Pour une coopération réfléchie et durablecnlj.bnf.fr/sites/default/files/revues_document... ·...

2
40 q Dossier : Formation aux métiers du livre TAKAM TIKOU nº13 La Joie par les livres : Depuis ses débuts, Culture et Développement (C&D) a été sensible à la question de la formation. Comment cette question a t-elle évolué au sein de l’association ? Francisco d’Almeida : C&D a commencé son action en 1962. Dès le début, une de ses missions concernait la for mation des acteurs cultur els des pays nouvellement indépendants d’Afrique. Après une interruption, elle a repris son action en 1986 en la réorientant, dans le sillage de la réforme relative à la décentralisation, vers la coopération culturelle entre collectivités territoriales françaises et africaines. Le mode opératoire de C&D en matière de formation a évolué au fil du temps. Dans une première phase, - 1988 à 1998 - nous avons préféré travailler à la démultiplication des « bonnes pratiques ». C’est pourquoi, nous avons or ganisé en dir ection des acteurs français de coopération de pr oximité, des jour nées d’études et des r encontr es qui étaient autant d’occasions de for mation , d’échanges d’expériences et d’amorces de mise en commun de projets. il s’agissait de sensibiliser les acteurs français de coopération décentralisée à des contextes de lecture différents. Ainsi, nous avons organisé une formation et publié un document sur le thème « Coopérer avec une bibliothèque d’Afrique » ; la question du don de livres aux bibliothèques d’Afrique est un autre thème qui a fait et fait encore l’objet de formation et de publications. Nous poursuivons ce volet au niveau des centres régionaux de ressources pour la coopération décentralisée ; à cela s’ajoute la publication d’outils méthodologiques comme le Mémento de l’élu local pour le développement de la lecture que nous publions cette année avec le soutien du ministère français des Affaires étrangères ou le Guide de la donation de livres pour le développement édité avec le soutien de l’Unesco. JPL : Le second niveau de votre action correspond à votre collaboration avec des collectivités françaises. F. d’A. : Progressivement, notamment à la demande de collectivités françaises, nous avons été amenés à agir directement sur le terrain à travers des projets de coopération décentralisée, c’est à dire de collectivité à collectivité. Dans ce cas-là, C&D opère pour une collectivité territoriale, comme elle le fait, par exemple, pour la Région Rhône-Alpes dans le cadre de sa coopération à plusieurs volets avec la région de Tombouctou au Mali. Depuis 2002, nous sommes l’un des deux opérateurs pour le volet livre-lecture; l’autre association étant Malira 1 . Dans ce cadre, le rôle de C&D consiste à soutenir et accompagner la Cellule Régionale d’Appui à la Lecture pour le Développement (CERALD), qui a un double rôle : d’une part, fournir des documents (des ouvrages neufs 2 et d’occasion acquis par C&D avec le soutien de la Région Rhône- Alpes) aux cinq bibliothèques de Cercle à partir d’une réserve régionale de livres ; et d’autre part, apporter un appui aux élus locaux pour suivre et développer la lecture dans cette région. C&D intervient en collaboration avec le CNLP (Centre National de Lecture Publique) qui contribue techniquement à la formation du responsable de la CERALD et lui fournit un appui technique en lien avec C&D. JPL : Enfin, vous répondez à des sollicitations de l’étranger ? F. d’A. : Oui, C&D est également engagée dans des formes directes de coopération non gouvernementales avec des collectivités africaines comme celle de Treichville à Abidjan, Côte-d’Ivoire, qui nous sollicitent directement. De manière générale, avant de nous engager, nous faisons une analyse du milieu pour connaître la situation, les besoins, et éliminons les demandes très ponctuelles. Nous évitons de suivre les actions émiettées et non inscrites dans un projet global car on peut donner sans fin des livres qui seront peu utilisés s’il n’y a pas localement une structure ou une politique qui les porte et les fait vivre. Ce ne sont pas seulement des rayonnages garnis de livres qui assurent le développement de la lecture mais un ensemble de conditions et d’acteurs - bibliothécaires, élus, libraires, éditeurs - dont les actions complémentaires permettent de créer un environnement favorable à la lecture. Et l’existence d’un service de la lecture permet de donner un cadre et de pérenniser l’initiative. Une autre de nos préoccupations est d’inscrire le développement de la lecture dans un processus plus global de développement local en associant l’action de la bibliothèque avec celle des programmes d’éducation, de formation professionnelle ou d’action, en décloisonnant les pratiques. Parmi les critères pour motiver notre action, la contribution budgétaire du partenaire nous paraît significative de son engagement. Ce peut être, comme le fait la Commune de Treichville, financer elle-même la construction de sa nouvelle bibliothèque. Dans ce cas, C&D assure la formation en lien avec des professionnels français ou africains et recherche auprès de divers partenaires des financements pour l’acquisition des documents et la formation. JPL : Devéloppez-vous un programme sensiblement identique dans chaque site, ou vous adaptez-vous selon les différents projets ? F. d’A. : Actuellement, C&D est engagée dans des actions au Mali où six points de lecture sont concernés, au Sénégal (deux points de lecture) et en Côte d’Ivoire (un seul). Chaque cas est particulier et les réalisations varient d’un milieu à l’autre, selon l’échelle territoriale concernée : ville ou région. En revanche, la méthode est la même : analyse de milieu, formation, appui à la pérennisation par des agents ou services, recherche de liens avec les autres volets du développement local. Pour éviter l’effet « coup d’épée dans l’eau », nous tentons d’aider à structurer un environnement solide et stable, capable de pérenniser le projet. Si ces conditions ne sont pas réunies, il n’y aura pas d’action durable. Voilà ce qui, avec la formation, donne cohérence à la démarche. JPL : Comment élaborez-vous votre programme de formation ? Les sessions ont-elles lieu en France et en Afrique ? F. d’A. : Nous procédons d’abord à un bilan pour identifier avec les personnes concernées, les besoins de formation. Ensuite, la formation est conçue dans une perspective pluriannuelle. Après il faut que les moyens suivent ! Lorsqu’il s’agit d’actions de coopération décentralisée dotées d’un budget, le programme a plus de chance d’être réalisé sans trop d’aléas. Ainsi, par exemple la Région Rhône- Alpes a récemment établi un dispositif finançant la mobilité des partenaires étrangers avec lesquels elle collabore pour la formation professionnelle. Cela permet d’inscrire la formation véritablement dans une démarche de renforcement des capacités. D’un autre côté, >>> Pour une coopération réfléchie et durable

Transcript of Pour une coopération réfléchie et durablecnlj.bnf.fr/sites/default/files/revues_document... ·...

Page 1: Pour une coopération réfléchie et durablecnlj.bnf.fr/sites/default/files/revues_document... · lecture) et en Côte d’Ivoire (un seul). Chaque cas est particulier et les réalisations

40 q Dossier : Formation aux métiers du livreTA

KA

M T

IKO

U n

º13

La Joie par les livres : Depuis ses débuts, Culture et Développement (C&D) a été sensible à la question de la formation. Comment cettequestion a t-elle évolué au sein de l’association ?

Francisco d’Almeida : C&D a commencé son action en 1962. Dès le début, une de ses missions concernait la for mation des acteurscultur els des pays nouvellement indépendants d’Afrique. Après une interruption, elle a repris son action en 1986 en la réorientant, dansle sillage de la réforme relative à la décentralisation, vers la coopération culturelle entre collectivités territoriales françaises et africaines. Le mode opératoire de C&D en matière de formation a évolué au fil du temps. Dans une première phase, - 1988 à 1998 - nous avonspréféré travailler à la démultiplication des « bonnes pratiques ». C’est pourquoi, nous avons or ganisé en dir ection des acteursfrançais de coopération de pr oximité, des jour nées d’études et des r encontr es qui étaient autant d’occasions de for mation ,d’échanges d’expériences et d’amorces de mise en commun de projets. il s’agissait de sensibiliser les acteurs français de coopérationdécentralisée à des contextes de lecture différents. Ainsi, nous avons organisé une formation et publié un document sur le thème« Coopérer avec une bibliothèque d’Afrique » ; la question du don de livres aux bibliothèques d’Afrique est un autre thème qui a fait etfait encore l’objet de formation et de publications. Nous poursuivons ce volet au niveau des centres régionaux de ressources pour lacoopération décentralisée ; à cela s’ajoute la publication d’outils méthodologiques comme le Mémento de l’élu local pour ledéveloppement de la lecture que nous publions cette année avec le soutien du ministère français des Affaires étrangères ou le Guide de ladonation de livres pour le développement édité avec le soutien de l’Unesco.

JPL : Le second niveau de votre action correspond à votre collaboration avec des collectivités françaises.

F. d’A. : Progressivement, notamment à la demande de collectivités françaises, nous avons été amenés à agir directement sur le terrain àtravers des projets de coopération décentralisée, c’est à dire de collectivité à collectivité. Dans ce cas-là, C&D opère pour une collectivitéterritoriale, comme elle le fait, par exemple, pour la Région Rhône-Alpes dans le cadre de sa coopération à plusieurs volets avec la région deTombouctou au Mali. Depuis 2002, nous sommes l’un des deux opérateurs pour le volet livre-lecture; l’autre association étant Malira1. Dans cecadre, le rôle de C&D consiste à soutenir et accompagner la Cellule Régionale d’Appui à la Lecture pour le Développement (CERALD), qui aun double rôle : d’une part, fournir des documents (des ouvrages neufs2 et d’occasion acquis par C&D avec le soutien de la Région Rhône-Alpes) aux cinq bibliothèques de Cercle à partir d’une réserve régionale de livres ; et d’autre part, apporter un appui aux élus locaux poursuivre et développer la lecture dans cette région. C&D intervient en collaboration avec le CNLP (Centre National de Lecture Publique) quicontribue techniquement à la formation du responsable de la CERALD et lui fournit un appui technique en lien avec C&D.

JPL : Enfin, vous répondez à des sollicitations de l’étranger ?

F. d’A. : Oui, C&D est également engagée dans des formes directes de coopération non gouvernementales avec des collectivitésafricaines comme celle de Treichville à Abidjan, Côte-d’Ivoire, qui nous sollicitent directement. De manière générale, avant de nousengager, nous faisons une analyse du milieu pour connaître la situation, les besoins, et éliminons les demandes très ponctuelles. Nousévitons de suivre les actions émiettées et non inscrites dans un projet global car on peut donner sans fin des livres qui seront peu utiliséss’il n’y a pas localement une structure ou une politique qui les porte et les fait vivre. Ce ne sont pas seulement des rayonnages garnis delivres qui assurent le développement de la lecture mais un ensemble de conditions et d’acteurs - bibliothécaires, élus, libraires, éditeurs -dont les actions complémentaires permettent de créer un environnement favorable à la lecture. Et l’existence d’un service de la lecturepermet de donner un cadre et de pérenniser l’initiative.Une autre de nos préoccupations est d’inscrire le développement de la lecture dans un processus plus global de développement local enassociant l’action de la bibliothèque avec celle des programmes d’éducation, de formation professionnelle ou d’action, en décloisonnantles pratiques. Parmi les critères pour motiver notre action, la contribution budgétaire du partenaire nous paraît significative de sonengagement. Ce peut être, comme le fait la Commune de Treichville, financer elle-même la construction de sa nouvelle bibliothèque.Dans ce cas, C&D assure la formation en lien avec des professionnels français ou africains et recherche auprès de divers partenaires desfinancements pour l’acquisition des documents et la formation.

JPL : Devéloppez-vous un programme sensiblement identique dans chaque site, ou vous adaptez-vous selon les différents projets ?

F. d’A. : Actuellement, C&D est engagée dans des actions au Mali où six points de lecture sont concernés, au Sénégal (deux points delecture) et en Côte d’Ivoire (un seul). Chaque cas est particulier et les réalisations varient d’un milieu à l’autre, selon l’échelle territorialeconcernée : ville ou région. En revanche, la méthode est la même : analyse de milieu, formation, appui à la pérennisation par des agentsou services, recherche de liens avec les autres volets du développement local. Pour éviter l’effet « coup d’épée dans l’eau », nous tentonsd’aider à structurer un environnement solide et stable, capable de pérenniser le projet. Si ces conditions ne sont pas réunies, il n’y aurapas d’action durable. Voilà ce qui, avec la formation, donne cohérence à la démarche.

JPL : Comment élaborez-vous votre programme de formation ? Les sessions ont-elles lieu en France et en Afrique ?

F. d’A. : Nous procédons d’abord à un bilan pour identifier avec les personnes concernées, les besoins de formation. Ensuite, laformation est conçue dans une perspective pluriannuelle. Après il faut que les moyens suivent ! Lorsqu’il s’agit d’actions de coopérationdécentralisée dotées d’un budget, le programme a plus de chance d’être réalisé sans trop d’aléas. Ainsi, par exemple la Région Rhône-Alpes a récemment établi un dispositif finançant la mobilité des partenaires étrangers avec lesquels elle collabore pour la formationprofessionnelle. Cela permet d’inscrire la formation véritablement dans une démarche de renforcement des capacités. D’un autre côté,

>>> Pour une coopération réfléchie et durable

xp17_48.qxp 22/02/07 14:32 Page 40

Page 2: Pour une coopération réfléchie et durablecnlj.bnf.fr/sites/default/files/revues_document... · lecture) et en Côte d’Ivoire (un seul). Chaque cas est particulier et les réalisations

Dossier : Formation aux métiers du livre g 41

TAK

AM

TIK

OU n

º13

il y a l’exemple le plus fréquent : C&D recherche les moyens et réalise la formation là où les besoins sont criants. Quelques principes guident notre action : la pluriannualité dans une démar che de for mation continue ; la définition du programmeen fonction des capacités et du passé pr ofessionnel de l’agent concerné ; la flexibilité de ce programme : on procède par évaluationà chaque phase pour l’ajuster aux besoins de la personne ; enfin le cr oisement Nor d-Sud des cadr es de for mation . Ainsi par exemplele responsable de la CERALD de Tombouctou suit un programme basé sur un va-et-vient entre le Mali et la France. Enfin, le dernierprincipe est celui de n’envoyer des assistants techniques sur le terrain que pour une courte durée : de ne pas faire de substitution maisun suivi constant à distance. Pourtant, c’est un principe que nous sommes en train de revoir car il y a des contextes où la présencequotidienne permet de surmonter bien des obstacles. À l’avenir, nous voulons évoluer vers des for mations en réseau , moins coûteuses :elles ont une plus forte dimension humaine et permettent de mutualiser les connaissances.

JPL : Est-ce que dans ce projet d’ensemble, vous incluez d’autres acteurs, comme les libraires et éditeurs de la place ?

F. d’A. : Oui, les libraires et les éditeurs. En fait, nous avons souvent constaté que lorsqu’on demandait à un bibliothécaire en Afrique defournir la liste des ouvrages souhaités, par manque de connaissance fine des centres d’intérêt de ses lecteurs et par méconnaissance de laproduction éditoriale, ses propositions étaient souvent déphasées et comportaient même peu d’ouvrages produits localement. Or, on nepeut diffuser le savoir pour créer les conditions d’un développement local sans présenter les informations portant sur le milieu concerné.Les libraires étant très bien équipés pour les aider à faire les choix, nous avons mis en place depuis 2004 le dispositif « Quatuor dulivr e en Afrique » . Il associe autour d’un budget d’achat de livres à acheter en librairie locale, par exemple à Dakar, un partenaire duNord (collectivité ou association) venant en appui à une bibliothèque d’Afrique et achetant en librairie locale les ouvrages édités dans lepays ou dans l’espace francophone. Ainsi, l’action concerne alors presque toute la chaîne du livre. Depuis cette année, nous amorçonsavec l’AILF (Association Internationale des Libraires Francophones) un partenariat autour de ce dispositif. Concrètement, on passe unaccord avec un libraire référencé par l’AILF ; C&D négocie les marges avec les éditeurs et en échange, le libraire apporte une aidebibliographique au bibliothécaire. Lorsque le choix est terminé, on nous envoie la facture et nous payons. C’est un dispositif qui peutêtre utilisé par n’importe quelle autre structure dans le cadre d’une campagne que nous comptons organiser l’année prochaine. En 2006,doté de 56000 €, le dispositif concerne deux bibliothèques sénégalaises, une en Côte d’Ivoire, 8 bibliothèques publiques et scolaires au Mali.

JPL : Est-ce que, sur le terrain, vous cherchez à collaborer avec d’autres partenaires comme les ONG, financeurs, associations ?

F. d’A. : Oui. La bibliothèque ne peut jouer son rôle d’outil cultur el contribuant au développement que si , comme je le disaistout à l’heure, son action est associée à celle des acteurs sociaux ou économiques du développement . C’est pourquoi, nouscherchons et incitons à une collaboration avec les acteurs présents dans le milieu. Par exemple, à Bignona, Casamance, encollaboration avec l’association Pays de Savoie solidaire, nous sommes en train d’explorer un projet associant le CEDAC (Centre deDocumentation et d’Action Culturelle), et les organismes d’appui et de formation des artisans ; en région de Tombouctou, c’est avec lesgroupements d’alphabétisation ; à Treichville et à Dakar Parcelles assainies, c’est avec les centres de formation professionnelle. En outre,nous travaillons toujours dans chaque pays avec la direction des bibliothèques. Nous sélectionnons nos partenaires car l’humanitaireponctuel ne nous intéresse pas. La pérennité d’un projet dépend de l’efficacité et de la fiabilité des partenaires en présence.

JPL : Aujourd’hui, êtes-vous en mesure d’évaluer l’impact de votre action ?

F. d’A. : Pour ce qui concerne le don de livres oui. Nous procédons systématiquement à l’évaluation de ce qui est fait. C’est ce qui nous aamenés à mettre en place le dispositif « Quatuor du livre en Afrique » Pour le reste, compte tenu de la complexité de ce qui est tenté etsurtout du fait que deux ans de travail c’est peu, on a encore du mal à évaluer. On voit des bibliothèques mieux fournies et leur lectorataugmenter mais l’inscription locale dans des programmes de développement est lente à se faire. Il faut donc attendre pour prendre lamesure des choses. Néanmoins, on peut mesurer l’impact du bibliobus de Treichville en circulation depuis cinq ans ; on en voit lesrésultats, sous des aspects parfois très encourageants. Doté d’un fonds progressivement étoffé en partenariat avec la Bibliothèque deCorbas et avec l’Unesco, ce bibliobus dessert aujourd’hui, selon un schéma de rotation, trente-huit quartiers de Treichville. Les libraires etplusieurs associations (dont l’AILF Côte d’Ivoire pour la Caravane du livre) utilisent aussi le bibliobus. Un jour, je suis allé le voir lorsd’une de ses tournées et j’ai vu un enfant, croyant qu’il s’agissait d’une Caravane du livre, venir avec de l’argent pour acheter un livre surles minéraux. C’est donc là la preuve que le bibliobus a formé un lecteur, acheteur, qui plus est. On sait que ce bibliobus a créé unlectorat supplémentaire à Treichville… Pour aider à généraliser cette démarche, nous préparons avec Jean Claude Le Dro, conservateurgénéral de bibliothèques, un manuel d’évaluation de la bibliothèque qui apportera des outils aux professionnels sur place.

JPL : Vous venez de prouver que des formes de partenariat peuvent être également des formes de formation. Que peut-on dire pourque ce soit le plus formateur possible, que cela fasse avancer ?

F. d’A. : Après plusieurs années de pratique nous arrivons à la conclusion qu’il faut mettre en place des formations partagées, en réseau.Elles nous semblent plus efficaces car elles permettent aux stagiaires de découvrir ce que font les autres d’innovant dans un contexteaussi difficile que le leur, et de comparer leurs pratiques. Ce qui est important, ce n’est pas tant de faire venir les stagiaires en France,c’est d’instaurer un mouvement de va-et-vient entre des formations sur site (le formateur les voit opérer et peut rectifier ce qui ne va pas),des formations chez des pairs, toujours en Afrique, montrant que dans des situations similaires, on peut mieux faire. Et enfin desfor mations en France dans des domaines pour lesquels on n’a pas de réponses sur le terrain. Et que tout ceci se dér oule dansune démar che globale, un peu collective, humaine et chaleur euse . Voilà ce qui me paraît la clé d’une formation réussie, inscritedans la durée.

Propos recueillis par Marie Laurentin avec la collaboration de Cécile Lebon

1 Association travaillant pour le développement de la lecture dans la région de Tombouctou, www.malira.org 2 Dotée d’un fonds de départ de 10000 documents. À l’avenir, la moyenne annuelle d’ouvrages fournis se situera entre 3000 et 5000 documents par an.

xp17_48.qxp 22/02/07 14:32 Page 41