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peter stammagnès
Dans la salle de lecture surchauffée de la biblio-thèque municipale ils échangèrent leurs premiers regards. Puis, autour d’un café, leurs premiers mots. Il est suisse et fait des recherches sur les wagons de luxe américains. Elle est américaine, étudiante en physique, et rédige sa thèse de doctorat. Ils dînent ensemble, partent en excursion dans les forêts envi-ronnantes, visitent les musées et tombent en arrêt devant une toile de Seurat.Un soir Agnès lui demande d’écrire sur elle, un portrait. Soir après soir il confie leur histoire à son ordinateur. Au début c’est un jeu, puis, peu à peu, leur vie se conforme aux aléas du récit qui finale-ment prend le pas sur la réalité.Agnès est le premier roman de l’écrivain et journaliste Peter Stamm, né en Suisse en 1963. Ce livre a reçu un accueil enthousiaste en Allemagne, les critiques n’hésitant pas à saluer en Peter Stamm un des meil-leurs écrivains de langue allemande de sa génération.
« Peter Stamm, Suisse allemand de 38 ans, a écrit un premier roman cérébral et singulier. Une réflexion angoissante sur les mystères de l’amour. Un voile soulevé dans un bruit de déchirure. » (Marie-Laure Delorme, Le Journal du dimanche)
« Sous les dehors d’une sorte de froideur neigeuse, c’est un petit livre ardent et douloureux que ce pre-mier roman de l’auteur alémanique Peter Stamm – un bijou qu’on pourrait dire une résurgence du romantisme allemand en dépit de sa matière contem-poraine. » (Jean-Louis Kuffer, 24 Heures)
Traduit de l’allemand par Nicole Roethel
Christian Bourgois éditeur ◊
Peter StammDu même auteur
chez Christian Bourgois éditeur
agnèsd’étranges jardinspaysages aléatoires
un jour comme celui-civerglas
Du même auteur dans la collection « titres »
verglas
Traduit de l’allemand par Nicole Roethel
Christian Bourgois éditeur ◊
Peter StammDu même auteur
chez Christian Bourgois éditeur
agnèsd’étranges jardinspaysages aléatoires
un jour comme celui-civerglas
Du même auteur dans la collection « titres »
verglas
agnès
Titre original :Agnès
© Peter Stamm, 1999© Christian Bourgois éditeur, 1998, pour la traduction française
ISBN 978 2 267 01986 5
william BurroughS DaviD CronenBerg
le scénario du « festin nu »CoPi
eva peron une visite inopportune
e. e. CummingS l’énorme chambrée
georgeS DiDi-huBerman mémorandum de la peste
le fléau d’imaginer
annie DillarD en vivant, en écrivant
frieDriCh Dürrenmatt justice
william gaDDiS gothique charpentier
kaye giBBonS ellen foster
une femme vertueuseliDiya ginzBurg
journal du siège de leningradPeter hanDke
j’habite une tour d’ivoireöDön von horváth
jeunesse sans dieuDeniS johnSon
des anges
Collection « titres »
giorgio agamBen idée de la prose
leS aSSiSeS internationaleS Du roman « roman et réalité »
lexique nomadeSvetlana alexievitCh
les cercueils de zincPierre alferi
chercher une phraseBernarDo atxaga
obabakoak – les gens d’obabajane auSten
juvenilia lady susan
riCk BaSS platte river
roBerto Bolaño appels téléphoniques
des putains meurtrières étoile distante
le gaucho insupportable la littérature nazie en amérique
nocturne du chiliwilliam BurroughS
lettres de tanger à allen ginsberg les lettres du yagé
mon éducation les terres occidentales
ultimes paroles
william BurroughS DaviD CronenBerg
le scénario du « festin nu »CoPi
eva peron une visite inopportune
e. e. CummingS l’énorme chambrée
georgeS DiDi-huBerman mémorandum de la peste
le fléau d’imaginer
annie DillarD en vivant, en écrivant
frieDriCh Dürrenmatt justice
william gaDDiS gothique charpentier
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une femme vertueuseliDiya ginzBurg
journal du siège de leningradPeter hanDke
j’habite une tour d’ivoireöDön von horváth
jeunesse sans dieuDeniS johnSon
des anges
Collection « titres »
giorgio agamBen idée de la prose
leS aSSiSeS internationaleS Du roman « roman et réalité »
lexique nomadeSvetlana alexievitCh
les cercueils de zincPierre alferi
chercher une phraseBernarDo atxaga
obabakoak – les gens d’obabajane auSten
juvenilia lady susan
riCk BaSS platte river
roBerto Bolaño appels téléphoniques
des putains meurtrières étoile distante
le gaucho insupportable la littérature nazie en amérique
nocturne du chiliwilliam BurroughS
lettres de tanger à allen ginsberg les lettres du yagé
mon éducation les terres occidentales
ultimes paroles
thomaS mcguane à la cadence de l’herbe
la source chaudetoni morriSon
invitée au louvre. étranger chez soi playing in the dark
jean-luC nanCy / jean-ChriStoPhe Bailly la comparutionalan PaulS
wasabijean-miChel Palmier
rêveries d’un montreur d’ombresgeorgeS PereC
tentative d’épuisement d’un lieu parisienfernanDo PeSSoa le banquier anarchiste le chemin du serpent
faust un singulier regardBarBara Pym
la douce colombe est morte un brin de verdure
une demoiselle comme il fautrolanD reCht
la lettre de humboldtDominiQue De roux
maison jauneolivier revault D’allonneS
musiques, variations sur la pensée juive
ernSt jünger le boqueteau 125
la guerre comme expérience intérieure visite à godenholm / la chasse au sanglier
gertruD kolmar lettres
la mère juive susanna
hanif kureiShi le mot et la bombe
PhiliPPe laCoue-laBarthe musica fictalinDa lÊ
les évangiles du crimeleCtureS D’oPéra
collectifantónio loBo antuneS
le cul de judas (adaptation théâtrale)
jean-françoiS lyotarD jean-louP théBauD
au justeoSSiP manDelStam
le bruit du temps la quatrième prosethomaS mann
le journal du « docteur faustus »BriCe matthieuSSent
jim harrison de A à X
thomaS mcguane à la cadence de l’herbe
la source chaudetoni morriSon
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jean-luC nanCy / jean-ChriStoPhe Bailly la comparutionalan PaulS
wasabijean-miChel Palmier
rêveries d’un montreur d’ombresgeorgeS PereC
tentative d’épuisement d’un lieu parisienfernanDo PeSSoa le banquier anarchiste le chemin du serpent
faust un singulier regardBarBara Pym
la douce colombe est morte un brin de verdure
une demoiselle comme il fautrolanD reCht
la lettre de humboldtDominiQue De roux
maison jauneolivier revault D’allonneS
musiques, variations sur la pensée juive
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werner SPieS l’œil, le mot
Peter Stamm agnès verglas
gertruDe Stein picasso
martin Suter business class
javier tomeo monstre aimé
enriQue vila-mataS abrégé d’histoire de la littérature portative
enfants sans enfants imposture
le voyageur le plus lent suicides exemplaires
voltaire mahomet le prophète
william CarloS williamS au grain d’amériquevirginia woolf
la scène londonienne quatre lettres cachées
werner SPieS l’œil, le mot
Peter Stamm agnès verglas
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voltaire mahomet le prophète
william CarloS williamS au grain d’amériquevirginia woolf
la scène londonienne quatre lettres cachées
1
Agnès est morte. Une histoire l’a tuée. Ilne me reste d’elle que cette histoire. Ellecommence il y a neuf mois, le jour où nousnous sommes rencontrés pour la premièrefois dans la bibliothèque municipale deChicago. Il faisait froid quand nous avons faitconnaissance. Froid comme presque toujoursdans cette ville. Mais aujourd’hui il faitencore plus froid et il neige. C’est du LacMichigan que vient la neige, et aussi le vent,qui souffle par rafales et que l’on entendencore malgré le double vitrage de la grandefenêtre. Il neige, mais la neige ne tient pas,elle est entraînée plus loin et ne reste accro-chée que là où le vent n’a pas accès. J’ai éteintla lampe et je regarde par la fenêtre les som-mets éclairés des gratte-ciel, le drapeau améri-cain que le vent ballotte çà et là dans lalumière d’un projecteur, et, loin en bas, les
ronds-points vides où, même maintenant, enpleine nuit, les feux passent du vert au rougeet du rouge au vert, comme si rien ne s’étaitpassé, comme si rien ne se passait.
Ici, j’ai habité avec Agnès un bref moment.C’était ici chez nous, mais maintenantqu’Agnès est partie, l’appartement m’est deve-nu étranger, insupportable. Juste un centi-mètre de verre me sépare d’Agnès, juste unpas. Mais les fenêtres ne peuvent pas s’ouvrir.
Pour la énième fois, je regarde la vidéoqu’elle a tournée lors de notre excursion duColumbus Day. De son écriture méticuleuseelle a inscrit sur la pochette et sur la cassetteColumbus Day in Hoosier National Park, et asouligné d’un double trait à la règle comme,enfant, on soulignait les résultats de noscalculs. J’ai coupé le son de la télévision. Lesimages m’apparaissent plus réelles que lesombre appartement qui m’entoure. Il yrègne une lumière étrange, la lumière d’uneplaine sans fin par un après-midi d’octobre.
Une plaine vide, pas une ville alentour, pasun village, pas même une ferme. Une suite deséquences brèves, sans que l’image se modifiede façon sensible. Chaque fois un nouveaudébut, une nouvelle tentative d’appréhenderle paysage. Parfois, je devine la raison pourlaquelle Agnès a mis en marche la caméra :
A G N È S
un nuage avec une forme étrange, un pan-neau publicitaire, dans le lointain une bandede forêt, que l’on distingue à peine à cause del’objectif grand angle. Une fois elle se tournevers moi pendant que je suis au volant. Je faisune grimace. Et puis, comme une sorte detentative de se montrer elle-même : le rétrovi-seur, la caméra en plein dedans, et derrière, àpeine visible, Agnès en personne. Alors, unefois encore, très brièvement, Agnès, au volantcette fois, qui fait un geste de refus avec lamain.
Le garde du parc. Lui aussi fait un geste derefus avec la main, mais contrairement àAgnès il rit en le faisant. Un gros plan surses mains, qui parcourent une carte géogra-phique, montre un chemin qu’on ne peut pasidentifier sur l’image. Le garde s’affale sur sachaise, ouvre un tiroir, en sort quelquesbrochures. Il rit et tend l’une d’elles versla caméra : How to survive Hoosier NationalForest. L’image vacille, puis une main chercheà saisir la carte par le bas. Le garde n’arrêtepas de parler, son visage devient sérieux. Lacaméra se détache de lui, m’effleure briève-ment. Soudain la forêt, des arbres clairsemés.Je suis étendu par terre sur le sol, je sembledormir ou du moins j’ai les yeux fermés. Lacaméra s’approche de moi par le haut, vient
A G N È S
de plus en plus près jusqu’à ce que l’imagese brouille, recule. Elle se promène alors surmon corps jusqu’aux pieds, puis de nouveaujusqu’à la tête. Longtemps elle reste en arrêtsur le visage, tente une fois encore de venirplus près, mais l’image se brouille de nou-veau, et cette fois aussi elle recule.
« Pas de vidéos ? » a demandé le vendeuraux cheveux pommadés et coiffés en arrièrequand, il y a quelques heures, je suis alléchercher de la bière à la boutique d’en bas. Ila demandé des nouvelles d’Agnès. « Elle estpartie », j’ai dit, et il a souri de façon désobli-geante. « Elles partent toutes un jour, a-t-ildit, ne t’en fais pas, le monde est plein dejolies femmes. »
Agnès n’aimait pas le vendeur, sans savoirpourquoi. Il lui faisait peur, disait-elle simple-ment en riant avec moi quand je me moquaisd’elle. Il lui faisait peur comme les fenêtresqu’on ne peut pas ouvrir, comme le bour-donnement nocturne de l’air conditionné,comme ces laveurs de vitres qui se balançaientdans une nacelle devant la fenêtre de notrechambre un après-midi. Elle n’aimait pasl’appartement, ni l’immeuble, encore moinstout le centre-ville. Au début nous en avonsri, puis elle n’en a plus parlé. Mais je remar-quai que la peur était toujours là, qu’elle
A G N È S
s’était accrue jusqu’à en devenir si grandequ’Agnès n’arrivait plus à en parler. Aucontraire, plus elle la redoutait, plus elles’accrochait à moi. À moi... le comble !
A G N È S
2
J’étais assis dans la bibliothèque munici-pale et je consultais, comme depuis des joursdéjà, de vieilles parutions du Chicago Tribune,lorsque je vis Agnès pour la première fois.C’était en avril de l’année dernière. Elle s’étaitassise en face de moi dans la grande salle delecture pleine ce jour-là, la plupart des placesétant occupées. Elle avait apporté un cous-sin pour s’asseoir dessus, un coussin ergono-mique en mousse, relevé sur l’arrière. Devantelle, sur la table, elle avait posé un bloc, àcôté quelques livres, deux ou trois crayons,une gomme, une calculette. Quand je levailes yeux de mon travail, je rencontrai sonregard. Elle baissa les yeux, prit le livre dudessus de la pile et commença à lire. J’essayaide déchiffrer les titres des livres qu’elle avaitapportés. Elle sembla le remarquer et fit légè-rement pivoter la pile vers elle.
36
Agnès n’est pas revenue. Je l’ai attenduetoute la nuit et toute la journée suivante. Versmidi la neige a cessé de tomber mais depuisquelques heures elle tombe de nouveau. Unefois le téléphone a sonné. Je n’ai pas pris lerécepteur et il a cessé de sonner avant que lerépondeur ne se déclenche.
J’ai éteint la lumière et je regarde la vidéoqu’Agnès a tournée lors de notre excursiondans le parc national.
Moi, filmé du siège arrière, au volant pen-dant que nous rentrons. Les essuie-glaces.Parfois une auto devant nous. Ma nuque, mesmains sur le volant. À la fin, je semble avoirremarqué qu’Agnès filme. Je tourne la tête, ensouriant, mais avant que je regarde franche-ment vers l’arrière, le film se termine.
werner SPieS l’œil, le mot
Peter Stamm agnès verglas
gertruDe Stein picasso
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javier tomeo monstre aimé
enriQue vila-mataS abrégé d’histoire de la littérature portative
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le voyageur le plus lent suicides exemplaires
voltaire mahomet le prophète
william CarloS williamS au grain d’amériquevirginia woolf
la scène londonienne quatre lettres cachées
Agnès Peter Stamm
Cette édition électronique du livre Agnès de Peter Stamm
a été réalisée le 7 décembre 2011 par les Éditions Christian Bourgois.
Elle repose sur l’édition papier du même ouvrage, (ISBN : 9782267019865).
ISBN PDF : 9782267023411. Numéro d’édition : 1511.