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ProductivitØ Globale des Facteurs et Croissance dans un contexte de Changement Institutionnel : Le cas du Venezuela (1942-2002) Alejandro Quijada * Aoßt 2004 RØsumØ Le Venezuela est le dixiLme producteur et le sixiLme exportateur mondial de pØtrole. LannØe 1958 marque le dØbut de lune des plus longues pØriodes de stabilitØ dØmocratique jamais vØcue au pays, jusqu ce que en 1992 une premiLre tentative de coup dEtat bouleverse les institutions en place. Ces ØvØnements trouvent une interprØtation dans le contexte nØo- institutionnel de North (1990), les institutions changent cause de modifications dans les prix relatifs et dans les prØfØrences des individus. Dans ce sens, nous essayons didentifier les ØlØments explicatifs de la croissance, notamment limpact du changement institutionnel sur laccumulation, en portant une attention particuliLre la contribution de la ProductivitØ Globale des Facteurs (PGF). Nous proposons Øgalement une approche alternative au calcul traditionnel de la productivitØ des facteurs. Notre dØmarche consiste estimer ØconomØtriquement les ØlasticitØs de production associØes chaque facteur de production pour ensuite dØriver lapport de la PGF. En termes de rØsultats, nous constatons que le changement institutionnel influence nØgativement la croissance travers son effet sur le secteur pØtrolier, de mŒme, la productivitØ devient de plus en plus importante en tant quØlØment explicatif de la croissance. * UniversitØ dAuvergne, Centre dEtudes et de Recherches sur le DØveloppement International. 65 Boulevard F. Mitterrand, Clermont-Ferrand, France E-mail : [email protected]

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Productivité Globale des Facteurs et Croissance dans un contexte de

Changement Institutionnel : Le cas du Venezuela (1942-2002)

Alejandro Quijada*

Août 2004

Résumé

Le Venezuela est le dixième producteur et le sixième exportateur mondial de pétrole. L�année 1958 marque le début de l�une des plus longues périodes de stabilité démocratique jamais vécue au pays, jusqu�à ce que en 1992 une première tentative de coup d�Etat bouleverse les institutions en place. Ces événements trouvent une interprétation dans le contexte néo-institutionnel de North (1990), les institutions changent à cause de modifications dans les prix relatifs et dans les préférences des individus. Dans ce sens, nous essayons d�identifier les éléments explicatifs de la croissance, notamment l�impact du changement institutionnel sur l�accumulation, en portant une attention particulière à la contribution de la Productivité Globale des Facteurs (PGF). Nous proposons également une approche alternative au calcul traditionnel de la productivité des facteurs. Notre démarche consiste à estimer économétriquement les élasticités de production associées à chaque facteur de production pour ensuite dériver l�apport de la PGF. En termes de résultats, nous constatons que le changement institutionnel influence négativement la croissance à travers son effet sur le secteur pétrolier, de même, la productivité devient de plus en plus importante en tant qu�élément explicatif de la croissance. * Université d�Auvergne, Centre d�Etudes et de Recherches sur le Développement International. 65 Boulevard F. Mitterrand, Clermont-Ferrand, France E-mail : [email protected]

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Productivité Globale des Facteurs et Croissance dans un contexte de Changement Institutionnel :

Le cas du Venezuela (1942-2002)

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Table des Matières

Introduction.......................................................................................................................3 I. La croissance et le changement institutionnel au Venezuela......................................4

A. Concepts de base et évolution institutionnelle.........................................................4 B. Quelques faits stylisés: une croissance centrée sur la rente pétrolière.....................6

II. La productivité globale des facteurs..........................................................................13

A. Origines et critiques................................................................................................13 B. Méthodes de calcul.................................................................................................16 C. Revue de la littérature.............................................................................................17

III. L�estimation de la productivité globale des facteurs.................................................20

A. Le modèle et les données........................................................................................20 B. L�approche comptable............................................................................................22 C. L�approche économétrique.....................................................................................24 D. Consistance et cohérence des résultats...................................................................34

IV. Les déterminants de la croissance au Venezuela.......................................................35

A. Les sources de l�accumulation factorielle..............................................................36 B. L�importance relative de la PGF............................................................................38

Conclusion.......................................................................................................................42 Bibliographie...................................................................................................................43 Annexe.............................................................................................................................45

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Le cas du Venezuela (1942-2002)

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Graphiques Graphique 1. Evolution institutionnelle et démocratique (1942-2002).............................6 Graphique 2. Produit Intérieur Brut réel (1942-2002)���...........................................6 Graphique 3. Evolution du PIB réel selon le secteur d�activité (1942-2002)���........7 Graphique 4. Evolution de la production et du prix réel du pétrole (1942-2002).............8 Graphique 5. Evolution du taux de change réel et du prix réel du pétrole (1942-2002)...9 Graphique 6. Stock de capital selon le secteur d�activité (1942-2002)...........................10 Graphique 7. Stock de travail selon le secteur d�activité (1942-2002)���...............11 Graphique 8. Contribution de la PGF et des facteurs de production à la croissance.......39

Tableaux Tableau 1. Participation sectorielle dans le PIB................................................................8 Tableau 2. Participation sectorielle dans le stock de capital physique............................10 Tableau 3. Participation sectorielle dans le stock de travail............................................11 Tableau 4. Elasticités moyennes de production...............................................................22 Tableau 5. Taux de croissance de la productivité globale des facteurs (%) : l�approche comptable.........................................................................................................................23 Tableau 6. Tests de racine unitaire..................................................................................25 Tableau 7. Estimation par MCO......................................................................................25 Tableau 8. Sélection du modèle ARMA(p,q)..................................................................27 Tableau 9. Estimation par MCNL avec terme d�erreur MA( 1)......................................28 Tableau 10. Exogénéité des instruments : Tests de causalité de Granger.......................30 Tableau 11. Estimation par 2 MCNL : première étape....................................................31 Tableau 12. Estimation par 2 MCNL : deuxième étape..................................................32 Tableau 13. Taux de croissance de la productivité globale des facteurs (%) : l�approche économétrique.................................................................................................................33 Tableau 14. Taux de croissance de la productivité globale des facteurs (%) : comparaison avec Clemente (2002)................................................................................34 Tableau 15. Taux de croissance de la productivité globale des facteurs (%) : comparaison avec Rodríguez (2004)...............................................................................34 Tableau 16. Croissance et productivité des facteurs (%).................................................38 Tableau 17. Décomposition de la variance du taux de croissance du PIB (%)...............40 Tableau A.1: Tests d�égalité des séries de capital (1950-1994)......................................45 Tableau A.2 : Variables instrumentales...........................................................................45 Tableau A.3 : Tests de causalité de Granger...................................................................46 Tableau A.4 : Corrélations taux de change réel, prix du pétrole.....................................46

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Le cas du Venezuela (1942-2002)

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Introduction Le Venezuela est le dixième producteur et le sixième exportateur mondial de pétrole. En 1942 le revenu par habitant était de 2.300 $US, presque trente ans après lors du premier choc pétrolier en 1970, ce même revenu avait pratiquement triplé atteignant les 6.100 $US, trois autres décennies plus tard et la moitié du revenu par tête avait disparu pour se situer en 3.160 $US. En même temps des changements d�ordre institutionnel et politique ont secoué la société vénézuélienne. L�année 1958 marque le début de l�une des plus longues périodes de stabilité démocratique jamais vécue au pays, jusqu�à ce que en 1992 une première tentative de coup d�Etat bouleverse les institutions en place. Les événements antérieurement décris, trouvent une interprétation dans le contexte néo-institutionnel de North (1990), les institutions changent à cause de modifications dans les prix relatifs et dans les préférences des individus. Ces modifications peuvent à leur tour être induites par des changements idéologiques issus du mécontentement populaire face à la mauvaise gestion gouvernementale. Dans ce sens, les changements institutionnels n�entraînent pas, a priori, des institutions plus efficientes, en termes de promotion de la croissance économique, étant donné qu�elles sont au service des groupes possédant le plus grand pouvoir de négociation. Nous essayons donc, dans le cas du Venezuela, d�identifier les éléments explicatifs de la croissance, notamment l�impact du changement institutionnel sur l�accumulation, en portant une attention particulière à la contribution de la Productivité Globale des Facteurs (PGF), à savoir, les variations de production non expliquées par l�accumulation factorielle (capital et travail). A cet effet nous proposons une approche alternative au calcul traditionnel de la productivité des facteurs. Notre démarche consiste à estimer économétriquement les élasticités de production associées à chaque facteur de production pour ensuite dériver l�apport de la PGF. Les avantages d�une telle procédure sont nombreux, tout d�abord, il n�est plus nécessaire de supposer l�existence d�une fonction de production à rendements constants, de même il devient possible de considérer les distorsions inhérentes aux marchés des facteurs, ainsi que d�introduire d�autres éléments explicatifs de l�accumulation et de la croissance. En termes de résultats, nous constatons premièrement que le changement institutionnel influence négativement la croissance à travers son effet sur le secteur pétrolier. Deuxièmement, la PGF ou l�efficacité avec laquelle les facteurs sont utilisés, devient de plus en plus importante en tant qu�élément explicatif de la croissance au Venezuela, notamment à partir des années quatre-vingt-dix. La suite du présent document s�organise en quatre grandes sections. En premier lieu nous portons notre attention sur la croissance au Venezuela au cours des soixante dernières années, en considérant tout particulièrement les concepts de base du changement institutionnel. Dans la deuxième section nous nous intéressons aux fondements théoriques et aux limitations empiriques du calcul de la productivité des facteurs. Dans la troisième section nous abordons le calcul comptable ainsi que l�estimation économétrique de la PGF. Pour terminer nous analysons les principaux déterminants de la croissance et l�importance relative de la productivité des facteurs au Venezuela.

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Le cas du Venezuela (1942-2002)

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I. La croissance et le changement institutionnel au Venezuela Tout d�abord nous revoyons quelques concepts de base de l�économie de la croissance et de l�économie institutionnelle en essayant de les intégrer dans l�analyse historique des changements sociopolitiques survenus au pays au cours des soixante dernières années. Ensuite nous décrivons l�évolution de l�économie vénézuélienne en fonction des changements ainsi identifiés.

A. Concepts de base et évolution institutionnelle La littérature récente sur les déterminants de la croissance au niveau international centre le débat au tour de trois éléments susceptibles d�influencer significativement l�activité productive de long terme (Rodrik et al, 2002, Dollar et Kraay, 2003, entre autres), à savoir, la qualité des institutions, l�intégration économique et l�emplacement géographique. En ce qui concerne les pays riches en ressources naturelles, d�autres mécanismes explicatifs de la croissance sont également identifiés. Tout d�abord Isham et al (2003) signalent que l�existence de ressources naturelles abondantes sous le contrôle de l�Etat peut affecter négativement la qualité des institutions à travers l�effet de la maximisation des rentes, à savoir, les bénéfices provenant de la vente dans les marchés internationaux d�un facteur non produit. Dans ce cas la propension à taxer les individus est moins importante, ce qui se traduit d�un côté, en un affaiblissement des moyens de contrôle des populations et d�un autre côté en une perte d�incitation des individus à surveiller et contrôler l�utilisation des fonds publics. De même, Collier et Hoffler (2002) font référence au danger de guerre civile induit par l�existence de revenus issus de l�exploitation publique de matières premières. Finalement Sala-i-Martin et Subramanian (2003) abordent le problème de la variabilité des prix internationaux et la sur-appréciation du taux de change comme éléments défavorisant la croissance dans les pays riches en ressources naturelles. En relation à l�importance des institutions, North (1981) suppose que les décisions économiques et politiques des individus dépendent de leur idéologie ainsi que des incitations créées par les institutions existantes. Le changement des institutions dépend à son tour des variations dans les prix relatifs et les préférences, qui changent elles-mêmes, en fonction des institutions déjà en place. Ainsi les changements institutionnels n�entraînent pas, a priori, des institutions plus efficientes, en termes de promotion de la croissance économique, étant donné qu�elles sont au service des groupes possédant le plus grand pouvoir de négociation (North, 1990). Dans ce sens, les institutions peuvent être définies, d�après North (1990), comme un ensemble de contraintes formelles (constitutions, lois, droits de propriété) et informelles (coutumes, traditions, codes de conduite) établies par les individus pour réglementer leurs rapports politiques économiques et sociaux. Elles sont créées afin d�ordonner et réduire l�incertitude dans les échanges. De même, il définit l�idéologie comme un ensemble de croyances subjectives, partagées par un groupe d�individus, utilisées pour interpréter l�entourage politique économique et social.

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Le cas du Venezuela (1942-2002)

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Les institutions changent alors, à cause de variations dans les prix relatifs et de modifications dans les préférences des individus. D�une part, les changements dans les prix relatifs sont provoqués par l�action des individus et des organisations qui essayent de profiter des opportunités créées par les institutions. D�autre part, les préférences sont modifiées grâce aux changements idéologiques dérivés des variations des prix relatifs et de l�accumulation de nouvelles connaissances difficiles à interpréter avec les idéologies existantes. A cet effet, Rodrik et al (2002) signalent que l�accumulation des effets des politiques économiques peut être assimilée aux variations du stock de qualité institutionnelle. Ainsi la variabilité de la qualité institutionnelle serait approximée par des indicateurs de résultat de la politique économique tels que l�inflation, le taux de change, l�endettement ou le taux de protection. En d�autres termes, des mesures économiques bien-fondés se matérialisent dans des institutions de bonne qualité favorisant la croissance, notamment à travers le respect des droits de propriété et la réduction des coûts de transaction (inefficience, corruption). Vera (2003) fait également référence à l�importance de l�inégalité dans la distribution des revenus comme facteur déterminant des changements institutionnels vécus en Amérique Latine et particulièrement au Venezuela, ainsi les bouleversements institutionnels seraient induits par des changements idéologiques issus probablement des inégalités provoquées par l�adoption de mauvaises politiques économiques. Selon Balza (2002), dans l�histoire récente du Venezuela deux grands moments de rupture et de changement institutionnel, tels que définis par North, sont identifiables:

- La fin de la dictature militaire et le début de la démocratie en 1958. - La tentative de coup d�état de 1992 et la remise en cause des institutions.

Le 23 janvier 1958 fût renversée la dernière des dictatures militaires à diriger le pays1, grâce au changement idéologique majeur issu de l�accumulation de valeurs démocratiques incompatibles avec le régime autocratique en place. Ceci entraîna la réalisation d�élections libres et l�adoption d�une nouvelle constitution en 1961. Pendant plus de trente ans le Venezuela vécut une période de grande stabilité institutionnelle caractérisée par l�alternance au pouvoir des deux principaux partis politiques et le respect de la constitution par les militaires. Cependant le 4 février 1992 une tentative de coup d�état menée par le Commandant Hugo Chávez bouleversa les institutions en place. Six ans plus tard, en 1998, Chávez est élu démocratiquement président de la république et adopte une nouvelle constitution. En termes d�évolution institutionnelle et démocratique le graphique 1 illustre les changements survenus au pays tels que mesurés par la variable DEMOC du Polity IV Project2 (Marshall et Jaggers, 2002).

1 Depuis son indépendance en 1810 le Venezuela avait été gouverné par des régimes militaires. 2 Cette variable permet d�intégrer dans un seul indicateur trois aspects fondamentaux de l�institutionalité démocratique des régimes politiques, à savoir, l�existence d�institutions à travers lesquelles les individus peuvent exprimer leur préférences en termes de politiques et de dirigeants; l�existence de contraintes institutionnelles limitant le pouvoir de l�exécutif; l�existence de libertés individuelles, notamment politiques. L�indicateur prend des valeurs allant de 0 (dictature) à 10 (démocratie totale).

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Le cas du Venezuela (1942-2002)

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Graphique 1. Evolution institutionnelle et démocratique (1942-2002)

0

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

19421944

1946 19481950

19521954

19561958 1960

19621964 1966

19681970

19721974

1976 19781980

1982 19841986

19881990

19921994

19961998

20002002

1942-1957 1958-1992 1993-2002 Nous constatons l�importance des changements institutionnels identifiés auparavant, notons également à partir de 1992 l�affaiblissement continuel de la démocratie et tout particulièrement la diminution de l�indice en 1998, année d�adoption d�une nouvelle constitution. Voyons maintenant quel a été le comportement des principaux agrégats macroéconomiques décrivant l�évolution du processus de croissance, face aux deux grands changements institutionnels survenus au Venezuela au cours des six dernières décennies.

B. Quelques faits stylisés: une croissance centrée sur la rente pétrolière

Graphique 2. Produit Intérieur Brut réel (1942-2002)

0

5,000

10,000

15,000

20,000

25,000

30,000

35,000

40,000

1942

1944

1946

1948

1950

1952

1954

1956

1958

1960

1962

1964

1966

1968

1970

1972

1974

1976

1978

1980

1982

1984

1986

1988

1990

1992

1994

1996

1998

2000

2002

Années

Bol

ivar

s rée

ls (1

984)

1942-1957 1958-1992 1993-2002

32,781

21,758

Sources: Banco Central de Venezuela, Baptista (1997), Instituto Nacional de Estadísticas, calculs de l�auteur

Source: Polity IV Project, 2002

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Le cas du Venezuela (1942-2002)

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Le PIB réel (graphique 2) croît rapidement durant la période de la dictature militaire (1942-1957), atteignant une valeur maximale de 32.781 Bs réels en 1957. A partir de l�instauration de la démocratie en 1958 et jusqu�en 1977 une certaine stagnation de la production per capita est observée, encore plus grave, de 1978 à 1989 l�activité économique registre une chute très marquée, cette chute est suivie de quelques périodes de faible récupération pour ensuite retomber, en 2002, au seuil de 21.758 Bs réels, comparable seulement aux niveaux d�activité registrés vers la fin des années quarante.

Graphique 3. Evolution du PIB réel selon le secteur d�activité (1942-2002)3

0%

20%

40%

60%

80%

100%

120%

140%

160%

180%

1942

1944

1946

1948

1950

1952

1954

1956

1958

1960

1962

1964

1966

1968

1970

1972

1974

1976

1978

1980

1982

1984

1986

1988

1990

1992

1994

1996

1998

2000

2002

Années

Pour

cent

age

Secteur non-pétrolier Secteur pétrolier

1942-1957 1958-1992 1993-2002

1970

1985

1978

En désagrégeant l�évolution du PIB selon le secteur d�activité (graphique 3), nous observons une croissance plus rapide du secteur pétrolier par rapport au secteur non pétrolier durant la décennie des années quarante et cinquante. En ce qui concerne la croissance du secteur pétrolier, celle-ci s�arrête en 1970, année de création de la première entreprise d�Etat dévouée à l�exploitation du pétrole4, pour décroître de façon continue jusqu�en 1985, cette année-là le taux de croissance du secteur par rapport à l�année 1942 n�est que de 40% alors que quinze ans auparavant en 1970 ce même taux avait été de 162%. En relation au secteur non pétrolier la diminution de l�activité n�est significative qu�à partir de 1978, cette contraction, provoquée en partie par les problèmes budgétaires du gouvernement central issus de la hausse des taux d�intérêt internationaux et de la chute du prix du pétrole, semble s�accélérer pendant la période d�instabilité institutionnelle qui a suivi la tentative de coup d�état de 1992, néanmoins elle demeure de loin inférieure à celle observée dans le secteur pétrolier.

3 Les variables son transformées en logarithmes et normalisées à zéro en 1942 4 L�industrie pétrolière sera ultérieurement nationalisée en 1973.

Sources: Banco Central de Venezuela, Baptista (1997), Instituto Nacional de Estadísticas, calculs de l�auteur

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Le cas du Venezuela (1942-2002)

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Il semble évident que la diminution du PIB réel, observée à partir de la fin des années soixante-dix (graphique 2), a été amorcée au début de la décennie par la contraction continuelle du secteur pétrolier et le ralentissement postérieur de l�activité productive dans le secteur non pétrolier. De même, nous constatons que cette contraction des activités liées au pétrole a entraîné une réduction progressive de sa participation dans la production totale (tableau 1), passant de 48% pour la période 1942-1957 à 28% pour la période 1993-2002.

Tableau 1. Participation sectorielle dans le PIB Période Secteur non-pétrolier Secteur pétrolier

1942-1957 52% 48%1958-1992 65% 35%1993-2002 72% 28%

En regardant plus en détail l�évolution du PIB réel du secteur pétrolier, particulièrement ce qui concerne la production de pétrole en millions de barils par jour (MBJ) et les fluctuations du prix réel du pétrole (graphique 4), nous observons que la réduction progressive de la production dans le secteur, débutée en 1970, est suivie de très près par une augmentation soutenue de son prix dans les marchés internationaux; ce qui correspond bien aux politiques de défense du prix du pétrole menées par les pays membres l�Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole (OPEP) depuis la création de l�organisme en 19605.

Graphique 4. Evolution de la production et du prix réel du pétrole (1942-2002)

-50%

0%

50%

100%

150%

200%

1942

1944

1946

1948

1950

1952

1954

1956

1958

1960

1962

1964

1966

1968

1970

1972

1974

1976

1978

1980

1982

1984

1986

1988

1990

1992

1994

1996

1998

2000

2002

Années

Pour

cent

age

Production de pétrole (MBJ) Prix du pétrole

1942-1957 1958-1992 1993-2002

1970

5 Le Venezuela est l�un des cinq membres fondateurs de l�OPEP.

Sources: Banco Central de Venezuela, Baptista (1997), Instituto Nacional de Estadísticas, calculs de l�auteur

Sources: Banco Central de Venezuela, Baptista (1997), Ministerio de Energía y Minas, calculs de l�auteur

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Le cas du Venezuela (1942-2002)

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Un autre agrégat macroéconomique étroitement lié aux fluctuations du prix du pétrole est le taux de change réel. En ce qui concerne les régimes de taux de change mis en place au pays, le Venezuela adopta un régime fixe qui demeura assez stable jusqu�en 19826, à partir de ce moment des dévaluations continuelles se succédèrent et des régimes plus ou moins flexibles furent partiellement suivis (crawling peg, flexibilité parfaite, flexibilité administrée, contrôle de change). Dans ce sens, à partir du graphique 5, nous constatons une première dépréciation du taux de change réel au début des années soixante lors d�une réduction considérable du prix du pétrole, ainsi qu�une certaine stabilisation, voir même une appréciation de la monnaie nationale, lors de la forte hausse des prix au milieu des années soixante-dix. A partir de 1981, la chute continuelle du prix mondial du pétrole et la subséquente réduction des recettes fiscales poussa les autorités à dévaluer continuellement la monnaie nationale jusqu�au début des années quatre-vingt-dix. Par opposition, la période de plus grande instabilité politique est caractérisée par une appréciation réelle du bolivar, provoquée probablement par les mesures visant à réduire l�inflation, alors que le prix du pétrole ne cessait de décroître, en 1998 ce dernier atteint un niveau réel semblable à celui de 1942.

Graphique 5. Evolution du taux de change réel et du prix réel du pétrole (1942-2002)

-50%

0%

50%

100%

150%

200%

1942

1944

1946

1948

1950

1952

1954

1956

1958

1960

1962

1964

1966

1968

1970

1972

1974

1976

1978

1980

1982

1984

1986

1988

1990

1992

1994

1996

1998

2000

2002

Années

Pou

rcen

tage

Prix du pétrole Taux de change réel

1942-1957 1958-1992 1993-2002

1981

Portons maintenant notre attention sur le comportement des éléments structurels qui expliquent la croissance: les facteurs de production. L�évolution du stock de capital (graphique 6), de 1942 à 1957, est caractérisée par une forte croissance dans les secteurs pétroliers et non pétroliers. A partir de 1960 nous 6 En 1936 le taux de change nominal était de 3,93 Bs/US$, en 1981 il était de 4,30 Bs/US$, actuellement il se situe à environ 1920 Bs/US$

Sources: Banco Central de Venezuela, Baptista (1997), Ministerio de Energía y Minas, calculs de l�auteur

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assistons au déclin progressif du capital pétrolier, atteignant un minimum de 376 bolivars réels en 1978, cependant cette tendance à la baisse est renversée au début des années quatre-vingt, par une assez forte récupération du niveau d�accumulation. En relation au stock de capital du secteur non pétrolier, celui-ci croît de façon soutenue jusqu�en 1981 où il registre une valeur de 9.444 Bs réels; malheureusement au-delà de cette année, le stock décroît considérablement en se réduisant presque de moitié par rapport au sommet atteint en 1981, de plus, cette détérioration semble s�accélérer durant la période de plus grande instabilité sociopolitique allant de 1992 à 2002.

Graphique 6. Stock de capital selon le secteur d�activité (1942-2002)

0

1,000

2,000

3,000

4,000

5,000

6,000

7,000

8,000

9,000

10,000

1942

1944

1946

1948

1950

1952

1954

1956

1958

1960

1962

1964

1966

1968

1970

1972

1974

1976

1978

1980

1982

1984

1986

1988

1990

1992

1994

1996

1998

2000

2002

Années

Bol

ivar

s rée

ls (1

984)

0

200

400

600

800

1,000

1,200

1,400

Bolivars réels (1984)

Secteur non-pétrolier Secteur pétrolier

1942-1957 1958-1992 1993-2002

376

9,444

A partir de la fin de la dictature militaire, l�accumulation de capital dans le secteur pétrolier semble évoluer de façon contra cyclique par rapport à celle du secteur non pétrolier, cette asymétrie est d�autant plus visible lorsque l�on s�intéresse à la participation sectorielle des deux activités dans le processus d�accumulation (tableau 2). En effet, la part du secteur pétrolier diminue en moyenne de seize points de pourcentage durant la période démocratique par rapport à la période de dictature, par contre elle accroît son importance à partir de 1992, pour arriver à représenter en moyenne 14% du stock total de capital physique.

Tableau 2. Participation sectorielle dans le stock de capital physique

Période Secteur non-pétrolier Secteur pétrolier

1942-1957 75% 25%1958-1992 91% 9%1993-2002 86% 14%

Sources: Banco Central de Venezuela, Baptista (1997), Instituto Nacional de Estadísticas, calculs de l�auteur

Sources: Banco Central de Venezuela, Baptista (1997), Instituto Nacional de Estadísticas, calculs de l�auteur

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En ce qui concerne l�évolution du facteur travail (graphique 7), d�une part, le nombre de travailleurs du secteur non pétrolier croît continuellement à travers les trois grandes périodes de changement institutionnel et d�autre part, le travail dans le secteur pétrole présente une tendance décroissante allant de la fin des années quarante jusqu�au milieu des années soixante-dix.

Graphique 7. Stock de travail selon le secteur d�activité (1942-2002)

0

0.05

0.1

0.15

0.2

0.25

0.3

0.35

0.4

0.45

1942

1944

1946

1948

1950

1952

1954

1956

1958

1960

1962

1964

1966

1968

1970

1972

1974

1976

1978

1980

1982

1984

1986

1988

1990

1992

1994

1996

1998

2000

2002

Années

Tra

vaill

eurs

par

hab

itan

0

0.002

0.004

0.006

0.008

0.01

0.012

0.014

Travailleurs par habitan

Secteur non-pétrolier Secteur pétrolier

1942-1957 1958-1992 1993-2002

De même, en termes de participation sectorielle dans le stock de travail (tableau 3), la partie attribuée au secteur pétrolier diminue progressivement jusqu�à atteindre en moyenne 0.7% des travailleurs pour la période 1993-2002.

Tableau 3. Participation sectorielle dans le stock de travail

Période Secteur non-pétrolier Secteur pétrolier

1942-1957 97.3% 2.7%1958-1992 99.0% 1.0%1993-2002 99.3% 0.7%

Sources: Banco Central de Venezuela, Baptista (1997), Instituto Nacional de Estadísticas, calculs de l�auteur

Sources: Banco Central de Venezuela, Baptista (1997), Instituto Nacional de Estadísticas, calculs de l�auteur

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En règles générales, l�évolution de la croissance au Venezuela durant la période 1942-2002 est caractérisée par les éléments suivants:

- Augmentation soutenue des activités dans le secteur non pétrolier de 1942 jusqu�à la récession de la fin des années soixante-dix.

- Maximisation de la rente pétrolière basée sur la défense des prix

internationaux et la dépréciation de la monnaie nationale à partir de l�instauration de la démocratie et de l�adhésion du pays à l�OPEP, tel qu�illustré par la diminution observée dans le niveau de production de pétrole.

- Détérioration accélérée de l�activité productive après les événements

sociopolitiques de 1992. En vue du cadre institutionnel changeant et des implications, a priori, observées sur l�ensemble de l�économie, nous introduisons dans l�analyse cette dimension sociopolitique afin d�en déduire les effets sur la croissance. Dans la prochaine section notre démarche s�amorce par la formalisation théorique de la PGF.

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II. La Productivité Globale des Facteurs En premier lieu, un regard très rapide sera porté sur les origines théoriques et les limitations pratiques concernant le concept de productivité des facteurs; ensuite les méthodes de calcul seront présentées. Cette section se termine par un survol de la littérature récente. A. Origines et critiques

La Productivité Globale des Facteurs se base, sous sa forme la plus élémentaire, sur les fondements conceptuels derrière l�identité comptable du Produit Intérieur Brut (PIB). Introduite d�après Griliches (1995), par Copeland en 1937 dans son ouvrage ´´Concepts of National Income´´ , puis estimée à l�appui d�une fonction de production de type Cobb-Douglas (avec des pondérations fixes) par Tinbergen en 1942. Il a fallu attendre Solow (1957) pour qu�elle soit théoriquement formalisée. En effet, en partant d�une fonction de production générale à rendements d�échelle constats, telle que :

( ), ,t t t tQ F A K L= (1)

tQ = quantité produite à la période t

tA = technologie à la période t

tK = stock de capital à la période t

tL = quantité de travail à la période t En supposant également que la technologie est exogène (neutre au sens de Hicks), l�équation (1) devient :

( ),t t t tQ A F K L= (2) Puis en la différenciant par rapport au logarithme, on trouve :

t tK t L t

t t t t t t

F K F LQ A K LQ A Q K Q L

= + +

! ! ! !

(3)

Le taux de croissance de la production n�est rien d�autre que la somme des taux de croissance des facteurs, pondérés par leurs élasticités de production, et du taux de croissance de la technologie. Cependant ces élasticités ne sont observables que si l�on suppose que les facteurs sont rémunérés à leur productivité marginale:

tKF = productivité marginale du capital = t

t

rp

tLF = productivité marginale du travail = t

t

wp

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Dans ce cas l�équation (3) devient :

t tK Lt t t t

Q A K LS SQ A K L

= + +

! ! ! !

(4)

tKS = part du capital dans le revenu total

tLS = part du travail dans le revenu total Ainsi le résidu de Solow ou le taux de croissance de la PGF est donné par :

t tt K Lt t t

Q K LR S SQ K L

= − −

! ! !

(5)

La croissance de la production qui n�est pas expliquée par l�accroissement des facteurs de production, à savoir, le déplacement de la fonction de production pour un niveau donné d�intrants. Cependant il ne s�agit là que d�une approche théorique, en réalité, lors des applications empiriques plusieurs sont les difficultés rencontrées et nombreuses sont les critiques portées sur la méthodologie de calcul, les hypothèses de base et l�interprétation des résultats. L�une des principales critiques portées sur le calcul de la productivité globale des facteurs repose sur ´´l�impureté´´ de la mesure obtenue du progrès technique, ainsi Abramovitz (1956) en faisant allusion à la PGF parle de ´´mesure de notre ignorance´´. Les erreurs de mesure dans les séries du travail et surtout dans celles du stock de capital physique, l�omission d�éléments susceptibles d�influencer la qualité et la productivité des facteurs tels que l�éducation, la nutrition, la recherche et développement ont soulevé tout un ensemble de mises en garde à l�égard de l�utilisation du résidu de Solow pour étudier le rôle du progrès technologique dans le processus de croissance. Un des problèmes soulevés par Jorgenson et Griliches (1967) est celui de l�agrégation des facteurs de production, l�impossibilité de distinguer entre différents types ou qualités de capital et de travail entraîne une surestimation du progrès technologique dans le cas où les facteurs employés deviennent de plus en plus performants (de meilleure qualité). Barro (1998) montre également que des changements quantitatifs dans les types de facteurs, par exemple une augmentation du travail industriel par rapport au travail agricole, entraînent des variations dans les prix relatifs de ces facteurs et par conséquent des différences dans les taux de participation de ces derniers dans la production totale, ainsi la PGF calculée à partir de l�équation (5) serait supérieure à celle qui tiendrait compte des changements factoriels antérieurement mentionnés. De même l�hypothèse de rendements d�échelles constants, de par son aspect peu réaliste, a provoqué la remise en cause de l�approche de Solow. Cependant Hulten (1973) remarque que cette hypothèse n�est ni restrictive ni indispensable dans le calcul de la PGF, en effet les rendements d�échelle constants ne sont nécessaires que si l�on ne

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dispose pas d�information suffisante pour obtenir le taux de rendement du capital7. Ainsi, si le taux de rendement du capital est calculé par une autre méthode (par exemple en employant une méthode économétrique), le résidu peut être dérivé sans imposer de restrictions sur les participations des facteurs. Une autre critique portée sur le calcul de la PGF vise le lien existant entre la rémunération des facteurs et leur productivité marginale. Hulten (2000) signale qu�en cas de concurrence imparfaite, et donc avec des prix supérieurs aux coûts marginaux, le calcul du progrès technique, par l�approche comptable classique, est biaisé. Cependant pour Barro (1998) ce problème peut être résolut de deux façons, soit en estimant économétriquement l�équation (4), les coefficients obtenus pour chaque taux de croissance des facteurs correspondraient directement aux

tKS ettLS , sans avoir besoin de

supposer l�égalité entre prix des facteurs et coûts marginaux; soit en employant l�approche duale de la comptabilité de la croissance. A cet effet, l�approche duale, introduite par Jorgenson et Griliches (1967) explique l�évolution du progrès technique par des changements dans les prix des facteurs, sans supposer de relation prix-coûts marginaux. Ainsi en introduisant le prix des facteurs, l�équation (4) devient :

t tK Lt t t t t

Q r K w LS SQ r K w L

= + + +

! ! ! ! !

(4�)

En réarrangeant les termes :

't t t tt K L K L

t t t t t

Q K L r wR S S S SQ K L r w

= − − = +

! ! ! ! !

(5�)

La PGF est donnée par l�accroissement du prix des facteurs pondéré par la part de ces derniers dans le revenu total. En d�autres termes, une augmentation du prix des facteurs n�est réalisable que si la production s�accroît en utilisant la même quantité d�inputs. Malgré les critiques et les limitations, le concept de productivité globale des facteurs garde une place importante dans l�analyse de la croissance de long terme. Dans la prochaine section nous allons nous intéresser plus en détail aux façons de la calculer et aux limitations pratiques rencontrées.

7 Dans ce cas le taux de rendement du capital est calculé de façon résiduelle = 1 � taux de rendement du travail.

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B. Méthodes de Calcul La PGF peut être approximée par deux méthodes distinctes: l�approche comptable et l�estimation économétrique. L�approche comptable est centrée sur le calcul des relations (5) ou (5�), notons que dans le cas de l�équation (5) les hypothèses sur les rendements et l�égalisation des prix des facteurs aux coûts marginaux supposent l�adoption d�une fonction de production à rendements constants de type Cobb-Douglas. La production est représentée par le PIB ou la Valeur Ajoutée, le facteur travail par la force de travail ou le nombre d�heures travaillées, et le facteur capital par une mesure réelle du stock de capital. A ce niveau, la principale difficulté rencontrée réside dans la façon de mesurer les facteurs. En relation au capital, une mesure idéale de celui-ci devrait porter sur le flux, en heures, de services employés dans le processus de production. Cependant, puisque généralement ce type d�information n�est pas disponible au niveau agrégé, une approche alternative basée sur l�évolution de la formation brute de capital fixe est employée, il s�agit de la méthode des inventaires permanents. Soit :

1t t t tK K I K+ = + − ∂ (6)

tK est le stock de capital physique au temps t, tI est l�investissement brut au temps t et ∂ représente le taux de dépréciation du capital. Après quelques manipulations l�équation (6) peut s�écrire :

0 01 gK Ig

+= + ∂ (7)

Le stock de capital initial, à un moment donné dans le temps, est fonction du taux de croissance de l�investissement (g), du taux de dépréciation et de l�investissement brut initial. A l�aide des équations (6) et (7) il est donc possible de mesurer le stock de capital dans le temps, cette méthode suppose néanmoins, le choix parfois difficile, d�un taux de dépréciation ainsi que l�adoption d�un taux d�investissement constant8. De même elle n�intègre pas les changements qualitatifs du capital. En ce qui concerne le facteur travail, celui-ci devrait être mesuré en termes d�heures totales travaillées pour une période donnée, mais une fois de plus le manque d�information statistique, surtout dans le cas de PED, oblige à utiliser une proxy telle que la force de travail. Par ailleurs, la méthode économétrique porte sur l�estimation, en fonction de l�information disponible, des relations présentées en (4) ou (4�). Le progrès technique

8 Généralement il s�agit du taux d�investissement moyen de la période d�étude.

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est dérivé, soit à partir des coefficients de l�équation estimée, ceci permet d�avoir l�évolution de la technologie par période, soit en introduisant une constante telle que suggérée par Barro (1998), dans ce cas on obtient une mesure moyenne de la PGF. Le grand avantage de l�estimation économétrique est la flexibilisation des hypothèses. Tout d�abord il n�est plus nécessaire de supposer l�existence d�une relation pré-établie entre le prix des facteurs et leur coût marginal, de même les rendements peuvent être croissants, décroissants ou constants, ce qui permet de ne pas avoir à choisir, dans le cas de la procédure de Solow, une fonction de production spécifique ou en tout cas de choisir une fonction ayant une forme plus flexible9. Cependant des problèmes liés aux erreurs de mesure de certains agrégats, à la simultanéité des variables et à leur non stationnarité posent des contraintes assez significatives sur les procédures d�estimation. Passons maintenant en revue quelques travaux portant sur l�estimation de la PGF. C. Revue de la littérature

Nous nous intéressons à des travaux portant sur l�estimation de la PGF au niveau international (Easterly et Levine, 2001), au niveau régional (Fajnzylber et Lederman, 1998) et au niveau national (Clemente, 2002 et Rodríguez, 2004). Easterly et Levine (2001) portent leur attention sur l�importance relative de la PGF et l�accumulation de facteurs, comme le capital physique et humain, dans le processus de croissance de long terme au niveau international, à travers le calcul de la productivité par la méthode comptable et l�estimation de la croissance en coupe transversale par la méthode généralisée des moments (GMM). Tout d�abord ils signalent que la productivité des facteurs, et non pas seulement l�accumulation de ceux-ci, explique la plupart des divergences observées entre niveaux et taux de croissance du PIB par tête de différents pays. De même ils associent cette divergence des taux de croissance à l�une des hypothèses de base des modèles de croissance endogène: l�existence de rendements non décroissants du capital. D�autre part, les auteurs observent une forte volatilité des taux de croissance de la production par habitant alors que les stocks de capital semblent croître de façon soutenue dans le temps, cette évidence empirique les porte à rejeter l�adoption de modèles de croissance dont la convergence vers l�état stationnaire est assurée par l�accumulation de capital, notamment le modèle néoclassique de Solow. Par ailleurs ils démontrent que l�accumulation de facteurs a tendance à avoir lieu dans des secteurs spécifiques, tant au niveau mondial, comme au niveau des pays et même au niveau des groupes ethniques, provoquant une très forte concentration des activités productives. Pour terminer ils font référence à l�importance des institutions et des politiques économiques pour accroître l�efficacité des facteurs de production et ainsi accélérer la croissance de long terme. Fajnzylber et Lederman (1998) s�intéressent aux effets des réformes économiques sur la productivité globale des facteurs de dix-huit pays d�Amérique Latine et des Caraïbes de 1950 à 1995. En effet, ils associent les épisodes de réforme économique à des périodes de plus grande ouverture telle que définie par Sachs et Warner (1995), ainsi

9 Par exemple une forme translogarithmique.

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deux grandes périodes de réforme sont identifiées: la décennie des années cinquante et le début des années quatre-vingt-dix. Les auteurs calculent l�évolution de la PGF en employant l�approche comptable et l�estimation économétrique d�un modèle en panel à effets fixes; dans le cas de l�approche comptable ils emploient une fonction de production de type Cobb-Douglas à rendements constants avec une participation du capital égale à 0,4. Leur principal résultat fait référence à une expansion de la PGF pendant les périodes de réforme et une contraction de celle-ci dans le cas contraire. En ce qui concerne le Venezuela les auteurs estiment un taux de croissance de la PGF proche à 1,8% durant les épisodes d�ouverture et -1,3% pendant les périodes de plus grande autarcie. De même, ils calculent, dans le cas du Venezuela, une croissance de la PGF de -0,3% pour l�ensemble de la période d�étude. Clemente (2002) présente une analyse sectorielle de la PGF au Venezuela dans un contexte de compétitivité et insertion internationale durant la période 1950-2000. Il emploie la méthode comptable en adoptant une fonction de production à rendements constants de type Cobb-Douglas, pour calculer premièrement, la productivité des facteurs dans la production totale et deuxièmement la productivité par secteur d�activité (pétrolier et non pétrolier). Dans le cas du calcul de la PGF au niveau agrégé l�auteur utilise des taux de participation moyens de 0,62% pour le capital physique et de 0,38% pour le travail. Il constate une assez forte réduction de la PGF à partir du début des années soixante-dix (-2,87%) et une participation négative de celle-ci dans la croissance. Lorsqu�il s�intéresse à la productivité sectorielle, l�auteur observe que la chute de cette dernière est d�autant plus marquée dans le secteur pétrole, avec un taux de croissance moyen minimum de -7,93% pour la période 1980-1989; en ce qui concerne le secteur non pétrolier la diminution de la PGF ne s�amorce qu�à partir des années quatre-vingt avec des taux moyens proches à -1,00%. Notons que les taux de participation factorielle employés sont respectivement de 0,92% et 0,08% pour le capital physique et le travail du secteur pétrolier, alors qu�ils représentent 0,54% et 0,46% pour le capital et le travail du secteur non pétrolier. L�auteur associe ces importantes contractions de la PGF aux politiques de maximisation de la rente pétrolière menées au sein de l�OPEP et à la chute de l�investissement privé. Au niveau latino-américain une réduction de la contribution de la PGF à la croissance est observée du début des années soixante jusqu�à la fin des années quatre-vingt, avec notamment des taux de croissance négatifs de la productivité dans la plupart des pays de la région de 1980 à 198910. La décennie des années quatre-vingt-dix représente une période de récupération en termes de productivité pour l�ensemble des pays sud-américains à l�exception du Venezuela, seul pays à afficher systématiquement des taux de croissance négatifs de la PGF de 1960 à 1990. Rodríguez (2004) analyse méthodologiquement et empiriquement les causes du faible niveau de croissance registré au Venezuela de 1950 à 1998. En termes de méthodologie deux raisons sont évoquées, premièrement les divergences entre les différentes sources d�information statistique en ce qui concerne l�évolution du PIB vénézuélien; à cet effet l�auteur suggère l�utilisation exclusive des données basées sur les calculs de la Banque Centrale du Venezuela. Deuxièmement, l�auteur signale que l�utilisation de la PGF agrégée pour évaluer la performance du pays donne une vision biaisée à la baisse de

10 Le Chili et la Colombie sont les seuls pays à avoir enregistré des taux de croissance positifs de la PGF.

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celle-ci, à cause des politiques de défense des prix du pétrole qui ont eut un impact négatif sur la production du secteur pétrolier; ainsi il serait préférable d�utiliser la PGF du secteur non pétrolier pour analyser convenablement l�évolution de la croissance. En ce qui concerne l�approche empirique, la PGF agrégée et sa décomposition sectorielle est calculé par la méthode comptable pour les périodes 1950-1968, 1968-1984 et 1984-199811. Les résultats indiquent une contraction de la PGF du secteur non pétrolier de 1968 à 1984 suivie d�une expansion jusqu�en 1998. Par contre la productivité dans le secteur pétrolier diminue continuellement de 1968 à 1984. Ainsi en considérant l�évolution de la PGF du secteur non pétrolier, la performance du Venezuela, bien que toujours pauvre, est davantage similaire à celle des autres pays de la région. De façon générale les travaux portant sur le calcul de la PGF sont basés sur l�adoption d`hypothèses assez restrictives telle que, par exemple, l�existence de concurrence parfaite dans les marchés des facteurs ou le choix d�une forme fonctionnelle déterminée. De même, en ce qui concerne l�utilisation de méthodes économétriques, ces dernières ne sont employées que dans le cas d�études en coupe transversale portant sur plusieurs pays. Dans le cas du Venezuela, l�utilisation exclusive de l�approche comptable pour mesurer l`évolution de la PGF impose des limitations considérables à l�interprétation et à la validation des résultats ainsi obtenus. Par ailleurs, la formalisation des grands changements survenus au pays, tant au niveau structurel comme au niveau institutionnel, semble également manquer dans les travaux empiriques essayant d�expliquer l�évolution de la productivité et de la croissance. Nous essayons d�intégrer et quantifier ces éléments dans la prochaine section. 11 En 1968 et 1984 la Banque Centrale du Venezuela a changé l�année base des séries statistiques.

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III. L�estimation de la productivité globale des facteurs Nous allons tout d�abord introduire le modèle et les données employées, pour ensuite estimer le progrès technique à l�aide des deux méthodes déjà évoquées. Nous vérifions par la suite la cohérence de notre démarche en comparant nos résultats à ceux d�autres auteurs.

A. Le modèle et les données Le modèle employé dans le calcul de la PGF est centré sur la décomposition multisectorielle de la croissance telle qu�abordée par Azam (1989) et Barro (1998). Soit tQ le produit intérieur brut à la période t, il se désagrège en deux composantes, le produit du secteur pétrolier à la période t, tQP et le produit du secteur non pétrolier à la période t, tQNP .

t t tQ QNP QP= + (8)

Dérivons cette expression par rapport au temps :

Q QNP QP= +! ! !

(8�)

Divisons par tQ et multiplions des deux côtés par t

t

QNPQNP

et t

t

QPQP

:

t t

t t t t t

QNP QPQ QNP QPQ Q QNP Q QP

= ⋅ + ⋅

! ! !

(9)

La variation de la production au niveau agrégé n�est rien d�autre que la somme pondérée des variations de productions sectorielles. Supposons maintenant que la production dans chaque secteur est définie par :

( ): , ,t t t tQNP F ANP KNP LNP (10)

( ): , ,t t t tQP H AP KP LP (11) F et H sont des fonctions de production spécifiques à chaque secteur. Le progrès technique sectoriel, supposé être neutre au sens de Hicks12, est donné par ANPt et APt. KNPt et LNPt représentent les quantités de capital et travail employées, au temps t, dans le secteur non pétrolier. KPt et LPt sont le capital et le travail utilisés, au temps t, dans le secteur pétrole.

12 Voir section II.

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Calculons les dérivées logarithmiques par rapport au temps des expressions (10) et (11):

t t t

t t tt t t tANP KNP LNP

t t t t t t t

QNP ANP KNP LNPANP KNP LNPF F FQNP QNP ANP QNP KNP QNP LNP

= + +

! ! ! !

(10�)

t t t

t t tt t t tAP KP LP

t t t t t t t

QP AP KP LPAP KP LPH H HQP QP AP QP KP QP LP

= + +

! ! ! !

(11�)

tXF , X=ANP, KNP,LNP, représentent les productivités marginales du secteur non pétrolier et

tYH , Y=AP, KP,LP, celles du secteur pétrolier. Etant donné que la technologie est neutre au sens de Hicks, nous pouvons les réécrire :

t t

t t tt t tKNP LNP

t t t t t t

QNP KNP LNPANP KNP LNPF FQNP ANP QNP KNP QNP LNP

= + +

! ! ! !

(10��)

t t

t t tt t tKP LP

t t t t t t

QP KP LPAP KP LPH HQP AP QP KP QP LP

= + +

! ! ! !

(11��)

La variation de la production dans chaque secteur s�explique par l�accroissement respectif des stocks de capital, travail et progrès technique. Pour retrouver le taux de croissance de l�économie au niveau agrégé, remplaçons les expressions (10��) et (11��) dans (9) :

t t t t

t tt tt t t t t tKNP LNP KP LP

t t t t t t t t t t t t t

QNP QP KNP LNP KP LPQ ANP AP KNP LNP KP LPF F H HQ Q ANP Q AP Q KNP Q LNP Q KP Q LP

= ⋅ + ⋅ + + + +

! ! ! ! ! ! !

(9�)

Soit t t

t t t t t

QNP QPAT ANP APAT Q ANP Q AP

= ⋅ + ⋅

! ! !

, en réorganisant les termes :

t t t t

t tt tt t t tKNP LNP KP LP

t t t t t t t t t t

KNP LNP KP LPAT Q KNP LNP KP LPF F H HAT Q Q KNP Q LNP Q KP Q LP

= − − − −

! ! ! ! ! !

(12)

Nous retrouvons donc une version décomposée sectoriellement de l�équation (5). La productivité globale des facteurs au niveau agrégé est égale à la croissance non expliquée par les variations des facteurs pondérés par leurs élasticités de production.

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En ce qui concerne les données, nous employons des valeurs réelles à prix constants de 1984, trois sources sont utilisées :

- Les statistiques historiques vénézuéliennes calculées par Baptista (1997) - Les séries historiques de la Banque Centrale du Venezuela (B.C.V) - Les séries historiques de l�Institut National des Statistiques (I.N.E)

Les séries concernant le stock de capital, calculées par Baptista, ne sont disponibles que jusqu�en 1994. Une mise à jour (1995-2002) à partir des données de la B.C.V, notamment en ce qui concerne la formation brute de capital fixe sectorielle, a été effectuée en utilisant la méthode des inventaires permanents. Il est important de signaler que récemment, Rodríguez (2004) a remis en cause la validité des données de Baptista en se basant sur le fait que ces dernières n�étaient pas calculées à partir des séries officielles fournies par la B.C.V, il a donc recommandé l�utilisation des séries de stock de capital de Hoffman (2000) construites en employant les données de la Banque Centrale. Cependant Hoffman n�a calculé le stock de capital du Venezuela qu�à partir de 1950 alors que Baptista l�a fait à partir de 1936. Par conséquent, nous avons effectué des test d�égalité des moyennes, des médianes et des variances des stocks de capital des deux auteurs13, sans pouvoir rejeter l�hypothèse nulle d�égalité des deux séries. Ainsi nous avons décidé d�employer, dans le calcul de la productivité des facteurs, les données de Baptista (1997), statistiquement semblables à celles de Hoffman (2000) et aillant l�avantage de porter sur une plus longue période de temps.

B. L�approche comptable La productivité globale des facteurs, tous secteurs compris, est calculée à partir de l�équation (12). Nous supposons l�existence d�une fonction de production à rendements d�échelle constants, de même que l�égalité entre rémunération des facteurs et productivité marginale. Les élasticités de production sont donc égales à la participation de chaque facteur dans l�activité économique. En ce qui concerne la productivité sectorielle, les mêmes hypothèses, concernant la fonction de production agrégée, sont maintenues, le calcul se faisant à l�aide des équations (10��) et (11��). Les pondérations employées (tableau 4) sont estimées à partir des comptes nationaux vénézuéliens publiés par la B.C.V et des calculs effectués par Clemente (2002), en fonction des trois périodes d�analyse.

Tableau 4. Elasticités moyennes de production

Période KNP LNP KP LP

1942-1957 0.28 0.24 0.44 0.04

1958-1992 0.35 0.30 0.33 0.03

1993-2002 0.39 0.33 0.26 0.02

13 Voir Annexe, tableau A.1.

Sources: Banco Central de Venezuela, Clemente (2002), calculs de l�auteur

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La part des facteurs associés au secteur pétrole dans la production totale diminue considérablement au cours de la période d�étude (tableau 4). Ainsi l�élasticité de production du capital employé dans le secteur pétrolier se réduit presque de moitié en espace de quarante ans, passant de 0,44 à 0,26. D�autre part la participation du travail et du capital du secteur non pétrolier s�accroît de façon soutenue. Notons, néanmoins, que cette asymétrie de comportements peut être le résultat de l�utilisation d�une fonction de production à rendements constants, hypothèse assez restrictive, mais indispensable pour le calcul de la PGF, étant donnée l�absence d�information statistique plus complète. Le tableau 5 montre l�évolution de la PGF estimée par la méthode comptable. La période de la dictature militaire est caractérisée par une forte croissance de la productivité des facteurs (4,48%) basée largement sur l�accroissement du progrès technique dans le secteur pétrole (5,73%). A partir de l�instauration de la démocratie la PGF décroît de façon très marquée, atteignant un taux de croissance négatif moyen de -0,63%. Après 1992, la contraction de la productivité s�accentue ; en moyenne les taux de croissance du progrès technique dans les secteurs non pétrolier et pétrolier ont été de -2,05% et -2,65% respectivement.

Tableau 5. Taux de croissance de la productivité globale des facteurs (%) : l�approche comptable

Période AT ANP AP

1942-1957 4.48 3.37 5.73

1958-1992 -0.63 -0.01 -1.58

1993-2002 -2.29 -2.05 -2.65

La productivité des facteurs, obtenue par l�approche comptable, est mesurée de façon assez brute. L�adoption d�une fonction de production peu flexible et l�exclusion d�autres facteurs pouvant influencer significativement le comportement des agrégats sont quelques unes des limitations rencontrées. Dans la prochaine section nous essayons de calculer une mesure plus précise, ou en tout cas avec moins de distorsions, de la PGF à l�aide d�outils économétriques.

Source: Calculs de l�auteur AT = PGF totale ANP = PGF secteur non pétrolier AP = PGF secteur pétrolier

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C. L�approche économétrique La démarche économétrique suivie consiste à estimer les élasticités de production des facteurs, à partir de l�équation (9�), pour ensuite dériver les élasticités sectorielles (équations 10�� et 11��). Une fois ces élasticités calculées, l�obtention de la PGF devient un simple exercice arithmétique. Le modèle à estimer est défini par:

0 1 2 3t t t t tY KNP LNP KP LP tg g g g g uβ β β β= + + + + (9��) Les

tig , it=Yt , KNPt , LNPt , KPt , LPt représentent les taux de croissance des variables

i au temps t. Les β sont les coefficients associés aux élasticités de production. Le terme d�erreur ut intègre le progrès technique et d�autres composantes stochastiques. Avant d�estimer l�équation (9��), il est indispensable de vérifier la stationnarité14 des variables à employer. La non stationnarité des séries en question peut entraîner l�apparition de corrélation dans les erreurs, violant ainsi l�une des hypothèses centrales de l�estimation par moindres carrés. De même, la présence d�autocorrélation peut provoquer le problème de relation fallacieuse introduit par Granger et Newbold (1974), à savoir, la supposition d�existence d�une relation entre variables, en base à des statistiques t et F biaisées. A cet effet, des tests de racine unitaire de Dickey-Fuller Augmenté (ADF) et de Phillips-Perron (PP) ont été réalisés. Le test en niveaux prend la forme suivante :

101

t t t j

m

i i j i tj

g g gα α ε− −

=

∆ = + ∆ +∑ (a)

H0 : α0 = 0 (non stationnarité) H1 : α0 ≠ 0 (stationnarité) Où ∆gi indique la première différence de la série et m est le nombre de retards. Notons que la forme employée n�inclut ni constante ni tendance pour rendre les résultats compatibles avec la forme fonctionnelle (9��) étudiée. L�équation (a) est estimée pour chaque variable en rajoutant autant de retards m que nécessaires afin que les résidus εt ne soient pas autocorrélés. Le tableau 6 montre les résultats des tests de stationnarité ADF et PP de chacune des variables en fonction du nombre de retards sélectionné.

14 Stationnarité au sens faible ou dans la covariance

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Tableau 6. Tests de racine unitaire

Variables ADF(0) ADF(1) ADF(2) ADF(3)

gY -4.554 -3.916 -3.168 -3.160

gKNP -1.525 -1.948 -2.085 -1.573

gLNP -6.601 -4.519 -3.934 -4.195

gKP -2.292 -3.990 -3.029 -2.790

gLP -7.351 -4.288 -3.933 -4.116

Variables PP(0) PP(1) PP(2) PP(3)

gY -4.554 -4.621 -4.324 -4.860

gKNP -1.525 -2.032 -2.240 -1.915

gLNP -6.601 -6.513 -6.565 -7.970

gKP -2.292 -3.597 -3.294 -3.331

gLP -7.351 -7.524 -7.364 -7.746

A S H

A S H

A S H

A S H

S H A

A S H

A S H

A S H

A S H

S H A

Les valeurs calculées sont supérieures, en valeur absolue, aux valeurs critiques. Il est donc possible de rejeter l�hypothèse nulle de non stationnarité pour l�ensemble des séries et d�estimer la forme réduite (9��) par moindres carrés ordinaires (MCO). Le tableau 7 résume les principaux résultats et statistiques calculés.

Tableau 7. Estimation par MCO

Variables Coefficients Ecarts-typesº t-student Prob.

gKNP 0.632 0.188 3.370 0.001

gLNP 0.498 0.385 1.294 0.201

gKP 0.213 0.138 1.547 0.127

gLP 0.218 0.089 2.458 0.017

Observations 61 -2.52R-carré 0.357 1.16R-carré ajusté 0.323 Test de normalité 0.38Akaike -2.662 Test B-G (Khi-deux(2)) 9.98 (0.0068)

º les écarts-types sont corrigés par la méthode de White

Variable dépendante: gY

SchwarzDurbin-Watson

(prob. d'accepter Ho)

Source: Calculs de l�auteur A,S et H indiquent le nombre de retards choisis par les critères d�Akaike, Schwarz et Hannan-Quinn pour obtenir des résidus sans corrélation. Les valeurs critiques à 1% et 5% sont -2,601 et -1,946 (MacKinnon, 1996).

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Les coefficients ont les signes attendus, l�accumulation de facteurs de production contribue positivement à la croissance. Notons cependant que les coefficients associés au travail du secteur non pétrolier et au capital du secteur pétrolier ne sont significatifs qu�à 20% et 13% respectivement. En regardant plus en détail les statistiques calculées, il semblerait que les résidus présentent une certaine forme de corrélation. En effet, un niveau assez faible du test de Durbin-Watson15 est observé. Par conséquent, un test de corrélation des résidus de Breusch-Godfrey (B-G) avec deux retards a été réalisé: le test consiste à régresser le résidu de l�équation de croissance en fonction de valeurs retardées de ce dernier et de toutes les autres variables du modèle, ensuite la signification conjointe des valeurs résiduelles retardées est testée. Notons que le choix du nombre de retards est totalement arbitraire, nous supposons qu�au-delà de deux ans la corrélation temporelle n�est plus déterminante dans le comportement des résidus. L�hypothèse nulle (non-existence de corrélation) étant rejetée, il reste à identifier le processus statistique suivi par le terme d�erreur. D�après Hamilton (1994) la dynamique du résidu, en présence de corrélation, peut correspondre à une combinaison de termes autorégressifs (AR) et de moyenne mobile (MA). Dans le cas du processus AR(p), le terme d�erreur varie en fonction de ses valeurs passées (équation b), alors que dans le cas du processus MA(q) le résidu dépend de la somme pondérée des erreurs retardées (équation c).

1 1 2 2 ...t t t p t p tu u u u vρ ρ ρ− − −= + + + + (b)

1 1 2 2 ...t t t t q t qu v v v vφ φ φ− − −= + + + + (c)

En combinant ces deux éléments nous retrouvons le processus ARMA(p,q):

1 1 2 2 1 1 2 2... ...t t t p t p t t t q t qu u u u v v v vρ ρ ρ φ φ φ− − − − − −= + + + + + + + + (d)

Le problème maintenant est de savoir quelle forme s�adapte mieux à la dynamique du terme d�erreur. A cet effet, deux critères de sélection sont utilisables selon Dufour (2002). Premièrement, une sélection en fonction du niveau de prévision, ainsi la minimisation de la variance et la maximisation du coefficient de détermination ajusté peuvent être des critères souhaitables. Deuxièmement, un choix centré sur la distance entre le modèle sélectionné et le ´´vrai´´ modèle, pour ce fait la minimisation des critères d�information d�Akaike et de Schwarz est envisageable. Le modèle de croissance est estimé en introduisant plusieurs variantes du processus ARMA(p,q) suivi, a priori, par le terme d�erreur (équation d). Le tableau 8 présente les résultats ainsi obtenus. 15 Le niveau assez faible du DW peut aussi être dû à une mauvaise spécification du modèle, entre autres causes.

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Tableau 8. Sélection du modèle ARMA(p,q)

Processus R-carré ajusté Akaike Schwarz

AR(1), MA(0) 0.443 -2.841 -2.668

AR(2), MA(0) 0.434 -2.811 -2.603

AR(0), MA(1) 0.487 -2.923 -2.750

AR(0), MA(2) 0.478 -2.891 -2.683

AR(1), MA(1) 0.479 -2.892 -2.685

AR(2), MA(1) 0.473 -2.868 -2.625

AR(1), MA(2) 0.491 -2.903 -2.661

AR(2), MA(2) 0.488 -2.883 -2.606

Selon le critères du R2 ajusté le processus qui semble mieux s�ajuster au comportement des résidus est un ARMA(1,2). D�après les critères d�Akaike et de Schwarz le modèle à choisir serait le ARMA(0,1). Dufour (2002) signale qu�en règles générales le critère d�Akaike tend à identifier des valeurs trop grandes de p et q, alors que le critère de Schwarz converge vers des valeurs très proches des vrais paramètres. Par conséquent nous choisissons le modèle ARMA(0,1) pour décrire la dynamique du terme d�erreur. Il est désormais possible d�estimer l�équation de croissance corrigée par la présence de corrélation dans les résidus. Ainsi le modèle devient:

0 1 2 3

1 1

t t t t tY KNP LNP KP LP t

t t t

g g g g g u

u v v

β β β βφ −

= + + + +

= + (9���)

La forme réduite est estimée par la méthode des moindres carrés non linéaires (MCNL), cette approche consiste à remplacer la forme ARMA du terme d�erreur dans l�équation d�intérêt pour ensuite procéder à l�estimation à travers un algorithme non linéaire de Marquardt. Le tableau 9 montre les résultats de la régression par MCNL. Tous les coefficients affichent les signes attendus et sont significatifs à 5%, exception faite du taux de croissance du stock de travail per capita du secteur non pétrolier, significatif seulement à 15%. En comparaison avec l�estimation précédente (tableau 7), un coefficient de détermination ajusté plus élevé est observé, de même, l�hypothèse d�absence de normalité est amplement rejetée. Du côté du test (B-G), celui-ci ne rejette pas l�inexistence de corrélation.

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Tableau 9. Estimation par MCNL avec terme d�erreur MA( 1)

Variables Coefficients Ecarts-typesº t-student Prob.

gKNP 0.720 0.277 2.595 0.012

gLNP 0.445 0.297 1.499 0.139

gKP 0.326 0.169 1.924 0.059

gLP 0.137 0.055 2.490 0.016

MA (1) 0.654 0.111 5.904 0.000

Observations 61 -2.75R-carré 0.521 2.03R-carré ajusté 0.487 Test de normalité 0.51Akaike -2.923 Test B-G (Khi-deux(2)) 1.60 (0.450)

º les écarts-types sont corrigés par la méthode de White

Durbin-Watson

Variable dépendante: gY

Schwarz

(prob. d'accepter Ho)

A première vue les résultats de l�estimation de l�équation de croissance semblent consistants, aussi bien du point de vue théorique qu�empirique. Néanmoins d�autres difficultés statistiques doivent encore être surmontées: les erreurs de mesure des variables employées et l�endogénéité des régresseurs estimés. L�une des hypothèses de base du modèle classique de régression est celle de l�absence de corrélation contemporaine entre les variables explicatives et le résidu. Lorsque les variables sont mesurées avec erreur ce principe est violé et l�estimation par moindres carrés abouti à des estimateurs inconsistants. La même situation se produit quand les régresseurs ne sont pas exogènes, en d�autres termes quand la causalité est bidirectionnelle entre variables explicatives et variables à expliquer, ce qui entraîne la sous identification du modèle et des estimateurs par moindres carrés biaisés. Dans le cadre de cette étude, il semble évident que des agrégats tels que le stock de capital et la force de travail sont mesurés avec un degré considérable d�erreur. De façon similaire, l�endogénéité des régresseurs semble incontestable, le niveau d�emploi ainsi que l�accumulation de capital sont, a priori, déterminés direct ou indirectement par le niveau d�activité économique. La solution réside dans l�estimation par la méthode des variables instrumentales ou dans le cas d�existence de corrélation dans les résidus, les doubles moindres carrés non linéaires (2MCNL). A cet effet, le choix des instruments représente une étape cruciale dans la procédure d�estimation, ainsi nous cherchons des variables exogènes fortement corrélées avec les facteurs de production et indépendantes du terme d�erreur ut. Notons néanmoins que la présence d�erreurs avec moyenne mobile impose quelques restrictions dans le choix des instruments. Fair (1970) recommande, dans le cas d�un processus AR(1), l�inclusion de toutes les variables du modèle retardées d�au moins une période afin d�obtenir des estimateurs consistants. Dans ce sens et en vue du fait que

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Le cas du Venezuela (1942-2002)

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toute représentation de moyenne mobile d�ordre un peut être exprimée, sous certaines conditions, comme une représentation infinie de termes autorégressifs (Hamilton, 1994), nous décidons d�incorporer dans la liste d�instruments, l�ensemble des variables composant la forme réduite, retardées de une à deux périodes. D�autre part, nous employons en tant qu�instruments16 les valeurs retardées du taux de croissance du prix réel du pétrole vénézuélien en US$ (PETR), du taux de change réel (TCR) et de la variation du degré d�ouverture (OPEN). Nous utilisions également le taux de croissance de la production vénézuélienne de pétrole en millions de barils par jour (MBJ), ainsi qu�une variable dichotomique indiquant les épisodes de changement institutionnel et politique17 (IP). L�exogénéité des variables instrumentales est vérifiée à partir du test de causalité de Granger (tableau 10), ainsi nous employons jusqu�à cinq retards pour confirmer l�absence de causalité bidirectionnelle entre les variables explicatives (les facteurs de production) et les instruments, de même nous vérifions l�inexistence de causalité entre la variable dépendante (la croissance du PIB) et les variables instrumentales. Nous observons que la causalité au sens de Granger allant des variables endogènes vers les instruments est dans la plupart des cas largement rejetée, de façon semblable il ne paraît pas y avoir de causalité entre les instruments et la variable à expliquer. Néanmoins la causalité en sens inverse, à savoir des instruments vers les variables endogènes, semble aussi être rejetée, ce qui pourrait indiquer une certaine faiblesse dans le choix des instruments. Par ailleurs en ce qui concerne la variable MBJ, nous supposons également que les variations de production font partie d�une stratégie de maximisation de rentes par les prix menée au sein de l�OPEP, dans ce cas le Venezuela ne fait qu�internaliser les décisions adoptées par les plus grands producteurs. En relation à la variable IP, son exogénéité semble discutable, en effet a priori on s�attend à ce que la performance économique influence également le changement institutionnel. A cet effet, une nouvelle série de tests de Granger est effectuée en considérant cette fois-ci l�existence de causalité allant de la croissance du PIB vers l�indice de démocratie et sa variabilité dans le temps (DEMOC et ∆(DEMOC)), le rejet de l�hypothèse nulle nous permet de vérifier le caractère exogène de la variable DEMOC18 et ainsi justifier l�utilisation de IP en tant qu�instrument. Dans ce sens Baum et Lake (2003) corroborent l�existence de causalité entre performance économique et démocratie lorsque la production est mesurée en niveaux et non pas en taux de croissance19.

16 Voir Annexe, tableau A.2. 17 Cet indicateur est construit à partir de la variable DEMOC, démocratie institutionnelle, illustrée dans le graphique 1. La variable est égale à 1 lorsque ∆(DEMOC) ≠ 0. En d�autres termes, nous ne portons pas de jugement sur l�aspect qualitatif de ces changements. 18 Voir Annexe, tableau A.3. 19 Ce résultat n�est pas confirmé dans le cas du Venezuela (tableau A.3). Les déterminants sociopolitiques du changement institutionnel sont étudiés dans la section I.

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Le cas du Venezuela (1942-2002)

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Tableau 10. Exogénéité des instruments : Tests de causalité de Granger

Hypothèse nulle Observations Statistique-F Probabilité

gY ne cause pas au sens de Granger gPETR(-1) 0.23 0.95

gPETR(-1) ne cause pas au sens de Granger gY 0.55 0.74

gKNP ne cause pas au sens de Granger gPETR(-1) 1.68 0.16

gPETR(-1) ne cause pas au sens de Granger gKNP 1.05 0.40

gLNP ne cause pas au sens de Granger gPETR(-1) 1.42 0.23

gPETR(-1) ne cause pas au sens de Granger gLNP 1.40 0.24

gKP ne cause pas au sens de Granger gPETR(-1) 0.79 0.56

gPETR(-1) ne cause pas au sens de Granger gKP 0.29 0.92

gLP ne cause pas au sens de Granger gPETR(-1) 0.48 0.79

gPETR(-1) ne cause pas au sens de Granger gLP 0.40 0.85

gY ne cause pas au sens de Granger gTCR(-1) 0.12 0.99

gTCR(-1) ne cause pas au sens de Granger gY 1.74 0.14

gKNP ne cause pas au sens de Granger gTCR(-1) 0.28 0.92

gTCR(-1) ne cause pas au sens de Granger gKNP 0.77 0.58

gLNP ne cause pas au sens de Granger gTCR(-1) 0.87 0.51

gTCR(-1) ne cause pas au sens de Granger gLNP 0.95 0.46

gKP ne cause pas au sens de Granger gTCR(-1) 0.91 0.48

gTCR(-1) ne cause pas au sens de Granger gKP 0.74 0.60

gLP ne cause pas au sens de Granger gTCR(-1) 0.56 0.73

gTCR(-1) ne cause pas au sens de Granger gLP 0.26 0.93

gY ne cause pas au sens de Granger D(OPEN(-3)) 0.91 0.48

D(OPEN(-3)) ne cause pas au sens de Granger gY 0.92 0.48

gKNP ne cause pas au sens de Granger D(OPEN(-3)) 1.87 0.12

D(OPEN(-3)) ne cause pas au sens de Granger gKNP 1.49 0.21

gLNP ne cause pas au sens de Granger D(OPEN(-3)) 0.17 0.91

D(OPEN(-3)) ne cause pas au sens de Granger gLNP 0.82 0.49

gKP ne cause pas au sens de Granger D(OPEN(-3)) 0.19 0.97

D(OPEN(-3)) ne cause pas au sens de Granger gKP 1.06 0.40

gLP ne cause pas au sens de Granger D(OPEN(-3)) 0.63 0.67

D(OPEN(-3)) ne cause pas au sens de Granger gLP 2.79 0.03

gY ne cause pas au sens de Granger gMBJ 0.33 0.90

gMBJ ne cause pas au sens de Granger gY 1.48 0.21

gKNP ne cause pas au sens de Granger gMBJ 0.83 0.54

gMBJ ne cause pas au sens de Granger gKNP 0.30 0.91

gLNP ne cause pas au sens de Granger gMBJ 1.51 0.20

gMBJ ne cause pas au sens de Granger gLNP 0.46 0.80

gKP ne cause pas au sens de Granger gMBJ 1.48 0.21

gMBJ ne cause pas au sens de Granger gKP 3.01 0.02

gLP ne cause pas au sens de Granger gMBJ 0.75 0.59

gMBJ ne cause pas au sens de Granger gLP 3.62 0.01

Retards employés: 5

61

61

61

61

61

58

58

58

58

58

60

60

60

60

60

60

60

60

60

60

Il est désormais possible de passer à l�estimation de la première étape.

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Le cas du Venezuela (1942-2002)

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Tableau 11. Estimation par 2 MCNL : première étape

Coeff. Prob. Coeff. Prob. Coeff. Prob. Coeff. Prob.

C 0.00 0.35 0.00 0.55 0.00 0.48 -0.01 0.50

IP 0.00 0.43 0.02 0.15 0.02 0.08 -0.11 0.01

gPETR(-1) 0.02 0.03 0.05 0.09 0.00 0.83 0.02 0.73

gTCR(-1) -0.01 0.54 0.08 0.06 0.05 0.13 -0.24 0.29

D(OPEN(-3)) 0.12 0.03 0.28 0.05 -0.14 0.29 0.59 0.30

gMBJ 0.03 0.02 0.01 0.76 0.12 0.00 0.35 0.01

gY(-1) 0.06 0.04 -0.03 0.58 -0.05 0.46 -0.21 0.58

gKNP(-1) 0.91 0.00 -0.23 0.63 -0.02 0.95 -1.66 0.34

gKP(-1) -0.09 0.09 -0.03 0.75 1.23 0.00 1.06 0.04

gLNP(-1) 0.04 0.56 0.35 0.04 0.16 0.18 0.48 0.48

gLP(-1) 0.00 0.72 0.00 0.98 0.09 0.00 0.04 0.79

gY(-2) 0.03 0.21 0.06 0.23 -0.10 0.15 0.29 0.45

gKNP(-2) -0.04 0.80 0.07 0.88 0.08 0.79 1.20 0.41

gKP(-2) 0.03 0.54 -0.01 0.95 -0.49 0.00 -1.14 0.07

gLNP(-2) 0.10 0.09 0.04 0.72 0.05 0.64 0.70 0.12

gLP(-2) 0.01 0.43 0.00 0.97 0.06 0.10 0.22 0.11

ObservationsR-carré

R-carré ajustéTest F

Prob (test F)

º les écarts-types sont corrigés par la méthode de White

gKP gLPVariablesº

0.4060.2072.046

61 61

gKNP gLNP

0.033

0.9490.932

55.9670.000

2.0570.032

0.8970.863

26.1060.000

61 610.4070.209

Nous observons tout d�abord, à partir du tableau 11, que la plupart des instruments employés sont significatifs à 10% dans au moins une des équations estimées. Les variations du PIB et du stock de capital non pétrolier retardées de deux périodes ainsi que la constante sont les seules variables à être statistiquement non significatives20. De même, la validité des instruments est en partie vérifiée par le rejet généralisé du test de significativité conjointe des coefficients (sous l�hypothèse nulle d�égalité des coefficients à zéro). Nous allons maintenant estimer la deuxième étape à l�aide des variables antérieurement instrumentées. Les coefficients estimés (tableau 12) affichent les signes attendus et sont tous significatifs à 10%. En ordre d�importance, le travail du secteur non pétrolier présente l�élasticité de production la plus importante, une augmentation de 1% de cette dernière se traduit, toutes choses étant égales par ailleurs, en une augmentation du taux de croissance de 0,718%. Les élasticités du facteur capital affichent des valeurs de 0,524 et 0,344 pour les secteurs non pétrole et pétrole respectivement. En ce qui concerne le travail pétrolier un accroissement de 1% de celui-ci entraîne, ceteris paribus, une variation de la croissance proche à 0,20%. 20Il est indispensable de les garder dans la première étape pour assurer la consistance de l�estimation de la deuxième étape étant donnée la corrélation des résidus.

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Tableau 12. Estimation par 2 MCNL : deuxième étape

Variables Coefficients Ecarts-typesº t-student Prob.

gKNP 0.524 0.259 2.025 0.048

gLNP 0.718 0.370 1.940 0.057

gKP 0.344 0.178 1.935 0.058

gLP 0.205 0.080 2.573 0.013

MA (1) 0.555 0.111 5.019 0.000

Observations 61 Test B-G (Khi-deux(2)) 2.875 (0.237)R-carré 0.489 Test Wald (Khi-deux(1)) 2.290 (0.130)R-carré ajusté 0.452 Test Chow 58-02 (F(45,12)) 1.49 (0.238)Durbin-Watson 1.98 Test Chow 93-02 (F(10,47)) 0.634 (0.777)Test de norm. 0.67

º les écarts-types sont corrigés par la méthode de White

(prob. d'accepter Ho)

Instruments: IP, gPETR(-1), gTCR(-1), gO PEN(-3), gMBJ, gY(-1), gY(-2), gKNP(-1),

gKNP(-2), gLNP(-1), gLNP(-2), gKP(-1), gKP(-2), gLP(-1), gLP(-2)

Variable dépendante: gY

Dans le but de prouver la présence ou non de rendements constants, nous effectuons un test de restriction des coefficients (Test Wald), le résultat obtenu ne permettant pas de rejeter l�hypothèse nulle, bien qu�il soit très proche de la zone de rejet, nous pouvons supposer l�existence de rendements constants dans la fonction de production. De façon similaire, nous avons confirmé la stabilité temporelle des coefficients à travers le test de Chow. Ce test consiste à comparer les résidus de régressions portant sur l�ensemble de l�échantillon aux résidus d�estimations restreintes à des sous parties de l�échantillon. Dans ce cas notre intérêt est porté sur le pouvoir prédictif du modèle pour les sous périodes 1958-2002 et 1993-2002, les résultats obtenus (tableau 12) ne permettent pas de rejeter l�hypothèse nulle de stabilité des coefficients. Par ailleurs, des tests de normalité et de corrélation des résidus ont également été réalisés, sans qu�il ne soit possible de détecter la violation des hypothèses de base d�estimation. Ainsi nous venons d�estimer les élasticités de production au niveau agrégé, sans supposer de forme fonctionnelle précise ni l�existence de rendements constants (bien qu�elle soit faiblement vérifiée), nous pouvons donc procéder à calculer la productivité globale des facteurs au niveau agrégé (équation 9�). Pour obtenir la PGF par secteurs nous dérivons les élasticités sectorielles (équations 10�� et 11��) en multipliant par Qt/QNPt et Qt/QPt respectivement, les élasticités globales, estimées économétriquement, du secteur non pétrolier et du secteur pétrolier. Il devient alors possible d�inclure l�effet

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de changements dans l�importance relative des secteurs et par conséquent d�incorporer l�impact des variations dans les quantités de facteurs de production employées. Le tableau 13 nous montre les résultats retrouvés.

Tableau 13. Taux de croissance de la productivité globale des facteurs (%) : l�approche économétrique

Période AT ANP AP

1942-1957 1.67 0.60 2.84

1958-1992 -1.25 -0.48 -2.66

1993-2002 -2.91 -1.60 -6.26

Comme dans l�approche comptable la croissance plus importante de la productivité a lieu durant la période de la dictature militaire, atteignant en moyenne 1,67%. Par contre durant la période de plus grande instabilité politique, la PGF agrégée décroît de 2,91%, poussée par une très forte contraction technologique dans le secteur pétrole (-6,26%). Remarquons que les variations de la productivité calculées par l�approche économétrique sont systématiquement inférieures aux valeurs retrouvées par l�approche comptable (exception faite de la PGF non pétrolière de la période 1993-2000, tableau 5), ce résultat semble cohérent avec la procédure de calcul employée, l�estimation économétrique étant supposée réduire, au moins partiellement, les distorsions, en termes de biais, inhérentes au calcul comptable du résidu de Solow. Avant de passer à l�analyse des déterminants de la croissance, nous allons vérifier la consistance de notre démarche en comparant, dans la mesure du possible, nos résultats à ceux d�autres auteurs.

D. Consistance et cohérence des résultats Dans le but de rendre nos résultats comparables, nous recalculons la productivité des facteurs tant au niveau agrégé comme au niveau sectoriel pour les sous périodes employées par Clemente (2002) et Rodríguez (2004), notons que les variations de productivité mesurées par ces auteurs sont calculées exclusivement par la méthode comptable. En relation à Clemente (2002), le tableau 14 montre l�évolution de la PGF par décennies de 1951 à 2000. De façon générale nous observons que le signe et l�ampleur des variations des PGF agrégée et sectorielles sont très semblables à celles dérivées par l�approche comptable (nous employons des pondérations similaires), exception faite de

Source: Calculs de l�auteur AT = PGF totale ANP = PGF secteur non pétrolier AP = PGF secteur pétrolier

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la période 1960-1969 où nos résultats différent considérablement. Ces différences peuvent s�expliquer par le fait que l�auteur calcule la productivité sans décomposer sectoriellement les facteurs de production, en d�autres termes il emploie une forme plus agrégée de l�équation 12.

Tableau 14. Taux de croissance de la productivité globale des facteurs (%) : comparaison avec Clemente (2002)

Période

Croissance Clem. Compt. Econ. Clem. Compt. Econ. Clem. Compt. Econ. Clem. Compt. Econ. Clem. Compt. Econ.

AT 1.67 1.73 1.42 0.02 3.17 4.89 -2.87 -1.15 -0.25 -1.69 -3.99 -6.66 -0.09 -0.58 -3.61

ANP 1.19 1.37 -1.14 0.45 0.07 -0.48 1.96 -0.12 -1.31 -1.17 -1.91 -1.68 -0.94 0.26 0.73

AP 4.46 2.22 3.77 6.35 8.62 14.68 -3.20 -2.60 1.68 -7.93 -8.57 -15.73 -4.10 -1.63 -12.31

1980-1989 1990-20001951-1959 1960-1969 1970-1979

Sources: Clemente (2002): tableaux 5.2, 5.3 et 5.4. Calculs de l�auteur

Remarquons également les valeurs systématiquement négatives de 1951 à 1990 de la PGF du secteur non pétrolier estimée par la méthode économétrique, ainsi les plus grands gains de productivité dans les secteur semblent avoir eu lieu durant les années quarante. En ce qui concerne Rodríguez (2004), les résultats comparatifs sont présentés dans le tableau 15. Dans ce cas l�auteur divise l�échantillon en trois grandes sous périodes correspondant au changement de l�année de base des données de la B.C.V.

Tableau 15. Taux de croissance de la productivité globale des facteurs (%) :

comparaison avec Rodríguez (2004)

Période

Croissance Rod. Compt. Econ. Rod. Compt. Econ. Rod. Compt. Econ. Rod. Compt. Econ.

AT 1.47 2.16 2.87 -2.46 -2.82 -4.00 0.99 -0.50 -2.42 -0.21 -0.28 -1.09

ANP 1.10 -0.40 -2.12 -1.45 -0.72 -1.58 0.31 0.07 0.51 -0.19 -0.45 -1.26

AP 5.28 6.03 10.18 -6.75 -6.38 -8.42 -0.26 -1.04 -8.31 -0.08 -0.18 -1.64

1950-1968 1968-1984 1984-1998 1950-1998

Sources: Rodríguez (2004): tableaux 7, 10 et 11. Calculs de l�auteur

Nous observons à nouveau une grande similarité entre le signe et l�ampleur des variations de la productivité des facteurs. Les plus grandes différences apparaissent pour la période 1984-1998, nos calculs indiquent une plus forte contraction de la productivité dans le secteur pétrole comparativement à celle trouvée par Rodriguez (2004), cette divergence s�explique en partie par les données de capital employées par ce dernier, provenant de Hoffman (2000). Notons néanmoins que durant cette période, une forte contraction de la PGF pétrolière est cohérente avec la chute du prix du pétrole, l�augmentation de la production et l�accroissement du stock de capital (graph. 3 et 5). La consistance de nos résultats étant vérifiée, nous allons maintenant porter notre attention sur les sources de la croissance au Venezuela.

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IV. Les déterminants de la croissance au Venezuela Dans cette dernière section nous portons notre attention sur les éléments explicatifs de l�accumulation factorielle ainsi que sur l�importance relative de la PGF dans le processus de croissance.

A. Les sources de l�accumulation factorielle Les déterminants de l�accumulation des facteurs ainsi que leur impact sur la croissance sont présentés dans les tableaux 11 (première étape) et 12 (deuxième étape). Notons que l�effet total sur la croissance des éléments explicatifs de l�accumulation est donné par la somme des effets significatifs trouvés dans la première étape pondérés par les élasticités de production correspondantes, calculées dans la deuxième étape. En d�autres termes :

,��ty

i j jt

gZ

γ β∂

=∂ ∑

,�i jγ =coefficient significatif (première étape) de la variable instrumentale Zi dans

l�équation associée au facteur de production j. �

jβ =élasticité de production (deuxième étape) du facteur de production j. En relation au changement institutionnel et politique, il est surtout significatif dans le secteur pétrole, d�une part, la variable IP influence positivement l�accumulation de capital et d�autre part, elle a un impact négatif sur l�évolution du travail. Ces effets sont cohérents avec l�appartenance du secteur pétrolier à l�Etat vénézuélien, en effet des bouleversements politiques et institutionnels tels que nous les abordons, se traduisent en un changement d�administration ou de régime politique, les nouveaux venus cherchent à maximiser la rente pétrolière, toutes choses égales par ailleurs, en rationalisant une industrie nettement intensive en capital (tableau 2), ainsi la force de travail se réduit et le stock de capital augmente. En relation à l�effet net du changement institutionnel sur la croissance, celui-ci est donné par :

(0,02)*(0,344) ( 0,11)*(0, 205) 0,016ty

t

gIP

∂= + − = −

Ainsi le changement institutionnel induit une diminution du taux de croissance du PIB de 0,016 points de pourcentage. Par contre une augmentation du prix réel du pétrole retardé d�une période a des effets significatifs uniquement sur le secteur non pétrolier, les agents semblent interpréter l�accroissement du prix du pétrole comme un indicateur d�amélioration future centrée notamment sur une participation plus active de l�Etat dans la vie économique du pays, l�investissement et l�embauche non pétroliers augmentent et les stocks de facteurs s�accroissent. Notons que cet effet positif du prix du pétrole sur l�accumulation du secteur non pétrolier peut aussi s�expliquer par une réduction du prix réel des facteurs : en effet face à des prix mondiaux plus importants, les recettes fiscales en monnaie nationale augmentent pour des niveau de production et de taux de change donnés, ceci

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se traduit en une augmentation de la masse monétaire pouvant entraîner l�accélération de l�inflation et la diminution du prix réel des facteurs de production (en supposant l�existence de rigidités salariales nominales et d�imperfections dans les marchés financiers). Ce résultat est d�autant plus intéressant lorsque nous observons l�impact non significatif des changements du prix réel du pétrole sur l�accumulation de facteurs dans le secteur pétrolier, confirmant ainsi en partie l�hypothèse de l�inefficience publique dans la gestion des ressources naturelles et l�emprise des groupes d�intérêt contrôlant le secteur (Isham et al, 2003). L�impact total du prix du pétrole sur la production est donné par :

1

(0,02)*(0,524) (0,05)*(0,718) 0,047t

t

y

PETR

gg

∂= + =

Une augmentation de dix points de pourcentage du taux de croissance du prix du pétrole retardé d�une période entraîne un accroissement du taux de croissance du PIB de un demi point de pourcentage. Notons également l�effet positif d�une dépréciation réelle du taux de change retardée d�une période sur la variation du facteur travail dans le secteur non pétrolier, ainsi l�augmentation du taux de change entraînerait, ceteris paribus, la hausse du niveau des prix et la diminution du salaire réel (en présence de rigidités salariales nominales), ce qui se traduirait en une augmentation de la demande de travail du secteur et un accroissement de la production.

1

(0,08)*(0,718) 0,058t

t

y

TCR

gg

∂= =

En termes d�impact, une augmentation de 1% du taux de dépréciation de la monnaie vénézuélienne se traduit en une augmentation du taux de croissance de 0,058%. Remarquons néanmoins, qu�il reste encore à déterminer les causes des fluctuations du taux de change et notamment l�importance du lien existant entre l�évolution du prix du pétrole et l�appréciation ou dépréciation de la monnaie vénézuélienne. A cet effet, le graphique 4 nous donne quelques réponses; durant les périodes de la dictature militaire et de l�instauration de la démocratie nous observons un comportement asymétrique des deux variables, alors qu�à partir de 1993 le taux de change et le prix du pétrole évoluent de façon semblable. En calculant la corrélation des deux agrégats21, il est possible de vérifier l�existence d�un effet retardé négatif et significatif de l�évolution du prix du pétrole sur la variation du taux de change. Ainsi par exemple la hausse du prix du pétrole aujourd�hui entraînerait l�appréciation du taux de change réel demain. Dans ce sens, l�impact négatif d�une appréciation (diminution) du taux de change réel sur le travail non pétrolier et sur la croissance, confirme également la vulnérabilité de l�économie vénézuelienne face au phénomène du Syndrome Hollandais (Dutch Disease). Ainsi, l�appréciation du taux de change, provoquée par l�augmentation du prix

21 Voir Annexe, tableau A.5.

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du pétrole22, entraîne un enchérissement relatif de la main d�oeuvre se traduisant en une contraction du secteur des biens et services échangeables au profit du secteur des non échangeables. De même, les importations augmentent (elles sont devenues moins chères) alors que les exportations diminuent, pour finalement aboutir à une réduction des investissements en capital humain, en technologie ou en tout autre facteur susceptible de stimuler la croissance de long terme. En relation à l�ouverture aux échanges, celle-ci influence significativement l�accumulation de facteurs dans le secteur non pétrolier, une plus grande ouverture facilite la mise en place de procédures de production plus efficaces et l�assimilation de nouvelles technologies favorisant l�accroissement des stocks de facteurs et par conséquent la croissance. L�effet sur la croissance est donc :

3

(0,12)*(0,524) (0, 28)*(0,718) 0, 264t

t

y

OPEN

gg

∂= + =

Une augmentation de un point de pourcentage du degré d�ouverture retardé de trois périodes, a pour effet d�accroître le taux de croissance du PIB en 0,264 points de pourcentage. Pour terminer, nous observons que la variation de la production de pétrole affecte positivement l�accumulation de facteurs dans le secteur pétrolier, un plus grand effort de production nécessite d�une plus grande quantité d�intrants, notons que cet effet est plus important pour le facteur travail, alors qu�il s�agit d�une industrie nettement capitalistique. L�augmentation de la production de pétrole entraîne également un accroissement du capital non pétrolier, dans ce cas il est possible de supposer l�apparition d�effets de débordement ou l�existence d�externalités positives qui stimulent l�activité productive (effet de levier) dans le secteur non pétrolier à travers une augmentation du stock de capital. L�impact total sur la croissance est donné par :

(0,03)*(0,524) (0,12)*(0,344) (0,35)*(0, 205) 0,129t

t

y

MBJ

gg∂

= + + =∂

Une augmentation de 1% du taux de croissance de la production de pétrole se traduit en une augmentation de la croissance de 0,129%. En résumé, l�effet net du changement institutionnel sur la croissance est négatif, en termes d�importance, l�ouverture aux échanges ainsi que la production pétrolière semblent prendre le devant en tant qu�éléments explicatifs de l�accumulation des facteurs. Tel qu�il a été évoqué auparavant, la théorie néoclassique, à travers le modèle de Solow, associe l�expansion économique à l�évolution du progrès technique et des facteurs de production, notamment l�accumulation de capital. Dans ce sens, la mise en place de politiques de développement cohérentes et soutenables dans le temps est conditionnée à l�identification des éléments les plus suceptibles d�influencer positivement la 22 Il existe néanmoins d�autres éléments pouvant expliquer l�appréciation du bolívar en dehors de l�augmentation du prix du pétrole, comme par exemple les politiques visant à contrôler l�inflation par l�ancrage du taux de change nominal.

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croissance. S�agit-il, par exemple, de promouvoir l�accroissement du stock de capital à travers l�investissement et l�épargne ? Ou bien, le problème réside-t-il dans les pertes de productivité associées à la mauvaise qualité des institutions au sens le plus large du terme ? Bien entendu la réponse se trouve quelque part entre les deux, néanmoins dans le cas du Venezuela nous essayons d�éclaircir l�importance relative de l�accumulation de facteurs et de la productivité.

B. L�importance relative de la PGF Dans ce sens, le tableau 16 illustre l�évolution de la croissance du PIB, des facteurs de production et du progrès technologique durant la période d�étude. Pour faciliter l�analyse et la compréhension, nous reproduisons les estimations de la PGF obtenues par les deux méthodes employées (tableaux 5 et 13).

Tableau 16. Croissance et productivité des facteurs (%)

Croissance

Q

QNP

QP

KNP

LNP

KP

LP

Croissance Comptable Econométrique Comptable Econométrique Comptable Econométrique

AT 4.48 1.67 -0.63 -1.25 -2.29 -2.91

ANP 3.37 0.60 -0.01 -0.48 -2.05 -1.60

AP 5.73 2.84 -1.58 -2.66 -2.65 -6.26

1958-1992 1993-2002

7.62 -2.32

9.06

5.52

-0.08

1942-1957

3.38

2.87

-0.51

0.89

-2.87

1.03

0.74

-1.13

-3.21

6.32

2.30

-0.77

-2.89

-0.60

-2.58

1.19

Tout d�abord, de 1942 à 1957 la forte croissance de la production totale est caractérisée par une expansion très importante des secteurs pétrolier et non pétrolier, de même nous constatons que cette augmentation de l�activité économique est centrée sur l�accroissement significatif du stock de capital et de la productivité des facteurs. Par la suite, à partir de 1958 et jusqu�en 2002 nous assistons à une décroissance continuelle qui s�accélère au début des années quatre-vingt-dix. En effet durant la période de stabilité politique (1958-1992), les politiques de maximisation de la rente pétrolière par les prix ont très probablement mené à la décapitalisation et à la réduction de la main d�oeuvre dans le secteur pétrole, malheureusement à cette réduction factorielle vint s�ajouter une plus grande inefficacité dans l�utilisation des facteurs qui amplifia les effets négatifs sur la croissance. En ce qui concerne le secteur non pétrolier, l�accumulation de facteurs s�est accrue en même temps que l�inefficacité dans l�emploi productif de ces derniers. A partir de 1993 la contraction est encore plus marquée malgré une plus grande accumulation de capital dans le secteur pétrolier. L�instabilité

Sources: Banco Central de Venezuela, Baptista (1997), Instituto Nacional de Estadísticas, calculs de l�auteur

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politique et la diminution très importante de la PGF expliquent, a priori, la décroissance observée. En ce qui concerne la contribution à la croissance, le graphique 8 illustre la relation liant les taux de variation de la PGF (à partir des résultats obtenus par l�approche économétrique) et des facteurs, au taux de variation du PIB. En d�autres termes, nous divisons les taux de croissance des facteurs et des PGF sectorielles par le taux de croissance du PIB total, en pondérant par les élasticités de production (tableau 12) et l�importance relative des productivités (équation 9�). Graphique 8. Contribution de la PGF et des facteurs de production à la croissance

-60%

-40%

-20%

0%

20%

40%

60%

80%

100%

KNP LNP KP LP ANP AP

1942-1957 1958-1992 1993-2002

Croissance 7,62% Croissance -0,51% Croissance -2,32%

Durant la dictature militaire 46% de la croissance s�explique par l�augmentation du stock de capital non pétrolier, le capital pétrolier contribue avec 19% alors que la productivité des facteurs représente 27% (5% provient du secteur non pétrolier et 22% du secteur pétrolier). La baisse de la production enregistrée tout au long de la période démocratique s�explique par la réduction de la PGF pétrolière dont la contribution est de 77%, notons que la plus grande accumulation de facteurs dans le secteur non pétrolier se traduit en une contribution négative à la décroissance de l�ordre de 87% (-44% provient du capital et -43% du travail), en d�autres mots elle compense une partie de la perte d�efficacité. En relation à la période d�instabilité politique, la chute de la productivité des facteurs contribue en 105% à la contraction du PIB (42% en provenance du secteur non pétrolier et 63% du secteur pétrolier), de la même façon la décapitalisation du secteur non pétrolier explique 49% de la décroissance, malheureusement l�accroissement des stocks de travail non pétrolier et de capital pétrolier n�arrive à compenser que partiellement cette perte.

Sources: Banco Central de Venezuela, Baptista (1997), Instituto Nacional de Estadísticas, calculs de l�auteur

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Une autre façon de quantifier l�importance des différents éléments déterminatifs de la croissance économique consiste à décomposer la variance du PIB en fonction des contributions des facteurs et de la PGF. Le tableau 17 montre la décomposition ainsi effectuée à partir des élasticités estimées (tableau 12) et des productivités calculées (équation 9�).

Tableau 17. Décomposition de la variance du taux de croissance du PIB (%)

Période Facteurs PGF Covariances Total

1942-1957 27.1 99.0 -26.1 100

1958-1992 42.6 248.7 -191.3 100

1993-2002 25.7 57.3 16.9 100

La productivité des facteurs demeure l�élément explicatif le plus important, en termes de contribution à la variance, tout au long des trois périodes considérées. De 1958 à 1992 la variance de la PGF atteint un sommet, expliquant 248,7% de la variance du taux de croissance de la production. Notons également que durant la période d�instabilité politique la contribution de l�accumulation factorielle ne représente plus que 25,7% de la variance du taux de croissance du PIB, alors qu�auparavant elle en determinée 42,6%. Il est important de signaler deux aspects essentiels de la croissance dont nous avons fait abstraction. Premièrement, la non inclusion du capital humain en tant que facteur de production, à cet effet des données portant sur le niveau d�éducation au Venezuela ne sont disponibles qu�à partir du début des années soixante, en plus elles ne permettent pas de faire une claire distinction par secteur d�activité. Dans ce sens, la productivité globale des facteurs estimée renferme l�apport de l�éducation à la croissance. Deuxièmement, nous avons considéré, tout au long de l�analyse, la productivité des facteurs comme étant déterminée en dehors du processus d�accumulation (hypothèse de neutralité au sens de Hicks), cependant il semble évident que dans le cas des PED, l�accumulation de capital et la PGF sont étroitement liées. Ainsi, la productivité des facteurs calculée mesure également l�apport d�un accroissement qualitatif du stock de capital.

Sources: Banco Central de Venezuela, Baptista (1997), Instituto Nacional de Estadísticas, calculs de l�auteur La colonne Covariances correspond au pouvoir explicatif de l�ensemble des intéractions entre facteurs de production et PGF.

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En règles générales :

- Durant la période de la dictature militaire (1942-1957) la croissance est centrée sur l�accumulation de capital physique dans le secteur non pétrolier.

- La période démocratique (1958-1992) est caractérisée par une stagnation de

l�activité productive induite par la contraction du secteur pétrole en termes d�accumulation de facteurs et notamment en termes de productivité.

- Tout au long de la période d�instabilité politique (1993-2002) la crise

s�accentue à travers la décapitalisation du secteur non pétrolier et la très forte contraction de la productivité des facteurs.

Qu�est-ce que tout ceci signifie ? Nous en tirons quatre grandes leçons à propos de la croissance au Venezuela de 1942 à 2002.

1. Le changement institutionnel semble avoir influencé négativement la croissance à travers son effet sur le secteur pétrolier. Suite aux épisodes de rupture la décroissance s�accélère, confirmant ainsi l�hypothèse selon laquelle ces changements sont favorables uniquement aux groupes possédant le plus grand pouvoir de négociation (North, 1990). Cet effet est d�autant plus visible lorsque nous considérons l�impact des changements politico-institutionnels et des variations du prix du pétrole sur l�accumulation de facteurs dans le secteur pétrolier (tableau 11, graphiques 1 et 2).

2. La PGF devient de plus en plus importante en tant qu�élément

explicatif de la croissance au Venezuela. En effet, bien que l�accumulation reste déterminante dans le processus productif, il semble évident que l�efficacité avec laquelle les facteurs sont utilisés influence considérablement l�évolution de la croissance, notamment à partir des années quatre-vingt-dix (graphique 8 et tableau 17).

3. La dépendance envers le secteur pétrolier rend plus vulnérable

l�économie vénézuélienne. Les impacts direct et indirects du prix du pétrole (notamment à travers le taux de change) sur l�économie non pétrolière, de même que l�impact de la production de pétrole sur l�accumulation de capital non pétrolier illustrent la dépendance et par conséquent la vulnérabilité de l�économie nationale face aux fluctuations du prix mondial du pétrole (tableau 11, graphiques 3 et 5).

4. L�ouverture aux échanges est favorable à la croissance et à la

diversification économique. En effet une plus grande ouverture favorise l�accumulation dans le secteur non pétrolier stimulant la croissance économique et réduisant la dépendance pétrolière (tableau 11).

Il est désormais temps de passer à la conclusion générale.

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Conclusion Tout d�abord en termes de méthodologie, l�approche employée, à savoir, l�estimation économétrique d�une fonction de production et la subséquente dérivation de la productivité des facteurs, facilite l�analyse des principaux déterminants de la croissance. Par rapport à l�approche traditionnelle comptable, la démarche économétrique permet de réduire le biais associé aux erreurs de mesure des stocks de facteurs de production, de même que formaliser le processus d�accumulation factorielle et ses implications sur la croissance. A cet effet, le changement institutionnel semble avoir influencé négativement la croissance au Venezuela, ainsi la création de nouvelles institutions (1958) et leur bouleversement postérieur (1992) n�ont pas contribué positivement au développement économique du pays. L�approche néo-institutionnelle de North (1990), selon laquelle la mise en place de nouvelles institutions n�entraîne pas, a priori, plus d�efficience économique est vérifiée. De même, en ce qui concerne les déterminants de l�accumulation des facteurs, l�ouverture et l�activité pétrolière apparaissent comme les éléments les plus significatifs. L�intégration aux marchés internationaux facilite la mise en place de procédures de production plus efficaces et l�assimilation de nouvelles technologies favorisant l�accroissement des stocks de facteurs, aisni que la diversification des activités productives. Par contre l�exploitation du pétrole, en termes de prix et de quantités produites, accentue la dépendance et la vulnérabilité de l�économie vénézuelienne, notamment à travers son impact significatif sur l�enesmble du secteur non pétrolier. Notons également l�importance du taux de change réel, en effet, l�existence de Syndrome Hollandais est constatée dans la mesure où la sur appréciation de la monnaie nationale est induite par l�augmentation du prix du pétrole. Par ailleurs, l�importance de plus en plus marquée de la PGF comme élément déterminatif de l�activité productive est corroborée (de 1993 à 2002 la chute de la productivité des facteurs contribue en 105% à la contraction du PIB et explique 57,3% de sa variance). Dans ce sens, les éléments susceptibles d�influencer la productivité des facteurs doivent encore être identifiés. Dans quelle mesure par exemple, la géographie, l�intégration régionale et les institutions induisent-elles des changements dans la PGF ? Ou alors la productivité des facteurs n�est-elle rien d�autre qu�une mesure agrégée de l�effet accumulé et direct de ces mêmes éléments sur la croissance de long terme ? Quel est le rôle de la PGF une fois le capital humain comptabilisé ? Des questions primordiales dont la réponse facilitera la mise en place des politiques de développement. Pour terminer, le cas du Venezuela semble bien illustrer l�importance de la qualité institutionnelle en tant que facteur explicatif de la croissance, il ne s�agit pas seulement de changer les contraintes formelles, telles que les lois et la constitution, mais plutôt d�internaliser et intégrer ces changements dans les coutumes et les codes de conduite sociaux. A quoi sert donc avoir des règles si personne ne les respecte ?

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Annexe

Tableau A.1: Tests d�égalité des séries de capital (1950-1994)

Indicateur LOG(K Hofman) LOG(K Baptista) Statistique Probabilitéº

Moyenne 11.197 11.262 t(88) 0.481 0.632

Médiane 11.164 11.245 Khi-deux(1) 0.044 0.833

Ecart-type 0.637 0.648 F(44,44) 1.038 0.903

Maximum 11.917 11.998 /// ///

Minimum 9.860 9.998 /// ///

Indicateur D(LOG(K Hofman)) D(LOG(K Baptista)) Statistique Probabilitéº

Moyenne 0.046 0.045 t(86) 0.126 0.900

Médiane 0.043 0.048 Khi-deux(1) 0.182 0.670

Ecart-type 0.040 0.036 F(43,43) 1.218 0.520

Maximum 0.118 0.110 /// ///

Minimum -0.018 -0.013 /// ///

º Ho : égalité entre les deux séries

Tableau A.3 : Variables instrumentales

Variable Définition

gTCR(-1) Taux de croissance du taux de change réel retardé d'une période

gPETR(-1) Taux de croissance du prix réel du pétrole retardé d'une période

gOPEN(-3) Variation du degré d'ouverture retardée de trois périodes (X+M/Y)

gMBJ Taux de croissance de la production de pétrole en millions de barils par jour

gY(-1) Taux de croissance du PIB réel retardé d'une période

gY(-2) Taux de croissance du PIB réel retardé de deux périodes

gKNP(-1) Taux de croissance du capital non pétrolier retardé d'une période

gKNP(-2) Taux de croissance du capital non pétrolier retardé de deux périodes

gLNP(-1) Taux de croissance du travail non pétrolier retardé d'une période

gLNP(-2) Taux de croissance du travail non pétrolier retardé de deux périodes

gKP(-1) Taux de croissance du capital pétrolier retardé d'une période

gKP(-2) Taux de croissance du capital pétrolier retardé de deux périodes

gLP(-1) Taux de croissance du travail pétrolier retardé d'une période

gLP(-2) Taux de croissance du travail pétrolier retardé de deux périodes

IP Episodes de changement institutionnel

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Tableau A.3 : Tests de causalité de Granger

Hypothèse nulle Observations Statistique-F Probabilité

gY ne cause pas au sens de Granger DEMOC 0.09 0.99

DEMOC ne cause pas au sens de Granger gY 1.96 0.10

gY ne cause pas au sens de Granger D(DEMOC) 0.40 0.85

D(DEMOC) ne cause pas au sens de Granger gY 0.26 0.93

Y ne cause pas au sens de Granger DEMOC 0.37 0.86

DEMOC ne cause pas au sens de Granger Y 0.26 0.93

Y ne cause pas au sens de Granger D(DEMOC) 0.40 0.85

D(DEMOC) ne cause pas au sens de Granger Y 0.21 0.95

Retards employés: 5

61

61

61

61

Tableau A.4 : Corrélations taux de change réel, prix du pétrole

gTCR gPETR gPETR(-1) gPETR(-2) gPETR(-3) gPETR(-4) gPETR(-5)

gTCR 1

gPETR 0.057 1

gPETR(-1) -0.211º 0.107 1

gPETR(-2) -0.134 -0.092 0.119 1

gPETR(-3) 0.071 0.095 -0.099 0.153 1

gPETR(-4) 0.051 -0.042 0.091 -0.060 0.110 1

gPETR(-5) -0.046 0.142 -0.042 0.046 -0.006 0.199 1

º significative à 95%