Odelettes de Nerval « Une allée du Luxembourg...

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  • Odelettes de Nerval Une alle du Luxembourg

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    Texte :

    Elle a pass, la jeune filleVive et preste comme un oiseau la main une fleur qui brille, la bouche un refrain nouveau.

    C'est peut-tre la seule au mondeDont le coeur au mien rpondrait,Qui venant dans ma nuit profondeD'un seul regard l'claircirait !

    Mais non, - ma jeunesse est finie ... Adieu, doux rayon qui m'as lui, -Parfum, jeune fille, harmonie...Le bonheur passait, - il a fui !

    Grard de Nerval, Odelettes, 1835

    lments dintroduction et contexte :

    Nerval :- pote romantique tortur et brillant- internement rgulier- mort pendu une grille dans le coin le plus sordide quil ait pu trouver (Baudelaire)

    Une alle du Luxembourg :- rencontre strile et fugace avec une jeune fille

    Construction du texte :

    3 quatrainsOctosyllabesRimes croises ABAB

    Les procds rhtoriques et leur interprtation :

    Procds Interprtations Une alle du Luxembourg (titre)

    Jardin parisien trs fleuri, lieu traditionnel des promenades amoureuses au XIXe.

    Pronom dmonstratif la (v.1)

    Indique quil sagit dune jeune fille en particulier, quelle la particulirement marque et dont le souvenir est plutt vif.

    Priphrase la jeune fille (v.1)

    Vient renforcer son importance car il aurait pu se contenter dcrire elle a pass , ce qui met en valeur son sexe, son jeune ge, la posant comme lobjet de fantasme amoureux.

  • La comparaison vive et preste comme un oiseau (v.2)

    Lassimile un volatile pour mieux monter sonct furtif, comme si sa marche tait un vol, llgance et la rapidit de loiseau. Nerval peut aussi suggrer son ct sauvage, non dompt. Elle volette dans le jardin, sans ne se soucier de rien.

    Paralllisme A la main (v.3), A la bouche (v.4)

    Prend des accents chantants, musicaux, dautant plus que ces expressions sont suivies de phrases nominales, plus lgres, plus dansantes. Le pote semble emport par le passage de cette jeune fille, au point de lui associer des clichs de la littrature courtoise : fleur . Par ailleurs, si cette fleur brille (v.3), cest pour mettre en valeur sa jeunesse (fait cho avec jeune (v.1)) et sonclat, probablement pour dsigner indirectement les mmes caractristiques chez la jeune fille.

    Hyperbole peut-tre la seule au monde (v.5)

    La pose en tre unique, bien que lemploi du modlisateur peut-tre en attnue la force,cette femme reprsente lunique occasion pour le pote de revivre et quitter sa nuit profonde .

    Plonasme nuit (v.7) et profonde (v.7)

    Insiste sur lpaisseur de la nuit. Nerval semble install depuis longtemps dans cette nuit , c'est--dire dans ce mal-tre, cette mlancolie. (Lui, auteur clbre de loxymore soleil noir de ma mlancolie exprime une fois encore son mal tre de vivre typique des Romantiques.)

    CL de la lumire : brille (v.3), claircirait (v.8), rayon (v.10), lui (v.10)

    Ce CL accorde la femme des pouvoirs quasi magiques, et suppose que, de sa seule prsence, elle illumine lexistence du pote.

    Antithse entre nuit (v.7) et claircirait (v.8)

    Insiste sur lopposition entre les deux personnages et sur leur compltude.

    Mtonymie cur (v.6) et lamtaphore/personnification dont le cur au mien rpondrait (v.6)

    Indique deux choses. Dune part, lapparition de cette femme touche le pote dans ses sentiments (cur=lieu mtamorphique des sentiments) ce qui peut laisser penser quelle serait son me sur, sa compagne dont les deux curs battraient lunisson : au mien rpondrait . Dautre part, cette mtonymie montre que la vie mme du pote peut entrer en jeu avec cette rencontre (cur=source de vie).

    Connecteur dopposition mais renforc par la ngation tonique non (v.9)

    Affirme nettement lchec de cette apparition.

    Affirmation ngative est directement dun constat amersans dtour ma jeunesse est finie (v.9)

    Lauteur semble associ cette jeune fille sa propre situation, comme si elle reprsentait mtamorphiquement lge dor envol, ses jeunes annes prsent derrire lui. On retrouve ainsi lexpression maladive du temps qui passe, dont lcoulement irrpressible

  • obsde les Romantiques.CL du passage : pass (v.1), adieu (v.10), passait (v.12), fui (v.12)

    Prparait dj cet chec car la jeune fille ou la jeunesse tait caractrise par la fugacit et la rapidit : elle est vou disparatre.

    Emploi du conditionnel rpondrait (v.6), claircirait (v.8)

    Navance finalement que des hypothses damliorations de la vie et des tats dme du pote et suggre quil ntait mme pas certain de son impact bnfique. Ce conditionnel prouve quelle avait la capacit dilluminer sa nuit profonde mais quelle nen a pas eu le temps ou la volont de le faire.

    Emploi du pass compos elle a pass (v.1), elle a fui (v.12

    Signale un fait certes rcent (sinon il aurait employ le pass simple) mais achev, termin, dont lespoir na t quun germe.

    La gradation entre les deux verbes employs aux deux extrmits du pome

    Met en vidence le fait que le pote a sombr.En effet, le premier verbe prend des connotations de rapidit et de passage, pas forcment ngatives, alors que fui connoteplus ngativement la volont de partir, voire lerejet de celui qui reste.

    Ponctuation expressive dans ledernier quatrain

    Pour mettre en valeur lmotion du pote. Ainsi les (v.9) aprs le constat dchec ma jeunesse est finie peuvent tre interprts comme le silence du pote soumis une trop forte motion en ralisant son malheur tandis que les tirets (v.9 et v.12) marquent une autre pause, probablement toutaussi douloureuse dans lcriture du pome, pour signaler la souffrance du pote.