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1 UNIVERSITE RENE DESCARTES PARIS V FACULTE COCHIN PORT ROYAL LA BIENFAISANCE, N’EST-ELLE PAS UNE EVIDENCE ? DIU Éthique et soins des malades Alzheimer et leur famille. Année 2011-2012 Marie Noëlle LE ROUX-TESSIER Directeur de mémoire : Judith MOLLARD Psychologue expert. France Alzheimer

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UNIVERSITE RENE DESCARTES – PARIS V

FACULTE COCHIN – PORT ROYAL

LA BIENFAISANCE,

N’EST-ELLE PAS UNE

EVIDENCE ?

DIU Éthique et soins des malades Alzheimer et leur famille.

Année 2011-2012

Marie Noëlle LE ROUX-TESSIER

Directeur de mémoire : Judith MOLLARD

Psychologue expert.

France Alzheimer

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« Dans la vie, il n’y a pas de solutions,

Il y a des forces en marche : il faut les créer, et les solutions arrivent ».

Antoine de Saint Exupéry. Vol de nuit.

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J’adresse mes plus vifs remerciements

A Judith Mollard, psychologue expert à France Alzheimer pour son soutien.

Aux formateurs de ce DIU,

Aux équipes des soignants des services ALOIS-VIVALDI-LE GALION- DALI 1et 2 de

l’HGMS de Plaisir Grignon et particulièrement à Anne Marie BAZZI, cadre de santé pour son

aide, et Armelle PERON, pour son accueil.

A mes « testeurs » et « relecteurs », Brigitte, Jean-Luc, Marino, France, Aldric.

A Gilbert, pour son soutien de chaque instant ;

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SOMMAIRE

INTRODUCTION 1

En stage à l’hôpital Gérontologique

et Médico-social de Plaisir-Grignon. 2 - 3

Un retour à domicile improbable pour Mme L. 4 - 5

I) De la définition de maltraitance à l’émergence

de la notion de bientraitance 6 - 10

De la bientraitance 11 – 17

II) Analyse des questionnaires soumis

aux soignants de l’Hôpital Gérontologique

et Médico-Social de Plaisir Grignon. 18 - 24

III) Les difficultés de la communication

dans la maladie d’Alzheimer. 25 - 26

IV) La présence à l’Autre 27 - 29

V) Quelles voies pour tendre vers la bienfaisance ? 30 - 37

CONCLUSION 38 - 40

ANNEXES

ANNEXE 1 : le questionnaire soumis aux soignants

ANNEXE 2 : le classement des réponses

ANNEXE 3 : les diagrammes

ANNEXE 4 : le classement des testeurs

ANNEXE 5 : Charte Alzheimer, éthique et société 2011

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INTRODUCTION

Infirmière dans un service de Long Séjour, en 1991, je rencontre Jean Louis, 68 ans.

Il est ma première expérience de soignante avec un patient atteint de la maladie d’Alzheimer.

Déjà très maigre et incontinent, parfois agité, presque violent, je devais dominer ma peur pour

l’approcher, lui prendre la main en l’appelant par son nom et tout doucement, l’entourer de

mes bras pour l’apaiser.

Mon contexte familial, mon engagement de 10 années de bénévolat auprès des personnes

désorientées m’ont donné envie d’apprendre pour mieux comprendre, d’où ma présence dans

cette formation ‘’DIU Ethique et soins aux personnes Alzheimer et leur famille’’.

Au cours de mon stage en unité de psycho-gériatrie aiguë, j’ai vu des soignants prendre soin

sans soigner et d’autres soignants, soigner sans prendre soin, et je me suis posé la

question suivante:

« Les soignants sont-ils conscients de n’être pas bienfaisant ?

Je n’ai pas posé ma question ainsi : « les soignants ont-ils conscience d’être malfaisants ? »

Parce que le terme de malfaisant peut blesser l’oreille des soignants.

Dans l’inconscient collectif un soignant ne peut pas être malfaisant.

Notre propos n’étant pas de choquer, j’ai ainsi libellé l’objectif de l’enquête auprès des

soignants de l’Hôpital Géronto-Médico-Social de Plaisir:

« Evaluer la conscience des soignants au regard de la non-malfaisance dans une unité

d’accueil et de soins des personnes Alzheimer »

Car il s’agit bien de cela. La volonté du soignant n’est pas de nuire, mais l’absence de

réflexion conduit à la « non bienfaisance ».

La littérature foisonne d’articles traitants du vieillissement de la population, de la dépendance,

et de la maltraitance.

Le professeur HUGONOT, fondateur d’ALMA a écrit : « La bientraitance n’est pas que l’absence

de maltraitance »

Nous définirons dans un premier temps la maltraitance, puis nous tenterons de cerner les

nouveaux concepts de bientraitance et de bienfaisance.

La bienfaisance dans le quotidien du soignant et de toute personne serait une attitude encore

plus subtile faite de délicatesse, illustrée par exemple, par un choix des mots pour dire et faire

sans heurter.

Je choisis ce terme de bienfaisance pour évoquer l’attitude des soignants parce qu’il est un

des fondements de la réflexion éthique et que l’éthique se définit comme une recherche

incessante, tenant compte de tous les possibles, pour tendre vers le comportement le plus

adapté.

Nous avons recours au questionnement éthique quand un sujet de société nous pose problème.

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La prise en soin des personnes malades d’Alzheimer est problématique.

La loi de janvier 2002 demande à tous les professionnels d’obtenir le consentement des

patients.

Mais qu’en est-il lorsque le patient, atteint de troubles cognitifs, ne parvient pas à se faire

comprendre de son entourage ?

Adopter une attitude bienfaisante suppose d’être conscient de la subjectivité de l’Autre par-

delà ses difficultés, et de vouloir être présent pour lui.

La présence à l’Autre demande une perpétuelle remise en question de soi, en tant que

soignant.

Compte tenu des troubles qu’entraine la maladie d’Alzheimer dans la communication, et du

fait de la complexité de la présence à l’Autre, nous comprendrons que la bienfaisance n’est

pas une évidence.

Pour conclure je ferai part de mes réflexions et propositions, particulièrement dans le champ

de la formation, qui à mon sens, devrait être la source d’une culture du questionnement,

favorable pour tendre vers une attitude bienfaisante.

En stage à l’hôpital Gérontologique et Médico-social de Plaisir-Grignon.

Fondé en 1862, et né de la transformation de l'hôpital Départemental des Petits Prés, l'Hôpital

de Plaisir-Grignon en Yvelines connait une médicalisation croissante depuis l'ouverture de

son premier service en 1969.

Aujourd’hui, l’hôpital Gérontologique et Médico-social (HGMS) s’organise en 2 pôles :

Le pôle gériatrique se compose d’une filière de psycho-gériatrie cognitive,

d’une filière de médecine polyvalente gériatrique dont VIVALDI : hôpital de jour

polyvalent.

La filière médecine physique et réadaptation ; les Unités de Soins Longue Durée (2

USLD), un service Espace Vie et Animation et les Etablissement d’Hébergement des

Personnes Agées Dépendantes (6 EHPAD).

Le pôle handicap comporte 3 Maisons d’Accueil Spécialisé (MAS), 2 Foyers

d’Accueil Médicalisé (FAM), 1 Foyer d’Accueil Médicalisé pour les Personnes

Handicapées Vieillissantes (FAMPHV), un foyer de vie

La filière psycho-gériatrie cognitive du pôle gériatrique se compose de trois services

distincts.

Chaque service m’a accueillie et fait découvrir leurs missions et particularités dans l’accueil

des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer.

L’hôpital de jour ‘’ ALOIS’’ où les personnes sont accueillies 2 ou 3 jours par

semaine, en ateliers de stimulation et réhabilitation cognitive, après les consultations et

évaluations de neuropsychologie qui ont conduit au diagnostic de démence type Alzheimer

(DTA).

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Pour l’équipe des soignants, la qualité de ce premier contact avec l’univers hospitalier

conditionne le futur à travers l’acceptation du diagnostic et le cheminement pour cerner les

limites et les contraintes de la maladie, pour le patient et son entourage.

En contiguë, le service VIVALDI, unité du pôle de médecine polyvalent gériatrique,

dont la mission est la réadaptation pour les patients atteints de troubles neuro-dégénératifs,

m’a fait découvrir toutes les astuces de travail de réadaptation ainsi que la perspicacité de

l’infirmière, spécialiste du traitement des plaies et cicatrisation.

L’accueil de jour » le GALION » « charnière fragile entre le domicile et l’entrée en

EHPAD » accueille, 3 ou 4 journées par semaine, les personnes dont l’altération des

capacités cognitives ne permettent plus des activités de réadaptation. L’équipe du Galion

propose des activités de restauration de l’estime de soi, de socialisation et de stimulation par

le plaisir.

Les unités de médecine aiguë de psycho-gériatrie cognitive « DALI » dont la mission

est l’accueil des personnes présentant des troubles du comportement, diagnostiqués ou pas,

incompatibles avec une prise en soin en unité classique ou le maintien dans le lieu de vie

habituel.

Ces personnes désorientées présentent des épisodes aigus de décompensation, ou sont

porteuses de pathologies somatiques à diagnostiquer, et le plus souvent en cause dans la crise

aiguë de désorientation.

L’hôpital de jour, l’accueil de jour et les unités de médecine aiguë de psycho-gériatrie

cognitive travaillent en relation étroite avec la coordination et le réseau gérontologique, les

associations et les aidants familiaux, assurant ainsi un lien essentiel pour un maintien à

domicile de qualité.

Le service DALI se compose de 2 unités.

DALI 1, unité de médecine aiguë ouvre douze lits pour une DMS de 10 à 12 jours.

DALI 2, unité de soins de suite et réadaptation propose 10 lits avec une DMS de 30 jours.

Les unités offrent de grands espaces et communiquent par un large couloir vitré ouvrant pour

chaque unité sur un jardinet dans un patio. La déambulation des personnes est ainsi sécurisée.

Les différents accès des unités sont sécurisés par des codes. Dans chaque unité, les salles de

soins et autres salles techniques ainsi que les armoires des chambres sont fermées à clef.

Un médecin chef de service, un praticien hospitalier à 80%, un praticien attaché à temps plein

et un cadre de santé accompagnent les équipes de soins.

Les équipes soignantes de chaque unité se composent ainsi :

- Un(e) infirmier(e) et de 3 aides-soignantes sur 12 heures en médecine aiguë

- Un(e) infirmier(e) et 2 aides- soignantes en 12h en Soins de Suite et Réadaptation.

- Un(e) infirmier(e) et 2 aides- soignantes également sur 12h prennent soin la nuit des

patients des 2 unités.

L’équipe est renforcée par une assistante sociale, une psychologue, une ergothérapeute, une

psychomotricienne et une kinésithérapeute qui, tous, interviennent à mi-temps.

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Les patients sont adressés par leur médecin traitant ou le médecin d’un EHPAD suivant leur

mode de domicile, ou par les services d’accueil d’urgence, ou par d’autres unités de soins

aigus, internes ou extérieures à l’HGMS.

L’équipe soignante se mobilise pour mettre en œuvre une stratégie qui vise à ramener la

personne malade à un état compatible avec son retour dans son lieu de vie.

J’ai vécu une semaine complète à Dali participant parfois aux actes de soins, aux réunions

de service, à l’accueil et à l’accompagnement des patients dans leurs activités quotidiennes et

dans leur déambulation.

Dans le cadre d’un questionnement éthique, je choisis de vous présenter la situation de

Mme L.

Un retour à domicile improbable pour Mme L.

Mme L est accueillie dans l’unité DALI 1 le 26 mars 2012, amenée par les pompiers.

Elle est trouvée par ses voisins, à terre, inconsciente, en malaise hypoglycémique dans son

appartement dont elle est locataire, en état d’incurie.

Agée de 80 ans, Mme L est grande et mince, elle porte des cheveux blancs longs, libres sur

les épaules.

Elle est veuve depuis 3 ans. Elle a une sœur jumelle.

Elle est atteinte d’un diabète de type1 traité par Insuline matin et soir.

Elle fume (20 paquets/année).

Elle souffre d’éthylisme à la suite de son veuvage.

Diagnostiquée DTA, Mme L présente un MMS à 26/30 en décembre 2011 et à 24/30 en mai

2012.

Madame L est protégée par une mesure de curatelle renforcée.

Elle bénéficie de l’APA en GIR 4.

Son admission à Dali 1 fait suite à de multiples hospitalisations suivies de multiples essais de

retour à domicile. Mme L refuse tout aide à son domicile.

En avril 2012 Mme L est admise en unité Dali 2, en attente de stabilisation de son état et,

surtout pour elle, dans l’espoir de retourner chez elle.

Entre temps le curateur informe le médecin du service que le propriétaire projette de

reprendre son appartement en juillet 2012.

Si le service d’hospitalisation organise le retour à domicile comme le souhaite fermement

Mme L, cela place la patiente en situation de danger du fait qu’elle perd son logement fin

juillet.

Le curateur ne voulant pas prendre de décision, il demande au médecin chef de service

certifié un certificat de non- retour à domicile.

Seul un médecin inscrit, extérieur à l’unité et qui n’intervient pas dans la prise en charge de

cette patiente pourra établir ce certificat.

Par ailleurs toute personne conserve le droit de choisir son lieu de vie.

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La loi du 2 janvier 2002 confirme le libre choix de la personne entre le domicile ou

l’institution.

Les articles 1 et 2 de la charte des droits et des libertés de la personne âgée en situation de

handicap ou de dépendance affirment cette liberté y compris si elle bénéficie d’une protection

juridique (loi 5 mars 2007).

Seul un certificat de non-retour établi par un médecin expert peut amener le Tribunal à valider

l’entrée en institution contre le gré de la personne s’il estime qu’elle sera en danger.

Le projet de l’équipe, pour cette dame, est de l’amener à accepter une entrée en EHPAD

Présente lors du déjeuner de cette dame, seule avec l’aide-soignante, je suis témoin d’une

situation qui pose un problème d’ordre éthique dans le sens où la notion de bienfaisance n’est

pas prise en compte.

En effet, soucieuse du peu d’appétit de la dame, l’aide-soignante stimule Mme L en ces

termes : « Il faut manger Mme L, c’est important si vous voulez rentrer à la maison » !!

Attitude ‘’gentille’’ de la part du soignant en totale contradiction avec un travail délicat mené

patiemment par toute l’équipe afin que Mme L consente à vivre en EHPAD.

Ce constat est la source de mon interrogation :

Les soignants sont –ils conscients de n’être pas bienfaisants ?

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Dans cette première partie, nous proposons un travail de synthèse des nombreuses

publications, avec l’objectif de mieux cerner le sens donné au terme de bientraitance.

I) De la définition de maltraitance à l’émergence de la notion

de bientraitance

Depuis une trentaine d’années, les textes et chartes sont multiples et la réflexion largement

nourrie notamment avec le travail de repérage des situations de maltraitance envers les

Personnes âgées mené par le Professeur HUGONOT dans les années 80, puis l’opération

« pouponnières » en 1990 avec Danièle RAPOPORT, qui introduit le concept de bien-

traitance pour la prise en charge des enfants confiés à l’institution, sans oublier le travail de

réflexion et de prévention mené par l’UNAPEI concernant les personnes en situation de

handicap et concrétisé dans un livre blanc en 2000. (1)

A l’issue de la seconde guerre mondiale, les sociétés se préoccupent de protéger la dignité et

la liberté des personnes et parmi les textes fondateurs de la bioéthique le rapport BELMONT

fonde la réflexion éthique sur trois principes : l’autonomie, la bienfaisance, la justice.

En France le préambule de la constitution de 1946 déclare « Les hommes naissent libres et

égaux en droits »

Sur le plan international, la déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948 est le

premier texte à énoncer les droits de l’Homme et ses libertés fondamentales.

En 1959, l’assemblée générale des Nations Unies adopte la déclaration des droits de l’enfant.

En 1975, cette même assemblée adopte la déclaration des droits des personnes handicapées.

En 1987 la Fondation Nationale de Gérontologie et le ministère des affaires sociales signent

la charte des droits et libertés de la personne âgée en situation de handicap ou de

dépendance, modifiée en 1997 et en 2007. La charte a pour objectif d’affirmer la dignité de la

personne âgée en situation de handicap, ou devenue dépendante, et de rappeler ses libertés et

ses droits ainsi que les obligations de la société à l’égard des plus vulnérables.

La loi du 1er

décembre 1988 relative au RMI affirme que « toute personne qui(…) se trouve

en incapacité de travailler, a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables

d’existence (…).

Confrontée au vieillissement démographique – en 1980 17% de personnes âgées de 65 ans et

plus, contre 22% en 2010, soit 11 millions de personnes (INSEE) – et à l’émergence des

violences faites aux Personnes âgées en institution- (source : alma-France.org)

Maltraitance principale signalée en institution en 2007 :

- négligences 34% - maltraitances psychologiques 19%

Maltraitance principale signalée en institution en 2010 :

- négligences 50% -maltraitances psychologiques 16%

(1) : Oriane Délivre- revue de littérature février 2008-document de travail ANESM

Les pouvoirs publics s’interrogent et se mobilisent, poussés par les associations et les

personnalités qui prennent cause pour les personnes vulnérables.

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En 1987, le professeur HUGONOT, gériatre et fondateur de la gérontologie en France, est

appelé par le Conseil de l’Europe à présider le groupe chargé d’étudier les violences et

négligences vis-à-vis des personnes âgées.

Il crée en 1995 l’association loi 1901 ALMA –ALlo Maltraitance des personnes âgées et/ou

des personnes handicapées, qui a une mission d’information, de prévention et de lutte contre

les situations maltraitances.

Les auteurs usent du concept « situation de maltraitance » en raison de la complexité du

phénomène et tous reprennent la définition du conseil de l’Europe en 1987 :

« La maltraitance se définit comme une violence caractérisée par tout acte ou omission

commis par une personne s’il porte atteinte à la vie, à l’intégrité corporelle ou psychique, à sa

liberté, ou compromet gravement le développement de sa personnalité et/ou nuit à sa sécurité

financière ».

En 1992, le Conseil de l’Europe a classifié les différents types de maltraitances :

• Violences physiques : coups, brûlures, ligotages, soins brusques sans information ou

préparation, non-satisfaction des demandes pour des besoins physiologiques, violences

sexuelles, meurtres (dont euthanasie).

• Violences psychiques ou morales : langage irrespectueux ou dévalorisant, absence de

considération, chantages, abus d’autorité, comportements d’infantilisation, non-respect

de l’intimité, injonctions paradoxales.

• Violences médicales ou médicamenteuses : manque de soins de base, non-

information sur les traitements ou les soins, abus de traitements sédatifs ou

neuroleptiques, défaut de soins de rééducation, non prise en compte de la douleur...

• Négligences actives : toutes formes de sévices, abus, abandons, manquements

pratiqués avec la conscience de nuire

• Négligences passives : négligences relevant de l’ignorance, de l’inattention de

l’entourage

Les causes de la maltraitance

Dans son travail de synthèse, Oriane DELIVRE retient 4 causes de la maltraitance: les

caractéristiques des usagers, les conditions de vie et de travail, les professionnels, et la

direction de l’établissement ou du service.

Les caractéristiques des usagers

La dépendance, la démence ou les troubles liés à certaines maladies peuvent être facteurs de

maltraitance, jusqu’au fait d’être trop vieux ou trop lent comme le fait apparaitre une étude

qualitative suédoise à propos des représentations des personnes âgées sur les maltraitances

qu’elles peuvent subir.

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Les conditions de vie des usagers et les conditions de travail des Professionnels

La non-adaptation est une cause importante de la maltraitance. Cette non-adaptation peut être

à la fois « l’inadéquation des réponses aux besoins » , mais aussi l’inadaptation des locaux ou

de l’organisation au rythme de la personne…/….

Le manque de moyens ainsi que les spécificités du milieu professionnel sont d’autres facteurs

cités : « la confrontation perpétuelle à la vieillesse et à l’image négative de la personne âgée

[…] peuvent contribuer à des attitudes déshumanisantes de la part du personnel»

Les conditions de travail, la pénibilité, ou encore, la routine sont auteurs de facteurs que l’on

retrouve dans la littérature.

Les professionnels

Concernant les professionnels se pose le problème du recrutement et de la formation des

personnels: « L’absence de valorisation de la mission soignante en gériatrie entraîne un

manque de candidature de personnels qualifiés…/…. L’embauche de personnel non qualifié

comble ce déficit mais pose le problème du manque de connaissance de la mission soignante

et plus encore de la spécificité de la personne âgée.

La direction

La mauvaise organisation du travail à proprement parler et la mauvaise gestion des

ressources humaines sont deux facteurs cités à plusieurs reprises, notamment par le rapport du

Sénat.../… qui dénonce, « dans certains cas, un indéniable problème de hiérarchie des

priorités de la part des responsables d’établissements : lorsque les intérêts de l’institution

passent avant ceux des personnes handicapées, les risques de maltraitance se multiplient »

Selon la déclaration de Toronto sur la prévention globale des mauvais traitements envers les

ainés, OMS 17 novembre 2002.

« Il y a maltraitance quand un geste singulier ou répétitif, ou une absence d’action appropriée,

se produit dans une relation où il devrait y avoir de la confiance, et que cela cause du tort ou

de la détresse chez une personne âgée. Cela peut prendre de multiples formes : physique,

psychologique/émotionnel, sexuel, financier ou refléter des formes intentionnelles ou non de

négligence. » (1) : Oriane Délivre- revue de littérature février 2008-document de travail ANESM

Il apparait dans cette définition la notion de rupture de confiance qui met en avant la gravité

de la chose.

Aussi, on ne peut parler de la maltraitance sans évoquer la sanction pénale à l’encontre de

l’auteur :

Parmi une trentaine d’articles issus du Nouveau Code Pénal, l’article 222-14. traite des

« violences habituelles sur personnes vulnérables » :

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Article 222-14 du nouveau code pénal :

Les violences habituelles sur un mineur de quinze ans ou sur une personne dont la

particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une

déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue

de leur auteur sont punies.

Les peines vont de 30 ans de réclusion criminelle lorsqu’elles ont entraîné la mort de la

victime, à 5 ans d’emprisonnement et 75000 euros d’amende lorsqu’elles n’ont pas

entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours

Dans le souci de protéger les personnes dépendantes, la loi oblige à signaler les actes de

maltraitance sur les personnes vulnérables :

Le nouveau Code Pénal précise à l'article 434-3 : « Pour quiconque ayant eu connaissance de

mauvais traitements ou privations infligés à un mineur de 15 ans ou à une personne qui n'est

pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une

déficience physique, psychique ou d'un état de grossesse, de ne pas en informer les autorités

judiciaires ou administratives, est puni d'un an d'emprisonnement et de 45000 € d'amende. »

L'article 226-13, relatif à la violation du secret professionnel est suivi de l'article 226-14 qui

constitue l'exception permettant de passer outre le secret professionnel.

1 - A celui qui informe les autorités médicales, judiciaires ou administratives des sévices ou

privations dont il a eu connaissance et ont été infligés à un mineur de 15 ans ou à une

personne qui n'est pas en mesure de se protéger.

2 - Au médecin qui, avec l'accord de la victime, porte à la connaissance du Procureur de la

République, les sévices qu'il a constatés dans l'exercice de sa profession et qui lui permettent

de présumer que des violences sexuelles de toute nature ont été commises.

Et la loi protège aussi celui qui signale de tels faits :

L’article 48 de la loi du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale

stipule : « Dans les établissements et services mentionnés à l'article L. 312-1, le fait qu'un

salarié ou un agent a témoigné de mauvais traitements ou privations infligés à une personne

accueillie ou relaté de tels agissements, ne peut être pris en considération pour décider de

mesures défavorables le concernant en matière d'embauche, de rémunération, de formation,

d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou

de renouvellement du contrat de travail, ou pour décider la résiliation du contrat de travail ou

une sanction disciplinaire.

« En cas de licenciement, le juge peut prononcer la réintégration du salarié concerné si celui-

ci le demande. »

La problématique de la maltraitance des Personnes âgées est à l’ordre du jour des institutions

européennes depuis plusieurs années.

En décembre 2000, l’Union Européenne adopte la charte des droits fondamentaux.

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Dans l’article 25, l’Union Européenne reconnaît et respecte les droits des personnes âgées qui

sont susceptibles de dépendre des autres pour l’aide et les soins, à mener une vie digne et

indépendante et à participer à la vie sociale et culturelle.

La teneur de cet article nous ramène au principal facteur de risque de maltraitance cité par le

professeur HUGONOT (2): la dépendance à autrui pour les activités de la vie quotidienne.

Il est important de souligner cette précision « à autrui » car cela aide à prendre conscience

que le risque majeur, c’est l’autre humain, c’est moi, parent, aidant ou soignant.

La maltraitance suppose une dissymétrie de la relation. La situation de maltraitance survient

entre un professionnel et une personne vulnérable qui dépend de l’aidant ou du soignant pour

les actes de la vie quotidienne.

Que dire de cette prise de pouvoir déplacée ? Qu’elle pourrait être une maltraitance

réactionnelle ainsi que l’explique sans bien sûr la cautionner, Alice Casagrande dans « ce que

la maltraitance nous enseigne » :

« L’origine socio-économique des professionnels exerçant dans les milieux du soin et de

l’accompagnement vient étayer régulièrement la thèse de la fragilité équivalente des

personnes soignées ou accompagnées et des professionnels qui sont leurs interlocuteurs. La

trace de ce rapprochement se trouve dans certains services publics qui prétendent dans un

même geste résoudre la problématique du chômage de longue durée et de l’absence de

qualification, et celui de l’augmentation du nombre des personnes dépendantes en attente

d’aide pour continuer d’habiter chez elles. Ainsi nous nous trouvons ici face à une

organisation des services médico-sociaux qui encourage la confusion et l’amalgame des

fragilités…./….Le jeu des vulnérabilités en miroir se manifeste ici à plein, puisque des

personnes dont l’entourage social, économique, familial, et souvent loin d’être stabilisé et

structurant, doivent simultanément faire face aux demandes elles aussi percutantes de

personnes en grande demande affective, en grande dépendance physique, en grande

souffrance sociale… La logique voudrait que les plus fragiles d’une société soient confiés aux

plus solides de ses membres …./… Dans la réalité, les vulnérabilités de tous ordres se croisent

dans les mêmes lieux et il n’est pas étonnant que ceci conduise à des manifestations de

détresse et de violence dont la maltraitance n’est qu’une des formes ; »

Par définition le rôle d’un soignant consiste à s’occuper de l’autre, malade ou dépendant, et

notre confiance en lui nous amène à penser que la majorité des actes inappropriés ne sont pas

volontairement nuisant.

Cela dit, lorsque le soin ne fait que répondre aux besoins de la personne sans la considérer

dans son individualité, c’est un déni de son statut de sujet qui constitue la maltraitance.

Par cette phrase « la bientraitance ne se réduit pas à éviter la maltraitance », le professeur

HUGONOT lance les bases de la réflexion complexe et permanente pour tendre vers la

bientraitance.

(2) : R Hugonot page 11 Pour une bientraitance, faut-il repenser le soin ? FNG n°133.

(3) :Alice Casagrande p 9-10 dans « ce que la maltraitance nous enseigne - DUNOD- » :

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15

DE LA BIENTRAITANCE

Devant la conscience des acteurs de santé de la réalité des « maltraitances ordinaires ou

passives » dans les prises en charges hospitalières,

(Une étude menée en 1999 par MA MANCIAUX dont l’objectif est l’identification des

représentations des soignants en USLD, concernant les violences, montre que, pour 65%

d’entre eux, les causes sont liées au personnel)-

la ministre de la santé, Mme R BACHELOT déclare l’année 2011 ‘’année des patients et de

leurs droits’’ et lance des missions de réflexion dont celle menée par Michelle BRESSAND

(4), qui recense les textes juridiques en faveur de la politique de la promotion de la

bientraitance.

Promouvoir la bientraitance des personnes dépendantes est l’objectif de la Charte européenne

des Droits et Responsabilités des Personnes Agées nécessitant des soins et une assistance de

longue durée, éditée en juin 2010 :

Le préambule affirme :

« La dignité humaine est un droit inviolable. L’âge et la perte d’autonomie ne peuvent à eux

seuls justifier des restrictions aux droits de l’homme et aux libertés civiles inaliénables

reconnus par les normes internationales et consacrés dans les conditions démocratiques. Tous

les individus, indépendamment de leur sexe, de leur âge, ou de leur degré de perte

d’autonomie, ont le droit de jouir de ces droits et libertés, et tous ont le droit de défendre leurs

droits humains et civils ».

Le groupe de travail européen AGE réfléchit au développement de normes européennes de

qualité qui se baseraient sur une obligation de résultats et non plus sur des critères de mise

œuvre de bientraitance. (2(p.110- AS PARENT)

Ces textes et chartes complétés en France par 3 textes de lois récents réaffirment le droit des

personnes à la dignité et à la liberté.

-la loi du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale dont les principes

seront repris dans la recommandation « bientraitance, définition et

repères » : « l’action sociale et médico-sociale est conduite dans le respect de l’égale

dignité de tous les êtres humains avec l’objectif de répondre de façon adaptée aux

besoins de chacun d’entre eux ».

L’obligation d’évaluation des pratiques professionnelles inscrite dans la loi 2002

s’inscrit au cœur des démarches d’amélioration de la qualité de la prise en charge des

patients/résidents. Elle est ainsi un levier intéressant vers la bientraitance

-La loi de février 2005 pour « l’égalité des droits et des chances et la participation et la

citoyenneté des personnes handicapées ».

-La loi de mars 2007 réformant la protection de l’enfance reprenant celle de juillet

1989 pour la prévention des mauvais traitements et la création d’un service national

d’appel téléphonique pour l’enfance maltraitée.

(4) : rapport de la mission ministérielle à X BERTRAND par M BRESSAND, M CHRIQUI-REINECKE, M SCHMITT.

Janvier 2011.

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16

En 2007 le ministère travail-emploi-santé a mis en œuvre le plan « Développement de la

bientraitance et renforcement de la lutte contre la maltraitance » et a créé un « comité national

de vigilance et de lutte contre la maltraitance des personnes âgées et des adultes

handicapées » avec une plate- forme d’appel au numéro unique de 3977, gérée par ALMA.

Si le droit est avant tout un cadre pour la bientraitance il s’avère nécessaire d’établir des

recommandations afin de guider les professionnels dans leur pratique.

Il n’existe pas une définition de bientraitance et les auteurs s’accordent pour donner un sens

dynamique à ce concept, et pour établir des préalables à la mise en œuvre

En 2008, l’Agence Nationale de l’Evaluation et de la qualité des établissements et Services

sociaux et Médico-sociaux (ANESM) publie des recommandations de bonnes pratiques

professionnelles : « la bientraitance : définition et repères pour la mise en œuvre »

La recommandation propose des éléments de définition de bientraitance et 4 repères en

direction de l’ensemble des professionnels, des organismes gestionnaires et des associations

d’usagers.

Avant cela, le texte liste les concepts sur lesquels les auteurs de rapports se sont appuyés pour

cerner la notion de bientraitance : (4) : rapport de la mission ministérielle à X BERTRAND par M BRESSAND, M CHRIQUI-REINECKE, M SCHMITT.

Janvier 2011.

- La notion de bienfaisance, un des 3 principes éthiques cités dans le rapport

BELMONT en 1979 qui oblige les professionnels de la recherche à « ne pas faire de

tort » et à maximiser les avantages et minimiser les dommages possibles ».

- La notion de bienveillance qui consiste à aborder l’Autre, le plus fragile, avec une

attitude positive en ayant le souci de bien faire pour lui.

- La notion de « mère suffisamment bonne » de D WINICOTT, pédopsychiatre qui

décrit une attitude d’ajustement à un enfant particulier, à un moment donné.

- La dimension d’une communication de qualité décrite par Carl ROGERS, regroupant

la capacité d’écoute sans jugement, la reconnaissance de ses propres sentiments, la

capacité de l’autre à formuler ses besoins et la compréhension des besoins de l’Autre.

En un mot la faculté d’empathie et la posture de négociation.

- La notion de sollicitude développée par P RICOEUR qui tend à rétablir l’équilibre

dans une attitude respectueuse entre la personne fragilisée et l’aidant.

- La notion anglo-saxonne de « care » dont le sens est la valorisation de la personne par

une réponse contextualisée et individualisée a ses besoins.

- La notion de reconnaissance portée selon A HONNETH par l’attention affective,

l’accès égal aux droits et l’estime sociale.

Les éléments de définition :

- La bientraitance est une culture inspirant les actions individuelles et les relations

collectives au sein d’un établissement ou d’un service. Elle vise à promouvoir le bien

être de l’usager en gardant à l’esprit le risque de maltraitance.

- C’est un mouvement d’individualisation et de personnalisation permanente de la

prestation. La bientraitance ne peut en tant que telle recevoir une définition définitive.

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- Parce que la bientraitance est l’interprétation concrète et momentanée d’une série

d’exigences, elle se définit dans le croisement et la rencontre des perspectives de

toutes les parties en présence.

Les fondamentaux de la bientraitance procédant de cette définition s’enracinent dans les

principes du questionnement éthique qui jalonne la pratique professionnelle.

- La culture du respect de la personne et de son histoire, de sa dignité et de sa

singularité.

La bientraitance trouve ses fondements dans le respect de la personne, de sa dignité et de sa

singularité (Déclaration Universelle des Droits de l’Homme). Il s’agit d’une culture partagée

au sein de laquelle les sensibilités individuelles, la spécificité de parcours et de besoins,

doivent pouvoir s’exprimer et trouver une réponse adaptée.

- Une manière d’être des professionnels au-delà d’une série d’actes.

La posture professionnelle de bientraitance est une manière d’être, d’agir et de dire, soucieuse

de l’autre et réactive à ses besoins et à ses demandes, respectueuse de ses choix et de ses

refus. Elle ne peut se résumer à une série d’actes.

Cette posture professionnelle comporte tout aussi bien le nécessaire souci de maintenir un

cadre institutionnel stable, avec des règles claires et sécurisantes pour tous, et un refus sans

concession de toute forme de violence et d’abus sur le plus faible, d’où qu’elle émane.

Cela implique que les professionnels eux même soient reconnus, soutenus et accompagnés

dans le sens qu’ils donnent à leurs actes.

- Une valorisation de l’expression des usagers

La bientraitance est une démarche faite en réponse aux droits et aux choix que l’usager, ses

proches, ou son représentant légal exprime concernant le lieu, le rythme, les modalités de vie

qu’il privilégie. En ce sens, la bientraitance est d’abord une capacité d’adaptation à l’autre.

- Un aller et retour permanent entre penser et agir.

De la bienveillance, la bientraitance retient l’intention positive. A cela s’ajoute l’héritage de la

bienfaisance : la nécessité d’un acte qui parvienne au plus juste équilibre entre toutes les

contraintes auxquelles sont soumises les actions en faveur des usagers.

La démarche de bientraitance exige à la fois une réflexion collective sur les pratiques pour

une prise de recul régulière des professionnels, et une mise en acte rigoureuse des mesures

que la réflexion collective préconise pour améliorer les pratiques.

En ce sens, c’est une culture du questionnement permanent, y compris à l’égard de l’évolution

des savoirs.

- Une démarche continue d’adaptation à une situation donnée

La recherche de bientraitance est une dynamique sans fin qui appelle des professionnels, des

usagers et de leurs proches et de toutes parties prenantes de l’intervention, une réflexion et

une collaboration continues à la recherche de la meilleure réponse possible à un besoin

identifié à un moment donné.

Cette recherche doit prendre en compte le plus de paramètres possibles concernant l’usager :

son identité et ses besoins, son parcours avant la rencontre avec la structure et les possibilités

qui s’offrent à lui ensuite, ses proches, et tout ce qui fait son expérience personnelle dans le

monde.

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18

Les repères pour la mise en œuvre :

Les auteurs expriment ici la nécessité de guider le lecteur pour une appropriation mesurée du

contenu de la mise en œuvre. Ils listent des actions qui répondent à chaque objectif

constituant les différents repères.

La lecture de la recommandation dans sa totalité est accessible sur le site de La Haute

Autorité de Santé – HAS-.

« Il est recommandé que la bientraitance soit en effet une dynamique d’exigence collective

qui, en tant que telle, soit reçue par chaque structure de manière singulière, selon ses

spécificités et ses missions ».

« Une appropriation judicieuse suppose …/…une exploration progressive et choisie des

préconisations contenues dans le texte ».

Repère 1 - L’usager co-auteur de son parcours

Principe inscrit dans la loi 2002-2, la liberté de choix de l’usager concernant les modalités de

sa vie et de son parcours appelle des initiatives concrètes de la part des professionnels.

Reconnaître la personne dans ce qu’elle veut être, et lui donner tous les moyens d’y parvenir

suppose, en effet de mettre en place des modalités précises de recueil et de prise en compte de

ses préférences et de ses difficultés.

1. Donner une réalité à la liberté de choix

Travailler dans le respect des droits et des choix de l’usager

Personnaliser l’accueil et accompagner l’intégration de l’usager dans la structure

Entendre la parole de l’usager et respecter sa légitimité

Développer les possibilités de relations de réciprocité entre les usagers et mettre

en place une organisation limitant les occasions de dépendance des usagers envers les

professionnels

Être attentif au refus et à la non-adhésion pour faire évoluer la situation de manière

adaptée.

2. L’accompagnement de l’autonomie

Informer, premier support à l’autonomie

Évaluer le risque et travailler à l’équilibre entre marge d’autonomie et marge

d’incertitude.

Prendre en compte le rythme de l’usager et l’ensemble de ses besoins

Accompagner par la parole, la réflexion et le parcours de l’usager

3. La communication individuelle et collective

Proposer à l’usager des occasions d’expression diversifiées

Créer dans les établissements un environnement propice à la prise de parole

individuelle ou collective

Communiquer jusqu’à la fin de vie

4. Un projet d’accueil et d’accompagnement défini et évalué

Fixer des objectifs précis dans le cadre du projet personnalisé

Fixer des modalités de mise en place et de suivi réalistes, respectueuses des

capacités et des rythmes de l’usager

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Observer les effets positifs et négatifs des actions mises en place en faveur de l’usager

et effectuer en conséquence les ajustements nécessaires dans l’accompagnement

Être attentif à la durée et à la continuité du parcours de l’usager

Repère 2 - La qualité du lien entre professionnels et usagers

1. Le respect de la singularité, fondement de l’intervention

Accueillir l’usager et respecter sa singularité

Apporter une réponse adaptée aux besoins de l’usager grâce à la formation et

à la qualification des professionnels

Formaliser le respect de la singularité de la personne grâce au contrat de séjour

et au document individuel de prise en charge

Porter toute l’attention nécessaire à la nature et à l’expression de la relation

affective.

2. La vigilance concernant la sécurité physique et le sentiment de sécurité des usagers

Assurer la protection et veiller au bien-être physique des personnes accueillies

Veiller à la communication et à l’articulation entre les professionnels

Informer les usagers sur les événements institutionnels et les changements de

Professionnels.

Être réactif aux besoins de l’usager et apporter à une réponse appropriée à la

demande.

3. Un cadre institutionnel stable.

Veiller à la connaissance et au respect du droit au sein de la structure

Effectuer un rappel à la règle si nécessaire, sans glisser dans l’excès de rigidité

institutionnelle.

Intervenir en cas de violence pour contenir la personne qui l’exerce envers les autres

Interroger les passages à l’acte violents à la lumière de la vie de l’institution et

du parcours de l’usager.

Repère 3 - L’enrichissement des structures et des accompagnements par toutes les

contributions internes et externes pertinentes

1. Travailler avec l’entourage et respecter les relations de l’usager avec ses proches.

Créer un environnement qui prend en compte l’entourage et entend sa propre

analyse sur la situation de l’usager, en complémentarité des autres analyses.

Créer des lieux ou des occasions qui permettent de reprendre, de maintenir et

de conforter les liens affectifs avec les proches dans le respect des intérêts et

des souhaits de l’usager.

Entendre et comprendre les demandes et besoins familiaux pour instaurer des

solutions de prise en charge pérennes et respectueuses des équilibres familiaux

Maintenir des positionnements professionnels neutres et sans jugement de valeur

à l’égard des relations entre l’usager et ses proches.

Aider les personnes isolées à se créer un réseau social

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2. L’articulation avec les ressources extérieures

Ouvrir la structure à des ressources extérieures et développer les partenariats

Organiser une articulation avec les visiteurs réguliers et favoriser les interactions

pour créer une culture de l’échange

Mettre en place des outils de recueil des perspectives extérieures à la structure

Développer la mutualisation des expériences entre les structures.

3. La promotion de l’expression et de l’échange des perspectives

Solliciter les usagers afin qu’ils formulent leurs souhaits dans des instances

représentatives

Mettre en place des lieux d’échange où professionnels, familles ou proches et usagers

peuvent croiser leurs regards

Promouvoir la participation en créant des liens lisibles entre les avis recueillis

et l’évolution du fonctionnement de la structure

Encourager la participation aux échanges par une sollicitation régulière et

respectueuse des usagers

4. L’ouverture à l’évaluation et à la recherche

Recueillir les données pertinentes pour alimenter une démarche d’évaluation

et de recherche

Ouvrir les structures à des actions d’évaluation et de recherche.

Parmi les éléments de définition, je retiens cette indication : « la bientraitance est un

mouvement d’individualisation et de personnalisation permanente de la prestation », et je

situe la bienfaisance dans l’intimité de la relation soignant –soigné

Parce que le terme bienfaisance constitue un des principes fondateurs de la

démarche éthique et que sa quête implique un questionnement incessant.

Parce que la posture de bienfaisance est un élément de la démarche de

bientraitance qui se compose de multiples approches dont certaines restent trop

éloignés de la seule volonté des soignants.

Parce que le terme de bienfaisance éloigne l’inévitable association des termes

bientraitance - maltraitance qui heurte les soignants.

Et parce qu’ils ne sont pas maltraitants, les soignants pensent qu’ils sont bien traitants donc

bienfaisants. Hors le Pr HUGONOT l’affirme : la bientraitance n’est pas le contraire de la

maltraitance.

Ainsi je pense qu’il est nécessaire de développer cette subtile notion de bienfaisance, que

chacun de nous espère présente dans la coexistence soignant-soigné

La bienfaisance implique de se former et de se questionner sur les effets d’un acte d’aide ou

de soin, sur l’Autre.

La bienfaisance implique de se concentrer sur cette valeur de respect de la dignité dans la

relation ; de prendre de la distance avec ce qui, propre à soi-même ou relevant des contraintes

institutionnelles, pourrait bouleverser la relation à l’autre.

Dans« Gérontologie et Société n°133 (2) : Pour une bientraitance : faut-il repenser le soin ?

R et S MOULIAS et F BUSBY écrivent :

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« Il ne faut pas confondre la bientraitance avec les mots voisins. La bienfaisance caractérise

une action bénévole et volontaire. La bienveillance définit une action faite pour le bien

d’autrui »

A mon sens, les écrits sur le sujet prennent source au sein de l’institution dans laquelle est

évoqué le rôle des professionnels, on se place dans le cadre de l’exercice professionnel

rémunéré et non dans un contexte de bénévolat pour ce qui concerne les comportements

attendus des soignants auprès des personnes vulnérables.

Ceci dit, la loi n° 99-477 du 9 juin 1999 reconnait les bénévoles d’accompagnement en Soins

Palliatifs.

L’article 10 stipule : « Des bénévoles, formés à l’accompagnement de la fin de vie et

appartenant à des associations qui les sélectionnent, peuvent, avec l’accord de la personne

malade ou de ses proches, et sans interférer avec la pratique des soins médicaux et

paramédicaux, apporter leur concours à l’équipe de soins en participant à l’ultime

accompagnement du malade et en confortant l’environnement psychologique et social de la

personne malade et de son entourage.

De cet article nous retiendrons deux termes incontournables pour tendre vers la

bienfaisance : « formés» et «sélectionnent» et nous les reprendrons en faisant le lien avec

l’hypothèse de la formation en faveur de la bienfaisance.

Par contre en reprenant les définitions du « Petit Larousse » à propos du vocable

« Volontaire » nous lisons :’’ qui se fait sans contrainte et de pure volonté : faculté de se

déterminer à certains actes et de les accomplir- énergie,

«Sans contrainte » signifie de ‘‘son libre arbitre, que l’on décide par soi-même’’.

Nous voyons là l’intérêt, d’une réflexion personnelle par chaque soignant sur son mode de

fonctionnement, en étant accompagné et en s’appuyant par exemple sur la méthode d’analyse

des pratiques.

Oui, on peut devenir bienfaisant si, en plus de la sensibilisation, de la formation, de la

considération, on y met de la « bonne » volonté.

Quant à la notion de bienveillance, elle souligne l’intention des professionnels pour adopter

une attitude positive envers l’autre, plus fragile, avec le souci de faire le bien pour lui.

Reste à savoir ce que représente cette notion de bien pour l’autre ; ce qui est bien pour le

soignant n’est pas forcément bien pour le patient. Le soignant a le devoir d’identifier ce qui

représente l’intérêt du patient.

La démarche éthique nous amène à favoriser l’expression de la personne et à la respecter

conformément à la loi de mars 2002 qui oblige au respect du consentement aux soins par le

patient « toute personne prend avec le professionnel de santé et compte tenu des informations

et des préconisations qu’il lui fournit, les décisions concernant sa santé ».

Dans le terme de bienveillance, nous entendons aussi « veiller-rester vigilant » et cette

assertion nous renvoie à la conscience que nous devons placer dans nos actes dans le but de

rétablir un équilibre dans la relation avec la personne fragilisée par la maladie d’Alzheimer,

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22

soucieux que nous sommes du respect de l’AUTRE, c’est ce que Paul RICOEUR nomme la

sollicitude.

Ainsi la bienfaisance exige de nous soignants une vigilance, une recherche permanente pour

ne pas nuire ; cette vigilance conditionne ce que j’appelle La présence à l’Autre (5).

Il nous a semblé intéressant de recueillir le ressenti des soignants au sein des unités qui

accueillent des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer.

Les pages suivantes rendent compte des résultats de l’analyse des questionnaires.

II) Analyse des questionnaires soumis aux soignants de l’Hôpital

Gérontologique et Médico-Social de Plaisir Grignon.

La bientraitance est un ensemble d’attitudes soucieuses du respect de la dignité de la

personne aidée, respectueuses de l’expression de son choix de vie, de ses habitudes et de son

rythme de vie.

La bientraitance est un comportement bienveillant en direction de l’autre, plus vulnérable.

La bienfaisance dans le quotidien du soignant et de toute personne aidante serait tout cela

additionné d’une note encore plus subtile faite de délicatesse, de mots choisis pour dire et

faire, sans heurter la dignité des personnes.

Suite à l’observation de la pratique des soignants dans les unités DALI 1 et 2, et le repérage

de plusieurs situations de malfaisance, ma question est la suivante :

Les soignants sont-ils conscients de n’être pas « bienfaisants » ?

Soutenue dans ma démarche par le cadre de santé, j’ai distribué un questionnaire

(Annexe 1) destiné à évaluer la perception des soignants, concernant des situations bien ou

malfaisantes, à partir de cas fictifs pour certains, observés pour d’autres.

Sans prétendre tirer de cette enquête une quelconque conclusion, les résultats montrent une

réelle sensibilité des soignants les plus impliqués dans l’aide aux activités quotidiennes, pour

identifier les comportements malfaisants.

L’écart dans le classement de certaines situations laisse penser qu’une analyse des pratiques

serait propice à la prise de conscience d’attitudes malfaisantes.

Je peux dire que les situations proposées à l’évaluation des soignants sont majoritairement des

situations de malfaisance dans le sens où elles ne sont pas des situations de maltraitance.

L’intention des soignants n’est pas de nuire et n’entraine pas de risques d’atteintes

physiques ou psychiques.

La situation m révèle la malfaisance institutionnelle pour laquelle certains soignants mettent

en cause la difficile évolution du fonctionnement de l’institution.

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23

Le profil des soignants qui ont participés à ce travail

L’âge moyen des soignants est de 38 ans.

Sans surprise les soignants sont majoritairement du sexe féminin, 24 pour 2 hommes.

L’ancienneté professionnelle est de 15,5 ans et l’ancienneté dans le service de 4 ans.

44% des soignants interrogés sont titulaires de titres de formation du domaine gériatrique.

7 métiers sont représentés :

médecin- assistante sociale- Aide Médico-Psychologique - psychomotricien-ergothérapeute-

Aide-Soignant- Infirmiers.

Les Aides-Soignantes (AS = 9) et les Infirmiers (es) (IDE = 9) sont majoritaires.

100% des soignants qui ont participé à ce sondage, ont choisi leur métier.

69% ont choisi de travailler dans leur service actuel.

Voici leurs motivations avec plusieurs réponses possibles :

J’ai ou j’ai eu une expérience familiale de cette pathologie : 3.8%

Je me suis spécialisé 30%

Ce sont des horaires qui me conviennent (service de jour) 7.7%

C’est un sujet de société qui m’interroge 27%

Je n’ai pas choisi, mais j’aime 34,5%

Autres : 7,5%

J’ai choisi et j’aime ; rapprochement géographique,

Besoin de changer d’activité,

Envie d’accompagner les patients et les aidants

L’exploitation des questionnaires:

Nombre de questionnaires distribués : 40

Nombre de questionnaires reçus : 26 soit 65%

N = 25 car un questionnaire sera inexploitable car non rempli.

Critiques des résultats et limites de ce travail: (diagrammes annexe 2)

Le questionnaire n’a pas été testé avant d’être diffusé, par oubli. Il le sera à postériori pour

évaluer mon propre classement.

Les consignes n’ont certainement pas été suffisamment claires et précises car les

professionnels n’ont pas tous compris que, dans les situations proposées, c’est l’attitude du

soignant qui doit être évaluée.

De plus, certains soignants ont eu tendance à modifier ou interpréter le contexte. Nous

pensions que le contexte décrit, même sobrement, était suffisant pour dire d’une situation si

elle est bienfaisante ou non.

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Certaines situations sont estimées à l’unanimité bienfaisantes (les situations c et g), ou

malfaisante (la situation s).

Neuf situations sont classées majoritairement (88% à 96%) bienfaisante (h) ou malfaisantes

(d-f-k-l-m-p-q-t).

Les résultats du classement pour les situations ci-dessus sont conformes à ce qui était attendu.

Les résultats divergent pour certaines questions ; cela m’interroge et la justification des

réponses fait défaut pour se positionner dans l’interprétation.

La situation -a) : 5 IDE et 5 AS répondent Bienfaisant– 4 IDE et 4 AS répondent

malfaisant—

a) Il fait 26° dehors; Chantal AMP choisit

sans hésitation une tunique sans manche pour

Mme C,

A mon sens, les termes ‘’sans hésitation’’ sont en faveur d’une attitude malfaisante dans le

sens ou l’avis de la personne n’est pas sollicité.

La situation -b) : 6 IDE et 1 AS répondent Bienfaisant– 3 IDE et 8 AS répondent malfaisant—

b) Tout le service est en retard dans les soins

du matin, Iris, AS, donne une douche rapide à

Mme I,

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

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25

Il me semble que la personne malade ne devrait pas subir les difficultés du service à fortiori

lorsqu’il s’agit d’une personne malade d’Alzheimer ; même si la douche est proposée, elle ne

doit pas être rapide.

Le soignant donne priorité à l’organisation du travail plutôt qu’à la personne.

La situation -e) : 4 IDE et 3 AS répondent Bienfaisant– 5 IDE et 6 AS répondent malfaisant.

e) Myriam, IDE procède à la toilette intime au

lit de Mme P et dit :’’Ecartez les cuisses, s’il

vous plait, Mme P ».

Est-ce que les soignants ont focalisés sur le ‘’ s’il vous plait’’ pour évaluer cette situation

bienfaisante ?

Il me semble qu’une formule plus délicate, moins connotée, conviendrait mieux pour

s’adresser à une femme : » ouvrez vos jambes Mme s’il vous plait » permet d’obtenir le

même geste.

A propos des situations ci-dessus, les chiffres sont assez proches entre le classement

bienfaisant et le classement malfaisant.

La comparaison des réponses (situations a-b-e) en fonction de la formation AS ou IDE montre

que les AS apparaissent plus sensibles que les IDE dans le repérage des situations de

malfaisances (18 contre 12).

Pour expliquer cela, mon argument serait d’évoquer le lien entre la proximité des AS avec les

patients.

A propos de la situation - n) : le libellé n’est pas suffisamment clair et tous les soignants n’ont

pas compris qu’on attendait leur avis sur le comportement du soignant. Dans cette situation, il

fallait lire : « l’ergothérapeute propose à Mr. X, un atelier « perles » pour rééduquer sa

motricité manuelle ».

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

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26

n) Mr. refuse de participer à l’atelier

« Perles » qui a pour but de rééduquer la

motricité manuelle.

L’activité n’est pas vraiment bien adaptée car dévalorisante pour ce monsieur, c’est en cela

que la proposition n’est pas bienfaisante.

La situation -o) oblige les soignants à évaluer les bénéfices et les risques, les souhaits d’une

personne face aux réactions du groupe.

o) Mme C a envie de changer de place dans la

salle à manger mais cela perturbe les autres

résidants, aussi Amélie AS, conduit son

fauteuil à sa place habituelle

Le choix délibéré de l’aide -soignante de ne pas entendre le souhait de Mme C, est considéré

comme malfaisant par une majorité de soignants – 68%. Les soignants qui classent cette

décision ‘bienfaisante’ privilégient certainement l’expression du groupe-28%.

Nous voyons ici, que même dans le cadre d’une décision instantanée, la réflexion est

nécessaire pour considérer le désir de l’une :

Son voisinage ne lui convient-il pas ? Est- elle éblouie face à la lumière ou au

contraire, préfère-t-elle être en pleine lumière ? Souhaite-t-elle rencontrer d’autres

résidents ?

Et prendre en compte l’intérêt des autres :

Comment leurs a-t-on présenté le changement ? Quels mots, quel ton, quels gestes?

Quels effets sur la dignité de la personne et indirectement sur la prise du repas induit

l’absence du respect de l’autonomie de la personne en fauteuil roulant ?

Qui est perturbé par ce changement : les résidents ou les soignants ?

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

0%

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70%

80%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

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r) Amélie fait participer Mme C à la

conversation quand la fille de celle-ci

l’interroge sur l’état de santé de sa mère.

Concernant la situation - r) : les préjugés concernant la maladie d’Alzheimer amènent

quelques soignants (5 sur 25) à penser qu’une personne malade ne peut pas participer à une

conversation.

Adopter une attitude bienfaisante, c’est considérer toute personne comme apte à penser et

s’exprimer surtout lorsqu’il s’agit de sujets la concernant.

A propos de ces différences de résultat, est-ce à dire qu’évaluer une situation « malfaisante ou

bienfaisante » dépend de l’interprétation du soignant, de sa personnalité ou de sa culture, de

son expérience, de sa formation ?

Oui, certainement et cela confirme que la bienfaisance s’inscrit dans une démarche éthique

qui laisse une place majeure à la réflexion personnelle qui peut être guidée par la formation et

la concertation sein des équipes. Nous reprendrons ce thème dans la discussion.

Le vécu des soignants concernant les situations de malfaisance.

76% des soignants disent avoir été confrontés à une situation de malfaisance,

8% disent ne pas avoir connu de telles situations,

16% ne se prononcent pas.

Les circonstances évoquées expliquant ces situations

26 % évoquent le stress et la fatigue

26% manque de personnel

21 % manque d’empathie-de respect- d’humanité

15 % manque de temps- problème d’organisation du planning ou du système hospitalier

15 % manque de professionnalisme- de compétences- de motivation

10 % les habitudes – la routine

Certains soignants évoquent des gestes de soin délicats comme le changement de chambre,

la toilette, le réveil.

Le ressenti des soignants:

Malaise et gêne : 52 %

Enervement –colère : 26 %

Incompréhension : 10 %

Frustration : 10 %

Peine : 5 %

Agression : 5%

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

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Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

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Leurs réactions

Discussion-échange- recadrage avec le soignant concerné : 31 %

Excuses-explications-dédramatisation auprès du patient : 26%

Réunion – information-formation : 10 %

Optimiser l’organisation : 5%

Faire au mieux : 5%

Justification par obligation de soin d’hygiène : 5%

Justification par « mauvaises habitudes » : 5%

Un soignant dit n’avoir parfois rien dit : 5% Un soignant dit ne jamais s’être interrogé sur la capacité des patients à se rendre compte : 5%

La réalité est implacable, nombreux sont les soignants qui ont été impliqués dans une

situation de malfaisance.

Plus de la moitié des soignants mettent en cause 2 éléments interactifs, la fatigue et le

manque de personnel.

Un soignant sur 5 explique le phénomène de malfaisance par une absence de valeurs

humaines.

Si nous faisons le lien avec le fait que 100% des soignants ont choisi ce métier, sommes-nous

autorisé à penser que les motivations de certains soignants ne sont pas l’intérêt pour l’Autre

mais plus l’assurance d’un emploi dans la fonction publique ?

15% des soignants remettent en cause l’organisation du service et/ou la lourdeur de

l’institution hospitalière.

25% des soignants font le lien avec un défaut de compétences et/ou de motivation.

Les situations de malfaisance sont toujours à l’origine de souffrance des soignants quelle que

soit leur fonction.

Pratiquer les métiers du soin est le plus souvent un choix (100% pour les soignants interrogés)

motivé par une adhésion à des valeurs d’humanité.

Ce conflit interne est peut-être un des éléments expliquant la difficulté à parler de la

malfaisance.

Etre confronté ainsi à des malfaisances à l’égard des personnes vulnérables est difficilement

supportable, ce que confirment les chiffres, puisque plus de 50% des soignants réagissent en

tentant de recadrer les auteurs et/ou en expliquant et s’excusant auprès du patient.

Il me semble important de noter qu’aucun soignant n’évoque les difficultés de

communication avec la personne atteinte de maladie d’Alzheimer comme risque de

malfaisance

J’imagine que les soignants n’ont pas identifié cette déficience comme un obstacle à une prise

en soin adaptée.

Nous reprendrons cette problématique dans la dernière partie en proposant la formation

comme hypothèse pour tendre vers la bienfaisance.

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Le paragraphe suivant tente de cerner les troubles engendrés par la Démence Type Alzheimer,

qui perturbent le mode de communication conventionnelle entres les personnes.

Favoriser l’expression des personnes accueillies est un pilier de la démarche de bienfaisance.

La préoccupation concernant la « difficile bientraitance » (3) est amplifiée :

du fait de l’évolution du nombre des personnes diagnostiquées Démence Type

Alzheimer.

Les projections indiquent qu’en l’absence de prévention, le nombre de malades

Alzheimer passerait de 13,5 millions en l’an 2000 à 36,7 millions en 2050. (Françoise FORETTE « des mots à dire » FNG).

du fait des difficultés vécues par les soignants pour comprendre les troubles,

les désirs, les attentes des personnes atteintes de DTA.

Les soignants n’ont pas identifié la maladie d’Alzheimer comme cause de la malfaisance.

Nous décrivons maintenant les principales perturbations qui affectent la communication

III) Les difficultés de la communication dans la maladie

d’Alzheimer.

La dégénérescence des fonctions cérébrales va restreindre les capacités cognitives comme le

registre sémantique, l’écriture et le langage, ainsi que la capacité d’attention et de

concentration.

Les fonctions intellectuelles comme le raisonnement et le jugement sont altérés.

La relation avec une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer est perturbée du fait que les

troubles cognitifs atteignent la perception de son schéma corporel et entrainent des difficultés

de repérage et d’orientation spatio-temporels.

L’agnosie réduit les capacités à reconnaitre et se servir de son environnement matériel

La personne éprouve des difficultés à conserver son identité.

Les troubles mnésiques déconstruisent son histoire de vie et l’empêche d’identifier les

personnes qui l’entourent.

Où qu’elle soit, la personne malade se trouve dans un environnement devenu inquiétant et est

envahie par l’angoisse à l’origine de troubles du comportement.

Son image narcissique est blessée, et la personne éprouve des sentiments de frustration, de

tristesse, de révolte, l’amenant vers des comportements qui déroutent l’entourage.

Bien évidemment, malgré ses troubles, la personne malade est avant tout une personne qui

porte en elle son histoire et les interactions montrent combien elle devient sensible à son

environnement. La capacité émotionnelle est présente.

« La partie inaltérable de l’être cherche à se manifester, requiert la proximité d’une âme

sensible qui l’aidera à passer vers l’autre versant de sa vie » ‘’ Aude ZELLER à l’épreuve de la vieillesse’’ p 122

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A la fin des années 80, Naomi FEIL, thérapeute reconnue sur le plan international, a mis au

point une approche thérapeutique qui permet de communiquer avec les personnes très âgées

désorientées ou diagnostiquées DTA : la VALIDATION. (7) Validation mode d’emploi Naomi FEIL page 45-48 .

« Cette thérapie basée sur une attitude de respect et d’empathie, vise à aider ces grands

vieillards malorientés à recouvrer leur dignité et leur éviter de sombrer dans le stade

végétatif »

La validation s’appuie sur 10 principes et valeurs fondamentales :

« La validation est basée sur le postulat qu’il y a une raison derrière tout comportement.

Comprendre pourquoi les personnes désorientées ont tel ou tel comportement, et accepter que

ce comportement soit le leur, est la clé qui permettra de les valider ».

L’intervenant en validation doit être capable d’accepter les personnes désorientés et de se

sentir bien à leur contact…/… de laisser de côté leur propre jugement et leurs attentes sur le

comportement d’autrui./… Cette technique requière une écoute attentive et une authentique

empathie. »

Deux attitudes attendues de la part des soignants dans « la présence à l’Autre ».

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« La vérité est ce qui brûle. La vérité est moins dans la parole que dans les yeux, les mains

et le silence. La vérité ce sont des yeux et des mains qui brûlent en silence. »

Christian BOBIN dans « LA PRESENCE PURE ».

IV) La présence à l’Autre.(5)

L’Autre est présent malgré la maladie d’Alzheimer.

En tant que soignants, nous devons faire de ‘’la présence à l’Autre’’ le fondement de la

qualité relationnelle dans l’aide et le soin. C’est cette attitude qui nous mènera vers la

bienfaisance.

« L’humanité, c’est ce visage qui m’oblige » (E LEVINAS)

« Le visage porteur de la souffrance oblige le professionnel de santé à accueillir l’homme

souffrant et ainsi à assumer sa dignité de soignant et sa responsabilité d’humain ». (6) Revue de littérature autour de la notion de bientraitance. Nadia PEOCH, p10

« Dans cette relation tellement spécifique qu’est le soin, les valeurs à préserver touchent

essentiellement à la qualité du rapport noué et entretenu avec la personne ».

‘’C’est une alliance complexe et changeante (8)’’, toujours à travailler. (8) E HIRSCH Repenser la maladie d’Alzheimer –p 114

Cela nous renvoie à la dynamique nécessaire à la démarche de bienfaisance, à une position

volontaire à adopter par le soignant pour garder une conscience aiguë des enjeux de la

relation.

Dans ce sens, nous dirons que le soignant maitrise la notion de prendre soin alors que, ce

même soignant, dans la capacité permanente à s’adapter à l’Autre fait preuve d’une

« démaitrise » (8), notion qui permet l’expression et l’existence de l’autre.

Nous retrouvons la notion du « lâcher prise », l’importance de l’humilité nécessaire qui nous

aide à accepter nos limites et laisse la place à l’Autre, sujet de soin.

« La proximité sans présence à l’autre est une juxtaposition » (9)

« Pour que cette proximité trouve un sens et soit acceptable sur le plan éthique, elle doit se

traduire en terme de présence, c'est-à-dire inclure le souci de respecter l’Autre dans son

altérité, son statut de sujet -sujet de soins et non objet-, inclure le souci de le maintenir dans

un partenariat, quels que soient la précarité ou le caractère problématique de son existence

dans sa manifestation concrète. » (9) B MATRAY La présence et le respect- page 16-18

Autrement dit, quelques soient les difficultés de compréhension, les atteintes cognitives de la

personne dont nous allons prendre soin, nous devons la considérer avant tout comme une

personne libre, compétente pour décider, et digne de notre respect.

Etudier la pathologie aide à comprendre mais ne réduit pas la personne à ces symptômes.

La personne malade est experte de ses désirs, de ses besoins, de sa qualité de vie » (8) P DORENLOT-M FREMONTIER- p 118

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Dans la préface de « la présence et le respect » (9) de B MATRAY, Patrick VERSPIEREN

écrit :

« Il n’est pas facile de laisser advenir cette présence, de soi-même à l’autre, présence de

l’autre à soi-même, surtout si l’autre est affecté par la douleur ou un autre type de souffrance.

Chacun pourra découvrir en lui des réticences, des résistances, à cause de la contagion de la

souffrance, du choc des émotions… la distance est souvent maintenue et la relation

compromise.

Or, c’est de cette présence qu’a le plus besoin celui qui est atteint…/…

Ne pas entendre serait un manque d’attention et d’intérêt; au contraire, s’imposer représente

une forme de violence ».

« On ne soigne pas vraiment à distance du corps ni à distance du cœur »

La difficulté réside dans la capacité à être suffisamment proche pour percevoir et comprendre

l’Autre sans s’identifier à l’Autre.

C’est cela que Naomi FEIL nomme l’écoute authentique. (7)

Ecouter signifie d’abord : savoir se taire pour laisser la parole à son interlocuteur et surtout

savoir se taire intérieurement.

Mettre à distance ses propres réactions émotionnelles et quitter son propre système de valeurs

sans les abandonner (10) Julie ou l’aventure de la juste distance. Pascal PRAYEZ - p 131-133

Dans l’approche centrée sur la personne, Carl Rogers propose l’empathie comme attitude

relationnelle qui « permet de percevoir le monde subjectif d’autrui, comme si on était cette

personne »

La maladie d’Alzheimer amène le soignant dans un registre de soin différent.

Nous ne sommes plus dans la technicité, depuis longtemps déterminant essentiel du soin.

Mais, même si le savoir- faire technique est incontournable dans le métier du soin,

souvenons-nous que « trop de technique appauvrit le soin » (11) MF COLLIERE Promouvoir la vie –p 322

Nous devons rompre avec cette dissymétrie que peut devenir la relation de soins.

« Les soins véhiculent un pouvoir réducteur à chaque fois que le soignant n’a pas identifié ce

que peut ou sait faire seule la personne dépendante, ou ce qui la motive, ce qui lui fait gagner

en confiance, ce qui la valorise…/… Fort heureusement, le pouvoir véhiculé par les soins

infirmiers est libérateur chaque fois qu’il permet aux usagers de mobiliser tout ce dont ils sont

encore capables ; chaque fois qu’il favorise l’interaction entre les personnes soignées ;

chaque fois qu’il reconnait le savoir des personnes soignées et qu’il accroit leur autonomie ». (11)

La personne seule est celle qui se connait le mieux ; demandons lui son accord, son avis, son

ressenti, et soyons suffisamment attentif et concentré pour décoder tout ce que son corps et

ses mots maladroits veulent nous dire.

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Avant de rentrer dans la chambre, prenons le temps de quelques secondes de concentration

pour nous préparer en entrer en relation avec la personne, ici présente, derrière cette porte de

chambre, et pour nous dire : « je vais rencontrer Mme ou Mr untel, ensuite je lui proposerai le

soin ».

C’est un temps nécessaire à une relation vraie telle que la formation et l’engagement du

bénévole auprès des personnes en fin de vie nous y entrainent.

Cela ne nous empêche pas de s’assurer que le matériel nécessaire au soin est rassemblé ; mais

essayons, tout en gardant la rigueur nécessaire au soin de qualité, de considérer d’abord la

personne, devenue si particulière par son mode de communication.

« Accompagner une personne atteinte de maladie d’Alzheimer c’est accepter la

communication non verbale comme réel outil de soins, en prendre conscience et savoir

l’utiliser.

C’est s’interroger sur la qualité de nos gestes, de notre façon de toucher.

C’est également accepter d’être regardé et touché autrement…

C’est repenser la façon dont on regarde, dont on nomme, dont on parle aux malades.

Et c’est peut-être enfin, pouvoir regarder l’autre, non pas en terme de capacités déchues mais

bien comme un être en constante dynamique pour s’exprimer et pour être en lien ».

Deborah Lowinski-Létinois, psychomotricienne- formateure DIU Ethique et soins aux personnes atteinte

de la maladie d’Alzheimer et leur famille – Janvier 2012

Dans son livre ‘’ la présence à l’Autre ‘’(5) Marcel NUSS demande aux aidants d’être

conscients de leurs actes, il leur demande de la concentration, d’avoir présent en pensée

l’image de l’Autre et les effets de leur acte sur l’Autre.

C’est donc une application et un questionnement permanents.

Pour tendre vers cette éthique relationnelle, il faut de la volonté, agir avec l’intention

déterminée de maintenir la personne dans sa dignité.

C’est cette posture qui apporte de la richesse et donne du sens à la présence du soignant.

La motivation et l’envie de comprendre la personne désorientée supposent une attention

constante qui demande du temps et de l’énergie.

Dans la revue « soins gérontologique n°91 sept-octobre 2011 », Catherine FLOCH infirmière

libérale du Morbihan écrit :

« Prendre le temps de connaitre le patient : cette notion est primordiale […/...] prendre soin

des personnes vieillissantes suppose de les soigner à la mesure de leurs temps : avec un

ralentissement. »

Les comportements des personnes désorientées sont parfois déroutants et il est nécessaire que

les soignants soient formés pour décrypter les messages et apprendre à y répondre de façon

adaptée.

La recommandation n°3 pour la bientraitance décrite par l’ANESM le rappelle :

« Cette disponibilité d’écoute active suppose d’avoir ancré chez les professionnels la

conviction que, quel que soit son éloignement des normes de comportements habituellement

en vigueur, quelle que soit la difficulté de compréhension qu’ils peuvent rencontrer, l’usager

est et demeure un être qui s’exprime et doit être rencontré en tant que tel. Ceci appelle une

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grande faculté de compréhension et d’analyse chez les professionnels en contact avec les

usagers manifestant des troubles du langage ou des troubles de comportement importants.

Il est donc recommandé qu’ils soient formés à cet effet. »

En dépit de la volonté de bien faire et d’un savoir être fondamental, « nous devons admettre

que la tâche du soin auprès d’une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer est lourde et

douloureuse. « L’image de la démence renvoie à la psychiatrie avec enfermement et

déchéance,…/… » (8) p 112

La présence est fragile, jamais assurée, toujours à reprendre. Elle suppose de garder à l’esprit

la singularité de l’autre, ce qui compose son identité, la différence de sa culture.

C’est par cette conscience de soi et de l’Autre que notre présence de soignant ou d’aidant

prend tout son sens.

Maintenir les conditions de la présence revient à rendre possible la bienfaisance.

C’est un chantier mis en œuvre depuis plusieurs années qui restera toujours inachevé mais

actif , puisqu’il intègre la notion de temps, l’évolution des sciences et des techniques et qui,

par-dessus tout, doit tenir compte de la singularité et l’inconstance, de la fragilité et la dignité

de l’être humain.

V) Quelles voies pour tendre vers la bienfaisance ?

Assurer les conditions de la présence revient à réfléchir sur les voies à suivre pour tendre

vers la bienfaisance.

C’est un questionnement perpétuel qui place dans la balance les exigences du service - la

qualité ne peut être obtenue que par l’adhésion des soignants- et l’intérêt du patient -

considérer sa vulnérabilité est primordiale

Les champs de réflexion sont nombreux et parmi les quelques hypothèses émises dans le

domaine du soin, je place en tête les modalités de la formation dans le secteur de l’aide à la

personne.

En 2007, l’espace éthique de l’AP-HP publie la ‘’charte Alzheimer, éthique et société’’

dont l’article 2 propose le développement et la garantie des compétences professionnelles par

les formations initiale et continue ainsi que par le travail en équipe.

a) Valoriser les métiers d’aide et de soins à la personne.

E HIRSCH (8) reconnait la difficulté de prendre en soins les personnes désorientées et,

en même temps l’absence de reconnaissance. Il écrit : « Cette part de l’activité

soignante recèle pourtant une richesse de talent et de générosité peu reconnu. »

Valoriser ces métiers, c’est reconnaitre la responsabilité des professionnels en leur attribuant

un salaire et une perspective de carrières décentes.

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Pourquoi ne pas adopter la politique du « donnant donnant » en opérant une sélection qui

permettra de recruter des candidats motivés.

Aujourd’hui, peu de candidats se présentent pour ces formations car les métiers d’Aide à la

Personne sont réputés difficiles.

Aussi les formateurs observent un choix par défaut, par nécessité alimentaire.

Rappelons que ce secteur est le plus porteur d’emploi ; un communiqué de presse de mars

2012 émanant de la Direction de l’Animation, de la recherche, des études, des statistiques

(DARES), service du ministère du travail et de l’emploi, de la formation professionnelle et du

dialogue social écrit :

« Les perspectives de création d’emploi devraient principalement profiter … /…aux métiers

du soin et d’aide aux personnes fragiles. Infirmiers, aides-soignants et aides à domicile,

figureraient parmi les métiers bénéficiant des plus importants volumes de créations d’emploi

d’ici 2020 ».

Prendre soin de l’Autre, dépendant et vulnérable, demande des qualités humaines relatives à

la personnalité du futur professionnel, qualités que la formation ne peut apporter, mais

seulement enrichir.

Nier ce prérequis c’est prendre le risque de la malfaisance voire de la maltraitance.

Que dire des formations de l’Education Nationale pour lesquelles les entretiens de sélection

des candidats sont supprimés, prétextant que les métiers d’aide à la personne n’exigent pas un

grand savoir.

Ce n’est pas l’évaluation des capacités à apprendre que les formateurs repèrent au cours de

ces entretiens, mais ils tentent de cerner les qualités humaines et les motivations pour ces

métiers si complexes et généreux de l’aide à la personne.

Si les missions de l’Education Nationale sont de proposer une formation aux jeunes pour les

mener vers un métier, la préoccupation tout aussi légitime et la responsabilité des formateurs

est de valider des futurs professionnels de l’aide à la personne, digne de ce titre.

La maturité et notre expérience de vie nous rend plus réfléchi, plus patient et mieux préparé

à affronter des situations relationnelles difficiles, cependant nos ainés dépendants ne peuvent

pas attendre que le temps fasse son œuvre pour améliorer le comportement des jeunes

soignants.

Le docteur R MOULIAS cite encore la déontologie comme préalable à la bientraitance.

Pour lui chaque métier a sa déontologie. La déontologie est aussi indispensable pour les

métiers de l’aide. « On ne peut continuer à les considérer comme de simples ‘’services à la

personne’’ dans la mesure où la personne dépend de ces professionnels pour vivre ». (2) pages 10-13

b) Changer les relations dans le soin.

La bienfaisance n’est pas une attitude qui se veut charitable, c’est au sens du respect de la

dignité que nous devons l’entendre.

Au cours de la relation d’aide ou de soin, le soignant porte attention au choix de ses gestes,

de ses mots ; il cherche à obtenir le consentement de la personne aidée, il est alors dans le

respect de l’autonomie.

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La question se pose à propos de la personne désorientée quand le sens de ses propos nous

échappe : Sans la possibilité d’obtenir ce consentement, le soignant doit partir du postulat que

la personne garde au plus profond d’elle-même l’identité qu’elle a mis tant d’années à forger

et que son refus éventuel, après que le soignant ou l’aidant ait mis en œuvre toutes les

conditions pour favoriser la compréhension, porte une valeur que nous devons entendre.

Il s’agit pour le soignant d’accepter de perdre cette forme de pouvoir sur l’Autre.

De réfléchir et peut être de gagner la liberté de penser le soin autrement ; briser la routine

pour faire de son travail quotidien un moment de qualité favorable à la bienfaisance et

valorisant par une sublime rencontre avec l’Autre.

c) Repenser l’organisation des services et le fonctionnement des équipes.

Que les soignants me pardonnent, mes remarques d’observateur externe à l’organisation sont

certainement naïves, mais elles reflètent seulement le constat d’un fonctionnement qui

m’apparait perfectible.

En dehors du fait indéniable que cette posture de bienfaisance apporte de la richesse et

donne du sens à la présence du soignant, la nécessaire concentration que requiert la qualité

des soins, est épuisante.

Le roulement des postes de travail des Aides-Soignants et des infirmiers se fait sur 12 heures

dans les unités de médecine aiguë de psycho-gériatrie cognitive.

Pour l’avoir pratiqué, il est impossible pour le soignant d’être attentif et concentré sur cette

amplitude.

Cet emploi du temps est souvent un choix du soignant lui-même, cependant il n’est pas

forcément compatible avec une prise en soin optimisée et sécurisante de la personne

désorientée.

Concernant la situation- m- proposée dans le questionnaire, 92% des soignants pensent que

coucher les patients à 18h 30 est une attitude malfaisante.

Je suis curieuse de connaitre les freins dans l’organisation des services pour obtenir cette

amélioration tellement attendue dans la vie quotidienne des patients.

Espérons que les textes nombreux qui prônent le droit des personnes à choisir leur mode de

vie amèneront les soignants à intégrer l’heure du coucher comme un élément du mode de vie.

Où est passé le binôme IDE-AS ?

Je n’ai pas vu pratiquer la toilette en binôme AS- IDE, alors que les soignants questionnés

identifient cet acte de soin comme propice à la malfaisance ?

L’intérêt du binôme est d’être un moyen de soutien, de formation continue, et d’évaluation

réciproque des pratiques auprès du patient.

La pratique du binôme, qu’on peut appeler aussi tutorat ou parrainage, s’organise en

couplant deux professionnels de formation différente et complémentaire, l’un étant plus

pragmatique, l’autre plus dans la réflexion.

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L’échange entre les deux faisant émerger le questionnement et transformer l’attitude

empirique en savoirs intégrés et partagés.

La bienfaisance est un processus évolutif, un travail de longue haleine qui suppose de la

réflexion, de la concertation, donc du temps

Les Recommandations de l’ANESM pour la bientraitance abordent cette question du temps :

« Les professionnels interviennent auprès des usagers dans des modalités de temps et de

rythme marqués par leurs contraintes institutionnelles. Il est important que ces contraintes

soient néanmoins périodiquement questionnées et ajustées autant que possible pour que

l’ensemble des besoins de l’usager soit pris en compte, et que les rythmes naturels dans sa vie

quotidienne (cycles de sommeil, d’appétit, mais aussi besoins de contacts et d’interactions

sociales, par exemple) soient respectés au mieux. Il est également important que les rythmes

propres de l’usager dans ses mouvements et sa vie quotidienne (temps du lever, de la toilette,

par exemple) soient connus, respectés et pris en compte dans l’organisation du travail des

professionnels ».

La question du manque temps est récurrente.

Donner du temps aux soignants c’est aussi le donner aux personnes âgées dépendantes, ce qui

est un des piliers de la bienfaisance.

Nous savons bien qu’en prenant de l’âge, il faut plus de temps pour réagir, pour s’exprimer,

pour se déplacer etc.

Alors comment faire avec les personnes désorientées auprès desquelles l’approche doit être

réfléchie, la présence douce, l’écoute attentive, le décodage permanent, l’adaptation

incessante.

Donner du temps aux soignants c’est leur donner les moyens de la réflexion et les moyens de

se mettre à distance. B MATRAY (9) écrit : « celui qui discerne saura se mettre à l’écoute ».

Mais le temps est une monnaie à haute valeur ajoutée, aussi dans cette période de crise, il est

peu probable que les soignants aient plus de temps. Ils en auront peut-être moins, contraints

par les obligations de traçabilité dans la pratique de la prise en soin des personnes.

Les soignants doivent compter sur leur volonté de travailler dans la bienfaisance et peut être

réfléchir encore et toujours, et se donner la liberté de penser le soin autrement

Devenir créatif dans la relation à l’Autre tout en respectant le cadre de soins, cela pourrait

être un programme de réflexion mené par les cadres et les formateurs avec l’objectif de rendre

les soignants plus autonome dans l’organisation des soins d’aide à la personne. Nous ne

pouvons plus rester dans un emploi de temps de journée type puisque la recommandation

citée ci-dessus mentionne « que les rythmes propres de l’usager dans ses mouvements et sa

vie quotidienne -doivent être- connus, respectés et pris en compte dans l’organisation du

travail des professionnels ».

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d) Repenser les contenus des formations et la pédagogie des formateurs

dans les métiers d’Aide à la personne

Dans l’ouvrage n°133 « Pour une bientraitance : faut-il repenser le soin ? » (2) édité par la

Fondation Nationale de Gérontologie, le docteur R MOULIAS président de ALMA, affirme

qu’il ne peut exister de bientraitance sans certains préalables dont la compétence. « Sans compétences, nul ne peut être bien traitant…/…La compétence ne se limite pas

à la qualification mais la qualification est un des meilleurs outils d’acquisition de la

compétence…/… et par une remise à niveau continue de ses connaissances ».

MF COLLIERE (11) écrit : « Le pouvoir réducteur (du soin) n’est pas forcément le fait d’un

mobile intentionnel, il est le plus souvent le signe d’une difficulté que le soignant ne parvient

pas à identifier …/… Par exemple l’hyper développement des capacités techniques fait que

les réponses apportées aux problèmes seront essentiellement d’ordre technique au détriment

du relationnel ».

D’où l’intérêt de repenser les contenus et la hiérarchie des priorités dans les programmes de

formation.

Nous pourrions comparer l’importance (en nombre de lignes ou en heures de cours) accordée

dans les référentiels de formation des AS-AMP-AVS pour aborder les thèmes

‘’ Éthique’’ et ‘’relation d’aide’’.

De façon plus globale, nous pourrions nous interroger sur la part du relationnel et la part du

technique, dans un programme de formation des métiers d’aide et de soin à la personne ?

Souvenez-vous : L’aide-soignante stimule Mme L en ces termes : « Il faut manger Mme L,

c’est important si vous voulez rentrer à la maison » !!

Ainsi que me le fait remarquer Mme B, cadre de santé de l’unité DALI, il faut se poser la

question si le comportement de l’Aide-Soignante, incitant Mme L à manger pour rentrer plus

vite à son domicile, est guidé par le souci de bien être de la patiente ,ou plutôt ‘’par les

contenus et modalités de sa formation qui veulent qu’un soignant accompagne la personne

dans la réalisation de ses besoins fondamentaux voire l’assiste activement !!’’.

Dans l’ouvrage ‘’Réflexions sur la formation’’ Jérôme PELLISSIER critique, en effet, la

façon avec laquelle les formateurs utilisent la liste des besoins fondamentaux de l’être

humain résumés par Virginia Henderson. (12) n°118- ‘’Réflexions sur la formation’’ FNG- p 37 à 54.

Il reprend notamment le fait que l’on ne peut pas réduire la personne à une liste de besoins,

qui plus est, passe sous silence les besoins sexuels.

Il s’étonne que ne soit pas listés le besoin de liberté ou le besoin d’autonomie.

A mon sens, et pour le pratiquer avec mes étudiantes, une étude approfondie de ces besoins, et

le lien fait entre eux, permet d’aborder bien des notions qui caractérisent l’être humain.

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Par exemple expliciter le besoin n°11‘’Agir selon ses croyances et ses valeurs’’ peut tout à

fait illustrer la notion de liberté et par extension, celle de pratiquer la sexualité de son choix.

Cette réflexion en groupe est riche et elle permet aux futurs professionnels d’adopter une

attitude réfléchie et attentionnée qui conditionne la capacité d’adaptation dans l’aide à la

personne dépendante.

Autre question à se poser : le formateur a-t-il insufflé au sein de son groupe de stagiaires, une

culture du questionnement, propice à donner au soignant l’autonomie nécessaire pour

répondre au mieux aux besoins des personnes aidées ?

Répondre au mieux aux besoins des personnes aidées, implique d’avoir pris connaissance du

projet individualisé de la personne, du contexte familial et social et bien sûr du processus

pathologique qui induit sa dépendance.

Partageant ces données, chaque soignant de l’équipe est à même d’adapter sa posture d’aidant

pour une prise en soin bienfaisante.

La formation continue est un droit et une obligation :

La loi HPST n° 2009-879 du 21 juillet 2009 instaure l’obligation de développement

professionnel continue (DPC) à l’ensemble des professionnels de santé.

Une attitude éthique semble accessible à chacun de nous puisqu’il s’agit de se questionner à

tout moment, même et surtout concernant des activités quotidiennes, de « routine » qui se

déroulent en présence de l’Autre, personne le plus souvent vulnérable, qui mérite toute notre

attention.

Pourtant cette remise en question n’est ni simple ni évidente, et cette culture du

questionnement et du doute ne va pas de soi.

« C’est par le manque que l’on éprouve que l’on peut s’approcher de l’autre ; ce n’est pas en

partant de certitudes »

Dans ces termes, Didier SICARD dans ‘’l’ éthique médicale et la bioéthique’’ ,

nous explique que le comportement de l’autre nous trouble parfois et que, ce n’est pas en

imposant notre explication des faits mais plutôt en cherchant à les comprendre que l’on

parvient à une attitude empathique, soucieuse de l’Autre. (13) Didier SICARD ‘’l’ éthique médicale et la bioéthique’’ p 63.

La démarche d’Evaluation des Pratiques Professionnelles est reconnue comme un levier

intéressant pour tendre vers la bientraitance (cf. loi 2 janvier 2002).

C’est bien la nécessité de prendre du recul, par l’analyse des pratiques qui permet aux

professionnels soignants de mesurer l’impact de leurs actes sur la personne et qui donne sens

au rôle de soignant.

Parce que la prise en soin des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer est complexe, la

mesure n°20 du plan Alzheimer 2008-2012 crée une formation spécifique de 140 heures, en

direction des professionnels de niveau 5, leur permettant d’appréhender plus justement et plus

sereinement les soins et l’accompagnement des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer

et leurs familles.

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Rappelons que, dans les justifications des situations de malfaisance vécues par les soignants,

personne n’a évoqué les difficultés de communication avec la personne atteinte de maladie

d’Alzheimer comme risque de malfaisance.

Et pourtant, c’est bien l’incompréhension des comportements et la difficulté de la prise en

soin de ces patients qui donnent lieu à tant de questionnement et de désarroi.

Tant de questionnement, tant d’ouvrages, et tant de mots pour parler de bientraitance !

Je ne peux développer mon approche de la formation sans parler des mots.

Bienfaisance-bienveillance-sollicitude- empathie- respect-

Et maintenant ‘’ le care’’

Le ‘’care’ ’c’est la qualité et l’authenticité de la relation du prendre soin.

« La pratique du care implique de sortir de son propre cadre de référence pour entrer dans

celui de l’autre ». (1) Oriane DELIVRE p 24

N’est-ce pas ce que nous appelons l’empathie !

Voici un terme que l’on retrouve dans plusieurs écrits et il me semble que les auteurs

souhaiteraient que ce néologisme anglophone soit intégré dans notre vocabulaire comme une

solution.

Les soignants ont-ils besoin de nouveaux mots pour bien vouloir réfléchir sur leurs pratiques ?

« Ce travail - de réflexion -autour de la parole doit amener les professionnels à accepter que

leur travail devienne invisible, car pour Pascale Molinier, de son invisibilité dépend son

succès » (1)

Oriane DELIVRE nous explique que le travail qui tend vers la bienfaisance n’est ni inscrit

dans un protocole technique, ni coté dans les SIIPS, mais fait preuve d’une présence

attentive, d’une réflexion permanente. C’est donc un travail silencieux pour lequel il ne faut

pas attendre de gloire mais la formidable joie de restaurer la personne dans sa dignité, de lui

laisser la liberté de décider pour elle-même.

C’est le sens que je donne à la bienfaisance ; est-cela « le care » ?

Je remercie celui ou celle qui voudra bien me former à cette notion.

Cela dit, la reconnaissance fait du bien, elle est nécessaire sur tous les plans et nous ne

sommes que des humains qui avons besoin de réconfort pour faire preuve sur le long terme,

de sollicitude envers les patients.

On peut penser que si la reconnaissance est accordée à la pratique du soignant, alors celui-ci

donnera toute son énergie pour une relation de qualité, lui conférant ainsi une véritable

posture bienfaisante

Pour ma part, si l’on devait se pencher sur les mots, la réflexion porterait plutôt sur le choix

des mots qui choque nos oreilles et celle de nos ainés.

Nous l’avons vu par exemple dans la situation e) du questionnaire, la sémantique est

importante.

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« Attention aux dérives du vocabulaire alerte Bernadette PUIJALON anthropologue : avec

l’emploi de termes très stigmatisant (EHPAD, UHR, etc.). (14)

Qui peut se sentir chez soi dans un UHR ? Le mot déclenche des images, provoque des

réactions de rejet ou d’attirance, crée, renforce les représentations sociales négatives ».

Que penser des termes « grabataire vertical ou horizontal » lus dans la fiche 5 qui traite de la

prévention des risques liés à une mauvaise installation au fauteuil de la personne âgée

grabataire en USLD.

Cette fiche fait partie d’un document de travail publié avec l’entête de la FORAP et celle de l’

HAS dont le titre est : « Développement de la bientraitance ».

Comment peut-on devenir bienfaisant en utilisant de tels mots pour parler de personnes

dépendantes, dont la mobilité est réduite ?

Il y a de quoi être choquée, je ne lis même pas « personne grabataire… ».

« Il n’est pas étonnant de constater que ces quelques mots …..//…..induisent le comportement

de bien des aidants dans leur relation à la personne malade, en raison de la représentation

imagin (aire-ée) qu’ils sous-tendent. --- Ce maître là (la personne malade) comme les aidants

méritent des mots plus justes ». (8) Claire DEMERLIAC. page 145 : LES MOTS

« Mal nommer les choses, c’est ajouter du malheur au monde ». Albert CAMUS

Prenons l’habitude de :

- chercher l’accord de la personne et de lui proposer une aide par « voulez-vous … »

ou « je viens vous aider pour votre toilette, êtes-vous d’accord ? »

La tournure de ce propos et la présence du verbe « aider à » accorde à la personne la part

d’autonomie nécessaire à sa dignité.

-Demander l’autorisation à la personne de faire un geste « puis je vous découvrir »

Ce temps permet au soignant de prendre conscience de la présence de l’autre et d’intégrer

l’impact de son geste sur la personne dépendante.

Ce temps avant l’action permet à la personne dépendante d’accepter ce qui va être fait, c’est

une obligation, pour tous les soignants, de requérir le consentement.

Nous pourrions parler du ‘’on’’, et du ‘’faire’’ mots impersonnels et anonymes, jamais

concernés ni responsables.

Bien vouloir modifier ses habitudes, changer son registre de vocabulaire et prendre le temps

de penser son action, cela déconditionne les actes automatiques des soignants et les mène

vers une prise de conscience de l’autonomie et de la présence de l’autre.

Prendre soin plutôt que prendre en charge, trop lourd la charge, un peu comme le fardeau

‘‘de Zarit’’.

Laissons là pour le champ administratif, gardons la prise en soin, terme qui en lui-même

enveloppe et protège la personne vulnérable.

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Il faudrait se méfier des mots !

« Des mots crachés qui font gros mots »

« Des mots tendres et des mots qui cognent »

« Des mots semant le désarroi »

« Des mots tranchants comme un couteau »

« Des mots vides et des mots ronflants »

« Des mots qui détruisent les gens »

Charles AZNAVOUR

Conclusion

Toujours remise sur l’ouvrage, la question de la bientraitance n’a pas fini de faire couler de

l’encre comme en témoigne la dernière parution de la FNG sur le sujet :

‘’Nouvelles pratiques de la bientraitance avec soi et avec l'autre. Application aux domaines

sanitaire et médico-social. / MARRO. Bordeaux : Etudes Hospitalières 2012’’

Ils sont nombreux, médecins, chercheurs, philosophes, soignants, psychologues etc. à écrire

pour nous faire partager leur expérience et leur réflexion.

Une multitude de publications, tellement que l’on s’y perdrait.

Heureusement les termes communs retrouvés convergent pour dire de la bienfaisance qu’elle

est avant tout une posture consciente et volontairement humble pour se mettre à l’écoute de

l’Autre et l’accompagner dans la réalisation de ce qui est pour lui, l’expression de son choix

de vie.

Pourquoi tant d’écrits, tant de réflexion qui constatent si peu de réalisation ?

Sans doute parce que parvenir à une attitude bienfaisante n’est pas une évidence.

C’est un réconfort de savoir que nos difficultés sont partagées et c’est aussi réconfortant de

lire et comprendre que nous avons, nous aussi réfléchi et mis en place des stratégies qui sont

reprises par d’autres professionnels.

C’est grâce aux échanges, à la confrontation et au questionnement que chacun de nous peut

progresser dans une attitude bienfaisante.

Si nous parlons formation, pourrions-nous retravailler les contenus des programmes de

formation, dès le plus jeune âge, afin d’amener les enfants puis les adolescents à réfléchir sur

les valeurs humaines et sur la place et l’interaction de chaque génération dans une société.

C’est l’esprit du tutorat souhaité par notre gouvernement.

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Sans nostalgie nous pouvons revenir sur le rôle occupé par nos ainés dans la société du début

du 20ème

siècle, repenser leur place aujourd’hui pour mieux profiter de leur prudence

réfléchie.

La charte Européenne des Droits et Responsabilités des Personnes Agées nécessitant des soins

et une assistance de longue durée, éditée en juin 2010, nous donne à lire cette introduction :

« Les soins de santé et les soins de longue durée, y compris la prévention et les interventions

précoces, doivent être considérés non pas comme un coût, mais comme un investissement

dont bénéficieront tous les groupes d’âge.

Les services de santé et de soins de longue durée dans l’Union européenne doivent être fondés

sur le principe de la solidarité entre les générations et refléter les dispositions du Traité de

Lisbonne, selon lesquelles l’Union européenne « combat l’exclusion sociale et les

discriminations, et promeut la justice et la protection sociales, l’égalité entre les femmes et

les hommes, la solidarité entre les générations et la protection des droits de l’enfant ».

Espérons que ce soit les prémices d’un changement du mode de pensée de nos sociétés dites

modernes, qui reviendraient à des valeurs laissant à chacun la place à laquelle il a droit et

surtout lui laissant exercer le rôle de solidarité propre à chaque génération.

Quant à la formation des soignants, si l’acquisition des règles d’hygiène doit rester

primordiale par les futurs professionnels, nous devons, nous soignants formateurs, donner la

même priorité à l’enseignement du savoir être.

Faire de la réflexion les prémices de tout acte d’aide ou de soin, dans l’objectif de proposer à

la personne soignée un geste bienveillant et respectueux.

« La bientraitance ne peut être qu’un objectif » (2)

Et à l’intérieur de cette dynamique, le perpétuel mouvement de la pensée du soignant, de

l’aidant avec le questionnement qui s’impose face à l’Autre, toujours unique et jamais le

même car lui aussi en perpétuelle évolution.

Il devrait ainsi ne pas y avoir de place pour la routine dans les métiers d’aide à la personne.

Dans sa revue de littérature (6), Nadia PEOCH écrit :

« Les petites choses ; si anodines en apparence,…/… cette attention de tous les instants, cette

présence organisée pour être continue, cette qualité de la présence aux moments les plus

imprévisibles où les personnes soignées et leurs familles expriment leurs confidences, leurs

espoirs, leurs projets, leurs solitudes, leurs souffrances…sont parfois plus déterminants que

des soins de haute technicité.

Alors , nous dirons que la bientraitance s’inscrit dans la quête du sens, dans la vigilance

critique intemporelle et dans cette posture de questionnement qui soumet « les vieilles

habitudes », les « on a toujours fait comme ça » et les « vieilles choses » à une interrogation

constante de nos croyances, de nos attitudes, de nos comportements, de nos pratiques

professionnelles »

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Si Nadia PEOCH me le permet, je fais mienne cette conclusion, tant je crois à la valeur de

tous ces petits gestes au quotidien, présence subtile de l’aidant qui s’élabore grâce à une

réflexion permanente et une attention inconditionnelle vers la personne dépendante.

Pour conclure, je vous proposerai ce qu’Eric FIAT écrit dans la préface de l’ouvrage de

Sylvie PANDELE : La grande vulnérabilité. Fin de vie. Personnes âgées. Handicap.

Esquisse d'une éthique de l'accompagnement. Paris, Seli Arslan, 2008.

« L'accompagnement d'une personne placée en situation de grande vulnérabilité du fait

d'altérations importantes de ses fonctions supérieures (pensée, langage, conscience) ne va pas

de soi : c'est une rencontre à haut risque, pour l'un, comme pour l'autre ».

Le monde de la grande vulnérabilité déploie en effet un univers d'étrangeté, voire d'extrêmes,

où les notions d'action, de soin et d'accompagnement semblent vouées à perdre sens.

Ce livre s'attache à explorer, dans une perspective philosophique et pratique, les enjeux de

cette rencontre singulière qui se noue entre une personne marquée par le grand âge, le

handicap profond ou la maladie grave finissante et celui qui a pour mission d'en prendre soin.

De cette confrontation à l'insupportable et au non-sens émerge l'exigence forte d'une éthique

spécifique de l'accompagnement. Quels sont les valeurs et les préceptes dont pourra - et

devra- se réclamer cette pratique d'accompagnement ? Quand le respect et la sollicitude,

pourtant si traditionnellement érigés en valeurs phares de la relation de soin, échouent à

éclairer l'univers incohérent de la grande vulnérabilité, il est besoin de forger un nouveau

principe d'action : celui de la vigilance éthique ».

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INDEX

HAS Haute Autorité de Santé

ANESM Agence Nationale de l’Evaluation et de la qualité des Etablissements et

services Sociaux et Médico-Sociaux.

ANAES Agence Nationale d‘ Accréditation et Evaluation en Santé

APA Allocation Personnalisée d'Autonomie

GIR Groupe IsoRessources

EHPAD Etablissement Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes

FORAP Fédération des Organismes Régionaux et Territoriaux pour l‘ Amélioration des

Pratiques et Organisation en Santé

DARES Direction de l’Animation de la Recherche, des Etudes et des Statistiques

MMS Mini Mental Score

UNAPEI Union Nationale d’Aide aux Parents d’Enfants Inadaptés

INSEE Institut Nationale de la Statistique et des Etudes Economiques

OMS Organisation Mondiale de la Santé

USLD Unité de Soins de Longue Durée

IDE Infirmier Diplômé d’Etat

AS Aide Soignant

DMS Durée Moyenne de Séjour

FNG Fondation Nationale de Gerontologie

DTA Demence Type Alzheimer

ZARIT(échelle de) Evaluation de la charge de l’Aidant auprès d’une personne malade d‘

Alzheimer

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BIBLIOGRAPHIE

1- Revue de littérature–Recommandations pour la bientraitance- Oriane

DELIVRE- février 2008- ANESM

2- Pour une bientraitance : faut-il repenser le soin ? FNG n°133 juin 2010

3- Ce que la maltraitance nous enseigne-Difficile Bientraitance. Alice Casagrande-

Editions DUNOD.2012

4- Rapport de la mission ministérielle de Michelle Bressand à X Bertrand.janv.2011

5- La présence à l’autre. Marcel Nuss. Editions DUNOD 2005

6- Revue de littérature autour de la notion de bientraitance. Université- hôpitaux de

Toulouse. Nadia Péoch. Septembre 2010

7- Validation, mode d’emploi. Naomi Feil. Editions PRADEL 2006

8- Repenser ensemble la maladie d’Alzheimer sous la direction de E. Hirsch et

C.Ollivet –éditions VUIBERT

9- La présence et le respect. Bernard Matray. Editions Desclée de Brouwer.2004

10- Julie ou l’aventure de la juste distance. Pascal Prayez. Editions LAMARRE 2005

11- Promouvoir la vie. Marie Françoise Collière. Inter Editions 1982

12- Réflexions sur la formation. FNG n°118 -2007

13- L’éthique médicale et la bioéthique .Didier Sicard- Editions PUF. 2009

La présence pure. Christian Bobin. Editions GALLIMARD. 1999

Le pari du sens. Nathalie Rigaux. Institut Edition. 1998

A l’épreuve de la vieillesse. Aude Zeller Editions Desclée de Brouwer. 2003

SITOGRAPHIE

www.documentation.aphp.fr

www.maltraitanceaines.gouv.qc.ca

www.agevillage.com

www.has-santé.fr

www.alma-France.org

www.fondation-recherche–alzheimer.com

www.espace-ethique-alzheimer.org

www.anesm.gouv

www.europa.eu

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ANNEXES

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ANNEXE 1

Questionnaire anonyme adressé aux soignants des services ALOIS hôpital de jour –

DALI Médecine aiguë- Le GALION Accueil de Jour.

Hôpital GERONTOLOGIQUE et MEDICO-SOCIAL PLAISIR GRIGNON 78375

Objectif du questionnaire : Evaluer la conscience des soignants au regard de la non-

malfaisance dans une unité d’accueil et de soins des personnes Alzheimer.

Consigne : De la question 2 à la question 4, soit vous barrez la ou les réponses qui ne vous

correspondent pas, soit vous entourez la ou les réponses qui vous conviennent.

1) Situation professionnelle :

Quel est votre service ?

Quelle est votre fonction ?

Quel est votre âge ? Votre sexe : F M

Quelle est votre ancienneté dans votre profession ?

Quelle est votre ancienneté dans ce service ?

Quelle est votre formation et/ou quel est votre diplôme initial ?

Êtes-vous titulaire de l’ASG ?

Quelles sont vos formations professionnelles continues ? (titre et année de la formation)

2°) Comment êtes vous arrivé à travailler dans ce service ?

Par choix

Par mutation

Premier poste

Par hasard

3) Que représente pour vous votre emploi ?

Un métier choisi

Un moyen de subsistance

Un « boulot » comme un autre

4) Quelles sont vos motivations pour travailler auprès des personnes Alzheimer ?

J’ai ou j’ai eu une expérience familiale de cette pathologie

Je me suis spécialisé

Ce sont des horaires qui me conviennent (service de jour)

C’est un sujet de société qui m’interroge

Je n’ai pas choisi mais j’aime

Autre : précisez….

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5) Vous classez chacune des situations proposées en inscrivant sa lettre repère dans

la colonne de droite ou dans la colonne de gauche.

Toutes ces situations imaginées concernent des personnes âgées de plus de 75 ans, en institution et

diagnostiquées Démence Type Alzheimer

a) Il fait 26° dehors; Chantal AMP choisit sans hésitation une tunique sans manche pour Mme C,

b) Tout le service est en retard dans les soins du matin, Iris, AS, donne une douche rapide à Mme I,

c) Mr. s’endort sur son fauteuil et penche fortement sur le côté droit ; Denis, AS le redresse vivement

et lui dit : « tenez-vous droit, vous allez tomber ! ».

d) Amélie, AS dynamique réveille chaque résidante par ces mots:” Bonjour ma chérie, tu as bien

dormi?”

e) Myriam, IDE procède à la toilette intime au lit de Mme P et dit :’’Ecartez les cuisses, s’il vous plait,

Mme P ».

f) Denis, AS frappe et entre rapidement dans la chambre où il surprend Mme C et Mr. B qui

s’embrassent.

g) Pour gagner du temps, Amélie AS écrase les comprimés et les mélange à la purée de Mme P.

h).Amélie AS, accompagne chacun à leur tour 4 résidants pour une courte ballade dans le parc.

i) Irma IDE de nuit et Iris AS de nuit, allument le plafonnier de la chambre pour répondre à un appel à

minuit.

j) Iris est confronté au refus de Mr P quand elle lui propose de l’aider pour sa toilette, elle lui explique

qu’elle repassera un peu plus tard dans la matinée.

k) Chantal AMP, répond à un appel en disant : “je reviens dans 5 mn” mais très occupée, elle revient

1heure plus tard.

l) Au cours d’un atelier mémoire Mme C répond à la place de tous les participants. Brigitte, AMP lui

demande de se taire sous peine de l’exclure du groupe.

m) Quelle que soit la saison, il est 18h30, heure de coucher tous les résidants avant de quitter son

service.

n) Mr. refuse de participer à l’atelier « Perles » qui a pour but de rééduquer la motricité

manuelle.

o) Mme C a envie de changer de place dans la salle à manger mais cela perturbe les autres

résidants, aussi Amélie AS, conduit son fauteuil à sa place habituelle.

p) Iris AS aide Mme B à prendre son repas. Mme B refuse de manger ; Iris ne dit rien se lève

et emporte le plateau.

q) Denis sur de lui, utilise la force et la vitesse pour le transfert lit-fauteuil des résidants.

r) Amélie fait participer Mme C à la conversation quand la fille de celle-ci l’interroge sur

l’état de santé de sa mère.

s) Mr. G déambule sans cesse, aussi Myriam IDE bloque sa porte de chambre avec un lourd

fauteuil.

t) Au moment du coucher Amélie AS, enlève le cousin en plumes de Mme C en prétextant

que ce n’est pas hygiénique

SITUATIONS de MALFAISANCE SITUATIONS DE BIENFAISANCE

6) Vous est –il arrivé de vous trouver (acteur ou témoin) dans une des situations décrites

ci-dessus ?

7) Quelles sont les circonstances qui ont provoqué cette situation ?

8) Qu’avez-vous ressenti ?

9) Comment avez-vous réagi ?

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ANNEXE 2 : Classement des réponses par les soignants :

Les situations Classement

« BIENFAISANT »

Classement

« MALFAISANT »

Situations non

classées

Chiffres

% chiffres % chiffres %

a) Il fait 26° dehors; Chantal AMP

choisit sans hésitation une tunique

sans manche pour Mme C,

15 60% 10 40%

b) Tout le service est en retard dans

les soins du matin, Iris, AS, donne une

douche rapide à Mme I,

9 36% 16 64%

c) Mr. s’endort sur son fauteuil et

penche fortement sur le côté droit ;

Denis, AS le redresse vivement et lui

dit : « tenez-vous droit, vous allez

tomber ! ».

0 / 25 100%

d) Amélie, AS dynamique réveille

chaque résidante par ces mots:”

Bonjour ma chérie, tu as bien

dormi?”

3 12% 22 88%

e) Myriam, IDE procède à la toilette

intime au lit de Mme P et dit

:’’Ecartez les cuisses, s’il vous plait,

Mme P ».

11 44% 14 56%

f) Denis, AS frappe et entre

rapidement dans la chambre où il

surprend Mme C et Mr. B qui

s’embrassent

2 8% 23 92%

g) Pour gagner du temps, Amélie AS

écrase les comprimés et les mélange

à la purée de Mme P.

0 / 25 100%

h).Amélie AS, accompagne chacun à

leur tour 4 résidants pour une courte

ballade dans le parc.

24 96% 1 4%

i) Irma IDE de nuit et Iris AS de nuit,

allument le plafonnier de la chambre

pour répondre à un appel à minuit.

4 16% 20 80% 1 4%

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51

j) Iris est confronté au refus de Mr P

quand elle lui propose de l’aider pour

sa toilette, elle lui explique qu’elle

repassera un peu plus tard dans la

matinée.

25 100% 0 /

Les situations Classement

« BIENFAISANT »

Classement

« MALFAISANT »

Situations non

classées

Chiffres % chiffres % chiffres %

k) Chantal AMP, répond à un appel en

disant : “je reviens dans 5 mn” mais très

occupée, elle revient 1heure plus tard.

1 4% 24 96%

l) Au cours d’un atelier mémoire Mme C

répond à la place de tous les participants.

Brigitte, AMP lui demande de se taire

sous peine de l’exclure du groupe.

1 4% 24 96%

m) Quelle que soit la saison, il est 18h30,

heure de coucher tous les résidents avant

de quitter son service.

1 4% 23 92% 1 4%

n) Mr. refuse de participer à l’atelier

« Perles » qui a pour but de rééduquer la

motricité manuelle.

12 48% 2 8% 11 44%

o) Mme C a envie de changer de place

dans la salle à manger mais cela perturbe

les autres résidants, aussi Amélie AS,

conduit son fauteuil à sa place habituelle

7 28% 17 68% 1 4%

p) Iris AS aide Mme B à prendre son

repas. Mme B refuse de manger ; Iris ne

dit rien se lève et emporte le plateau

2 8% 23 92%

q) Denis sur de lui, utilise la force et la

vitesse pour le transfert lit-fauteuil des

résidants.

1 4% 24 96%

r) Amélie fait participer Mme C à la

conversation quand la fille de celle-ci

l’interroge sur l’état de santé de sa mère.

20 80% 4 16% 1 4%

s) Mr. G déambule sans cesse, aussi

Myriam IDE bloque sa porte de chambre

avec un lourd fauteuil.

0 25 100%

t) Au moment du coucher Amélie AS,

enlève le cousin en plumes de Mme C en

prétextant que ce n’est pas hygiénique

2 8% 23 92%

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52

ANNEXE 3 :

Diagrammes représentant le classement des situations bienfaisantes ou malfaisantes par les soignants.

a) Il fait 26° dehors; Chantal AMP choisit

sans hésitation une tunique sans manche pour

Mme C,

b) Tout le service est en retard dans les soins

du matin, Iris, AS, donne une douche rapide à

Mme I,

c) Mr. s’endort sur son fauteuil et penche

fortement sur le côté droit ; Denis, AS le

redresse vivement et lui dit : « tenez vous

droit, vous allez tomber ! ».

d) Amélie, AS dynamique réveille chaque

résidante par ces mots:” Bonjour ma chérie, tu

as bien dormi?”

0%

20%

40%

60%

80%

100%

120%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

0%

20%

40%

60%

80%

100%

120%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

0%

20%

40%

60%

80%

100%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

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53

e) Myriam, IDE procède à la toilette intime au

lit de Mme P et dit :’’Ecartez les cuisses, s’il

vous plait, Mme P ».

f) Denis, AS frappe et entre rapidement dans

la chambre où il surprend Mme C et Mr. B qui

s’embrassent

g) Pour gagner du temps, Amélie AS écrase

les comprimés et les mélange à la purée de

Mme P.

h).Amélie AS, accompagne chacun à leur tour

4 résidants pour une courte ballade dans le

parc.

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

0%

20%

40%

60%

80%

100%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

0%

20%

40%

60%

80%

100%

120%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

0%

20%

40%

60%

80%

100%

120%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

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54

i) Irma IDE de nuit et Iris AS de nuit,

allument le plafonnier de la chambre pour

répondre à un appel à minuit.

j) Iris est confronté au refus de Mr P quand

elle lui propose de l’aider pour sa toilette, elle

lui explique qu’elle repassera un peu plus tard

dans la matinée.

k) Chantal AMP, répond à un appel en disant

: “je reviens dans 5 mn” mais très occupée,

elle revient 1heure plus tard.

l) Au cours d’un atelier mémoire Mme C

répond à la place de tous les participants.

Brigitte, AMP lui demande de se taire sous

peine de l’exclure du groupe.

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

90%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

0%

20%

40%

60%

80%

100%

120%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

0%

20%

40%

60%

80%

100%

120%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

0%

20%

40%

60%

80%

100%

120%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

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m) Quelle que soit la saison, il est 18h30,

heure de coucher tous les résidents avant de

quitter son service.

n) Mr. refuse de participer à l’atelier

« Perles » qui a pour but de rééduquer la

motricité manuelle.

o) Mme C a envie de changer de place dans la

salle à manger mais cela perturbe les autres

résidants, aussi Amélie AS, conduit son

fauteuil à sa place habituelle

p) Iris AS aide Mme B à prendre son repas.

Mme B refuse de manger ; Iris ne dit rien se

lève et emporte le plateau

0%

20%

40%

60%

80%

100%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

0%

20%

40%

60%

80%

100%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

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56

q) Denis sûr de lui, utilise la force et la vitesse

pour le transfert lit-fauteuil des résidants.

r) Amélie fait participer Mme C à la

conversation quand la fille de celle-ci

l’interroge sur l’état de santé de sa mère.

s) Mr. G déambule sans cesse, aussi Myriam

IDE bloque sa porte de chambre avec un lourd

fauteuil.

t) Au moment du coucher Amélie AS, enlève

le cousin en plumes de Mme C en prétextant

que ce n’est pas hygiénique

0%

20%

40%

60%

80%

100%

120%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

90%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

0%

20%

40%

60%

80%

100%

120%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

0%

20%

40%

60%

80%

100%

Malfaisant

Bienfaisant

Non classé

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57

ANNEXE 4 : le classement des situations par les testeurs.

JL B F MJ M O

Les situations MAL

F

BIEN

F

MAL

F

BIEN

F

MAL

F

BIEN

F

MAL

F

BIEN

F

MAL

F

BIEN

F

a) Il fait 26° dehors;

Chantal AMP choisit sans

hésitation une tunique sans

manche pour Mme C,

X X X X X

b) Tout le service est en

retard dans les soins du

matin, Iris, AS, donne une

douche rapide à Mme I,

X X X X X

c) Mr. s’endort sur son

fauteuil et penche

fortement sur le côté droit ;

Denis, AS le redresse

vivement et lui dit : « tenez

vous droit, vous allez

tomber ! ».

X X X X X

d) Amélie, AS dynamique

réveille chaque résidante

par ces mots:” Bonjour ma

chérie, tu as bien dormi?”

X X X X X

e) Myriam, IDE procède à

la toilette intime au lit de

Mme P et dit :’’Ecartez les

cuisses, s’il vous plait,

Mme P ».

X X X X X

f) Denis, AS frappe et

entre rapidement dans la

chambre où il surprend

Mme C et Mr. B qui

s’embrassent

X X X X X

g) Pour gagner du temps,

Amélie AS écrase les

comprimés et les mélange

à la purée de Mme P.

X X X X X

h).Amélie AS,

accompagne chacun à leur

tour 4 résidants pour une

courte ballade dans le parc.

X X X X X

i) Irma IDE de nuit et Iris

AS de nuit, allument le

plafonnier de la chambre

pour répondre à un appel à

minuit.

X X X X X

j) Iris est confronté au

refus de Mr P quand elle

lui propose de l’aider pour

sa toilette, elle lui explique

qu’elle repassera un peu

plus tard dans la matinée.

X X X X X

k) Chantal AMP, répond à

un appel en disant : “je X X X X X

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reviens dans 5 mn” mais

très occupée, elle revient

1heure plus tard.

l) Au cours d’un atelier

mémoire Mme C répond à

la place de tous les

participants. Brigitte, AMP

lui demande de se taire

sous peine de l’exclure du

groupe.

X X X X X

m) Quelle que soit la

saison, il est 18h30, heure

de coucher tous les

résidants avant de quitter

son service.

X non classé X X X

n) Mr. refuse de participer

à l’atelier « Perles » qui a

pour but de rééduquer la

motricité manuelle.

X non classé non classé X X

o) Mme C a envie de

changer de place dans la

salle à manger mais cela

perturbe les autres

résidants, aussi Amélie

AS, conduit son fauteuil à

sa place habituelle

X non classé X X X

p) Iris AS aide Mme B à

prendre son repas. Mme B

refuse de manger ; Iris ne

dit rien se lève et emporte

le plateau

X X X X X

q) Denis sur de lui, utilise

la force et la vitesse pour le

transfert lit-fauteuil des

résidants.

X X X X X

r) Amélie fait participer

Mme C à la conversation

quand la fille de celle-ci

l’interroge sur l’état de

santé de sa mère.

X X X X X

s) Mr. G déambule sans

cesse, aussi Myriam IDE

bloque sa porte de chambre

avec un lourd fauteuil

.

X X X X X

t) Au moment du coucher

Amélie AS, enlève le

cousin en plumes de Mme

C en prétextant que ce

n’est pas hygiénique

X X X X X

b-e-n-o-r : ces situations sont évaluées de façon divergente entre les soignants testeurs 3/2

Les autres situations montrent un consensus dans le classement M ou B

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ANNEXE 5