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1 Avec le soutien financier de la Commission européenne, DG EMPL VS/2014/0338 Concilier compétitivité, qualité et sécurisation de l’emploi des travailleurs saisonniers de l’agriculture – une mesure d’attractivité - Projet de rapport des experts pour discussion à la conférence -

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Avec le soutien financier de la Commission européenne, DG EMPL

VS/2014/0338

Concilier compétitivité, qualité et sécurisation de l’emploi des

travailleurs saisonniers de l’agriculture – une mesure d’attractivité

- Projet de rapport des experts

pour discussion à la conférence -

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Préambule

Le travail saisonnier façonne le quotidien de la production agricole, au sens large. Il se

caractérise par l’exécution de tâches normalement appelées à se répéter chaque année, à

des dates à peu près fixes, en fonction du rythme des saisons (récolte, cueillette,…), ou, dans

le tourisme, des modes de vie collectifs. Cette variation d’activité doit être indépendante de

la volonté de l’employeur. Les salariés directement occupés à des tâches saisonnières

peuvent être recrutés en contrats à durée déterminée (CDD) prévoyant ou non un terme

précis. Sous certaines conditions, des contrats saisonniers successifs peuvent être conclus

avec le même salarié. De même, ils peuvent comporter une clause de reconduction, selon

les pays.

Entre la taille, le traitement, la récolte, les vendanges et le conditionnement, les activités

saisonnières sont nombreuses et variées. Elles présentent de mult iples attraits ou

réticences : un travail en plein air et la possibilité de diversifier son métier en passant

d’une exploitation à une autre au fil de la saison. L'emploi s'exerce le plus souvent en

équipe. Dans certains cas (vendanges, cueillette de fruits...), ce sont plusieurs dizaines de

saisonniers qui peuvent travailler en même temps sur la même exploitation. Mais il

arrive également de confier des tâches réalisées en solitaire comme par exemple la taille

des vignes. Les opérations à réaliser sont le plus souvent manuelles. Elles sont

étroitement liées à certains cycles saisonniers et limitées dans le temps (de l'ordre de

quelques semaines).

Mais cela, c’était …. avant …

Certes, ces éléments structurant le travail saisonnier sont toujours présents, mais les

motivations qui en conditionnent le recours semblent se multiplier au gré des contraintes

économiques et concurrentielles, de l’imagination de nouveaux acteurs en recherche de

profits, et de comportements déviants dignes d’un autre âge. Sait-on, par exemple, qu’en

1981, la Suisse a envisagé la suppression du statut de travailleur saisonnier1 en raison,

notamment, de sa précarité et de pratiques abusives (dans un contexte où ce statut

s’inscrivait, à sa création, dans une « politique migratoire globale visant à garantir la

1 Initiative « Etre solidaires », rejetée massivement en votation. http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F25738.php

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flexibilité nécessaire aux besoins de l’économie et à lutter contre la surpopulation

étrangère »).

De même, le travail saisonnier est souvent associé à la précarité et à la pauvreté qui en

découle.

L’enrichissement des textes législatifs nationaux et européens visent à assurer des droits à

ces travailleurs, mais certaines pratiques, minoritaires mais très visibles, donnent une image

qui ne sert ni les intérêts de ces travailleurs, ni celui des entreprises qui préfèrent la

normalité, et joue contre l’esprit de la Stratégie Européenne pour l’Emploi.

La question de fond aujourd’hui est celle d’un choix entre deux hypothèses :

Laisser une grande liberté d’agissement aux acteurs qui dégradent le fondement

même de la concurrence loyale, au risque de contaminer l’ensemble de la filière ?

Concourir à ce que la notion même du travail respectueux des principes et des

normes soit un facteur de développement ?

La transposition, dans les Etats membres, de la directive sur le travail saisonnier d’origine

extracommunautaire est, sans doute, l’occasion de redonner du sens commun à la seconde

hypothèse.

Le travail entamé par l’EFFAT, au travers ses recommandations exprimées dans le document

« les missions des syndicats agricoles lors de la transposition de la directive en droit

national » constitue un document de référence visant à redonner au dialogue social son sens

premier, d’une part, et, d’autre part, à procurer une méthode de travail à l’usage des

organisations syndicales nationales, pour l’essentiel, à un niveau très large.

Les enjeux sont importants, le contenu de ce rapport en témoigne. Aussi, ce document doit-

il faire l’objet d’un suivi et offrir la possibilité, pour une organisation syndicale, de disposer

d’un appui particulier en cas de difficultés dans la mise en œuvre de ces recommandations.

Cela étant, le contenu de l’étude démontre que d’autres actions, le plus souvent locales,

sont nécessaires pour corriger les dérives que les organisations nationales ont exprimées.

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C’est dans ce cadre que la dernière partie de notre rapport propose une série de

préconisations soumises à débat, de sorte à en arrêter les lignes d’un plan d’actions, pour la

dernière réunion du comité de pilotage du projet. Il s’agit ni plus, ni moins, que de concilier

compétitivité et sécurisation de l’emploi en misant sur un nouveau professionnalisme du

secteur…

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CONTENU PAGES

Avant-propos : le contexte du projet, ses objectifs 7

Chapitre I : le travail saisonnier en question 11

1 – Le travail saisonnier : de son utilité économique aux risques d’une précarisation accrue contraire aux intérêts économiques du secteur

13

A – Une nouvelle notion économique : la flexi-insécurité 13

B – Une directive à parfaire avec les organisations syndicales 16

C – Premières conclusions 19

2 – Le travail saisonnier : d’un choix de vie à des situations subies … 20

3 – La mobilité interne et internationale : une question essentielle 22

4 – Quelques situations emblématiques 24

Chapitre II – questionnaire, restitution et analyse des réponses 31

Chapitre III : préconisations pour un plan d’actions à trois dimensions 49

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Avant-propos – le contexte du projet, ses objectifs

a) Contexte

Nombre croissant de travailleurs saisonniers

Développement de pratiques illégales, dégradation des conditions de travail

Nouvelle directive (février 2014) pour les travailleurs saisonniers des pays tiers

Mobilité professionnelle = facteur de compétitivité

Droit inégal à la formation selon le pays ou l’origine du travailleur saisonnier

Suite du projet de 2008/2009

b) Objectifs poursuivis dans le projet

Dans un premier temps, il est nécessaire de mesurer concrètement le résultat du projet précédent (2008/2009) afin :

- De mettre en place de nouvelles mesures en relation avec une définition commune de ce qu’est, de manière harmonisée au niveau de l’UE, le travail saisonnier ;

- De mieux appréhender la nature et les conditions du détachement de travailleurs dans le cadre d’entreprises qui exercent une activité de prestations de services ;

Au-delà de cette première étape, 4 objectifs spécifiques sont visés :

1. Examiner les modalités de recrutement d’entreprises de prestations de services, la

durée des contrats, le respect de la réglementation relative au travail détaché, en

attachant un regard particulier sur la nouvelle directive « saisonnier » pour les pays

tiers en évitant les phénomènes de discrimination avec les salariés de l’UE (états

membres, pays candidats, EEE)

2. Examiner la durée des contrats par type d’activité (travailleurs nationaux et migrants

–notamment des pays tiers- séparément) pour tenter de parvenir à une définition

commune du travail saisonnier

3. Au sein de différents EM, enquêter auprès de salariés afin de connaître :

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a. Les différents emplois exercés durant une année, par secteur de production, afin de mieux cerner la possibilité de réfléchir au développement d’un contrat spécifique de type Contrat à Durée Indéterminée ;

b. Les difficultés rencontrées et/ou les questions relatives à l’exercice des droits à pension ;

c. La réalité des conditions de déroulement du contrat de travail (temps de travail, conditions de travail, d’hébergement,…).

d. Les conditions de mise en œuvre d’AGRIPASS, en premier lieu AGRIPASS Card présentée en décembre 2012, d’une part, mais aussi la version électronique, ainsi que les bénéfices pour les travailleurs et les employeurs

4. Au sein de différents EM, enquêter auprès des institutions (chambre d’agriculture,

organisation de travailleurs et d’employeurs), pour recenser les modalités existantes

qui convergent vers cette notion de contrat spécifique et leur conception juridique

c) Les conclusions du projet de 2008/2009

La précédente étude de 2008/2009 comportait une série de questions visant à mesurer des

réalités nationales sur les conditions de vie au travail et hors travail des travailleurs

saisonniers, nationaux et/ou migrants.

Le rapport s’était attaché à citer de bonnes et de moins bonnes pratiques, à les diffuser, de

sorte à encourager la pratique du dialogue social pour corriger des situations quelquefois

inacceptables. Toutefois, les exemples repris dans le rapport ne représentaient qu’un petit

nombre de situations, dans un ensemble beaucoup plus vaste qui nécessitait une étude

beaucoup plus vaste, et dont le CESE2 recommandait la réalisation.

L’idée d’une définition commune du travail saisonnier, reprise comme objectif dans le

précédent projet, a fait du chemin :

Il n’existe pas de définition du travail saisonnier dans l’ensemble des Etats

membres, et cette absence produit certains « vides » que seuls les partenaires

sociaux peuvent combler. D’autres Etats membres ont exprimé plus ou moins

explicitement le contenu d’un travail saisonnier. Le recensement de ces définitions

fait apparaître une grande diversité qui puise ses sources dans des différences

2 Comité Economique et Social Européen

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culturelles, entre autres, qui traduisent un besoin de compréhension mutuelle : c’est

dans ce cadre qu’a été proposée l’idée d’un glossaire qui doit permettre une

meilleure compréhension entre pays ;

Parallèlement, les évolutions législatives récentes (directive sur le travail

saisonnier extracommunautaires) expriment une définition suffisamment large pour

permettre une grande liberté, sans concertation des organisations syndicales. Cette

concertation doit cependant s’ouvrir dans l’intérêt des travailleurs concernés, d’une

part, mais, d’autre part, plus largement, dans l’intérêt d’une agriculture compétitive

au sens large (c'est-à-dire qui prend en compte la dimension sociale au sens de la SEE

2020) ;

Le secteur « agriculture » de l’EFFAT a publié un document important, au

lendemain de la publication de la directive susmentionnée, visant à organiser une

méthode de travail qui limite les dérives actuelles.

Cette définition du travail saisonnier – d’origine national, migrant extracommunautaire ou

non – doit, selon nous, inclure une reconnaissance du statut de travailleur saisonnier afin de

faciliter la transportabilité des droits sociaux afférents à l’exercice d’un emploi agricole (et

donc comprenant la formation). Certes, cette transportabilité suppose un examen

approfondi des situations nationales, mais un des enjeux de cette préconisation porte sur

l’épuisement prévisible du « réservoir » de candidats potentiels. Ne voit-on pas aujourd’hui

une tendance à un relatif tarissement de candidats communautaires pour des emplois dans

l’agriculture ? Cette reconnaissance de statut peut par ailleurs homogénéiser certaines

pratiques de formation et certificats qui les sanctionnent.

A ce stade, l’idée d’une charte européenne du travailleur saisonnier doit pouvoir exprimer

les attentes des différents contractants, les conditions de recours à cette forme de contrat

dite atypique, et rendre ainsi possible l’expression des organisations syndicales dans un

cadre qui rende possible la prise en compte des intérêts des travailleurs saisonniers –

quelque soient les origines de ces travailleurs – avec, comme objectif principal une

agriculture compétitive au sens le plus large. Certes, cet objectif suppose que l’on révise le

concept majoritaire de la compétitivité « prix » qui prédomine aujourd’hui. L’idée d’une

charte portant sur l’emploi saisonnier n’est pas nouvelle, à l’image de celles qui peuvent

exister dans certaines régions européennes (à ce sujet, nous suggérons l’exemple d’une

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charte élaborée en France, élaborée et signée par un ensemble très vaste de partenaires,

incluant également des secteurs liés à l’agriculture, disponible sur le site http://www.maine-

et-loire.fr/fileadmin/user_upload/internet/actions/economie). D’autres exemples sont

bienvenus pour enrichir les réflexions sur ce point.

Le projet de 2008/2009 visait également à mesurer d’autres aspects de la vie quotidienne

des travailleurs saisonniers, parmi lesquels les conditions d’hébergement. Sur ce point, nous

le verrons plus loin, de nouvelles initiatives sont apparues, depuis. Ces conditions

d’hébergement sont un des facteurs de compétitivité et d’attractivité du secteur.

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CHAPITRE I

LE TRAVAIL SAISONNIER EN QUESTION

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1 – LE TRAVAIL SAISONNIER : DE SON UTILITE ECONOMIQUE AUX RISQUES D’UNE

PRECARISATION ACCRUE CONTRAIRE AUX INTERETS ECONOMIQUES DU SECTEUR

A- Une nouvelle notion économique : la flexi-insécurité…

Le travail saisonnier est une donnée structurelle de l’activité dans l’agriculture : sur ce

principe, et sous réserve de son ampleur, chaque Etat membre peut être en accord.

Cela étant, ces dernières années, plusieurs phénomènes sont apparus :

Les travailleurs nationaux sont de moins en moins enclins à occuper des postes où la précarité est très développée ;

L’image du secteur est entachée –probablement exagérément- de pratiques qui lui confèrent un statut peu envié (travail difficile, rémunérations peu attractives, conditions de vie au travail très difficiles). En revanche, si cette perception est majoritaire, la réalité du secteur est relativement différente par les perspectives et les défis qu’il propose ;

La migration se développe afin de répondre à des demandes d’exploitants. Mais cette migration fait émerger plusieurs problèmes nouveaux :

o Les candidats sont nombreux, jouissant, souvent, d’un niveau d’étude supérieur à l’emploi qu’ils vont occuper ;

o Parallèlement, de nouveaux acteurs jouent le rôle d’intermédiaires entre l’offre d’emplois et la demande, dans des conditions peu respectueuses des droits des salariés ;

o Les offres d’emplois ne peuvent pas toujours être satisfaites car certains métiers évoluent et les compétences des travailleurs migrants ne correspondent pas toujours aux besoins des exploitants ;

o Les pratiques d’accueil sont très diverses au sein des Etats membres, exacerbant une concurrence pouvant devenir déloyale.

Le travail illégal s’amplifie ;

Le périmètre des activités saisonnières s’élargit dans des proportions déraisonnables

Provocant une orientation très nette vers un noyau dur d’emplois permanents de plus en plus évident, et un développement d’une flexi-sécurité non débattue ;

Les travailleurs saisonniers migrants jouissent, souvent, dans la pratique, de droits différents des travailleurs nationaux (formation, salaires, droits sociaux, …) ;

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Les compétences acquises par les travailleurs saisonniers migrants, à l’occasion de leur contrat de travail dans un pays d’accueil, sont peu mises en valeur lors de leur retour au pays ;

La Commission européenne a adopté une directive qui va dans un sens peu favorable aux conditions d’accueil et de travail des travailleurs saisonniers migrants extracommunautaires. Nous y revenons plus loin.

Le marché de l’emploi saisonnier connait donc plusieurs difficultés d’ordre :

Structurel : la nature même du travail agricole induit, souvent, des tensions de toutes

natures. La grande variabilité au long de l’année de la quantité de main d’œuvre nécessaire

et les pics importants qu’elle entraîne sont inévitables : c’est la raison d’être du travail

saisonnier. Dans ce contexte, se sont développés, ces dernières années, de nouveaux types

d’entreprises, appelées « agences » qui ne sont en fait que des entreprises de « location de

main d’œuvre », souvent étrangères, utilisant les lacunes législatives nationales.

Économique : les pressions sur les produits agricoles pèsent lourdement sur les

producteurs. La course à la productivité est poussée, sans pour autant permettre aux

producteurs d’attirer les saisonniers par un salaire plus attrayant. La mécanisation trouve

assez rapidement ses limites, et ne peut donc pas remplacer la main d’œuvre dans les

champs, par exemple. En revanche, il existe des possibilités de réduire au maximum la

pénibilité physique du travail saisonnier, dans l’espoir de le rendre moins répulsif. Les

innovations technologiques sont riches, et concernent les espèces (faire pousser à hauteur

de bras, par exemple), le développement de cultures diverses (des plus rapides aux plus

tardives), entrainant ainsi une importance stratégique dans la gestion de la pénurie de main

d’œuvre. Les efforts d’entretien influent également sur la qualité du travail. La propreté des

parcelles évite la gêne dans la progression, la façon de tailler un arbre peut en rendre les

fruits plus accessibles. Le développement de la réflexion autour de l’ergonomie et sa

transposition concrète sur les exploitations bénéficie aux producteurs : elle participe à la

fidélisation de la main d’œuvre, et en augmente la productivité.

Démographique, et un tarissement des sources traditionnelles de main d’œuvre

(famille de l’exploitant, voisinage, gens du voyage, vieillissement des sources traditionnelles

de main d’œuvre étrangère). A ce facteur, s’ajoute des « fuites » vers d’autres secteurs

(étudiants plus orientés vers des stages proches de leurs études, passage du secteur agricole

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vers un autre secteur, en raison du confort du nouveau poste de travail, meilleure

rémunération, horaire régulier). La main d’œuvre formée par le secteur agricole est

appréciée et recherchée par divers secteurs (industrie, agro-alimentaire, bâtiment,

hôtellerie) pour sa performance et sa résistance. C’est un atout du secteur agricole qui n’est

pas mis en avant : il peut servir de tremplin pour rebondir ensuite sur une autre activité.

Psychologique : le secteur agricole n’attire pas. Le travail de la terre est souvent

déprécié, jugé « sale, pénible, ne payant pas ». Il est trop souvent perçu comme l’ultime

solution quand toute autre alternative a échoué. La société, dans son ensemble, à

commencer par le système éducatif et l’orientation professionnelle, participe de cette image

dévalorisée du travail agricole. Cette dépréciation de l’image du travail agricole n’affecte pas

uniquement l’emploi saisonnier, mais également l’emploi permanent. La nature même du

travail agricole (cycle des saisons, produits fragiles et périssables) dicte en grande partie les

conditions de travail dans le secteur, et en particulier, celles des saisonniers. Ces conditions

de travail portent sur :

- L’imprévisibilité qui complexifie l’organisation du travail, et favorisant un

comportement qui vise à ce qu’un travailleur saisonnier fasse un maximum d’heures

de travail pour amasser un maximum d’argent ;

- La mobilité : mobilité dans les postes de travail (polyvalence) – mobilité

géographie – mobilité d’employeur (accepter de changer souvent d’employeur)

En outre la question des rémunérations est sensible. D’abord, parce que les salaires sont souvent plus faibles dans l’agriculture que dans d’autres secteurs. Ensuite, le mode de rémunération préféré est souvent le paiement à l’heure de travail, laissant une grande marge de manœuvre au saisonnier pour choisir librement son temps de travail et sa rémunération.

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B- Une directive à parfaire avec les organisations syndicales

La directive relative aux travailleurs saisonniers en provenance de pays tiers est un nouvel instrument législatif de la politique commune de l'UE en matière de migration légale. Elle a le mérite de tenter d’organiser le travail saisonnier en provenance de travailleurs migrants, mais son contenu, pour le secteur agricole, souffre de manques et d’inégalités qui nécessitent aujourd’hui qu’un relais soit pris entre les partenaires sociaux, tant à l’échelle européenne qu’à l’échelle de chaque Etat Membre. Il n’est pas utile, dans ce rapport, de présenter l’ensemble de cette directive, mais d’en préciser différents points, au regard des travaux d’enquêtes qui ont été menés lors de la réalisation de l’étude. Certes, les situations décrites par les travailleurs migrants saisonniers (extracommunautaires notamment) ne sont pas représentatives d’une généralité dans les comportements des entreprises, mais ils nous ont semblé suffisamment significatifs pour être cités. Nous y reviendrons plus loin.

La directive relative aux travailleurs saisonniers d’origine extracommunautaire a été adoptée par le Parlement Européen, le 24/02/2014. Elle fixe « les conditions d’entrée et de séjour ainsi que les droits des ressortissants de pays tiers qui viennent exercer un travail saisonnier dans un pays membre de l’Union Européenne (UE). Il s'agit donc de travailleurs saisonniers qui ont leur résidence principale en dehors de l’UE, mais qui résident temporairement et de façon légale sur le territoire des Etats membres de l’UE afin d'exécuter du travail saisonnier ». Le texte concerne 25 Etats membres, Royaume-Uni, Danemark et Irlande n’ayant pas participé à sa négociation (en conformité avec un protocole annexé au Traité Européen).

L'objectif de cette directive consiste à assurer aux travailleurs saisonniers des conditions de travail et des circonstances de vie qui soient décentes. Elle tend à renforcer la lutte contre l'exploitation sociale et économique des travailleurs3. Les Etats membres fixent un nombre maximal de travailleurs saisonniers autorisés. Ils établissent également, éventuellement en concertation avec les partenaires sociaux, une liste de secteurs au sein desquels le travail saisonnier est admis. Cette liste peut entre autres concerner des activités dans les secteurs agricoles, horticoles ou touristiques. A ce titre, l’EFFAT a publié une position et élaboré des conclusions qui vont dans le sens d’un renforcement de la protection des droits des travailleurs saisonniers extracommunautaires. A la suite, le secteur agricole a publié un document important visant, notamment, à définir une méthode de travail efficiente dès l’entrée en vigueur de cette directive au sein des Etats Membres concernés. 3 Les Etats membres doivent fixer une période maximale de séjour des travailleurs saisonniers qui ne peut être

inférieure à cinq mois et supérieure à neuf mois par période de référence de douze mois. Cette fixation d’une durée maximale de séjour vise à garantir le caractère saisonnier du travail effectué et tend à éviter que des séjours temporaires ne deviennent permanents

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Il est nécessaire, pour le travailleur saisonnier, de disposer d’un contrat de travail ou d’une offre de travail obligatoire dans lequel les éléments suivants ont été convenus : le lieu et la nature du travail, la durée, les rémunérations, le nombre d'heures de travail par semaine/mois, les éventuels congés payés, les autres conditions de travail utiles et - si cela est déjà possible - la date d'effet. Cet aspect de la directive est fondamental : il existe actuellement nombre de cas où ces différents points ne sont pas respectés (Cf. enquêtes). Par ailleurs, l’employeur doit également démontrer que les travailleurs saisonniers sont logés dans des circonstances qui garantissent un niveau de vie convenable (chaque modification de logement doit être mentionnée à l'autorité compétente). En outre, le travailleur devra apporter une preuve de ressources suffisantes et une preuve de souscription à une assurance médicale. L’interprétation effective des critères précités est laissée à la libre appréciation des Etats membres. Les travailleurs saisonniers originaires de pays tiers doivent pouvoir bénéficier des mêmes droits que les citoyens européens du pays de l’UE concerné. Concrètement, cela signifie qu’ils doivent bénéficier des mêmes conditions d'emploi et de travail, pouvoir adhérer à un syndicat, recevoir un accès à la sécurité sociale ou à diverses formations. Les employeurs qui ne respectent pas leurs obligations peuvent se voir sanctionner et devront, en outre, indemniser les travailleurs lésés. Par ailleurs, l'employeur peut se voir interdire de faire appel à nouveau à des travailleurs saisonniers. Ces différents points de la directive sont autant de sujets sur lesquels le rôle des organisations syndicales nationales est essentiel, en harmonie avec les orientations et préconisations présentées sur le document « les missions des syndicats agricoles lors de la transposition de la directive en droit national4 ». Remarque importante : la directive prévoit de nouvelles obligations pour les Etats membres sans que la question des moyens budgétaires soit abordée : cette question devra être discutée lors des discussions dans les EM.

Cela dit, le rôle des organisations syndicales nationales n’est pas facilité du fait de l’absence ou de manque de précisions sur la définition du travail saisonnier :

Certains ont opté pour un cadre légal inscrit dans le code du travail ;

D’autres se réfèrent à des usages ou adaptent le contenu de leur réglementation selon la réalité du secteur ;

D’autres, encore, le considèrent comme une forme de travail temporaire.

4 Juin 2014.

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Le plus souvent, les enquêtes précisent qu’il s’agit cependant d’un travail normal, mais, en l’absence d’une définition précise de la durée des travaux, de leur durée minimale, il est souvent assorti d’une très grande souplesse, voire d’abus.

La directive relative aux travailleurs saisonniers extracommunautaires, au travers son article 3, propose une définition « ouverte » : il s’agit d’une « activité soumise au rythme des saisons, en lien avec une certaine époque de l’année présentant une situation récurrente ou une suite d’évènements récurrents liés aux conditions saisonnières pendant lesquels les besoins de main d’œuvre sont nettement supérieurs à ceux qui sont nécessaires dans le cadre des activités courantes ».

Cette définition a fait réagir l’Association Européenne pour la Défense des Droits de l‘Homme (AEDH)5 qui considère que cette directive est la moins protectrice des droits des salariés, sur l’ensemble des textes qui forment le volet « immigration du travail ». l’AEDH regrette que cette directive considère les travailleurs saisonniers migrants comme « simple variable d’ajustement des besoins économiques de l’UE », et met l’accent sur de nombreux aspects qui restent encore très flous. Selon elle, dans la majorité des cas, le rôle des intermédiaires (souvent cités dans des cas difficiles) sera déterminant pour l’établissement d’un contrat de travail, avec un risque d’accroître un trafic de main d’œuvre sans que des sanctions fortes soient prévues contre de telles pratiques. Elle souligne le risque de davantage de précarité et les conséquences du manque de précisions quant à la prise en charge des frais de voyage, de couverture en matière d’assurance maladie, de prestations sociales et de chômage.

5 Communiqué de presse 06/02/2014

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C- Premières conclusions

Il ne fait guère de doute que l’influence des organisations syndicales doit jouer pleinement

son rôle lors de la transposition de cette directive en droit national. De plus, cette directive

de portée générale, propose des règles du jeu qui doivent être adaptées pour le secteur de

l’agriculture.

L’AEDH souligne le risque de dérives graves qui peuvent permettre le développement de

situations particulièrement dévastatrices au plan humain, consécutivement à l’évolution de

la « mobilité circulaire de main d’œuvre » (accroissement de la mobilité des migrants sans

qu’il y ait nécessairement sédentarisation). A ce sujet, nous vous renvoyons vers une étude

réalisée par le FRA « European Union Agency For Fundamental rights » de juin 20156 qui met

en évidence certaines pratiques, en particulier au sein de l’Union Européenne, et émet des

conclusions dont les partenaires sociaux peuvent utilement s’emparer.

Dans cet esprit, le dialogue social, au plan national, doit pouvoir s’appuyer sur les

recommandations proposées dans le document de l’EFFAT7 publié en juin 2014 et faire valoir

les orientations et plans d’actions qui seront arrêtés à l’issue de la conférence de juillet

2015.

Dans un contexte où les enjeux du secteur sont multiples, et quand bien même la directive

permet d’ouvrir « un robinet sans fin » en matière d’opportunités de recrutements, il nous

paraît essentiel qu’une stratégie européenne, déclinée et adaptée au niveau des Etats

membres, soit mise en œuvre, par les partenaires sociaux, pour enrichir le contenu de la

directive 2014/36/UE du 26/02/2014, et combler ses nombreuses lacunes.

6 Disponible sur site http://fra.europa.eu/en/publication/2015/severe-labour-exploitation - version

anglaise uniquement – nom de l’étude : Severe labour exploitation: workers moving within or into the

European Union - States’ obligations and victims’ rights

7 « Les missions des syndicats agricoles lors de la transposition de la directive en droit national »

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2 – LE TRAVAIL SAISONNIER : D’UN CHOIX DE VIE A DES SITUATIONS SUBIES …

Les ouvriers agricoles sont les oubliés des recherches académiques. Dans les années 1960/1980, peu de travaux leur ont été consacrés, alors que le monde rural faisait, lui, l’objet de nombreuses études économiques, sociologiques, politiques et culturelles. Le travail saisonnier, dont la conception est apparue graduellement dans plusieurs pays d’Europe, a souvent été associé à des choix de vie (« faire des saisons, c’est leur métier » disait-on encore il y a plusieurs années à l’occasion de la venue de travailleurs migrants, souvent issus du pourtour méditerranéen, pour une durée de 6 à 8 mois. On peut qualifier ce travailleur saisonnier « d’historique »). Les changements structurels que connait le secteur, la course à la productivité, l’organisation de la filière, la mondialisation de l’agriculture ont façonné d’autres modes d’organisation dans lesquels la flexibilité (mobilité géographique et professionnelle, capacité d’adaptation, variabilité des contrats de travail, …) devient un facteur essentiel de la compétitivité.

En 2010, la Commission européenne a cofinancé un projet réalisé par « working lives » -

Research Institute – portant sur le travail précaire et les droits sociaux8, sur 12 Etas membres

de l’UE : Allemagne, Bulgarie, France, Espagne, Grèce, Irlande, Italie, Lettonie, Pays-Bas,

Pologne, Suède, Royaume-Uni.

Dans sa synthèse, le groupe d’experts associe précarité et absence de droits sociaux,

situation présente dans le secteur agricole : les personnes ayant un emploi précaire sont

davantage susceptibles d‘être privées de droits sociaux, et donc d’avoir accès à un logement

décent, aux soins médicaux, aux retraites et pensions et à l’éducation, et dans le même

temps, cette exclusion des droits sociaux pousse les gens vers le travail précaire. « La

précarité du travail entraîne donc dans d’autres situations qui enferment les individus dans

des existences précaires. Le travail précaire expose aussi les gens au manque de protection

sociale adaptée pendant la vieillesse » (texte tiré de la synthèse).

Cette étude a été réalisée dans un contexte d’incertitude croissante, consécutivement à la

crise économique persistante. L’emploi, en Europe, est, en 2012, plus précaire qu’en 2007,

et la longueur de cette crise pèsera encore à long terme pour les travailleurs ayant subi cette

situation, au moment de faire valoir leurs droits à leur retraite. Ce commentaire appelle une

remarque : le développement de la précarité, sous l’effet de la crise ou d’opportunités

8 Study on precarious work and social rights – publiée en 2012 et disponible sur le lien

file:///C:/Users/UTILISATEUR/Downloads/Study_Precarious_work_executive_summary_FR.pdf

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recherchées par les entreprises marque à la fois des difficultés persistantes quant à une

reprise économique durable, et à la fois d’autres difficultés à long terme sur la gestion des

pensions …

L’accroissement du travail à durée déterminée et à temps partiel (subi) ont été deux facteurs

de développement de la précarité observée dans cette étude. Cela dit, d’autres facteurs se

sont fortement développés :

La fausse activité professionnelle non salariée, ou emplois indépendants fictifs ;

Le travail officieux (ou travail au noir) ;

Le travail occasionnel, parmi lequel le travail saisonnier.

Autrement dit, autant de solutions contraires à l’esprit de la stratégie Europe 2020 qui

s’appuie sur un niveau d’emplois croissant, et de meilleure qualité.

Si le développement du travail circulaire procure nombre d’opportunités pour les

entreprises, et, en principe, pour les travailleurs extracommunautaires, cela est-il compatible

avec la SEE 2020 dont le succès permettrait au citoyen européen d’adhérer davantage au

concept d’une Union Européenne forte de valeurs collectives ? Dans quelle mesure l’Europe

n’est-elle pas en train de créer une sous-classe de travailleurs temporaires qui se remplacent

dans une rotation permanente ?

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3 – LA MOBILITE INTERNE ET INTERNATIONALE : UNE QUESTION ESSENTIELLE

Le phénomène migratoire est d’ampleur mondiale9 et constitue désormais une question internationale majeure. Il toucherait un être humain sur 7, si l’on additionne les 740 millions de migrants internes aux 214 millions de migrants internationaux comptabilisés par les Nations Unies.

Si les migrations sont le plus souvent associées aux déplacements des ressortissants des pays les plus pauvres vers les pays riches, la réalité est plus complexe. A l’échelle mondiale :

Un tiers des migrants se déplace des pays en développement (sud) vers les pays développés (nord) ;

Un tiers, du sud vers le sud ;

Et le dernier tiers du nord vers le nord.

Les raisons économiques n’en sont pas les seules causes. La migration témoigne de la mobilité grandissante des personnes et de la densification des réseaux transnationaux économiques, culturels, matrimoniaux et religieux. La plupart des régions du monde sont concernées, soit par le départ, soit par l’accueil, soit par le transit des migrants ; certains pays l’étant par les deux, voire les trois à la fois. De nouvelles tendances s’observent et constituent des éléments importants pour la réflexion sur les enjeux des migrations :

La migration circulaire, qui accroît la mobilité des migrants mais pas nécessairement leur sédentarisation, se développe ;

Les migrations qualifiées et très qualifiées sont devenues une composante familière des migrations dans les années 2000. A l’exode des cerveaux (« brain drain ») s’ajoute la migration de qualifiés dans les professions médicales et les services de santé vers les pays riches et vieillissants (« care drain ») ;

Les migrations sont de plus en plus féminisées. Les femmes représentent désormais 49% des 214 millions de migrants du monde.

Le vieillissement de la population et la faible natalité en Europe et au Japon accroissent leur dépendance à l’égard des travailleurs issus des autres régions du monde. Selon la division des Nations Unies pour la population, pour maintenir le rapport de dépendance

9 http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/politique-etrangere-de-la-france/gouvernance-1053/mobilite-migration-

et/article/ - texte public.

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(rapport entre le nombre d’inactifs pour un actif) à son niveau actuel, une immigration 2 à 4 fois supérieure à celle observée aujourd’hui serait nécessaire. Dans certains secteurs d’activités, les besoins de main d’œuvre se font d’ores et déjà ressentir, telles les nouvelles technologies, l’enseignement et la santé ou encore l’agriculture, l’hôtellerie et le bâtiment et les travaux publics. L’Afrique subsaharienne, dernière région du monde à accomplir sa transition démographique, devrait enregistrer une forte croissance démographique avec une multiplication par près de 10 de sa population entre 1950 (180 millions d’habitants) et 2050 (plus de 1,7 milliards selon les projections des Nations Unies).

La communauté internationale s’est jusqu’à présent particulièrement mobilisée autour de deux domaines en termes d’impacts des migrations sur le développement : l’exode des compétences et les transferts d’argent effectués par les migrants.

La nécessité d’optimiser les impacts positifs et de minimiser les impacts négatifs des migrations sur le développement fait l’objet d’un consensus international. Le dialogue de haut niveau (DHN) des Nations Unies pour les migrations internationales de 2006 s’est ainsi conclu sur la nécessité d’instaurer un dialogue permanent entre Etats d’origine et d’accueil des migrants sur les migrations et le développement. C’est dans cet esprit qu’a été lancé le Forum mondial sur la migration et le développement. Les migrants peuvent contribuer de deux manières au développement de leur pays d’origine. D’une part, ils transfèrent une partie de leur revenu, ressource tant pour les ménages bénéficiaires que pour les Etats d’origine. Ces transferts (400 milliards de dollars en 2012 selon la Banque Mondiale contre 6 milliards en 1970) représentent plus de trois fois les budgets de l’aide publique au développement. D’autre part, les migrants transfèrent des ressources immatérielles, telles leurs compétences (intellectuelles, techniques ou relationnelles) et sur un plan plus large des normes (comme l’égalité des genres), des valeurs civiques (respect du cadre collectif). Les migrants ont également la capacité d’œuvrer au sein du pays d’accueil en apportant une vitalité économique et sociale en s’insérant dans des dynamiques collectives.

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4 – QUELQUES SITUATIONS EMBLEMATIQUES

4.1 - ARY Macédoine : un accord de mars 2014 encadre l’envoi de travailleurs saisonniers

macédoniens au Monténégro

Chaque été, des milliers de travailleurs venus de tous les Balkans se dirigent vers le Monténégro pour y trouver un emploi saisonnier. Plusieurs secteurs embauchent, (principalement la construction et l’hôtellerie/restauration). Les agences pour l’emploi monténégrines et macédoniennes ont signé un accord pour mieux encadrer ces embauches10.

En 2013, deux tiers d’entre des saisonniers embauchés au Monténégro étaient des étrangers originaires de la région. Selon Podgorica, le travail saisonnier ne motive pas les chômeurs monténégrins malgré les campagnes menées par l’agence nationale pour l’emploi, car il n’est pas considéré comme une solution permanente. La plupart des travailleurs étrangers recrutés chaque année sont des Serbes et des Bosniaques, mais on trouve également des Macédoniens, des Kosovars, des Bulgares et Roumains. En raison de nouvelles règles administratives, la plupart d’entre eux travaillent au noir. Jusqu’en 2009, les travailleurs des pays voisins pouvaient être embauchés avec une simple carte d’identité, mais les employeurs ont désormais l’obligation de les déclarer et doivent payer environ 300 euros pour cette procédure.

Le mémorandum qui engage Skopje et Podgorica matérialise un registre exact des travailleurs macédoniens embauchés au Monténégro et inversement, et donnera des informations sur les offres d’emploi ainsi que sur les dispositions légales des deux pays.

4.2 - Le cadre légal actuel pour les ressortissants extracommunautaires aux Pays-Bas

Pour embaucher un ressortissant hors union économique européenne, l’employeur doit prouver qu’il n’est pas parvenu à recruter un employé néerlandais ou un ressortissant de l’Union économique européenne pour ce travail, et aussi prouver qu’il a fait les démarches nécessaires pour trouver cet employé11. Après cela, un permis de travail peut être délivré par les autorités nationales pour une période maximum d’un an. Il est donc très difficile pour l’employeur d’employer légalement un ressortissant hors Union Économique Européenne car les délais administratifs sont très longs. C’était cependant le cas avant pour les

10

Source : le Courrier des Balkans – www.courrierdesbalkans.fr 11

Texte issu d’une publication de « Europe, nos contributions », qui milite pour un réseau de défense de l’agriculture paysanne et des travailleurs migrants saisonniers

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travailleurs Polonais (jusqu’en 2007) Bulgares et Roumains (jusqu’au 1er janvier 2014), mais maintenant ils n’ont plus besoin de permis de travail pour être embauché aux Pays-Bas. Il reste cependant nécessaire pour les Croates. En outre, le contrat de travail saisonnier ne peut dépasser plus de 14 semaines, soit 3 mois et demi, pour les ressortissants hors Union européenne.

Néanmoins, si la personne prend le statut d’ « auto-entrepreneur », elle peut travailler sur le lieu de son permis de séjour.

Les spécificités dans l’agriculture : Il existe deux types de contrat saisonnier :

Contrat correspondant à 8 semaines de travail maximum

Contrat saisonnier jusqu’à 6 mois

Les conditions normales font référence à 38h de travail par semaine pour un temps complet. Dans ce type de contrat, les employeurs ne payent pas de cotisations sociales (assurances maladie, vieillesse, accidents du travail). En ce qui concerne les heures supplémentaires, les conditions dépendent des accords collectifs de chaque branche du secteur agricole. Mais dans la réalité, ceci n’est pas respecté, de même que les contrats saisonniers excèdent les 8 semaines : les employeurs embauchent par exemple de manière successive les employés avec des contrats de 6/8 semaines, en utilisant une autre entreprise qui en fait appartient ou constitue le même groupe

Il correspond en quelque sorte à un CDD12 où cette fois les employeurs sont tenus de payer les cotisations sociales. Encore une fois, le paiement des heures supplémentaires dépend des négociations collectives de chaque branche. La durée maximum de travail par semaine est de 60 h. De même, la plus part du temps, les migrants travaillent plus et ne sont pas payés en conséquence.

Il est à ajouter que si l’employeur souhaite reconduire le contrat de travail de son ouvrier, il est alors obligé de lui offrir l’équivalent d’un contrat à durée déterminée. Cependant, l’employeur a le droit d’offrir de nouveau un contrat saisonnier de 6 mois si l’ouvrier retourne dans son pays pour une période de deux semaines

Le cas des agences de travail temporaire :

L’employé doit être informé à l’avance et par écrit des conditions et lieux de travail.

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CDD : Contrat à Durée Déterminée

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Les conditions légales sont déterminées par les accords collectifs négociés pour la branche (CAO) des entreprises de travail temporaire. Dans le cas d’un emploi dans le secteur agricole, ce sont les négociations collectives de la branche qui s’appliquent. Aux Pays-Bas, 50% du travail migrant dans l’agriculture est fournis par les agences de travail temporaire.

Le logement :

Si l’employeur fournit un logement à ces ouvriers saisonniers, il est autorisé à retenir au maximum 20% du salaire minimum à plein temps (pour la location, l’eau et l’énergie, et 10% pour l’assurance santé.

En termes de logement, les employeurs néerlandais sont responsables de la fourniture d’un logement dit « adéquat » à leurs ouvriers migrants, les municipalités ont alors en charge les contrôles. Cependant, ceux-ci concernent surtout les conditions de sécurité des logements, et moins leur qualité. Si l’employeur est une agence de travail temporaire qui joue le rôle de sous-traitant du travail pour les agriculteurs, les règles sont les mêmes.

Cela n’entrave néanmoins pas les dérives, comme le relate notamment un exemple dans la région de Limburg, au sud du pays, où des travailleurs Polonais vivaient à 6 dans une caravane délabrée, pour 50 € par personne et par semaine environ, soit 300 € par semaine et 2.000 € par mois pour l’employeur. Sur le papier, les conditions étaient pourtant respectées.

Les pratiques en vogue pour réduire les coûts sur le dos des travailleurs migrants « bon marché »

Dans le cadre de l’emploi intérimaire mais aussi pour certains agriculteurs, le moyen d’avoir une main d’œuvre peu chère consiste finalement à récupérer par divers moyens, l’argent versé pour leur salaire. Certains employeurs proposent des services payants aux travailleurs agricoles à des conditions tarifaires particulièrement abusives, voire parfois extrêmes : « Par exemple on leur propose de la nourriture pour 60 euros par semaine, mais ce service correspond en réalité à un frigo avec du pain … c’est plus ou moins la même chose avec les cours de néerlandais, qui leur apprennent juste des notions de bases comme comment dire bonjour, merci, au revoir … ». En outre, les travailleurs migrants ne peuvent souvent pas « échapper » à ces services, ce qui est surtout vrai pour l’accès à la nourriture : les journées de travail interminable ne leur laisse pas l’opportunité de se rendre dans un supermarché durant les heures d’ouvertures. Ils sont donc contraints d’avoir recours aux services hors de prix des employeurs, ce qui renforce leur vulnérabilité vis-à-vis de ces derniers.

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Une manipulation plus ou moins « légale » également utilisée par les employeurs, du moins qui permet de dissimuler un travail sous-payé, est de recruter le personnel manutentionnaire sous le statut de « self-employed » (sorte de statut d’auto-entrepreneur) : ce statut permet légalement à ces personnes « self-employed » de ne pas se soumettre aux conventions collectives (CAO), ni au salaire minimum, et ainsi offrir une force de travail peu coûteuse. Néanmoins, ce statut n’autorise pas l’employé à travailler pour une seule personne, pour un seul contrat, ce qui encourage donc ces travailleurs à cumuler les contrats. Mais les journées de travail interminables ne permettent pas réellement aux travailleurs agricoles de multiplier simultanément les contrats, c’est pourquoi les contrats « self-employed » de migrants dans l’agriculture apparaissent immédiatement suspicieux pour les syndicats de travailleurs.

Une autre possibilité, moins avantageuse mais s’inscrivant cette fois plus dans la légalité, consiste à avoir recours à une entreprise sous-traitante étrangère. Celle-ci est alors chargée de réaliser les travaux demandés avec une force de travail dite « détachée », et payée en fonction du niveau de vie du pays d’origine des travailleurs. Ces derniers sont néanmoins indemnisés pour leur détachement. De plus, le détachement est bien souvent administrativement simple. Par exemple, dans le cas d’un sous-traitant Polonais qui voudrait détacher des ouvriers (agricoles ou non), il lui suffit d’obtenir moyennant une contrepartie financière auprès de l’Etat Polonais, une sorte de déclaration de détachement qui doit être présentée à l’organisme d’assurance sociale néerlandais pour valider le détachement des travailleurs. Ceci sert aussi à attester théoriquement du fait que les ouvriers sont assurés en Pologne et que l’entreprise paye les cotisations sociales patronales dans ce pays. Les candidats au détachement ne manquent pas parce que ce mécanisme présente des avantages : il leur permet d’avoir théoriquement accès au revenu minimum néerlandais (ce qui est exigé par la loi néerlandaise pour tout travail sur son territoire, même dans un tel cas). Mais ce recours présente surtout de nombreux avantages pour les employeurs. En effet, d’après la responsable de la fondation Srada, il permet à l’entreprise-employeur de se soumettre uniquement au payement des taxes et cotisations sociales dans le pays d’enregistrement, donc pour un niveau de salaire généralement plus faible. En outre, les avantages du côté employeur ne s’arrêtent pas là, car en effet, aucun contrôle de la validité de ces certifications n’est réalisé côté néerlandais, et leur obtention est facilitée par la rémunération qu’elle procure à l’Etat Polonais. Enfin, les taxes et cotisations patronales ne s’appliquent que sur la rémunération de base, et non sur l’indemnisation de détachement qui permet à l’ouvrier Polonais d’atteindre le revenu minimum légal aux Pays-Bas.

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4.3 - Italie : des situations scandaleuses dignes d’un autre temps

Le cas de l’Italie n’est pas une exception en Europe, mais sa présentation est liée au fait qu’une organisation syndicale (FLAI-CGIL) développe une stratégie nécessitant d’importants moyens pour lutter contre des situations dangereuses pour un nombre important de travailleurs migrants, qu’ils soient d’origine intracommunautaire ou extracommunautaire. Nous vous invitons à prendre connaissance de l’étude récente menée par la FRA – European Union Agency for Fundamental Rights – « Severe labour exploitation: workers moving within or into the European Union States’ obligations and victims’ rights », disponible sur le site de cette institution.

Le contexte national et sectoriel :

Chaque année, au cœur du système, se développe le marché «des bras», l’industrie déviante de la main-d’œuvre. Des milliers de migrants traversent les campagnes du sud de l’Italie au rythme des produits de saison pour être embauchés comme travailleurs saisonniers : ils récoltent les tomates en été, font les vendanges à l’automne, l’hiver ce sont les agrumes. La main d’œuvre vient principalement du Maghreb, de l’Afrique subsaharienne et de l’Europe de l’Est : davantage clandestine qu’en règle…

Les ouvriers sont contraints d’accepter des conditions de travail épouvantables : logements de fortune, salaires au-dessous des standards minimaux et la tyrannie d’un système : le « caporalato ». Figure historique des campagnes du Mezzogiorno, le caporale, un contremaître agricole, organise et contrôle la main-d’œuvre, sur la base des besoins des producteurs, tirant ses profits de la médiation13.

En août 2011, un groupe de braccianti étrangers refuse cette logique de «guerre entre pauvres». Ils entament une grève pour dénoncer leurs conditions de travail, pour demander l’attention et l’intervention des institutions, des forces politiques et sociales, pour revendiquer le droit au travail et à un traitement digne.

Tout commence le samedi 30 juillet 2011 quand le caporale leur demande une surcharge de travail, sans rémunération supplémentaire. Spontanément, 40 saisonniers refusent de continuer la récolte et abandonnent les champs. A la masseria Boncuri à Nardò, ils s’organisent et exposent leurs revendications : la régularisation des contrats de travail, des

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Sources : reportage du journal « La Tribune » (France), et rencontre avec des travailleurs saisonniers agricoles – juin 2015.

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augmentations de salaire, la création d’un centre pour l’emploi, la mise en place de structures dignes pour l’accueil et le logement, des contrôles des autorités sur les champs, le droit à conserver leurs documents d’identité souvent «confisqués», la création d’un rapport direct avec les propriétaires et donc la disparition du caporale.

Le jour suivant, la protestation continue et presque personne ne travaille. Ils souhaitent avant tout une rencontre avec le préfet, les syndicats et les entreprises, mais ils font aussi appel au gouvernement pour une mesure d’urgence destinée à introduire des sanctions pénales contre les médiateurs des bras. Ils communiquent à travers un blog et reçoivent des menaces de mort. Les institutions n’apportent aucune réponse concrète mais seulement des promesses aléatoires, tandis que le pouvoir des médiateurs demeure sans obstacles. La lutte des « braccianti » poursuit 13 jours, et la principale revendication reste toujours la demande d’une mesure d’urgence contre le caporalato.

La société civile les accompagne dans cette lutte : avant, les saisonniers dormaient dans des abris de fortune, mais depuis deux ans, la structure de l’ancienne ferme de Boncuri est un lieu d’accueil et de rencontre, qui leur a permis de se connaître, de prendre conscience de leurs conditions mais aussi de leur force, et de s’unir pour faire front ensemble contre l’injustice érigée en système.

Cet évènement constitue le point de départ d’une réflexion de fond de la Confédération Générale du Travail qui a proposé un texte de loi pour faire de «l’intermédiation illicite de main- d’œuvre à des fins d’exploitation» (définition technique du caporalato) un crime passible de sanction pénale. Depuis, les choses ont évolué, sans que les comportements des entreprises soient devenus exemplaires.

Les rencontres avec les travailleurs migrants saisonniers :

Environ 25 saisonniers venant du Cameroun, du Sénégal et de la Roumanie étaient présents.

Ils ont exposés tous leurs problèmes et difficultés de tous ordres et expliqué quelles sont

leurs conditions de travail, du non paiement des salaires de l’hébergement scandaleux et

tout ceci peut s’assimiler à de l’esclavage moderne.

Nous ne reprendrons pas ici le contenu de chacune des interventions, mais nous tenons à

formuler les remarques suivantes :

Ces comportements sont à travers l’Europe, mais lorsque l’on entend les victimes,

l’effroi prend une tout autre dimension ;

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Le principe de ces rencontres était prévu dans le cadre de ce projet, mais plusieurs

difficultés opérationnelles ont empêché leur réalisation dans plusieurs cas ;

Pour autant, pour mesurer avec une totale pertinence, les réalités vécues par ces

travailleurs, ceux-ci doivent pouvoir s’exprimer face à des interlocuteurs qu’ils jugent

comme « vecteur potentiel de résolution des problèmes ». Certes, le traitement des

difficultés particulières exprimées lors de ces rencontres relèvent des institutions

nationales, mais leur compréhension et leur démonstration sont de nature à

argumenter un débat européen qui vise à présenter un cadre plus exigeant en

matière de normalisation des comportements, en vue de parfaire les outils dont les

partenaires sociaux peuvent s’emparer.

Enfin, ces exemples illustrent les recommandations exprimées dans le document « les

missions des syndicats agricoles lors de la transposition de la directive en droit

national » publié par l’EFFAT en juin 2014.

De même, ces exemples illustrent également le rôle que peuvent jouer les

organisations syndicales nationales en matière de défense des intérêts des

travailleurs saisonniers, en particulier migrants.

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CHAPITRE II

QUESTIONNAIRE –

RESTITUTION ET ANALYSE DES REPONSES

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Préambule

Les questionnaires traités dans ce rapport reprennent la situation perçue par 18

organisations de 13 pays :

Albanie – Allemagne – ARY Macédoine – Autriche – Bulgarie – Espagne – France – Finlande –

Islande – Italie – Slovénie – Suède.

Le questionnaire proposait 11 thèmes :

1 – Définition du travail saisonnier; 2 – Les conventions collectives; 3 – Les contrats de travail; 4 – origines et nombre de travailleurs saisonniers; 5 - les conditions sociales applicables; 6 – les travailleurs saisonniers, les syndicats, leur implication dans la vie collective et les conditions de séjour; 7 – les coopérations entre organisations syndicales; 8 – les coopérations avec les services publics; 9 – les coopérations avec des organismes privés; 10 – des exemples de « bonnes pratiques »; 11 – des pistes d’amélioration

1– Définition du travail saisonnier

Tous les pays d’Europe (Etats membres et/ou pays candidats) n’ont pas donné de définition précise au travail saisonnier. Certains ont opté pour un cadre légal inscrit dans le code du travail, d’autres se réfèrent à des usages ou adaptent le contenu de leur réglementation selon la réalité du secteur. D’autres, encore, le considèrent comme une forme de travail temporaire.

PAYS/ORGAN OUI NON PAYS/ORGAN OUI NON ARYM AGROSIN X DANEMARK/3F NC ALLEM/IGBAU X FIN/PUULIITTO X AUTR/PROGE NC ISLANDE/SGS NC BULGARIE/FNSZ NC Italie/CONFEDER NC BULG/PODKREP X Italie/FLAI CGIL NC Espagne/CCOO NC SLOVENIE/KZI X Espagne/FITAG NC SUEDE/KOMMU X France/CFTC ALB/SPPBBSH France/FO X ALB/FSPBUPASH

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Lorsque la colonne « non » est marquée d’une croix, cela ne signifie pas qu’il y ait absence de définition. Dans ce cas, celle-ci peut être inexistante, inscrite dans d’autres textes (ex : France, dans le Code de la Sécurité sociale), ou provient d’usages.

De manière plus ou moins formelle, le travail saisonnier, c’est aussi :

Un travail « normal », qui revêt une forme temporaire;

Il est souvent associé à certains travaux définis;

Sans qu’il existe de définition précise de la durée des travaux, ni même de durée minimale, ce qui suggère une très grande souplesse, voire des abus;

Limité dans le temps, dont la durée peut-être très variable d’un pays à l’autre (en raison des productions notamment), sauf dans 4 pays où cette limite n’existe pas;

En revanche, s’il existe une durée maximale, elle est liée à la nature de la production (exemple : vendange) ou des travaux. Bien souvent, cette durée maximale est calquée sur celle d’un emploi à durée déterminée

Globalement, lorsqu’aucune définition n’existe, ou lorsque celle-ci apparaît floue, les organisations souhaitent un cadre légal précis. A l’échelle de l’UE, l’absence d’une définition européenne claire représente un obstacle.

Les organisations syndicales considèrent, dans leur très grande majorité, que le travail saisonnier est une forme de travail temporaire…

PAYS/ORGAN OUI NON PAYS/ORGAN OUI NON ARYM AGROSIN X DANEMARK/3F X ALLEM/IGBAU NA FIN/PUULIITTO X AUTR/PROGE X ISLANDE/SGS X BULGARIE/FNSZ X Italie/CONFEDER X BULG/PODKREP X Italie/FLAI CGIL X Espagne/CCOO X SLOVENIE/KZI X Espagne/FITAG x SUEDE/KOMMU X France/CFTC x ALB/SPPBBSH X France/FO x ALB/FSPBUPASH X

Indépendamment des expressions identitaires, le travail saisonnier est considéré comme un travail normal, et, le plus souvent, il est associé à certains travaux définis :

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PAYS/ORGAN OUI NON PAYS/ORGAN OUI NON ARYM AGROSIN X DANEMARK/3F X ALLEM/IGBAU NA FIN/PUULIITTO X AUTR/PROGE X ISLANDE/SGS X BULGARIE/FNSZ X Italie/CONFEDER X BULG/PODKREP X Italie/FLAI CGIL X Espagne/CCOO X SLOVENIE/KZI X Espagne/FITAG x SUEDE/KOMMU X France/CFTC x ALB/SPPBBSH X France/FO x ALB/FSPBUPASH X

Note : certaines réponses ont été transmises en relation avec un point de vue. C’est la raison pour laquelle, dans un même pays par exemple, des organisations syndicales ont produit des réponses contraires.

Par nature, le travail saisonnier est aussi une activité limitée dans le temps, dont la durée peut-être variable selon les pays, la nature des travaux. Toutefois, Cette limite de temps n’existerait pas dans 4 des pays interrogés. Cela provient sans doute d’une interprétation liée aux usages et/ou à la possibilité de cumuler différentes activités saisonnières dans le cadre d’un contrat de travail initié par un groupement d’employeurs par exemple. Signe d’une grande souplesse poussée à l’extrême semble-t-il, le plus souvent il n’existe pas de définition de la durée de travaux associée au statut de travailleur saisonnier. Ce « flou » peut suggérer des pratiques très souples, voire abusives dans certains cas. De même, la majorité des Etats Membres ne prévoit aucune définition de la durée minimale des travaux saisonniers. Certes, l’exercice est probablement difficile, mais au regard de la question précédente, ce manque de définition contribue au « flou » que le statut de travailleur saisonnier subit.

Lorsqu’une définition de la durée maximale des travaux saisonniers existe, elle est liée à la nature des travaux. Par exemple, en France, un contrat durant la période des vendanges, le contrat est limité à un mois, mais c’est une exception. En Allemagne, la définition utilisée est la même que celle de l’emploi à durée déterminée. En Autriche, un maximum de 10 mois/an est possible. En Slovénie, le contrat ne peut dépasser un mois.

2 – Les conventions collectives

Le questionnaire recense peu d’accords (ou règles) spéciaux relatifs aux conditions salariales : seuls 6 pays sont concernés. Parmi les cas cités : Allemagne, où les règles de la négociation intègre le concept des travailleurs à durée indéterminée, France, avec la convention collective spécifique au champagne, Suède qui prévoit des règlements spécifiques pour les travailleurs saisonniers, notamment quant à la priorité de réemploi.

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Il n’existerait pas (ou peu) de différence de traitement entre travailleurs saisonniers et travailleur en contrat à durée illimitée. D’un point de vue formel, le principe de l’égalité des droits semble prédominer. La réalité témoigne de situations différences, et, quelquefois dignes d’un autre âge. Certes, ces cas ne sont pas majoritaires, mais ils sont jugés suffisamment préoccupants pour être soulignés par les organisations syndicales interrogées.

A l’exception de l’Italie, il n’existerait pas de conventions collectives spécifiques aux travailleurs saisonniers. Les travailleurs saisonniers sont généralement intégrés dans les conventions collectives relatives aux travailleurs de l’agriculture, à l’exception de l’Albanie. Il existe toutefois des accords (ou règles) régionales, dans 5 pays sur les 13, dont le contenu est lié à leur organisation administrative. En Allemagne, par exemple, une recommandation nationale encadre le secteur, tandis que les conventions collectives sont régionales (Länder).

La question des salaires est sans nul doute celle qui présente la plus grande diversité, quand bien même l’égalité de traitement est majoritaire entre saisonniers et permanents :

Il existe plusieurs situations où le salaire des saisonniers est en dessous de celui des travailleurs sous contrat CDI ;

Parmi ces situations, certaines sont en voie de normalisation ;

Dans d’autres Etats Membres, il n’y a pas de différence, au moins d’un point de vue théorique ;

Enfin, dans d’autres encore, certains salaires sont liés à des rendements ;

Le salaire à la tâche semble fréquent (souvent lié à une activité précise), encore que la rémunération minimale horaire doit être respectée, dans plusieurs cas.

En matière de temps de travail, les règles applicables aux travailleurs en CDI semblent l’être également pour les saisonniers. Il existe cependant quelques dérogations possibles (travail le week-end et jours fériés, flexibilité hebdomadaire). Cependant, quand bien même les conventions en fixent les règles, il est fréquent, selon les organisations syndicales, que cette durée ne soit pas respectée. Notons cependant que les pays nordiques sont plus soucieux de respecter les textes.

Piste de normalisation souhaitable : le cas des conditions météorologiques défavorables. La diversité des réponses des organisations syndicales (bien que toutes n’ont pas produit de réponses à cette question) nécessiterait un examen plus poussé pour parvenir à une harmonisation de pratiques.

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Les modalités d’hébergement des travailleurs saisonniers sont exprimées dans un tiers des réponses (là où il existe des règles), et ces 6 réponses donnent autant de situations différentes. Le plus souvent, l’absence de règles semble justement être la … règle. Il s’agit d’un sujet à surveiller dans le cadre de la transposition de la directive de février 2014.

A l’exception de l’Albanie, de l’Allemagne et de l’Islande, il n’existe pas de règles particulières en matière de repas.

- Le système allemand ressort d’une législation fédérale qui prévoit la fourniture d’un repas moyennant une récupération sur le salaire, limitée. De la théorie à la pratique, il y a des différences, puisque dans plusieurs situations, en réalité, le repas peut être proposé et/ou offert

- En Islande, des règles –générales- sont inclues dans les conventions collectives, sans distinction de statut.

3 – Les contrats de travail

Dans la presque totalité des pas, un contrat de travail peut être conclu entre l’employeur agricole, en direct, et le travailleur.

D’autres intermédiaires sont également présents, comme en témoigne le tableau ci-après.

Les agences de travail intérimaire sont présentées comme acteurs dans la formulation d’un contrat de travail, pour 6 organisations, mais 5 pays.

Les prestataires de services sont, de manière statistique, peu présent (3 pays), en raison de la spécificité de ces acteurs (le plus souvent, il s’agit d’entreprises de travaux agricoles)

Cela étant, il n’est pas utile de rappeler que cette situation n’est représentative que des seuls bénéficiaires d’un contrat de travail, mais que la réalité, citée régulièrement, est marquée, souvent, par l’absence de contrat liée au travail au noir.

Nous n’avons pu vérifier avec précision la qualité de ces contrats, mais, fréquemment, ceux-ci, semble-t-il, ne sont pas rédigés dans la langue du travailleur. Il est vraisemblable que cela concerne davantage le cas d’un contrat de travail conclu directement entre l’employeur et le travailleur, encore que cela reste à mesurer.

Quelque soit l’identité physique et/ou morale de l’employeur, Il existe deux catégories d’exigence en matière de qualification au moment du recrutement :

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Les pays qui recrutent (le plus souvent) en fonction de la qualification des salariés (6).

Ceux qui, au contraire, ne considèrent pas ce critère déterminant (7)

La situation n’est pas systématique dans les deux cas, car il existe des postes de travail qui requièrent certaines qualifications.

La rédaction de tout contrat de travail dans les langues des acteurs (employeur et travailleur) semble devoir être posée en termes de revendication portée à l’échelle européenne et mise en œuvre dans chacun des pays. Ce sujet pourrait d’ailleurs être inscrit dans la charte européenne du travailleur saisonnier que nous évoquions au début de ce rapport, dans le cadre de la transposition de la directive de février 2014. Dans ce cadre, la réalisation d’un contrat de travail « type » pourrait y être annexée.

Nombre de

Origines OUI NON

Entre l’employeur agricole direct et le travailleur

16 1

Entre une agence et le travailleur 8 9

Entre une agence d’intérim/intermédiaire et le travailleur

6 11

Entre un autre prestataire de services et le travailleur

3 12

Note : l’addition des « oui » et des « non » peut représenter un nombre inférieur au total des réponses, en raison de l’absence de réponse d’une ou plusieurs organisations

En outre, la conclusion d’un contrat de travail écrit ne garantit pas une entière sécurité pour le travailleur : le non-respect des contrats est souvent cité comme source de dysfonctionnements, ce qui affirme la nécessité d’une rédaction lisible et compréhensible pour les deux parties.

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4 – Origines et nombre de travailleurs saisonniers

Les informations transmises par les organisations syndicales sont à considérer avec prudence, dans la mesure où :

Dans certains cas, les organisations syndicales d’un même pays peuvent produire des chiffres différents ;

La liberté de circulation au sein des Etats Membres implique désormais une absence de données numériques fiables pour les saisonniers intra-communautaires ;

Certaines organisations ne masquent pas les difficultés à procéder à une telle évaluation.

Quoiqu’il en soit, le nombre de travailleurs saisonniers, globalement, est important dans plusieurs Etats membres, et relativement marginal dans d’autres. La proportion des travailleurs « nationaux » reste élevée dans le cas où les chiffres fournis sont jugés suffisamment fiables. Dans cet ensemble, la part des travailleurs « hors U.E. », peu souvent communiquée, est néanmoins significative, notamment en Espagne et en Italie. La situation reste donc difficile à mesurer avec les précisions qu’il faudrait pour mesurer quelles actions prioritaires devraient être mises en œuvre en faveur des travailleurs extracommunautaires.

5 - Les conditions sociales applicables

Assurance « accidents du travail » : le risque est couvert dans l’ensemble des pays, dès le début de la prise de fonction. Cela étant, la couverture du risque ne s’applique pas dans le cadre d’un travail au noir.

Assurance contre le risque « maladie » : 9 pays sur les 13 ayant répondu indiquent que le risque maladie est couvert dès le début de la prise de fonction. Dans les 4 autres, la situation est différente, en raison, notamment, d’un délai de carence.

L’ensemble des travailleurs saisonniers, bénéficiaires d’un contrat de travail, cotisent à l’assurance retraite, en fonction des systèmes nationaux respectifs. En Espagne, la mesure est encore récente (2012), au Danemark, cette assurance doit être couverte par une convention collective. La problématique réside davantage dans les conditions d’octroi des pensions. Sur ce point il existe nombre de réalités qui :

Rendent difficile la possibilité de jouir de ses droits, en raison des conditions de durée de cotisations et de validation de périodes de cotisations ;

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Multiplient des démarches, de la part du travailleur, qui complexifient la construction des dossiers de demande de versement ;

… Quand bien même il n’y a pas de discrimination entre travailleurs permanents et travailleurs saisonniers…

C’est une vraie problématique européenne qui n’est pas encore totalement réglée. Les instruments transnationaux actuels ne semblent pas suffisants pour traiter la question du suivi de carrière et des droits afférents : un dispositif propre au secteur agricole, dans le cadre d’Agripass, pourrait faciliter les démarches et l’obtention des droits pour chaque travailleur, dans le cadre d’une démarche de dimension européenne.

Serait-ce le premier pas vers un système de suivi et/ou de gestion des droits à la retraite, à l’échelle européenne ? N’est-ce pas une piste de réflexion tendant à améliorer l’attractivité du secteur ? Dans quelle mesure les insuffisances actuelles du système pourront entraîner des problèmes complexes dans le cadre de l’équilibre général des systèmes de retraite des pays pourvoyeurs de main d’œuvre ? Le système actuel n’est-il pas de nature à développer des systèmes privés dont le but ultime est la création de richesses ? Le sujet des droits aux indemnités chômage n’est-il pas comparable à celui des droits au versement d’une pension vieillesse ?

Quelle place peuvent jouer les partenaires sociaux, et notamment les organisations syndicales, dans ces réflexions ?

Le questionnaire remis à chaque organisation syndicale devait permettre d’enrichir la connaissance collective quant au coût de la protection sociale pour le travailleur saisonnier. En dehors des éléments déjà recensés dans le cadre d’un autre projet, les réponses apportées ne sont pas de nature à répondre à ce besoin, à l’exception des Etats membres assurant le financement de la protection sociale via l’impôt.

6 – Les travailleurs saisonniers, les syndicats, leur implication dans la vie collective et les conditions de séjour

Ils sont minoritaires (4/13) les pays où un travailleur saisonnier ne peut participer aux activités de l’entreprise qui l’emploie. Encore que les réponses transmises peuvent être nuancées du fait que ce relatif empêchement peut être lié a un temps de présence insuffisant, ou un relatif manque d’intérêt (ou relative crainte) de la part d’un salarié saisonnier.

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Si l’on considère que le travailleur saisonnier « historique » (Cf. chapitre I, thème 2) a pour vocation de faire les saisons pour une durée pouvant aller de 6 à 8 mois, cet objectif peut être un frein à la volonté de s’investir sur des champs de nature collective.

Si l’on considère également le travailleur saisonnier migrant, on peut parler de relative crainte à s’investir sur des sujets qui nuiraient, éventuellement, à une reconduction de son contrat de travail d’une année sur une autre. On peut donc admettre qu’il existe deux freins à une implication dans les activités représentative :

Les freins « législatifs » au sens où la loi ne comporterait pas de dispositions particulières de nature à favoriser cette implication. Ces cas sont peu nombreux ;

« L’autocensure » du salarié lui-même pour les raisons expliquées ci-avant. Cela dit, lorsque ces travailleurs peuvent participer aux activités de l’entreprise, cela ne signifie pas pour autant que ce droit est pleinement exercé, et nonobstant le fait qu’il existe des conditions préalables, cela reste effectivement à mesurer, à l’image du cas présenté en Italie (Cf. Chapitre I, thème IV).

Pays où les travailleurs saisonniers peuvent élire des représentants :

PAYS/ORGAN OUI NON PAYS/ORGAN OUI NON

ARYM AGROSIN X DANEMARK/3F X

ALLEM/IGBAU FIN/PUULIITTO X

AUTR/PROGE X ISLANDE/SGS X

BULGARIE/FNSZ X Italie/CONFEDER X

BULG/PODKREP X Italie/FLAI CGIL X

Espagne/CCOO SLOVENIE/KZI X

Espagne/FITAG X SUEDE/KOMMU X

France/CFTC ALB/SPPBBSH X

France/FO x ALB/FSPBUPASH X

Dans deux autres cas, la promotion semble pouvoir être facilitée :

En Allemagne, via des actions de formation ;

En Islande, grâce, semble-t-il, aux actions des organisations syndicales.

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L’accès aux informations relatives aux droits des travailleurs migrants est un vaste sujet qui

présente de multiples situations :

Il existe des exemples où le droit à l’information et les modalités d’accès sont les

mêmes qu’il s’agisse d’un travailleur saisonnier ou permanent : ARY Macédoine,

Bulgarie, France, Italie (en théorie) ;

Dans d’autres exemples, l’initiative revient aux organisations syndicales (lesquelles

s’impliquent également lorsque le droit à l’information est encadré par la loi). Il existe

également d’autres solutions pour que ces travailleurs obtiennent des « informations

satisfaisantes » : dans 7 pays, d’autres organismes sont présents (Agences pour

l’emploi, organismes paritaires, …)

Ce sujet est un autre point qui pourrait être intégré dans une charte européenne du travailleur saisonnier.

Dans la plupart des pays étudiés, les travailleurs saisonniers peuvent être promus au sein de

l’entreprise, mais, dans plusieurs autres, les restrictions en cours limitent, voire empêchent,

le fonctionnement du processus. Ainsi, en Espagne, la promotion devient possible quand un

travailleur saisonnier bénéficie d’un statut de « permanent ». La situation est décrite comme

semblable en France. Ces deux exemples interpellent : en effet, il existe de nombreuses

situations où un travailleur saisonnier « fidèle » cumule des périodes de travail. En France,

notamment, ce facteur (et d’autres) a permis l’émergence de solutions visant à pérenniser

leur emploi, soit sous une forme spécifique de contrat de travail, soit par le biais d’un

groupement d’employeurs. La non prise en compte du cumul des contrats de travail des

saisonniers fidèles ne constitue-t-elle pas une discrimination ?

L’acquisition de nouvelles qualifications est organisée dans la presque totalité des pays étudiés. Mais ce constat doit être relativisé du fait que, dans de nombreux cas, le travailleur saisonnier peut éprouver de grandes difficultés à faire valoir ses qualifications au moment de son embauche (c’est le cas de 6 pays). Si l’on compare ce droit, que nous qualifions de théorique, aux moyens existants dans les pays où ce droit existe (c’est-à-dire la presque totalité des pays étudiés, il n’en reste plus que 6 qui disposent de structures œuvrant à la qualification des travailleurs saisonniers. De plus, la barrière linguistique peut représenter un frein au développement des compétences dans le pays d’accueil.

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Le questionnaire proposait d’évaluer les conditions éventuelles de prise en charge des frais de voyage (aller-retour) des travailleurs saisonniers. La question fait référence, plus particulièrement, aux travailleurs saisonniers migrants. Certaines ambiguïtés sont apparues :

Il existe le cas (qui concerne l’étude) du travailleur saisonnier (non détaché) : les choses sont claires, les frais de voyage sont à la charge du travailleur ;

Mais une réponse au moins concerne les travailleurs dits « détachés ». Il est vrai que dans le contexte du secteur agricole, les frontières entre les deux statuts sont fragiles… La Bulgarie précise que des agences intermédiaires orientant des travailleurs en France les obligent à payer leurs propres frais de voyage, en violation avec la directive sur le détachement d’un travailleur. Mais au fond, n’est-ce pas le statut de travailleur détaché qui est lui-même en contradiction avec les règles qui régissent le détachement ?

En complément des sujets qui précèdent, les organisations syndicales avaient la possibilité de signaler d’autres éléments sur la situation des travailleurs saisonniers. Certaines ont insisté sur les sujets qu’elles considèrent plus sensibles.

Nous relevons :

Une réelle insatisfaction sur la situation globale des travailleurs saisonniers (ARY Macédoine), et l’expression de cette insatisfaction suggère un appel pour aider l’organisation à traiter les difficultés ;

Les difficultés pour ces travailleurs à occuper d’autres postes de travail après une saison, empêchant toute possibilité d’obtenir des allocations chômage (Bulgarie) ;

Le manque d’attractivité du statut de travailleur saisonniers entraîne un développement du travail illégal, avec les risques inhérents à cette pratique (Bulgarie - Italie). Souvent, dans ce cas, il s’agit de travailleurs bénéficiant déjà d’allocations des services sociaux ;

Les dérives quant à l’utilisation du statut de détachement de travailleurs par des agences de travail intérimaires (Bulgarie) ;

En revanche, l’implication forte d’organismes sociaux (organismes paritaires) avec des moyens spécifiques permet d’organiser les visites médicales au plus près des travailleurs saisonniers (France).

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A ce stade, on mesure l’importance du rôle des organisations syndicales, mais aussi les difficultés qu’elles peuvent éprouver pour organiser et défendre les droits des travailleurs saisonniers. Sur le plan général, les travailleurs saisonniers sont peu souvent adhérant d’une organisation syndicale. De ce point de vue, les raisons sont multiples : « on connait peu », souvent ce sont des travailleurs sans contrat de travail, ils ont peur de perdre leur emploi, ils font l’objet de discrimination dès que l’employeur a connaissance de leur adhésion …

Soit, ces différentes raisons sont manifestement réelles. Pour autant, les réponses (et les rencontres avec des organisations nationales) font clairement apparaître que lorsqu’une organisation syndicale traite un problème majeur, les résultats sont remarquables. Nous ne reviendrons pas sur l’exemple de l’Italie présenté à l’occasion d’une rencontre avec des travailleurs saisonniers migrants : il a fait l’objet d’un point spécifique précédemment Un travailleur saisonnier migrant, adhérant à l’organisation syndicale, en Suède, a pu être réintégré -ainsi que sa famille- après qu’il eut été licencié pour motif d’adhésion à un syndicat. En Espagne, une campagne d’information orientée sur l’hébergement et la formation a produit des changements significatifs, sans condition préalable d’adhésion. En matière d’information en direction des travailleurs saisonniers, pratiquement chaque pays a mené des actions qui ont porté sur :

Le revenu minimum ; Les conventions collectives ; L’intérêt du contrat de travail ;

Concrètement, ces campagnes se sont matérialisées par des réunions d’informations, des conférences de presse, des permanences juridiques, des livrets, des visites sur les lieux de travail, des accords de coopération transnationale…

Les quelques exemples que les organisations ont mentionnés semblent n’être qu’une partie infime des mauvais traitements pouvant être infligés à des travailleurs saisonniers. Cependant, à l’occasion de rencontres, d’autres cas ont été rapportés donnant une dimension bien plus forte à ce problème. D’autre part, l’adhésion de travailleurs saisonniers et l’implication des organisations syndicales sont un élément de réponse au manque d’attractivité du secteur, mais aussi au développement d’une concurrence déloyale qui joue contre les intérêts de ces travailleurs, et, au-delà, des entreprises elles-mêmes. Le sujet de la prise en compte des dysfonctionnements inhérents au statut de travailleur saisonnier est donc un sujet relevant du dialogue social au sens large.

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7 – Les coopérations entre organisations syndicales

Les exemples cités sont relativement nombreux, témoignant d’une réelle vivacité et besoin à développer des formes de coopérations soit ponctuelles, soit structurelles. Ces coopérations concernent également des pays en dehors de l’UE (Maroc, Egypte, Tunisie), en raison des flux de migrants en provenance du pourtour méditerranéen. Toutefois, les exemples cités n’en sont qu’au stade de démarrage.

Au niveau du territoire de l’U.E., les partenariats s’exercent surtout entre pays d’Europe de l’Ouest et pays d’Europe centrale et de l’Est, pour parfaire l’intégration de ces derniers, mais aussi pour développer des thèmes spécifiques aux droits des travailleurs arrivant dans un pays d’accueil. Le thème de la mobilité a mis en scène plusieurs pays pour en comprendre les fondamentaux et son intérêt.

Globalement, ces accords de coopération sont jugés enrichissants, producteurs d’échanges de pratiques et destinés à mieux appréhender les différentes cultures d’autres pays, à l’exception d’un cas jugé peu satisfaisant. Les impacts en termes de développement d’adhésions restent cependant difficiles à évaluer. Dans le cadre d’un précédent projet, la question de l’adhésion avait été traitée, sans que de réelles mesures opérationnelles aient été mises en place. L’idée d’une cotisation partagée à partir du pays de destination peut, ici, être réétudiée.

8 – Les coopérations avec les services publics

Elles trouvent naturellement leur place, car de nature à s’enrichir mutuellement. Souvent, ces coopérations intègrent l’ensemble des services publics concernés par l’emploi, ainsi que d’autres types d’acteurs institutionnels (chambres d’agriculture, associations pour l’emploi, comités de suivi –provinciaux-) et peuvent permettre d’élaborer des relations entre organismes similaires des pays partenaires.

Jugées plutôt positives, ces coopérations doivent s’inscrire dans le temps, en sollicitant des cofinancements de la Commission européenne, et peuvent s’étendre aux pays qui n’en ont pas encore fait l’expérience. A titre d’exemple pouvant illustrer la richesse de ces échanges, citons :

L’apparition du « lanceur d’alerte » pour informer les pouvoirs publics de certains agissements ;

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La création d’outils innovants tels l’installation de bureaux d’accueil dédiés aux travailleurs migrants dans les gares d’un pays d’accueil lors de circonstances spécifiques (vendanges par exemple) ;

Une législation plus stricte pour protéger les travailleurs saisonniers.

Certes, dans cet ensemble tout n’est pas parfait puisque quelques expériences ont produit des frustrations, sans que les questionnaires en dévoilent les raisons.

D’autre part, si le principe de la coopération est apprécié, nombre de pays soulignent l’insuffisance des contrôles. A cela, deux raisons sont présentées :

L’insuffisance de moyens, dans un contexte de rigueur budgétaire dont le concept n’est pas toujours en phase avec les nécessités. Il est vrai que sur ce point, plusieurs théories se confrontent, allant de la recherche d’une meilleure efficience des moyens déployés, de la rationalisation budgétaire dont chacun évoque une définition confuse pour ne pas parler d’austérité, jusqu’à la rigueur dont l’esprit ne semble pas toujours compatible avec l’évolution des questions à résoudre. Il est vrai que la nature des sujets fait de plus en plus appel à des connaissances étendues (connaissances juridiques, sociales de plusieurs pays) qui tracent le cadre du futur inspecteur européen ? Pour l’heure, le rôle des organisations syndicales est essentiel dans la perception des problèmes et leur résolution, dans un cadre de ressources inégales selon les pays, et en raréfaction dans de nombreux cas.

Sommes-nous dans un système qui semble avoir trouvé ses limites ?

9 – Les coopérations avec des organismes privés

Les exemples de coopérations avec des organismes privés sont peu nombreux (4 pays). De plus, ces organismes privés sont, dans 3 cas sur 4, des organisations non gouvernementales (ONG).

Deux sujets ont été présentés :

Une alliance contre le trafic d’êtres humains (Allemagne), jugée positive ;

Une autorité consultative spécifique pour les travailleurs migrants saisonniers (Espagne) qui, semble-t-il n’a pas produits les résultats attendus.

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10 – Des exemples de « bonnes pratiques »

La quasi absence de réponses traduit plusieurs interprétations possibles :

Une forme d’humilité ;

Une difficulté à définir ce qu’est une bonne pratique ;

Ou encore une réelle absence d’exemples de nature à poser la question de son concept.

Deux exemples sont mentionnés :

Le projet mobilité en Allemagne ;

Les maisons des saisonniers qui sont des points d’informations et de conseils, voire de relais des services publics, en France. Ces maisons des saisonniers sont fédérées au plan national dans l’association ALATRAS qui dispose d’un site web et produit plusieurs informations, dont la liste et les coordonnées de ces structures.

De nombreux acteurs du monde agricole de nombreux pays (dont les organisations syndicales) ont publié des guides –ou recueil- de « bonnes pratiques ». Il n’est pas possible, dans le cadre de ce projet de les référencer en totalité. Nous vous invitons à prendre connaissance du recueil de « bonnes pratiques » publié par l’Observatoire Paritaire Prospectif des Métiers, des qualifications et de l’emploi de la Coopération Agricole » (France) publié en octobre, et disponible sur : http://www.metiers-cooperation-agricole.fr

Ce guide reprend, selon nous, et indépendamment de son contenu, l’ensemble des thèmes qui concernent la vie quotidienne des travailleurs saisonniers :

- L’information des travailleurs saisonniers ; - Leur recrutement ; - Leur intégration ; - La formation et le développement des compétences ; - L’amélioration des conditions de travail ; - Les outils de mutualisation de gestion à usage des employeurs ; - La gestion des emplois et des compétences.

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11 – Des pistes d’amélioration

S’agissant d’une question ouverte, les organisations syndicales se sont montrées désireuses

de contribuer à l’amélioration des travailleurs saisonniers.

Signalons d’ores et déjà qu’aucune des propositions formulées n’entre en opposition avec

d’autres.

Leur analyse permet une retranscription en 5 thèmes :

THEMES CONTENUS

Réglementation Clarifier la réglementation (homogénéiser ?)

Contrôles Renforcer les contrôles gouvernementaux et autres structures Prévenir la fraude par les agences de travail temporaire Visites en milieu de travail Superviser les conditions de travail (observatoire ?)

Coopération Avec les employeurs des pays d’accueil, développement d’actions conjointes contre le travail illégal et la concurrence déloyale

Information Une meilleure information à destination du public concerné

Sécurisation Création d’un réseau public pour l’emploi Créer une clause de reconduction tacite dune année sur l’autre, et versement d’une prime de précarité (mesure égalitaire avec les CDD) Développer la pluriactivité et la formation Organiser les travailleurs saisonniers

… Autant de pistes qui forment un cahier de revendications, mais aussi des bases pour la construction d’une charte européenne du travailleur saisonnier…

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CHAPITRE III

PRECONISATIONS POUR UN PLAN D’ACTIONS

A TROIS DIMENSIONS

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Définir un plan d’actions est un des objectifs centraux du projet. Ce plan d’actions doit faire

l’objet d’un débat sur les bases :

De l’étude menée au travers ce rapport

Des préconisations formulées ci-après

Ce plan d’actions peut être conçu en trois dimensions :

L’objectif central est de concilier compétitivité, qualité et sécurisation de l’emploi des

travailleurs saisonniers de l’agriculture, qui renforcera l’attractivité du secteur

Modifier les comportements

Préparer les changements

Sécuriser et rendre

attractif le statut de

travailleur saisonnier

Concilier compétitivité,

qualité et sécurisation de

l’emploi

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Motivations générales :

Le recours croissant à une forme de précarité qui engendre de la pauvreté dans un

cadre juridique insuffisamment précis ;

Une image du secteur qui se ternit et qui entraîne certaines tensions sur l’emploi ;

La présence de nouveaux acteurs dont certains se comportent en marchands

d’esclaves ;

La course à la compétitivité « prix » contraire au développement d’une agriculture

de qualité ;

Amplification du travail illégal (à mesurer) ;

Flux migratoires qui constituent un réservoir de main d’œuvre à « bon marché ».

1- Modifier les comportements :

Contexte :

Un cadre juridique insuffisamment précis : il n’existe pas de définition du travail saisonnier

dans l’ensemble des pays étudiés ;

De nouveaux acteurs peu scrupuleux perturbent les règles d’une concurrence loyale : les cas

rapportés ne constituent pas un fait dominant, mais sont jugés suffisamment graves, car

portant atteinte à la dignité humaine.

L’importance du travail illégal : de nombreuses raisons expliquent –sans le justifier- le

développement du travail illégal. Ces raisons peuvent concerner à la fois le travailleur

saisonnier (quelquefois sans qu’il le sache) et, à la fois, l’employeur qui mise sur le manque

d’efficience des pouvoirs publics dont les moyens se rétrécissent au motif de contractions

budgétaires contraires aux intérêts généraux de la société civile. Par « travail illégal », il faut

comprendre « travail non déclaré », recours abusif au détachement de travailleurs et les

faux indépendants.

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Préconisations :

Cadre juridique : modifier la législation d’un pays n’est pas chose facile, et un tel objectif

pourrait apparaître non opérationnel. La directive de février 2014 propose une définition,

certes insatisfaisante, qui sera transposée dans 25 Etats membres en 2016. Cette définition

cadre de manière moins anarchique (au regard des pays où il n’existe pas de définition) et

peut contribuer à limiter les comportements abusifs. Pour autant, ce nouveau cadre ne

comblera pas toutes les lacunes.

Le rôle des organisations syndicales trouve ici une place significative argumentée par les

recommandations présentées en juin 2014 par EFFAT.

Par ailleurs, une charte européenne du statut du travailleur saisonnier peut

explicitement prévoir le rôle des organisations syndicales sur ce point, afin de

contrecarrer les éventuelles réticences. C’est dans le cadre de cette charte que

pourrait être abordée la compensation financière des jours non travaillés pour

raisons d’intempéries.

Nouveaux acteurs : ceux-ci, par nature, se sentiront moins concernés par la directive.

Cependant, les agissements décrits par les organisations syndicales ne peuvent perdurer.

Nous formulons les pistes suivantes :

Disposer d’une meilleure connaissance, au sein des pays d’accueil mais aussi des

pays pourvoyeurs, dans la limite du possible, sur les sociétés agissant comme

intermédiaire de pourvoyeurs de travailleurs afin de repérer celles qui agissent en

dehors des règles, et ainsi de réduire leur capacité de nuisance. Cette meilleure

connaissance passe par un développement de la coopération entre organisations

syndicales et les pouvoirs publics en charge des contrôles ;

Définir un label éthique, à l’image, par exemple, de celui créé en Italie : chaque

colis livré intègre une étiquette mentionnant que l’entreprise est vertueuse en

matière de respect des textes et de la dignité humaine, en ayant, préalablement,

adhéré à la charte déjà mentionnée. Ce label a pour objectif de favoriser l’activité des

entreprises engagées dans une démarche de respect de cette charte.

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Ces deux propositions peuvent s’appuyer éventuellement sur des cofinancements

européens pour en permettre la mise en œuvre.

Rendre obligatoire la rédaction du contrat de travail dans les langues des différents

contractants

Travail illégal :

Nonobstant l’argument d’organisations qui considèreraient que la lutte contre le travail

illégal relève des compétences des pouvoirs publics, il nous parait essentiel de définir une

méthode de travail.

Des indicateurs d’alerte peuvent ainsi être développés, par exemple le rendement apparent

d’une exploitation. Cet indicateur d’alerte existe dans quelques cas : il compare les

rendements affichés (quantité produite/effectif employé, ou valeur de la production de

l’entreprise/masse salariale) à des rendements théoriques. Il a pour objectif d’examiner la

cohérence des résultats d’une entreprise, et, dans le cas contraire, de susciter un examen.

Bien sur cela suppose une collaboration étroite entre différentes parties prenantes

(organisations syndicales, entreprises, chambres d’agriculture, inspections du travail, etc.…).

La limite de cet outil réside dans la dissimulation du chiffre d’affaires éventuellement généré

par l’utilisation de travailleurs non déclarés.

La reconduction de l’étude de 2007/2008 sur l’évaluation du travail illégal et des mesures

mises en œuvre pour lutter contre trouve ici pleinement sa justification.

2- Sécuriser et rendre attractif le statut de travailleur

Contexte :

Une précarisation accrue génératrice de pauvreté ;

Un « réservoir » de main d’œuvre important –extracommunautaire- qui accentue les

difficultés à résoudre les problèmes ;

Accentuer la professionnalisation ;

Reconnaître les qualifications

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Préconisations :

La directive de février 2014 produit, au fond, un nouveau modèle de travailleur saisonnier

générateur de nouvelles inégalités.

Ces conséquences probables renforceront l’image dégradée du secteur, suscitant de

nouvelles tensions sur l’emploi. De ce point de vue, la sécurisation et l’amélioration de

l’attractivité de l’emploi agricole –au sens large- pose la question des capacités du secteur à

anticiper de nouvelles situations difficiles, car, à défaut, ces nouvelles situations

s’imposeront obligeant les entreprises du secteur à les subir. Sécurisation et attractivité

deviennent ainsi deux aspects d’une ligne de stratégie de gestion et de développement des

ressources humaines.

Les préconisations qui suivent rejettent la possibilité de voir apparaître un nouveau modèle

de travailleur saisonnier, en partant du principal fondamental de l’égalité de traitement

entre travailleur.

L’ensemble des acteurs de la filière le sait : le travail saisonnier est un élément structurant

les activités agricoles.

Trois types d’actions peuvent ainsi être proposés :

Poursuivre les actions entamées (contrôle, informations, syndicalisation, etc. …) : plusieurs

exemples montrent leur utilité et leur nécessité. Par contre, les rendre plus visibles est

probablement un axe à développer, peut-être en intégrant des travailleurs saisonniers –

migrants- dans l’action. Pour faciliter la compréhension mutuelle, l’élaboration d’un

glossaire est souhaitable.

Diffuser les pratiques qui permettent le maintien du travailleur saisonnier à un poste de

travail aux termes d’un précédent contrat (ex : groupement d’employeurs, pluriactivité)

Inclure dans le programme des partenaires sociaux :

a) Des discussions sur l’élaboration d’un statut du travailleur saisonnier agricole (encore

qu’il faille tenir compte de la perméabilité des frontières entre les métiers agricoles

et, dans certains cas, les métiers liés au tourisme –rural-) qui compléterait la charte

européenne évoquée par ailleurs. Outre la définition de ce qu’est un travailleur

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saisonnier (permettant des adaptations locales), plusieurs sujets pourraient être

repris dans ce statut, entre autres :

- Les modalités d’information et leur contenu ; - Leur intégration et leur représentation syndicale ; - Une visite médicale annuelle dont les données pourraient être utiles à

l’élaboration de statistiques quantitatives ; - la prise en compte de leurs qualifications ; - La formation et le développement des compétences ; - L’amélioration des conditions de travail ; - Les outils de mutualisation de gestion à usage des employeurs ; - La gestion des emplois et des compétences, incluant les pratiques en matière

de renouvellement des contrats, et/ou les différentes formes de contrats qui permettent de développer le concept de la pluriactivité.

b) Une réflexion sur le développement des observations des métiers de l’agriculture qui

intégreraient le point particulier des travailleurs saisonniers

c) Tenter de délimiter la notion de bonnes pratiques pour en élaborer un guide annexé

à la charte européenne plusieurs fois mentionnée.

3- Préparer les changements

Contexte :

La directive sur le travail saisonnier d’origine extracommunautaire ;

La croissance des flux migratoires

Préconisations :

Par changement, nous faisons référence à la directive relative aux travailleurs saisonniers

extracommunautaires. Tout autre élément étant hors sujet dans le cadre de ce projet.

En toile de fond :

Penser que les flux migratoires prévisibles susciteront l’appétit de certains acteurs en

recherche de profit ;

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Avec le soutien financier de la Commission européenne, DG EMPL

VS/2014/0338

Considérer que ces mêmes flux, pour ces mêmes acteurs représentent un réservoir de main

d’œuvre sans limite engendrant des dérives ;

Le document présenté par EFFAT en juin 2014 « les missions des syndicats agricoles lors de la

transposition de la directive en droit national » représente un outil substantiel et un guide

méthodologique.

Cependant, il convient :

De s’assurer de son utilisation effective ;

D’évaluer la progression des discussions ;

D’évaluer les résultats.