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Module 4 Partie 2. Les politiques économiques Chapitre 1. Allocation des ressources et réglementation des marchés « Bénéficiez des vertus du marché requiert souvent de s’écarter du laissez- faire » Jean Tirole Economie du bien commun 2016, p.56 Problématique traitée directement par le cours : faut-il opposer allocation des ressources par le marché et intervention économique de l’Etat ? 1. Les trois grands domaines de l’intervention économique de l’Etat : la typologie de R.Musgrave Document 1 : il n’existe pas d’économie de marché « pure » Penser la politique économique exige au préalable de s’interroger sur les justifications de l’intervention publique en économie de marché. Si l’Etat apparaît de prime abord comme étranger à la régulation des échanges marchands quand existe un mécanisme de prix équilibrant l’offre et la demande, la théorie économique reconnaît dans plusieurs domaines la nécessité de l’intervention étatique, en raison des imperfections du marché. (…) Source : Hubert Kempf « Les fondements théoriques de la politique économique » in Les notices de la documentation française « La politique économique et ses instruments », 2010, p.7 Document 2 La prévalence, l’universalité des marchés comme modes privilégiés de régulation et d’allocation des ressources est incontestable. Les marchés sont partout, ils débordent les frontières. (…) Et pourtant, les Etats sont toujours là, même s’ils s’adaptent, changent de nature, de responsabilités, et tendent à coopérer au sein d’ensembles plus vastes, de zones de libre- échange, unions monétaires ou unions politiques. Si les marchés sont partout, ils ne sont pas tout. Une bonne partie des liens économiques entre les individus ou les collectivités humaines se fait hors du marché (…). De surcroît les Etats restent évidemment maîtres du pouvoir législatif : à ce titre, ils affectent les conditions de fonctionnement des marchés et de réalisation des transactions. Ces différentes modalités d’action de la puissance publique font qu’il n’existe pas d’économie de marché pure, ce sont des économies de marché où l’intervention de la puissance publique est multiple, constante et systématique. Cela pose un problème de fond quant à la régulation de ces économies de marché mixtes. Dans le cas (fictif) d’une économie de marché pure, la régulation des décisions individuelles se fait par les prix, les marchés ayant justement pour fonction de permettre que se fixe un système de prix ESH ECE2 Camille Vernet 2016-2017 Nicolas Danglade

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Module 4Partie 2. Les politiques économiques

Chapitre 1. Allocation des ressources et réglementation des marchés

« Bénéficiez des vertus du marché requiert souvent de s’écarter du laissez-faire » Jean Tirole Economie du bien commun  2016, p.56

Problématique traitée directement par le cours : faut-il opposer allocation des ressources par le marché et intervention économique de l’Etat ?

1. Les trois grands domaines de l’intervention économique de l’Etat : la typologie de R.Musgrave

Document 1  : il n’existe pas d’économie de marché « pure »Penser la politique économique exige au préalable de s’interroger sur les justifications de l’intervention publique en économie de marché. Si l’Etat apparaît de prime abord comme étranger à la régulation des échanges marchands quand existe un mécanisme de prix équilibrant l’offre et la demande, la théorie économique reconnaît dans plusieurs domaines la nécessité de l’intervention étatique, en raison des imperfections du marché. (…)

Source : Hubert Kempf « Les fondements théoriques de la politique économique » in Les notices de la documentation française « La politique économique et ses instruments », 2010, p.7

Document 2La prévalence, l’universalité des marchés comme modes privilégiés de régulation et d’allocation des ressources est incontestable. Les marchés sont partout, ils débordent les frontières. (…) Et pourtant, les Etats sont toujours là, même s’ils s’adaptent, changent de nature, de responsabilités, et tendent à coopérer au sein d’ensembles plus vastes, de zones de libre-échange, unions monétaires ou unions politiques. Si les marchés sont partout, ils ne sont pas tout. Une bonne partie des liens économiques entre les individus ou les collectivités humaines se fait hors du marché (…). De surcroît les Etats restent évidemment maîtres du pouvoir législatif : à ce titre, ils affectent les conditions de fonctionnement des marchés et de réalisation des transactions. Ces différentes modalités d’action de la puissance publique font qu’il n’existe pas d’économie de marché pure, ce sont des économies de marché où l’intervention de la puissance publique est multiple, constante et systématique. Cela pose un problème de fond quant à la régulation de ces économies de marché mixtes. Dans le cas (fictif) d’une économie de marché pure, la régulation des décisions individuelles se fait par les prix, les marchés ayant justement pour fonction de permettre que se fixe un système de prix équilibrant l’offre et la demande agrégées sur tous les marchés. Dans le cas (tout aussi fictif) d’une économie sans aucun marché, la régulation des décisions individuelles se fait par le biais de décisions politiques, sans référence aucune à des prix. Dans une économie mixte, la difficulté est de concilier ces deux modalités de coordination. Un système de prix de biens marchands se détermine sur les marchés, mais les décisions publiques sont prises de façon politique (…). Il n’est pas de façon univoque de régler les inévitables conflits engendrés par ces deux logiques, marchande et politique, alors même qu’elles doivent fonctionner simultanément et conjointement.

Source : Hubert Kempf « Les fondements théoriques de la politique économique » in Les notices de la documentation française « La politique économique et ses instruments », 2010, p.7

Document 3 : le fonctionnement de l’économie de marché

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Décisions par le marché : préférences collectives exprimées par la variation des prix - régulation marchande

Décisions par la puissance publique : préférences collectives exprimées par le vote /choix politiques –

régulation politique

Décidées de la manière(s) dont les ressources économiques vont être utilisées

Document 4 : les trois objectifs de l’intervention économique de l’Etat selon R.MusgraveA la suite de Richard Musgrave (1959), on distingue usuellement trois fonctions essentielles de la politique budgétaire et, plus largement, de la politique économique :

- l’allocation des ressources (c’est-à-dire leur affectation aux différents usages possibles). Entrent dans cette catégorie les interventions publiques qui visent à affecter la quantité ou la qualité des facteurs de production disponibles dans l’économie ou à modifier leur répartition sectorielle ou régionale et, d’une manière générale, les politiques visant à fournir les biens publics : investissement en R&D, éducation, protection de l’environnement, …

- la stabilisation macroéconomique face à des chocs exogènes qui éloignent l’économie de l’équilibre (prix stables et plein emploi des facteurs de production), c’est-à-dire la réduction des écarts par rapport à cet équilibre. C’est le rôle que les économistes keynésiens attribuent usuellement aux politiques budgétaires et monétaires ;

- la redistribution entre agents ou entre régions, c’est-à-dire la modification de la répartition des revenus. C’est ce que visent les politiques de taxation progressive et les transferts sociaux. La redistribution a clairement un objectif différent de l’allocation ou de la stabilisation, puisqu’elle vise à un certain objectif de distribution du revenu à l’intérieur d’une société. Mais allocation et stabilisation semblent avoir des objectifs voisins. La distinction entre elles renvoie à la différence entre tendance de l’activité à long terme et fluctuations de court terme autour de cette tendance : les politiques d’allocation visent à accroître le niveau maximal de production atteignable sans inflation (la croissance potentielle) ; les politiques de stabilisation visent à minimiser l’écart entre la production effective et son niveau potentiel, ce que l’on appelle l’écart de production (output gap).

Source : Agnès Bénassy-Quéré, B.Coeuré, Pierre Jacquet & Jean Pisani-Ferry, « Politique économique », De Boeck, seconde édition, 2009, p.32

Document 5 : « l’horlogerie des règles » (Thesmar et Landier)En soi, la centralité de la question publique dans l’orchestration de l’économie ne doit pas étonner. Elle n’est pas nouvelle. Les gestes les plus simples de notre vie quotidienne, du steak que nous mettons dans notre assiette à la vitesse à laquelle nous roulons, sont finalement encadrés. Nous baignons dans l’intervention publique, et le plus souvent, c’est à notre grand soulagement. Car l’absence de règles, ou la lenteur à les formuler peut tuer. En 1847, le chirurgien hongrois, Ignac Semmelweis, découvrait qu’on pouvait considérablement limiter les infections des malades hospitalisés en forçant les médecins à se laver les mains avant toute opération. Sa découverte, statistiquement irréfutable, heurtait les croyances de l’époque. Il faudra plus de 20 ans pour que se généralise une pratique qui aurait pu sauver des milliers de vies. Comment choisir des systèmes de règles qui servent au mieux l’intérêt général ? Cette interrogation est essentielle. (…) Ce livre commence donc par une visite guidée de « l’horlogerie des règles ». Il s’agira de comprendre la raison d’être des règles que la puissance publique doit imposer au marché. (…) La doctrine de l’horlogerie évite de dicter des lois à l’aveuglette ; elle donne une grille au débat citoyen, elle permet de sortir du symbolique et des antagonismes rhétoriques entre ceux qui « croient à l’Etat » et ceux qui « croient au marché ». Ces deux pôles ne peuvent pas être dissociés. Ils sont le recto et le verso d’une même idée, celle de l’échange efficace : ceux qui croient au marché croient aussi à l’Etat.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p. 10-12

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2. L’allocation des ressources dans le cadre du marché : les conditions pour que l’allocation marchande soit optimale

2.1 La métaphore de la main invisible

Document 6 : la métaphore de la main invisibleDe façon générale, les économistes estiment (…) que les marchés concurrentiels (c’est-à-dire les marchés retenus dans notre modèle concurrentiel de base) permettent une utilisation globalement efficace des ressources rares de la société. Cette confiance dans les marchés remonte à l’œuvre maîtresse d’Adam Smith, publiée en 1776 et intitulé « La Richesse des nations ». Selon A.Smith, les travailleurs et les producteurs sont les principaux responsables du succès de l’économie, et cela parce qu’ils ne s’intéressent qu’à eux-mêmes et à leurs familles : « l’homme a presque continuellement besoin de l’aide de ses semblables, et c’est en vain qu’il l’attendrait de leur seule bienveillance. Il sera plus certain de réussir s’il peut faire appel à leur intérêt personnel afin qu’ils agissent en sa faveur et s’il peut leur montrer qu’il est de leur propre avantage de faire ce qu’il leur demande … ce n’est pas de la bienveillance du boucher, du marchand de bière ou du boulanger, que nous attendons notre dîner, mais bien de l’attention qu’ils portent à leurs propres intérêts … nous ne leur parlons jamais de nos propres besoins mais de leurs avantages ». En bref, A.Smith soutient que les individus qui poursuivent leur intérêt personnel sont ceux qui contribuent le plus à la promotion de l’intérêt public. Son idée est que les individus travaillent plus et mieux en faveur de l’activité économique globale de la société quand les efforts qu’ils fournissent leur sont également profitables. Il s’est servi de la métaphore de la main invisible pour expliquer comment l’intérêt personnel conduit au bien-être social : « l’homme recherche seulement son propre avantage et, dans ce domaine comme dans les autres, il est conduit par une main invisible à promouvoir des buts qui sont étrangers à ses intentions … En poursuivant son propre intérêt, il sert souvent mieux les desseins de la société que lorsqu’il essaie intentionnellement de le faire ». Cette idée joue un rôle très important dans les sciences sociales. Elle n’est pas du tout évidente. Il ne suffit pas que les individus travaillent dur pour qu’une économie soit gérée efficacement. Comment ces individus savent-ils ce qu’il faut produire ? Par quel mécanisme la poursuite non coordonnée par chacun de son intérêt personne peut-elle aboutir à des résultats efficaces ? L’un des acquis les plus important de la théorie économique moderne a été dans quel sens et sous quelles conditions on peut dire que le marché est efficace.

Source : J.Stiglitz « Principes d’économie moderne », De Boeck, 2008, p. 200

2.2 La maximisation du surplus collectif à l’équilibre de concurrence pure et parfaite

Document 7 : l’équilibre de marché et la maximisation du surplus collectifSur les marchés concurrentiels, les entreprises et les consommateurs sont nombreux. Chacun n’est responsable que d’une part infime des transactions de l’ensemble du marché. Pour un ménage ou une entreprise, les prix sont donc des données. Les entreprises, en maximisant leur profit, produisent en un point tel que leur coût marginal est égal au prix du marché. Les ménages, en faisant des choix rationnels, achètent jusqu’au point où leur disposition marginale à payer est égale au prix de marché. (…) Quand le marché est à l’équilibre, les entreprises peuvent vendre la quantité qui maximise leur profit compte tenu du prix de marché. De leur côté, les ménages sont en mesure d’acheter la quantité qui maximise leur utilité compte tenu du prix de marché. (…) Au prix d’équilibre, le surplus social (somme des surplus des consommateurs et des producteurs) est maximisé sur un marché concurrentiel.

Source : J.Stiglitz « Principes d’économie moderne », De Boeck, 2008, p. 200-202

Document 8 : équilibre et surplus collectifIl faut attendre les travaux des néo-classiques, en particulier la théorie de l’équilibre général formulée par Léon Walras dans Éléments d'économie politique pure ou théorie de la richesse sociale (1874), pour qu’une « formalisation » de la « main invisible » soit établie. Sous réserve du respect des hypothèses de la concurrence pure et parfaite (atomicité des agents, fluidité du marché, homogénéité des produits, mobilité parfaite des facteurs de production et transparence de l’information), le fonctionnement du marché permet d’obtenir le plus grand surplus collectif possible, c’est-à-dire le plus grand bien-être collectif. Sur le marché des biens et services, l’offre émane des producteurs et la demande des consommateurs.Les producteurs cherchent à maximiser leur profit sous contrainte de leurs coûts de production. Par conséquent, ils produisent jusqu’à ce que le coût marginal soit égal à la recette marginale (c’est-à-dire le prix en CPP)  ; dit autrement tant que le prix que rapporte une unité supplémentaire vendue est supérieure à son coût. L’offre alimente le marché tant que la production est rentable (c’est-à-dire qu’elle augmente le profit). ESH ECE2 Camille Vernet 2016-2017Nicolas Danglade

Les consommateurs cherchent à maximiser leur utilité totale (leur satisfaction totale) sous contrainte de leur budget. Les consommateurs consomment donc jusqu’à ce que leur utilité marginale soit égale au prix du marché, c’est-à-dire tant qu’ils considèrent que l’utilité retirée de la consommation d’une unité supplémentaire est supérieure à la désutilité liée à la perte de revenu. La demande répond à l’offre sur le marché tant la satisfaction marginale des consommateurs augmente.

Pour déterminer le surplus collectif, il faut alors partir du prix de marché, qui est fournit en CPP par le creusement des droites d’offre et de demande : P* dans notre schéma. Le surplus du consommateur correspond à l’écart entre le prix payé à l’équilibre de marché (P*) et le prix maximal que les agents demandeurs étaient prêts à payer. Par exemple pour une quantité inférieure à la quantité d’équilibre, on observe sur le graphique que chaque quantité demandée par le consommateur l’est à un prix supérieur au prix qui sera celui de l’échange. Les consommateurs réalisent donc un gain que l’on peut mesurer par l’aire de la surface C sur le graphique : le triangle situé au dessous de la droit de demande et au dessus du prix d’équilibre. Le surplus du producteur désigne la différence entre le prix reçu à l’équilibre et le prix minimum que les agents offreurs avaient envisagé. Les producteurs font donc un gain égal à l’air de la surface P du graphique pour la vente d’un volume de biens qu’ils étaient prêts à payer moins cher. Ce triangle correspond à la surface située au dessus de la droite d’offre et au dessous du prix d’équilibre.Le surplus total = surplus du producteur + surplus du consommateur. Il représente le gain à l’échange réalisé à l’équilibre en CPP par l’ensemble des agents présents sur le marché.

Document 9 : l’équilibre général en CPPA l’équilibre de marché, la quantité de biens demandée par les consommateurs est égale à la quantité offerte par les entreprises. Les marchés du travail et du capital atteignent l’équilibre selon un processus similaire. Sur le marché du travail, l’offre et la demande de travail s’égalisent pour un niveau de salaire d’équilibre. A l’équilibre, l’offre de travail des ménages est égale à la demande de travail des entreprises. Sur le marché du capital, l’équilibre est obtenu par des ajustements du taux d’intérêt. A l’équilibre, l’offre de travail des ménages est égale à la demande de travail des entreprises. Sur le marché du capital, l’équilibre est obtenu par des ajustements du taux d’intérêt. A l’équilibre, le montant de l’épargne offerte par les ménages est égal au montant des emprunts des entreprises. Quand les trois marchés sont à l’équilibre, les grandes questions de base «  que produit-on ? Comment produire ? Et pour qui produire ? » sont résolues par l’interaction des ménages et des entreprises sur le marché. Quand tous les principaux marchés d’une économie ont atteint leur équilibre de cette façon, les économistes disent que l’économie est à l’équilibre général.

Source : J.Stiglitz « Principes d’économie moderne », De Boeck, 2008, p. 200

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2.3 L’optimum de Pareto

Document 10 : l’optimum au sens de ParetoL’argument selon lequel les marchés concurrentiels assurent l’efficacité au sens de Pareto peut être reformulé de façon simple comme suit : une réallocation des ressources ne peut être avantageuse que pour ceux qui l’acceptent de leur plein gré. A l’équilibre concurrentiel, les individus ont déjà procédé d’eux-mêmes aux échanges qu’ils comptaient effectuer : étant donné les prix en vigueur, personne ne souhaite produire ni demander plus ou moins. L’efficacité au sens de Pareto ne veut pas dire qu’il n’existe aucun moyen d’améliorer le sort d’une ou de plusieurs personnes. Il est en effet toujours possible de retirer des ressources aux uns pour les donner aux autres, et d’améliorer ainsi le bien être de ces derniers. Mais cela se fait au détriment des premiers.

Source : J.Stiglitz « Principes d’économie moderne », De Boeck, 2008, p. 200

Document 11 : de l’équilibre partiel à l’équilibre général

Document 12 : le premier théorème de l’économie du bien êtreLa formalisation mathématique de la « main invisible » se poursuit avec les travaux de Kenneth Arrow et de Gérard Debreu (Existence of an Equilibrium for a Competitive Economy, 1954). A la suite d’une démonstration mathématique, ils proposent un théorème du bien-être qui s’énonce de la façon suivante  : tout équilibre général en concurrence pure et parfaite est un optimum de Pareto.

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Sur un marché

Offre Demande

Calculs des offreurs et des demandeurs qui optimisent leurs choix en fonction de leurs

contraintes

Equilibre de marché = situation où les surplus des offreurs et les

surplus des demandeurs sont les plus élevés possible (il n’est pas possible d’augmenter le surplus des demandeurs sans baisser celui des offreurs). C’est la situation optimale définie

par Pareto

L’équilibre partiel = la meilleure situation individuelle et collective possible. Le bien être individuel se confond avec le bien être collectif (le marché est « guidé » par une main invisible pour réaliser l’intérêt général alors que cet objectif n’est pas ce qui motive les décisions individuelles)

En cas de déséquilibres, le marché est auto-régulateur (flexibilité des prix)

Sur tous les marchés

Les variations des prix relatifs permettent l’équilibre simultané de tous les marchés

En cas de déséquilibres, les marchés sont auto-régulateurs

L’équilibre général =la meilleure situation individuelle et collective

possible. Le bien être individuel se confond avec le bien

être collectif. Le marché est « guidé » par une main invisible pour réaliser l’intérêt général alors qu’il n’est que l’agrégation des décisions individuelles.

De l’équilibre partiel à l’équilibre général : ce qui est vrai pour un marché est également

vrai pour tous les marchés

Ainsi, en présence d’un « système complet de marché » (ce qui suppose l’existence d’un marché pour tous les biens qui puissent satisfaire les consommateurs), un équilibre de marché en situation de concurrence pure et parfaite suffit pour atteindre un optimum de Pareto. Le théorème du bien-être stipule donc qu’une économie parfaitement concurrentielle permet d’atteindre le bien-être social le plus élevé possible – puisqu’il n’est pas possible d’améliorer le bien-être d’un individu sans qu’un autre souffre de ce changement. Autrement dit, des agents soucieux de maximiser leur intérêt individuel conduisent à une allocation des ressources pareto-optimale (ou la plus efficace d’un strict point de vue économique). Tous les échanges mutuellement avantageux se réalisent. Ce théorème du bien-être propose finalement une formulation moderne de la « main invisible » d’Adam Smith : lorsqu’il fonctionne de façon parfaite, le marché est l’institution qui « produit » la situation collective la plus enviable.

Document 13 : l’intervention économique de l’Etat dans le domaine de l’allocation des ressources

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Action de l’Etat sur l’allocation des ressources ?

Les caractéristiques du marché réduisent l’efficacité

de l’allocation

Les comportements des acteurs présents sur le marché doivent être

encadré

Les préférences sociales conduisent l’Etat à intervenir

(il n’est pas nécessaire de justifier cette intervention par la présence de défaillances)

L’Etat intervient pour compenser les défaillances de marché car certains B&S

sont trop ou pas assez produits

Politique de la concurrenceRégulation /supervision de certains

secteurs

3. Les caractéristiques du marché produisent des « défaillances » : l’analyse de ces défaillances de marché dans le cadre de l’approche néoclassique traditionnelle

Document 14 : L’action économique de l’Etat dans le cadre de l’allocation des ressources = réaliser l’intérêt général (rapprocher les actions individuelles de l’intérêt général)

La vision classique de l’économie, depuis le début du 20ième siècle (…) retient donc que les défaillances du marché appellent l’intervention publique de façon à améliorer la régulation d’ensemble de l’économie. L’Etat est ainsi implicitement investi du souci de l’intérêt général (…). Pour les économistes, ce souci de l’intérêt général se décline de deux façons. La puissance publique doit d’abord assurer la meilleure allocation des ressources existantes pour la collectivité, et ce dans une perspective intertemporelle. Les ressources doivent être utilisées de façon efficiente, en particulier en ce qui concerne la production des biens non marchands et la gestion des externalités. Cela requiert des investissements publics et nécessite qu’on se soucie de la protection et du bien-être des générations futures.

Source : Hubert Kempf « Les fondements théoriques de la politique économique » in Les notices de la documentation française « La politique économique et ses instruments », 2010, p.10

3.1 La structure des coûts empêche la concurrence : le monopole naturel vs les consommateurs

3.1.1 L’apparition du monopole naturel et ses conséquences sur le surplus du consommateur

Document 15 : le monopole naturel et l’abus de position dominanteQuand, étant donné la taille du marché du bien considéré, la production est réalisée à moindre coût par une seule entreprise, la structure industrielle qui émarge naturellement est le monopole. En effet, (dans ce cas), la rentabilité d’une entreprise augmente en même temps que son échelle de production (elle connaît des rendements d’échelles croissants). L’entreprise la plus importante est alors en mesure d’éliminer ses concurrents. (…) Ce (..) cas résulte généralement d’importants coûts fixes (que l’augmentation de la production permet de répartir sur davantage d’unités, ce qui pousse à la baisse le coût moyen), comme on l’observe traditionnellement dans des secteurs tels que le transport ferroviaire, les télécommunications, la distribution d’eau, de gaz et d’électricité. Si, dans ce type de situation, les mécanismes de marché permettent de sélectionner la structure industrielle qui est optimale du point de vue de la collectivité (la structure monopolistique est en effet ici celle qui minimise le coût de production), ils conduisent en effet à un niveau de production sous-optimal. La position de monopole confère en effet à l’entreprise un pouvoir sur les prix (elle est price maker) dont elle cherchera à tirer parti pour accroître son profit. Cela se traduira par le choix du niveau de production dont le coût marginal s’égalise à la recette marginale alors que l’optimalité parétienne requiert l’égalisation du coût marginal au prix de la demande (c’est-à-dire à la disposition marginale à payer).Source : Y.Croissant et P.Vornetti « Les motifs de l’intervention publique » in Cahiers Français n°313, 2003, p. 5

Document 16 : émergence du monopole naturelOn trouve cette structure de marché dans les secteurs qui réclament d’importants coûts fixes au départ (comme les réseaux de transports, de télécommunications, ou encore de distribution d’eau, de gaz ou d’électricité). Le monopoleur doit s’accaparer de l’ensemble de la demande disponible afin de rentabiliser ses investissements initiaux conséquents (les coûts fixes sont très élevés pour produire la première unité). La première entreprises entrée sur le marché est en mesure d’emporter tout le marché et de conserver son monopole, on parle de « winner takes all » ou de « first advantage mover » Or, rappelons qu’en concurrence pure et parfaite, les agents doivent être « price takers » : en raison de l’atomicité, aucun d’entre eux ne doit être en mesure d’influencer le niveau des prix. La difficulté vient de ce que dans le cas du monopole naturel, cette situation ne s’observe pas. Le monopole naturel est « price makers ». Si un acteur privé s’empare de ces marchés, il risque de se servir de son pouvoir de marché pour fixer des prix trop élevés (afin d’accroître) pour que tous les consommateurs intéressés puissent acquérir les services produits. Par conséquent, le niveau de production risque d’être sous optimal. Ainsi, si les mécanismes de marché permettent de sélectionner la structurelle industrielle la plus efficace pour la collectivité – le monopole –, ils ne conduisent pas à l’optimum social. Comme les monopoles naturels se situent sur des marchés qui ne sont pas contestables – compte des importants coûts fixes initiaux qui constituent une barrière à l’entrée –, la concurrence ne peut être rétablie pour faire baisser les prix.

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3.1.2 L’intervention publique en situation de monopole naturel : du monopole public à la dérégulation du marché

Document 17 : nationalisation ou subvention à une entreprise privée Une solution consiste à nationaliser les monopoles naturels (de façon à ce que ce ne soit pas un acteur privé qui puisse bénéficier de cette rente de situation). Si l’Etat se charge de ces productions – par le biais d’entreprises publiques. Mais il existe d’autres moyens de lutter contre la défaillance du marché provenant d’un monopole naturel. L’Etat peut déléguer le marché à une entreprise privée (avec l’obligation de respecter un cahier des charges et un prix praticable). L’obligation de respecter ce « prix plafond » (« price cap ») est intéressant car il oblige l’entreprise à réaliser des gains de productivité pour augmenter son profit.

Document 18 : évolutions technologiques, industrie de réseau et disparition du monopole naturelLes caractéristiques technologiques (que nous avons décrites pour l’eau), à savoir des rendements croissants et des investissements initiaux irréversibles, se retrouvent à des degrés divers dans de nombreuses industries de réseaux, comme la poste, le gaz, l’électricité, les télécoms, le rail, les transports urbains. De fait, ces industries ont longtemps été structurées et régulées comme des monopoles naturels. En France, elles ont même été longtemps gérées par des monopoles publics que nous connaissons tous : PTT, GDF, EDF, France Telecom, SNCF. A l’échelle mondiale, les soixante-quinze premières années du 20ième siècle ont été marquées par une très forte régulation de ces secteurs, en interdisant généralement l’entrée pour éviter des effets de compétition destructrice et consolidant souvent des monopoles locaux pour bâtir des monopoles nationaux. Depuis le milieu des années 1970, la notion de monopole naturel s’est vue attaqué par les économistes et les politiques. Cela a fait suite à des évolutions technologiques qui ont diminué l’importance des rendements croissants (…). Dans certaines des industries de réseau, comme les Télécom, le principe du monopole national a été abandonné. Dans d’autres, les régulations ont été modifiées pour ouvrir à la concurrence des segments potentiellement compétitifs du secteur. Par exemple, pour l’électricité, la production (dont les rendements ne sont pas « trop » croissants) a été ouverte à la concurrence, tandis que le transport par les lignes haute tension (qui lui représente de forts rendements croissants) restait régulé comme un monopole. De même, le monopole du réseau ferré reste intact, mais des transporteurs privés peuvent maintenant y accéder et concurrencer la SNCF.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p.29-38

Document 19 : le traitement du monopole naturel

3.1.3 L’exemple de la fourniture de l’eau

Document 20 : le monopole naturel, le cas de la fourniture d’eau

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Production à coûts fixes importants pour mettre en place

réseau de distribution

Monopole naturel

Nationalisation : monopole public

Délégation de service public : l’Etat n’est pas

producteur mais il régule le marché

Pour éviter abus position dominante

Séparation activité de réseau et activité de fourniture du service : rendre le marché contestable

(ouvert à la concurrence)

Activité de réseau = monopole public

Fourniture du service  = entreprises privées en concurrence

Disparition du monopole public et prix de marché de concurrence

dans le cadre de la fourniture de service

L’eau du robinet est en France, comme presque partout dans le monde, un monopole. A un moment donné, et à un endroit donné, un seul prestataire peut amener l’eau jusqu’à votre robinet. L’eau étant un produit de première nécessité, le régulateur doit protéger le consommateur face à un monopole dont il est tout bonnement forcé d’être le client. Mais commençons par le début. Comment se fait-il que malgré les injonctions de la concurrence, certains secteurs comme l’eau finissent presque automatiquement dans les mains d’un monopole ? (…) Les mécanismes qui font que la concurrence directe n’est pas possible dans certains secteurs ont trait à la technologie en place, ils sont donc littéralement une contrainte physique qu’on ne peut éliminer par décret. (…) La distribution d’eau n’est pas un exemple choisi au hasard. C’est même l’un des seuls domaines où un consensus existe chez les économistes pour parler de monopole naturel. Si l’on peut qualifier de naturel le monopole de l’eau du robinet, c’est parce que la duplication de l’infrastructure de distribution d’eau serait très coûteuse : il faudrait rajouter tout un réseau parallèle de canalisations, ce qui représente un coût fixe très élevé. Par exemple, pour la Ville de Paris, le réseau actuel compte plus de 3000 kilomètres de canalisations. (…) Pour l’eau, ce sont des contraintes physiques qui font qu’une seule entreprise dessert votre robinet. Lorsque l’on essaie de généraliser cet exemple pour circonscrire les situations où les contraintes technologiques conduisent naturellement au monopole, on s’aperçoit que ce sont les coûts de production d’un produit en fonction de la quantité produite qui sont au cœur du problème. On parle de rendements croissants (…). Quand les rendements sont croissants, le monopole géant écrasera toujours un petit entrant, car sa technologie lui permet de produire à un plus faible coût. (…) Au fond ce n’est pas une mauvaise nouvelle puisque cela reflète la possibilité de faire des économies en rassemblant les consommateurs comme clients d’une entreprise unique. Mais comment faire en sorte que le consommateur bénéficie de ces économies d’échelle ? Réguler les prix est-il le seul moyen d’y parvenir ? (…) Certains économistes ont soutenu l’idée que tant que le monopole est « contestable », les prix resteront raisonnables. Si le monopole commence à faire des profits importants, un autre « géant » peut venir le remplacer et « rafler » le monopole en proposant des prix plus faibles. Il n’y aurait donc pas lieu de réguler les prix. (…) Il est facile de voir que cette théorie (du monopole contestable) ne fonctionne pas dans le cas de l’eau, car l’investissement initial en canalisations, nécessaire pour devenir un distributeur est énorme ; mais une fois cet investissement réalisé, le « coût marginal » (celui de servir un client supplémentaire) est quasi nul. Résultat : si deux distributeurs d’eau sont en position de servir les consommateurs, une guerre des prix sans merci sera inévitable. Celle-ci se terminera par la faillite du concurrent le plus faible et un retour à la situation de monopole. Au final, l’entrepreneur qui envisage de contester le monopole anticipe cette séquence infernale et décide simplement de ne rien faire. Il n’y a pas de contestabilité véritable sur ce marché.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p.29-38

Document 31 : monopole naturel privé et délégation de service public(Il n’y a pas de contestabilité véritable sur ce marché) Il faut donc dans pareille situation un régulateur pour contrôler les prix et s’assurer que le monopole ne prend pas en otage les consommateurs. En fait, le régulateur devra contrôler non pas seulement les prix mais aussi «  l’entrée » en désignant le monopole et en s’engageant à ce qu’il ne soit pas contesté pendant un certain temps. (…) En effet, laisser le monopole émerger naturellement risque de conduire soit au sous-investissement (personne n’entre), soit à du sur-investissement suivi d’une compétition destructrice pour décider du gagnant. (…) Comme cela s’est produit à Londres au début du 19ième siècle. Flechter décrit en 1845, le résultat désastreux dans certains quartiers  : chaussée publique devenue infranchissable, faillites d’entreprises et interruption de services pour leurs consommateurs, instabilité des prix et problèmes sanitaires débouchant sur des épidémies meurtrières. Reconnaissant que le principe de concurrence ne s’appliquait pas à l’approvisionnement en eau, le Parlement resserrera progressivement les régulations, politique culminant en 1902 avec la municipalisation intégrale des compagnies privées, c’est-à-dire l’instauration d’un monopole public. (…) En France, bien que l’approvisionnement en eau ait été très tôt délégué à des entreprises privées, le principe de monopole naturel a été tout de suite acquis. (…) Cette longue tradition de délégation de service public de l’eau ne se verra jamais remise en cause. Aujourd’hui, seulement ; 20% du volume d’eau distribué relève d’une gestion directe par les communes. Le reste du marché est partagé par trois grands acteurs privés. (…) Si le rôle du privé est prépondérant, il ne faut pas s‘y tromper, il n’y a pas compétition directe mais compétition pour devenir le monopole local pendant une certaine période. Autrement dit la police du marché est bien là ; elle institue et contrôle le monopole naturel. (…) En échange de leur position de monopole pour une durée donnée, les entreprises privées, doivent respecter une grille tarifaire, dont l’évolution est négociée à l’avance, et un cahier des charges, qui inclut des contraintes sur la qualité, l’entretien des installations … (…)

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p.29-38

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3.2 La nature de certains biens rend l’allocation marchande sous-optimale

3.2.1 Sur-consommation de biens communs et sous-production de biens collectifs

Document 21 : typologie des biensCaractéristiques des biens Non excluabilité Excluabilité Non rivalité Biens collectifs (public goods) Biens de clubRivalité Biens communs Biens privés

Critère d’excluabilité : il est possible d’exclure des AE de l’accès à un bien ou service ; conséquence : seul les AE qui « paient » le bien ou service peuvent y accéder ; Critère de rivalité : l’utilisation du bien ou service par un AE prive les autres AE de l’utilisation de ce bien ; conséquence : à chaque fois qu’un AE utilise un bien ou service, la quantité disponible pour les autres AE diminue ;

Document 22 : distinguer biens collectifs et biens communs

Document 23 : la sur-consommation des biens communs, « la tragédie des communs »Une ressource renouvelable est en effet intermédiaire entre bien privé et bien public (ou bien collectif). Elle partage avec le premier son caractère rival qui fait que sa consommation par un agent l’interdit aux autres, et elle

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Cas d’un bien non – excluable

Le producteur ne peut pas contrôler l’accès à la consommation par les AE de son bien / service

Les consommateurs sont incités à adopter une stratégie de passager clandestin : ils ne

paient pas pour consommer

Conséquence : les producteurs ne sont pas incités à produire ce type de bien =

le bien est sous-produit

Le bien est rival Le bien est non-rival

Chaque consommation réduit le stock

- D’un côté, aucun producteur n’est incité à produire ;

- De l’autre côté, aucun consommateur n’est incité à limiter sa consommation

puisqu’il n’en paie pas le prix

Tragédie des « communs » (Hardin)

Chaque consommation n’affecte pas le stock 

- D’une part, il peut consommer sans payer, ce qui n’incite pas les producteurs à produire ;

- D’autre part, chaque consommation ne réduit pas le stock total = que le bien soit

produit pour un AE ou pour tous les AE, le coût de production est le même

Situation de sur-consommation : la consommation dépasse l’effort de

production

Situation de sous-production : aucun producteur ne veut produire un bien/service

qui est accessible à tous « gratuitement »

Biens collectifs

possède comme le second la difficulté d’exclusion de son usage. La capture d’un poisson supplémentaire par un pêcheur entraîne une diminution de la taille de la population (de poisson), donc de sa taille future, et conduit à rendre plus difficiles et donc plus coûteuses les captures ultérieures. On est là en présence d’une externalité de production, où l’activité d’un pêcheur a des conséquences sur l’ensemble des exploitants (on entend ici par externalité l’existence d’une différence entre le coût privé pris en compte par le pêcheur dans sa décision de capture et le coût social supérieur qui sera supporté par la collectivité du fait de sa décision). La combinaison de ces deux facteurs, externalité d’exploitation et accès libre, conduit à la « tragédie des biens communs » analysée par Hardin.

Source : Gilles Rotillon « Economie des ressources naturelles », La découverte, 2010, p.53

3.2.2 Résoudre les problèmes d’allocation des biens communs et la « tragédie des communs »

Document 24 : privatiser, nationaliser ou réglementer Pour lutter contre la surexploitation des biens communs, plusieurs options sont possibles :La privatisation des biens communs est une première option : l’Etat décide de distribuer des droits de propriété et de laisser faire le marché. On peut citer l’exemple historique des enclosures en Angleterre. Comme le bien commun devient payant, son usage doit être limité. Cette possibilité se rapproche du théorème de Coase : les acteurs qui font usage des biens communs se paient les uns les autres de manière à ne pas surexploiter la ressource.La nationalisation des biens communs est une seconde option : l’Etat devient propriétaire de la ressource surexploitée et décide de son utilisation (soit directement par le biais d’entreprises publiques, soit en confiant cette gestion à une entreprise privée).

Document 25 : réglementation et quotaLa réglementation imposée par l’Etat – qui veille également à son application. Les pouvoirs publics limitent l’accès à la ressource de type bien commun en édictant des normes. La restriction d’accès peut prendre des formes très différentes : limitation des dates durant laquelle l'exploitation est autorisée (périodes de chasse par exemple), règles sur les moyens employés (à l’instar des tailles maximum des filets de pêche), ou interdiction complète (dans le cas, par exemple, des espèces en péril ou protégées). Pour éviter la surpêche de certains poissons, des quotas peuvent être mis en place (ce qui est une autre forme de réglementation). Sur le graphique ci-dessous, on perçoit bien les effets d’un quota sur un marché : en imposant une quantité maximale, la quantité échangée est inférieure à la quantité d’équilibre (Qquota <Q*) ; cela génère une perte sèche – qui correspond à la baisse du surplus total suite à la réduction de la quantité échangée.Les effets du quota sur un marché :

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Document 26 : la coopération et la gestion collective des biens collectifs (Elinor Ostrom)Dans Governing the Commons : The Evolution of Institutions for Collective Action (1990), Elinor Ostrom, Prix Nobel d’Economie en 2009, démontre qu’il est possible de sortir de l’alternative entre l’Etat et le marché pour bien générer les biens communs. Des acteurs locaux mettent en place des institutions, sous la forme d’auto-organisation, afin d’entretenir une exploitation raisonnée des biens communs (limitation de l’usage pour qu’ils existent à long terme). Ces stratégies d’autogouvernance collective sont respectées car chacun sait que cela lui permettra de profiter des ressources plus longtemps (et de les léguer à ses enfants). Les cas étudiés par Elinor Ostrom sont tous des communautés de petites échelles, dans lesquelles chaque membre a une parfaite connaissance des règles existantes. La coordination des hommes par le biais de ce mécanisme institutionnel conduit généralement à l’optimum social. Ce n’est ni la loi marchande, ni l’intervention de l’Etat qui permettent l’allocation optimale des ressources mais bien la volonté des hommes de se coordonner suivant leurs propres règles. Dans la plupart des communautés étroites étudiées par Ostrom, les droits d'accès aux biens communs restent dépendants des droits de propriété personnels. En suisse, dans un village de montagne, le droit d’accès aux pâturages communaux est proportionnel à la taille de la propriété privée. A Valence, en Espagne, qui se situe dans une région très chaude où l’eau peut venir à manquer, le système d’accès aux canaux d’irrigation s’appuie sur une rotation établie à partir de la taille de la propriété personnelle. Même s’il peut exister des logiques de contrôles et des mécanismes de résolution des conflits – toujours en interne –, c’est d’abord et surtout l’adhésion volontaire et l’auto-coordination qui autorise la pérennité des règles mises en place et donc des biens communs. Elinor Ostrom est en désaccord avec l’hypothèse sur laquelle s’appuie Hardin : les hommes ne sont pas nécessairement des êtres qui cherchent à « maximiser leur profit individuel » ; on peut compter sur le sens collectif des individus, sur leur responsabilité. Ainsi, à côté de la gestion par l’Etat ou par le marché, il existe une autre formule pour gérer efficacement le devenir des biens communs : les « arrangements institutionnels » que décident les hommes entre eux qui, bien souvent, existent depuis très longtemps. Olstrom juge même qu’il s’agit de la méthode la plus efficace pour atteindre l’optimum social et éviter la tragédie des biens communs.

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3.2.3 L’Etat prend en charge certains biens collectifs pour éviter leur sous-production : ils deviennent des biens tutélaires

Document 27 : la prise en charge de certains biens collectifs par la puissance publiqueL’intervention de l’Etat consiste alors à financer la production de certains biens collectifs. Usant de son pouvoir de coercition, il prélève des impôts afin de rendre possible la production des services collectifs qu’il juge indispensable : défense, entretiens des espaces publics, le réseau hertzien, etc ... La défense de la nation est un bon exemple pratique : chacun a besoin d’être défendu en cas de nécessité mais a aussi intérêt à ne pas subir les coûts de la mobilisation (qui est risquée) ; par conséquent, les individus bénéficient de l’engagement de certains, organisé par l’Etat, sans en supporter les conséquences. Ces biens collectifs produits par la puissance publique sont appelés des biens tutélaires.

Document 28 : certains biens « collectifs » deviennent des biens « tutélaires » (produits par l’Etat)Les agents privés n’ont généralement pas intérêt à produire des biens collectifs, et ils font donc souvent l’objet d’une production publique s’ils sont jugés utiles pour la collectivité. C’est le cas des grands services régaliens (comme la justice ou la défense nationale) mais aussi des services administratifs chargés de représenter et de défendre l’intérêt général dans chaque domaine d’activité. Différentes administrations publiques interviennent ainsi dans le processus de gestion de l’eau, comme les directions départementales de la cohésion sociale et de la protection des populations, chargées notamment de la surveillance sanitaire, elles contrôlent la qualité de l’eau fournie dans chaque commune.

Source : M.Navarro et E.Buisson « La microéconomie en pratique », A.Colin Cursus, 2012, p.206

Document 28’ : des biens collectifs aux biens tutélaires

Document 29 : attention, des biens collectifs peuvent être produits par des AE privés ! La mise à disposition de certains biens collectifs peut être le fait de l’initiative privée. R.Coase montre («  Le phare en économie », 1974) que les phares, prototype du bien collectif, se sont en fait développés à partir du 17ième siècle en Angleterre grâce à l’initiative privée. Il pouvait en effet s’avérer rentable de construire un phare dans une région puis de réclamer un droit de passage aux navires accostant à proximité. Les modalités de gestion des biens collectifs restent donc assez plastiques

Source : M.Navarro et E.Buisson « La microéconomie en pratique », A.Colin Cursus, 2012, p.191

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Biens collectifs

Jugés non nécessaires à la collectivité

Jugés nécessaires à la collectivité

+ Choix politiques

Production réalisée par la puissance publique

Biens tutélaires

Document 30 : les biens collectifs produits par le privé !

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Les biens collectifs : les consommateurs agissent en passagers clandestins dans le

cadre d’une production dont on ne peut exclure personne

Première solution : trouver un moyen technique pour faire payer les

consommateurs

Seconde solution : trouver un second type de consommateur qui utilise le service et qui

ne peut pas agir en passager clandestin

Exemple du Phare en Angleterre au 17ième

siècle Exemple : la vente d’espace publicitaire dans

l’audiovisuel

3.3 La présence d’effets externes provoque une sur-production ou une sous-production de certains biens (ou services)

3.3.1 Les échanges ont des effets qui ne sont pas pris en compte par le marché : un écart entre somme des biens êtres individuels et bien être collectif

Document  31 : les externalités ne sont pas prises en compte par les AE participants aux échanges On parle d’externalité lorsque l’action de consommation ou de production d’un agent a des conséquences sur le bien-être d’au moins un autre agent sans que cette interdépendance soit reconnue par le système de prix, et donc sans donner lieu à compensation monétaire. L’agent émetteur de l’effet externe n’est alors pas conduit à intégrer dans son calcul avantages-coûts la nuisance (en cas d’externalité négative) ou le bénéfice (en cas d’externalité positive) que son comportement engendre pour autrui. Par suite, la valeur sociale de son activité diffère de sa valeur privée. S’il n’est pas rémunéré pour sa contribution au bien-être collectif, l’émetteur d’une externalité positive optera pour un niveau sous-optimal. Inversement, s’il n’a pas à assumer monétairement la pleine responsabilité des dommages qu’il impose, l’émetteur d’une externalité négative (d’une pollution par exemple) choisira un niveau d’activité supérieur au niveau socialement optimal. Notons que la défaillance de marché ne réside pas dans la pollution en tant que telle, mais se signale par le fait que son niveau est trop élevé. Pallier cette défaillance n’impose donc pas de supprimer la pollution. Puisque l’obstacle posé à l’efficacité du marché résulte des effets hors marché générés par les actions individuelles, le moyen d’y remédier consiste à « internaliser » ces effets. Dans cet esprit, l’intervention publique doit viser à accroître le coût privé de la production ou de la consommation des biens générant des externalités négatives et de réduire celui des biens à effets externes positifs. Source : Y.Croissant et P.Vornetti « Les motifs de l’intervention publique » in Cahiers Français n°313, 2003, p. 5

Document 32 : la somme des intérêts individuels s’écartent de l’intérêt collectif

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Externalités : des décisions individuelles (prises pour optimiser les intérêts individuels) ont aussi des conséquences sur des AE qui ne sont pas liés à l’échange

Si elles détériorent la situation des agents non liés à l’échange

Si elles améliorent la situation des agents non liés à l’échange

Les bénéfices privés tirés de l’échange > au bénéfice collectif

Les bénéfices privés tirés de l’échange < au bénéfice collectif

Externalités Externalités

Si le marché fonctionnait de manière optimale : ce type d’échanges

seraient ________nombreux = le bénéfice collectif augmenterait

Si le marché fonctionnait de manière optimale : ce type d’échanges

seraient ________ nombreux = le bénéfice privé augmenterait

Conclusion : les biens qui génèrent des externalités négatives _________

produits : il faudrait donc _________ leur production

Conclusion : les biens qui génèrent des externalités positives

_____________ produits : il faudrait donc __________leur production

3.3.2 Réduire les externalités négatives : l’exemple des externalités environnementales3.3.2.1 La réglementation

Document 33 : des normes qui s’imposent de manière identique à tous les AELe recours à la réglementation consiste à définir des normes qui s’imposent à tous les agents, sous le contrôle des autorités publiques. C’est le principal instrument utilisé actuellement pour réguler les prélèvements d’eaux souterraines en France. Les prélèvements individuels dans les nappes phréatiques offrent un bon exemple des problèmes collectifs posés par la gestion d’une ressource commune qui risque de s’épuiser localement ou de se dégrader, et qui est à l’origine de nombreuses externalités. Une surexploitation d’une nappe phréatique entraîne par exemple des externalités de coûts de pompage (il faut pomper plus profondément), diminue la possibilité de s’appuyer sur la nappe phréatique pour faire face aux fluctuations des eaux de surface, et accroît le risque de dégradation de la ressource (par exemple, une nappe qui se vide au bord des côtes est rapidement polluée par l’eau de mer qui l’envahit). Les normes en vigueur prévoient par exemple la déclaration obligatoire des forages et la fixation d’un quota de prélèvements. Dans les périodes de raréfaction de l’eau, les prélèvements sont interdits (…) de façon à assurer la reconstitution des réserves.

Source : M.Navarro et E.Buisson « La microéconomie en pratique », A.Colin Cursus, 2012, p.213

Document 34 : intérêt et limites de la réglementationCe type d’instruments est en apparence peu coûteux pour l’Etat contrairement à des subventions par exemple. (…) Mais en réalité, il se révèle peu efficace (…). Les normes ne valent d’abord que si elles sont appliquées, or plus elles se révèlent contraignantes et difficiles à vérifier, et plus elles incitent les agents à y échapper. Dans le Roussillon par exemple, région particulièrement touchées par les risques d’épuisement des eaux souterraines, seuls 5% à 10% des forages seraient déclarés. Si on accroît les contrôles, les normes seront davantage appliquées, mais les coûts de surveillance peuvent se révéler très élevés. (…) Les quotas entraînent souvent des effets distorsifs importants, car une norme qui s’applique uniformément à tous les agents ne tient pas compte du fait que certains peuvent s’y soumettre plus facilement que d’autres. Ainsi, pour un objectif donné de réduction des émissions polluantes, il est plus efficace de demander un effort relativement plus important aux entreprises pour lesquelles le coût de dépollution est moindre. Imposer à toutes les entreprises le même quota d’émissions polluantes ne permet pas d’atteindre l’objectif à moindre coût, car elles sont toutes obligées de se soumettre au même objectif alors qu’elles ont des contraintes de coûts très différentes. (…) Ce type d’instrument est toutefois adapté pour les émissions polluantes dangereuses où une réglementation stricte est nécessaire car il importe que toutes les entreprises, quelle qu’elles soient et où qu’elles se situent respectent ces normes, pour des raisons de santé publique.

Source : M.Navarro et E.Buisson « La microéconomie en pratique », A.Colin Cursus, 2012, p.213

3.3.2.2 La taxe (ou subvention) : la solution « pigouvienne » pour réduire les externalités

Document 35 : la taxe (subvention), un instrument pour internaliser les externalités La solution classique au problème des externalités négatives consiste à instaurer une taxe unitaire sur le bien polluant dont le montant soit égal au dommage marginal. Appuyée sur le principe du pollueur-payeur, cette taxe « pigouvienne » permet de rétablir la correspondance entre valeurs sociales et valeurs privées. Le remède pigouvien trouve également à s’appliquer dans le cas d’externalités positives telles que celles engendrées par la santé, l’éducation, la recherche, les transports … (il correspond alors à une taxe négative, c’est-à-dire une subvention). Source : Y.Croissant et P.Vornetti « Les motifs de l’intervention publique » in Cahiers Français n°313, 2003, p. 5

Document 36 : le montant des externalités négatives produites par l’utilisation de la voitureLe simple fait de prendre sa voiture nuit aux autres automobilistes, car un conducteur supplémentaire sur les routes accroît mécaniquement la probabilité de carambolage et, dans les agglomérations, provoque des ralentissements. Une externalité négative induit par la prise de volant existe donc toujours, même si l’on conduit bien, et sans une goutte d’alcool dans le sang. Au-delà des dommages corporels, le surcroît de dangerosité créé par chaque automobiliste pour les autres pousse à la hausse des primes d’assurance. La taille financière de cette externalité est considérable, surtout dans les régions à forte congestion routière. A.Edlin et P.Karaca-Mandic ont fait le calcul pour les Etats-Unis et trouvent un montant de l’ordre de 220 milliards de dollars par an pour le pays, dont 66 milliards pour la seule Californie, soit nettement plus que les recettes annuelles de cet Etat. Ce montant est la taxe qu’il serait nécessaire d’imposer aux automobilistes pour qu’ils prennent en compte l’externalité qu’ils exercent sur les autres. De manière générale, cette idée de taxer les comportements nuisibles à la mesure des ESH ECE2 Camille Vernet 2016-2017Nicolas Danglade

dommages est due à l’économiste A.C.Pigou : une taxe pigouvienne sur la circulation en centre-ville existe par exemple à Londres et à Stockholm. Dans cette dernière ville, le prix payé par les automobilistes dépend de l’heure à laquelle ils accèdent au centre ville : il est meilleur marché de circuler en dehors des heures de pointe. L’avantage d’une taxe pigouvienne sur une limitation arbitraire du nombre de voitures autorisées est que ceux qui ont vraiment besoin d’accéder en voiture au centre ville ne perdent pas cette flexibilité, tandis que ceux qui en ont la possibilité emploieront un autre moyen ou décaleront leur passage. Le régulateur ne pourrait pas deviner à priori qui tombe dans chacune de ces deux catégories. Un domaine où la taxe pigouvienne est devenue courante est celui de la pollution environnementale : on pense bien sur à la taxe carbonne.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p.39-43

Document 37 : portée et limites du principe du pollueur-payeurLa taxe pigouvienne présente de nombreux avantages théoriques. Elle conduit d’une part les agents à faire le choix de pollution optimale et conduit à ce que les pollueurs supportent les coûts sociaux de la pollution  : c’est le principe du pollueur payeur. (…) Cependant la taxe pigouvienne rencontre aussi des problèmes de mise en œuvre qui conduisent à s’interroger sur son efficacité réelle. Il faut supposer que la puissance publique dispose d’un excellent niveau d’information, de manière à déterminer précisément les coûts sociaux des externalités, faute de quoi elle pourrait introduire une taxation ayant plus d’effets perturbateurs que correctifs. D’où la question cruciale de l’évaluation des externalités. (…) Du point de vue de la taxe pigouvienne, le niveau actuel de la fiscalité sur les prélèvements des eaux souterraines est clairement insuffisant : la redevance versée à l’Agence de l’eau, que doivent payer ceux qui prélèvent des eaux souterraines (quand ils sont déclarés et possèdent un compteur d’eau) est de l’ordre de 0,02 à 0,03 le mètre cube, et les agriculteurs bénéficient en plus d’une décote importante par rapport à ce prix (…). La taxation n’est pas pensée pour réduire sensiblement les prélèvements, elle sert surtout à financer certains investissements sur les cours d’eau. Au-delà de cet exemple, l’expérience des dernières années montre que l’acceptabilité sociale d’une taxation écologique ne va pas de soi, (…) comme le suggère l’abandon de la contribution climat énergie, qui devait taxer les émissions de carbone associées à un certain nombre de biens. Elle s’est heurtée en 2009, après son adoption au Parlement, à l’avis négatif du Conseil constitutionnel, qui s’opposait à la rupture d’égalité devant l’impôt de la taxe en raison des nombreuses exemptions envisagées, or, ces exemptions avaient précisément été négociées au départ … pour favoriser son acceptabilité.

Source : M.Navarro et E.Buisson « La microéconomie en pratique », A.Colin Cursus, 2012, p.216

Document 38 : la taxe pigouviennePortée Limites

3.3.2.3 Les droits à polluer : la solution « coasienne » pour réduire les externalités

Document 39 : les externalités négatives existent car les droits de propriétés sont mal définis Quand une externalité concerne un petit nombre d’agents, une négociation entre ces derniers est envisageable. Elle donne la possibilité aux agents d’intégrer les externalités en trouvant un accord privé, fondé sur une compensation monétaire des coûts et des bénéfices externes. Prenons l’exemple d’un complexe touristique situé sur un lac et d’une industrie polluante en amont de la rivière qui alimente le lac. Considérons que d’un point de vue juridique, l’industrie a le droit de polluer la rivière. Le complexe touristique subit une externalité due à la pollution, dont il peut identifier la cause. S’il est capable d’estimer les coûts du préjudice subi, il a intérêt à engager une négociation avec la firme afin de trouver un accord dans lequel l’industrie s’engage à réduire la pollution en l’échange d’une aide financière du complexe touristique. Ce dernier est prêt à payer pour la réduction d’une unité de pollution tant que le bénéfice qu’il retire de la dépollution est supérieur à l’indemnité qu’il doit verser à l’entreprise polluante pour qu’elle émette une unité de pollution en moins. Cette dernière va accepter de réduire sa pollution d’une unité tant que la somme versée pour réduire d’une unité la pollution émise soit supérieure au coût marginal de dépollution. Cet arrangement les amène à intégrer dans leur prise de décision les bénéfices et les coûts externes de leur action. Ils vont ainsi négocier un accord tel que le niveau optimal de pollution est atteint. Le marché n’est donc pas défaillant dans ce cas. Le théorème de Coase stipule ainsi que quand les coûts de transaction sont nuls, les agents sont capables de trouver une solution efficace pour internaliser les externalités, sans que l’intervention de l’Etat soit nécessaire. (…) Toutefois, l’hypothèse d’une absence des coûts de transaction est en fait très restrictive, car les situations d’externalités sont souvent très complexes et nécessitent des coûts importants pour négocier un accord, vérifier sa mise en œuvre, … R.Coase considérait lui-même que ce théorème était peu réaliste, dans la mesure où la présence de coûts de transaction est plutôt la règle. ESH ECE2 Camille Vernet 2016-2017Nicolas Danglade

Quand la pollution résulte des interactions entre des millions de producteurs et d’usagers, comme c’est le cas pour la pollution de l’eau par les nitrates, les coûts de transaction liés aux négociations sont très élevés : un ménage insatisfait de la pollution en nitrates ne peut entamer une négociation avec tous les agriculteurs qui peuvent être à l’origine de son préjudice. Dans ce cas, le marché est mis en échec et l’intervention de l’Etat est nécessaire pour internaliser les externalités afin que l’optimum social soit atteint.

Source : M.Navarro et E.Buisson-Fenet « La microéconomie en pratique », A.Colin Cursus, 2012, p.203

Document 40 : le cas où l’usine détient les droits à polluerQuand une externalité concerne un petit nombre d’agents, une négociation entre ces derniers est envisageable. Elle donne la possibilité aux agents d’intégrer les externalités en trouvant un accord privé, fondé sur une compensation monétaire des coûts ou des bénéfices externes. Prenons l’exemple d’un complexe touristique situé sur un lac et d’une industrie polluante en amont de la rivière qui alimente le lac. Considérons que d’un point de vue juridique, l’industrie a le droit de polluer la rivière. Le complexe touristique subit une externalité due à la pollution, dont il peut identifier la cause. S’il est capable d’estimer les coûts du préjudice subi, il a intérêt de trouver un accord dans lequel l’industrie s’engage à réduire la pollution en échange d’une aide financière du complexe touristique. Ce dernier est prêt à payer pour la réduction d’une unité de pollution tant que le bénéfice qu’il retire de la dépollution est supérieur à l’indemnité qu’il doit verser à l’entreprise polluante pour qu’elle émette une unité de pollution en moins. Cette dernière va accepter de réduire sa pollution d’une unité tant que la somme versée pour réduire d’une unité de pollution émise est supérieure au coût marginal de dépollution. Cet arrangement les amène à intégrer dans leur prise de décision les bénéfices et les coûts externes de leur action. ils vont ainsi négocier un accord tel que le niveau optimal de pollution est atteint. Le marché n’est donc pas défaillant dans ce cas de figure. Le théorème de Coase stipule ainsi que quand les coûts de transaction sont nuls, les agents sont capables de trouver une solution efficace pour internaliser les externalités, sans que l’intervention de l’Etat soit nécessaire. L’internalisation d’une externalité signifie que chacun intègre les coûts et les bénéfices externes de son action dans sa prise de décision.

Source : M.Navarro et E.Buisson « La microéconomie en pratique », A.Colin Cursus, 2012, p.202

Document 41 : le cas où le complexe touristique détient les droits à polluerCe résultat est valable quelle que soit la façon dont sont définis les droits de propriété. Reprenons l’exemple précédent. Le fait que l’industrie polluante rejette ce que bon lui semble dans la rivière sans que le complexe touristique puisse protester revient à considérer que l’industrie a un droit de propriété sur la rivière puisqu’elle peut en faire libre usage (le droit d’usage est un des droits liés à la propriété). Supposons à présent que la rivière et le lac soient la propriété du complexe touristique. Ce dernier peut interdire à l’industrie le rejet de toute émission polluante. Le complexe subissant un préjudice à la pollution, sans négociation, il ne va pas autoriser l’industrie à émettre la moindre pollution. Mais cette dernière est disposée à verser une somme au complexe pour la dédommager de la pollution subie. L’industrie sera prête à payer tant que le bénéfice marginal qu’elle retire de l’émission d’une unité supplémentaire de pollution (économie des frais de traitement des eaux usées par exemple) est supérieur à la dépense supplémentaire qu’elle doit engager pour dédommager le complexe. Ce dernier va autoriser l’industrie à émettre une unité supplémentaire de pollution tant que la somme versée pour autoriser ce surcroît de pollution compense les coûts qu’elle génère. Au final, la négociation va aboutir à une situation équivalente au premier cas de figure du point de vue de la quantité d’émission polluante. En revanche, du point de vue de la répartition des revenus, les deux situations ne sont pas équivalentes. Dans le premier cas de figure, le complexe touristique verse une somme à l’industrie pour qu’elle réduise sa pollution alors que dans le second, c’est l’industrie polluante qui indemnise le complexe pour avoir l’autorisation de polluer.

Source : M.Navarro et E.Buisson « La microéconomie en pratique », A.Colin Cursus, 2012, p.202

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Document 42 : la solution coasienne pour internaliser les externalités

Document 43 : les limites de la solution coasienne Toutefois, l’hypothèse d’une absence de coûts de transaction, nécessaire pour valider le théorème de Coase est en fait très restrictive, car les situations d’externalités sont souvent très complexes, et nécessitent des coûts importants pour négocier un accord, vérifier sa mise en œuvre …. R.Coase considérait lui-même que ce théorème était peu réaliste, dans la mesure où la présence de coûts de transaction est plutôt la règle. Quand la pollution résulte des interactions entre des millions de producteurs et d’usagers, comme c’est le cas pour la pollution de l’eau par les nitrates, les coûts de transaction liés aux négociations sont très élevés  : un ménage insatisfait de la pollution de nitrates ne peut entamer une négociation avec tous les agriculteurs qui peuvent être à l’origine de ce préjudice. Dans ce cas, le marché est mis en échec. Source : M.Navarro et E.Buisson « La microéconomie en pratique », A.Colin Cursus, 2012, p.203

Document 44 : les droits à polluer (Coase)Portée Limites

3.3.2.4 Le marché des quotas et le système du « cap and trade »

Document 44 : marché des permis à polluer et quotasComme le dysfonctionnement de l’économie liée à la présence d’externalités s’explique souvent par l’absence de marché qui fixerait un prix à l’externalité, certains économistes ont préconisé la mise en place d’un marché boursier où les parties concernées pourraient échanger des titres de propriété des ressources environnementales. L’Etat fixe alors un objectif de pollution, et distribue ou alloue, par exemple aux enchères, le montant correspondant de droits à polluer à l’entreprise et aux riverains. L’entreprise doit posséder un nombre de droits égal aux rejets effectués ; si elle en possède plus que nécessaire, elle peut décider de les revendre aux riverains ou,

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Solution coasienne

Créer un marché où s’échangent des droits à polluer

Décision de la firme polluante ? Le coût de la dépollution est croissant avec la quantité produite

Elle va alors arbitrer :Tant que le coût de la dépollution est inférieur au prix du DP, l’entreprise va dépolluer ;

Mais comme le coût de dépollution augmente, il arrive un moment où ce prix devient supérieur au prix du droit à polluer ; conséquence : l’entreprise achète un droit à polluer et pollue

Le marché n’est plus défaillant ; En créant des DP = internalisation des

externalités La somme des intérêts individuels correspond désormais à l’intérêt

général

Internalisation des externalités ? Le prix du droit à polluer vendu par l’AE pollué donne une valeur à la pollution : il indique le montant de la compensation que l’AE pollué demande pour la pollution réalisée et il dépend de la technique de dépollution

utilisée par l’entreprise

Limites à la pollution ? - Moins la technique de dépollution est onéreuse, moins l’entreprise

a besoin d’acheter un DP (elle préfère dépolluer que polluer) ; - Plus le prix du droit à polluer est élevé, moins l’entreprise cherche

à acquérir ce droit et préfèrera dépolluer plutôt que polluer (inversement, moins le prix du droit à polluer est élevé, plus

l’entreprise est incité à l’acheter et moins elle dépollue

Admettons par exemple, une firme polluante et un AE pollué qui possède des droits à polluer qu’il peut vendre à l’entreprise

à l’inverse, les riverains diminuent le stock de permis disponible pour les entreprises réduisant d’autant la pollution. (…) Dans le cadre du protocole de Kyoto, qui a fixé un objectif de réduction des émissions mondiales de 5% par rapport au niveau de 1990, l’UE s’est engagée à réduire de 8% entre 2008 et 2012 ses propres émissions de GES, toujours par rapport à 1990. Pour ce faire, l’UE a lancé en janvier 2005 un marché d’échange des quotas d’émissions de carbone. Chaque année, les pays élaborent un plan national d’allocation des quotas qui doit être ratifié par la Commission européenne et qui indique le nombre de quotas accordés à leurs entreprises et la façon dont ils sont répartis. Les quotas sont alors distribués gratuitement aux installations industrielles concernées. Celles-ci sont au nombre de 11 400 dans les secteurs de l’énergie, de la production et de la transformation des métaux ferreux, de l’industrie minérale et de la fabrication de papier et de carton.

Source : P.Bontems et G.Rotillon « L’économie de l’environnement », La découverte, 2008, p.57 et 69

Document 45 : distinction taxe et marché des permis à polluerUne bonne politique doit être efficace (elle doit permettre de maintenir les émissions sous un certain niveau), efficiente (elle doit minimiser les coûts à objectif donné) et équitable. Ces critères déterminent les choix entre les instruments dits « économiques » (taxes, subventions et marché des droits) et les instruments dits « réglementaires » (normes, interdictions …). Dans les instruments économiques, on distingue ce que l’on appelle les « politiques de prix » (taxe), qui permettent un contrôle du prix payé par le pollueur, et les « politiques de quantités », comme les marchés de permis d’émissions, qui conduisent en principe au contrôle des quantités de pollution émise. A un premier niveau les choses sont assez simples : pour les économistes, les taxes et les marchés de permis ont des effets à peu près équivalents sur les quantités, les prix et l’incitation à dépolluer. Si l’on instaure une taxe de 20 euros par tonne sur le carbone et que le carbone s’échange à 20 euros la tonne sur le marché de permis, l’effet sur les incitations à réduire les émissions, mais aussi, à la marge, sur les coûts des producteurs qui utilisent du carbone et donc in fine sur les prix des produits est pour l’essentiel identique : c’est ce que dit la théorie, et cette analyse est largement corroborée par l’observation. (…) Mais l’équivalence entre taxe et permis ne s’applique que dans un monde où tout est certain. L’incertitude vient compliquer singulièrement le résultat, car alors on ne peut plus avoir à la fois de la certitude sur le prix du carbone et de la certitude sur les quantités de carbone émises. Si vous pensez qu’émettre trop de gaz à effet de serre est le risque le plus important, alors il faut privilégier les instruments de régulation des quantités, c’est-à-dire les marchés de permis. (…) En présence d’incertitude, le marché donne de la certitude sur les quantités quand la taxe en donne en principe sur les prix.

Source : R.Guesnerie et N.Stern « Deux économistes face aux enjeux climatiques », 2012, Le Pommier, p.55

Document 46 : distinguer les avantages de la taxe et des permis à polluerPolitique Politique de prix Politique de quantités Objectif ? Taxe Permis à polluer (marché des

quotas)Quelle différence entre les deux

politiques si : Taxe = 20 euros la tonne Prix du droit à polluer d’une tonne

est de 20 eurosUnivers d’incertitude : le risque à combattre = limiter l’émission de GES, quelle politique choisir ? Univers d’incertitude : le risque à combattre = avoir un prix du carbone qui ne soit pas désincitatif, quelle politique choisir ?

Document 47 : limites du cap and trade(Dans le cas des politiques environnementales) L’inefficacité de la taxe ou des quotas échangeables ne peut venir que d’une erreur d’appréciation ex ante des dommages et/ou bénéfices (…). Dans le cas d’une taxe, une erreur d’appréciation des bénéfices marginaux conduira à une discordance entre le niveau des émissions observé et le niveau attendu ; dans un système de quotas échangeables, c’est un écart de prix qu’on observera. L’effondrement du prix du carbone ces dernières années sur le marché européen illustre assez bien ce type d’erreur d’appréciation. La surévaluation des bénéfices marginaux de pollution a poussé les autorités publiques à fixer un quota total trop généreux, ce qui explique une partie de la baisse du prix, une autre partie étant dure à la mauvaise conjoncture économique. (…) ESH ECE2 Camille Vernet 2016-2017Nicolas Danglade

Source : Marc Baudry in Cahiers Français « L’environnement sacrifié ? » n°374, juin 2013

Document 48 : l’exemple des émissions de quotas de CO2En 2005, les pays de l’UE ont émis 2,2 milliards de tonnes de CO2 (1 tonne = 1 quota), et le montant total des transactions a été estimé à 260 millions de tonnes, soit 12% des allocations initiales. Toutefois, les émissions ont été inférieures de 44 millions de tonnes par rapport aux quotas fixés. Conséquence de cette surabondance, le prix du quota qui était de 8,5 euros le 3 janvier 2005 et qui avait atteint 31 euros à la mi-avril 2006 s’est effondré pour revenir à 8,6 euros en mai 2006

Source : P.Bontems et G.Rotillon « L’économie de l’environnement », La découverte, 2008, p.69

Document 49 : Politique environnementale pour limiter les GES (pollution/externalités négatives)

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Objectif à atteindre ?

Le prix du carbone :Etre certain que les AE vont intégrer dans leur décision l’impact négatif sur les autres

La quantité d’émissionsEtre certain que les décisions des AE ne

conduisent pas à dépasser un certain seuil d’émissions de GES

Utiliser l’instrument ? Utiliser l’instrument ?

4. Les caractéristiques du marché produisent des « défaillances » : l’analyse de ces défaillances de marché dans le cadre de la nouvelle microéconomie

4.1 Sélection adverse et aléa moral produisent des défaillances de marché

Document 50 : l’apport de la théorie des asymétries d’information à la compréhension des défaillances de marché

Avant le développement de la théorie des asymétries d’information, la plus grande partie de la science économique se focalisait sur (…) la perte du surplus économique due aux inefficacités allocatives. Le saut conceptuel fondamental de la littérature économique portant sur les asymétries d’information a été de comprendre que ces pertes sèches étaient somme toute de faible amplitude, de l’ordre de quelques pour cent de surplus perdus, et que la majeure partie des inefficacités économiques était d’une autre nature ; elles provenaient des comportements stratégiques des agents détenant du pouvoir par l’information qu’ils possédaient à titre privé. La conclusion est donc nécessairement subtile : elle ne peut se résumer à un slogan simple comme « plus de marché » ou « moins de marché ». En asymétrie d’information, les implications normatives de la discipline sont parfois contradictoires.

Source : Etienne Wasmer « Principes de microéconomie », Pearson, 2010, p. 448

Document 51 : sélection adverse et aléa moral (définitions)Lorsque la caractéristique d’un bien (d’un individu ou d’une entreprise) est cachée à certains agents, le comportement optimal des agents conduira à l’anti-sélection. La raison est qu’en l’absence du dispositif institutionnel, ce type d’asymétrie d’information peut conduire les agents avec les meilleures caractéristiques à quitter le marché et à n’y laisser que les agents avec les caractéristiques les moins favorables. Il y a des situations dans lesquelles, c’est l’action d’un agent qui n’est pas observable par les autres agents (ou pas vérifiables par un tiers). Ce type d’asymétrie d’information conduira alors à une situation de risque moral ou aléa moral. Cela conduit l’effort réalisé pour cette action à être sous-optimal. Une manière de présenter le risque moral est la suivante : c’est un contexte dans lequel un individu agit d’une certaine façon, et cette façon serait différente s’il était observé par les individus avec lesquels il interagit.

Source : Etienne Wasmer « Principes de microéconomie », Pearson, 2010, p. 400-410

Document 52: le marché fonctionne mal en situation d’asymétrie d’information

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Les caractéristiques d’un agent ou d’un bien ne sont pas connues de l’agent avec qui il échange

Fonctionnement du marché ?

Les « bons » agents ou « bons » produits disparaissent du marché : il ne reste que les

« mauvais » ;

Les actions d’un agent ne sont pas observables par l’autre agent avec lequel il échange

Fonctionnement du marché ?

L’effort réalisé par le premier agent est inférieur à ce qu’il devrait être ;

Cet agent peut alors avoir un comportement opportuniste dont les conséquences affectent

négativement l’autre agent

Le risque que souhaite éviter l’acheteur qui est victime de l’asymétrie d’information a plus de

chance de se réaliser

Si cet agent est l’offreur : retrait et disparition de l’offre sur le marché (crédit bancaire,

refinancement interbancaire) Si cet agent est le demandeur : retrait et disparition de la demande sur le marché

(voitures d’occasion)

4.2 Les effets de la sélection adverse : l’exemple du marché des voitures d’occasion 

Activité 53 : asymétrie de l’information et sélection adverse, l’exemple du marché des voitures d’occasionDans le modèle concurrentiel de base, on suppose que les ménages et les entreprises sont bien informés. Cela signifie que les uns et les autres connaissent leur domaine de choix possibles, les produits disponibles et leurs prix. Ils sont censés connaître les caractéristiques de chaque bien, y compris leur durée de vie. Pour certains achats, les consommateurs disposent d’une information d’excellente qualité, (…) mais dans la majorité des cas, pour acheter, nous devons prendre des décisions sur la base d’une information qui est loin d’être parfaite. (…) Certaines voitures sont de moins bonne qualité que d’autres. Elles possèdent des défauts cachés dont le propriétaire ne s’aperçoit qu’au bout d’un certain temps d’utilisation. Il s’agit de produit de «  mauvaise qualité » (« lemons » en anglais) qui sont sans cesse en panne. Les propriétaires cherchent à s’en débarrasser en la revendant à quelqu’un d’autre. En d’autres termes, ceux qui possèdent les produits de mauvaise qualité seront les plus pressés de les vendre. Quand les prix de l’occasion augmentent, ces premiers vendeurs sont rejoints par les propriétaires de voitures de meilleure qualité, qui veulent, par exemple, remplacer leur ancien modèle par celui qui vient de sortir. Inversement, quand les prix baissent, un plus grand nombre de voitures en bon état sont retirées du marché car les propriétaires décident de les garder (car ils ne veulent pas «  brader » leur véhicule dont ils savent qu’il est de bonne qualité). La qualité moyenne des voitures mises en vente diminue sur le marché. On dit qu’il y a « sélection perverse » ou « sélection adverse ».

Source : Stiglitz, Principes d’économie moderne, 2007, De Boeck, p.230 et 316

Activité 54 : la forme des fonctions d’offre et de demandeQuand le prix augmente, le nombre de voitures offertes à la vente sur le marché s’accroît. La courbe de demande a quant à elle une forme particulière. Elle est croissante à certains moments, et décroissante à d’autres. La demande ne dépend pas seulement du prix, elle dépend aussi de la qualité. Si la qualité se dégrade rapidement quand le prix baisse, alors la quantité demandée diminue avec la baisse des prix. Les acheteurs ne sont pas en mesure de faire le tri entre ceux qui ont une raison légitime de vendre leur voiture, et ceux qui veulent s’en débarrasser car ils possèdent un « lemon » (c’est-à-dire entre les voitures qui fonctionnent mal et les voitures en bon état). Plutôt que de prendre un risque, ils préfèrent renoncer à acheter. La demande baisse donc. Plus la demande est faible, plus la proportion de lemons supposés augmente, ce qui fait encore fuir les acheteurs potentiels, entraînant un cercle vicieux. Il résulte de cette situation d’asymétrie de l’information que les acheteurs et les vendeurs ont des chances d’être moins nombreux qu’en situation d’information parfaite ; on dit que les marchés sont plus « étroits » ; lorsque la demande disparaît complètement, on parle de marchés incomplets.

Source : Stiglitz, Principes d’économie moderne, 2007, De Boeck, p.230 et 316Remplir le tableau suivant :

Prix de marché faible Prix de marché élevéCritère sur lequel la demande prend sa décision : le prix ou la qualité ? Réaction de la demande à la baisse du prixRelation prix/demandePente de la droite de demande

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Document 55: le marché des voitures d’occasion

Document 56 : crise de confiance et arrêt du marché Il est assez illustratif de la façon dont certaines crises de confiance peuvent se produire et s’amplifier  ; la crise de la filière bovine en serait un exemple : il est difficile d’observer la qualité de la viande que l’on achète, car elle dépend en partie de la qualité de l’élevage dont est issu l’animal. Dans ce contexte, tant que les consommateurs ont confiance, les prix permettent aux producteurs de qualité de rester sur le marché. Mais la découverte de pratiques condamnables ou d’élevages intensif diminue cette propension à payer, ce qui affaiblit l’élevage de qualité ; toute la filière en souffre, avec des baisses de prix qui, de temporaires, peuvent devenir durables si la qualité a baissé. Les marchés où ce type de mécanisme peut jouer son nombreux : la qualité d’un vin est inobservable dans un rayon de supermarché, la qualité des titres d’un portefeuille titrisé de crédits immobiliers aussi. Dans chacun de ces exemples, les marchés peuvent être rapidement déstabilisés dès lors qu’un doute apparaît sur les produits. Une solution possible est de tenter de certifier les produits mis en vente. Les vendeurs ont un intérêt très fort à rétablir un minimum de transparence et d’information sur le marché (contrôles techniques, guides de qualité, labels, …).

Source : Etienne Wasmer « Principes de microéconomie », Pearson, 2010, p. 400-410

Document 57 : de la sélection adverse à la disparition du marché

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La décision est prise en fonction de la qualité supposée du B/S

La décision est prise en fonction du prix du B/S

Lorsque le prix baisse, les AE anticipent une chute de la qualité

La défiance augmente = la demande baisse

Lorsque le prix baisse, la contrainte budgétaire AE diminue

La demande augmente

Au-dessous d’un certain prix : Au-dessus d’un certain prix :

Sélection adverse

Une caractéristique du bien / d’un agent n’est pas connue par le co-échangiste

Le fonctionnement du marché conduit les agents qui n’ont pas l’information a se retirer du marché

Le marché « disparaît »

4.3 Réduire les asymétries d’information : révéler l’information pour réduire la sélection adverse 

4.3.1 Réduire l’asymétrie d’information du côté de l’offre

Document 58 : révéler l’information du côté de l’offreUne solution possible (…) est de tenter de certifier les produits mis en vente. En effet, les vendeurs ont un intérêt très fort à rétablir un minimum de transparence et d’information sur le marché, de façon à segmenter en sous-marchés où la qualité est connue, donc où le marché fonctionnera en information complète. La certification (…) peut prendre plusieurs formes. Sur le marché des voitures d’occasion analysé par Akerlof, on peut imaginer la mise en place de contrôles techniques ou que les concessionnaires s’engagent sur une garantie pièces et main d’œuvre. Sur le marché du vin, des intermédiaires vont éditer des guides de qualité. (…) Les mécanismes des jeux répétés sont une autre façon d’instaurer une confiance dans le produit vendu : si un vendeur sait qu’il va de façon récurrente rencontrer son acheteur, il va éviter de lui cacher la qualité du bien, faute de quoi l’acheteur ayant fait une mauvaise affaire ne reviendra pas. (…) D’autres mécanismes plus subtils, sont une conséquence de ce besoin de répétition des transactions et de la confiance. Il n’est pas toujours possible de consommer le même bien au même endroit, en particulier lorsqu’on se déplace. Akerlof conclut son article de 1970 en faisant remarquer de façon astucieuse que sur les aires d’autoroute, on trouve souvent des entreprises de restauration rapide sous forme de marques franchisées, alors que les fast-food indépendants, dépourvus de ce label, son en revanche le plus souvent en marges des quartiers résidentiels. L’interprétation est simple : si l’on peut obtenir de l’information sur la qualité du restaurant par le bouche à oreille ou la répétition dans son quartier, il n’y a pas besoin d’une marque pour instaurer la confiance. En revanche, lorsqu’un consommateur est en déplacement, et qu’il est à peu près certain pour le consommateur comme pour le producteur que la probabilité de revenir au même endroit est très faible, l’incitation du restaurateur à offrir un service de qualité est plus faible. La présence d’une marque peut alors établir la confiance. Ici la répétition ne se fait pas dans le temps, mais grâce à la marque.

Source : Etienne Wasmer « Principes de microéconomie », Pearson, 2010, p. 412

4.3.2 Réduire l’asymétrie d’information du côté de la demandeDocument 59 : révéler l’information du côté de la demande, le cas de l’assurance

Imaginons que des agents économiques souhaitent se couvrir contre un risque d’accident. Imaginons qu’il existe deux types d’agents (fort risque et faible risque). (…) En information incomplète, le coût du contrat moyen sera toujours supérieur à ce que les agents à faible risque sont prêts à payer pour se couvrir. Les individus du groupe «faible risque » vont se retirer du marché. La compagnie d’assurance va donc voir la fraction du groupe à «  haut risque » augmenter, et donc recalculer ses tarifs à la hausse, ce qui va conduire d’autres personnes du groupe à faible risque à quitter le marché, et ainsi de suite. L’anti-sélection aura donc joué un rôle déstabilisant pour le marché. On pourrait imaginer une solution partielle pour l’assureur : tenter de retrouver « statistiquement » quels sont les groupes à faible risque et ceux à risque élevé et leur proposer autoritairement des primes d’assurances différentes. Mais ce type de solution a des limites (qui peuvent être légale et/ou éthique). Plutôt que d’imposer des contrats différents, les assureurs peuvent par exemple laisser au choix plusieurs contrats différents, en offrant donc un « menu » de contrats. Les assurés vont alors choisir le contrat qui leur est personnellement le plus favorable. (…) Cela permettra d’offrir une assurance même aux personnes de faible risque, qui sinon préféreraient s’auto-assurer contre le risque plutôt que de payer pour les personnes à plus fort risque.

Source : Etienne Wasmer « Principes de microéconomie », Pearson, 2010, p. 416-417

Document 60 : réduire les asymétries d’information pour réduire la sélection adverseAsymétrie d’information Du côté de la demande Du côté de l’offre

Sélection adverse Exemple de l’assurance Si tous les AE paient la même assurance, les « meilleurs » AE vont sortir du marché

Exemple des voitures d’occasions, du vin Si les AE acheteurs n’ont pas confiance dans la qualité du bien, ils se retirent du marché

Conséquence Les acheteurs d’assurance vont révéler leurs préférences à l’aide de menus de contrat

Les vendeurs de voitures vont révéler les informations sur la qualité de leur voiture (certification, label

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…) Document 60b: sélection adverse + préférences sociales, le cas de l’assurance chômage obligatoire

La difficulté d’une assurance privée est un problème d’anti-sélection. Si l’assurance chômage est facultative, seuls les ouvriers exposés souscriront, à un coût élevé, et les cadres, soumis à un risque moindre, souhaiteront s’assurer eux-mêmes ou dans un système différent. Dans ce cas, la dimension pertinente pour le risque, la profession, est observable. On pourrait donc imaginer une segmentation du système : ce serait sans doute inégalitaire puisqu’il n’y aurait pas de redistribution entre groupes, mais le système pourrait fonctionner. La difficulté est autre. Le risque de chômage n’est pas entièrement observable. Il est aussi lié à des dimensions inobservables pour l’assureur : la santé financière réelle de l’entreprise, l’adéquation du travailleur à son emploi, la qualité de sa relation à son chef de service, son sérieux, entre autres. Les individus moins sérieux, ayant de moins bonnes relations avec leur chef de service, bref, anticipant un risque de chômage, souscriront plus volontiers à une assurance chômage. En poussant la logique à l’extrême, l’assureur risque de n’assurer que ceux qui vont effectivement être au chômage, à un coût qui sera très certainement très élevé. La solution est donc (…) d’imposer une assurance obligatoire et collective, donc des cotisations chômage obligatoires et gérées par un organisme à but non lucratif, en l’occurrence en France une gestion paritaire entre syndicats et organisations patronales. La logique de l’assurance maladie est similaire. Le risque de maladie est difficile à connaître, et a priori encore plus pour l’assureur que pour l’assuré, sauf à imposer des tests très poussés. Pour éviter que les gens en bonne santé s’auto-assurent et que les gens en mauvaise santé ne puissent plus s’assurer sauf à des taux très élevés, on oblige tout le monde à cotiser à la Sécurité sociale, ce qui est un transfert de fait entre les assurés sociaux : on mutualise les risques, et on évite la dérive d’un secteur privé de l’assurance qui tenterait de segmenter les cotisations en fonction des caractéristiques observables (âge, sexe …). En revanche, comme la demande de santé est hétérogène dans la population (certaines familles veulent parfaitement être assurées, avoir des conditions d’hospitalisation meilleures, des soins plus complets), une partie de l’assurance de santé est laissée au secteur privé ou à des mutuelles complémentaires.

Source : Etienne Wasmer « Principes de microéconomie », Pearson, 2010, p. 416-417

Document 60c : le cas de l’assurance obligatoire, l’asymétrie de l’information conduit à la production publique (bien privé tutélaire)

4.3.3 Les effets de l’aléa moral

Document 61 : l’aléa moral et le modèle « principal/agent » L’aléa moral ne résulte pas d’une information cachée sur la nature d’un agent, mais sur ses actions. Les situations sont très courantes. On peut en énumérer certains. L’entreprise (principal) et le salarié (agent) sont dans une relation entachée d’aléa moral, car le soin, la qualité ou la quantité d’effort mis par un salarié ne sont pas directement observables. (…) Le second exemple, c’est la relation d’agence au sein de la firme. Le principal est représenté par l’actionnaire, l’agent est cette fois le dirigeant d’entreprise. Le principal veut que le dirigeant prenne les meilleures décisions possibles pour l’entreprise. Mais le dirigeant (agent) peut avoir son propre agenda, différent de la stricte maximisation du profit. L’action cachée est la gestion courante de l’entreprise, les choix effectués, les stratégies retenues. Des parents qui font garder leurs enfants du matin au soir ne savent pas ce qui se passe pendant la journée, ne serait-ce que pour des choses aussi banales que le temps consacré à l’enfant  : sera-t-il

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Les individus doivent s’assurer contre un risque : chômage, maladie

Situation d’asymétrie d’information : l’assureur ne connaît par la « qualité » de l’assuré

Risque : segmentation entre les « bons » assurés qui s’auto-assurent à faible coût et les « mauvais » assurés qui s’assurent à coût plus élevé

Si on considère que certains risques sont des « risques sociaux » (qui dépendent moins des individus que la collectivité / c’est un choix collectif exprimé politiquement) :

la protection des individus doit être sociale et non individuelle

Mise en place d’une assurance obligatoire et publique : mutualisation collective des risques = bien privé tutélaire

stimulé ou le laissera-t-on livré à lui même pendant quatre heures ? L’agent (l’assistante maternelle) sera parfois tenté de se conduire différemment s’il sait que le principal (les parents) n’ont pas de pouvoir de contrôle. Un assureur (le principal) réfléchit à accepter un contrat assurant le centre sportif qui emmène des clients étrangers au sommet du Mont Blanc. Idéalement, il aimerait que l’agent (le guide) prenne toutes les précautions, vérifie le matériel, annule la randonnée si la météo est variable, … mais du point de vue du guide, suivre à la lettre ces consignes, à supposer que l’on puisse même en écrire le détail, est coûteux, nécessite du temps et peut même lui faire perdre des clients s’il est exagérément prudent par rapport à ses concurrents. L’assureur n’a pas de moyen direct de vérifier si les précautions ont été prises directement, car l’information précise est trop coûteuse à collecter. L’effort inobservable est ici la prudence du guide et son professionnalisme. Le même exemple se retrouve pour l’assurance automobile : le principal, la compagnie d’assurance, souhaite que les conducteurs roulent prudemment, fassent des pauses, ne doublent pas imprudemment, mais ne pourra jamais le vérifier complètement. La prudence de la conduite de l’agent n’est pas observable directement par l’assureur. (…)Le client d’un garage (le principal) délègue à un agent (le garagiste) la réparation d’une voiture : celui-ci prétend avoir passé 6 heures à la réparer (action invérifiable, a changé une pièce qu’il n’était pas nécessaire de changer, prétend qu’il faut changer telle autre pièce dans les deux mois …l’aléa moral a ainsi été défini de diverses façons ; on pourrait dire pour résumer que l’aléa moral est une situation dans laquelle un agent agit différemment selon qu’il est ou non observé dans les actes qui entrent dans le cadre de sa relation avec le principal. (…)Dans plusieurs contextes, l’observabilité ne suffit pas (…). Dans ces cas, il faudra mettre en œuvre des solutions imaginatives pour obtenir le meilleur effort possible de l’agent.

Source : Etienne Wasmer « Principes de microéconomie », Pearson, 2010, p. 432

Document 62 : aléa moral et comportement opportuniste

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Les actions d’un agent ne sont pas observables par un autre :le « principal » ne peut pas contrôler ce que fait « l’agent » 

Problème dans la situation du « principal »/ « agent »

« L’agent » peut alors modifier son comportement et ne pas respecter les engagements de son contrat avec le « principal » :

il adopte un comportement opportuniste

Exemple : l’assuré avec l’assureur, le salarié avec l’employeur, le PDG avec les actionnaires, le garagiste avec le client, …

Document 63 : les solutions adoptées par les AE pour réduire les conséquences des asymétries d’information peuvent elles aussi réduire l’efficience des marchés, l’exemple du marché du travail

4.3.4 Réduire l’aléa moral : le rôle des contrats incitatifs

Document 64 : les contrats incitatifsPour limiter le risque d’aléa moral, il faut réduire l’asymétrie d’information, mais tout contrôle a un coût et il est impossible de les supprimer complètement. Plutôt que de chercher à les contrôler, certains économistes proposent de concevoir des contrats incitants les individus à en respecter les termes et à renoncer à adopter des comportements opportunistes. On parle de contrats incitatifs. La théorie des contrats incitatifs (développée par J.J.Laffont et .Tirole) vise à élaborer des modèles pour déterminer quelles sont les structures des contrats les plus efficaces pour inciter les agents à suivre l’objectif fixé. La plupart des banques proposent par exemple aujourd’hui à leurs clients des contrats d’assurance automobile auxquels sont associés des systèmes de bonus et malus. Un tarif de base de l’assurance est défini entre la banque et son client et en cas de mauvais comportements, le tarif à payer pour s’assurer va augmenter. A l’inverse, si la personne n’a pas d’accidents pendant un certain temps, elle verra son bonus augmenter et paiera des cotisations moins élevées. Un tel mécanisme incite les individus à ne pas être imprudents même s’ils sont assurés.

Source : M.Navarro et E.Buisson « La microéconomie en pratique », A.Colin Cursus, 2012, p.175

Document 65

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Asymétrie d’information : l’employeur ne contrôle pas la productivité du salarié

Il a peur d’avoir à faire à un comportement opportuniste de tire au flanc

Il décide alors de le payer au-dessus du prix d’équilibre (prix de marché)

Pour le stimuler et faire augmenter sa productivité (théorie du salaire d’efficience)

Pour faire augmenter le coût d’opportunité en cas de licenciement (théorie des contrats implicites)

Conséquence commune : le salaire réel se fixe au-dessus du salaire d’équilibre = rigidité sur le marché du travail qui provoque du chômage involontaire

Asymétrie d’information : aléa moral

Risque : comportement opportuniste

Contrat incitatif : exemple les bonus/malus …

Contrat révélateur : menus de contrat, système d’enchères, …

Comment réduire ce risque ?

4.4 Les asymétries d’information et les crises financières

4.4.1 Frictions de crédit et disparition des marchés (marchés incomplets)

Document 66 : les marchés sont incompletsL’optimalité de l’équilibre de marché repose sur l’existence de marchés pour un ensemble de transactions à des horizons plus ou moins lointains. Si certains marchés sont absents ou défaillants, l’équilibre de marché n’est plus nécessairement optimal au sens de Pareto. Par exemple, faute de collatéral sur lequel gager l’emprunt, il est très difficile d’emprunter pour financer ses études. C’est en outre risqué, car le choix d’une spécialisation professionnelle est difficilement prévisible. La quasi-absence d’un marché du crédit sur lequel les jeunes pourraient emprunter pour financer des investissements dans leur propre capital humain tend à limiter l’accès à l’éducation supérieure, en particulier dans les pays en développement. En l’absence d’intervention publique, l’investissement privé en capital humain est donc sous-optimal, ce qui nuit à la croissance. Cet argument fournit une justification à l’intervention publique quand les marchés sont incomplets. Dans l’exemple ci-dessus, c’est l’efficacité économique qui motive le financement des études par des bourses et l’offre de service d’éducation public. Cependant, les gouvernements peuvent aussi créer des nouveaux marchés : dans les années 1990, l’Australie et la Nouvelle-Zélande ont introduits des prêts aux étudiants conditionnés au revenu, dont le remboursement dépend du revenu futur du bénéficiaire du prêt. Un certain nombre de pays, comme le Chili, le Royaume-Uni, l’Afrique du Sud et la Thailande ont par la suite suivi cette voie. Ce type de réforme est fréquemment introduit en contrepartie d’une augmentation des frais de scolarité. Robert Shiller (2003) a proposé d’aller au-delà de ce système en développant des produits financiers spécifiques qui protègeraient les étudiants contre le risque de dévalorisation de leur capital humain, lié à des évènements économiques.

Source : Agnès Bénassy-Quéré, B.Coeuré, Pierre Jacquet & Jean Pisani-Ferry, « Politique économique », De Boeck,

Document 67 : le marché du financement des études

Document 68 : la disparition des marchés lorsque l’information est imparfaite, le cas du marché des crédits

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Etudiants qui ont besoin de financer leur formation

Incertitude sur le devenir professionnel de chaque étudiant

Les banques refusent de prêter : pas de financement

Intervention de l’Etat

sert de garantie bourses Réglemente le marché des prêts étudiants : prêts étudiants conditionnés aux revenus

Sélection adverse  Incertitude sur l’évolution future des caractéristiques d’un co-échangiste

Perte de confiance : les banques rationnent le crédit car elles ne peuvent pas déterminer la qualité des emprunteurs ; plus les taux augmentent, plus les

meilleurs emprunteurs partent, moins les banques ont confiance dans les AE à besoin de financement = une

friction de crédit = crise financière

Les banques ne savent pas si les emprunteurs pourront rembourser plus tard leurs crédits

étudiants : elles ne financent pas ce type de crédit

Blocage du marché des crédits

4.4.2 Aléa moral et crises bancaires

Document 69 : aléa moral et comportement opportuniste Un agent adopte un comportement opportuniste s’il ne tient pas ses engagements ou dissimule volontairement des informations qui pourraient jouer en sa défaveur. Le risque d’aléa moral survient quand une des parties prenantes adopte un comportement opportuniste à la suite d’une transaction entre elles, du fait qu’il ne peut être contrôlé parfaitement. Il s’agit d’un risque ex post alors que le risque de sélection adverse a lieu ex ante. Une banque peut craindre que le client auquel elle a octroyé un crédit n’utilise pas la somme pour l’usage prévu et accroisse ainsi son risque de défaut. (...) Le risque d’aléa moral existe dans de nombreuses situations et son importance dépend pour beaucoup de l’environnement institutionnel. A.Landier et D.Thesmar ont ainsi montré que la libéralisation du secteur bancaire dans les années 1980 a privé les banques du filet de sécurité étatique les conduisant à être beaucoup plus soucieuses de la qualité des crédits octroyés, les banques n’étant plus systématiquement renflouées en cas de difficultés financières, liées notamment à des défauts de paiement. Le changement de la législation a rendu moins intéressant pour les banques l’adoption d’un comportement risqué en matière de crédit. (Cependant) L’aléa moral reste fort car les banques centrales viennent souvent en aide aux banques de grande taille lorsqu’elles sont en difficultés pour éviter une crise systémique. Les banques importantes sont couvertes par le principe du too big to fail : elles sont tentées d’adopter des comportements risqués car en cas de réussite, elles bénéficient de gains substantiels alors qu’en cas de perte, elles sont aidées par la puissance publique, qui estime que leur faillite ferait courir un risque trop grand à l’ensemble des agents. (…) Pour D.Marteau, le concept d’aléa moral est indispensable pour comprendre la crise économique qui a débuté en 2007 et ce pour deux raisons majeures. Tout d’abord, les banques sont incitées à être peu regardantes sur la qualité des crédits qu’elles octroyaient car elles pouvaient les céder à des investisseurs à travers des opérations de titrisation. Les banques ne supportaient ainsi pas le risque découlant des prêts octroyés. Le sommet du G20 à Pittsburgh en 2009 a conclu qu’il fallait réduire l’aléa moral sur les marchés financiers. Une des propositions du sommet est que les banques à l’origine d’une opération de titrisation conservent une fraction des prêts accordés les plus risqués. L’idée de cette mesure est que les banques seraient incitées à être attentives à la qualité des créances titrisées car elles seraient concernées par une éventuel défaut de paiement. D’autre part, le système de rémunération des opérateurs de marché au sein des banques leur attribue souvent des primes en cas d’opérations réussies mais aucune sanction en cas de perte. D’ou le risque élevé d’aléa moral, car ce système incite les opérateurs à prendre des risques excessifs pour augmenter leurs primes, quittes à user de dissimulation ou de mensonges.

Source : M.Navarro et E.Buisson « La microéconomie en pratique », A.Colin Cursus, 2012, p.174

Document 70 : l’allocation sous optimale des ressources sur les marchés lorsque l’information est imparfaite, le cas des marchés des capitaux

4.4.3 Les défaillances de marché pour expliquer les difficultés de financement des investissements « verts »

Document 71 : un nouveau cycle long d’innovation (« innovation séculaire ») basé sur l’environnement L’investissement dans la maîtrise du changement climatique a le potentiel de renouveler profondément le régime de croissance dans le sens du développement durable. La transition énergétique, liée au changement climatique et pas seulement à la rareté à venir des sources d’énergie fossile, n’est pas qu’un processus de substitution des sources d’énergie renouvelables à des non renouvelables. C’est une transformation d’ensemble de la production dans le sens de l’efficacité énergétique à laquelle l’efficacité carbone est étroitement corrélée. En ce sens, on peut qualifier cette transformation de vague d’innovation séculaire.

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Les banques rationnent le crédit aux agents dont les revenus futurs sont incertains (étudiants, jeunes

entreprises ou innovantes)

Les banques rationnent le crédit aux emprunteurs lorsque

les taux d’intérêt montent (sélection adverse)

Les transferts de risques entre agents produit de l’aléa moral

et augmentent le risque systémique

L’allocation des ressources sur les marchés des capitaux est sous-optimale

Les innovations séculaires nourrissent l’accumulation du capital sur de longues périodes parce qu’elles bouleversent la vie des sociétés. (…) Les grandes vagues d’innovation peuvent se chevaucher, la crise d’adaptation d’un type d’innovation coexistant avec l’émergence du suivant. C’est ainsi que l’organisation taylorienne du travail développée dans les chaînes intégrées de production de l’industrie lourder a essaimé dans la production de masse des biens durables de consommation, fer de lance de la vague d’innovations suivante. En recoupant les informations sur les dates des révolutions industrielles et sur les déclenchements des crises financières majeures, puis sur l’étude de l’époque dite fordiste, on peut dresser le tableau suivant complété par des connaissances parcellaires sur les révolutions en cours des technologies de l’information et de l’environnement. Ce tableau décrit le déploiement de ces innovations qui scandent les époques historiques du capitalisme depuis la première révolution industrielle. Elles sont bien au-delà des politiques économiques. Toute la société des pays qu’elles transforment est concernée, soit directement, soit par les répercussions de la mobilité du travail sur les secteurs plus traditionnels. Toutefois, ces innovations requièrent une complémentarité des investissements publics et privés. C’est ainsi que l’automobile a remodelé entièrement les villes. Elles se déploient en phases successives. Les investissements structurants jouant un rôle majeur dans leur expansion parce qu’ils induisent des flux d’investissement qui réalisent le paradigme de l’innovation majeure dans l’ensemble de l’économie. c’est le lien entre l’innovation générique qui révolutionne le progrès technique et transforme le mode de vie et les innovations incrémentales qui la réalisent concrètement dans les entreprises. La possibilité d’une vague d’innovations radicales fondées sur l’environnement n’est pas reconnue par tous. Si

l’on fait remonter l’événement inaugural à l’avertissement du Club de Rome en 1972, la phase d’émergence est particulièrement longue. Même le sommet de la terre à Rio en 1992, et les conférences internationales qui ont suivi n’ont pas véritablement lancé la phase de diffusion. Celle-ci est en effet la phase où le principe qui porte l’innovation séculaire considérée devient dominant dans les choix d’investissement des pays leaders dans les technologies qui concrétisent cette innovation. Même si de plus en plus d’acteurs économiques et de gouvernements sont convaincus de la réalité du changement climatique et de son origine humaine, le lien financier qui déclenche les investissements massifs de l’entrée en phase de diffusion n’a pas encore été noué.

Source : M.Aglietta « Sortir de la crise et inventer l’avenir », Michalon, 2014, p. 288

Document 72 : quelles difficultés pour l’investissement vert ? Ainsi, les politiques énergétiques en Europe sont-elles chaotiques et contradictoires (…). L’incertitude politique et l’inaptitude des marchés financiers pour investir dans les infrastructures environnementales constituent un double handicap. (…) Les investissements verts ont des handicaps supplémentaires. Le plus rédhibitoire est l’inexistence ou l’inadéquation du prix du carbone déterminé sur le marché des droits à polluer. (…) Sans une valorisation crédible suffisante du carbone, garantie par les gouvernements et croissante dans le temps, et sans arrêt des subventions aux énergies fossiles, ces investissements sont dominés par les infrastructures existantes. Pour rediriger l’épargne dans les investissements bas carbone, il faut abaisser les profils de risque des projets pour les investisseurs sans surcharger les contribuables.

Source : M.Aglietta « Sortir de la crise et inventer l’avenir », Michalon, 2014, p. 288

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Document 73 : les difficultés du financement des investissements « verts »

Document  74: rôle du prix du carbone pour développer le financement de la transition énergétique (lien entre défaillance de marché par externalité et défaillance de marché par incertitude)

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Investissements « carbones » Investissements « vert  »

Faibles coûts / forte rentabilité Forts coûts / forte incertitude

Financement élevé Financement faible

Chemin de dépendance en faveur des investissements « carbones » plutôt que « décarbonés »

Investissements « carbones »

Externalités négatives

Si taxe carbone et prix du carbone identiques et élevés sur le marché des quota à polluer

Hausse du coût relatif des investissements carbonés

Baisse du prix relatif des investissements décarbonés

Développement marché du financement des investissements décarbonés 

Transition énergétique

5. Les justifications de l’intervention de l’Etat sur l’allocation des ressources : au-delà des situations de défaillances de marché

5.1 L’existence et le fonctionnement des marchés s’appuient toujours sur un cadre légal : définition des droits de propriété et respect des contrats

Document 75 : l’établissement et le respect des droits de propriétéSi les marchés peuvent difficilement exister sans Etat, c’est parce que les transactions marchandes impersonnelles sont rarement viables en dehors d’un cadre institutionnel permettant de faire respecter les termes de l’échange. En effet, lorsqu’une transaction économique implique de nombreuses personnes anonymes et porte sur un bien aux caractéristiques complexes, chacun a intérêt (individuellement mais pas socialement) à ne pas respecter totalement le contrat implicite de la transaction : un individu refusera de payer le prix consenti, un autre fournira un travail de piètre qualité, un troisième vendra un bien défectueux … ces possibilités nuisent à la viabilité des transactions, alors même qu’il existe un gain à l’échange : les intérêts personnels vont à l’encontre du bien-être social qui nécessite l’existence d’un marché. Un cadre légal qui définit des droits, est nécessaire pour faire émerger le marché. (…) La définition de ce cadre institutionnel passe en priorité par l’établissement et la protection des droits de propriété. En effet, en l’absence de tels droits, le fruit d’une activité marchande peut être saisi par quiconque, réduisant les incitations à s’engager dans l’échange de biens ou de services. les droits de propriété sont par ailleurs nécessaires au développement du marché du crédit, dans la mesure où l’octroi d’un prêt exige souvent la mise en gage d’un bien qui ne peut être assurée que si le propriétaire du bien est clairement identifié. L’établissement des droits de propriété par l’Etat suppose la vérification des titres de propriété, l’enregistrement des actes de vente, etc… La protection de ces droits est quant à elle dévolue aux institutions étatiques chargées de faire respecter la loi et l’ordre public (tribunaux, police, armée…). L’incapacité de l’Etat à faire respecter les règles nécessaires au bon fonctionnement des marchés constitue un obstacle majeur au développement économique : en particulier, l’éclatement du pouvoir entre différents entités (clans, mafias …) nuit à la création de richesses parce que le morcellement du pouvoir coercitif ne permet pas de garantir efficacement la protection des droits de propriété. A l’inverse, un Etat « prédateur » peut abuser de son pouvoir coercitif pour exproprier certains agents économiques, entraînant par là même une diminution de la richesse produite. L’intervention de l’Etat peut être bénéfique à la réalisation des gains à l’échange marchand, mais elle contient aussi en germe des dysfonctionnements.

Source : ss direction de Bozio et Grenet « Economie des politiques publiques », La découverte, 2010, p. 11

Document 76 : le respect des contratsUn fondement plus subtil de l’intervention publique résulte du constat que les marchés présupposent des droits de propriété reconnus et convenablement assignés à des individus ou à des organisations, des contrats dont le non-respect est puni. La transaction marchande elle-même, aussi simple soit-elle, peut être assimilée à un contrat et celui-ci doit avoir force légale pour obliger les parties prenantes à des actes spécifiés par le contrat. Enfin, en cas de contentieux, il est nécessaire qu’il soit tranché par une instance d’arbitrage incontestée car prévue par le contrat lui-même. En d’autres termes, les marchés ne peuvent fonctionner sans la loi, et donc sans l’intervention législative de la puissance publique : la loi est faite pour garantir la viabilité des contrats et des échanges. La difficulté vient du fait qu’il n’y a pas une forme contractuelle, ni une organisation sociale qui s’impose avec la force de l’évidence et de l’objectivité, et que la loi se contenterait de mettre en pratique. La loi elle-même définit la forme contractuelle et l’organisation sociale. La loi fait la société autant que la société fait la loi. Ainsi, par le pouvoir législatif, la puissance publique est en mesure d’orienter en profondeur le devenir économique d’une société.

Source : Hubert Kempf « Les fondements théoriques de la politique économique » in Les notices de la documentation française « La politique économique et ses instruments », 2010, p.10

Document  77 : les marchés ne peuvent fonctionner sans la loi

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Création de marché : définir les droits de propriété Respecter des droits de

propriété Faire respecter les contrats / arbitrer en cas de contentieux

Les marchés ne peuvent fonctionner sans la loi

5.2 Le respect des règles de la concurrence : lutte contre les comportements déloyaux et maintien d’un degré de concurrence potentielle

Document 78 : concurrence imparfaite et politique de la concurrenceEn règle générale, l’origine de l’insuffisance de la concurrence provient du faible nombre d’acteurs qui participent à un marché. Les situations les plus couramment rencontrées sont celles qui voient un grand nombre d’acheteurs faire face à un seul vendeur (monopole) ou à un petit nombre de vendeurs (oligopoles). L’inefficacité économique de ces deux formes de concurrence imparfaite provient du fait que les entreprises en position de monopole ou d’oligopole bénéficient d’un pouvoir de marché qui leur permet d’augmenter leur prix de vente au-dessus du niveau qui prévaudrait si les marchés étaient parfaitement concurrentiels. Les entreprises en oligopole peuvent en particulier tenter de créer une entente et maintenir des prix élevés. Ce type de pratique non seulement nuit aux consommateurs, en renchérissant les prix, mais réduit également l’activité totale du secteur, en limitant les quantités vendues. La mise en œuvre de pratiques anticoncurrentielles par les entreprises en monopole ou en oligopole justifie la régulation des marchés par la puissance publique. Pour favoriser le fonctionnement concurrentiel des marchés, l’Etat dispose d’un éventail de moyens d’action : (…) l’adoption de lois anti-trust, le contrôle des concentrations, la mise en place de sanctions financières en cas d’abus de position dominante.

Source : ss direction de Bozio et Grenet « Economie des politiques publiques », La découverte, 2010, p. 18

5.3 Protéger les agents économiques (consommateurs) contre les biais cognitifs, l’incohérence temporelle et l’incomplétude de l’information en réglementant les marchés

Document 79 : les apports de l’économie comportementale (importance des biais cognitifs et de l’incohérence temporelle dans les décisions des agents)

Les apports de l’économie comportementale ont, au cours de la dernière décennie, permis d’élargir significativement l’éventail des justifications de l’intervention publique. (…) Cette justification de l’intervention publique ne doit pas être trop rapidement assimilée à une forme de « paternalisme » qui voudrait que l’Etat puisse faire le bonheur des individus « malgré eux ». (…) L’économie comportementale distingue deux types d’imperfection qui fausse la décision des agents : les biais cognitifs et l’incohérence temporelle. La prise de décision individuelle est souvent limitée par l’incapacité des agents à mobiliser toute l’information nécessaire pour effectuer des choix éclairés. Ceci est particulièrement vrai en matière d’épargne, de crédit (…). La complexité et l’incertitude de ces décisions économiques obligent les agents à chercher à trouver des solutions raisonnables plutôt que de chercher à comparer l’ensemble des alternatives possibles. (…) Les biais cognitifs expliquent que la manière dont sont présentés les choix peut influencer de manière significative la prise de décision individuelle. (…) La puissance publique doit donc s’efforcer de les prendre en compte pour éviter que les agents n’effectuent des choix sous-optimaux. L’incohérence temporelle constitue une seconde dimension de la rationalité limitée. Un individu cohérent dans le temps agit demain comme il le prévoit aujourd’hui. (…) L’incohérence temporelle permet par exemple d’expliquer que les individus n’épargnent pas suffisamment pour leur retraite : les personnes soumises à ce type de comportement ajourneront continuellement leur résolution d’épargner davantage dans le futur. (…) Par exemple, l’obligation faite aux citoyens par l’Etat de consacrer une partie de leur salaire au financement des retraites peut s’interpréter comme une manière de les aider à résoudre leur problème d’incohérence temporelle sans pour autant aller à l’encontre de leur volonté.

Source : ss direction de Bozio et Grenet « Economie des politiques publiques », La découverte, 2010, p. 20

Document  80 : les individus victimes de biais cognitifs Les économistes du comportement se sont attachés à montrer que les individus sains, même quand ils sont en pleine possession de leurs moyens, sont sujets à des forces psychologiques qui peuvent les conduire à prendre des décisions contraires à leur intérêt et donc à justifier une intervention publique. Autrement dit, dans certaines situations nous ne sommes pas les meilleurs avocats de notre propre volonté ; la régulation peut nous aider à limiter les dégâts, et elle est d’autant plus nécessaire que des entreprises commerciales peuvent chercher à exploiter systématiquement ces failles psychologiques. (…)

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p. 61-75

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Document 81 : la rationalité limitée des agents pousse l’Etat à simplifier les contrats Presque tous les jours, nous sommes conduits à cocher la case « j’accepte » lorsqu’un site Internet nous demande de consentir à un contrat d’usager. En général nous le faisons sans trop y penser, et avouons-le, sans lire les détails du contrat. Si l’on pouvait nous faire signer n’importe quoi, ce comportement serait pure folie. Nous n’oserions pas alors signer sans le soutien d’un avocat ou de longues heures de lecture patiente. Si nous le faisons sans trop de souci, c’est parce que nous savons que des clauses excentriques ne seront pas valides. (…) L’homogénéité que l’Etat impose dans les contrats est en un sens une perte de liberté, mais elle évite aux individus un état d’esprit paranoïaque et leur permet de ne pas avoir à acquérir une expertise technologique pour toutes les questions de la vie courante : par exemple, seuls les casques de moto « certifiés » peuvent être vendus. Les normes en vigueur ont été déterminées par des spécialistes pour assurer que le casque joue son rôle protecteur en cas de choc, ce qui évite aux motards de se spécialiser dans la physique des solides. Quand l’Etat considère que la compétence moyenne des individus sur un sujet n’est pas suffisante pour permettre une décision rationnelle, il impose l’intervention d’un expert. C’est pour cette raison que les médicaments puissants doivent être prescrits par un médecin, tandis que l’aspirine ou les crèmes solaires sont en vente libre. Dans un autre registre, certains produits financiers complexes ne sont pas accessibles à une clientèle jugée non qualifiée, et la publicité pour ce genre de produit est interdit. (…) Parfois, pour que les choix des individus soient éclairés, l’Etat impose des règles strictes sur l’information qui leur est fournie. (…) Pour éviter les malentendus, le régulateur « standardise » aussi le langage que les vendeurs peuvent utiliser sur les emballages. (…) L’Etat nous protège lorsque des contrats nous engagent à notre insu ou tirent parti de notre manque d’information. cela permet d’éviter un excès de méfiance inutile dans les transactions que nous faisons tous les jours.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p. 61-75

Document 82: les entreprises aussi utilisent les résultats de l’économie comportementale pour orienter les décisions des agents

Les économistes et l’Etat sont loin d’être seuls à s’intéresser à la psychologie des décisions économiques. comme le note Ian Ayres, parce qu’il y a de l’argent à gagner en utilisant l’économie comportementale, « le monde du business a pris une longueur d’avance sur les Etats dans l’usage de ces technologies ». (…) La récente crise des subprimes est pour partie le symptôme de ces dérives perverses du marketing : de nombreux ménages pauvres ont été persuadés de s’endetter pour acheter leur maison car les paiements initiaux étaient faibles et cachaient des paiements futurs bien plus élévés, que beaucoup d’entre eux étaient condamnés à ne pas pouvoir honorer.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p. 61-75

Document 83 : biais psychologique et faiblesse de l’épargne des ménagesL’économiste Dick Thaler, l’un des pionniers de l’économie comportementale, s’est depuis longtemps inquiété de la trop faible épargne des ménages américains, qui est selon lui une des conséquences du conflit temporel interne aux individus. dans ce pays où les pensions du système de retraite par répartition est faible, les ménages sont censés épargner tout au long de leur vie pour financer leurs retraites. Ce calcul, qui nécessite de réfléchir à notre espérance de vie, au salaire que nous pouvons espérer dans le future, au coût d’une maison de retraite et des soins médicaux dont nous aurons alors besoin n’est ni facile ni particulièrement plaisant à effectuer. Selon Thaler plus des deux tiers de la population considèrent devoir épargner plus … mais ne le font pas et reportent indéfiniment à plus tard un changement de comportement. En 2005, le taux d’épargne des ménages américains est même devenu négatif. L’Etat conscient du problème, donne pourtant un avantage fiscal important à l’épargne. pour aller plus loin, Thaler propose un système qui a l’avantage de « guérir » les conséquences de la schizophrénie temporelle sans pour autant attenter aux libertés et est beaucoup plus efficace qu’un coup de pouce fiscal. Tout d’abord, Thaler suggère que les individus soient automatiquement inscrits par leur employeur sur des plans d’épargne, tout en ayant le droit de se désinscrire s’ils le souhaitent. (…) Il suggère aussi la mise en place de l’approche « épargner plus demain » qui propose aux individus d’augmenter automatiquement leur taux d’épargne future, au fur et à mesure qu’ils obtiendront des augmentations de salaire. Cela rend l’épargne plus attractive parce que la perspective d’une augmentation de l’effort d’épargne est éloignée dans le temps, donc relativement indolore du point de vue du moi présent. Cette approche a rencontré un vif succès aux Etats-Unis ; elle a été adoptée par environ 40% des grandes entreprises américaines. (…) Dans un ouvrage coécrit avec le professeur de droit Cass Sunstein (…) il propose de ne pas restreindre la liberté et la responsabilité des individus, mais de les aiguiller vers des choix plus efficaces pour eux-mêmes en créant des « options par défaut » qui guident les décisions rationnelles. (…) il s’agit de faire du gouvernement l’architecte des choix des individus sans pour autant les contraindre.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p. 61-75

Document 84 : une illustration de l’incohérence temporelle des agents économiquesESH ECE2 Camille Vernet 2016-2017Nicolas Danglade

Un (des multiples) biais psychologiques (…) est ce que les économistes appellent « l’actualisation hyperbolique » ou, la schizophrénie temporelle. L’idée est simple : nous avons parfois tendance à céder dans l’instant à des impulsions qu’avec un certain recul dans le temps nous voudrions éviter. Pour être concret, si on vous donne aujourd’hui le choix entre recevoir un pain au chocolat dans un an ou deux pains au chocolat dans un an et un jour, vous choisirez bien évidemment la seconde offre. Mais si dans un an on vous confronte au même arbitrage, à savoir une viennoiserie gratuite tout de suite, ou bien deux demain, il est plus que probable que vous céderez à la tentation de la gratification immédiate. L’anecdote est triviale, mais ses conséquences sont lourdes, car elle signifie que nous sommes en conflit interne avec nous-mêmes. La rationalité de notre moi actuel est en lutte avec l’impulsivité de notre moi futur. Pour résoudre ce conflit, la solution naturelle est de « se lier les mains ». C’est ce que fait Ulysse, qui choisit d’être ligoté au mât de son bateau pour résister au chant des sirènes. (…) Les neurosciences montrent que lorsque nous sommes confrontés à une tentation, deux zones de notre cerveau entrent en conflit. La première correspond à un système planificateur et rationnel, la seconde à un système instinctif, sorte de pilote automatique, qui pousse à l’action réflexe (…) sans prendre en compte les conséquences. Parfois nous pouvons donc préférer être exposés à moins de choix plutôt que plus. Pour cette raison, le fait que les cigarettes sont fortement taxées, ne sont pas en vente partout et que leur publicité est interdite est une politique que certains fumeurs eux-mêmes soutiennent car elle peur permet de « garder le contrôle ». Pour la même raison, les cercles de jeu et les casinos sont en nombre limité.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p. 61-75

Document 85 : la rationalité limitée des agents les pousse à faire des choix sous-optimaux

Document 86 : l’Etat « paternaliste » interdit certains types d’échangesDepuis la rentrée scolaire 2005, les distributeurs de boissons et de snacks sont interdits dans les collèges et lycées. Cette interdiction est destinée à prévenir l’obésité juvénile, qui a augmenté de 17% en vingt ans en France. Le surpoids touche près de 20% des enfants. (…) La raison théorique de les contraindre est que leurs capacités physiques, cognitives et psychologiques (le contrôle de soi) sont insuffisantes pour leur permettre d’exercer en toute responsabilité ces activités. Mais où placer la limite de cet argument ? La simple évolution au cours du temps de l’âge de la majorité, passé de 21 ans à 18 ans en 1974, montre bien les hésitations sur cette question. (…) et le surpoids et l’alcoolisme sont loin d’être exclusivement des questions de pédiatrie …La puissance publique doit-elle aussi être paternaliste avec les adultes, les empêcher de se faire du mal quand il y a lieu ? Dans les faits, il s’agit d’un motif de régulation qui ne nous est pas étranger. On peut penser immédiatement à l’interdiction de consommer de la drogue, ou de faire de la publicité pour le tabac.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p. 61-75

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La manière dont est présentée l’information conditionne les choix effectués par les AE

Il y a un écart entre ce que les AE prévoit de faire dans le futur et ce qu’ils vont réellement faire

Biais cognitifs :Les AE NINJA se sont endettés sans pouvoir

supporter une hausse des taux ;Les AE ont intérêt à préserver leur santé mais ils

achètent des cigarettes ;

Incohérence temporelle - schizophrénie temporelleLes AE ont intérêt à épargner pour augmenter leurs

revenus futurs, mais ils reportent toujours la décision d’épargner (préférence pour la gratification immédiate)

Solutions : - l’Etat doit aiguiller davantage vers les « bons » choix sans

contraindre les AE dans leur décision ;- l’Etat doit réglementer certaines activités

Problèmes : - choix individuellement sous optimaux - risque de duperies et de fraudes

5.4 Protéger les agents économiques contre les crises du système financier : la supervision financière

Document 90 : les banques et assurances tiennent une place particulière dans l’économieLes établissements qui participent au financement de l’économie, qui récoltent les dépôts des ménages et des entreprises et assurent la gestion de l’épargne des ménages tiennent une place particulière dans l’économie. si une entreprise fait faillite, cela aura des répercussions sur ses créanciers, mais si une banque fait faillite ces créanciers sont une multitude de déposant et d’autres banques avec laquelle elle a des dettes croisées. Une faillite bancaire a des conséquences bien plus importantes qu’une faillite d’une entreprise du secteur « réel ». C’est pour cette raison, qu’ont été développés des instruments de supervision des établissements dans le cadre des accords de Bâle 1, 2 et 3. Il existe des discussions sur la portée et les limites de la supervision microprudentielle mais, au-delà de cela, il faut avoir en tête que la supervision encadre les pratiques des établissements « régulés ».

Document 91 : il ne faut pas opposer Etat et MarchéLe débat public oppose souvent le partisan du marché au partisan de l’Etat  ; tous deux considèrent le marché et l’Etat comme concurrents. Et pourtant, l’Etat ne peut faire vivre (correctement) ses citoyens sans marché ; et le marché a besoin de l’Etat : non seulement pour protéger la liberté d’entreprendre et de sécuriser les contrats au travers du système juridique, mais aussi pour corriger ses défaillances. L’organisation de la société traditionnellement (et implicitement) repose sur deux piliers :

- la main invisible du marché concurrentiel (…) ; - l’Etat corrige les (nombreuses) défaillances du marché (…).

L’Etat définit les règles du jeu et responsabilise les acteurs, qui peuvent et (même doivent !) alors rechercher leur intérêt propre. (…) Cette analyse monte que le marché et l’Etat ne sont pas des alternatives, mais qu’ils sont au contraire, mutuellement dépendants. Le bon fonctionnement du marché dépend du bon fonctionnement de l’Etat. Inversement, un Etat défaillant ne peut ni contribuer à l’efficacité du marché, ni lui offrir une alternative. Cependant, tout comme les marchés, l’Etat est souvent défaillant.

Source : Jean Tirole « Economie du bien commun » 2016, p.200-220

Document 92 Même dans une économie de marché, l’Etat et ses émanations sont au cœur de la vie économique d’au moins 6 manières. A travers les marchés publics, il est acheteur et organise donc la concurrence entre les fournisseurs : construction d’édifices publics, concessions de transport (autoroutes, ferroviaire, urbain), fournitures pour hôpitaux et autres collectivités, … Législateur et pouvoir exécutif, il octroie des autorisations d’ouverture de supermarchés ou de voitures de tourisme avec chauffeur, attribue droits d’atterrissage aux compagnies aériennes et fréquences aux opérateurs de télécommunications, de radio et de télévision, et donc influe indirectement sur les prix que vont payer les consommateurs pour leurs courses, leurs trajets, leurs appels, leurs émissions préférées. Arbitre des marchés, il veille à la concurrence, garante d’innovation et de produits abordables pour le consommateur. Il définit les règles du jeu par le droit à la concurrence, et il œuvre à travers les autorités de la concurrence contre les abus de position dominante et interdit les ententes et les fusions qui feraient monter les prix. Régulateur des télécoms, de l’électricité, des services postaux et ferroviaires, il assure que des marchés en monopole ou très concentrés ne se traduisent pas par l’exploitation des utilisateurs par l’opérateur historique. Superviseur financier, il assure que les banques ou compagnies d’assurances ne prennent pas trop de risques pour accroître leur profit au détriment des épargnants, des détenteurs de polices d’assurance, ou, le plus souvent, du Trésor public en cas de renflouement de l’institution financière. Signataire de traités internationaux, il détermine l’exposition des secteurs à la concurrence étrangère.

Source : Jean Tirole « Economie du bien commun » 2016, p.468

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Document 93 : l’Etat intervient sur l’allocation des ressources

5.5 L’allocation marchande est affectée par d’autres interventions de l’Etat

Document 94 : les institutions ont des rôles différents pour faire fonctionner les marchésLa plupart des travaux récents sur les institutions et la croissance économique insistent sur l’importance d’un groupe particulier d’institutions, à savoir celles qui protègent les droits de propriété et qui garantissent l’exécution des contrats. On pourrait les appeler institutions créatrices de marchés, puisqu’en leur absence, les marchés n’existent pas ou fonctionnent très mal. Mais le développement économique à long terme exige plus qu’une simple stimulation de l’investissement et de l’esprit d’entreprise. Il faut aussi mettre en place trois autres types d’institutions pour soutenir la dynamique de croissance, renforcer la capacité de résistance aux chocs et faciliter une répartition des charges socialement acceptable en cas de chocs.On pourrait parler d’institutions :

• de réglementation des marchés, qui s’occupent des effets externes, des économies d’échelle et des informations imparfaites. Ce sont, par exemple, les organismes de réglementation des télécommunications, des transports et des services financiers.

• de stabilisation des marchés, qui garantissent une inflation faible, réduisent au minimum l’instabilité macroéconomique et évitent les crises financières. Ce sont, par exemple, les banques centrales, les régimes de change et les règles budgétaires.

• de légitimation des marchés, qui fournissent une protection et une assurance sociales, organisent la redistribution et gèrent les conflits. Ce sont, par exemple, les systèmes de retraite, les dispositifs d’assurance chômage et autres fonds sociaux.

Source : Dani Rodrik et Arvind Subramanian « La primauté des institutions », Finances et développement, 2003, p.34

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Les marchés nécessitent

Un cadre légal et un respect des

droits de propriété

Le respect des règles de la concurrence

Protéger les consommateurs : supervision des acteurs financiers

Les marchés produisent des biens et services

L’Etat prend en charge certains biens et services :

les biens tutélaires

L’allocation marchande est déficiente : le bien être collectif s’écarte de la somme des biens être individuels = il existe des

défaillances de marché

Quelles sont les interventions de l’Etat ?

Production de certains biens/services

Réglementation, quota, taxes, subvention

Apparition de nouveaux droits de propriété

Régulation des entreprises privées

Protéger les consommateurs : biais cognitifs, incohérence

temporelle, information limitée, paternalisme 

= réglementation

L’Etat intervient dans l’allocation sans qu’il y ait de défaillances de marché : pour créer le marché et protéger certains de ces membres

L’Etat intervient dans l’allocation en réponse aux défaillances du marché pour éviter que certains biens

soit trop ou pas assez produits

Document 95 : le rôle des institutions dans l’économie de marché (D.Rodrik)

Document 96 : les solutions institutionnelles adoptées par chaque pays Chaque fonction des institutions peut prendre diverses formes. Quel système juridique un pays doit-il adopter — droit coutumier, droit civil ou un système hybride? Quel est le juste équilibre entre concurrence et réglementation dès lors qu’il s’agit de surmonter certaines défaillances standards des marchés? Quelle est la taille appropriée du secteur public? (…) Malheureusement, l’analyse économique n’est guère utile pour répondre à ces questions, ce qui peut paraître étonnant. En fait, il est de plus en plus évident que les dispositifs institutionnels souhaitables sont largement influencés par des spécificités contextuelles qui résultent de différences historiques, géographiques et politico-économiques, entre autres conditions initiales. Ceci expliquerait pourquoi les pays en développement qui obtiennent de bons résultats combinent presque toujours des politiques conventionnelles et non conventionnelles. L’Asie de l’Est a combiné une politique orientée vers l’extérieur et une intervention dans l’industrie. La Chine a greffé une économie de marché sur une économie planifiée plutôt que d’éliminer totalement la planification centrale. L’île Maurice a mis en place des zones franches industrielles plutôt que d’opérer une libéralisation générale. Même le Chili a combiné une réglementation des mouvements de capitaux et une politique économique plutôt conventionnelle par ailleurs. Ces variations pourraient aussi expliquer pourquoi des différences institutionnelles majeures — dans le rôle du secteur public, la nature des systèmes juridiques, le gouvernement d’entreprise, les marchés de capitaux, le marché du travail et les dispositifs d’assurance sociale, entre autres — persistent dans les pays avancés d’Amérique du Nord et d’Europe occidentale, ainsi qu’au Japon. En outre, il se peut que des choix institutionnels qui donnent de bons résultats dans un pays soient inappropriés dans un autre qui ne dispose pas des normes d’accompagnement et des institutions complémentaires. En d’autres termes, les innovations institutionnelles ne s’exportent pas nécessairement bien.

Source : Dani Rodrik et Arvind Subramanian « La primauté des institutions », Finances et développement, 2003, p.34

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Institutions De création de marché : définissent et protègent les droits de propriété et garantissent l’exécution des contrats

De réglementation des marchés : s’occupent des effets externes, des économies d’échelle et des informations imparfaites.

De stabilisation des marchés : s’occupent des déséquilibres macroéconomiques

De légitimation des marchés : fournissent une protection et une assurance sociales, organisent la redistribution

Spécifique à chaque pays car résultent des différences historiques, géographiques et politico-économiques

Document : l’intervention de l’Etat modifie l’allocation des ressources

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1) Tout marché s’appuie sur des règles qui créent le marché et protègent les

participants :L’Etat établit le cadre légal des échangesL’Etat fait respecter les droits de propriété L’Etat fait respecter les règles de la concurrence L’Etat réglemente les marchés pour protéger les consommateurs : sur les marchés des biens et sur les marchés financiers (superviseur)

2) L’Etat intervient pour répondre aux défaillances de marché :

il traite de la question des monopoles naturels, des externalités, des asymétries d’info, des

biens collectifs et communs ; il rapproche le résultat des échanges du bien être collectif

(évite la surproduction ou la sous production de certains biens)

4) Les conséquences de l’intervention de l’Etat pour redistribuer les revenus

primaires :l’Etat répond à la question de la légitimité que

les agents accordent au marché dont le fonctionnement s’accompagnent d’inégalités et

de pauvreté ; la présence de prélèvements obligatoires, de revenus de transferts, d’un

salaire minimum affecte l’offre et la demande (notamment sur le marché du travail)

3) Les conséquences de l’intervention de l’Etat pour stabiliser les grands agrégats macroéconomiques : politique monétaire, politique budgétaire, politique de change,

politique commerciale ; les variations de taux d’intérêt, des dépenses publiques, de la

fiscalité, des accords commerciaux, des taux de change ont des conséquences sur l’offre et

la demande de biens échangés

6. Les limites de l’intervention publique dans le domaine de l’allocation des ressources

Document 97

6.1 Les limites de l’Etat à agir efficacement : l’Etat « inefficient »

6.1.1 L’Etat, un agent économique victime d’asymétries d’information 

Document 98 : les asymétries d’information touchent aussi la puissance publique L’hypothèse traditionnelle fait du chef de gouvernement ou de ses ministres les maîtres d’un Etat sans défaut qui, tout à la fois, leur fournit l’information et transmet, sans biais aucun, leurs instructions du haut en bas de la hiérarchie. Analogue dans son principe aux représentations caricaturales de l’économie planifiée. (…) La prise en considération de l’imperfection de l’information et du comportement stratégique des services ou agences de l’Etat a conduit les économistes à une vision plus nuancée des objectifs poursuivis dans les faits par l’administration publique. L’économie publique a d’abord mis en évidence combien l’imperfection de l’information conduit à modifier la représentation et la conception des politiques publiques. En effet, lorsque des agents, publics ou privés, disposent d’une information privilégiée et en font un usage stratégique, le décideur central, tributaire pour ses propres décisions de la révélation de cette information, est en situation d’infériorité et ses décisions peuvent en être biaisées. (…) L’Autorité de régulation des communications (l’ARCEP) doit veiller à ce que les opérateurs tarifient au juste prix, mais ce sont ceux-ci qui connaissent l’état de la technologie et les comportements des consommateurs ; les collectivités territoriales passent des contrats de fournitures d’eau avec des entreprises privées, mais elles leur concèdent du même coup l’exclusivité de quantité d’informations sur l’état du réseau ou les comportements des usagers ; le ministère de la Santé voudrait sanctionner les médecins qui encouragent la surconsommation des soins, mais ce sont les praticiens qui connaissent les pathologies des patients.

Source : A.Bénassy-Quéré, B.Coeuré, P.Jacquet et J.Pisani-Ferry « Politique économique », De Boeck, 2009, p.101-102

6.1.2 L’Etat possède une information imparfaite qui lui fait commettre des erreurs : l’exemple du fonctionnement du marché des quotas d’émission

Document 99 : la régulation des externalités, le cas des politiques environnementales(Dans le cas des politiques environnementales) L’inefficacité de la taxe ou des quotas échangeables ne peut venir que d’une erreur d’appréciation ex ante des dommages et/ou bénéfices (…). Dans le cas d’une taxe, une erreur d’appréciation des bénéfices marginaux conduira à une discordance entre le niveau des émissions observé et le niveau attendu ; dans un système de quotas échangeables, c’est un écart de prix qu’on observera. L’effondrement du prix du carbone ces dernières années sur le marché européen illustre assez bien ce type d’erreur d’appréciation. La surévaluation des bénéfices marginaux de pollution a poussé les autorités publiques à fixer un quota total trop généreux, ce qui explique une partie de la baisse du prix, une autre partie étant dure à la mauvaise conjoncture économique. (…)

Source : Marc Baudry in Cahiers Français « L’environnement sacrifié ? » n°374, juin 2013

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Action économique de l’Etat

Question : Est-on sûr que l’intervention économique de l’Etat

améliore l’efficacité dans l’utilisation des ressources ?

Existe-t-il des difficultés pratiques à l’action publique ?

L’Etat est-il « efficient » ?

Question : Est-on sûr que l’intervention économique de l’Etat

vise l’intérêt général ?L’Etat est-il « bienveillant » ?

Document 100: l’exemple des émissions de quotas de CO2En 2005, les pays de l’UE ont émis 2,2 milliards de tonnes de CO2 (1 tonne = 1 quota), et le montant total des transactions a été estimé à 260 millions de tonnes, soit 12% des allocations initiales. Toutefois, les émissions ont été inférieures de 44 millions de tonnes par rapport aux quotas fixés. Conséquence de cette surabondance, le prix du quota qui était de 8,5 euros le 3 janvier 2005 et qui avait atteint 31 euros à la mi-avril 2006 s’est effondré pour revenir à 8,6 euros en mai 2006

Source : P.Bontems et G.Rotillon « L’économie de l’environnement », La découverte, 2008, p.69

Document 101 : l’Etat victime d’informations imparfaites

6.1.3 L’allocation des ressources par la puissance publique peut renforcer le déséquilibre des marchés

Document 102 : lorsque la régulation a des effets pervers (protection du contrat de travail et dualisation du marché du travail)

A la racine de la segmentation de notre marché du travail se trouve la définition du licenciement économique. (…) Notre droit du travail et sa jurisprudence sont devenus, au fil des ans, des sources d’incertitude considérable à la fois pour les employeurs et pour les salariés. Un licenciement sur cinq fait l’objet d’un contentieux. Dans les entreprises, le licenciement économique est devenu un tel repoussoir qu’elles font tout pour l’éviter. Elles gèrent l’essentiel de leurs mouvements d’effectifs à l’aide de CDD.

Source : Y.Algan, P.Cahuc et A.Zylberberg « La Fabrique de la défiance », 2012, p.143

Document 103 : lorsque la régulation devient contre-productive, l’exemple du logementLe contrôle des loyers répond à la volonté a priori louable d’empêcher les propriétaires d’exploiter les locataires en augmentant les loyers (…).A la sortie de la seconde guerre mondiale (…), la puissance publique institue un contrôle sur l’augmentation des loyers de tous les logements. (…) Les capitaux se détournent de l’investissement résidentiel et les propriétaires cessent d’entretenir leurs propriétés. Mais le plus grave est qu’en pénalisant l’investissement le gel des loyers repousse aussi hors du système les entrants (jeunes, couples avec enfants) puisque ce sont tous les ménages qui ont déjà un logement qui en profitent. Au bout du compte, le contrôle des prix s’avère être à la longue une régulation contre-productive qui pèse sur l’offre de nouveaux logements. (…) Pour pallier, la pénurie de logements de l’après-guerre qu’elle avait elle-même en partie déclenchée avec le contrôle des prix, la puissance publique a dû accroître l’offre de logements sociaux. Aujourd’hui, celle-ci concerne 17% de résidences principales, soit près de 1 locataires sur 2. (…) Malheureusement, ce dispositif a été largement détourné de sa fonction initiale, car il ne bénéficie pas uniquement aux ménages qui ne pourraient pas se loger sans aide publique. Une étude de l’Insee révèle qu’en 2002 plus de 20% des locataires d’HLM se situent dans la moitié supérieure de l’échelle des revenus. Le troisième pilier de la politique du logement , l’aide directe aux personnes, a pour objectif de mieux cibler les dépenses de l’Etat vers les ménages pauvres. l’aide personnalisée au logement (APL) est la plus connue et la plus

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Délégation de services publics à une entreprise

privée (exemple : fourniture de l’eau)

Asymétrie d’information

Découvrir l’information détenue par l’agent : menus de contrat / enchères

Etat régulateur sur certains marchés : par

exemple, le marché des télécommunications

Asymétrie d’information Information incomplète

Difficulté pour internaliser certaines externalités : déterminer

le montant d’une taxe et des quantités de droits à polluer

importante. (…) L’avantage de l’aide personnalisée est qu’elle vient directement aider les ménages les plus pauvres, car elle est versée sous condition de ressources. Cependant, cette mesure n’est pas parfaite, car les locataires subventionnés étant rendus plus riches, les propriétaires ont tendance à augmenter les loyers et récupèrent ainsi pour leur compte une partie de la subvention. On pense typiquement aux studios loués aux étudiants dans les villes universitaires où l’espace est rare.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p.76-88

Document 104 : les réglementations peuvent renforcer les déséquilibres de marché

Document 105 : la production publique n’atteint pas son objectif de redistribution Le problème majeur de la redistribution par le biais de l’opérateur public est que, le plus souvent, elle n’effectue de fait que peu de transferts réels à destination des plus nécessiteux. Nous avons vu que, dans le cas des HLM, un certain nombre de ménages aisés continuent de bénéficier de leur logement bien qu’ils n’en aient plus besoin. Dans le cas de l’assistance publique ou de l’école publique, la redistribution se fait presque à l’envers. Les enfants des classes moyennes et supérieures font des études plus longues et coûteuses. Ils forment l’essentiel des étudiants des universités et des grandes écoles, qui sont pourtant souvent gratuites. Lorsqu’ils vieilliront, ils vivront plus longtemps, utiliseront davantage le système de santé (gratuit) pendant leur vieil âge.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p.76-88

Document 106 : la redistribution « à l’envers » de l’école publique

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Une caractéristique de l’école publique : sa gratuité

Objectif : réduire l’impact des inégalités de revenus sur la durée des études

Deux constats

Les enfants des milieux populaires sont ceux qui font les études les

plus courtes : la gratuité n’agit donc pas comme un incitateur au

rallongement des études

L’école est une dépense publique : il y a donc une redistribution des

richesses des plus riches … vers les plus riches

Règles : distinction nature des contrats de travail et coût du licenciement

Préférence des entreprises pour les contrats à durée déterminée

Dualisation du marché du travail et frein à la dynamique de destruction créatrice (Cahuc)

Règles : Contrôle des loyers + aide aux personnes

Désincitation à la construction de nouveaux logements ;

Hausse des loyers dont les AE sont concernés par les aides

Frein à l’offre + hausse des prix

Marché du travail Marché du logement

6.2 La critique de l’Etat « bienveillant »

6.2.1 L’action de l’Etat ne vise pas l’intérêt de tous : le paradoxe de Condorcet

Document 107 : le gouvernement n’est pas « une machine sans fiction » Les arguments qui viennent d’être énoncés ne mettent pas en cause les objectifs des autorités publiques  : ces dernières sont supposées servir l’intérêt collectif (…). Les arguments critiques recensés jusqu’ici soulignent seulement les limites de leur capacité à agir efficacement (notamment) lorsque les agents privés adoptent à leur égard des comportements stratégiques, ou dans un environnement risqué. (…) Tout autre est la critique qui met en doute la capacité, voire la volonté des autorités à servir le bien public. Prenant appui d’un côté sur la théorie économique des institutions publiques, de l’autre sur l’économie publique contemporaine, un ensemble de travaux se sont attachés à remettre en cause la vision par trop naïve de la décision publique (…). Comme l’écrivait Jean-Jacques Laffont au sujet de la France, « le système étatique et administratif repose sur une conception idéaliste du pouvoir politique et de la vie démocratique, sur un postulat général de bienveillance des hommes politiques, de l’administration et de tous les fonctionnaires et personnels assimilés ». J.J.Laffont observe que l’idée selon laquelle le comportement des politiques peut être décrit comme maximisation d’une fonction de bien être social, relève d’une conception rousseauiste selon laquelle le gouvernement est « une machine sans friction » et un simple « instrument de mise en œuvre de la volonté du peuple » , sans existence propre.

Source : A.Bénassy-Quéré, B.Coeuré, P.Jacquet et J.Pisani-Ferry « Politique économique », De Boeck, 2009, p.108-109

Document 108 : le paradoxe de Condorcet montre que le choix politique laisse une partie des citoyens insatisfaits

Les individus qui composent une société ont des vues différentes en matière de politiques publiques. Face à cette infinie variété des préférences individuelles, l’Etat doit trouver le moyen d’agréger de manière cohérente les préférences individuelles afin d’aboutir à un choix collectif optimal. Mais un tel mécanisme existe-t-il ? dans la plupart des pays développés, le problème de l’agrégation des préférences individuelles est résolu au moyen du vote à la majorité. Les élections identifient les préférences individuelles au moyen du bulletin de vote et fournissent une règle simple de majorité. Malheureusement, ce mécanisme n’est pas parfait car il ne permet pas toujours d’agréger les préférences individuelles de manière cohérente. Cet écueil du système démocratique peut être compris à partir du paradoxe de Condorcet. (…) Parce qu’elles sont susceptibles de produire des résultats incohérents, les élections à la majorité ne constituent qu’un mécanisme très imparfait pour guider les choix collectifs. (…) L’Etat même s’il est capable d’identifier les préférences des individus, est condamné à ne pouvoir en déduire une préférence collective cohérente.

Source : ss direction de Bozio et Grenet « Economie des politiques publiques », La découverte, 2010, p. 25

Document 109 : le paradoxe de Condorcet Supposons que les préférences des électeurs se répartissent de la manière suivante : Un tiers (groupe 1) préfère A à B et B à C ; Un tiers (groupe 2) préfère B à C et C à A ; Un tiers (groupe 3) préfère C à A et A à B ; (si les choix des agents se font par pairs) Le paradoxe de Condorcet mis en évidence est qu’il est parfaitement possible que le candidat A soit préféré au candidat B par une majorité d’électeurs et que le candidat B soit également préféré au candidat C par une majorité d’électeurs, sans pour autant que la majorité des électeurs préfère A à C. Parce qu’elles ne sont pas transitives, les décisions prises à la majorité peuvent ne pas être cohérentes avec les préférences individuelles des agents.

Source : ss direction de Bozio et Grenet « Economie des politiques publiques », La découverte, 2010, p. 25

Document 110 : l’incohérence des préférences dans le paradoxe de CondorcetRaisonnement par paires Groupe 1: A>BGroupe 3 : A>BDonc A>B recueille la majorité ; Groupe 1 : B>CGroupe 2 : B>C Donc B>C recueille la majorité ESH ECE2 Camille Vernet 2016-2017Nicolas Danglade

Conclusion : si les choix des individus des trois groupes étaient cohérents on devrait avoir le classement A>B>C.Or, on constate pour C est préféré à A par deux groupes sur trois ! Un seul groupe préfère A à C (le groupe 1). Les choix sont donc incohérents.

Document 111 : les problèmes du marché à mener à l’intérêt général concerne aussi la puissance publique

6.2.2 Il existe aussi des « défaillances de l’Etat » : cycle politico-économique, capture du régulateur et lobbies

Document 112 : les sources de défaillances de l’Etat Premièrement, les gouvernements démocratiques responsables sont particulièrement sujets aux problèmes de crédibilité et de l’incohérence temporelle. Par nature, ils arbitrent constamment entre différents objectifs  ; ils doivent réagir aux attaques de leurs opposants et aux inquiétudes de l’opinion ; ils cherchent à être réélus, ce qui raccourcit leur horizon. (…) Deuxièmement, les gouvernements subissent en permanence la pression d’intérêts constitués. (…) George Stigler (1971) accorde une place centrale à la question de la « capture du régulateur » par les intérêts qu’il est en charge de surveiller. La troisième défaillance a pour origine la politisation des décisions. Dans un régime démocratique, un gouvernement peut se conduire de manière opportuniste et chercher à maximiser ses chances de réélection en baissant les impôts juste avant le scrutin, en augmentant les dépenses ou en repoussant les décisions difficiles. Si les électeurs sont myopes et ne perçoivent pas les conséquences futures des décisions publiques, ce type de comportement donne naissance à un cycle des affaires politiques. L’Insee a ainsi mesuré que, toutes choses égales par ailleurs, L’investissement augmente en moyenne de 6% dans les administrations locales sur les deux années précédant une élection municipale et baisse de près de 5% sur les deux années suivant l’élection. Ce type de comportement peut également déboucher sur des choix intertemporels systématiquement défavorables aux générations à venir, qui ne votent pas (encore). Quatrièmement, (…) sachant qu’en cas d’alternance la priorité politique va changer, un parti incertain de sa réélection va fortement inciter à surinvestir dans le domaine qu’il privilégie, et au contraire à freiner les dépenses de son successeur en lui léguant une dette publique élevée. Plus le pays est divisé et l’alternance fréquente, plus élevée sera la dette publique. Le problème vient ici de ce que chaque camp est persuadé de conduire une politique conforme à l’intérêt général, mais que la division idéologique du pays conduit à un excès de dépense et d’endettement. De fait, l’endettement public est positivement corrélé au degré d’instabilité politique. Cinquièmement, l’existence de fortes divisions entre régions, ethnies ou groupes sociaux, peut conduire à une allocation inefficace de la dépense publique. Chaque fraction a intérêt à obtenir du gouvernement des bénéfices tangibles, tandis que les coûts macroéconomiques correspondants sont répartis sur l’ensemble de la population.

Source : A.Bénassy-Quéré, B.Coeuré, P.Jacquet et J.Pisani-Ferry « Politique économique », De Boeck, 2009, p.108-109

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Par le marché (régulation marchande)

Les actions individuelles conduisent à des situations sous-optimales : défaillances

Par l’Etat (régulation politique)

Les décisions individuelles conduisent à des situations incohérentes

Dans ce cas, le marché, ne conduit pas à l’intérêt général

Dans ce cas, l’expression politique ne conduit pas à l’intérêt général

L’expression des décisions individuelles soit par le marché, soit par l’Etat ne conduit pas à l’intérêt général

Document 113 : les apports de l’école du Public Choice Pour les fondateurs de l’école des choix publics, James Buchanan et Gordon Tullock (The Calculus of consent. Logical foundations of Constitutionnal democracy, 1962), l’Etat n’est pas bienveillant : contrairement à ce que l’on postule généralement, les pouvoirs publics ne cherchent pas toujours à favoriser l’intérêt général. L’Etat – ou plutôt les acteurs qui l’animent – a aussi ses intérêts propres, ce qui le conduit à prendre des décisions qui l’éloignent l’allocation optimale des ressources : son intervention peut se faire au profit des dirigeants politiques, des cercles de pouvoirs (élargis aux intérêts économiques des grandes firmes) ou des groupes de pression. Les théoriciens du choix public considèrent qu’il existe un marché politique. L’offre politique (incarnée par les dirigeants politique) cherche à y maximiser sa satisfaction. Ainsi, des décisions peuvent être prises pour des intérêts opportunistes ou électoralistes. Par exemple, des choix de court terme sont privilégiés à des mesures de long terme bien que ces dernières soient plus efficaces car il s’agit avant d’être réélu. Il s’agit donc d’obtenir les votes (demande politique) sans nécessairement tenir compte de l’intérêt général.Dans The Political Business Cycle (1975), William D. Nordhaus explique justement que certains choix en matière de politiques conjoncturelles traduisent l’existence d’échéances électorales. Les politiques au pouvoir ont tendance à mener des politiques de relance budgétaire (par la hausse des dépenses publiques) quelques temps avant une élection afin s’attirer la bienveillance des électeurs (et rester au pouvoir)  ; puis, à mener des politiques de rigueur (afin de lutter contre l’inflation) une fois l’échéance électorale passée et remportée. James Buchanan et Gordon Tullock (1962) expliquent que les dirigeants politiques ne peuvent aucunement satisfaire l’ensemble des préférences des électeurs. Il devient donc rationnel de choisir de satisfaire en premier lieu les revendications des groupes de pression (lobbies). Il s’agit d’une facilité qui est rentable sur le plan électoral : le lobby avantagé perçoit très distinctement l’aide qui lui a été apporté alors que le coût supporté par la collectivité suite à cette décision est beaucoup plus diffus. Les électeurs ne vont donc pas saisir que l’Etat n’est désintéressé. L’influence des groupes de pression sur les hommes politiques peut être analysé d’une façon. En 1971, dans « The Theory of Economic Regulation », Georges Stigler montre qu’il existe un marché de la réglementation : les offreurs sont les dirigeants politiques et les hauts fonctionnaires qui décident des normes en vigueur ; les demandeurs sont les responsables des grandes firmes qui souhaitent que la réglementation n’entrave pas leur volonté de profit. Stigler considère que les entrepreneurs font pression sur les autorités politiques grâce à leurs moyens financiers conséquents (versement de fonds lors des campagnes électorales) et leur potentiel d’emplois (et donc de chômage). L’Etat devrait normalement satisfaire l’intérêt général mais, ainsi placée sous pression, il peut être amené à prendre des décisions qui servent les intérêts privés des grandes firmes. Les groupes de pression capture ainsi la réglementation pour qu’elle leur soit favorable, et ce, au détriment du bien-être collectif (des consommateurs, de l’environnement etc.) ;Enfin, les théoriciens du choix public se sont intéressés au comportement des fonctionnaires. Dans Bureaucracy and Representative Government (1971), William A. Niskanen explique que les « serviteurs de l’Etat » possèdent également des intérêts propres qui peuvent se révéler en contradiction avec l’intérêt général. Il explique ainsi qu’un Etat se donnant pour mission de trouver l’optimum collectif serait vraisemblablement entravé dans sa quête par le développement de coûts bureaucratiques. En dépit de leur mission de service public, les fonctionnaires ont en effet tout intérêt à ce que la taille de l’Etat augmente (ce qui se traduit par une hausse des prélèvements obligatoires) : ils défendent leur champ d’activité, obtiennent des hausses de budget et augmentent ainsi les dépenses publiques. Pourquoi les fonctionnaires obtiennent-ils gain de cause ? En raison d’une asymétrie d’information. La tutelle de l’administration est toujours éloignée et l’Etat ne maitrise pas aussi bien les attentes du secteur concerné que les fonctionnaires. Il faut également tenir compte du fait qu’il est presque toujours impossible pour les pouvoirs publics de s’adresser à une autre entreprise et de faire jouer la concurrence (monopoles publics). En fait, l’Etat aurait même tout intérêt à toujours augmenter le budget de ses administrations puisque les fonctionnaires représentent une force électorale non-négligeable. Il est donc plus intéressant qu’ils soient plus nombreux (et redevables) que le contraire. Dès lors, la bureaucratie ne peut cesser de grandir  : plus l’Etat augmente les budgets de ses services administratifs, plus les administrations ont un poids important dans les décisions publiques, plus elles se font entendre et obtiennent des rallonges budgétaires etc.

Document 114 : les cycles politiques et la critique de l’homme politique désintéressé Dans presque toutes les démocraties, les impôts ont tendance à baisser avant les élections, et les ajustements fiscaux douloureux ont lieu juste après. Ces cycles, il est évident que ce n’est pas la logique économique mais le processus politique qui les engendre. Car les hommes politiques sont des citoyens qui font leur métier, dont une grande partie consiste à se faire élire et réélire. (…) Les politiques ne sont ni des saints ni des salauds : comme

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tout un chacun, ils optimisent leurs carrières. Ce faisant, ils obéissent aux incitations que les institutions démocratiques leur donnent, et font ce qu’il faut pour ne pas perdre leur emploi. Le court-termisme, l’électoralisme qu’incarne le marketing politique sont inévitables. Ils ne sont pas une dégénérescence mais une donnée du problème de gouvernance qui accompagne toute véritable démocratie représentative. (…) Le fait que l’on accède au pouvoir en séduisant une majorité peut conduire à la mise en place de politiques publiques néfastes. En effet, une majorité peut vouloir dépouiller une minorité, sans considération pour le coût imposé à la minorité. (…) De fait, l’homme politique « rassembleur » est un mythe que nous a légué le Général De Gaulle. Les politiques en campagne ne cherchent jamais à satisfaire l’ensemble des électeurs. Ils se battent pour convaincre une catégorie spécifique d’individus, les indécis, qui peuvent faire basculer le scrutin d’un côté ou de l’autre ; plus que la majorité, ce sont alors ces indécis, que les politologues appellent « l’électeur médian », qui sont les arbitres du jeu politique et déterminent son « agenda ». (…) Les effets pervers de cette mythologie de l’homme politique désintéressé sont particulièrement nombreux dans notre pays, et pour certains, uniques au monde : cumul des mandats, avantages en nature, rémunérations relativement basses, faiblesse endémique des autorités de contrôle, juridiction d’exception pour l’Etat, négation des conflits d’intérêts.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p.131-144

Document  115 : groupes de pression et lobbiesLes hommes politiques ne sont pas les seuls à orienter l’intervention publique de manière à satisfaire leurs propres intérêts. il existe en effet une myriade d’autres acteurs qui cherchent à modifier l’action de l’Etat pour en retirer des profits personnels. Les groupes de pression, ou de lobbies, ont pour but d’influencer les hommes politiques car ils informent les gouvernements sur les problèmes que ces derniers pourraient ignorer. En France, cette fonction a par exemple été consacrée lors du processus dit du Grenelle de l’environnement qui a réuni en 2007 le gouvernement, des ONG environnementales et des groupements professionnels. Le rôle des lobbies s’avère en revanche plus discutable lorsqu’il consiste à récompenser des hommes politiques en leur accordant des faveurs pour les inciter à mettre en œuvre des politiques qui ne profitent pas à la société dans son ensemble. Cette menace est importante parce qu’il est d’autant plus facile pour un groupe d’individus de se constituer en lobby que ce groupe est petit et donc moins représentatif.

Source : ss direction de Bozio et Grenet « Economie des politiques publiques », La découverte, 2010, p. 31

Document 116 : la capture du régulateur par les intérêts privés Le premier dysfonctionnement qui peut miner la police du marché est le danger d’une connivence entre le régulé et le régulateur, qui inactive de fait la fonction de ce dernier. Dans quelles circonstances faut-il s’inquiéter le plus de cette capture potentielle ? Comment peut-on minimiser le risque ? (…) Difficile de dire qu’en France, les régulateurs du transport aérien sont à l’abri du conflit d’intérêt. D’une part, la direction générale de l’Aviation civile (DGAC) dépend directement du ministère des Transports, lui-même actionnaire du transport française, Air France. L’Etat est donc à la fois régulateur et régulé. D’autre part, le Cohor (association chargée d’allouer les créneaux horaires aux différentes compagnies aériennes) n’a pas le statut d’autorité indépendante (comme le régulateur des télécoms ou celui de l’électricité), mais d’association dont Air France est un membre fondateur. Son directeur général est en détachement d’Air France, et encore rémunéré par la compagnie. Son conseil d’administration est composé, sur six membres, de trois filiales d’Air France. Pour verrouiller l’ensemble, un représentant du ministre chargé de l’aviation civile siège au conseil d’administration et à l’assemblée générale de l’association. Il est évidemment impossible de prouver que la DGAC, les aéroports ou le Cohor ont intentionnellement cherché à favorisé Air France. (…) Mais les suspicions ne sont pas levées, et ne le seront jamais tant que le système plongera les hommes qui le font fonctionner dans des situations de conflits d’intérêts. (…) Le régulateur peut être capturé par les intérêts privés qu’il est censé réguler.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p.91-99

Document 117 : les conséquences de la capture du régulateur (exemples)Quelles faveurs ces intérêts privés peuvent-ils attendre ? (…) Fréquentes sont les subventions indirectes. Les plus évidentes sont les subventions de type « prime à la casse » où l’on verse une aide d’Etat à ceux qui remplacent leurs automobiles, mais dont le but est de soutenir temporairement les producteurs. La filière automobile, en difficulté pendant les crises, obtient typiquement de telles subventions en menaçant de licencier massivement. On peut aussi penser aux déductions fiscales accordées aux ménages qui investissent dans le logement locatif. (…) Au-delà des subventions, la capture du régulateur permet aussi de se prémunir contre la concurrence, soit par des

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barrières à l’entrée, soit au moyen de prix réglementés. Le rapport écrit en 2004 par P.Cahuc et F.Kramarz fourmille d’exemples de professions, qui, au fil du temps, ont hérissé des barricades pour éviter la concurrence. (…) En 2008, il y a à Paris 16 000 licences de taxis, contre 14 000 en 1937. (…) Comme nous l’avons vu, la fixation des prix par la puissance publique peut tout à fait se comprendre en présence d’un monopole naturel dont la tentation est de fixer des prix trop élevés. Mais dans un secteur concurrentiel comme celui des taxis, cela est beaucoup moins évident. En fait, la réglementation des prix a pour seul et unique but, dans un secteur concurrentiel, d’empêcher les producteurs de baisser leurs prix et de se faire concurrence. C’était par exemple, la raison d’être de l’interdiction de rémunération des dépôts bancaires jusqu’en 2004. (…) Après les subventions et les protections contre la concurrence, la proie favorite des groupes d’intérêts est la protection du consommateur. (…) En 2004, G.Bush a tenté de rendre les contrats de prêts immobiliers plus transparents et plus simples, pour éviter aux ménages peu avertis de s’endetter excessivement. Il en a été empêché par le Congrès  ; au cœur de la manœuvre, on trouve des parlementaires proches des courtiers spécialisés dans l’octroi des prêts immobiliers aux ménages pauvres, comme Countrywide.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p.91-99

Document 118 : l’exemple des liens entre finance et pouvoir politique aux Etats-UnisDans les démocraties développées, la capture du régulateur prend une forme plus discrète, mais n’en existe pas moins. L’ancien chef économiste du FMI Simon Johnson dénonce le « coup d’Etat silencieux » organisé par le secteur financier sur les administrations Bush et Clinton, grâce aux nombreuses passerelles qui existent entre Wall Street et les hautes sphères du pouvoir. Ces passerelles fonctionnent dans les deux sens : les régulateurs qui s’apprêtent à partir pour le secteur privé ne veulent pas fâcher leurs futures employeurs. On a pu établir par exemple que, dans le secteur de l’électricité aux Etats-Unis, les membres des commissions de régulation dont le mandat arrive à échéance ont tendance à voter pour des prix de l’électricité plus élevés. Au terme du mandat, on devient donc significativement plus sensible aux préoccupations des producteurs, ce qui suggère que la transition du public vers le privé a un impact sur l’impartialité du régulateur. (…) Après l’élection de G.Bush, R.Rubin qui avait bâti sa fortune chez Goldman Sachs avant de devenir ministre (secrétaire d’Etat au Trésor) à rejoint Citigroup comme conseiller du président. (…) Depuis 2005, Alan Greenspan (gouverneur de la Fed) travaille pour Pimco, l’un des plus grands gestionnaires de fonds obligataires du monde. Lawrence Summers est de retour à la Maison Blanche et œuvre à la régulation d’un système financier en déroute … après avoir travaillé pendant plusieurs années pour le fonds spéculatif D.E.Shaw & Co. Sans faire peser aucun soupçon de corruption directe, ces parcours traduisent la proximité très forte des protagonistes de la régulation des années 1990 avec la haute finance américaine.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p.100-112

Document 119 : la capture du régulateur, le cas français En France, les groupes d’intérêts ne capturent pas le régulateur : ils sont installés au sein même de l’appareil public, ils organisent la version française du coup d’Etat silencieux avec l’accord tacite d’une fraction de la fonction publique. (…) A tous les niveaux de l’Etat, les groupes d’intérêts influencent officiellement le politique et l’administration ; ils obtiennent subventions, produits de nouvelles taxes, restrictions concurrentielles, obligations d’achat et règlements dérogatoires. (…) Il faut d’abord se pencher sur une particularité historique qui est spécifique à notre pays : le corporatisme. Le mouvement corporatiste, né dans les années 1930, avait pour ambition de déléguer l’organisation de l’économie aux associations professionnelles. (…) Dans la France de l’après-guerre, l’Etat fait le choix d’impliquer les syndicats professionnels dans l’organisation de la reconstruction. (…) Les représentants professionnels sont impliqués dans la rédaction des règlements, mais se chargent aussi de recouvrer les impôts et de faire respecter certaines règles. Par exemple, dans l’agriculture, l’Etat suspend son rôle de planificateur en 1960, et délègue à partir de ce moment le soin à la profession de lever l’impôt et de distribuer les subventions. On voit très vite les effets pervers du corporatisme : installés directement au cœur de l’Etat, dotés d’un statut quasi officiel, ces lobbies qui ne disent pas leur nom font office de fonction publique bis. (…) Le deuxième élément typiquement français de la capture du régulateur est le lien très fort qui unit la haute fonction publique et le monde des affaires ; depuis l’après-guerre, cette osmose s’est formée par le transfert de plus en plus fréquent des hauts fonctionnaires vers le secteur privé. (…) En 2009, sur l’ensemble des directeurs généraux des entreprises du CAC 40, 11 étaient issus de l’ENA, 13 des grands corps d’Etat et 9 avaient été membres de cabinet ministériels. Toutes les banques sont dirigées par d’anciens inspecteurs des finances. (…) La France ne fait pas exception : chez nous comme ailleurs, les groupes de pression ont appris à prendre le contrôle

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du régulateur. L’impartialité de la fonction publique ou la bonne volonté des associations professionnelles sont des mythes néfastes qui entretiennent notre pays dans un corporatisme coûteux.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p.100-112

Document 120 : les défaillances de l’Etat

Document 121 : des défaillances du marché aux échecs de l’Etat

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Défaillances de l’Etat

cycle politico-économique lobbies capture du régulateur

L’action de l’Etat défend des intérêts particuliers

L’Etat n’est pas « efficient » L’Etat n’est pas « bienveillant »

L’allocation marchande est en échec pour atteindre l’optimum collectif dans certains cas

La réponse à ces échecs du marché peut être l’action de l’Etat : l’Etat intervient dans l’allocation des ressources

Mais l’intervention publique, elle aussi, ne garantie pas que l’optimum collectif soit atteint

Est-il possible de réduire ces « échecs » de la puissance publique ?

6.3 Comment réduire les limites et contraintes qui pèsent sur l’action publique ?

Document 122 : les réponses aux limites de l’intervention publique On peut distinguer trois types de réponses aux limites de l’intervention publique. Les réponses qui s’attaquent aux problèmes posés par les asymétries d’information : comme l’on montré Jean-Jacques Laffont ou Jean Tirole (Economie du bien commun, 2015) il est possible pour la puissance publique de ne pas subir de comportements opportunistes de la part des entreprises avec lesquelles elle est en situation de principal/agent. par exemple, les mairies qui utilisent des services d’entreprises privées pour la gestion de l’eau peuvent chercher à découvrir le « vrai » prix du service en jouant sur un menu de contrats.Les réponses qui s’attaquent aux problèmes posés par l’inefficacité de l’action publique. Les pouvoirs publics doivent se doter d’outils d’évaluation des politiques publiques afin d’éviter des erreurs de politiques économiques. Les réponses qui s’attaquent aux problèmes posés par les défaillances de l’Etat. C’est sans doute le point sur lequel la France aujourd’hui a le plus de retard par rapport à d’autres PDEM. Les défaillances de l’Etat correspondent aux situations où l’intérêt général est confisqué par des intérêts particuliers : intérêt des hommes politiques qui « optimisent » leur carrière politique, intérêt des lobbies qui influencent les décisions, intérêt des régulés eux-mêmes qui peuvent capturer l’organisme chargé de leur propre régulation (ce sont les syndicats agricoles qui gèrent par exemple la distribution des subventions de la PAC .... aux agriculteurs), collusion entre les hommes politiques, les entreprises et les citoyens dans les situations de corruption de fonctionnaires ou d’élus (Pierre Lascoumes « Une démocratie corruptible », 2011).

6.3.1 Répondre aux problèmes des asymétries d’information : les travaux de Tirole et Laffont

Document 123 : le système des enchères pour révéler l’informationLes enchères dans le cas des licences téléphoniques sont un exemple de contrat qui incite l’ « agent » à révéler au « principal » l’information dont il dispose. (…) Pour être incitatif, le contrat concède généralement à l’entreprise une partie de la rente. (…) La portée de cette analyse est très vaste : délégation de service public d’une collectivité territoriale à une régie ou à une entreprise privée, comme il est d’usage en France pour le traitement et la distribution de l’eau, partenariat privé-public (PPP) avec un entrepreneur chargé de construire des routes, des hôpitaux, des prisons, relation entre l’Etat et une entreprise publique, comme les chemins de fer.

Source : A.Bénassy-Quéré, B.Coeuré, P.Jacquet et J.Pisani-Ferry « Politique économique », De Boeck, 2009, p.102-104

Document 124  : l’apport des travaux de Jean Tirole et Jean-Jacques Laffont, contrôler la délégation de service public (asymétrie d’information)

Depuis le milieu des années 1980, les nouvelles théories de la régulation, dont les économistes française Jean-Jacques Laffont et Jean Tirole ont été les pionniers, mettent en exergue l’importance des incitations et des asymétries d’information pour une régulation optimisée des monopoles naturels. Le contrat avec une entreprise concessionnaire d’un monopole naturel doit lui donner des incitations à réduire ses coûts de production et à entretenir les infrastructures efficacement. Il faut donc laisser à ces entreprises la possibilité de faire des profits. Elles ont alors un intérêt financier à gérer mieux. En négociant avec elles, le régulateur doit chercher à inférer leurs coûts véritables pour éviter des gonflements artificiels et limiter les profits concédés. Il peut le faire en invitant à choisir parmi un « menu » de contrats, dont chacun spécifie l’enveloppe fournie à l’entreprise pour couvrir les coûts de sa prestation et la règle de partage en cas de profits et de dépassement des coûts. Laffont et Tirole insiste aussi sur l’avantage d’utiliser les enchères pour détecter le producteur le plus efficace et celui de « benchmarker » leur performance par les coûts observer sur des marchés similaires. (…) L’exemple de l’eau, ou le monopole est institué à l’échelle de la commune et non du pays, est à ce titre éclairant. Du fait de cette structure locale, on compte plus de 15 000 contrats de délégation différents dans les pays, ce qui préserve une émulation technologique entre les prestataires et une possibilité de comparer finement leurs coûts et donc de diminuer la note des consommateurs.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p.29-38

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Document 125 : la production de l’eau

6.3.2 L’importance de l’évaluation des politiques publiques

Document 126 : Comment sortir des situations de défaillances de l’Etat ? Tout d’abord, il est nécessaire de développer davantage d’évaluations indépendantes (du pouvoir politique en place) des politiques économiques. Il existe véritablement un retard français en matière d’évaluation des politiques publiques. Cette évaluation indépendante commence à se développer mais elle reste embryonnaire. En outre, le pouvoir politique a pour habitude de ne pas évaluer ex ante (avant de la mettre en place) les résultats potentiels d’une politique économique. Les politiques choisies sont donc souvent des orientations idéologiques plus que des choix pragmatiques permettant de répondre à une situation donnée.

Document 127 : le rôle de l’évaluation des politiques publiquesMême lorsque le régulateur est animé des meilleures intentions possibles, le dispositif peut ne pas fonctionner. Les acteurs ne sont pas des robots : ils adaptent leur comportement aux nouvelles règles, ce qui souvent limite l’effet attendu, voire rend le changement contre-productif. Parfois, ce type de contournement survient de manière indirecte, et est donc difficile à prévoir. Par exemple aux Etats-Unis, l’un des effets imprévus de l’interdiction de fumer dans les bars a été …. une augmentation très forte des accidents de la route. (…) Pour pouvoir accompagner leur bière d’une cigarette, les fumeurs qui vivent dans un comté prohibitionniste doivent faire plus de route. Le chemin du retour est plus long, ce qui accroît le risque d’accident, surtout lorsqu’on a bu. (…) La réglementation, visant à protéger le consommateur, grandissante depuis les années 1970, a donné d’autres exemples d’effet de contournement inattendus (comme par exemple la hausse des accidents de voiture avec l’introduction des airbags). (…) Parce que l’effet des politiques publiques est difficile à prévoir, il faut pouvoir les expérimenter et les évaluer à posteriori. (…) Il faut admettre que les modèles dont disposent les économistes actuellement permettent rarement de prédire quantitativement la réaction des agents. Les comportements humains se traduisent moins bien en équations que le mouvement d’un fluide autour d’une paroi (comme dans le cas des souffleries par exemple)  : les interactions économiques sont trop nombreuses, complexes et changeantes, pour être intégralement modélisées. En particulier, la manière dont les croyances des agents changent reste difficile à appréhender. (…) L’économie n’est pas la seule discipline à ne pas disposer d’une théorie exhaustive de son objet. Depuis longtemps la médecine fait face au même problème : la complexité des interactions biologiques et l’importance des phénomènes psychologiques empêchent les médecins de prédire ce qui arriverait au corps humain en intégrant telle ou telle substance. (…) En matière d’évaluation, la régulation économique est actuellement dans l’état de la médecine dans les années 1960. Du côté des régulateurs, l’évaluation en est encore à un stade primitif. (…)

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p.199-240

Document 128: la faiblesse de l’évaluation avant la mise en œuvre des politiques publiques, le cas du RSAESH ECE2 Camille Vernet 2016-2017Nicolas Danglade

Production eau

Monopole naturel

Monopole public ou délégation de service public ?

Avantage de la production privée par rapport à la production publique 

Mais inconvénient de la production privée

Comment réduire l’asymétrie d’information et le risque de comportement opportuniste ?

Travaux de Laffont et Tirole 

Tous les effets pervers d’une évaluation mal gouvernée se sont manifestés à l’occasion de la mise en place du revenu de solidarité active. Pour simplifier, l’objectif initial du RSA était de rendre, pour les titulaires du RMI, la reprise de l’activité financièrement attractive. La mise en place du dispositif prévoyait une phase d’expérimentation initiale : il s’agit de voir dans quelle mesure remplacer le RMI par le RSA permettait d’accélérer la reprise de l’emploi. En théorie, l’expérimentation aurait du porter sur un échantillon aléatoire représentatif de Rmistes, mais cela n’a pas été possible. (…) à la place, (…) la composition des groupes témoins a été biaisée. (…) les dispositifs étudiés étaient variables, ce qui engendrait de l’aléa dans les résultats des différentes expériences. (…) En juillet 2008, le comité d’évaluation a remis un rapport d’étape, qui trouvait un effet favorable du dispositif sur l’emploi, mais très modeste ; il calculait qu’un taux mensuel de 2,9% des Rmistes « traités par le RSA » retrouvaient un emploi, contre 2,2% des Rmistes « non traités ». Rédigé par des experts en statistique économique, le rapport insistait sur le caractère peu fiable et prématuré de ces résultats. (…) Mais le RSA était une mesure phare de la majorité, il permettait de « travailler plus pour gagner plus », ce qui a précipité le gouvernement à précipiter le processus. Malgré des résultats en demi-teinte, la loi instituant le RSA a été votée fin 2008. (…) Cinq mois après le vote de la loi instituant le RSA, le comité d’évaluation rendait son rapport final confirmant l’impact décevant du dispositif ; la loi votée en décembre 2008 est malgré tout entrée en application en juin 2009, et comme un dernier pied de nez à la logique de l’expérimentation, le montant de l’allocation effectivement versée a été fixé à un niveau sensiblement plus bas que celui utilisé dans l’expérience. On adonc versé un RSA inférieur au montant testé, pourtant déjà peu incitatif au retour à l’emploi. (…) L’histoire du RSA a montré à quel point la classe politique française méprise la notion même d’expérimentation. Expérimenter, c’est se soumettre aux faits, renoncer au marketing politique, et d’une certaine façon déléguer du pouvoir aux scientifiques chargés du protocole expérimental. Les hommes politiques n’hésitent pas à la faire lorsqu’il s‘agit d’expériences médicales, mais c’est plus difficile à accepter sur le terrain de la politique économique. évaluer, ce n’est donc pas juste une question de méthode, mais aussi une question de gouvernance.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p.199-240

6.3.3 Répondre aux défaillances de l’Etat : le rôle de la démocratie

Document 129 : le lien entre démocratie et croissance L’élaboration de l’action publique (c’est-à-dire l’élaboration d’une politique économique) ne peut être laissée entre les mains d’experts technocrates. Il est nécessaire que les citoyens puissent, grâce au débat public, « s’emparer » des questions qui vont conduire à la mise en œuvre de telle ou telle décision politique. Il faut donc davantage d’information et davantage de participation. On retrouve là l’idée d’une démocratie « délibérative » dans laquelle finalement l’action publique est le résultat d’un débat argumenté au sein de la société. Dit autrement, le débat politique ne peut pas s’arrêter une fois les élections passées et les représentants du peuple désignés. Il est important de « créer » un espace de discussion politique qui ne se limite pas à l’hémicycle de l’Assemblée Nationale. Les médias ont donc un rôle à jouer dans cette démocratie délibérative, ainsi que tous les acteurs de l’espace civil (et non pas uniquement « politique »), comme, par exemple, les universitaires qui portent une connaissance « objective » de la réalité. Le débat public doit finalement ressembler au débat scientifique, où l’argument le plus pertinent doit pouvoir l’emporter. C’est ainsi que le philosophe allemande contemporain Jurgen Habermas conçoit l’espace public. Finalement, comme le rappelle Pierre Rosanvallon, la démocratie est bien plus « complexe » qu’une simple élection. On peut conclure, en rappelant que la démocratie peut aussi être participative : certaines politiques publiques peuvent être élaborées et décidées conjointement par les élus (ce qui est normal dans une démocratie représentative) mais aussi par les citoyens. Ainsi à Porto Alegre au Brésil, l’affectation du tiers du budget municipal est décidée conjointement par les élus et par les citoyens (c’est donc un mélange entre démocratie représentative et démocratie directe). La capacité à fournir et faire circuler l’information doit également permettre de lutter contre la corruption et le clientélisme. David Thesmar et Augustin Landier insistent sur le fait que plus la démocratie est vivace, plus les formes délibératives, participatives et représentatives se complètent, plus les défaillances de l’Etat peuvent être réduite. On retrouve aussi cette idée chez Philippe Aghion (« Repenser l’Etat. Pour une sociale démocratie de l’innovation » avec Alexandra Roulet en 2012) par exemple lorsqu’il fait le lien positif entre démocratie et croissance. Le point important est finalement que la société ne laisse pas à quelques-uns la capacité de définir et de mettre en œuvre les choix publics. D.Thesmar et A.Landier parlent de « société translucide », car ce qui importe c’est la capacité que la société a à produire de l’information sur elle-même (importance des statistiques, de la recherche et des évaluations des politiques publiques) et, à assurer la communication de ces informations en son sein, pour permettre des décisions « éclairées » de tous les citoyens.

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Document 130 : réduire les échecs de l’Etat ?

Document 131 : l’écosystème de la « société translucide », l’ouverture de l’information à l’ensemble des citoyens

Comment faire entrer une véritable culture de l’évaluation dans les mœurs politiques et administratives ?La première étape consiste à privilégier l’évaluation statistique ou expérimentale sur l’évaluation qualitative par comité d’experts. (…) Pour développer l’analyse statistique, il faut donc former davantage de statisticiens à même d’évaluer l’action publique. Dans la société de l’information, le secteur privé, de l’Oréal à Google, fait une utilisation de plus en plus intensive du savoir-faire des statisticiens pour analyser des bases de données toujours plus nombreuses et plus détaillées. (…) Un Etat qui se veut efficace doit exploiter davantage ces techniques. La deuxième pièce du puzzle est la formation d’un corps d’évaluateurs indépendants, capables de mettre au point des protocoles d’expérimentation, formés à la statistique, et à l’abri des pressions provenant des politiques comme de ceux qui sont évalués. (…) Un Insee rendu formellement indépendant du ministère de l’Economie serait à même de jouer ce rôle en France en partenariat avec la Cour des comptes. (…) Mais il serait erroné de ne compte que sur un tel institut national de l’évaluation pour surveiller l’action publique. Si la politique est l’art du choix, l’évaluation statistique doit être son guide, et l’opinion publique son cerbère. C’est l’opacité et le doute qui permettent le maintien des systèmes inefficaces : c’est pourquoi il faut mettre au grand jour les informations et faire appel à toutes les bonnes volontés et pas seulement aux évaluateurs internes à l’administration ou à leurs sous-traitants. Il faut donc faire appel à l’intelligence collective. (…) Pour rendre l’action publique sa force et sa flexibilité, il faut briser le monopole de l’expertise, et s’appuyer pour évaluer et faire évoluer la régulation sur ces experts externes que sont les universitaires, les journalistes, les associations et les citoyens informés. Pour être efficace, le régulateur doit faire le pari de l’intelligence collective. (…) Un véritable écosystème d’analystes critiques existe au sein de la société civile, il faut y recourir. (…) Comment impliquer les citoyens plus directement dans l’action publique ? La première approche, évidente pour un économiste, consiste à en appeler à leurs intérêts financiers plutôt qu’à leur civisme. (…) Aux Etats-Unis, les actions collectives auprès des tribunaux sont une technologie citoyenne redoutable. Pour l’instant, les projets de class actions à la française sont étouffés par les groupes d’intérêts. (…) Heureusement, la Commission européenne met la pression : tôt ou tard, la France devra autoriser les actions de groupe. (…) Pour ce qui est de la surveillance des entreprises et de leurs dirigeants, certains investisseurs jouent aussi un rôle de vigile intéressé. Ils digèrent des informations financières complexes, positionnent leurs investissements, puis cherchent à convaincre l’opinion. (…) Le gérant de portefeuille David Einhorn a ainsi révélé au printemps de 2008, soit 6 mois avant le désastre final, le « pot aux roses » sur la banque Lehman Brothers, en expliquant par le détail pourquoi des chiffres en apparence rassurant présentés par la banque n’étaient qu’une habile entourloupe. (…) En accord avec ses convictions, Einhorn était à l’époque vendeur du titre Lehman Brothers. (…) A côté des citoyens, les universitaires constituent une deuxième classe d’experts externes. (…) L’avantage des universitaires est d’être au fait des dernières technologies statistiques et expérimentales, d’être capable d’adapter ces méthodes aux problèmes de régulation et d’avoir le temps de le faire. (…) Parce qu’ils misent leur carrière sur l’innovation et la

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Est-il possible de réduire ces « échecs» de la puissance publique ?

Réduire les asymétries d’information : travaux de

Laffont et Tirole

Effets pervers et objectifs non atteints

Des décisions qui favorisent certains intérêts particuliers

Solution ? « une société translucide » (Thesmar & Landier) / rôle de la démocratie

Points faibles en France : faiblesse de l’évaluation des politiques publics et défaillances de l’Etat

reconnaissance à long terme, ils ont les incitations adéquates pour mettre en place ces protocoles et poser les questions qui dérangent en faisant fi du marketing politique. (…) A coté des universitaires, le secteur associatif constitue une deuxième classe d’experts externes issus de la société civile. Certaines ONG globales, parmi les mieux connues, agissent comme des agences de notation. (…) Les think tanks, ou instituts politiques, sont eux aussi des relais charnière de la société civile, à la frontière du monde universitaire, du politique et des médias. (…) Dernière composante du système de surveillance : les médias. Certains journalistes font profession de dénicher des scandales et misent leur carrière sur des scoops. (…) Le régulateur doit maintenant apprendre à fonctionner en architecture ouverte, sur le modèle des programmes informatiques « open source », dont le code, en perpétuelle évolution, est ouvert à l’usage et aux contributions de tous. (…) Les conditions de l’action publique participative sont simples. Aucun citoyen, aucune entité ne doit être en situation de monopole sur l’information ou la production d’idées. L’ouverture est la clé du dispositif de surveillance par des experts extérieurs ; c’est l’antidote aux illusions de groupe et à la capture des gardiens du secret par les intérêts privés.

Source : Augustin Landier et David Thesmar « La société translucide. Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant », Fayard, 2010, p.199-240

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