi entend imposer aux personnes qui ont une rémunération annuelle supérieure à 250 000€ après retenue des cotisations sociales un taux de 100 % sur les indemnités de départ dépassant 250 000 € ou dépassant 1 mois de rémunération par année d’ancienneté dans l’entreprise. Dans l’attente de cette législation, il convient que l’Etat belge montre l’exemple en empêchant la pratique du « parachute doré » au niveau des entreprises publiques dont il est actionnaire.

Proposition : Encadrer la rémunération des dirigeants

Le Code belge de gouvernance d’entreprise, plus connu sous le nom du Code Lippens, stipule uniquement que : « Le niveau de rémunération est suffisant pour attirer, garder et motiver des administrateurs et managers exécutifs ayant le profil défini par le conseil d'administration ». Ainsi, ce Code de gouvernance ne préconise qu’un niveau de salaire suffisant, sans s’interroger sur la question des salaires excessifs. Pour toute mesure régulatrice, il est stipulé que les rémunérations des dirigeants devront être publiées dans le rapport annuel de l’entreprise. De plus, ce Code n’est pas contraignant et plusieurs entreprises du BEL20 ne respectent pas la recommandation de publication des rémunérations. Interrogé sur la raison de l’ampleur de sa rémunération en 2007, qui a atteint la somme

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de 3,91 millions €, l’ancien CEO de Fortis déclarait à la presse26 : « Il n’y a pas beaucoup de gens qui savent faire le boulot que je fais, tout comme peu de gens savent jouer au tennis comme la n°1 mondiale ». Cette déclaration est le reflet de l’arrogance et de la vanité qui caractérisent une certaine élite managériale d’aujourd’hui. En somme, les rémunérations disproportionnées et injustifiées des dirigeants d’entreprise sont à la fois une atteinte grave à l’ordre social et un non-sens économique. Pour cette raison, notre proposition de loi entend plafonner les rémunérations excessives de certains dirigeants d’entreprise en appliquant un impôt supplémentaire de 30 % sur la partie de la rémunération annuelle qui dépasse 1 000 000 € après retenue des cotisations sociales.

Proposition : Mettre fin aux stock-options

Ecolo entend que soient interdites les rémunérations qui dépendent directement de la prise de risque (stock-options et actions). En effet, la rémunération liée au cours de bourse conduit les dirigeants à privilégier le court terme au détriment des intérêts à long terme de l’entreprise et de ses travailleurs. Ecolo souhaite que la rémunération variable des dirigeants soit désormais liée aux performances à long terme de l’entreprise (5 à 10 ans).

Proposition : Taxer les opérations boursières spéculatives

Il est urgent d’introduire une taxe sur les opérations boursières (pas uniquement la spéculation monétaire). L’objectif est ici de décourager, par la fiscalité, les opérations spéculatives sur les titres, les taux et les devises et d’encourager la détention longue des titres financiers (en bon père de famille) et une bonne gestion du risque par les entreprises. Il s’agirait d’introduire une taxe de faible taux (entre 0,1 % et 0,5 %) sur toutes les opérations financières27 ; ce faible taux ne

26 « Salaire : ‘Peu de gens savent faire le boulot que je fais’ », dans La Libre Belgique, 23 avril 2008. 27 Cette taxe sera payable à l’Etat belge notamment lorsque le lieu de négociation, le lieu d’enregistrement comptable, le lieu de règlement de la transaction, le domicile, un siège de direction, d’exploitation, d’administration ou l’établissement d’une partie ou d’un intermédiaire à la transaction se situent en Belgique.

serait pas dissuasif pour l’investisseur ou l’épargnant qui souhaite investir à long terme dans une entreprise. Ce taux maximum de 0,5 % n’est rien comparé au droit d’entrée et/ou de sortie de certains fonds d’investissements qui peuvent s’élever jusqu’à 5 % ou aux frais prélevés par les banques et courtiers pour l’achat d’actions qui peuvent représenter 2 % du prix de ces actions. Par contre, elle serait de facto très dissuasive pour les spéculateurs qui vendent et achètent des titres plusieurs fois dans la même journée. Par ailleurs, le taux de la taxe sur les opérations boursières pourrait être variable en fonction de la volatilité du marché. En période de forte volatilité le taux serait porté à 2,5 % et en période de très forte volatilité à 5 %.

Proposition : Orientation des placements vers le développement durable

Afin de lutter contre la spéculation et de favoriser une économie plus « durable », il est nécessaire de réguler les investissements des fonds de pension. L’objectif est ici de lutter contre leur politique de placement à court terme qui nourrit l’économie casino et d’orienter peu à peu leurs placements vers des secteurs durables et équitables. Actuellement, la durée de détention moyenne de participations des fonds de pension dans les entreprises s’élève à 7 mois, c’est une durée bien trop courte pour entreprendre quoi que ce soit. La proposition de loi qu’Ecolo a déposée ramène ce terme moyen à 5 ans en s’appuyant sur le levier fiscal : l’avantage fiscal actuel ne serait plus octroyé si cette durée moyenne n’est pas constatée. L’adoption d’une telle mesure, d’autant plus justifiée qu’il s’agit là d’épargne subventionnée par l’Etat, permettrait ainsi de simultanément lutter contre le « court-termisme » des marchés financiers et de diriger l’épargne disponible vers des activités porteuses d’améliorations sociales et environnementales, elles-mêmes créatrices d’emploi et de richesse.

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Proposition : Introduire des ralentisseurs sur les marchés financiers

Ecolo juge opportun d’introduire des mécanismes qui ralentissent les mouvements spéculatifs sur les marchés. Ainsi, l’ampleur des mouvements quotidiens des titres sur les marchés financiers serait limitée. On pourrait imaginer une limite maximale de 5 à 10 % de variation des cours, au-delà de cette limite le cours du titre concerné serait suspendu jusqu’au lendemain, voire pour une période plus longue. De plus, des transactions anormales (ordres de vente ou d’achat très significatifs émis par un nombre très restreint d’opérateurs) entraineraient également une suspension de la cotation jusqu’au lendemain (voire ici aussi pour une période plus longue), car ces transactions sont souvent le signe d’une asymétrie de l’information (délit d’initié) et faussent les règles du jeu.

Proposition : Interdire les dopants financiers

Ecolo propose que l’autorité de contrôle (en Belgique, la CBFA) ait le pouvoir et même le devoir d’interdire certains produits financiers

qui excèderaient un niveau de risque tel que déterminé par l’agence publique de notation. Concrètement, le profil de l’acteur financier déterminerait le type de produits financiers qu’il pourrait détenir selon le niveau de risque. Ainsi, les banques commerciales ne pourraient détenir que des actifs financiers avec un risque faible à modéré. De plus, certains produits financiers seraient tout simplement interdits car jugés trop instables ou sans autre but que purement spéculatif et donc sans utilité économique réelle.

Proposition : Création d’un fonds interbancaire public

Pour éviter qu’en cas de crise de confiance les banques commerciales refusent de se prêter les unes aux autres et que les taux interbancaires n’explosent, il conviendrait de créer un Fonds de liquidités interbancaire (national ou européen). Les banques commerciales seraient obligées de prêter progressivement des fonds à hauteur de 10 % de leur pied de bilan à ce fonds qui octroierait des crédits aux banques.

Tableau 3 : Bilan restructuré (avec fonds interbancaire)

Actif Passif

Créances banques 15 Capital 8

Prêts clients 60 Réserves 7

Fonds interbancaire 10

Fonds interbancaire 15

Titres sûrs 15 Dettes banques 10

Dépôts 60

TOTAL 100 TOTAL 100

Ce fonds interbancaire public aurait pour but d’octroyer des liquidités aux banques commerciales selon un mécanisme d’adjudication semblable à celui utilisé par les banques centrales. En cas de crise de confiance entre les banques, celles-ci auraient dès lors encore accès à des liquidités suffisantes via ce fonds interbancaire. En effet, il serait un intermédiaire entre les prêteurs et les emprunteurs qui ne veulent plus faire d’affaires ensemble en raison d’une perte de confiance. Un tel fonds

empêcherait que certaines banques ne coupent volontairement les liquidités à une banque en difficulté afin de l’affaiblir encore plus pour l’avaler par la suite. Bien entendu, les Banques centrales assumeraient toujours leur rôle de prêteur de dernier ressort.

Proposition : Créer un régulateur européen

De plus en plus de banques en Europe sont actives dans plusieurs pays de l’Union. Ces banques transnationales sont moins aisément

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contrôlables par les régulateurs nationaux. En outre, les marchés financiers européens s’interpénètrent de plus en plus. Un régulateur européen compétent pour les marchés de l’Union ou de la zone euro est dès lors devenu indispensable. Ecolo entend que ce régulateur ait pour mission de faire respecter les règles minimales fixées au niveau européen.

Proposition : Ajuster le rôle et la mission de la BCE

La mission de la Banque centrale européenne (BCE) doit être repensée et élargie ; la maitrise de l’inflation ne peut plus être l’objectif quasi exclusif de la BCE. A l’avenir, Ecolo souhaite que la BCE intègre également la croissance durable et la stabilité des marchés financiers comme objectifs prioritaires. Ce nouveau mix d’objectif nécessiterait que la BCE mène une politique des taux plus pro-active à l’avenir et prenant en compte la durabilité économique. De plus, dans le cadre de la séparation des métiers bancaires, Ecolo veut que la BCE soit obligée d’appliquer des taux supérieurs aux banques d’affaires par rapport au taux appliqués aux banques commerciales pour les divers moyens de financement (prime de 100 à 150 points de base, par exemple).

Proposition : Refinancement du fonds de garantie des dépôts

Le fonds de protection des dépôts doit être refinancé par les banques. À terme, Ecolo propose que les réserves du fonds couvrent au moins 5 % des dépôts détenus par les banques commerciales. De plus, il convient que le montant couvert par le fonds soit rapidement relevé, comme cela vient d’être annoncé. Par ailleurs, la protection du fonds de garantie doit être étendue aux produits d’épargne à long-terme, à capital et rendement garanti (type branche 21), qui respectent les principes développés dans notre proposition de loi visant à orienter les placements des fonds de pension. Cette extension de la garantie implique que les compagnies d’assurance (ou les banques commerciales) qui offrent ces produits devront également alimenter les fonds de protection, à due concurrence de leur part

de marché et du bénéfice réalisé sur ces produits d’épargne.

Proposition : Taxer les flux financiers en provenance des paradis fiscaux

Les règles CFC28 consistent à taxer les flux financiers en provenance de sociétés situées dans des paradis fiscaux ou des places financières non régulées. Ces règles CFC peuvent être définies comme la législation anti-abus qui permet une taxation avant distribution dans le pays de résidence des actionnaires sur les revenus réalisés par une société étrangère qui est sous le contrôle des actionnaires. Elles sont un outil indispensable dans la lutte contre la fraude organisée et l’économie casino. Concrètement, les règles CFC permettent de taxer les revenus en provenance de paradis fiscaux et de places financières non régulées (qu’ils soient versés ou attribués). Une banque belge qui aurait un véhicule d’investissement (hors bilan) dans un paradis fiscal, serait taxée en Belgique sur les bénéfices qui y sont générés. Ecolo propose d’intégrer ces règles dans notre législation. La taxation doit être suffisamment dissuasive que pour décourager totalement la constitution de telles sociétés off-shore.

Proposition : Limiter les avantages fiscaux des plus-values

Ecolo propose, afin de sortir du régime fiscal privilégié qui prévaut actuellement sur les plus-values de nature purement spéculative, de limiter l’immunisation fiscale des plus-values réalisées aux sociétés :

qui ont détenu les actions concernées pendant au moins trois ans sans interruption au moment de la cession ;

qui possèdent une participation structurelle dans la société émettrice (au moins 10 %) ;

qui sont à même de prouver que la société émettrice a subi une imposition effective analogue à l’impôt des sociétés qui prévaut en Belgique.

28 Acronyme anglophone pour « Controlled foreign capital ».

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PRIORITE N°3 : FAVORISER UNE CONDUITE DES AFFAIRES ECONOMIQUEMENT ET SOCIALEMENT

RESPONSABLE

Proposition : Instaurer des droits de douane sociaux et environnementaux

La mondialisation débridée est la cause de la montée des inégalités à travers le monde, du gaspillage des ressources et de la destruction de l’environnement. Comme le dénonce Maurice Allais, Prix Nobel d’économie, « une mondialisation généralisée des échanges entre des pays caractérisés par des niveaux de salaires très différents aux cours des changes ne peut qu’entraîner finalement partout dans les pays développés : chômage, réduction de la croissance, inégalités, misères de toutes sortes. Elle n’est ni inévitable, ni nécessaire, ni souhaitable »29. La protection des conditions sociales et environnementales des travailleurs et citoyens requiert l’introduction de droits de douane spécifiques et d’un mécanisme de redistribution des droits retenus sous forme d’aides structurelles aux pays en développement. L’un des enjeux principaux du XXIe siècle est de protéger les acquis sociaux et environnementaux des pays riches et de permettre leur développement au sein des pays émergents. Au « libre-échange », il faut substituer le « juste-échange ». Les droits de douane sociaux ne seraient prélevés que sur les biens importés en Europe, afin de décourager les délocalisations et la concurrence déloyale ; les recettes de ces droits sociaux seraient reversés sous forme d’aide au développement afin d’accélérer le développement social, écologique et économique des pays du Sud.

Proposition : Consolider la responsabilité des entreprises dans les secteurs stratégiques

En matière de responsabilisation des entreprises, Ecolo propose, d'abord et avant

29 M. ALLAIS, La Mondialisation. La Destruction des Emplois et de la Croissance. L’Evidence Empirique, Clément-Juglar, Paris, 1999, pp. 142-146 et 451-455.

tout, d'appliquer ce qui est déjà prévu. Un contre-exemple est donné par le secteur pétrolier. Alors que ce secteur dispose de moyens financiers colossaux, il répercute, sur les consommateurs et sur l’Etat, le coût de l’obligation qui lui est faite de garder des stocks stratégiques. Le nucléaire lui aussi devrait assumer tous les coûts qu’il engendre au présent et au futur. Ce n’est pas le cas et, pour Ecolo, il faut d’abord et avant tout corriger cette situation. D'autres mesures sont à prendre dans le même sens :

veiller à l’assurabilité complète des activités de production, de manière à ce que ces activités dans leur ensemble deviennent civilement acceptables ;

ajuster la responsabilité pénale des sociétés, de leurs administrateurs et de leurs dirigeants en cas de conséquences externes particulièrement graves de leurs activités ;

instaurer le principe de la responsabilité en cas d’impact social et environnemental négatif, même s’il ne découle pas d’une attitude – personnelle ou collective – fautive.

Proposition : Intégrer les dimensions sociales et environnementales dans les rapports annuels des entreprises ; évaluer et développer leur mise en œuvre

Pour Ecolo, il est primordial d'intégrer les aspects sociaux et environnementaux dans les rapports annuels des entreprises. Il convient d’encourager et de généraliser toutes les démarches visant à étoffer ou à compléter les rapports annuels classiques par des rapports sociaux et environnementaux, idéalement intégrés dans une démarche de développement durable. Dans tous les cas d’évolution d’une entreprise, et notamment en cas de cession ou d’acquisition, la dette complète, y compris la dette « environnementale », doit figurer explicitement au programme des charges subséquentes. De la même manière, il faut également améliorer la qualité de l’information et sa diffusion aux stakeholders (travailleurs, fournisseurs, clients …) concernés. Une bonne gestion est

Programme Ecolo 2009 - Livre IV « Pour une société qui se développe » - Chapitre 2 « Régulation » - p 30/77

une gestion qui se base sur une information de qualité, complète et bien diffusée. Ecolo propose également que les coûts des externalités négatives (sociales et environnementales) liées aux activités des entreprises, fassent l'objet d'une évaluation exhaustive et, à terme, soient intégrées dans les coûts de l'entreprise. Le respect des normes et codes de conduites doit devenir obligatoire et non plus seulement volontaire.

Proposition : Renforcer la sélectivité dans l’octroi des aides économiques

Ecolo propose de limiter l’accès au statut d’entreprise en restructuration aux firmes qui sont réellement en difficulté. Il est aussi choquant qu’inacceptable de voir des entreprises largement bénéficiaires recevoir des aides publiques pour procéder à des plans sociaux30. Parallèlement, notre objectif est aussi de renforcer les mécanismes de remboursement des aides pour les entreprises qui délocalisent. Ecolo propose de conditionner le soutien direct et indirect aux entreprises d'exportation, au respect de normes sociales et environnementales fondamentales.

Proposition : Instaurer une cotisation de solidarité sur les billets d’avion

Ecolo propose qu’une contribution de solidarité soit prélevée sur les billets d’avion pour le transport de passagers et de marchandises. Cette contribution de solidarité, qui serait versée dans un fonds, constitue un moyen de financement qui contribuera à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement. Cette proposition s’inscrit dans le cadre du sommet des Nations Unies du 14 septembre 2005 où 79 pays réunis à New York ont souscrit à une déclaration sur les sources innovantes de financement, déclaration co-parrainée par un groupe de six pays (Algérie, Allemagne, Brésil, Chili, Espagne et France). La Commission européenne a souligné dans son

30 Belgacom recourt régulièrement à cette politique. Cette entreprise présente le plan social le plus important pour 2006 (2 500 personnes) alors qu’elle affiche des bénéfices de 28,6 % par rapport à son chiffre d’affaires et de 71,2 % par rapport à ses fonds propres !

dernier document de travail (1er septembre 2005) tous les avantages de ce mécanisme, et notamment la simplicité de sa mise en œuvre.

Proposition : Améliorer la gouvernance d’entreprise

Le Gouvernement a avancé dans l’application du principe de corporate governance, qui enjoint aux organes de gestion de se préoccuper du développement et de la santé de l’affaire dont ils assument la gestion. Il n’en reste pas moins que ce type d’implication de l’administrateur n’est pas encore réellement intégré dans la nature du système économique belge. Ecolo souhaite que la législation soit complétée par l’obligation pour l’administrateur d’adhérer à une charte l’engageant à respecter des principes de gestion saine. Ecolo a également déposé une proposition de loi visant à obliger les entreprises cotées en bourse à publier le détail des salaires et des avantages de toute nature dont jouissent les dirigeants de ces entreprises. La rémunération de ces dirigeants est souvent opaque afin d’en masquer les excès. La transparence devrait limiter les rémunérations excessives qui suscitent l’indignation justifiée des citoyens. Il faudra également étudier l’opportunité d’imposer une limite maximale à la rémunération des dirigeants d’entreprise si cette mesure de transparence s’avérait inefficace31. Par ailleurs, Ecolo propose d’examiner la possibilité, à l’instar de ce qui se passe aux Pays-Bas, de réserver à l’approbation d’un conseil d’entreprise, la désignation et le contrôle de l’indépendance de ses administrateurs et de leurs compétences par rapport aux besoins de la société. Les nominations concernées par ce contrôle seraient, au minimum, celles des administrateurs indépendants de sociétés cotées en bourse. Le système pourrait ensuite être étendu à la nomination de l’ensemble des administrateurs, à commencer par les entreprises publiques.

31 Voir à ce sujet nos propositions du Livre V, Chapitre 2 « Ethique politique et Gouvernance » et Chapitre 3 « Service public ».

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Proposition : Intégrer dans la législation belge les conventions internationales porteuses sur le plan social et environnemental

Pour Ecolo, il est crucial d'intégrer rapidement dans la législation belge les conventions internationales de toute nature, en particulier celles de l’Organisation internationale du Travail, et les directives européennes qui s’inscrivent dans un projet de développement durable. Nous proposons également d'aligner, quand c’est possible, la législation belge, environnementale et sociale, sur celle du pays européen où elle est la plus exigeante.

PRIORITE N°4 : ORGANISER UNE CONCURRENCE PLUS

SAINE POUR UN POUVOIR D’ACHAT AMELIORE

Proposition : Renforcer le contrôle des prix

Nous observons actuellement dans notre pays, une tension grandissante entre les producteurs agricoles et les filières de commercialisation de leurs produits. A titre d’exemple, la crise du lait se poursuit et illustre l’absence de transparence du marché et des prix pratiqués, et le caractère inéquitable des rémunérations d’une série d’acteurs de la filière. D’un côté de la chaîne, les prix aux producteurs sont inférieurs à leurs coûts de production et, de l’autre côté, les prix pour les consommateurs de nombreuses denrées augmentent régulièrement. Pour pouvoir faire la clarté sur l’évolution des prix dans la filière alimentaire, à chaque stade du processus production / transformation / commercialisation, Ecolo demande la mise en place immédiate d’un Observatoire des prix à la consommation, pourvu de responsabilités précises et de moyens adéquats. En outre, Ecolo souhaite que la loi sur le contrôle des prix soit à nouveau appliquée. En effet, l’évolution constatée durant ces dernières années a montré la nécessité que soit fixé le prix de certains biens essentiels comme le pain, le lait, les féculents, certains fruits et légumes importants dans le régime nutritionnel pour leur apport en minéraux et vitamines, vendus sans transformation.

Lorsqu’il devient évident que la concurrence n’offre pas le prix le plus bas au consommateur, voire que des ententes entre producteurs ont lieu en dépit des interdictions légales, c’est au politique à intervenir dans l’intérêt des consommateurs. Enfin, Ecolo propose également que le contrôle des prix du gaz et de l’électricité soit rétabli et que les outils indépendants de régulation des marchés soient renforcés. Il est aussi nécessaire de mettre en place une régulation internationale du marché des produits pétroliers32.

Proposition : Limiter la marge bénéficiaire des grandes entreprises

La valeur ajoutée créée par les plus grandes entreprises belges est énorme. Elle a donc un impact considérable sur la position concurrentielle et l’emploi de notre pays. Depuis 1996, la loi organise la modération salariale dans notre pays alors que les profits des entreprises ne cessent quant à eux d’augmenter. La part des salaires dans le PIB est au plus bas depuis trente ans. Cela signifie que les profits qui rémunèrent les propriétaires du capital représentent une part croissante du prix des biens et services produits en Belgique. Ecolo plaide donc pour que le dispositif existant soit évalué et qu’un mécanisme de modération de la rémunération des propriétaires de capital soit introduit à l’instar de celui déjà existant en matière de modération des salaires.

PRIORITE N°5 : RENFORCER LA PROTECTION DES

CONSOMMATEURS Ces trente dernières années, le droit de la

consommation a connu une profonde évolution. Dans nombre de secteurs, les rapports entre les vendeurs et les consommateurs ont été clarifiés : les pratiques du commerce ou la sécurité des consommateurs constituent des champs largement investis par le législateur.

32 Voir à ce sujet nos propositions du Livre I, Chapitre 1 « Energie – Climat ».

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De même, au cours des dernières années sont apparues des nouvelles formes de régulation, internes à certains secteurs, comme des codes de conduite, des chartes, mais aussi la normalisation, le traitement extra-judiciaire des plaintes, etc. Ainsi, plusieurs accords ont été conclus entre les représentants des professionnels et des consommateurs, comme en matière de publicité, de services financiers, de téléphonie ou d’électricité. Toutefois, si elles peuvent offrir plus de souplesse et de rapidité dans l’élaboration des normes et permettent d’associer les acteurs des secteurs concernés, ces pratiques, qui s’apparentent à de l’autorégulation des secteurs concernés, ne garantissent pas nécessairement la meilleure protection du consommateur. Dans une série de cas, la mission régulatrice des autorités publiques doit donc être poursuivie et renforcée. De trop nombreux consommateurs sont encore confrontés à des pratiques commerciales abusives, de la publicité mensongère et des arnaques en tout genre.

Proposition : Mieux encadrer la publicité commerciale

La publicité commerciale a pour objectif premier de faire vendre et d’inciter à la consommation de produits et services. Elle se trouve par nature aux antipodes de la diffusion d’une information objective qui devrait guider les choix des citoyens dans leur consommation. Elle peut aussi générer des attitudes et des comportements généralement contraires à la nécessité de réduire notre empreinte écologique. En outre, la publicité commerciale se fait globalement de plus en plus envahissante, aussi bien dans l’espace public, dans les différents médias que dans l’espace privé. Elle commence aussi à faire son entrée, plus ou moins subrepticement, dans les écoles, malgré l’interdiction prévue explicitement par le Pacte scolaire. Il est aujourd’hui de plus en plus difficile d’échapper à cet envahissement. Il convient d’inverser la tendance. D’une manière structurelle, Ecolo souhaite faire évoluer le Jury d’éthique publicitaire en un Observatoire indépendant de la publicité commerciale, qui travaillerait en étroite collaboration avec un organe public de régulation. Celui-ci pourrait faire suspendre toute campagne publicitaire contrevenant aux balises proposées ci-dessous ou sur la base de plaintes de consommateurs. Outre la régulation

générale (affichages publics, médias traditionnels …), ces instances devraient accorder une attention particulière aux nouvelles formes de publicité (internet, diffusions massives de courriers électroniques …) et à la défense de la vie et des espaces privés (publicités téléphoniques et toutes-boîtes, envois adressés …). Par ailleurs, Ecolo propose :

de légiférer sur les conditions de l’emploi de termes publicitaires tels « respectueux de l’environnement, écologique, vert, durable … » et ce afin de lutter contre le « greenwashing », pratique qui consiste à présenter comme favorables à l’environnement ou la santé, des produits qui ne le sont pas ;

d’étendre la liste des produits ne pouvant faire l'objet de publicité aux produits présentant un impact négatif avéré sur l’environnement et la santé, sur la base de critères objectifs (présence de substances classées toxiques ou dangereuses, faible efficacité énergétique, émissions élevées de CO2, contradiction avec les programmes gouvernementaux tels que plans de maîtrise de l'énergie, politiques d'amélioration de la qualité de l'air, plan fédéral de réduction de l'usage des pesticides, de l’alcool ou du tabac ...) ;

de mettre en oeuvre, sous l'autorité de l'organe de régulation, une base de données des personnes qui souhaitent ne pas recevoir d'envois adressés ni faire l'objet d'un démarchage téléphonique ou par voie électronique ; de systématiser cette opportunité à l'ensemble des entreprises commerciales et d'en sanctionner les infractions ;

d’interdire la publicité à destination des enfants de moins de 12 ans ;

d’interdire l’utilisation de l’image d’enfants en tant que prescripteurs d’achats ;

d’interdire la publicité qui véhicule des stéréotypes pouvant mener à des comportements discriminants : misogynie, racisme, homophobie, xénophobie ;

d’élargir les zones d’interdiction et de restriction de la publicité dans l’espace public afin de mieux protéger notre cadre de vie ;

de sanctionner les entreprises qui lancent des campagnes illégales (publicité

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déguisée, affichage illégal …) ou qui ne respectent pas les réglementations précitées ;

d’interdire aux entreprises de crédit la possibilité d'offrir un objet en contrepartie de l'ouverture d'un crédit.

Proposition : Instaurer une facture standard pour l’électricité et le gaz

Depuis la libéralisation du marché européen de l’électricité et du gaz, les consommateurs ont la possibilité de choisir entre plusieurs fournisseurs. Alors qu’autrefois, ils ne pouvaient acheter qu’un produit standardisé à un fournisseur unique, plusieurs fournisseurs proposent aujourd’hui une gamme entière de produits, qui peuvent différer entre eux de nombreuses manières. Pour que la concurrence puisse jouer pleinement, il importe de disposer d’informations transparentes quant aux produits proposés. La facture joue un rôle essentiel en la matière. Or, plusieurs organisations et rapports font état de problèmes importants en ce qui concerne sa lisibilité. Pour pallier ces difficultés, Ecolo a déposé une proposition de loi visant à instaurer un modèle unique de facture pour la fourniture de gaz et d’électricité en vue d’améliorer la lisibilité de la facture énergétique et d’accroître la concurrence entre les fournisseurs, en permettant une vraie comparaison entre des factures qui contiennent ainsi des mêmes données.

Proposition : Limiter les reconductions tacites

Dans de nombreux domaines, le consommateur conclut des contrats avec des fournisseurs (contrat d'assurance, abonnement à un journal, abonnement auprès d'un centre sportif ou de fitness, contrat de fourniture de gaz naturel et d'électricité, abonnement de téléphone …). Dans ce cadre, il arrive parfois qu’il soit lié sans le savoir par une clause de reconduction tacite. En effet, les contrats à durée déterminée contiennent souvent, généralement en petits caractères, des dispositions qui prévoient une prolongation automatique du contrat pour une nouvelle durée lorsqu'une partie n'a pas fait savoir à l'autre partie, avant l'expiration de la durée initialement convenue, qu'elle s'opposait à ce qu'on appelle la reconduction tacite. Ceci piège parfois les consommateurs moins avertis.

Pour cette raison, Ecolo propose de baliser à l’avenir les reconductions tacites. Les fournisseurs seraient tenus d’envoyer au plus tard trois mois avant l’expiration du contrat un formulaire, sous format papier ou électronique, à renvoyer par le consommateur. Il serait ainsi possible au consommateur de choisir librement et sans aucun frais de reconduire le contrat pour une même durée ou de le résilier. En l’absence de réponse du consommateur dans le délai prévu, le contrat serait prolongé automatiquement afin d’éviter l’interruption du service, mais le consommateur aurait la possibilité de le résilier à tout moment et sans aucun frais.

Proposition : Simplifier les résiliations de contrat

Les contrats de services sont parfois conclus pour de longues durées et assortis de modalités de résiliation compliquées. De plus, ces modalités pratiques varient fortement d’un prestataire de services à l’autre. Ecolo propose d’uniformiser et de simplifier ces règles en vue de mieux protéger le consommateur et de renforcer la concurrence. Concrètement, nous proposons de limiter la durée maximale des contrats de services à 2 ans, d’organiser une période de préavis de 3 mois avant l’échéance et de limiter l’indemnité de résiliation anticipée à maximum 3 mois.

Proposition : Permettre l’action collective en justice pour les associations de protection des consommateurs

Actuellement, il est très difficile pour des associations d’avoir accès aux tribunaux pour défendre des intérêts collectifs, notamment en matière de protection des consommateurs. Un récent rapport montre que la Belgique, avec l’Allemagne et l’Autriche, est un des trois pays de l’Union européenne où il y a le plus d’obstacles pour l’introduction d’une procédure judiciaire en vue de défendre des intérêts collectifs. L’annonce d’une augmentation injustifiée du prix de l’électricité, l’instauration en Flandre d’une taxe Elia, le constat de hausses de prix illégales des primes d’assurance hospitalisation, l’application de frais injustifiés par les banques, le non-respect des garanties

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sur les produits électroménagers … constituent autant d’exemples de nature à motiver l’action collective des associations. Pour beaucoup de victimes de ces pratiques, il n’est pas financièrement possible d’intenter une procédure judiciaire souvent longue et complexe. Pourtant, chaque citoyen, consommateur, patient ou emprunteur doit pouvoir faire valoir ses droits. L’action collective en justice facilitera l’accès à la justice et en réduira les coûts tout en introduisant plus de discipline dans certaines pratiques commerciales malhonnêtes33.

33 Cette proposition est plus largement développée au sein du Livre II, Chapitre 7 « Justice ».

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PROGRAMME ECOLO ELECTIONS 2009

Livre IV - Pour une société qui se développe

Chapitre 3 « Economie verte »

Réussir la transition écologique vers une économie durable

Economie verte : Etat des lieux et analyse

I. Vers une économie vertueuse

Une économie verte, une économie vertueuse, une économie à haute qualité environnementale et sociale intégrée, c’est bien de cela dont la Belgique – et plus largement l’Europe – a besoin. Urgemment. On lira par ailleurs34 l’importance de baliser la jungle du marché qui a précipité, à partir de la crise des subprimes, l’économie dans des problèmes gravissimes, qui considère le travailleur comme seule variable d’ajustement (Inbev, Arcelor, VW Forest, etc.), détruit l’environnement (pollution, réchauffement climatique, perte de biodiversité, etc.) et s’organise sur le mythe de la croissance continue de la consommation de chacun. Or, la disponibilité des ressources naturelles est limitée.

Le concept d’économie verte ne représente pas le dernier avatar, teinté de vert, du capitalisme mais bien une porte d’entrée vers le développement durable, comme une économie intégrée dans la biosphère et non épuisant la biosphère. Dépassant le cadre étroit des marchés de l’environnement (la vision initiale de secteurs réparateurs des dégâts que le reste de l’économie cause à l’eau, à l’air, au sol, …), l’économie verte pénètre chaque marché, fait évoluer les métiers, les industries, les mentalités.

Ainsi, l’économie verte contribue à entreprendre autrement. Il ne s’agit en effet pas uniquement de revoir les modes de production mais également de repenser les principes même de l’entrepreneuriat et les finalités de la création de richesse. Les alternatives économiques façonnées au quotidien par les entrepreneurs sociaux et l’économie sociale démontrent qu’il existe déjà une

34 Voir à ce sujet nos propositions du Livre IV, Chapitre 2 « Régulation ».

autre économie. Ces entrepreneurs « sociaux » développent des alternatives économiques qui renouvellent les modes de gestion de l’entreprise et mettent en pratique les principes qui animent leur démarche : finalité de services aux membres et à la collectivité plutôt que de profit, autonomie de gestion, gestion démocratique et primauté du travail et des personnes sur le capital dans la répartition des revenus. Entreprendre autrement est le terreau de l’économie verte.

Grâce à l’économie verte, la société évoluera vers une utilisation plus rationnelle des ressources naturelles en créant de nombreux emplois. L’économie verte s’intègre donc plus largement dans le projet socio-économique d’Ecolo et traverse l’ensemble de nos priorités en matière d’environnement, d’énergie, de climat, d’économie, de mobilité, de recherche et innovation ou de logement. L’économie verte rassemble et offre une valeur ajoutée tout au long du processus de production, puisqu’elle repense complètement celui-ci afin de dégager plus de valeur pour les clients et pour la société. Elle ouvre de nouvelles filières d’emplois, notamment à travers la création d’éco-produits et d’éco-services. Elle suscite la créativité via l’éco-design industriel, et touche des secteurs tels ceux des énergies renouvelables, des éco-secteurs (chimie verte, tourisme vert, …), ainsi que des concepts comme les quartiers et villes durables.

Après un bref état des lieux, nous dessinerons ici des propositions qui visent à réorienter fondamentalement l’économie du pays, à stimuler les investissements dans ces nouveaux secteurs en utilisant notamment la fiscalité verte et les marchés publics verts, à privilégier certaines filières vertes potentiellement créatrices d’emplois et à développer la recherche et l’innovation vers le développement durable.

Programme Ecolo 2009 – Livre IV « Pour une société qui se développe » – Chapitre 3 « Economie verte » – 36/77

II. Analyse et état des lieux

Comment cerner au plus près ce concept d’économie verte ? Quelles sont les tendances qui, statistiquement ou plus empiriquement, se dégagent des analyses, des actions publiques et privées ? Des statistiques fiables (complètes, actualisées) font généralement défaut mais quelques chiffres et tendances significatifs peuvent être relevés.

Au niveau international, la récente étude du Programme des Nations-Unies pour l’Environnement (PNUE)35 réalise une synthèse intéressante : « Des motivations commerciales de plus en plus puissantes se font jour en faveur du développement des activités de protection de l’environnement dans l’économie et sur le marché de l’emploi, ce qui est encourageant. Face à la flambée des prix de l’énergie et des produits de base, les consommateurs comme les décideurs exercent une pression croissante sur les entreprises pour qu’elles adoptent des pratiques et des méthodes de production plus écologiques afin d’éviter des changements climatiques dangereux. Les activités visant à rendre l’économie plus respectueuse de l’environnement constituent une occasion unique de créer de nouvelles entreprises, de développer de nouveaux marchés et de diminuer les coûts de l’énergie. Enfin et surtout, elles peuvent aussi générer des attitudes plus positives parmi les consommateurs et les communautés locales face aux activités et aux investissements des entreprises ».

Traduction chiffrée ? Le marché mondial des produits et services environnementaux devrait doubler pour passer de 1 370 milliards $ par an à l’heure actuelle à 2 740 milliards $ d’ici à 2020. La moitié de ce marché concerne l’efficacité énergétique et l’autre moitié les transports durables, l’alimentation en eau, l’assainissement et la gestion des déchets. Les investissements dans l’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments pourraient générer 2 à 3,5 millions d’emplois verts supplémentaires seulement en Europe et aux Etats-Unis. Le potentiel est beaucoup plus important dans les pays en développement.

Les investissements dans le secteur des énergies renouvelables sont en forte expansion : ils sont passés de 10 milliards $ en 1998 à au moins 66 milliards $ en 2007, soit l’équivalent de 18 % de l’ensemble des investissements. Ils devraient

35 Disponible sur le site www.ilo.org/wcmsp5/groups/public/---dgreports/---dcomm/---webdev/documents/publication/wcms_098488.pdf.

atteindre 343 milliards $ en 2020 et quasiment doubler à nouveau d’ici à 2030 pour se chiffrer à 630 milliards $. Les investissements prévus devraient se traduire par au moins 20 millions d’emplois supplémentaires dans le secteur, qui deviendrait ainsi une source d’emplois beaucoup plus importante que ne l’est aujourd’hui l’industrie des énergies fossiles (activités minières, extraction du pétrole, raffinage et production d’électricité fossile) par exemple.

De même, il est beaucoup plus rentable de diminuer nos rejets de CO2 par des économies d’énergie (les fameux négawatts, soit les watts qui ne doivent pas être produits) plutôt que de chercher à adapter les modes traditionnels de production d’énergie.

L’Europe vit bien entendu une évolution similaire et dispose en outre de nombreuses entreprises en pointe dans les secteurs de l’eau, des énergies renouvelables ou des technologies vertes. Sous la pression conjuguée des associations de consommateurs et de protection de l’environnement, des organisations syndicales et de certains partis politiques, l’Union européenne a construit au fil des années une législation étoffée (produits, efficience énergétique, environnement, énergie, …). Même imparfaite et insatisfaisante sur de nombreux points, cette réglementation influence déjà les marchés. Qu’on pense, à titre d’exemples, à la directive RhOS36 sur l’utilisation des substances dangereuses, à la directive sur la performance énergétique des bâtiments (PEB), à la directive-cadre sur l’éco-design ou aux obligations de reprise.

L’Europe a également réactivé un plan d’action pour une consommation, une production et une industrie durables dans lequel elle entend privilégier trois domaines :

une politique nouvelle concernant les produits (éco-conception, étiquetage environnemental, label écologique européen, etc.) ;

une production plus économe en ressources ;

et une consommation et une production durables à l’échelle internationale (accords par secteur industriel, bonnes pratiques, biens et services respectueux de l’environnement).

Il s’agira d’agir pour que ces bonnes

intentions, qui peuvent rester superficielles et

36 Restriction of the use of certain hazardous substances.

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périphériques, se concrétisent et influencent l’économie en profondeur. Autre indicateur intéressant : les chiffres du marché européen de l’investissement socialement responsable (ISR). Le marché était évalué à 2 665 milliards € fin 2007, soit 102 % d’augmentation en deux ans37 !

Cet aperçu quantitatif représente l’arbre qui cache la forêt puisque « le caractère transversal de cette composante environnementale devient un instrument de créativité et de dynamisme et touche tous les secteurs d’activité de l’industrie, des services, de l’agriculture, des métiers du bâtiment et des travaux. Il s’agit de repenser notre façon de produire, de consommer, de nous déplacer, de concevoir nos villes »38.

Alors que certains secteurs sont arrivés à maturité de marché en Belgique (on pense au traitement traditionnel des déchets, aux procédés classiques d’épuration des eaux, …) tout en nécessitant encore investissements de réorientation et maintenance, des marchés émergent dans les énergies renouvelables, les économies d’énergie, les changements climatiques, les nouvelles façons d’habiter, les carburants et les motorisations de substitution, etc. On verra plus loin que plusieurs filières présentent des potentiels importants dans les nouvelles technologies vertes (ou éco-technologies).

Sur le plan régional, les choses avancent… lentement mais signalons néanmoins d’intéressantes initiatives comme l’appel à projets « verts » lancé en février 2008 par le Gouvernement wallon. 42 millions € sont sur la table sous la forme d’un appel à projets auquel ont répondu les centres de recherche, les entreprises et les universités. Mais cet appel à projets est insuffisant dans le cadre d’un Plan Marshall libérant au total 1 500 000 000 €. Les nouvelles technologies vertes méritent bien mieux ; aux USA par exemple, elles sont déjà la troisième source d’investissement en recherche après l’informatique et les biotechnologies…

Nous pouvons également relever le projet SMIGIN (Sustainable Management by Interactive Governance and Industrial Networking) qui bénéficie d’un financement du programme européen Life. Il est géré par l’Union Wallonne des Entreprises (UWE) et est mené en partenariat avec la Chambre de Commerce et d’Industrie (CCI) de Valenciennes. Il oriente clairement les parcs

37 Voir à ce sujet le site www.eurosif.org/publications/sri_studies. 38 Les marchés de l’environnement et du développement durable. Les fiches professionnelles : la création par métier, APCE, Paris, décembre 2005.

d’activités économiques (comme à Saintes et à Geer) vers une gestion collective et concertée de la mobilité, la gestion des déchets, l’énergie, etc. Ce programme traite globalement la question des flux de matières et de personnes, des synergies entre acteurs, bref de l’écosystème local.

Nous pouvons aussi noter la création d’un nouveau cluster wallon orienté développement durable. TWEED (Technologies Wallonnes de l’Energie renouvelable et de l’Environnement Durable) a pour but de favoriser les investissements en production et exploitation de l’énergie durable. Ce cluster rassemblera des entreprises autour de projets dans les domaines de l’énergie renouvelable (éoliennes, biomasse, cogénération, etc.), de l’efficacité énergétique et de l’impact climatique en industrie (technique d’enfouissement du CO2, etc.) et dans le domaine des produits et services verts (moteurs hybrides, etc.).

Hélas, à côté de ses initiatives louables, des incohérences flagrantes minent la politique de la Région wallonne qui ne fait pas de l’économie verte un axe stratégique ; qui porte l’essentiel de ses efforts en matière de réduction des gaz à effet de serre à l’extérieur de la Wallonie alors qu’un rééquilibrage en faveur du territoire wallon s’impose au plus vite (en mettant à contribution deux grands acteurs, le transport et le logement, et en aidant mieux l’industrie à tirer profit de ce contexte) ; et qui finance des projets « made in développement non durable » (autoroutes, incinération des déchets, émiettement de l’habitat …).

Pour sa part, le Contrat pour l'Economie et l'Emploi 2005-2010 mis en œuvre dans la Région de Bruxelles-Capitale entend s'attaquer au défi de l'accès à l'emploi des Bruxellois (formation, mobilité des travailleurs, développement prioritaire de secteurs porteurs d'emploi « local » ...), tout en se donnant les moyens de maintenir et amplifier pour l'avenir une activité économique forte et compatible avec sa situation urbaine39.

En Région bruxelloise, 70 % des émissions de gaz à effets de serre proviennent du bâti. Un programme d'incitants financiers et de projets d'impulsion (appel à projets « bâtiments exemplaires », notamment) a été mis en œuvre. Il vise à appuyer un développement accéléré du secteur de la construction passive et basse énergie. Grâce à un cadre réglementaire et

39 Voir à ce sujet nos proposition du Livre II, Chapitre 2 « Emploi – Activités – Temps ».

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financier, ainsi que des méthodes d'accompagnement des porteurs de projets et d'animation des acteurs sectoriels, ce sont au minimum 200 000 m² de bâtiments construits ou rénovés selon les standards passifs ou de haute performance énergétique qui seront mis sur le marché dans les trois prochaines années. Ecolo veut pérenniser cette tendance et consolider les outils mis en place.

Ces actions d'impulsion vont de pair avec la poursuite du développement d'outils publics consolidant l'offre d'entreprises et de métiers dans les secteurs concernés. Ce sont notamment :

la création du Cluster Ecobuild ;

le développement d'une expertise et d'une offre de formation conséquente aux nouvelles techniques et matériaux de construction liés à l'efficacité énergétique et aux énergies renouvelables ;

l’élaboration de plans stratégiques de développement des filières de l'efficacité énergétique, des énergies renouvelables, mais aussi des déchets, des éco-produits et de la chimie verte ;

un dispositif de co-financement public-privé de l'assainissement de terrains à vocation économique (impulsion environnementale et économique, ouvrant des perspectives d'emploi, permettant le développement d'un secteur « vert » et contribuant à la réhabilitation urbaine) ;

la mise à disposition des entreprises d’une aide et d’un accompagnement à la construction d’un calculateur d’empreinte écologique.

Economie verte : Les propositions d’Ecolo

Un Green Deal

Les autorités publiques, tous niveaux de pouvoir confondus, doivent montrer l’exemple et se lancer dans le financement d’investissements publics « verts ». Elles doivent également soutenir les investissements privés du même type. Bien sûr, nous savons qu’à terme, de tels investissements sont rentables écologiquement, socialement et économiquement. Mais à l’heure actuelle, il n’est pas encore acquis que d’autres acteurs que l’Etat se lanceront dans une entreprise d’une telle dimension. La crise financière n’est pas un obstacle, c’est au contraire une opportunité. Ayons le courage, comme lors du New Deal de 1933, de nous engager dans un plan de relance. Mais à la

différence de 1933, soyons sélectifs et orientons nos choix d’investissements.

Nous n’avons plus de temps à perdre. L’enjeu est d’aller à la rencontre des emplois de demain. D’autres pays l’ont bien compris. Ainsi en Allemagne, le Gouvernement rouge-vert a-t-il lancé, dès 2001, un plan « emploi – environnement40 » ; l’Ecosse l’a fait en 2004 en investissant dans les secteurs de l’agriculture, de l’éco-habitat et du tourisme vert ; l’Espagne a suivi en 2004 en faisant un choix radical pour le solaire et l’éolien, la Suède en 2006 via son plan de sortie du charbon sans relance du nucléaire. Et, très récemment, la Grande-Bretagne a annoncé un plan de 7,4 milliards € pour isoler tous les logements d’ici 2020, financé par les producteurs et distributeurs d’énergie. La Belgique doit rejoindre rapidement ce mouvement.

PRIORITE N°1 : ENTREPRENDRE LA TRANSITION VERS UNE ECONOMIE DURABLE

Changer de cadre conceptuel

Pour réussir la transition d’une économie

classique – qui démontre chaque jour ses limites et ses impacts de plus en plus négatifs – vers une économie durable, le cadre conceptuel doit être secoué. La science économique gagnerait à se rappeler des limites de l’économie de marché qu’elle a elle-même reconnues depuis Adam Smith, et à s’ouvrir à d’autres sciences comme la biologie, la géographie, la psychologie, l’anthropologie, la sociologie, l’histoire … L’économie écologique41 est, à ce propos, une grille de lecture tenant mieux compte de la « rationalité limitée42 » des agents économiques, et permettrait de mieux appréhender les « verrouillages technologiques43 » actuels de nos sociétés dans une économie basée sur l’utilisation intensive des énergies fossiles44.

40 L’Alliance pour la construction durable en Allemagne a permis – fin 2004 – la rénovation de 196 000 habitations, l’économie d’ 1 million de tonnes de CO

2, la création de 25 000 emplois et la préservation de

141 000 emplois préservés dans le secteur de la construction. 41 Pour une approche du courant « ecological economics », voir la revue Etopia n°4, juin 2008. 42 Etant donné l’impossibilité de vérifier l’ensemble de l’information disponible, l’agent économique adopte des routines pour simplifier son processus de décision (thèse de Simon). 43 Les systèmes technologiques suivent une trajectoire spécifique qu’il est coûteux et difficile de changer. Le facteur responsable du « verrouillage technologique » est celui des « rendements croissants liés à leur adoption » (RCA), c’est-à-dire les effets de retour positifs qui augmentent l’attractivité d’une technologie à mesure qu’elle est adoptée (réseaux téléphoniques, logiciels informatiques, …). 44 KEVIN MARECHAL, Repenser le rôle de l’économie politique pour traiter de la problématique des changements climatiques, l’exemple du

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Une méthodologie pour la transition

Pour orienter une trajectoire de développement d’un secteur, les pouvoirs publics ont d’abord à leur portée les outils normatifs et fiscaux. La meilleure manière de les utiliser est de fixer un cadre stable et connu de tous englobant à la fois les normes à respecter à moyen et long termes, et les systèmes progressifs d’incitants, de désincitants et de sanctions.

A l’intérieur de tels systèmes, les pouvoirs

publics doivent alors développer des politiques sectorielles de motivation et d’apprentissage. On peut ainsi recourir à des méthodologies du même type que celles qui ont fait leurs preuves en matière de politique énergétique45 :

1. mettre les acteurs en réseau ; 2. installer des « facilitateurs » par

segments du secteur ; l’action de ces facilitateurs sera d'offrir des services, informations et conseils pour le consommateur et les professionnels sans jamais se substituer à un opérateur du marché ; être identifié comme étant la référence technique, le conseiller ;

3. informer, démontrer, expliquer par une offre constante d’événements mobilisateurs ; ceux-ci ont pour objectifs de présenter les motivations possibles des acteurs, les méthodologies existantes et des cas concrets démontrant l’intérêt économique ;

4. développer des outils pratiques et opérationnels pour guider les décideurs et les professionnels ;

5. susciter des projets par des appels d’offre et lancer des concours pour des réalisations exemplaires.

Le concept central : l’écologie industrielle

Même si sa mise en œuvre s’avère particulièrement ardue sur les plans économique, juridique ou culturel, l’écologie industrielle est cette approche qui conçoit les processus de consommation et de production dans leur ensemble afin de limiter les pertes de matières et d’énergie. Elle vise à augmenter la productivité et l’utilisation durable des ressources naturelles, s’inscrivant ainsi dans le développement durable

nécessaire déverrouillage technologique, in Etopia, n°4, page 75, Namur, juin 2008. 45 Par les ministres écologistes de l’énergie José Daras en Région Wallonne (1999-2004) et Evelyne Huytebroeck en Région Bruxelloise (2004-2009).

en s’inspirant des principes du vivant. Comme le souligne Motoyuki Suzuki (directeur du Zero Emission Forum au Japon) : « après la productivité du travail et du capital, le temps est venu d’augmenter la productivité des matières premières ».

Elle se traduit pour la recherche de synergies entre les entreprises, de sorte qu'elles réutilisent entre elles, ou avec les collectivités, leurs résidus de production (vapeurs, eau, déchets ...). Cette approche permet ainsi d'optimiser l'utilisation des matières et de l’énergie dans les processus industriels. L’écologie industrielle cherche à répondre aux besoins émergents des entreprises qui, sous la pression des législations et des normes, du jeu de la concurrence, et des attentes des consommateurs, intègrent l’environnement dans leur stratégie. Elle part, en effet, des limites des démarches traditionnelles qui raisonnent en termes de réduction des pollutions, qu’il s’agisse d’approches en « bout de chaîne » ou, dans une moindre mesure, « à la source ».

Les technologies ou les modes de production

propres actuels ne visent souvent que des optimisations sectorielles, au travers de la mise en place d’un équipement, au mieux d’une installation, dont il est parfois difficile d’évaluer l’impact global. L’écologie industrielle recherche, quant à elle, une optimisation à l’échelle de groupes d’entreprises, de filières, de régions, voire même du système industriel dans son ensemble. Elle favorise ainsi la transition du système industriel actuel vers un système viable, durable, inspiré par le fonctionnement cyclique des écosystèmes naturels. En pratique, pour tendre vers cet objectif, l’écologie industrielle s’attache à :

valoriser les déchets comme des ressources ;

boucler autant que possible les cycles de matières et d’énergie, et minimiser les émissions dissipatives liées aux usages qui dispersent les produits polluants dans l’environnement ;

dématérialiser les produits et les activités économiques ;

internaliser les coûts des activités humaines ;

se passer des énergies fossiles ;

minimiser son impact sur l'ensemble du cycle de vie du produit de manière à éviter les transferts de pollution en amont ou en aval du site de production.

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Améliorer la durée de vie des produits en recourant à l’économie de fonctionnalité

Une approche complémentaire réside dans ce que l’on appelle « l’économie de fonctionnalité », qui remplace la vente d’un produit par la vente de l’usage de celui-ci. En louant un produit, on associe les bénéfices de l’entreprise qui le produit à sa durée de vie. Cette économie de fonctionnalité ne livrera tous ses avantages sur le plan environnemental que si l’entreprise de location prend en charge le produit loué durant toute sa durée de vie. Pour cette raison, il faut envisager de maintenir le droit de propriété d’un produit à son fabricant et ce jusqu’à sa fin de vie. Ainsi, à titre d’exemple conceptuel, une entreprise automobile deviendrait responsable de son parc de voitures durant toute leur utilisation et serait en charge de leur ‘déconstruction’ (et transfert dans des filières de revalorisation) en fin de vie. La nature des métiers se modifiera alors puisqu’il faudra concevoir les voitures pour qu’elles durent. On verra alors apparaître des métiers dans la maintenance, la réparation, la récupération et la valorisation, souvent plus intensifs en main d’œuvre et difficilement délocalisables. Au-delà du management environnemental : l’éco-conception

Les outils d’évaluation et de monitoring (bilan carbone, empreinte écologique ...) sont également très utiles pour réorienter la production des entreprises46. L’offre de conseil et d'accompagnement pour les entreprises en matière d'indicateurs environnementaux et sociaux facilitant l'innovation et le changement dans les modèles d'investissement et dans les schémas de décision est un nouvel axe de politique économique à développer.

Mais si ces outils permettent d’améliorer le management environnemental en provoquant une prise de conscience de l'impact global d'une activité de production, la réduction des impacts et l'orientation vers des systèmes de production plus respectueux de l'environnement passe par la mise en œuvre d'une véritable démarche d'éco-conception. L'éco-conception vise à introduire la dimension environnementale lors de la conception du produit, à côté des contraintes économiques, marketing et ergonomiques. L'éco-conception – à

46 En Région de Bruxelles-Capitale, les écologistes ont mené un projet de mise à disposition de 12 entreprises (ventilées sur 6 secteurs) d'une aide et d'un accompagnement à la construction d'un calculateur d'empreinte. L'expérience a été menée avec succès mais a montré les limites de la notion d'empreinte écologique pour le secteur de la production et des entreprises.

travers les outils d'analyses de cycle de vie – introduit également la notion de responsabilité des impacts environnementaux générés tout au long du cycle de vie du produit (« du berceau à la tombe », c’est-à-dire depuis l'extraction des matières premières jusqu'à la gestion du produit devenu déchet). Il ne s'agit plus de concevoir uniquement un produit qui va plaire au consommateur à un moindre coût mais de proposer un produit qui respecte les cycles naturels en minimisant les besoins en ressources naturelles et les rejets dans l'air, l'eau et le sol. Cette approche "cycle de vie" peut également s'appliquer à la dimension sociale en veillant au respect des conditions des travailleurs à toutes les étapes de production d'un produit.

Politiques transversales Proposition : Encourager la mise sur le marché de produits éco-conçus

Ecolo propose une politique d’incitation à l’éco-conception qui s’applique tant au niveau de l’offre que de la demande.

Sur le plan de l’offre : 1. faire connaître la démarche et aider les

entreprises (en particulier les PME) à mettre en place une démarche d'éco-conception via le développement de formations : mise à disposition d'un cahier des charges type ; remboursement partiels des conseils extérieurs ; organisation annuelle d'un appel à projet de Recherche et Développement (R&D) ; développement d'outils à mettre à disposition des PME ;

2. favoriser les entreprises qui mettent sur le marché des produits éco-conçus via une réduction des taxes sur ces produits, une réduction d'impôts pour les projets de R&D dans ce domaine et la réduction des charges patronales pour l'engagement « d'éco-designers ».

Sur le plan de la demande : 1. développer un système d’étiquetage des

impacts environnementaux tout au long du cycle de vie des produits de grande consommation, comme cela existe déjà pour les produits alimentaires ;

2. organiser des campagnes de promotion soutenues par les autorités publiques ;

3. introduire des clauses spécifiques dans les cahiers des charges publics ;

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4. conclure un accord avec la grande distribution pour mettre en avant ces produits.

Complémentairement et vu l'urgence environnementale, il est nécessaire d'interdire la vente de certains biens nuisibles tant à la collectivité qu'au citoyen à titre individuel. A l'instar des ampoules à incandescence (dont l'interdiction de vente est prévue en 2011), de telles mesures doivent être étendues progressivement à l'ensemble des produits et équipements trop énergivores ou nuisibles à l'environnement47.

Proposition : Créer des pôles régionaux de recherche appliquée orientés vers le développement durable

La recherche fondamentale est avant tout destinée à améliorer la connaissance au sens large ; la recherche appliquée est davantage orientée dans un but particulier : vers une application à fort potentiel économique ou vers une application dans les sciences humaines, sociales ou médicales... La recherche appliquée peut être davantage orientée vers des projets plus régionaux, plus spécifiques dans le cadre d'une utilisation plus ou moins rapide des résultats sur base d'essais. Un grand nombre de PME ou TPE48 n'ont pas ou ont trop peu de moyens spécifiques destinés à la recherche-innovation, par faute de moyens humains, financiers ou par manque d'espaces. Or, leurs besoins ne sont pas nécessairement énormes pour améliorer sensiblement un process de fabrication, de gestion des stocks ou de diffusion de leurs produits. Des produits spécifiques (fonds de garantie, démonstrateurs, bourse de préactivité …) ou tout simplement du crédit à l’investissement classique pour business verts pourraient être davantage proposés par la SRIW49 ou la SOWALFIN50 et par la SRIB51 aux petites entreprises qui constituent le terreau de l’économie wallonne et bruxelloise. En outre, un pôle « recherche appliquée / développement durable » pourrait se constituer

47 Voir à ce sujet nos proposition du Livre IV, Chapitre 2 « Régulation ». 48 Très petite entreprise. 49 Société régionale d’investissement de Wallonie. 50 Société wallonne de financement. 51 Société régionale d’investissement de Bruxelles.

pour mieux répondre aux besoins des PME et TPE dans des domaines comme l'agro-alimentaire de qualité, le développement des énergies renouvelables ou la gestion de l'eau... qui sont des domaines à fort potentiel économique (création d'emplois) et fort potentiel environnemental. Des moyens publics peuvent être dégagés pour la création d'un pôle de "recherche-action" en collaboration avec les universités, les hautes écoles et autres institutions publiques. Beaucoup d’entreprises se plaignent des lenteurs régionales pour subsidier les projets pilotes et bien souvent, elles finissent par monter le projet pilote elles-mêmes. Il s’agira donc d’accélérer le traitement de demandes de financement des projets pilotes.

Proposition : Investir dans les filières d’avenir basées sur le biomimétisme

Le biomimétisme (bio = vie et mimesis = imiter) est une discipline nouvelle qui étudie les meilleures idées de la nature pour ensuite s’en inspirer dans une perspective d’accroissement de la soutenabilité écologique de la production humaine. Cette innovation inspirée par la nature concerne soit la forme des êtres vivants (s’en inspirer pour de nouveaux produits), soit leur processus d’évolution (s’en inspirer pour de nouveaux processus de production industrielle), soit les relations entre les espèces, c’est-à-dire les écosystèmes naturels (s’en inspirer pour concevoir des entreprises entières, des zonings industriels ou des villes par exemple). L’intérêt de cette approche réside dans le fait que la nature a, de tout temps, dû imaginer des solutions permettant de résoudre des problèmes auxquels les humains sont aujourd’hui confrontés. Les animaux, les plantes et les micro-organismes sont des ingénieurs chevronnés. Ils ont trouvé ce qui marche, ce qui est approprié, et surtout ce qui résiste sur terre, à température et pression ambiante. Le but est donc de créer des produits, processus et protocoles – de nouvelles lignes de conduite – mieux adaptés à une durée de vie prolongée sur terre. Leurs modèles d’inspiration sont des organismes qui fonctionnent sans faire appel au principe de fabrication « chaleur-pression-traitement » ou des écosystèmes qui marchent à l’énergie

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solaire et aux interactions, en créant des opportunités plutôt que des déchets. Il s’agit donc de développer des démarches de design industriel qui se posent sans cesse les questions suivantes : que ferait la nature dans ce cas ? que ne ferait-elle pas ? pourquoi ? ou pourquoi pas ?52 Pour développer recherches et partenariats entre chercheurs et monde de l’entreprise, Ecolo propose :

la mise en place d’une sensibilisation à cette nouvelle discipline à différents niveaux d’enseignement : secondaire, technique, universitaire (par exemple, des chaires de biomimétisme) ;

la création d’une plate-forme belge (en relation avec une démarche européenne) d’échange sur le biomimétisme. Cette plateforme devrait organiser des échanges croisés entre entreprises et centres de recherche organisant la rencontre entre, d’une part, les ingénieurs et designers et, d’autre part, les biologistes et écologues. Ces échanges devraient être organisés par thème et par secteur afin de les concentrer sur des matières spécifiques. L’idée est de créer un lieu de visibilité pour les démarches biomimétiques belges et encourager d’autres chercheurs et industriels à suivre la démarche ;

un appel à projets pour des solutions biomimétiques à destination des écoles d’ingénieurs, d’économistes et de design.

Proposition : Développer les études de métabolisme territorial

L’écologie territoriale propose de développer une vision novatrice du territoire en assimilant son fonctionnement à celui d’un écosystème. Formellement, « cette démarche, essentiellement analytique et descriptive, vise à comprendre la dynamique des flux et des stocks de matière et d’énergie liés aux activités humaines, depuis l’extraction et la production des ressources jusqu’à leur retour inévitable, tôt ou tard, dans les grands cycles de la biosphère53».

52 Un des exemples les plus connus de biomimétisme est l’utilisation par les chemins de fers japonais de la faculté de passer d’un milieu à un autre du martin pêcheur (cet oiseau passe de l’air à l’eau à très grande vitesse sans perturbation). Pour lutter contre les vibrations des TGV, les chemins de fer japonais ont profilé leurs trains en s’inspirant du bec du martin pêcheur. 53 ERKMAN S., Vers une écologie industrielle, Paris, Editions Charles Léopold Mayer, 2e édition, mars 2004.

Concrètement, cela implique que, pour chaque niveau territorial concerné, soit établi un bilan des ressources (cadastre des vents, géothermie, cadastre des surfaces de toits, volume de déchets par type, etc). Les ressources prises en compte présentent la double caractéristique d’être locales et transformables en énergie (ou autre destination). Chaque commune, groupement de communes ou territoire doit savoir qu’il dispose de X m² de toits, que les habitants produisent X tonnes de déchets valorisables en biométhanisation, etc. Cette comptabilité des ressources permet d’identifier des producteurs locaux d’énergie (électricité ou chaleur), des producteurs potentiels d’engrais ou d’autres choses encore. Les objectifs des études de métabolisme territorial sont de :

comprendre les consommations du territoire via une analyse des flux de matière et d’énergie ;

impulser une gestion plus économe et intégrée des ressources sur le territoire ;

renforcer les démarches concrètes de développement durable.

Déjà expérimentée avec succès à Genève, Lille, etc., cette démarche pourrait donc utilement s’appliquer en Régions bruxelloise et wallonne en commençant par les bassins de Bruxelles, Liège, Charleroi… Elle constituerait une grille d’analyse précieuse pour les décideurs politiques.

Proposition : Soutenir la mise en place d’éco-zonings

Ecolo propose d’appliquer l’écologie industrielle à la gestion du territoire et des zones d’activité économique. Un des grands principes de l’écologie industrielle est d’optimiser les flux in et out (énergie, matières, déchets …) entre entreprises. Les acteurs concernés (sociétés régionales et intercommunales de développement économique par exemple) pourraient recevoir un mandat et les moyens pour élaborer une action large en vue d’intégrer l’écologie industrielle dans la stratégie des zones d’activité économique. L’objectif serait, en collaboration avec les fédérations patronales, de rassembler des entreprises qui ont un intérêt économique à travailler ensemble pour

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ensuite les amener à réfléchir sur l’intérêt écologique d’une collaboration et mettre en place les premiers éco-zonings belges. Il va sans dire que ces nouveaux éco-zonings devront veiller à ce que leur localisation s’inscrive dans les principes d’une mobilité durable.

En complément à cette idée, Ecolo propose les actions suivantes au niveau des zonings existants : 1. favoriser l'accessibilité via le

développement des filières de mobilité douce ;

2. prévoir une desserte en transport en commun ou favoriser la mise en place de plans de déplacement d'entreprise. De manière concrète, il faut faire appliquer la loi qui prévoit l’introduction du thème de la mobilité durable dans les négociations sociales.

Proposition : Renforcer et améliorer l’utilisation de systèmes de management environnemental (EMAS et ISO14001)

Le système de management environnemental (SME) et d'audit54 est un système permettant à des organismes de s'engager, sur une base volontaire, à évaluer et à améliorer leurs résultats en matière d'environnement (analyse environnementale des activités, mise en place d’un système de management environnemental, rédaction d’une déclaration environnementale, vérification de son système de gestion environnementale, demande d'enregistrement auprès de l'organisme compétent, labellisation).

Ce système communautaire a été initié dès 1993 et fait pour l’instant l’objet de débats au niveau européen en vue de le renforcer en améliorant son efficacité (accroître le nombre d’organisations qui l’appliquent, devenir une référence, impacter sur les fournisseurs et prestataires de services aux entreprises labellisées EMAS).

En 2007, la Belgique figurait parmi les trois Etats membres comptant le plus grand nombre de sites enregistrés EMAS par million d’habitants (32,27 sites/mh, assez loin cependant du Danemark et de l’Autriche). Pour

54 Ou EMAS pour Eco-Management and Audit Scheme.

autant, une étude récente55 montre que les systèmes et outils de management environnementaux sont trop peu utilisés par les PME. Les méthodes de mise en œuvre d’un système de gestion environnementale ne correspondent pas à leur réalité. Plusieurs actions pourront contribuer à ce que le système EMAS soit mis en œuvre dans de plus en plus d’entreprises et surtout dans les PME :

proposer des allégements administratifs aux entreprises proactives en matière d’environnement ;

développer et faire connaître les aides et incitants financiers ;

promouvoir l’intégration au niveau local (partenariats public/privé) ;

mettre en avant les avantages économiques d’une démarche de management environnemental ;

récompenser les entreprises performantes ;

améliorer la visibilité et la reconnaissance des labels et des normes ;

promouvoir des outils plus simples pour aider à la mise en place des SME au sein des petites et moyennes entreprises ;

améliorer l’accès et la compréhension de la législation environnementale ;

fédérer plusieurs entreprises pour mettre en œuvre l’EMAS (réduction des coûts de certification, échange des bonnes pratiques, diminution des besoins en ressources internes, …) ;

développer la formation continuée des consultants en environnement.

Proposition : Rationaliser les structures existantes

Pour Ecolo, l’objectif est de créer les conditions favorables à l’éclosion et à l’essor de ces nouvelles filières vertes. Or, après le temps des pionniers, de nombreuses structures, tant publiques que privées, occupent le terrain de l’économie verte. Il s’agit donc de :

réaliser une cartographie des structures actives, et une évaluation de leur action

55 JULIEN LABONNE, A Comparative Analysis of the Environmental Management, Performance and Innovation of SMEs and Larger Firms based on the OECD database, July 2006.

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afin d’identifier le rôle de chaque structure ;

rationaliser l’activité des structures propres à ces secteurs, afin d’éviter les doubles emplois ;

demander aux agences wallonnes de stimulation technologique et de stimulation économique de réaliser conjointement une vaste étude des filières environnementales, puis de réorganiser les dispositifs de soutien au développement des filières identifiées (financement de facilitateurs, soutien à la commercialisation, outils d’expansion, etc.) ;

faciliter le partage des expériences à l’intérieur des filières par la mise sur pied de plateformes d’échange de savoir ; et favoriser les échanges entre opérateurs des filières vertes et les acteurs des autres secteurs économiques, de la formation et de la recherche. Il s’agit par là de permettre une diffusion et une appropriation efficace des avancées offertes par les nouvelles technologies ;

établir des passerelles entre acteurs des filières vertes des différentes régions du pays. Les défis sont communs, il faut mutualiser les connaissances pour y faire face.

Proposition : Développer l’économie sociale et coopérative

La transition vers une économie durable passe également par une inversion de la logique de la ponction démesurée du profit par l'actionnaire au détriment de la pérennité de l'activité économique. Les modèles qui imposent des limites à la course au profit doivent être encouragés. Il faut que la plus-value réalisée grâce à l'activité économique d'une entreprise soit modérément distribuée pour rémunérer le capital et davantage réinvestie dans l'entreprise elle-même. Des outils législatifs existent d’ores et déjà pour encourager le développement d’un autre modèle d’entreprise. En matière de répartition des revenus de l’entreprise, les sociétés à finalité sociale et les coopératives agréées par le Conseil National de la Coopération (CNC) permettent d’offrir des solutions concrètes aux dérives du « tout à l’actionnariat ». Les conditions de cet agrément reprennent en effet

les cinq grands principes de la coopération : l'adhésion volontaire, le principe d'égalité ou la limitation du droit de vote aux assemblées générales, la désignation des administrateurs par l'assemblée générale, un dividende modéré servi aux parts sociales (actuellement 6 % net) et une ristourne aux associés. Cet autre modèle économique doit être encouragé et soutenu. Sa valeur d’exemple, mais également les plus-values économiques, sociales et environnementales qu’il dégage, nécessitent une meilleure prise en compte et une plus grande valorisation.

Politiques sectorielles

Proposition : Créer une Communauté européenne des Energies renouvelables (ERENE)

Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, les Européens mirent en place la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier (CECA), dont l’objectif majeur était de garantir l’indépendance énergétique de ses membres. La CECA fut une première étape décisive dans le processus d’unification européen56. Aujourd’hui, les Verts européens proposent la conclusion d’un Traité européen des énergies renouvelables dont l’objectif est de valoriser l’immense potentiel dont elles disposent en Europe. Ce traité porterait sur la création d’une Communauté Européenne des Energies Renouvelables (ERENE) et ferait de l’Europe la pionnière énergétique du XXIe siècle en permettant de couvrir à terme sa demande énergétique par les énergies renouvelables. Pour les Verts européens, le traité ERENE doit s’intégrer dans une stratégie européenne globale intégrant les économies d’énergie et le développement de l’efficience énergétique. Bien que distribué inégalement, le potentiel des énergies renouvelables est en effet immense. Les missions d’ERENE iraient du soutien à la recherche transnationale dans le domaine des énergies renouvelables à la promotion de l’innovation (via la construction d’installations pilotes), en passant par la mise en place d’un réseau d’électricité européen capable d’intégrer un grand nombre de

56 Les mêmes Etats conclurent ensuite le traité EURATOM – la Communauté européenne de l’énergie atomique – pour promouvoir l’utilisation de l’énergie nucléaire. Mais ce qui devait être une industrie « du futur » s’est surtout révélée être un gaspillage colossal de fonds publics.

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sources différentes et décentralisées, l’encouragement des investissements dans la production d’électricité verte, le développement d’un marché européen de l’électricité verte et la promotion de la coopération avec des pays tiers, singulièrement de la Méditerranée dont le potentiel en énergie thermique solaire est énorme.

Proposition : Réorienter la politique énergétique

Dans le cadre de la lutte contre les changements climatiques et dans la perspective d’une plus grande indépendance énergétique de la Belgique et de l’Europe, Ecolo estime nécessaire de soutenir trois pistes importantes dans la politique énergétique :

l’augmentation de l’efficacité énergétique et la maîtrise de la demande d’énergie ;

l’accroissement de la part des énergies renouvelables et l’amélioration de leurs filières de production, en agissant prioritairement sur les énergies qui offrent le meilleur temps de retour énergétique ;

l’amélioration des performances énergétiques et environnementales des sources d’énergies fossiles, pour la part décroissante qui restera utilisée dans le futur.

On lira par ailleurs57 les propositions d’Ecolo pour améliorer l’efficacité énergétique, développer les économies d’énergie et accroître significativement la part des énergies renouvelables en Belgique. Soutenir ces pistes passera par l’aide à l’établissement de certains marchés (octroi de primes, certificats verts, définition de normes à atteindre, par exemple), par les aides aux entreprises mais aussi par des crédits de recherche et la mise en réseau d’acteurs multiples afin de disposer du niveau de connaissance et de maîtrise technique nécessaire. Concrètement, cette réorientation de la politique énergétique passera par :

le développement de filières de « cogénération », avec une filière domestique et de petite taille et une filière industrielle, visant les installations de puissance importante ; car si la

57 Voir à ce sujet nos propositions du Livre I, Chapitre 1 « Energie – Climat ».

technologie paraît la même, les métiers sont différents ;

le développement des réseaux de chaleur et les technologies nécessaires ;

le développement de compétences dans la fabrication des machines électriques (nouveaux marchés de niche pour des moteurs électriques à haute valeur ajoutée) ;

la production d’installations de biométhanisation ;

le soutien à la filière de production d’éolienne ;

l’inscription dans la filière photovoltaïque en veillant à renforcer la recherche de cellules photovoltaïques plus efficaces ;

la création d’un pôle économique de la biomasse ;

le soutien à la recherche dans les filières émergentes que sont l'énergie marémotrice, les agrocarburants de seconde génération, les hydroliennes, … de manière à ce que la Belgique rattrape son retard dans ces filières potentiellement prometteuses.

Proposition : Développer les métiers liés à l’éco-rénovation et à l’éco-construction de logements

Dans le cadre d’une nouvelle politique du logement58, il s’agira de mettre sur pied une filière de matériaux de construction écologiques sains et à faible contenu énergétique, dans le cadre de l’application de la directive européenne sur la performance énergétique dans les bâtiments (PEB). Les pouvoirs publics s’engageront à développer les quartiers durables et les villes durables par l’éco-construction (la construction à haute performance énergétique – standards basse énergie, passif, voire à énergie positive –, l’usage de matériaux écologiques et l’éco-rénovation). Les actions à mettre en œuvre dans ce domaine sont :

la mise à disposition des entrepreneurs et des architectes et la popularisation d'une base de données reprenant les matériaux de construction écologiques ;

58 Voir à ce sujet nos propositions du Livre II, Chapitre 3 « Logement ».

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la formation des entrepreneurs et des architectes à l'éco-construction via une formation spécifique dans le cursus des architectes ou des formations spécifiques données par les organismes de formation59 ;

la rédaction d'un argumentaire environnemental et économique sur les avantages de l'éco-construction. Il devra clairement mettre en avant le rôle des primes, ciblées sur les actions les plus efficaces, c’est-à-dire celles qui présentent encore actuellement un temps de retour sur investissement inférieur à 5 ans (la construction selon le standard passif, par exemple) ;

le développement d'une certification « construction durable » comme cela existe en France pour la certification "HQE60" ;

l’imposition dans les cahiers des charges de bâtiments publics de la mise en place d’une démarche d'éco-construction en fixant éventuellement un plafond maximum exprimé en litres de mazout par m² de consommation d'énergie.

Proposition : Adopter un plan de modernisation écologique du secteur automobile

L’avenir du marché automobile dans nos régions est plus qu’incertain. Cette question est d’autant plus aigüe en Belgique que nous sommes un pays de montage automobile et un des plus grands pays exportateurs par habitant. Abstraction faite des situations conjoncturelles, l’industrie automobile se trouve aujourd’hui confrontée à un défi de taille : continuer à assurer la croissance du secteur dans un marché quasi saturé et dans un contexte d’une indispensable réduction des émissions CO2. Une seule voie de solution s’ouvre apriori à elle : augmenter la vitesse de renouvellement du parc. La FEBIAC avançait d’ailleurs récemment : « nous devons réaliser que la rotation rapide des voitures de société représente une part essentielle du chiffre d’affaires des entreprises automobiles belges ».

59 Le principal frein actuel à l'éco-construction est la méconnaissance des techniques et parfois une désinformation propagée par certains entrepreneurs ou certains architectes plus traditionnalistes qui, par peur de l'inconnu, déconseillent certaines techniques pourtant parmi les plus efficaces. 60 Haute qualité environnementale.

Or, réorienter notre système de mobilité pour le rendre plus durable implique, inévitablement, de réduire l’empreinte écologique de l’automobile. Celle-ci passe par une modification profonde des gammes de produits et par une diminution du volume du parc automobile. Le rôle des pouvoirs publics est dès lors fondamental. Il s’agit ni plus ni moins d’accompagner la modernisation écologique complète et la reconversion partielle du secteur automobile. Pour ce faire, il faut réorienter toutes les aides publiques pour le secteur automobile, sous quelle que forme que ce soit (y compris la fiscalité des voitures de société), vers ces deux objectifs.

En particulier, il s’agit de :

soutenir la recherche sur les nouveaux matériaux, l’application systématique des analyses de cycle de vie aux automobiles, le développement de couples « nouveaux carburants-nouvelles motorisations » les plus éco-efficients, etc. ;

favoriser la reconversion de l’industrie automobile vers la production des transports en communs écologiques, y compris du point de vue de la formation professionnelle. Ainsi, le groupe TEC a identifié une dizaine de métiers dont il a besoin et qui sont en pénurie ; il en va de même à la SNCB. Le secteur de la mobilité durable offre donc un potentiel d’emplois non négligeable de nature à permettre la reconversion de bon nombre d’emplois du secteur automobile.

PRIORITE N°2 : UTILISER LA FISCALITE VERTE POUR

RENDRE LES CHOIX ECOLOGIQUES MOINS

CHERS ET REORIENTER L’ECONOMIE

La fiscalité verte devrait constituer, dans la boîte à outils des pouvoirs publics, avant tout un instrument microéconomique de modification des comportements vers des choix plus respectueux de l’environnement, plutôt qu’un moyen de faire rentrer de l’argent dans les caisses de l’Etat. La priorité n’est donc pas de taxer plus mais de taxer mieux, afin d’inciter le choix écologique ou de désinciter l’option inverse. A côté de la dissuasion de certains comportements dommageables pour le développement durable, il s’agit ainsi de démontrer que d’autres orientations sont possibles et ne coûtent pas plus cher. Rendre le choix écologique le moins cher aide à convaincre. Ainsi, sous

Programme Ecolo 2009 – Livre IV « Pour une société qui se développe » – Chapitre 3 « Economie verte » – 47/77

l’impulsion d’Ecolo, de nombreuses mesures facilitant le choix écologique ont déjà vu le jour :

déductions fiscales à l’Impôt des Personnes Physiques (IPP) à la performance énergétique de l’habitation et aux énergies vertes ;

déductions fiscales à l’IPP, en frais réels, des trajets en vélo, du covoiturage, du transport en commun ;

écobonis sur les boissons à contenant réutilisable ;

primes « énergie » en Région wallonne et en Région de Bruxelles-capitale ;

suppression de la taxe régionale forfaitaire sur les déchets en Région wallonne et liaison des contributions communales au poids ou au volume des poubelles61. Par ailleurs, on peut rappeler qu’à terme, la

lutte contre la pollution et en faveur du développement de technologies vertes « rapporte » non seulement en termes de qualité de vie, mais aussi au niveau des finances collectives et individuelles : réduction des décès prématurés ou des admissions hospitalières, augmentation de la productivité du travail … De plus, de nombreuses activités du secteur de l’environnement sont très difficilement délocalisables ; qu’on songe par exemple à la collecte sélective et à la revalorisation des déchets, ou la rénovation des logements qui, outre l’impact environnemental positif, permet la création de nombreux emplois dont une grande majorité d’ouvriers et/ou de personnes peu qualifiées.

Enfin, pensons au fait que la nature fournit de

nombreux biens et services vitaux : la purification de l’eau, la prévention des inondations, la pollinisation des plantes et des fruits, le maintien de la fertilité des sols, etc. Préserver la capacité des écosystèmes naturels à fournir ces biens et services est un des piliers centraux du développement durable. Malheureusement, ces services « naturels » (que les économistes appellent « externalités positives ») n’ont pas de valeur économique formellement reconnue. Trop peu de mécanismes économiques ou politiques s’opposent à leur surexploitation. La philanthropie, la bonne volonté individuelle ou le seul recours aux pouvoirs publics ne suffiront pas. Que cela plaise ou non, in fine, le coût est un outil important pour faire bouger les choses. Il faut donc corriger les

61 Voir à ce sujet nos propositions du Livre I, Chapitre 2 « Environnement ».

défaillances d’un marché qui ne reflète pas le prix-vérité, notamment dans les domaines où les droits de propriété ne sont pas clairement attribués et où des coûts externes apparaissent.

Si nous considérons les ressources naturelles

comme des facteurs de production essentiels qui ne peuvent être gaspillés, il faut que leur prix reflète davantage leur rareté et intègre le coût des dommages créés. A l’heure actuelle, sans responsable identifié, sans application du principe du « pollueur – payeur », c’est l’Etat et, derrière lui, les contribuables anonymes qui passeront à la caisse et payeront un jour ou l’autre les coûts aujourd’hui cachés, donc reportés. Bref, le signal prix actuellement envoyé par le marché n’est pas le bon. C’est l’application du principe du « pollueur - profiteur » qui prévaut : des firmes peuvent s’enrichir impunément sur le dos de l’environnement et de la collectivité. La Suisse a évalué à environ 13 milliards € par an les coûts non couverts dus aux atteintes à l’environnement sur son territoire. Et chez nous ? Il n’y a pas de données connues. Mais fondamentalement, la dynamique est identique : ce sont les citoyens qui paient les dégâts environnementaux causés principalement par certains secteurs économiques ou groupes privés62.

La symbiose entre écologie et économie sera

d’autant plus forte que l’internalisation des coûts environnementaux aura été réalisée et que le coût des biens et produits traduira mieux le coût-vérité. Sans « internalisation », la théorie économique classique met en compétition deux facteurs principaux : le travail d’un côté et le capital de l’autre. L’analyse de ces dernières années nous montre combien l’arbitrage s’est malheureusement toujours effectué en faveur du capital. Il a su profiter à fond de la globalisation et de la financiarisation. Le travail, lui, a été constamment mis sous pression au nom de la compétitivité. C’est ici que la théorie économique doit effectuer un saut qualitatif en introduisant, dans ce rapport, l’environnement comme un facteur à part entière. Une série d’arbitrages devront alors être impérativement reconsidérés : le surcoût de nos salaires belges et européens sera désormais à mettre en balance avec le surcoût plus grand encore de l’internalisation des dégâts environnementaux, liés par exemple au déplacement en très longues distances de matières et de biens.

62 Rappelons que le rapport Stern sur l’économie du changement climatique – rédigé par l'économiste Nicholas Stern – estime qu'1 % du PIB investi maintenant suffirait à fortement atténuer les effets du changement climatique et que l’inaction pourrait entraîner une récession jusqu'à 20 % du PIB mondial.

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Ce faisant, l’environnement apparaîtra dans les années qui viennent comme un facteur fort de la nécessaire relocalisation de l’emploi, au même titre d’ailleurs que l’explosion des prix du pétrole. Il va par exemple devenir prohibitif de produire une série de marchandises en Chine puis de les transporter jusqu’en Europe. Pour donner un ordre de grandeur, pour un prix de pétrole de 20 $ le baril, transporter un container de Shanghai aux Etats-Unis revient à 3 000 $ ; à un prix de 200 $ le baril, le même déplacement du même container revient à 15 000 $. L’impact du coût de transport est, on le voit, énorme. Il le sera encore plus dès lors que nous aurons réellement entamé l’internalisation des coûts des dégâts environnementaux.

Tout l’enjeu consiste donc à faire progressivement apparaître le « vrai » coût des biens et services. Or, à l’heure actuelle, la plupart des coûts environnementaux sont externalisés, et donc, in fine, pris en charge par l’État et non par l’entreprise « polluante ». La comptabilité environnementale existe en Belgique mais elle n’est hélas pas intégrée dans la grille d’analyse des politiques publiques. L’internalisation des coûts environnementaux est en fait une application généralisée du principe du « pollueur - payeur » élargie, quand c’est possible, au coût du déstockage des ressources naturelles. L’internalisation complète, c’est donc l’intégration dans le prix du coût des externalités environnementales de ce produit (tout au long de son cycle de vie) et du coût d’épuisement des ressources qui ont été nécessaires à sa fabrication.

L’application de ce principe semble relever de l’évidence. Mais il ne faut pas ignorer que sa généralisation est difficile. De nombreuses études, notamment en matière d’évaluation de la valeur des biens naturels, sont encore nécessaires. Notre objectif doit donc être d’augmenter progressivement le taux d’internalisation et non d’attendre d’être entièrement en mesure de la généraliser. Car, à défaut d’avancées en la matière, on restera en permanence exposé à la pression de la recherche des prix les plus faibles, quelles qu’en soient les conséquences pour l’environnement, le développement durable, l’emploi ou la protection sociale.

Proposition : Mettre en œuvre une taxe carbone sur les produits hors Kyoto

Joseph Stiglitz, ancien économiste en chef de la Banque Mondiale et prix Nobel d’économie en 2001 a proposé d’instaurer une taxe

carbone sur les pays qui, comme les États-Unis, refusent d’adhérer au processus de Kyoto. Son idée est de créer un mécanisme contraignant qui empêcherait un pays comme les USA qui refuse de réduire ses émissions, d’infliger des dégâts au reste du monde. Concrètement, Stiglitz propose d’utiliser le cadre de référence de l’OMC63, à savoir l’interdiction des subventions aux entreprises. Aux yeux de l’OMC, une entreprise bénéficie d’une subvention lorsqu’elle ne paie pas tous les coûts liés à sa production. Ne pas (devoir) payer les coûts d’un dommage causé à l’environnement constitue donc une subvention, tout comme le serait le fait de ne pas payer entièrement les salaires des travailleurs. De ce point de vue, les entreprises américaines sont ainsi subventionnées. Pour Stiglitz, le remède est donc simple : les autres pays devraient interdire les importations de biens américains produits grâce à des technologies utilisant beaucoup d’énergie ou à tout le moins introduire une forte taxe pour compenser la subvention. En réalité, les États-Unis eux-mêmes ont déjà admis ce principe : ils ont interdit l’importation de crevettes thaïlandaises capturées à l’aide de filets qui causent la mort inutile d’un grand nombre d’espèces de tortues en voie de disparition. Bien que la façon dont les États-Unis aient imposé cette restriction ait été critiquée, l’OMC a approuvé le principe important selon lequel l’environnement et les intérêts commerciaux sont étroitement liés. Selon Stiglitz, le Japon, l’Europe et les autres signataires de Kyoto devraient au plus vite porter le dossier devant l’organe de règlement des différends de l’OMC, en dénonçant des subventions injustes. D’une certaine façon, les États-Unis devraient accueillir positivement une telle initiative... eux qui se sont si souvent plaints, au sujet du protocole de Kyoto, de l’absence d’un mécanisme d’exécution contraignant.

Dans un premier temps, nous devons commencer par renforcer l’information sur les coûts environnementaux des biens et des services. D’autres pays comme la France et la Grande-Bretagne sont en train de prendre des mesures très concrètes en matière d’étiquetage CO2.

63 Organisation mondiale du commerce.

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Proposition : Augmenter la déductibilité fiscale pour la construction et la rénovation de « maisons vertes » et d’habitats groupés

La législation fiscale permet depuis 2005 que les amortissements de capital, les intérêts hypothécaires et les primes d'assurance-vie (solde restant dû) fassent l'objet d'une « déduction pour habitation propre et unique ». Ainsi, chaque citoyen qui construit peut obtenir une déduction du revenu net imposable, quel que soit le niveau de ses revenus imposables, en fonction de sa situation familiale.

Ecolo propose de doubler les montants actuels, si les citoyens optent pour une construction verte, sur base d’un cahier des charges précis (une construction qui maîtrise les impacts du bâtiment sur l'environnement extérieur, qui crée un environnement sain et agréable pour les occupants, qui préserve les ressources en optimisant leur usage). Ce gain serait encore plus important pour les habitats groupés verts et les éco-rénovations.

Proposition : Développer la fiscalité verte en matière de logement et de transport

La fiscalité verte (ou fiscalité environnementale) peut porter sur différents secteurs. Ecolo propose de développer la fiscalité verte du logement et la fiscalité verte du transport vu l’impact de ces secteurs sur l’empreinte écologique globale de la Belgique. 1. La fiscalité verte du transport devrait comporter :

la variation de la taxe de circulation selon des éco-scores liés aux émissions polluantes et la consommation d’énergie, et non plus selon la puissance comme actuellement. Il s’agirait donc de diminuer les taxes sur les voitures peu polluantes et peu consommatrices, et de les augmenter sur les véhicules peu respectueux de l’environnement (avec prise en compte des familles nombreuses et des personnes précarisées qui ne peuvent s’acheter de nouveaux véhicules)64 ;

64 Voir à ce sujet nos propositions du Livre I, Chapitre 3 « Mobilité et Transport ».

la suppression de la taxe de mise en circulation, remplacée par une taxe « au kilomètre » (avec prise en compte des spécificités urbaines et rurales) ;

un traitement préférentiel à l’IPP pour les utilisateurs se rendant au travail par des modes doux (par exemple en augmentant, uniquement pour eux, le forfait de déduction au kilomètre) ;

une réduction fiscale lors du placement de filtres à particules sur les anciennes voitures ;

la taxation du kérosène et l’imposition aux transports aérien et maritime de quotas de CO2 dégressifs et mis aux enchères.

L’ensemble de ces mesures constitueront autant de stimulants pour la recherche de formules d'amélioration environnementale, pour l’évolution de l’offre de services et de produits et pour une évolution des comportements individuels. 2. La fiscalité verte du logement devrait comporter :

la mise en œuvre et le maintien dans le temps d’un taux de TVA de 6 % pour les rénovations pour le logement social et pour les bâtiments scolaires ;

l’extension de la déduction fiscale à l’isolation de toutes les parois du bâtiment ;

l’augmentation des déductions à l’IPP des prêts hypothécaires tant pour l’éco-rénovation que pour l’éco-construction ;

la non-augmentation du revenu cadastral après une rénovation énergétique ;

l’adoption d’une fiscalité indirecte différenciée sur les produits et équipements énergétiques : les taux de TVA et d'accises doivent être fixés en tenant compte du niveau des nuisances provoquées par leur usage tout au long du cycle de vie du produit ; la taxation indirecte sera d’autant plus basse que la filière de production a un impact réduit sur l’environnement, sur les émissions de gaz à effet de serre et sur l’efficacité énergétique ; le taux de taxation des différents carburants et des combustibles évoluera ainsi progressivement en fonction de ces critères, par application différenciée du mécanisme de cliquet ;

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la diminution de la TVA sur les investissements pour les économies d’énergie et les énergies renouvelables, dans les limites permises par la directive européenne, notamment pour la construction de maisons passives, la rénovation basse énergie et la vente de chaleur issue des réseaux de chaleur.

3. Plus globalement, la fiscalité verte devrait comporter :

la réduction du taux de TVA pour les produits labellisés pour des raisons environnementales et éthiques ;

l’orientation des fonds de placement à investir dans ce secteur.

Un dispositif de crédit d’impôt doit être prévu pour permettre à davantage de contribuables d’obtenir ces déductions fiscales, qui bénéficient actuellement peu aux classes de revenus moins aisées. De la même manière, les entreprises devraient également être fiscalement encouragées à réduire leur consommation d’énergie par une série de mesures ciblées et concertées avec les secteurs.

Proposition : Favoriser les actifs immobilisés verts

Afin de privilégier un développement durable et responsable, Ecolo propose une mesure fiscale qui consiste en la majoration de 20 points de base65 des immobilisations66 qui tendent :

à promouvoir la recherche et le développement de produits nouveaux et de technologies avancées n’ayant pas d’effets sur l’environnement ou visant à minimiser les effets négatifs sur l’environnement ;

à une utilisation plus rationnelle de l’énergie, à l’amélioration des processus industriels au point de vue énergétique, et plus spécialement, à la récupération d’énergie dans l’industrie.

65 1 point de base = 0,01%. 66 L’article 69 du code des impôts prévoit des déductions pour investissement dans des actifs immobilisés par une entreprise. Ces déductions sont comprises entre 3,5 % et 10,5 %. Le pourcentage est majoré de 10 points de base pour une série d’immobilisations. Pour les immobilisations qui s’inscrivent dans le cadre du développement durable, la proposition vise à doubler cette majoration en la faisant passer à 20 points de base.

PRIORITE N°3 : ORIENTER VERS L’ECONOMIE VERTE PAR

LE BIAIS DE LA COMMANDE PUBLIQUE

Les marchés publics constituent un excellent levier pour imprimer un sens durable à la politique économique du pays. Outre le fait que la concurrence transfrontalière se soit fortement accrue dans le secteur des marchés publics et ait fait baisser d'environ 30 % les prix payés par les pouvoirs publics pour les biens et services, la capacité financière des pouvoirs publics à orienter la production est importante. La commande publique dans l’UE – c’est-à-dire les commandes de fournitures, de services et de travaux par le secteur public – représente en moyenne 14 % du budget des administrations des Etats de l'Union européenne. C'est dire le volume financier des marchés publics également en Belgique.

Outre le fait d’approvisionner l’Etat en services, biens et travaux, les marchés publics sont donc un formidable outil économique. Pourtant, la façon dont l’Etat achète stimule encore trop peu l’innovation environnementale, sociale et éthique. Au niveau européen, il a été montré que les critères environnementaux ne sont pas assez pris en compte lors de la passation des marchés publics. Seuls l’Autriche, le Danemark, la Finlande, la Grèce, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et la Suède font un réel effort pour « acheter vert ». 40 à 70 % des appels d’offre lancés par ces 7 pays exigent le respect de critères environnementaux, ce qui stimule évidemment leur économie intérieure à passer au vert. Dans les 18 autres pays de l’Union, ce taux ne dépasse pas les 30 %.

C’est particulièrement vrai en Belgique francophone, où le volet « vert » des marchés publics n’est jusqu’ici que très peu actionné, alors qu’il pourrait activer des secteurs à fort potentiel de croissance et d’emplois au moins partiellement non délocalisables (construction durable, énergie renouvelable, chimie verte, bioplastique, transport écologique et logistique multimodale, agriculture biologique, …).

En outre, si les Gouvernements désirent que les entreprises de nos régions ne prennent pas de retard à proposer des produits plus écologiques, il est temps que les pouvoirs publics passent du stade de « projets-pilote » à une systématisation de la commande de produits et d’investissements verts, sans quoi la majorité des produits écologiques seront importés des pays du Nord et de l’Est de l’Europe.

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Proposition : Lancer un plan national d'action pour des achats publics durables

La Belgique n'apparaît pas dans le groupe des États membres considérés comme les plus avancés en cette matière. La majorité de ces États travaillent à l’élaboration d’un plan national avec parfois des engagements forts. Ecolo propose que les nouveaux Gouvernements régionaux préparent un tel plan dans l’année de leur installation. Les investissements publics représentent plus de 5 milliards € tous niveaux de pouvoir confondus et les consommations de biens et services environ 11 milliards. Au total, cela représente annuellement 5 % du PIB. C’est dire l’enjeu et le poids de ces commandes publiques en terme « d’orientation » de l’économie.

Proposition : Augmenter le pourcentage de marchés publics verts

L’objectif d’Ecolo est clair : pousser les pouvoirs publics à développer une politique ambitieuse d’achats, sur base de critères environnementaux, sociaux et éthiques, intégrés à chaque phase de la passation des marchés publics. Tout en assurant le respect des objectifs de la politique des marchés publics67, la protection de l'environnement peut ainsi être prise en compte à chaque stade d'une procédure de passation de marché public, à savoir :

la définition de l'objet du marché ;

le choix des spécifications techniques ;

la sélection des candidats ;

l'attribution du marché ;

les conditions additionnelles ;

l'exécution du contrat.

67 Contribuer à la réalisation du marché intérieur par des achats transparents et non discriminatoires et assurer une allocation optimale des deniers publics en garantissant des achats au meilleur prix ou meilleur rapport qualité/prix.

Proposition : Adopter un plan d’investissements dans le transport public

A l’heure actuelle, seuls environ 20 % des 140 milliards de kilomètres parcourus chaque année en Belgique le sont en transport en commun. Les voitures belges roulent de plus en plus. Ces vingt dernières années, le nombre moyen de kilomètres parcourus annuellement par nos voitures personnelles a progressé de 1 % en moyenne chaque année. De 12 500 km en 1985, il est passé à 15 000 en 2005. Ces chiffres sont le résultat des choix d’investissements effectués depuis plusieurs décennies. La Belgique possède, après les Pays-Bas, le réseau autoroutier le plus dense de l’Union européenne (UE) avec 1,6 km de réseau routier pour 10 000 habitants alors que la moyenne pour l’UE n’est que de 1,38 km. Il faut donc lancer un plan d’investissements verts se donnant pour objectif d’augmenter considérablement la part de marché des transports en commun et singulièrement du train. Pour y parvenir, nous devons améliorer non seulement la qualité (ponctualité, sécurité, accueil, etc.) mais aussi la quantité de l’offre (réouverture de petites gares, création de nouvelles lignes, accroissement du nombre de places dans les trains, augmentation de la fréquence, etc.).

Proposition : Lever les obstacles juridiques à la conclusion de marchés publics verts

Ecolo propose que les Gouvernements régionaux mettent tout en œuvre (budget, moyens humains, campagne de sensibilisation) pour lever les principaux obstacles à cette prise en compte des critères environnementaux dans les marchés publics. Ces obstacles sont les connaissances insuffisantes pour fixer les bons critères environnementaux, les contraintes budgétaires imputables aux prix parfois plus élevés des produits et des services écologiques et l’insécurité juridique. Ecolo propose que les politiques mises en œuvre (formation des fonctionnaires, échange des bonnes expériences, insertion des clauses environnementales, évaluation, etc.) soient coordonnées et valorisées par les administrations régionales.

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PRIORITE N°4 : PROMOUVOIR ET DEVELOPPER LE

SECTEUR DU TOURISME DURABLE

Comme toute activité économique, le tourisme nécessite une régulation forte et une vision qui dépassent le court terme. En 2020, l'OMT68 prévoit 1,5 milliard de touristes dans le monde, alors qu'ils étaient 800 millions en 2005 ; les villes devraient être les principales bénéficiaires de cette évolution. Le risque majeur de ce développement est, pour le secteur, de devenir la victime de ses propres excès. Or, les changements climatiques et la hausse du coût de l'énergie imposent l'émergence d'un modèle touristique qui minimise les impacts négatifs sur le territoire, tout en assurant un développement au bénéfice de l'activité économique locale, de l’emploi, de l’environnement et de l'enrichissement culturel des populations et visiteurs.

Pour Ecolo, tant le tourisme de loisirs que le tourisme d’affaires ou de congrès offrent, à des degrés divers, de nombreuses opportunités de développement durable à la Wallonie et à Bruxelles. Ils représentent un important réservoir d'emplois non délocalisables pour une série de qualifications professionnelles (accueil, organisation, guidance, nouvelles technologies, marketing, langues, …). Outre les emplois directs, de nombreuses personnes tirent bénéfice de revenus complémentaires liés à la location de gîtes, au guidage des visiteurs, à l’horeca ... Le développement touristique est également une opportunité de valorisation du patrimoine (naturel, culturel, gastronomique ...) dans toutes ses dimensions y compris historique et éducative.

Au nom du tourisme durable et pour réduire la pression sur les écosystèmes, certaines destinations privilégient l'accueil de touristes financièrement aisés, ce qui leur permet de maintenir le niveau de revenus tout en diminuant le nombre de nuitées. Pour Ecolo, le tourisme durable ne peut se construire sur le présupposé d‘une quelconque limitation à la découverte et au voyage pour les moins favorisés. Proposition : Renforcer la plus value culturelle de l’activité touristique

La plus-value culturelle de l'activité économique touristique (ou la plus-value

68 Organisation mondiale du tourisme. Voir le site http://www.unwto.org/index_f.php.

économique de l'activité culturelle touristique) est manifeste. Encore faut-il la susciter. Face à la manne financière que constituent les rentrées du tourisme, la tentation est grande chez les décideurs de multiplier les produits touristiques artificiels « clé sur porte » (infrastructures, évènements ...), sans lien avec la culture du pays. Pour Ecolo, la destination touristique (la ville, la région) ne peut se développer parallèlement aux habitants. Face à ce que certains appellent la « disneylandisation » des territoires, le rôle des pouvoirs publics est d'organiser l'offre touristique de telle sorte que la rencontre entre le visiteur et les habitants soit la plus optimale possible. Pour améliorer les bénéfices culturels de l'activité touristique et ne pas réduire l'échange à une interaction exclusivement marchande, Ecolo propose :

d’intégrer le projet touristique dans le projet de ville ou de région ;

de développer des évènements culturels et touristiques en lien avec la culture de la destination ;

de valoriser touristiquement les atouts existants (produits de terroir, mode, design, architecture ...) ;

de s'appuyer davantage sur les habitants pour assurer la promotion de la destination ;

en Région de Bruxelles-Capitale, de poursuivre la valorisation touristique multiculturelle au travers du caractère européen de nombreux habitants69 ;

d’encourager les habitants à développer l'accueil des visiteurs (chambres d'hôtes, gîtes ...) ;

d’encourager les associations locales à participer à la valorisation touristique de leur région.

Ecolo souhaite également encourager le tourisme de proximité, notamment intra et inter-régional (voyages scolaires, par exemple) et contribuer de la sorte à la construction de nouveaux rapports entre les Régions au sein de l'Etat fédéral.

69 Voir par exemple l’initiative Tof People sur le site http://www.brusselstofpeople.eu/.

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Proposition : Développer de nouveaux indicateurs de qualité

A l'heure actuelle, ce sont essentiellement les chiffres des nuitées et le poids économique des marchés qui témoignent seuls de la réussite ou de l'échec des politiques menées. Pour primordiales qu'elles soient, ces données ne suffisent pas à rendre compte d'une politique durable. Pour Ecolo, il y a lieu de développer des indicateurs complémentaires permettant de mesurer :

la réduction de l'empreinte écologique du secteur et son impact sur les milieux naturels, comme initié en Région bruxelloise ;

le degré de participation et d'adhésion de la population au développement touristique ;

la quantité et la qualité des emplois créés ;

la diversité des lieux et des infrastructures touristiques pour mieux les intégrer dans des projets structurants ;

l'enrichissement culturel des visiteurs et des habitants.

Proposition : Mieux valoriser et développer le tourisme régional et local durable

Le tourisme axé sur les richesses de la biodiversité (autour du brame du cerf et des espèces emblématiques comme la cigogne noire ou le castor, par exemple) est sous-valorisé et peut devenir un vrai vecteur de développement en Région wallonne, en particulier au sud du sillon Sambre et Meuse. Il doit également cependant être encadré pour éviter toute atteinte à la richesse des sites. Pour Ecolo, une dynamique doit être initiée entre associations de conservation de la nature, horeca, offices du tourisme, agences de voyage, … pour générer une offre cohérente. D’une manière plus générale, les richesses forestières et paysagères doivent être développées comme produit touristique d’appel majeur. Les efforts en matière de promotion du tourisme vert (sentiers balisés, RAVeL, promenade verte à Bruxelles, …) et fluvial doivent être poursuivis.

L'actuel projet de développement du site des lacs de l'Eau d'Heure doit faire l'objet d'une réorientation sur base de critères ;

de moindre urbanisation (concentrer l'hébergement dans la zone de loisirs au nord de la plate taille) ;

d'intégration de tous les acteurs concernés dans la conception et la mise en œuvre des projets ;

de valorisation de l'intérêt paysager et naturel du site (zones d'intérêts paysagers et biologiques à protéger) ;

de cohésion et cohérence avec le territoire adjacent aux lacs (tourisme intégré dans les villages).

Proposition : Ecologiser l’activité touristique et la rendre plus efficace

Pour diminuer l'empreinte écologique de l'activité touristique, Ecolo propose notamment de :

développer des labels de qualité environnementale pour les hébergements70, les produits de terroir et valoriser par des actions de promotion les acteurs touristiques qui réduisent l'empreinte écologique de leur activité (festivals notamment) ;

encourager les visiteurs à recourir aux moyens de déplacement les moins polluants vers la destination et durant le séjour, notamment par une amélioration de l’offre ;

positionner Bruxelles et la Wallonie comme des destinations durables auprès des visiteurs ;

selon les principes de l'économie verte, mettre « en tourisme » les activités économiques existantes (gastronomie durable, mode, design ...) et les avancées vertes des destinations Bruxelles et Wallonie (énergies renouvelables, bâtiments exemplaires, agriculture biologique ...).

Pour rendre le secteur plus efficace, Ecolo prône une meilleure cohérence institutionnelle et propose le transfert de la compétence de la Cocof au profit de la Région bruxelloise. Il

70 Au rang desquels l’éco-label européen. Voir le site http://www.eco-label.com/french/.

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s’agit également de veiller à une meilleure gouvernance par une évaluation des structures (régionales, provinciales, intercommunales, locales et associatives) en vue de leur rationalisation éventuelle ou d’une mutualisation de certains projets (centrales de réservations, par exemple).

PRIORITE N°5 : ENCOURAGER L’EXPLOITATION DURABLE DES RESSOURCES NATURELLES

REGIONALES

Le bois71 31 % du territoire wallon est constitué des zones forestières représentant plus de 80 % de la forêt belge. Cette superficie est en progression constante mais son exploitation souffre d’un important morcellement de la forêt privée (52 % du total)72. La filière bois représente en Région wallonne près de 13 000 emplois salariés directs dans plus de 2 000 entreprises. Pour assurer un développement durable accru de la filière bois en Région wallonne, Ecolo propose :

d’évaluer l’utilisation du bois dans toutes ses formes et mettre en œuvre une stratégie globale à l’échelle régionale, notamment aux fins d’éviter une concurrence néfaste entre les différents usages (papeterie, bois d’œuvre et bois énergie) ;

de renforcer le soutien et l’encadrement accordés aux groupes de propriétaires ou d’associations forestières ;

d’encourager la mise sur pied de « Contrats de massifs » entre les différents acteurs de la forêt73 ;

de préciser les missions du nouvel Office économique Wallon du Bois (OWB) et des outils de promotion existants dans un souci de renforcement de la professionnalisation et de la rationalisation des outils de soutien au secteur ;

71 Voir à ce sujet nos propositions du Livre I, Chapitre 2 « Environnement ». 72 On estime à 105 000 le nombre de propriétaires privés et 70 % des propriétés ont moins d’un hectare. 73 A l’instar du projet de gestion intégrée du massif de Saint-Hubert (PGISH).

de développer la R&D orientée vers une meilleure valorisation du matériau bois dans l’éco-construction et l’efficacité énergétique ;

d’encourager les dynamiques de partenariat coopératif en aide à la modernisation des entreprises de première et seconde transformation ;

de développer les réseaux publics de chaleur au bois.

La pierre Au vu de son impact important sur l’environnement et le paysage couplé à son caractère non délocalisable, l’activité extractive représente une activité économique particulière. Elle conduit à de nombreux conflits d’usage du sol entre les exploitants et des citoyens soucieux de la préservation de leur cadre de vie. Le secteur de l’industrie extractive recouvre une large diversité d’activités répondant à de nombreux besoins de la vie quotidienne (construction, applications multiples de la chaux, …) et offrant de l’emploi non délocalisable à de nombreuses personnes de qualifications diverses. Elle est aussi cependant consommatrice d’espaces et génératrice de nuisances. Ecolo est favorable à la coexistence de cette activité avec d’autres fonctions vitales en tenant compte de deux faits : d’une part, l’extraction est dépendante de la carte géologique ; d’autre part, il n’a pas été tenu assez compte dans l’urbanisation galopante des 30 dernières années de la proximité des zones d’extraction au plan de secteur. Ecolo propose de mieux planifier le développement de l’industrie de l’extraction via une réflexion globale sur la localisation des carrières, basée sur la cartographie géologique de la Wallonie, une meilleure connaissance des besoins du secteur pour les 30 prochaines années ainsi qu’une prise en compte de la carte du bâti et des ressources environnementales (eau, préservation des terres agricoles, …). Ces éléments devraient mener à une révision thématique des plans de secteur. En effet, une zone d’extraction doit être bien située géologiquement (c’est la viabilité de l’entreprise qui en dépend) sans entrer en concurrence avec les autres fonctions de cette zone. L’activité des carrières pose également question en termes de compensations planologiques : le

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CWATUPE74 prévoit que pour chaque hectare transformé en zone urbanisable (dont font désormais partie les zones d’extraction), un autre hectare « urbanisé » (dont les anciennes carrières, par exemple) doit être rendu à la nature. Pour Ecolo, un mécanisme de compensation est intéressant dans la mesure où il permet de prendre effectivement en compte l’empreinte écologique de la carrière. Toutefois, le régime actuel des compensations est insuffisant : il ne tient absolument pas compte de la qualité environnementale du lieu (détruit ou rendu à la nature) et le flou règne sur les compensations alternatives (investissements d’intérêt général) qui laissent les petits exploitants carriers impuissants face à des demandes de compensation parfois inattendues de la part des pouvoirs publics75. Pour assurer un développement équilibré du secteur, Ecolo propose :

une planification globale des zones d’extraction au plan de secteur, actuellement en déshérence ;

une gestion des carrières selon des critères clairs et objectifs intégrant la préservation des ressources et le cadre de vie (notamment par le biais de zones tampons entre les espaces d’extraction et les habitations proches), selon une cartographie et une planification cadrées ;

une meilleure prise en compte de l’empreinte écologique des carrières, avec une attention particulière à l'eau, notamment en objectivant les compensations qui sont légalement demandées ;

une valorisation (environnementale, culturelle, économique) des sites désaffectés qui passe par une obligation de réhabilitation et de sécurisation selon des critères définis préalablement et garantis par l’exploitant et les autorités publiques ;

un soutien aux comités d’accompagnement des carrières et industries polluantes ;

un renforcement des contrôles ;

un encouragement à la modernisation de l’image et des usages de la pierre régionale souvent perçue comme valeur du passé plutôt que matériau d’avenir ;

le maintien d’une « culture de la pierre wallonne » au travers de la diffusion du savoir-

74 Code wallon de l'urbanisme, de l'aménagement du territoire, du patrimoine et de l'énergie. 75 Exemple : si un « grand » groupe peut envisager un « subside » pour construire une route ou un préau d’école, ce n’est souvent pas le cas des plus petites entreprises.

faire professionnel du secteur et d’un soutien accru à la formation.

D’une manière plus transversale et tant pour la pierre que pour le bois, Ecolo est favorable à :

soutenir des clusters économiques locaux et régionaux dans le secteur de l’éco-construction ;

mettre en place un réseau de conseillers à l’usage et la valorisation des ressources naturelles régionales ;

développer un observatoire de l’utilisation de nos ressources naturelles indigènes dans l’habitat (pourcentage de pierre et bois indigènes utilisés) comme outil d’orientation des stratégies économiques à mettre en œuvre ;

intégrer des critères liés à ces matériaux régionaux dans la commande publique76 ;

encourager le recyclage et la réutilisation des matériaux primaires (dont la pierre et le bois) dans la construction et l’industrie.

76 Voir à ce sujet nos propositions reprises dans notre 3e priorité « Orienter l’économie verte par le biais de la commande publique ».

Programme Ecolo 2009 - Livre IV « Pour une société qui se développe » – Chapitre 4 « Indépendants et PME » - p 56/77

PROGRAMME ECOLO ÉLECTIONS 2009

Livre IV - Pour une société qui se développe

Chapitre 4 « Indépendants et PME »

Pour que les petites entreprises contribuent à la sortie de crise…

Indépendants et PME aujourd’hui : Etat des lieux et analyse

Trop longtemps négligé-e-s, l’indépendant ou le/la patron-ne de PME ou TPE voi(en)t ces dernières années son/leur image revalorisée au sein de la société. C’est que la mondialisation, la crise sociale, les mutations de l’économie ont laissé la Belgique et plus particulièrement les Régions wallonne et bruxelloise dans un état socioéconomique précaire. Parmi les incantations médiatiques s’élève la voix appelant à plus d’initiative, à la créativité, au goût du risque. Personne ne s’en plaindra. Mais entre le dire et le faire, il y a une authentique révolution culturelle à opérer, surtout au Sud du pays. Le rôle du politique est donc, au-delà du discours « dynamique » de circonstance, de mettre en place les conditions pour que le risque ne se transforme pas en cauchemar, de faire en sorte que les outils les mieux adaptés soient à la disposition des indépendants (création, cession, transmission d’activités) et des PME.

L’Europe a en tout cas pris conscience de

l’importance des PME en lançant à l’été 2008 le Small Business Act, un plan qui devrait soutenir les petites et moyennes entreprises. Un nouveau règlement général d’exemption par catégorie portant sur les aides d'État vise à simplifier les procédures et à réduire les coûts. Il veut accroître l'intensité de l'aide en faveur des PME et permettre à celles-ci de bénéficier plus facilement d'aides en matière de formation, de recherche et développement, de protection environnementale ainsi que d'autres types de soutien. Un nouveau statut de société privée européenne permettra la création d'une société privée européenne (SPE) qui fonctionnera selon les mêmes principes uniformes dans tous les États membres. Une nouvelle proposition relative à la TVA offre aux États membres la possibilité d'appliquer des taux de TVA réduits sur les services fournis localement, y compris les services à forte intensité de main-

d'œuvre, qui sont principalement proposés par des petites et moyennes entreprises. Enfin, une modification de la directive sur les retards de paiement est prévue en 2009, afin de garantir que les PME soient payées dans le délai prévu de 30 jours. Ceci reste largement à concrétiser et à modaliser, mais nous pouvons en tout cas nous réjouir du lancement d’une telle dynamique à l’échelon européen.

Etre « indépendant(e) », c’est quoi ?

L'élément essentiel qui permet de distinguer l'activité indépendante par rapport à l'activité salariée est l'absence de lien de subordination. En effet, le (la) travailleur(euse) indépendant(e) décide librement des conditions dans lesquelles il (elle) exécute son travail. L'appréciation de l'existence du lien de subordination est complexe mais les éléments suivants éclairent le chemin : choix des horaires et du lieu de travail, variabilité du revenu, absence de garantie de revenu minimum, participation aux bénéfices mais aussi aux pertes de l'entreprise, investissement de fonds propres, liberté de travailler pour plusieurs clients, détermination autonome de la politique des prix, possibilité d'engager du personnel en son nom propre, absence de contrôle par un supérieur ... En outre, au regard du droit belge, l'activité exercée doit avoir un caractère professionnel. La notion d’indépendant(e) concerne aussi la personne qui a un mandat (même gratuit) dans une société et l’aidant(e) d’un(e) travailleur(euse) indépendant(e). L’intérêt du développement des PME

Ecolo souligne l’importance du rôle exercé

par les petites et moyennes activités économiques : plus souples et plus adaptables, elles représentent environ 40 % des travailleurs et

Programme Ecolo 2009 - Livre IV « Pour une société qui se développe » – Chapitre 4 « Indépendants et PME » - p 57/77

sont fréquemment à la pointe de l’innovation. A ce titre, elles constituent un des moteurs principaux de la régénération du tissu économique, permettant la création d’emplois localisés et la concrétisation d’un projet de développement régional. Dans cet esprit, il faut noter que les services et les produits qu’elles mettent sur le marché comportent le plus souvent une très forte valeur ajoutée au travail.

De plus, pour Ecolo, l’état économique, social

et environnemental des Régions wallonne et bruxelloise souligne l’urgence de stimuler de nouvelles initiatives, l’exploration de nouvelles voies et l’émergence de nouvelles activités.

Une PME, ce n’est pas seulement une idée et

de l’argent, des questions de croissance ou des soucis liés aux difficultés de la gestion quotidienne. Le soutien d’Ecolo pour les PME se justifie aussi parce qu’une PME, c’est avant tout une question d’êtres humains ainsi qu’un ancrage géographique, culturel et social. Dans ce sens, elles contribuent également au maintien de la mixité urbaine et de la diversité des activités en milieu rural. Les PME sont relativement protégées de la course effrénée vers le « court-termisme », si destructrice d’emplois localisés chez nous.

Nous connaissons le dynamisme,

l’enthousiasme et l’optimisme des entrepreneurs ou travailleurs(euses) wallon(ne)s, flamand(e)s et bruxellois(es), lorsqu’ils peuvent s’exprimer et nous voulons libérer cette expression. C’est un pacte de développement qu’Ecolo propose aux PME. Cela suppose notamment une fonction publique qui vienne vraiment en support des entreprises, dans un cadre clair et cohérent et qui évite la dilution des efforts.

Certaines PME sont bien sûr cotées en

bourse, et parmi elles, certaines peuvent être gérées par des actionnaires majoritaires étrangers et/ou spéculateurs. La majorité des PME belges restent cependant gérées par des entrepreneurs et investisseurs qui connaissent leur environnement social, économique et culturel et qui s’inscrivent ou qui pourraient s’inscrire dès lors dans une dynamique de projet de développement avec l’ensemble des forces vives de leur région. C’est ce dont notre pays a besoin.

Ceci n’est évidemment pas incompatible

avec la nécessité qu’il y a de soutenir, le cas échéant, le développement et la croissance de ces PME vers des tailles de moyennes et grandes entreprises engageant un plus grand

nombre de travailleurs, mais le foisonnement de PME et TPE77 continuera de constituer le vivier de talents, d’innovations et de modernisations de l’économie d’ aujourd’hui et de demain.

Les indépendants et les PME en Belgique

L’année 2007 a été à nouveau caractérisée par une augmentation du nombre total de travailleurs indépendants, qui a atteint 904 954 personnes (+ 2,76 % par rapport à 2006). Les professions libérales continuent, quant à elles, de connaître une expansion (de 192 329 à 202 675 ou + 5,38 %). L’industrie et les services ont respectivement connu une augmentation de + 4,49 % (de 180 310 à 188 398) et de + 3,36 % (de 77 387 à 79 986). Tout comme en 2006, le secteur primaire est quant à lui en diminution (- 1,10 %) : dans l’agriculture, il y a une régression de -1,01 % (de 86 575 à 85 697) tandis que la pêche a connu une forte diminution de -7,24 % (de 1 230 à 1 141). Le commerce enregistre de son côté un petit gain de + 1,11 % (de 339 292 à 343 045). Le nombre de conjoints aidants ne bénéficiant que de l’ancien « mini-statut » poursuit son érosion. Au 31 décembre 2007, il y avait 17 556 assujettis au mini-statut78 (dont 1 058 hommes) contre 19 681 en 2006. Les conjoints aidants bénéficiant d’un statut social complet sont au nombre de 28 820 au 31 décembre 2007 (dont 3 110 hommes) contre 29 310 en 200679.

77 Très petites entreprises. 78 Depuis le 1er juillet 2005, le conjoint aidant est obligé d’adhérer au maxi-statut. Il bénéficie ainsi d’une protection plus complète que dans le mini-statut : pension, prestations familiales, soins de santé, incapacité de travail, invalidité et maternité (pas d’assurance en cas de faillite). Le conjoint aidant qui est né avant le 1er janvier 1956 peut opter pour le mini-statut, mais de cette façon, il n’est assuré que contre l’incapacité de travail, l’invalidité et pour la maternité. 79 Rapport annuel 2007, INASTI, Bruxelles, juin 2008.

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Situation au 31 décembre 2007

Qualité Sexe 2003 2004 2005 2006 2007

Indépendant(e) Homme 529.638 534.638 542.099 551.537 567.540

Femme 224.188 226.706 232.437 239.751 249.951

Total 753.826 761.344 774.536 791.288 817.491

Aidant(e) Homme 36.351 36.446 35.360 35.171 35.214

Femme 66.478 61.927 57.372 54.163 52.249

Total 102.829 98.373 92.732 89.334 87.463

Total 856.655 859.717 867.268 880.622 904.954

La typologie des PME est fixée au niveau européen depuis 2005 comme suit : une entreprise moyenne a un nombre de travailleurs inférieur à 250, un chiffre d’affaire inférieur ou égal à 50 millions € et un total bilantaire inférieur ou égal à 43 millions € ; alors qu’une petite entreprise a un nombre de travailleurs inférieur à 50, un chiffre d’affaires inférieur ou égal à 10 millions € et un total bilantaire inférieur ou égal à 10 millions €. En 2006, le secteur privé comptait 216 200 employeurs (+ 0,49 % par rapport à 2005)80 et 2 565 601 postes de travail (+ 1,5 %). En termes d’emploi, le secteur de l’industrie manufacturière est le plus important (mais perd cependant en importance au fil des années) suivi par le commerce, les services aux entreprises et enfin la santé et l’action sociale. Des inégalités de droits et de protection sociale

La répartition des revenus des

indépendant(e)s démontre que 40 % des revenus déclarés sont détenus par 80 % d’entre eux; autrement dit, 4/5 des assujettis ne possèdent que 2/5 des revenus ! Un tiers des indépendants vivraient même sous le seuil de pauvreté ! Il est urgent de corriger ces inégalités, pour plus de justice sociale mais également pour rendre plus attractif ce type de carrière.

Le niveau des revenus d’un(e) indépendant(e)

ne peut évidemment être fixé sur la base de barèmes comme pour les salariés. Ces revenus dépendent du choix du type d’activités, du dynamisme de l’entreprise, du temps de travail souvent énorme des indépendants, de la manière dont les risques ont été pris et parfois d’une part de chance ou de malchance. Il est donc impossible de viser une égalité de revenus entre les indépendant(e)s.

80 Panorama de l’économie belge, 2007, SPF Economie, PME, Classes moyennes et Energie, Bruxelles, 2008.

Il est par contre nécessaire de soutenir la prise de risques, de faciliter et, si nécessaire, d’accompagner le développement des activités. Il convient également de veiller à ce que la sécurité sociale des indépendant(e)s permette des pensions et des revenus de remplacement équivalents à ceux des salarié(e)s et que les indépendant(e)s participent à son financement de manière solidaire et équitable.

Le statut social des indépendants est donc à

améliorer. Si l’on veut que davantage de travailleurs (et notamment les femmes81) se lancent dans une carrière d’indépendant, il faut renforcer la protection sociale qui est offerte et développer les incitants. La récente décision du Gouvernement de protéger l’immeuble familial des indépendants en cas de faillite est, en ce sens, à saluer. Nos propositions en matière de statut visent dès lors en particulier à renforcer les couvertures sociales, actuellement très variables entre indépendant(e)s, et souvent insuffisantes par rapport aux risques encourus.

Une culture entrepreneuriale à renforcer

Les travailleurs(euses) ayant une activité

indépendante à titre principal représentent moins de 20 % du nombre total de travailleurs(euses). L’Eurobaromètre 200782 nous montre que 30 % des Belges seulement auraient opté pour une activité indépendante s’ils avaient eu le choix. C’est nettement en-dessous de la moyenne européenne et, plus inquiétant, la tendance est à la diminution de l’esprit d’entreprise puisque entre 2000 et 2007, ce taux est passé de 36 % à 30 %... Les risques les plus redoutés par les Belges sont la possibilité de faire faillite (40 %, 51 % pour UE 25) et l’incertitude du revenu (38 % aux niveaux belge et européen). Il faut du reste noter que la crainte de faire faillite est en recul pour les Belges (48 % en 81 Environ 30 % d’indépendantes seulement 82 http://ec.europa.eu/enterprise/enterprise_policy/survey/eurobarometer2007/eb2007summ_fr.pdf.

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2004), alors qu’elle progresse au niveau européen. Le manque de soutien financier reste le principal frein à la création, mais son importance diminue par rapport aux enquêtes précédentes (68 % en 2007 contre 74 % en 2004 et 81 % en 2000) ; la situation belge apparaît ici plus favorable que la moyenne européenne en la matière (75 % pour l’UE 25 en 2007). Les autres freins les plus souvent mentionnés sont les complexités administratives, dont l’importance est également en recul en Belgique (68 % en 2007 contre 71 % en 2004 et 77 % en 2000) et la crainte de l’échec (52 %).

Des projets à faciliter

Enfin, soutenir les indépendant(e)s et les PME

n’a de sens que si on soutient l’entrepreneuriat et si on favorise le développement de créneaux d’activité innovants, diversifiés et porteurs d’avenir. Ce sont notamment tous les secteurs liés aux nouvelles technologies vertes83 dont les économies d’énergie, l’efficacité énergétique, les produits agro-alimentaires locaux, leur transformation et leur distribution de qualité.

Des aides particulières doivent être réservées

au lancement d’activité, de même qu’une attention générale à l’allègement des contraintes administratives inutiles. Des secteurs à aider

Ecolo estime que des secteurs d’activités

sont à soutenir plus particulièrement. Ainsi, par exemple, la construction, la réutilisation et le réemploi, et l’horeca constituent trois secteurs à haute intensité de main-d’œuvre. Les travailleurs du secteur de la construction ont en outre un rôle important à jouer dans la lutte contre le réchauffement climatique vu la part du logement dans les émissions de CO2. Et tant dans la construction que dans l’horeca, et dans la réutilisation et le réemploi, une part importante de main-d’œuvre est peu qualifiée et demande d’importants efforts pour être valablement insérée sur le marché du travail dans le respect plein et entier du droit social.

Le commerce de proximité et l’artisanat local

est également à valoriser vu les enjeux qu’il présente pour la vie en société (risque d’uniformisation à travers la grande distribution, maintien de diversité des produits, accès aux filières de proximité dans un contexte de mondialisation, animation des villes et villages, etc.).

83

Lire à ce sujet nos propositions du Livre IV, Chapitre 3 « Economie verte ».

Indépendants et PME demain : Propositions d’Ecolo

PRIORITE N°1 : SOUTENIR L’INITIATIVE

Notre économie ne peut fonctionner et des

emplois ne peuvent être créés sans des citoyens et des citoyennes qui osent se lancer, prendre des risques, qui s’investissent personnellement dans le développement d’activités économiques, commerciales ou sociales, qu’elles relèvent du secteur marchand ou du secteur non-marchand.

Ces initiatives doivent être encadrées, pour

assurer la pérennité des activités productives et des emplois, la sécurité du consommateur et la protection de l’environnement, et pour éviter les comportements économiques douteux. Mais cet encadrement doit se concevoir de façon à ne pas être un frein gratuit au projet. Des efforts doivent être réalisés pour, tout en assurant le contrôle et l’orientation, faciliter la vie de ceux qui prennent des initiatives, en évitant les démarches administratives sans valeur ajoutée ou redondantes, en simplifiant les règles inutilement complexes.

De même, ces initiatives doivent être

soutenues par des mesures et des dispositifs qui pourront aider à leur lancement ou à leur développement. C’est le rôle des pouvoirs publics d’être aussi un catalyseur de l’initiative.

Proposition : Adopter un pacte intergouvernemental de soutien à l’initiative

Les démarches administratives nécessaires quand on se lance dans un projet entrepreneurial relèvent de divers niveaux de pouvoir, de la commune à l’Etat fédéral, en passant par la Région voire la province. L’ensemble de ces entités administratives ont un rôle à jouer pour faciliter la vie des entrepreneurs. Ecolo propose dès lors de les mettre autour de la table en vue de conclure un pacte intergouvernemental de soutien à l’initiative, car si des progrès ont été faits via la création des guichets d’entreprise et le numéro unique des entreprises par exemple, il reste qu’une évaluation des impacts des dispositifs législatifs et réglementaires élaborés par les différents niveaux de pouvoir doit intervenir régulièrement.

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Ce pacte comprendrait notamment les recommandations suivantes :

simplification radicale des structures d’aide économique, dans une optique de lisibilité et d’accessibilité et avec une attention particulière aux projets de plus petite taille ;

accélération du délai de traitement des dossiers et de versements des aides ;

objectivation des critères d’octroi de l’aide économique ;

organisation de la compatibilité et de la connectivité des bases de données utilisées par les différents niveaux de pouvoir (de façon à éviter les démarches administratives redondantes) ;

concertation systématique, notamment dans les cas où des décisions administratives peuvent avoir des conséquences sur l’activité économique (chantiers de travaux publics au plan local, par exemple) ;

allègement des contraintes pour ceux (notamment les demandeurs d’emploi) qui veulent se lancer dans une activité d’indépendant ;

information systématique et coordonnée des indépendants sur leurs droits et devoirs ;

évaluation et adaptation des outils mis en place récemment et création de nouveaux outils plus adéquats si nécessaire pour la gestion du personnel dans l’horeca et la construction (exemples : déclaration du personnel engagé rapidement suite à une activité croissante non régulière, horaires de travail irréguliers …).

Proposition : Développer l’aide au démarrage

Beaucoup de projets, du moins en phase de démarrage, ne nécessitent pas de moyens financiers importants. Or ces moyens sont néanmoins difficiles à trouver parce que les banques dédaignent certaines prises de risque. Les pouvoirs publics ont mis en place des outils complémentaires de prêts au niveau de l’Etat fédéral et des Régions. Parmi ces outils publics et privés, existent aussi des organismes spécialisés dans le micro-crédit mais ceux-ci sont encore trop peu utilisés. Parmi les organismes susceptibles de stimuler le micro-crédit figurent notamment les sociétés de cautionnement mutuel, qui ont

pour mission de garantir partiellement les crédits bancaires sollicités par leurs membres, essentiellement des indépendants et des très petites entreprises84. Si l’activité de la garantie indirecte est ainsi en croissance dans la foulée du développement de ces outils, elle ne répond pas encore entièrement aux attentes légitimes en vue de favoriser l’accès des TPE aux micro-crédits. Les banques restent intéressées par ce type de garanties portant sur des crédits de petits montants, en particulier pour la création et le démarrage de nouvelles entreprises, mais à condition d’en réduire fortement le coût de traitement administratif et le risque opérationnel. Ecolo veut encourager mieux et davantage ces organismes qui doivent être soutenus par les pouvoirs publics, notamment au vu des réalités socioéconomiques de nombreux bassins (les zones urbaines importantes de Bruxelles, Liège, Charleroi mais aussi Mons, La Louvière … ainsi que certaines zones de précarisation bien identifiées). De plus, Ecolo propose de permettre le maintien d’une allocation de chômage (ou autre revenu de remplacement) durant la première année de fonctionnement pour les nouveaux indépendants, de manière à ce qu’ils disposent d’un revenu minimum de 13 704 euros net annuellement, complémentairement au recours à une couveuse d’entreprise ou à un autre organisme d’accompagnement à la gestion. Cela rendrait possible le respect des obligations si souvent « oubliées » ou considérées comme trop lourdes et l’évaluation de la soutenabilité du projet.

84 Par ailleurs, la Société des cautions mutuelles de Wallonie, en abrégé SoCaMut, a été créée en 2003, comme filiale de la Sowalfin et financée à la fois par des fonds européens et des fonds régionaux, afin de favoriser l’accès aux crédits d’investissements et de fonds de roulement pour des micro-entreprises (entreprises occupant mois de 10 personnes et dont le chiffre d’affaires annuel ou le total du bilan annuel n’excède pas 2 millions €) établies dans l’une des zones assistées par les fonds structurels et qui ne disposent pas des garanties souhaitées par les dispensateurs de crédits. La SoCaMut peut ainsi contre-garantir les engagements souscrits par les SCM lors de la réalisation de projets. De même, en vue de faciliter l’accès au micro-crédit via d’autres organismes que les banques, une mission déléguée a été confiée à la Sowalfin en 2006 pour la mise en œuvre d’un partenariat avec des opérateurs de crédit non soumis à la CBFA (Commission Bancaire, Financière et des Assurances), permettant à ceux-ci d’obtenir automatiquement, moyennant critères, une couverture de 50 % de l’ensemble des micro-crédits qu’elle accorde dans le cadre d’un programme spécifique d’activité.

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Proposition : Revoir en profondeur le système des intérêts notionnels

Contrairement à l’objectif initial du Gouvernement, ce ne sont pour l’essentiel pas les PME qui renforcent leurs capitaux propres. C’est à nouveau la BNB qui l’affirme : « Ce sont surtout les grandes entreprises qui ont affiché une rupture de tendance à partir de 2005. Leurs capitaux propres corrigés ont en effet augmenté de quelque 30 % pendant deux années consécutives alors qu’ils n’avaient jamais progressé de plus de 14 % auparavant. Bien que les PME bénéficient d’une déduction majorée de 0,5 point de pourcentage, ce sont surtout les entreprises internationales et celles disposant de moyens financiers importants qui restructurent leur capital. La déduction des intérêts notionnels est en effet la plus intéressante pour les entreprises les plus capitalisées ». Tel qu'il est actuellement en vigueur, le dispositif participe au dumping fiscal international. Dans les faits, l’objectif du Gouvernement de stimuler le renforcement des fonds propres des PME afin qu'elles puissent investir dans leur développement et dès lors dans l'emploi est tout sauf réalisé. Or, ce sont les PME qui sont les principales créatrices d’emploi et de valeur ajoutée en Belgique. Comme le souligne une étude des professeurs Sleuwaegen et De Backer de la Vlerick Management School, ce sont les entreprises locales orientées vers le marché belge (lisez les PME) qui ont créé de l’emploi et de la valeur ajoutée au cours des dix dernières années. Sur la même période de dix ans, les entreprises multinationales installées en Belgique et les entreprises belges tournées vers l’exportation ont respectivement réduit leurs effectifs de près de 10 % et de 6,7 %. Face à ce constat, plutôt que de se relancer dans un nouveau tour mondial de promotion du dispositif tel qu'il existe actuellement et n’en faire profiter quasi exclusivement que les entreprises intensives en capital toujours disposées à profiter des moindres effets d'aubaines, Ecolo propose d'imposer au dispositif les balises nécessaires au respect d'objectifs permettant à la fois de contrer les abus, de lier les avantages à la création d’emploi ou au développement de l'activité, de soutenir davantage les secteurs innovants, d’introduire une sélectivité pour ceux qui en

ont vraiment besoin (principalement les PME) et, ce faisant, de supprimer cet avantage pour les entreprises qui ne font que thésauriser. L'ensemble de ces modifications proposées par les Verts permettra de retrouver d'importantes marges budgétaires pour les politiques de solidarité et de développement durable.

Proposition : Lancer des chèques « accompagnement en gestion »

Les dispositifs de « chèques formation » et de « chèques formation à la création d’entreprises » fonctionnent relativement bien et ont une réelle utilité économique. Cependant, un certain nombre d’indépendants ou de sociétés ont des difficultés, après la création, pour gérer leurs activités, en particulier au niveau financier. Ces lacunes en matière de gestion constituent une cause importante de difficultés financières, de faillites d’entreprises ou d’arrêts d’activités. Il s’agirait dès lors de mettre en place un dispositif de chèques à l’accompagnement en gestion, sur le modèle des chèques formation. Une entreprise pourrait en bénéficier durant les 5 premières années d’activité, pour payer tout ou partie de ses honoraires comptables, de sorte à être bien encadrée en matière financière. Elle pourrait ainsi tenir une comptabilité aisée, permettant par ailleurs une transparence accrue de ses comptes, une plus grande traçabilité, un meilleur suivi de ses créances et de ses dettes (dont ONSS, contributions et TVA) et dès lors une diminution du nombre de faillites.

Proposition : Favoriser la coopération entre petites entreprises

Etre spécialisé en plomberie, en horeca ou en informatique ne signifie pas toujours être un administratif né, capable de gérer ses affaires sur le plan administrativo-financier ou même d’être simplement disponible pour bien le faire. Différents systèmes peuvent compenser ce déficit d’expérience, de connaissance ou de temps, tels que les SAACE (structures d’accompagnement à l’autocréation d’emploi), les groupements d’employeurs ou l’organisation des activités en économie circulaire.

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En Wallonie, une rationalisation du paysage de la création d’activités économiques vient d’intervenir en regroupant autour des SAACE les coopératives d’activités et les couveuses d’entreprises au sein d’une seule législation. Une SAACE permet à un porteur de projet de se mettre pendant un certain laps de temps en réelle situation et ainsi de tester la viabilité de son projet. Les groupements d’employeurs85 procèdent, quant à eux, d’une logique de mutualisation, dès lors qu’il s’agit d’associations réunissant des entrepreneur(e)s, dont le but est de pouvoir engager ensemble un ou plusieurs employés et de les mettre à la disposition des uns ou des autres, en fonction de leurs besoins. Enfin, le concept d’économie circulaire (gestion coordonnée des flux de matières entrants et sortants) pourrait également intégrer la grille d’analyse des indépendants et des PME. Pour ne citer qu’un exemple marquant d’une coopération intelligente entre entreprises, le zoning de Kaiserbaracke (Amel) abrite 4 entreprises en interaction : un centre de triage de bois, une scierie, une entreprise de raboterie et de production de copeaux et de pellets, et une entreprise qui valorise les déchets biomasse des trois autres PME via une unité de cogénération et leur fournit de l’énergie ! Au niveau des sous-produits des commerces (huiles usagées, frigolite, cartons, etc.), de la mutualisation des fournisseurs, ou encore du réseau de chauffage, des réflexions entre indépendants et PME peuvent déboucher sur des synergies substantielles, et favoriser l’émergence de nouvelles activités.

Proposition : Faciliter la transmission des entreprises

En raison de la structure vieillissante de la population, les entreprises à transmettre sont nombreuses, même si le chiffre exact est difficile à déterminer. Il apparaît qu’un nombre significatif d’entreprises sont liquidées faute de repreneurs. En outre, le taux de faillite des sociétés reprises est sensiblement inférieur à celui des sociétés qui se créent. Il s’agit donc d’un enjeu stratégique de première importance pour notre économie.

85 Voir à ce sujet nos propositions du Livre II, Chapitre 2 « Emploi ».

De différentes études réalisées notamment avec les principaux acteurs du secteur privé actifs en cession/reprise d’entreprises, il ressort le triple constat suivant :

un manque de sensibilisation et d’information sur la cession/reprise, que ce soit du côté du cédant ou du côté du repreneur potentiel d’une entreprise ;

des difficultés rencontrées par un nombre significatif de candidats à la cession d’une PME dans le cadre de leur recherche d’acquéreurs intéressés et correspondant à leurs attentes, ceci étant particulièrement le cas pour des cessions allant jusque 5 000 000 € ;

des difficultés à évaluer la valeur des entreprises par l’entrepreneur en fin d’activité et par le repreneur potentiel par rapport à la modernisation de l’outil éventuellement nécessaire.

Par ailleurs, le financement demeure également un des principaux problèmes rencontrés lors de la transmission d’une entreprise86, aussi bien pour les entrepreneurs eux-mêmes que pour les spécialistes du sujet. Dans plus de trois-quarts des cas, la transmission engendre, d’une manière ou d’une autre, un besoin d’argent frais. Des problèmes de financement surviennent lors d’une transmission sur trois. Le manque de fonds propres et de garanties est considéré comme le principal obstacle lors de la recherche de financement. Enfin, Ecolo propose des mesures de soutien en faveur de la reconversion d'entreprises qui souhaitent adopter un comportement éthique et repenser leur activité en termes de développement durable. Par exemple, mise aux normes de l'outil de production, adoption de mesures environnementales, commerce équitable, conditions de travail, etc. Une série de mesures ont été prises durant ces dernières années pour répondre à ce défi de la transmission d’entreprises87. Il convient de poursuivre et d’amplifier l’effort en la matière.

86 Selon une étude réalisée et publiée fin 2006 par le Centre de connaissances du financement des PME (CeFIP). 87 Nous pensons par exemple, en Wallonie, au lancement de la Société Wallonne d’acquisitions et de cessions d’entreprises (SoWAcCEs) en 2006.

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Proposition : Réduire la TVA de 21 à 6 % dans l’éco-construction et l’éco-rénovation

Le secteur de la construction est un secteur-clé en termes de développement économique régional et, potentiellement, en termes de lutte contre le réchauffement climatique. Afin d’orienter le secteur dans la voie du développement durable et de favoriser l’éco- construction et l’éco-rénovation (notamment à travers l’utilisation des matériaux ou l’emploi des techniques les plus efficaces en termes d’isolation et d’économie énergie), Ecolo propose de réduire de 21 à 6 % le taux de TVA pour la construction et la rénovation des habitations qui appliquent les normes les plus pointues en matière d’isolation, d’économie d’énergie et d’utilisation d’énergies renouvelables (maisons basse-énergie, maisons passives …)88.

Proposition : Réduction des cotisations sociales pour l’engagement des deux premiers travailleurs

Si les PME constituent une source potentielle d’emplois importante, certain(e)s petit(e)s indépendant(e)s et petites entreprises ne peuvent engager en raison de charges patronales excessives. Ils ont effectivement un besoin évident de main-d’œuvre, ont l’intention ferme d’embaucher de nouveaux salariés mais refusent de passer à l’acte en raison du risque que cela représente. Ecolo propose de faciliter les deux premiers engagements via l’application de réductions ciblées des cotisations sociales pendant 3 ans.

Proposition : Aider les indépendants en cas de travaux de voirie de longue durée

Outre la possibilité d’ester en justice (long et aléatoire) et l’exonération possible du paiement des cotisations sociales (mais impact sur la pension), les indépendants qui sont confrontés à des chantiers en voirie de longue durée et qui encourent de ce fait des pertes

88 Cfr la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 2006/112/CE88 en ce qui concerne les taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée (en particulier le point 10 de l’annexe III), présentée par la Commission en date du 7 juillet 2008 (COM(2008)428 final).

commerciales peuvent recourir depuis 2007 à un fonds d'indemnisation, qui est alimenté par une cotisation de 0,125 % du montant des travaux, à charge des maîtres d'ouvrage. L'indemnisation est réservée aux petites entreprises (moins de dix salariés, moins de 2 millions € de bilan), les nuisances doivent être évidentes (par exemple, l'indisponibilité des places de parking dans un rayon de 100 mètres ou la fermeture, dans un ou deux sens, d'une voie d'accès à l'établissement), et il faut avoir fermé complètement, pendant au moins 14 jours (samedis, dimanches et fériés compris). Le dédommagement est alors de 44,2 € par jour et par indépendant actif dans l'entreprise, y compris les conjoints aidants. Il était prévu que 5 000 commerçants demandent un dédommagement chaque année mais à ce stade, une première évaluation montre qu’on en est fort loin (procédure trop compliquée, obligation de fermeture totale non raisonnable ...). Pour aller plus loin, Ecolo propose :

de taxer comme un revenu de remplacement le dédommagement de 44,2 € par jour ;

d’élargir l’accès au chômage économique pour le personnel des magasins qui voient leur clientèle fortement diminuer ou qui doivent fermer pendant une période donnée suite à des travaux de voirie. La législation actuelle stipule qu’un employeur peut introduire un régime de chômage temporaire pour des raisons économiques s’il lui est temporairement impossible d’occuper les ouvriers à défaut de travail. Nous proposons de l’élargir aux employés des commerces dans ces circonstances de baisse de clientèle suite à des travaux de voirie prolongés. Ceci permettrait au travailleur de recevoir les allocations de chômage dès le 1er jour de chômage ;

de faciliter la faculté d’emprunt pour ces commerçants via un taux réduit ou nul pendant la durée des travaux. Puisque les enquêtes auprès des commerçants montrent qu’ils pâtissent en moyenne pendant 8 mois des effets négatifs des travaux, et dès lors que ces mêmes travaux peuvent ensuite améliorer l’accès de leur établissement. Cette capacité d’emprunt leur permettrait d’assumer la période de transition et d’investir pour

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redémarrer en s’adaptant aux changements résultant des travaux89 ;

de désigner un coordinateur apte à programmer les travaux, ainsi que leur organisation et les concertations entre maîtres d’œuvre, commerçants, commune et habitants des quartiers concernés, afin de réduire autant que possible les nuisances de tels chantiers de voirie.

Proposition : Modifier la législation relative aux permis socioéconomiques

La libéralisation de l’implantation des centres commerciaux décidée par le Gouvernement violet en août 2004 a conduit à un grand nombre de difficultés : le nombre de demandes a doublé (alors que c’est loin d’être le cas du portefeuille de nos concitoyens), les communes se livrent une concurrence parfois féroce (certaines faisant miroiter la création de nouveaux emplois, alors que cela se fait le plus souvent au détriment du voisin et de la diversité commerciale), aucune vision de l’aménagement du territoire globale et durable n’est plus possible (dès lors que le niveau de décision est communal), les critères de mobilité, d’efficacité énergétique ou de préservation des espaces verts sont depuis lors marginalisés. Ecolo veut corriger le tir et a déposé une proposition de loi visant à :

veiller à ce que tout nouveau projet soit effectivement analysé sous l’angle de sa durabilité et de la création nette d’emplois (plutôt que celui du déplacement d’emplois) ;

situer la décision non plus au seul niveau communal uniquement, mais sous l’aval de la Région qui devra examiner les demandes sur base de projets de développement économique, de mobilité et d’impact environnemental, à une échelle plus large ;

associer les communes limitrophes et leur permettre d’avoir aussi leur mot à dire dans la décision finale.

89 Il faut relever, à cet égard, que la Région bruxelloise a récemment adopté en ce sens un dispositif d’aide complémentaire au crédit de caisse.

Proposition : Soutenir certains acteurs

L’horeca et la construction sont deux secteurs d’activité qui se caractérisent par des périodes creuses ou des périodes d’arrêt de travail (intempérie pour la construction) et des périodes d’activité prévisibles ou imprévisibles dans leur intensité. Des dispositions ont donc été prises pour permettre des engagements rapides (signalement via gsm à Dimona) de main-d’œuvre supplémentaire momentanée et des taux de cotisations sociales réduits associés à des mécanismes de récupération des heures. Malgré cela, le travail en noir y est encore fortement utilisé, le temps partiel est souvent la règle dans l’horeca et ceci est parfois demandé par les travailleurs eux-mêmes alors que cela participe à la précarité de leur sécurité sociale. Certains secteurs font face à une concurrence intra-secteurs déloyale avec le recours à des faux indépendants, à de la main-d’œuvre en noir ou ne respectant pas les conventions collectives et la législation du travail. Pour lutter contre ces abus, il convient de renforcer les moyens humains pour le contrôle fiscal et social. Il s’agit également d’adapter les outils mis en place et envisager la création de nouveaux outils plus adéquats si nécessaire pour la gestion du personnel. Concernant l’horeca, les pistes qui méritent d’être envisagées consistent :

à évaluer le personnel nécessaire pour que puisse fonctionner un établissement avec autant de tables et situé dans telle région, appliquer un forfait de cotisations sociales et d’impôts sur base de cette évaluation a priori et ré-évaluable chaque année sur base des réalités de l’année écoulée, par exemple. Ce système est appliqué en Espagne ;

à appliquer un taux de cotisation sociale plus faible pour leur personnel (dont la plupart non qualifié, horaires incomplets et salaires bas) mais en contrepartie paiement de ces travailleurs en tant que travailleurs temps plein, même si certains jours le travail sera à temps partiel. Ce qui leur garantirait une couverture complète en sécurité sociale et des droits complets à la pension. Mais ce qui nécessite de baliser

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pour éviter les exploitations en heures supplémentaires évidemment.

Bref, Ecolo propose d’oser de nouveaux modèles d’organisation du travail dans ces secteurs hors norme de manière à préserver les droits des travailleurs, à y favoriser l’emploi mais de qualité et de manière à préserver les employeurs des complications administratives ou d’obligations trop chères, trop lourdes, trop inadaptées.

Proposition : Réduire la période des pré-soldes

Le système belge d’un mois de soldes à 2 moments de l’année fixés dans la loi et précédés de 6 semaines d’une période de pré-soldes durant lesquelles les commerçants ne peuvent diminuer leurs prix est menacé par la libéralisation voulue des pratiques du commerce et par la non-uniformisation européenne des pratiques. Certains voudraient supprimer les pré-soldes ou permettre les soldes toute l’année. Ecolo propose de maintenir le système actuel, mais en limitant éventuellement à 4 semaines les pré-soldes, car c’est la seule manière de préserver le petit commerce face à la grande distribution ou aux chaines agressives des prix bradés, En effet, soit on considère que les soldes sont utiles car elles permettent de vendre même à perte des marchandises qui n’ont pu être vendues pendant la saison et qui seront invendables ensuite, soit on considère que les soldes sont une manière de se faire de la concurrence déloyale permanente avec les conséquences que l’on connaît sur le statut et le revenu de ceux qui fabriquent les produits ainsi bradés, ainsi que la qualité et la diversité de ces produits.

Proposition : Respecter les délais de paiement aux fournisseurs

Le montant des factures payés en retard par l’Etat fédéral aux indépendants et aux entreprises dépassait 350 millions € fin 2007 ! Ces retards de paiement entraînent d’importantes difficultés de trésorerie pour de nombreux fournisseurs. En outre, les factures impayées conduisent naturellement à une augmentation des recours devant les tribunaux

et pèsent lourd en intérêts de retard (1,5 million € en 2007 et 1,7 millions € en 2006). Il s’agit donc de respecter scrupuleusement les délais de paiement aux fournisseurs. Un monitoring doit être mis en œuvre en ce sens.

PRIORITE N°2 : AMELIORER LE STATUT SOCIAL DES

INDEPENDANTS ET INDEPENDANTES Ecolo souhaite poursuivre jusqu’à son terme

le programme d’ajustement qui a débuté sous le Gouvernement arc-en-ciel et qui se poursuit depuis avec des améliorations significatives du statut des indépendants) pour aboutir in fine à une qualité équivalente de la couverture sociale des indépendant(e)s et des salarié(e)s.

Les propositions d’Ecolo pour financer

l’amélioration de la couverture sociale des indépendants (pensions, incapacité, invalidité, soins de santé) sont de trois ordres :

intégrer la couverture totale des soins de santé dans le régime de sécurité sociale via l'intégration des petits risques dans le système général des soins de santé afin que tous les indépendants cotisent et bénéficient dès lors d’une couverture sociale de qualité en cas de maladie ; Ecolo a donc soutenu le vote de cette disposition en janvier 2007, entrée en vigueur dès le 1er juillet 2007 pour les starters et les bénéficiaires de la GRAPA (sans augmentation de cotisations pour ces deux catégories) et pour tous les indépendant(e)s en janvier 2008 ; une évaluation de la répartition des cotisations entre les indépendants en fonction de leurs revenus, et du coût de la mesure via les cotisations sociales obligatoires plutôt que via les cotisations volontaires aux mutuelles devra être réalisée au printemps ;

pour assurer des pensions et des revenus de remplacements minimaux équivalents aux revenus minimaux des salariés ainsi que des allocations familiales équivalentes, une augmentation du financement alternatif de la sécurité sociale est nécessaire90 ;

enfin, le relevé des plafonds actuels fixant les taux de cotisations doit davantage assurer l’équité entre indépendant(e)s et entre salarié(e)s et indépendant(e)s dans la participation au financement de la sécurité sociale.

90 Voir à ce sujet nos propositions du Livre II, Chapitre 1 « Protection et action sociales ».

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En plus de garantir les mêmes droits aux indépendant(e)s qu’aux salarié(e)s, il s’agit également pour Ecolo de rencontrer des situations particulières. Ainsi, vis-à-vis du congé de maternité ou de périodes d’incapacité et/ou d’invalidité, des formules nouvelles sont à imaginer pour répondre à la situation spécifique des indépendant(e)s qui ne bénéficient pas de revenus lorsqu’ils ne travaillent pas mais qui risquent en outre de voir leur activité réduite à rien, en cas d’incapacité de trouver des formules souples de remplacement ou de soutien.

Proposition : Revaloriser les pensions les plus basses

Ecolo souhaite que la revalorisation des pensions les plus basses (bien souvent les plus anciennes) soit réalisée en instaurant un droit minimum par année de carrière. Ce minimum aurait pour résultat de permettre aux indépendant(e)s n’atteignant pas deux tiers d’une carrière complète, donc n’ayant pas droit à la pension minimum, d’obtenir une pension revalorisée. A terme, la pension minimale pour indépendant(e)s doit rejoindre la pension minimale pour travailleurs salariés.

Proposition : Améliorer l’indemnité en cas d’invalidité

Comme pour tout autre citoyen ou citoyenne, l’indépendant(e) doit être assuré(e) d’une couverture décente en soins de santé. Mais sa couverture doit être plus large : tout problème de santé est suivi, chez les indépendant(e)s, d’une diminution, voire d’un arrêt, de son activité. Outre le coût de sa maladie, il perd ses bénéfices mais également les recettes primaires liées à l’activité. Diverses mesures sont à prendre pour rencontrer cette situation :

assurer que le revenu d’invalidité d’un(e) indépendant(e) dépasse le plus rapidement possible le seuil de pauvreté, soit atteindre environ 900 € pour une personne isolée par exemple ;

soutenir et subventionner les mécanismes d’assurance mutuelle permettant à un(e) indépendant(e) en incapacité de travail d’engager un(e) remplaçant(e) ;

créer des pools de remplaçant(e)s (par secteur et par zone géographique) de manière à pouvoir faire face à des interruptions d’activité. Les systèmes mis en place par les agriculteurs ont montré l’efficacité de tels mécanismes solidaires ;

permettre la reprise partielle et graduelle d’un indépendant(e) en incapacité de travail, tout en maintenant ses indemnités d’incapacité91.

Proposition : Accorder le droit au chômage à certaines catégories d’indépendants

Face à une situation de faillite, le travailleur indépendant est confronté à des problèmes financiers et sociaux importants. Pour l'aider, le législateur a décidé d’instaurer une assurance sociale en cas de faillite. Cette assurance offre :

le maintien des droits sociaux en matière d'allocations familiales et en matière d'assurance maladie-invalidité (secteur soins de santé) pendant quatre trimestres maximum ;

le paiement d'une indemnité mensuelle pendant 12 mois maximum.

L'octroi de cette assurance sociale est soumis à l'introduction d'une demande ainsi qu'au respect de conditions strictes. L’indemnité mensuelle sans charge de famille est de 873,81 € et, avec charge de famille, cette indemnité s’élève à 1 158,09 €92. Mais ce mécanisme est très largement sous-utilisé. Par ailleurs, les indépendants dont les activités stagnent ou régressent, ceux qui souhaitent remettre leur affaire … hésitent à se désengager du statut d’indépendant vu l’absence de filet de protection sociale. Ecolo propose d’octroyer le droit au chômage pour l’ensemble des indépendants pendant 9 années (fractionnables en fonction des besoins) en le finançant via le transfert du budget « assurance sociale faillite ». Une cotisation volontaire peut être proposée aux indépendants qui souhaitent bénéficier d’un droit au chômage illimité par un système de

91 Un travailleur indépendant qui veut bénéficier d’indemnités d’incapacité de travail doit en effet actuellement cesser complètement son activité indépendante. 92 Chiffres au 1er octobre 2008.

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cotisations spécifiques versées dans un fonds spécial.

Proposition : Une allocation familiale identique pour le premier enfant

Parmi les différences « historiques » entre travailleurs salariés et travailleurs indépendants figure le montant des allocations familiales pour le premier enfant. L’allocation pour le premier enfant d’un(e) travailleur(euse) salarié(e) est de 83,40 €. Le Gouvernement fédéral a partiellement résorbé l’écart défavorable à l’indépendant(e), puisque l’allocation pour le premier enfant d’un(e) travailleur(euse) indépendant s’élève à présent à 74,07 €93. Ecolo propose que, durant la prochaine législature, l’allocation pour le premier enfant du travailleur indépendant soit alignée sur l’allocation familiale du travailleur salarié. Nous proposons par ailleurs que cette allocation du premier enfant soit progressivement portée au niveau de l'allocation octroyée au second enfant.

Proposition : Améliorer le statut social des indépendantes et favoriser l’entreprenariat au féminin

Une autre préoccupation de longue date d’Ecolo est de favoriser l’entrepreneuriat féminin. Nous sommes à l’origine de la concrétisation d’un véritable statut social pour les conjoint(e)s aidant(e)s entré en vigueur dans toutes ses dimensions depuis juillet 2005. Mais il reste bien du chemin à faire. Et ce, d’autant plus que nous savons que les activités indépendantes des femmes sont généralement plus petites, avec moins de capital et un accès plus difficile au crédit. Elles travaillent souvent seules. Bref des types d’activité qui n’autorisent pas à se reposer ni à fonder ou agrandir une famille. Pour mettre dans des conditions optimales les femmes qui souhaitent entreprendre, il convient d’envisager les spécificités des femmes (encore plus avec l’augmentation du nombre de familles monoparentales). L’accueil des enfants doit notamment être adapté. Les

93 Chiffres au 1er septembre 2008.

crèches doivent intégrer au moins les horaires des magasins. En outre, Ecolo propose que les indépendantes bénéficient d’un congé de maternité de dix semaines (au lieu de 8 actuellement, et de 15 semaines pour les salariées …) avec possibilité d’engager un(e) remplaçant(e) ou un(e) aidant(e) dans leur activité professionnelle. Un tel mécanisme permettrait de préserver la santé de l’indépendante et de son bébé, tout en maintenant un niveau d’activités suffisant. Certaines professions mériteraient en outre de bénéficier de la possibilité d’un écartement vu la toxicité ou la pénibilité de certains travaux. Ceci n’est de nouveau envisageable que si des remplaçants temporaires peuvent être engagés pour les aider dans leur activité professionnelle. Il est également important de permettre à une indépendante d’assurer un suivi minimum de son activité tout en bénéficiant de son indemnité de maternité : suivi comptable, suivi du traitement d’un dossier, vérification des stocks … de manière à ce que le personnel actif pour la période de maternité puisse être au minimum encadré. Il s’agit donc d’autoriser sous conditions l’exercice d’une activité indépendante partielle en cas d’incapacité partielle de travail. Enfin, le soutien à la mise en place de réseaux entre entrepreneures est aussi une priorité parce que ces femmes travaillent souvent seules, parce que les cercles existants sont souvent fermés de fait aux femmes. Il faut permettre aux entrepreneures de s’organiser entre elles de manière complémentaire et solidaire.

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PROGRAMME ECOLO ÉLECTIONS 2009

Livre IV - Pour une société qui se développe

Chapitre 5 « Recherche et Innovation »

La recherche et l’innovation aujourd’hui : Etat des lieux et analyse

La recherche, c’est fondamental !

A l’intersection entre progrès sociétaux et

croissance économique, cohésion sociale forte et respect de l’environnement, l’investissement dans l’innovation et la connaissance est une des clés majeures du développement durable de nos sociétés. Vecteur de progrès, source d’amélioration de la qualité de vie, moteur essentiel de l’activité économique à long terme, cet investissement est une réponse aux nombreux défis posés à l’Europe du XXIe siècle, qu’ils soient sociaux, économiques, énergétiques, sanitaires ou environnementaux.

Ce soutien suppose toutefois une vision qui

dépasse l’équation trop simpliste recherche = progrès. Pour ce faire, trois aspects sont à clarifier :

rendre explicite que toute recherche n’est pas bonne en soi, que certaines recherches constituent des impasses, que d’autres ne profiteront pas au plus grand nombre mais seulement à quelques-uns, que certaines recherches renforcent certains modèles socioéconomiques ;

revoir le rôle spécifique des acteurs dans la définition des programmes de recherche et de leur financement. Il est possible de donner plus de poids au citoyen dans la définition et l’évaluation des programmes de recherche ;

évaluer plus sérieusement les recherches financées sur fonds publics tant a priori qu’a posteriori en se basant sur des critères qui dépassent les seuls critères économiques ou d’excellence scientifique autoproclamée. Une réelle plus-value sociale et environnementale doit aussi être démontrée.

Ne commettons pas non plus l’erreur de ne considérer la recherche et l’innovation que dans leur implication socioéconomique. Ne cédons pas à la pression très forte de n’orienter la recherche que vers les applications industrielles ou à fort potentiel économique. Ainsi, la recherche est un vecteur de progrès de la société face aux nouveaux défis qu’elle rencontre dans les domaines de la justice sociale, de la pauvreté, de la santé, de l’environnement ; …. De l’archéologie à la psychologie, de l’histoire de l’art à la sociologie, de la philosophie à l’environnement, les champs de la recherche fondamentale sont diversifiés et méritent un soutien structurel sans faille.

Néanmoins, sur le plan économique aussi, la

recherche et l’innovation sont des outils formidables de redéploiement. Confrontés à des délocalisations, soumis à une concurrence découlant d’un coût de la main-d’œuvre moindre dans d’autres pays aux législations sociales moins développées, les Etats européens se doivent, aujourd’hui plus que jamais, d’investir dans les secteurs de la recherche et de l’innovation, notamment pour répondre à l’objectif de création d’emplois durables et peu délocalisables. L’Europe doit innover pour son propre compte.

Les secteurs de la recherche et de l’innovation

sont d’ailleurs porteurs d’emplois directs et plus encore indirects (développement de secteurs économiques innovants), qui permettent d’envisager la prise en charge de nouveaux défis écologiques et sociaux. En comptabilisant les emplois dans les entreprises, dans les organismes publics, dans l’enseignement supérieur, et dans le secteur privé sans but lucratif, la Politique scientifique fédérale estime que près de 80 000 personnes travaillaient dans le secteur de la recherche en 2006 en Belgique.

En particulier, tous les secteurs à triple

dividende (environnemental, social, économique) de la « nouvelle économie verte », à savoir les secteurs qui permettent la création de valeur ajoutée (donc d’emplois), des gains

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environnementaux (donc de santé), des économies d’énergie (donc de pouvoir d’achat), disposent d’un potentiel de développement évident.

Cette recherche de solutions et de débouchés

novateurs et originaux doit être entreprise au plus vite, afin de permettre à la Belgique de s’imposer également comme un leader européen dans les nouvelles technologies vertes. Et d’y trouver des ressources favorisant un développement durable et équitable, permettant d’assurer la prise en charge des défis posés par l’évolution démographique et l’augmentation moyenne de la durée de vie dans nos pays occidentaux.

Outre le défi démographique, les défis liés aux

conséquences du changement climatique et de la perte de biodiversité nécessitent le développement de la connaissance afin de prendre les mesures adéquates en termes d’adaptation et d’atténuation au changement climatique. L’enjeu n’est pas à minimiser car il concernera l’ensemble du fonctionnement économique et social de notre société et passera par des secteurs cruciaux tels que celui de l’agriculture, des transports ou de l’énergie.

Et en amont de la recherche appliquée, la

recherche en appui à la décision (d’une durée de 2 à 5 ans) représente un chaînon important afin de mener des politiques sur des bases scientifiquement fondées.

La recherche, un investissement public prioritaire, mais… à la traine !

Pour Ecolo, les pouvoirs publics doivent

investir plus et mieux dans la recherche, a fortiori la recherche fondamentale. Un financement public suffisant de la recherche fondamentale et des mécanismes modernes d’attribution permettra d'en assurer la pérennité et la qualité. Cela implique l’évaluation de projets de recherche par des jurys privilégiant la diversité (de discipline et de genre) et renonçant à terme à la cooptation.

La Communauté française doit, à la fois,

promouvoir la coopération entre universités et moduler la répartition de leur dotation. Il faut aussi promouvoir la coopération entre centres de recherche, universités et institutions sans but lucratif (où se réalisent aussi des recherches interdisciplinaires de grande qualité).

Le financement de la recherche scientifique et

des universités, la carrière et le statut des chercheurs et des chercheuses, les liens entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée, la pression du marché sur les politiques de

recherche d’une part, et les questions philosophiques liées au progrès, aux types de recherche ou aux conséquences des découvertes technologiques sur la société, d’autre part, sont autant de domaines à intégrer dans une réflexion systémique.

Malheureusement, les chiffres relatifs aux

investissements dans la recherche en Belgique ne concrétisent pas ces potentialités. En mars 2000, les chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Union européenne (UE) réunis à Lisbonne décidaient que l’Union devait s’engager à relever le taux de croissance et d’emploi pour soutenir la cohésion sociale et l’environnement durable. Se retrouvant deux ans plus tard à Barcelone pour concrétiser cet objectif ambitieux, les Quinze (à l’époque) décidèrent notamment que les investissements de recherche et développement (R&D) dans l’UE devraient augmenter pour atteindre les 3 % du produit intérieur brut (PIB) à l’horizon 2010, dont deux tiers au moins seraient financés par le secteur privé.

Après avoir connu une hausse continue entre

1994 et 2001, période durant laquelle la part du PIB consacrée à la R&D94 est passée de 1,65 % à 2,08 %, l’effort belge s’essouffle depuis 2001. Le dernier chiffre disponible, relatif à l’année 2006, situe ce taux à 1,83 %95.

Même si ce taux place la Belgique dans la

moyenne européenne, plusieurs pays voisins consentent des efforts plus importants. La trajectoire belge s’éloigne donc de l’objectif au moment même où d’autres mettent le paquet : la France est à 2,12 %, l’Allemagne à 2,51 %, le Danemark à 2,43 %, la Finlande à 3,45 % et la Suède à 3,82 %. Ces deux derniers pays ont donc d’ores et déjà atteint l’objectif de Lisbonne2.

Sous la législature 2003-2007, le

Gouvernement violet a fait tout le contraire de ce qui était nécessaire. Le budget 2005 fut même catastrophique pour les secteurs de la recherche : une inquiétante marche arrière s’y est dessinée, que ce soit pour les programmes nationaux de recherche ou pour la participation de la Belgique à des programmes internationaux. Les dépenses de l’Etat fédéral en matière de R&D ont diminué de 9 % cette année-là. Cette tendance à la baisse s’est confirmée dans le budget 2008 du Gouvernement fédéral.

94 L’agrégat standard DIRD englobe toutes les dépenses intérieures brutes afférentes aux travaux de R&D exécutés sur le territoire national pendant une période de 12 mois. Afin de faciliter les comparaisons internationales, les DIRD sont exprimées en pourcentage du PIB. Cet indicateur présente l'avantage d’être une mesure de l'intensité de la R&D et non de sa valeur absolue. Il n’est donc pas influencé par la taille du pays. 95 Source Eurostat.

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En matière de R&D, le privé couvre 60 % du financement, situant la Belgique sur ce point dans le haut du peloton européen (moyenne UE : 54 %). Par contre, en termes d’investissements publics, nous sommes bons derniers avec un taux de 24,7 % de l’ensemble des investissements couverts par les pouvoirs publics (moyenne UE : 35 %) !

En pourcentage du PIB, les crédits budgétaires publics alloués à la recherche ne représentent chez nous que 0,61 % du PIB et n’ont pour ainsi dire pas augmenté depuis l’engagement pris au début de la décennie, au contraire d’autres pays qui se situaient à l’époque au même niveau que nous tels l’Autriche, le Portugal ou plus encore l’Espagne, qui a atteint dès 2006 l’objectif européen défini à 1 %.

Evolution du PIB consacré dans les budgets publics à la R&D

(source : eurostat)

Si nous suivons l’engagement pris à

Barcelone, les moyens publics consacrés à la recherche devraient, d’ici 2010 – en deux années budgétaires donc – atteindre 1 % du PIB, soit une enveloppe budgétaire annuelle supplémentaire d’environ 1 350 milliards € ! Ce constat est surtout préoccupant en ce qui concerne la faiblesse du financement de la recherche fondamentale. Mais il est également valable, sur ce plan, pour le secteur privé : le « Top 100 » des entreprises actives en R&D a réduit son effort au cours des dernières années.

Face à ce constat assez sombre, également partagé, notamment, par l’Union wallonne des entreprises et par le Conseil de la politique scientifique, certaines mesures ont été prises. Au niveau wallon, il s’agira d’évaluer l’impact du Plan Marshall sur le développement de la recherche. Le Gouvernement wallon a, en effet, décidé d’investir 270 millions € en quatre ans pour la recherche et l’innovation, mais sans accorder aucune priorité à la question énergétique ou aux nouvelles technologies vertes au sens large.

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L’exécution budgétaire pose cependant déjà question à certains égards. Dans son analyse de l’utilisation globale des crédits consacrés au Plan Marshall96, la Cour des Comptes a constaté qu’en 2007, les moyens d’action et les moyens de paiement n’ont été utilisés qu’à concurrence de 90,1 % et de 84,3 % (95,6 % et 88,2 % en 2006). Les consommations les moins élevées concernent précisément l’axe 1 (créer des pôles de compétitivité, et en particulier la mesure 1.2 dédiée à la recherche) avec un taux d’utilisation de 77,4 % et l’axe 4 (doper la recherche et l’innovation en lien avec l’entreprise) avec un taux d’utilisation de 75,4 %.

La Région wallonne a également créé une

Agence de stimulation technologique97. Cette structure a pour mission de rassembler et de coordonner les divers opérateurs qui participent aujourd'hui à l'intermédiation scientifique et technologique. Le porteur de projet, quel que soit son point d’entrée dans le marché de l’offre de technologies et de la demande de solutions, doit être désormais orienté vers l’opérateur le plus adéquat par rapport à son besoin. Un important décret98 a, par ailleurs, été adopté en cette matière par le Parlement wallon le 25 juin 2008, visant à adapter le secteur aux évolutions économique, institutionnelle, juridique et technologique et à moderniser la plupart des types d’aides de la Région wallonne à destination des entreprises, des organismes publics de recherche, des centres de recherche, des partenariats d’innovation technologique et des partenariats internationaux. Il s’agira d’évaluer l’impact de ces nouveaux outils sur le paysage de la recherche wallonne, sur l’efficacité des procédures et sur la rationalisation des intervenants.

Relevons également que des efforts ont été

réalisés pour augmenter le nombre de docteurs formés, le nombre de chercheuses et chercheurs hautement qualifiés dans les universités et dans les entreprises et pour améliorer l’attractivité de ces carrières (notamment par l’exonération de 50 % du précompte professionnel des chercheurs et par l’instauration de primes). Il n’en reste pas moins que très peu de docteurs peuvent ensuite obtenir un poste académique ou un poste scientifique. De plus, les compétences acquises lors de leur doctorat sont insuffisamment reconnues, que ce soit dans le secteur public ou privé.

96 Compte-rendu analytique de la Commission des Relations internationales, de la Coopération internationale, de la Recherche, des Technologies nouvelles et des Télécommunications, Parlement Wallon, session 2007-2008, Namur, mardi 24 juin 2008. 97 http://ast.wallonie.be/. 98 http://nautilus.parlement-wallon.be/Archives/2007_2008/DECRET/799_1.pdf.

Rappelons enfin l’importance de la recherche et de l’innovation « non technologique », par exemple dans le secteur des services, qui n’apparaît pas dans les statistiques de dépenses mais jouent un rôle de stimulation économique et sociale indéniable.

La recherche, pas n’importe comment !

Pour Ecolo, une politique de recherche et

d’innovation doit s’articuler autour de cinq principes : 1. Une qualité de vie augmentée : promouvoir le

bien-être social et environnemental. Il s’agit de privilégier les projets de recherche fondamentale ou appliquée prenant en compte des objectifs sociaux et/ou environnementaux explicites. Ainsi, les recherches en matière d’armement militaire, notamment, ne devraient pas être comptabilisées dans le volume d’investissement de chaque pays.

2. Une éthique confirmée : les aspects éthiques d'une recherche doivent être explicitement examinés, dans les enceintes démocratiques adéquates. C’est particulièrement utile en ce qui concerne les nouvelles technologies, comme les nanotechnologies qui nécessitent d’être strictement réglementées.

3. Un financement durable : offrir de meilleures possibilités de financement aux projets de recherche et d’innovation orientés vers le long terme. Une garantie de financement pour une période relativement longue (4 à 5 ans) est essentielle pour permettre une qualité du travail, l'indépendance et l'intégrité des chercheuses et des chercheurs. Les temps politique et scientifique diffèrent. La succession de contrats à durée déterminée est parfois très difficile à vivre pour les chercheurs. En outre, elle est souvent contre-productive eu égard à l’investissement humain et matériel nécessaire pour former un scientifique et pour mettre en place son environnement de recherche. Il faut développer des mécanismes de transition entre les statuts précaires et un statut durable, notamment lorsqu’une unité de recherche parvient à bâtir une compétence spécifique.

4. Une coopération accentuée : privilégier la coopération entre laboratoires, universités et centres de recherche belges, européens et issus des pays en développement. Cette coopération se traduira par davantage d’opportunités d’innovation, une augmentation significative de la qualité intrinsèque des publications ainsi que des résultats de la recherche, et un partage plus équitable des retombées économiques éventuelles (brevet,

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licences, ...). Un partenariat entre les politiques de coopération au développement et les politiques de recherche est aussi à renforcer afin d’augmenter le transfert de connaissances et de permettre de mener des politiques de coopération basées sur les derniers développements scientifiques. Tout comme la Flandre le fait depuis de nombreuses années, les Communautés française et germanophone doivent s’investir beaucoup plus dans les matières et structures scientifiques et techniques du ressort de l’UNESCO.

5. Une publication transparente : rendre plus accessible les revues scientifiques, notamment en agissant sur leur coût ou en utilisant le potentiel d’une diffusion sur Internet, et faciliter la publication de travaux interdisciplinaires. La recherche est une des compétences les

plus éclatées en Belgique. Les Communautés et Régions disposent de compétences larges mais l’échelon fédéral finance également des programmes de recherches spécifiques. Interlocuteurs multiples, intérêts particuliers, pouvoirs limités, sous-régionalismes et cloisonnements ne favorisent pas l’émergence d’un projet commun. Il s’agit également pour Ecolo de veiller à la cohérence des projets entrepris et d’une coordination efficace entre les projets des uns et des autres.

La recherche demain : Propositions d’Ecolo

PRIORITE N°1 : INVESTIR MASSIVEMENT ET

INTELLIGEMMENT DANS UNE RECHERCHE

DIVERSIFIEE Alors que, pour atteindre les objectifs

européens, la Belgique devrait consacrer 3 milliards € d’aides publiques à la recherche et à l’innovation, elle ne dépasse que faiblement les 60 % de cet objectif. Dans une récente étude99, le Bureau du Plan a comparé les politiques d’innovation de la Belgique avec celles menées en Suède et en Finlande, deux des leaders en matière de recherche et innovation : « La première différence importante est l’ampleur de l’effort consenti par les pouvoirs publics pour soutenir l’innovation. Alors que la Finlande est un pays

99 B. BIATOUR, C. KEGELS et S. VANDECANDELAERE, Le financement public de l’innovation : Etude comparative Finlande, Suède, Belgique, par Working Paper 9-06, Bureau Fédéral du Plan, septembre 2006.

beaucoup plus petit que la Belgique, cette nation parvient à dégager autant de ressources que la Belgique pour soutenir la recherche. De même, la Suède qui a une taille comparable à la Belgique, a un soutien public à la recherche qui atteint plus du double du soutien offert par les autorités belges. Il s’agit pour la Suède et la Finlande d’une véritable volonté politique de mettre l’innovation au coeur de toutes les politiques menées après le choc systémique qu’a constitué la sévère crise économique du début des années nonante ».

Proposition : Investir 1 milliard € public dans la recherche

Ecolo constate qu'il est impératif, pour respecter les objectifs de Lisbonne, d'augmenter l’aide publique à la recherche, tous niveaux de pouvoir confondus, à hauteur d’1 milliard € structurels d’ici 2010. Ecolo propose que cet investissement soit orienté afin de donner la priorité aux secteurs innovants, notamment ceux de la nouvelle économie verte et en veillant à une meilleure coordination des investissements réalisés aux différents niveaux de pouvoir, notamment quant à la définition des priorités à travers les cofinancements et en dépassant les seuls critères économiques et académiques.

Proposition : Se doter d’outils d’évaluation qualitative de la recherche et de l’innovation

Ecolo propose également que la Belgique se dote d’outils d’évaluation plus pertinents et indépendants des efforts réalisés en matière de recherche et d’innovation, de façon à assurer un pilotage dynamique et efficace des investissements réalisés. « En Finlande comme en Suède, l’évaluation continue et indépendante de haut niveau des projets et politiques menées permet à tout moment de réorienter l’action publique vers une plus grande efficacité. (…) Quelle que soit la forme choisie, il faut que cette évaluation soit de grande qualité et suivie d’effets immédiats pour véritablement porter ses fruits. (…) la Finlande comme la Suède donnent l’impression d’avoir clairement et unanimement identifié leurs points forts et leurs points faibles en matière de système d’innovation et d’avoir une bonne programmation des interventions

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publiques nécessitées par ce diagnostic. La Belgique paraît moins avancée sur ce plan », conclut l’étude du Bureau Fédéral du Plan. A l’instar de ce qui est fait au niveau fédéral, Ecolo souhaite améliorer, au niveau de la Communauté française et des Régions, la transparence des procédures de sélection des recherches et mettre au point des outils objectifs d’évaluation des recherches financées :

sur la base d’appels ouverts à propositions de recherche ;

en recourant à une évaluation des propositions de recherche par des experts non belges ou étrangers, pour prévenir tout conflit d’intérêts et éviter que les décideurs soient aussi les défenseurs d’un projet en lice ;

via la détermination de critères de sélection précis, objectifs et publics ;

par le biais d’une évaluation intermédiaire et finale des recherches financées.

Proposition : Instaurer un monitoring permanent des investissements en recherche et innovation

Pour répondre à cet objectif de pilotage des investissements en recherche et innovation et pour évaluer la réalisation de l’objectif de 3 % du PIB consacré à ce secteur, Ecolo propose d’instaurer au sein du budget de l’Etat un mécanisme permanent de monitoring des investissements dans le secteur de la recherche.

PRIORITE N°2 : AMELIORER LE STATUT DES

CHERCHEUSES ET DES CHERCHEURS Depuis longtemps, le statut et la carrière des

chercheuses et des chercheurs interpellent. Les constats sont largement connus quant à la précarité de leur statut et les intentions partagées quant à son amélioration, de façon à éviter une fuite des cerveaux et à optimaliser leurs travaux. Toutefois, alors que sous la législature précédente une importante réflexion avait été entreprise, le cadre législatif, devant améliorer significativement le statut de la recherche, fait encore défaut

aujourd’hui. Dans ce cadre, il s’agira également d’objectiver les nominations des chercheurs.

Proposition : Valoriser les chercheuses et chercheurs

Ce cadre légal n’est pas directement ou pas exclusivement de la compétence de l’autorité fédérale100, dès lors que les enjeux de la recherche et de l’innovation débordent des niveaux de pouvoir. C’est pourquoi Ecolo, pour un meilleur statut des chercheuses et des chercheurs, soutient les orientations suivantes :

la systématisation du contrat de travail pour les doctorants, ainsi que le rattachement à une commission paritaire spécifique ;

une meilleure préparation des doctorantes et doctorants ;

une amélioration de la transparence des décisions prises en matière de nomination et de financement des chercheurs et/ou de financement de leurs projets. Ceci passe, d’une part, par la systématisation du recours à des experts externes lors de l’évaluation des projets, pour éviter tout conflit d’intérêts, et, d’autre part, par l’élaboration de critères d’évaluation des projets précis, objectifs et publics dans les diverses instances décisionnelles ;

le développement des possibilités de post-doctorat (y compris à l’étranger) ;

une valorisation du doctorat et de la carrière de chercheur ou chercheuse, y compris en terme de mobilité (mandats de retour) et l’accroissement des opportunités de carrières pour les docteurs (au-delà de postes académiques de plus en plus rares) ;

la création de postes permanents au sein des Universités pour des chercheurs seniors, afin d’ouvrir des perspectives de carrière (autres que purement académiques) aux chercheurs et d’inciter des jeunes à se lancer dans la carrière scientifique ;

des mesures spécifiques au bénéfice des femmes, notamment en supprimant la

100 Les chercheurs dépendant de l’Etat fédéral ont, quant à eux, vu une révision totale de leur statut en 2008, à l’exception des chercheurs contractuels qui restent en attente à ce stade.

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discrimination par l’âge qui existe au FNRS et au FRIA selon laquelle il est impossible d’obtenir une bourse de ces deux organismes si on commence un doctorat après 30 ans.

Proposition : Revoir le mode de financement

Le système des contrats de recherche mériterait d’être sérieusement audité. Comme c’est déjà le cas pour les boursiers FNRS et FRIA, il faut, en effet, donner au doctorant entamant sa thèse une sécurité quant aux moyens financiers nécessaires pour mener à bien son projet, c’est-à-dire assurer ses revenus sur toute la période du doctorat, ainsi que les moyens indispensables à l’accomplissement de ses recherches (avec évaluation à mi-parcours). Le très faible taux d’achèvement des doctorats est pour une large part explicable par le manque de continuité dans le financement (contrats de très courte durée, interruption du financement entre deux contrats, …). Même si des efforts ont été fournis ces deux dernières années, cela reste insuffisant. Certains types de projets, comme les FIRST spin-off, ne peuvent avoir été précédemment financés par de l'argent public. Voilà qui est paradoxal quand on sait que ce type de projet est précisément destiné à faire passer vers l'industrie des recherches menées dans les universités et les centres de recherche. En outre, Ecolo veut tendre vers un pourcentage significatif de chercheurs pérennisés. Cela permettrait de développer des connaissances, et par la suite, de les faire sortir des universités via, par exemple, des contrats du type spin-off. La gestion des ressources financières en serait, par ailleurs, rationalisée.

Proposition : Optimaliser les Conseils de la politique scientifique

Pour pouvoir examiner de manière optimale le financement de la recherche scientifique et des universités, et contribuer plus efficacement à l’amélioration de la carrière et du statut des chercheurs, les Conseils de la politique scientifique des Régions (wallonne et bruxelloise) doivent fusionner au profit d’une structure unique, mandatée aussi par la

Communauté française pour ses compétences et élargie dans sa composition afin de pouvoir traiter l’ensemble de ces enjeux. Le décret de la Communauté française relatif aux organes d’avis en matière de politique scientifique du 9 janvier 2003 doit ainsi être actualisé et reconnaître, par ailleurs, le rôle de l’administration.

Proposition : Faciliter le groupement d’employeurs en matière de recherche

Pour améliorer le statut professionnel des chercheuses et des chercheurs, Ecolo propose également de faciliter l’utilisation de la technique du « groupement d’employeurs101 » en matière de recherche. La structure socioéconomique de la Wallonie est très majoritairement composée de PME et de TPE qui ne disposent pas ou peu de moyens à affecter à la recherche et à la politique d’innovation. Le « groupement d’employeurs » s’inscrit dans un nouveau rapport au travail où les demandes de plusieurs entreprises sont mutualisées. Il introduit des pratiques de coopération dans un système socioéconomique largement dominé par une logique de compétition. Pour Ecolo, la logique du groupement d’employeurs n’est pas limitée à l’intra muros et peut s’entendre dans une logique de coopération entre régions du même pays et entre régions de pays voisins. La coopération public/privé en matière de recherche est très difficile pour des raisons de propriété intellectuelle, de secret de fabrication notamment. Mettre en place une instance facilitatrice dans ce domaine apparaît par conséquent tout à fait utile.

PRIORITE N°3 : VISER UN DEVELOPPEMENT DURABLE PAR

LA RECHERCHE La recherche fédérale dans les secteurs du

développement durable fait actuellement l’objet d’un trop faible investissement. En 2007, seuls 20 % des projets initialement présentés ont été financés. Cela signifie que 80 % des dossiers –

101 Le « groupement d’employeurs » est une association qui réunit des employeurs dans le but de recruter un ou plusieurs salariés et de le(s) mettre à disposition de ses membres selon les besoins de chacun d’eux.

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pourtant rédigés, lus, relus et « expertisés » - passent en pertes et profits. Quand on sait que certains projets de recherche (First, ministère de l'agriculture, ...), sont alloués par tranche et qu’il convient donc de déposer trois dossiers (introduction et deux renouvellements) pour un soutien de quatre à six ans, la situation n’apparaît pas du tout optimale. Or, c’est la recherche dans ce domaine qui pourra contribuer à réorienter notre modèle de société vers une plus grande intégration des pôles économiques, sociaux et environnementaux, vers un développement plus durable. Il s’agit donc d’évaluer les raisons de ce très faible taux de financement et de corriger le tir.

Proposition : Favoriser la recherche dans les secteurs verts

La recherche dans les secteurs verts est créatrice de bien-être dans notre société, elle est porteuse de nouveaux paradigmes et contribue fortement à la protection de l'environnement et l'innovation. Ainsi les recherches en sciences humaines (sociologie, psychologie, ...) en lien avec le développement durable renouvellent le concept dans une compréhension plus transversale des enjeux de sa mise en œuvre102. A l'interface entre l'ingénierie et la biologie, le biomimétisme103 ouvre un champ complet d'innovation au profit du développement durable. La nature est, en effet, un laboratoire de création de solutions durables qui ont assuré la survie et l'adaptation des êtres vivants jusqu'à aujourd'hui. L'expertise belge en matière de recherche, consacrée à la conservation de la biodiversité, est en régression alors même que les besoins pour concrétiser les politiques à mettre en œuvre dans ce domaine ne sont pas couverts. Un investissement accru dans ce secteur spécifique est indispensable. Au plan des changements climatiques, le soutien à l'expertise et l'expérience belges dans le secteur de la recherche polaire doit se poursuivre.

102 Voir à ce sujet nos propositions du Livre IV, Chapitre 3 « Economie verte ». 103 Le biomimétisme consiste à s'inspirer du fonctionnement de la nature (faune et flore) pour créer des solutions à des problèmes jusqu'ici résolus par des méthodes complexes et parfois très polluantes.

Proposition : Lancer un programme pluriannuel de recherche dans le secteur des énergies vertes

Dans le même ordre d’idées, Ecolo propose le lancement par le Gouvernement fédéral d’un programme pluriannuel de recherche fondamentale en matière d’énergies vertes exploitables en Belgique intégrant notamment les dimensions techniques, sociétales, systémiques et environnementales. Ce programme aborderait tant le volet « production d’énergie » que les volets « transport, stockage et efficacité énergétique ». Les potentialités dans ces domaines sont importantes même si elles doivent être analysées en fonction des spécificités de notre pays. Les énergies « vertes » (géothermique, éolien urbain, solaire, biomasse, hydraulique, photovoltaïque par un stockage de l’électricité, l’accumulation de chaleur et desmatériaux supraconducteurs, …) et les technologies d’économie d’énergie (isolation, immeubles passifs, …), sont susceptibles d’apporter des réponses aux défis énergétiques et climatiques et constituent également de belles opportunités économiques.

AUTRES PRIORITES

Proposition : Créer un office parlementaire d’évaluation technologique

« L’enjeu fondamental du développement des offices d’évaluation des choix technologiques est sans aucun doute de ramener la sphère des sciences et technologies au cœur même du débat de société, et plus précisément au sein des institutions politiques légitimement en charge de la gestion de la cité »104. Les citoyennes et les citoyens s’interrogent à juste titre, par exemple, sur l’impact des organismes génétiquement modifiés, sur le clonage, sur l’impact pour leur santé des ondes électromagnétiques … L’émergence des nanotechnologies suscite également de nombreuses questions. La recherche pose des

104 PIERRE DELVENNE et SEBASTIEN BRUNET, Le Technology Assessment en question : une analyse comparative, courrier hebdomadaire du CRISP n° 1909-1910, Bruxelles, 2006.

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questions éthiques et philosophiques pointues. Pour que les différents débats de société, liés aux sciences et technologies, puissent avoir lieu et a fortiori dans de bonnes conditions, Ecolo propose la création d’un Office d’évaluation technologique, sous la responsabilité du Parlement fédéral et en concertation avec les entités fédérées. Parmi les missions de cet Office figurerait la mise en place de moments de dialogue réguliers entre les chercheurs et les citoyens (table-ronde, débats, conférences, …).

Proposition : Diffuser et démocratiser la recherche sur Internet

Dans le cadre du processus de Lisbonne et de la stratégie d'innovation de l'Union Européenne, la question de la diffusion du savoir est centrale. La réponse de la Commission consiste à promouvoir les brevets et autres outils de propriété intellectuelle, alors qu’Ecolo pense que c'est exactement le contraire qu’il faut faire. Sur base du modèle du logiciel libre, de nombreux scientifiques, et plus particulièrement dans les domaines de la physique et de la médecine, ont lancé des revues scientifiques en libre accès. La Déclaration de Berlin105 sur le Libre Accès à la Connaissance en Sciences exactes, Sciences de la vie, Sciences humaines et sociales est explicite : « De nouvelles possibilités de diffusion de la connaissance, non seulement sous des formes classiques, mais aussi, et de plus en plus, en s’appuyant sur le paradigme du libre accès via l’Internet, doivent être soutenues. Nous définissons le libre accès comme une source universelle de la connaissance humaine et du patrimoine culturel ayant recueilli l’approbation de la communauté scientifique. » En outre, le coût des publications scientifiques pose problème, au point qu'aujourd'hui ces revues peuvent devenir plus un frein qu'un moteur de diffusion. Enfin, les modifications de la chaîne éditoriale constituent un élément important à prendre en considération. Du fait du libre accès aux preprints (diffusion libre des brouillons d'articles avant publication) qui est en voie de généralisation, l'édition survient à un moment

105 http://www.inist.fr/openaccess/article.php3?id_article=38.

où une évaluation collective a déjà eu lieu. Elle vient sanctionner et formaliser celle-ci. Il restera cependant aussi des domaines où les publications seront tenues secrètes, sauf au sein d'un tout petit groupe. Enfin, grâce à l'accès libre, des lectrices et lecteurs (scientifiques d'autres disciplines ou sous-disciplines, lectrices et lecteurs grand public à culture scientifique, décideuses et décideurs) accèdent aujourd'hui à la littérature scientifique primaire. Cela modifie considérablement le débat sociétal sur la science et constitue une condition de base d'une articulation science/société. Pour favoriser les archives ouvertes et la publication scientifique sur Internet, le financement en amont doit être suffisant et pérenne, garantir l’indépendance des auteurs, être incitatif et efficient. Les archives ouvertes présentent le double avantage d’éviter les files d’attente des études et d’assurer une diffusion très large à la connaissance scientifique. Ecolo propose la mise en libre accès sur Internet des travaux des chercheuses et chercheurs belges qui en font la démarche avant toute publication dans des revues papier. De la même manière, un effort budgétaire significatif devra être consenti pour la valorisation des collections scientifiques par le biais des nouvelles technologies.

Proposition : Créer un label de qualité européen

Afin de valoriser la recherche européenne, un label de qualité européen serait créé. Il encouragerait particulièrement la publication et la diffusion en ligne de recherches interdisciplinaires de haut niveau.

Proposition : Maintenir et développer le potentiel scientifique fédéral

La recherche et l’expertise scientifique se développent dans différents SPF106 (l’Institut de Santé publique, l’École Royale Militaire, l’Institut de Criminalistique, …) et dans le SPP « Politique scientifique ». Ce dernier service concerne à lui seul 2 300 agentes et agents répartis entre l’administration et dix établissements scientifiques. Ces institutions

106 Service public fédéral.

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développent une recherche de qualité au service de l’ensemble de la population et des différents niveaux de pouvoir. Elles gèrent également des collections scientifiques de valeur internationale. L’Homme ne peut pas être ou devenir sans savoir ce qu’il a été ! Dans la continuité du « Livre blanc sur la modernisation des institutions scientifiques fédérales », il faut garantir les conditions de travail de ces institutions sur le long terme : infrastructures (bâtiments, informatique, équipements lourds, …), moyens (programmes pluriannuels en recherche stratégique et fondamentale, programmes de préservation et de valorisation des collections, y compris d’informations (bases de données), personnel (évolution du statut, intégration du personnel contractuel, …).

Proposition : Créer et/ou développer des lieux de sensibilisation scientifique permanents

L’image des sciences qui rebutent les jeunes a la vie dure. Heureusement, des actions de sensibilisation intelligentes, conviviales, didactiques montrent qu’il y a moyen d’intéresser les jeunes générations aux carrières scientifiques. Que l’on pense à des émissions de télévision aussi populaires que « C’est pas sorcier » ou « Matière grise », « Semence de curieux » à la radio, aux actions « Le Printemps des sciences » ou « La nuit du chercheur », une série d’initiatives qui portent leurs fruits. Dans le même sens, des collaborations régulières entre les médias (télévisions nationales, journaux hebdomadaires) seraient les bienvenues pour soutenir la recherche. L’initiative récente « Ik heb een vraag » (« J’ai une question », sorte d’interface web entre les questions du public et les experts), impliquant des organismes flamands et fédéraux, retient notre attention. L’expérience difficile du PASS de Frameries ne doit pas décourager les pouvoirs publics à investir dans des structures permanentes de sensibilisation aux sciences et aux techniques. Le cas du Technopolis de Malines (largement soutenu par la Région flamande et « sponsorisé » à la fois en termes d’installation que de fonctionnement) est édifiant. Cette plateforme permanente pour la science et la technologie a coûté 15,5 millions €. Via plus de 260 manipulations interactives, les visiteurs (re)découvrent le monde qui les entoure. Grâce à une approche ludique et pédagogique et à sa présence estivale au palais royal, Technopolis

accueille plus de 250 000 visiteurs par an. Les efforts doivent être prolongés en vue d’accroître la fréquentation du PASS par les écoles, y compris bruxelloises, notamment en améliorant leurs conditions globales d’accès.

Proposition : Faire du visa européen une réalité pratique

Le Gouvernement fédéral a adopté fin 2005 un projet d’arrêté royal (AR) modifiant l’arrêté royal du 9 juin 1999 relatif à l’occupation des travailleuses et des travailleurs étrangers. Cet arrêté a été complété par de nouvelles dispositions visant :

la suppression du permis de travail et de l'autorisation d'occupation pour les chercheuses et chercheurs (102 institutions scientifiques agréées et 1 658 centres de recherche d'entreprises reconnus) ;

la suppression du permis de travail et de l'autorisation d'occupation pour les managers d'entreprises internationales ;

la dispense temporaire du permis de travail et de l'autorisation d'occupation pour des missions à court terme (formation au sein de l'entreprise, gestion de crise, réparations urgentes, tests de prototypes et congrès internationaux) ;

la délivrance plus souple de la carte professionnelle pour les indépendantes et indépendants étrangers qui veulent devenir actifs en Belgique.

La manière restrictive dont a été défini le champ d’application du visa scientifique en Belgique le rend peu efficace par rapport à l’objectif proclamé : permettre aux chercheurs hors UE de circuler plus librement en Europe. Il serait judicieux d’étendre la définition de « chercheur » aux boursiers de post-doctorats, aux chercheurs stagiaires, invités ou en formation continuée, ainsi qu’aux chercheurs des nouveaux pays adhérents de l’UE en période transitoire.