Page 1/11 - Hôtel La Pyramide | Relais & Châteaux … de France Philippe le Bel, il mit fin à...

11
10/12 PLACE DE LA BOURSE 75081 PARIS CEDEX 02 - 01 44 88 34 34 21/27 MARS 13 Hebdomadaire Paris OJD : 502108 Surface approx. (cm²) : 5213 N° de page : 1-11 Page 1/11 277455d15cb01401427c4eb4b707e54405479489112e38e VIENNOIS 1170175300508/XVR/OTO/2 Eléments de recherche : LE PAYS VIENNOIS, toutes citations

Transcript of Page 1/11 - Hôtel La Pyramide | Relais & Châteaux … de France Philippe le Bel, il mit fin à...

10/12 PLACE DE LA BOURSE75081 PARIS CEDEX 02 - 01 44 88 34 34

21/27 MARS 13Hebdomadaire Paris

OJD : 502108

Surface approx. (cm²) : 5213N° de page : 1-11

Page 1/11

277455d15cb01401427c4eb4b707e54405479489112e38eVIENNOIS1170175300508/XVR/OTO/2

Eléments de recherche : LE PAYS VIENNOIS, toutes citations

10/12 PLACE DE LA BOURSE75081 PARIS CEDEX 02 - 01 44 88 34 34

21/27 MARS 13Hebdomadaire Paris

OJD : 502108

Surface approx. (cm²) : 5213N° de page : 1-11

Page 2/11

277455d15cb01401427c4eb4b707e54405479489112e38eVIENNOIS1170175300508/XVR/OTO/2

Eléments de recherche : LE PAYS VIENNOIS, toutes citations

Vienne

m m I Kl i.*J I '4 ̂ B

Les riches heuresde VienneLes innombrables vestiges romains et médiévaux de la ville témoignent de son passéglorieux. Retour sur les périodes prospères de la cité rhodanienne

Vienne, pas question deremiser le passe. Il portelaville en gloire et conti-nue de s'exhumer depuis

qu'en 1755, I archéologue PierreSchneyder (1733-1814), venu deCologne, décide de s'y installer, mupar sa passion de l'Antique En 1772,alors qu'il dirige l'école de dessin, ilentreprend des fouilles et decout redes centaines de vestiges romainset médiévaux. Il est alors naturelle-ment nomme directeur du museed'Antiquités de la ville en 1802.«J'ai cree ce musee a mes frais, c'estma proprieté», écrit-il a l'un de sesélevés La richesse patrimonialemise au jour par Pierre Schneyderne cessera plus de passionner lesViennois. «Nous avons ete Romains

pendant six cents ans ! s'exclame-t-on a l'office du tourisme. Nos ves-tiges comptent parmi lesplus remar-quables de France. »

Ils comptent aussi parmi les plusdivers et spectaculaires. La ville atoujours écrit son histoire avec ungrand H « Vienne est une poupéerusse, elle se découvre depuis le neohthique jusqu'au XIXe siecle, soitdans les musées, soit dans les sous-sols, soit dans le bâti», expliqueVeronique Langlet-Marzloff direc-trice du Centre de restauration etd'études archéologiques munici-pales (Cream) (voirp. VIII). En chan-tier permanent, la cite rhodaniennen'a pas encore livre toutes sesrichesses. «Depuis la loi sur l'ar-cheologiepreventive de2001, la ville

entière est sous surveillance archéo-logique Chacun est susceptible detrouver des vestiges dans son jar-din », affirme Monique Zannettacci,archéologue municipale a Vienne

Au carrefour des Alpes et du Mas-sif central, sur une boucle peu pro-fonde d'un Rhône assagi a cetendroit, facilitant ainsi les comniunications vers la Mediterranee,Vienne a d'abord ete la capitale despuissants Allobroges Ces Celtesvenus de l'est au rv6 siecle avant J -Cs'étaient installes sur un vaste terriloire allant des rives du Leman ausud de Vienne. Ils sont envahis parles Romains en 121 avant J. C. Laville deviendra une fastueuse colo-nie romaine a\ant d'être «citesainte » a l'ère chrétienne Ne s'enor-

10/12 PLACE DE LA BOURSE75081 PARIS CEDEX 02 - 01 44 88 34 34

21/27 MARS 13Hebdomadaire Paris

OJD : 502108

Surface approx. (cm²) : 5213N° de page : 1-11

Page 3/11

277455d15cb01401427c4eb4b707e54405479489112e38eVIENNOIS1170175300508/XVR/OTO/2

Eléments de recherche : LE PAYS VIENNOIS, toutes citations

42 monumentsclassés.3,3 millionsd'euros ont étéinvestis sur 4 ansen 2O05 pour larestauration deVienne dans lecadre du PlanPatrimoine.4 millions d'euross'y sont ajoutésen 2010.20% de cessommes sontfinancés parle départementde l'Isère,40% par la Drac,20% par la ville et20% par la région.13% du budget defonctionnementde la ville(4O,8 millionsd'euros) estconsacré à la vieculturelle.L'association desAmis de Vienneregroupe 55Omembres etpossède plus d'unmillier de livressur Vienneet sa région.(Sources mairieet musees deVienne)

gueillit-on pas, ici, d'avoir donné auxcatholiques le pape Calixte II en1119? La ville ne bruisse-t-elle pasencore de l'extraordinaire concilehistorique de 1312 ? Convoqué par lepape Clément V sous la pression duroi de France Philippe le Bel, il mitfin à l'ordre des Templiers dans l'im-posante cathédrale Saint-Maurice.

Des Allobroges, peuple guerrier,Tite-Live disait: «Ite ne le cèdent, enpuissance, en renommée, à aucunenation de la Gaule.» Leur dyna-misme s'éprouve particulièrementdans le commerce. «A Vienne, ils semettent à extraire du minerai deplombqu'ils transforment en tuyauxet vendent; ils implantent un portcéréalier d'autant plus importantqu'en amont de la ville, le fleuve n'est

La cité romaine plus navigable, les bateaux doiventà son apogée, s'arrêter, explique André Trabet,ressuscitee par le président d'honneur de l'associationpaysagiste Etienne Vienne Historique (i). Plus tard, auRey, en 1860 F'siècle, les bateaux de Massilia y

déchargeront les huiles d'olives deGrèce et d'Italie, tout comme lescépages de syrah, qui fontaujourd'hui la renommée des côtes-rôties sur la rive droite du Rhône. »

L'annexion du territoire allobrogepar le proconsul romain QuintusFabius Maximus en 121 avant J.-C.donne lieu à des révoltes sanglantescontre les impôts infligés par Romependant environ soixante ans.Jusqu'à ce que, préparant sa guerredes Gaules (de 58 à Sl avant J.-C.),Jules César propose un marché auxAllobroges: allegement des taxes

contre neutralité pendant laconquête. L'élite accepte. A l'avenir,les Allobroges resteront toujoursfidèles à Rome. Ils refuseront de ral-lier Vercingétorix lors de la batailled'Alésia, en 52 avant J.-C. «Après laconquête, entremet 27 avant J.-C.,Vienne devient colonie latine. Lavillepeut frapper monnaie et les membresdes élites deviennent des citoyensromains deplein droit, ainsi que leurfamille, s'ils ont exercé une magistra-ture municipale», explique AndréPelletier (2), professeur émérited'histoire et d'archéologie romaineà l'université Lumière-Lyon 2.

Cette entente n'empêcherapas lesAllobroges de bouter hors de Vienneun grand nombre de vétéransromains au cours d'une rébellion, en44 avant J.-C., un mois apres l'assas-sinat de Jules César. L'expulsion deces Romains va signer la fin d'uneépoque. Emmenés par MunatiusPlancus, un ancien officier de César,ils s'installent au nord de Vienne etfondent Lugdunum en 43 avantJ.-C. (voirp. V). «lien découlera unerivalité coriace, mais Viennegardesasuprématie pendant un temps.Auguste, neveu de César, empereuren 27 avant J.-C., voit tout l'intérêtamneville comme Vienne, bien situéesur le Rhône et défendue par cinq col-lines», raconte le journaliste Phi-lippe Gonnet (3). L'empereur vamême entourer Vienne d'un rem-part de prestige de 7 kilomètres etorné de SO tours. «Ce mur d'apparatenglobe les lieux sacrés des Viennoispar-dessus les collines. Est-cepourlesvaloriser ou pour prouver la domina-tion romaine?» se demande Véro-nique Langby, guide-conférencière.

Pendant la Pax Romana, du Ier auIIe siècle après J.-C., Vienne est àson apogée. En 68, Tacite évoque« l'or des Viennois». La taille des édi-fices qui recouvrent alors la cité,forte de 30 DOO habitants, traduitson importance et son opulence. AuIer siècle, s'élèvent un temple dédiéd'abord à Rome, puis à Auguste etLivie (voirp. VI-VII), l'un des mieuxconserves d'Europe; un théâtre de12000 places, l'un des plus grandsde l'empire; un odéon pour 3000spectateurs, un vaste forum et uncirque de IS DOO places, dont il nereste que l'extrémité de l'obélisque,communément appelée «la •••

10/12 PLACE DE LA BOURSE75081 PARIS CEDEX 02 - 01 44 88 34 34

21/27 MARS 13Hebdomadaire Paris

OJD : 502108

Surface approx. (cm²) : 5213N° de page : 1-11

Page 4/11

277455d15cb01401427c4eb4b707e54405479489112e38eVIENNOIS1170175300508/XVR/OTO/2

Eléments de recherche : LE PAYS VIENNOIS, toutes citations

L'église Saint-Pierre, du ve siecle, abrite aujourd'hui le Musee archéologique

par l'empereur Claude pour avoirourdi un complot contre lui, Asiati-cus se coupe les veines dans sa bai-gnoire. Cet homme immensémentriche, beau-frère de Caligula, étaitpropriétaire des jardins de Lucullus,à Rome. En fait, c'est lui qui a été vic-time d'un complot. Furieuse qu'ilrefuse ses avances, Messaline, lafemme de Claude, a inventé cette his-toire de complot contre l'empereur...Elle guignait aussi les jardins deLucullus et s'est vengée. »

Au IIe siècle, le christianisme serépand dans toutes les classes de lasociété, même parmi les esclaves.«On leur promet une vie meilleuredans l'au-delà, ils veulent y croire»,explique Véronique Langby. Les pre-mières cruautés envers les chrétiensn'épargnent ni Vienne ni Lyon. SousMarc-Aurèle, en 177, le diacre Sanc-tus, responsable des chrétiens deVienne et la jeune esclave Blandinesont martyrisés à Lyon. A partir de

pyramide». Mais aussi degigantesques entrepôts impériauxoù s'entassent victuailles, poteries,verreries de Vienne et étoffes de linet de laine. Sur les deux rives duRhône, surgissent de somptueusesdemeures, des thermes fabuleuxdécorés de mosaïques et de marbrevenus d'Italie, d'Espagne, de Grèceou encore d'Afrique du Nord. Lescoteaux de Seyssuel se couvrent devignobles (voirp. XI). La cité com-merce avec la Méditerranée,l'Orient et l'Asie, d'où lui arrivent lescultes d'Isis, de Cybèle, de Zoroastreou de Mithra.

«Vienne rayonne alors dans lemonde, confirme l'historien AndréPelletier. Les Viennois accèdent auxpostes suprêmes. En 35, sous le règnede Tibère, Decimus Valerius Asiati-cus, issu d'une vieille famille d'Allo-broges, est le premier Gaulois à êtreélu consul et... à mourir à la romaine.En 47 après J.- C., condamné à mort

Les trésors du muséedes Beaux-ArtsSi l'épopée viennoise remonte aux Allobroges, les peuplades auparavantimplantées dans la région, depuis le néolithique et l'âge de bronze, ont laisséd'impressionnantes traces de leur passage. Témoins de cette protohistoire,des armes et des céramiques. Ces objets sont exposés au musée desBeaux-Arts et d'Archéologie de la ville. «Il est trop peu connu des Viennois,regrette la jeune conservatrice Elsa Gomez. Nous détenons aussi le dépôtallobroge de la colline Sainte-Blandine, exhumé en 195O. Il date du if siècleavant J.-C. et contient des chenets, des éléments de parure, des outilsagricoles, des fourchettes, des chaudrons et des grils, ainsi que des objetsdruidiques dont des fibules très travaillées. Il est rare qu'une villede 300OO habitants possède une collection de vestiges pareille.» CM.Place cfe Miremont, tél 04 74 85 50 42

Le théâtre antique progressivement dégage au xxe siecle

313, quand les empereurs Constan-tin et Licinius promulguent l'édit deMilan autorisant la liberté de culte,Vienne devient fervente catholique.

C'est dans le courant du iii6 siècleaprès J.-C. que la ville s'affaiblit. LesGermains commencent leurs raids,le commerce est moins actif, lapopulation s'exile à la campagne, laville ne compte plus que 10000habitants environ. En 465, alorsque les Romains cèdent leur supré-

L'ancienne malle aux Burgondes sans lutter,cathédrale les évêques mènent la frondeSaint-Maurice contre le roi Gondebaud, et gardent(xic-xvic siecle) vit leur pouvoir. Vienne la romainela dissolution devient Vienne la catholique,de l'ordre des Les pères fondateurs de la villeTempliers, en 1312 chrétienne, dont Mamert, l'un des

10/12 PLACE DE LA BOURSE75081 PARIS CEDEX 02 - 01 44 88 34 34

21/27 MARS 13Hebdomadaire Paris

OJD : 502108

Surface approx. (cm²) : 5213N° de page : 1-11

Page 5/11

277455d15cb01401427c4eb4b707e54405479489112e38eVIENNOIS1170175300508/XVR/OTO/2

Eléments de recherche : LE PAYS VIENNOIS, toutes citations

trois saints de glace, et Avit, l'insti-gateur du mariage entre Clotilde etClovis, roi franc converti en 496,sont les puissants évêques de la citéde 452 à 608. Quatre monastèresdominent Vienne, dont l'abbayeSaint-Pierre, devenue l'actuel muséelapidaire, et Saint-André-le-Haut,abbaye aux dames, toujours encours de fouilles. La spectaculairecathédrale Saint-Maurice seconstruit du XIe au XVIe siècle. AuXIIIe siècle, sous l'impulsion du trèsinfluent archevêque Jean de Sernin(de 1218 à 1266), Vienne accroîtencore son prestige ecclésiastique.Trente-trois centres religieux s'éri-gent, regroupant 1500 moines fran-ciscains, bénédictins, carmes et hos-pitaliers avec les antonins, puis auXVIIe siècle viennent les ursulines,les bernardines et les minimes.

Le pouvoir religieux est affaiblilorsque Charles VII annexe Vienneà la France en 1450. Si la Réformecalviniste ne divise pas laville, elle ya laissé son empreinte. En 1553, legrand théologien Michel Servet, amide l'evêque de Vienne Pierre Pal-mier, prêche contre Calvin. DepuisGenève, ce dernier le fait emprison-

ner pour hérésie par Mathieu Ory,grand inquisiteur général de la foipour le royaume de France. MichelServet s'évade et est condamné àmort par contumace le 17 juin 1553,à Vienne. Il sera retrouvé à Genèveet brûlé vif le 27 octobre 1553.

A partir de la Renaissance, Viennen'est plus qu'une petite ville. Lesrois de France favorisent Lyon et saflorissante industrie de la soie. En1540, François 1er donne à la ville lemonopole des soies grège, Vienneperd de sa superbe mais conserveson prestige historique.

En 1790, l'evêché est supprimé.Dans le même temps, un autrepilier de la puissance viennoiseapparaît, celui de la manufacturede la laine cardée. Petite productionlocale au XVIIe dans la vallée de laGère, elle prend de l'ampleur en1720 grâce au Lyonnais Charvet tan-dis que l'entreprise Blumensteinobtient une concession minière deplomb argentifère, de cuivre et dezinc dans la même vallée. «Viennea été la première ville industrielle duDauphiné avant Grenoble. Elledeviendra un important centremétallurgique avec un millier de

Lyon, la grande rivale?«Nous ne sommes plus les rivaux de Lyon. Et même, depuis 2O12, Viennefait partie du pôle métropolitain de Lyon. Drôle de clin d'oeil de l'histoirequi vient rappeler aux Lyonnais que la grande soeur est de retour», s'amuseAndré Trabet, président d'honneur de l'association Vienne Historique,tandis que Jacques Remiller, maire UMP de Vienne depuis 2001, confirme:«La rivalité s'est muée en respect mutuel. 45% des Viennois actifstravaillent à Lyon avec qui nous sommes en étroite collaboration,économique et culturelle.» Il conclut d'un bon mot en souriant: «Lyon,c'est la banlieue de Vienne!»On Ie voit, la hache de guerre est enterrée. Jadis, on la brandissait.Lugdunum se développe à partir de 43 avant J.-C. Entre 16 et 12 avant J.-C,elle devient capitale des Gaules et voit naître le futur empereur Claude,en 10 avant J.-C. «Vienne, quanta elle, devra attendre 280 après J.-C.,époque à laquelle Dioctétien réorganise l'empire, pour devenir enfinla capitale des sept provinces de la Gaule romaine du Sud, alors que Lyonassure sa suprématie sur les dix provinces du Nord», rappelle l'historienAndré Pelletier. Plus tard, les deux cités se toisent et chicanent à proposde conciles. A Lyon, où l'archevêque obtient le titre de primat des Gaules,le pape Innocent IV organise un concile œcuménique en 1245. Grégoire Xy préside le concile de 1274. Vienne, elle, n'obtiendra qu'en 1311 un concileœcuménique, mais c'est l'un des plus importants de l'histoire. Convoquépar Clément V et Philippe le Bel, il s'achèvera en 1312 par un coup detonnerre: l'ordre des Templiers est aboli. «Une anecdote illustre l'ancestralerivalité: le pape viennois Calixte ll supporte mal, en 1119, que l'archevêquede Lyon accède au titre de primat des Gaules. Il décide alors de nommercelui de Vienne primat des primats», souligne André Trabet. CM.

Au bordde la Gère, auxixe siecle, s'installele quartier industrieldevienne

mineurs, fondeurs, forgeurs en1848», explique l'historien GérardJolivet, spécialiste des mouve-ments ouvriers, qui précise qued'après l'écrivain viennois AiméImbert, une des premières logesmaçonniques française est créée àVienne en 1781.

Dans le courant du XIXe siècle,120 fabricants de draps s'installentle long de la Gère, la rivière qui four-nit leur force motrice aux machines.En 1872,26 000 habitants peuplentVienne, presque autant qu'àl'époque des Romains et qu'au-jourd'hui. Les guerres de 1870,1914-1918 et 1939-1945 nourrissent lescommandes d'uniformes pour lestroupes. Les affaires fleurissentjusqu'au krach boursier de 1929.«La concurrence s'accroît avec lesindustries de la chimie lyonnaises,qui mettent au point la soie artifi-

délie en 1930, raconte Gérard Joli-vet. Les faillites se multiplient. En1935, Hy avait encore 7200 ouvriersdans le textile, il n'en restait plus que750 en 1974. Le dernier tissage dis-paraît en 1987, la dernière filatureen 1994.» Mais Vienne se redresseavec son tourisme patrimonial etles cordages Béai qui, installés dansles anciens bâtiments de l'entre-prise Charnay-Seguin sur la Gere,sont les leaders mondiaux. Encoreune exception viennoise.COLETTE MAINGUY(1) « Raconte moi Vienne sainteet maudite », editions Aléas, 2005(2) «Vienne, Samt-Romam-en Galet environs », éditions Lyonnaises d'Artet d'Histoire, 2O12(3) « Le Pays viennois », éditionsDauphine Libére et Glénat, 2009

10/12 PLACE DE LA BOURSE75081 PARIS CEDEX 02 - 01 44 88 34 34

21/27 MARS 13Hebdomadaire Paris

OJD : 502108

Surface approx. (cm²) : 5213N° de page : 1-11

Page 6/11

277455d15cb01401427c4eb4b707e54405479489112e38eVIENNOIS1170175300508/XVR/OTO/2

Eléments de recherche : LE PAYS VIENNOIS, toutes citations

Mémoire de pierresLes monuments-phares de la ville n'ont pas encorelivré tous leurs secrets. Zoom sur les dernièresdécouvertes des archéologues et des historiens

Musée de Saint-Romain-en-Gal-VienneSitue sur I un des plus grands sites gallo-romains de FranceQui sait qu'a l'extrémité des grandioses thermes des lutteurs unhangar de tôle cache des vestiges paléochrétiens (n"-v* siècle)?«C'estpeut-être la première église cle Vienne, explique M'hammedBehel, conservateur du musée. Les conclusions des fouilles n'ontpas encore été publiées. Nous avons un dilemme: conserverl'église ou les thermes ? En fait, nous allons sans doute enterrerles quèlques vestiges de l'église. »

Le temple d'Auguste etLivieConstruit vers 20-10 av J-C sous Auguste et reprissous Claude vers 41 apr J C Classe par ProsperMerimee en 1845, c'est le mieux conserve d EuropePourquoi donc est-il date de deux époques? «Desdécouvertes de 2O11 montrent qu'il a brûlé, affirmeMonique Zannettacci, archéologue municipale. On voitdes traces d'incendie au sol et sur la partie médiane haute. Ce feu a détruit l'avant puisqueles chapiteaux arrière sont sculptes a la façon du règne d'Auguste (27 av. J.-C.-14 apr. J.-C.),et ceux dè l'avant datent de la fin du f siecle apres J.-C. tt Maïs les avis divergent, ii Unincendie ne change pas la structure, assure Benoit Helly, archéologue a la directionrégionale des affaires culturelles de Rhône-Alpes. Or, elle a changé. Les colonnes ontbougé de 5 centimètres vers /'extérieur. Je pense que Pavant du temple s'est écroulé sousle coup d'un tremblement de terre, sans doute entre 37 et 41 après J.-C. Le déplacementdes seuils de nombreuses maisons, sur lequel je travaille actuellement, et la reconstructionde "domus" dans les annees 45-5O renforcent cette hypothèse, tt

L'ancienne cathédraleSaint-MauriceConstruite du xf au xvf siecle sans doutea I emplacement de l'ancien evêchedu vic siecle«Les fouilles de sa façade nord,achevées en 2O12, montrent bienle chevauchement des époqueset le réemploi de certaines pierres

à travers les siècles», dit Monique Zannettacci. Ainsi, le linteau enmarbre d'un petit temple romain surmonte une porte dont le pilierdroit, bombardé pendant la Seconde Guerre mondiale, utiliseun pilastre romain. Par ailleurs, «peu de Viennois savent quedepuis octobre demier, apposée sur le pilier gauche à hauteurdu sanctuaire, une plaque commémore le célèbre concile deVienne (1311-1312) qui mit fin a l'ordre des Templiers», confieAndre Trabet, president d'honneur de Vienne Historique.

PONT DE LATTRE DE TASSIGNY

10/12 PLACE DE LA BOURSE75081 PARIS CEDEX 02 - 01 44 88 34 34

21/27 MARS 13Hebdomadaire Paris

OJD : 502108

Surface approx. (cm²) : 5213N° de page : 1-11

Page 7/11

277455d15cb01401427c4eb4b707e54405479489112e38eVIENNOIS1170175300508/XVR/OTO/2

Eléments de recherche : LE PAYS VIENNOIS, toutes citations

-^ Stade romainL'actuel cimetière dè Pipet est l'objetdè toutes les attentions. Il y a cinq ans,on y a retrouvé les vestiges d'un stadede 200 mètres. «Sans doute le seulconnu actuellement en Gaule. Dans unedè ses lettres de la fin du f siècle, Plinele Jeune parle des jeux du stade interditsà Vienne», confirme Benoît Helly.

THÉÂTREANTIQUE

Saint-André-le-HautEn juillet 2012, les archéologuesAnne Baud, Monique Zannettacciet les étudiants de Lyon 2 ont annonceque l'église abbatiale deSaint-André-le-Haut, abbaye de femmesfondée au début du vi* siècle, avait étéconstruite sur le temple romain de Mars,Deux aqueducs et les vestiges d'unecrypte ont également été mis au jour.

L'aqueduc «"«•*«•«C'est l'un des plus grands de Gaule.Il était situé sous la place Jouvenet. Hélas,on ne peut plus y accéder alors qu'il estspectaculaire. Grégoire de Tours raconteque la reine des Burgondes est entrée

dans Vienne par cetaqueduc en 500», dévoileBenoît Helly, qui décrit unconduit de deux mètres dehauteur, les graffitis qui l'ontrecouvert au xvm" siècle,et les bancs apportés parla population qui s'abritaitlà pendant la SecondeGuerre mondiale. L'aqueducse prolonge à l'air libre, surla route de Malissol,en allant vers Grenoble.

L'odéonll date dè la fmdu f siecle apr J-CLes archéologuesle pensaient uniqueen Gaule, avec celui

de Lyon maîs la ville de Valence en a découvertun lors dè travaux, en novembre 2012«Je l'ai dégagé et fouille de 1965 à 1980»,rappelle l'archéologue André Pelletier. Il se réjouitqu'une étude de sauvegarde de l'édifice ait étédécidée le 2O février 2013. «L'odéon témoignedu raffinement culturel passé de la ville», disentRenaud Junillon et Alain Bélier, les dynamiquesdirecteurs de Lucioles, l'une des librairies les plusrenommées de France. Ils se verraient bienorganiser des lectures là où déclamaientles poètes antiques.

Musée archéologique'tee Saint-Pierre

Ses origines remontent au V siecle Un egout romain de pluscie 4 metres de haut passe sous son collatéral nord«Avec tous ses trésors de pierre, c'est le musée lapidaire le plusextraordinaire de France.', s'exclame Philippe Gonnet, journaliste au"Dauphiné Libéré". Seize siècles s'y enchevêtrent depuis l'époqueromaine.» On sait peu qu'il conserve 27 sarcophages de pierregraves datant de 27 avant J.-C. au début du iv* siècle.

NICOLAS 23MBE JOSEPHINE IvTNET RAMBAUB/ALPACA'ANDIA DELMAPTY/ALPACA/ANDIA HENPvY LANDEAU MUSEE DE / EM-IE

10/12 PLACE DE LA BOURSE75081 PARIS CEDEX 02 - 01 44 88 34 34

21/27 MARS 13Hebdomadaire Paris

OJD : 502108

Surface approx. (cm²) : 5213N° de page : 1-11

Page 8/11

277455d15cb01401427c4eb4b707e54405479489112e38eVIENNOIS1170175300508/XVR/OTO/2

Eléments de recherche : LE PAYS VIENNOIS, toutes citations

SAVOIR-FAIRE

L'excellence viennoiseLe Centre de restauration et d'études archéologiques municipalet l'Atelier interdépartemental de restauration de mosaïques deSaint-Romain-en-Gal réparent avec maestria les vestiges du passé

Une des piècesdu Trésor d'argent,un ensembledatart du in0 siècleaprès J.-C.

EN CHIFFRES

34 piècesconstituent leTrésor d'argent440 m2 demosaïques del'antiquitéviennoise ont étérestaurés dansl'atelier depuissa création10OOO objetssont conservesdans les muséesde Vienne(sources museesde Vienne)

Les GrandsDauphins, duiie siecle apresJ.-C,trouves dansle Rhône en 1840et restauresa Vienne en 2005.

Un dialogue silencieux

A l'est de la ville, non loin du boulo-drome, dans une sorte de no man'sland, les ateliers du Centre de restau-ration et d'études archéologiquesmunicipal (Cream) sont une véri-table ruche... silencieuse. «Ici, nousdialoguons surtout avec des objetsmillénaires, même si nous échan-geons avec nos collègues à propos del'une ou l'autre des pièces que nousrestaurons», affirme VéroniqueLanglet-Marzloff, la responsable duprestigieux centre, l'un des premierscréés en France en 1962, par le cher-cheur Gabriel Chapotat.

C'est aussi l'un des plus réputéspour la grande expérience des scien-tifiques qui y œuvrent, les mêmesdepuis plus de trente ans. Spécialisédans les métaux, le verre et la céra-mique, le centre reçoit des com-mandes de la France entière et mêmede l'étranger. Dernièrement, c'est leSoudan qui a eu recours à ses servicespour des pièces provenant du sitearchéologique d'El-Hobagi. Derrièreleur loupe binoculaire, les six restau-rateurs manient roulettes, colle, scal-

pels, pincettes et petits burins à ultra-son avec une infinie précaution.Pièces de monnaie, sculptures debronze monumentales, fibules,débris de pots et d'amphores, coute-las ou plats d'argent, tous les objetsarrivent ici pris dans un magma deterre brute. «Nous ne savons pas ceque nousallons mettre au jour, confiela restauratrice Marylen Kappes,tenant à la main un morceau de verrebleuté. Nous faisons parfois de mer-veilleuses découvertes, comme cegobe-let tronconique du IVe siècle trouvé àVienne, où dansent avec grâce cinqpersonnages graves.» Les pièces dis-loquées sont bientôt identifiées etrestaurées, avant tout pour délivrerleur message historique : «Nous nesommes pas des réparateurs d'objets,on cherche à les comprendre, en rela-tion avec les archéologues», préciseVéronique Langlet-Marzloff.

L'un des temps forts du centre futcertainement la restauration desGrands Dauphins de bronze doré,trouvés dans le Rhône, à Vienne, en1840. Datés du IF siècle après J.-C.,

ils n'ont été restaurés qu'en 2005 :«C'est alors que nous avons pu mieuxles interpréter. On s'est aperçu qu'ilsétaient sans doute chevauchés parune statue d'Eros ou d'Amphitrite,qu'il reste à retrouver. C'est une autrehistoire, à poursuivre dans leRhône», raconte le restaurateurJean-Baptiste Latour.

Autre souvenir marquant, celui dela restauration du Trésor d'argent, unensemble de plats décorés, bassins,coupes et boîte à épices datant duIIP siècle après J.-C. Exhumé en!984de la place Camille-Jouffray, il estexposé au musée des Beaux-Arts etd'Archéologie. « J'ai eu le bonheur del'ouvrir, un choc émotionnel qui nes'oublie pas», s'exclame VéroniqueLanglet-Marzloff qui garde aussi unsouvenir vibrant du travail qu'elle aeffectue sur l'imposant tresor moné -taire de Villette-d'Anthon, décou-vert en 1992, à proximité de Vienne.Constitué de 9500 pièces romainesdu IIIe siècle, dont plus de la moitiéà l'effigie de Constance Chlore, lepère de l'empereur Constantin, ilétait enfermé dans une amphore decéramique. Cette matière est l'unedes spécialités initiales du Cream.«Nous avons à notre actif quelque2000 céramiques restaurées dont lamajorité, datée de toutes les époques,provient de Vienne et de Saint-Romain-en-Gal. Parfois, nos doigtsrencontrent des empreintes digitales,c'est très émouvant. Nous sommesalors en eon tact avec la personne quia fabriqué l'objet, explique JoëlleNevoret, l'une des restauratrices duCream, qui a aussi travaillé sur plusd'un millier d'objets en fer pour lefutur musée d'Alésia. En fait, notretravail est métaphysique. » e. M.

10/12 PLACE DE LA BOURSE75081 PARIS CEDEX 02 - 01 44 88 34 34

21/27 MARS 13Hebdomadaire Paris

OJD : 502108

Surface approx. (cm²) : 5213N° de page : 1-11

Page 9/11

277455d15cb01401427c4eb4b707e54405479489112e38eVIENNOIS1170175300508/XVR/OTO/2

Eléments de recherche : LE PAYS VIENNOIS, toutes citations

L'atelier-cathédrale«C'est une structure unique enFrance, et même en Europe, par sataille et les outils de pointe mis ànotre disposition. Nous évoluonsdans 1200 m2, que le petit milieu dèla restauration a baptisés la "cathé-drale". Il nous faut bien cet espacepour travailler sur les pièces monu-mentales que nous recevons deVienne, de Saint-Romain-en-Gal etau monde entier», s'enthousiasmeEvelyne Chantriaux, directrice del'Atelier interdépartemental de res-tauration de mosaïques. Créée en1980, cette entité est désormaisconnue internationalement: lescommandes parviennent du Liban,de Tunisie, du Maroc...

Le travail tient autant du terras-sier, du joaillier et de l'historien quedu mosaïste. Ici, les pièces à restau-rer sont des voûtes gigantesquescomme celles du caveau de Saint-Pothin, à Lyon, datant duXIXe siècle, mais aussi des sols duIIe siècle après J.-C., comme le Châ-timent de Lycurgue (chef-d'œuvreexposé au musée mitoyen), grandde 7,70 rn sur 5,25 rn et découvert en1900 à Sainte-Colombe. «Avec sonfond vert foncé, très rare, et sansaucune géométrie, c'est une pièceexceptionnelle», explique Evelyne

Chantriaux dont la grande fierté estd'avoir travaillé, avec quatre autresrestaurateurs, sur l'une des plusbelles mosaïques qui soit, celle del'église Saint-Christophe(vi6 siècle), à Qabr Hiram, aux envi-ron de Tyr. Elle vient d'intégrer letout nouvel espace dédié à l'Orientméditerranéen dans l'Empireromain au Louvre : «Sa restaura-tion a duré dix ans et a nécessité9000heures de travail pour unesurface de 120 m2. Nous l'avons res-tituée dans la configuration qu'elleprésentait au sol de l'église Saint-christophe, un travail colossal etmerveilleux», témoigne EvelyneChantriaux. D'autant plus mer-veilleux que la restauratrice a tisséun lien étroit avec l'œuvre qu'elleavait découverte lors d'un staged'études à Besançon en 1978 etqu'elle a revue dans les réservesNapoléon du Louvre, en 1983:«J'avais travaillé sur le revers de lanef centrale, sans me douter quej'aurai à restaurer les pavements destrois nefs et du chœur, trente ansplus tard!» dit-elle, son attentiondéjà portée vers les quelque SO mer-veilles qui attendent ses soins etceux de deux de ses collaborateurs.COLFTTEMAINGUY

La restaurationde la mosaiquede Qabr Hiram,aujourd'hui exposéeau Louvre,a nécessite dix ansde travail

TROIS QUESTIONS ÀJÉRÔME MIGAYROU

"L'histoire dèla ville se réécritsans cesse"Le directeur du développementculturel dè Vienne veut faire vivrele patrimoine de la villeLe Nouvel Observateur Quelle estla spécificité culturelle de Vienne?Ici, dès que l'on creuse, on tombesur un vestige romain ou médiéval,qui permet de nouvellesinterprétations du passé. L'histoirede la ville se réécrit sans cesse.Comment faire vivre ce patrimoinesans rester prisonnier du passé?Aujourd'hui, nous favorisons lesprojets artistiques qui permettentdes confrontations visuelles«passé-présent» faisantredécouvrir nos monuments. C'estce qui s'est passé, il y a trente-troisans, avec la création du festivalde jazz dans le théâtre antique. Lesmusiciens sont sous le choc quand,depuis la scène, ils voient le «mur»du public face à eux. D'une certainemanière, ce qui se fait de plusactuel comme scénographie ici,on le doit à l'héritage romain. Noussouhaitons multiplier ce typede choc, c'est le meilleur moyen dene pas nous enfermer dans le passé.Quelles manifestations relèveront,à l'avenir, de cette démarche?Lin centre d'art contemporainouvrira l'automne prochain dansl'ancienne halle des Bouchers, quidate du xvie siècle. Il sera inaugurépar la manifestation Columna 02,du 12 septembre 2013 au 5 janvier2014. La commissaire PetraBungert veillera à ce que lesœuvres soient aussi disperséesdans la ville. Leurs auteurs,de renommée internationale,seront entre autres le plasticienbelge Greet Billet, qui exposera surle mont Pipet, ou la franco-américaine Colombe Marcasiano,qui fera une installation au Muséearchéologique de Saint-Romain-en-Gal, tandis que des vidéastes,comme la française LéopoldineRoux, présenteront leurs oeuvresà la halle des Bouchers.Propos recueiffisparCOLETTEMAINGUY

10/12 PLACE DE LA BOURSE75081 PARIS CEDEX 02 - 01 44 88 34 34

21/27 MARS 13Hebdomadaire Paris

OJD : 502108

Surface approx. (cm²) : 5213N° de page : 1-11

Page 10/11

277455d15cb01401427c4eb4b707e54405479489112e38eVIENNOIS1170175300508/XVR/OTO/2

Eléments de recherche : LE PAYS VIENNOIS, toutes citations

TABLE DE PRESTIG

La légende étoiléeLa Pyramide conjugue son illustre passé au présent. Une bellehistoire écrite par les chefs Fernand Point et Patrick Henriroux

C'est l'une des institutions dela région. Les gastronomess'y pressent depuis...quatre-vingt-dix ans. Venu

de Saône-et-Loire, Auguste Point, filset petit-fils de cuisinière, inaugure lerestaurant La Pyramide en 1923. Ilmeurt un an plus tard, sans avoir eule temps d'en savourer le succès nais-sant. Son fils Fernand, 24 ans, luisuccède aux fourneaux et, lui,connaîtra la gloire. «En 1930, ilépouse Mado, qui s'était juré que Fer-nand deviendrait le plus grand cuisi-nier de France», raconte PatrickHenriroux, l'actuel chef de La Pyra-mide. Aussitôt dit, aussitôt fait. En1933, le guide Michelin crée la troi-sième étoile pour ce prodige des pia-nos, pourtant décrié par les maîtresqueux puristes, «parce qu'il s'est misen tête défaire de la nouvelle cuisineavant l'heure, à rebours des platsampoules et roboratifs de l'époque»,poursuit Patrick Henriroux.

Colosse de 1,96 mètre et pesantautour de 165 kg, Fernand Point a legoût de la transmission. Il va formerune célèbre lignée d'étoiles tels quePaul Bocuse, les frères Troisgros,Marc Haeberlin et Alain Chapel. Si,comme le rappelle Patrick Henri-roux, «les Point ont porté Vienne aufirmament de la gastronomie fran-çaise et réussi à attirer despersonna-

Le prodigeFernand Point(au centre, en blanc):c'est pour lui quele guide Michelin creela troisième etoileen 1933.

Htes aussi prestigieuses que LouisLumière, Colette, Ritu Hayworth,Clark Gable, Edouard Herriot ouPicasso, ils ont aussi su préserver lelien étroit qui les unissait à leurs pro-ducteurs locaux.» La mort de Fer-nand Point, en 1955, n'interrompt pasle bal des célébrités. Mado Point, quia repris le flambeau, maintiendra latroisième étoile jusqu'à sa mort, en1986. Fait unique dans les annales duguide Michelin, le restaurant auraconserve trois macarons pendantcinquante-trois ans d'affilée !

Un groupe immobilier parisienreprend l'affaire et ferme pour tra-vaux. La Pyramide rouvre en 1989avec, derrière les fourneaux, PatrickHenriroux, l'ancien chef de La Fermede Mougins, près de Cannes. Henri-

roux est un homme pressé. Ildécroche une première étoile dès1990. En 1992, en voici une deuxième.Et, en 1996, il devient, avec sonépouse Pascale, le nouveau proprié-taire. «Sz on m'avait dit que je rachète-rais Point, moi qui suis un autodi-dacte...», s'étonne encore celui quiest également vice-président deRelais & Châteaux et président del'Agora des Chefs, une associationgastronomique dont le but est de pro-mouvoir la qualité du terroir rhône-alpin. Les trompettes de la renom-mée résonnent à nouveau dans lemonde entier. L'affaire, exclusive-ment familiale, tourne rondementavec les deux enfants et le gendre.Elle s'est agrandie d'un «bistrot» atte-nant, le PH3, où pour 35 euros leclient a le choix entre trois entrées,trois plats et trois desserts.

Comme Fernand Point, le patronse fournit chez une cinquantaine deproducteurs locaux installés dans lesquatre départements voisins (i). Sil'exceptionnelle réputation de LaPyramide a convoqué les grands dece monde à l'époque des Point, elleattire également nos contemporainsqui apprécient l'élégance du lieu, labienveillance des Henriroux et leurdiscrétion. En témoigne le livre d'or,signé entre autres par les sculpteursCésar et Arman, le couturier Chris-tian Lacroix et toute la fine fleurinternationale de la politique, ducinéma et surtout du jazz. Depuis lacréation du festival Jazz à Vienne, ily a trente-trois ans, Miles Davis,Sonny Rollins mais aussi BB King,Eric Clapton ou James Brown ontdéfilé à La Pyramide. «L'été dernier,à la surprise de la clientèle et du per-sonnel, nous avons reçu le "docteurHouse". Je ne savais pas qu'il s'appe-lait Hugh Laurie, ni qu'il était un jazz-man accompli. Il est charmant, dis-cret, parle très bien français et necherche pas à capter l'attention. Ilpeut rester tout l'après-midi à lire sousun arbre», raconte volontiers BorisHenriroux, le fils de la maison, res-ponsable de la bonne marche de l'éta-blissement. La légende continue des'écrire. COLETTE MAINGUY14, boulevard Fernand-Point,tél.:04-74-53-01-96(i) Vienne, en Isère, est au carrefourdu Rhône, de la Drôme, de l'Ardècheet de l'Ain.

10/12 PLACE DE LA BOURSE75081 PARIS CEDEX 02 - 01 44 88 34 34

21/27 MARS 13Hebdomadaire Paris

OJD : 502108

Surface approx. (cm²) : 5213N° de page : 1-11

Page 11/11

277455d15cb01401427c4eb4b707e54405479489112e38eVIENNOIS1170175300508/XVR/OTO/2

Eléments de recherche : LE PAYS VIENNOIS, toutes citations

ŒNOLOGIE

Les vignes de BacchusTrois vignerons ont replanté l'historique vignoble romain.Les dessous d'une initiative originale

11 est dit que Vienne redeviendra«la Vineuse», comme le décla-mait le poète latin Martial (40-104après J.-C.), dans une ode à la

générosité des vignobles viennois deSeyssuel. Il y a quinze ans, dans unpari risqué, les vignerons YvesCuilleron, François Villard et PierreGaillard ont replanté sur les collinesd'argile et de schiste de la région duviognier, pour les blancs, et de lasyrah, pour les rouges, «sans doutele successeur naturel de l'antique

roir gallo-romain oublié, dont lescuvées se vendaient à Rome à prixd'or pour leur goût de poix inédit.«Les vignerons trafiquaient leursvins en y ajoutant de la poix pourfaire croire à des produits exception-nels et les vendre à des tarifs excessifs,raconte Michel Bouvier, historien dela vigne et du vin (i). Mais des étudesde l'Institut national de la rechercheagronomique ont prouvé qu'aucuncépage ne donne naturellement ungoût de poix. »« Oui, mais la poix ser-

cépage vitis allobrogica», avanceYves Cuilleron. Au sein de leursociété Les Vins de Vienne, ces viti-culteurs, déjà producteurs de côtes-rôties sur la rive droite du Rhône,ont remporté leur défi ! Les vignesviennoises ont retrouvé leur lustrebachique millénaire alors qu'ellesavaient totalement disparu.

Les noms des vins sont issus detextes de Pline l'Ancien (23-79 aprèsJ.-C.): c'est le Sotanum pour la cuvéeprestigieuse de rouge, l'Heluicumpour les rouges plus fruités et leTaburnum pour les blancs. Ils rap-pellent à eux seuls le prodigieux ter-

vait aussi à étanchéifier les "dolia",ces récipients utilisés pour la vinifi-cation et la conservation des vins,d'où leur goût», précise PierreGaillard. Pas question pourtant pourles viticulteurs d'aller jusqu'à refairedu vin à l'antique: «On a voulureplanter un vignoble historique,mais on vinifie comme aujourd'hui.Nos contemporains n'apprécieraientpas le goût des cuvées romaines oùl'on ajoutait toutes sortes d'herbes»,explique Yves Cuilleron.

A la fois frais et capiteux, les nou-veaux vins de Vienne (2) se taillentdéjà une belle réputation, comme

À Seyssuel,François Villard,Yves Cuilleron etPierre Gaillard (tfeg.a oU renouent avecles cuvées romaines.

dans l'Antiquité. Du Japon à l'Austra-lie, les 40000 bouteilles produiteschaque année s'apprécient sur toutesles tables gastronomiques. Citons,en France, la triple étoilée Aubergedu Pont de Collonges de Paul Bocuseet La Pyramide, le célèbre restaurantdeux étoiles de Patrick Henriroux,fleuron de l'art culinaire français àVienne (voir ci-contre).

Aujourd'hui, quatorze autresvignerons ont rejoint les fondateurs.Leur production s'étend sur unetrentaine d'hectares et, depuis 2011,ces passionnés s'emploient à fairereconnaître leurs récoltes par l'Ins-titut national de l'origine et de laqualité, ex-Institut national desappellations d'origine (Inao). «Notredossier les intéresse, mais ils doiventen référer aux instances del'appella-tion côtes- du-rhône dont nous dépen-dons», dit Yves Cuilleron, qui accep-terait aussi une appellationautonome, à l'instar des côtes-du-ventoux. Les cuvées seraientregroupées sous le nom de côtes-de-seyssuel. Pour les dix-sept vigneronsdes coteaux qui ont relance l'écono-mie locale, recevoir l'agrément del'Inao serait la réparation d'un oublide l'histoire. «Ce n'est pas pour desraisons de marketing que l'on sou-haite cette reconnaissance adminis-trative, mais bien parce que noussommes passionnés, poursuit YvesCuilleron. Et nous tenons à retrouvernotre ancienne notoriété. »

En attendant l'accord de l'Inao, larégion viennoise a obtenu le labeld'œnotourisme Vignobles & Décou-vertes en janvier 2013. «Ce labelrecouvre Seyssuel, les côtes-rôties etCondrieu, encore méconnus. Mainte-nant, nous espérons que nos caveauxde dégustation, nos chambres d'hôtechez les vignerons et les vestigesremarquables que nous faisons visiterinciteront les visiteurs à séjournerdans notre région», déclare PierreGaillard. Ce label montre en tout casqu'il fait bon vivre en pays viennois,comme du temps des Romains oùl'on répétait à l'envi : «Bonum vinumlaetiflcat corhominis», soit «le bonvin réjouit le cœur de l'homme. »COLETTEMAINGUY(1) Auteur de « Les vins enbiodynamie », éd. Jean-Paul Rocher,2010,221 p, 23 €.(2) www.vmsdevienne.com