PROCESSUS DE RECONSTRUCTION AU CHILI APRES LE SEIME DU 27 FEVRIER...

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Le processus de recinstruction au Chili après le séisme du 27 février 2010 3 au 14 mars 2014 Félix MÉLOU Antoine MEULEMAN Projet Build-Back-Better 15 février au 15 septembre 2014 1 PREMIER ARTICLE, REDIGE APRES NOTRE SEJOUR A CONCEPCION (CHILI) DU 3 AU 14 MARS 2014 PROCESSUS DE RECONSTRUCTION AU CHILI APRES LE SEIME DU 27 FEVRIER 2010 Le Chili est un pays très touché par les tremblements de terre. Il se situe en effet à la rencontre des plaques Nazca et Sud-Américaine qui forment l'une des zones sismiques les plus actives du globe. Par exemple, durant notre voyage d'un mois au Chili, trois séismes ont eu lieu (de magnitudes comprises entre 4,5 et 5,5). Le Chili est frappé environ tous les quarante ans par un séisme très destructeur (magnitude supérieure à 8). Dans l'ensemble les constructions récentes du Chili sont adaptées à la récurrence de ces événements. Cependant le pays fut très durement touché par le dernier grand tremblement de terre qu'il a connu en 2010. En effet à un séisme de magnitude très élevée (8,8) c'est ajouté un tsunami. Or les chiliens n'ont pas eu l'habitude de faire face aux tsunamis et y sont par conséquent moins bien préparés. C'est dans ce contexte que nous avons décidé de passer une semaine dans la région de Bìobìo, la région la plus touchée. Ceci afin d'y étudier les différentes problématiques auxquelles les chiliens ont dû faire face pour reconstruire leurs régions et leur vie. Nous tenons à nous excuser pour le manque d'originalité et de personnalité dans le choix de nos illustrations. Suite à quelques péripéties au cours de notre voyage on nous a en effet dérobé l'ensemble des photos que nous avions pu prendre sur place et des documents que nous avions réunis. I) INTRODUCTION A) Le tremblement de terre du Maule Le 27 février 2010 à 3h34 le Chili a été touché par un séisme de magnitude de 8,8 sur l’échelle de Richter, suivi d’un tsunami dévastateur, ce triste événement maintenant appelé « 27F » provoqua la mort de 526 personnes au Chili. L’épicentre de ce séisme ce trouvait à 320 Km au Sud-Ouest de Santiago à une profondeur de 35Km, sa zone de rupture s’étendit sur plus de 500Km. Il est considéré comme le 6 ème plus fort séisme depuis l’existence des méthodes de mesures modernes. Il est notamment à l’origine d’un déplacement de 3m vers l’Ouest de la ville de

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Le processus de recinstruction au Chili après le séisme du 27 février 20103 au 14 mars 2014

Félix MÉLOUAntoine MEULEMAN

Projet Build-Back-Better15 février au 15 septembre 2014

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PREMIER ARTICLE, REDIGE APRES NOTRE SEJOUR A CONCEPCION (CHILI) DU 3 AU 14 MARS 2014

PROCESSUS DE RECONSTRUCTION AU CHILIAPRES LE SEIME DU 27 FEVRIER 2010

Le Chili est un pays très touché par les tremblements de terre. Il se situe en effet à la rencontre des plaquesNazca et Sud-Américaine qui forment l'une des zones sismiques les plus actives du globe. Par exemple, durant notrevoyage d'un mois au Chili, trois séismes ont eu lieu (de magnitudes comprises entre 4,5 et 5,5). Le Chili est frappéenviron tous les quarante ans par un séisme très destructeur (magnitude supérieure à 8).

Dans l'ensemble les constructions récentes du Chili sont adaptées à la récurrence de ces événements. Cependantle pays fut très durement touché par le dernier grand tremblement de terre qu'il a connu en 2010. En effet à unséisme de magnitude très élevée (8,8) c'est ajouté un tsunami. Or les chiliens n'ont pas eu l'habitude de faire faceaux tsunamis et y sont par conséquent moins bien préparés.

C'est dans ce contexte que nous avons décidé de passer une semaine dans la région de Bìobìo, la région la plustouchée. Ceci afin d'y étudier les différentes problématiques auxquelles les chiliens ont dû faire face pourreconstruire leurs régions et leur vie.

Nous tenons à nous excuser pour le manque d'originalité et de personnalité dans le choix de nos illustrations.Suite à quelques péripéties au cours de notre voyage on nous a en effet dérobé l'ensemble des photos que nousavions pu prendre sur place et des documents que nous avions réunis.

I) INTRODUCTION

A) Le tremblement de terre du MauleLe 27 février 2010 à 3h34 le Chili a été touché par un séisme de magnitude de 8,8 sur l’échelle de Richter, suivi

d’un tsunami dévastateur, ce triste événement maintenant appelé « 27F » provoqua la mort de 526 personnes auChili.

L’épicentre de ce séisme ce trouvait à 320 Km au Sud-Ouest de Santiago à une profondeur de 35Km, sa zone derupture s’étendit sur plus de 500Km. Il est considéré comme le 6ème plus fort séisme depuis l’existence desméthodes de mesures modernes. Il est notamment à l’origine d’un déplacement de 3m vers l’Ouest de la ville de

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Concepción, et d’un déplacement de l’axe dela terre de 8cm provoquant leraccourcissement de la durée d’une journéed’un millionième de seconde.

Le tsunami provoqué par ce séisme futégalement d’une ampleur considérable : lahauteur de la vague s’éleva jusqu’à 15 mètressur les côtes Chilienne et il frappa même lescôtes japonaises.

Bien que l’ensemble du Chili fût touché parcette catastrophe, ce sont les régions duMaule et de Bíobío où l’on recense le plus dedégâts, notamment le long de la côte.

B) L’état de guerreLe Chili est l’un des pays avec la plus forte activité sismique au monde. Mais la force et l’ampleur de ce séisme

ajouté au drame humain qu’il a provoqué à profondément marqué les consciences des habitants avec qui nousavons échangé, notamment dans la région de Concepción (la deuxième zone urbaine du pays) pourtant plusieursfois touchées par d’importants séismes au cours de son histoire. Il est difficile pour nous de s’imaginer les quelquesjours qui ont suivi la secousse mais plusieurs témoignages nous ont marqué.

La région a d’abord été entièrement coupée du reste pays et en particulier de Santiago ou l’ensemble despouvoirs étatiques sont réunis. De nombreuses liaisons entre les différentes villes étant coupées (167 points sur leréseau routiers et 54 ponts ont été endommagés), sans électricité ni réseaux téléphonique, il était impossible decontacter ses proches et d’obtenir des informations. Rapidement l’armée a été déployée et un couvre-feu instauréde 11 heures du soir à 6 heures du matin afin d’éviter les violences et pillages qui peuvent se produire dans uneville en ruine. La nécessité de l’entraide entre les habitants c’est rapidement fait ressentir puisque de nombreusespersonnes n’avaient nulle part ou se loger et l’accès à l’eau courante était difficile. Dans ce climat post-apocalyptique, les répliques extrêmement fortes qui suivent le tremblement de terre continues de détruire lesbâtiments affaiblis et de terroriser la population. Au-delà des dégâts matériels, c’est bien les dégâts psychologiquessur la population qui seront les plus long à effacer.

C) L’évacuation des buildings / Dégâts à ConcepciónLes standards de construction aux Chili étant généralement bon, peu d’édifices dans la ville de Concepción se

sont effondrés. Les bâtiments les plus anciens ont été bien sur les plus touchés. On peut noter toutefois ladestruction de l’alto Bíobío suite à des erreurs de calculs ou de mise en œuvre (procès en instance) et de la facultéde chimie de l’université de Concepción à la suite d’un incendie. Néanmoins, quelques jours après le séisme, lamairie avec l’aide de professionnels indépendants dut entreprendre un travail de diagnostique afin d’établir la listedes maisons et des bâtiments aux dommages structurels trop importants et devant être démolis. Les propriétairesont reçu une aide financière afin de réaliser la démolition de leurs biens dans un temps limité (sauf s’ils pouvaient

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certifier la mise en œuvre de réparation adéquate). Pour les immeubles de tailles importantes, un périmètre desécurité d’un rayon de 1.5 fois la hauteur du bâtiment a été instauré. Cette mesure a conduit à l’évacuation d’unepartie des habitants du centre-ville.

Par ailleurs le ministère des affaires publiques a établi une liste de neuf hauts bâtiments/tours provisoirementstabilisés mais présentant un risque pour la population et nécessitant une étude technique approfondie. La DICTUC(groupe de spécialistes de l'Université Catholique de Concepción) fut mandatée pour réaliser cette étude complètecomprenant la collecte d’informations sur les plans, la modélisation de la structure existante, les vérifications surplace de la qualité de la construction et des fondations, et le plan détaillé des anomalies structurelles. Au-delà del’analyse de structure, l’équipe a aussi déterminé les solutions techniques permettant de réhabiliter les bâtimentsconcernés (lorsque cela était possible). Une analyse comparative des coûts d’une réparation ou d’une destructiondu bâtiment a également été réalisée. L’étude a aussi permis de déterminer si les coûts des travaux incombaient àl’état ou aux promoteurs immobiliers. Enfin l’étude a conclu de la nécessité de réaliser les travaux sous 3 ans carles dommages augmenteraient du fait de l’exposition des fissures à l’air et à l’humidité. Finalement trois de cesneuf buildings furent réparés et les six autres furent détruits. L’état finança les travaux pour sept de cesconstructions.

Ces bâtiments, sans s’être effondrés face à la force du tremblement de terre, ont déjà rempli leur rôle. Maisleurs évacuations ont laissé dans la ville des ruines modernes abandonnées du jour au lendemain et ont contraintà l’évacuation d’une partie de la population de la ville.

Alto BìoBìo après le tremblement deterre

Torre O'Higgins après le tremblement deterre

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D) Les ravages du Tsunami / Dégâts sur la cotes

Sur la côte, les dégâts engendrés par le tsunami furent bien plus importants. La vague laissa derrière elle despaysages de désolation dont les images firent le tour du monde. Dans la région de Bíobío, 18 communes ont ététrès sévèrement touchées et particulièrement celles orientées vers le nord dans le sens de propagation de la vague.Un effet de rebond a aussi amplifié les destructions engendrées par le tsunami dans les baies en U (créées pard’ancien tsunami selon certains géologues). Au total : 11 633 bâtiments dont 1 238 commerces, 192 industries, 38écoles, 5 bâtiments de santé, 72 autres équipements et une majorité de maisons ont été endommagés ou détruitspar les flots.

Effectuer l’évaluation des dégâts provoqués par le tsunami fut beaucoup plus compliquée que pour letremblement de terre. Pourtant cette étape est primordiale dans le processus de reconstruction. D’abord lescommunes avaient perdu tous les registres et plans avec la montée des eaux. Il n’y avait aucune information decadastre disponible. Pour lister le type de constructions affectés et l’importance des dégâts, il a fallu compterdirectement sur les sites avec l’aide de bénévoles. Même le recensement des personnes touchées fut compliquépuisque les gens avaient perdu leurs papiers d’identité et les registres des propriétaires à Santiago étaient caducs.

II) UTILISATION DE LA SIGLe manque d’information sur le cadastre ainsi que d’un plan précis des localités a constitué le premier obstacle

d’importance pour mettre en place le plan de reconstruction des communes côtières. Il était donc nécessaire decartographier ces sites afin de pouvoir modéliser un futur tsunami et donc d’identifier les zones à risques. Refairecette cartographie était aussi nécessaire car la topographie avait changé après la catastrophe. En recoupant :

o des photographies prises par un satellite allemand juste après le tsunami,o des pointages laser aérien réalisés par l’armée chilienne

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o des relevés topographiques sur place (comprenant la ligne d’inondation)o le cadastre et le recensement des dommages (dont l’acquisition a été longue et difficile)o une cartographie de la zone a pu être réalisée.

Réalisation et utilisation d'une carte des risques.

L'établissement d'une carte des risques était un enjeu majeur pour entamer la reconstruction de chaque ville:En effet il ne s'agissait pas de reconstruire des villes qui puissent être en proies au risque d'une nouvelle destructionface à un éventuel futur tsunami.

La réalisation de cette carte repose d'abord sur la connaissance de la géographie du lieu de reconstruction(dénivelé, présence de cours d'eau, nature des sols). Une fois connue la physionomie de la zone, elle est recrééeinformatiquement, puis on lui applique par modélisation informatique un tsunami (le pire scénario est envisagé).On peut alors analyser de quelle façon la zone est touchée (vitesse et hauteur de la vague)

Ce premier travail réalisé, plusieurs hypothèses sont considérées pour atténuer l'impact du tsunami.Généralement trois hypothèses sont étudiées. Elles intègrent la présence d'un mur anti-tsunami et font varier lalargeur de la zone tampon ainsi que de la zone dite d'atténuation. Après avoir obtenu l'impact du tsunami considérédans les différents scénarios l'une des hypothèses est retenue pour commencer à prévoir l'aménagement de lafuture ville. Le choix se porte généralement sur l'hypothèse dont le rapport entre la réduction de l'impact dutsunami et le prix de sa réalisation est le plus probant.

Une fois l'hypothèse d'aménagement de la zone côtière retenue, on réalise à proprement parler la carte desrisques de la ville. Cette carte découpe tout d'abord la ville en trois zones en fonction des degrés de risques dechacune (élevé, médian, inexistant). L’établissement de ces zones permettra de déterminer le type (maison, école,industrie...) et le mode opératoire (anti-tsunami, tsunami résistante, normale) des constructions que l'on y fera,ainsi que d’éventuels terrassements à réaliser. On intègre par ailleurs sur cette carte les voies d'évacuations vers

les points sûrs ainsi que le tracé d'une routedans les hauteurs (piet mont) qui permettre dedésenclaver la ville si la route principale estdétruite.

Plan de reconstruction établie à partir dela modélisation de la vague. On y voit :

o -les voies d'évacuations avec les zones deregroupement en rougeo -la route piet mont en bleu à l'extérieur dela villeo -la zone d'habitation à risque en jauneo -le bosquet d'atténuation en vert. Onremarque qu'il suit aussi la rivière et qu'il estparticulièrement dense et important àl'entrée de l'estuaire. Cette zone est la plussensible, ce fut en effet l'unique zone touchéepar un mini tsunami en 2011 après letremblement de terre du Japon.

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III) LES OBJECTIFS DE LA RECONSTRUCTION

A) La mise en place de protectionsLa protection anti-tsunami repose d'abord sur le principe de réduction de la vitesse et de la hauteur de la vague,

puis sur l'implantation d'habitations adaptées, en fonction des caractéristiques de la vague (vitesse et hauteur del'eau) obtenues sur la carte des risques.

PROTECTION DU LITTORAL

La première barrière mise en œuvre pour protéger la villeest un mur anti-tsunami. D’une hauteur d’environ 2.5m(5.5m au-dessus du niveau de la mer), légèrement incurvéet profondément ancré dans le sol, il constitue le premierobstacle au tsunami. Il a pour but de diminuer la hauteur dela vague ainsi que sa vitesse.

ZONE TAMPON / PARC D’ATTENUATION

Derrière le mur anti tsunami, un espace d’environ 40m de large appelé zone tampon doit rester vierge de touteshabitations. Il se compose d’une promenade côtière, de pistes cyclables, d’une route, de trottoirs, d'un parking etd’un espace vert. Ce dernier (appelé parc d'atténuation) est arboré et légèrement vallonné. Il a pour butd’augmenter le coefficient de frottement de surface de la zone tampon, et ainsi de diminuer la vitesse de la vague.Il possède aussi l’avantage d’absorber la pollution crée par le passage de la vague. Contrairement au mur anti-tsunami, le parc d’atténuation constitue une défense ‘fusible’: il doit être recréé après chaque raz de marée.

Reprèsentation du futur front mer de Dichato

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BATIMENT ANTI TSUNAMI / BATIMENT TSUNAMI RESISTANT

Le Chili a choisi de reconstruire au même endroit, plutôt que de quitter définitivement les zones à risques(contrairement au Japon). Malgré les protections citées plus haut, il existe encore des zones à risques habitées. Ila donc fallu adapter les habitations au risque tsunamique. On distingue 2 types d’habitation.

o les maisons anti-tsunami. Elles se situent dans les zones oùla vitesse de la vague reste importante (environ 2,5m/s).Ce sont des habitations sur pilotis métalliques n’ayantdonc aucun espace habitable au rez-de-chaussée. Ellessont placées dans des zones où la hauteur de la vague resteinférieure à 2.5m de manière à ce que celle-ci passe sousle premier étage, laissant ainsi les habitations intactes:

o les maisons tsunami résistantes. Elles se situent dans des zones où la vitesse de la vague est faible(<1.5m/s). Ce sont des maisons ancrées de 1.50m dans le sol par des fondations en béton armé. Toutela structure du rez-de-chaussée est en béton armé, les étages pouvant être fait de n’importe quelsmatériaux. Le rez-de-chaussée se compose aussi de larges ouvertures (portes, fenêtres, latrines) surchacune des faces. La vague traversera donc le rez-de-chaussée en détruisant les portes et les fenêtresmais la structure restera intacte.

B) L'améliorations de la qualité de vieAMENAGEMENT DES ESPACES / URBANISME

Le plan d’urbanisme mise au point pour chaque commune est directement lié avec la carte des risques établiepréalablement.

3 zones sont établies :

o Zone rouges / risques majeurs. On y trouve des petits commerces, des industries à faible risques, desinfrastructures de transport, des infrastructures sportives, des espaces verts etc.

o Zone orange / risques modérés. On y trouve des habitations et bâtiments anti-tsunami ou tsunamirésistantes, des commerces, diverses industries, et quelques bâtiments publics comme des écoles.

o Zone verte / risques nuls. Tous les bâtiments publics nécessaires en cas d’urgence sont implantés danscette zone, c’est-à-dire les hôpitaux, les bâtiments militaires, les commissariats et bâtiments depompiers. Les maisons dans cette zone sont classiques.

o Une fois ces règles d’aménagement établies, le plan d’urbanisme est pensée afin de convenir au mieuxà la population (transport, espace vert, zones commerciales, etc...) et de conserver l’identité locale.

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DEVELOPPEMENT DURABLE

La reconstruction d’une ville constitue aussi l’opportunité d’améliorer son impact sur l’environnement. Cetaspect a donc bien évidemment été pris en compte dans la reconstruction. Une étude énergétique des projetsproposés a révélé une diminution significative de la consommation des communes.

La mise en place de pistes cyclables, le réaménagement du réseau de transport en commun, l’implantationd’espaces verts ou de nouvelles zones agricoles sont autant d’actions qui s’inscrivent dans une démarcheécologique globale.

INDICATEURS DE QUALITE DE VIE

Un effort particulier a été fait dans l’élaboration d’indicateurs de la qualité de vie permettant de guider les choixà effectuer dans la reconstruction. Ces indicateurs ont été organisés en sept domaines : l’aspect urbain,l’environnement, la mobilité, l’espace public, l'équipement, les services de base et l'emploi. Ces indicateurs sontdéfinis dans le plan de reconstruction comme des données quantitatives correspondant à des variables mesurantla qualité de vie dans une localité et le bien-être de ses riverains. Avant toutes choses, ils sont définis par lapopulation de chaque commune et reflètent les besoins et priorités de la communauté. Mais ils comprennent aussides indicateurs universels représentant des paramètres permettant la comparaison et l’analyse (ex : taux dechômage, m2 d’espaces verts ou encore nombre de commerce). Ces indicateurs donnent donc une photographiede l’état actuel de la situation urbaine. Ils forment un outil permettant de mesurer, comparer et suivre dans letemps la façon dont la croissance affecte la qualité de vie. En conséquence leurs utilisations serait utile pour prendredes décisions de politique urbaine afin d’intervenir toujours dans le sens d’une amélioration de l’habitat.

RELANCE ECONOMIQUE ET PERSPECTIVE D'AVENIR

Au-delà de la construction pierre par pierre de chaque ville, la relance économique joue un rôle primordialedans le processus de réhabilitation -il s'agirait même du facteur clé-. Il faut apporter à la population des nouvellesperspectives d'avenir.

En effet le gouvernement et les différents acteurs de la reconstruction (tel que le PRBC18) ont rapidementcompris que leurs rôles allaient au-delà de la reconstruction de villes et qu’il s’agissait de recréer la vie dans cesvilles meurtries. Pour ce faire différents ministères chiliens ont subventionné des initiatives de relances àdifférentes échelles (allant 100 à 70 000 euros). En effet si beaucoup de projets subventionnés touchent uneéconomie très locale (achat de combinaisons de plongée pour les pêcheurs de coquillage par exemple), la créationde grands hôtels et de ports de plaisances le long de la côte, s'inscrit dans une politique économique régionalevisant à promouvoir le tourisme.

Par ailleurs la création d’emplois permet à la population de retrouver une activité quotidienne, ce qui constitueun premier pas vers une vie ‘normale’. Cela permet de se reconstruire petit à petit en se projetant vers l'aveniret d'avoir d'autres préoccupations que celles créés par le traumatisme de la catastrophe.

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C) La prise en compte des aspects sociauxLa gestion des problématiques sociales est l'un des défis majeurs de la reconstruction post-catastrophique. Pour

réussir, la participation citoyenne dès le début du processus de réhabilitions est nécessaire. Intégrer les problèmesculturels et préserver l'identité ne peux se faire sans une participation directe des populations concernées.

L'un des premiers principes choisit par le gouvernement a été de reconstruire aux mêmes endroits. Délocaliserune ville entière entraine souvent un refus en bloc de la population. Il y a un attachement fort des populations àleur terre. Celui-ci n'est pas seulement sentimental, il est aussi d'ordre pratique. Comment expliquer à des pêcheursqu'ils vont devoir vivre à 15km des côtes ?

Il sera donc toujours plus facile de faire oublier le traumatisme créé par la catastrophe et de reconstruire uneville (avec son activité économique), en restant sur les lieux du désastre. En effet, l'appropriation du nouvel habitatpar le citoyen est moins difficile dans ce cas de figure. La réponse à cette question posée aux habitants de Dichatoest sans appel:

o 55% des habitants veulent rester aux mêmes endroits et que la ville intègre des protections aux raz-de-marées

o 44.5% des habitants veulent quitter la zoneo 5.5% des habitants veulent rester aux mêmes endroits sans que la ville n'intègre des protections aux raz-de-

marées.

Mais la reconstruction post-tsunami pose plus de problème que la reconstruction post-sismique sur ce sujet. Lamise en place d'une zone tampon entraine forcement des expropriations et une redistribution des terrains alorsque dans les villes affectées uniquement par le séisme, il suffit de reconstruire les nouvelles maisons sur les vestigesdes anciennes. Les principales oppositions aux plans de reconstruction des communes côtières du BioBio venaientde l'expropriation des habitants logeant sur le front de mer (dans la zone rouge).

De nombreuses réunions avec les citoyens ont été réalisées afin d'expliquer les plans de reconstruction et deprendre en considération leurs avis. Mais il était très difficile de faire entendre aux habitants concernés parl'expropriation la nécessité de celle-ci. En particulier si leur maison n'avait pas été détruites (mais la carte desrisques intègrent tous les tsunamis possibles !). Le problème a été solutionné par l'argent. L'état a payé deux fois :pour le rachat des terrains inconstructibles et pour les nouveaux terrains avec les maisons.

Toujours dans l'optique d'intégrer les problématiques sociales et d'identité à la reconstruction le gouvernementa mis en place deux autres "principes" à suivre.

D'abord, se focaliser sur les familles et non pas sur les maisons. Si deux familles vivaient sous le même toit, l'étata financé la construction de deux maisons. Ce principe va au-delà d'une réponse à une problématique socialeengendrée par la catastrophe, puisqu'il constitue une amélioration de la qualité de vie comparée à celle précédentle tremblement de terre.

Ensuite, afin d'éviter de construire des lotissements de maisons "clones", il faut promouvoir la diversité. À partird'une banque de plans de maison parasismique et tsunami résiliente présélectionnées, chacun a pu choisir sonhabitation. À noter que l'aide apportée par l'état bénéficiait à tous quelques soit leur groupe social (riches etpauvres). Tout le monde était donc égal dans le choix de sa maison. Laisser le choix à la population présente undouble avantage. D'une part cela permet de respecter les goûts. Cela permet également au receveur de se sentirconcerné par la reconstruction. Le tous ayant pour but que le futur résident commence à s'approprier sonhabitation avant même le début des travaux. Cette participation des citoyens joue aussi un rôle central dans lerespect des cultures et de l'identité d'une commune. Dans certaines localités par exemple, les plans de maisons à

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2 étages ont été formellement rejetés par la population car ils ne correspondaient pas à l'identité locale. En effetdans ces localités toutes les constructions étaient de plein pied.

D) OrganisationROLE DU GOUVERNEMENT

Le premier travail du gouvernement a été un travail d'organisation. Dans un premier temps de nombreuxacteurs veulent intervenir dans l'urgence (volontaires, pompiers, policiers, architectes,...). Le rôle de l'état est alorsde structurer l'aide afin de la rendre plus efficace.

Dans un deuxième temps, une fois la phase d'urgence passée, l'état a du faire le lien entre les victimes et lesentreprises de construction. En tant que payeur mais non bénéficiaire, il était important de sonder l'ensemble desparties prenantes afin de rendre le travail efficace. Lors de notre rencontre avec une entreprise de constructionlocale près de Concepción, nous avons appris que le MINVU (ministère de l'habitation et de l'urbanisme) quisélectionnait les entreprises en tant que maitre d'ouvrage, avait plusieurs fois demandé aux constructeursd'énumérer les problèmes auxquelles ils devaient faire face. Ces entreprises ont d'abord connu une croissance trèsforte et soudaine. Elles sont parfois passées de 30 à 160 employés. Elles ont dû faire face à des problèmes d'inflationdes prix et de pénuries (de tôles ondulées par exemple). De plus l'état ne pouvait payer qu'une fois la constructionréalisée. Les entreprises ont donc dû engager leurs propres fonds pour la reconstruction. Néanmoins ce phénomènea eu deux conséquences positives:

o seules les entreprises de construction sérieuses sont restées sur le marchéo le temps de la reconstruction fut considérablement amélioré.

ROLE DES AUTORITES LOCALES

Le Chili est divisé en quinze régions. Chacune de ces régions possèdent un pouvoir relativement important faceau gouvernement de Santiago. Dans le cadre de la reconstruction, des problèmes liés aux divergences politiquespeuvent interférer et troubler le processus de reconstruction. En effet chacun veut s'approprier la réussite desprojets et utiliser la reconstruction à son compte comme outil de communication par exemple.

Dans la région de BíoBío, les autorités locales étaient plus directement confrontées aux problèmes liés à lareconstruction. Nous avons pu discuter avec Luciano Pariza, responsable du secplan de l'agglomération de Tome,c'est-à-dire en charge du suivi de la reconstruction de l'ensemble des communes de l'agglomération. Ce dernieravait travaillé directement avec les experts du PRBC18 et connaissait l'ensemble des problèmes techniquesauxquelles il a fallu et il faut encore faire face comme la quantité de terrain disponible, la mauvaise qualité du sol,les problèmes de cadastre entrainant un départ de zéro dans la reconstruction ou encore les problèmes d'accès àl'eau qui affectent toujours 50% des habitants de l'agglomération.

A cette échelle le rôle d'organisateur de la reconstruction est aussi très important. Il faut réussir à travaillersur de nombreux secteurs, avec de nombreux acteurs. Il est aussi certain que les autorités locales sont plusdirectement en contact avec les victimes de la reconstruction.

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Le processus de recinstruction au Chili après le séisme du 27 février 20103 au 14 mars 2014

Félix MÉLOUAntoine MEULEMAN

Projet Build-Back-Better15 février au 15 septembre 2014

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En arrivant au Chili, pour commencer notre voyage d'investigations, nous ne savions pas dans quoi nous nousengagions. Nous avions peu, voire très peu de contacts à rencontrer, nous n'avions pas pleinement conscience dece que fut la catastrophe du 27F et surtout c'était la première fois que nous allions pratiquer l'exercice de reporter.

Quel ne fut pas notre surprise de rencontrer tant d'acteurs de la reconstruction au Chili et d'horizons si variés.Cette première étape est et nous pensons restera un excellent point de départ pour notre étude. Nous avons eneffet pu aborder un grand nombre de questions concernant la reconstruction post-catastrophe mais aussi au sujetde la question de l'urgence. De plus, il semblerait que le travail réalisé et en cours de réalisation soit efficace, dequalité et apprécié de la plupart des Chiliens concernés (bien sur rien n'est jamais parfait !).

Finalement c'est avec plaisir (malgré le retard et quelque regrets concernant la perte de nos documents) quenous vous avons proposé cet article qui récapitule dans la mesure de nos qualités littéraires l'ensemble de ce quenous avons pu apprendre.

Par ailleurs nous tenons à remercier l'ensemble des personnes qui nous ont reçu avec intérêt et qui ont partagéleurs expériences avec plaisir ainsi que l'ensemble des personne nous ayant aidé pendant notre voyage.

-Ivan Cartes, Dr en Urbanisme, Doyen de la faculté d'architecture et d'urbanisme, Université de BíoBío

-Igor Bacigaluppi, Architecte spécialiste de SIG, Ex-PRBC18

-Carolina Arriagada, Architecte Urbaniste Municipalidad de Concepcion, Ex-PRBC18

-Alejandro Lara, Administrateur Public, Dr en Sciences Experimentales et sociales, Université de Concepción

-Luciano Pariza, Directeur Secpla, Commune de Tome

-Noemi Lamas, Architecte, LLamas Construcion

-Braian Vegenas, Ingenieur en génie civile

-Ana Claudia Amar, Secretariat executif des Campamentos, Ministerio de Vivienda y Urbanisme (MINVU)

-Rodriguo Donoso, Secretariat executif des Campamentos, Ministerio de Vivienda y Urbanisme (MINVU)

-Antonio, Responsable du syndicat des pêcheurs de Tome

Ainsi que:

-Samuel Alegria et sa famille

-Rodriguo Bahamondes

pour leur hospitalité