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Gérard de Nerval Le Roi de Bicêtre Raoul Spifame Éditions Sillage MMVI

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Gérard de Nerval

Le Roi de Bicêtre

Raoul Spifame

Éditions Sillage

MMVI

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Ce texte a été publié pour la première foisdans La Presse en date du 17-18 septembre 1839,sous le titre Biographie singulière de Raoul Spifame,Seigneur des Granges, et repris dans la RevuePittoresque en 1845 sous le titre Le Meilleur Roi deFrance. Il a été publié pour la première fois envolume dans le recueil Les Illuminés (Paris, V.Lecou, 1852).

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I

L’IMAGE

Nous allons vous raconter la folie d’unpersonnage fort singulier, qui vécut vers lemilieu du XVIe siècle. Raoul Spifame,seigneur Des Granges, était un suzerain sansseigneurerie, comme il y en avait tant déjàdans cette époque de guerres et de ruines quifrappaient toutes les hautes maisons deFrance. Son père ne lui laissa que peu defortune, ainsi qu’à ses frères Paul et Jean,tous deux célèbres, depuis, à différentstitres ; de sorte que Raoul, envoyé très jeuneà Paris, étudia les lois et se fit avocat.Lorsque le roi Henri deuxième succéda àson glorieux père François, ce prince vint en

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personne, après les vacances judiciaires quisuivirent son avènement, assister à la rentréedes chambres du parlement. Raoul Spifametenait une modeste place aux derniers rangsde l’assemblée, mêlé à la tourbe des légistesinférieurs, et portant pour toute décorationsa brassière de docteur en droit. Le roi étaitassis plus haut que le premier président,dans sa robe d’azur semée de France, etchacun admirait la noblesse et l’agrément desa figure, malgré la pâleur maladive quidistinguait tous les princes de cette race. Lediscours latin du vénérable chancelier futtrès long ce jour-là. Les yeux distraits duprince, las de compter les fronts penchés del’assemblée et les solives sculptées duplafond, s’arrêtèrent enfin longtemps sur unseul assistant placé tout à l’extrémité de lasalle, et dont un rayon de soleil illuminait enplein la figure originale ; si bien que peu àpeu tous les regards se dirigèrent aussi versle point qui semblait exciter l’attention du

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prince. C’était Raoul Spifame qu’on exami-nait ainsi.

Il semblait au roi Henri II qu’un portraitfût placé en face de lui, qui reproduisait toutesa personne, en transformant seulement ennoir ses vêtements splendides. Chacun fit demême cette remarque, que le jeune avocatressemblait prodigieusement au roi, et,d’après la superstition qui fait croire quequelque temps avant de mourir, on voit appa-raître sa propre image sous un costume dedeuil, le prince parut soucieux tout le reste dela séance. En sortant, il fit prendre des infor-mations sur Raoul Spifame, et ne se rassuraqu’en apprenant le nom, la position et l’ori-gine avérés de son fantôme. Toutefois, il nemanifesta aucun désir de le connaître, et laguerre d’Italie, qui reprit peu de temps après,lui ôta de l’esprit cette singulière impression.

Quant à Raoul, depuis ce jour, il ne fut plusappelé par ses compagnons du barreau queSire et Votre Majesté. Cette plaisanterie se

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prolongea tellement sous toutes sortes deformes, comme il arrive souvent parmi cesjeunes gens d’étude, qui saisissent toute occa-sion de se distraire et de s’égayer, que l’on a vudepuis dans cette obsession une des causespremières du dérangement d’esprit qui portaRaoul Spifame à diverses actions bizarres.Ainsi un jour il se permit d’adresser uneremontrance au premier président touchantun jugement, selon lui, mal rendu en matièred’héritage. Cela fut cause qu’il fut suspendude ses fonctions pendant un temps etcondamné à une amende. D’autres fois il osa,dans ses plaidoyers, attaquer les lois duroyaume, ou les opinions judiciaires les plusrespectées, et souvent même il sortait entière-ment du sujet de ses plaidoiries pour exprimerdes remarques très hardies sur le gouverne-ment, sans respecter toujours l’autorité royale.Cela fut poussé si loin, que les magistratssupérieurs crurent user d’indulgence en nefaisant que lui défendre entièrement l’exercice

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de sa profession. Mais Raoul Spifame serendait dès lors tous les jours dans la salle desPas-Perdus, où il arrêtait les passants pourleur soumettre ses idées de réforme et sesplaintes contre les juges. Enfin, ses frères et safille elle-même furent contraints à demanderson interdiction civile, et ce fut à ce titre seule-ment qu’il reparut devant un tribunal.

Cela produisit une grave révolution danstoute sa personnalité, car sa folie n’étaitjusque-là qu’une espèce de bon sens et delogique ; il n’y avait eu d’aberration que dansses imprudences. Mais s’il ne fut cité devant letribunal qu’un visionnaire nommé RaoulSpifame, le Spifame qui sortit de l’audienceétait un véritable fou, un des plus élastiquescerveaux que réclamassent les cabanons del’hôpital. En sa qualité d’avocat, Raoul s’étaitpermis de haranguer les juges, et il avaitamassé certains exemples de Sophocle etautres anciens accusés par leurs enfants, tousarguments d’une furieuse trempe ; mais le

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hasard en disposa autrement. Comme iltraversait le vestibule de la chambre desprocédures, il entendit cent voix murmurer :« C’est le roi ! voici le roi ! place au roi ! » Cesobriquet, dont il eût dû apprécier l’effetrailleur, produisit sur son intelligence ébranléel’effet d’une secousse qui détend un ressortfragile : la raison s’envola bien loin en chan-tonnant, et le vrai fou, bien et dûment écorné ducerveau, comme on avait dit de Triboulet, fitson entrée dans la salle, la barette en tête, lepoing sur la hanche, et s’alla placer sur sonsiège avec une dignité toute royale.

Il appela les conseillers : nos amés et féaux,et honora le procureur Noël Brûlot d’un Dieu-gard rempli d’aménité. Quant à lui-même,Spifame, il se chercha dans l’assemblée,regretta de ne point se voir, s’informa de sasanté, et toujours se mentionna à la troisièmepersonne, se qualifiant : « Notre amé RaoulSpifame, dont tous doivent bien parler. »Alors ce fut un haro général entremêlé de

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railleries, où les plaisants placés derrière luis’appliquaient à le confirmer dans ses folies,malgré l’effort des magistrats pour rétablirl’ordre et la dignité de l’audience. Une bonnesentence, facilement motivée, finit par recom-mander le pauvre homme à la sollicitude etadresse des médecins ; puis on l’emmena, biengardé, à la maison des fous, tandis qu’il distri-buait encore sur son passage force salutationsà son bon peuple de Paris.

Ce jugement fit bruit à la cour. Le roi, quin’avait point oublié son Sosie, se fit raconterles discours de Raoul, et comme on lui appritque ce sire improvisé avait bien imité lamajesté royale : « Tant mieux ! dit le roi ;qu’il ne déshonore pas pareille ressem-blance, celui qui a l’honneur d’être à notreimage. » Et il ordonna qu’on traitât bien lepauvre fou, ne montrant toutefois aucuneenvie de le revoir.

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II

LE REFLET

Durant plus d’un mois, la fièvre domptachez Raoul la raison rebelle encore, et quisecouait parfois rudement ses illusionsdorées. S’il demeurait assis dans sa chaise, lejour, à se rendre compte de sa triste identité,s’il parvenait à se reconnaître, à secomprendre, à se saisir, la nuit son existenceréelle lui était enlevée par des songes extra-ordinaires, et il en subissait une tout autre,entièrement absurde et hyperbolique ; pareilà ce paysan bourguignon qui, pendant sonsommeil, fut transporté dans le palais de sonduc, et s’y réveilla entouré de soins et d’hon-neurs, comme s’il fût le prince lui-même.

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Toutes les nuits, Spifame était le véritable roiHenri II ; il siégeait au Louvre, il chevauchaitdevant les armées, tenait de grands conseils,ou présidait à des banquets splendides.Alors, quelquefois, il se rappelait un avocatdu palais, seigneur Des Granges, pour lequelil ressentait une vive affection. L’aurore nerevenait pas sans que cet avocat n’eût obtenuquelque éclatant témoignage d’amitié et d’es-time : tantôt le mortier du président, tantôt lesceau de l’État ou quelque cordon de sesordres. Spifame avait la conviction que sesrêves étaient sa vie et que sa prison n’étaitqu’un rêve ; car on sait qu’il répétait souventle soir : « Nous avons bien mal dormi cettenuit ; oh ! les fâcheux songes ! »

On a toujours pensé depuis, enrecueillant les détails de cette existencesingulière, que l’infortuné était victime d’unede ces fascinations magnétiques dont lascience se rend mieux compte aujourd’hui.Tout semblable d’apparence au roi, reflet de

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cet autre lui-même et confondu par cettesimilitude dont chacun fut émerveillé,Spifame, en plongeant son regard dans celuidu prince, y puisa tout à coup la conscienced’une seconde personnalité ; c’est pourquoi,après s’être assimilé par le regard, il s’identi-fia au roi dans la pensée, et se figura désor-mais être celui qui, le seizième jour de juin1549, était entré dans la ville de Paris, par laporte Saint-Denis, parée de très belles etriches tapisseries, avec un tel bruit ettonnerre d’artillerie que toutes maisons entremblaient. Il ne fut pas fâché non plusd’avoir privé de leur office les sieurs Liget,François de Saint-André et AntoineMénard, présidents au parlement de Paris.C’était une petite dette d’amitié que Henripayait à Spifame.

Nous avons relevé avec intérêt tous lessinguliers périodes de cette folie, qui nepeuvent être indifférents pour cette sciencedes phénomènes de l’âme, si creusée par les

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philosophes, et qui ne peut encore, hélas !réunir que des effets et des résultats, enraisonnant à vide sur les causes que Dieunous cache ! Voici une bizarre scène qui futrapportée par un des gardiens au médecinprincipal de la maison. Cet homme, à qui leprisonnier faisait des largesses toutes royales,avec le peu d’argent qu’on lui attribuait surses biens séquestrés, se plaisait à orner de sonmieux la cellule de Raoul Spifame, et y plaçaun jour un antique miroir d’acier poli, lesautres étant défendus dans la maison, par lacrainte qu’on avait que les fous ne se blessas-sent en les brisant. Spifame n’y fit d’abordque peu d’attention ; mais quand le soir futvenu, il se promenait mélancoliquement danssa chambre, lorsque au milieu de sa marchel’aspect de sa figure reproduite le fit s’arrêtertout à coup. Forcé, dans cet instant de veille,de croire à son individualité réelle, tropconfirmée par les triples murs de sa prison, ilcrut voir tout à coup le roi venir à lui, d’abord

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d’une galerie éloignée, et lui parler par unguichet comme compatissant à son sort, surquoi il se hâta de s’incliner profondément.Lorsqu’il se releva, en jetant les yeux sur leprétendu prince, il vit distinctement l’imagese relever aussi, signe certain que le roi l’avaitsalué, ce dont il conçut une grande joie ethonneur infini. Alors il s’élança dans d’im-menses récriminations contre les traîtres quil’avaient mis dans cette situation, l’ayantnoirci sans doute près de Sa Majesté. Ilpleura même, le pauvre gentilhomme, enprotestant de son innocence, et demandant àconfondre ses ennemis ; ce dont le princeparut singulièrement touché ; car une larmebrillait en suivant les contours de son nezroyal. À cet aspect un éclair de joie illuminales traits de Spifame ; le roi souriait déjà d’unair affable ; il tendit la main ; Spifame avançala sienne, le miroir, rudement frappé, se déta-cha de la muraille, et roula à terre avec unbruit terrible qui fit accourir les gardiens.

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La nuit suivante, ordre fut donné par lepauvre fou, dans son rêve, d’élargir aussitôtSpifame, injustement détenu, et faussementaccusé d’avoir voulu, comme favori, empié-ter sur les droits et attributions du roi, sonmaître et son ami : création d’un haut officede directeur du sceau royal 1 en faveur duditSpifame, chargé désormais de conduire àbien les choses périclitantes du royaume.Plusieurs jours de fièvre succédèrent à laprofonde secousse que tous ces gravesévénements avaient produite sur un telcerveau. Le délire fut si grave que le méde-cin s’en inquiéta et fit transporter le fou dansun local plus vaste, où l’on pensa que lacompagnie d’autres prisonniers pourrait detemps en temps le détourner de ses médita-tions habituelles.

1. Voir les Mémoires de la Société des inscriptionset belles-lettres, tome XXIII. (N. d. A.)

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III

LE POÈTE DE COUR

Rien ne saurait prouver mieux quel’histoire de Spifame combien est vraie lapeinture de ce caractère, si fameux enEspagne, d’un homme fou par un seul endroitdu cerveau, et fort sensé quant au reste de salogique ; on voit bien qu’il avait consciencede lui-même, contrairement aux insensésvulgaires qui s’oublient et demeurentconstamment certains d’être les personnagesde leur invention. Spifame, devant un miroirou dans le sommeil, se retrouvait et sejugeait à part, changeant de rôle et d’indivi-dualité tour à tour, être double et distinctpourtant, comme il arrive souvent qu’on se

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sent exister en rêve. Du reste, comme nousdisions tout à l’heure, l’aventure du miroiravait été suivie d’une crise très forte, aprèslaquelle le malade avait gardé une humeurmélancolique et rêveuse qui fit songer à luidonner une société.

On amena dans sa chambre un petithomme demi-chauve, à l’œil vert, qui secroyait, lui, le roi des poètes, et dont la folieétait surtout de déchirer tout papier ouparchemin non écrit de sa main, parce qu’ilcroyait y voir les productions rivales desmauvais poètes du temps qui lui avaient voléles bonnes grâces du roi Henri et de la cour.On trouva plaisant d’accoupler ces deuxfolies originales et de voir le résultat d’unepareille entrevue. Ce personnage s’appelaitClaude Vignet, et prenait le titre de poèteroyal. C’était, du reste, un homme fort doux,dont les vers étaient assez bien tournés etméritaient peut-être la place qu’il leur assi-gnait dans sa pensée.

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En entrant dans la chambre de Spifame,Claude Vignet fut terrassé : les cheveuxhérissés, la prunelle fixe, il n’avait fait un pasen avant que pour tomber à genoux.

« Sa Majesté !… s’écria-t-il.– Relevez-vous, mon ami, dit Spifame en

se drapant dans son pourpoint, dont iln’avait passé qu’une manche ; qui êtes-vous ?

– Méconnaîtriez-vous le plus humble devos sujets et le plus grand de vos poètes,ô grand roi ?… Je suis Claudius Vignetus,l’un de la Pléiade, l’auteur illustre du sonnetqui s’adresse aux vagues crespelées… Sire,vengez-moi d’un traître, du bourreau demon honneur ! de Mellin de Saint-Gelais !

– Hé quoi ! de mon poète favori, dugardien de ma bibliothèque ?

– Il m’a volé, sire ! il m’a volé monsonnet ! il a surpris vos bontés…

– Est-ce vraiment un plagiaire !… Alors,je veux donner sa place à mon brave

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Spifame, à présent en voyage pour les inté-rêts du royaume.

– Donnez-la plutôt à moi ! sire ! et jeporterai votre renom de l’orient au ponant,sur toute la surface terrienne.

Ô sire ! que ton los mes rimes éternisent !…

– Vous aurez mille écus de pension, etmon vieux pourpoint, car le vôtre est biendécousu.

– Sire, je vois bien qu’on vous avaitjusqu’ici caché mes sonnets et mes épîtres,tous à vous adressés. Ainsi arrive-t-il dansles cours…

Ce séjour odieux des fourbes nuageuses.

– Messire Claudius Vignetus, vous ne mequitterez plus ; vous serez mon ministre, etvous mettrez en vers mes arrêts et mesordonnances. C’est le moyen d’en éterniser

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la mémoire. Et maintenant, voici l’heure oùnotre amée Diane vient à nous. Vouscomprenez qu’il convient de nous laisserseuls. »

Et Spifame, après avoir congédié lepoète, s’endormit dans sa chaise longue,comme il avait coutume de le faire une heureaprès le repas.

Au bout de peu de jours les deux fousétaient devenus inséparables, chacuncomprenant et caressant la pensée de l’autre,et sans jamais se contrarier dans leursmutuelles attributions. Pour l’un, ce poèteétait la louange qui se multiplie sous toutesles formes à l’entour des rois et les confirmedans leur opinion de supériorité ; pourl’autre, cette ressemblance incroyable était lacertitude de la présence du roi lui-même. Iln’y avait plus de prison, mais un palais ; plusde haillons, mais des parures étincelantes ;l’ordinaire des repas se transformait enbanquets splendides, où, parmi les concerts

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de violes et de buccines, montait l’encensharmonieux des vers.

Spifame, après ses rêveries, était commu-nicatif, et Vignet se montrait surtout enthou-siaste après le dîner. Le monarque racontaun jour au poète tout ce qu’il avait eu àendurer de la part des écoliers, ces turbu-lents aboyeurs, et lui développa ses plans deguerre contre l’Espagne ; mais sa plus vivesollicitude se portait, comme on le verra ci-après, sur l’organisation et l’embellissementde la ville principale du royaume, dont lestoits innombrables se déroulaient au loinsous les fenêtres des prisonniers.

Vignet avait des moments lucides,pendant lesquels il distinguait fort clairementle bruit des barreaux de fer entre-choqués,des cadenas et des verrous. Cela le conduisità penser qu’on enfermait Sa Majesté detemps en temps, et il communiqua cetteobservation judicieuse à Spifame, qui répon-dit mystérieusement que ses ministres

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jouaient gros jeu, qu’il devinait tous leurscomplots, et qu’au retour du chancelierSpifame les choses changeraient d’allure ;qu’avec l’aide de Raoul Spifame et de ClaudeVignet, ses seuls amis, le roi de France sorti-rait d’esclavage et renouvellerait l’âge d’orchanté par les poètes.

Sur quoi Claude Vignet fit un quatrainqu’il offrit au roi comme une avance debénédiction et de gloire :

Par toy vient la chaleur aux verdissantes prées,Vient la vie aux troupeaux, à l’oiseau ramageux,Tu es donc le soleil, pour les coteaux neigeuxTransmuer en moissons et collines pamprées !

La délivrance se faisant attendre beau-coup, Spifame crut devoir avertir son peuplede la captivité où le tenaient des conseillersperfides ; il composa une proclamation,mandant à ses sujets loyaux qu’ils eussent às’émouvoir en sa faveur ; et lança en même

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temps plusieurs édits et ordonnances fortsévères ; ici le mot lança est fort exact, carc’était par sa fenêtre, entre les barreaux,qu’il jetait ses chartes, roulées et lestées depetites pierres. Malheureusement, les unestombaient sur un toit à porcs, d’autres seperdaient dans l’herbe drue d’un préaudésert situé au-dessous de sa fenêtre ; une oudeux seulement, après mille jeux en l’air, s’al-lèrent percher comme des oiseaux dans lefeuillage d’un tilleul situé au-delà des murs.Personne ne les remarqua d’ailleurs.

Voyant le peu d’effet de tant de manifes-tations publiques, Claude Vignet imaginaqu’elles n’inspiraient pas de confiance, étantsimplement manuscrites, et s’occupa defonder une imprimerie royale qui serviraittour à tour à la reproduction des édits du roiet à celle de ses propres poésies. Vu le peu demoyens dont il pouvait disposer, son inven-tion dut remonter aux éléments premiers del’art typographique. Il parvint à tailler, avec

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une patience infinie, vingt-cinq lettres debois, dont il se servit, pour marquer, lettre àlettre, les ordonnances rendues fort courtesà dessein : l’huile et la fumée de sa lampe luifournissant l’encre nécessaire.

Dès lors les bulletins officiels se multi-plièrent sous une forme beaucoup plussatisfaisante. Plusieurs de ces pièces,conservées et réimprimées plusieurs foisdepuis, sont fort curieuses, notamment cellequi déclare que le roi Henri deuxième, enson conseil, ouïes les clameurs pitoyablesdes bonnes gens de son royaume contre lesperfidies et injustices de Paul et JeanSpifame, tous deux frères du fidèle sujet dece nom, les condamnait à être tenaillés,écorchés et boullus. Quant à la fille ingratede Raoul Spifame, elle devait être fouettéeen plein pilori, et enfermée ensuite auxfilles repenties.

L’une des ordonnances les plus mémo-rables qui aient été conservées de cette

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période, est celle où Spifame, gardantrancune du premier arrêt des juges qui luiavait défendu l’entrée de la salle des Pas-Perdus, pour y avoir péroré de façon impru-dente et exorbitante, ordonne, de par le roi,à tous huissiers, gardes ou suppôts judi-ciaires, de laisser librement pénétrer dansladite salle son ami et féal Raoul Spifame ;défendant à tous avocats, plaideurs, passantset autres canailles, de gêner en rien lesmouvements de son éloquence ou les agré-ments nonpareils de sa conversation fami-lière touchant toutes les matières politiqueset autres sur lesquelles il lui plairait de direson avis.

Ses autres édits, arrêts et ordonnances,conservés jusqu’à nous, comme rendus aunom d’Henri II, traitent de la justice, desfinances, de la guerre, et surtout de la policeintérieure de Paris.

Vignet imprima, en outre, pour soncompte, plusieurs épigrammes contre ses

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rivaux en poésie, dont il s’était fait donnerdéjà les places, bénéfices et pensions. Il fautdire que ne voyant guère qu’eux seuls aumonde, les deux compagnons s’occupaientsans relâche, l’un à demander des faveurs,l’autre à les prodiguer.

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IV

L’ÉVASION

Après nombre d’édits et d’appels à la fidé-lité de la bonne ville de Paris, les deux prison-niers s’étonnèrent enfin de ne voir poindreaucune émotion populaire, et de se réveillertoujours dans la même situation. Spifameattribua ce peu de succès à la surveillance desministres, et Vignet à la haine constante deMellin et de Du Bellay. L’imprimerie futfermée quelques jours ; on rêva à des résolu-tions plus sérieuses, on médita des coupsd’État. Ces deux hommes qui n’eussentjamais songé à se rendre libres pour êtrelibres, ourdirent enfin un plan d’évasiontendant à dessiller les yeux des Parisiens et à

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les provoquer au mépris de la Sophonisbe deSaint-Gelais et de la Franciade de Ronsard.

Ils se mirent à desceller les barreaux par lebas, lentement, mais faisant disparaître àmesure toutes les traces de leur travail, etcela fut d’autant plus aisé qu’on les connais-sait tranquilles, patients et heureux de leurdestinée. Les préparatifs terminés, l’imprime-rie fut rouverte, les libelles de quatre lignes,les proclamations incendiaires, les poésiesprivilégiées firent partie du bagage, et, versminuit, Spifame ayant adressé une courtemais vigoureuse allocution à son confident,ce dernier attacha les draps du prince à unbarreau resté intact, y glissa le premier, etreleva bientôt Spifame qui, aux deux tiers dela descente, s’était laissé tomber dans l’herbeépaisse, non sans quelques contusions.Vignet ne tarda pas dans l’ombre à trouver levieux mur qui donnait sur la campagne ; plusagile que Spifame, il parvint à en gagner lacrête, et tendit de là sa jambe à son gracieux

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souverain, qui s’en aida beaucoup, appuyantle pied au reste des pierres descellées du mur.Un instant après le Rubicon était franchi.

Il pouvait être trois heures du matinquand nos deux héros en liberté gagnèrentun fourré de bois, qui pouvait les déroberlongtemps aux recherches ; mais ils nesongeaient pas à prendre des précautions trèsminutieuses, pensant bien qu’il leur suffiraitd’être hors de captivité pour être reconnus,l’un de ses sujets, l’autre de ses admirateurs.

Toutefois, il fallut bien attendre que lesportes de Paris fussent ouvertes, ce qui n’ar-riva pas avant cinq heures du matin. Déjà laroute était encombrée de paysans qui appor-taient leurs provisions aux marchés. Raoultrouva prudent de ne pas se dévoiler avantd’être parvenu au cœur de sa bonne ville ; iljeta un pan de son manteau sur sa mous-tache, et recommanda à Claude Vignet devoiler encore les rayons de sa face apollo-nienne sous l’aile rabattue de son feutre gris.

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Après avoir passé la porte Saint-Victor, etcôtoyé la rivière de Bièvre, en traversant lescultures verdoyantes qui s’étalaient longtempsencore à droite et à gauche, avant d’arriveraux abords de l’île de la Cité, Spifame confiaà son favori qu’il n’eût pas entrepris certesune expédition aussi pénible, et ne se fût passoumis par prudence à un si honteux inco-gnito, s’il ne s’agissait pour lui d’un intérêtbeaucoup plus grave que celui de sa liberté etde sa puissance. Le malheureux était jaloux !jaloux de qui ? de la duchesse de Valentinois,de Diane de Poitiers, sa belle maîtresse qu’iln’avait pas vue depuis plusieurs jours, et quipeut-être courait mille aventures loin de sonchevalier royal. « Patience, dit ClaudeVignet, j’aiguise en ma pensée desépigrammes martialesques qui puniront cetteconduite légère. Mais votre père François ledisait bien : Souvent femme varie !… » Endiscourant ainsi, ils avaient pénétré déjà dansles rues populeuses de la rive droite, et se

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trouvèrent bientôt sur une assez grandeplace, située au voisinage de l’église desSS. Innocents, et déjà couverte de monde,car c’était un jour de marché.

En remarquant l’agitation qui se produi-sait sur la place, Spifame ne put cacher sasatisfaction. « Ami, dit-il au poète, toutoccupé de ses chaussures qui le quittaient enroute, vois comme ces bourgeois et ces cheva-liers s’émeuvent déjà, comme ces visages sontenflammés d’ire, comme il vole dans la régionmoyenne du ciel des germes de mécontente-ment et de sédition ! Tiens, vois celui-ci avecsa pertuisane… Oh ! les malheureux, quivont émouvoir des guerres civiles !Cependant pourrai-je commander à mesarquebusiers de ménager tous ces hommesinnocents aujourd’hui parce qu’ils secondentmes projets, et coupables demain parce qu’ilsméconnaîtront peut-être mon autorité ?

– Mobile vulgus », dit Vignet.

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V

LE MARCHÉ

En jetant les yeux vers le milieu de laplace, Spifame éprouva un sentiment desurprise et de colère dont Vignet luidemanda la cause. « Ne voyez-vous pas, ditle prince irrité, ne voyez-vous pas cettelanterne de pilori qu’on a laissée au méprisde mes ordonnances. Le pilori est supprimé,monsieur, et voilà de quoi faire casser leprévôt et tous les échevins, si nous n’avionsnous-même borné sur eux notre autoriéroyale. Mais c’est à notre peuple de Parisqu’il appartient d’en faire justice.

– Sire, observa le poète, le populaire nesera-t-il pas bien plus courroucé d’apprendre

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que les vers gravés sur cette fontaine, et quisont du poète Du Bellay, renferment dans unseul distique deux fautes de quantité ! humidasceptra, pour l’hexamètre, ce que défend laprosodie à l’encontre d’Horatius, et unefausse césure au pentamètre.

– Holà ! cria Spifame sans se trop préoc-cuper de cette dernière observation, holà !bonnes gens de Paris, rassemblez-vous, etnous écoutez paisiblement.

– Écoutez bien le roi qui veut vous parleren personne », ajouta Claude Vignet, criantde toute la force de ses poumons.

Tous deux étaient montés déjà sur unepierre haute, qui supportait une croix defer : Spifame debout, Claude Vignet assis àses pieds. À l’entour la presse était grande,et les plus rapprochés s’imaginèrentd’abord qu’il s’agissait de vendre desonguents ou de crier des complaintes et desnoëls. Mais tout à coup Raoul Spifame ôtason feutre, dérangea sa cape, qui laissa voir

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un étincelant collier d’ordres tout de verro-teries et de cliquant qu’on lui laissait porterdans sa prison pour flatter sa manie incu-rable, et sous un rayon de soleil quibaignait son front à la hauteur où il s’étaitplacé, il devenait impossible de mécon-naître la vraie image du roi Henrideuxième, qu’on voyait de temps en tempsparcourir la ville à cheval.

« Oui ! criait Claude Vignet à la fouleétonnée : c’est bien le roi Henri que vousavez au milieu de vous, ainsi que l’illustrepoète Claudius Vignetus, son ministre et sonfavori, dont vous savez par cœur les œuvrespoétiques…

– Bonnes gens de Paris ! interrompaitSpifame, écoutez la plus noire des perfidies.Nos ministres sont des traîtres, nos magis-trats sont des félons !… Votre roi bien-aiméa été tenu dans une dure captivité, commeles premiers rois de sa race, comme le roiCharles sixième, son illustre aïeul… »

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À ces paroles, il y eut dans la foule unlong murmure de surprise, qui se communi-qua fort loin : on répétait partout : « Le roi !le roi !… » On commentait l’étrange révéla-tion qu’il venait de faire ; mais l’incertitudeétait grande encore, lorsque Claude Vignettira de sa poche le rouleau des édits, arrêts etordonnances, et les distribua dans la foule,en y mêlant ses propres poésies.

« Voyez, disait le roi, ce sont les édits quenous avons rendus pour le bien de notrepeuple, et qui n’ont été publiés ni exécutés…

– Ce sont, disait Vignet, les divinespoésies traîtreusement pillées, soustraites etgâtées par Pierre de Ronsard et Mellin deSaint-Gelais.

– On tyrannise, sous notre nom, le bour-geois et le populaire…

– On imprime la Sophonisbe et la Franciadeavec un privilège du roi, qu’il n’a pas signé !

– Écoutez cette ordonnance qui supprimela gabelle, et cette autre qui anéantit la taille…

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– Oyez ce sonnet en syllabes scandées àl’imitation des latins… »

Mais déjà l’on n’entendait plus les parolesde Spifame et de Vignet ; les papiers répan-dus dans la foule et lus de groupe en groupe,excitaient une merveilleuse sympathie :c’étaient des acclamations sans fin. On finitpar élever le prince et son poète sur unesorte de pavois composé à la hâte, et l’onparla de les transporter à l’Hôtel de Ville, enattendant que l’on se trouvât en force suffi-sante pour attaquer le Louvre, que lestraîtres tenaient en leur possession.

Cette émotion populaire aurait pu êtrepoussée fort loin, si la même journée n’eûtpas été justement celle où la nouvelle épousedu dauphin François, Marie d’Écosse, faisaitson entrée solennelle par la porte Saint-Denis. C’est pourquoi, pendant qu’onpromenait Raoul Spifame dans le marché, levrai roi Henri deuxième passait à cheval lelong des fossés de l’hôtel de Bourgogne. Au

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grand bruit qui se faisait non loin de là,plusieurs officiers se détachèrent et revin-rent aussitôt rapporter qu’on proclamait unroi sur le carreau des halles. « Allons à sarencontre, dit Henri II, et, foi de gentil-homme (il jurait comme son père), si celui-cinous vaut, nous lui offrirons le combat. »

Mais, à voir les hallebardiers du cortègedéboucher par les petites rues qui donnaientsur la place, la foule s’arrêta, et beaucoupfuirent tout d’abord par quelques ruesdétournées. C’était, en effet, un spectaclefort imposant. La maison du roi se rangea enbelle ordonnance sur la place ; les lansque-nets, les arquebusiers et les Suisses garnis-saient les rues voisines. M. de Bassompierreétait près du roi, et sur la poitrine deHenri II brillaient les diamants de tous lesordres souverains de l’Europe. Le peupleconsterné n’était plus retenu que par sapropre masse qui encombrait toutes lesissues : plusieurs criaient au miracle, car il y

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avait bien là devant eux deux rois deFrance ; pâles l’un comme l’autre, fiers tousles deux, vêtus à peu près de même ; seule-ment, le bon roi brillait moins.

Au premier mouvement des cavaliers versla foule, la fuite fut générale, tandis queSpifame et Vignet faisaient seuls bonnecontenance sur le bizarre échafaudage où ilsse trouvaient placés ; les soldats et lessergents se saisirent d’eux facilement.

L’impression que produisit sur le pauvrefou l’aspect de Henri lui-même, lorsqu’il futamené devant lui, fut si forte qu’il retombaaussitôt dans une de ses fièvres les plusfurieuses, pendant laquelle il confondaitcomme autrefois ses deux existences deHenri et de Spifame, et ne pouvait s’y recon-naître, quoi qu’il fît. Le roi, qui fut informébientôt de toute l’aventure, prit pitié de cemalheureux seigneur, et le fit transporterd’abord au Louvre, où les premiers soins luifurent donnés, et où il excita longtemps la

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curiosité des deux cours, et, il faut le dire,leur servit parfois d’amusement.

Le roi, ayant remarqué d’ailleurs combienla folie de Spifame était douce et toujoursrespectueuse envers lui, ne voulut pas qu’ilfût renvoyé dans cette maison de fous oùl’image parfaite du roi se trouvait parfoisexposée à de mauvais traitements ou auxrailleries des visiteurs et des valets. Ilcommanda que Spifame fût gardé dans unde ses châteaux de plaisance, par des servi-teurs commis à cet effet, qui avaient ordre dele traiter comme un véritable prince et del’appeler Sire et Majesté. Claude Vignet lui futdonné pour compagnie, comme par le passé,et ses poésies, ainsi que les ordonnancesnouvelles que Spifame composait encoredans sa retraite, étaient imprimées et conser-vées par les ordres du roi.

Le recueil des arrêts et ordonnancesrendus par ce fou célèbre fut entièrementimprimé sous le règne suivant avec ce titre :

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Dicœarchiæ Henrici regis progymnasmata. Il enexiste un exemplaire à la bibliothèqueroyale sous les numéros VII, 6, 412. Onpeut voir aussi les Mémoires de la Sociétédes inscriptions et belles-lettres, tomeXXIII. Il est remarquable que les réformesindiquées par Raoul Spifame ont été laplupart exécutées depuis.

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Gérard Labrunie naît en 1808 à Paris. Après lamort de sa mère, il est élevé à Mortefontaine, dansl’Oise, par son grand-oncle Antoine Boucher. Lejeune garçon rencontre Théophile Gautier auLycée Charlemagne à Paris. Sa traduction deFaust, publiée en 1827, suscite l’enthousiasme deGoethe lui-même. Commence alors la vie debohème ; le poète se lie au cercle des jeunesromantiques qui soutiennent Victor Hugo dans labataille d’Hernani.

Après un voyage en Italie entrepris en 1834,Nerval fonde une revue pour l’actrice JennyColon, Le Monde dramatique, qui le ruinera en unan. Tout en publiant romans et drames (dontLéo Burckart, représenté pour la première foisen 1839), il vit tant bien que mal de son métierde journaliste.

Sa première crise nerveuse survient en 1841.Il effectue un séjour à la clinique du docteur

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Blanche. Il passe toute l’année 1843 en Orient eteffectue divers voyages les années qui suivent.En 1848, il traduit pour la Revue des Deux Mondesdes poèmes de Heine, avec qui il se lie. Ilséjourne à nouveau chez le docteur Blancheaprès la publication du Voyage en Orient en 1851.

Les quatre dernières années de sa vie,marquées par la maladie et la misère, serontpourtant une intense période d’écriture et depublications. En 1852, Nerval publie Les Illuminés.En 1853 il fait notamment paraître Sylvie ; ilachève Les Filles du feu et Les Chimères. Menantune vie errante, il écrit Aurélia. Le 26 janvier1855, Nerval est retrouvé pendu rue de laVieille-Lanterne.

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l’Académie des Inscriptions et des Belles-LettresStephen Crane, Le Bateau ouvertStephen Crane, La Conquête du courageEugène Dabit, Un mort tout neufJoseph von Eichendorff, La Statue de marbre

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Hanns Heinz Ewers, Tannhäuser crucifiéRicardo Güiraldes, Don Segundo SombraThomas Hardy, Le Maire de CasterbridgeNathaniel Hawthorne, L’Expérience du docteur

HeideggerE. T. A. Hoffmann, Le Choix d’une fiancéeJoris-Karl Huysmans, En ménageHenry James, L’ÉlèveYasunari Kawabata, Nuée d’oiseaux blancRudyard Kipling, Le Perturbateur du traficRudyard Kipling, Simples contes des collinesValery Larbaud, AllenPierre Mac Orlan, Le Rire jaune et autres textesHerman Melville, Le Grand EscrocVeijo Meri, Une histoire de cordeFrancisco de Quevedo, El BuscónJules Renard, L’ÉcornifleurM. E. Saltykov-Chtchédrine, Les GolovlevLucien de Samosate, L’Ignorant BibliomaneScarron, Le Châtiment de l’avarice

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Victor Segalen, Un grand fleuveRobert Louis Stevenson, Aes TriplexRobert Louis Stevenson, MendiantsRobert Louis Stevenson, Les Porteurs de lanternesIvan Tourguéniev, Dimitri RoudineIvan Tourguéniev, FuméeB. Traven, Le Trésor de la Sierra MadreRamón del Valle-Inclán, La Guerre carliste