Perspectives Macro 128 Fr

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N°128 – 2 e trimestre 2010 Confirmation de la reprise et maintien des incertitudes ne sont en rien contradictoires Le diagnostic sur l’état du monde semble se stabiliser. Dans les pays développés, on assiste à une reprise incomplète : reprise car les indicateurs pointent clairement sur un retour à la croissance, et ce probablement pour un certain temps ; incomplète car, tandis que le crédit n’augmente pas, les dépenses des ménages et les investissements restent ternes. Dans les pays émergents, les perspectives sont plus flatteuses. La croissance prévue du PIB est d’environ 6 % pour cette année comme pour la prochaine. La consolidation des grands équilibres macroéconomiques dans la plupart des pays concernés (avec une inflation sous contrôle, un désir de gestion orthodoxe de la politique monétaire et une situation plutôt solide des comptes publics) renvoie une image à la fois rassurante et attirante. Ce diagnostic assez favorable n’empêchera pas une certaine prudence de la part des entrepreneurs et des investisseurs et le sentiment de manque de clarté ne disparaîtra pas si facilement. Il y a trois raisons principales à cela. Tout d’abord, la crise nous a appris que le marché ne savait pas tout mieux que tout le monde. Ce qui signifie qu’une forte augmentation du prix des actifs n’impliquera pas forcément une plus grande préférence des agents économiques pour la consommation aux dépens de l’épargne. Toutefois, il est à craindre que de façon asymétrique une chute des prix de certains actifs ne s’accompagne d’une perte nette de confiance ainsi que d’une révision à la baisse des intentions d’achats. Ensuite, l’incertitude concernant les évolutions de la régulation atténuerait les esprits « animaux » souvent à l’origine des décisions d’investissement. Par exemple, le secteur financier ne sait toujours pas ce qui se prépare en terme de nouvelles réglementation ni comment cela impactera sa profitabilité. D’autres secteurs sont confrontés également à ce genre d’incertitudes. Ainsi aux Etats-Unis, les entreprises ne savent pas combien leur coûtera la réforme de l’assurance-santé pour leurs salariés. Enfin, la période post-crise sera très contraignante pour les politiques économiques. Dans les pays développés, le but est de normaliser les politiques très accommodatives imposées par la crise, tout en soutenant une croissance économique prévue faible, au moins au début. Dans les pays émergents, le but est d’empêcher un dangereux emballement des marchés et de renforcer la culture de stabilité progressivement instaurée pendant la dernière décennie. L’enjeu est énorme et les questions nombreuses. Quand agir ? Quels outils utiliser ? A quel degré ? Dans tous les cas, les marchés seront très attentifs à la crédibilité et à l’efficacité attendue des mesures adoptées. Sommaire Spécial - Les anticipations de marché porteront moins sur la croissance que sur la politique économique 2 Politique monétaire - Une nouvelle politique en « règles » 4 Taux d'intérêt - Face aux retraits de liquidité 6 Taux de change - Déclin de l'euro 7 Energie - Une reprise à deux vitesses 8 Métaux - Les platinoïdes présentent plus d’attrait que les autres métaux précieux 8 Ressources agricoles - La demande de biocarburants dopera les prix au second semestre 9 Etats-Unis - D’une croissance soutenue à auto-entretenue 10 Focus Etats-Unis - Le taux de chômage va-t-il baisser aussi vite qu’il est monté ? 12 Japon - Une croissance plus équilibrée en vue 15 UEM - Une reprise à deux vitesses :le centre versus la périphérie 16 Focus UEM - Retournement conjoncturel et chômage 18 France - Lendemains de fête 21 Allemagne - Vices et vertus 22 Italie - Retour vers la réalité 23 Grèce - Le chemin sera long et difficile 24 Espagne - La trappe à austérité 25 Scandinavie - La croissance pâtit des incertitudes à l’étranger 26 Royaume-Uni - Promesse de croissance 27 Australie - Le retour de la confiance 28 Nouvelle-Zélande - En passe de relever les taux 28 Canada - Reprise plus dynamique qu’attendue 29 Pays émergents - Qui va monter ou non les taux ? 30 Europe centrale - Retour du politique 32 Afrique du Sud - Dans le brouillard 33 Egypte - 2010 est une année à risque pour le budget 33 Russie - Encourageant, mais 34 Turquie - Un redressement encore hésitant 34 Inde - Vers des politiques plus restrictives 35 Chine - Le raffermissement du yuan remis à plus tard 35 Mexique - Laborieux 36 Brésil - Bientôt les hausses de taux 36 GCC - Les économies de la région se redressent à des rythmes différents 37 Prévisions 39

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N°128 – 2e trimestre 2010

Confirmation de la reprise et maintien des incertitudes ne sont en rien contradictoires

Le diagnostic sur l’état du monde semble se stabiliser. Dans les pays développés, on assiste à une reprise incomplète : reprise car les indicateurs pointent clairement sur un retour à la croissance, et ce probablement pour un certain temps ; incomplète car, tandis que le crédit n’augmente pas, les dépenses des ménages et les investissements restent ternes. Dans les pays émergents, les perspectives sont plus flatteuses. La croissance prévue du PIB est d’environ 6 % pour cette année comme pour la prochaine. La consolidation des grands équilibres macroéconomiques dans la plupart des pays concernés (avec une inflation sous contrôle, un désir de gestion orthodoxe de la politique monétaire et une situation plutôt solide des comptes publics) renvoie une image à la fois rassurante et attirante.

Ce diagnostic assez favorable n’empêchera pas une certaine prudence de la part des entrepreneurs et des investisseurs et le sentiment de manque de clarté ne disparaîtra pas si facilement. Il y a trois raisons principales à cela. Tout d’abord, la crise nous a appris que le marché ne savait pas tout mieux que tout le monde. Ce qui signifie qu’une forte augmentation du prix des actifs n’impliquera pas forcément une plus grande préférence des agents économiques pour la consommation aux dépens de l’épargne. Toutefois, il est à craindre que de façon asymétrique une chute des prix de certains actifs ne s’accompagne d’une perte nette de confiance ainsi que d’une révision à la baisse des intentions d’achats.

Ensuite, l’incertitude concernant les évolutions de la régulation atténuerait les esprits « animaux » souvent à l’origine des décisions d’investissement. Par exemple, le secteur financier ne sait toujours pas ce qui se prépare en terme de nouvelles réglementation ni comment cela impactera sa profitabilité. D’autres secteurs sont confrontés également à ce genre d’incertitudes. Ainsi aux Etats-Unis, les entreprises ne savent pas combien leur coûtera la réforme de l’assurance-santé pour leurs salariés.

Enfin, la période post-crise sera très contraignante pour les politiques économiques. Dans les pays développés, le but est de normaliser les politiques très accommodatives imposées par la crise, tout en soutenant une croissance économique prévue faible, au moins au début. Dans les pays émergents, le but est d’empêcher un dangereux emballement des marchés et de renforcer la culture de stabilité progressivement instaurée pendant la dernière décennie. L’enjeu est énorme et les questions nombreuses. Quand agir ? Quels outils utiliser ? A quel degré ? Dans tous les cas, les marchés seront très attentifs à la crédibilité et à l’efficacité attendue des mesures adoptées.

Sommaire

Spécial - Les anticipations de marché porteront moins sur la croissance que sur la politique économique 2 Politique monétaire - Une nouvelle politique en « règles » 4 Taux d'intérêt - Face aux retraits de liquidité 6 Taux de change - Déclin de l'euro 7 Energie - Une reprise à deux vitesses 8 Métaux - Les platinoïdes présentent plus d’attrait que les autres métaux précieux 8 Ressources agricoles - La demande de biocarburants dopera les prix au second semestre 9 Etats-Unis - D’une croissance soutenue à auto-entretenue 10 Focus Etats-Unis - Le taux de chômage va-t-il baisser aussi vite qu’il est monté ? 12 Japon - Une croissance plus équilibrée en vue 15 UEM - Une reprise à deux vitesses :le centre versus la périphérie 16 Focus UEM - Retournement conjoncturel et chômage 18 France - Lendemains de fête 21 Allemagne - Vices et vertus 22 Italie - Retour vers la réalité 23 Grèce - Le chemin sera long et difficile 24

Espagne - La trappe à austérité 25 Scandinavie - La croissance pâtit des incertitudes à l’étranger 26 Royaume-Uni - Promesse de croissance 27 Australie - Le retour de la confiance 28 Nouvelle-Zélande - En passe de relever les taux 28 Canada - Reprise plus dynamique qu’attendue 29 Pays émergents - Qui va monter ou non les taux ? 30 Europe centrale - Retour du politique 32 Afrique du Sud - Dans le brouillard 33 Egypte - 2010 est une année à risque pour le budget 33 Russie - Encourageant, mais 34 Turquie - Un redressement encore hésitant 34 Inde - Vers des politiques plus restrictives 35 Chine - Le raffermissement du yuan remis à plus tard 35 Mexique - Laborieux 36 Brésil - Bientôt les hausses de taux 36 GCC - Les économies de la région se redressent à des rythmes différents 37 Prévisions 39

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Les anticipations de marché porteront moins sur la croissance que sur la politique économique

Le diagnostic conjoncturel paraît se stabiliser. Pour ce qui est des pays développés, une reprise incomplète se poursuit. Il s’agit bien d’une reprise dans la mesure où les indicateurs montrent clairement que la croissance est de retour et sans doute de façon pérenne. Il en est ainsi des chiffres du PIB les plus récents (pour les troisième et/ou quatrième trimestres de 2009) ; il en est de même des résultats des enquêtes auprès des entreprises, sensés baliser la trajectoire de l’activité au cours des prochains mois. Le caractère incomplet se perçoit de différentes manières. Premièrement, si les données relatives au secteur manufacturier envoient des signaux encourageants, aidées par un arrêt du processus de déstockage et par une normalisation du commerce mondial, celles concernant les consommateurs et l’investissement en construction sont beaucoup plus ternes. Deuxièmement, le crédit n’est pas vraiment reparti et les incertitudes sur le nouveau cadre réglementaire, qui s’imposera au secteur bancaire, ne participeront sans doute pas d’un redémarrage spectaculaire. De plus, la spectaculaire montée des dettes publiques fragilise l’image d’une croissance saine et durable, assise sur une attention forte portée au respect des grands équilibres macroéconomiques.

Du côté des pays émergents, les perspectives sont plus flatteuses. La croissance du PIB avoisinerait les 6 % tant cette année que l’an prochain (d’abord un peu moins, puis un peu plus). Si l’Asie continue de faire la « course en tête » avec des projections supérieures à 7 %, c’est ailleurs que l’inflexion est la plus impressionnante avec le passage d’une sévère récession en 2009 à des rythmes de croissance au moins honorables en 2010. Ainsi, pour les pays de l’Europe émergente, la performance passerait de -5,5 % à +2,4 %. Bien sûr, ce tempo renforcé ou retrouvé, selon les régions, doit encore trop à la demande extérieure et pas assez aux dépenses domestiques. Mais la consolidation des grands équilibres macroéconomiques de l’essentiel des pays concernés (inflation sous contrôle, volonté de resserrer les réglages monétaires en fonction de l’évolution des prix et situation des comptes publics plutôt flatteuse) envoie une image à la fois rassurante et attractive.

Cette divergence entre les régimes de croissance des pays développés et émergents pourrait même être accentuée en termes d’attractivité relative des marchés de capitaux par des réglages de politique économique opposés. Dans le monde émergent, la force de la croissance, le faible niveau de la dette publique et la volonté de contenir les pressions inflationnistes participent de l’option de combiner resserrement de la politique monétaire avec maintien en l’état du réglage budgétaire. Ce qui se traduirait plutôt par des pressions haussières sur les taux d’intérêt réels. Au final, l’espérance de rendements anticipés élevés pour les actifs émergents devrait se traduire par davantage d’entrées de capitaux vers ces régions.

Pour ce qui est des pays avancés, la crise grecque apparaît comme un catalyseur de la prise de conscience de la nécessité de prendre sans tarder des mesures de rééquilibrage des comptes publics. Ce qui ne manquera de peser sur une reprise déjà anticipée comme faible relativement aux expériences passées. Les banques centrales devront intégrer cette composante dans leur processus de décision. Il y là de quoi confirmer que la remontée des taux directeurs, tant aux Etats-Unis qu’en Europe sera tardive et lente.

Cette opposition entre les réglages de Policy Mix des pays émergents par rapport aux pays développés renforce l’idée d’un plus fort attrait en termes d’Expected Return pour cette première zone comparée à la seconde. De façon sans doute encore plus fondamentale, ce contraste est quelque chose de perçu comme potentiellement durable. La conjonction d’une croissance potentielle assez forte (peut-être autour de 6 % ; même si l’approche est vraisemblablement à « manier avec des pincettes ») et de l’apprentissage d’une culture de la stabilité macroéconomique (inflation contrôlée, finances publiques équilibrées et comptes extérieurs en bon état) participent évidemment à la fois d’une espérance de rendements élevés et de l’idée que la perception du risque lié à ce type d’investissement est peut-être appelée à se corriger à la baisse le temps passant. En sachant que même en maintenant une approche un peu conservatrice de stabilisation du risque émergent, l’expression du ratio rendement/risque reste très favorable. C’est pourquoi il faut sans doute se préparer à des allocations de portefeuille accordant des pondérations plus élevées aux actifs émergents. D’où l’insistance particulière sur l’idée que les flux de capitaux vers les marchés émergents devraient augmenter d’une façon marquée.

Cet environnement nouveau, tant en termes de perspectives de croissance (en insistant sur la médiocrité de celles concernant les pays développés) que de volume des flux de capitaux (avant tout en direction des marchés émergents), pose de lourdes questions de politique économique. Deux d’entre elles sont particulièrement importantes. La première concerne avant tout les Etats-Unis, l’Europe de l’ouest et sans doute aussi le Japon. Comment à la fois recréer les conditions de davantage de croissance économique (repositionner la croissance potentielle sur une trajectoire plus élevée) et revenir à un réglage plus neutre de la politique économique ; c'est-à-dire retrouver les moyens d’un interventionnisme public efficace lorsque pour une raison ou une autre l’activité s’affaiblira à nouveau dans le futur ? Pour nombre de pays européens (de l’Espagne au Royaume-Uni en passant par l’Irlande, pour ne retenir que ceux-là) et aussi pour les Etats-Unis, le moteur de

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la demande à l’horizon des prochaines années devra être moins la consommation des ménages ou l’investissement logement que les exportations et l’investissement des entreprises. Et ceci avant tout parce que les ménages doivent consolider leur bilan (moins de dettes et plus d’épargne accumulée). Il n’empêche que la capacité de compenser est limitée. Le seul poids de la consommation dans le PIB est ainsi aux Etats-Unis le triple de celui du couple formé par les exportations et l’investissement des entreprises. Tout ralentissement de 1 % du premier doit être équilibré par une accélération de 3 % du second. L’objectif n’est en rien facile à atteindre et il est à craindre que le régime de croissance soit durablement affecté par ce rééquilibrage sans doute incomplet par nature. N’est-ce pas le message envoyé par les expériences allemande ou japonaise ? Il reste à espérer un nouveau choc technologique et l’arrivée d’une nouvelle offre qui trouvera d’elle-même sa propre demande. Mais peut-on affirmer hic et nunc que cela arrivera vite ? Sans doute pas. Dans ces conditions, comment réussir à stabiliser puis à réduire le ratio dette publique sur PIB tout en revenant à des taux d’intérêt à court terme plus en harmonie avec l’expression de la neutralité monétaire et en maintenant un niveau de croissance socialement acceptable ? La question est redoutable et il ne sera pas facile d’y répondre. La lisibilité de la politique économique sera faible à l’horizon des prochains trimestres et le risque d’erreur, vraisemblablement supérieur à ce qui a pu être observé par le passé.

Du côté des pays émergents, la perspective d’un afflux potentiellement important de capitaux en provenance de l’Ouest n’est pas sans poser de difficultés. Il ne faut pas oublier que la capitalisation de l’essentiel des marchés de la zone émergente est de taille réduite relativement à celle observée dans les pays avancés. Pour ce qui est des marchés d’actions, les pays développés « pèsent » 70 % de la capitalisation mondiale ; la proportion étant encore plus élevée si on ne s’intéresse, comme il faut le faire, qu’au « flottant ». Le risque d’apparition de phénomènes de bulles est donc réel. Les conséquences seraient dommageables : durant la formation de celle-ci, d’une perte de compétitivité-prix à cause de la surévaluation de la devise à un développement excessif du crédit ; lorsqu’elle éclate, des effets-richesse négatifs à la nécessité de consolider les bilans des agents économiques. Il faut donc comprendre la préoccupation des responsables de politique économique et leur souhait de prendre des mesures pour éviter l’enclenchement de ce type de mécanisme. Des initiatives de contrôle des capitaux ont déjà été prises au Brésil et sont discutées dans certains pays asiatiques (Corée, Indonésie ou Taïwan). Bien sûr, l’efficacité de ces restrictions est sujette à discussion et il apparaît souvent que celles-ci impactent davantage la composition des entrées de capitaux que le montant total. De plus, d’autres moyens existent pour réduire le flux entrant de capitaux comme la stérilisation des réserves de change, le réglage de la politique monétaire ou les mesures prudentielles. On le voit, la « boite à outils » de la gestion du volume des capitaux en direction des marchés émergents est bien fournie. Mais on sait moins dans quelle mesure elle devra être utilisée et si la palette des remèdes choisis sera efficace. Une fois encore, la politique économique se retrouve en première ligne pour baliser des perspectives potentiellement déstabilisatrices ; sans que pour autant l’investisseur puisse être pleinement confiant sur l’efficacité des solutions mises en œuvre.

La crise nous a appris que le marché ne savait pas toujours mieux que les autres (les opérateurs prix individuellement, les responsables de la politique économique, les régulateurs ou les analystes). L’après-crise va beaucoup solliciter les politiques économiques. Dans les pays développés, l’objectif est à la fois de normaliser les réglages très accommodants que la crise a forcé à prendre et de favoriser le renforcement d’une croissance sans doute faible au moins dans un premier temps. Dans les pays émergents, le but est d’éviter les emballements de marchés et de consolider cette culture de la stabilité apparue progressivement au cours de la décennie passée. L’enjeu est de taille et de lourdes questions de calendrier (quand faut-il bouger ?) d’outils à privilégier et du degré d’utilisation de ceux-ci vont se poser. Les marchés, pour leur part, vont être attentifs à la crédibilité et à l’efficacité attendue des mesures décidées. Gageons que la lisibilité va manquer et que le regard des investisseurs sera prudent, voire sceptique. Avoir été déçu par le marché ne veut pas dire revenir à une confiance absolue dans la politique économique.

Hervé GOULLETQUER [email protected]

Etats-Unis et zone euro : PMI

30354045505560

Jan-07 Jan-08 Jan-09 Jan-10Zone euro PMI manuf.Etats-Unis PMI manuf.Source : Bloomberg

Etats-Unis et UEM : crédit au secteur privé

(Mds €)

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-5%

0%

5%

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15%

janv-07 janv-08 janv-09 janv-10

a/a

Etats-Unis UEMSource : Bloomberg

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Politique monétaire

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Une nouvelle politique en « règles »

Les banques centrales ont durement gagné la bataille contre l’inflation, elles doivent maintenant s’armer contre un nouvel ennemi : l’instabilité financière.

Depuis les années 70, la lutte contre l’inflation a été au cœur des stratégies des banques centrales qui ont vu là le moyen le plus efficace d’assurer simultanément stabilité économique et financière. Cibler l’inflation revenait à lutter contre le principal stigmate des excès cycliques dans la sphère réelle lorsque phases de surchauffe et de récession se succèdent par à coups. Le cycle financier et ses effets d’accélérateurs étaient seulement considérés comme révélateur de ces tensions. En effet, les marchés étant efficients, tout mouvement de prix d’actifs se devait de refléter l’évolution des fondamentaux sous-jacents. Autrement dit, stabiliser les prix devait permettre de lisser les cycles d’activité et, par suite logique, le cycle financier. Cette stratégie s’est avérée payante puisque comme espéré la croissance et les prix ont fait preuve d’une plus grande régularité au point de caractériser la période des quinze dernières années comme celle de la « grande modération ». « Grande modération » dont les banquiers centraux ont revendiqué la paternité.

Pourtant, les épisodes d’instabilité financière se sont multipliés1 venant à rebours de l’hypothèse de complémentarité entre stabilité macroéconomique et financière. A l’origine de toutes ces crises se trouve l’accumulation d’un lourd passif sur fond de hausse rapide des prix d’actifs venant le plus souvent en garantie de ces excès d’endettement, avec l’enclenchement de boucles auto-renforçantes. Les banques centrales pilotant le prix de la liquidité et donc la disponibilité et le coût de la ressource financière, elles sont souvent incriminées pour avoir suivi des politiques monétaires trop accommodantes, pendant trop longtemps, ce qui aurait nourri les bulles de prix des actifs en stimulant le levier d’endettement qui les sous-tend. Pire on leur reproche d’intervenir pour éteindre l’incendie quitte à recréer des conditions propices à la formation de nouveaux excès financiers.

Les banques centrales ne sont pas les seules responsables, mais l’asymétrie de comportement qu’on leur reproche - laxisme en phase de montée des déséquilibres financiers, puis activisme n’est plus tenable. L’idée d’actions préventives rend également caduque le principe de séparation entre une politique monétaire dédiée à la gestion du cycle et une politique prudentielle, souvent conçue à un niveau microéconomique, pour garantir la stabilité financière. Il faut une politique globale servie par des instruments plus spécifiques et adaptés au double objectif de stabilité économique et financière.

Il est vrai qu’en théorie, les taux apparaissent comme un outil de prédilection pour combattre la spéculation et les bulles de prix d’actifs, puisque la recherche effrénée de rendement se fait la plupart de temps à effet de levier croissant. Mais des conflits d’objectifs risquent d’apparaître, cet instrument servant également à gérer les fluctuations cycliques. Il existe en économie une règle de bon sens, celle de Tinbergen, qui démontre la nécessité de disposer d'autant d'instruments qu'il y a d'objectifs à atteindre pour réussir une politique économique. En fait, il en faut au moins autant et peut être plus an cas de crise. Si les taux d’intérêt ne sont pas l’outil adéquat, il convient alors de réfléchir à d’autres voies plus praticables.

US : encours de dette

30

50

70

90

110

1972 1981 1990 1999 200830

50

70

90

110

sociétés non financières ménages

Sources : Réserve fédérale, Crédit Agricole S.A.

zone grisée : récession

% du PIB

US : Fluctuations des prix d'actifs

50

250

450

650

96 00 04 08

Indice 100=1995

100120140160180200220240260

Pétrole ($)SP 500 (éch. dr.)prix immobilier US (éch. dr.)

Source : Crédit Agricole S.A.

1 Japon (1990), Asie 1997, Russie 1998, USA 2001, jusqu’au paroxysme de la crise 2007-2009…

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Politique monétaire

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Le débat se concentre aujourd’hui sur les aspects réglementaires avec la nécessité de repenser les outils de régulation prudentielle à un niveau plus macro-économique et à contre-courant des cycles, afin de contrarier, autant que faire se peut, le caractère pro-cyclique de la finance.

En réponse à la crise financière de 2007, le Comité de Bâle propose de renforcer les fonds propres des banques afin d’améliorer leur capacité de résilience en cas de choc. La question du curseur est ici primordiale. Le capital est cher, ce qui pourrait finalement se traduire par un renchérissement du coût de refinancement des banques et réduire le niveau d’intermédiation avec des effets potentiellement indésirables sur la croissance, notamment en pénalisant les PME-PMI qui recourent exclusivement au crédit pour financer leur développement. La rigidité de cette règle rentre aussi en contradiction avec la volonté d’aller à contre-courant des cycles qui nécessite une approche plus dynamique. Une autre proposition serait d’appliquer une surcharge en capital qui pourrait varier en fonction de la position dans le cycle, du profil de risque et du degré d’importance systémique des institutions financières. Mais, jusqu’à quel point les marchés seront prêts à accepter une baisse du ratio Tier one en phase de crise constitue la principale limite à cette idée de capital contra-cyclique. On pourrait également envisager une politique de provisionnement dynamique à rebours des cycles (souvent sur la base des défauts historiques) afin d’inciter les banques à se constituer un matelas de sécurité durant les périodes de prospérité à utiliser en phase de basses eaux2. Il est aussi question de cibler plus spécifiquement les marchés d’actifs les plus propices à la formation de bulle ou de viser les acteurs de la finance soumis à des règles moins contraignantes. Une réduction des ratios « Loan To Value » en phase montante du cycle pourrait être un outil utile pour stopper les dynamiques cumulatives sur le marché immobilier. Faire varier les appels de marges ou les décotes (haircuts) appliquées sur les prêts sécurisés (notamment octroyés aux acteurs non bancaires) pourrait permettre de freiner les excès de leviers qui alimentent les bulles de prix d’actifs. Cette liste non exhaustive montre que l’approche ne peut être unidimensionnelle mais à l’inverse l’empilement de mesures, sans compter leur difficile calibrage, pourrait s’avérer dangereux en inhibant toute prise de risque. Les questions de la surveillance des acteurs non bancaires, du degré coordination de ce type de politique à l’échelle mondiale et les mesures de sauvegarde de la liquidité sont des sujets connexes qui ne sont pas abordés ici mais revêtent également une importance particulière pour faire aboutir la réforme du système monétaire international.

Si réformer le système financier pour lui conférer plus de stabilité est essentiel il ne s’agit pas pour autant de corseter l’ensemble à grands coups de mesures réglementaires. L’activité de crédit, intermédiée ou non, est par essence risquée mais indispensable pour poser les bases d’une croissance future. La boîte à outils doit donc être suffisamment flexible pour ne pas inhiber ce moteur mais suffisamment contraignante pour éviter de verser dans de nouveaux excès.

Isabelle JOB [email protected]

2 Cette pratique qui existe en Espagne depuis le début des années 2000 n’a pas empêché la formation d’une bulle majeure de crédit sur un tandem immobilier-ménages mais a néanmoins amorti le choc de la purge sur les bilans bancaires.

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Taux d’intérêt

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Face aux retraits de liquidité

Les injections de liquidité ont atteint leur point haut. Ce sont les marchés obligataires de la zone euro qui devraient être les plus concernés au cours des prochains mois. Pourtant les rendements à dix ans se situent aux mêmes points bas que durant la Grande Récession. Nous recommandons la prudence, notamment en Europe.

La liquidité ne peut que diminuer désormais. Depuis deux ans, les banques centrales injectent des liquidités dans le système financier dans le but de permettre coûte que coûte aux marchés monétaires de recommencer à fonctionner normalement, de soutenir les banques et de relancer l’économie mondiale. En 2010, elles commenceront à éponger ces liquidités. On ne peut que spéculer sur l’impact de ce changement de politique, car les banques centrales n’ont jamais jusqu’à présent procédé à des retraits de liquidité à l’échelle mondiale.

En outre, les banques centrales passent cette année d’une situation de liquidité surabondante à une situation de liquidité seulement abondante. On peut se demander si elles relèveront les taux d’intérêt cette année mais, à supposer qu’elles le fassent, elles ne les porteront pas à un niveau restrictif.

Certaines bulles financières donnent l’impression d’apparaître. Les indices boursiers sont élevés et les rendements obligataires très bas. De fait, la moyenne des taux dix ans de référence de chaque pays de la zone euro, pondéré par le PIB du pays concerné, est très proche de son plancher historique. Les rendements sont aussi bas qu’au pire de la Grande Dépression. Cela étant, les reprises économiques auxquelles on assiste de par le monde ont lieu à un rythme de plus en plus rapide et, à notre avis, les investisseurs obligataires ne pourront qu’en pâtir.

Les investisseurs obligataires européens nous semblent encourir les risques les plus élevés. L’économie américaine devrait connaître une croissance plus vigoureuse que la zone euro, mais la BCE est beaucoup plus susceptible d’éponger une partie des liquidités dont est actuellement inondé le système financier européen. En fait, le remboursement de 442 Mds € le 1er juillet lui force plutôt la main et les banques n’ont acheté en 2009 qu’un peu moins de la moitié des obligations d’Etat émises par les pays de la zone euro. Une rapide comparaison entre ce que les banques ont acheté en 2009 et ce qu’elles auraient normalement acheté compte tenu de la pente de la courbe des taux permet de conclure qu’elles ont probablement acheté quelque 200 Mds € de plus qu’à l’ordinaire. Ces achats « excédentaires » d’obligations ont pu être effectués parce que la BCE a donné à ces établissements les moyens de le faire. Néanmoins au cours des prochains mois, par ses retraits de liquidité la BCE forcera d’une certaine façon les banques à revendre une bonne partie de ces obligations.

Autrement dit, en zone euro l’offre obligataire augmentera de 200 Mds € au troisième trimestre. Certaines banques tenteront peut-être de conserver leurs positions en utilisant d’autres sources de financement. D’autres solderont les leurs, mais à qui précisément ? Telle est bien la question actuellement. Les investisseurs étrangers du secteur privé procèdent à des achats plus importants depuis quelque temps, certes, mais on ne peut pas compter uniquement sur eux. Selon nous, une fois que la Fed aura cessé ses achats de titres et que le marché américain commencera à se méfier des opérations de repo tripartites et des autres techniques de retrait de liquidités, les taux dix ans augmenteront rapidement.

La BCE devrait également commencer à relever ses taux au quatrième trimestre ou, plus précisément, à mettre un terme aux mesures de relance d’urgence qu’elle a mises en œuvre. Comme à l’accoutumée, elle évaluera l’impact de sa politique monétaire à un horizon d’un à deux ans, mais le marché se préoccupera de savoir si la BCE n’est pas trop en avance Dans ces conditions, la courbe des taux européens devrait, à notre avis, fortement s’aplatir au deuxième semestre 2010 à mesure que la BCE donnera de plus en plus l’impression de vouloir relever ses taux. Les taux dix ans devraient alors augmenter à un rythme plus lent et ceux à trente ans pourraient même légèrement baisser. C’est généralement ainsi que la courbe de taux évolue lorsqu’une banque centrale est en avance. Pour la même raison, la prochaine hausse de taux décrétée par la BCE suscitera vraisemblablement une dépréciation de l’euro.

David KEEBLE [email protected]

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Taux de change

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Déclin de l’euro

Les tensions entre les Etats-Unis et la Chine à propos du taux de change de leurs monnaies respectives risquent d’aller en s’intensifiant, mais les Etats-Unis auraient le plus à perdre. Les craintes concernant l’Europe se sont apaisées, mais les perspectives de l’euro par rapport à la plupart des autres devises se sont assombries. Nous avons maintenu nos prévisions de baisse du JPY en 2010 et de hausse de l’AUD et du NZD. L’appréciation de l’USD devrait s’accentuer au deuxième semestre 2010.

Les tensions entre les Etats-Unis et la Chine à propos des taux de change vont susciter une plus grande attention des marchés. Alors que la Chine continue de faire la sourde oreille aux appels à une réévaluation du CNY, les spéculations grandissantes selon lesquelles les Etats-Unis pourraient officiellement désigner la Chine comme « manipulant sa monnaie », prouvent que cette question va rester au centre des préoccupations. Il devient de plus en plus difficile pour le gouvernement américain d’ignorer les appels du Congrès à une politique plus ferme en la matière. De plus, la promesse de Barack Obama de doubler les exportations américaines au cours des cinq prochaines années requiert une baisse du dollar vis-à-vis des devises asiatiques, yuan en tête, et pas seulement contre les boucs émissaires habituels tels que l’euro. Il n’y a guère de signes aujourd’hui qu’une telle baisse est près de se produire. Nous nous attendons néanmoins à ce que la Chine finisse par réévaluer sa monnaie au cours du deuxième trimestre 2010, ce qui poussera les autres banques centrales asiatiques à tolérer un change plus fort.

Les craintes concernant l’Europe devraient rester au centre de l’actualité mais à un degré moindre qu’au cours de ces derniers mois. L’annonce par la Grèce de nouvelles mesures d’austérité budgétaire suivie de l’accord tacite de l’UE a contribué à rassurer les marchés. Le fait même que la baisse de l’USD et son corollaire, la hausse de l’EUR, soient restées limitées montre toutefois que les inquiétudes demeurent, pas seulement au sujet de la Grèce mais aussi des problèmes budgétaires et de la faiblesse de la croissance dans d’autres pays européens. Par conséquent, nous avons révisé à la baisse nos prévisions sur l’EUR/USD. En dépit d’une possible hausse de l’EUR/USD à court terme, surtout si les écarts des CDS continuent de se réduire, nous pensons que celle-ci restera limitée. Nous prévoyons désormais l’EUR/USD à 1,25 d’ici la fin 2010.

Nous avons également révisé, pour les mêmes raisons, nos prévisions de taux de change de l’EUR vis-à-vis d’autres devises. Les performances du CHF et de la SEK ont été supérieures à nos anticipations. La position plus ferme que prévu de la Riksbank a soutenu la forte hausse de la SEK mais nous nous attendons à ce que son appréciation se poursuive à un rythme plus graduel. Quant au CHF, la BNS semble avoir adopté une position plus souple vis-à-vis de la parité EUR/CHF et s’être faite à l’idée d’un CHF plus fort à mesure de la reprise de l’activité. Nous continuons d’anticiper une appréciation progressive de la parité EUR/CHF au cours des prochains mois, mais depuis un point de départ plus bas. La révision à la baisse de nos prévisions sur l’EUR/USD combinée au maintien de nos prévisions de baisse du JPY se traduit par une appréciation de l’EUR/JPY bien moins importante.

La GBP, qui a plus baissé que l’EUR au cours des dernières semaines pour différentes raisons, est actuellement le « maillon faible » du marché. Elle devrait rester vulnérable à court terme, au moins jusqu’aux élections législatives de début mai. Cependant, le cours de la livre intègre déjà tant de mauvaises nouvelles et la GBP étant très sous-évaluée que tout nouvel accès de faiblesse sera l’occasion de prendre des positions longues en vue d’une hausse à moyen terme. Ainsi, malgré une révision en hausse de nos prévisions sur l’EUR/GBP pour les six prochains mois, nous nous attendons ensuite à ce que la GBP reprenne plus vite des couleurs vis-à-vis de l’EUR que prévu précédemment. La hausse de la GBP vis-à-vis de l’USD serait en revanche plus modeste, pour partie du fait de la révision à la baisse de nos prévisions sur l’EUR/USD. Nous prévoyons désormais un pic de la parité GBP/USD à 1,55 environ en juin 2011 alors que nous tablions jusque-là sur un plus haut de 1,63 en décembre 2010.

A long terme, l’USD devrait s’apprécier au fur et à mesure que le rythme de la croissance américaine va s’affermir et dépasser celui de la plupart des autres grandes puissances économiques, et de la zone euro en particulier. L’AUD et le NZD devraient une nouvelle fois faire figure d’exceptions et s’apprécier grâce à des taux d’intérêt plus élevés, une croissance plus soutenue et un appétit croissant pour le risque. Ces deux devises pourraient selon nous atteindre un pic respectivement à 0,95 et 0,76 contre l’USD au deuxième trimestre 2010, des niveaux élevés qui devraient devenir dissuasifs en deuxième partie d’année. Les investisseurs prêts à prendre davantage de risques parieront sur une hausse du NZD et de l’AUD et sur une baisse du CHF et du JPY, le cas des autres devises se situant quelque part entre les deux. L’EUR malheureusement devrait se situer plutôt en bas de l’échelle à l’horizon de notre prévision.

Mitul KOTECHA [email protected]

Page 8: Perspectives Macro 128 Fr

Energie - Métaux

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 8

Une reprise à deux vitesses

La demande de pétrole est repartie à la hausse sur les marchés émergents, mais elle reste faible dans les pays de l’OCDE. Or, le deuxième trimestre est ordinairement marqué par un déclin saisonnier de la demande de pétrole et une certaine pression devrait s’exercer sur les prix. De fait, nous tablons sur une chute du prix du baril de pétrole brut léger américain WTI à 68 USD/bl au deuxième trimestre 2010, suivie par un rebond à 72-76 USD/bl au second semestre 2010, soutenu par des prélèvements sur les stocks à partir du troisième trimestre.

Les dynamiques régionales conditionnent l’évolution des marchés mondiaux de produits pétroliers. La demande de pétrole est plus vigoureuse en Asie qu’en Europe ou aux Etats-Unis, les pays asiatiques ayant bénéficié d’un rebond plus rapide de l’activité économique et peut-être également d’un certain phénomène de transfert de l’activité industrielle vers les économies en développement. Toutefois, la demande des pays asiatiques ne contribuera guère à la résorption des excédents de stocks sur les deux rives de l’Atlantique, ni au soutien de l’activité de raffinage en Europe et aux Etats-Unis. Au contraire, plusieurs grands pays ont mis en place de nouvelles raffineries l’année dernière et sont devenus d’importants exportateurs nets de produits pétroliers. Tel est le cas de la Chine et de l’Inde où de nouvelles capacités de raffinage ont commencé à être exploitées en 2009. En 2010, les exportations de produits pétroliers en provenance d’Asie continueront à influencer les équilibres sur les marchés mondiaux.

A la fin de la période de demande élevée qui caractérise la saison hivernale, la dynamique du marché des produits pétroliers reste caractérisée par l’héritage de la Grande Récession. Au cours des derniers mois, la demande de gasoil a été plus durement pénalisée par le recul de l’activité industrielle et des échanges commerciaux que la demande d’essence, et d’importants excédents de stocks de gasoil se sont constitués au cours de l’été. De fait, la demande d’essence a mieux résisté à la récession que la demande de gasoil. A cause du manque de flexibilité qui caractérise cette activité, les raffineries – qui devaient satisfaire la demande d’essence – ont produit des excédents de gasoil qui ont dû être stockés. Au début de l’hiver, les stocks de gasoil aux Etats-Unis et en Europe (stockés en grande partie sur des navires de transport) se situaient à des niveaux historiquement élevés. Depuis lors, la rigueur des températures a favorisé une diminution de ces excédents de stocks en soutenant la consommation de fioul domestique. Toutefois, celui-ci représente encore une partie limitée de la demande totale de gasoil et, à moins d’une reprise significative de la demande de diesel, les stocks de gasoil devraient rester élevés jusqu'à la fin de l’année en Europe et aux Etats-Unis.

Christophe BARRET [email protected]

Les platinoïdes présentent plus d’attrait que les autres métaux précieux

Les métaux devraient enregistrer une bonne performance cette année. L’accélération de la croissance mondiale soutenant la demande ; nous préférons toujours les métaux industriels aux métaux précieux. Toutefois, la performance boursière des acteurs du secteur dépendra du niveau de couverture des stocks et favorisera les métaux soumis à des contraintes en termes de production. Les platinoïdes bénéficient d’une exposition plus élevée au cycle industriel et nous semblent présenter plus d’attrait que les autres métaux précieux.

Le platine et le palladium (désignés collectivement sous le vocable platinoïdes ou PGM) devraient enregistrer une meilleure performance cette année. De fait, le raffermissement de la croissance mondiale devrait soutenir l’utilisation dans l’industrie et la joaillerie, deux domaines qui avaient été durement touchés par la récession l’année dernière. Ces deux métaux sont utilisés dans les catalyseurs auto, dont la demande devrait croître avec la reprise des ventes mondiales de véhicules. L’accélération attendue de la croissance des ventes de voitures à essence, qui dominent les marchés américain et chinois (tandis que les voitures diesel dominent en Europe), favorisent le palladium davantage que le platine, car les catalyseurs auto utilisent plus de palladium que de platine.

Aux Etats-Unis, le lancement de « trackers » suivant l’évolution du platine et du palladium physiques pourrait encore accentuer le resserrement du marché des platinoïdes. Si l’on en juge par l’intérêt très vif observé pour des produits similaires sur le marché de l’or et de l’argent, cette évolution devrait susciter un fort engouement de la part des investisseurs, et donc fortement doper les prix.

Le potentiel d’augmentation des capacités de production sur ces deux métaux est limité ; l’offre de platine est dominée par l’Afrique du Sud et celle de palladium par la Russie. L’augmentation du coût de l’électricité en Afrique du Sud se traduira par une augmentation relativement forte du coût marginal de production en vue de satisfaire la demande. Les ventes des stocks de l’Etat russe ont entretenu un niveau assez élevé d’approvisionnement sur le marché du palladium, mais le niveau exact de ces stocks demeure à présent une incertitude majeure. Même si les prix ont déjà progressé de manière assez sensible par rapport aux points bas atteints l’année dernière, le marché nous semble encore receler un potentiel de hausse et nous recommandons d’acheter sur repli.

Robin BHAR [email protected]

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Ressources agricoles

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 9

La demande de biocarburants dopera les prix au second semestre

Bien que les prix des ressources agricoles soient confrontés à une dégradation des fondamentaux, ils devraient continuer d’être soutenus par le redémarrage de l’activité économique à l’échelle mondiale et la vigueur de la demande, tout particulièrement celle de biocarburants produits à partir de sucre ou de maïs.

La demande de biocarburants dopera les prix du sucre et du maïs. Les prix des denrées alimentaires devraient à nouveau augmenter cette année, la reprise de l’économie mondiale préfigurant une augmentation de la demande. La FAO craint une flambée des prix des denrées alimentaires. Elle considère par ailleurs que les pays les plus pauvres de la planète pourraient devenir de plus en plus tributaires de leurs importations de denrées alimentaires et les pays exportateurs de denrées alimentaires de moins en moins nombreux.

Compte tenu de la dégradation des fondamentaux, les prix des ressources agricoles devraient toutefois rester orientés à la baisse au cours des 4 à 5 prochains mois.

La baisse du prix des céréales et du soja est essentiellement imputable à une offre mondiale excédentaire : la production mondiale de blé a atteint un record historique de 678 Mt et s’est stabilisée depuis, tandis que l’abondance des récoltes aux États-Unis et en Amérique du Sud pèse sur les cours du maïs et du soja. Une fois que le marché aura absorbé ces récoltes, les prix devraient bénéficier de la vigueur de la demande et de la reprise économique, dans la mesure où les acheteurs potentiels se laisseront probablement tenter par le niveau attractif des prix.

En dépit de l’insuffisance de l’offre mondiale – estimée à 9,4 Mt cette année par l’ISO –, les prix du sucre ont baissé récemment, car les clients potentiels les trouvent trop élevés. Ils devraient continuer de baisser au cours des quatre à cinq prochains mois, mais à un rythme plus lent : au Brésil, le rendement des récoltes est déjà supérieur de 10 % à celui de l’an dernier en glissement annuel et en Inde, la récolte de sucre devrait augmenter de 16 à 17 Mt cette année à 25 Mt l’an prochain, selon l’association Simbhaoli. D’ici cinq mois, les prix du sucre devraient néanmoins se redresser, l’Inde étant susceptible d’importer jusqu’à 3Mt de sucre à l’approche des fêtes d’automne – en effet, la reprise économique soutiendra alors la demande mondiale.

La production de biocarburants sera l’un des principaux moteurs de la hausse de la demande de maïs et de sucre. Les deux principaux producteurs d’éthanol sont les États-Unis (éthanol à base de maïs) et le Brésil (éthanol à base de sucre).

Les exportations brésiliennes d’éthanol ont baissé ces deux dernières années ; au Brésil, la production d’éthanol a baissé de 7,3 % en glissement annuel en 2009/2010, à 23,1 milliards de litres (source : Unica), ce carburant étant devenu moins rentable en raison de la flambée des prix du sucre. Aux États-Unis en revanche, la production d’éthanol a augmenté de près de 20 % en 2009, à 40,96 milliards de litres (source : RFA).

Les États-Unis ont décidé de tirer parti de la moindre rentabilité de l’éthanol produit à partir de sucre et du niveau record de la récolte américaine de maïs pour accroître leurs capacités de production d’éthanol. 109,23 Mt de maïs devraient être utilisées aux Etats-Unis pour produire de l’éthanol cette année, ce qui correspond à 33 % du maïs récolté dans ce pays et à une augmentation de 16,2 % par rapport à l’an dernier. En outre, la production brésilienne d’éthanol devrait repartir à la hausse en 2010/2011, à 29,8 milliards de litres (source : Datagro), à la faveur d’une récolte de canne à sucre plus abondante.

La production de biocarburants devrait donc soutenir la demande et les prix du sucre et du maïs des deux principaux pays producteurs. Elle devrait également soutenir le cours des contrats à terme sur le blé et sur le soja négociés au CBOT, le blé et le soja pouvant également servir d’aliments pour bétail et être utilisés pour produire des biocarburants.

Christophe BARRET [email protected]

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États-Unis

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 10

D’une croissance soutenue à auto-entretenue

L’économie américaine semble sur la voie d’une croissance durable. Son rythme devrait toutefois être atypiquement faible pour une reprise et le taux de chômage mettra du temps à refluer. L’inflation devrait rester modérée, militant pour un statu quo sur les Fed funds cette année. Nous tablons sur une accélération de la croissance en 2011.

Le passage à une croissance autonome de la demande privée sera une transition cruciale en 2010-2011, alors que d’expansionniste, la politique budgétaire deviendra restrictive et que le caractère exceptionnellement accommodant de la politique monétaire sera normalisé. Les mesures budgétaires et monétaires volontaristes mises en œuvre l’année dernière pour faire face à la pire récession depuis la crise de 1929 continueront de soutenir la croissance en 2010, mais leur impact ira en s’estompant et s’inversera en 2011. Les principaux obstacles que la reprise doit passer cette année sont : l’effet richesse négatif résiduel découlant de la destruction de plus de 11 000 milliards de dollars de richesse des ménages, un accès restreint au crédit et les incertitudes autour du paysage économique et politique.

L’effet richesse négatif devrait inciter les ménages à épargner une partie de l’augmentation de revenu induite par le redressement de l’emploi, afin de reconstituer leur patrimoine, ce qui pèsera sur la consommation. Simultanément, les ménages se désendettent comme l’indique la diminution des encours de crédit à la consommation et immobilier. Par conséquent, la consommation sera essentiellement alimentée par le revenu courant, plutôt que par la richesse et le crédit.

L’accès restreint au crédit est un autre frein à une reprise vigoureuse de la demande des ménages et des entreprises. Si les banques ont en grande partie stoppé le resserrement des conditions de crédit, elles n’en sont pas encore à les assouplir. Ces restrictions sur l’offre de crédit sont le résultat de l’impact sur leur bilan des pertes antérieures, dont toutes n’ont pas été provisionnées. Les grandes entreprises ont accès aux marchés de capitaux mais ce n’est pas le cas des petites entreprises, qui se tournent vers des banques également de petite taille (moins de 10 milliards de dollars d’actifs). Or ces dernières supportent une large part des prêts à l’immobilier commercial. Et les risques associés à ces créances nous font craindre que les banques ne restreignent longtemps leur distribution de prêts, freinant le développement des petites entreprises et la création d’emplois. Ce dernier point est préoccupant, les petites entreprises générant près de la moitié des emplois.

Après la destruction nette de près de 8,2 millions d’emplois salariés pendant la récession, le marché du travail semble stabilisé. Les destructions d’emplois ont fortement diminué et nous anticipons une augmentation des créations nettes d’emplois salariés non agricoles au fil de l’année. Toutefois, la baisse du taux de chômage, actuellement très élevé, prendra du temps, car l’amélioration du marché de l’emploi incitera un certain nombre de personnes à rejoindre le rang des actifs.

L’investissement des entreprises devrait continuer de se redresser, mais bien plus lentement qu’au rythme de 19 % enregistré au quatrième trimestre 2009. L’économie compte d’importantes ressources inemployées : taux d’utilisation des capacités 8 points de pourcentage en deçà de sa norme historique, écart négatif de production estimé par le CBO à près de 5 points de PIB. Il ne semble donc pas vraiment nécessaire d’accroître les capacités à ce stade. L’investissement devrait cependant être alimenté dans une certaine mesure par la nécessité de remplacer certains équipements obsolètes. Et à mesure que l’économie se redressera, les entreprises voudront moderniser leur stock de capital, pour maintenir leurs marges bénéficiaires, d’autant que le coût d’usage du capital est plutôt bas actuellement. Les entreprises ont préservé leurs marges durant la crise en réduisant leurs coûts, salariaux en particulier. À mesure que l’emploi se redressera avec la reprise, les entreprises devront chercher ailleurs leurs gains de productivité.

US : diminution de la dette

1100

1200

1300

1400

1500

1600

1700

janv-07 janv-08 janv-09 janv-102350

2400

2450

2500

2550

2600

encours prêts industriels et commerciauxencours crédit conso. (dr.)

Source : Réserve fédérale

milliards de $ milliards de $

US : stabilisation du marché du travail

-800-600-400-200

0200400

janv-05

janv-06

janv-07

janv-08

janv-09

janv-10

4567891011

variation mensuelle emploi salarié non agricoletaux de chômage (dr.)

Source : BLS

milliers %

Page 11: Perspectives Macro 128 Fr

États-Unis

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 11

Les incertitudes autour du paysage politique et réglementaire tempèrent les « esprits animaux » propices à la prise de décision et de risque. L’industrie financière ne connaît toujours pas l’impact qu’aura la réforme de la réglementation sur sa rentabilité. Les entreprises ne savent pas combien elles devront payer au titre de la couverture sociale de leurs salariés dans le cadre de la réforme du système de santé. Une incertitude pèse aussi sur la consommation des ménages aux revenus élevés confrontés à la perspective d’une augmentation de leurs impôts en 2011.

Les stocks, après avoir été massivement réduits pendant la crise, sont devenus un moteur de croissance. Le moindre déstockage a été ainsi responsable de 3,8 points de pourcentage de la progression de 5,6 % du PIB au quatrième trimestre 2009. Leur contribution devrait rester positive sur l’ensemble de 2010, mais dans une moindre mesure.

La situation sur le marché immobilier résidentiel reste fragile, mais s’améliore. Au-delà du soutien temporaire apporté par le crédit d’impôt, ce secteur mettra néanmoins du temps à se redresser. Près d’un quart des emprunteurs doivent davantage à leur banque que la valeur de leur logement. Ces situations de « negative equity » vont continuer de faire monter le niveau des saisies immobilières en 2010. Cette « offre cachée » finira par être mise sur le marché, ce qui nous incite à penser qu’il faudra attendre quelque temps encore la stabilisation des prix.

La croissance modérée de 3 % que nous prévoyons cette année ne permettra d’absorber les ressources inemployées que lentement. L’inflation sous-jacente devrait donc poursuivre sa décélération, cette année, jusqu’en deçà de 1 % en glissement annuel. Les anticipations d’inflation devaient rester ancrées. C’est un point important, la recherche économique ayant mis en évidence leur influence accrue sur l’inflation, tandis que l’influence des ressources inemployées sur le marché du travail aurait diminué3. Nous voyons dans cet ancrage des anticipations d’inflation une crédibilité renforcée de la Fed dans sa capacité à gérer l’inflation. Les anticipations d’inflation pourraient être affectées par l’incertitude croissante autour de la politique monétaire en l’absence d’une expérience similaire pour appréhender les effets retardés de la politique non-standard d’assouplissement du crédit sur la demande globale ou l’inflation. C’est ce qui explique les efforts déployés par la Fed pour expliquer qu’elle dispose d’outils (reverse repo, dépôts à terme et hausse de la rémunération versée sur les réserves excédentaires des banques) pour drainer l’excès de liquidité injecté pendant la crise financière. Préserver l’ancrage des anticipations d’inflation revêt pour la Fed une importance cruciale. Certains intervenants craignent par ailleurs que l’explosion du déficit budgétaire fédéral et l’augmentation de la dette publique n’incitent les autorités à orchestrer un affaiblissement de la devise et une monétisation de la dette. Ce scénario exigerait la complicité de la Fed et serait contraire à son mandat. En outre, M. Bernanke a explicitement rejeté, avec raison, la monétisation des emprunts d’État, qui annihilerait la crédibilité gagnée par la Fed. D’après nous, les perspectives d’inflation modérée, associées à un taux de chômage obstinément élevé, inciteront la Fed à maintenir les Fed funds dans leur fourchette actuelle de 0 % à 0,25 % jusqu’au printemps 2011.

L’explosion du déficit budgétaire soulève des inquiétudes sur la qualité de la signature souveraine et les investisseurs sont attentifs à ce que le déficit retrouve une trajectoire soutenable. Le déficit budgétaire fédéral a gonflé à 10 % du PIB l’année dernière, et dans le cadre du dispositif budgétaire actuel, le Congressional Budget Office (CBO) prévoit qu’il sera ramené à environ 2,75 % du PIB vers le milieu de la décennie, avant de se creuser de nouveau. Ce scénario ne tient pas compte des modifications que le gouvernement souhaite apporter. Selon les estimations de la Maison blanche, ses propositions permettraient au déficit de revenir à environ 4 % du PIB au milieu de la décennie. La dette publique augmenterait jusqu’à avoisiner 73 % du PIB en 2015, contre 40 % en 2008. Tout le monde connaît la solution au problème du déficit. Il faut augmenter les impôts et réduire les dépenses, en particulier les transferts sociaux, comme le programme Medicare. Il revient à la commission bipartite créée par le Président de faire des propositions.

Mike CAREY [email protected]

Etats-Unis (a) 2009 2010 2011T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4

PIB -2,4 3,0 3,1 -6,4 -0,7 2,2 5,6 2,7 2,9 2,5 3,0 3,4 3,4 3,4 2,6Consommation privée -0,6 2,0 2,7 0,6 -0,9 2,8 1,6 2,6 1,8 2,3 2,7 3,1 2,9 2,4 2,6Investiss., équip. & logiciels -16,6 8,6 11,6 -36,4 -4,9 1,5 19,0 9,8 7,0 8,0 9,2 12,0 13,0 16,0 15,0Investissement résidentiel -20,5 2,7 18,6 -38,2 -23,2 18,9 3,7 -9,0 7,8 13,0 14,7 22,0 28,0 15,0 17,9Variation des stocks (b) -0,9 0,5 0,1 -2,4 -1,4 0,7 3,8 0,4 0,4 0,1 0,3 0,3 0,1 0,2 0,1Exportations nettes (b) -0,2 -0,7 -0,5 2,6 1,7 -0,8 0,3 -0,7 -0,1 0,2 -0,3 -0,4 -0,2 0,0 -0,6Taux d'épargne 4,3 4,8 4,8 3,7 5,4 3,9 3,9 4,2 5,1 5,1 5,0 4,8 4,7 4,8 4,7Taux de chômage 9,3 9,6 8,9 8,2 9,3 9,7 10,0 9,7 9,7 9,6 9,5 9,3 9,1 8,8 8,5Inflation (t/t, %) -0,3 2,1 2,1 -2,2 1,9 3,7 2,6 1,7 1,2 1,8 2,5 1,9 2,4 1,8 2,4Balance courante (% PIB) -2,9 -3,5 -3,6 -2,9 -2,8 -2,9 -3,2 -3,3 -3,6 -3,7 -3,5 -3,6 -3,6 -3,6 -3,7(a) données annualisées (b) contribution à la croissance du PIB (en %)

2009 2010 2011

3 Inflation, Inflation Expectations, Money and Monetary policy. Joel Prakken. Macroeconomic advisors presentation, mars 2010.

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États-Unis

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 12

Le taux de chômage va-t-il baisser aussi vite qu’il est monté ?

Une baisse lente du taux de chômage devrait suivre sa montée en flèche pendant la récession. La reprise attendue ne serait pas sans emplois « à la 2001 », mais les emplois créés le seraient en quantités bien moindres que lors d’une phase de reprise cyclique habituelle et, surtout, en quantités insuffisantes pour faire baisser sensiblement le taux de chômage en 2010.

Pendant la récession, le taux de chômage est monté vite (+5,7 points de pourcentage entre son creux de 4,4 % en mars 2007 et octobre 2009) et haut (jusque 10,1 % en octobre 2009, ce qui devrait être son point haut si nos prévisions sont correctes). A quel point cette hausse s’est-elle écartée de la loi d’Okun ? Les entreprises américaines ont-elles licencié plus que nécessaire par rapport à la contraction de leur activité ? Sur quel rythme de croissance faut-il tabler pour, a minima, stabiliser, le taux de chômage ? Quel risque que la croissance de l’emploi soit insuffisante pour absorber l’augmentation de la population active ? Chacune de ces questions fait l’objet d’un débat, rendant d’autant plus difficile la réponse à l’ultime question : de combien et à quelle vitesse le taux de chômage va-t-il baisser à l’horizon des prochains trimestres.

Un marché du travail durement éprouvé par la récession La récession traversée par les Etats-Unis de la fin 2007 à la mi-20094 et la détérioration du marché du travail qui l’a accompagnée sont les plus sévères depuis la Grande Dépression : 8,4 millions d’emplois salariés non agricoles détruits, un pic du taux de chômage à 10,1 % (seulement un point plus bas que le pic atteint au début des années 1980) et un taux de sous-emploi de 17 %, un plus haut historique5. La montée du taux de chômage aurait pu être plus sévère encore n’eût été la baisse d’un peu plus d’un point du taux d’activité, qui s’inscrit en rupture par rapport à sa lente décrue depuis un pic à 67 % début 2000. A 64,8 % début 2010, il se retrouve à un plus bas depuis le milieu des années 1980. Une part disproportionnée de cette baisse s’expliquerait par le retrait des plus jeunes et des moins éduqués, un ajustement de nature conjoncturelle et donc temporaire : dès lors que le marché du travail donnera des signes de reprise, ces personnes reviendront gonfler les rangs de la population active et la baisse attendue du taux de chômage s’en trouvera freinée.

Une application stricte de la loi originale d’Okun aboutit à la conclusion que le taux de chômage a beaucoup plus augmenté durant le second semestre de 2009 que ce que le profil de croissance laissait attendre. La formulation la plus connue de cette loi est la suivante : chaque point de croissance en dessous du rythme tendanciel entraîne une augmentation instantanée du taux de chômage d’un demi-point6. Or, la croissance a été positive aux troisième et quatrième trimestres 2009, et significativement supérieure à sa tendance au quatrième trimestre (de près de 3 points de pourcentage avec une croissance tendancielle estimée à 3 %). Pourtant, le taux de chômage a poursuivi sa hausse (alors qu’il aurait « dû » baisser d’environ 1,5 point). Autre mode de calcul, même conclusion : le PIB était quasiment au même niveau fin 2009 que fin 2008, une stagnation compatible avec une hausse du taux de chômage d’environ 1,5 point, qui, en réalité, a atteint le double. Ces écarts ne sont pas totalement anormaux compte tenu des délais probables d’ajustement. De plus, si le taux de chômage continue bien de monter, il monte malgré tout de moins en moins : quand on met simplement en parallèle la croissance du PIB en glissement annuel et la variation sur un an du chômage, les deux grandeurs ont visiblement évolué en ligne.

US : Taux de chômage

3456789

1011

1965 1972 1979 1986 1993 2000 200734567891011

Sources : BLS, Crédit Agricole S.A.

%

zones grisées :récessions

US : emploi salarié non agricoleavant, pendant, après la récession

9296

100104108112116

T-6 T+6 T+18 T+30 T+42 T+54 T+66déc. 2007 mars 2001 juil. 1990juil 1981 nov. 1973 déc. 1969avril 1960 août 1957

Sources : BLS, Crédit Agricole S.A.

T = 100 = pic d'activité

4 La date du creux d’activité n’a pas encore été officialisée par le NBER mais la récession a probablement pris fin vers la mi-2009. 5 Définition U6 du BLS qui compte également comme chômeurs les personnes ayant abandonné toute recherche active d’un emploi et les travailleurs à temps partiel involontaires. 6 Et cette relation est proportionnelle et symétrique.

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États-Unis

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 13

L’écart entre le taux de chômage observé et celui déduit de la loi d’Okun s’explique par la réalisation de gains de productivité inhabituellement élevés au cours du second semestre de 2009, c’est-à-dire durant les premiers mois de la reprise7. L’analyse des entrées et sorties du chômage permet d’apporter un éclairage supplémentaire sur ce qui a alimenté ces gains de productivité. Sont-ils venus d’une augmentation inhabituelle des licenciements (composante des flux dits entrants8), d’une baisse inhabituelle des embauches (composante des flux sortants9), ou d’une combinaison des deux ? D’après les travaux d’Elsby et alii (2010), la récession de 2008-2009 se distingue des précédentes essentiellement par la baisse continue et très importante des flux sortants10. L’évolution des flux entrants, plus précisément des licenciements, est, elle, similaire aux précédentes grosses récessions et caractéristique justement de leur sévérité : forte progression au début, ralentissement ensuite.

Un lent rétablissement en perspective Quelles conclusions tirer de ces résultats pour le futur ? Le taux de chômage semble bien avoir monté plus que ce que justifiait la contraction de l’activité. La logique voudrait qu’un tel sur-ajustement à la hausse soit rapidement corrigé : tout comme, historiquement, plus sévère est la récession, plus vigoureuse est la reprise, on peut en effet penser que plus la hausse du taux de chômage est excessive pendant la récession, plus son déclin est rapide pendant la reprise. La réalité est néanmoins plus complexe dans la mesure où la nature de la récession importe autant, si ce n’est plus, que son ampleur. Il en va de même pour le taux de chômage dont la baisse dépend de ce qui l’a poussé à la hausse. Et, en l’occurrence, les perspectives sont mitigées.

En effet, la réalisation d’importants gains de productivité, la facilité d’un ajustement de la quantité de travail par une hausse de la durée, la part importante du travail temporaire involontaire, et le manque même de vigueur de la reprise économique anticipée sont autant d’arguments en faveur d’une reprise sans emplois. D’ailleurs, si on considère que le creux d’activité a été atteint en juin 2009 et vu que l’emploi continue de baisser (et le taux de chômage de monter), une telle reprise sans emplois serait d’ores et déjà une réalité. Cette situation ne devrait toutefois pas perdurer : un véritable redémarrage de l’emploi semble en bonne voie. C’est sa vigueur qui pose question, plus exactement celle de la reprise des embauches. A ce jour, on observe bien un ralentissement significatif des licenciements, qui contribue au ralentissement des destructions nettes d’emplois salariés non agricoles, mais les entreprises restent prudentes en matière de recrutements. Elles vont cependant avoir du mal à pousser beaucoup plus loin les gains de productivité déjà réalisés : pour continuer d’accroître leur production, elles vont devoir embaucher de plus en plus. La bonne nouvelle, c’est qu’elles en ont les moyens ; la mauvaise, c’est le dynamisme incertain de la croissance. Et il y a un autre point noir au tableau. La très forte montée du chômage de longue durée fait en effet peser un risque nouveau pour les Etats-Unis, mais bien connu des Européens : le risque d’hystérèse.

Notre scénario coupe la poire en deux entre une vraie reprise sans emplois « à la 2001 » et une vraie reprise cyclique « à l’ancienne » : d’après nous, la croissance va créer des emplois mais en quantités moindres que lors d’une phase de reprise cyclique habituelle et surtout insuffisantes pour faire baisser sensiblement le taux de chômage en 2010.

US : Croissance du PIBet taux de chômage

-4 -2 02468

10

1983 1986 1989 1992 1995 1998 2001 2004 2007 2010-3 -2 -1 01234

croissance taux de chômage (dr.)Sources : BEA, Census bureau, Crédit Agricole S.A.

a/a, %a-a,

point de %

zones grisées : récessions

US : gains de productivité horaire

-1012345678

61-69 82-90 91-01 01-07 09-…années 1 et 2 du cycle années 3 et 4années 5 et 6 années 7 et +récession

Sources : BLS, Crédit Agricole S.A.

t/t % moyen, r.a

7 M. Daly et B. Hobijn, 2010, “Okun’s Law and Unemployement Surprise of 2009”, FRBSF Economic Letter n°2010-07, mars. 8 Ceux qui ont perdu leur emploi, ceux qui l’ont quitté, les nouveaux entrants et les ré-entrants sur le marché du travail viennent gonfler les rangs des chômeurs. 9 Ceux qui quittent la population active (parce qu’ils sont découragés ou pour toute autre raison) et ceux qui trouvent un emploi sortent (des statistiques) du chômage. 10 Cf. M. Elsby, B. Hobijn, et A. Sahin, « The Labor Market in the Great Recession », papier présenté pour le Brookings Panel on Economic Activity, 18-19 mars 2010.

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États-Unis

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 14

Si l’on suit ce que nous dit la loi d’Okun en prévision, avec nos chiffres de croissance marginalement supérieurs au rythme tendanciel, la baisse du taux de chômage ne peut en effet qu’être lente. Un taux de croissance du PIB de 3 % permet de stabiliser le taux de chômage avec environ 150 000 emplois créés par mois (sous l’hypothèse d’une progression tendancielle de la population active de 0,1 % par mois).

Pour obtenir une baisse plus rapide du taux de chômage, le seuil critique des créations nettes mensuelles d’emplois passe à environ 250 000, un chiffre atteignable avec une croissance de 4 % environ ou une croissance moindre mais des gains de productivité plus faibles. C’est tout à fait du domaine du possible (c’est d’ailleurs ce sur quoi nous tablons en 2011). Mais cela n’enlève rien au caractère problématique de la lenteur annoncée de la baisse du taux de chômage. On se souvient que la valeur du cœfficient d’Okun implique qu’à chaque point de croissance au-dessus de la croissance tendancielle est associée une baisse du taux de chômage de 0,5 point. Compte tenu de son niveau actuel, proche de 10 %, et sous l’hypothèse raisonnable d’une croissance réelle moyenne de 3,5 % et d’une croissance potentielle de 3 %, le délai pour revenir au niveau de 5 % jugé normal pour les Etats-Unis serait de dix ans ! Ce délai tombe en revanche à environ deux ans si la cible de taux de chômage est remontée à 7 % et sous l’hypothèse d’une croissance réelle observée de 5 % et d’une croissance potentielle réduite à 2 %.

Hélène BAUDCHON [email protected]

US : créations et destructions d'emplois privés

55006000650070007500800085009000

92 94 96 98 00 02 04 06 08 1055006000650070007500800085009000

créations destructions

milliers, cvs

Sources : BLS (enquête BED), Crédit Agricole S.A.

zones grisées : récessions

US : Croissance du PIB et emploi

-5

-3

-1

1

3

5

7

1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 2011-600 -500 -400 -300 -200 -100 0100200300400500

croissance emploi (dr.)Source : BEA, BLS, Crédit Agricole S.A.

a/a, % variation mensuelle, mm12, milliers

zones grisées : récessions

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Japon

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 15

Une croissance plus équilibrée en vue

La reprise économique entamée au deuxième trimestre 2009 reste principalement alimentée par la consommation et les exportations, qui bénéficient des diverses mesures de soutien prises au Japon ou ailleurs. Nous prévoyons une croissance plus équilibrée de l’économie japonaise en 2010, grâce, enfin, au redressement cyclique de l’investissement.

Le PIB réel s’est contracté en 2009 à un rythme historique de 5,2 %, sous l’impact de l’effondrement de l’investissement et des exportations. Toutefois, la reprise économique qui a débuté au deuxième trimestre 2009 devrait selon nous se poursuivre au cours des prochaines années et le PIB réel devrait enregistrer une croissance de 1,9 % en 2010 et 1,6 % en 2011. L’économie japonaise devrait ainsi dépasser son potentiel à long terme de 1,5 %. Si la reprise économique reste principalement alimentée par la consommation et les exportations, qui bénéficient des divers dispositifs de relance mis en place par le Japon et d’autres pays, nous prévoyons une croissance plus équilibrée de l’économie japonaise au cours des prochaines années. Notre prévision d’une croissance du PIB réel de 1,9 % en 2010 s’appuie sur une reprise de l’investissement dans le courant de l’année. Après une contraction plus marquée et plus longue que nous ne l’avions anticipé initialement, en raison de l’effondrement de la demande non seulement intérieure, mais extérieure, aussi, l’ajustement baissier de l’investissement productif semble tirer à sa fin. En outre, la croissance régulière des exportations, la hausse du taux d’utilisation des capacités et le redressement de la rentabilité des entreprises devraient accélérer la reprise de l’investissement. Enfin, des conditions monétaires accommodantes associées à la liquidité accumulée concourront à inciter les entreprises à s’équiper. En conséquence, nous prévoyons une croissance positive de l’investissement de 0,1 % en 2010 et de 4,9 % en 2011, après une contraction de 19,3 % en 2009. Le redressement du PIB réel entraînera une diminution des pressions déflationnistes. La récession mondiale a aggravé la crise économique du Japon à travers l’effondrement de la demande d’exportations et a considérablement amplifié le déficit de production, entraînant l’émergence de tensions déflationnistes. La croissance du PIB réel à un rythme supérieur à son potentiel à long terme va permettre de résorber le déficit de production et de dissiper les pressions déflationnistes à l’œuvre. Les indices de prix portent déjà la marque de cette évolution, la déflation de l’indice « noyau dur » des prix à la consommation s’étant stabilisée à –1,3 % en rythme annuel en janvier, alors qu’elle avait atteint –2,5 %, en rythme annuel, toujours, en août 2009. Si les tensions déflationnistes vont continuer à se dissiper sous l’impact de la reprise économique, militant pour le retour à une croissance nominale positive du PIB pour la première fois depuis 2007. Sur le front budgétaire, depuis l’arrivée au pouvoir du parti démocrate en septembre, l’attention s’est concentrée sur la nécessité d’orchestrer la reprise économique aux dépens de la définition d’axes budgétaires de moyen terme. En conséquence, un nouveau budget expansionniste de 92 300 milliards JPY a été adopté pour l’exercice 2010, après 102 600 milliards JPY en 2009 (y compris les deux rallonges budgétaires). L’association d’un redressement limité des recettes fiscales et d’un budget de grande envergure se traduira inévitablement par le maintien d’une impasse conséquente des comptes publics. Le gouvernement va donc se trouver dans l’obligation de ramener la dépense à un niveau cohérent avec celui des recettes fiscales. Dans cette optique, il sera contraint d’adopter une mesure impopulaire : taxer davantage la consommation. Il devra cependant attendre pour accroître la pression fiscale sur la consommation que la croissance se soit stabilisée et pérennisée. Sur le front monétaire, des pressions de plus en plus fortes incitent la Banque du Japon à prendre d’autres mesures accommodantes. Nous pensons toutefois qu’elle conservera ses perspectives optimistes sur l’évolution de l’économie et le niveau de la déflation et s’abstiendra par conséquent de recourir aux dispositifs d’assouplissement quantitatif utilisés par le passé. La Banque du Japon n’a eu recours à « l’assouplissement quantitatif » qu’entre mars 2001 et mars 2006, avec pour résultat un crédit bancaire toujours poussif et un noyau dur des prix à la consommation solidement en territoire négatif. La Banque n’a pas oublié cette expérience malheureuse et, tout en maintenant son taux directeur à 0,10 % en 2010, elle continuera de concentrer son intervention sur ses opérations spéciales de prêt à taux fixe à trois mois commencées en décembre 2009. Toutefois, avec la poursuite des mesures budgétaires expansionnistes, les pressions vont s’accumuler sur le front politique l’incitant à augmenter le montant de ses achats directs d’emprunts d’État.

Susumu KATO [email protected]

Japon : contribution à la croissance du PIB

Dép

ense

s pu

bliq

ues;

0,

3

Trav

aux

publ

ics;

0,1

Con

som

mat

ion;

1,7

Loge

men

t; -0

,6

Inve

stis

sem

ent;

-0,7

Expo

rtatio

ns; 3

,4

Con

som

mat

ion

; -0,

6

-1,0-0,50,0

0,51,0

1,52,02,5

3,03,54,0

% t/t

Source : Cabinet Office

Japon (a) 2009 2010 2011T1 T2 T3 T4

PIB -5,0 1,9 1,6 0,4 0,3 0,3 0,5Consommation privée -1,0 2,1 1,3 0,4 0,2 0,3 0,2Investissement -19,3 0,1 4,9 0,4 0,8 1,2 1,7Variation des stocks (b) -0,1 -0,1 0,1 0,3 0,0 0,0 0,1Exportations nettes (b) 1,1 0,3 0,1 0,2 0,1 0,0 0,0Production industrielle -22,5 14,3 6,9 25,2 16,4 9,5 6,1Taux de chômage 5,3 4,8 4,5 4,9 4,9 4,8 4,7Inflation (Core CPI, a/a, %) -1,3 -0,8 -0,5 -1,2 -0,8 -0,5 -0,5Dette publique (% PIB) 184 197 203(a) données annualisées (b) contribution à la croissance du PIB (en %)

2010

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UEM

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 16

Une reprise à deux vitesses : le centre versus la périphérie

La croissance en zone euro a ralenti au quatrième trimestre 2009 (+0,1 % t/t). La reprise va se poursuivre. Elle sera plus lente et fragilisée par l’hétérogénéité croissante entre les pays membres de la zone euro, du fait de l’assainissement des finances publiques et des freins structurels. La croissance s’établirait à 0,9 % en 2010 et 1,2 % en 2011.

La croissance en zone euro a marqué le pas au quatrième trimestre 2009 (+0,1 % t/t, après +0,4 % au T3). Ce ralentissement tient essentiellement à la faiblesse de la demande domestique. L’investissement a continué à se replier (-0,8 % t/t). La consommation privée a stagné. En revanche, les exportations nettes ont contribué positivement à la croissance (+0,3 point). Parmi les principales économies de la zone euro, seule la France a enregistré une progression de son PIB (+0,6 % t/t). L’activité a stagné en Allemagne. Le PIB italien est repassé en territoire négatif (-0,3 % t/t, après +0,5% t/t au T3) et l’Espagne s’est maintenue en récession pour le sixième trimestre consécutif (-0,1 % t/t, après -0,3 % t/t au T3). Au total, sur l’ensemble de l’année 2009, la zone euro a enregistré sa plus forte contraction du PIB depuis l’après Guerre (-4 %).

Le freinage de l’activité en fin d’année 2009 ne remet pas en cause fondamentalement notre scénario de reprise cyclique. Les niveaux des enquêtes de confiance à la fin du premier trimestre 2010 sont supérieurs à ceux du quatrième trimestre 2009, signe que les rythmes d’activité ont accéléré. Les données « dures » signalent, quant à elles, un rebond de l’activité industrielle.

Cependant, les évolutions économiques et financières de ce début d’année suggèrent que la reprise qui se dessine sera plus fragile, plus incertaine, et caractérisée par une hétérogénéité croissante entre les pays membres de la zone euro : d’un côté le « centre » (Allemagne, France, Pays-bas, Belgique et dans une moindre mesure Italie), et de l’autre la « périphérie » (Espagne, Grèce, Portugal et Irlande). Le schéma d’une reprise « classique », tirée par les exportations nettes, devrait certes se poursuivre, mais il sera beaucoup plus lent que nous l’avions anticipé lors de notre précédent exercice de prévision. En moyenne, nous prévoyons une croissance de 0,9 % en 2010 (contre 1,2 % auparavant) et 1,2 % en 2011 (contre 1,6 % auparavant).

Les craintes sur la soutenabilité des finances publiques, en particulier en Grèce et plus généralement dans les pays dits de la « périphérie » du sud (Espagne et Portugal), se sont matérialisées beaucoup plus vite que prévu. La consolidation des finances publiques se fera donc plus tôt, et pèsera sur les économies encore convalescentes de ces pays dès cette année et en 2011. Arithmétiquement, le freinage de la croissance dans ces pays affectera l’ensemble de la zone euro (Espagne, Grèce, Portugal et Irlande représentent 17,9 % du PIB de la zone euro). La contagion aux autres économies de la zone euro se fera également via les échanges commerciaux intra-régionaux. Les programmes de stabilité pour 2010-2013 des autres économies de la zone euro (Allemagne, France et Italie notamment) indiquent un assainissement des finances publiques plus progressif à partir de l’année prochaine, mais les dépenses publiques seront réduites significativement. En conséquence, nous prévoyons une nette modération de la consommation publique en 2011.

UEM : demande domestique(conso. publique et privée + investissement)

-8 -6 -4 -2 0246

07 08 09 10 11Allemagne FranceItalie Espagne

Sources : Eurostat, Crédit Agricole S.A.

a/a %

UEM : centre versus périphérie

-6,0

-4,0

-2,0

0,0

2,0

2009 2010 2011Allemagne Espagne FranceGrèce Italie Portugal

a/a %

Sources : Eurostat, Crédit Agricole S.A.

Prévisions

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UEM

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 17

Dans l’ensemble, notre scénario central table sur une demande domestique peu allante au cours des prochains trimestres. Dans un contexte de dégradation continue du marché du travail (taux de chômage prévu à 10,5 % fin 2010, contre 9,9 % en janvier), la consommation privée restera modérée, la faiblesse des revenus salariaux pesant sur le pouvoir d’achat des ménages. De plus, la consommation privée sera pénalisée par l’arrêt ou la réduction des mesures de soutien public (primes à la casse notamment) et les hausses des taux d’imposition prévues dans certains pays (TVA en Espagne et en Grèce, et impôt sur le revenu au Portugal).

Le redressement de l’investissement productif s’annonce lent. Le cycle de productivité est en effet affecté par les ajustements atypiques de l’emploi intervenus au cours de la « grande » récession (rétention de main d’œuvre, mesures publiques en faveur du chômage partiel en particulier en Allemagne et dans une moindre mesure en France). Les surcapacités des entreprises atteignent des niveaux historiques et la demande interne est peu vigoureuse. Nous n’envisageons une véritable reprise de l’investissement production qu’à partir du second semestre 2011.

Le commerce extérieur restera le véritable moteur de l’activité. Les exportations vont profiter du dynamisme de l’activité dans le reste du monde (en particulier, dans les pays émergents et, dans une moindre mesure, aux Etats-Unis). La dépréciation présente et anticipée de l’euro devrait également renforcer la compétitivité des exportations.

La balance des risques entourant notre scénario central apparaît relativement équilibrée. D’un côté, un assainissement généralisé et plus marqué des finances publiques en zone euro, sous la pression notamment des marchés financiers, pourrait faire rechuter l’activité (« double dip »). De l’autre, un rebond plus important des exportations, tiré par une demande mondiale plus vigoureuse que prévu, pourrait avoir des effets d’entraînement sur l’investissement, l’emploi et la demande interne avec l’enclenchement d’un processus auto-entretenu de croissance.

Olivier BIZIMANA [email protected]

UEM 2009 2010 2011T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4

PIB -4,0 0,9 1,2 -2,5 -0,1 0,4 0,1 0,3 0,2 0,2 0,3 0,3 0,3 0,4 0,4Consommation privée -1,0 0,4 0,8 -0,5 0,1 -0,2 0,0 0,2 0,2 0,1 0,2 0,2 0,2 0,3 0,3Investissement -11,0 -1,2 1,7 -5,4 -1,7 -0,9 -0,8 0,0 0,1 0,3 0,3 0,4 0,5 0,6 0,6Variation des stocks (a) -1,2 0,2 0,0 -0,9 -0,6 0,5 0,0 0,2 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0Exportations nettes (a) -0,8 0,4 0,3 -0,3 0,7 0,0 0,3 -0,1 0,0 0,1 0,1 0,1 0,1 0,1 0,1Production industrielle -14,7 1,9 2,1 -7,6 -2,6 0,8 2,0 2,9 -3,8 0,3 2,5 2,6 -3,0 0,2 2,5Taux de chômage 9,4 10,4 10,5 8,8 9,3 9,6 9,9 10,2 10,3 10,4 10,5 10,6 10,6 10,4 10,3Inflation (a/a, %) 0,3 1,1 1,7 1,0 0,2 -0,4 0,4 0,9 0,9 1,2 1,3 1,5 1,6 1,7 1,8

(a) contribution à la croissance du PIB (en %)

2009 2010 2011

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UEM

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 18

Focus : retournement conjoncturel et chômage - le centre versus la périphérie de la zone euro

Les marchés du travail nationaux en zone euro semblent avoir réagi de manière différente au récent retournement conjoncturel. Les équations d’Okun suggèrent qu’il faut en moyenne un taux de croissance du PIB plus élevé dans les pays de la périphérie pour réduire le taux de chômage.

Croissance et taux de chômage en zone euro au cours de la récente récession L’ampleur de la récession en zone euro en 2008-2009 soulève des questions quant à ses effets sur le marché du travail et leur persistance. Au cours de la récente récession, le taux de chômage de l’ensemble de la zone euro a en effet augmenté de 2 points entre le premier trimestre 2008 (pic d’activité) et le deuxième trimestre 2009 (point bas de l’activité), alors que le PIB a chuté de 5,2 % sur la même période. En d’autres termes, la hausse du taux de chômage semble avoir été relativement contenue, au regard de l’ampleur de la chute d‘activité. En moyenne, pour chaque baisse d’un point du PIB, le taux de chômage a augmenté de 0,4 point.

Par ailleurs, on constate des hétérogénéités parmi les différents pays membres de la zone euro. Les marchés du travail nationaux semblent en effet avoir réagi de manière différente au récent retournement conjoncturel (cf. graphique p.19). Deux groupes se distinguent : d’une part les pays dits du centre (l’Allemagne, l’Italie, les Pays-Bas et, dans une moindre mesure, la France), dont le taux de chômage a connu une hausse relativement modérée malgré une forte chute du PIB. Et d’autre part, les pays dits de la périphérie dont la croissance a fortement baissé et le taux de chômage a augmenté plus fortement que la moyenne de la zone euro : notamment l’Espagne et l’Irlande. La Grèce et le Portugal sont, quant à eux, entrés en récession un peu plus tard que le reste de la zone euro (respectivement au T4 2008 et T3 2008). Le chômage dans ces pays a certes augmenté moins que la moyenne de la zone euro, mais plus fortement que dans la plupart des pays du centre qui, pourtant, ont enregistré une baisse de l’activité plus importante.

Les facteurs d’hétérogénéité Les hétérogénéités d’ajustement du chômage constatées entre les différents pays de la zone euro tiennent à plusieurs facteurs :

• les législations du marché du travail : degré de protection et nombre de salariés protégés ; importance des emplois temporaires (CDD, intérim) dans l’emploi total. • les politiques économiques menées en matière d’emploi : allégement des cotisations sociales, subventions des heures supplémentaires et du chômage partiel. • les types de relation entre les partenaires sociaux : modes de négociations salariales (collectives, au niveau des branches, individuelles, indexation des salaires, etc.).

En particulier, au cours de la crise actuelle, plusieurs pays ont mis en place des politiques visant à sauvergarder l’emploi. Les mesures incitant les entreprises à développer le chômage partiel ont ainsi permis de limiter la chute de l’emploi, et donc la hausse du chômage, en Allemagne, et dans une moindre mesure en France.

Les comportements des entreprises ont également contribué à limiter la hausse du taux de chômage au début de la chute de l’activité. Dans la première phase du retournement cyclique, les chefs d’entreprise préfèrent, traditionnellement, conserver leurs salariés en poste. C’est un moyen de préserver le capital humain (ou le savoir faire) dans l’entreprise et d’éviter par la suite des coûts de recrutement et de formation. Les entreprises réduisent en premier lieu l’emploi intérimaire et les CDD, puis les heures supplémentaires. Elles ont ensuite recours au chômage partiel, notamment si cette solution est encouragée par les pouvoirs publics.

Les équations d’Okun pour comprendre les hétérogénéités au sein de la zone euro Quel taux de croissance permet de réduire le taux de chômage ? La relation entre la croissance du PIB et celle du taux de chômage est généralement décrite dans la littérature par la « loi d’Okun ». La relation de base d’Okun permet d’appréhender la corrélation entre la croissance du PIB et les mouvements du taux de chômage. Autrement dit, elle permet de relier les évolutions de l’activité et celles du taux de chômage.

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UEM

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 19

Elle est exprimée sous la forme suivante :

ΔUt= α + β *ΔPIBt ΔUt est la variation du taux de chômage et ΔPIBt le taux de croissance du PIB.

Le paramètre β est appelé « cœfficient d’Okun ». Ce dernier est négatif, de sorte qu’une accélération de la croissance du PIB correspond à une baisse du taux de chômage. Inversement, une baisse ou un ralentissement de l’activité se traduit par une montée du taux de chômage. Le ratio « -α/β » donne le taux de croissance du PIB compatible avec un taux de chômage stable. En d’autres termes, il s’agit d’un « seuil critique », c’est-à-dire le rythme de progression de l’activité nécessaire pour maintenir un niveau donné de taux de chômage.

Les calculs du cœfficient d’Okun sur longue période Le tableau ci-dessous présente les estimations des équations d’Okun pour la zone euro dans son ensemble, ainsi que pour les principales économies du centre (Allemagne, France et Italie) et de la périphérie (Espagne, Grèce, Portugal et Irlande) sur la période 1970-2007.

• Selon les résultats des estimations, pour l’Allemagne et la France, une croissance nulle du PIB au cours d’un trimestre (β=0) est associée à une hausse du taux de chômage de l’ordre de 0,17 point de pourcentage sur le trimestre. Ce chiffre est nettement plus élevé en Espagne (0,55 point) et en Irlande (0,4 point).

• Le taux de croissance du PIB compatible avec un taux de chômage constant est de l’ordre de 3 % en France et en Allemagne. Un taux de croissance du PIB supérieur à ce rythme coïncide donc à une baisse du chômage. Inversement, un rythme de croissance plus faible induit une hausse du taux de chômage. Parmi les pays retenus, l’Irlande et la Grèce sont les pays qui doivent avoir le taux de croissance le plus élevé (respectivement 4,9 % et 4,5 %) pour maintenir leur taux de chômage constant.

• La valeur du cœfficient d’Okun implique que pour chaque point de pourcentage au-dessus de 3,1 % (« -α/β ») est associée une baisse du taux de chômage de 0,06 point de pourcentage en Allemagne et en France (« β »). En Espagne, le taux de chômage baisse plus fortement (-0,2 point) pour chaque point de pourcentage au dessus du seuil critique. Ce seuil est relativement similaire à celui de la France et de l’Allemagne (3 %).

En résumé, on constate qu’une stagnation du PIB dans les pays du centre (Allemagne et France en particulier) entraîne une hausse du taux de chômage plus modérée (0,17 point) que dans les pays de la périphérie, notamment en Espagne et en Irlande (respectivement 0,55 et 0,40).

La hausse du cœfficient d’Okun dans la période récente L’estimation des équations d’Okun sur la période récente (1997-2007) indique que les caractéristiques des économies de la zone euro ont changé (cf. tableau 2).

• Le seuil de croissance au-dessus duquel les économies allemande et française créent des emplois a baissé de 3,1 %, à respectivement 1,4 % et 1,7 % depuis la fin des années 1990. Dans les pays de la périphérie, le seuil critique a également baissé : le taux de croissance requis pour stabiliser le taux de chômage est ainsi passé de 4 % au Portugal à 2,3 %.

• Le cœfficient d’Okun a augmenté : pour chaque point de pourcentage au dessus du seuil critique de croissance («-α/β») est associée une baisse du taux de chômage de l’ordre de 0,13 point de pourcentage en Allemagne et en France, contre 0,06 point auparavant. En d’autres termes, les économies allemande et française se sont enrichies en emploi.

UEM : variation du PIB et du taux de chômage

UEM

Allemagne

FranceItalie

Espagne

Pays-Bas

Grèce Portugal

Irlande

0

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

-10 -8 -6 -4 -2 0

Variation du PIB: T1 08 - T3 09 (%)

Varia

tion

du ta

ux d

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ômag

e :

T1 0

8 - T

3 09

(poi

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e)

Sources : Eurostat, Crédit Agricole S.A.

Page 20: Perspectives Macro 128 Fr

UEM

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 20

Néanmoins, les résultats des équations d’Okun suggèrent qu’il faut en moyenne un taux de croissance du PIB plus élevé dans les pays de la périphérie pour réduire le taux de chômage, même si en tendance et pour tous les pays ce rythme a baissé.

Comment expliquer l’augmentation du cœfficient d’Okun depuis les années 1990 ? La hausse du cœfficient d’Okun traduit l’enrichissement de la croissance en emplois en zone euro depuis les années 1990. Autrement dit, la productivité par tête a fortement ralenti ces dernières années : en moyenne sur la période 2000-2007, les gains de productivité en Allemagne et en France s’élevaient à respectivement 1 % et 1,1 %, contre respectivement 1,6 % et 1,4 % entre 1992 et 1999. Ce phénomène est également notable dans les pays de la périphérie. Par exemple en Espagne, les gains de productivité par tête étaient négatifs sur la période 2000-2007 (-0,4 %), alors qu’ils s’établissaient en moyenne autour de 1 % au cours des années 1990.

Dans l’ensemble, le ralentissement de la productivité par tête tient à plusieurs facteurs :

• l’augmentation de la part des activités à faibles gains de productivité (construction et services) ; • les politiques de l’emploi mises en œuvre dans certains pays (dispositifs en faveur du temps partiel,

emplois aidés en France par exemple, etc.) ; • le recours accrû à des emplois temporaires (intérim, CDD).

Olivier BIZIMANA Axelle LACAN [email protected] [email protected]

Pays α β R² -α/β

UEM (a) 0,26 -0,13 0,68 2,03(9,26)*** (-12,92)***

Allemagne 0,18 -0,06 0,28 3,04(4,82)*** (-4,91)***

France 0,17 -0,06 0,18 3,05(5,76)*** (-4,21)***

Italie 0,06 -0,02 0,02 3,16(-1,47) (-1,51)

Espagne 0,55 -0,18 0,51 2,99(8,87)*** (-10,51)***

Irlande 0,40 -0,08 0,19 4,89(3,46)*** (-4,42)***

Grèce 0,08 -0,02 0,11 4,52(1,83)* (-2,25)**

Portugal 0,15 -0,04 0,05 4,03(3,37)*** (-3,01)**

Source: Estimation CA,

*** (**, *) signif icatif au seuil de 1 (5, 10) %,U: taux de chômage; PIB: PIB réel; β=coefficient d'Okun,

Tableau 1 : Estimation des équations d'Okun sur longue période∆U=α+β∆ ln(PIB)+ε

Période d'estimation : T1 1970 - T4 2007

Les statistiques de Student sont entre parenthèses,

-α/β: taux de croissance du PIB réel nécessaire pour réduire le taux de chômage, (a): période d'estimation: 1991-2007

∆ seuil Pays α β R² -α/β critique

UEM 0,19 -0,11 0,72 1,64 -0,39(6,78)*** (-10,42)***

Allemagne 0,17 -0,12 0,47 1,43 -1,61(3,25)*** (-4,82)***

France 0,22 -0,13 0,39 1,74 -1,31(3,51)*** (-4,91)***

Italie -0,04 -0,05 0,15 -0,95 -4,10(-1,54) (-2,53)**

Espagne 0,66 -0,23 0,29 2,91 -0,07(2,63)** (-3,59)***

Irlande 0,28 -0,06 0,19 4,40 -0,49(4,14)*** (-4,75)***

Grèce 0,20 -0,06 0,08 3,27 -1,25 (-1,37) (-2,09)**

Portugal 0,23 -0,10 0,17 2,37 -1,65(2,56)** (-2,95)**

Source: Estimation CA;

*** (**, *) signif icatif au seuil de 1 (5, 10) %,U: taux de chômage; PIB: PIB réel; β=coefficient d'Okun,

Tableau 2 : Estimation des équations d'Okun dans les périodes récentes

∆U=α+β∆ ln(PIB)+εPériode d'estimation : T1 1997- T4 2007

Les statistiques de Student sont entre parenthèses,

-α/β: taux de croissance du PIB réel nécessaire pour réduire le taux de chômage

Page 21: Perspectives Macro 128 Fr

France

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 21

Lendemains de fête

La croissance française a accéléré en fin d’année 2009 (+0,6 % t/t). Après une telle performance, l’activité se tassera au premier trimestre 2010 (+0,1 % t/t). Elle devrait rester par la suite bridée par un taux de chômage élevé, un assainissement nécessaire des finances publiques et un cycle de productivité atypique. En moyenne, le PIB progresserait de 1,1 % en 2010 et 1,3 % en 2011.

En fin d’année 2009, la France a affiché un taux de croissance flatteur de 0,6 % t/t, grâce à une consommation des ménages très dynamique (+0,9 % t/t) et une contribution positive des stocks (+0,9 point). Belle performance, certes, mais performance temporaire. Nous prévoyons un taux de croissance de 0,1 % t/t au premier trimestre 2010. La consommation privée devrait en effet stagner, les ménages ayant anticipé en fin d’année leurs achats d’automobiles, pour profiter de la prime à la casse dans sa totalité. L’investissement continuerait à peser sur la croissance mais moins lourdement (-0,4 % t/t), à en croire notamment la dernière enquête Insee dans l’industrie. Les chefs d’entreprise devraient finir par reconstituer leurs stocks (+0,2 % t/t). Enfin, le faible niveau des opinions des industriels sur leurs carnets de commandes étrangères suggère que les exportations peineront à soutenir l’activité (contribution des exportations nettes attendue à -0,2 % t/t). Passé ce trimestre de « correction technique », nous prévoyons une croissance modeste du PIB, de l’ordre de 1,1 % en 2010 et 1,3 % en 2011. Taux de chômage élevé, assainissement des finances publiques et cycle de productivité atypique devraient brider la croissance française en cette sortie de crise. Le taux de chômage, qui a atteint 9,6 % en France métropolitaine au quatrième trimestre 2009, est attendu en hausse jusqu’au troisième trimestre 2010 (pic à 10,1 %). La consommation privée devrait donc rester modérée (en moyenne, +1,2 % en 2010 et +1 % en 2011). En 2010, elle continuera à bénéficier du soutien public. En revanche, l’objectif d’apurement des finances publiques devrait légèrement peser sur la consommation des ménages début 2011 (arrêt des mesures d’aide gouvernementales et suppression annoncée de niches fiscales). Il faudra attendre fin 2011 pour que la consommation privée renoue avec des rythmes de croissance trimestriels plus dynamiques, grâce à une baisse prévisible du taux d’épargne, en lien avec le recul du chômage. L’inflation, qui devrait être modérée tout au long de la période de prévision, restera un allié du pouvoir d’achat. En ligne avec ces prévisions d’inflation maîtrisée, les taux d’intérêt devraient rester accommodants en 2010, permettant la stabilisation de l’investissement résidentiel des ménages. Si le programme de stabilité français ne devrait avoir qu’un impact limité sur la consommation privée, aucune annonce de hausse d’impôts n’ayant été faite, il en sera tout autrement sur la consommation publique, dont le freinage est attendu en 2011 (en moyenne, 0,5 % en 2011, contre 1,8 % en 2010). Un ris-que baissier entoure notre prévision. La Commission européenne reste sceptique face à ce plan d'assai-nissement des finances publiques. Les mesures annoncées pour réduire à 3 % le déficit à horizon 2013 sem-blent insuffisantes et assises sur des hypothèses de croissance trop optimistes (2,5 % à compter de 2011). Au vu de cette mise en garde, il est possible d’assister à un freinage plus marqué des dépenses publiques en 2011. Face à ces perspectives modérées de demande, les entreprises devraient faire le choix de reconstituer leurs gains de productivité. Ceux-ci ont chuté lourdement pendant la grande récession de 2008, en lien avec le faible ajustement de l’emploi. Ils pèsent aujourd’hui sur la dynamique de la reprise, en limitant par exemple la compétitivité française. Les reconstituer devient donc une priorité. L’investissement, notamment de productivité, devrait ainsi peu à peu se rétablir. La suppression de la taxe professionnelle, en contribuant à améliorer la profitabilité des entreprises, devrait donner un coup de pouce à ce rétablissement. L’investissement des sociétés ne redeviendrait cependant un moteur de la croissance qu’en 2011. Les taux d’utilisation des capacités de production sont en effet ancrés à un bas niveau et les taux d’endettement des entreprises restent élevés. Dans ce contexte économique de demande domestique bridée, le cycle des stocks devrait apporter un soutien opportun à la croissance en 2010 (+0,8 %). Nous pourrions également être surpris positivement par la contribution du commerce extérieur. Un risque haussier entoure en effet nos prévisions (-0,6 % en 2010 et 0 % en 2011). Certes, la concrétisation récente et prématurée des craintes sur les finances publiques, notamment dans les pays d’Europe du sud, justifie une certaine prudence quant aux exportations. Mais la reprise vigoureuse des économies dans le reste du monde (en Chine par exemple) pourrait dynamiser le commerce extérieur de la France et donc son taux de croissance.

Axelle LACAN [email protected]

France 2009 2010 2011T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4

PIB -2,2 1,1 1,3 -1,4 0,3 0,2 0,6 0,1 0,2 0,2 0,3 0,3 0,3 0,4 0,4Consommation privée 0,8 1,2 1,0 0,2 0,3 0,1 0,9 0,0 0,3 0,1 0,3 0,2 0,2 0,4 0,5Investissement -6,9 -2,0 1,4 -2,5 -1,0 -1,3 -1,1 -0,4 0,0 0,3 0,4 0,4 0,4 0,5 0,5Variation des stocks (a) -1,4 0,8 0,1 -0,7 -0,6 -0,1 0,9 0,2 0,1 0,1 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0Exportations nettes (a) -0,2 -0,6 0,0 -0,2 0,9 0,4 -0,8 -0,2 -0,2 -0,1 0,0 0,1 0,1 0,0 0,0Production industrielle -12,9 -1,0 0,0 -8,1 0,4 3,5 0,2 -5,9 1,4 5,6 -2,8 -4,7 1,9 6,1 -2,3Taux d'épargne 16,6 16,5 16,0 16,0 16,7 17,0 16,5 16,8 16,4 16,4 16,2 16,1 16,2 15,9 15,7Taux de chômage 9,1 10,0 9,9 8,6 9,1 9,1 9,6 9,7 10,0 10,1 10,1 10,0 10,0 9,9 9,8Inflation (a/a, %) 0,1 1,3 1,6 0,6 -0,2 -0,4 0,4 1,1 1,3 1,4 1,6 1,6 1,6 1,6 1,5 (a) contribution à la croissance du PIB (en %)

2009 2010 2011

Page 22: Perspectives Macro 128 Fr

Allemagne

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 22

Vices et vertus

Le modèle allemand basé sur un secteur exportateur dynamique et compétitif va prouver son efficacité en sortie de crise, avec une croissance qui va superformer celle de la zone euro. La pression continue de s’exercer sur le consommateur allemand lequel, malgré des mesures gouvernementales d’accompagnement, ne devrait pas se montrer très prodigue.

L’économie allemande, plus cyclique par nature, car plus ouverte sur l’extérieur (poids des exportations dans le PIB de 47 %, contre seulement 26 % en France) est sans doute le pays de la zone euro le plus à même de profiter de la reprise mondiale.

Le modèle allemand devrait en effet prouver son efficacité en sortie de crise avec une croissance économique qui va superformer le reste de la zone euro en 2010 (1,6 % en moyenne pour l’Allemagne, contre 0,9 % en zone euro). Grâce à une compétitivité prix élevée, les exportateurs vont pouvoir sécuriser leurs gains de parts de marchés. Cependant, si les exportations allemandes sur les marchés en croissance, le plus souvent logés dans la sphère émergente, vont générer des revenus en progression, le commerce à destination de la zone euro (plus de 40 % du total des exportations) risque lui de patiner. En particulier, les marchés autrefois dynamiques et porteurs, comme ceux de l’Espagne, de la Grèce ou de l’Irlande (soit environ 5 % du total des exportations), vont marcher durablement au ralenti sans compter que les autres débouchés intra-zone ne vont pas briller par leur vitalité. Ajoutez-y les 6 % à destination du Royaume-Uni et c’est une grosse partie du commerce allemand dont la dynamique a toutes les chances d’être durablement enrayée.

La segmentation sectorielle de l’Allemagne ne devrait pas non plus aider. Les ventes d’automobiles représentent environ 20 % du total des exportations. Les constructeurs allemands ont profité à plein de l’effet d’aubaine des primes à la casse. Mais avec l’arrêt de ces programmes, le contrecoup s’est déjà fait ressentir et, à sa suite, la dynamique des ventes s’annonce molle dans un environnement où les dépenses des ménages restent un peu partout contraintes (désendettement, chômage élevé et faible disponibilité du crédit). L’Allemagne est également spécialisée dans les biens d’investissement (environ 15 %), alors que les excès de capacités hérités de la crise ne plaident pas en faveur d’un rebond vigoureux de ce côté, hormis quelques débouchés prometteurs dans la sphère émergente. Au total, les exportations devraient selon nos prévisions progresser de 1,4 % t/t en moyenne chaque trimestre en 2010, après des rebonds marqués de plus de 3 % t/t en fin d’année dernière.

Ce rythme de reprise des exportations n’étant pas spécialement rapide et les taux d’utilisation des capacités toujours très bas, il est peu probable que les dépenses d’investissement se redressent significativement même si le fort ajustement de 2009 (-8,8 % en moyenne annuelle) appelle une correction. Nous tablons sur un lent redémarrage de l’investissement productif en Allemagne ces deux prochaines années avec des progressions annuelles moyennes de 1,4 % et 2,5 %, successivement en 2010 et 2011.

Le modèle allemand a cependant des revers. La disette salariale nécessaire à la préservation des gains de compétitivité pèse depuis longtemps sur la consommation des ménages, même en phase montante du cycle. Avec la crise, le gouvernement a agi pour protéger l’emploi en obtenant en échange peu de revendications salariales de la part des syndicats, le fameux consensus social allemand. Cet amortisseur n’a pas empêché la consommation de replonger dans le rouge une fois les effets des primes à la casse dissipés et la reprise s’annonce laborieuse. Certes, les baisses d’impôts (25 Mds €) et la reconduction des mesures de soutien à l’emploi en 2010 sont des facteurs positifs mais, a contrario, les perspectives économiques incertaines et la remontée inexorable, quoique amortie du chômage vont peser sur la consommation qui devrait croître de moins de 1 % en moyenne en 2010 (hors effets d’acquis très négatifs à la fin 2009) et guère plus l’année suivante.

Au-delà de ces aspects conjoncturels, sa rectitude budgétaire permet à l’Allemagne d’aborder relativement sereinement ce cycle de reprise, puisque le pays n’aura pas à fournir, à l’inverse de la plupart de ses voisins, un effort d’assainissement trop douloureux et inhibiteur de croissance.

Isabelle JOB Frederik DUCROZET [email protected] [email protected]

Allemagne : chômage

3,0

3,5

4,0

4,5

5,0

92 94 96 98 00 02 04 06 08 100,0

0,4

0,8

1,2

1,6

nombre de chômeurs (cvs)emplois à temps partiel (dr.)

millions

Sources : Bundesbank, Crédit Agricole S.A.

millionsAllemagne 2009 2010 2011

T1 T2 T3 T4PIB -4,8 1,8 1,7 0,2 0,3 0,4 0,4 Consommation privée 0,6 0,3 1,0 0,1 0,3 0,2 0,2 Investissement -8,3 2,3 2,5 0,5 0,5 0,6 0,6 FBCF équipement -20,1 2,4 2,9 0,5 0,5 0,7 0,7 FBCF construction -0,3 1,9 2,3 0,5 0,5 0,5 0,5 Variation des stocks (a) -0,5 0,5 0,0 0,1 0,0 0,0 0,0 Exportations nettes (a) -3,6 0,6 0,5 0,0 0,0 0,2 0,1 Production industrielle (a/a, %) -16,2 3,4 2,7 4,1 3,0 3,8 2,8 Taux de chômage 8,2 8,9 8,7 8,6 8,9 9,0 9,0 Inflation (a/a, %) 0,3 0,8 1,6 0,0 0,6 0,6 1,0

(a) contribution à la croissance du PIB (en %)

2010

Page 23: Perspectives Macro 128 Fr

Italie

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 23

Retour vers la réalité

La reprise de l’économie italienne s’annonce chaotique. Le fort rebond du PIB au troisième trimestre laissait espérer une reprise vigoureuse. Mais, la rechute du PIB en fin d’année nous ramène à la réalité. La demande domestique demeure faible et le manque de compétitivité de l’économie italienne pèse sur les secteurs exportateurs. La reprise est en marche, mais à un rythme ralenti et plus faible que le reste de la zone euro.

Alors qu’elle venait juste d’émerger de la récession au trimestre précédent, l’économie italienne a rechuté au quatrième trimestre 2009 (-0,3 % t/t.). Cette contraction s’assimile pour partie à une correction technique suite à la forte croissance observée au troisième trimestre (révisée à +0,5 % t/t). Après avoir fortement rebondi au T3, l’investissement s’est à nouveau replié au T4 (80,5 %, après +3,9 %). De même, les dépenses des ménages ont reculé de 0,1 % en fin d’année, après avoir connu un sursaut le trimestre précédent (+0,6% au T3). Le PIB aurait pu chuter encore davantage sans la vague de re-stockage observée au T4. Ce mouvement a alimenté la progression des importations (+3,2% t/t). En revanche, les exportations se sont affaiblies et n’enregistrent qu’une faible hausse de +0,1% t/t au T4 (après +2,6% au T3). Au total, l’économie italienne s’est contractée de -5,1% en 2009.

Ce hoquet de croissance a pesé sur le moral des entreprises et des ménages, et risque de doucher les espoirs d’une reprise rapide de la demande intérieure. L’indice ISAE du climat des affaires a progressé de 1,6 point au cours des deux premiers mois du premier trimestre 2010, contre une progression de 8 points au dernier trimestre 2009. Les indices des directeurs d’achat (PMI) ont stagné en février, aussi bien pour les services que pour le secteur manufacturier, mais ils restent toutefois ancrés en zone d’expansion de l’activité (supérieurs à 50). L’évolution de la production industrielle en janvier a été encourageante (+2,6 % en glissement mensuel), mais ses niveaux restent très inférieurs à ce qu’ils étaient avant la crise. Le taux d’utilisation des capacités demeure à un plus bas historique ce qui suggère un démarrage très lent de l’investissement tout au long de l’année 2010.

Du côté de la consommation, la confiance a subi un revers début 2010. L’indice ISAE de confiance des consommateurs est tombé de 111,6 en janvier à 107,7 en février, son plus bas niveau depuis juillet 2009. Les dépenses des ménages ont été stimulées à partir du deuxième trimestre 2009 par des avantages fiscaux (notamment les primes à la casse) ainsi que des mesures d’incitations en direction des entreprises pour sauvegarder les emplois. Cependant, avec l’épuisement de ces mesures de relance et la montée inéluctable du taux de chômage, la contribution de la consommation privée à la croissance devrait rester faible au cours des prochains mois.

Avec une demande intérieure déprimée, le redressement de l’économie italienne dépendra largement du degré de dynamisme des exportations. La reprise économique chez les principaux partenaires commerciaux de l’Italie devrait permettre un redressement des exportations, mais le pays reste handicapé par sa faible compétitivité. Les coûts unitaires du travail ont commencé à diminuer fin 2009, mais restent nettement plus élevés que la moyenne de la zone euro. La productivité du travail est entravée par le retard d’ajustement du marché du travail. Les salaires restent rigides et l’emploi ne s’est pas autant ajusté que ne le suggère le fort recul de l’activité (-1,4 % en moyenne durant les trois premiers trimestres de 2009, contre -5,1 % pour le PIB en 2009). Pour regagner en compétitivité, les entreprises italiennes vont sans doute devoir tailler dans leurs effectifs.

Dans l’ensemble, le recul du PIB au dernier trimestre ne remet pas en cause notre scénario central de reprise même si son rythme s’annonce poussif (+0,4 % sur l’année 2010). Les mesures d’austérité budgétaires qui se dessinent en Europe du sud ne devraient pas être aussi sévères en Italie. Certes le poids de le dette est très lourd (estimée à 115,6 % du PIB en 2009), mais la moindre dégradation du déficit public (-5,3 % du PIB en 2009) est synonyme d’un effort moins prononcé pour rétablir les finances de l’Etat, et distingue l’Italie des autres pays de la périphérie. En 2011, la croissance devrait rester modeste, de l’ordre de +0,7 %, dans un contexte de demande toujours faible et de problèmes de compétitivité patents.

Bénédicte KUKLA [email protected]

Italie : déficit public

-14

-9

-4

1

6

04 05 06 07 08 09Espagne ItalieIrlande PortugalUEM EMU

Sources : CE, simul. Crédit Agricole S.A.

% du PIB Italie 2009 2010 2011T1 T2 T3 T4

PIB -5,1 0,4 0,7 0,2 0,2 0,2 0,3Consommation privée -1,8 0,7 0,7 0,1 0,2 0,2 0,2Investissement -12,2 -1,3 1,9 -0,3 0,1 0,4 0,5FBCF équipement -17,2 0,5 1,3 0,3 0,1 0,3 0,3FBCF construction -7,9 -2,6 2,7 -0,5 0,1 0,6 0,6Variation des stocks (a) -0,5 0,6 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0Exportations nettes (a) -1,2 -0,3 0,0 0,1 0,0 0,0 0,1Taux de chômage 7,7 8,7 8,8 8,5 8,6 8,8 8,8Inflation (a/a, %) 0,8 1,2 1,7 1,1 0,9 1,5 1,3Déficit public (% PIB) -5,3 -5,2 -4,7 - - - -

(a) contribution à la croissance du PIB (en %)

2010

Page 24: Perspectives Macro 128 Fr

Grèce

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 24

Le chemin sera long et difficile

Alors que les mesures d’austérité budgétaire devraient contribuer à ramener les finances publiques sous contrôle, les perspectives de croissance sont beaucoup moins encourageantes qu’il y a quelques mois. Davantage d’efforts seront nécessaires pour réformer en profondeur l’économie.

En janvier, la Grèce a pris des mesures exceptionnelles pour régler ses problèmes de finances publiques. Début mars, elle est allée un cran plus loin dans son plan d’austérité, en introduisant des efforts supplémentaires de 4,8 milliards d’euros (2,0 % du PIB). Ces mesures concernent aussi bien les recettes que les dépenses. Le plan d’austérité a permis d’atténuer le risque de défaut et d’abaisser les primes de risques souverains, qui restent malgré tout à un niveau élevé. Cependant, le gouvernement aura à faire face à d’importantes échéances de refinancement de sa dette dès le printemps et son besoin sur l’année s’élève à 55 milliards €.

Ce plan ambitieux d’austérité va peser lourdement sur la croissance. La contraction du PIB a été plus marquée en 2009 qu’initialement attendu (à -2,0 %, contre -1,2 % prévu initialement) en raison de la performance décevante des secteurs clefs du tourisme et du transport maritime. Après une amélioration temporaire, les enquêtes de confiance ont repris le chemin de la baisse, reflet des difficultés économiques. Alors que le reste de la zone euro est en phase de reprise, l’économie grecque s’enfonce en récession.

Le revenu disponible des ménages va être fortement amputé par la hausse de la fiscalité et la baisse des transferts sociaux (notamment le gel des salaires des fonctionnaires et des retraites et la réduction des avantages sociaux et primes). La montée du chômage et la hausse des prix, induite par le relèvement de certains droits d’accise, contribueront également à freiner la consommation. Les dépenses publiques vont diminuer, et ce de manière très significative, conformément à l’objectif de réduction du déficit.

En ce qui concerne l’investissement, les perspectives du bâtiment sont décevantes. Des efforts ont été déployés pour relancer l’investissement des entreprises, avec des possibilités de financements dans le cadre du plan stratégique national. Ceci va dépendre pour une grande part de la vitesse et du taux de tirage des fonds structurels de l’UE. En outre, le programme d’investissement public pâtira des coupes liées aux contraintes qui s’exercent sur les dépenses budgétaires.

Le commerce extérieur fait preuve de dynamisme et devrait contribuer positivement à la croissance du PIB, sans compenser totalement la baisse de la demande intérieure. Les exportations devraient se redresser au rythme de l’amélioration de l’environnement économique mondial, tandis que les importations vont souffrir de la conjoncture domestique déprimée. Dans l’ensemble, la contraction du PIB pourrait avoisiner les 3,4 % en 2010.

Malgré la récession, les tensions inflationnistes s’accumulent, révélatrices de faiblesses structurelles chroniques sur certains marchés. L’indice général des prix à la consommation devrait augmenter en moyenne de 3,0 % cette année, après 1,4 % en 2009, tiré par des relèvements de taxes indirectes. Le chômage devrait poursuivre sa hausse (10,3 % au quatrième trimestre 2009) et devrait demeurer durablement à un niveau supérieur à 10 % et ce tant que la récession va sévir.

Les effets de la rigueur sur l’activité économique domestique pourraient compromettre la réalisation des recettes budgétaires. Celles-ci sont également menacées en cas de dégradation de l’environnement extérieur. Si, les exportations, le seul moteur de la croissance grecque, déçoivent, alors la récession risque encore d’être plus marquée et la base imposable réduite davantage.

A court terme, un cercle vicieux entre austérité budgétaire et récession risque de s’enclencher. Le seul moyen d’opérer une sortie de crise par le haut est de mettre l’accent sur l’investissement et les réformes structurelles pour retrouver le chemin de croissance à moyen terme sur des bases assainies.

Katerina ANAGNOSTOPOULOU [email protected]

Grèce : solde public (% PIB)

-13-11-9-7-5-3-1

2006 2007 2008 2009 2010* 2011*

Sources : National Statistical Service of Greece, Emporiki

* Projections

Grèce 2009 2010 2011T1 T2 T3 T4

PIB -2,0 -3,4 -1,2 -1,5 -0,8 -0,6 -0,5Consommation privée -1,8 -3,3 -1,0 -1,5 -2,3 -1,7 0,5Consommation publique 9,6 -6,0 -1,5 -3,2 -1,9 -1,3 -0,7Investissement -13,9 -6,5 1,5 -0,2 -0,5 -0,6 0,0Exportations -18,1 2,8 3,7 -0,8 0,5 0,3 0,5Importations -14,1 -6,0 -1,5 -0,4 -0,7 -1,1 -0,7Variation des stocks (a) 0,0 -1,1 -1,7 0,2 1,0 0,6 -1,0Exportations nettes (a) 0,7 2,4 1,2 0,0 -0,2 0,4 0,3Taux de chômage 9,4 11,4 12,0 11,2 11,2 11,6 11,8Inflation-HCPI (a/a, %) 1,4 3,0 1,7 2,7 3,3 3,2 2,7Excédent public (% PIB) -12,7 -8,9 -5,9 - - - -

2010

Page 25: Perspectives Macro 128 Fr

Espagne

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 25

La trappe à austérité

L’Espagne est restée en récession au dernier trimestre 2009. Toutefois, la composition du PIB du quatrième trimestre révèle certaines évolutions encourageantes, tant du point de vue de la demande intérieure qu’extérieure. Cependant, ces bourgeons de reprise subissent (et continueront de subir) l’influence négative des problèmes structurels liés à la poursuite de l’ajustement du secteur résidentiel et à la nécessité impérieuse de rééquilibrer les finances publiques.

L’économie espagnole a traversé une année entière de récession, avec une nouvelle contraction de 0,1 % du PIB au dernier trimestre 2009. L’ampleur du recul au quatrième trimestre a néanmoins été en partie atténuée par la contribution positive du cycle des stocks et le redressement du commerce extérieur. Toutefois, la demande intérieure qui avait bien progressé au troisième trimestre, s’est à nouveau orientée à la baisse au quatrième trimestre (–0,4 % t/t). Même si la consommation des ménages s’est légèrement raffermie (+0,3 % t/t), grâce à la bonne tenue des ventes de véhicules neufs, cette amélioration a été plus que compensée par le repli des dépenses publiques (-1,7 % t/t). L’investissement (hors construction) rebondit depuis deux trimestres (+3,1 % t/t, après +1,8 % au T3). Cependant, l’investissement dans le secteur clef de la construction a encore décliné de 2,2 %. En conséquence, l’investissement total s’est replié de 1,0 % t/t. Sur l’ensemble de l’année, le PIB espagnol s’est contracté de 3,6 %, après +0,9 % en 2008 et +3,6 % en 2007.

Un piège à l’horizon : austérité sur fond d’ajustement structurel Les finances publiques ont été loin des préoccupations durant la crise. La priorité a été de soutenir la croissance au travers de divers dispositifs de relance, qui ont creusé fortement le déficit public (lequel atteint 11,4 % du PIB en 2009, après un excédent de 2,2 % en 2007). Malgré un niveau d’endettement encore gérable (55,2 % du PIB en 2009, contre 113,4 % pour la Grèce), la peur de la contagion de la crise grecque a contraint l’Espagne à abandonner ce biais accommodant et à opter prématurément pour la rigueur budgétaire. Le revers de la médaille est que ces mesures auront inévitablement un impact négatif sur l’activité avec le risque d’enclenchement d’un cercle vicieux. Le relèvement du taux de la TVA à partir de juillet devrait stimuler légèrement, par anticipation, la consommation en début d’année, mais le contrecoup se fera sentir en seconde partie de l’année. En outre, la réduction des pensions de retraites et des salaires du secteur public, la fin des avantages fiscaux , le tout associé à un taux de chômage élevé (18,8 % en janvier) vont peser sur le moral des ménages et leur revenu et les inciter à épargner davantage. L’insuffisance de la demande intérieure ne plaide pas en faveur d’un redressement durable de l’investissement. Ainsi, les mesures d’austérité pourraient finalement s’avérer contre-productives pour réduire le déficit en pesant trop lourdement sur la demande et les recettes fiscales. Paradoxalement, le plan d’ajustement budgétaire proposé en janvier repose en grande partie sur la hausse anticipée des recettes fiscales.

Un redressement laborieux Les enquêtes de conjoncture révèlent déjà ces préoccupations. En février, un mois seulement après l’introduction de ces mesures, la confiance des ménages a chuté de 5 points. La confiance des entreprises a légèrement progressé dans l’industrie et dans les services, mais a continué de se détériorer dans la construction. L’indice PMI des directeurs d’achats était bien orienté en février, mais demeure en deçà du seuil symbolique de 50, (révélateur de la poursuite de la contraction de l’activité manufacturière), reflétée dans les chiffres de la production industrielle en janvier (-2,6 en rythme mensuel). Dans l’ensemble, la faiblesse de la consommation des ménages et celle de l’investissement devraient s’alimenter mutuellement avec au final un manque de dynamisme de la demande domestique. Les stocks se seront probablement reconstitués modérément en début d’année. Les exportations qui seront le seul vrai moteur de croissance devraient bénéficier du redressement de la demande mondiale. Toutefois, les perspectives à court terme restent ternes pour l’économie espagnole. L’Espagne devrait émerger de la récession au début de l’année 2010, mais le redressement sera lent et laborieux. Le PIB espagnol devrait encore se contracter de 0,4 % en 2010, avant d’augmenter modestement de 0,6 % en 2011. Plus fondamentalement, l’Espagne a besoin de repenser son modèle de croissance. Le pays doit mettre en œuvre des réformes structurelles afin d’améliorer sa compétitivité, et pour trouver de nouveaux relais de croissance domestique afin de réduire sa dépendance vis-à-vis du secteur immobilier, le tout en aidant les agents privés surendettés à assainir leur bilan. Le risque est que le programme de rigueur budgétaire se focalise trop sur le court terme en négligeant ces enjeux de moyen-long terme.

Bénédicte KUKLA [email protected]

Espagne : contributionà la croissance

-3,5

-1,5

0,5

2,5

2007 2008 2009Variation des stocks solde extérieurConsom. privée Consom. publiqueFCBF PIB

Source : Crédit Agricole S.A.

contributions à la croissance t/t, %

Espagne 2009 2010 2011T1 T2 T3 T4

PIB -3,6 -0,4 0,6 0,0 0,2 -0,2 0,0Consommation privée -5,0 -0,2 0,0 -0,1 0,3 -0,3 -0,1Investissement -15,3 -4,7 -0,5 -0,7 -0,8 -0,6 -0,4FBCF équipement -24,2 0,1 2,4 -0,1 0,0 0,1 0,1FBCF construction -11,2 -7,8 -2,5 -2,0 -1,8 -1,5 -1,0Variation des stocks (a) -0,8 0,2 0,2 0,2 0,1 0,0 0,0Exportations nettes (a) 3,3 0,3 0,3 -0,2 0,0 0,0 0,0Taux de chômage 18,0 18,9 18,6 19,0 19,0 18,9 18,8Inflation (a/a, %) -0,3 1,4 2,5 1,0 1,3 1,6 1,8Excédent public (% PIB) -11,4 -10,3 -8,3 - - - -

(a) contribution à la croissance du PIB (en %)

2010

Page 26: Perspectives Macro 128 Fr

Scandinavie

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 26

La croissance pâtit des incertitudes à l’étranger

La croissance a été décevante au dernier trimestre 2009, aussi bien en Suède qu’en Norvège, ce qui a impliqué des révisions à la baisse des perspectives de croissance de moyen terme. Le cycle de resserrement des taux a été suspendu en Norvège, pour une période prolongée. Dans les deux pays, les incertitudes quant à la reprise économique à l’étranger ont assombri les perspectives d’exportations, alors que la consommation des ménages s'est rapidement améliorée.

La Suède est restée en récession au dernier trimestre 2009, avec un recul de sa croissance de 0,6 % en glissement trimestriel. La balance commerciale est restée le principal point noir. Les exportations, qui consistent principalement en biens manufacturés et d’équipement, semblent pâtir du faible taux d’utilisation des capacités à l’étranger tandis que les importations sont tirées vers le haut par l’amélioration de la consommation des ménages. La compétitivité du pays est menacée par l’appréciation de la couronne suédoise, dont le taux de change réel effectif a progressé de plus de 5 % en 2009. La faiblesse des exportations va probablement persister au premier trimestre 2010, avant de connaître une légère remontée par la suite grâce à l’accélération de la reprise en Norvège, en Allemagne et au Royaume-Uni, les principaux partenaires commerciaux de la Suède.

Tandis que la reprise de l’investissement des entreprises se fait encore attendre, avec une chute de 3,3 % en glissement trimestriel sur le quatrième trimestre 2009, les stocks sont repartis à la hausse, et ont apporté une contribution significative à la croissance du PIB. D’après l’enquête de la Swedbank auprès des directeurs d’achats, la confiance des entreprises s’améliore, ce qui laisse supposer que la production industrielle devrait continuer de se redresser, quoique à partir de niveaux historiquement bas. Nous prévoyons donc une amélioration progressive de l’investissement plus tard dans l'année et les variations de stocks devraient rester le principal moteur de croissance en 2010. La consommation des ménages risque d'être freinée par un taux de chômage significatif et par les perspectives d’un premier relèvement des taux d’intérêt durant l’été. D’un côté, la hausse des prix des logements stimule la confiance des ménages, mais d’un autre côté les conditions du marché du travail continuent de se dégrader, et le chômage ne devrait pas atteindre son pic avant fin 2010.

Nous anticipons en conséquence un recul graduel de l’inflation sous-jacente. En outre, l’appréciation de la couronne suédoise devrait continuer de modérer l'inflation importée. En revanche, l'inflation totale, qui inclut les intérêts hypothécaires, devrait encore croître face aux anticipations d’un relèvement du taux directeur de la banque centrale « cet été ou au début de l’automne ». L’inflation devrait toutefois rester inférieure à l’objectif de 2 % de la Riksbank en 2010 et 2011, conformément à nos anticipations de croissance moins optimistes que celles de la Riksbank. Nous pensons que le premier relèvement de taux de Riksbank aura lieu en septembre, bien que certains de ses membres les plus « hawkish » aient exprimé leur préférence pour une première hausse dès juillet, suivie par un resserrement monétaire graduel.

La Norges Bank a décidé de laisser son taux directeur inchangé en mars, pour la seconde fois depuis février. Le ralentissement de la croissance à l’étranger, la hausse des différentiels de taux et l’appréciation de la NOK ont été parmi les facteurs clés de cette décision. Il semble à présent possible qu’elle procède à un relèvement de son taux directeur lors de sa prochaine réunion du mois de mai. La Norges Bank a en effet exprimé, lors de sa dernière réunion, ses préoccupations relatives à la hausse des prix des maisons et à l’endettement croissant des ménages, et a répété son intention de procéder à une normalisation progressive des taux d’intérêt. Cependant, une appréciation supplémentaire de la couronne norvégienne pourrait inciter la banque centrale à davantage de prudence. D’après nos estimations, l’écart de production négatif devrait continuer d’exercer une pression à la baisse sur l’inflation sous-jacente, sans doute jusqu’à fin 2010. La consommation des ménages devrait rester un soutien à la croissance durant toute la période de prévision, mais le rythme de progression des dépenses des particuliers devrait quelque peu marquer le pas, au profit de l'épargne, en conséquence du resserrement de la politique monétaire et budgétaire.

Slavena NAZAROVA [email protected]

Suède : production industrielle & PMI

-25-20-15-10-505

10

96 98 00 02 04 06 08 1020304050607080

IP (mm3) PMI (éch.dr.)Source : Statistics Sw eden, Crédit Agricole S.A.

% a/a

Norvège : inflation totaleet taux directeur

-3-2-10123456

01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 120

2

4

6

8

CPI Taux directeur (éch.dr.)Source : Statistics Norw ay, Crédit Agricole S.A.

% a/a

Prévisions

Page 27: Perspectives Macro 128 Fr

Royaume-Uni

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 27

Promesse de croissance

Le Royaume-Uni a renoué avec la croissance au quatrième trimestre 2009 grâce, en partie, au redressement de la consommation des ménages. Cette tendance semble se confirmer en début d’année mais la croissance va rester molle car sous contrainte de désendettement privé et public.

Le Royaume-Uni est sorti de récession au quatrième trimestre 2009, avec une croissance de 0,4 % t/t sur le trimestre, qui n’empêche pas une contraction historique du PIB de -4,9 % sur l’année. La consommation des ménages s’est redressée à partir du troisième trimestre 2009, stimulée par une politique monétaire et fiscale exceptionnellement accommodante. Le rétablissement des marchés financiers et la hausse récente des prix immobiliers, qui viennent en garantie de la dette hypothécaire des ménages, relâchent progressivement la pression à l’assainissement des bilans privés. La stabilisation du taux de chômage à 7,8 % au cours de la seconde moitié de 2009 a également pu contribuer à soutenir les dépenses des ménages. Après un mois de janvier difficile, affecté par des conditions climatiques particulièrement mauvaises, la consommation semble avoir repris le chemin haussier comme le suggèrent les enquêtes disponibles pour le mois de février. La reprise de la consommation pourrait donc s’avérer durable mais elle devrait toutefois rester faible.

L’incertitude liée aux élections parlementaires de mai et la perspective d’un plan d’austérité budgétaire devraient peser sur le moral du consommateur dans les mois à venir. Les différents partis semblent s’accorder sur la nécessité d’apurer les finances publiques. D’après le Budget Report du 24 mars 2010, le déficit budgétaire est estimé à 11,8 % pour l’année fiscale 2009-10. Les prévisions de croissance du Trésor étant de surcroît jugées trop optimistes, 1,0%-1,5% en 2010 et 3,0%- 3,5 % en 2011, les mesures nécessaires à cet assainissement pourraient s’avérer beaucoup plus sévères que celles annoncées actuellement.

Le commerce extérieur a pesé négativement sur la croissance en 2009. Les exportations ont certes rebondi mais pas suffisamment eu égard à la progression des importations, liée au renforcement de la demande interne. La faiblesse de la livre tarde de plus à produire ses effets, les exportateurs cherchant surtout à reconstituer leur marge au lieu d’imprimer une tendance baissière sur leur prix. Toutefois, nous continuons de privilégier l’hypothèse d’un rééquilibrage des comptes extérieurs à la faveur d’une progression dynamique des exportations. Les résultats des enquêtes récentes dans l’industrie manufacturière suggèrent en effet une forte hausse des commandes à l’exportation.

L’investissement a chuté lourdement au quatrième trimestre en partie par manque de crédit mais surtout en raison de l’incertitude entourant les perspectives économiques. Les variations de stocks quant à elles, ont contribué positivement à la croissance au quatrième trimestre 2010. Le processus de déstockage devrait se poursuivre mais à un rythme de moins en moins soutenu tandis que l’investissement ne devrait se redresser que très lentement. L’ensemble plaide en faveur d’un scénario de croissance molle tout au long de la période de prévision.

Sous l’effet conjugué du retour de la TVA à 17,5 % au mois de janvier, de la hausse du prix du pétrole et de la dépréciation de la livre, l’inflation a atteint 3,5 % en glissement annuel en janvier. Tandis que la faiblesse de la livre devrait continuer de tirer l’inflation vers le haut, les variations sur les prix de l’énergie pourraient se traduire par une volatilité accrue de l’inflation à court terme. Les dernières minutes de la BoE notent que la rareté du crédit, la faiblesse des cash-flows et l’incertitude économique auraient empêché jusqu’à présent les entreprises de procéder à des baisses de prix. Au regard de l’incertitude entourant l’ampleur des surcapacités héritées de la crise, et par conséquent les perspectives de désinflation à moyen terme, la probabilité d’une extension future du QE paraît réduite. Néanmoins, alors que la politique budgétaire va se resserrer et dans un souci d’équilibrer le policy-mix, la BoE devrait garder une politique accommodante tout au long de 2010. Nous maintenons notre hypothèse d’une première remontée du taux directeur au premier trimestre 2011.

Slavena NAZAROVA [email protected]

R-U : prix des maisons et confiance des consommateurs

-30-20-10

0102030

90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10-40-30-20-10010

Indice des prix HalifaxIndic. confiance des consom. CVS (éch.dr)

%a/a

Sources : ONS, Nationw ide, Crédit Agricole S.A.

Royaume-Uni 2009 2010 2011T1 T2 T3 T4

PIB -4,9 1,1 1,7 0,5 0,4 0,4 0,3 Consommation privée -3,2 0,9 1,6 0,5 0,2 0,2 0,4 Consommation publique 2,2 1,7 0,4 0,2 0,2 0,1 0,1 Investissement -14,9 -2,0 1,6 0,2 0,2 0,3 0,3 Variation des stocks (a) -1,2 0,6 0,2 0,1 0,1 0,2 0,0 Exportations nettes (a) 0,7 0,0 0,1 0,1 0,1 0,0 0,0 Balance publique (% du PIB) -2,3 -9,5 -7,5 - - - -Taux d'épargne 0,0 6,0 6,5 6,2 6,0 5,8 5,8 Taux de chômage (ONS) 5,9 8,0 8,5 7,8 7,9 8,0 8,2 Inf lation (HICP, a/a, %) 2,2 2,4 1,5 3,1 2,5 2,2 1,8

(a) contribution à la croissance du PIB (en %)

2010

Page 28: Perspectives Macro 128 Fr

Océanie

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 28

Australie : Le retour de la confiance

Les conditions économiques devraient continuer à s’améliorer, avec une croissance d’environ 2,5 % cette année et de 3,2 % en 2011. Nous tablons sur de nouvelles hausses progressives des taux et sur un taux directeur (cash rate) à 5 % vers la fin 2010. Les perspectives concernant l’AUD demeurent positives pour les prochains mois, le dollar australien devant, d’après nos prévisions, atteindre un point culminant autour de 0,95 pour un USD vers le milieu de l’année 2010.

L’Australie, dont le ralentissement a été limité pendant la crise financière, semble en passe de profiter, dans les prochains mois, de ses avantages économiques. Le marché du travail continue de donner des signes d’amélioration, ce qui, ajouté aux résultats positifs de plusieurs enquêtes, indique que la croissance va rester plus ou moins conforme à la tendance. Les conditions du crédit vont probablement s’assouplir encore tandis que l’investissement repart à la hausse, en particulier dans le secteur des matières premières. Le marché de l’immobilier donne également des signes de redressement, un redressement qui pourrait néanmoins se ressentir du relèvement des taux. L’Australie va continuer à bénéficier du raffermissement de la croissance en Asie, en particulier en Chine, et ne pâtira pas d’une croissance attendue en deçà de la tendance dans les autres grandes économies. Nous prévoyons une croissance de 2,5 % du PIB en 2010 et de 3,2 % in 2011.

Les tensions inflationnistes se renforcent mais les évolutions de l’indice des prix à la consommation devraient être conformes dans les mois à venir à l’objectif de 2-3 % fixé par la RBA, dans l’hypothèse d’une poursuite de la normalisation de la politique monétaire. La RBA ne sera probablement pas pressée de relever les taux, surtout compte tenu de la modération des pressions salariales. Néanmoins, de nouvelles hausses progressives des taux seront nécessaires pour que les risques d’inflation restent maîtrisés ; le cash rate devrait, selon nos prévisions, atteindre un sommet à 5,0 % vers la fin de l’année.

Les perspectives restent positives pour l’AUD ; nous tablons sur un plus haut à 0,95 AUD/USD vers le milieu de l’année. La hausse des taux d’intérêt va renforcer l’attrait de l’AUD comme devise de « portage ». Cependant, le dollar australien devrait, selon notre analyse, se déprécier au cours du second semestre 2010 car le billet vert sera en train de se raffermir au moment même où les taux d’intérêt australiens atteindront leur point culminant.

Nouvelle-Zélande : En passe de relever les taux

Bien qu’à la traîne de l’Australie, les performances économiques de la Nouvelle-Zélande vont bénéficier de la vigueur de la demande asiatique et de la bonne tenue des dépenses de consommation. L’économie devrait connaître une croissance de 2,1 % cette année et de 3,1 % en 2011. La RBNZ relèvera probablement les taux à 4,0 % d’ici à la fin de l’année tandis que le NZD/USD atteindra un point haut autour de 0,76 vers le milieu de 2010.

La situation économique continue de s’améliorer, une embellie qui devrait s’accélérer pendant le reste de l’année. A l’instar de l’Australie, la Nouvelle-Zélande bénéficie du renforcement de la croissance en Asie, qui a un impact positif sur sa balance commerciale. De nombreux signes indiquent également un rebond de l’économie nationale, qui s’accompagne d’une stabilisation des conditions sur le marché du travail et d’un raffermissement de la consommation. L’économie devrait, selon les prévisions, croître au rythme de 2,1 % cette année et de 3,1 % l’année prochaine, des chiffres qui pourraient encore être révisés à la hausse si le redressement de l’activité se poursuit au rythme actuel.

Sous l’effet de facteurs temporaires, l’inflation va probablement augmenter à court terme vers le haut de la fourchette cible de la RBNZ. Toutefois et dans un premier temps, l’indice des prix à la consommation se maintiendra, probablement dans une fourchette de 1 à 3 %, de sorte qu’il n’y aura pas urgence à durcir trop rapidement la politique monétaire. Cependant, à mesure que la santé économique s’améliorera, les tensions inflationnistes ne manqueront pas de se renforcer, ce qui obligera la Banque centrale à relever les taux vers le milieu de l’année. Selon nos prévisions, le taux d’intérêt directeur devrait être augmenté à 4,0 % vers la fin de l’année, sachant que de nouvelles hausses des taux sont attendues en 2011 pour atteindre un pic à 5,0 %.

Le NZD a de bonnes chances de gagner encore du terrain dans les prochains mois ; le dollar néo-zélandais enregistrera, selon nos prévisions, l’une des meilleures performances de toutes les grandes devises pour culminer à 0,76 NZD/USD vers la fin du deuxième trimestre 2010. Comme l’AUD, le NZD va bénéficier des perspectives de hausses des taux d’intérêt, du raffermissement de l’activité économique, de l’amélioration de l’appétit pour le risque et de l’augmentation des prix des produits de base. Le NZD est actuellement mieux valorisé que l’AUD et recèle une marge de hausse légèrement supérieure.

Mitul KOTECHA [email protected]

Page 29: Perspectives Macro 128 Fr

Canada

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 29

Reprise plus dynamique qu’attendue

L’activité économique du Canada a rebondi au quatrième trimestre de l’année dernière et croît à un rythme légèrement supérieur à celui anticipé par la Banque du Canada. Si la récente poussée d’inflation est en partie ponctuelle, les risques augmentent que la Banque du Canada ne commence à normaliser sa politique monétaire accommodante dès le troisième trimestre.

Le PIB réel a crû au rythme annualisé de 5 % au quatrième trimestre 2009, soit sa plus forte progression depuis le troisième trimestre 2000. La consommation a augmenté de 0,9 % sur le trimestre, tirée par les achats de biens durables, tels que véhicules et meubles. Les dépenses de services se sont accrues de 1 %. Toutefois, l’investissement productif a reculé de 2,3 %, et les investissements en bâtiments se sont contractés pour le cinquième trimestre consécutif. Les exportations ont progressé, tandis que la croissance des importations a ralenti : le commerce extérieur a donc apporté une contribution positive à la croissance.

Le redressement de l’économie semble bien engagé au vu des dernières statistiques, qui mettent en évidence la poursuite d’une croissance dynamique au premier trimestre 2010. 21 000 emplois ont été créés en février et les emplois à plein temps ont fortement progressé. Ce chiffre porte à 159 000 le nombre des emplois créés depuis juillet 2009. Le chômage a été ramené à 8,2 % en février. Les ventes de détail ont progressé de 0,7 % en janvier, soutenues par les dépenses de réparation et de rénovation à l’approche de l’expiration du crédit d’impôt en faveur de l’amélioration de l’habitat.

Les chiffres du PIB du quatrième trimestre sont une bonne nouvelle pour le Canada. En revanche, côté prix, les nouvelles sont, en apparence, moins favorables. Sur les deux derniers mois, l’inflation a été tirée vers le haut par la hausse des prix de l’énergie, et elle atteint 1,6 % en glissement annuel. L’inflation sous-jacente, telle que mesurée par la Banque du Canada, s’est établie à 2,1 % sur un an, après 2 % en janvier. Le chiffre de février reflète la hausse du prix des véhicules de tourisme et des frais d’hébergement sous l’impact des jeux olympiques, dont l’effet devrait être ponctuel.

La croissance économique étant plus dynamique que ne l’anticipait la Banque du Canada il y a quelques mois, il semble désormais possible que la Banque, qui s’était engagée sous conditions à maintenir sa politique de taux d’intérêt inchangée jusqu’à la fin du deuxième trimestre, entame le processus de normalisation des taux dès le troisième trimestre. La Banque du Canada commencerait ainsi à remonter ceux-ci avant la Fed et devrait procéder par mouvements limités de 25 pdb.

Le CAD se traite presqu’à parité avec l’USD. L’une des inquiétudes des pouvoirs publics est que le raffermissement de la devise ne pénalise les exportations, qui sont destinées pour la plupart aux États-Unis. Toutefois, les secteurs tournés vers l’exportation semblent s’adapter relativement bien au raffermissement du CAD. Les ventes manufacturières de janvier ont ainsi augmenté de 2,4 %, en hausse pour le cinquième mois de suite. L’appréciation du CAD est favorable à l’économie canadienne dans la mesure où elle abaisse le coût des importations, permettant aux entreprises d’investir dans de nouveaux équipements, ce qui contribue à renforcer leur productivité et à préserver la compétitivité des produits canadiens. C’est un point positif pour le Canada à long terme, dont la devise trop bon marché par le passé avait réduit les efforts de productivité des entreprises. Comme le faisait récemment remarquer le ministre de l’Industrie, Tony Clement : « La nouvelle norme, c’est que l’on ne se contente plus de compter sur la faiblesse du dollar canadien pour assurer sa productivité et je pense que la plupart des entreprises l’ont compris ».

Le raffermissement du CAD permet en outre de limiter la hausse du prix des produits importés. Par conséquent, la Banque du Canada ne tardera probablement pas pour entamer le resserrement de sa politique monétaire, alors qu’en même temps les perspectives économiques du voisin du sud s’améliorent. De plus, le système bancaire canadien n’a pas été touché aussi durement par la crise financière mondiale que celui de nombre d’économies avancées. Et le niveau de la dette publique du Canada se compare avantageusement à celui de ses principaux partenaires commerciaux.

Mike CAREY [email protected]

Page 30: Perspectives Macro 128 Fr

Pays émergents

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 30

Qui va monter ou non les taux ?

La résurgence de l’inflation sur de nombreux marchés émergents contraint les Banques centrales à augmenter leurs taux directeurs. Il s’agit cependant d’une normalisation des conditions monétaires plutôt que du début d’un cycle de resserrement marqué. Les hausses devraient se multiplier dans le courant de l’année, à partir du deuxième trimestre, en Asie et au Brésil. L’Amérique latine suivra. L’Europe de l’Est pourrait être en retrait.

La plupart des marchés émergents poursuivent leur redressement depuis le début de l’année. Non seulement les dispositifs de relance ont continué de soutenir l’activité économique, mais le rebond de la demande mondiale a stimulé les exportations. Les indices des directeurs d’achats s’ancrent fermement au-delà de 50 points, attestant de l’expansion continue des pays émergents

On note toutefois un léger accès de faiblesse en février. Nous y voyons la marque des entreprises du monde émergent en train de s’habituer à l’idée d’un environnement économique moins porteur. Nous ne croyons pas à une rechute. Néanmoins, nous anticipons une modération de la croissance économique au cours des prochains trimestres sous l’impact de la décélération des exportations à mesure que les dispositifs de relance disparaîtront et que les hausses de taux directeurs se généraliseront.

L’une des principales caractéristiques de cette nouvelle donne est le retour des pressions inflationnistes dans les pays émergents. Certains verront dans le récent rebond d’inflation le résultat d’effets de base. C'est un fait. Toutefois, au-delà de cet effet statistique, l’inflation séquentielle est également de retour. Selon nos calculs, l’inflation séquentielle moyenne de dix grands pays émergents est revenue à la normale, c’est à dire au niveau de la période 2004-07. En revanche, les taux directeurs sont loin d’avoir retrouvé des niveaux normaux. À ce stade, parmi les principaux pays émergents, seuls l’Inde, Israël, la Malaisie et le Vietnam ont rehaussé leurs taux directeurs.

Nous n’anticipons pas de forte hausse des taux au cours des prochains trimestres. Nous prévoyons une normalisation monétaire plutôt que le début d’un nouveau cycle volontariste de resserrement. Cependant, nous pensons que les Banques centrales vont être beaucoup plus nombreuses à relever leurs taux au deuxième trimestre.

D’un point de vue géographique, l’Asie devrait être en avance. En effet, les deux géants asiatiques ont déjà entamé la normalisation de leur politique monétaire en relevant dans un premier temps leur ratio de réserves. Toutefois, l’Inde a surpris en augmentant ses taux directeurs en mars. Nous pensons que la Chine lui emboîtera le pas au deuxième trimestre.

La Chine fait face à la montée des tensions inflationnistes et à un risque de bulles sur les actifs. En outre, son taux d’inflation se situe désormais au-delà du taux des dépôts à un an (à 2,70 % en rythme annuel en février, contre 2,25 % pour le taux de rémunération des dépôts). Les épargnants perdent donc aujourd’hui en termes réels de l’argent sur leurs dépôts. Ceci constitue une raison supplémentaire d’augmenter les taux d’intérêt. La Banque centrale chinoise devrait relever par deux fois son taux directeur cette année, par paliers de 27 pdb, comme à son habitude.

Indice des directeurs d’achatsdes marchés émergents

35

40

45

50

55

60

2007 2008 2009 2010

Moyenne des indices de directeurs d’achats (Chine, Brésil, Mexique, Singapour et AFS)

Sources : CEIC, Crédit Agricole CIB

Inflation des pays émergents

0%

2%

4%

6%

8%

10%

12%

2002 2004 2006 2008 2010

Inflation séquentielle dans 10 pays émergents* (moyenne arithmétique CVS, t/t)

Average 2004-07

*Afrique du Sud, Brésil, Chine, Corée, M exique, Pologne, Russie, Thaïlande et Turquie.

Sources : Bloomberg, Crédit Agricole CIB

Page 31: Perspectives Macro 128 Fr

Pays émergents

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 31

En Inde, l’inflation flirte déjà avec des niveaux à deux chiffres. La Banque centrale a commencé à relever les taux en mars. Compte tenu de l’historique de l’Inde sur le front de l’inflation, il est crucial que la RBI parvienne à endiguer les anticipations inflationnistes. En outre, l’inflation pourrait devenir un problème politique, si elle reste élevée, minant le pouvoir d’achat des ménages. Nous pensons que la RBI augmentera ses taux directeurs de 125 pdb au total en 2010.

Il est intéressant de noter que cela portera le taux repo à 4,5 %, soit un niveau toujours inférieur à la moyenne historique de 5,5 % observée entre 2005 et 2008. De notre point de vue, compte tenu des risques de hausse de prix des matières premières, la RBI pourrait intervenir de façon plus volontariste si l’inflation des prix alimentaires ne se modère pas significativement.

Après l’Asie, viendra l’Amérique latine. Le resserrement monétaire est également à l’ordre du jour sur le continent, compte tenu de la montée des pressions inflationnistes dans l’ensemble de la région. L’inflation n’a cependant pas encore atteint des niveaux menaçants. Toutefois, les anticipations inflationnistes pourraient déraper dans un contexte de la reprise de l’économie mondiale et régionale. Le resserrement devrait être modéré dans la zone, les taux d’intérêt réels restant positifs. Le Brésil fait exception et commencera probablement le premier, avec un cycle de resserrement des taux impressionnant de 275 pdb qui devrait démarrer en avril selon nos projections. L’offre et la demande ont fait preuve de résistance et l’économie est en route pour une croissance remarquable de 5,3 % en 2010.

Toutes les Banques centrales ne s’apprêtent cependant pas à augmenter leurs taux. Tous les pays émergents ne bénéficient pas de perspectives aussi florissantes et le cycle de resserrement des taux d’intérêt ne pointe pas encore à l’horizon des pays d’Europe centrale et orientale. À l’exception de la Pologne, les PECO restent à la peine et les taux d’intérêt réels demeurent positifs, ce qui contribue à protéger leur monnaie pendant les poussées d’aversion pour le risque. Des passifs importants en devise étrangère ont limité la marge de manœuvre des Banques centrales pour abaisser leurs taux d’intérêt.

Sur certains autres marchés européens, la demande intérieure et les tensions inflationnistes sont faibles et le cycle de baisse de taux n’a pas atteint son terme partout. C’est notamment le cas en Russie. La déflation accélérée observée sur les trois derniers trimestres autorise à notre avis de nouvelles baisses de taux. En outre, l’objectif de taux de change des pouvoirs publics n’est plus le même que l’année dernière. Ils pourraient se contenter de limiter l’appréciation du RUB afin de soutenir la reprise et pourraient utiliser les baisses de taux pour lisser l’appréciation du RUB et limiter l’afflux massif de capitaux.

L’Afrique du Sud pourrait être tentée de poursuivre sa politique de détente monétaire également, ou du moins de conserver un biais expansionniste. L’économie reste atone tandis que la demande intérieure, principal moteur de la croissance, montre peu de signes de redressement. Dans ce contexte, l’on s’interroge sur la pertinence des objectifs d’inflation et la surévaluation du ZAR incite fortement les autorités à adopter une politique monétaire plutôt accommodante.

Sébastien BARBE Guillaume TRESCA [email protected] [email protected]

Pays émergents : taux réels

-6

-4

-2

0

2

4

6

INR

HU

F

RU

B

PLN

CN

Y

CZK

ZAR

MXN

RO

N

BRL

%

Source s : Bloomberg, Crédit Agricole CIB

Pays émergents : taux de change

6,57,07,58,08,59,09,5

10,0

mars-09 juin-09 sept-09 déc-09 mars-1034

35

36

37

38

39

40

USD/ZAR Panier/RUB (éch. dr.)

Sources : Bloomberg, Crédit Agricole CIB

Page 32: Perspectives Macro 128 Fr

Pays émergents

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 32

Europe centrale : retour du politique

A la fin du premier trimestre 2010, la région s’est affranchie des craintes liées aux risques sur la Grèce, et elle se trouve dans une position comparativement meilleure. La reprise économique se poursuit, et nous prévoyons toujours que la Pologne affichera la meilleure performance. Au deuxième trimestre, l’attention se portera sur les élections en Hongrie (en avril) et en République tchèque (en mai). Cette période devrait favoriser la Hongrie.

La région a terminé le premier trimestre sur une note positive malgré la forte augmentation de l’aversion au risque liée à la crise grecque. Les spreads des CDS ainsi que les différentiels de rendement face au Bund se sont resserrés. Ceci semble indiquer que les investisseurs ont repris confiance dans la région. La République tchèque semble être à la traîne. En effet, la CZK a enregistré l’appréciation la plus modeste vis-à-vis de l’euro et les rendements sur le marché obligataire tchèque sont non seulement inférieurs à ceux de la Pologne et de la Hongrie, mais aussi à ceux de la zone euro.

Cette situation est en partie imputable aux perspectives de croissance. La Pologne continue de caracoler en tête, avec un taux de croissance de 2,3 % attendu cette année. Toutefois, si la croissance sera moins forte en Roumanie (1 %) et en Hongrie (-0,3 %) qu’en République tchèque (1,5 %), les investisseurs redoutent de plus en plus que ce dernier pays ne soit disproportionnellement pénalisé par la morosité de l’activité en zone euro

De fait, les banques centrales de la région pourraient suivre des politiques divergentes. La politique monétaire de la banque centrale polonaise semble de plus en plus restrictive, malgré ses inquiétudes au sujet de la vigueur du PLN qui ont même conduit à des menaces d’intervention. La Roumanie devrait une fois encore abaisser ses taux, mais à 6,5 %, les taux nominaux resteront élevés. De même, la Hongrie conserve un taux accommodant. Toutefois, même si les taux paraissent comparativement élevés à 5,75 %, une dernière baisse des taux, tout au plus, est attendue. Dans le même temps, compte tenu des craintes sur la croissance en République tchèque, la Banque centrale tchèque devrait être contrainte de maintenir ses taux à seulement 1 % jusqu'au quatrième trimestre 2010, ce qui devrait augmenter la pression sur les marchés à l’heure où les investisseurs sont en quête de rendement.

Enfin, les élections en Hongrie entre le 11 et le 25 avril devraient conduire à une victoire sans appel du parti d’opposition Fidesz, ce qui devrait lui donner les moyens de mettre en œuvre des réformes structurelles et budgétaires, et devrait soutenir les actifs libellés en HUF. Le résultat des élections tchèques les 28 et 29 mai est moins facile à prévoir. Le risque que les sociaux démocrates n’aient besoin de former un gouvernement de coalition pourrait pénaliser la CZK.

Stuart BENNETT [email protected]

Europe centrale : CDS 10 ans

0

50

100

150

200

250

300

350

oct-09 déc-09 févr-10Rép. tchèque RoumaniePologne HongrieSource : Reuters

Europe centrale : taux de change

60

70

80

90

100

110

juil-08 janv-09 juil-09 janv-10

HUF CZK PLN RON

Index Juillet 2008 = 100, /EUR

Source : Crédit Agricole CIB

Page 33: Perspectives Macro 128 Fr

Pays émergents

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 33

Afrique du Sud : dans le brouillard

L’Afrique du Sud est finalement sortie de la récession mais il n’y a pas de quoi s’extasier. Rien n’est certain et vu que les incertitudes persistent, la Banque centrale peut être tentée de poursuivre une politique accommodante. Le ZAR paraît à la limite de la surévaluation et nous tablons sur un repli à court terme.

L’Afrique du Sud est enfin sortie de la récession mais ses performances restent léthargiques. La récession a été en partie contenue – le PIB s’est contracté de 1,4 % en 2009 – ainsi que la reprise. En effet, nous tablons sur une modeste progression de 2 % du PIB. La production industrielle a été bien orientée et la demande intérieure a donné des signes de reprise. Toutefois, des incertitudes demeurent et il semble y avoir très peu de motifs d’enthousiasme. L’Afrique du Sud est manifestement dans l’incertitude. En premier lieu, les risques baissiers ne sont pas négligeables. Les freins à une reprise dynamique de la demande intérieure sont nombreux – taux de chômage élevé, endettement des ménages et inégalités importantes. Les autorités ont une marge de manœuvre limitée dans un contexte de revenus en nette baisse et de dépenses consacrées à de gros projets d’infrastructures. Cela est d’autant plus inquiétant que la consommation représente les deux tiers du PIB. En deuxième lieu, la désinflation est peu marquée malgré l’atonie de la conjoncture économique. De plus la hausse des tarifs d’Eskom risque de rajouter un point d’inflation. L’objectif d’inflation de la Banque centrale a été amplement discuté et nous attendons un discours moins dur de la part des autorités monétaires tant que l’inflation baissera. Les pressions en faveur d’une politique monétaire plus accommodante se sont accentuées et nous tablons sur une réaction de la part des autorités monétaires pour stimuler la demande. Les perspectives d’évolution du ZAR ne sont guère plus prévisibles. Depuis des mois, l’affermissement des cours de la monnaie sud-africaine se poursuit et le ZAR est considéré à tous points de vue comme surévalué. Etant donné la léthargie de la conjoncture économique et la politique monétaire accommodante, nous tablons toujours sur un repli à court terme. Si l’appétit pour le risque faisait un retour en force dans les pays émergents, le ZAR devrait continuer de s’apprécier, ce qui mettrait les autorités dans une position délicate. Ces dernières ont de nombreuses fois plaidé pour un ZAR moins fort.

Guillaume TRESCA [email protected]

Egypte : 2010 est une année à risque pour le budget

La chute des recettes fiscales et la hausse des dépenses plombent le budget, et après cinq années consécutives de baisses, la dette publique devrait croître en 2010. Le gouvernement cherchera avant tout à attirer les investisseurs étrangers pour financer la croissance économique.

Quand la croissance dépassait 7 % en 2007/08, l’objectif du gouvernement égyptien était de réduire rapidement le déficit budgétaire à -3 % du PIB. Il pourrait néanmoins atteindre près de -9 % cette année. La chute des recettes fiscales, la hausse des dépenses publiques et du service de la dette expliquent cette nette dégradation. 2010/2011 est une année charnière pour le budget car, si la baisse de l’inflation sur 2008/2009 avait dégagé quelques marges de manœuvre fiscales, elles tendent aujourd’hui à s’épuiser. Les comptes publiques se trouvent aujourd’hui entre deux feux : d’un côté le risque d’une hausse non maîtrisée des dépenses contraintes en raison du faible taux de croissance économique et d’un retour prévu de l’inflation alimentaire, et d’un autre celui que les recettes fiscales - particulièrement celles en devises très corrélées à l’activité économique mondiale - ne se rétablissent pas suffisamment vite. Après cinq années de baisses consécutives, la dette publique va très probablement croître en 2010.

Dans ce contexte, l’Etat ne pourra pas non plus soutenir le même effort de relance budgétaire qu’en 2009/2010, ce qui rendra la croissance encore plus sensible à la conjoncture mondiale. L’une de ses priorités sera d’attirer en nombre les investisseurs étrangers afin d'alimenter la croissance et de lui redonner des marges de manœuvre face à une situation sociale qui tend à se durcir. Les offres de Public Private Partnership en direction des investisseurs devraient ainsi se multiplier.

Riadh EL-HAFDHI [email protected]

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Pays émergents

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 34

Russie : encourageant, mais…

Le trimestre précédent a confirmé la reprise économique et cela semble devoir se poursuivre. La Banque centrale devrait continuer de baisser les taux pour desserrer les conditions financières et lisser l’appréciation du RUB. Toutefois, la monnaie et l’économie resteront vulnérables étant donné que peu de réformes structurelles ont été initiées.

La reprise fragile enregistrée au cours des derniers trimestres s’est transformée en rebond solide et tous les problèmes semblent avoir été résolus. L’économie affiche un repli de 7,9 % en 2009, soit une performance meilleure qu’attendu. Grâce à la stabilisation des prix du pétrole, du taux de change et du ratio de prêts non performants, la croissance devrait redevenir positive en 2010, à 3,5 % en glissement annuel.

Même la demande intérieure, bien que fragile et ayant pesé sur le rythme de la reprise, a donné des signes positifs. La croissance positive des salaires en termes réels et la stabilisation du taux de chômage laissent penser que cette reprise n’est pas finie.

Il n’en reste pas moins que cette embellie ne modifiera probablement pas la politique accommodante de la Banque centrale. Cette dernière procède certes à un réglage fin de sa politique, mais le cycle de desserrement des conditions financières et monétaires n’est pas fini tant que la tendance à la désinflation se poursuit. De nouvelles baisses des taux devraient donner un ballon d’oxygène aux ménages endettés. Ces baisses sont aussi destinées à lisser l’appréciation globalement rapide du RUB. De fait, on a assisté à des entrées massives de capitaux au cours du dernier trimestre, entraînant un raffermissement du RUB. La Banque centrale va continuer d’intervenir sur les marchés des changes et de baisser le plancher du corridor de fluctuation du change. Les opérations de stérilisation devraient s’intensifier pour neutraliser les effets de l’afflux de capitaux.

Il faut reconnaître que l’appréciation du RUB est un signe que l’on peut considérer comme encourageant, mais la monnaie nationale reste vulnérable. Les autorités n’ont pas réellement saisi l’occasion d’initier les réformes structurelles nécessaires. L’économie en Russie demeure très peu diversifiée : elle reste principalement axée sur le pétrole avec peu d’exportations de produits manufacturés et une grande rigidité des prix. Une forte variation des prix du pétrole ou un rebond de l’inflation auront les mêmes conséquences que précédemment, entraînant un net repli du RUB et mettant en danger la reprise économique.

Guillaume TRESCA [email protected]

Turquie : un redressement encore hésitant

Le chiffre de production industrielle pour janvier a déçu après le vif rebond de décembre. L’activité économique devrait en fait rester molle à court terme. Plusieurs évolutions ou événements récents restreignent, en effet, les possibilités qu’il en soit autrement. Le déficit de la balance courante devrait, par ailleurs, repartir à la hausse cette année, rappelant au passage que la Turquie est dépendante des capitaux étrangers.

La production industrielle avait fait un bond de 25,3 % a/a en décembre 2009. Au-delà d’un effet de base certes très favorable, cette performance avait laissé entendre que la demande domestique pourrait repartir un peu plus rapidement que prévu. Cela restait tout de même à confirmer. Le chiffre de janvier ne l’a pas fait. L’industrie a vu sa production croître de 12,1 % a/a. La reprise risque en fait de rester hésitante à court terme. Les difficultés de la Grèce sont venues troubler les perspectives de rebond européen. Le chômage a continué d’augmenter en fin d’année dernière. L’inflation s’est accélérée à 10,1 % a/a en février (contre un point bas à 5,1 % a/a en octobre 2009). Les négociations (sur un nouveau programme d’aide) entre le FMI et Ankara ont été interrompues début mars. Et les relations entre l’AKP, d’un côté, l’armée et le pouvoir judiciaire, de l’autre, se sont tendues ces dernières semaines. Sans inquiéter, ces nouvelles donnes créent un peu plus d’incertitude et ne favorisent sans doute pas le raffermissement de l’activité économique.

Le déficit de la balance courante s’est par ailleurs élevé à 2,96 Mds USD en janvier, soit à un niveau six fois supérieur à celui de janvier 2009. En rythme annuel, cela représente un déficit de 30 à 35 Mds USD, soit encore 4 % à 5 % du PIB. La Turquie est dépendante des financements étrangers et, donc, sensible aux humeurs des investisseurs. Ce n’est pas nouveau et cela ne changera ni à court, ni à moyen terme. Le redressement de la balance courante l’an dernier n’a été que la conséquence heureuse d’une forte contraction de la demande interne.

Sylvain LACLIAS [email protected]

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Pays émergents

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 35

Inde : vers des politiques plus restrictives

L’amélioration des perspectives de croissance permet aux autorités monétaires et budgétaires de s’orienter prudemment vers des politiques plus restrictives

Après une croissance économique décevante au quatrième trimestre 2009, l’économie indienne semble prête pour une nouvelle accélération : l’impact négatif de la mauvaise mousson s’estompe et les exportations poursuivent leur redressement. Nous tablons sur une progression du PIB de 7,0 % pour l’exercice 2011 (qui débutera en avril 2010).

Le budget de l’exercice 2011, présenté au début du mois, va dans le bon sens. Le gouvernement a fait des efforts méritoires en direction de la consolidation budgétaire. Le déficit du gouvernement central devrait se réduire, passant de 6,7 % du PIB en 2010 à 5,5 % du PIB en 2011. En outre, le gouvernement a fixé un objectif à moyen terme de 4,1 % du PIB en 2013. Par ailleurs, la crédibilité du projet budgétaire est étayée par des hypothèses de croissance réalistes et des mesures importantes, comme la poursuite des cessions, un projet d’introduction d’un impôt sur les biens et les services en 2011, la réduction des exonérations fiscales et le relèvement du taux de certains impôts, comme les droits d’accise. Ainsi, la réduction programmée du déficit budgétaire ne devrait pas s’effectuer aux dépens des investissements de développement. C’est à saluer, d’autant que les besoins d’infrastructure sont particulièrement importants.

L’Inde vient toutefois de connaître des mois difficiles. L’inflation, mesurée par l’évolution de l’indice des prix de gros, s’est accélérée, passant d’un taux négatif au milieu de l’année dernière à près de 10 % en rythme annuel en février. Elle pourrait culminer au cours des prochains mois. Toutefois, même si elle se modère à partir du début du deuxième trimestre, les dernières hausses mensuelles permettent de penser qu’elle devrait rester supérieure à la zone de confort de la Banque centrale à plus long terme. La RBI augmentera probablement encore son ratio de réserves et devrait commencer à relever les taux d’intérêt à partir d’avril, selon nous. Nous anticipons 125 pdb de hausse du taux repo et reverse repo.

Chine : le raffermissement du yuan remis à plus tard

La politisation de la question du yuan retardera probablement la reprise de son appréciation. Celle-ci est cependant incontournable pour limiter le risque de bulle sur les actifs et d’inflation.

Les tensions politiques s’accumulent entre la Chine et les Etats-Unis sur la question du CNY. À l’occasion de la session de clôture du Congrès national du peuple, le Premier ministre chinois a nié la sous-évaluation du CNY et a répété ses inquiétudes quant à la valeur des actifs de la Chine libellés en USD. Les tensions devraient rester soutenues jusqu’à la mi-avril, lorsque le Trésor américain décidera ou non d’accuser la Chine de manipuler les taux de change. La politisation de la question du CNY nous incite à penser qu’il est peu probable que la Chine intervienne sur sa monnaie avant la seconde partie du deuxième trimestre.

Toutefois, les défis macroéconomiques continueront de prendre de l’ampleur. La croissance économique dynamique (10,7 % en rythme annuel au T4) et l’expansion monétaire soutenue ont entraîné une accélération de l’inflation, à 2,7 % en rythme annuel en février. Le risque de bulles sur les actifs demeure une source croissante d’inquiétude. Ce n’est pas tout. Le peg du CNY à l’USD alimente les déséquilibres, selon nous. L’on craint que la Banque centrale ait perdu le contrôle de l’inflation et bon nombre d’intervenants sur les marchés financiers sont prêts à parier sur une appréciation du CNY à plus long terme. De ce fait, l’afflux de capitaux spéculatifs devrait rester soutenu, alimentant la liquidité intérieure et le risque d’inflation et de bulles.

Nous pensons que la Chine finira par être contrainte d’intervenir. Elle attendra cependant probablement que l’environnement politique redevienne plus serein. Un autre facteur pourrait aussi l’inciter à tarder à intervenir sur le CNY. L’USD a entraîné le CNY dans son sillage dans sa récente ascension contre l’euro, ce qui rend plus difficile la reprise de l’appréciation du CNY dans l’immédiat par rapport à il y a deux ou trois mois. Nous estimons désormais que le CNY devrait recommencer à s’apprécier vers la fin du deuxième trimestre (et non plus à partir de la fin du premier trimestre ou du début du deuxième).

Sebastien BARBE [email protected]

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Pays émergents

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 36

Mexique : laborieux

Les signes d'un redémarrage sont là. Il ne sera pas exceptionnel : le recul de 2009 ne sera pas entièrement résorbé. Mais à nouveau, le Mexique va tirer profit de la reprise aux Etats-Unis, qui sera probablement soutenue en cours d'année par une demande domestique encore à la traîne.

L'économie mexicaine redémarre, lentement. La plupart des indicateurs sont bien orientés. En janvier, les exportations progressaient ainsi de 27,5 % a/a, la production manufacturière de 9,7 % a/a (deuxième mois consécutif de hausse), et en décembre même les ventes de détail avaient pour la première fois depuis août 2008 augmenté en volume de 1,6 % a/a. La demande extérieure (au Mexique : celle des Etats-Unis) est le principal moteur de la croissance. La demande domestique reste en retrait. Par exemple, les ventes d'automobiles ou la construction reculent toujours.

Au total, il s'agit donc d'une reprise assez modeste. Même les exportations restent au-dessous de leur niveau du troisième trimestre 2007. Le recul de l'activité a cependant été tel en 2009 (le PIB s'est contracté de 6,5 %) que le Mexique devrait retrouver la tendance (modeste) de croissance des années 2003-2008 (3,4 %). Le principal risque à cette reprise est celui d'une poussée inflationniste qui conduirait la Banque du Mexique à relever son taux directeur. En février, l'indice des prix à la consommation était déjà en hausse de 4,8 % a/a, nettement au-dessus des 3,6 % de décembre 2009. Une croissance de 3,5% ne serait pourtant pas exceptionnelle pour un pays disposant des ressources du Mexique, mais aller au-delà exigerait des réformes structurelles bien connues (fiscalité, pétrole, éducation…) mais très improbables à court terme.

Jean-Louis MARTIN [email protected]

Brésil : bientôt les hausses de taux

Le redressement de l’économie brésilienne est bien engagé, mais le rythme de croissance actuel ne pourra clairement pas perdurer. L’inflation est repartie à la hausse, de même que les anticipations. Cette situation laisse supposer qu’un ajustement de la politique monétaire est imminent, et qu’il sera sans doute plus marqué qu’initialement prévu.

L’économie brésilienne a continué de croître au dernier trimestre, stimulée comme prévu par l’investissement privé et par la consommation. La vigueur de l’économie à ce jour, et le fait que la croissance soit tirée par l'investissement privé, conforte encore notre opinion que le pays en serait aux premiers stades d'un long cycle de croissance. Nos prévisions actuelles de croissance du PIB réel se situent à 5,3 % pour 2010 et 4,2 % pour 2011.

D’un autre côté, l’inflation se révèle plus importante que prévu depuis le mois de décembre. Bien que la plupart des pressions sur les prix ne soient pas liées à la demande, elle a eu un certain impact sur les prévisions d’inflation à court et moyen terme. La hausse des prévisions d’inflation, couplée au sentiment croissant que l'output gap se resserre plus vite que prévu, va probablement donner lieu sous peu à un relèvement des taux d'intérêt. Nous tablons à présent sur une première hausse d’un demi-point du taux Selic en avril plutôt qu’en juin. Nous avons également relevé notre estimation à fin 2010 de 11 % à 11,5 %. A moyen terme cependant, la croissance devrait ralentir vers des niveaux plus soutenables, ce qui laissera une certaine marge de manœuvre pour des baisses de taux au second semestre 2011.

Le BRL devrait rester relativement proche de son niveau actuel au cours des deux prochaines années. D’un côté, le déficit courant va se creuser, du fait d’une progression de la demande intérieure toujours plus rapide que la croissance du PIB. D’un autre côté, la forte croissance et des taux d’intérêt réels très élevés devraient continuer d'attirer les flux de capitaux dans le pays.

Vladimir VALE [email protected]

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Pays émergents

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 37

GCC : les économies de la région se redressent à des rythmes différents

Pour les économies du Golf, la hausse des cours pétroliers à 70 USD et plus induit les effets d’une importante relance budgétaire. Le climat de confiance, l’insuffisance du crédit bancaire et la timidité du secteur privé représentent de leur coté autant de freins à la croissance économique. L'inflation n'est pas encore extrêmement préoccupante compte tenu d’une demande intérieure réduite et de la bonne tenue du dollar américain. Les perspectives macroéconomiques pour l’Arabie saoudite sont les plus encourageantes de toute la région.

Les prix du pétrole ont atteint en moyenne 77 USD le baril au cours des deux premiers mois de 2010, avant de monter encore au-dessus de 80 USD en mars, ce qui a permis de soutenir une reprise économique prudente des pays du Golfe. Les principaux freins pour cette région exportatrice d'or noir sont la stagnation du crédit bancaire, le manque de dynamisme du secteur privé, les incertitudes autour de l'ampleur exacte des problèmes liés à la dette de Dubaï et la part des créances douteuses dans le bilan des banques. Tandis que 2010 devrait être, dans l’ensemble, une année de reprise économique, des évolutions divergentes apparaissent entre les différents pays du Golfe, les meilleures perspectives macroéconomiques étant celles de l’Arabie saoudite, suivie d’Abou Dabi et du Qatar.

En 2008, l’Arabie saoudite a entrepris un plan d'investissement quinquennal de 400 Mds USD, soit le plan de relance le plus ambitieux du G20 en pourcentage du PIB d’après le FMI, soit plus de 111 % du PIB de 2009. Ce plan est adossé aux 411 Mds USD d’actifs étrangers de la Banque centrale (dernier chiffre disponible). A ce jour, l’État a dépensé près d’un tiers de ce budget, ce qui laisse supposer qu’il devrait aisément atteindre son objectif pour 2013. Bien que l’Arabie saoudite ait enregistré un léger déficit budgétaire en 2009, elle réduit également son endettement depuis 2002, une tendance qui devrait se poursuivre cette année. Le ratio dette/PIB du pays devrait même reculer à 13,2 % en 2010.

Les recettes des exportations pétrolières saoudiennes devraient permettre au pays d’enregistrer des excédents courant et budgétaire en 2010. La dette extérieure brute fait partie des plus faibles parmi les pays du Golfe et la dette actuelle de l'État est exclusivement domestique. Aucune bulle d'actifs n’a été constatée en Arabie saoudite, et une nouvelle loi sur les prêts hypothécaires (attendue d'ici au second semestre) devrait améliorer la situation de l’offre de logements à moyen terme ainsi que l’intermédiation financière des banques. La croissance saoudienne s’appuie sur une population de 25 millions d’habitants, dont quelque 7,5 millions d’expatriés, qui croît d’environ 2,5 % par an. Des tendances positives sont visibles dans les statistiques du crédit bancaire et du commerce extérieur, les importations et les exportations hors pétrole ayant atteint en décembre leurs plus hauts niveaux de 2009.

L’économie des Émirats arabes unis se redresse plus lentement en raison de l'effondrement du marché immobilier et de l'érosion de la demande intérieure. Abou Dabi, qui détient la majeure partie des réserves pétrolières des Émirats, est plus riche et moins endetté que Dubaï, et il devrait voir son PIB croître de 3,8 % en 2010, tandis que celui de Dubaï est appelé à se contracter. Cependant, ses banques et entreprises familiales sont également exposées aux difficultés immobilières de son voisin.

GCC : prévisions 2010

0%5%

10%15%20%25%

Arab

iesa

oudi

te

EAU

Kow

eit

Qat

ar

Om

an

Bahr

ein

-2%

0%

2%

4%

6%

PIB réel IPC (éch. dr.)

Source : Crédit Agricole CIB

Ratios dette/PIB estimésdes États du Golfe en 2009

(% PIB)

180,5%

67,7%

38,0%23,5% 19,6% 17,1%

Bahr

ein

Qat

ar

EAU

Kow

ait

Arab

iesa

oudi

te

Om

an

Source : FMI

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Pays émergents

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 38

Le Qatar devrait enregistrer la plus forte croissance du PIB au niveau mondial en 2010 (19,2 % environ) du fait de l’accélération de sa production de gaz naturel, mais le pays reste pris dans un cycle de déflation engendré par la baisse des prix immobiliers qui devrait persister cette année avec l’augmentation de l'offre. Au Qatar, les prix à la consommation ont chuté de 4,7 % en 2009, et en janvier la déflation a atteint 5,7 %. Les Émirats connaissent encore une faible inflation, qui devrait s’élever en moyenne à 2,4 % en 2010 selon les estimations, contre 1,6 % en 2009. Dans les autres pays, la hausse des prix s'accélère du fait du renchérissement des produits alimentaires à l'échelle mondiale et des niveaux élevés des loyers sur certains marchés. En Arabie saoudite, l’inflation est montée à 4,6 % en février, tandis que dans le Sultanat d’Oman, où elle était tombée à moins de 1 % à la fin de l’année dernière, elle est repartie à la hausse à 1,7 % en janvier.

Le parlement koweitien a voté en février l’adoption d’un plan de développement de 104 Mds USD sur quatre ans visant à réduire la dépendance pétrolière et à stimuler le secteur privé. En complément de ce plan, la Banque centrale a abaissé son taux directeur à 2,5 %. Ces mesures positives confortent notre estimation de croissance du PIB de 3,8 % en 2010, après une contraction estimée à 2,7 % l’année dernière. La croissance économique d’Oman devrait atteindre 3,9 % en 2010, après 1,6 % en 2009. Le Sultanat, qui a fait d’importants efforts de diversification, a été préservé de la crise financière mondiale et des problèmes de dette de Dubaï. Le PIB de Bahreïn devrait progresser de 3,6 % en 2010 suite au renforcement des investissements, des services et du tourisme.

John SFAKIANAKIS [email protected]

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Prévisions taux d’intérêt

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 39

Au 29 mars 2010

29-mars juin-10 sept-10 déc-10 mars-11 juin-11 sept-11 déc-11

Etats-Unis Fed funds 0-0.25 0-0.25 0-0.25 0-0.25 0-0.25 1,00 2,00 2,25 3 mois 0,29 0,40 0,50 0,70 1,00 1,50 2,50 2,75 Taux 2 ans 1,04 1,90 2,75 3,25 3,25 3,50 3,75 4,00 Taux 10 ans 3,87 4,20 4,50 4,50 4,50 4,50 4,50 4,50Japon Call 0,10 0,10 0,10 0,10 0,10 0,25 0,50 0,50 3 mois 0,24 0,40 0,40 0,40 0,40 0,60 0,70 0,70 Taux 2 ans 0,18 0,20 0,20 0,20 0,30 0,50 0,60 0,60 Taux 10 ans 1,41 1,40 1,50 1,60 1,60 1,80 2,00 2,00Zone euro Repo 1,00 1,00 1,00 1,25 1,75 2,25 2,50 2,75 3 mois 0,58 0,90 1,40 1,80 2,30 2,80 3,20 3,40 Taux 2 ans 0,98 2,00 2,75 3,25 3,50 3,75 4,00 4,00 Taux 10 ans (All.) 3,13 3,85 4,20 4,40 4,40 4,40 4,40 4,40Royaume-Uni Taux de base 0,50 0,50 0,50 0,50 1,00 1,75 2,50 3,25 3 mois 0,65 0,80 0,80 0,80 1,40 2,15 2,90 3,65 Taux 2 ans 1,18 2,20 2,75 3,25 3,50 3,75 4,00 4,00 Taux 10 ans 3,98 4,20 4,40 4,60 4,50 4,50 4,50 4,50Suède Repo 0,25 0,25 0,75 1,50 2,00 2,50 3,00 3,00 3 mois 0,50 0,60 1,10 1,90 2,30 2,80 3,30 3,30 Taux 10 ans 3,20 4,10 4,20 4,30 4,30 4,40 4,40 4,40Norvège Deposit 1,75 2,00 2,25 2,50 2,75 3,00 3,25 3,50 3 mois 2,20 2,40 2,65 2,85 3,05 3,25 3,50 3,75 Taux 10 ans 3,78 4,60 4,70 4,70 4,80 4,80 4,80 4,80Suisse 3 mois 0,25 0,25 0,25 0,50 0,75 1,00 1,25 1,50 Taux 10 ans 1,91 2,35 2,50 2,70 2,70 2,70 2,70 2,70Canada Overnight Target 0,25 0,25 0,75 1,25 1,75 2,25 2,50 2,50 3 mois 0,40 0,50 1,00 1,60 2,15 2,65 2,80 2,80 Taux 10 ans 3,58 3,90 4,40 4,50 4,60 4,60 4,60 4,60Australie Cash Target 4,00 4,00 4,50 5,00 5,00 5,00 5,00 5,00 3 mois 4,50 4,60 5,00 5,50 5,50 5,50 5,50 5,50 Taux 10 ans 5,79 5,70 5,80 6,00 6,00 6,20 6,30 6,30Nouvelle-Zélande Official Cash Rate 2,50 3,00 3,50 4,00 4,50 5,00 5,00 5,00 3 mois 2,73 3,30 3,80 4,30 4,80 5,30 5,40 5,50 Taux 10 ans 6,02 6,10 6,30 6,40 6,50 6,50 6,60 6,60

Page 40: Perspectives Macro 128 Fr

Prévisions taux d’intérêt

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 40

30-mars juin-10 sept-10 déc-10 mars-11 juin-11 sept-11 déc-11Asie Chine 1Y lending rate 5,31 5,58 5,85 5,85 5,85 6,12 6,39 6,39 Hong Kong Base rate 0,50 0,50 0,50 0,50 0,50 1,00 1,50 2,00 Inde Repo rate 5,00 5,50 6,00 6,00 6,00 6,00 6,50 6,50 Indonésie BI rate 6,50 7,00 7,25 7,75 7,75 7,75 7,75 7,75 Corée Call rate 2,00 2,25 2,50 2,75 3,00 3,50 3,50 3,50 Malaisie OPR 2,25 2,25 2,50 2,50 2,50 3,00 3,00 3,00 Philippines Repo rate 4,00 4,50 5,00 5,00 5,00 5,50 5,50 5,50 Singapour 6M SOR 0,62 0,80 0,90 0,95 1,00 1,40 1,80 2,20 Taiw an Redisc 1,25 1,50 1,75 2,00 2,00 2,25 2,50 2,50 Thaïlande Repo 1,25 1,50 2,00 2,25 2,50 2,75 3,00 3,00 Vietnam Prime rate 7,00 10,00 10,00 10,00 10,00 10,00 10,00 10,00

Amérique latine Argentine 3M deposit 10,25 11,00 11,00 11,00 11,00 11,50 12,00 12,00 Brésil Overnight/Selic 8,75 9,75 10,75 11,50 11,50 11,50 11,00 11,00 Mexique Overnight rate 4,50 4,50 4,75 4,75 4,75 5,00 5,25 5,25Europe émergente Rép. Tchèque 14D repo 1,00 1,00 1,00 1,25 1,50 1,75 2,00 2,00 Hongrie 2W repo 5,50 5,50 5,50 5,50 5,50 5,75 6,00 6,25 Pologne 7D repo 3,50 3,50 3,50 3,50 3,50 3,75 4,00 4,25 Roumanie 2W repo 6,50 6,50 6,50 6,50 6,50 7,00 7,50 7,50 Russie Refinancing rate 8,50 8,00 8,00 8,25 8,75 9,25 9,50 9,50 Turquie Overnight 6,50 6,50 6,50 7,00 8,00 8,75 9,50 9,75Afrique & Moyen Orient Afrique du Sud Repo 6,50 6,50 6,50 7,00 7,00 7,25 7,50 7,75 EAU Repo 1,00 1,00 1,00 1,00 1,00 1,50 2,00 2,50 Arabie saoudite Repo 2,00 2,00 2,00 2,00 2,00 2,50 3,00 3,50

Page 41: Perspectives Macro 128 Fr

Prévisions taux de change

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 41

Au 29 mars 2010

Taux de change USD 29-mars juin-10 sept-10 déc-10 mars-11 juin-11 sept-11 déc-11Pays industrialisés Euro EUR/USD 1,34 1,33 1,28 1,25 1,23 1,21 1,19 1,18 Japon USD/JPY 93 94 98 100 104 106 108 110 Royaume-Uni GBP/USD 1,50 1,49 1,49 1,51 1,52 1,55 1,55 1,55 Suisse USD/CHF 1,06 1,11 1,16 1,19 1,22 1,25 1,28 1,30 Canada USD/CAD 1,02 1,01 1,03 1,05 1,08 1,09 1,10 1,12 Australie AUD/USD 0,91 0,95 0,93 0,91 0,89 0,87 0,86 0,86 Nouvelle-Zélande NZD/USD 0,71 0,76 0,74 0,72 0,71 0,70 0,69 0,69Asie Chine USD/CNY 6,83 6,70 6,60 6,50 6,43 6,35 6,28 6,20 Hong Kong USD/HKD 7,76 7,80 7,80 7,80 7,80 7,80 7,80 7,80 Inde USD/INR 44,96 43,50 42,00 41,00 40,80 40,50 40,30 40,00 Indonésie USD/IDR 9 085 9 100 9 050 9 000 8 975 8 950 8 925 8 900 Malaisie USD/MYR 3,27 3,28 3,25 3,22 3,18 3,14 3,09 3,05 Philippines USD/PHP 45,25 44,50 44,00 43,50 43,00 42,50 42,00 41,50 Singapour USD/SGD 1,40 1,37 1,35 1,34 1,33 1,32 1,31 1,30 Corée du Sud USD/KRW 1 132 1 060 1 020 1 000 990 970 960 950 Taiwan USD/TWD 31,79 31,20 30,70 30,00 29,75 29,50 29,25 29,00 Thaïlande USD/THB 32,36 32,40 31,80 31,50 31,30 31,00 30,80 30,50 Vietnam USD/VND 19 085 19 300 19 400 19 500 19 500 19 500 19 500 19 500Amérique latine Argentine USD/ARS 3,87 4,06 4,18 4,31 4,37 4,42 4,48 4,54 Brésil USD/BRL 1,81 1,80 1,77 1,75 1,75 1,75 1,75 1,75 Mexique USD/MXN 12,47 12,70 12,40 12,38 12,35 12,33 12,30 12,30Afrique & Moyen-Orient Afrique du Sud USD/ZAR 7,41 7,90 7,85 7,80 7,73 7,65 7,58 7,50Europe - émergents Pologne USD/PLN 2,89 2,78 2,81 2,80 2,76 2,73 2,69 2,63 Russie USD/RUB 29,55 30,74 31,35 31,46 31,45 30,79 29,94 29,05 Turquie USD/TRY 1,53 1,44 1,42 1,40 1,39 1,38 1,37 1,36Parités croisées contre euroPays industrialisés Japon EUR/JPY 124 125 125 125 128 128 129 130 Royaume-Uni EUR/GBP 0,90 0,89 0,86 0,83 0,81 0,78 0,77 0,76 Suisse EUR/CHF 1,43 1,47 1,48 1,49 1,50 1,51 1,52 1,53 Suède EUR/SEK 9,78 9,90 9,80 9,70 9,60 9,50 9,50 9,40 Norvège EUR/NOK 8,06 8,05 8,00 7,80 7,60 7,50 7,50 7,40Europe centrale République tchèque EUR/CZK 25,46 24,00 24,00 22,50 22,00 21,50 21,00 20,50 Hongrie EUR/HUF 266 260 260 260 255 250 245 240 Pologne EUR/PLN 3,88 3,70 3,60 3,50 3,40 3,30 3,20 3,10 Roumanie EUR/RON 4,07 4,30 4,30 4,30 4,30 4,30 4,30 4,30

Page 42: Perspectives Macro 128 Fr

Scénario économique du Groupe Crédit Agricole S.A.

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 42

Au 29 mars 2010

2009 2010 2011 2009 2010 2011 2009 2010 2011Etats-Unis -2,4 3,0 3,1 -0,3 2,2 2,1 -3,0 -3,4 -3,6Japon -5,0 1,9 1,6 -1,3 -0,8 -0,5 2,5 4,3 4,6Zone euro -4,0 0,9 1,2 0,3 1,1 1,7 -0,6 -0,5 -0,4 Allemagne -4,9 1,6 1,6 0,2 0,6 1,3 5,0 4,5 6,0 France -2,2 1,1 1,3 0,1 1,3 1,6 -2,0 -1,9 -2,0 Italie -5,1 0,4 0,7 0,8 1,2 1,8 -3,3 -2,3 -2,1 Espagne -3,6 -0,4 0,6 -0,3 1,5 2,5 -5,1 -3,5 -3,0

Royaume-Uni -4,9 1,1 1,8 2,2 2,4 1,5 -2,6 -2,4 -2,0 Norvège -1,4 1,6 2,3 2,2 2,5 2,3 13,8 14,0 15,0 Suède -4,7 0,5 2,7 -0,3 1,6 2,3 6,2 7,0 7,0 Suisse -1,8 0,6 1,6 -0,6 0,7 1,0 6,0 7,0 7,0

Canada -2,6 3,1 3,0 0,3 1,8 1,9 -2,9 -2,1 -1,6 Australie 1,7 2,5 3,2 1,5 2,1 2,2 -4,0 -5,0 -5,0 Nouvelle-Zélande -1,9 2,1 3,1 1,8 2,1 2,0 -6,5 -6,0 -6,0Asie 5,9 7,2 7,5 0,7 3,6 4,0 4,2 3,4 3,5 Chine 8,7 9,0 9,0 -0,7 3,0 3,5 6,0 5,0 5,5 Hong Kong -2,7 5,0 5,0 0,7 1,8 3,0 12,0 9,0 9,0 Inde 7,5 7,0 7,5 1,9 5,0 5,5 -1,5 -1,0 -1,0 Indonésie 4,5 5,0 5,3 4,9 5,8 5,0 2,3 2,0 1,3 Corée 0,2 4,0 5,0 2,7 3,0 3,5 5,2 3,0 2,0 Malaisie -1,7 4,0 5,5 0,7 2,0 2,5 14,0 12,0 13,0 Philippines 1,3 4,5 5,5 3,5 4,5 5,0 5,0 3,5 2,5 Singapour -2,0 5,5 6,0 0,5 2,5 3,0 12,5 15,5 14,0 Taiwan -1,9 5,0 5,5 -0,8 1,5 2,0 9,0 7,5 7,0 Thaïlande -2,3 4,0 4,5 -0,8 2,5 3,0 6,5 4,5 5,0 Vietnam 4,1 4,5 4,5 6,6 6,0 8,0 -11,0 -8,0 -8,0Amérique latine -2,6 4,1 3,7 6,7 5,5 5,2 -1,4 -1,8 -2,2 Argentine -3,0 2,8 2,5 14,8 10,0 10,0 0,5 1,0 1,0 Brésil 0,2 5,3 4,2 4,9 4,7 4,5 -1,5 -3,0 -3,5 Mexique -6,5 3,0 3,5 5,3 4,5 4,0 -2,1 -1,4 -2,0Europe - émergents -5,4 2,8 4,0 7,8 6,2 6,4 0,9 0,6 0,0 République tchèque -4,3 1,5 3,0 0,5 0,7 2,0 -2,0 -2,5 -2,8 Hongrie -6,3 -0,3 2,5 5,4 3,5 3,5 0,3 -1,5 -2,5 Pologne 1,7 2,3 3,4 3,8 2,9 2,8 -1,4 -2,3 -3,0 Russie -7,9 3,5 4,5 11,5 8,0 8,5 3,9 4,5 4,0 Roumanie -7,0 1,0 2,0 6,0 5,0 5,5 -5,5 -5,0 -6,0 Turquie -5,9 3,5 4,5 6,3 8,0 7,0 -2,2 -3,7 -4,5Afrique & Moyen-Orient 0,3 3,5 4,3 5,1 5,0 5,5 -0,1 0,5 2,0 Algérie 2,6 4,5 4,3 5,9 4,2 4,9 -2,0 1,7 0,5 Egypte 4,7 4,8 5,5 11,8 11,0 9,0 -1,5 -1,0 0,0 Koweït -2,7 3,8 4,1 4,6 3,6 4,4 22,3 29,5 22,4 Liban 7,0 6,0 5,5 1,2 3,0 3,0 6,0 -9,5 -6,5 Maroc 4,7 4,0 4,4 1,2 2,4 2,6 -3,3 -5,0 -3,5 Qatar 11,0 19,2 7,2 -4,9 -1,0 3,5 4,5 11,9 20,3 Arabie saoudite 0,2 3,9 4,8 5,1 4,3 4,8 0,9 2,0 9,8 Afrique du Sud -1,4 2,0 3,5 7,1 6,6 7,0 -4,8 -5,2 -5,0 Emirats arabes unis -3,6 2,0 3,9 1,4 2,4 4,1 4,1 4,3 5,0 Tunisie 3,0 3,5 4,5 3,7 3,7 3,0 -3,8 -2,5 -2,5Total -0,8 3,6 3,9 1,2 2,7 2,9 0,4 0,2 0,3Pays industrialisés -3,2 2,1 2,2 -0,2 1,4 1,6 -1,1 -1,0 -1,0Pays émergents 2,7 5,8 6,2 2,9 4,3 4,7 2,5 2,0 2,1

Notes:(1) Royaume-Uni : HICP ; Inde : prix de gros ; Chine, index prix de détail ; Brésil : IPCA, Afrique du Sud : CPI-X(2) Inde : f in de l'année f iscale en mars.

PIB (a/a, %) Inflation (a/a, %) Balance courante(en % du PIB)

Page 43: Perspectives Macro 128 Fr

Budget – Matières premières

Perspectives Macro - N°128 – 2e trimestre 2010 43

Au 29 mars 2010

2009 2010 2011 2009 2010 2011Etats-Unis -9,9 -10,6 -8,3 53,0 63,6 68,6Japon -11,3 -10,9 -9,7 184,0 197,0 206,0Zone euro -6,4 -6,9 -6,1 78,4 84,3 88,8

Allemagne -3,3 -5,5 -4,9 72,7 77,0 80,4France -8,0 -8,2 -7,5 77,0 84,0 89,8Italie -5,3 -5,2 -4,7 115,6 119,1 121,8Espagne -11,4 -10,3 -8,3 55,2 66,6 74,9Pays-Bas -4,9 -6,2 -5,2 62,3 67,8 71,6Belgique -5,9 -4,8 -4,3 97,9 100,8 102,9Grèce -12,8 -8,9 -5,9 113,4 123,4 128,2Irlande -11,7 -11,7 -11,0 64,5 78,0 86,8Portugal -9,3 -8,8 -8,2 76,8 84,9 91,7

Royaume-Uni -13,3 -12,7 -10,0 70,0 83,0 88,0

Solde budgétaire Dette publique

T1 T2 T3 T4 Année T1 T2 T3 T4 AnnéeMétaux Aluminium USD/t 2 190 2 180 2 400 2 300 2 320 2 300 2 300 2 500 2 450 2 750 2 500 2,650 (120c/lb) Cuivre USD/t 7 479 7 250 7 650 7 400 7 700 7 500 7 500 8 000 8 000 8 500 8 000 4,960 (225c/lb) Nickel USD/t 23 569 19 700 21 000 17 300 22 000 20 000 22 000 24 000 23 000 27 000 24 000 15,432 (700c/lb) Zinc USD/t 2 197 2 300 2 350 2 200 2 450 2 325 2 500 2 600 2 600 2 700 2 600 1,764 (80c/lb) Plomb USD/t 2 096 2 260 2 100 2 440 2 800 2 400 2 800 2 600 2 700 2 700 2 700 1,323 (60c/lb) Etain USD/t 17 595 17 150 20 000 19 000 23 850 20 000 23 000 24 000 24 000 25 000 24 000 15,000 (680c/lb)

Métaux précieux Or USD/oz 1 114 1 091 1 120 1 220 1 220 1 185 1 100 1 050 1 000 950 1 025 650 Argent USD/oz 17,4 16,7 17,0 19,8 19,0 18,5 19,0 19,5 20,5 21,0 20,0 7,0 Platine USD/oz 1 619 1 590 1 560 1 625 1 675 1 650 1 750 1 725 1 750 1 775 1 750 1 200 Palladium USD/oz 476 452 450 470 505 500 550 565 590 600 576 300

2010 2011 Prix à long terme29-mars

T1 09 T2 09 T3 09 T4 09 T1 10 T2 10 T3 10 T4 10 T1 11 T2 11 T3 11 T4 11WTI $/BBL 43 60 68 76 78 68 72 76 75 70 70 75Brent $/BBL 44 59 68 75 77 67 72 75 74 69 70 74

Pétrole

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