Plantes Dangereuses
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7/26/2019 Plantes Dangereuses
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ARTICLE ORIGINAL /ORIGINAL ARTICLE DOSSIER
Plantes toxiques : les dangers du retour la nature
Toxic plants: the dangers of going back to nature
F. Flesch
Reu le 2 mars 2012 ; accept le 17 mai 2012
SRLF et Springer-Verlag France 2012
RsumEn France, les vgtaux sont en cause dans environ
5 % des cas donnant lieu un appel un centre antipoison et
de toxicovigilance (CAPTV). Les intoxications par plantes
concernent principalement lenfant et sont gnralement
bnignes. Chez ladulte, elles sont rares et surviennent soit
dans un contexte suicidaire, soit par confusion avec une
plante comestible, soit par utilisation de la plante dans unbut addictif ou thrapeutique. Ces intoxications peuvent tre
graves et mettre en jeu le pronostic vital. Cet article prsente
des plantes pour lesquelles des intoxications graves, voire
mortelles, ont t rapportes et dont la toxicit est principa-
lement cardiaque et/ou neurologique. Aprs une description
sommaire de chacune des plantes suivantes : aconit, bella-
done, colchique, datura, digitale, if, laurier rose, redoul et
vratre, les aspects cliniques, thrapeutiques et analytiques
des intoxications correspondantes seront traits.
Mots cls Plantes toxiques Intoxications Alcalodes
Antidote
Abstract In France, approximately 5% of calls to their
National Poisons Information Service (CAPTV) are due to
plants. Poisoning from plants affects mainly children, and it
is generally not life-threatening. Cases in adults are far rarer,
and often result from a suicide attempt, a mix-up with an
edible plant, or are due to a plant being used for addictive
or therapeutic purposes. This type of poisoning can be
serious and may even be fatal. This article describes plants
for which life-threatening poisonings, or even fatalities have
been reported, and whose toxicity is mainly cardiac and/orneurologically related. After a short description of each of
the following plants: aconite, belladonna, colchicum, datura,
digitalis, yew, oleander, myrtle and veratrum album, the cli-
nical, therapeutic, and analytical aspects of each of the cor-
responding poisons are discussed.
Keywords Toxic plants Poisons Alkaloids Antidote
Introduction
En France, les vgtaux sont en cause dans environ 5 % des
cas donnant lieu un appel un centre antipoison et de toxi-
covigilance (CAPTV) [1,2]. Les intoxications par plantes
concernent principalement lenfant et sont gnralement
bnignes. Chez ladulte, elles sont rares et surviennent soit
dans un contexte suicidaire, soit par confusion avec une
plante comestible, soit par utilisation de la plante dans un
but addictif ou thrapeutique. Ces intoxications peuvent tre
graves et mettre en jeu le pronostic vital.
Dans cet article, nous prsentons une dizaine de plantes
toxiques, classes par ordre alphabtique du nom vernacu-
laire, pour lesquelles des intoxications svres, voire mortel-
les, ont t rapportes. Il sagit principalement de plantes
toxicit cardiaque et/ou neurologique. Aprs une description
sommaire de la plante [3], nous abordons les aspects clini-
ques, thrapeutiques et analytiques.
Aconit (Aconitum napellusL., Fig. 1)
Laconit napel, encore appel casque de Jupiter, tue-loup, char
de Vnus ou casque bleu (wolfsbane ou monkshood, en
anglais) est une plante herbace vivace appartenant la
famille des Renonculaces. Cest une plante de 50 180 cm
de hauteur qui pousse essentiellement dans les zones monta-
gneuses de lOuest de lEurope. Elle fleurit de juin aot ; les
fleurs sont bleu violac, groupes en grappes. La racine est
napiforme, pointue, souvent surmonte par un reste de tige.
Tous les organes de la plante, mais surtout les racines et
les graines, renferment des alcalodes diterpniques dont le
principal est laconitine. Laconitine agit au niveau des
canaux sodiques voltage-dpendants du myocarde, des nerfs
et des muscles. Elle provoque une activation persistante
de ces canaux les rendant ainsi rfractaires la repolarisa-
tion, avec, pour consquence, une excitation prmature.
F. Flesch (*)
Centre antipoison et de toxicovigilance, nouvel hpital civil,
F-67091 Strasbourg, France
e-mail : [email protected]
Ranimation
DOI 10.1007/s13546-012-0494-5
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Laconitine agit en excitant puis en paralysant les centres
nerveux du bulbe rachidien ainsi que les terminaisons ner-
veuses priphriques. Son action toxique se traduit par des
troubles neurologiques et cardiaques [4].
Les intoxications sont rares en Europe. Elles peuvent tre
suicidaires [5], conscutives une consommation de prpa-
rations phytothrapiques ou une confusion avec des racines
alimentaires (navet, raifort, cleri) et, exceptionnellement,
criminelles [6]. Les intoxications sont frquentes en Asie
du fait de lutilisation de laconitine en mdecine chinoise
pour ses proprits antirhumatismales et antinvralgiques
[7]. Une intoxication grave peut survenir aprs ingestion de
1 mg daconitine ou de 2 4 g de racines fraches.
Les symptmes apparaissent rapidement aprs lingestion
(entre dix minutes et deux heures) et se caractrisent par des
paresthsies buccales, labiales et pharynges puis des extr-
mits, des troubles digestifs (hypersialorrhe, nauses,
vomissements, parfois diarrhes), des vertiges et une asth-
nie. Dans les cas graves surviennent des troubles cardiaques
(tachycardie ventriculaire, fibrillation ventriculaire, dysryth-
mies) ainsi quune paralysie respiratoire. Lassociation de
paresthsies avec une asthnie musculaire et des troubles
cardiaques est caractristique dune intoxication par aconit.
Lingestion daconit ncessite une hospitalisation dans un
service de ranimation avec monitorage lectrocardiogra-
phique et tensionnel. Une vacuation digestive par vomisse-
ments provoqus ou lavage gastrique peut tre prconise en
cas de dlai court (infrieur une heure). Lindication de
cette vacuation digestive sera fonction de la dose suppose
ingre, des symptmes et du dlai. Le traitement est princi-
palement symptomatique. Il nexiste pas de consensus
concernant le meilleur traitement des arythmies ventriculai-
res : amiodarone, flcanide, mexiltine et sulfate de magn-sium [8,9] ont t utiliss avec des succs variables selon les
cas. La lidocane a t gnralement inefficace. En expri-
mentation animale, chez le rat, ce sont le flcanide et les
btabloquants qui se sont rvls tre les plus efficaces
[10]. En cas darythmie ventriculaire et de choc rfractaire,
il convient de mettre rapidement en place une assistance
circulatoire.
Laconitine peut tre dose dans le sang ou les urines. La
mthode analytique qui semble actuellement la plus perfor-
mante pour le dosage de laconitine est la chromatographie
liquide couple la spectromtrie de masse en tandem (LC-
MS/MS). Une concentration sanguine 3,6 g/l peut tre
considre comme ltale en labsence de traitement [9].
Dans un cas dintoxication svre avec une concentration
plasmatique 1,75 g/l la septime heure, la demi-vie cal-
cule de laconitine a t de trois heures [11].
Belladone (Atropa belladonnaL., Fig. 2)
La belladone encore appele belle dame, bouton noir ou
mandragore baccifre (deadly nightshade, en anglais) est
une plante herbace vivace appartenant la famille des Sola-naces. Prsente en Europe, elle pousse dans les clairires,
de prfrence en terrain calcaire. Elle fructifie en aot/sep-
tembre et produit des baies globuleuses, de la taille dune
cerise, enchsses au centre dun calice toil.
Fig. 1 Aconit
Fig. 2 Belladone
2 Ranimation
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Les intoxications peuvent tre conscutives une inges-
tion accidentelle chez les enfants [12,13] ou une confusion
avec des baies comestibles chez les adultes [14]. Elles sur-
viennent plus rarement dans un contexte suicidaire ou
addictif.
Toutes les parties de la plante renferment des alcalodes
tropaniques dont latropine, lhyoscyamine (isomre lvo-
gyre de latropine) et la scopolamine. Ces trois alcalodes
ont une action parasympatholytique ; ils inhibent de faon
comptitive et rversible la fixation de lactylcholine
au niveau des rcepteurs muscariniques priphriques et
centraux, avec pour consquence des effets sympathomim-
tiques (ou anticholinergiques, ou atropiniques).
Les symptmes apparaissent 30 minutes 2 heures aprs
lingestion et comportent, selon la quantit ingre, un ou
plusieurs des signes cliniques suivants : vomissements,
scheresse buccale, mydriase, tachycardie, hyperthermie,
confusion mentale, dlire, convulsions, coma et dpression
respiratoire.
Le traitement est principalement symptomatique. La phy-
sostigmine (ou srine), inhibiteur rversible de lactylcho-
linestrase, augmente la concentration dactylcholine dans
la fente synaptique et permet la stimulation des rcepteurs
muscariniques et nicotiniques. Grce sa structure amine
tertiaire, la physostigmine passe la barrire hmatoencpha-
lique et agit la fois sur les symptmes anticholinergiques
centraux et priphriques. Elle est disponible en France sous
le nom dAnticholium et est soumise au statut dautorisa-
tion temporaire dutilisation nominative (ATU, 2007). Ce
mdicament, difficile manier en raison de ses effets secon-
daires, peut tre utilis en cas dintoxication svre rsistanteaux mesures symptomatiques. Il est administrer raison
de 1 2 mg en i.v. lente chez ladulte aprs avoir vrifi
labsence de contre-indications lies son utilisation. La
physostigmine agit entre la 5e et la 20e minute aprs linjec-
tion, et son effet persiste de 45 60 minutes [1517].
Colchique (Colchicum autumnale L., Fig. 3)
Le colchique encore appel safran des prs (meadow saffron
ouautumn crocus, en anglais) est une plante herbace vivace
fleurissant daot novembre. Les fruits et les feuilles appa-
raissent au printemps de lanne suivante. Le fruit est une
grosse capsule verte trois loges renfermant chacune 60
80 graines. Le principal compos du colchique est la colchi-
cine qui inhibe la formation des microtubules en se fixant sur
la tubuline avec, pour consquence, un blocage de la mitose
au stade de la mtaphase.
Les intoxications surviennent surtout au printemps, par
confusion des feuilles avec celles de lail des ours [18,19]
ou du poireau sauvage ; plus rarement elles surviennent chez
lenfant par consommation des graines ou chez ladulte dans
un cadre suicidaire [20].
Les intoxications par colchique sont graves et mettent en
jeu le pronostic vital. Les premiers signes sont digestifs et
surviennent aprs un dlai de quelques heures (vomisse-
ments puis diarrhes profuses rapidement responsables
dune dshydratation). Dans les cas svres, on note lappa-
rition, dans les 24 premires heures, dune insuffisance
circulatoire aigu. Vers le troisime jour apparat une aplasie
mdullaire qui va durer deux six jours et dont le risque est
infectieux et hmorragique. Vers le dixime jour survient
une alopcie. Le dosage sanguin de la colchicine permet de
confirmer le diagnostic.
Concernant la prise en charge thrapeutique : lvacuation
digestive est rarement ralise en raison du dlai habituelle-
ment long entre lingestion et ladmission en milieu hospita-
lier. Ladministration de doses rptes de charbon activ
pourrait tre efficace mais nest gnralement pas ralisable
en raison des vomissements importants. Le volume de dis-
tribution important de la colchicine rend illusoires les mtho-
des dpuration extrarnale. Les anticorps anticolchicine ne
Fig. 3 Colchique
Ranimation 3
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sont, ce jour, pas disponibles. Le traitement est donc prin-
cipalement symptomatique, guid par une surveillance
quotidienne de lionogramme, de lhmogramme et de la
prothrombine.
Datura (Datura stramoniumL., Fig. 4)
Le genre Datura comprend une vingtaine despces dont la
plus rpandue estDatura stramoniumL., encore appel stra-
moine, herbe du diable, pomme pineuse, herbe aux taupes
(jimson weed, en anglais). Cest une plante herbace, appar-
tenant la famille des Solanaces, abondante en Europe o
elle affectionne les terrains incultes et bords des chemins ;
elle est largement cultive pour son aspect dcoratif. Elle
fleurit de juillet octobre (grandes fleurs blanches en forme
de trompette). Son fruit est une grosse capsule ovode pi-
neuse qui renferme de nombreuses graines.
Toutes les parties de la plante renferment des alcalodes
dont lhyoscyamine (alcalode principal), la scopolamine et
latropine ; ces alcalodes sont des antagonistes comptitifs
priphriques et centraux de lactylcholine. Le datura
induit, comme la belladone, un effet parasympatholytique
mais dont lintensit est plus forte.
Le mode dintoxication le plus frquent concerne la
consommation de cette plante dans un but addictif sous
forme de dcoction, dingestion de graines ou dutilisation
de cigarettes fabriques partir des feuilles sches [21].
Lintoxication se traduit par un syndrome anticholiner-
gique symptomatologie essentiellement neuropsychique
avec excitation psychomotrice, propos incohrents, hallucina-tions visuelles, dsorientation, agressivit. Parmi les signes
anticholinergiques priphriques, on note la prsence dune
mydriase bilatrale alors que les autres signes anticholiner-
giques sont plus inconstants : scheresse buccale, tachycardie
sinusale, hyperthermie, rtention urinaire et vomissements.
Dans les cas graves, on peut observer coma et convulsions.
Lvolution est gnralement favorable en 24 48 heures. Le
diagnostic peut tre confirm par le dosage sanguin et urinaire
des alcalodes par chromatographie en phase liquide couple
une double spectromtrie de masse (LC-MS/MS) [22].
Le traitement est symptomatique. La physostigmine, dis-
ponible en France sous le nom dAnticholium et soumise une ATU nominative, peut tre utilise dans les intoxications
svres (cf. Belladone).
Digitale (Fig. 5)
Le genre Digitalis comprend une vingtaine despces. Il sagit
dune plante herbace appartenant la famille des Scrofula-
riaces et fleurissant de mai septembre sous forme dune
longue grappe unilatrale. Il existe en France trois espces
sauvages : la digitale pourpre (Digitalis purpureaL.) oupur-
ple foxgloveen anglais, la digitale jaune (Digitalis luteaL.)
et la digitale grandes fleurs (Digitalis grandifloraL.).
La plante renferme de nombreux composs dont des ht-
rosides cardiotoniques variables qualitativement et quantita-
tivement (digitoxine, gitoxine, lanatoside C, digitoxig-
nine). Ces cardnolides agissent en inhibant la pompe
Na+
/K+
ATPase membranaire. Ils ont un effet inotrope posi-
tif, chronotrope et dromotrope ngatifs. Ils ont par ailleurs un
effet vasoconstricteur, diurtique et un effet central.
Les intoxications peuvent tre conscutives une confu-
sion avec des feuilles de bourrache utilises pour la prpa-
ration de salades ou de tisanes, ou une ingestion volontaire
dans un but suicidaire. Les intoxications accidentelles chez
lenfant sont exceptionnelles.
Fig. 4 Datura Fig. 5 Digitale
4 Ranimation
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Les symptmes associent : troubles digestifs (nauses,
vomissements), troubles neurosensoriels (obnubilation, confu-
sion, dyschromatopsie), troubles cardiaques avec troubles
de la conduction et/ou de lautomatisme (bradycardie sinu-
sale, bloc auriculoventriculaire de degr 1, 2 ou 3, tachy-
cardie sinusale ou jonctionnelle, tachycardie ou fibrillation
ventriculaire). Ces troubles peuvent tre associs une
hyperkalimie, facteur de gravit de cette intoxication. Enraison de ractions croises des cardnolides lors des dosa-
ges par immunoassay, cest le dosage de la digoxine qui est
habituellement utilis pour valuer la gravit de lintoxica-
tion ; cependant, vu la faible corrlation clinicobiologique
[23], il convient de privilgier les signes cliniques pour
lvaluation de la gravit et dterminer la prise en charge
thrapeutique. Un dosage des htrosides spcifiques serait
utile si le laboratoire dispose des techniques adquates [24].
Concernant le traitement, lindication dune vacuation
digestive est discuter en fonction du dlai, de la quantit
ingre et des symptmes. Ladministration rpte de char-
bon activ pourrait tre utile [23]. Le traitement comporte la
correction prudente de lhypokalimie et ladministration
datropine en cas de bradycardie. Un traitement spcifique
par les anticorps antidigitaliques (Digibind) reprsente le
traitement de choix dune intoxication grave.
If (Taxus baccata L., Fig. 6)
Il sagit dun arbre (yew, en anglais) de 4 15 m de hauteur
feuilles persistantes, frquemment plant dans les parcs et
jardins. Le fruit, faussement appel baie , est form
dun arille sacciforme rouge entourant une graine ellipsode.
Hormis larille, toutes les parties de la plante sont toxiques
et renferment un mlange dalcalodes et de pseudoalcalodes
de structure complexe. Les principales substances cardiotoxi-
ques sont les taxines A et surtout les taxines B, substances
diterpniques noyau taxane qui sont des antagonistes des
canaux calciques et sodiques et dont les proprits sont simi-
laires celles des antiarythmiques de la classe 1. Un gramme
de feuilles dif contiendrait approximativement 5 mg de taxi-
nes. Le taxol (paclitaxel), agent cytotoxique antimicrotubu-
line initialement isol partir de lcorce deTaxus brevifolia
Nutt., ny est prsent quen trs faible quantit (0,01 %).
Les intoxications graves sont principalement observes
chez ladulte et peuvent tre conscutives une ingestion
de feuilles et de graines dans un but suicidaire ou uneingestion accidentelle dans un contexte de traitement phyto-
thrapique. Chez lenfant, les intoxications accidentelles
sont gnralement bnignes en raison de lingestion de la
partie charnue non toxique de la baie ou de lingestion
dune faible quantit de baies avec un noyau non mch.
Les signes cliniques apparaissent deux trois heures
aprs lingestion et comprennent des signes digestifs, neuro-
logiques (coma, convulsions) et cardiaques (troubles de la
conduction ventriculaire, arythmie, fibrillation ventricu-
laire). Le dosage des alcalodes dans les liquides biologiques
peut tre ralis dans un laboratoire disposant de la tech-
nique adapte [25,26].
Le traitement des troubles cardiaques reste mal codifi :
lidocane, phnytone, anticorps antidigitaliques, assistance
circulatoire et perfusion de soluts alcalins ont t utiliss
avec des succs variables [27].
Laurier rose (Nerium oleanderL., Fig. 7)
Il sagit dun arbuste (oleander, en anglais) de 2 3 m de
hauteur appartenant la famille des Apocynaces. Les feuil-
les sont persistantes et les fleurs, de couleur rose, rouge ou
blanche, sont prsentes de juin septembre. Toutes les par-
ties de la plante renferment des htrosides, le principal tant
lolandrine, dont la structure est proche de celle des digita-
liques. Les intoxications surviennent le plus souvent chez
ladulte dans un contexte suicidaire [28,29].
Les symptmes de lintoxication sont ceux de lintoxica-
tion digitalique avec : troubles digestifs (nauses, vomisse-
ments), troubles neurosensoriels (agitation, confusion, trou-
bles de la vision des couleurs), troubles cardiaques lis
linhibition de la pompe Na+/K+ ATPase membranaire
(bradycardie, troubles de la conduction et/ou de lautoma-
tisme). Ces troubles peuvent tre associs une hyperkali-
mie, facteur de gravit de cette intoxication [30]. Le dosage de
lolandrine ntant pas ralis en pratique courante, cest le
dosage de la digoxine qui est gnralement utilis pour va-
luer la gravit de lintoxication mme sil nexiste pas de cor-
rlation stricte entre la concentration mesure et la svrit de
lintoxication. Lefficacit du charbon activ est probable,
bien quil nexiste pas de consensus sur son mode dadminis-
tration (dose unique versus doses multiples) [31,32].
Le traitement comporte, outre ladministration datropine
en cas de bradycardie et la correction prudente des anomaliesFig. 6 If
Ranimation 5
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ioniques, ladministration danticorps antidigitaliques dont
lindication repose sur des critres cliniques, lectrocardio-
graphiques et biologiques (kalimie).
Redoul (Coriaria myrtifolia L.)
Cest un arbrisseau commun des rgions mditerranennes
dont les fruits ressemblent grossirement des mres. Toutes
les parties de la plante renferment une lactone sesquiterp-
nique (coriamyrtine) qui prsente une analogie structurale
avec la picrotixine et lanisatine. La cause la plus frquente
dintoxication est lingestion de fruits, surtout chez les enfants.
Les symptmes surviennent le plus souvent entre
30 minutes et 2 heures suivant lingestion et associent : trou-
bles digestifs (douleurs digestives, vomissements), troubles
neurologiques (par ordre de frquence : convulsions, obnu-
bilation, hypertonie et crampes musculaires, lipothymie,
coma, dsorientation, trismus et opisthotonos, cphales,
agitation) et troubles respiratoires (polypne, apne). Le trai-
tement est symptomatique [33,34].
Vratre (Veratrum album L., Fig. 8)
Le vratre blanc (dit dEurope), encore appel ellbore blanc
(white hellebore ou poison lilly, en anglais), appartient la
famille des Liliaces. Cest une plante herbace vivace des
rgions montagneuses de lEurope. Les fleurs forment une
longue grappe blanchtre lextrmit de la tige. Les fruits
se prsentent sous forme dune capsule ovode brune renfer-
mant des graines. La plante contient de nombreux alcalodes
dont les protovratrines A et B [35]. Le mcanisme physio-
pathologique principal de lintoxication est en rapport avec
laugmentation de la permabilit des canaux sodiques [36].
Les intoxications surviennent principalement chez ladulte
par confusion avec la gentiane (Gentiana luteaL.) lors de la
fabrication artisanale de liqueur partir des racines, les deux
espces partageant le mme habitat. Les symptmes apparais-
sent aprs 30 minutes 3 heures et se caractrisent par des
troubles digestifs (nauses, vomissements, douleurs abdomi-
nales), des troubles cardiovasculaires (bradycardie, hypo-
tension, troubles conductifs) et des troubles neurologiques
(troubles visuels, vertiges, paresthsies, confusion) [37,38].
Les symptmes rgressent gnralement en 24 48 heures.
Le traitement est symptomatique. Latropine est efficace sur la
bradycardie.
Fig. 7 Laurier rose
Fig. 8 Redoul
6 Ranimation
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Conclusion
Un certain nombre de vgtaux renferment des alcalodes
cardiotoxiques et neurotoxiques. Leur consommation peut
tre lorigine dintoxications graves dont le diagnostic
risque dtre mconnu en labsence danamnse prcise.
Aussi convient-il, pour tout patient admis dans un contexte
de troubles digestifs et prsentant des troubles cardio-
vasculaires et/ou des signes neurologiques (paresthsies,
confusion, convulsions) dvoquer lhypothse dune
intoxication vgtale. Un prlvement sanguin fait
ladmission permettra, le cas chant, de raliser un dosage
des alcalodes spcifiques afin de confirmer le diagnostic
et de progresser dans ltude dune corrlation clinicobio-
logique pour des cas dintoxication peu frquents, graves
et occasionns par des agents prsents dans notre environ-
nement proche.
Conflit dintrt : les auteurs dclarent ne pas avoir de
conflit dintrt.
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