Politiques de la petite enfance dans les pays nordiques · que dans les autres pays nordiques...

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Tous droits réservés © Lien social et Politiques, 2003 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ Document généré le 30 oct. 2020 13:14 Lien social et Politiques Politiques de la petite enfance dans les pays nordiques Child care policies in the Nordic countries Gudny Bjork Eydal Société des savoirs, gouvernance et démocratie Numéro 50, automne 2003 URI : https://id.erudit.org/iderudit/008286ar DOI : https://doi.org/10.7202/008286ar Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) Lien social et Politiques ISSN 1204-3206 (imprimé) 1703-9665 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Bjork Eydal, G. (2003). Politiques de la petite enfance dans les pays nordiques. Lien social et Politiques, (50), 165–184. https://doi.org/10.7202/008286ar Résumé de l'article Cet article présente la politique de la petite enfance en Islande eu égard aux autres pays nordiques, en particulier la loi islandaise de 2000 relative à l’égalité des droits au congé parental. Parmi les pays nordiques, réputés pour leur offre publique de services aux familles, l’Islande accusait un retard prononcé en ce qui concerne les services de garde et les congés parentaux. Le congé maternité rémunéré, institué en 1975, s’y est progressivement étendu de trois à six mois (1990); les pères islandais ont acquis en 1998 le droit à un congé de paternité de deux semaines, qui a été porté à un mois en janvier 2001. Les congés disponibles pour les deux parents ont peu à peu augmenté, pour atteindre neuf mois. La loi a changé le régime d’indemnisation de manière radicale, garantissant une égalité de traitement à tous les parents qui travaillent. Mais il est trop tôt pour affirmer que l’Islande a emprunté la voie sociale-démocrate.

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Tous droits réservés © Lien social et Politiques, 2003 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation desservices d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politiqued’utilisation que vous pouvez consulter en ligne.https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/

Cet article est diffusé et préservé par Érudit.Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé del’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec àMontréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche.https://www.erudit.org/fr/

Document généré le 30 oct. 2020 13:14

Lien social et Politiques

Politiques de la petite enfance dans les pays nordiquesChild care policies in the Nordic countriesGudny Bjork Eydal

Société des savoirs, gouvernance et démocratieNuméro 50, automne 2003

URI : https://id.erudit.org/iderudit/008286arDOI : https://doi.org/10.7202/008286ar

Aller au sommaire du numéro

Éditeur(s)Lien social et Politiques

ISSN1204-3206 (imprimé)1703-9665 (numérique)

Découvrir la revue

Citer cet articleBjork Eydal, G. (2003). Politiques de la petite enfance dans les pays nordiques.Lien social et Politiques, (50), 165–184. https://doi.org/10.7202/008286ar

Résumé de l'articleCet article présente la politique de la petite enfance en Islande eu égard auxautres pays nordiques, en particulier la loi islandaise de 2000 relative àl’égalité des droits au congé parental. Parmi les pays nordiques, réputés pourleur offre publique de services aux familles, l’Islande accusait un retardprononcé en ce qui concerne les services de garde et les congés parentaux. Lecongé maternité rémunéré, institué en 1975, s’y est progressivement étendu detrois à six mois (1990); les pères islandais ont acquis en 1998 le droit à un congéde paternité de deux semaines, qui a été porté à un mois en janvier 2001. Lescongés disponibles pour les deux parents ont peu à peu augmenté, pouratteindre neuf mois. La loi a changé le régime d’indemnisation de manièreradicale, garantissant une égalité de traitement à tous les parents quitravaillent. Mais il est trop tôt pour affirmer que l’Islande a emprunté la voiesociale-démocrate.

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Cet article a pour objectif d’ana-lyser la politique de la petite enfanceen Islande par rapport aux autrespays nordiques. Nous traiteronstout particulièrement de la loiislandaise la plus récente en faveurdu congé parental†

1.

On considère généralement queles cinq pays nordiques appartien-nent à un même modèle nordique ouscandinave de protection sociale(voir par exemple Esping-Andersen,1993, 1999; Millar et Warman,1996; Sipila, 1997). Ce modèle estcaractérisé, d’une part, par desniveaux d’emploi féminin élevés et,d’autre part, par une offre impor-tante de services et d’aides publicsaux familles (Rauhala et al., 1997).Même si des chercheurs en poli-tiques sociales ont mis en évi-dence les similitudes existantentre les pays du modèle nor-dique, ils ont aussi révélé des dif-

férences. Ce constat est égalementapplicable dans le domaine despolitiques en faveur de la petiteenfance†

2 (Rostgaard et Fridberg,1998; Rostgaard, 2002; Leira,1999; Sipila, 1997).

La recherche récente a montréque le système de protection socialeislandais était différent du modèlenordique par certains aspects(Olafsson, 1999; Broddadottir et al.,1997; Eydal, 2000). Dans les années1940 et 1950, les dépenses islan-daises de protection sociale étaientcomparables à celles des autres paysscandinaves mais, dans les années1960 et 1970, ces dépenses socialesn’ont pas évolué aussi rapidementque dans les autres pays nordiques(tableau 1). Dans les années 1990, lapart du PNB islandais consacréeaux prestations sociales a avoisinéles 18†%, ce qui est faible, même parrapport aux normes européennes

(Social Security in the NordicCountries, 2000).

Une des caractéristiques com-munes aux politiques de la petiteenfance dans les pays nordiques aété l’aide généralisée octroyée auxparents de jeunes enfants. La pre-mière partie de cet article donne unbref aperçu historique de l’évolu-tion des politiques de la petiteenfance en Islande par rapport auxautres pays nordiques. Cette com-paraison nous permet de constaterque l’Islande, d’une manière géné-rale, a mis en place une aide publi-que à l’attention des parents qui estinférieure à celle qu’offrent lesautres pays nordiques.

Dans les années 1990, tous lespays nordiques ont adopté de nou-veaux droits spécifiques au congéparental en faveur des pères. EnIslande, un premier pas dans cette

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Politiques de la petite enfance dans les pays nordiques

Gudny Bjork Eydal

Lien social et Politiques – RIAC, 50, Société des savoirs, gouvernance et démocratie, Automne 2003, pages 165 à 184.

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direction a été franchi en 1998 avecla création d’un congé de paternitéde deux semaines, bien que la loiislandaise attribue moins de compen-sation financière à ce congé que lesautres pays nordiques. La nouvelleloi sur le congé parental, Act onMaternity/Paternity and ParentalLeave [Loi sur le congé maternité/paternité et le congé parental](no 95/2000), a amélioré radicale-ment les droits des parents islandais,et les droits des pères en particulier.La loi accorde le droit à un congéparental de neuf mois, qui peut êtredivisé en un congé maternité detrois mois, un congé de paternité†

3 detrois mois et trois mois supplémen-

taires que les parents peuvent parta-ger à leur gré. En outre, la structuredes prestations a été changée afind’offrir une égalité de traitementpour tous les parents qui travaillent.La seconde partie de cet article ana-lyse les objectifs de cette nouvelleloi et ses effets sur le modèle islan-dais des politiques de la petiteenfance. En conclusion, nous met-trons en évidence les principalescaractéristiques des politiques enfaveur de la petite enfance en Islandedans les années 1990, que nous com-parerons aux politiques et évolutionsdes autres pays nordiques†

4.

Aperçu historique des politiquesde la petite enfance dans lespays nordiques

Les premières institutions pourenfants ont été créées en Europe del’Ouest au cours du 18e siècle(Stang-Dahl, 1985; Sipila, 1997). Àl’origine, les institutions scandi-naves en faveur de la petite enfanceétaient conçues pour des groupesd’enfants particuliers, mais un chan-gement de référentiels d’action a eulieu dans les années 1940, condui-sant à privilégier l’investissementdans l’éducation préscolaire pour

tous les enfants (Antman, 1996;Rostgaard et Fridberg, 1998; Sipila,1997). Après la Seconde Guerremondiale, la petite enfance est deve-nue un problème public, et doncpolitique, dans les pays nordiques(Bjornberg, 1992, 1993). On assistanon seulement au développement deservices publics†

5 de crèche, maisaussi de différents dispositifs decongés rémunérés, permettant auxparents de prendre en charge leursenfants à domicile. La division dutravail entre l’État et les famillesest un problème central dans lespolitiques de la petite enfance dansles pays nordiques. Deux argumentsprincipaux sont avancés pour uneintervention et une aide étatiques†:1) aider la famille à choisir lameilleure solution dans l’intérêt del’enfant et 2) faire en sorte que lesmères aient les mêmes opportuni-tés d’accès au marché du travail ou,inversement, aient la possibilité dese consacrer aux tâches de reproduc-tion sociale (Rostgaard et Fridberg,1998; Leira, 1992).

On peut distinguer trois grandesétapes dans l’histoire des politiquesen faveur de l’égalité des sexes. La

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Politiques de la petite enfance dans les paysnordiques

Tableau 1. Dépenses sociales dans les pays nordiques, 1950-1998

Islande Danemark Finlande Norvège Suède

1950 6,3 8,0 7,1 6,5 8,3

1960 7,6 9,8 8,2 9,8 10,4

1970 9,9 16,6 13,4 14,7 17,8

1980 16,4 27,8 21,1 21,1 32,6

1990 18,0 30,0 26,0 29,0 35,0

1998 18,3 31,4 29,3 25,7 33,7

Source : Social Security in the Nordic Countries.

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première étape correspond à l’éta-blissement de droits formels en vuede l’égalité hommes-femmes. Laseconde étape est marquée par lapossibilité pour les femmes d’accé-der à des responsabilités, notam-ment sur le marché du travail et dansle domaine public. La troisièmeétape implique «†l’intégration desfemmes et des hommes à tous lesniveaux, sur le marché du travail etdans le domaine privé, autrement ditque les femmes et les hommes par-tagent les responsabilités tant éco-nomiques que de prise en chargefamiliale. Il s’agit donc d’une phasedominée par un travail de redéfini-tion des rôles des sexes et par desmesures politiques de redéfinitiondes genres†» (Kjeldstad; 2001†: 79).

L’évolution des politiques nor-diques en faveur de la petiteenfance a été fortement influencéepar les politiques en faveur del’égalité des sexes. Dans les années1970 et 1980, le modèle nordiqued’égalité des sexes encourageaitvivement la participation desfemmes au marché du travail ettous les pays avaient mis en placedes politiques ayant pour objectifde favoriser cette égalité (Kvinnoroch män i Norden, 1988).

Durant cette période, les paysnordiques ont développé le nombrede places de crèche. L’objectif étaitd’accorder une prise en chargepublique de l’enfance pour le bien-être propre de l’enfant, mais onpeut également avancer que lanécessité d’une prise en chargepublique de la petite enfancedécoulait de la présence des mèressur le marché du travail†

6. En plusdes services de crèche, les paysnordiques ont élargi leur politique

de congé parental (entre 1974 et1981) et prôné la mise en placed’un congé parental s’ajoutant aucongé de maternité traditionnel.Selon Leira (1999), cette loi estimportante, parce qu’elle établitlégalement la priorité de la respon-sabilité parentale en matière deprise en charge d’un enfant faceaux exigences professionnelles etconcerne aussi bien les pères queles mères. Elle donne aux pèresl’opportunité de partager le congéparental avec la mère, si les parentsle souhaitent. Cependant, les statis-tiques montrent que le taux de par-ticipation des pères au congéparental était souvent très faible(Leira, 1999), même en Suède, oùdepuis plus d’un quart de siècle lesystème avait encouragé les pères àpartager le congé parental avec lesmères. Haas et Hwang (1999†: 44)remarquent ainsi que «†l’expé-rience de la Suède en termes decongé parental montre la difficultéde promouvoir des changementsimportants dans les rôles tradition-nels de l’homme et de la femme.En dépit des encouragementsnotables mis en place par les auto-rités gouvernementales, les couplesont eu du mal à négocier demanière équitable le partage desprestations du congé parental. Laraison en est simple†: une tellenégociation prend place dans uncontexte plus vaste, où le statut desfemmes sur le marché du travailreste inférieur à celui des hommeset où les cultures organisation-nelles sur le lieu de travail deshommes tiennent pour acquis queles femmes ont une responsabilitéet un intérêt plus grands pour laprise en charge des enfants que leshommes. La division des rôles des

sexes entre pourvoyeur de revenuet responsable des soins est encorerenforcée lorsque les couples déci-dent que les mères bénéficieront aumaximum des prestations accor-dées†». Ces résultats, confirmés parles recherches sur la paternité et lesobligations familiales†

7, ont débou-ché dans les années 1990 sur despolitiques destinées à promouvoirle rôle du père dans la prise encharge et à favoriser les arbitragesparentaux (Moss et Deven, 1999).

Les pays nordiques ont tousréformé leurs politiques dans lesannées 1990 dans le but d’inciterles pères à faire usage du congéparental, et ouvert des droits spéci-fiques pour le congé de paternitédu père. Pour Leira, «†l’introductionde “quotas pour les papas” dans ledispositif de congé parental montreune évolution intéressante de la pen-sée politique à propos de la relationentre parents, enfants et État. Eninstituant un droit des pères àprendre en charge leurs enfants, onesquisse une nouvelle approche dela paternité et de l’égalité entre lessexes†: une intervention étatique surl’emploi au travers de la loi du tra-vail pour promouvoir le rôle d’ai-dant paternel. En réservant unepartie des congés aux pères, on faitun effort réel pour influencer le par-tage du travail à domicile et pourmodifier l’équilibre entre les sexesdans le partage des responsabilitésde la prise en charge familiale†»(Leira, 1999†: 275).

Congé parental, congé poursoins et dispositifs de prestationsde prise en charge à domicile

La Suède est un précurseur dansle développement de dispositifs de

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congés parentaux. La loi suédoiserelative au congé maternité remonteà l’année 1900. À ce moment, lesmères ont bénéficié de quatresemaines de congé après une nais-sance. En 1912, la durée du congéa été portée à six semaines. En1931, la première loi d’assurancematernité accorda aux mères uneaide financière, et en 1937 90†%des mères bénéficiaient d’une pres-tation maternité (Antman, 1996;Ohlander, 1991). En 1954, toutesles mères se sont vu attribuer uncongé maternité rémunéré de troismois. En 1962, ce congé fut étenduà six mois, la prestation établie à60†% du dernier salaire. C’est en1974 qu’intervient la plus fameuseréforme†: tous les parents se sont vuattribuer un congé total de six mois,la prestation compensatoire s’éle-vant à 90†% du dernier salaire.Jusqu’au huitième anniversaire del’enfant, les parents pouvaientchoisir librement quand utiliserleurs droits au congé parentalrémunéré (Björnberg et Eydal,1995; Sundstrom, 1991, cité parGauthier, 1996).

La durée du congé a été étendueà plusieurs reprises depuis 1974 et,en 1989, elle a été portée à douze

mois. Le niveau de remplacementde l’ancien salaire a varié de 90†% à75†%. En outre, les parents sansemploi ont droit à trois mois deprestation forfaitaire pendant ladurée du congé. En cas de situationsimprévues, comme une longuemaladie d’un enfant, les parentspeuvent demander un congé paren-tal temporaire. Les parents ont alorsdroit à 60 jours par an, et dans cer-tains cas on leur accorde jusqu’à120 jours. Les pères suédois béné-ficient également de jours spéci-fiques pour les papas†: dix jours decongé parental temporaire après lanaissance†

8. En 1996, les pères ontobtenu un congé parental spéci-fique, le «†mois-papa†», rémunéré à90†% du dernier salaire (Rostgaardet Fridberg, 1998).

Depuis le 1er janvier 2002, lesparents suédois ont droit à 480jours de congé parental rémunéré.Chaque parent, la mère comme lepère, se voit attribuer 60 jours; ilspeuvent ensuite se partager les 360jours restants. La rémunérationcorrespond à 80†% de l’anciensalaire (en deçà d’un plafond) pen-dant un an après la naissance del’enfant. Pendant les 90 jours sui-vants, les parents ne reprenant pasleur travail peuvent recevoir unmontant garanti s’élevant à 60 SEKpar jour. Les parents qui ne tou-chaient pas de revenu auparavantreçoivent ce montant garanti pen-dant toute la durée des 480 jours(Swedish Institute, 2003; SocialFörsakringskassan, 2003). Les allo-cations de prise en charge à domicilen’ont pas été mises en œuvre enSuède, si ce n’est durant une courtepériode, de 1993 à 1994. Les parentsd’enfants âgés d’un à trois ans pou-vaient alors s’occuper de leurs

enfants et bénéficier de prestationspendant 24 mois. Le gouvernementde coalition conservateurs-démo-crates chrétiens avait instauré ceschéma, mais les sociaux-démo-crates l’ont aboli dès leur retour aupouvoir en 1994 (Bjornberg etEydal, 1995).

Au Danemark, le premier dis-positif en matière de maternitédate de 1915 (Gauthier, 1996). En1933, un congé maternité de deuxsemaines a été instauré pour toutesles mères salariées et, en 1960, cecongé a été étendu à 14 semainesaprès la naissance. En 1984, lesdroits à congés statutaires sontpassés à 26 semaines†: 14 semainesde congé maternité, deux semainesde congé de paternité au moment dela naissance et dix semaines decongé parental partagé. En 1999, uneproposition (déjà présentée auParlement danois en 1984) fut adop-tée†: celle-ci attribuait deux semainesde congé de paternité spécifique, àprendre après dix semaines du congéparental (Rostgaard et al., 1999).Malgré les propositions des sociaux-démocrates et du parti du centrevisant à étendre le congé parental etle quota des pères, le gouvernementconservateur-libéral élu en 2002 asuivi une tout autre politique. Lenouveau gouvernement «†a renforcéla tradition des dispositifs de congésouverts et négociables, dans lequella mère et le père décident eux-mêmes lequel des deux prend lecongé†: le congé maternité-parentala été étendu à 52 semaines, dont 32pouvant être partagées entre lamère et le père, et tous les plansvisant à introduire des quotas pourles pères ont été rejetés†» (Rostgaard,2002†: 6).

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En 1992, une loi relative à un dis-positif de congé pour les parentsavait été adoptée, parallèlement àune loi de réforme du marché du tra-vail. L’objectif était de générer desopportunités d’emploi pour les chô-meurs, en augmentant le congéparental des parents. Cette stratégies’est révélée bénéfique; le pro-gramme de congé parental, d’unedurée de 26 à 52 semaines, a connucontre toute attente un grand succèset permis de diminuer les presta-tions de 80†% de l’allocation-chô-mage à 60†% en 1998 (Rostgaard etFridberg, 1998; Social Security inthe Nordic Countries, 2000).

La Finlande a réglementé lecongé maternité des femmes sala-riées à la fin des années 1930. En1944, une allocation de maternitéen espèces ou en nature, soumise àcondition de ressources, fut attri-buée à toutes les mères†

9. En 1964,un congé rémunéré de huitsemaines a été accordé à toutes lesmères. Les mères salariées rece-vaient une prestation proportion-nelle à leur ancien salaire et lesmères non salariées une prestationforfaitaire. En 1974, ce congé futétendu à 174 jours et, en 1978, 12jours de congé de paternité y ont étéajoutés†

10 (Gauthier, 1996; Rauhala,1998). Le nombre de jours a peu àpeu augmenté et, en 1999, le congématernité était de 17 semaines etdemie, dont cinq semaines àprendre avant la naissance. Lenombre total de semaines s’élevaità 44. Depuis 1990, les parents fin-landais ont droit à un congé paren-tal spécifique pour prendre soind’un enfant et à une prestation deprise en charge à domicile jus-qu’aux trois ans de l’enfant. EnFinlande, en plus du congé et de

l’allocation de prise en charge àdomicile, les parents ont le droit deréduire leurs heures de travail jus-qu’à ce que leur enfant entre àl’école à l’âge de sept ans. La mèreet le père peuvent prendre le congésimultanément ou le prendre sépa-rément, à leur convenance (Salmi etLammi-Taskula, 1999).

En Norvège, le congé maternitérémunéré fait partie intégrante del’universalisation du dispositif d’as-surance maladie. En 1956, les mèressalariées se sont vu accorder uncongé maternité rémunéré de dixsemaines. En 1971, ce congé estpassé à douze semaines, et en 1977,à 18 semaines. Dans les années1980, ces droits ont été élargis.Depuis 1993, les parents peuventchoisir, soit un congé parental de 42semaines avec une rémunérationcorrespondant à 100†% de leurancien salaire, soit un congé de 52semaines avec une rémunération à80†%. Ce dispositif a été nommé leTime-account Scheme (dispositif àcompteur de temps). À partir de1993, quatre semaines de congéparental sont réservées uniquementau père†

11, en plus des droits du pèreà prendre deux semaines de congéau moment de la naissance. La mèredoit obligatoirement prendre troissemaines avant l’accouchement etsix semaines après. En plus ducongé parental rémunéré, lesparents norvégiens peuvent prendrejusqu’à trois années de congé nonrémunéré ou, en accord avec leuremployeur, réduire leurs heures detravail. Les mères qui retournent tra-vailler et continuent d’allaiter peu-vent réduire d’une heure leur duréequotidienne de travail (Rostgaard etFridberg, 1998; Gauthier, 1996;Leira, 1995, 1999, 2002). Pour les

parents d’enfants de moins de troisans non placés en crèches, laNorvège a voté une loi donnantdroit à une prestation. Si l’enfant yest inscrit à temps partiel, lesparents se voient attribuer une pres-tation proportionnelle au tempspassé par l’enfant dans l’institution(Lov om kontantstøtte til smabarns-foreldre nr. 73/1997-8).

En somme, le Danemark, laFinlande, la Norvège et la Suèdeont tous effectué des réformesimportantes de leurs dispositifsjuste après la guerre. SelonGauthier (1996), ces pays ont étédes précurseurs dans ce domaineparmi les pays de l’OCDE. Cepen-dant, l’Islande s’en démarquait for-tement. En 1946, un ensemble delois sur l’assurance sociale futadopté par le Parlement islandais.Ces lois comprenaient des articlessur les prestations à la naissance etle congé maternité rémunéré.Toutes les mères recevaient uneprestation forfaitaire, appelée pres-tation naissance. Les mères sala-riées reçurent également desprestations spécifiques pendanttrois mois. Les mères mariées nepercevaient ces prestations com-plémentaires que si elles appor-taient la preuve que leur mari nepouvait pas subvenir aux besoinsde la famille (Althingistidindi1945; Log um almannatryggingarnr. 50/1946). La loi fut changée en1950 et toutes les femmes eurentdroit à la même prestation nais-sance forfaitaire, indépendammentde leur situation professionnelle etde leur situation maritale. La pres-tation naissance équivalait aux fraisd’accouchement, en hôpital ou enclinique (Eydal, 2000).

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En 1954, le syndicat des fonc-tionnaires demanda trois mois decongé maternité rémunéré dans lecadre des négociations salariales. Ila obtenu gain de cause et ces droitsont été entérinés par une loi (Logum rettindi og skyldur opinberrastarfsmanna nr. 38/1954). Cettedécision fut importante, non seule-ment pour les femmes fonction-naires, mais aussi pour toutes lesfemmes. Grâce à cette loi, le besoind’un congé maternité rémunéré futmieux reconnu. Peu à peu, certainssyndicats obtinrent des droits iden-tiques†

12. Cependant, la majorité desfemmes salariées n’eurent droit à uncongé maternité rémunéré qu’à par-tir de 1975, lorsque la loi concer-nant l’allocation chômage futmodifiée. Cette loi garantissait àtoutes les femmes salariées venantd’accoucher un congé maternitérémunéré d’une durée de trois mois(Althingistidindi, 1975).

En 1981, l’Islande vota une loirelative aux droits universels à uncongé parental rémunéré. C’étaitl’aboutissement d’une négociationsyndicale sur les salaires au coursde laquelle le gouvernement avaitpromis à la Fédération du travail(ASÍ) que toutes les femmes

auraient droit à un congé maternitérémunéré de trois mois. Les presta-tions seraient de deux types†: 1) desprestations universelles, d’un mon-tant forfaitaire, et 2) un complémentmensuel fonction du nombred’heures travaillées (et non pas dusalaire) au cours des douze derniersmois. Au-delà de 30 jours après lanaissance, la mère pouvait fairebénéficier le père de ses droits pourla durée de congé qu’il souhaitait.Les prestations étaient versées parl’État, ce qui, dans le même temps,entraîna une modification des coti-sations sociales de l’employeur(Althingistidindi, 1980-1981; Eydal,2000). Selon Styrkarsdottir (1999),ce ne sont ni les organisations fémi-nines ni les syndicats qui avaientdemandé le droit des pères au congéparental, mais l’influence exercéepar les autres pays nordiques avaitconduit à la passation de ces lois. En1987, la durée avait graduellementatteint six mois (Log um faedinga-rorlof nr. 57/1987).

En 1998, la loi accorda aux pèresdes droits à un congé de paternitérémunéré de deux semaines.Cependant, en 2000, une nouvelleloi relative au congé parental futadoptée, changeant de manière radi-cale les droits des pères islandais.Selon cette loi, les mères ont droit àun congé maternité de trois mois;les pères ont droit à un congé depaternité d’un mois en 2001, dedeux mois en 2002 et de trois moisen 2003. Ensuite, les parents ontdroit à un congé maternité-pater-nité de trois mois en commun,qu’ils peuvent se partager selonleur convenance. Selon la nouvelleloi relative au congé maternité-paternité, les parents peuventdésormais prendre 26 semaines de

congé parental non rémunéré, treizesemaines sont accordées à la mèreet treize semaines au père.

Une des caractéristiques dumodèle islandais de la petite enfanceest que, à part le congé parental,aucun autre droit à un congé spéci-fique à la petite enfance, ni aucuneallocation de prise en charge à domi-cile n’ont été accordés. À plusieursreprises au cours des années 1980,la Women’s Alliance (Allianceféminine) a présenté un projet deloi, visant à permettre aux parentsd’enfants de moins de deux ans deprendre un congé non rémunéré.Ses propositions n’ont pas étéacceptées et aucun projet de loi surl’allocation de prise en charge àdomicile n’a été proposé auParlement (Althingistidindi, 1988).Au niveau local, quelques expé-riences d’allocation de prise encharge à domicile ont été menées et,dans la capitale, Reykjavik, un dis-positif d’allocation de prise encharge à domicile a été mis en placepar le Parti de l’indépendance (partide droite) au début des années 1990.

Ce dispositif fut aboli en 1994avec l’arrivée au pouvoir del’Alliance du SDP, de la PeoplesAlliance, de la Women’s Alliance etdu Progressive Party. En 1998,l’Independence Party proposa ànouveau un système d’allocationde prise en charge semblable auprogramme kontanstøtte norvé-gien, pendant sa campagne pouraccéder au conseil municipal; maisl’Alliance des partis du centre et degauche gagna de nouveau les élec-tions (Eydal, 2000). La nouvelle loirelative au congé maternité-pater-nité attribue aux parents un droit à26 semaines de congé non rému-

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Hors thème

Politiques de la petite enfance dans les paysnordiques

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néré (treize semaines à la mère ettreize semaines au père) jusqu’auxhuit ans de l’enfant.

Comparativement aux autrespays nordiques, le dispositif islan-dais accorde moins de prestationsaux parents en termes, tant de duréedu congé parental que d’indemnitésoctroyées†

13. Cependant, contraire-ment à l’Islande, aucun pays nor-dique n’a actuellement de loiassurant aux pères autant de droitsindépendants au congé de paternité.

Services de crèches

Les politiques en faveur de lapetite enfance traitent à la fois descongés parentaux et des services aubénéfice des parents de jeunesenfants. Dans les années 1960, laprise en charge des enfants est deve-nue un élément essentiel du débatsocial dans tous les pays nor-diques†

14. Au cours des années 1960et 1970, des lois globales ont étévotées dans tous les pays. LeDanemark fut le premier à légiférersur la prise en charge des enfants,en 1964, suivi par la Finlande,l’Islande et la Suède, tous trois en1973, et plus tard par la Norvège, en

1975 (Sipila, 1997; Broddadottir etal., 1997). Les pays nordiques déve-loppèrent des systèmes publics decrèche basés sur un principe d’uni-versalité, fortement subventionnéset régulés par le secteur public. Enoutre, les autorités locales obtinrentun grand niveau d’autonomie pourdéfinir le volume de l’offre de priseen charge†

15.

Malgré ces similitudes, lesmodèles sont différents (Gornick etal., 1997; Leira, 1992; Rauhala et al.,1997; Sipila, 1997). Le Danemarket la Suède ont été des précurseurset développèrent l’offre la plusimportante. Leurs modèles se carac-térisaient par l’importance de l’aidesociale aux enfants, mais tenaientcompte en même temps des besoinsdu marché du travail. Cependant,dans les années 1990, l’intégrationdes services à la petite enfance et dela scolarisation a été renforcée et, enSuède, on a assisté à une prise deconscience accrue des aspects rela-tifs à la politique pédagogique. En1996, la responsabilité de la prise encharge publique de l’enfance futtransférée du ministère de la Santéet des Affaires sociales au ministère

de l’Éducation et des Sciences. En1998, la réglementation relative à lapetite enfance a été intégrée à la Loisur l’éducation†

16.

En Norvège, par contre, l’offrepublique de crèche a augmenté dansune moindre mesure, la priorité por-tant surtout sur les aspects pédago-giques et non sur les besoins dumarché du travail et des mères(Leira, 1992). En Finlande, l’offrede prise en charge des enfants demoins de trois ans est moindre quedans les autres pays nordiques, maiscette différence est liée à l’adoptionen 1985 d’un dispositif d’alloca-tions pour faciliter la prise en chargeà domicile, dispositif mentionnéprécédemment (Rauhala, 1998).

Si l’on observe l’évolution del’offre de crèche pour les plusjeunes enfants (0-2 ans), les caracté-ristiques sont différentes selon lespays (tableau 2). Les pays précur-seurs, le Danemark et la Suède, sonttoujours au premier rang pour ce quiconcerne le nombre d’enfants demoins de deux ans fréquentant unecrèche. Au cours des années 1990,la Norvège a augmenté son offrepour les enfants âgés d’un à deuxans. Cependant, c’est en Islande quel’augmentation fut la plus marquée,la prise en charge pour ce grouped’âge ayant plus que doublé, et en2000 l’Islande présentait une offresemblable à celle de la Suède. Selonces chiffres, le seul pays nordiquen’ayant pas augmenté son offre deplaces en crèche est la Finlande,mais il faut rappeler que les enfantspris en charge par des assistantsrémunérés par l’intermédiaire dusystème d’allocations de prise encharge à domicile ne sont pas comp-tabilisés dans le tableau 2.

1

Tableau 2. Enfants de 0-2 ans pris en charge dans une crèche ou dansune crèche familiale (%)

Islande

Danemark

Finlande

Norvège

Suède

1981

14

37

18

4

25

1990

25

48

31

12

32

2000 a

59

77

35

37

60

Source : Sipila, 1997; Social Security in the Nordic Countries, 2000, 2002.

a. Enfants de 1-2 ans.

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Les données sur les enfants detrois à six ans présentent des carac-téristiques similaires (tableau 3).De 1981 à 1990, il y a une forte fré-quentation au Danemark et enSuède, moindre dans les autrespays nordiques, notamment en cequi concerne les inscriptions àtemps plein. En 1999, c’est enFinlande que le chiffre global est leplus faible, mais il semble que lesystème d’allocations aux parentspour la prise en charge à domicile deleurs enfants jusqu’à l’âge de troisans influence le nombre de placespour les enfants de trois ans. Selon leYearbook of Nordic Statistics, lesoffres ont augmenté en Norvège àpartir de 1993. En 1999, 77†% desenfants âgés de trois à six ans sontinscrits dans une crèche publique,contre 82†% en Suède. C’est auDanemark que le taux de couver-ture est le plus élevé†: 91†% de tousles enfants de trois à six ans sontinscrits dans une crèche publique.

Selon Broddadottir et al. (1997),l’Islande s’apparente plus au modèle

norvégien pendant les années 1980et le début des années 1990, lesdeux pays offrant un nombre deplaces relativement faible pour lesenfants de moins de deux ans etune prise en charge institutionnellede jour pour environ 60†% desenfants âgés de trois à six ans (enoutre, une forte proportion d’en-fants sont inscrits à temps partiel).La principale caractéristique de cesdeux pays fut de prévoir une priseen charge publique faible, lesobjectifs pédagogiques et la priseen charge à temps partiel ayant étéprivilégiés (Leira, 1992, 1995;Rauhala et al., 1997; Broddadottiret al., 1997). Dans les années 1990,l’Islande s’est orientée dans unetout autre direction; on a pu remar-quer une augmentation de la cou-verture, notamment pour lesenfants âgés de plus de trois ans,mais aussi pour le groupe d’âge leplus jeune.

Malgré cette augmentation enIslande à la fois de l’offre de priseen charge et des droits au congéparental rémunéré, les comparai-sons des parts de PNB consacrées à

la famille et aux enfants dans lespays nordiques révèlent quel’Islande apporte une aide moinsimportante à la famille et auxenfants que les autres pays nor-diques. En 1997, l’Islande a consa-cré 2,4†% de son PNB auxprestations et services à la familleet aux enfants, par rapport à 3,8†%au Danemark, 3,9†% en Finlande,3,5†% en Norvège et 3,8†% enSuède. En outre, si l’on tientcompte de la structure démogra-phique islandaise, cet écart tendencore à s’agrandir (tableau 4)(Social Security in the NordicCountries, 1998). La recherchemenée sur l’aide sociale en Islandeet ses résultats permettent ainsi dedémontrer que le système islandaisoctroie moins de prestations et deservices aux familles avec enfantsque les autres pays nordiques(Juliusdottir, 1993; Kristinsdottir,1991; Olafsson, 1999).

Cependant, les parents islandaissont très impliqués sur le marchédu travail. Les taux de fécondité enIslande sont également bien supé-rieurs à ceux des autres pays nor-

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Politiques de la petite enfance dans les paysnordiques

Tableau 3. Enfants de 3-6 ans pris en charge dans une crèche ou dansune crèche familiale (%)

Islande

Danemark

Finlande

Norvège

Suède

1981

41

47

37

35

65

1990

60

73

58

57

64

2000 a

92

92

67

78

86

Source : Sipila, 1997. Social Security in the Nordic Countries, 2000, 2002.

a. Enfants de 3-5 ans.

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1

Tableau 4. Soutien aux familles avec enfants dans les pays nordiques, 1996-1997

Dépenses endirection desfamilles avecenfants/PIB (%)

Poids de la popu-lation de moinsde 16 ans (%)

Importance relative destransferts a

Islande

2,35

25,9

0,09

Danemark

3,98

18,6

0,21

Finlande

3,91

20,3

0,19

Norvège

3,53

20,7

0,17

Suède

3,78

20,0

0,20

Source : Social Security in the Nordic Countries, 1997; et Yearbook of Nordic Statistics, 1996 (d’après Olafsson, 1999).

a. % dépenses/% population.

Tableau 5. Données diverses sur les pays nordiques (actualisées pour 2000-2003)

Islande Danemark Finlande Norvège Suède

16-64 ans sur le marché du travail (%)Hommes 91,5 85,4 75,9 84,9 79,5Femmes 84,3 76,4 71,2 76,2 74,8

Mères actives avec enf. 0-6 ans (%) 77,6 74 62 75 76,6Dont à temps plein 41,8 na 82 51 56,2

Taux de fécondité 2,048 1,724 1,697 1,810 1,505

Nombre maximum de semaines de congé paternel ou maternel et parental rémunéré 36 30 44 42-52 64

Dont (en semaine) :— Congé de maternité 12 18 18 9 8

— Congé de paternité 12 Aucun Aucun 4 8

— Congé addit., père et mère Aucun 2 3 2 2

— Congé rémunéré et allocation de prise en charge à domicile Aucun 52 semaines 3 ans 3 ans Aucun

Enfants en crèche (%)0-2 ans 59 77 35 37 600-5 ans 92 92 67 78 86

Sources : Femmes de 16-64 sur le marché du travail : Yearbook of Nordic Statistics, 2000 : 140. Mères actives d’enfants de 0-6 ans : donnéesles plus récentes des services statistiques de chaque pays. Indice de fécondité, 1999 : Yearbook of Nordic Statistics, 2000 : CHIL02. Enfantspris en charge en institution : Social Security in the Nordic Countries, 2000, 2002. Nombre maximum de semaines pour recevoir une presta-tion de maternité : ibid.; Social försakringskassan, 2003; Rostgaard, 2002. Congés parentaux : Social Security in the Nordic Countries, 2000;Leira, 1999; Rostgaard, 1999; Salmi et Lammi-Taskula, 1999. Islande, 2000 : loi relative à l’égalité des droits pour le congé parental.

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Page 11: Politiques de la petite enfance dans les pays nordiques · que dans les autres pays nordiques (tableau 1). Dans les années 1990, la part du PNB islandais consacrée aux prestations

diques. Le tableau 5 donne unaperçu des taux d’activité et destaux de fécondité, ainsi que deschiffres clés relatifs à différentsprogrammes destinés à la petiteenfance dans les pays nordiques.Les données indiquent que lesfemmes islandaises travaillentautant que leurs consœurs nor-diques, même si les taux de fécon-dité sont beaucoup plus élevés enIslande que dans les autres paysnordiques. Parallèlement, l’offre decrèche est comparable mais l’en-semble des droits aux congésparentaux rémunérés demeure infé-rieur en Islande.

Islande 2000 : loi relative à l’égalité des droits pour le congéparental

Loi relative au congé maternitéet de paternité : objectifs despouvoirs publics

Au printemps 2000, le projet deloi†

17 relatif au congé maternité-paternité et au congé parental aété soumis au Parlement islandais(Althingi) par Pall Petursson,ministre des Affaires socialesdans le gouvernement de coalitionalors formé par le Parti de l’indé-

pendance et le Parti progressif.Après la Seconde Guerre mondiale,l’Islande a compté quatre grandspartis politiques†: le Parti social-démocrate (Althyduflokkur); le«†Parti de gauche†» (parti socia-liste de gauche plusieurs foisrebaptisé); le Parti progressif(Framsoknarflokkur) (centre); etle Parti de l’indépendance(Sjalfstaedisflokkur), qui se situeà droite, mais moins que les par-tis conservateurs européens(Olafsson, 1999). La carte poli-tique s’est modifiée en 1999.Apparue durant les années 1980et représentée au Parlementdepuis lors, l’Alliance féminine(Kvennalistinn) s’est unie au Partisocial-démocrate et à une dissi-dence du Parti de gauche pour for-mer un nouveau parti, l’Alliance(Samfylkingin); la majorité du Partide gauche a créé un nouveau parti,le Mouvement des verts et de lagauche (Vinstri-Grænir), et un petitParti libéral (Frjálslyndi flokku-rinn) est entré au Parlement.

Le Parlement islandais a voté enun temps record la nouvelle loi des-tinée à «†permettre aux enfants deprofiter aussi bien de leur père quede leur mère et à faciliter aux deuxparents la conciliation entre viefamiliale et vie professionnelle†»(Log um faedingar- og foreldraorlofnr. 95/2000)†

18. Des rechercheseffectuées en Islande comme dansd’autres pays montraient en effetque les pères souhaitaient passerplus de temps avec leurs enfants,possibilité dont les privait souventla répartition traditionnelle destâches. Le projet de loi faisait aussiréférence à la loi islandaise relativeà l’égalité des sexes†: les parentsdevaient avoir droit aux mêmes

congés pour jouir d’un accès égalau marché du travail et être égale-ment à même de concilier respon-sabilités familiales etresponsabilités professionnelles.

Aux termes de la loi, chaqueparent «†bénéficiera d’un droitpropre à un congé maternité-pater-nité d’une durée maximale de troismois, dans les situations suivantes†:une naissance, une adoption oul’accueil permanent d’un enfant.Ce droit n’est pas assignable†

19. Àcela s’ajoute la possibilité pour lesparents de bénéficier de trois moissupplémentaires. Ces trois moispourront soit être pris en totalitépar l’un des parents, soit être parta-gés entre les deux parents. Le droitau congé maternité-paternité expi-rera aux 18 mois de l’enfant. Lafemme devra prendre au moinsdeux semaines de congé maternitéaprès la naissance de son enfant. Leparent qui n’a pas la garde de l’en-fant ne pourra prétendre à un congématernité-paternité que si le parentgardien donne son accord†» (Logum faedingar- og foreldraorlof nr.95/2000, 8.gr.). Outre ces droits aucongé maternité-paternité, chaqueparent peut bénéficier, jusqu’auxhuit ans de l’enfant, d’un congéparental non rémunéré de treizesemaines, soit un total de 26semaines (treize pour la mère,treize pour le père), non cessibles(voir le tableau 6).

Le caractère non cessible ducongé maternité-paternité est con-sidéré comme une condition indis-pensable pour atteindre l’objectif dela loi. Dans son discours, le ministrePall Petursson énumère les raressituations où l’enfant pourrait ne pasbénéficier de la présence de ses

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Politiques de la petite enfance dans les paysnordiques

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deux parents pendant neuf mois,soit celles où la mère choisit de nepas mentionner le nom du père del’enfant, où le parent gardien n’au-torise pas l’autre parent à utiliserses droits au congé maternité-paternité et où l’un des deuxparents réside à l’étranger (PallPetursson, í Althingistidindi, 2000).

Selon la loi, un(e) employé(e)doit informer son employeur parpréavis de son intention de prendreun congé maternité-paternité. L’em-ployé(e) peut prendre ce congé soiten une seule fois, soit en plusieurs,mais avec l’accord de sonemployeur et à condition de prendreau minimum une semaine à la fois.En cas de refus, l’employeur doit endonner la raison par écrit dans undélai d’une semaine et proposer uneautre solution (Log um fædingar-ogforeldraorlof nr. 95/2000).

Le système de protection socialeislandais propose des prestationsforfaitaires et des prestations éta-blies en fonction des ressources. Iln’a jamais adopté la tradition scan-

dinave d’une prestation compensa-toire du revenu (Olafsson, 1999).Les lois antérieures prévoyaientdeux types d’indemnités de congéparental†: une indemnité forfaitaire,versée à tous les parents, et uneindemnité calculée en fonction dunombre d’heures de travail oud’études du parent durant lapériode précédant la naissance del’enfant. Le système n’avait pasbougé depuis 1946. La nouvelle loiattribuant aux parents des indemni-tés égales à 80†% de leur salairemoyen constitue un changementradical. Le revenu de référenceenglobe tous les types de res-sources, sans considération de pla-fond minimal ou maximal. Lamoyenne est calculée à partir dunombre d’heures travaillées durantdouze mois consécutifs, deux moisavant le premier jour du congématernité-paternité. Si les parentsont travaillé moins de 25†% d’untemps partiel ou n’ont pas été actifssur le marché du travail, ils reçoi-vent une indemnité de maternité-paternité de 33157 ISK par mois.

Les étudiants à temps plein ontdroit à une indemnité mensuelle de74867 ISK (Log um fædingar-ogforeldraorlof nr. 95/2000).

La présentation du ministre desAffaires sociales souligne que la loifavorise non seulement l’égalitéentre mères et pères, mais aussil’égalité entre employés membresdes différents syndicats, puisqu’ellegarantit le versement de 80†% del’ancien salaire à l’ensemble desemployés (Althingistidindi, 2000),alors que le dispositif précédent negarantissait une prestation à tauxplein qu’à certains syndiqués, lesautres ne bénéficiant que desindemnités du système de protec-tion sociale. Le nouveau congématernité-paternité est versé par unfonds spécifique, le Fonds de congématernité-paternité, créé par la loi etfinancé par des prélèvements sur lesassurances (Log um fædingar-ogforeldraorlof nr. 95/2000).

Comme nous l’avons vu, le pro-jet de loi fait référence à desrecherches qui donnent à penserqu’une majorité d’hommes souhai-tent pouvoir concilier vie profes-sionnelle et vie familiale et que lacréation d’un congé maternité-paternité fondé sur des droits dis-tincts pour le père et la mère peutfavoriser la conciliation entre vieprofessionnelle et vie familialepour les deux parents. Au cours desdébats, les parlementaires ont aussifait référence à des accords formu-lés au sein de l’Union européenne,notamment à la Directive sur lecongé parental (96/34/EC), en évo-quant la possibilité d’intégrer celle-ci dans la loi. Cette directiveeuropéenne pose les exigencesminimales dont on souhaite le res-

1

Tableau 6. Congés de maternité et de paternité et congés parentaux enIslande, 2001-2003

Âge de l’enfant

Moins de 18 mois

De 18 mois à 8 ans

Type de congé

Paternité-maternité :3 mois de congé dematernité;3 mois de congé depaternité;3 mois à répartir selonle choix des parents

Congé parental :13 semaines pour lesmères13 semaines pour lespères

Financement

Pour les parents qui tra-vaillent : 80% dusalaire. Pour les autres :montant forfaitaire

Pas de financement

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pect par tous les États membres,notamment le droit de tous lesemployés (hommes ou femmes) àtrois mois de congé parental aprèsla naissance ou l’adoption de leurenfant. Ces droits sont égalementattribués aux parents des famillesd’accueil qui prennent des enfantsen charge de manière permanente,conformément aux lois islandaisesrelatives à la protection des enfants(Althingistidindi, 2000).

Le ministre des Affaires socialesa conclu son discours en réaffirmantses intentions†: l’adoption de la loirelative au partage du congé mater-nité-paternité entre les deux parents«†doit être considérée, a-t-il dit,comme une mesure provisoire,visant en priorité à améliorer lasituation des hommes. Dans le sys-tème actuel, ce sont essentiellementles femmes qui profitent de leursdroits au congé parental, et celamême si ce droit au congé parentalest un droit commun aux deuxparents. De l’avis du groupe d’ex-perts, auteurs de ce projet de loi, ilest nécessaire de légiférer sur le par-tage des droits entre les parents enmême temps que sur les droits aucongé de paternité. Il est prévu derevoir ces lois au bout de trois ans,

en fonction des résultats des étudesmenées sur l’usage par les parentsde leurs droits communs et sur letaux de participation des pères†»(Pall Petursson, í Althingistidindi,2000).

Le contexte politique : les idéessur le congé de paternité

La notion de droits spécifiquesattribués aux pères n’est pas nou-velle. L’opposition a présenté à plu-sieurs reprises au Parlement despropositions relatives aux droits despères au congé parental. En mars1994, l’Alliance féminine (qui avaitdéjà réclamé un congé parental dedouze mois sans quote-part pour lespères) a proposé la formation d’uncomité chargé de recommanderdes mesures favorables à l’égalitéentre les sexes et à l’améliorationde la situation des parents dejeunes enfants. Il pouvait s’agirpar exemple de «†faciliter l’accèsdes hommes au congé parental†»(Alhingistidindi, 1994†: Thingskjal725). En novembre de la mêmeannée, Sigurdardottir, membre duParti social-démocrate, a présentéune résolution visant la créationd’un comité chargé de modifier laloi relative au congé parental ens’attachant tout particulièrement àla question de l’application desdroits des pères (Althingistidindi,1994-1995†: Thingskjal 155). Cespropositions n’ont pas été retenues.Elles défendaient toutes deuxl’idée de faciliter l’accession despères à un congé de paternité, maisaucune n’en précisait les modalitésconcrètes.

En décembre 1995, la premièreproposition directe fournissant deséléments pour mettre cette idée en

pratique est venue d’un comit髆sur le rôle des hommes entre lessexes†» créé par le ministère desAffaires sociales, qui a soumis sessuggestions au comité nommé par leministre de la Santé et de la Sécuritésociale pour modifier la loi sur lecongé parental. Les propositions sui-vantes ont été publiées†:

1) Un congé parental d’unedurée de douze mois†: quatre moisde congé maternité, quatre mois decongé de paternité et quatre moislibrement partagés par les parents.

2) L’attribution aux pères d’uncongé de deux semaines lors de lanaissance de l’enfant.

3) L’existence de droits distinctsau congé parental et aux presta-tions.

4) Une plus grande souplessedonnant la possibilité aux parentsde prendre le congé maternité-paternité avant les deux ans del’enfant.

5) La garantie qu’une perte derevenu n’empêcherait pas lesparents de profiter de leur droit aucongé (Gislason, 1997).

Selon Gislason, ces propositionssont devenues les principaux enjeuxdes débats sur le congé parental.Ainsi, en février 1996, l’Allianceféminine a suggéré de créer uncomité désigné par le ministre de laSanté et de la Sécurité sociale, dontla mission serait de rédiger un nou-veau projet de loi relatif au congéparental, garantissant notammentau père un droit distinct à un congéde paternité d’une durée de troismois (Althingistidindi, 1995-1996†:Thingskjal 307). Cette suggestion,non retenue, mentionnait explicite-

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Politiques de la petite enfance dans les paysnordiques

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ment l’idée de droits spécifiques despères au congé parental. Toujours enfévrier, le Parti de gauche a proposéd’attribuer aux pères le droit à uncongé de paternité de deux semainesrémunéré au moment de la naissancede l’enfant (Althingistidindi, 1995-1996†: Thingskjal 309). Commetoutes les propositions émises parl’opposition en 1996, celle-ci a étérejetée. En novembre 1996, la muni-cipalité de Reykjanesbae a décidéd’octroyer à tous les employésmunicipaux le droit à un congé depaternité rémunéré de deuxsemaines (Gislason, 2001).

Une étude quantitative mené en1997 révèle l’intérêt des Islandaispour la création d’un congé depaternité†: 87,5†% des hommes ontdéclaré qu’ils profiteraient d’uncongé de trois mois si cela étaitpossible. L’étude montre égale-ment que, pour les pères, la pertede salaire serait un élément déter-minant de leur décision de prendreou non ce congé (Masson, cité parGislason, 1997)†

20. Une autre étude,qualitative, précise que 24 pèressur 25 ont pris un congé aumoment de la naissance de leursenfants, sous la forme d’un congésans solde ou en utilisant leurscongés payés (Gislason, 1997).

Grâce à un financement euro-péen, la Ville de Reykjavik a à sontour réalisé une étude entre 1996 et1998, en collaboration avec l’Asso-ciation des employés municipaux,l’Association des ménagères nor-diques et le Comité sur le rôle deshommes entre les sexes. De nom-breux pères ont participé à l’étudequalitative†: employés de la Ville deReykjavik, ils ont eu droit à uncongé de paternité de trois mois

avec maintien du salaire à tauxplein. L’objectif de l’étude étaitd’analyser l’impact d’un congé surun certain nombre d’éléments†:«†sur les pères, sur les liens déve-loppés avec l’enfant, sur la réparti-tion des tâches entre les deuxparents, sur l’égalité au sein ducouple et, enfin, sur les relationsprofessionnelles†» (Einarsdottir,1998†: 4). À partir des résultats del’étude, on a réalisé un documen-taire télévisé pour sensibiliser lepublic, modifier les comporte-ments et «†contribuer à une réformede la loi sur le congé parental attri-buant aux pères un droit au congéde paternité individuel et non trans-férable†» (ibid.). Les médias ontsuivi ce projet de près. Bien qu’ilsoit difficile de tirer des conclu-sions sur l’effet direct de cette cam-pagne, elle a sans aucun doute euun impact sur la population et surle débat politique.

En mai 1997, le Parlement a votéune résolution sur la politique fami-liale stipulant que le gouvernementavait le devoir d’octroyer des droitsau congé parental aux deux parentset de prendre des mesures pourpermettre aux pères d’en bénéfi-cier (Althingistidindi, 1995-1996†:Thingskjal 719). En septembre 1997,le ministre des Finances a mis enplace un congé de paternité rémunéréd’une durée de deux semaines des-tiné à l’ensemble des pères fonction-naires. Ce congé devait être pris aucours des huit semaines suivant lanaissance de l’enfant. En décembrede la même année, le Parlement aapprouvé un projet de loi gouverne-mental accordant un congé de deuxsemaines à tous les pères à compterdu 1er janvier 1998. Les partis d’op-position ont soutenu le projet de loi,

tout en soulignant qu’il allait moinsloin que leurs propres propositions(Althingistidindi, 1997). À l’au-tomne 2000, dans un discours pro-noncé lors de la Conférenceinternationale Women and Demo-cracy [les femmes et la démocratie],le Premier ministre Oddson aannoncé un projet de loi visant àaccorder des droits égaux aux deuxparents (Einarsdottir, 2000).

Présenté en 2000, le projet de loi areçu le soutien de tout le Parlement,nonobstant les appartenances poli-tiques†

21. Seul un membre du Parti del’indépendance s’y est opposé, fai-sant valoir que l’application de laloi entraînerait une augmentationdes dépenses gouvernementales àun moment où il fallait réaliser deséconomies pour garantir la crois-sance économique à venir. Il estintéressant de noter que c’est unmembre du Mouvement des vertset de la gauche — parti d’opposi-tion — qui lui a répondu en plai-dant en faveur du projet de loi. Lesmembres de l’opposition ont néan-moins fait quelques remarques etsuggestions. Ils ont exprimé descraintes concernant les cas (commele viol) où la mère ne pouvait pasidentifier le père de son enfant;dans de telles situations exception-nelles, il fallait selon eux que lamère puisse utiliser elle-même lestrois mois de congé de paternité.En outre, il leur paraissait dérai-sonnable de ne pas plafonner lesprestations. Enfin, ils ont demandéque la loi soit plus souple. Demanière générale, ils ont insisté surla nécessité de prévoir des modifi-cations et des améliorations à la loiaprès sa mise à l’épreuve, maissans en proposer au moment du

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vote. Le projet initial a donc étéaccepté (Althingistidindi, 2000).

Les notes explicatives jointesau projet de loi précisent que,selon une directive européenne,les États membres doivent pou-voir transférer au marché du tra-vail la responsabilité des mesuresinstituées. L’Islande a essayé sanssuccès de mettre en place uneconvention de ce type. Cependant,la loi a bénéficié d’un large sou-tien, le projet ayant été rédigé encollaboration avec le ministèredes Affaires sociales, le ministèredes Finances et le ministère de laSanté et de la Sécurité sociale,compte tenu des propositionsémises par la Fédération des syndi-cats (Althydusamband Islands),l’Union des employés de l’Univer-sité (Bandalag Haskolamanna),l’Association des employés muni-cipaux (Bandalag stafsmannarikis og baeja), l’Association desinstituteurs d’Islande (Kennara-sambands Islands) et la Confé-dération des employeurs islandais(Samtok atvinnulifsins).

Le projet a rencontré deux typesd’opposition dans la population.D’une part, certains jeunes membres

du Parti de l’indépendance ontdénoncé l’ingérence de l’État dansla vie privée des gens. Selon eux, larépartition du congé parental entrele père et la mère ne doit pas être duressort de l’État mais des parentseux-mêmes. D’autre part, au coursdes débats, le ministre des Affairessociales a dit avoir reçu des e-mailsde la part d’un groupe de femmesmécontentes de la réduction deleurs droits de congé maternité desix à trois mois. En effet, dans lecadre de la nouvelle loi, si ellessouhaitent bénéficier de six mois decongé, les mères doivent négocieravec les pères le partage des troismois communs (Althingistidindi,2000). Mis à part ces résistances, lanouvelle loi, entrée en vigueur enjanvier 2001, semble avoir été bienperçue et reçue par la population.Un sondage Gallup de mars 2003confirme l’ampleur de son soutien,qui diffère toutefois légèrementselon les sexes. À la question†:«†Êtes-vous favorable à ce que lesfemmes utilisent leurs droits à uncongé parental rémunéré de trois àsix mois†?†», 99†% des personnesinterrogées ont répondu positive-ment, tandis que 85†% étaient d’ac-cord avec le fait que les hommesutilisent les mêmes droits. Lesjeunes étaient plus favorables queles personnes plus âgées à l’utilisa-tion de ces droits par les hommes†:97,5†% des 18-24 ans contre 69,9†%des 55-75 ans. Le soutien était moinsprononcé parmi les employeurs(73,7†%) que parmi les employé(e)s(87,3†%) (Gallup, 2003).

Le succès de la loi se mesureraau nombre réel de pères qui bénéfi-cieront de leurs droits. Les donnéesdisponibles sur l’usage des congéssont peu abondantes. Selon l’Insti-

tution de la protection sociale(Tryggingarstofnun Ríkisins), la pro-portion d’utilisation par les hommes,en pourcentage des femmes, était de79,7†% en 2001 et de 78,1†% en2002. À grande échelle, si l’on exa-mine combien de parents n’utilisentpas leurs droits (trois mois pour lesfemmes; un mois en 2001 et deuxmois en 2002 pour les hommes),les résultats montrent que presque100†% des femmes utilisent tousleurs droits, tandis que 94,8†% deshommes ont utilisé leurs droits en2001 et 82,5†% en 2002. Quant auxtrois mois que les couples peuventpartager librement, 94,2†% desfemmes en ont bénéficié en 2001 et93,3†% en 2002; 14,5†% deshommes ont utilisé une partie deces congés en 2001 et 12,9†% en2002. Si l’on compare l’utilisationdu congé parental par les parents,les résultats montrent que la majo-rité des femmes prennent leurcongé en une seule fois (71,3†% en2001 et 65†% en 2002) tandis queles hommes préfèrent toujoursscinder leurs congés en deuxpériodes ou plus. Ainsi, en 2002,70,9†% des hommes ont pris plusd’un congé (Janrettisstofa, 2003).

Les chiffres laissent croire à uneforte participation des pères, mais ilest encore trop tôt pour tirer de plusamples conclusions†: les donnéessont trop limitées. Il faut attendre leschiffres calculés pour 2003, pre-mière année où hommes et femmesauront joui de droits égaux.

Conclusion

Dans les années 1980 et au débutdes années 1990, l’offre de serviceset de prestations aux familles avecenfants était moins importante en

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Politiques de la petite enfance dans les paysnordiques

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Islande que dans les autres paysnordiques. L’Islande accordait éga-lement moins de droits au congéparental rémunéré. La loi de 2000étend la durée du congé à neufmois, dont trois sont attribués uni-quement au père en 2002. En ins-taurant des droits égaux et distinctsau congé parental, cette loi fait del’Islande un pionnier. Dans lemodèle islandais, les parents doi-vent partager également la respon-sabilité de la prise en charge desenfants. Seul l’avenir nous diracombien de pères exerceront réel-lement leurs droits et comment lesparents partageront leurs trois moiscommuns. Pour ce qui est de laprise en charge de jour, l’offre étaitplus faible en Islande que dans lesautres pays nordiques lorsque, aucours des années 1990, les places àtemps plein et à temps partiel ontcommencé à augmenter. Malgréleur croissance rapide, l’attentereste longue dans de nombreusesmunicipalités. Même si les parentsprennent leurs 26 semaines supplé-mentaires non rémunérées après lecongé maternité-paternité, rienn’assure que l’enfant pourra béné-ficier d’une garde de jour au termede cette période.

Le Danemark a réussi à comblerce manque en instaurant un congépour la petite enfance. De leur côté,la Norvège et la Finlande ont créédes dispositifs d’allocations de prisede prise en charge à domicile. Lasituation de la Suède est un peu dif-férente puisqu’il y existe un congéparental de quinze mois. Si l’oncompare les systèmes proposés dansles pays nordiques, il ressort que,globalement, c’est toujours l’Islandequi offre les congés de prise encharge rémunérés les moins longs.

Les politiques en faveur del’égalité adoptées par tous les paysnordiques se sont répercutées sur laprise en charge publique de l’en-fance et sur la demande de congésde paternité rémunérés. Pour éva-luer adéquatement la situation quien résulte, il faudrait que nousconnaissions mieux le degré departicipation des pères à la prise encharge des enfants et la positiondes femmes sur le marché du tra-vail. Or, soulignent Haas et Hwang(1999), en Suède, les écarts derémunération entre les sexes sub-sistent (le rapport est de 80†%) et laségrégation en fonction des sexespour l’obtention des postes n’adiminué que très légèrement aucours des dernières années.«†L’évolution vers l’égalité sur lemarché du travail suppose un chan-gement de culture†: une modifica-tion du modèle traditionnel, né àune époque où vie familiale et vieprofessionnelle étaient séparées etoù le travailleur était toujours unhomme, libre de toute responsabi-lité à l’égard de la prise en chargedes enfants au sein de la famille†»(Haas et Hwang, 1999†: 55). Mêmeen l’absence de preuves empiriques,il est clair que, dans tous les paysnordiques, la participation deshommes à la prise en charge desenfants est considérée comme uneétape essentielle vers l’égalité deshommes et des femmes. Dans lestravaux sur le lien entre participationdes femmes au marché du travail etdispositifs de prise en charge desenfants à domicile, on défend l’idéequ’un congé parental rémunéré a deseffets positifs sur le lien avec le mar-ché du travail (O’Connell, 1990;Joesch, 1995; Waldfogel, 1996;Ruhm et Teague, 1995, cités par

Gornick et al., 1997). Même si larelation causale n’a pas été démon-trée, on peut supposer que la sécu-rité d’emploi est l’un des facteursfavorables au retour de la mère àson ancien emploi après la nais-sance de l’enfant. Dans les cas oùles prestations proposées ne sontpas proportionnelles à l’anciensalaire, les avantages de la partici-pation antérieure au marché du tra-vail sont évidents.

Les effets de la durée des congésrémunérés ont fait l’objet de débats.Certains spécialistes sont d’avis«†que les politiques autorisant descongés de longue durée peuventlimiter des opportunités de carrièrequi exigent une certaine continuitédans le travail†» (Gornick et al.,1997†: 48). Selon un groupe d’ex-perts européens, «†les congés delongue durée et les interruptions decarrière peuvent être des piègespour les femmes. Si les congés sontlongs et ne sont pas rémunérés, ilsdoublent le poids de la prise encharge par les femmes salariées, dufait de la perte de rémunérationqu’elles subissent pendant le congéet des moins bonnes conditions quisont les leurs lorsqu’elles revien-nent au travail. Des congés delongue durée bien rémunérés pal-lient le premier inconvénient, maisnon le second†» (Bettio et al., 1998†:24). Une étude récente sur la parti-cipation des mères au travail enNorvège, en Suède et en Finlanderenforce ces constatations†: «†lesfemmes qui ont droit à un congérémunéré se remettent à travaillerplus rapidement que les femmesqui n’ont pas eu ce droit. Cepen-dant, la différence entre ces deuxgroupes tend à diminuer lorsque ladurée s’allonge, et peut même dis-

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paraître totalement si elle est trèslongue†» (Rønsen, 1999†: 191).

Les dispositifs d’allocations deprise en charge à domicile crééspar la Norvège, la Finlande et leDanemark sont principalement utili-sés par les femmes. Leira y voit unmécanisme de renforcement des iné-galités†: «†le dispositif se traduit parle versement d’une allocation auxparents qui vise à leur faciliter lechoix d’un type de prise en chargepour leurs enfants et à permettre àl’un d’eux de rester à la maison. […]Le dispositif “cash-for-care” [pres-tations contre prise en charge] nemodifie guère, voire pas du tout,l’organisation familiale tradition-nelle. Au contraire, il la renforce†»(1999†: 272)†

22. Selon Leira, les poli-tiques entretiennent le modèle dupère pourvoyeur parce que leursmodalités d’application ne laissentpas vraiment le choix au parent quiperçoit le revenu le plus élevé. Lafamille a besoin de ce revenu pourvivre, et il paraît peu probable que laréforme permette aux pères de pas-ser plus de temps avec leurs enfants.

Leira (1999†: 271) distingue troistypes de politiques dans les paysnordiques†:

1. Les dispositifs qui créentdes prestations financières de type«†cash-for-care†», renforçant lemodèle familial traditionnel et lesinégalités entre les sexes.

2. Les dispositifs publics quicréent des services de prise encharge, facilitant le travail desmères et l’augmentation du nombrede familles à double revenu.

3. Les dispositifs qui instaurentdes droits au congé maternité, aucongé de paternité et aux congésparentaux, propices aux familles àdouble revenu et au partage de laprise en charge.

Deux types existent vraiment enIslande. La création de dispositifsde prise en charge publics et la loirelative au congé parental appuientles familles à double revenu etfavorisent le partage de la prise encharge. Il est cependant difficile desavoir si le dispositif danois relatifau congé parental est comparableaux dispositifs norvégiens et fin-landais d’indemnisation pour laprise en charge de l’enfant, ous’apparente plus au dispositif trèssouple qui entoure le congé paren-tal en Suède. En Norvège et enFinlande, les politiques de la petiteenfance évoluent, de toute évi-dence, en fonction de ces troisorientations. En revanche, les poli-tiques développées par la Suèdesont semblables à celles del’Islande. Il est cependant trop tôtpour dire que l’on peut comparerces deux pays. Les différencesentre eux sont importantes, euégard non seulement aux pro-grammes analysés, mais égalementà d’autres dispositifs, concernantpar exemple le droit des parents de

rester à domicile et de s’occuperd’un enfant malade. Les pays nor-diques ont inscrit des droits spéci-fiques pour les pères dans desdispositifs de congé paternité-maternité différents, ce qui com-plique encore l’analyse. L’Islandeassure des droits égaux aux deuxparents (trois mois pour chacun) etla Suède de même (deux mois),mais les droits des pères et desmères diffèrent au Danemark, enFinlande, en Norvège. Il est encoretrop tôt pour parler de changementdes politiques ou d’un modèle nor-dique ou scandinave des politiquesde la petite enfance. La diversité ausein du modèle nordique est consi-dérable, comme le montrent denombreuses recherches.

Si l’on considère le cas del’Islande, il est clair que les poli-tiques en faveur de la petite enfanceont évolué conformément aumodèle scandinave et donc suivantla même idéologie qu’en Suède. Lesdeux pays ont mis l’accent sur uneoffre élevée de garde de jour et uncongé parental égalitaire et n’ontpas opté pour une allocation de priseen charge à domicile. C’est extrê-mement intéressant si on tientcompte de leurs cadres politiquesdifférents. La tradition d’un Partisocial-démocrate fort subsiste enSuède, tandis qu’en Islande le Partide l’indépendance (droite) a été leparti prédominant pendant lapériode examinée. Or, rappelleLeira, «†les sociaux-démocrates etd’autres partis de gauche soutien-nent en général plus ardemment lesdroits des femmes à une indépen-dance économique et à une prise encharge des enfants de grande qualitéet subventionnée par l’État, où ilsvoient un objectif valable en soi et

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un moyen d’offrir des chanceségales aux enfants. En Finlande, enNorvège et en Suède, les partis ducentre et de la droite ont préconisédes prestations financières verséesdirectement aux familles avecenfants, pour donner aux parents lechoix du mode de prise en chargedes enfants†» (1999†: 271-272). Lespolitiques de la petite enfance de ladroite islandaise et du parti ducentre ne s’intègrent donc pas dansle modèle des politiques de droite enfaveur de la famille.

Même si certains indicateursmontrent que l’Islande accorde plusde services et de prestations auxfamilles avec enfants, dans le sensdes politiques sociales-démocrates,ses dépenses publiques en faveur deces familles ne représentent toujoursque la moitié de celles des autrespays nordiques. Son système d’aidesociale paraît plus proche du modèlelibéral ou conservateur que lemodèle nordique (Olafsson, 1999).Certes, les taux de fécondité y sonttrès élevés, et la participation desmères au marché du travail relative-ment forte. Mais on ne peut pourautant ranger l’Islande dans lemodèle nordique d’aide sociale. «†Ladémocratie sociale n’est pas la seulevoie que peuvent emprunter lesfemmes pour entrer dans la sphèrepublique de l’emploi. Il existe uneautre voie au sein des États libéraux,mais elle n’est pas associée auxmêmes conséquences en termes dedifférences entre les sexes et de rela-tions entre les classes†» (Walby,1999†: 73). Il demeure que l’évolu-tion récente de l’offre de services àla petite enfance et la nouvelle poli-tique du congé parental sont certai-nement plus conformes au modèlenordique et à l’idéologie sociale-

démocrate qu’au modèle libéral-conservateur. L’Islande se trouveraitdonc à un croisement. Si elle accroîtson soutien aux parents et si sa poli-tique de la paternité obtient du suc-cès, on pourra considérer qu’elle aemprunté la «†voie†» du modèlesocial-démocrate.

Gudny Bjork EydalDépartement de travail socialFaculté des sciences sociales

Université d’Islande

Notes

i Blanche Le Bihan et Claude Martin ontassuré la traduction de ce texte, qui a faitl’objet d’une présentation dans un sémi-naire de l’Institut national d’étudesdémographiques en juin dernier.

2 Le terme politiques de l’enfance recouvreles dispositifs publics de prise en chargede l’enfant et les services et les presta-tions pour les carers (Fridberg et al.,1998).

3 L’idée de droits indépendants des pèresà certains congés liés à la naissance d’unenfant renvoie à des choses différentesdans les pays nordiques. Par exemple, enNorvège, on parle de «†daddy quota†»(Leira, 1999; voir aussi Rostegaard,2002). En droit islandais, le concept estle suivant : «†fe∂raorlof†» (fe∂ur = pèreset orlof = congé; on traduit par congé depaternité); «†mæ∂raorlof†» est le congéde maternité et «†foreldraorlof†» le congéparental.

4 Les renseignements historiques mention-nés dans cet article sont tirés en partie demon rapport de recherche sur l’évolutionde la politique familiale en Islande,publié par le Département de sociologiede l’Université de Gothenburg, sous ladirection du professeur Ulla Björnberg.L’analyse des changements les plusrécents dans les politiques de la petiteenfance a été réalisée dans le cadre duprojet de recherche Combining Work andCare. The Case of Parents of Childrenunder 3 [Concilier vie professionnelle etvie familiale. Le cas des parents d’en-

fants de moins de 3 ans], soutenu par leConseil de recherche islandais et l’Uni-versité d’Islande.

5 La notion de crèche publique nécessitequelques précisions dans la mesure oùtous les pays nordiques peuvent prétendreavoir un système de crèches combinant duprivé et du public. J’ai choisi de suivre ladéfinition donnée par Leira (1992†: 50),qui qualifie de crèches publiques lesformes de prise en charge quotidienne quireçoivent une accréditation des pouvoirspublics et des subventions publiquesmême si la propriété de la structure et lestatut des opérateurs restent privés.

6 De nombreux débats ont eu lieu sur larelation de causalité entre l’existence deservices à la petite enfance et la partici-pation des femmes au marché du travail,mais «†somme toute, la littérature s’ac-corde à considérer que meilleures sontles possibilités de prise en charge del’enfant, plus l’emploi des mères aug-mente théoriquement†» (Gornick et al.,1997†: 48). Les services de crèches ontprouvé qu’ils étaient le préalable le plusnécessaire pour permettre la participa-tion des mères au marché du travail(Bjornberg, 1992; Bradshaw, 1996).

7 Voir par exemple Bjornberg et Kollind,1996; Leira, 1999.

8 Depuis 2001, il est possible de payercette prestation à une autre personnedans certaines conditions. http://www.forsakringskassan.se/foralder/foraldra-penning/annanpappa.jsp (25.04.2003).

9 Les prestations en nature consistent endes lots de vêtements et d’autres biensmatériels utiles durant la premièreannée. Il est possible de faire le choix decette formule en Finlande.

10 En 1980, des pères ont obtenu d’utiliser24 jours du congé de maternité avecl’accord de la mère (Salmi et Lammi-Taskula, 1999).

11 Toutefois, le droit du père est dérivé dudroit de la mère à un congé de maternité.De manière à ce que chaque parent soitbénéficiaire du niveau maximum de com-pensation financière, la mère doit avoiroccupé au moins un emploi à mi-temps,six mois avant la naissance (Leira, 1999).Cette formule a été réformée en 1999-

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2000 et les pères ont obtenu un droit spé-cifique à quatre semaines de congé depaternité rémunéré («†quota des pères†»)(Rostgaard, 2002).

12 Les syndicats de travailleurs islandaisont toujours été fortement genrés aucours du 20e siècle (Rafnsdottir, 1995).

13 On trouvera plus d’éléments compara-tifs dans Eydal, 2000.

14 Pour plus de détails sur le développe-ment des services aux familles de jeunesenfants dans les pays nordiques, voirSipila, 1997.

15 La liberté de manœuvre des autoritéslocales a engendré des différences desystèmes de garde selon les communes;aussi, les caractéristiques nationales necorrespondent qu’à une moyenne de cesdifférents dispositifs locaux (voir parexemple Hanssen, 1997; Kroger, 1997;Duncan et Edwards, 1997).

16 Depuis janvier 2003, tous les enfants de4 et 5 ans ont droit à une place à l’écolematernelle, ce qui correspond à uneprise en charge de 525 heures par mois(Skolverket, 2003).

17 Faute de données issues de la recherche,cette analyse s’appuie sur des sources etdébats officiels. Son objectif est d’éclai-rer l’évolution et l’institutionnalisationdes mesures prises en matière de congésparentaux.

18 Pour la version anglaise, voir http://brunnur.stjr.is/interpro/fel/fel.nsf/Files/act-maternity-paternity/†$file/act-mater-nity-paternity.PDF.

19 Si l’un des parents meurt avant les 18 moisde l’enfant, le droit de congé de maternitéou de paternité qui n’a pas été utilisé peutêtre repris par le parent survivant.

20 Des recherches antérieures vont dans lemême sens; voir Juliusdottir, 1993.

21 Pour une analyse plus approfondie ducontexte politique et historique de lapériode d’après 1944, voir Eydal, 2000.

22 Salmi et Lammi-Taskula (1999), cher-cheurs finlandais, ont critiqué les conclu-sions de Leira concernant les effets del’allocation de prise en charge à domicilesur la participation des femmes au marchédu travail. Il est selon eux impossible demesurer ces effets.

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Hors thème

Politiques de la petite enfance dans les paysnordiques

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