Partie 1 : Fondements de la réflexion stratégique

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Partie 1 : Fondements de la réflexion

stratégique

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Chapitre 1 : Politique et stratégie

d'entreprise : Rappels, notions et contexte

Section I : Entreprise et Gestion : Définitions et concepts

I- Définition et caractéristiques de l’entreprise

L’entreprise peut être définie comme « un groupe humain de production, autonome, disposant

d’un patrimoine, exerçant un effet d’attraction sur son environnement et dont le devenir

dépend de la vente du produit de son activité » [Capet, Gausse et Meunier, 1986].

A partir de cette définition, on peut ressortir six (6) caractéristiques fondamentales de

l’entreprise, à savoir :

L’entreprise est un groupe humain

L’entreprise ne peut exister que suite à l’association de deux personnes ou plus pour la

production d’un bien ou d’un service. Elle constitue une entité dont le développement et la

survie dépend de la contribution de chacun de ses membres dans l’exercice de ses activités.

L’entreprise est un groupe de production

Les membres d’une entreprise s’associent afin de fabriquer et/ou commercialiser un produit

ou un service. Ce produit peut être matériel, tangible (un ordinateur, une voiture…) ou un

bien immatériel, intangible, c’est-à-dire un service (banque, assurances…).

L’entreprise est autonome

L’entreprise constitue un groupe autonome dans un cadre légal bien déterminé. Elle dispose

de l’autonomie financière dans la mesure où elle peut utiliser ses ressources financières dans

le cadre de son activité.

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Elle dispose aussi de l’autonomie décisionnelle, elle fixe librement selon les orientations de

son équipe dirigeante, les objectifs à atteindre, ainsi que la politique et la stratégie à suivre

pour la réalisation de ses objectifs.

L’entreprise dispose d’un patrimoine

Comme toute organisation, et afin d’assurer son fonctionnement, l’entreprise nécessite des

moyens matériels, humains et financiers. L’ensemble de ces éléments forme le patrimoine.

On distingue généralement deux(2) types de patrimoines :

- Le patrimoine humain : composé des membres de l’entreprise

- Le patrimoine matériel : formé par les moyens matériels utilisés par l’entreprise.

L’entreprise exerce un effet d’attraction sur son environnement

L’entreprise fabrique un bien ou un service en vue de satisfaire un besoin de l’environnement.

Par conséquent elle attire des clients qui veulent acheter son produit. Elle attire aussi des

fournisseurs qui lui proposent leurs produits ou leurs services.

Elle peut aussi attirer des actionnaires qui veulent prendre part à son capital et aussi des

chercheurs d’emploi désirant faire partie des membres de l’entreprise du fait de la place

qu’occupe l’entreprise dans l’économie du pays ou les avantages qu’elle offre à ses employés.

L’entreprise procède par échange avec son environnement. Il lui fournit les matières

premières, les capitaux, les moyens humains et techniques. Pour sa part, l’entreprise fournit

des flux de biens et de services destinés à satisfaire les besoins de l’environnement.

L’entreprise poursuit des objectifs

L’entreprise attribue à chacun de ses membres des taches et mène des actions afin d’atteindre

un ou plusieurs résultats et objectifs.

Par exemple, augmenter son chiffre d’affaires (CA), produire et commercialiser de nouveaux

produits ou services, améliorer la qualité de ses produits…

Les résultats que l’entreprise cherche à atteindre constituent ses objectifs. Ils guident son

comportement et orientent les activités de ses membres.

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II- Les Fonctions de la gestion

Quatre (4) principales fonctions de l’entreprise sont à distinguer : la planification,

l’organisation, la direction et le contrôle.

Si ces fonctions ne sont pas en harmonie, les résultats souhaités ne seront pas réalisés.

1- La planification

La planification se définit comme le processus par lequel le gestionnaire fixe les objectifs à

atteindre et dresse les plans de travail afin d’atteindre et réaliser ses objectifs.

Les étapes de la planification sont :

- Analyse des forces et des faiblesses de l’entreprise et opportunités et menaces de

l’environnement ;

- Définition de l’orientation de l’entreprise ;

- Examen des options possibles et choix de la stratégie appropriée ;

- Etablissement des liens entre les stratégies d’une part, et les plans opérationnels et les

budgets d’autre part.

2- L’organisation

Elle consiste à définir la composition des groupes de travail et coordonner leurs activités. Elle

entraîne la création de liens organisationnels qui aident les individus et les groupes à travailler

ensemble pour l’atteinte d’objectifs communs.

Les étapes de l’organisation sont :

- Choisir les moyens et les méthodes appropriées ;

- Déterminer les besoins en ressources humaines et matériels ;

- Définir les interrelations ;

- Répartir les tâches de manière à atteindre les objectifs visés.

3- La direction

La direction consiste à diriger les employés chargés d’exécuter le travail et à exercer sur eux

une influence positive. La formation, la communication et la motivation représentent les

principales tâches liées à cette fonction.

C’est en facilitant leur travail et en les stimulant que les gestionnaires peuvent motiver leur

personnel à devenir plus productif et à atteindre les objectifs fixés.

4- Le contrôle

Le contrôle de définit comme l’examen par lequel on s’assure que les résultats obtenus sont

conformes aux buts et qui permet d’apporter, au besoin, les corrections nécessaires pour

réorienter l’entreprise vers ses objectifs.

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Les étapes du contrôle sont :

- Déceler les écarts entre la situation actuelle et la situation désirée ;

- Identifier les causes ;

- Apporter les corrections et solutions nécessaires.

Figure 1 : Les fonctions du système de gestion

III- Les compétences du gestionnaire

La compétence est un ensemble de connaissances, de capacités d’action et de comportements

structurés en fonction d’un but et dans un type de situations donné. Elle constitue les moyens

personnels dont dispose chaque individu pour agir.

Les compétences requises pour un gestionnaire résultent de l’interaction des trois

composantes suivantes :

Le Savoir : ensemble de connaissances acquises ;

Le Savoir-faire : habileté et capacité à utiliser les connaissances acquises ;

Le Savoir- être : c’est le savoir vivre : connaissances et pratiques de savoir se

comporter (skills for life).

Les compétences dont le gestionnaire a besoin sont de quatre (4) types :

PLANIFICATION

DIRECTION ORGANISATION

CONTRÔLE

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- Conceptuelles : c’est l’aptitude à analyser, à interpréter et à résoudre des problèmes en

examinant les causes et les effets de nombreuses données liées à une question

particulière ;

- Humaines : c’est l’aptitude à comprendre, interagir et collaborer avec les autres

(capacité à communiquer, à motiver les autres, à être un meneur d’individus et de

groupes) ;

- Techniques : c’est l’aptitude à comprendre et à utiliser efficacement un processus, une

méthode ou une technique.

- De communication : les aptitudes à la communication permettent de recevoir et de

transmettre l’information. Un bon gestionnaire doit impérativement maitriser l’art de

la communication (écrite, orale et non verbale).

Figure 2 : le rapport entre niveaux techniques, fonctions de la gestion et compétences requises

Section II : Stratégie, Définitions et Concepts

I- La stratégie : Définitions

Le mot « stratégie » vient du grec stratos qui signifie « armée » et ageîn qui signifie

« conduire ».

Pour les militaires la stratégie est l'art de coordonner l'action de l'ensemble des forces de la

Nation pour conduire une guerre, gérer une crise ou préserver la paix.

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La notion de stratégie a vu le jour dans le domaine militaire, elle consiste à mobiliser des

moyens pour gagner une guerre. Il s’agit de l'art de coordonner l'action de forces militaires,

politiques, économiques et morales impliquées dans la conduite d'une guerre ou la préparation

de la défense d'une nation ou d'une coalition.

Cette notion a été extrapolée à l’entreprise. En effet, elle définit les actions à mener pour

réaliser les objectifs. C’est la direction générale de l’entreprise qui doit procéder au choix des

voies et des moyens à mettre en œuvre afin d’atteindre les objectifs fixés. Ces actions

devraient lui permettre de faire face aux entreprises concurrentes.

On trouve dans la littérature managériale un très grand nombre de définitions différentes de la

stratégie d’entreprise.

Définition de STRATEGOR

« Elaborer une stratégie c’est choisir les domaines d’activité dans lesquels l’entreprise

entend être présente et allouer les ressources de façon à ce qu’elle s’y maintienne et s’y

développe. »

Cette définition permet d’identifier deux niveaux de stratégie :

- La stratégie de groupe ou corporate strategy : qui consiste dans le choix du ou des

domaines d’activité de l’entreprise. L’entreprise s’engage alors dans un secteur plutôt

qu’un autre ;

- La stratégie concurrentielle ou business strategy : qui consiste dans le choix des

actions et des manœuvres à mettre en place afin d’avoir un positionnement lui

permettant de faire face aux concurrents du secteur.

Il s’agit donc du choix d’allocation de ressources, d’investissement ou désinvestissement qui

font la stratégie.

Définition de M. Porter

«L’art de construire des avantages concurrentiels durablement défendables»

M. Porter met l’accent sur la notion de l’avantage concurrentiel. Pour lui, une stratégie doit

permettre à l’entreprise de construire, garder et développer un avantage concurrentiel lui

concédant de faire face à la concurrence.

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Ainsi, nous pouvons résumer la notion de stratégie comme étant les moyens mis en place par

l’entreprise afin d’atteindre les objectifs stratégiques fixés par les dirigeants. Et ce pour se

créer un positionnement favorable par rapport à ses concurrents.

Il s’agit alors de répondre à trois questions :

II- Quelques vocabulaires de la stratégie

- Mission : Propos fondamental de l’organisation, en rapport avec les valeurs et les

attentes des parties prenantes. Il s’agit de la raison d’être de l’entreprise.

- Vision ou intention stratégique : Etat futur souhaité, l’aspiration de l’organisation,

projection de l’avenir.

- But : Déclaration générale d’intention.

- Objectif : Quantification ou intention plus précise.

- Compétences distinctives : Ressources procédés et aptitudes qui permettent d’obtenir

un avantage concurrentiel.

- Contrôle : Evaluation de l’efficacité de la stratégie et des réalisations, Modification de

la stratégie et/ou des réalisations si nécessaire.

III- Les composantes de la stratégie

1- La stratégie délibérée et la stratégie émergente

D’après Mintzberg, la stratégie prend forme progressivement dans un flux continu d’actions.

Certaines de ces actions sont planifiées et délibérées, et vont dans le sens des actions futures

prévues par les dirigeants : on parle alors de stratégie planifiée.

D’autres répondent à des événements non prévus auxquels les firmes réagissent. Elles

proviennent suite à des changements provenant de l’environnement et dont la prévision n’est

pas possible : On parle alors de stratégie émergente.

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2- La stratégie déduite et la stratégie construite

La stratégie déduite (de l’environnement) : consiste à élaborer la stratégie en

identifiant les opportunités résultant des forces externes qui s’exercent sur

l’organisation et en adaptant les ressources dont elle dispose de manière à en tirer

avantage. Il s’agit de répondre, plus ou moins bien, à des besoins existants (ex : Nestlé

rachète les glaces aux USA car sa consommation est en augmentation) et de

comprendre les changements de comportement des consommateurs ou les différences

qu’il y a selon les pays afin d’adapter sa stratégie (locale) à ces éléments.

La stratégie construite (à partir des ressources et compétences) : consiste à s’appuyer

sur les ressources et les compétences de l’organisation afin de développer un avantage

concurrentiel qui permet d’exploiter de nouvelles opportunités. Il s’agit d’identifier les

ressources et les compétences qui pourront servir de base à la création de nouvelles

opportunités.

IV- Les niveaux de décisions stratégiques

Les décisions stratégiques constituent des décisions qui engageront la firme sur le long terme,

ainsi, elles sont souvent irréversibles et impliquent des changements structurels importants. La

décision stratégique diffère selon le niveau hiérarchique. En effet, on retrouve trois niveaux de

la décision : On parle de stratégie d’entreprise ou corporate strategy, stratégie par domaine

d’activité ou business strategy et stratégie fonctionnelle.

1- La stratégie générale d’entreprise

Elle concerne le schéma et le périmètre de l’organisation dans sa globalité et la manière dont

elle ajoute de la valeur à ses différentes activités.

A ce niveau, la stratégie permettra la détermination du domaine d’activité dans lequel

l’organisation désire œuvrer.

Il s’agit de l’orientation du portefeuille de couples « produit - marché » de la détermination de

ce que l’organisation doit faire pour mettre en pratique cette orientation.

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2- La stratégie par domaine d’activité

Elle consiste à identifier les facteurs clé de succès sur un marché particulier. Il s’agit de

définir comment un avantage peut être obtenu par rapport à ses concurrents et de savoir quels

nouveaux marchés peuvent être identifiés ou construits.

A ce niveau la stratégie permet de définir comment l’organisation doit s’y prendre pour faire

face à la compétition au sein du domaine d’activités ou du secteur dans lequel elle opère.

Il peut s’agir d’un avantage compétitif de coûts, d’une différentiation, d’une focalisation ou

d’une niche de marché.

3- La stratégie fonctionnelle

Elle consiste à assurer la mise en œuvre des stratégies globales et des stratégies par domaine

d’activités et ce spécifiquement pour chaque fonction de l’entreprise. (Marketing, production,

distribution, R&D, etc.)

A ce niveau, la stratégie vise à mettre à profit et à intégrer les compétences distinctives et les

capacités de l’organisation pour chacune des différentes fonctions qu’elle assume.

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Chapitre 2 : les écoles de pensée en

stratégie

Section I : Les deux grandes approches stratégiques

Depuis les années 50, on assiste à une évolution dans la pensée en stratégie. L’évolution de

ces approches provient de l’évolution de l’environnement des entreprises qui introduit de

nouvelles variables.

On peut distinguer deux grandes approches : l’approche de l’adaptation stratégique (basée sur

le positionnement) et l’approche de l’intention stratégique (basée sur le mouvement).

1-L’approche de l’adaptation stratégique

C’est l’école classique qui renvoie à une période durant laquelle la stratégie est associée à des

principes d’adaptation et de position. Il s’agit du déterminisme stratégique où la stratégie est

considérée comme une variable contingente à l’environnement. En effet, cette approche

considère que la stratégie suppose une adaptation permanente à l’environnement pour acquérir

une position dominante sur le secteur et la défendre. Ainsi, la stratégie ne peut qu’être

imposée par l’environnement de l’entreprise.

Elle débute avec le modèle « SWOT », qui constitue la base sur laquelle toutes les autres

théories se développent. Ce modèle considère que la stratégie doit constituer une adéquation

entre les opportunités et menaces de l’environnement et les forces et faiblesses de l’entreprise.

Elle se prolonge par une réflexion sur l’avantage concurrentiel et s’achève avec M. Porter,

dont les travaux représentent la référence dans le domaine des stratégies de positionnement.

En effet, la stratégie devrait permettre de construire et de garder un avantage concurrentiel

durable permettant d’améliorer le positionnement de l’entreprise dans son secteur d’activité.

Ainsi, la stratégie est considérée comme un moyen permettant à l’entreprise d’atteindre la

position idéale (de ses DAS) par rapport à ses concurrents dans l’industrie. Il s’agit d’une

position unique et créatrice de valeur.

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NB : Cette approche s’inspire de l’économie industrielle, elle est également appelée «

l’approche économique et industrielle ».

2-L’approche de l’intention stratégique

Cette approche met en avant une conception de la stratégie centrée plutôt sur l’intention et le

mouvement. Il s’agit plutôt d’une vision volontariste où l’entreprise, avec ses spécificités

(ressources, compétences, connaissances), peut agir sur son environnement.

La stratégie vise dans ce cas à la transformation permanente du jeu concurrentiel et des

capacités de l’entreprise.

Contrairement à l’approche classique, cette approche se base sur les spécificités de

l’entreprise et non sur le secteur d’activité dans lequel elle se trouve. Elle considère, d’une

part, que l’entreprise doit concilier des avantages concurrentiels multiples et non durables.

D’autre part, l’objectif clé de la stratégie n’est plus l’adaptation aux conditions de la

concurrence, mais leur transformation et leur renouvellement.

Cette approche débute par le courant de l’intension stratégique (l’école basée sur les

ressources) qui propose une conception radicalement opposée à l’adaptation stratégique : A

partir de ses propres ressources et compétences centrales, une entreprise peut transformer les

conditions de l’environnement en identifiant les ressources et compétences clés, les évaluer

dans le contexte environnemental de l’entreprise, ensuite les développer et valoriser dans le

cadre d’un apprentissage individuel et collectif.

Une ressource clé : actif spécifique, de valeur, rare, difficilement imitable, non substituable et

difficilement transférable.

Le courant de l’intention stratégique s’est développé récemment pour intégrer le concept de la

transformation et du mouvement, et ce, car le problème central devient le renouvellement

constant des conditions de la concurrence. En effet, les nouvelles conditions de la concurrence

(on parle de l’hyper-concurrence) explique cette évolution et rend la transformation

permanente nécessaire.

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Section II : Les écoles stratégiques selon H. Mintzberg

Mintzberg a classifié les approches de gestion stratégique en 10 écoles.

1- L'école de la conception, la créativité ou école du projet

Cette école voit la formation de la stratégie comme un processus de conception. Elle se base

sur la rationalité du dirigeant. Cette école fonde l »élaboration de la stratégie sur la notion du

diagnostic stratégique. Ainsi, l’élaboration d'une stratégie consiste à trouver la meilleure

adéquation possible entre les forces et faiblesses internes et les menaces et opportunités

externes (concept bien connu d'analyse SWOT). Les dirigeants formulent des stratégies

claires et simples, dans un schéma délibéré de réflexion consciente - ni analyse formaliste, ni

flou intuitif - de façon à ce qu'elles puissent être mises en œuvre par tous.

Il s’agit d’établir un ajustement qui tendra vers l'harmonie.

Avantages : Ordre, simplicité. Cette approche convient aux environnements relativement

stables, idéalement appuyée par un leadership visionnaire fort.

Limites : La simplification peut déformer la réalité. Elle adopte la rationalité parfaite du

dirigeant alors que celui-ci s’appuie en réalité sur la rationalité limitée.

2-L'école de la planification

Cette école voit la formation de la stratégie comme un processus formel. Elle reprend pour

l'essentiel les hypothèses de l'école du projet, sauf une - qui a son importance : le processus

stratégique n'est pas seulement cérébral, mais formel, décomposable en étapes distinctes,

délimité par des check-lists et étayé par des techniques (objectifs, budgets, programmes et

plans opérationnels). L'équipe de « planning stratégique » remplace, de fait, les dirigeants qui

n’a plus qu’une intervention marginale. Ici la stratégie est considérée comme un processus

objectif, organisé et planifié dans ses moindres détails.

Contributions : Donne un sens clair à la stratégie, un axe auquel tout le monde peut se rallier.

Permet une bonne répartition des ressources de l'entreprise, ce qui est un des fondements de la

stratégie. Les analystes peuvent pré-visualiser les faits et juger les stratégies élaborées. Permet

aussi un contrôle ex-post de la réalisation sur base de ce qui avait été planifié.

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Limites : Lenteur du processus de planification, lenteur du processus de mise en oeuvre, prise

de pouvoir de l’équipe de planification, inadaptée aux situations d’incertitude : peut entraver

l’émergence de certaines stratégies en les masquant.

3-L'école du positionnement

Cette école voit la formation de la stratégie comme un processus analytique. Par l'analyse de

l'industrie, du secteur et donc de la concurrence, la stratégie va déterminer un positionnement,

choisir un endroit où le potentiel de développement est le plus élevé. Le positionnement ici est

principalement vu en terme de produits / marchés. C'est Michael Porter, qui a donné son élan

à cette école en 1980, dans la foulée d'autres travaux réalisés sur le thème du positionnement

stratégique, tant dans le monde universitaire que dans celui du conseil (notamment par le

Boston Consulting Group). Pour cette école, la stratégie se réduit à un certain nombre de

positions génériques, choisies par le biais d'une analyse formelle des situations. Cette

littérature s'est développée dans toutes les directions, englobant les groupes stratégiques, les

chaînes de valeur, la théorie des jeux et d'autres encore, mais toujours avec une tendance

analytique.

Elle place l'activité dans le contexte de son industrie, et regarde comment l'entreprise peut

améliorer son positionnement stratégique dans cette industrie.

Avantages : Particulièrement utile aux premiers stades du développement de la stratégie,

quand les données sont analysées.

Limites : Néglige l'influence de la politique, la culture, les faits sociaux. Elle est plutôt

orientée vers les grandes sociétés.

4-L'école entrepreneuriale

Le courant entrepreneurial axe le processus stratégique sur le dirigeant de l'entreprise, et

insiste sur l’importance de la prise en compte des mécanismes mentaux : l’intuition, le

jugement, la sagesse, l’expérience, etc. dans le processus de décision stratégique. Les

stratégies Ne sont plus des projets, des plans ou des positionnements précis, mais des visions

floues, ou des perspectives, en général exprimées de façon imagée, au travers de métaphores.

Elle se base sur la vision, c'est-à-dire la représentation de la stratégie qui se créé dans le

cerveau du dirigeant et qui constitue la ligne directrice de la stratégie.

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Contributions : Une vision claire et un patron visionnaire aident les organisations à naviguer

en cohésion dans les eaux troubles. Particulièrement dans ses débuts ou dans les années très

difficiles pour l'organisation parce que dans ces circonstances, le leadership est fondamental

pour que tout le monde rame dans la bonne et même direction. On délibère dans les grandes

lignes et on est souple et réactif dans la mise en œuvre.

Limites : La navigation d'un cap prédéfini peut aveugler quelqu'un sur des dangers ou des

développements potentiels inattendus. Est-ce que l'on dispose du bon leader, possédant toutes

les qualités requises ? Les leaders entrepreneuriaux et visionnaires ont une tendance à aller

trop loin. Être Président est un travail extrêmement exigeant dans cette perspective

5-L'école cognitive

Cette école voit la formation de la stratégie comme un processus mental. L'intérêt portait sur

l'origine des stratégies. Si elles se développaient dans l'esprit humain sous formes de schémas

de base, de modèles ou de cartes, était-il possible de comprendre le cheminement de ces

processus mentaux ? Le courant cognitif sert à bâtir des stratégies sous forme d'interprétations

créatives, plutôt qu'à retracer la réalité de façon plus ou moins objective.

Cette école analyse comment les personnes perçoivent les modèles et le processus

d'information. Elle se concentre sur qu'est-ce qui se produit dans l'esprit du stratège, et

comment il ou elle traite l'information.

Contributions : Voit la stratégie comme un processus cognitif dans l'esprit du stratège. Les

Stratégies émergent comme concepts, cartes, schémas et structures de la réalité. Souligne le

côté créateur du processus de stratégie.

Limites : Pas très pratique au-delà de l'étape conceptuelle. Pas très pratique pour concevoir de

grandes idées ou stratégies. Actuellement pas très utile pour guider des processus collectifs de

stratégie.

6-L'école de l'apprentissage

Cette école voit la formation de la stratégie comme un processus émergent. Ce modèle de

création stratégique - totalement différent de ce ceux des écoles précédentes - remonte aux

premiers travaux sur « l'incrémentation » (ou la notion des petits pas plutôt que de grandes

enjambées) et aux concepts tels que la « prise de risque », la « stratégie émergente » (issue de

décisions individuelles plutôt que d'une conception dans une tour d'ivoire). Dans cette

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optique, les stratégies sont émergentes, les stratèges sont partout dans l'entreprise et la

formulation et la mise en œuvre de la stratégie sont inextricablement liées. On introduit le

concept d'organisation apprenante. Il n’y a pas de séparation entre le processus de la

formulation de la stratégie et le processus de la mise en œuvre.

Le monde est trop complexe pour permettre à des stratégies d'être développées d'un seul trait.

Comme plans ou visions claires. Par conséquent les stratégies doivent émerger dans de petites

étapes, car une entreprise « apprend ».

Contributions : Offre une solution pour traiter la complexité et l'imprévisibilité dans la

formation à la stratégie.

Limites : Cette école pourrait mener à n'avoir aucune stratégie ou juste à faire des manœuvres

tactiques (embrouillant tout). Ou à la dérive stratégique. Pas du tout utile pendant les crises.

Pas très utile en conditions stables. La prise de beaucoup de petites mesures sensibles ne

s'ajoute pas nécessairement pour mener jusqu'à une stratégie totale saine.

7-L'école du pouvoir

Cette école voit la formation de la stratégie comme un processus de négociation. Il s'agit d'un

courant de pensée qui considère deux pouvoirs :

Le pouvoir à vocation interne considère que le développement de stratégies au sein d'une

entreprise est essentiellement politique et que ce processus est basé sur la négociation, la

persuasion et la confrontation entre les acteurs internes.

Le pouvoir à vocation externe perçoit l'entreprise comme une entité qui utilise son influence

sur les autres et sur ses partenaires au sein d'alliances, co-entreprises et autres formes de

réseaux pour négocier des stratégies dites « collectives » dans son intérêt.

La stratégie est alors développée comme un processus de négociation entre les détenteurs de

la puissance au sein de l'entreprise, et / ou entre l'entreprise et ses partenaires externes.

Contributions : Peut aider à s'assurer que tous les aspects d'une question sont entièrement

discutés. Peut aider à traverser des obstacles au changement nécessaire. Peut aider à diminuer

des résistances après qu'une décision soit prise. Particulièrement utile pour comprendre des

alliances stratégiques, Joint-ventures et pour faire une Analyse de partenaire.

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Limites : La politique peut être séparative, utilise beaucoup d'énergie, cause de gaspillage et

de déformation et est coûteuse. Peut mener à des aberrations. Peut mener à n'avoir aucune

stratégie ou à faire juste des manœuvres tactiques (embrouillant tout). Exagère le rôle de la

puissance dans la formation de la stratégie.

8-L'école culturelle

Cette école voit la formation de la stratégie comme un processus collectif. En fait, la culture

est un élément central de la stratégie : elle intervient dans le processus d’élaboration de la

stratégie et constitue une source de l’avantage concurrentiel car difficilement imitable.

Elle essaye d'impliquer les divers groupes et départements au sein de l'entreprise. La

formation de la Stratégie est regardée comme processus fondamentalement collectif et

coopératif. La stratégie qui est développée est une réflexion sur la culture d'entreprise de

l'organisation.

Contributions : Souligne le rôle crucial que les processus, les convictions et les valeurs

sociales jouent dans la prise de décisions et dans la formation de la stratégie. Peut également

contribuer à gérer les processus de fusions et acquisitions.

Limites : Vague, peut alimenter des résistances au changement et peut être abusé pour

justifier le statu quo (la situation initiale avant le changement).

9-L'école environnementale

Cette école voit la formation de la stratégie comme un processus réactif : C’est

l’environnement qui oblige l’entreprise à choisir une stratégie plutôt qu’une autre, ce sont les

forces extérieures à l’entreprise qui constituent le vérifiable acteur de la stratégie. Ainsi, soit

l’entreprise s’adapte à l’environnement soit elle disparait. Cependant, l'école

environnementale mérite que l'on y prête attention pour l'éclairage qu'elle apporte sur les

exigences liées à l'environnement.

La stratégie est alors une réponse aux défis imposés par l'environnement externe.

L'environnement n’est plus considéré un facteur, il est considéré comme un acteur.

Contributions : Donne un rôle central à l'environnement dans la formation à la stratégie.

Limites : Les dimensions de l'environnement sont souvent vagues et agrégées. Ceci la rend

moins utile pour la formation à la stratégie.

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10- L'école de configuration

Cette école voit la formation de la stratégie comme un processus de transformation.

L'entreprise est perçue comme une configuration (des groupes cohérents de caractéristiques et

de comportements). La planification, par exemple, dans les entreprises routinières connaissant

des conditions de stabilité relative et l'école entrepreneuriale dans des configurations plus

dynamiques de start-up ou de transformation. Toutefois, s’il est possible de décrire les

entreprises par de tels états, alors le changement suppose un mouvement plutôt radical, c'est-

à-dire le passage d'un état à un autre.

La formation de la Stratégie est un processus de transformation de l'organisation d'un type de

structure de prise de décisions en un autre.

Contributions : La clef du Management stratégique est la plupart du temps : soutenir la

stabilité, ou au moins un changement stratégique adaptable. Mais périodiquement il y a un

besoin de transformation. Et pour être capable de gérer ce processus sans détruire

l'organisation, la voie de la formation de la stratégie doit s'adapter à sa propre époque et

contexte, alors qu'elle prend une ou plusieurs des 10 formes mentionnées. Par conséquent la

formation de la stratégie elle-même a des configurations.

Limites : En réalité, cette école décrit la réalité en utilisant des configurations, ce qui risque

de déformer la réalité afin de l'expliquer.