PANORAMA DE PRESSE - CGT FINANCES PUBLIQUES€¦ · La dernière fois, c’était contre la loi El...
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PANORAMA DE PRESSE
06/09/2017 08h18
CGT
Panorama réalisé avec Pressedd
SOMMAIRE
SYNDICALISME(1 article)
mercredi 6 septembre2017 06:26
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ACTUALITE SOCIALE(2 articles)
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RÉFORME DU CODE DU TRAVAIL(4 articles)
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Philippe Martinez : "La loi ne sera plus la même pour tous"(1831 mots)
Philippe Martinez dans son bureau au siège de la CGT à Montreuil, le 4 septembre.Paris Match. Quel point parmi les 150 pages d’ordonnances vous semble…
Face à la contestation, Muriel Pénicaud vante la «confiance»des investisseurs (653 mots)
La température de l’opposition à la loi travail ne sera donnée que les 12 et 23septembre. Mais, rue de Grenelle, on a déjà…
Chômage : comment Muriel Pénicaud compte communiquer(521 mots)
Muriel Pénicaud a levé le voile mardi sur la manière dont elle compte déso…
La mise au point de FO sur la loi travail isole définitivementl'exécutif (930 mots)
En quelques lignes, Force ouvrière (FO) a fait lundi d'une pierre deux coups. Enaffirmant que « nombre d'éléments (des ord…
« La question des pouvoirs des salariés monte de façonnouvelle » (680 mots)
Contre toute évidence, le gouvernement prétend que son projet va augmenter lesdroits et les libertés de…
Et Emmanuel Macron inventa le CPE pour tous (859 mots)
Il y a dix ans, le gouvernement Villepin tenta de paralyser le droit dulicenciement, œuvre du gaullisme social, en créant …
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PROTECTION SOCIALE(3 articles)
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MOUVEMENTS SOCIAUX(4 articles)
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Loi travail : le recentrage de FO profite à l'exécutif (1183 mots)
Jean qui grogne et Jean qui rit ? A la sortie de Matignon, jeudi 31 août, où EdouardPhilippe venait de présenter les ordo…
Le RSI, achevé comme il est né (636 mots)
C'était annoncé, c'est désormais confirmé : le RSI, ou régime social desindépendants, vit ses dernières heures. édouard Ph…
Le gouvernement caresse les travailleurs indépendants dans lesens fiscal (728 mots)
Parmi les projets du gouvernement, celui-là ne sera pas le plus mal accueilli. Enannonçant mardi à Dijon un paquet de mesu…
Le plan du gouvernement pour remplacer le RSI (1093 mots)
Le sujet concentre depuis plusieurs années le courroux des travailleursindépendants. Libéral sur le plan économique, Emman…
Les GM & S « parqués comme des chiens » (369 mots)
«Depuis le temps que je milite, je n'ai jamais vu ça. Des cars de CRS à perte de vue.Il y en a partout. C'est hallucinant …
Contre la loi travail : tous ensemble, tous ensemble ? (729 mots)
Une fois n’est pas coutume : une grande majorité de la gauche est d’accord. Elles’oppose aux ordonnances qui doivent réfor…
Loi travail : les syndicats en rangs dispersés (736 mots)
C’est peu dire que les organisations syndicales n’en pincent pas beaucoup pourles ordonnances Pénicaud. De la «déception» …
Jean-Luc Mélenchon et Philippe Martinez opèrent un geste derapprochement (487 mots)
Serait-ce le début d’une réconciliation ? Jean-Luc Mélenchon, le chef de file de LaFrance insoumise (LFI), et plusieurs de ses dép…
EUROPE ET INTERNATIONAL(1 article)
mercredi 6 septembre2017
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Salariés épiés : la justice européenne met le droit dans l’œildes patrons (835 mots)
Un employeur n’a pas tout pouvoir sur les communications d’un salarié sur le lieude travail : c’est le sens de l’arrêt ren…
SYNDICALISME
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Philippe Martinez : "La loi ne sera plus la même pour tous"
mercredi 6 septembre 2017 06:261831 mots
: PARIS MATCH
Philippe Martinez dans son bureau au siège de la CGT à Montreuil, le 4
septembre.
Paris Match. Quel point parmi les 150 pages d’ordonnances vous semble-t-il le
plus contestable?
Philippe Martinez. Il n’y en a pas qu’un … Le plus négatif, c’est que des sujets
qui étaient du ressort de la loi –où tous les salariés étaient traités de la même
façon quelle que soit leur entreprise- vont être discutés soit dans l’entreprise,
soit dans la branche. La loi ne sera plus la même pour tout le monde. Avant,
elle précisait la durée maximum et le nombre de renouvellements possibles
du CDD pour tous. Demain, nous pourrons certes négocier un accord majori-
taire, mais il y aura des différences selon votre profession et votre entreprise.
C’est une remise en cause du principe de l’égalité, une valeur de notre Répu-
blique. Ce sera aussi la fin du contrat de travail, puisque l’accord prévaudra sur
le contrat.
Mais les accords majoritaires ne sont-ils pas une garantie pour les salariés?
L’accord majoritaire est parfois obtenu par le chantage dans une entreprise.
Avant les salariés pouvaient refuser l’application d’un accord. Ce fut le cas
chez Smart où il a été dit aux salariés : «Vous acceptez de travailler plus
et de gagner moins sinon on ferme l’entreprise.» Ceux qui étaient d’accord
devaient ensuite signer un avenant. Ceux qui ne l’étaient pas, continuaient
comme avant. Demain, l’accord fera loi, ceux qui refuseront seront licenciés
pour faute sans recours possible. Celui qui pour des raisons personnelles ne
pourra pas, par exemple, travailler plus longtemps se retrouvera donc dehors.
Cette mesure s’accompagne d’une autre, qui ne retient que le périmètre natio-
nal pour juger des difficultés économiques d’une entreprise qui licencie. Beau-
coup d’entreprises s’arrangent, par des jeux d’écriture, pour faire passer une
filiale dans le rouge.
Décryptage : Ce qui coince dans la réforme du droit du travail
L’augmentation de 25% des indemnités légales n’est-il pas une avancée pour
les salariés?
Tout est question d’équilibre. Avec le plafonnement des indemnités prud’ho-
males, les salariés toucheront au final beaucoup moins. Les entreprises
peuvent calculer à l’avance le montant d’un licenciement abusif, elles ne sont
plus obligées de donner le motif du licenciement avant le jour de l’audience,
c’est la porte ouverte aux excès. Comment un salarié peut-il se défendre si il
ne sait pas pourquoi il est licencié? Cela n’existait plus depuis 1973!
Le renforcement du rôle des branches n’est-il pas une avancée, comme le
disent d’autres syndicats?
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Le renforcement des branches met fin à l’égalité. Le code du travail devient dé-
sormais le minimum légal.
"La CGT n'appelle pas tous les quatre matins à se mobiliser"
Qu’attendez-vous de la mobilisation du 12 septembre?
La CGT n’appelle pas tous les quatre matins à se mobiliser. Elle le fait quand il
se passe quelque chose de grave. La dernière fois, c’était contre la loi El Khom-
ri. Nous dépasserons la centaine de cortèges. Les ordonnances reviennent,
trois à six mois plus tard, au Parlement pour entrer dans la loi. Il nous reste
donc du temps pour expliquer et pour mobiliser.
A lire : Philippe Martinez, la CGT et la popularité de Hollande
Avoir annoncé une mobilisation au début de la concertation ne vous a-t-il pas
privé de toute possibilité de peser sur le texte?
Nous l’avons annoncée après quatre réunions, une fois que nous avons com-
pris le ton de la concertation et les objectifs précis du gouvernement.
Une seule de vos 18 pages de propositions a-t-elle été retenue?
Le gouvernement a reconnu que les discriminations vis-à-vis des syndiqués et
des élus étaient trop nombreuses. Des outils vont être mis en place pour que
les élus et les mandatés aient le même déroulement de carrière que leurs col-
lègues, aient des mises à niveau régulières et puissent plus facilement revenir
à leur emploi à plein temps. C’est un point positif des ordonnances, même si
ces dernières ne vont pas assez loin.
Les autres syndicats pointent la difficulté de contester dans la rue une réforme
annoncée par un candidat élu trois mois plus tôt. Qu’en pensez-vous?
Si nous ne contestons pas la légitimité du président, nous prenons en compte
les spécificités de cette élection, jamais vues en France. Au premier tour, c’est
le candidat qui a eu le plus de votes par défaut, au second tour, c’est la pre-
mière fois qu’il y a eu autant d’abstention et de bulletins blancs et nuls. On sait
depuis 2002 que lors d’un tel deuxième tour, beaucoup votent contre l’autre
candidat. Le score d’Emmanuel Macron est plus faible que celui de Chirac en
2002 et personne à l’époque n’avait dit que tout le monde adhérait au pro-
gramme de Chirac. Dire que tous ceux qui ont voté pour Macron ont adhéré à
son programme est un raccourci difficile à faire.
Si les ordonnances sont si défavorables aux salariés, pourquoi vous êtes avec
Sud les seuls à vous mobiliser?
Je ne conteste à personne le droit d’avoir une autre analyse que la CGT. Mais
les syndicats sont moins enthousiastes aujourd’hui qu’ils ne l’étaient envers la
loi El Khomri, c’est le moins que l’on puisse dire.
Jean-Claude Mailly (FO) dit qu’il n’appelle pas à manifester pour ne pas en-
voyer «les salariés dans le mur». Vous posez-vous cette question?
On ne veut jamais envoyer les salariés dans le mur, mais quand la situation est
↑ 7
grave, les salariés pourraient nous reprocher de ne pas avoir dit «attention, il
faut agir».
Regrettez-vous l’absence de FO à vos côtés?
Oui, de FO et des autres. Quand les syndicats sont divisés, c’est toujours les
salariés qui y perdent.
Cela fait longtemps que vous n’avez pas été unis…
C’est pour cela que les droits reculent.
Reprendriez-vous à votre compte l’expression « coup d’Etat social » de Jean-
Luc Mélenchon?
Je ne commente pas les petites phrases des autres.
La France insoumise appelle à manifester le 23 septembre. Pourquoi ne pas
faire cortège commun?
La CGT reste indépendante des partis politiques. Nous n’empêchons personne
de venir dans la rue.
Irez-vous défiler aux côtés de Jean-Luc Mélenchon le 23?
Pour l’indépendance de la CGT, je n’irai pas manifester le 23. A cette date, je
suis engagé pour une marche en faveur de la paix.
Il sera absent à la fête de l’Huma. Est-ce une occasion manquée de débattre?
Il y a débattu l’an dernier, il ne va pas venir tous les ans.
Ne comptez-vous pas sur les députés FI pour combattre les ordonnances?
Nous avons comme d’habitude interpellé tous les députés. Nous rencontrons
ceux qui le souhaitent. Nous verrons mercredi ceux de la France insoumise.
Redoutez-vous des violences en début de cortèges, comme l’an dernier, avec
des services d’ordre dépassés?
Nous ne sommes pas responsables de ce qui se passe en marge des manifesta-
tions. Nos services d’ordre ont assuré, avec difficulté parfois j’en conviens, la
protection des manifestants. Il est évident qu’il faudra faire attention à Paris,
à Rennes ou à Nantes. Il n’y a pas eu de réunions au plus haut niveau, comme
l’an dernier, pour discuter de ces questions.
Pourquoi avoir élargi les revendications du 12?
Les ordonnances sont au cœur de l’actualité. Mais le mécontentement dépasse
largement ce sujet. Le gouvernement dit aux fonctionnaires qu’ils travaillent
bien et, en contrepartie, il ne les augmente pas. Leurs salaires ont été bloqués
pendant six ans, ils ont connu deux petites augmentations de 0,6% l’an dernier
et ils sont à nouveau gelés. Le gouvernement leur remet un jour de carence,
↑ 8
comme si les fonctionnaires étaient des fainéants qui s’arrêtaient pour un oui
et pour un non. Il veut supprimer des postes de fonctionnaires et des contrats
aidés. Des Restos du Cœur vont fermer! Quant aux retraités, leurs pensions
vont baisser en 2018. On va leur piquer des sous sur leur CSG en leur disant
: «Vous n’êtes pas les plus malheureux. Il faut aider la jeunesse.» Je crois que
les retraités aident beaucoup leurs petits enfants. Comment Emmanuel Ma-
cron peut-il dire qu’un célibataire qui touche 1200 euros de pension par mois
qu’il est presque un privilégié? Seul celui qui n’a pas vécu avec 1200 euros peut
dire cela. Quand une députée LREM dit que la baisse de 5 euros des APL est
indolore, qu’elle aille donc voir les étudiants qui travaillent pour payer leurs
études!
Une mesure pour lutter contre le chômage?
Réduire le temps de travail. Certains meurent parce qu’ils ont trop de travail,
d’autres meurent parce qu’ils n’en ont pas.
Ce n’est pas à l’ordre du jour…
A l’ordre du jour, c’est de continuer ce qui n’a pas marché. Nous devons en
être à la neuvième réforme qui n’a pas marché. Le père de Pierre Gattaz en
parlait déjà dans les années 1980. On voit où cette formule « les licenciements
d’aujourd’hui sont les emplois de demain » nous a menés. Ils utilisent tous les
mêmes mots, parlent du « coût du travail »…
Comment jugez-vous les débuts du président de la République?
D’un point de vue social, ceux qui travaillent sont beaucoup attaqués et, en
contrepartie, l’impôt sur la fortune baisse. La majorité des citoyens doit par-
tager la misère. Ceux qui ont beaucoup continuent à engranger la fortune. Les
dividendes versés aux actionnaires n’ont jamais été aussi élevés. C’est anor-
mal. Il faut limiter les dividendes. Les inégalités se creusent. Macron fait le
tour de l’Europe de l’Est contre le moins-disant social et, en même temps, il
baisse les droits des salariés en France au nom de l’harmonisation européenne.
C’est lui qui joue le moins-disant social.
Et les débuts de Muriel Pénicaud?
C’est une bonne DRH. Macron a dit qu’il allait gérer la France comme une en-
treprise, donc lui c’est le patron et il a une bonne DRH de son côté. Elle nous a
écoutés, mais pas entendus.
Le gouvernement compte effectuer des privatisations pour financer l’innova-
tion. Qu’en pensez-vous?
Nous avons eu l’expérience des autoroutes. Ce fut un cadeau fait aux nouveaux
propriétaires : ils font ce qu’ils veulent et ils gagnent beaucoup d’argent. Au
lieu de céder ses participations, l’Etat devrait les augmenter et imposer des
règles pour que ces entreprises rendent un service public. Elles pourraient de-
venir des vitrines sociales pour améliorer les conditions de travail.
A lire : L'avertissement de la CFDT à Emmanuel Macron
↑ 9
Dans quel état d’esprit abordez-vous la réforme de l’assurance-chômage pré-
vue en 2018?
Nous sommes inquiets. Là aussi, nous sommes dans une philosophie où celui
qui n’a pas d’emploi est le coupable. Un chômeur sur deux n’a aucun revenu.
En réduisant la durée des indemnités, en accélérant les radiations, on va, là
encore, partager la misère. Macron pense qu’il vaut mieux un petit boulot que
pas de boulot du tout. En France, le principe est de payer selon ses moyens, et
de recevoir selon ses besoins. Aujourd’hui, on ne paie plus selon ses moyens
puisque de nombreuses entreprises sont exonérées d’impôts, et on se fait soi-
gner selon ses moyens… C’est une société encore plus inégalitaire. Nous nous
alignons sur le modèle américain. Là-bas pour se soigner, ils n’ont pas une
carte Vitale mais une carte bleue.
par Anne-Sophie Lechevallier
Tous droits réservés 2017 parismatch.com
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Parution : Continue
Diffusion : 10 316 311 visites (France) - © OJD Internet juil.2017
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ACTUALITE SOCIALE
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Face à la contestation, Muriel Pénicaud vante la «confiance» des investisseurs
Comme prévu, la ministre du Travail n’a pas voulu commenter ce mardi les chiffres du chômagede Pôle Emploi. Elle a préféré un débat d’experts et parler de formation et d’apprentissage.
N° 11286mercredi 6 septembre 2017
Édition(s) : PrincipalePage 4
653 mots
ÉVÉNEMENT
L a température de l’opposition à
la loi travail ne sera donnée que
les 12 et 23 septembre. Mais, rue de
Grenelle, on a déjà changé le thermo-
mètre concernant le taux de chô-
mage. Mardi après-midi, dans un
exercice de communication baptisé
«les Rendez-vous de Grenelle», Mu-
riel Pénicaud a mis en application ce
qu’elle avait promis à son arrivée au
ministère du Travail : ne plus com-
menter les chiffres livrés chaque
mois par Pôle Emploi pour leur pré-
férer les statistiques trimestrielles de
l’Insee, qui mesurent le nombre de
demandeurs d’emploi au sens du Bu-
reau international du travail, et
d’autres indicateurs économiques
permettant, dixit Pénicaud,
d’avoir«une vision plus complète de la
situation de l’emploi». Ça tombe bien
pour la com gouvernementale : les
chiffres de Pôle Emploi ont de nou-
veau mesuré une hausse du chômage
en juillet (+ 1 % sur un mois pour la
catégorie A) quand l’Insee expliquait
quelques jours plus tôt que le taux de
chômage au deuxième trimestre 2017
(9,5 % des actifs) était revenu à son
niveau de 2012.
«Effet». Mais la réforme du code du
travail n’est jamais très loin : après
avoir laissé débattre le directeur de
l’Insee, Jean-Luc Tavernier, avec Xa-
vier Timbeau, de l’Observatoire fran-
çais des conjonctures économiques
(OFCE), et Philippe Gudin, chef éco-
nomiste Europe chez Barclay’s, Pé-
nicaud profite d’avoir le micro pour
défendre ses ordonnances devant les
journalistes : «Les réformes structu-
relles que nous sommes en train de
faire, […] c’est maintenant qu’il faut
les faire, insiste-t-elle. Dos au mur,
c’est plus coûteux sur le plan social.»
La ministre fait référence aux ré-
formes réalisées dans des pays du sud
de l’Europe - en particulier l’Espagne
- qui a vu les entreprises licencier
dans la foulée. En France, elle en est
certaine, ce ne sera pas le cas. «Il y
aura des effets.» Comprendre : forcé-
ment positifs. «Ça dépend beaucoup
du comportement des acteurs», recon-
naît-elle ensuite. Et si «certains s’in-
quiètent», il faut selon elle «prendre
au mot» les entrepreneurs. Pénicaud
rapporte alors qu’elle a vu la veille
des représentants d’entreprises
étrangères : «Les réformes en cours
[sont] en train de débloquer des déci-
sions d’investissement de leurs mai-
sons mères. Les TPE-PME disent la
même chose.»
Et alors que le directeur des conjonc-
tures de l’OFCE, Xavier Timbaud, la
met en garde sur le danger d’une «dé-
gradation de la qualité des emplois» -
comme constatée ces derniers mois
par l’Insee -, la ministre promet
qu’elle sera «attenti[ve]» à la question
et y va d’une autre justification :
«C’est pourquoi nous avons souhaité
que les branches puissent négocier sur
la gestion et la qualité de l’emploi» (lire
aussi page 22).
Priorité. Les ordonnances n’ont pas
encore été ratifiées et les manifesta-
tions contre sa réforme n’ont pas en-
core eu lieu que la ministre du Travail
évoque déjà la suite : la réforme de
la formation professionnelle et celle
de l’assurance chômage. Muriel Péni-
caud rappelle ainsi que le «plan d’in-
vestissement» à 50 milliards d’euros
promis par Emmanuel Macron pen-
dant sa campagne aura un volet
«compétences» : 1 milliard d’euros
pour les «jeunes peu qualifiés éloignés
de l’emploi» et 1 milliard pour les
«chômeurs de longue durée faiblement
qualifiés», était-il écrit dans le pro-
gramme du candidat d’En marche.
Dans le dossier de presse distribué
par le ministère du Travail bourré de
graphiques fournis par les services
statistiques, Pénicaud s’appuie sur
l’«écart énorme d’accès à l’emploi en
fonction du taux de qualification». De
quoi, insiste la ministre, «renforcer la
nécessité d’investir [dans] la formation
professionnelle et l’apprentissage»,
dont le gouvernement veut faire une
priorité des mois à venir. D’où le
choix, martèle l’exécutif ces derniers
jours, de baisser le nombre d’emplois
aidés parce qu’ils ne seraient «pas ef-
ficaces». Ce qui, «à court terme», ont
précisé ses invités du jour, aura un
impact sur la situation de l’emploi.
Une partie de ceux qui devaient en
obtenir un en cette rentrée scolaire
se retrouveront dans les prochains
chiffres de demandeurs d’emplois.
Ceux de Pôle Emploi comme ceux de
l’Insee. ■
par Lilian Alemagna
Tous droits réservés Libération 2017
5f9a736a8830fe0785231ac0010f31b89ae84466775d97b65260de0
Parution : Quotidienne
Diffusion : 77 094 ex. (Diff. payée Fr.) - © OJD PV 73331
Audience : 961 000 lect. (LNM) - © AudiPresse One 2016↑ 12
Chômage : comment Muriel Pénicaud compte communiquerLa ministre du Travail interviendra tous les trimestres en privilégiant le taux de chômage au sensdu BIT.
N° 22523mercredi 6 septembre 2017
Page 4521 mots
FRANCE—SOCIAL
Muriel Pénicaud a levé le voile mardi
sur la manière dont elle compte dé-
sormais communiquer sur les statis-
tiques du chômage. Plombé par la
promesse de François Hollande d'in-
verser la courbe, le précédent gou-
vernement était tombé dans le piège
du commentaire mensuel du nombre
- très volatil d'un mois à l'autre - de
personnes inscrites à Pôle emploi. «
Si l'on veut mieux comprendre et
agir, les clefs de lecture doivent être
trimestrielles », a déclaré mardi la
ministre du Travail lors de son pre-
mier Rendez-vous de Grenelle.
Si la périodicité à venir de ses sorties
était connue, restait à savoir quels
indicateurs allaient être privilégiés.
Ce sera le taux de chômage au sens
du Bureau international du travail,
mesuré par sondage auprès de
100.000 ménages par l'Insee. « Ce se-
ra le chiffre que je commenterai le
plus », a précisé Muriel Pénicaud. Le
plus, mais pas le seul.
CDD, intérim et temps
partiel en augmentation
Chaque point sera l'occasion pour le
ministère du Travail de mettre en
avant 5 faits saillants sur le trimestre
écoulé, issus d'une batterie de 40 in-
dicateurs mis à jour pour l'occasion.
Un débat d'experts est aussi inscrit au
menu, assorti d'une séance de ques-
tions-réponses avec les médias. Le
nombre d'inscrits à Pôle emploi de-
meure, mais vivra sa propre vie dans
une version améliorée pour en faire
ressortir les tendances.
Le taux de chômage du deuxième tri-
mestre - 9,5 % pour la France hors
Mayotte - ayant été publié mi-août
déjà, le premier Rendez-vous de Gre-
nelle, n'a pas apporté de nouveautés
côté chiffres. Mais, outre un plai-
doyer pro domo pour les réformes en
cours, leur rappel a été l'occasion
pour Muriel Pénicaud de mettre en
avant la poursuite de la reprise éco-
nomique qui touche « quasiment tous
les secteurs d'activité ».
Selma Mahfouz, directrice de la
Dares (la Direction des études et des
statistiques du ministère du travail),
s'est félicitée de « l'accélération des
créations d'emplois », qui ont atteint
291.000 entre juin 2016 et juin 2017.
« Les créations d'emplois depuis 2014
annulent 90 % des destructions in-
tervenues entre 2008 et 2014 », a-t-
elle ajouté.
« Nous sommes dans un schéma de
baisse nette du chômage depuis la fin
2015 », a confirmé Xavier Timbeau,
économiste à l'Observatoire français
des conjonctures économiques
(OFCE). Mais, « cette reprise s'ac-
compagne d'une dégradation de la
qualité de l'emploi », a-t-il poursuivi.
« Le taux d'emploi de personnes en
CDD, intérim et temps partiel aug-
mente. » Autre ombre au tableau :
le fossé entre qualifiés et non quali-
fiés sur l'accès à l'emploi s'agrandit.
A la fin du deuxième trimestre 2017,
le taux de chômage des bac+2 était à
5,7 %, alors que celui des personnes
sans diplôme atteignait 19,4 %. ■
par Alain Ruello
et Guillaume De Calignon
Tous droits réservés Les Echos 2017
B19BD34D8650BF0D85541BE0A005C1729D080169C70A9714F6FACB8
Parution : Quotidienne
Diffusion : 127 475 ex. (Diff. payée Fr.) - © OJD PV 127389
Audience : 633 000 lect. (LNM) - © AudiPresse One 2016↑ 13
RÉFORME DU CODE DUTRAVAIL
↑ 14
DROIT DU TRAVAIL
La mise au point de FO sur la loi travail isole définitivement l'exécutifLa commission exécutive confédérale de Force ouvrière a clairement condamné les ordonnancesréformant le Code du travail. Le gouvernement fait désormais face à la réprobation de la quasi-totalité des organisations syndicales.
mercredi 6 septembre 2017Page 4
930 mots
SOCIAL-ECO
E n quelques lignes, Force
ouvrière (FO) a fait lundi d'une
pierre deux coups. En affirmant que «
nombre d'éléments (des ordonnances
sur le Code du travail) constituent
aujourd'hui une régression sociale et
sont en tant que tels inacceptables »,
la commission exécutive confédérale
de FO, sorte de « parlement du syndi-
cat », a non seulement officialisé un
changement de cap de la confédéra-
tion, mais également acté l'isolement
du gouvernement qui ne peut désor-
mais se targuer du soutien des orga-
nisations syndicales.
Dans un court communiqué publié
lundi, l'exécutif de FO, s'il « souligne
le travail réalisé par la confédération
depuis trois mois en application du
réformisme militant qui se traduit
par l'obtention de certaines garanties
et le blocage de nombreuses disposi-
tions », affirme néanmoins qu'« à la
lecture des textes d'autres éléments
négatifs apparaissent », ce qui justifie
que, « dans les consultations offi-
cielles et obligatoires qui seront or-
ganisées, FO votera contre ». Adop-
tée à une large majorité (28 voix
contre 5), cette déclaration tranche
avec la relative et surprenante bien-
veillance à l'égard de cette réforme
affichée par le secrétaire général de
FO, Jean-Claude Mailly, suite à la pu-
blication du contenu des ordon-
nances. « Il y a trois colonnes : ce que
nous obtenons, ce que nous avons
évité et ce sur quoi nous sommes en
désaccord. Il y a des éléments dans
les trois colonnes », avait-il déclaré,
dans la cour de Matignon, le 31 août
dernier, déclenchant ensuite, en in-
terne, quelques remous.
Désormais, « la position de la com-
mission exécutive est claire. Elle
condamne ces ordonnances régres-
sives. Au cours des jours qui se sont
écoulés depuis la publication des or-
donnances, nos juristes se sont rendu
compte des régressions », estime Mi-
chel Le Roc'h, secrétaire général de
FO en Loire-Atlantique. Et à l'heure
où se préparent les manifestations du
12 septembre contre les ordonnances
Macron à l'initiative de la CGT et de
Solidaires, rejointes par la FSU, les
déclarations de l'exécutif du syndicat
laissent présager une mobilisation
plus importante des militants FO
malgré des déclarations de Jean-
Claude Mailly qui avait, très tôt, ex-
clu d'y participer. La donne est donc
en train de changer. « Pour nous, cela
signifie que nous ne sommes pas du
tout sur la voie de l'isolement
contrairement à ce que d'aucuns vou-
draient faire croire », a réagi Fabrice
Angei, secrétaire confédéral CGT. «
Les opinions convergent et chacun se
rend bien compte qu'elles ne vont ab-
solument pas dans le sens des sala-
riés mais bien dans celui de la protec-
tion du capital », poursuit le syndica-
liste.
Car si la déclaration de la commis-
sion exécutive confédérale de Force
ouvrière fait aujourd'hui autant par-
ler, c'est qu'elle porte un ultime coup
à la communication gouvernemen-
tale. Désormais, malgré les auto-sa-
tisfecit sur la « méthode » de concer-
tation qui aurait permis un prétendu
consensus généralisé sur le contenu
de sa réforme, l'exécutif, soutenu par
les organisations patronales, est lâ-
ché par l'immense majorité des syn-
dicats, y compris ceux, CFDT en tête,
qui avaient pourtant largement ac-
compagné la loi travail l'an passé.
Ainsi, Laurent Berger, « profondé-
ment déçu » à la publication des or-
donnances, estime que le gouverne-
ment a raté « l'occasion de faire du
dialogue social un élément central de
la gouvernance des entreprises ».
Dans un communiqué, le syndicat
enfonce aussi le clou, jugeant que
l'exécutif a « privilégié la flexibilité
au détriment de la justice sociale »
et a « légitimé les attentes les plus
conservatrices d'une partie du patro-
nat ». Même son de cloche du côté
des cadres. François Hommeril, se-
crétaire général de la CFE-CGC, s'est
inquiété à plusieurs reprises que
cette nouvelle réforme n'engendre «
probablement une précarisation plus
importante des salariés ». L'Unsa
avait également émis de sérieuses ré-
serves.
Reste la construction d'une mobilisa-
tion la plus large possible. Dans son
communiqué, la commission exécu-
tive de Force ouvrière « considère
qu'il faut d'ores et déjà examiner les
possibilités de recours juridiques et
estime qu'il est important que les
confédérations syndicales puissent
échanger rapidement entre elles sur
↑ 15
la situation ». Sans attendre, la CFE-
CGC a appelé hier « l'ensemble des
organisations syndicales à se rappro-
cher pour partager leurs évaluations
sur les risques que ce projet de loi fait
peser sur les salariés et sur l'écono-
mie », tout en refusant pour l'instant
de participer à la mobilisation du 12
septembre. Pour Fabrice Angei, ces
déclarations constituent des signes
positifs « sans pour autant changer ni
notre analyse ni notre cap. »
En somme, s'il est clair que le 12 sep-
tembre ne sera pas l'occasion d'une
large riposte intersyndicale, le chan-
tier des réformes piloté par un gou-
vernement qui veut « aller vite » ne
s'arrête pas à la question du Code du
travail. Assurance-chômage, retraite,
formation professionnelle Les gros
dossiers sociaux vont se succéder ces
prochains mois. Ils s'annoncent
d'ores et déjà comme autant d'éven-
tuels points de convergence entre les
organisations syndicales pour
construire un rapport de forces dans
la plus large unité possible. ■
par Marion D'allard
Tous droits réservés L'Humanité 2017
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« La question des pouvoirs des salariés monte de façon nouvelle »Membre du Conseil économique, social et environnemental, l'économiste Frédéric Boccara ouvrele débat sur l'alternative aux ordonnances.
mercredi 6 septembre 2017Page 5
680 mots
SOCIAL-ECO
Contre toute évidence, le
gouvernement prétend que son
projet va augmenter les droits et
les libertés des salariés. Comment
analysez-vous ce discours ?
Frédéric Boccara La question des
pouvoirs nouveaux pour les salariés
monte de façon nouvelle de tous les
côtés, du monde syndical comme de
la société civile : pouvoirs sur l'ar-
gent des entreprises, sur l'évasion
fiscale A tel point que le gouverne-
ment est contraint de biaiser son dis-
cours en prétendant que son projet
vise à accorder des pouvoirs nou-
veaux aux salariés. Cette question
doit donc être au centre de l'agenda
de ceux qui s'opposent à la régression
contenue dans les ordonnances. Elle
sera au cœur de la rencontre pu-
blique organisée au Cese jeudi, avec
la participation de la CGT, de la CGC
ou encore de l'Unef (1). L'enjeu est de
créer de nouveaux droits et de nou-
velles libertés pour une mobilité maî-
trisée entre emploi et formation,
dans la sécurité. Macron fait du
brouillard. Il fait reculer les pouvoirs
individuels et collectifs des tra-
vailleurs pour les fragiliser face au
patron. C'est le Far West qu'ils
veulent créer ! La fusion des ins-
tances va aboutir à évincer le syndi-
cat du débat sur la gestion des en-
treprises et à les cantonner à la dé-
fense des intérêts individuels. Il va
permettre de provisionner à l'avance
le coût des licenciements illégaux, il
introduit les ruptures convention-
nelles collectives. Ainsi, le salarié est
réduit à sa force de travail, à une
marchandise, et sa personne, qui dé-
borde cette réduction capitaliste, se
trouve niée, alors qu'on lui demande
d'avoir des idées, de prendre des ini-
tiatives, car la révolution informa-
tionnelle change la donne. C'est cette
contradiction qui explose avec l'as-
piration à des pouvoirs nouveaux, et
c'est cela qu'ils essaient de contenir.
Emmanuel Macron affirme qu'il
n'y a pas d'alternative
Frédéric Boccara Oui, mais il tait la
proposition de loi déposée par les dé-
putés PCF sous la législature précé-
dente. Ce que nous proposons, c'est
d'engager le dépassement du marché
du travail et la marchandisation de la
force du travail en équipant les sala-
riés de pouvoirs nouveaux. Pour être
effectifs, ces droits doivent être dotés
de moyens financiers et culturels,
d'information et de connaissances.
Vous dénoncez une focalisation
sur la baisse du « coût du travail
» qui escamote le problème du «
coût du capital »
Frédéric Boccara Le silence est sa-
vamment entretenu sur le coût du ca-
pital. Il empêche d'autres dépenses
qui peuvent permettre de produire
plus efficacement, ce sont les dé-
penses de formation, de qualifica-
tion, de salaire, services publics, et
aussi les investissements efficaces.
Cela ferait baisser significativement
le coût du capital, c'est-à-dire les di-
videndes payés aux actionnaires, les
charges financières. Quel meilleur
moyen d'ouvrir ce débat que les ins-
tances représentatives du personnel
? Le levier, ce sont des cotisations so-
ciales modulées grâce à un bonus-
malus contre les licenciements, la
mobilisation du crédit bancaire, des
aides publiques utilisées différem-
ment, une réforme de la fiscalité. Et
puis des droits d'information sur l'ar-
gent et son utilisation : quand on en-
tend exclure les filiales internatio-
nales des multinationales dans le pé-
rimètre des difficultés économiques
pour justifier les licenciements, on
exclut en réalité l'argent et les profits
situés à l'étranger de l'évaluation des
difficultés.
(1) La revue économie et politique
organise une rencontre publique,
jeudi de 9 h 15 à 13 heures au Cese
(place d'Iéna, Paris 16e), sur le thème
: « Ordonnances Macron et alterna-
tives, quel agenda pour l'emploi et le
Code du travail ? » Renseignements
sur http://www.economie-poli-
tique.org/
Frédéric Boccara
économiste du PCF, membre du Cese■
Entretien réalisé par Sébastien Cré-
pel
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Et Emmanuel Macron inventa le CPE pour tous
Avec la réforme du contrat de travail, un employeur pourra désormais licencier toutsalarié sans motif valable moyennant une indemnité dérisoire. Un cadeau au patronat quise traduira par la multiplication des recours pour discrimination et harcèlement.
N° 11286mercredi 6 septembre 2017
Édition(s) : PrincipalePages 22-23
859 mots
IDÉES
I l y a dix ans, le gouvernement
Villepin tenta de paralyser le
droit du licenciement, œuvre du
gaullisme social, en créant le contrat
nouvelles embauches (CNE) et le
contrat première embauche (CPE). Le
premier, privé d’effet par les juges
quelques années plus tard sur le fon-
dement du droit international avant
d’être abrogé par la loi, permettait
aux petites entreprises de rompre le
contrat de travail pendant les
deux années suivant l’embauche,
sans application des règles du licen-
ciement. L’employeur n’avait pas à
justifier la rupture du contrat, il de-
vait simplement s’acquitter du paie-
ment d’une indemnité de 8 % des sa-
laires. Le second, abandonné après
les manifestations lycéennes et syn-
dicales, visait le même objectif pour
les jeunes salariés embauchés. Fon-
dés sur l’idée que faciliter la rupture
du contrat de travail favorise les em-
bauches, le CNE et le CPE instau-
raient donc une période d’essai de
deux ans. La contestation par le sala-
rié de la rupture de son contrat de
travail était limitée aux seules hypo-
thèses de discrimination ou harcèle-
ment et devait être exprimée dans le
délai d’un an.
L’ordonnance relative à la prévisibi-
lité et à la sécurisation des relations
de travail, préparée par le gouverne-
ment, crée subrepticement un CPE-
CNE généralisé, sans passer par la
création de nouveaux contrats déro-
gatoires mais en modifiant en pro-
fondeur le droit commun du licen-
ciement. C’est donc tous les salariés,
jeunes ou non, de toutes les entre-
prises, petites ou grandes, qui sont
concernés. D’abord, le gouvernement
s’emploie à éviter qu’un salarié
puisse contester son licenciement,
en réduisant à un an le délai de l’ac-
tion en justice. Ce délai est passé en
l’espace de dix années de trente à
deux ans, et désormais à un an, soit
un délai inférieur aux délais du droit
des contrats classique ou du droit de
la consommation. La finalité est
claire : compter sur le désarroi du sa-
larié. En outre, avant de saisir le juge
dans ce délai réduit, le salarié licen-
cié devra préalablement demander à
l’employeur de s’expliquer sur les
motifs de la rupture, faute de quoi il
perdra en pratique le droit de contes-
ter la légitimité des motifs de licen-
ciement. Enfin, si le juge est saisi et
s’il reconnaît le caractère abusif du
licenciement, son pouvoir de sanc-
tion est désormais strictement enca-
dré par un barème : quelle que soit sa
situation personnelle ou profession-
nelle, le salarié ayant moins de
deux ans d’ancienneté ne pourra se
voir octroyer qu’une indemnité com-
prise entre un et deux mois de sa-
laire. Indemnité que le juge peut mi-
norer au regard des indemnités lé-
gales de licenciement. En d’autres
termes, et sans même parler de la gé-
néralisation du contrat de chantier,
ce CDI aux allures de CDD, un em-
ployeur pourra licencier tout salarié
sans motif valable moyennant le
paiement d’une indemnité équiva-
lente à celle qui était prévue pour le
CPE et pour le CNE.
Qu’on ne s’y trompe pas. C’est une
remise en cause complète du droit du
contrat de travail. Le contrôle des
motifs de la rupture visait à rééqui-
librer un contrat fortement inégali-
taire. Or, la motivation du licencie-
ment perd ici tout son intérêt : peu
importe le débat sur les motifs
puisque l’employeur peut provision-
ner le coût de sa violation. C’est une
exigence de longue date du patronat
qui est ici entendue : le contrôle du
juge n’est pas en soi un problème,
tant qu’il est loisible à l’employeur
de connaître à l’avance le coût de la
rupture du contrat de travail et d’au-
tant plus lorsque ce coût est faible.
Et il l’est, les planchers et plafonds
d’indemnisation s’avèrent bien plus
faibles que ceux prévus dans la loi
Macron de 2015, censurée sur ce
point par le Conseil constitutionnel.
C’est une régression sans précédent
du droit du travail français. Une ré-
gression purement corporatiste et
idéologique, le Premier ministre
ayant lui-même reconnu dans sa
conférence de presse, qu’on ne pour-
rait en attendre le moindre effet sur
l’emploi.
Les optimistes pourront espérer que
la réforme soit partiellement paraly-
sée par la jurisprudence de la Cour de
cassation qui a multiplié, sans fonde-
ment textuel, les hypothèses de nul-
lité du licenciement. Certes, mais
l’orientation très pro-entreprises de
la Chambre sociale de la Cour de cas-
↑ 18
sation pourrait annihiler ce contre-
feu. Les pessimistes considéreront
que, par le jeu de cette indemnisation
prédéfinie, le droit français se rap-
proche du droit américain fondé, au
moins dans son principe, sur la libre
rupture du contrat de travail. Or, la
principale conséquence de ce sys-
tème réside dans la multiplication
des recours fondés sur la discrimina-
tion. Il est fort probable qu’il en soit
de même en France, où le terreau ju-
diciaire et sociétal est prêt, d’autant
plus que la sanction des discrimina-
tions - c’est également le cas du har-
cèlement - n’est pas soumise au ba-
rème.
A la pacification par la justification
du licenciement, le gouvernement
substitue la pacification par l’indem-
nisation. C’est un choix de société : le
salarié devient une simple ressource,
évaluable financièrement.
C’est aussi un pari risqué au regard
de la faiblesse des montants propo-
sés. On risque d’assister à une hausse
artificielle du contentieux fondé sur
la discrimination, engendrant des re-
vendications communautaires, bien
réelles quant à elles, contentieux
uniquement destiné à obtenir la nul-
lité du licenciement ou une indem-
nisation majorée. De la lutte des
classes à la lutte des communautés,
beau pari social et républicain ! ■
par Julien Icard
Tous droits réservés Libération 2017
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Loi travail : le recentrage de FO profite à l'exécutif
Hostile à la loi El Khomri, le syndicat a changé de pied et ne s'oppose pas à la réformeactuelle
mercredi 6 septembre 2017Page 9
1183 mots
FRANCE
Jean qui grogne et Jean qui rit ? A
la sortie de Matignon, jeudi 31 août,
où Edouard Philippe venait de pré-
senter les ordonnances sur le code du
travail, la planète syndicale semblait
avoir changé. Laurent Berger, le se-
crétaire général de la CFDT, affichait
son visage des mauvais jours et
confiait sa déception. Tout en sou-
lignant " des points fondamentaux de
désaccord ", son homologue de FO,
Jean-Claude Mailly, se montrait plus
positif, plus mesuré. La veille déjà, il
avait justifié son refus de manifester
avec la CGT le 12 septembre en met-
tant en avant le " vrai dialogue social "
noué avec le gouvernement pendant
trois mois. Durant l'été, M. Mailly a
multiplié les entretiens officieux. "
J'ai eu des contacts avec Emma-
nuelMacron ", confie-t-il.
Le recentrage de FO, qui avait ba-
taillé contre la loi El Khomri en 2016,
s'est amorcé dès le mois de juin. Dans
une interview au Monde (daté du 28
juin), M. Mailly évoquait une "
concertation intense ". Et il donnait la
clef de son changement de stratégie.
Il n'y avait pas à ses yeux de remise
en cause de la sacro-sainte hiérarchie
des normes, contrairement à la loi
travail de 2016. " Si j'avais ce senti-
ment, ajoutait-il, la concer-tation se
serait arrêtée. " Dès le -départ, Emma-
nuel Macron a changé son logiciel.
Devenu président de la République, il
a compris que pour obtenir au moins
une neutralité bienveillante de FO –
mais aussi de la CFDT et de la CFTC
–, il fallait abandonner le " tout à
l'entreprise " et réhabiliter le rôle des
branches. Dans plusieurs domaines,
elles garderont un " verrou " qui em-
pêchera les entreprises de conclure
des " accords dérogatoires ".
Historiquement, FO a toujours privi-
légié les négociations de branches,
d'abord parce qu'elle est beaucoup
moins implantée que la CFDT et la
CGT dans les entreprises. Et ensuite
parce que c'est, à ses yeux, le
meilleur niveau pour contrer le "
dumping social ". Le taux d'implan-
tation dans les entreprises de plus de
50 salariés, tous syndicats confon-
dus, est de 67 %. En 2017, sur 418
conventions collectives recensées
par la direction générale du travail,
FO est représentative – et donc en
capacité de négocier – dans 349
branches (? 23,8 % par rapport à
2013), derrière la CFDT (418) et la
CGT (410).
" Position tactique "
La place de la branche a été le sésame
qui a permis à M. Mailly de revenir
dans le jeu contractuel. Deux autres
considérations ont joué. Le leader de
FO a tiré un bilan négatif de son com-
bat dans la roue de la CGT pour obte-
nir l'abrogation de la loi El Khomri –
qu'il demande toujours pour la forme
– dans lequel son syndicat n'a eu au-
cune visibilité.
Dimanche 3 septembre, Jean-Claude
Mailly a répliqué vertement à Phi-
lippe Martinez. Le secrétaire général
de la CGT lui avait demandé d'expli-
quer pourquoi il refusait de com-
battre la " loi travail XXL " de M. Ma-
cron alors qu'il avait ferraillé contre
celle de François Hollande. " Cen'est
pas quand tout est fini qu'il faut mener
la bagarre, il fallait la mener avant ", a
lancé M. Mailly sur France 3, en mar-
telant qu'il n'avait pas " envie d'appe-
ler les salariés à manifester une, deux,
trois, quatre, cinq fois pour les envoyer
dans le mur ".
En 2016, la CGT et FO avaient or-
ganisé quatorze journées d'action
contre la loi travail sans obtenir son
retrait. " Mailly a une position tac-
tique, juge l'un de ses homologues
syndicaux. Son organisation a laissé
beaucoup de plumes dans les manifes-
tations de 2016 alors il teste une autre
stratégie. Mais, quand il dit qu'heureu-
sement que FO était là pour contrer les
mauvais coups, il force le trait. "
Le positionnement de FO se com-
prend aussi dans la perspective des
réformes sociales à venir, sur la for-
mation professionnelle ou encore
l'assurance-chômage. Comme les
autres partenaires sociaux, FO joue
un rôle capital dans l'Unedic. Ce sont
eux qui décident de la convention ré-
gissant l'assurance-chômage et de
toutes les règles appliquées aux de-
mandeurs d'emploi, notamment le
montant et la durée des indemnités.
L'autre raison relève du jeu interne à
FO. Jean-Claude Mailly quittera ses
fonctions en avril 2018 au congrès
de Lille, pour laisser la place à son "
dauphin ", Pascal Pavageau. Elu à ce
poste en 2004, il avait inscrit ses pas
dans ceux de son prédécesseur, Marc
↑ 20
Blondel (1938-2014), dont il avait été
l'assistant, qui avait incarné durant
son mandat (1989-2004), le " syndica-
lisme de contestation ".
" Capitulation "
C'était une rupture avec le long règne
d'André Bergeron (1922-2014) qui, de
1963 à 1989, avait donné la priorité à
la recherche du " grain à moudre ". In-
terlocuteur privilégié des gouverne-
ments, de droite comme de gauche, il
signait tous les accords interprofes-
sionnels. En mettant en avant son "
réformisme militant ", M. Mailly achè-
vera son mandat comme Bergeron
après l'avoir entamé comme Blondel.
Et il n'a plus à craindre les foudres
de ses minorités trotskistes et anar-
chistes – présentes notamment en
Bretagne – qui voient dans tout com-
promis une " capitulation ".
Dans un syndicat politiquement hé-
térogène et peu centralisé – les fédé-
rations ont beaucoup d'autonomie –,
la stratégie de M. Mailly ne fait pas
l'unanimité. Deux fédérations, celle
des transports et de la logistique et
celle de l'équipement, manifesteront
le 12 septembre avec la CGT. " Ces
ordonnances ne font pas autre chose
que du dumping social à la française,
dénonce Patrice Clos, secrétaire gé-
néral de la fédération transports.
Mailly est allé au bout de ce qu'il pen-
sait être le dialogue. C'est son rôle,
mais on n'est pas obligé de partager
son avis. " Plusieurs unions départe-
mentales s'y associeront, " quinze "
selon Philippe Martinez, " peut-être
vingt ", selon Jean-Claude Mailly. "
C'est toujours arrivé dans l'histoire de
FO, a-t-il observé le 31 août. Il y a
des grognards fidèles et des grognons
râleurs (…) C'est leur droit d'exister. "
Lundi 4 septembre, la commission
exécutive de FO a entériné, par
vingt-huit voix pour et cinq contre,
cette mise en œuvre du " réformisme
militant " qui " se traduit par l'obten-
tion de certainesgaranties et le blocage
de nombreuses dispositions ". Elle sou-
ligne toutefois que " nombred'élé-
ments constituent une régression so-
ciale " et sont " inacceptables ". Dans
les consultations obligatoires à venir
pour avis, FO votera donc contre et
n'exclut pas des " recours juri-diques
". Une façon pour M. Mailly de ré-
pondre à ses " grognons râleurs ".
Raphaëlle Besse Desmoulières, et
Michel Noblecourt ■
par Raphaëlle Besse Desmou-
lières, Et Michel Noblecourt
Tous droits réservés Le Monde 2017
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PROTECTION SOCIALE
↑ 22
PROTECTION SOCIALE
Le RSI, achevé comme il est néLe premier ministre a confirmé hier la fin du régime social des indépendants. Une mise à mortaussi précipitée que sa création, estime la CGT.
mercredi 6 septembre 2017Page 8
636 mots
SOCIAL-ECO
C 'était annoncé, c'est désormais
confirmé : le RSI, ou régime so-
cial des indépendants, vit ses der-
nières heures. édouard Philippe a en-
tériné la décision hier. Le premier
ministre se donne deux ans pour ve-
nir à bout de ce régime social décrié,
qui sera définitivement supprimé à
compter du 1er janvier 2018. « Il ne
s'agit pas de tout chambouler pour le
plaisir de tout chambouler », a-t-il
plaidé, mais de cesser « de bricoler »
pour tenter de réparer les dysfonc-
tionnements de l'organisme. Avec
quelle garantie de succès ? Toute la
question est là.
Le RSI est l'héritier malmené d'une
histoire de scission. Dès 1945, com-
merçants, chefs d'entreprise et autres
artisans refusaient d'intégrer le ré-
gime général de Sécurité sociale, à
l'époque sous gestion ouvrière, pré-
férant développer plusieurs caisses
autonomes. En 2006, le gouverne-
ment Raffarin décidait de les regrou-
per toutes en une : le régime social
des indépendants voyait le jour, avec
pour ambition de simplifier les dé-
marches des 2,8 millions de cotisants
concernés. Ces derniers déchante-
ront. La variété de leur situation et
l'évolution rapide des professions
rendent la réunification des caisses
complexe. La crise qui explose en
2008 trouble encore la donne. Mais
la réforme, surtout, a été mal trous-
sée et mal financée. « La précipita-
tion avec laquelle le régime a été mis
en place et la réduction de coûts de
gestion imposée sous prétexte de
simplification induisaient inélucta-
blement l'échec du RSI », commente
aujourd'hui Jean-François Naton,
conseiller CGT à la Caisse nationale
d'assurance-maladie (Cnam). En
2009, la création du statut d'autoen-
trepreneur finit de gâter la situation
en créant une nouvelle caste d'indé-
pendants précaires. Au final, la struc-
ture censée tout simplifier devient
organisme sous-doté, sommé de gé-
rer des situations sociales contras-
tées 460 euros par mois de revenu
moyen pour un autoentrepreneur, 3
100 euros pour les autres indépen-
dants. Les retards de versement de
retraites se multiplient, de même que
les dossiers non traités. En 2012, la
Cour des comptes parlera de « catas-
trophe industrielle ».
Fallait-il jeter le bébé avec l'eau du
bain ? Les avis sont partagés. Le Syn-
dicat des indépendants et l'Union des
entreprises de proximité se félicitent
de la décision, laquelle répercute une
promesse du candidat Macron. Dans
l'absolu, au reste, l'idée de dévelop-
per un régime de Sécurité sociale
commun à tous les travailleurs est de
nature à plaire à la gauche. Le pro-
gramme de la France insoumise, pen-
dant la présidentielle, allait dans ce
sens, proposant de laisser la liberté
aux artisans, chefs d'entreprise et au-
toentrepreneurs de s'affilier au ré-
gime général plutôt qu'au RSI. « Si
nous étions dans la logique originelle
de 1945, visant une sécurité sociale
de haut niveau pour tous, ce serait
évidemment une bonne nouvelle »,
reprend Jean-François Naton. Seule-
ment ce n'est pas le cas. Neuf mille
suppressions de postes ont été pro-
grammées entre 2014 et 2017 dans
les organismes de Sécurité sociale
(MSA, RSI et régime général), rap-
pelle-t-il, couplées à une amputation
de 15 % des budgets. « Dans ces
conditions, le regroupement des
caisses peut s'avérer un fiasco com-
plet pour tout le monde », poursuit le
syndicaliste, notant l'absence de visi-
bilité du processus en cours. Un non-
choix stratégique, conclut-il. « On
fait porter à un organisme et à ses
salariés la responsabilité d'échecs in-
duits par des choix politiques. » ■
par Marie-Noëlle Bertrand
Tous droits réservés L'Humanité 2017
DA93E35C87C0AC05A52C1550D00171539BA8F26E87B8962976D7FBE
Parution : Quotidienne
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Audience : 372 000 lect. (LNM) - © AudiPresse One 2016↑ 23
Le gouvernement caresse les travailleurs indépendants dans le sens fiscal
Fin du RSI, baisse des cotisations sociales pour les entrepreneurs... En déplacementà Dijon, Edouard Philippe a confirmé une batterie de mesures destinées à un électorat trèspro-Macron.
N° 11286mercredi 6 septembre 2017
Édition(s) : PrincipalePage 14
728 mots
EXPRESSO
P armi les projets du
gouvernement, celui-là ne sera
pas le plus mal accueilli. En annon-
çant mardi à Dijon un paquet de me-
sures à destination des indépen-
dants, dont la suppression de leur ré-
gime social (RSI), Edouard Philippe a
confirmé les promesses du candidat
Macron. Et satisfait de nombreux as-
surés du RSI : créé en 2006, il a été
très critiqué pour ses dysfonctionne-
ments à répétition.
«Calvaire». Inscrite dans le prochain
projet de loi de financement de la Sé-
curité sociale - qui sera présenté fin
septembre -, sa disparition se fera
progressivement à partir du 1er jan-
vier 2018. A cette date, ses missions
seront transférées au régime général,
même si la transition technique
s’étalera sur une période de
deux ans. Ne restera du RSI qu’un
«guichet spécifique» à destination des
indépendants. «Objectivement, le dis-
positif n’était pas à la hauteur des en-
jeux», a jugé le Premier ministre, évo-
quant «des dysfonctionnements parfois
graves» et même le «calvaire» de cer-
tains indépendants. «On aurait pu
continuer à bricoler, mais le président
de la République a préféré prendre
un nouveau départ.»
Eux aussi du voyage, les ministres
Agnès Buzyn (Santé) et Gérald Dar-
manin (Budget) visitaient un centre
local du RSI. Objectif : rassurer les
5 300 salariés du régime, en promet-
tant une réforme sans licenciements
ni mobilité forcée. Sur place, ces der-
niers n’en affichaient pas moins leur
amertume : «Le sentiment d’injustice
est très fort, confie un représentant
de la direction du RSI. Après dix ans
de travail, les principaux dysfonction-
nements ont disparu. Les indépendants
pensent que la réforme va tout changer,
mais il n’y aura pas de grand soir :
c’est le même système qui continuera
à calculer leurs cotisations. En réalité,
on paye surtout la mauvaise image de
la "marque" RSI.» Regrets balayés par
Darmanin : «Si cela marchait si bien,
on ne serait pas ici.»
A cette annonce s’ajoute un cortège
de mesures favorables aux tra-
vailleurs indépendants, dont plu-
sieurs baisses de prélèvements.
Comme pour les salariés, la hausse à
venir de la CSG sera comme promis
«compensée» par une diminution
conséquente des cotisations sociales.
Tous les indépendants connaîtront
une baisse de 2,15 points de leurs co-
tisations «famille» et 75 % d’entre
eux (ceux dont les revenus vont jus-
qu’à 43 000 euros net par an) verront
celles à la ligne «maladie» diminuer
de manière dégressive.
Exonérations. Le «gain de pouvoir
d’achat», selon le gouvernement, sera
équivalent à celui promis aux salariés
: «270 euros par an» pour un indépen-
dant qui gagne l’équivalent du smic
et «550 euros» pour un autre à «2
400 euros net par mois». Mais ça, ce ne
sera pas avant 2019 puisque, comme
pour les salariés, ces baisses de coti-
sations seront étalées en 2018 tandis
que la hausse de la CSG se fera dès le
début de l’année. «Ces coups de pouce
seront visibles dès les premiers
acomptes, soit à l’été 2018», a tout de
même promis Edouard Philippe mar-
di à Dijon.
Autre faveur : à partir de 2019, ceux
qui créeront ou reprendront une en-
treprise se verront totalement exoné-
rés de cotisations pour leur première
année d’exercice, si leurs revenus
sont inférieurs à 40 000 euros. Selon
Matignon, la mesure concernera 90
% des néo-entrepreneurs, pour un
coût estimé entre 300 et 350 millions
d’euros. Dernière nouveauté : la pos-
sibilité pour les indépendants de mo-
duler leurs cotisations en temps réel,
selon les fluctuations de leurs reve-
nus.
«Flexibilité». Quant au régime de la
micro-entreprise, avec ses obliga-
tions comptables allégées, il verra
doubler sa limite maximale de reve-
nus, qui passera en 2018 à 170
000 euros pour la vente de biens et
à 70 000 euros pour les services. Une
hausse qui ne concerne pas les seuils
de franchise de TVA, afin de limiter
la «concurrence déloyale» dont se
plaignent les entreprises tradition-
nelles.
Pour le gouvernement, ces cadeaux
aux «entreprises du quotidien» sont
plus faciles à vendre que la réforme
du marché du travail, saluée par
l’épouvantail Medef. «On vous plébis-
cite et vous envie, a lancé Edouard
↑ 24
Philippe à son public de petits entre-
preneurs. Vous êtes au cœur de la ré-
conciliation qui commence à se jouer
entre les Français et l’esprit d’entre-
prise.» Le Premier ministre n’en a pas
moins lié ses annonces aux autres ré-
formes économiques, fondées elles
aussi sur une baisse du coût du tra-
vail et une «flexibilité» accrue pour les
entreprises et la main-d’œuvre : «Ces
transformations forment un écosys-
tème, chacune s’appuie sur l’autre et
l’amplifie.» Un grand dessein dont le
niveau de soutien dans l’opinion
reste encore à déterminer. Et qui,
avec les mobilisations politiques et
syndicales prévues ce mois-ci, va
connaître ses premières mises à
l’épreuve. ■
par Dominique Albertini
Tous droits réservés Libération 2017
de99a37d81f0e005a5dc1a70580f21579bf80866571792a018f8daf
Parution : Quotidienne
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Le plan du gouvernement pour remplacer le RSI
Le dispositif sera supprimé le 1er janvier 2018, et les indépendants seront adossés aurégime général de la " Sécu "
mercredi 6 septembre 2017Page 8
1093 mots
FRANCE
Le sujet concentre depuis plusieurs
années le courroux des travailleurs
indépendants. Libéral sur le plan
économique, Emmanuel Macron ne
pouvait pas se permettre d'ignorer
les plaintes de ces derniers contre
leur caisse spécifique de sécurité so-
ciale, le régime social des indépen-
dants (RSI). Soucieux de soutenir la
création d'entreprise, il avait promis
durant sa campagne d'engager une
réforme de ce système dédié aux
autœntrepreneurs, artisans, petits
commerçants et professions libé-
rales. Mardi 5 septembre, le premier
ministre, Edouard Philippe, accom-
pagné des ministres Agnès Buzyn
(solidarités et santé) et Gérald Dar-
manin (comptes publics), a dévoilé à
Dijon les modalités de réforme du
RSI.
A l'heure où le gouvernement est de
plus en plus accusé de mener des po-
litiques en faveur des plus aisés, il
s'agit pour l'exécutif de replacer ces
annonces dans le cadre de son action
pour le pouvoir d'achat. " Les indé-
pendants sont au cœur de la machine
économique, mais c'est une catégorie
d'actifs souvent précaire, avec beau-
coup de travailleurs pauvres ", fait-on
valoir à Matignon.
Comme ils acquittent leurs cotisa-
tions salariales et patronales, et
qu'ils ne cotisent pas à l'assurance-
chômage, beaucoup craignaient
qu'une hausse de la CSG, compensée
pour les salariés par une baisse des
cotisations à l'Assurance-maladie et
chômage, ne vienne grever encore
plus leur budget. Mardi, le gouverne-
ment leur a annoncé une baisse de
cotisations sociales qui devrait com-
penser la hausse de cet impôt : la co-
tisation famille recule ainsi de 2,15
points, ce qui peut représenter un
gain de pouvoir d'achat de 270 euros
par an pour un smic. Les cotisations
maladies vont elles aussi baisser de 5
points, mais de façon dégressive jus-
qu'à 43 000 euros de chiffre d'affaires
annuel.
Autre point capital : l'adossement de
la sécurité sociale des indépendants
au régime général. Né en 2006 de la
fusion de plusieurs caisses de protec-
tion sociale de chefs d'entreprise, le
RSI gère les retraites et l'assurance-
maladie des commerçants, artisans,
autœntrepreneurs… Soit 4,6 mil-
lions de personnes. Mais nombre
d'entre elles ont dénoncé les mul-
tiples dysfonctionnements du dispo-
sitif : services injoignables, injonc-
tions par huissier injustifiées, mode
de calcul des cotisations illisibles, re-
couvrements abusifs… A tel point
qu'en 2012, un rapport de la Cour des
comptes qualifiait le RSI de " catas-
trophe industrielle ".
" Cela paraît technique, mais c'est
considérable ", indique-t-on à Mati-
gnon. Concrètement, le gouverne-
ment compte achever la transition en
deux ans, en rapprochant une à une
du régime général chaque mission du
RSI pour un fonctionnement à plein
régime au 31 décembre 2019. Offi-
ciellement toutefois, le RSI disparaî-
tra dès le 1er janvier 2018.
Le dispositif devrait assurer la conti-
nuité des droits pour un salarié qui
devient indépendant et inversement,
là où il y avait, auparavant, de com-
plexes démarches de réinscription à
différentes caisses. Un exemple avec
l'Assurance-maladie : à partir du 1er
janvier 2019, une personne devenant
indépendante pourra conserver sa
caisse d'affiliation précédente. " Et à
partir du 1er janvier 2020, tout le stock
de travailleurs indépendants sera re-
pris par les caisses primaires d'assu-
rance-maladie ", précise Matignon.
Les modalités de cette petite révolu-
tion devraient être inscrites dans le
projet de loi de financement de la Sé-
curité sociale 2018.
Pour autant, en dehors des baisses
prévues pour compenser la hausse de
la CSG, les autres cotisations acquit-
tées par les indépendants demeure-
ront les mêmes. Elles ne seront pas
alignées sur celles des salariés. Idem
pour les prestations. " Les règles de
cotisations – en moyenne 30 % plus
faibles que celles des salariés – de-
meurent inchangées, on est dans une
logique de baisse de cotisations et pas
de hausse ", insiste-t-on rue de Va-
renne.
Une mission sera tout de même lan-
cée courant 2019 pour rapprocher les
deux régimes en matière de mater-
nité. Aujourd'hui, nombre de tra-
vailleurs indépendants n'ont tout
simplement pas droit à un congé en
cas de grossesse.
↑ 26
Pour doper l'entreprenariat, le gou-
vernement crée, en outre, une " an-
née fiscale blanche " pour les créa-
teurs d'entreprises. Dès le 1er janvier
2019, ils seront exonérés de toutes
les cotisations sociales pour leur pre-
mière année d'activité, dans la limite
d'un chiffre d'affaires inférieur à 30
000 euros.
Modulation
Pour ceux qui gagnent davantage, le
dispositif sera dégressif dans la limite
de 40 000 euros annuels. Le gouver-
nement chiffre à 350 000 le nombre
de créateurs d'entreprises qui de-
vraient bénéficier de la mesure. Il en-
tend, par ailleurs, simplifier les dé-
marches des personnes concernées
en leur assurant un interlocuteur dé-
dié à l'Urssaf, l'organisme chargé de
collecter leurs cotisations.
Cette simplification passera aussi par
la possibilité pour les travailleurs in-
dépendants de " moduler leurs
acomptes de cotisations en temps réel
". Beaucoup se plaignent aujourd'hui
du décalage de plusieurs mois, voire
années entre la réalisation d'un
chiffre d'affaires et l'acquittement
des cotisations qui y correspondent.
Entre-temps, la situation du tra-
vailleur peut avoir changé, et ses ré-
serves de trésorerie avoir fondu.
Voilà pourquoi il sera désormais pos-
sible pour chacun d'entre eux d'ajus-
ter ses cotisations, les augmentant
ou les baissant, selon les aléas de son
activité, mois par mois. A cela
s'ajoutent des procédures facilitées
en cas de difficultés de paiement, ou
la mise à disposition d'outils numé-
riques pour gérer ses liens avec l'ad-
ministration.
Cette nouvelle salve d'annonces per-
mettra-t-elle à l'exécutif de s'attirer
les bonnes grâces de nouvelles caté-
gories de travailleurs, après sa chute
de popularité estivale ? A Matignon,
on insiste : " L'objectif est de permettre
à de nouvelles personnes de se lancer,
et de les accompagner tout au long de
leur vie d'indépendant (protection so-
ciale, baisse de charges). On a essayé
de construire un plan cohérent, pas que
de petites mesures fiscales. "
Sarah Belouezzane, Raphaëlle
Besse Desmoulières, et Audrey
Tonnelier■
par Sarah Belouezzane, Ra-
phaëlle Besse Desmoulières, Et Au-
drey Tonnelier
Tous droits réservés Le Monde 2017
6E9BE3C385D03E0105811080230CF14A9028736D07519A469E5DA55
Parution : Quotidienne
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Audience : 2 416 000 lect. (LNM) - © AudiPresse One 2016↑ 27
MOUVEMENTS SOCIAUX
↑ 28
Les GM & S « parqués comme des chiens »Les salariés qui manifestaient devant le site ont été délogés manu militari par les CRS, qui les at-tendaient en masse.
mercredi 6 septembre 2017Page 20
369 mots
CACTUS
«Depuis le temps que je milite, je n'ai
jamais vu ça. Des cars de CRS à perte
de vue. Il y en a partout. C'est hal-
lucinant ! » Délégué syndical central
CGT du site PSA Poissy, Thomas Bau-
douin n'en revient toujours pas de l'«
accueil » qui a été fait, hier, aux sa-
lariés creusois de l'équipementier au-
tomobile GM & S placé en liquidation
judiciaire venus manifester leur mé-
contentement devant l'usine PSA
Peugeot des Yvelines.
Vers midi, la centaine de manifes-
tants rassemblée devant l'une des en-
trées du site a en effet été délogée
manu militari par les forces de
l'ordre. « Quand ils ont décidé de blo-
quer l'entrée, les CRS les ont pris par
les bras, par les jambes puis les ont
parqués plus loin, comme des chiens,
raconte Thomas Baudouin. Heureu-
sement, les salariés sont restés très
calmes, très patients. Ça rappelle
néanmoins les heures noires de la
France Si c'est ça la méthode Macron
» Alors que le tribunal de commerce
de Poitiers doit rendre demain sa dé-
cision sur l'offre de reprise par l'em-
boutisseur GMD, qui ne préserverait
que 120 emplois sur les 277 que
compte l'usine de La Souterraine, les
salariés poursuivent le bras de fer. «
On défend nos emplois, on défend
notre avenir », expliquait ainsi hier
à l'AFP Franck Cariat, salarié depuis
vingt et un ans de l'entreprise GM &
S et délégué CGT. Les principaux in-
téressés estiment que les garanties
de commandes (22 millions d'euros
annuels sur cinq ans) arrachées à PSA
et Renault, les deux principaux
clients de GM & S, ne sont pas un
gage de pérennité du site. Et restent
convaincus que les lignes peuvent
encore bouger sur l'emploi, via les
deux constructeurs automobiles,
pour garantir davantage d'activité. «
PSA et Renault sont dans le même
mutisme. Mais en face d'eux, les GM
& S n'ont pas envie de bouger. Ils
sont là pour discuter de leur avenir.
Ils veulent sauver leurs emplois. Et
ils ont bien raison. » ■
par Alexandra Chaignon
Tous droits réservés L'Humanité 2017
7B92632D8CC0440DE5851020CC07D1C49AA8066907C29FA805124E4
Parution : Quotidienne
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CONTRE LA LOI TRAVAIL
Contre la loi travail : tous ensemble, tous ensemble ?
Le leader de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, compte profiter de lamanifestation du 23 septembre pour s’afficher comme le principal opposant de gauche,alors que la CGT préfère défiler le 12. Le PS, lui, reste en retrait.
N° 11286mercredi 6 septembre 2017
Édition(s) : PrincipalePages 2-3729 mots
ÉVÉNEMENT
U ne fois n’est pas coutume : une
grande majorité de la gauche
est d’accord. Elle s’oppose aux or-
donnances qui doivent réformer en
profondeur le code du travail, et les
dirigeants ne manquent pas de mots
pour en dire le plus grand mal. Mais
il y a un hic. Les partis, à l’image des
syndicats(lire ci-contre), se divisent
sur la forme et les stratégies sont
multiples. Résultat : deux manifesta-
tions en septembre et des absents
dans le cortège. Bien évidemment,
chacun a sa raison - une aubaine
pour Emmanuel Macron.
La France insoumise est en première
ligne après son entrée remarquée au
Palais-Bourbon. Elle s’imagine
grande, belle et puissante. Le mou-
vement créé par Jean-Luc Mélenchon
souhaite enfiler la ceinture du pre-
mier opposant au pouvoir présiden-
tiel. Un titre honorifique qui a son
importance dans la reconstruction de
la gauche. Le mouvement a tout pro-
grammé. Cet été, le tribun avait an-
noncé un rassemblement sur la place
de la Bastille, qui aura lieu le 23 sep-
tembre. Une initiative qui a mis de
mauvaise humeur certains syndicats.
Pour cause, plus tôt, la CGT avait ap-
pelé à manifester le 12 septembre. Ce
mercredi, Philippe Martinez et Mé-
lenchon vont pouvoir s’expliquer.
Ils se retrouvent à l’Assemblée, une
première depuis des mois.
«Un coup bas»
Entre les deux leaders, l’ambiance est
tiède. Philippe Martinez reproche à
La France insoumise ses coups de
force contre les autres composantes
de la gauche, notamment le Parti
communiste. Et la marche du 23 sep-
tembre n’arrange rien. Au sein de la
CGT, on voit ça comme une provoca-
tion, «un coup bas» pour balayer d’un
revers de main l’unité et instaurer un
face-à-face avec l’Elysée en sautant
sur la tête des syndicats.
Mélenchon, qui ne participera pas à
la Fête de l’Humanité - une première
depuis 2005 -, rejette les accusations.
La France insoumise, qui se voit
comme un mouvement social et po-
litique, sera présente dans le cortège
le 12 septembre pour défendre les sa-
lariés. Mais le 23 septembre, c’est
différent : c’est la «manifestation du
peuple qui déferle sur Paris».
D’ailleurs, le néodéputé invite tous
les partis, les syndicats et les mou-
vements à se joindre à sa manifesta-
tion. Mélenchon, qui prononcera un
discours ce jour-là, s’imagine ga-
gnant - à condition de faire déborder
les âmes de la place de la Bastille.
Soit les autres forces de gauche par-
ticipent à la journée et il se pose en
chef des opposants, soit ils refusent
l’invitation et il encaisse tout seul les
bénéfices de la manifestation. La
CGT a d’ores et déjà annoncé son ab-
sence car elle participe à une marche
pour la paix qui tombe à pic. Et le mot
d’excuse des communistes ne devrait
pas tarder.
Au milieu des bisbilles entre
La France insoumise et la CGT, les
socialistes tentent de se faire en-
tendre. Et le moins que l’on puisse
dire, c’est qu’ils ont du mal. Pas facile
de se relever après la défaite cin-
glante lors de la présidentielle et des
législatives. Lundi soir, le PS s’est re-
trouvé rue de Solférino pour un bu-
reau national, où les ordonnances
ont occupé une grande part des
échanges. Après un débat et des di-
visions, une décision a été prise :
«Le Parti socialiste soutient, dans le
respect de l’indépendance syndicale,
toutes les démarches de mobilisation,
mais il ne sera pas pour autant co-ini-
tiateur de la manifestation du 12 sep-
tembre.»
Et ce n’est pas tout. Afin de ne pas
laisser toute la lumière à La France
insoumise, le PS prévoit une cam-
pagne «pour l’unité au travers d’un
tract» distribué à plusieurs millions
d’exemplaires et «des rassemblements
devant les préfectures». Pas sûr que
cela suffise pour se faire remarquer.
Au sein de la direction, on répond
que le parti ne peut pas se permettre
de se rendre à une manifestation
alors que les syndicats sont divisés.
Et que chacun est libre de défiler en
son nom.
Le m1717, «présent»
La crise au PS a mis au monde une
nouvelle petite famille, le M1717,
lancé par Benoît Hamon au mois de
↑ 30
juillet après avoir quitté la rue de Sol-
férino. Dimanche, le M1717 se re-
trouvera à Paris pour son premier sé-
minaire. Un texte sera publié au sujet
des ordonnances et le mouvement
devrait officialiser sa participation à
la manifestation du 12 septembre,
peut-être également à celle de La
France insoumise. L’eurodéputé
Guillaume Balas argumente : «Nous
ne sommes pas favorables à la straté-
gie de Jean-Luc Mélenchon mais nous
répondrons présent à toutes les mobi-
lisations organisées par des progres-
sistes.» L’occasion, qui sait, de voir
Mélenchon et Hamon sur la même
photo, quatre mois après la présiden-
tielle. ■
par Rachid Laïreche
Tous droits réservés Libération 2017
8f91c3498170960105f01f90b90051ae96480264f7df9253eaf3c47
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Loi travail : les syndicats en rangs dispersés
Bien que la défiance contre les ordonnances soit partagée, le front syndical est désuni.Une partie de FO va même à l’encontre de son leader, Jean-Claude Mailly, et iramanifester.
N° 11286mercredi 6 septembre 2017
Édition(s) : PrincipalePage 3
736 mots
ÉVÉNEMENT
C ’est peu dire que les
organisations syndicales n’en
pincent pas beaucoup pour les or-
donnances Pénicaud. De la«décep-
tion» de la CFDT à la dénonciation
d’une «loi travail XXL» par la CGT,
l’ensemble des confédérations - avec
de fortes nuances - apprécient peu
cette énième tambouille du droit du
travail. Il n’y aura pas, pour autant,
de front syndical uni dans la rue,
le 12 septembre, pour la première
mobilisation contre les ordonnances
lancée par la centrale cégétiste. La
lutte contre la loi El Khomri en 2016,
longue, violente, et finalement peu
rentable, a laissé un goût amer chez
nombre de syndicalistes.
Ainsi, si la CFDT et la CFTC, les plus
mesurées, rappellent qu’elles
n’étaient pas demandeuses d’une
nouvelle réforme, et qu’il s’agit fina-
lement, selon le cédétiste Laurent
Berger, d’«une occasion manquée»,
pas question d’appeler à battre le pa-
vé. Les militants de ces deux organi-
sations resteront sagement à la mai-
son mardi. Même chose pour la CGC
(confédération des cadres), mais avec
un cran au-dessus dans la protesta-
tion : «Le contenu détaillé des ordon-
nances confirme les pires craintes que
l’on pouvait avoir sur l’ampleur et la
violence de l’attaque du gouvernement
contre le droit du travail», a expliqué,
lundi dans un communiqué, son co-
mité directeur. Mais pas d’appel à
l’insurrection pour les cadres lors de
la journée du 12, «initiée unilatérale-
ment avant l’été». Sous-entendu par
la seule CGT. La confédération de
François Hommeril se limitera à «in-
former l’opinion sur les risques de
désordre social que fait peser ce projet
de loi». Même si, localement, cinq
unions départementales CGC de-
vraient rejoindre les cortèges.
Vents contraires. De l’autre côté du
spectre syndical, en revanche, c’est
dans la rue que se jouera désormais
l’opposition aux ordonnances. Dans
le sillage de la CGT, la FSU (fonction-
naires) et Solidaires (syndicats SUD)
se mobiliseront mardi «pour une pre-
mière riposte de grèves et de manifes-
tations», selon la centrale de Mon-
treuil, qui recense 166 rassemble-
ments.
Entre les «réformistes» qui resteront
chez eux et les «contestataires» dans
la rue, il y a le cas de Force ouvrière.
Assez conciliante jusqu’à maintenant
avec le gouvernement, la centrale
semble travaillée depuis quelques
jours par des vents contraires. Jeudi,
peu après la présentation des ordon-
nances, Jean-Claude Mailly émet un
jugement mesuré sur le projet du
gouvernement : «On consolide la
branche», mais «il reste un problème
sur les primes» et «des points de désac-
cord». Le lendemain, le syndicaliste
va plus loin : «Cette loi n’est pas la
casse du code du travail, notre modèle
social n’est pas remis en cause.» Après
le week-end, changement de ton. Le
communiqué publié lundi à l’issue de
la réunion de la commission exécu-
tive se révèle bien plus virulent.
Certes, la direction «souligne le travail
réalisé par la confédération depuis
trois mois […] qui se traduit par l’ob-
tention de certaines garanties et le blo-
cage de nombreuses dispositions».
Mais rapidement, elle dénonce
«nombre d’éléments [qui] constituent
aujourd’hui une régression sociale et
sont en tant que tels inacceptables».
Au point que, «dans les consultations
qui seront organisées, FO votera contre
[les ordonnances]». Et la direction
d’appeler à des échanges avec les
autres confédérations et à «examiner
toute initiative permettant de dévelop-
per les positions FO». Sans demander
à ses troupes, toutefois, de défiler
avec la CGT, qui a décidé de la date
«sans en parler aux autres», dénonce
lui aussi Yves Veyrier, du bureau
confédéral.
Séduction. Sauf que, sur le terrain,
les militants pourraient en décider
autrement. Selon Jacques Eliez, de la
CGT, au moins 30 unions départe-
mentales FO ont déjà rejoint locale-
ment les appels communs à manifes-
ter. D’après une source FO, ce sont
même 39 UD qui défileront, soit plus
du tiers des UD que compte l’orga-
nisation. Six fédérations profession-
nelles devraient faire de même, dont
les transports, l’équipement, l’éner-
gie, la chimie et l’éducation. «Oui,
nous descendrons dans la rue le 12
contre cette réforme qui devrait
conduire à ce qu’il y ait un code du tra-
vail par entreprise et par branche, et
cette journée n’est qu’un début», me-
nace Patrice Clos, responsable de la
↑ 32
fédération des transports. «Il faut un
rapport de force clair si on veut com-
battre ces ordonnances», abonde son
homologue de l’équipement, Jean
Hédon.
Avec la CGT, Solidaires, la FSU et une
partie de FO, c’est donc la moitié du
paysage syndical qui sera dans la rue
mardi, tandis que l’autre ne fera rien
pour défendre le projet d’ordon-
nances. Pas de quoi faire encore
trembler Macron, mais un signe que
l’opération séduction de cet été, lors
des concertations, n’a pas totalement
fonctionné. ■
par Luc Peillon
Tous droits réservés Libération 2017
bb9ef3548dc0660065c41830070cd1119468b661a7089fbcab430cb
Parution : Quotidienne
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Audience : 961 000 lect. (LNM) - © AudiPresse One 2016↑ 33
Jean-Luc Mélenchon et Philippe Martinez opèrent un geste derapprochement
mercredi 6 septembre 2017487 mots
POLITIQUE
Serait-ce le début d’une réconciliation ? Jean-Luc Mélenchon, le chef de file
de La France insoumise (LFI), et plusieurs de ses députés, doivent rencontrer
Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, mercredi 6 septembre à l’As-
semblée nationale. Au programme : l’articulation des deux journées de mobi-
lisation contre les ordonnances réformant le code du travail. Le 12 septembre
à l’appel de la CGT et de SUD ; le 23 septembre à l’initiative de LFI qui a mis en
place une « marche contre le coup d’Etat social ».
« On veut lui dire comment on voit les choses, que notre marche n’est pas en
contradiction avec la journée syndicale, glisse-t-on à la direction de LFI. Les deux
initiatives se complètent. On n’a jamais imaginé le 23 comme se substituant à la
journée de mobilisation syndicale. D’ailleurs, on sera tous présents le 12 et on ap-
pelle à y participer. »
Ce rendez-vous sera surtout utile pour retisser les liens entre MM. Mélenchon
et Martinez dont les relations sont plutôt fraîches depuis quelques mois. « Ils
ne se parlent plus », confirme un haut dirigeant syndical.
En 2012, celui qui était alors le candidat du Front de gauche à la présidentielle
avait pourtant été acclamé lors d’un rassemblement organisé par la centrale
et il n’était pas rare de voir des chasubles et drapeaux CGT dans les meetings
de l’ex-député européen. Changement de ton cinq ans plus tard où le syndicat
désormais dirigé par Philippe Martinez a semblé prendre ses distances.
« Signe positif »
L’annonce de la manifestation du 23, qui peut apparaître comme concurrente
de celle du 12 n’a rien arrangé. Le leader de la CGT s’est d’ailleurs clairement
démarqué de la « marche contre le coup d’Etat social » lors de sa conférence de
presse de rentrée. Comme le rappelle Fabrice Angeï, un dirigeant de la CGT,
« on a décidé de longue date une participation à la marche de la paix le 23 sep-
tembre ». « Après le 12, il y aura une nouvelle date dans la semaine qui suit, voire
une poursuite de la grève le 13 dans les secteurs les plus mobilisés », ajoute-t-il.
Les tensions politiques entre LFI et le PCF ne sont pas étrangères non plus à
ce revirement de la CGT qui reste influencée par le communisme. D’ailleurs,
place du Colonel-Fabien, on regarde le rendez-vous entre les deux hommes
d’un œil circonspect. « Je suis pour la discussion et les convergences les plus
larges », estime Olivier Dartigolles, porte-parole du PCF. Et l’élu palois pré-
vient les « insoumis » : « Si certains pensent représenter à eux seuls l’opposition,
ils accompagneront la politique gouvernementale. Il faut une plate-forme com-
mune, que l’ensemble des forces opposées à la politique d’Emmanuel Macron se
donnent rendez-vous pour discuter. »
LFI, elle, est plutôt satisfaite de ce « signe positif ». « Nous sommes très contents
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Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, à Matignon (Paris), le 31 août.
de le voir. Le lien n’a jamais été rompu, assure-t-on. Mais Martinez souffle le
chaud et le froid avec nous. Il se couvre de tous les côtés, il est un peu compliqué… »
Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, à Matignon (Paris), le 31 août.
CHARLES PLATIAU / REUTERS
Par Abel Mestre, Raphaëlle Besse Desmoulières
Tous droits réservés http://www.lemonde.fr 2017
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Parution : Quotidienne
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EUROPE ET INTERNATIONAL
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Salariés épiés : la justice européenne met le droit dans l’œil des patrons
L’arrêt rendu mardi par la Cour européenne des droits de l’homme crée un cadre législatifplus strict sur le contrôle par les employeurs des communications privées.
N° 11286mercredi 6 septembre 2017
Édition(s) : PrincipalePage 18
835 mots
EXPRESSO
U n employeur n’a pas tout
pouvoir sur les communica-
tions d’un salarié sur le lieu de travail
: c’est le sens de l’arrêt rendu mardi
par la Cour européenne des droits de
l’homme (CEDH). Une décision dont
les 47 Etats membres du Conseil de
l’Europe devront tenir compte, mais
qui ne bouleversera pas le droit fran-
çais.
De quoi s’agit-il ?
L’affaire est partie en 2007 d’un ci-
toyen roumain, Bogdan Mihai Barbu-
lescu. Cet ingénieur chargé des
ventes dans une entreprise privée a
été licencié pour avoir utilisé son
compte professionnel de messagerie
instantanée à des fins personnelles.
Lors d’un entretien, son employeur
lui a mis sous le nez un dossier
de 45 pages de messages privés
échangés depuis ce compte avec son
frère et sa fiancée, entre le 5 et
le 12 juillet 2007.
Barbulescu conteste d’abord son li-
cenciement devant la justice rou-
maine, en faisant valoir une atteinte
à son droit à la correspondance. En
vain : le tribunal de Bucarest, puis
la cour d’appel jugent que la sur-
veillance de ses communications
était le seul moyen pour l’employeur
de constater l’infraction au règle-
ment intérieur, qui interdit l’usage
personnel des ressources de l’entre-
prise (ordinateurs, téléphones…).
En décembre 2008, Barbulescu saisit
la CEDH : il met en avant une vio-
lation de la Convention européenne
des droits de l’homme, dont l’ar-
ticle 8 protège le droit au respect de
la vie privée et familiale, du domicile
et de la correspondance. Mais
en 2016, la Cour lui donne tort : elle
conclut que la justice roumaine a
«ménagé un juste équilibre» entre le
droit à la vie privée du salarié et «les
intérêts de son employeur». Barbules-
cu fait appel, et le cas est renvoyé de-
vant la Grande Chambre de la CEDH.
Cette fois, c’est la bonne : mardi, le
juge européen a tranché en sa faveur.
Que dit l’arrêt de la CEDH ?
La juridiction européenne a conclu
que la justice roumaine avait failli à
ses obligations de protection de la vie
privée. Certes, Barbulescu connais-
sait le règlement intérieur de l’entre-
prise, mais les tribunaux auraient dû
vérifier s’il avait été «averti par son
employeur de la possibilité que ses
communications soient surveillées». Ils
auraient aussi dû tenir compte «du
fait qu’il n’avait été informé ni de la
nature ni de l’étendue de cette sur-
veillance», et déterminer «si l’em-
ployeur aurait pu faire usage de me-
sures moins intrusives». Autrement
dit, le fameux «équilibre» entre les
droits du salarié et les intérêts de
l’employeur n’a pas été respecté, et il
y a bel et bien violation de l’article 8
de la Convention.
Pour autant, précise la Cour, sa dé-
cision «ne signifie pas que les em-
ployeurs ne peuvent en aucun cas sur-
veiller les communications de leurs em-
ployés».«La CEDH détermine une liste
de critères devant être pris en considé-
ration : information préalable des sa-
lariés, étendue de la surveillance opé-
rée, existence de motifs légitimes, etc.»,
résume Ambroise Marlange, avocat
au Conseil d’Etat et à la Cour de cas-
sation. Mais, point important, la juri-
diction européenne souligne que «les
instructions d’un employeur ne peuvent
pas réduire à néant l’exercice de la vie
privée sociale sur le lieu de travail», et
que «le respect de la vie privée et de
la confidentialité des communications
continue à s’imposer».
Ça change quoi ?
«Globalement, cet arrêt ne semble pas
remettre radicalement en cause le droit
français, qui paraît conforme aux exi-
gences posées par la Cour», poursuit
Ambroise Marlange. La question a
fait l’objet d’une jurisprudence co-
pieuse. En 2001, la chambre sociale
de la Cour de cassation a consacré le
droit «au respect de l’intimité de sa vie
privée» pour le salarié, en particulier
le secret des correspondances, «même
au temps et au lieu de travail».
Si les correspondances échangées via
des outils mis à disposition par l’em-
ployeur sont présumées d’ordre pro-
fessionnel, celles qui sont identifiées
comme privées (dans un en-tête de
mail, par exemple) ne sont pas libre-
ment accessibles à l’employeur, qui
ne peut les ouvrir qu’en présence du
salarié. Il existe des exceptions. «Si
le salarié était suspecté de vouloir por-
ter atteinte à l’entreprise, précise Am-
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broise Marlange, celle-ci peut saisir le
juge pour être autorisée à faire interve-
nir un huissier qui pourra constater le
contenu des messages.» Et pour qu’un
employeur puisse mettre en place un
contrôle automatisé de la messagerie
professionnelle, il doit informer les
salariés et notifier la Commission na-
tionale de l’informatique et des liber-
tés (Cnil). Mais «l’employeur ne peut
pas recevoir en copie automatique tous
les messages écrits ou reçus par ses
employés», note cette dernière dans
une de ses fiches pratiques.
L’arrêt de la CEDH «ne va pas entraî-
ner un bouleversement du droit fran-
çais, confirme le juriste en droit pu-
blic Nicolas Hervieu, spécialiste de la
CEDH. L’exigence d’information préa-
lable existe dans notre droit, de même
que l’exigence de justification et de
proportionnalité. [Mais le texte] sera
un point de référence du droit européen
sur le sujet : les juridictions nationales,
notamment françaises, devront tenir
compte, au cas par cas, du faisceau de
critères établis par la Cour.» De quoi
ouvrir des perspectives sur des cas
complexes comme le télétravail. Et
au-delà de la France, «certains Etats
vont devoir faire des efforts pour proté-
ger la vie numérique du salarié». ■
par Amaelle Guiton
Tous droits réservés Libération 2017
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