No de cahier RQ -03-2011 L’économie sociale et les ...
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No de cahier RQ -03-2011 L’économie sociale et les personnes immigrantes au Québec : opportunité, effet de parcours ou dernier recours?
Par Valérie Chamberland
et Lucie Dumais
Projet économie sociale et personnes issues de l’immigration
Copublication : RQRP-ÉS et LAREPPS
Janvier 2011
ii
Cahier du RQRP-ÉS
RQ-O8-2010
« L’économie sociale et les personnes immigrantes au Québec : opportunité, effet de parcours ou dernier recours? » Par Valérie Chamberland et Lucie Dumais Collaboration à la production de la recherche :
Chantal Aznavourian, Denis Bussières et Jean-Marc Fontan
Copublication :
Réseau québécois de recherche partenariale en économie sociale (RQRP-ÉS)
Laboratoire de recherche sur les pratiques et les politiques sociales (LAREPPS)
Révision linguistique : Francine Pomerleau
ISBN : 978-2-89276-500-7
Dépôt légal : 2011
Bibliothèque et Archives nationales du Québec
Bibliothèque et Archives Canada
Présentat ion de l ’ARUC-ÉS et du RQRP-ÉS
L’Alliance de recherche universités-communautés en économie sociale (ARUC-ÉS) et le Réseau québécois de
recherche partenariale en économie sociale (RQRP-ÉS) sont des organismes partenariaux de recherche financés par
le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. Ce consortium de recherche en économie sociale réalise
des activités de réflexion, de recherche et de valorisation des connaissances en économie sociale. Ses actions
contribuent à la reconnaissance et à l’essor de l’économie sociale comme outil de développement social, culturel,
politique et économique du Québec.
L’ARUC-ÉS, créée en 2000, est le premier centre de recherche interuniversitaire québécois entièrement consacré à
la recherche partenariale. Ses activités portent sur différents secteurs de l’économie sociale : l’habitat
communautaire, les services aux personnes, le loisir et le tourisme social, la finance et le développement local et
régional. Créé en 2005, le RQRP-ÉS est, quant à lui, l’un des six centres canadiens voués à la recherche partenariale
en économie sociale. Ses activités sont décentralisées dans les huit régions du Québec où l’on trouve une institution
universitaire et ses objets de recherche s’articulent autour des particularités de chacune de ces régions. Les deux
centres cohabitent sous le même toit, à Montréal.
Présentation de l ’ARUC-ÉS et du RQRP-ÉS
iv
Résumé
Dans le cadre du plan d’action du Comité d’orientation - Économie sociale et communautés culturelles du Chantier
de l’économie sociale, nous avons brossé une première esquisse de la situation des immigrants au sein des
entreprises d’économie sociale (EÉS) au Québec. Nous avons fait des constats sur les parcours professionnels de
gestionnaires immigrants d’EÉS et sur leur appréciation du secteur. Nous avons aussi effectué une enquête
comparative sur les mêmes thèmes avec des travailleurs, immigrants ou natifs du Canada, ainsi qu’auprès
d’administrateurs bénévoles.
Les 16 gestionnaires immigrants interrogés relèvent surtout deux types de difficultés : celles liées au démarrage et à
la consolidation de l’entreprise, qui ne diffèrent pas de celles que rencontrent les entrepreneurs natifs du Canada;
et celles inhérentes à l’immigration (apprendre la langue, se réseauter, connaître le marché et les ressources), mais
qui leur paraissent secondaires. Les EÉS qu’ils gèrent comptent une majorité de travailleurs et de bénévoles
immigrants. Notre analyse de 305 questionnaires complétés par des travailleurs immigrants et natifs nous révèle
que, globalement, en dépit de situations d’emploi et de parcours différents, il y a peu de différences significatives
dans l’appréciation que font les immigrants et les natifs de leur milieu de travail et de l’économie sociale. Dix-huit
(18) questions d’appréciation ont été utilisées pour la comparaison. Par exemple, 70 % des immigrants disent ne pas
travailler dans leur domaine de formation comparativement à 35 % des natifs, tandis que plus d’immigrants pensent
que leur emploi actuel les aidera à obtenir un autre emploi. En revanche, immigrants et natifs s’entendent pour dire
que si les salaires en EÉS sont peu intéressants, le climat de travail est agréable et ouvert aux différences de
chacun. Quant aux 32 questionnaires complétés par les bénévoles administrateurs, ils nous apprennent que les
conseils d’administration d’EÉS sont largement constitués de natifs, ce qui n’empêche pas les quelques
administrateurs immigrants d’occuper des postes exécutifs.
En dépit d’efforts méthodologiques pour être le plus systématique possible, notre recherche ressort avec des
constats qui ne peuvent être généralisés sans nuances à l’ensemble du tiers secteur. Mais en faisant un geste
modeste pour dresser le portrait des immigrants en économie sociale, elle indique aussi qu’il est urgent de mieux
apprécier la situation au vu du défi démographique et économique à venir au Québec.
Mots clés : Économie sociale; Immigrants; Entrepreneuriat; Emplois; Conditions de travail.
Résumé
vi
Remerc iements
Soutien financier
La réalisation de cette recherche a été rendue possible grâce au soutien financier du Groupe régional d’activités
partenariales de Montréal (GRAP) du Réseau québécois de recherche partenariale en économie sociale (RQRP-ÉS) et
du Chantier de l’économie sociale (CÉS), ainsi qu’à l’appui du Laboratoire de recherche sur les pratiques et les
politiques sociales (LAREPPS). Comité d’orientation et comité de recherche
Constitué pour la mise en oeuvre de l’axe 1 du plan d’action du Comité d’orientation - Économie sociale et
communautés culturelles du CÉS, un sous-comité de recherche partenariale a supervisé activement les travaux de la
présente enquête. Nous remercions tous les membres du sous-comité, lequel était composé de : Chantal
Aznavourian et Martin Frappier, Chantier de l’économie sociale; Dominique Fortier, Ville de Montréal; Lucie Bernier,
ministère de l’Immigration et Communautés culturelles (MICC); Nicole Moreau, ministère des Affaires municipales,
des Régions et de l'Occupation du territoire (MAMROT); Maria Cristina Gonzalez, Compagnie F; Ralph Rouzier, Conseil
des relations interculturelles; Céline Charpentier, Comité sectoriel de la main-d’oeuvre en économie sociale et
action communautaire (CSMO-ÉSAC); Denis Bussières et Jean-Marc Fontan (RQRP-ÉS); Valérie Chamberland et Lucie
Dumais (LAREPPS).
Participants à la recherche
Nous remercions enfin les gestionnaires, travailleurs et bénévoles d’organisations ou d’entreprises d’économie
sociale qui ont accepté de participer à notre enquête. Merci à Ralph Rouzier et à Martin Frappier pour leurs commentaires complémentaires.
Remerciements
viii
Table des matières
PRÉSENTATION DE L’ARUC-ÉS ET DU RQRP-ÉS ..................................................................................... iii
RÉSUMÉ.................................................................................................................................... v
REMERCIEMENTS ....................................................................................................................... vii
LISTE DES TABLEAUX ET DES GRAPHIQUES .......................................................................................... xi
LISTE DES ABRÉVIATIONS, SIGLES ET ACRONYMES .............................................................................xiii
Contexte de la recherche ............................................................................................................ 15
Terminologie ........................................................................................................................... 17
Revue de littérature .................................................................................................................. 19
Premier volet d’étude: Enquête qualitative auprès des gestionnaires immigrants ......................................... 23
Méthode d’enquête......................................................................................................... 23Population à l’étude et stratégie d’enquête ....................................................................... 23Méthodologie, recrutement, échantillon retenu ................................................................... 23Profil des répondants................................................................................................... 25
Résultats d’enquête ........................................................................................................ 26Quelques données sur les entreprises dirigées par les répondants.............................................. 26Qu’est-ce que l’économie sociale pour les répondants? Les éléments de définition......................... 29Motivations et choix de travailler en économie sociale........................................................... 31Ce que les répondants aiment de l’économie sociale ............................................................. 32Ce que les répondants n’aiment pas de l’économie sociale...................................................... 33Obstacles caractéristiques des entreprises d’économie sociale ................................................. 35Obstacles associés au fait d’être immigrant........................................................................ 36Liens et réseaux d’affaires des gestionnaires immigrants ........................................................ 38Autres points de vue des répondants ................................................................................ 39Conclusion de l’enquête auprès des gestionnaires ................................................................ 40
Second volet d’étude: Enquête quantitative auprès des travailleurs et des bénévoles .................................... 43
Méthode d’enquête......................................................................................................... 43Population à l’étude et stratégie d’enquête ....................................................................... 43Méthodologie, recrutement, échantillon retenu ................................................................... 43Limites méthodologiques .............................................................................................. 45
Résultats d’enquête ........................................................................................................ 45Profil des travailleurs ayant participé à l’enquête ................................................................ 45La situation des travailleurs en économie sociale ................................................................. 47Conclusion de l’enquête auprès des travailleurs................................................................... 56Profil des bénévoles ayant participé à l’enquête .................................................................. 57
Conclusion générale ................................................................................................................... 59
Bibliographie ........................................................................................................................... 61
Annexe 1: Questionnaires ............................................................................................................ 63
Table des matières
x
L is te des tab leaux et des graph iques
Tableau 1 : Population des gestionnaires immigrants en économie sociale et échantillon d’étude .................... 24
Tableau 2 : Information sur les travailleurs des (sept) entreprises d’économie sociale sondées ....................... 27
Tableau 3 : Information sur les bénévoles des (sept) entreprises d’économie sociale sondées ......................... 28
Tableau 4 : Secteurs, quartiers et formes d’entreprises ciblées ............................................................. 44
Tableau 5: Profil des travailleurs ayant participé à l’enquête .............................................................. 46
Tableau 6 : Appréciation des travailleurs à l’affirmation « Vos compétences sont mises à profit dans l’organisation où vous travaillez » (N=294) ......................................................................................... 48
Tableau 7 : Appréciation des travailleurs à l’affirmation « Vous sentez que vous contribuez à la mission de l’organisation où vous travaillez » (N=295) ....................................................................... 48
Tableau 8 : Cotes moyennes d’appréciation des natifs et des immigrants (et khi2) aux 18 questions.................. 50
Tableau 9 : Profil des travailleurs permanents et des travailleurs temporaires (% horizontaux) ....................... 51
Tableau 10 : Cotes moyennes d’appréciation des permanents et des temporaires (et khi2) aux 18 questions......... 53
Tableau 11 : Pourcentage des ayant répondu « Beaucoup » ou « Tout à fait » aux questions d’appréciation sur l’organisation, selon la proportion d’immigrants dans l’entreprise ........................................... 55
Tableau 12 : Cotes moyennes d’appréciation selon la proportion d’immigrants (et khi2) aux 18 questions............ 56
Graphique 1 : Courbes des cotes d’appréciation des natifs et des immigrants aux 18 questions d’enquête.......... 49
Graphique 2 : Courbes des cotes d’appréciation des travailleurs permanents et des travailleurs temporaires aux 18 questions d’enquête ...................................................................................... 53
Graphique 3 : Courbes des cotes d’appréciation des travailleurs aux 18 questions d’enquête, selon la proportion d’immigrants dans l’entreprise .................................................................................. 55
L iste des tableaux et des graphiques
xii
L is te des abrév ia t ions , s ig les e t acronymes
ARUC-ÉS : Alliance de recherche universités-communautés en économie sociale
C.A. : Conseil d’administration
CDEC : Corporation de développement économique communautaire
CÉS : Chantier de l’économie sociale
CÉSIM : Comité d’économie sociale de l’île de Montréal
CIÉR : Comité d’éthique de la recherche avec des êtres humains
CLD : Centre local de développement
CLE : Centre local d’emploi
CPE : Centre de la petite enfance
CRÉ : Conférence régionale des élus
CRI : Conseil des relations interculturelles
CSMO-ÉSAC : Comité sectoriel de main-d’œuvre de l’économie sociale et de l’action communautaire
ÉS : Économie sociale
EÉS : Entreprises d’économie sociale
FDEÉS : Fonds de développement des entreprises d’économie sociale
GRAP : Groupe régional d’activités partenariales
INRS : Institut national de la recherche scientifique
LAREPPS : Laboratoire de recherche sur les pratiques et les politiques sociales
MAMROT : Ministère des Affaires municipales, des Régions et de l’Occupation des territoires
MICC : Ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles
ONG : Organisation non gouvernementale
OBNL : Organisme à but non lucratif
PRIIME : Programme d’aide à l’intégration des immigrants et des minorités visibles en emploi
RISQ : Réseau d’investissement social du Québec
RQRP-ÉS : Réseau québécois de recherche partenariale en économie sociale
UQAM : Université du Québec à Montréal
L iste des abréviat ions, s ig les et acronymes
xiv
Contexte de la recherche
Le Comité d’orientation - Économie sociale et communautés culturelles du Chantier de l’économie sociale a déposé
un plan d’action de trois ans, en quatre axes. Le premier axe en est un de recherche et vise à faire le « portrait » de
la situation, à savoir quelle place prennent les communautés culturelles dans l’économie sociale. Dans le cadre de
cette recherche, nous nous sommes penchés sur la situation des immigrants de première génération, c’est-à-dire les
personnes nées à l’extérieur du Canada. Le présent rapport expose la démarche et les résultats de cette enquête de
type exploratoire qui comporte deux volets. Le premier volet est de nature qualitative et le second volet est de
nature quantitative. Le tout englobe la préparation et la coordination d’activités de recherche, de collecte et
d’analyse, de même qu’un effort de collecte de données dans différentes régions du Québec pour le premier volet
et à Montréal pour le second volet.
Une recherche documentaire menée durant l’été et l’automne 2008 a indiqué le peu de données statistiques
existantes, ainsi que les difficultés à créer un outil d’enquête et un plan d’échantillonnage pour les produire.
Récemment, le Comité sectoriel de main-d’oeuvre en économie sociale et action communautaire (CSMO-ESAC) a
lancé une étude auprès des entreprises d’économie sociale (EÉS). Dans cette étude, diffusée sur le Web, deux
questions pouvaient fournir de l’information quantitative au sous-comité sur la situation. Ces deux questions sont :
Combien de personnes issues de l’immigration votre entreprise compte-t-elle? Et s’il n’y en a pas en ce moment, y
en a-t-il eu par le passé? Sur les 366 organisations qui participaient à l’étude, seulement 49 étaient des entreprises
d’économie sociale. Cette enquête a révélé que 51 % des entreprises d’économie sociale ne comptaient aucun
employé originaire d’un autre pays que le Canada, mais 19 % d’entre elles en avaient compté par le passé. Ces
chiffres constituaient alors des données de départ pour réaliser notre enquête et ils nous laissaient croire à une
faible présence immigrante au sein des entreprises d’économie sociale.
Contexte de la recherche
16
Terminologie
Au travers de nos discussions, des clarifications conceptuelles ont aussi été nécessaires relativement aux notions de
communautés culturelles, immigrants (ou issus de l’immigration) et minorités visibles.1
Bien qu’avec nos partenaires, le vocable « communautés culturelles » ait été utilisé, nous avons opté pour travailler
avec la notion d’« immigrants » qui est plus facile à utiliser opératoirement. Méthodologiquement, il est commode
d’opérer avec le pays de naissance pour identifier qui est immigrant. La notion de communautés culturelles fait
directement référence à l’altérité et à la diversité. En ce sens, elle est significative par rapport à notre
problématique où les barrières de la langue, des codes culturels d’entreprises et des réseaux sociaux sont présents
lors des démarches de recherche d’emploi surtout, mais aussi en milieu de travail. Néanmoins, elle est beaucoup
moins facile d’utilisation sur le terrain, car immigrants et natifs d’ici peuvent tous s’en revendiquer.
La notion de « minorités visibles » – et celle de « minorités racisées » – constitue un autre point d’appui théorique
intéressant pour la recherche sur l’intégration, sa mise en perspective avec le marché de l’emploi et la gestion des
ressources humaines. Elle est parlante sur le plan sociologique, en ce sens qu’elle aide à saisir les effets de système
et les clivages interethniques. Mais elle nous amène sur le terrain complexe de la discrimination qu’il est
excessivement délicat d’aborder empiriquement. Nous n’avons donc pas utilisé la notion de minorités visibles dans
notre étude, ni centré notre problématique sur celle-ci. Néanmoins, nous y serons attentifs dans l’interprétation de
nos résultats.
1 À titre indicatif : « L’expression Québécois des communautés culturelles fait référence aux personnes immigrantes et aux personnes issues de
l’immigration autre que française et britannique qui sont nées au Québec; elle inclut donc les groupes désignés par le terme ″minorités visibles″ ». (Ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles. 2008. La diversité : une valeur ajoutée. Politique gouvernementale pour favoriser la participation de tous à l’essor du Québec. p. i). Nous remercions Ralph Rouzier de nous avoir fourni ces précisions.
Terminologie
18
Revue de l i ttérature
Au moment où le Québec prend à peine conscience du défi d’intégrer des communautés très diversifiées et, surtout,
contrastées par rapport à ses propres traditions, les organismes communautaires se sont déjà engagés de manière
forte. Les études produites en 2007 pour la Commission de consultation sur les pratiques d’accommodement reliées
aux différences culturelles viennent conforter la fonction sociale des organismes et leur contribution indispensable
aux politiques d'immigration du gouvernement. Néanmoins, les organismes eux-mêmes se posent un certain nombre
de questions sur leurs pratiques quant à leur efficacité réelle et leurs effets. Ils se demandent, en outre, si
l’approche interculturelle québécoise s’incarne mieux que le multiculturalisme canadien.
McAndrew et Labelle sont parmi les chercheures les plus citées au Québec sur les politiques d’immigration. La
première a fait état de l’influence du financement étatique sur les pratiques des organismes à but non lucratif. Elle
constate, dans les années 2000, que de moins en moins d’entre eux prônent les particularités ethniques et, au
contraire, qu’ils ajustent leurs activités à l’idée de participer à une culture commune vivante (McAndrew et coll.,
2008). La seconde a, récemment encore, mis en relief la tension entre la fonction économique et utilitariste
attribuée à l’immigration par l’État canadien et la fonction humaniste défendue par les ONG (Labelle et coll., 2009).
Le choix d’étudier les relations entre l’État, les associations arabo-musulmanes et leurs ONG-parapluie2 n’était pas
anodin en raison des considérations sécuritaires de l’époque. Cela dit, concernant l’économie, nombre de
fonctionnaires des paliers fédéral et provincial interrogés ont souligné qu’il fallait revoir le système de sélection des
immigrants afin de pallier le problème de l’inadéquation avec les besoins du marché du travail, mais aussi pour
« faciliter la reconnaissance des compétences acquises à l’étranger pour permettre l’accès au marché du travail plus
facilement » (Labelle et coll., 2009 : 66).
Dans son rapport 2010-2011, le vérificateur général du Québec faisait d’ailleurs état, au sujet du ministère de
l’Immigration et des Communautés culturelles, de l’absence d’indicateurs socioéconomiques pour évaluer la
capacité du Québec à intégrer les nouveaux arrivants (rapporté par le journaliste Dutrisac, 2010). De plus, en ce qui
regarde la sélection des immigrants dans la catégorie des travailleurs qualifiés, il remarquait que parmi les
candidats sélectionnés pour leur niveau de scolarité, leur âge et leur connaissance du français, les deux tiers
n’avaient eu aucun pointage pour leur formation au regard des domaines privilégiés par le Québec : seulement 9 %
des candidats sélectionnés y correspondaient (Idem).
Les recherches de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) ont aidé à comprendre les rapports
interethniques dans divers quartiers de Montréal (Germain, 2004). Rose et Iankova (2005), par exemple, montrent
que les rapports de proximité de groupes ethnoculturels avec les non-immigrants n’entraînent pas forcément une
intégration forte ou l’absence de préjugés; ou que le respect mutuel n’implique pas toujours un degré fort
d’apprivoisement ou d’interculturalité. Dans nos propres recherches, nous avons aussi constaté une convergence
certaine des discours et des activités des organismes vers l’interculturalité, les pratiques dites interculturelles
s’imposant sur les pratiques monoculturelles. Sur le terrain, cependant, les organisations s’adressant à des
communautés culturelles homogènes sont nombreuses et restent indispensables pour les immigrants durant leurs
premières années d’installation (Prohet et Dumais, 2009). Il en est de même pour les réseaux d’économie en soutien
aux entrepreneurs qui sont créés sur la base d’affinités culturelles : l’entrepreneuriat ethnique existe et il a une
fonction sociale qu’il serait difficile de nier (Dumais et coll., 2008).
2 Une ONG-parapluie est en quelque sorte une ONG qui en regroupe, chapeaute et soutient plusieurs autres.
Revue de la l i ttérature
20
Un questionnement similaire se pose pour les entreprises d’économie sociale. Les entreprises sont-elles ouvertes, en
quantité et en qualité, à la diversité des cultures? Leurs pratiques d’insertion concourent-elles à l’intégration sociale
et à la réussite professionnelle des immigrants et, si oui, comment? Sinon, ces entreprises constituent-elles un
marché d’emploi transitoire qui sous-emploie les compétences de ces derniers – plus que pour les natifs3.
Les statistiques relatives au marché de l’emploi au Québec laissent peu de doutes sur le sous-emploi des immigrants,
en dépit de leur scolarité et de politiques d’immigration sélectives (Chicha et Charest, 2008; Girard et coll., 2008;
Boudarbat et Boulet, 2010). En 2007, plus des deux tiers des immigrants avaient 14 ans ou plus de scolarité, alors
que les adultes de 25 à 55 ans ayant été admis au Québec depuis cinq ans ou moins vivaient un taux de chômage de
14,2 % (ce taux était alors de 5,6 % pour l’ensemble de la population québécoise) (Gouvernement du Québec, 2008).
Cependant, les études longitudinales de Renaud sur les immigrants suggèrent aussi que, passé une certaine période
d’adaptation, leur situation d’emploi s’améliore : « Cinq ans après leur arrivée, 69 % des immigrants ont trouvé un
emploi requérant un niveau d’éducation égal ou supérieur à la scolarité complétée avant l’arrivée au Québec »
(Renaud et Cayn, 2006 dans Girard et coll., 2008 : 795). En revanche, la disparité salariale a augmenté entre les
immigrants et les natifs au fil des années. Ainsi, chez les hommes, en 1980, les immigrants avaient un revenu
équivalant à 80 % de celui des natifs et, en 1996, ils n’en gagnaient plus que 60 % (Reitz, 2005 dans Girard et coll.,
2008 : 792). Boudarbat et Boulet (2010) l’illustrent de façon différente en comparant l’écart de salaire
hebdomadaire moyen entre les immigrants et les natifs et concluent, qu’entre 1980 et 2005, les immigrants avaient
un revenu inférieur à celui des natifs qui est passé de 3,3 % à 14 %. Une situation qui se répète également dans les
autres provinces canadiennes bien que l’étude de Boudarbat et Boulet (2010) révèle que, de façon globale, la
situation des immigrants est plus défavorable au Québec qu’en Ontario et en Colombie-Britannique, provinces qui
accueillent 87 % des immigrants au pays. Cela, malgré le fait que le Québec mette davantage l’accent sur
l’admission d’immigrants dans la tranche d’âge de la population active, maîtrisant déjà le français et, comme
mentionné précédemment, très scolarisés.
Plusieurs études se sont penchées sur les facteurs explicatifs de la déqualification des immigrants. Chicha (2009),
parlant de l’étude de McGuiness faite en 2006, évoquait la théorie du capital humain et faisait ressortir un problème
d’information selon lequel, d’une part, à son arrivée, la personne immigrante ne connaîtrait pas les offres d’emploi
en lien avec ses qualifications. D’autre part, les employeurs manquant d’information sur les diplômes étrangers
auraient tendance à les sous-estimer. Ce à quoi répondent certains programmes dont les effets positifs ont été
démontrés par l’enquête récente d’Emploi-Québec auprès des employeurs ayant utilisé des programmes ciblant les
immigrants (Tétreault, 2009) : les employeurs gagnent à utiliser les périodes d’ajustement que leur procurent ces
programmes, car maintes de leurs appréhensions tombent et leur attention se porte alors sur un bassin de
compétences jusque-là mis de côté.
Les conditions macroéconomiques sont aussi mises en cause puisque la proportion d’immigrants admis annuellement
demeure la même et ne prend pas en compte les variations de ces conditions. Ainsi, Boudarbat et Boulet (2010 : 16)
concluaient que : « Si le taux de chômage est élevé au sein de la population native, mais que le nombre
d’admissions n’est pas réduit, les immigrants risquent d’avoir encore plus de difficultés à trouver un emploi. »
Par ailleurs, la dernière recherche de Chicha (2009) montre l’effet du statut de « minorité visible » s’appliquant aux
personnes qui ne sont ni de « race » blanche, ni autochtones. Il influe sur les taux d’emploi, de même qu’il a une
3 Le terme « natifs » désigne les gens nés au Canada, en contraste avec le terme « immigrants » désignant les gens nés hors du Canada. Le terme
natif est usité dans la littérature sur l’immigration.
Revue de la l i ttérature
21
portée dans la gestion des ressources humaines. Chicha tire des conclusions assez fermes sur la discrimination faite à
l’égard des femmes immigrantes scolarisées, constats accentués quand elle compare le sous-emploi chez trois
groupes de femmes se distinguant selon des critères tels que l’appartenance à une minorité visible4 ou le fait d’avoir
des enfants.
Si les recherches sur les immigrants sont nombreuses, tant quantitativement que qualitativement, nous sommes, en
revanche, encore peu documentés sur leur présence dans l’économie sociale.
4 Le Recensement de 2006 indique qu’un peu plus de 15 % de la population de la région métropolitaine de Montréal est constituée de minorités
visibles, mais autour du tiers à Brossard, du quart dans la ville de Montréal et de 15 % à Laval et à Longueuil. Nous remercions R. Rouzier de nous avoir fourni ces données.
Revue de la l i ttérature
22
P r e m i e r v o l e t d ’ é t u d e
Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
Cette étape visait à recueillir, d’une part, des informations générales sur notre sujet, mais aussi des informations
plus spécifiques concernant les gestionnaires immigrants d’organisations ou d’entreprises d’économie sociale.
Méthode d’enquête
Popu la t ion à l ’é tude et s t ra tég ie d ’enquête
Nous avons visé la population des entrepreneurs immigrants des régions de Montréal, de l’Estrie, de L'Abitibi-
Témiscamingue, de la Capitale-Nationale, de la Mauricie et des entreprises des secteurs suivants : entreprises
d’insertion, groupes d’entraide, restauration, culture, habitation, entrepreneuriat, médias, recyclage, agro-
environnement, santé, service-conseil, transport, produits de beauté et produits équitables.
Pour brosser le présent portrait, nous avons ciblé des gestionnaires d’organisations ou d’entreprises d’économie
sociale dont l’organisation ou l’entreprise a dépassé le stade de démarrage et est donc en activité depuis plusieurs
mois. De plus, nous nous sommes concentrés sur des personnes ayant la possibilité de s’exprimer en français.
Pour la collecte de données, un groupe de discussion ainsi qu’une douzaine d’entrevues téléphoniques ont été
réalisés avec 16 gestionnaires. Dans la moitié des cas, des données complémentaires ont été obtenues sur
l’entreprise et des visites des lieux ont été faites.
Méthodo log ie , recrutement , échant i l l on retenu
Les listes d’entreprises d’économie sociale existantes, qu’elles soient locales, régionales ou nationales, demeurent
imprécises et incomplètes5 pour différentes raisons, allant de leurs critères d’inclusion à la mise à jour des
entreprises dissoutes ou nouvellement démarrées. Aussi, puisqu’il n’existe aucune liste d’entrepreneurs ou de
gestionnaires immigrants en économie sociale, ni au niveau national, ni au niveau régional ou local, nous avons dû
constituer notre propre répertoire. Ainsi, en vue de constituer cette liste, nous avons consulté 38 sources
comprenant :
La vingtaine de membres du Comité d’orientation - Économie sociale et communautés culturelles du Chantier de
l’économie sociale où siègent également les 11 partenaires de la présente recherche soit, les membres du
comité portrait qui réunit des chercheurs en économie sociale, des entrepreneurs en économie sociale, une
représentante du ministère des Affaires municipales, des Régions et de l’Occupation du territoire (MAMROT),
une représentante du ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles (MICC), une représentante du
CSMO-ÉSAC, un représentant du Conseil des relations interculturelles (CRI), une représentante de la Ville de
Montréal et une représentante du Chantier de l’économie sociale.
Les 16 pôles régionaux en économie sociale.
5 Voir Dumais, Chamberland, Fontan, 2008, p. 11.
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
24
Le Répertoire des entreprises d’économie sociale qui regroupe 4741 entreprises ou organisations en économie
sociale et le Répertoire du CÉSÎM qui regroupe 1066 entreprises d’économie sociale à Montréal. Nous y avons
cherché des noms de gestionnaires ayant une consonance nous laissant croire à des origines immigrantes. Cette
méthode, bien que très imprécise, nous a permis d’ajouter quelques entreprises à notre liste.
Nous avons ainsi pu obtenir une liste de 54 gestionnaires d’organisations ou d’entreprises d’économie sociale dont 38
de la région de Montréal et 16 des régions de la Capitale-Nationale, de l’Estrie, de la Mauricie et de L'Abitibi-
Témiscamingue.
Parmi les 38 gestionnaires de la région de Montréal, nous en avons exclu 11 : quatre dont l’entreprise était en
démarrage, deux dont l’entreprise était dissoute, un qui ne pouvait s’exprimer en français, un qui est né au Québec,
un qui était gestionnaire de deux entreprises de notre liste (nous avons donc enlevé un doublon), un que nous avions
déjà interrogé dans le cadre d’une autre étude portant sensiblement sur le même sujet et un dont le type
d’organisation ne cadrait pas dans notre démarche (voir le Tableau 1).
Nous avons ainsi contacté 27 gestionnaires de Montréal dont 12 ont décliné notre invitation à participer à l’étude ou
n’y ont pas donné suite. Ce sont donc 15 gestionnaires qui ont accepté de répondre à nos questions à Montréal.
Nous avions, dans un premier temps, privilégié la collecte de données par groupes de discussion. Ainsi, quatre
gestionnaires immigrants ont participé à une discussion le 20 mars 2009 dans un local de l’UQAM. Un second groupe
a été convoqué, mais une seule personne a dit pouvoir se libérer avant quelques semaines, tandis qu’on attendait
encore les retours d’appel des autres. Par ailleurs, le groupe s’est avéré une méthode peu propice à la collecte
d’informations sur des parcours individuels, bien qu’elle restait d’intérêt pour discuter de la vision de l’économie
sociale.
Par conséquent, à la suite de la tenue du premier groupe de discussion, il a été convenu de repenser la méthode de
collecte de données. Nous avons opté pour des entrevues téléphoniques, ce qui réglait en bonne partie le problème
évoqué par plusieurs gestionnaires ayant refusé de participer à un groupe de discussion, soit le temps (1/2 journée)
de déplacement et de participation et, aussi, la difficulté d’agencer les horaires des gestionnaires pour fixer une
rencontre. Nous avons réalisé 11 entrevues avec d’autres gestionnaires de Montréal (et une 12e avec un gestionnaire
en région).
Tableau 1: Population des gestionnaires immigrants en économie sociale et échantillon d’étude
R é g i o n d e M o n t r é a l
A u t r e s r é g i o n s ( C a p i t a l e - n a t i o n a l e , E s t r i e ,
M a u r i c i e , A b i t i b i - T . ) T O T A L
P o p u l a t i o n c o n t a c t é e 27 6 33
Participants groupe de discussion et entrevues téléphoniques (étape 1) 15 1* 16
Participants entrevues sur place (étape 2) 7 0 7**
* Au départ, deux gestionnaires ont participé à l’entrevue téléphonique, mais un seul était immigrant; nous avons fait le choix d’exclure les données de l’entrevue auprès du natif.
** Sept entrepreneurs furent sondés à cette étape, mais seulement 6 entreprises ont été visitées.
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
25
Parmi les 16 gestionnaires des régions de la Capitale-Nationale, de l’Estrie, de la Mauricie et de L'Abitibi-
Témiscamingue, nous en avons exclu 10 : quatre étaient nés au Québec, trois étaient des bénévoles, un autre était
employée et non-gestionnaire; deux entreprises n’étaient pas vraiment des EÉS. Des six gestionnaires que nous avons
contactés en vue d’une entrevue téléphonique, deux ont accepté de participer à notre enquête. Mais l’un étant né
au Québec, bien que de parents immigrants, nous avons fait le choix d’exclure de notre enquête les données de son
entrevue.
Au total, nous avons recueilli les propos de 16 gestionnaires d’EÉS. Puis, voulant étoffer certaines données
d’entreprises et obtenir quelques renseignements supplémentaires, sur les 16 entrepreneurs contactés, sept nous
ont accordé un second entretien dans les locaux de leur organisation.
Prof i l des répondants
Notre échantillon est composé également de femmes et d’hommes (F = 8, H = 8) qui sont majoritairement (11/16)
âgés de 46 à 65 ans. Quatre de ces personnes sont arrivées au pays sous le statut6 de résidents permanents, quatre
autres personnes sont arrivées en tant que travailleurs permanents, trois en tant que réfugiés, deux en tant
qu’étudiants étrangers, une personne est arrivée en tant que gens d’affaires et une autre a été parrainée. L’une des
participantes au groupe de discussion est née ici de parents immigrants. Nous avons quand même retenu les données
de son entrevue parce que, par la mission de l’entreprise d’économie sociale qu’elle gère, elle est amenée à
travailler en priorité pour des personnes issues de l’immigration. La grande majorité d’entre elles sont maintenant
citoyennes ou résidentes permanentes.
Les répondants sont issus des 12 pays suivants : Haïti (deux personnes), Mexique, Chili, Algérie, Cameroun, Liban,
Pakistan, Colombie, Italie, Guadeloupe, Grèce et République démocratique du Congo. Quatre (4) personnes ont aussi
transité par d’autres pays avant d’arriver au Canada. Ainsi, trois (3) personnes ont habité en France, dont une
personne a aussi habité au Maroc, une autre personne a habité aux États-Unis d’Amérique. Les répondants sont au
Canada depuis des périodes qui varient de 4 à 43 ans, pour une moyenne de 22,5 ans.
Quant à la scolarité des participants, elle varie entre les études secondaires et doctorales. Aussi, les domaines
d’études avant leur arrivée au pays sont variés. On y retrouve les champs d’études suivants : administration,
économie, finance, gestion d’entreprise, biologie, travail social, psychologie, communications, langue française,
tourisme et relations internationales, histoire, biochimie, agronomie et enseignement. Six (6) participants sur 157
ont eu une reconnaissance de leurs diplômes et sept (7) autres participants sur 15 n’ont pas cherché à faire
reconnaître leurs diplômes. Par ailleurs, 11 des 15 participants ont repris des études depuis leur arrivée au pays.
Ce sont 12 personnes qui travaillent dans leur domaine de formation, dont trois (3) qui travaillent dans le domaine
de leur formation acquise au Canada. Les répondants occupent leur emploi8 depuis 1 à 26 ans, pour une moyenne de
9,3 ans. En outre, il est intéressant de constater que seulement 4 gestionnaires sur 16 ayant participé à notre étude
ont travaillé dans une entreprise d’économie sociale dans leurs emplois précédents.
6 Les catégories d’immigration ayant été modifiées au cours des années, nous ne retrouvons pas nécessairement ici le nom des catégories
actuellement en vigueur au Canada. 7 La seizième personne répondante de l’échantillon étant née ici, la question ne s’appliquait pas elle. 8 Notez que quatre postes de gestionnaires sont occupés par des bénévoles.
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
26
Résultats d’enquête
Dans cette section, nous offrons une vue très détaillée du contenu des entrevues faites avec les gestionnaires
immigrants. Parmi ces éléments descriptifs détaillés, certains autorisent des constats d’enquête plus généralisables
que d’autres. Nous avons tout de même tenu à présenter tous les résultats, puis d’en dégager les conclusions
appropriées.
Quelques données sur les ent repr i ses d i r i gées par les répondants
Une majorité de personnes (15/16) disent travailler dans un milieu multiethnique. De ces personnes, 12 travaillent dans une organisation où les employés ne sont pas majoritairement issus du même pays qu’eux.
a) Environnement physique des entreprises Nous nous sommes déplacés dans six entreprises. Nous avons pu constater d’emblée que deux d’entre elles sont
situées dans une tour à bureaux (EÉS-7, EÉS-14), deux autres sont situées sur de grandes artères commerciales (EÉS-
3, EÉS-16), une organisation est située dans un petit centre d’achat de quartier (EÉS-5) et une dernière sur une rue
résidentielle (EÉS-11). Partout l’accueil a été très courtois. En ce qui concerne l’état des lieux, il est très variable
quant à la décoration, la propreté et l’organisation de l’espace. Par exemple, une des entreprises visitées présente
une décoration harmonieuse, épurée et très ordonnée (EÉS-14), alors qu’une autre se trouve dans un endroit très
petit et désordonné où les travailleurs ont relativement peu d’espace, mais beaucoup de poussière (EÉS-7)! Ceci
étant dit, tous les gens que nous avons pu voir étaient plutôt souriants et semblaient heureux d’être là. La taille des
locaux est également variable. Certains comptent une seule pièce de taille moyenne ou grande (EÉS-7, EÉS-14),
alors que d’autres comptent plus d’une dizaine de pièces (EÉS-3), voire plus d’un étage (EÉS-11, EÉS-16). Aussi, dans
certaines entreprises, nous avons pu observer la volonté de faire de ces endroits des lieux d’appartenance,
notamment par l’affichage de photos d’activités de l’entreprise ou par les interactions entre la clientèle et les
travailleurs (EÉS-3, EÉS-5).
b) Informations descriptives sur le personnel des entreprises gérées
Les données recueillies lors de la première étape de la recherche indiquent que les organisations ou entreprises où
travaillent les gestionnaires interrogés comptent entre 1 et 50 travailleurs pour une moyenne de 9,7 (les entreprises
comptent généralement entre 1 et 14 travailleurs, donc si on retire la seule entreprise qui compte 50 travailleurs,
on obtient une moyenne de 7,1 travailleurs par entreprise). Elles comptent entre 33,3 % et 100 % d’immigrants. Sur
les 156 emplois qu’elles totalisent, 75,6 % sont occupés par des immigrants.
Les données de la seconde étape permettent d’en savoir plus sur les travailleurs, mais il faut garder en tête qu’elles
n’ont pu être recueillies qu’auprès de sept (7) entreprises d’économie sociale. Ainsi, ces 7 entreprises totalisent 99
emplois dont 32 sont des emplois à temps plein et 67 à temps partiel ou à contrat. Les personnes issues de
l’immigration occupent 65 % (64/99) des emplois, dont 17 postes (53 %) à temps plein et 47 postes (70 %) à temps
partiel (voir le Tableau 2). Il est à noter qu’une des entreprises ne compte aucun travailleur immigrant. Par ailleurs,
4 gestionnaires sur 7 ont dit qu’ils n’accordaient pas d’importance particulière à l’embauche de personnes issues de
l’immigration, mais deux d’entre eux considèrent le faire indirectement puisqu’ils priorisent l’embauche de
résidents de leur quartier qui est multiethnique.
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
27
Aussi, lorsqu’ils sont à la recherche de nouveaux travailleurs, les gestionnaires interrogés utilisent différentes
stratégies. Deux personnes ont la collaboration d’organismes communautaires pour se faire référer des gens (EÉS-14,
EÉS-15) et une autre consulte d’abord sa liste de bénévoles (EÉS-5); si personne dans cette liste ne correspond au
profil recherché, on ira en appel d’offres de service. Des gestionnaires ont dit qu’ils affichaient l’offre d’emploi sur
des sites Web gratuits (EÉS-7, EÉS-16), dans des médias (EÉS-3, EÉS-16), dans un réseau d’autres entreprises
d’économie sociale (EÉS-7), dans le réseau de leurs employés et de leurs bénévoles (EÉS-16). Une entreprise a
embauché tous ses travailleurs à la suite d’une subvention salariale (EÉS-11).
Tableau 2: Information sur les travailleurs des (sept) entreprises d’économie sociale sondées
T o t a l I m m i g r a n t s
T r a v a i l l e u r s Nombre de travailleurs 99 64
Nombre travaillant à temps plein 32 17
Nombre travaillant à temps partiel 67 47
Travail de gestion ou direction 23 16
Travail d’intervention ou de production 76 48
On compte un total de 23 postes de gestion ou de direction, dont 16 sont occupés par des personnes issues de
l’immigration, et 76 postes d’intervention ou de production occupés à 63 % (48/76) par des personnes issues de
l’immigration (voir le Tableau 2). Leur expérience de travail dans ces organisations est très variable, allant jusqu’à
25 ans d’ancienneté. Du côté des personnes immigrantes, l’expérience varie entre une semaine et 15 ans.
En termes de roulement de personnel, deux (2) gestionnaires n’ont connu aucun départ de travailleurs. Quatre (4)
gestionnaires disent que ce ne sont que les emplois bénéficiant d’une subvention salariale qui amènent le roulement
de personnel. Quant à la septième entreprise, le gestionnaire nous informe que les employés restent en moyenne 10
ans. Lorsqu’on regarde le roulement du personnel immigrant, 4 entreprises sur 7 n’en ont pas connu et 1 autre a vu
le départ d’une personne engagée par le biais d’une subvention salariale. Fait intéressant, un gestionnaire nous a dit
que 90 % des gens qui ont eu un emploi ou ont fait un stage dans l’organisation pour laquelle il travaille se sont
trouvé un emploi par la suite et ils vont autant vers le privé que vers l’économie sociale (EÉS-8).
Concernant le programme PRIIM, aucun des gestionnaires interrogés ne l’utilise et seulement 3 d’entre eux en
avaient déjà entendu parler. Une gestionnaire a expliqué que, selon elle, ce programme s’adresse davantage à
l’entreprise privée puisqu’on doit démontrer qu’on arrivera à embaucher les personnes à la fin du programme (EÉS-
5).
Tous les travailleurs parlent le français, mais 78 % (77/99) d’entre eux parlent aussi l’anglais, dont 85 % (55/64) des
travailleurs immigrants. Les emplois sont occupés à 60 % (59/99) par des femmes et 66 % (39/59) d’entre elles sont
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
28
des personnes immigrantes. Ce sont 82 % (71/879) des gens qui ont terminé des études universitaires et 75 % (53/71)
de ces personnes sont issues de l’immigration.
Parmi les pays d’où sont originaires les travailleurs immigrants, on compte notamment : Haïti, Maroc, Géorgie,
France, Colombie, Algérie, Mexique, Chili, Salvador, Cameroun, Angleterre, Guadeloupe, Argentine, Russie,
Roumanie, Kazakhstan, Arménie.
c) Les bénévoles
Selon les données de la première étape de la recherche, les 16 entreprises comptent entre 0 et 200 bénévoles qui
sont immigrants, pour une moyenne de 22,3. Généralement, les entreprises ont entre 0 et 40 bénévoles qui sont
immigrants. Ainsi, si on retire de notre calcul la seule entreprise qui compte 200 bénévoles immigrants, on obtient
plutôt une moyenne de 9,6.
Selon les données de la seconde étape qui permettent d’en savoir plus sur eux, les 440 bénévoles, 52 % (229/440)
sont des personnes immigrantes. Presque la totalité (397/440) de ces bénévoles fréquente l’organisation à raison de
plusieurs fois par semaine, au moins tous les mois, ou alors ce sont des membres du conseil d’administration. Ils sont
donc réguliers par rapport à des bénévoles occasionnels qui donneraient un coup de main à l’organisation quelques
fois par année ou de façon ponctuelle. Les personnes immigrantes représentent 53 % (212/397) des bénévoles
réguliers et 40 % (17/43) des bénévoles occasionnels, et ce, bien que 6 gestionnaires sur 7 aient mentionné qu’ils
n’accordaient pas d’importance particulière au recrutement de bénévoles immigrants, quoique deux d’entre eux
considèrent le faire indirectement, soit en ciblant des personnes vulnérables issues de quartiers pauvres et qui se
trouvent à être majoritairement des personnes immigrantes (EÉS-11), ou en privilégiant les gens de leur quartier qui
compte beaucoup d’immigrants (EÉS-5) (voir le Tableau 3).
Lorsque les gestionnaires sont à la recherche de bénévoles pour l’entreprise, certains lanceront un appel par le
bouche-à-oreille (EÉS-5), par le réseau des travailleurs de l’entreprise (EÉS-3, EÉS-7, EÉS-14, EÉS-15) ou celui des
membres du conseil d’administration (EÉS-3). Deux gestionnaires utilisent le journal local (EÉS-5, EÉS-11) et un autre
fait appel au centre d’action bénévole (EÉS-7). Deux organisations font connaître leurs besoins de bénévoles par le
biais de leurs activités (EÉS-11, EÉS-16). Enfin, une organisation reçoit des bénévoles qui sont référés par la sécurité
publique pour faire des travaux communautaires (EÉS-5).
Tableau 3 : Information sur les bénévoles des sept entreprises d’économie sociale sondées
T o t a l I m m i g r a n t s
B é n é v o l e s Nombre de bénévoles 440 229
Nombre bénévoles réguliers 397 212
Nombre bénévoles occasionnels 43 17
Bénévolat de type gestion ou direction 35 17
Bénévolat d’intervention ou de production 407 216
9 Ce calcul n’a pu être fait sur le total de 99 travailleurs puisqu’un des gestionnaires n’a pu fournir cette information.
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
29
Il est intéressant de noter que pour 3 entreprises sur 7, le poste de gestionnaire est bénévole (ces répondants ne
touchent aucun salaire). Ce sont 35 bénévoles qui siègent aux différents conseils d’administration des organisations,
chacune d’entre elles compte donc 5 personnes en moyenne et les personnes immigrantes occupent 17 de ces 35
sièges. Quatre cent sept10 bénévoles ont plutôt un rôle d’intervention ou de production et, ici encore, les personnes
immigrantes représentent plus de la moitié (53 %, 216/407) de ces personnes (voir le Tableau 3). Les bénévoles,
immigrants ou non, sont présents dans les organisations depuis des périodes qui varient de 1 semaine à 25 ans. Les
gestionnaires interrogés estiment que les bénévoles demeurent au sein des organisations pour une durée qui varie de
6 mois à 10 ans en moyenne et de 1 à 10 ans pour les personnes issues de l’immigration.
Selon les données recueillies, 94 % (412/43711) des bénévoles parlent le français et 24 % (107/43712) parlent
l’anglais. Du côté des personnes immigrantes, 93 % (214/229) parlent le français et 14 % (33/229) parlent l’anglais.
Contrairement aux travailleurs où nous retrouvions une majorité de femmes, du côté des bénévoles, on compte une
majorité (61 %, 265/437) d’hommes. Cette proportion est semblable (65 %, 148/229) pour les personnes issues de
l’immigration. Concernant la scolarité des bénévoles, deux organisations nous ont dit qu’ils ne demandaient pas
cette information aux gens. Ainsi, pour les quatre organisations qui ont pu fournir cette information, nous
constatons qu’une large majorité d’entre eux ont un niveau de scolarité universitaire, et ce, tant pour les bénévoles
en général (60/62) que pour les personnes immigrantes (18/20).
Enfin, parmi les pays d’origine des bénévoles immigrants, on compte notamment : France, Guadeloupe, Congo,
États-Unis d’Amérique, Haïti, Algérie, Maroc, Maghreb, Cameroun, Sénégal, une vingtaine de pays hispanophones et
trois pays lusophones.
Qu’es t -ce que l ’économie soc ia le pour les répondants? Les é léments de déf in i t ion
Dans la première étape de l’enquête (N=16), nous avons demandé aux gestionnaires de nous expliquer ce qu’était
pour eux l’économie sociale. Dans l’ensemble des éléments de leurs définitions, nous remarquons que les gens
parlent tantôt de l’économie sociale en tant qu’idéologie, tantôt comme de la forme d’organisation ou d’entreprise.
Ainsi, quatre thèmes ressortent de leurs propos, soit la forme et la finalité, le facteur social, les revenus et
bénéfices, et les valeurs.
a) La forme et la finalité
Sur ce thème, une personne formule que les entreprises d’économie sociale produisent des biens ou des services qui
sont mis en marché et qui participent à l’économie globale (EÉS-2)13. Quatre personnes mentionnent que l’économie
sociale est davantage axée sur un développement local et la production de biens et de services pour une
communauté (EÉS-8, EÉS-2, EÉS-12, EÉS-15). D’autres disent que l’économie sociale vient combler un créneau qui
n’intéresse pas les entreprises privées et que ne couvrent pas les services publics (EÉS-3, EÉS-11). Il s’agit d’une
économie qui part de la base vers le sommet (EÉS-6), où l’on travaille pour les usagers et non pour des actionnaires
comme dans l’entreprise privée (EÉS-12). Une personne souligne que les entreprises d’économie sociale sont
autonomes par rapport à l’État (EÉS-13) et six personnes lient l’économie sociale à un mouvement social qui crée un
10 Notez que deux bénévoles acquittent à la fois des fonctions de gestion et d’intervention dans une organisation sans en tirer aucun salaire. 11 Ce calcul n’a pu être fait sur le total de 440 bénévoles puisque nous ne disposions pas de ces informations concernant une des organisations. 12 Idem. 13 Nous indiquons entre parenthèses le numéro de l’entrevue faite avec l’entrepreneur concerné.
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
30
équilibre entre l’économique et le développement social ou que c’est l’économique au service du social (EÉS-4, EÉS-
5, EÉS-10, EÉS-11, EÉS-12, EÉS-14).
b) Le facteur social
Dans leur façon de définir l’économie sociale, les participants ont beaucoup insisté sur la composante sociale. Ainsi,
ils ont mentionné qu’une entreprise d’économie sociale est un groupe de personnes qui partagent les mêmes
intérêts (EÉS-1), qui compte plusieurs propriétaires (EÉS-2, EÉS-13), que les travailleurs participent à la gestion de
l’entreprise, au chiffre d’affaires et aux services (EÉS-11) et que le fonctionnement est démocratique (EÉS-16). Ils
ajoutent que cette forme d’entreprise a un objectif de création d’emplois pour la communauté (EÉS-1) ou pour les
personnes qui partagent les valeurs de l’économie sociale (EÉS-11). Les entreprises d’économie sociale ont aussi un
rôle d’accompagnement des personnes moins qualifiées afin de les outiller et développer leurs habiletés afin qu’ils
deviennent parties prenantes du développement économique (EÉS-9, EÉS-10). Une large place est accordée à
l’adhésion aux objectifs de l’entreprise par les employés qui ont un rôle plus participatif que dans l’entreprise
privée et plus « complice » de l’atteinte de l’objectif puisque ceci leur garantit leur travail (EÉS-11). « Ils ne sont
pas que des exécutants » (EÉS-11). Une participante nous dit que c’est une autre forme d’économie qui place la
personne au centre (EÉS-14). On veut répondre aux besoins de la communauté, rendre service à la communauté
(EÉS-3, EÉS-10). Trois personnes voient l’économie sociale comme une façon, voire la meilleure façon, de se prendre
en main au lieu d’attendre (EÉS-1, EÉS-6, EÉS-7) et d’autres soutiennent que c’est un « moyen d’intégration
fantastique » (EÉS-5) puisque l’économie sociale facilite la participation socioéconomique des personnes issues de
l’immigration (EÉS-10) en leur fournissant un emploi ou des services, ou les deux, tels que des conseils aux
immigrants « pour l’intégration dans la communauté au sens large et non seulement leur communauté à eux » (EÉS-
16).
c) Les revenus et bénéfices
Si une personne nous dit que cette forme d’entreprise comporte « beaucoup de social et peu de bénéfices » (EÉS-7),
d’autres gestionnaires soulignent qu’il faut faire des profits pour assurer la pérennité de l’entreprise (EÉS-3, EÉS-
12). On ajoute que les bénéfices doivent être réinvestis (EÉS-2, EÉS-7) pour assurer les emplois (EÉS-2). Selon un
répondant, l’économie sociale compte ses avantages et inconvénients, mais elle est aussi efficace que l’économie
générale (EÉS-8).
d) Les valeurs
Quant aux valeurs qu’on lie à l’économie sociale, on nomme : l’intégration, l’inclusion, le partage, la tolérance, la
gestion démocratique et participative, l’innovation, la diversité culturelle et des professions (EÉS-4), l’accessibilité
à tous (EÉS-5), l’éthique de partage et de solidarité (EÉS-11). Un gestionnaire ajoute que si plus de gens faisaient de
l’économie sociale, il y aurait moins d’injustice (EÉS-6).
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
31
Mot ivat ions e t cho ix de t rava i l le r en économie soc ia le
Nous avons demandé à l’ensemble des gestionnaires interrogés (N=16) pourquoi ils avaient fait le choix de travailler
en économie sociale. Les thèmes qu’ils ont abordés sont intimement liés; ils parlent de valeurs, de convictions
personnelles et de répondre à un besoin exprimé par une communauté.
a) Les valeurs
Bien sûr, les gestionnaires ont exprimé leur adhésion aux valeurs nommées dans la section précédente, mais ils ont
aussi parlé des valeurs personnelles qui les ont amenés à choisir ce type d’organisation ou d’entreprise. Pour l’un
d’eux, c’est la valeur de bien commun qui l’a amené à l’économie sociale et il ajoute que cela facilitait la réunion
d’un fonds de roulement nécessaire au démarrage : « À plusieurs, c’est plus facile » (EÉS-1). Une gestionnaire
mentionne qu’en ayant une formation dans le domaine social, il lui fallait une entreprise qui lui permette d’allier
l’aspect social et l’aspect économique (EÉS-14). Une autre personne voyait dans la gestion démocratique une façon
d’éviter des conflits liés à la hiérarchie, mais selon cette personne, ce choix était aussi celui de la précarité (EÉS-2).
Une participante insiste pour sa part sur le fait de donner : « C’est intéressant de faire de l’argent, mais aussi de
donner, de fournir des services à une population qui n’aurait pas les moyens de se les payer. » (EÉS-3)
b) Les convictions personnelles
Pour certains, le choix de l’économie sociale s’est fait en réaction à l’entreprise privée à but lucratif, tel ce
répondant qui d’entrée de jeu déclare : « J’ai eu le bonheur de ne jamais travailler dans le privé » (EÉS-16). Une
personne nous dit avoir été déçue par les résultats de ce type d’entreprise qui, contrairement à l’économie sociale,
ne permettait pas d’atteindre les résultats sociaux qu’elle envisageait (EÉS-4). Une autre personne ayant vécu ce
genre de déception avait été enthousiasmée par le travail d’un organisme communautaire : « J’ai vu des personnes
impliquées, des résultats concrets sur la vie des gens, des changements » (EÉS-14). Mais elle avait malgré tout
identifié certaines lacunes en ce qui concerne la situation économique des usagers de cet organisme et a ainsi
décidé d’y remédier par la création d’une coopérative de solidarité. Cette forme d’entreprise donnait la possibilité
à ces personnes de sortir de la pauvreté en intégrant la coopérative de travailleurs et en bénéficiant de salaires
raisonnables, tout en conjuguant leur emploi avec leur situation personnelle (EÉS-14). Un second gestionnaire a créé
une entreprise d’économie sociale avec quelques personnes après avoir été touché par la constatation des effets de
certaines lacunes matérielles chez des enfants (EÉS-7).
Un gestionnaire nous dit que ses convictions personnelles l’amenaient à voir l’économie autrement (EÉS-8), alors
qu’un autre souligne qu’il ne veut pas confier son salaire à quelqu’un d’autre puisqu’il est le meilleur juge de ses
intérêts (EÉS-6). Parce qu’elle voulait travailler dans une organisation gérée de façon collective, une répondante
avait décidé depuis longtemps de mettre sur pied une coopérative de travail, ce qu’elle et sa collègue ont fait dès
qu’un créneau a été identifié (EÉS-13). Une gestionnaire nous dit que c’est son désir de travailler avec les gens et de
les aider à se développer qui l’a conduite à l’économie sociale : « Economy is not just money for me » (EÉS-9). Pour
un répondant, c’est d’abord une implication au conseil d’administration d’une organisation qui l’a amené au poste
de gestionnaire : « Je connaissais le travail et quand le poste a été ouvert, je me suis dit, bon, pourquoi pas » (EÉS-
16).
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
32
c) Répondre à un besoin exprimé par une communauté
Parfois, c’est un groupe de personnes qui discutent d’un besoin et ensemble vont mettre sur pied une organisation
(EÉS-2); parfois, ce sont des citoyens ou des groupes qui s’adressent à un regroupement ou à un organisme déjà en
activité pour développer un projet (EÉS-10, EÉS-11, EÉS-12), ou alors, c’est une personne qui exprime une difficulté
ou un besoin à quelqu’un qui décide ensuite de se pencher sur le problème et d’y remédier (EÉS-15). Dans tous les
cas, il s’agissait de créer — des emplois, des services, des biens — qui allaient générer un revenu, soit pour soutenir
l’organisation dans sa mission, soit pour soutenir les personnes directement.
Ce que les répondants a iment de l ’économie soc ia le
Nous présentons ici les réponses des gestionnaires interrogés (N=16), lorsque nous leur avons demandé ce qu’ils
aimaient de l’économie sociale.
a) Une économie « équilibrée »
Lorsque nous avons demandé aux gestionnaires ce qu’ils aimaient de l’économie sociale, ces derniers nous ont dit
aimer cet équilibre entre « l’économique » et le développement social (EÉS-5), les possibilités de « faire un
contrepoids à l’économie dominante qui ne laisse que des poussières à la base » (EÉS-6) et le fait que cette
économie était « ancrée dans l’économie locale » (EÉS-8). Ils aiment aussi la gestion démocratique (EÉS-1, EÉS-11)
qui amène une diversité de compétences qu’on peut mettre à profit (EÉS-1) et qui permet de partager le travail et
les profits en plus des valeurs (EÉS-8). Cette forme d’entreprise crée des relations interpersonnelles plus fortes,
avec plus de partage et d’ouverture, selon une gestionnaire, parce qu’elle est tournée vers le partenariat plutôt que
la compétition (EÉS-4).
b) Le développement et l’intégration sociale
Un gestionnaire y voit l’avantage de mettre son humanisme à contribution (EÉS-8) et une autre y voit la liberté de
pouvoir développer des choses pour les personnes les plus démunies (EÉS-5). Quelques gestionnaires reviennent sur
l’économie sociale comme moyen de s’intégrer (EÉS-2, EÉS-5, EÉS-10); pour des immigrants qui n’ont pas
d’expérience de travail au Canada (EÉS-2, EÉS-10) et plus globalement pour les plus démunis, c’est l’occasion de se
prendre en main (EÉS-5) et de développer des compétences (EÉS-9). Une répondante ajoute qu’elle « n’aime pas
voir les gens utilisés comme employés bon marché. Les gens doivent se sentir plus que cela » (EÉS-9). Selon une
autre participante, l’économie sociale permet de dynamiser le travail pour des personnes à statut précaire qui
apprennent ce qu’il faut faire pour que l’entreprise fonctionne et s’investissent à fond pour leur emploi « alors
qu’autrement, elles auraient été à la merci d’un employeur » (EÉS-10).
c) L’atmosphère de travail et les relations humaines
Des gestionnaires qui ont participé à notre portrait aiment en outre l’approche conviviale, l’atmosphère chaleureuse
et la flexibilité dans l’emploi (EÉS-2, EÉS-7, EÉS-11). Selon un gestionnaire, « les gens sont plus écoutés et ça les
encourage à apporter de nouvelles idées » (EÉS-7). C’est une entreprise qui laisse beaucoup de souplesse dans sa
forme et son fonctionnement, ce qui a l’avantage, aux yeux d’un répondant, de bien répondre aux besoins (EÉS-11).
d) La créativité, l’ouverture et le risque
En outre, des personnes voient des avantages liés au manque de ressources qu’ils associent à l’économie sociale.
D'abord, certains trouvent que cela stimule la créativité (EÉS-2, EÉS-12) et ouvre davantage les horizons de
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
33
collaboration à l’international (EÉS-2, EÉS-7). Un des gestionnaires interrogés dit aimer l’élément de risque lié à
l’entrepreneuriat, il y voit du défi, de l’adrénaline : « Il y a toujours du développement à faire et c’est ce qui est
intéressant » (EÉS-12). Enfin, une personne apprécie le travail qui a été fait au cours des années sur le plan
politique. Selon elle, cela a amené la reconnaissance qui a eu pour effet de diminuer les irritants liés à ce type
d’entreprise (EÉS-3).
Ce que les répondants n ’a iment pas de l ’économie soc ia le
Même s’ils ont fait le choix de travailler en économie sociale, les répondants y voient plusieurs irritants. Nous
présentons ici ce qu’ils ont dit ne pas aimer de l’économie sociale.
a) Les aléas dans la gestion démocratique et l’indivisibilité des profits
Pour certains, la gestion démocratique rend la prise de décision plus lourde afin d’obtenir un consensus (EÉS-1, EÉS-
11). Un autre inconvénient évoqué est celui de devoir partager les profits (EÉS-8).
b) Les ressources financières limitées
Toutefois, ce qui est le plus souvent nommé parmi les aspects négatifs de l’économie sociale, c’est le manque de
ressources financières (EÉS-2, EÉS-4, EÉS-7, EÉS-10, EÉS-13, EÉS-14, EÉS-15). Plusieurs ont dit avoir eu de la
difficulté à trouver du financement pour le démarrage de leur organisation. Une personne dit avoir travaillé pendant
deux ans sans aucune aide financière : « On veut que les gens fassent des entreprises et créent des emplois, mais on
leur ferme les portes » (EÉS-7). Une autre répondante a travaillé sans soutien pendant deux ans et demi : « Je n’ai
pas eu le support [dont j’avais] besoin au début. Ils pensent que quelqu’un, un être ordinaire, qui a beaucoup de
talent par exemple, va lâcher ce qu’il fait pour [gagner] sa vie, pour supporter quelque chose [de] très important,
sans aucune aide. It’s crazy. […]. C’est très frustrant parce qu’on rencontre des murs. Ce n’est pas qu’ils ne sont pas
sensibilisés, c’est le système qui n’est pas assez bien construit [pour le genre d’activités d’entreprise que j’ai] »
(EÉS-15).
Une gestionnaire raconte qu’elle est en train de refaire son plan d’affaires dans le but d’aller cogner à des portes et
voir si elle peut obtenir des subventions pour son organisation « parce qu’en économie sociale, il y a plein d’argent,
mais je ne sais pas pourquoi, nous, on n’a pas réussi à en avoir » (EÉS-13). Une personne nous a dit être exaspérée
d’avoir constamment à se justifier pour obtenir un financement (EÉS-5). Deux gestionnaires ont souligné l’aide reçue
par la CDEC de leur territoire respectif. Par ailleurs, l’une d’elles a parlé des délais entre les demandes de
subvention et l’arrivée des fonds, ce qui oblige à attendre avant de réaliser les projets : « C’est comme si on ramait
toujours à contre-courant. […] Vivre de cette façon-là, c’est tout un défi » (EÉS-10). En revanche, un groupe dont
faisait partie une des gestionnaires interrogées a plutôt déploré le travail de la CDEC où une personne devait les
accompagner pour une demande de subvention pour le plan d’affaires. Elle explique : « Cette subvention nous a été
refusée avec comme motif que notre objet ressemblait plus [à] un modèle OBNL. […] Nous, on expliquait que notre
modèle était une coopérative à but lucratif. Alors, ce que la CDEC nous disait, c’était qu’il fallait changer de
modèle » (EÉS-14). Lorsque les organisations arrivent néanmoins à recevoir de l’aide financière, elles doivent encore
compléter des rapports de reddition de comptes. Une gestionnaire a mentionné qu’elle passait 50 % de son temps à
travailler sur ces rapports et les demandes de subvention (EÉS-9).
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
34
c) La gestion des ressources humaines sous contrainte
Un autre aspect difficile que les répondants ont identifié est le manque de ressources humaines (EÉS-2, EÉS-4, EÉS-
5). À ce sujet, certains ont parlé du programme de subvention salariale d’Emploi-Québec qui permet à une personne
éloignée du marché du travail d’intégrer un emploi pour une durée de six mois (EÉS-2, EÉS-13, EÉS-15). Des
répondants déplorent la courte durée de ces subventions qui entraînent un roulement de personnel puisqu’ils n’ont
souvent pas les moyens de garder ces personnes en poste (EÉS-2, EÉS-13, EÉS-15). Aussi, il n’est pas facile de trouver
une personne lorsque l’emploi requiert des connaissances particulières dans un champ d’activité (EÉS-13, EÉS-15).
Une gestionnaire explique qu’Emploi-Québec leur a déjà envoyé une personne qui avait des études dans un domaine
qui ne cadrait pas avec les besoins de l’entreprise, tout en lui disant que la subvention n’était pas pour l’organisme,
mais pour aider les personnes (EÉS-13). Aussi, deux répondantes expriment que le temps requis pour former une
personne équivaut au temps nécessaire pour effectuer les tâches (EÉS-13, EÉS-15). L’une d’elles explique : « Une
fois, on a eu trois personnes sur la même subvention parce que ça [ne] faisait pas notre affaire. Donc, nous on est
comme toujours à recommencer, recommencer, recommencer. Et c’est arrivé souvent […] que j’ai préféré faire les
choses plutôt que de prendre le temps parce que je savais déjà que ça n’allait rien donner. En tout cas, c’est très
frustrant » (EÉS-13). Par ailleurs, ce programme a aussi ses aspects positifs puisqu’une des gestionnaires a souligné
avoir été très satisfaite du travail d’une personne ayant travaillé dans son organisation grâce à cette subvention
(EÉS-15). Aussi, lorsqu’on regarde du côté de la recherche de bénévoles, il semble qu’il ne soit pas facile de trouver
lorsqu’on a besoin de personnes ayant certaines connaissances précises (EÉS-15).
d) Les problèmes de relève
Deux personnes ont mentionné avoir des problèmes de relève (EÉS-5, EÉS-13). Selon une entrepreneure, ce
problème est plus prononcé dans le domaine de l’économie sociale qu’ailleurs (EÉS-5). L’économie sociale
demandant une plus grande implication des gens, donc plus de travail, cela entraîne, aux yeux d’un répondant, un
certain roulement de personnel (EÉS-3).
e) Le manque de ressources techniques
Aussi, une personne a relevé un problème sur le plan des ressources techniques qui, selon elle, sont trop peu
nombreuses et mal connues ou offrent des services segmentés et inadéquats. Elle explique, par exemple : « Il y a
des organismes de formation au démarrage, mais l’accès n’est pas facile parce qu’ils sont mal connus. Et même si
ces organismes font un bout, il n’existe aucun plan très clair et complet pour faire de l’économie sociale. Il y aussi
les répertoires en économie sociale, mais la promotion se fait à l’intérieur, elle n’est pas tournée vers l’extérieur. Il
y a aussi le Chantier de l’économie sociale qui est un regroupement d’entreprises d’économie sociale, mais il n’est
pas très connu » (EÉS-4). À ce propos, au moins trois gestionnaires rencontrés ont fait leurs propres démarches et
trouvé eux-mêmes les informations par des lectures précises (EÉS-12) ou par la publicité présente dans les journaux,
notamment celle portant sur le Fonds de développement des entreprises d’économie sociale (FDEÉS) (EÉS-6).
f) Le réseautage et les collaborations limités
Un gestionnaire trouve qu’il n’y a pas de réseau en économie sociale (EÉS-6). Ce dernier voudrait bien qu’il y ait un
journal destiné aux acteurs de l’économie sociale, mais il déplore : « Chacun est dans sa tranchée, il n’y a pas
d’efficacité, pas de liens entre les entrepreneurs » (EÉS-6). Alors qu’une autre personne trouve au contraire qu’il y a
beaucoup de réseautage, mais que la réalité des organisations fait en sorte que chacun tente de réaliser ses propres
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
35
activités et manque de temps pour travailler avec les autres (EÉS-4). Elle ajoute qu’il y a donc plus de collaboration
que de partenariat (EÉS-4).
g) Le label « économie sociale » galvaudé
Enfin, selon une répondante, l’économie sociale aurait un problème de nom. La popularité de ce mouvement ferait
en sorte que des gens se réclameraient de l’économie sociale, sans pour autant en partager les valeurs de
participation notamment (EÉS-3).
Obstac les caractér i s t iques des ent repr i ses d ’économie soc ia le
En demandant aux répondants s’ils pouvaient identifier des obstacles plus typiques d’entreprises d’économie
sociale, ces derniers ont à nouveau parlé du financement et des ressources humaines. Mais ils ont aussi parlé de
gestion interne, de promotion et de reconnaissance.
a) Ressources humaines
Trois personnes ont parlé des ressources humaines. La première trouve difficile le processus visant à réunir des gens
autour d’un projet (EÉS-11). Pour la seconde personne, la difficulté est d’assurer la relève avec des personnes qui
n’ont pas créé l’entreprise (EÉS-2). La dernière personne souligne que le fait d’embaucher des personnes
vulnérables demande plus d’encadrement et de formation, ce qui ralentit les résultats et donc l’entrée des profits
qui doivent, par ailleurs, survenir assez rapidement afin de couvrir les dépenses puisque les subventions ne suffisent
pas (EÉS-10).
b) Gestion interne
Une seule personne a mentionné la gestion interne comme obstacle. Maintenant que les plus grandes difficultés ont
été largement amoindries depuis les dix dernières années par la création de ressources, un soutien financier au
démarrage et une plus grande considération de l’apport social au regard de l’apport financier au moment de faire
valoir une entreprise d’économie sociale, les difficultés se situent maintenant davantage en ce qui a trait à la
gestion et à la communication entre les employés (EÉS-3).
c) Promotion et reconnaissance
Quelques gestionnaires ont identifié un problème de promotion de l’économie sociale et, conséquemment, de
reconnaissance, et ce, en lien avec différents aspects. D’abord, à l’extérieur du réseau de l’économie sociale, une
gestionnaire dira qu’il est très difficile d’obtenir des fonds d’une banque, puisque les gens qui s’y trouvent ne sont
pas sensibilisés à l’économie sociale : « On nous voit comme un OBNL, on est ça en partie, mais on a aussi un profil
entrepreneur » (EÉS-4). Ce manque de promotion de l’économie sociale rendrait aussi difficile la recherche de
partenaires (EÉS-4). De plus, cela entraînerait une confusion entre les entreprises d’économie sociale et les
organismes communautaires. « Les gens ne comprennent pas qu’on fasse des profits ou qu’on accorde des bonus »
(EÉS-8).
Et pour ceux qui connaissent davantage l’économie sociale, sans pour autant en faire eux-mêmes, un gestionnaire
ajoute : « On a des attentes envers l’économie sociale, mais on ne reconnaît pas son apport. On s’attend toujours à
des contrats bon marché. Aussi, le volume des budgets en économie sociale est toujours limité. Même quand on
travaille avec la CDEC sur un projet, c’est toujours calculé sans marge de manœuvre » (EÉS-8). Outre le problème
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
36
de promotion de l’économie sociale, un entrepreneur souligne la difficulté de faire connaître son entreprise (EÉS-7).
Il raconte qu’il a tenté d’approcher les médias, mais que ces derniers ne réagissaient pas (EÉS-7). Une occasion s’est
finalement présentée et il a réussi à attirer les grands médias à l’entreprise (EÉS-7).
d) Financement
Le problème du financement a été nommé une seconde fois par plusieurs gestionnaires. Selon l’un d’eux, il est à la
fois difficile de trouver une façon de rendre l’entreprise rentable à travers sa mission et de convaincre des bailleurs
de fonds (EÉS-8) d’y investir. Un autre gestionnaire a eu beaucoup de difficulté à réunir le financement nécessaire
au démarrage de l’entreprise et c’est pourquoi il a créé un seul poste de travailleur; les autres tâches sont donc
effectuées par des bénévoles (EÉS-6). Cet entrepreneur a finalement obtenu un prêt au démarrage du gouvernement
du Québec ainsi qu’un financement sur trois ans (EÉS-6), alors qu’une autre entreprise a dû démarrer d’abord avec
des fonds personnels; un prêt de pré-financement lui a ensuite été octroyé et, finalement, elle a obtenu un
financement sur trois ans avec la CDEC (EÉS-7). Une troisième gestionnaire a travaillé de façon bénévole pendant
deux ans et demi (EÉS-15). Elle a fait une demande de subvention à la CDEC, qui a d’abord été refusée (EÉS-15).
Puis, au bout de huit ou neuf mois de discussion avec la CDEC, elle a réussi à obtenir cette subvention (EÉS-15). Une
gestionnaire qui n’a pas réussi à obtenir le FDÉES de la CDEC se dit qu’elle n’était peut-être pas capable de se
vendre auprès de sa CDEC (EÉS-13). En ce qui concerne le travail avec la CDEC, un gestionnaire nous dira que « ce
n’est pas facile, elle est là, elle donne les papiers et pose les conditions » (EÉS-7).
Une gestionnaire revient, quant à elle, sur le plan d’affaires en disant qu’elle a dû en faire un très diversifié pour
arriver à financer l’entreprise : « Il faut être très innovateur dans la recherche de fonds » (EÉS-5). Enfin, une
gestionnaire déplore le manque de financement global : « Il faut y aller par morceau, donc on ne peut mettre le
paquet pour que le projet fonctionne bien, on ne peut partir avec toutes les chances de notre côté » (EÉS-10).
e) Absence de difficultés
Un gestionnaire a affirmé ne pas avoir connu de difficultés et c’est celui qui se trouve à l’extérieur de la région de
Montréal. Il mentionne que, pour l’instant, l’organisation où il travaille reçoit du soutien de partout et il ajoute, en
guise d’explication, que la communauté voit peut-être cela comme du développement pour la région (EÉS-12).
Obstac les as soc iés au fa i t d ’êt re immigrant
Quatre gestionnaires ont dit qu’il n’y avait pas d’obstacles liés au fait d’être immigrant en économie sociale (EÉS-5,
EÉS-6, EÉS-11, EÉS-12). Les 12 autres personnes ont, en revanche, surtout parlé des conditions difficiles de mise sur
pied d’une entreprise d’ÉS et de la perception qu’ont les immigrants eux-mêmes de l’ÉS. Trois personnes ont, quant
à elles, identifié des problèmes comme la méfiance générale envers les immigrants, leur manque de crédibilité et le
manque de soutien de leur communauté d’origine.
a) Conditions de mise sur pied d’une entreprise d’économie sociale
Selon un des gestionnaires interrogés, les immigrants nouvellement arrivés veulent plutôt créer une petite
entreprise familiale (EÉS-2). Ce n’est qu’après un certain temps que les gens s’installent, se regroupent et auraient
les conditions pour mettre sur pied des entreprises collectives, mais la précarité de ces entreprises ne leur permet
pas de répondre à leurs besoins (EÉS-2). Aussi, la connaissance de l’économie sociale serait inégale selon les origines
des personnes immigrantes, certains pays ayant davantage développé ce mouvement même s’ils ne le nomment pas
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
37
tous de la même façon (EÉS-3, EÉS-8). Ainsi, une gestionnaire croit que le problème est une méconnaissance, de la
part des immigrants, de l’économie sociale (EÉS-5). On relève deux autres difficultés sur le plan des connaissances.
Il y a d’abord la méconnaissance du marché, puis celle des ressources puisque la personne immigrante doit résider
un certain temps dans son nouveau milieu pour les connaître (EÉS-4, EÉS-8). Au sujet de la méconnaissance des
ressources, un gestionnaire nous dira que, selon lui, c’est la seule difficulté qui soit plus grande pour un immigrant
que pour un entrepreneur né au Québec (EÉS-4). De plus, selon un gestionnaire, du fait qu’ils ne sont pas encore
connus des acteurs locaux, les personnes immigrantes doivent mettre plus d’efforts pour démontrer leur capacité à
gérer une entreprise (EÉS-3). Enfin, une personne nous dit que les immigrants ont de la difficulté à obtenir un prêt
pour leur entreprise parce que, pour l’obtenir, on demande aux personnes d’avoir un dossier de crédit (EÉS-3), ou
alors, pour faire une demande de subvention, on leur demande d’avoir des états financiers ainsi qu’un local (EÉS-7),
ce dont ils ne disposent pas encore.
b) Perception de l’économie sociale
Des gestionnaires ont émis certaines hypothèses quant à la perception que certains immigrants pouvaient avoir de
l’économie sociale. L’un d’eux avance que du fait que les entreprises d’économie sociale fonctionnent avec des
subventions, des immigrants pourraient se sentir honteux de demander de l’argent à l’État, tout en croyant à
l’avance qu’ils devront essuyer un refus (EÉS-2). Aussi, en économie sociale, on recherche des travailleurs qui seront
des partenaires et non des employés et certaines personnes, lors de leur embauche, disent partager les valeurs de
l’entreprise, mais une fois en poste, elles éprouvent un malaise (EÉS-8). Une dernière personne mentionne qu’il y a
une méconnaissance de la façon de travailler en économie sociale (EÉS-4). Selon elle, le rythme est plus lent parce
qu’on discute, alors que les immigrants arrivent avec une expérience tirée de l’entreprise privée qui fonctionne
avec des objectifs de rentabilité plus rapides (EÉS-4).
c) Méfiance
Trois personnes ont parlé d’une certaine méfiance ou d’une confiance plus difficile à établir pour les personnes
immigrantes. L’une d’elles nous dit que, bien que le Canada soit un pays ouvert qui accueille les immigrants, elle
ressent une méfiance envers les immigrants, qui n’est pas visible (EÉS-1). Un autre gestionnaire mentionne que la
lourdeur de la bureaucratie fait en sorte qu’il est difficile de démarrer une entreprise pour tout le monde, mais
selon lui le degré de difficulté est plus grand pour un immigrant « parce qu’il faut établir la confiance, on doit être
connu dans notre milieu. Ce n’est pas facile de se trouver un parrain. C’est possible, mais difficile » (EÉS-7). Une
dernière gestionnaire ajoute que les entrepreneurs immigrants rencontrent plus de difficultés que les personnes
nées au Québec et que, pour les minorités visibles, c’est encore plus difficile (EÉS-10). Selon elle, les immigrants
doivent faire une démonstration beaucoup plus évidente de la viabilité de leur projet. Aussi, pour arriver à vendre
leurs produits à l’extérieur de leur communauté, embaucher un Québécois rend les choses beaucoup plus faciles
(EÉS-10). Cette personne a expliqué qu’une Québécoise d’origine a été embauchée pour venir expliquer aux
travailleuses comment aborder les clients et que, par sa présence, l’entreprise a pu aller frapper à certaines portes
(EÉS-10).
d) Manque de soutien de la communauté d’origine
Une des personnes interrogées déplore le manque de soutien de sa communauté d’origine : « Si les membres de la
communauté ne sont pas les premiers clients, comment cela peut-il marcher? » (EÉS-1). Selon elle, dans sa
communauté, les gens s’attendent à avoir une faveur parmi les gens de même communauté. Ainsi, ils consomment
et disent qu’ils vont revenir payer, mais ne reviennent jamais. Alors, ils paient pour les mêmes services chez les
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
38
non-immigrants. Elle regarde d’autres communautés comme les Italiens et les Portugais. « Leur communauté est
là! » (EÉS-1). Elle ajoute : « S’unir et travailler ensemble, ils ne comprennent pas ça, donc les organismes tombent »
(EÉS-1).
e) Crédibilité à l’international
Selon un gestionnaire, une des difficultés des entrepreneurs immigrants est que, sur le plan international, un
organisme québécois qui est dirigé par un Québécois d’origine aura plus de crédibilité qu’un organisme québécois
qui est dirigé par une personne d’origine africaine (EÉS-1).
L iens e t réseaux d ’a f fa i res des ges t ionna i res immigrants
Nous présentons ici l’ensemble des liens et réseaux d’affaires que les gestionnaires interrogés nous ont dit avoir
avec le secteur de l’économie sociale ou hors de celui-ci.
a) Liens et réseaux en économie sociale
Lorsque nous avons demandé à l’ensemble des gestionnaires interrogés quels étaient leurs liens ou leurs réseaux en
économie sociale, outre l’un d’eux qui nous a dit n’avoir aucun lien (EÉS-6), les autres ont nommé différentes
organisations en économie sociale.
Du côté des regroupements en économie sociale, des répondants ont nommé le Chantier de l’économie sociale (EÉS-
2, EÉS-3, EÉS-10, EÉS-11). Les liens vont de la lecture de documents que l’organisation produit jusqu’à une
participation aux activités de l’organisation. Les gestionnaires ont aussi mentionné un membership ou une
participation en lien avec les organisations suivantes : le Comité régional d’économie sociale (EÉS-5), le Conseil de
l’économie sociale de l’île de Montréal (CÉSIM) (EÉS-10), le Réseau d’entreprises d’économie sociale et solidaire
(EÉS-10) et une entreprise d’économie sociale compte s’affilier au Pôle régional en économie sociale (EÉS-12).
Les gestionnaires répondants ont également parlé de leurs liens avec les organisations de soutien financier en
économie sociale suivantes : le Réseau québécois de crédit communautaire (EÉS-3), le Réseau canadien de crédit
communautaire et coopératif (EÉS-3), le Fonds d’investissement en économie sociale (EÉS-10) et le RISQ (EÉS-14).
Aussi, des organisations ont parlé, soit de travail, de partenariats ou d’échanges avec d’autres entreprises
d’économie sociale (EÉS-3, EÉS-4, EÉS-6, EÉS-7, EÉS-9, EÉS-12, EÉS-14). De plus, trois organisations gérées par les
répondants entretiennent des liens avec des regroupements sectoriels en économie sociale (EÉS-8, EÉS-9, EÉS-13).
En outre, certains gestionnaires ont nommé des liens avec des organisations qu’ils associent à l’économie sociale,
comme le CSMO-ÉSAC (EÉS-3), l’ARUC-ÉS (EÉS-3), la CDEC, (EÉS-10, EÉS-11) et le CLD (EÉS-12).
b) Liens et réseaux hors économie sociale
Parmi les liens que les gestionnaires ont dit avoir à l’extérieur du réseau de l’économie sociale, on compte des
organismes communautaires. Ainsi, six gestionnaires ont mentionné des liens avec au moins huit groupes
communautaires (EÉS-1, EÉS-2, EÉS-4, EÉS-7, EÉS-14, EÉS-15). Quatre gestionnaires ont mentionné des liens avec six
regroupements sectoriels (EÉS-4, EÉS-5, EÉS-7, EÉS-10). Aussi, deux gestionnaires ont mentionné deux fondations
(EÉS-7, EÉS-10). D’autres ont mentionné des liens avec des acteurs locaux ou régionaux tels que la CDEC (EÉS-3, EÉS-
4, EÉS-7, EÉS-15), le CLE (EÉS-12), le CRÉ de Montréal (EÉS-7), l’arrondissement (EÉS-11), le milieu des affaires et le
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
39
secteur privé (EÉS-5, EÉS-8), et des liens qui peuvent aider dans la recherche de fonds (EÉS-5). En outre, un
gestionnaire a parlé de liens avec Environnement Canada, avec qui il a un projet (EÉS-4).
Autres po int s de vue des répondants
Au moment de terminer les entrevues téléphoniques et le groupe de discussion, nous demandions aux participants
s’ils avaient des éléments à ajouter concernant le sujet de la recherche ou certaines de leurs réponses. Cinq d’entre
eux ont mentionné n’avoir rien à ajouter (EÉS-3, EÉS-4, EÉS-6, EÉS-7, EÉS-9). Ainsi, nous retrouvons dans cette
section les éléments nommés par les autres répondants.
a) Manque de soutien social et financier
Deux personnes ont souligné le manque de soutien pour les entrepreneurs en économie sociale. L’une d’elles évoque
des difficultés qu’elle attribue davantage au fait d’être immigrant. Selon elle, les entreprises gérées par les
immigrants n’ont pas une longue vie parce qu’ils manquent de fonds et de soutien social et financier de toutes
parts; d’abord de leurs clients/communauté, puis des acteurs locaux et des milieux municipal et fédéral (EÉS-1).
Elle ajoute : « Parfois nous sommes obligés de faire affaire avec eux, mais ils ne croient pas à notre affaire. C’est
dommage parce qu’il y a un potentiel d’immigrants qui pourraient se prendre en main au lieu d’aller chercher du
travail » (EÉS-1). Un autre gestionnaire identifie un tout autre type de difficulté, soit celui de l’attribution des
subventions du FDEÉS. Ce gestionnaire trouve qu’il y a un traitement inégal entre les CDEC des différents quartiers
et arrondissements en ce qui concerne la considération des critères d’accès au FDEÉS (EÉS-11). Il explique, qu’à sa
CDEC, on s’est aperçu que certains critères étaient trop « envahissants » pour juger de la viabilité économique
d’une entreprise et il ajoute que ceci fait en sorte que beaucoup d’argent du FDEÉS dort (EÉS-11). À ses yeux,c’est
le résultat d’une trop grande rigidité sur les critères économiques notamment (EÉS-11).
b) Manque d’information et de promotion
Selon un gestionnaire, les communautés culturelles ne connaissent pas suffisamment les programmes et manque de
savoir-faire (EÉS-2). Il suggère de s’adresser à des organismes liés à des communautés culturelles pour toucher les
gens et faciliter leur insertion dans la société (EÉS-2). En ce qui concerne l’économie sociale, une personne nous dit
qu’il y a peu d’immigrants dans ce secteur parce qu’ils ne connaissent pas cette forme d’entreprise. (EÉS-4). Elle
ajoute : « C’est difficile pour quelqu’un qui arrive d’avoir cette information, que l’économie sociale existe, il n’y a
pas de promotion, alors il y a une méconnaissance pour les immigrants » (EÉS-4). Ceci n’est toutefois pas une
situation qu’elle a vécue puisque, de son côté, elle connaissait l’économie sociale avant d’arriver au pays (EÉS-4).
Une des gestionnaires interrogées soutient qu’il faudrait davantage faire la promotion des retombées économiques
et sociales de l’économie sociale parce que, selon elle, actuellement ce n’est pas reconnu (EÉS-5). Elle explique
que, contrairement au secteur privé, les entreprises d’économie sociale reçoivent des subventions et que bien qu’il
y ait une différence en ce qui touche au travail de l’entreprise et la clientèle reçue, « le milieu des affaires prend
ça comme une compétition déloyale » (EÉS-5).
c) La meilleure voie d’intégration pour les immigrants et les minorités visibles
Selon un gestionnaire interrogé, l’économie sociale est un secteur économique comme un autre, mais pour les
immigrants, c’est le meilleur choix à faire parmi les quatre possibilités d’emploi qui s’offrent à eux (EÉS-8). Il
explique qu’ils peuvent d’abord aller vers la fonction publique, mais que cela leur est quasiment impossible parce
qu’ils doivent déjà être citoyens pour avoir un poste (EÉS-8). Ensuite, ils peuvent regarder du côté d’une entreprise
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
40
privée, mais cela ne sera pas plus simple parce qu’on ne reconnaîtra pas leurs diplômes (EÉS-8). Ils peuvent tenter
de créer leur propre entreprise privée, ce qui est très difficile, ou alors utiliser la voie de développement de
l’économie sociale qui est plus axée sur des résultats stables et non sur la spéculation du profit (EÉS-8). Une autre
personne abonde dans le même sens en disant qu’il y a beaucoup d’opportunités pour les communautés immigrantes
en économie sociale, notamment pour lancer leur propre « business » ou leur donner les moyens de le faire (EÉS-
12). Selon lui, il y a pour eux, en économie sociale, un meilleur cadre que dans l’entreprise privée (EÉS-12).
Un répondant avance que l’économie sociale pourrait également être développée par des personnes assistées
sociales qui actuellement n’ont pas de vraie assistance, puisqu’on leur offre seulement l’assistance sociale et on les
encourage à l’emploi dans le secteur privé (EÉS-8). Aussi, si ces personnes veulent devenir entrepreneurs, on les
pénalise parce qu’elles arrêtent alors de chercher de l’emploi (EÉS-8). Il ajoute que l’économie sociale peut ouvrir
une voie puisque souvent ces personnes ont fait des études et possèdent déjà des compétences (EÉS-8). Le
gouvernement pourrait ainsi aider à former des groupes selon les compétences de chacun (EÉS-8). Dans le même
ordre d’idées, une autre gestionnaire soutient que, de la même façon qu’on a pu développer les entreprises
d’insertion pour l’emploi et qu’on a développé les CPE pour la petite enfance, on devrait développer des créneaux
en économie sociale pour les minorités visibles afin de faciliter leur intégration (EÉS-10). Elle suggère aussi que ce
travail pourrait se faire avec la participation du MICC et du MAMROT (EÉS-10).
Conc lus ion de l ’enquête auprès des ges t ionna i res
En préalable à la cueillette de données pour cette première phase d’enquête, nous avons d’abord dû établir une
liste de base (ou population) de gestionnaires immigrants en économie sociale. Malgré une volonté d’élargir notre
collecte de données à plusieurs régions du Québec, c’est presque qu’exclusivement à Montréal que nous avons pu
l’effectuer. La région de Montréal qui accueille 88 % de la population immigrante (Québec, 2004) faisait
statistiquement de cette région l’endroit où il devait aussi y avoir un plus grand nombre de gestionnaires immigrants
en économie sociale. Par ailleurs, nous ne nous attendions pas à ce que la recherche de ce profil nous mène à une si
courte liste à l’extérieur de la région de Montréal. Ceci nous laisse croire, même si notre méthode n’était pas
systématique, que la population de gestionnaires immigrants en économie sociale à Montréal et au Québec est
somme toute assez restreinte.
Nous avons alors tenté d’identifier et de comprendre les facteurs menant à cet état de fait. Pour ce faire, nous
avons contacté des gestionnaires immigrants en économie sociale. Cette méthode avait l’avantage de nous fournir
des données sur le parcours et l’expérience de plusieurs années des répondants. En revanche, elle ne nous informait
qu’à partir de modèles de réussite et non sur ceux qui avaient abandonné leur projet en cours de route ou l’avaient
mis en veille pour une période indéterminée.
Ce sont 16 gestionnaires qui ont accepté de participer à la recherche. Ces derniers nous ont parlé de leur vision de
l’économie sociale et des raisons qui les ont conduits à diriger ce type d’entreprise. Ils nous ont ensuite fait part de
leur appréciation de l’économie sociale, des obstacles rencontrés et des liens et réseaux qu’ils entretiennent.
Certains d’entre eux ont aussi fourni des données sur les travailleurs et les bénévoles de l’organisation qu’ils
dirigent.
Concernant les éléments de définition de l’économie sociale, nous avons pu constater des visions diverses
s’attachant tantôt davantage à l’aspect économique et tantôt davantage à l’aspect social. Quant au choix de
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
41
travailler en économie sociale, les gestionnaires ont parlé de valeurs telles que le bien commun, la démocratie et le
partage. Pour d’autres, il s’agissait surtout de convictions personnelles allant d’une réaction négative envers
l’entreprise privée au désir de créer une organisation ayant un impact positif sur les gens ou sur leurs conditions de
vie. Une autre raison de travailler en économie sociale est celle de répondre à un besoin exprimé par la
communauté.
En adéquation avec les valeurs de démocratie et de solidarité, nombre de gestionnaires ont dit aimer l’économie
sociale à cause de cet équilibre entre les aspects économiques et sociaux qui permet le partage à la fois du travail,
de la gestion et des profits et qui stimule les partenariats plutôt que la concurrence. On nous a également parlé de
soutien aux personnes pour les aider à prendre leur place, soit pour l’intégration de personnes démunies ou
d’immigrants n’ayant pas encore d’expérience de travail au Canada. Cette sensibilité aux personnes qu’on lie à
l’économie sociale est appréciée. En outre, même le manque de ressources est apprécié par quelques gestionnaires
qui trouvent que cela stimule la créativité.
Quant aux irritants qu’on lie à l’économie sociale, si deux gestionnaires parlent des revers de la démocratie qui rend
la prise de décision plus lourde, en revanche, plus de la moitié d’entre eux nous ont parlé du manque de ressources
financières qui entraîne de grandes frustrations. Aussi, lorsqu’ils arrivent à obtenir des subventions, il y a encore un
délai d’attente et la reddition de comptes à faire. De plus, le manque de ressources financières entraîne une
difficulté à trouver des ressources humaines. Pour y remédier, certains gestionnaires font appel au programme de
subvention salariale d’Emploi-Québec qui a plutôt été conçu, non pas pour soutenir les entreprises, mais pour
stimuler l’intégration de personnes éloignées du marché du travail. Ainsi, les avantages envisagés par les
gestionnaires font souvent place à de grandes déceptions puisqu’ils investissent beaucoup de temps dans la
formation de la personne et demeurent dans l’impossibilité de la garder en emploi au-delà de la subvention. En
outre, même lorsqu’il s’agit de remplacer du personnel dans des postes consolidés, trois gestionnaires disent avoir
de la difficulté à trouver de la relève. Une personne suggère que le degré d’implication qu’exige ce type
d’entreprise pourrait jouer un facteur déterminant. De plus, on parle du manque de ressources techniques pour
promouvoir l’économie sociale, informer et former les éventuels entrepreneurs. Le réseautage a aussi été nommé
dans les irritants, soit pour déplorer son absence, soit pour déplorer le manque de temps pour y participer. Enfin,
une personne fait une mise en garde en mentionnant que certains veulent profiter de la popularité de l’économie
sociale sans pour autant partager les valeurs associées à ce type d’entreprise.
Concernant les obstacles typiques des entreprises d’économie sociale, les gestionnaires ont insisté sur les difficultés
de gestion des ressources humaines dans des phases de démarrage de projets, pour assurer de la relève et pour
l’embauche et la formation de personnes vulnérables. Une personne a mentionné la gestion interne alors que trois
autres ont plutôt souligné les lacunes sur le plan de la promotion et, conséquemment, de la reconnaissance de
l’apport de l’économie sociale. Le problème se répercuterait sur la recherche de financement, de partenaires et sur
les attentes envers ces entreprises ou organisations. D’ailleurs, dans cette section, plus de la moitié des
gestionnaires ont réaffirmé les obstacles de financement. Bien que la majorité d’entre eux en aient finalement
obtenu, ils ont dû investir bénévolement beaucoup de temps, insister et faire preuve d’une grande créativité pour y
arriver. Il est intéressant de souligner que le seul gestionnaire qui nous a dit ne pas avoir connu de difficulté et être
soutenu par la communauté est celui qui se trouve à l’extérieur de la région de Montréal.
Premier volet d’étude Enquête qual itat ive auprès des gest ionnaires immigrants
42
Ainsi, les gestionnaires immigrants qui ont participé à l’étude font nommément état des difficultés qui ne sont pas
spécifiques à leur situation d’immigrant. Ils parlent des mêmes problèmes ou irritants que l’ensemble des
entrepreneurs en économie sociale pourraient aborder. Nous leur avons donc posé la question directement à savoir
si, selon eux, il y avait en économie sociale des obstacles particulièrement liés aux immigrants. Sur les 16
gestionnaires immigrants interrogés, quatre d’entre eux nous ont mentionné qu’il n’y en avait pas. Six autres ont
mentionné des éléments liés aux immigrants eux-mêmes : désir de créer plutôt une entreprise de type familial,
perception négative de l’économie sociale, connaissance de l’économie sociale inégale selon le pays d’origine des
personnes, méconnaissance du marché et des ressources d’un territoire à l’arrivée, absence d’un dossier de crédit
nécessaire à l’obtention de prêts. Trois personnes ont parlé d’une confiance plus difficile à établir ou même d’une
méfiance envers les immigrants. L’une d’elles mentionne qu’il faut se faire connaître des acteurs locaux pour
stimuler la confiance et se trouver un parrain. Selon une autre personne, démarrer une entreprise est difficile pour
tout le monde, mais encore pire pour les personnes identifiées aux minorités visibles qui doivent démontrer la
viabilité de leur projet de façon beaucoup plus évidente. Une dernière personne déplore le manque de soutien des
membres de sa communauté d’origine qui, selon lui, devraient être les premiers à se soutenir les uns les autres. Il
souligne de plus que, dans son pays d’origine, les organisations gérées par des Québécois d’origine ont une meilleure
crédibilité que celles gérées par les membres de sa communauté – les premiers ayant meilleure réputation auprès
des populations locales.
Concernant les liens et réseaux des organisations gérées par les gestionnaires interrogés, 13 organisations sur 16 en
ont avec l’économie sociale. Il s’agit de liens avec des regroupements sectoriels ou non, des organisations qui
offrent un soutien financier ou d’autres entreprises d’économie sociale. Seulement trois organisations ont parlé
d’implication active dans ces réseaux. Pour les autres, il s’agit le plus souvent de liens ponctuels, d’un projet de
membership ou d’un membership passif. Les gestionnaires interrogés ont davantage mentionné des liens à
l’extérieur des réseaux de l’économie sociale. Ainsi, 11 gestionnaires ont nommé des liens avec plus de 24
organisations telles que des groupes communautaires, des regroupements sectoriels, des fondations et des acteurs
locaux.
Quant aux autres sujets que les gestionnaires étaient libres de discuter ou d’ajouter en fin d’entrevue, certains ont
insisté à nouveau sur le manque de soutien social et financier pour les entrepreneurs en économie sociale, le
manque d’information des communautés culturelles au sujet de l’économie sociale, le manque de sensibilisation et
de promotion à l’extérieur du réseau de l’économie sociale (dans le milieu des affaires, par exemple). Sous un angle
plus positif, des gestionnaires ont en outre parlé de l’économie sociale comme meilleure voie d’opportunité,
d’intégration et de participation sociale pour les immigrants et les minorités visibles.
S e c o n d v o l e t d ’ é t u d e
Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et des bénévoles
Dans le second volet de la recherche, nous nous sommes donné comme objectif de recueillir et de comparer des
données sur la vision et l’expérience des travailleurs et des bénévoles, immigrants ou natifs, sur leur milieu de
travail.
Méthode d’enquête
Popu la t ion à l ’é tude et s t ra tég ie d ’enquête
Dans le cadre de ce volet quantitatif, nous avons voulu approfondir nos données sur les travailleurs et sur les
bénévoles membres d’un conseil d’administration quant à l’appréciation de leur expérience en économie sociale.
Nous voulions, de plus, être en mesure de réaliser une comparaison entre les réponses des immigrants et celles des
natifs afin d’aller vérifier si des écarts existaient entre ces groupes et, dans cette éventualité, identifier les zones
de contraste. Nous avons donc administré un questionnaire auprès des deux types de répondants en ciblant dix
organisations ou entreprises d’économie sociale, ou ayant un volet économie sociale, et situées à Montréal. Nous
nous intéressons alors à la vision et à l’expérience des travailleurs et des bénévoles, immigrants ou non,
d’organisations ou d’entreprises d’économie sociale de Montréal.
Il faut souligner que, pour la présente enquête, le terme « travailleur » inclut toutes les personnes exerçant une
activité rémunérée à l’intérieur de l’organisation ou de l’entreprise d’économie sociale. Ce terme inclut ainsi les
travailleurs permanents et les travailleurs temporaires tels que ceux qui sont embauchés sous octroi de subventions
ou dans le cadre de programmes d’insertion. À nos yeux, ces personnes vivent toutes une expérience de travail à
l’intérieur d’organisations ou d’entreprises d’économie sociale et, à cet effet, leur vision de cette expérience ne
devait pas être négligée dans le cadre de cette étude, puisque ces travailleurs constituent une part du portrait de
l’économie sociale. Quant au terme « bénévole », à moins de précision contraire, il réfère aux membres des conseils
d’administration des organisations ou entreprises d’économie sociale ciblées. Nous nous sommes limités à interroger
ce type de bénévoles à cause de leur rôle administratif qui revêt un caractère plus spécifique à l’économie sociale.
Méthodo log ie , recrutement , échant i l l on retenu
Afin de constituer notre liste de dix organisations ou entreprises d’économie sociale ou ayant un volet économie
sociale, nous avons exploré le terrain en tenant compte de nos premières constations à l’effet que les réseaux de
l’économie sociale ont une connaissance approximative des entreprises et des entrepreneurs de leur territoire.
Aussi, le Répertoire des entreprises d’économie sociale du Chantier de l’économie sociale donne accès à une liste
considérable (4778 organisations), mais non exhaustive des EÉS au Québec. Ce répertoire regroupe les entreprises en
20 secteurs d’activité et selon les 17 régions administratives. Le répertoire ne donne pas de détails sur la taille des
entreprises, ni d’informations sur la présence de personnes immigrantes. Il en est de même pour le Répertoire du
Comité d'économie sociale de l'île de Montréal (CÉSÎM) qui regroupe 1066 EÉS. Il n’est donc pas possible d’avoir une
idée précise de notre population de référence, que ce soit les immigrants qui travaillent dans les entreprises ou
ceux qui, comme bénévoles, siègent aux conseils d’administration.
Second volet d’étude Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et bénévoles
44
Nous avons alors fait le choix stratégique de ratisser large dans la deuxième phase de notre recherche, en nous
intéressant tant aux immigrants qu’aux natifs afin de produire des données comparatives entre ces deux groupes.
Nous avons fixé un échantillon raisonné sur la base de caractéristiques d’entreprises, en variant les secteurs de
l’économie sociale, les quartiers où sont situées les entreprises et les formes d’entreprises. Le Tableau 4 illustre la
variété intrinsèque de l’échantillon ciblé d’entreprises.
Tableau 4: Secteurs, quartiers et formes d’entreprises ciblées
S e c t e u r s d e l ’ É S Q u a r t i e r s d e M o n t r é a l * * F o r m e s d ’ e n t r e p r i s e s
Aide domestique
Alimentaire
Culture
Finance*
Habitation
Loisir
Manufacturier
Petite enfance
Recyclage
Services aux entreprises
Centre-Sud
Centre-Ville
Hochelaga-Maisonneuve
Montréal-Nord
Montréal-Ouest
Pointe-aux-Trembles
Rosemont – Petite-Patrie
Saint-Laurent
Saint-Michel
Verdun
Villeray
Coopérative de travailleurs
Entreprise d’économie sociale
Entreprise d’insertion
OBNL – volet économie sociale
* L’entreprise ciblée du secteur financier n’a finalement pas pu participer à la recherche.
** On compte plus de quartiers que d’entreprises visitées parce que l’une d’elles a divers points de services. Nous avons également choisi des entreprises de taille différente, la plus petite employant moins de 10 personnes et
la plus grande, environ 350 travailleurs, pour une moyenne de 80 travailleurs par entreprise; de 4 à 12 personnes
siégeant aux C.A. Nous avons fait le choix de cibler des entreprises où il y avait une proportion importante de
travailleurs immigrants afin d’assurer nos visées comparatives. Les entreprises ciblées comptent de 11 % à 68 % de
personnes immigrantes sur le total de leur personnel et de 0 % à 71 % sur le total de leurs bénévoles au C.A.
Un court questionnaire a été constitué pour la collecte de données. Ce sondage, de 36 questions pour les travailleurs
et de 29 pour les bénévoles, a été mené par les chercheurs de l’UQAM. Un prétest administré à quatre travailleurs et
à quatre bénévoles d’une entreprise d’économie sociale nous a permis de confirmer la cohérence et la clarté de
notre questionnaire. L’administration du questionnaire s’est effectuée dans les entreprises en complétant le
sondage dans la demi-heure dégagée par les organisations ou en le retournant par la poste. La collecte s’est faite de
décembre 2009 à avril 2010. Pour l’ensemble des entreprises visitées, nous obtenons des travailleurs un taux de
réponse global de 55 % (305/55514). Du côté des bénévoles membres d’un conseil d’administration, nous obtenons un
taux de réponse global de 42 % (32/77).
14 Nombre total de questionnaires distribués à ne pas confondre avec le nombre total de travailleurs annuels des entreprises qui se chiffre à 802. Il
n’était pas possible de rejoindre l’ensemble des travailleurs, surtout à cause de l’emploi saisonnier ou de l’emploi temporaire dans certaines entreprises.
Second volet d’étude Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et des bénévoles
45
L imi tes méthodo log iques
Nous avons pu constater que certaines organisations étaient très sollicitées pour des recherches alors que d’autres
l’étaient peu ou pas du tout. Est-ce à dire qu’une partie du terrain est « brûlé »? Dans les faits, deux entreprises sur
dix ont refusé de participer à notre étude pour cette raison. Nous avons pu remplacer l’une de ces entreprises par
une organisation qui s’est tout de suite montrée intéressée.
Une autre limite est liée à la méthode de collecte de données jumelée à la population de l’enquête. En effet, un
seul questionnaire a été construit pour être distribué dans l’ensemble des entreprises de tous les secteurs ciblés.
Aussi, quelques questions se sont avérées plus difficiles à interpréter dans le contexte de certaines entreprises. De
plus, la population de travailleurs était très diversifiée, notamment en ce qui a trait au niveau de scolarité et à la
maîtrise du français. Dans quelques cas, des travailleurs avaient des difficultés de lecture, alors que d’autres
manifestaient des problèmes de compréhension du sens de certains mots ou du sens de certaines phrases.
Finalement, si les travailleurs rencontrés ont participé à l’étude en grand nombre, il est intéressant de mentionner
qu’au moment de la présentation de l’étude, lorsque l’objectif de faire un « portrait de la place des communautés
culturelles dans l’économie sociale » était mentionné, on remarquait, dans le langage non verbal de travailleurs
immigrants, une certaine circonspection, de l’étonnement, voire quelque appréhension ou méfiance, à la suite de
l’expression « communauté culturelle » retenue dans la présentation de l’étude en concordance avec le plan
d’action du Chantier de l’économie sociale.
Résultats d’enquête
Au total, nous avons analysé 305 questionnaires de travailleurs et 32 questionnaires de bénévoles membres de C.A.
Voici les résultats obtenus.
Prof i l des t rava i l leurs ayant par t i c ipé à l ’enquête
Dans l’ensemble de notre échantillon de travailleurs, près de la moitié des répondants sont immigrants, soit 47 %
(144/305)15
.
Parmi l’ensemble des répondants, on compte une majorité de femmes (62 %) et de personnes âgées de 26 à 45 ans
(52 %). Un tiers des répondants ont complété un niveau de scolarité secondaire (34 %) et un autre tiers, une scolarité
universitaire (35 %).
Les répondants, natifs et immigrants, ont complété leur scolarité universitaire dans les mêmes proportions (I=34 %,
Na=36 %)16
. Les immigrants sont toutefois plus nombreux à avoir complété le niveau de scolarité collégial (I=30 %,
Na=21%) (voir le Tableau 5).
15 L’échantillon total de 305 répondants est constitué de 161 natifs et 144 immigrants. Cependant, en raison des « ne sait pas » et des « non-
réponses » aux diverses questions d’enquête, le nombre de répondants baisse parfois sous ces nombres, jusqu’aux alentours de 270 pour certaines questions.
16 Pourcentage ou nombre d’immigrants (I) ou de natifs (Na) ; par contraste au total de l’échantillon (N).
Second volet d’étude Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et bénévoles
46
Parmi les immigrants, on compte une plus grande proportion de femmes que d’hommes que parmi les natifs (FI=68%,
HI=32 %; FNa=57%, HNa=43%).
Les immigrants paraissent un peu plus âgés que les natifs. En effet, 64 % (93/144) des immigrants ont de 26 à 45 ans,
alors que 52 % (84/161) des natifs ont 35 ans ou moins (voir le Tableau 5).
Les répondants nés à l’extérieur du Canada sont issus de 44 pays. Mais on compte relativement plus de répondants
de l’Algérie (12 %, 15/130), d’Haïti (19 %, 25/130) et du Maroc (12 %, 16/130). Les répondants sont arrivés au
Canada entre 1968 et 2010, mais 46 % sont arrivés au cours des quatre dernières années. Près de la moitié (48 %)
sont maintenant citoyens canadiens et trois personnes ont indiqué être réfugiées.
Concernant la reconnaissance de leurs diplômes, 49 % des immigrants ont mentionné qu’ils avaient été reconnus.17
Nous pouvons cependant penser que certains répondants ont confondu reconnaissance et équivalence formelle des
formations supérieures. Cela dit, plus de la moitié des immigrants (55 %) ont repris des études depuis leur arrivée au
Canada : c’est le cas de presque la moitié des immigrants ayant un niveau de scolarité primaire ou secondaire et de
57 % de ceux qui ont déjà une scolarité universitaire.
Tableau 5: Profil des travailleurs ayant participé à l’enquête
N a t i f s ( n = 1 6 1 )
I m m i g r a n t s ( n = 1 4 4 )
T O T A L ( N = 3 0 5 ) 47 % 52 %
S E X E ( N = 3 0 5 ) % %
Hommes 43,5 32
Femmes 56,5 68
 G E ( N = 3 0 5 ) % %
25 ans ou moins 28,5 13
26 à 35 ans 23,5 33
36 à 45 ans 17 31
46 à 55 ans 22 13
56 à 65 ans 9 8
66 ans ou plus 0 2
SCOLARITÉ (N=304) % %
Primaire / élémentaire 4 6
Secondaire 39 30
Collégial 21 30
Universitaire 36 34
Enfin, 49 % (141/290) de l’ensemble des répondants ont indiqué qu’ils travaillaient dans leur domaine de formation.
17 Sur cette proportion, 19 % (8/42) avaient un niveau d’études primaires ou secondaires.
Second volet d’étude Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et des bénévoles
47
La s i tuat ion des t rava i l leurs en économie soc ia le
La très grande majorité (80 % ou 237/294) des répondants ont dit qu’ils n’avaient pas travaillé dans une organisation
ou une entreprise d’économie sociale avant leur actuel emploi. Cette proportion est légèrement plus élevée chez les
immigrants (82 % ou 115/140) que chez les natifs (78 % ou 122/156). Concernant la manière dont ils ont connu
l’organisation pour laquelle ils travaillent, 46 % ont mentionné que c’était surtout par un ami ou une connaissance et
32 % (97/302) par une offre d’emploi18. Les immigrants paraissent avoir eu plus souvent affaire à des amis ou
connaissances (I=49%; Na=43 %) et moins souvent à une offre d’emploi que les natifs (I=26%; Na=38%)19
.
Concernant la durée d’emploi, on constate de grandes variations dans l’ensemble. Il y a des travailleurs en poste
depuis moins d’un mois et d’autres depuis 25 ans, pour une moyenne de 40 mois (N=288). Un peu plus du tiers (37 %)
des répondants occupent leur emploi depuis six mois ou moins. Or, parmi ces personnes, il y plus d’immigrants. Ce
sont en fait 47 % (63/133) des répondants immigrants comparativement à 28 % (43/155) des répondants natifs qui
ont aussi peu d’ancienneté dans l’entreprise.
La majorité des répondants ont un emploi permanent (70 %, 201/288) et travaillent à temps plein (81 %). Si la
proportion de travailleurs à temps plein est tout à fait comparable chez les immigrants (82 %) et chez les natifs
(80 %), il est intéressant de souligner que la situation est différente en ce qui a trait à la permanence des emplois.
En effet, la grande majorité des travailleurs natifs (85 %, 128/151) occupent un emploi permanent, mais seulement
la moitié des immigrants ont ce statut (53 %, 73/137).
Ces dernières données doivent être nuancées par le fait que notre échantillon comporte une bonne part de
travailleurs en insertion (98/305 ou 32 %) dont l’emploi est d’une durée déterminée et en lien avec une formation à
l’emploi. Parmi ces travailleurs, on compte une bonne proportion de personnes nées à l’extérieur du Canada. Ainsi,
même si notre échantillon ne comptait que deux entreprises d’insertion sur le total des neuf entreprises visitées, le
fait qu’elles comptent beaucoup de travailleurs conduit à une surreprésentation de ce statut de travailleurs. Sauf
exception, les entreprises qui embauchent des personnes par le biais des programmes d’employabilité sont les
entreprises d’insertion.
Toutes les entreprises visitées comptent des travailleurs nés à l’extérieur du pays. Au moment de répondre au
questionnaire, 96 % des répondants avaient connaissance que l’organisation pour laquelle ils travaillaient
embauchait des immigrants.
En résumé, nous constatons, qu’avant leur actuel emploi, la majorité des répondants n’ont jamais travaillé dans une
entreprise d’économie sociale, qu’ils ont surtout connu l’organisation pour laquelle ils travaillent par un ami ou une
connaissance, que les répondants occupent surtout des emplois à temps plein. Mais les immigrants occupent leur
emploi depuis moins longtemps que les natifs et aussi, en moins grande proportion, un emploi permanent. Par
ailleurs, ajoutons que 70 % des immigrants disent ne pas travailler dans leur domaine de formation comparativement
à 35 % des natifs.
18 Question à choix multiples, le pourcentage a été calculé sur le N=302 et non sur le nombre total de sélections (312). 19 Idem.
Second volet d’étude Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et bénévoles
48
Appréc ia t ion des t rava i l leurs sur leur parcours d ’emplo i e t leur mi l ieu de t rava i l
- Données comparatives entre travailleurs natifs et travailleurs immigrants
Notre analyse s’est d’abord concentrée sur la comparaison entre les immigrants et les natifs en ce qui a trait à leur
appréciation de l’économie sociale ou à leur expérience au sein de l’organisation ou de l’entreprise d’économie
sociale où ils travaillent. Une série de 18 questions leur était alors adressée et portait, d’une part, sur différents
aspects du travail dans une organisation ou une entreprise d’économie sociale et, d’autre part, sur le
fonctionnement de l’organisation ou l’entreprise où ils travaillent. Le Graphique 1 illustre les résultats de cette
comparaison, où sont présentées les deux courbes des cotes moyennes d’appréciation pour chacune des 18 questions
d’enquête20.
Voulant savoir si nos répondants avaient déjà reçu des services de l’organisation où ils travaillent, la plupart ont
répondu « Pas du tout », mais dans une proportion beaucoup plus élevée pour les natifs (78 %, 122/156) que pour les
immigrants (50 %, 65/130).
Un second thème visait à connaître les perceptions des travailleurs sur l’effet de leur présence au sein de
l’organisation où ils travaillent. Il est intéressant de remarquer que lorsqu’on demande aux participants s’ils sentent
que leurs « compétences sont mises à profit » ou qu’ils « contribuent à la mission de l’organisation », les natifs se
montrent un peu plus confiants ou affirmatifs que les immigrants en répondant davantage « Tout à fait » (voir le
Tableau 6).
Tableau 6: Appréciation des travailleurs à l’affirmation « Vos compétences sont mises à profit dans l’organisation où vous travaillez » (N=294)
P a s d u
t o u t U n p e u B e a u c o u p
T o u t à
f a i t T O T A L
Immigrants 11 % 21 % 36,5 % 31,5 % 100 % (N=155) Natifs 7 % 11 % 34 % 48 % 100 % (N=139)
Tableau 7: Appréciation des travailleurs à l’affirmation « Vous sentez que vous contribuez à la mission de l’organisation où vous travaillez » (N=295)
P a s d u
t o u t U n p e u B e a u c o u p
T o u t à
f a i t T O T A L
Immigrants 1,5 % 9,5 % 42 % 47 % 100 % (N=158) Natifs 3 % 17 % 30 % 50 % 100 % (N=137)
Posant l’hypothèse que l’économie sociale peut jouer un rôle de tremplin vers d’autres milieux de travail ou formes
d’entreprises, et ce, particulièrement pour les personnes nées à l’extérieur du Canada, nous avons demandé aux
répondants si leur actuel emploi leur donnait de l’expérience pour obtenir un autre emploi. Ce à quoi plus de la
moitié des immigrants (51 % ou 70/137) et 41 % (64/155) des natifs répondent « Tout à fait ».
20 Les répondants devaient évaluer de 1 à 4 si les affirmations correspondaient : 1. « Pas du tout », 2. « Un peu », 3. « Beaucoup » ou 4. « Tout à
fait » à leur expérience. Les chiffres présentés correspondent aux moyennes des réponses de chaque groupe.
Second volet d’étude Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et des bénévoles
49
Quant aux salaires, ils ne semblent pas très intéressants autant pour les natifs que pour les immigrants qui nous
disent qu’ils ne sont « Pas du tout » intéressants ou « Un peu » intéressants dans une proportion de 80 % (111/138)
pour les immigrants et 70 % (107/152) pour les natifs. Par contre, les natifs et les immigrants trouvent que
l’atmosphère de l’organisation où ils travaillent est « Beaucoup » ou « Tout à fait » agréable ou chaleureuse
(I= 81 %, Na=90 %) et trouvent que l’entreprise pour laquelle ils travaillent est « Tout à fait » ouverte aux
différences de chacun (I= 63 %, Na= 58 %).
En résumé, il y a peu de divergences dans les appréciations globales des natifs et des immigrants, comme le dénote
la ressemblance des deux courbes du Graphique 1. Certes, les immigrants sont plus nombreux à avoir reçu des
services de l’organisation où ils travaillent (question 2) ; ils se montrent moins affirmatifs que les natifs en ce qui a
trait à la perception selon laquelle leurs compétences sont mises à profit (question 4) ou qu’ils contribuent à la
mission de l’organisation où ils travaillent (question 6). De plus, ces derniers expriment, dans une plus grande
proportion que les natifs, que leur actuel emploi leur donne de l’expérience pour obtenir un autre emploi (question
7). Mais globalement, c’est une majorité dans l’ensemble des deux groupes qui s’accorde à dire, par exemple, que
les travailleurs trouvent l’atmosphère agréable et chaleureuse, que l’organisation pour laquelle ils travaillent est
ouverte aux différences de chacun, mais que les salaires ne sont pas intéressants (voir le Graphique 1 pour
l’ensemble des résultats sur les 18 questions d’appréciation; voir le Tableau 8 pour les moyennes des cotes sur ces
mêmes éléments, ainsi que les khi2 (x2) qui indiquent sur quelles questions les écarts sont significatifs.)
Graphique 1: Courbes des cotes d’appréciation des natifs et des immigrants aux 18 questions d’enquête21
21 Les répondants devaient apprécier chaque affirmation (ou question) par une cote de 1 à 4 : 1. « Pas du tout », 2. « Un peu », 3. « Beaucoup » ou
4. « Tout à fait ». Il s’agit ici des cotes moyennes des deux groupes.
0
0,5
1
1,5
2
2,5
3
3,5
4
1 2 3 4 5 6 7 8 9101112131415161718
Immigrants
Natifs
Second volet d’étude Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et bénévoles
50
Tableau 8: Cotes moyennes d’appréciation des natifs et des immigrants (et khi2) aux 18 questions
Q u e s t i o n s I m m i g r a n t s
( N≈138)
N a t i f s
( N≈158) X 2
Vous avez choisi de travailler dans cette organisation ou cette entreprise parce que :
(***non-
signicatif)
1. Elle est située près de chez vous. 1,8841 1,9108 <0.05
2. Vous y avez déjà reçu des services. 1,9764 1,3526 <0.05
3. Vous y rencontrez des gens de votre culture. 2,0147 1,9675 ***
4. Vos compétences y sont mises à profit. 2,8921 3,2468 <0.05
5. Vous vous y sentez soutenu et encadré. 3,0365 3,0065 ***
6. Vous sentez que vous contribuez à la mission de l’organisation. 3,3431 3,2785 ***
7. Cela vous donne de l’expérience pour obtenir un autre emploi. 3,2774 2,9613 <0.05
8. Les salaires sont intéressants. 1,9928 2,1250 ***
9. Les emplois sont stables. 2,6045 2,9231 <0.05
10. L’atmosphère y est agréable et/ou chaleureuse. 3,2086 3,3397 <0.05
Cette organisation :
11. Embauche des personnes nées à l’extérieur du Canada. 3,3869 3,3355 ***
12. Répond à un besoin exprimé par le milieu ou la communauté. 3,4015 3,4114 ***
13. Est ouverte aux différences de chacun. 3,5109 3,4937 ***
14. Respecte le rythme d’apprentissage de chacun. 3,3139 3,2532 ***
15. A une gestion démocratique et collective. 3,2059 3,1046 ***
16. Demande une implication importante. 3,2612 3,2038 ***
17. Est stable et solide. 3,3088 3,2293 ***
18. Trouve facilement de la relève. 3,0667 2,8974 <0.05
Données comparat ives ent re t rava i l leurs permanents e t t rava i l leurs tempora i res
Constatant, somme toute, peu de différences dans l’appréciation de leur expérience en économie sociale de la part
des immigrants au regard de celle des natifs, nous avons voulu vérifier si de plus grands écarts seraient exprimés en
comparant cette fois les travailleurs permanents aux travailleurs temporaires. Concernant les questions
d’appréciation, nous nous limitons ici à présenter les résultats statistiquement significatifs.
- Profil des travailleurs permanents et des travailleurs temporaires
Notre échantillon est composé d’une majorité de travailleurs permanents (70 %, 201/288) et par près d’un tiers de
travailleurs temporaires (30 %, 87/288).
On constate que relativement moins de femmes que d’hommes occupent un emploi permanent : 64 % d’entre elles
(116/181) comparativement à 79 % (85/107) parmi les hommes (voir le Tableau 9).
Il y a un lien entre la scolarité et le statut d’emploi. La proportion de personnes occupant un poste permanent
augmente en fonction du niveau de scolarité : 80 % (83/104) des répondants ayant un niveau universitaire et 68,5 %
(50/73) des répondants ayant un niveau collégial, mais 63 % (60/95) de ceux qui ont un niveau secondaire et 53 %
Second volet d’étude Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et des bénévoles
51
(8/15) de ceux qui ont un niveau élémentaire. En revanche, il n’y a pas de différences marquées en fonction de
l’âge. En effet, on retrouve presque autant de permanents chez les « 25 ans ou moins » (70,5 %, 43/64) que dans la
tranche des « 36 à 45 ans » (71 %, 48/68) ou celles des « 46 à 55 ans) (79 %, 42/53). Seuls les « 26 à 35 ans » sont
sous-représentés chez les travailleurs permanents (62 %, 50/81) (voir le Tableau 9).
La majorité des travailleurs permanents disent travailler dans leur domaine de formation (59 %, 113/192). À
l’inverse, la majorité des travailleurs temporaires (72,3 %, 60/83) disent ne pas travailler dans leur domaine. (N=275
et x2<0.05) (voir le Tableau 10).
La plupart des travailleurs permanents ont connu l’EÉS où ils travaillent par une offre d’emploi (41 %, 83/201) ou par
un ami ou connaissance (40 %, 80/201). Or, du côté des travailleurs temporaires, on a encore plus souvent connu
l’EÉS par un ami ou connaissance (57 %, 49/86), mais aussi deux fois plus souvent par un service d’employabilité
(22 %, 19/86) que par une offre d’emploi (12 %, 10/86) (N=287 et x2<0.05).
Rappelons ici que notre échantillon est composé à plus du tiers (37 %, 106/288) de répondants occupant leur emploi
depuis six mois ou moins, et qu’il comprend une bonne part de travailleurs en entreprise d’insertion (38 %, 99/274).
Tableau 9: Profil des travailleurs permanents et des travailleurs temporaires (% horizontaux)
P e r m a n e n t s ( N = 2 0 1 )
T e m p o r a i r e s ( N = 8 7 )
T O T A L ( N = 2 8 8 ) 70 % 30 %
S E X E ( N = 2 8 8 ) % %
Hommes 79 21
Femmes 64 36
 G E ( N = 2 8 8 ) % %
25 ans ou moins 70,5 29,5
26 à 35 ans 62 38
36 à 45 ans 71 29
46 à 55 ans 79 21
56 à 65 ans 74 26
66 ans ou plus 50 50
S C O L A R I T É ( N = 2 8 7 ) % %
Primaire / élémentaire 53 47
Secondaire 63 37
Collégial 68,5 31,5
Universitaire 80 20
Quand nous avons demandé aux répondants s’ils étaient embauchés sur un programme d’employabilité, cette
question a fait ressortir de la confusion ou un manque d’information de la part des répondants. Ainsi, bien que selon
des informations organisationnelles, seules trois entreprises sur neuf ont des travailleurs embauchés par le biais des
programmes d’employabilité, des travailleurs de cinq des six autres entreprises ayant participé à l’enquête ont dit
être embauchés par le biais de tels programmes.
Second volet d’étude Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et bénévoles
52
En résumé, plus d’hommes ont un emploi permanent, l’âge ne semble pas affecter la permanence, mais la scolarité
a un effet significatif. Les travailleurs permanents oeuvrent davantage dans leur domaine de formation. Ils occupent
leur emploi depuis plus longtemps que les travailleurs temporaires. Ils ont connu l’organisation pour laquelle ils
travaillent davantage par une offre d’emploi ou par un ami ou une connaissance, alors que les travailleurs
temporaires ont moins recours aux offres d’emploi, mais davantage aux services d’employabilité.
- Appréciation des travailleurs permanents et des travailleurs temporaires
Le Graphique 2 illustre pour l’ensemble des 18 éléments d’appréciation les cotes d’appréciation des travailleurs
permanents et des travailleurs temporaires. Encore ici, on observe des différences entre les deux groupes, mais
assez légères (voir le Tableau 10 pour les moyennes des cotes sur ces mêmes éléments, ainsi que les x2.).
Quand on demande aux travailleurs s’ils ont reçu des services de l’organisation pour laquelle ils travaillent, la
majorité répond négativement. Cependant, les travailleurs permanents le disent dans une plus grande proportion
(83 %, 162/196 n’en ont « Pas du tout » reçu ou « Un peu ») que les travailleurs temporaires (74 %, 55/74) (N=270).
De la même façon, lorsqu’on demande aux répondants s’ils sentent que leurs compétences sont mises à profit dans
l’emploi qu’ils occupent, la plupart nous disent « Beaucoup » ou « Tout à fait », mais dans une proportion plus
grande pour les permanents (78 %, 154/197) que pour les temporaires (69 %, 55/80) (N=277).
Quant à la perception des travailleurs selon laquelle leur actuel emploi leur donne de l’expérience pour obtenir un
autre emploi, ce sont les travailleurs temporaires (88 %, 71/81) plutôt que les permanents (70 % 136/194) qui
affirment en plus grande proportion que leurs acquis pourront être transférés (N=275).
Concernant la stabilité des emplois, sans surprise, nous constatons que 71 % (139/196) des travailleurs permanents
disent qu’ils sont « Beaucoup » ou « Tout à fait » stables. À l’inverse, 59 % (47/80) des travailleurs temporaires
indiquent plutôt que les emplois sont « Pas du tout » ou « Un peu » stables (N=276).
Malgré tout, une large part des répondants s’entendent pour dire que l’atmosphère au travail est « Beaucoup » ou
« Tout à fait » agréable ou chaleureuse, et ce, presque autant pour les temporaires (84 %, 70/83) que pour les
permanents (86 %, 169/196) (N=279).
En outre, les travailleurs temporaires (89 %, 73/82) expriment dans une plus grande proportion que les permanents
(81 %, 160/197) que l’organisation pour laquelle ils travaillent respecte « Beaucoup » ou « Tout à fait » le rythme
d’apprentissage de chacun (N=279). Aussi, lorsqu’on leur demande si l’organisation pour laquelle ils travaillent
trouve facilement de la relève, les travailleurs temporaires (83 %, 69/83) répondent plus souvent que les
permanents (63 %, 123/195) « Beaucoup » ou « Tout à fait ». (N=278)
En résumé, les travailleurs permanents, plus que les temporaires, n’ont pas ou très peu reçu de services de
l’organisation pour laquelle ils travaillent, mais ils trouvent davantage que leurs compétences y sont mises à profit.
Quant aux travailleurs temporaires, ils expriment dans une plus large mesure que leur actuel emploi leur donne de
l’expérience pour obtenir un autre emploi, que l’organisation pour laquelle ils travaillent respecte le rythme
d’apprentissage de chacun et trouve facilement de la relève. Dans des proportions semblables, les deux groupes de
répondants trouvent que l’atmosphère de leur lieu de travail est agréable ou chaleureuse, mais les avis sont opposés
concernant la stabilité des emplois (pour les moyennes et leurs écarts significatifs (khi2), voir le Tableau 10).
Second volet d’étude Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et des bénévoles
53
Graphique 2: Courbes des cotes d’appréciation des travailleurs permanents et des travailleurs temporaires aux 18 questions d’enquête 22
Tableau 10: Cotes moyennes d’appréciation des permanents et des temporaires (et khi2) aux 18 questions
Q u e s t i o n s P e r m a n e n t s
( N≈197)
T e m p o r a i r e s
( N≈83) X 2
Vous avez choisi de travailler dans cette organisation ou cette entreprise parce que :
(*** non
significatif)
1. Elle est située près de chez vous. 1,8223 2,0741 ***
2. Vous y avez déjà reçu des services. 1,5918 1,7465 <0.05
3. Vous y rencontrez des gens de votre culture. 1,9282 2,0897 ***
4. Vos compétences y sont mises à profit. 3,1837 2,8375 <0.05
5. Vous vous y sentez soutenu et encadré. 3,0000 3,0500 ***
6. Vous sentez que vous contribuez à la mission de l’organisation. 3,3401 3,2469 ***
7. Cela vous donne de l’expérience pour obtenir un autre emplo.i 2,9588 3,4444 <0.05
8. Les salaires sont intéressants. 2,0515 2,1235 ***
9. Les emplois sont stables. 2,9333 2,2785 <0.05
10. L’atmosphère y est agréable et/ou chaleureuse. 3,3163 3,2289 <0.05
Cette organisation :
11. Embauche des personnes nées à l’extérieur du Canada. 3,3542 3,4815 ***
12. Répond à un besoin exprimé par le milieu ou la communauté. 3,4031 3,4337 ***
13. Est ouverte aux différences de chacun. 3,4924 3,5679 ***
14. Respecte le rythme d’apprentissage de chacun. 3,2030 3,4878 <0.05
15. A une gestion démocratique et collective. 3,1204 3,2561 ***
16. Demande une implication importante. 3,1897 3,2750 ***
17. Est stable et solide. 3,2462 3,3293 ***
18. Trouve facilement de la relève. 2,8351 3,2892 <0.05
22 Les répondants devaient apprécier chaque affirmation (ou question) par une cote de 1 à 4 : 1. « Pas du tout », 2. « Un peu », 3. « Beaucoup » ou
4. « Tout à fait ». Il s’agit ici des cotes moyennes des deux groupes.
0
0,5
1
1,5
2
2,5
3
3,5
4
1 2 3 4 5 6 7 8 9101112131415161718
Permanents
Temporaires
Second volet d’étude Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et bénévoles
54
- Données comparatives selon que l’entreprise est à forte ou à faible proportion de travailleurs immigrants
La proportion de travailleurs immigrants dans une organisation ou une entreprise d’économie sociale influence-t-elle
l’appréciation des travailleurs quant à leur expérience dans ce type d’organisation? Pour répondre à cette question,
nous avons réalisé une 3e comparaison en triant notre échantillon sur la base de la proportion de travailleurs
immigrants dans chaque organisation.
Notre classement d’entreprises à forte ou à faible proportion d’immigrants s’est fait selon qu’une entreprise
comptait moins du tiers de travailleurs nés à l’extérieur du Canada (considérée à faible proportion d’immigrants) ou
au moins un tiers de travailleurs immigrants (forte proportion). Dans les faits, et par rapport à notre échantillon, les
cinq entreprises classées dans la catégorie à faible proportion comptaient entre 11 % et 36 % de travailleurs
immigrants. Les quatre entreprises que nous avons classées à forte proportion comptaient entre 53 % et 68 % de
travailleurs immigrants. Selon ce classement, notre échantillon compte davantage de travailleurs dans les
entreprises à forte (55 %, 166/304) qu’à faible (45 %, 138/304) concentration.
Posons maintenant un nouveau regard sur l’appréciation des répondants au sujet de leur expérience en économie
sociale, selon qu’ils travaillent dans une organisation à forte ou à faible proportion d’immigrants. Le Graphique 3
illustre l’ensemble des cotes d’appréciation des travailleurs en fonction de notre classement d’entreprises (voir le
Tableau 11 pour les moyennes des cotes sur ces mêmes éléments, ainsi que les khi2.) Comme dans la section
précédente, nous mettons en relief les résultats statistiquement significatifs dans ce qui suit.
Les répondants travaillant dans une organisation à forte proportion d’immigrants indiquent un peu plus souvent
(Forte = 56 %, 89/158; Faible = 51 %, 69/136) que leur lieu de travail n’est « Pas du tout » situé près de chez eux
(N=294).
Lorsque nous demandons s’ils ont déjà reçu des services de l’organisation où ils travaillent, la plupart des
répondants disent « Pas du tout », mais ceux qui travaillent dans une entreprise à faible proportion d’immigrants
l’affirment davantage (71 %, 94/132) que ceux d’entreprises à forte proportion d’immigrants (61 %, 93/153) (N=285).
Nous avons vu qu’une bonne part des répondants trouve que les salaires sont peu intéressants. Cet avis est encore
plus prononcé chez les répondants identifiés aux entreprises à faible proportion d’immigrants (82 % ou 107/131) qu’à
ceux à forte proportion d’immigrants (70 % ou 110/158) (N=289).
Enfin, concernant quatre questions d’appréciation sur l’entreprise où ils travaillent (1. Elle embauche des personnes
nées à l’extérieur du Canada, 2. Elle respecte le rythme d’apprentissage de chacun, 3. Elle est stable et solide et 4.
Elle trouve facilement de la relève), ceux qui travaillent dans une organisation à forte proportion d’immigrants
répondent davantage « Beaucoup » ou « Tout à fait » (voir le Tableau 11).
Second volet d’étude Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et des bénévoles
55
Tableau 11: Pourcentage des ayant répondu « Beaucoup » ou « Tout à fait » aux questions d’appréciation sur l’organisation, selon la proportion d’immigrants dans l’entreprise
C e t t e o r g a n i s a t i o n : F a i b l e p r o p o r t i o n
d ’ i m m i g r a n t s
F o r t e p r o p o r t i o n
d ’ i m m i g r a n t s N
Embauche des personnes nées à l’extérieur du Canada. 75 % 90 % 292
Respecte le rythme d’apprentissage de chacun . 78 % 89 % 294
Est stable et solide. 75 % 91 % 293
Trouve facilement de la relève. 61 % 76 % 293
En résumé, notre échantillon compte davantage de travailleurs dans les entreprises à forte proportion d’immigrants.
Les répondants travaillant dans une organisation à forte proportion d’immigrants indiquent légèrement plus souvent
que l’entreprise n’est pas située près de chez eux et qu’elle embauche des personnes nées à l’extérieur du Canada,
respecte le rythme d’apprentissage de chacun, est stable et solide, ou trouve facilement de la relève. En revanche,
ceux qui travaillent dans une entreprise à faible proportion d’immigrants affirment dans une majorité plus élevée
qu’ils n’y ont « Pas du tout » reçu de services et que les salaires y sont peu intéressants (voir le Tableau 12).
Graphique 3: Courbes des cotes d’appréciation des travailleurs aux 18 questions d’enquête, selon la proportion d’immigrants dans l’entreprise 23
23 Les répondants devaient évaluer de 1 à 4 si les affirmations correspondaient : 1. « Pas du tout », 2. « Un peu », 3. « Beaucoup » ou 4. « Tout à
fait » à leur expérience. Les chiffres présentés correspondent aux moyennes des réponses de chaque groupe.
0
0,5
1
1,5
2
2,5
3
3,5
4
1 2 3 4 5 6 7 8 9101112131415161718
Fort
Faible
Second volet d’étude Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et bénévoles
56
Tableau 12: Cotes moyennes d’appréciation selon la proportion d’immigrants (et khi2) aux 18 questions
Q u e s t i o n s F o r t e ( N≈161) F a i b l e ( N≈136) X 2
V o u s a v e z c h o i s i d e t r a v a i l l e r d a n s c e t t e
o r g a n i s a t i o n o u c e t t e e n t r e p r i s e p a r c e q u e :
( * * * n o n
s i g n i f i c a t i f )
1. Elle est située près de chez vous. 1,8734 1,9338 <0.05
2. Vous y avez déjà reçu des services. 1,7733 1,4545 <0.05
3. Vous y rencontrez des gens de votre culture. 2,0194 1,9552 ***
4. Vos compétences y sont mises à profit. 3,0380 3,1269 ***
5. Vous vous y sentez soutenu et encadré. 3,0570 2,9699 ***
6. Vous sentez que vous contribuez à la mission de l’organisation. 3,3711 3,2296 ***
7. Cela vous donne de l’expérience pour obtenir un autre emploi. 3,1824 3,0303 ***
8. Les salaires sont intéressants. 2,2025 1,9008 <0.05
9. Les emplois sont stables. 2,7756 2,7669 ***
10. L’atmosphère y est agréable et/ou chaleureuse. 3,3125 3,2537 ***
Cette organisation :
11. Embauche des personnes nées à l’extérieur du Canada. 3,4340 3,2868 <0.05
12. Répond à un besoin exprimé par le milieu ou la communauté. 3,4750 3,3358 ***
13. Est ouverte aux différences de chacun. 3,5723 3,4296 ***
14. Respecte le rythme d’apprentissage de chacun. 3,4000 3,1493 <0.05
15. A une gestion démocratique et collective. 3,1772 3,1308 ***
16. Demande une implication importante. 3,3013 3,1567 ***
17. Est stable et solide. 3,4025 3,1128 <0.05
18. Trouve facilement de la relève. 3,1056 2,8154 <0.05
Conc lus ion de l ’enquête auprès des t rava i l leurs
Nous avons comparé l’appréciation de l’économie sociale en classant les travailleurs de trois façons : par lieu de
naissance (immigrants, natifs), par statut d’emploi (permanents, temporaires) et par la proportion de travailleurs
immigrants dans l’entreprise (forte, faible).
Grosso modo, et c’est ce qui peut être le plus marquant de notre enquête, trois constats généraux ressortent.
Premièrement, il y a peu d’écarts importants entre immigrants et natifs sur l’ensemble des questions, comme
l’indique la ressemblance des courbes du Graphique 1. Deuxièmement, dans le Tableau 8, peu d’énoncés recueillent
des positions extrêmes (« Pas du tout » ou « Tout à fait ») avec des cotes moyennes autour du minimum (1) ou du
maximum (4). Troisièmement, les écarts paraissent un peu plus prononcés entre travailleurs permanents et
temporaires qu’entre immigrants et natifs.
Autrement dit, il se pourrait fort bien que ce soit la combinaison des deux facteurs, le fait d’être immigrant et
d’avoir un emploi temporaire, qui distingue le mieux les appréciations des travailleurs au sein des entreprises
d’économie sociale. D’emblée, les données sociodémographiques de notre échantillon laissaient présager de tels
constats. Cela dit, les positions de l’ensemble des répondants ne versent pas dans les extrêmes.
Second volet d’étude Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et des bénévoles
57
Les résultats de notre enquête viennent en quelque sorte pondérer les constats très défavorables des études
statistiques sur le sous-emploi des immigrants, sans les nier. Nos données laissent aussi croire que la discrimination
n’est pas endémique, mais sans forcément nous permettre de vraiment lever le voile sur les dynamiques à l’œuvre
dans les milieux de travail étudiés.Nos résultats montrent que les entreprises d’économie sociale constituent une
mise en route vers l’emploi pour les immigrants, mais qu’elles n’apportent pas forcément d’opportunités à long
terme, en leur sein ou ailleurs.
Prof i l des bénévo les ayant par t i c ipé à l ’enquête
Vu le nombre plus restreint de répondants dans la catégorie bénévoles, nous nous sommes limités à présenter ici les
résultats essentiels et les croisements les plus pertinents.
Parmi les 32 répondants bénévoles24 membres d’un conseil d’administration, on compte beaucoup plus de natifs
(84 %, 27/32) que d’immigrants. Ces derniers sont originaires d’Afrique du Nord, d’Europe et du Moyen-Orient. Ils
sont arrivés au pays entre 1971 et 2003 et sont tous citoyens canadiens.
On compte à peu près autant de femmes (52 %, 16/31) que d’hommes bénévoles au total, et il en va de même parmi
les immigrants (3 hommes et 2 femmes).
Plus de la moitié (56 %) des bénévoles ont de 46 à 65 ans. De plus, leur niveau de scolarité est élevé : 81 % des
bénévoles ont un niveau de scolarité universitaire et cela se répercute à 60 % chez les immigrants (3/5) et à 85 %
chez les natifs (3/27).
Les bénévo les e t leur parcours en économie soc ia le
La plupart des répondants (63 %) n’ont pas fait auparavant de bénévolat dans une autre entreprise d’économie
sociale. Or, c’est le cas de l’ensemble des immigrants, mais de la moitié (56 % ou 15/27). Ceux qui en ont fait
auparavant ont indiqué des EÉS du secteur de l’habitation, de la culture, du loisir et de l’alimentation.
Le tiers (10/32) des répondants ont connu l’organisation où ils sont bénévoles par un organisme communautaire ou
par une autre EÉS (mais ce n’est le cas d’aucun immigrant). Pour environ un autre tiers (9/32), cela s’est fait par un
ami ou une connaissance (de même que pour un seul des cinq bénévoles immigrants). Parmi les autres références
évoquées, on retrouve des travailleurs de l’entreprise (3/32), des fondateurs de l’entreprise (2/32) et des gens qui
reçoivent des services de l’organisation (2/32).
Quant à la durée de l’actuel bénévolat, elle varie de 6 mois à 20 ans pour l’ensemble des répondants (en moyenne,
7 ans). Mais chez les immigrants, elle varie de 6 mois à 3 ans. La moitié (15/3125) des répondants occupe l’un des
postes exécutifs au C.A. (président, vice-président, secrétaire, trésorier) et d’autres (13 %) siègent au comité
exécutif. Quant aux immigrants, ils occupent tous un poste à l’exécutif (président, vice-président ou trésorier).
Ainsi, bien que ce ne soit pas le cas de tous les bénévoles ayant participé à l’enquête, bon nombre de répondants
ont inscrit, dans le temps, leur implication dans l’entreprise d’économie sociale. D’ailleurs, dans le cadre d’une de
24 L’échantillon total de 32 répondants est constitué de 27 natifs et 5 immigrants. En raison des « non-réponses » aux diverses questions d’enquête,
le nombre de répondants baisse parfois sous ces nombres. 25 Question à choix multiples, nombre de répondants = 31, nombre de réponses = 34.
Second volet d’étude Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et bénévoles
58
nos visites en entreprise, un gestionnaire déplorait le fait que plusieurs organisations limitaient le mandat des
administrateurs. Il se demandait pourquoi on empêchait quelqu’un de s’impliquer aussi longtemps qu’il le désirait en
argumentant que cela fournissait une stabilité à l’organisation.
Appréc ia t ion des bénévo les nat i f s e t immigrants sur leur parcours e t leur mi l ieu
Les bénévoles administrateurs devaient répondre à une série de 17 questions d’appréciation de l’économie sociale.
Nous présentons ici les résultats obtenus.
Une majorité de bénévoles (77 % ou 23/30) n’ont « Pas du tout » reçu de services de l’organisation où ils font du
bénévolat, alors que deux immigrants sur cinq y ont déjà reçu « Beaucoup » de services.
Lorsqu’on a demandé aux participants s’ils siégeaient au conseil d’administration parce qu’on les a approchés, 60 %
(18/30) ont répondu « Tout à fait ». De la même façon, lorsqu’on leur a demandé s’ils sentaient qu’ils contribuaient
à la mission de l’organisation, 60 % (18/30) ont répondu « Tout à fait ».
Par ailleurs, 70 % (21/30) des répondants disent que leur bénévolat ne donne « Pas du tout » d’expérience pour
obtenir un emploi, ce qui est aussi le cas de deux immigrants sur cinq, les autres considérant que cela leur donne
« Un peu » (3/5) d’expérience.
Enfin, 71 % (22/31) des répondants trouvent que l’organisation où ils font du bénévolat est « Tout à fait » stable et
solide (N=31) et 65 % (20/31) pensent qu’elle trouve facilement (soit « Beaucoup » ou « Tout à fait ») de la relève.
En résumé, il y a peu de différences dans les réponses des natifs et des immigrants bénévoles aux questions de notre
enquête. Une majorité des bénévoles ayant participé à l’enquête siègent au conseil d’administration parce qu’on les
a approchés. Ils sont nombreux à penser qu’ils contribuent à la mission de l’organisation. Cependant, une bonne part
estiment que leur bénévolat ne leur sera pas utile pour obtenir un autre emploi. Par contre, tous les répondants se
montrent plus nuancés lorsqu’on leur demande si cette expérience peut leur être utile à l’entrée dans un autre
milieu. Enfin, les répondants trouvent généralement que l’organisation où ils font du bénévolat est stable et solide
et qu’elle trouve facilement de la relève. Cela dit, si la plupart des bénévoles n’ont « Pas du tout » reçu de services
de l’organisation où ils font du bénévolat, les quelques répondants immigrants évoquent qu’ils en ont reçu un peu
plus que les natifs.
Conclusion générale
Les résultats d’enquête présentés dans ce rapport nous donnent une première esquisse de la place des immigrants
en économie sociale à Montréal et, d’une certaine manière, au Québec, du moins là où leur présence est
significative. C’est dans la suite du plan d’action du Chantier de l’économie sociale envers les communautés
culturelles et en référence à diverses études portant sur les pratiques d’intégration d’organismes communautaires et
sur le marché de l’emploi que nous avons interrogé 16 entrepreneurs immigrants et investigué auprès de 300
travailleurs et une trentaine d’administrateurs d’entreprises d’économie sociale.
D’emblée, le fait même de traiter de la question immigrante a paru susciter des réactions mitigées de plusieurs
répondants, comme si certains voulaient se fondre dans la majorité ou ne pas attiser une situation déjà assez
litigieuse quand on la voit traitée par les médias. Par ailleurs, on peut dire des répondants à notre enquête qu’ils
ont été sélectionnés parce qu’ayant réussi à s’insérer sur le marché de l’emploi et dans la société d’accueil. Cela
vient contraster avec ce que rapportent souvent les médias, ou même d’autres recherches récemment publiées au
Québec et qui apportent leur propre éclairage, souvent plus critique et plus affirmé quant à la présence de blocage
ou de discrimination envers les immigrants. À notre avis, il est aussi important de voir l’autre côté de la médaille,
comme la présente enquête a pu le mettre en lumière.
Nos résultats montrent que l’économie sociale n’est pas fermée aux immigrants, au contraire. Il y a des ouvertures
pour les entrepreneurs; il y a des milieux chaleureux pour les travailleurs; il y a des sièges d’administrateurs qui ne
sont pas que de l’apparat. Ils nous informent un peu plus précisément sur la place des immigrants.
Les gestionnaires immigrants que nous avons interrogés partagent les valeurs de solidarité et d’humanisme
véhiculées par l’économie sociale, ou encore une préoccupation pour le soutien aux communautés de base. À côté
de cela, en revanche, ils critiquent les mécanismes, parfois bancals, de financement de la main-d’œuvre et d’autres
leviers de promotion. Enfin, peut-être parce qu’ils se considèrent comme des gagnants, ils tendent à minimiser leurs
difficultés en tant qu’immigrants et vont jusqu’à faire une certaine autocritique.
Les données d’appréciation que nous avons colligées auprès des travailleurs immigrants et natifs montrent
globalement peu de différences entre ces deux groupes. Les avis sont en général fort positifs, par exemple en ce qui
concerne le climat de travail. Qu’ils soient immigrants ou natifs, les travailleurs sentent bien qu’ils contribuent à la
mission de l’entreprise et y sont reconnus. Cela dit, on a observé que plus de natifs y trouvaient de tels avantages.
Dans notre analyse, nous avons tenté de comprendre ces nuances en regardant si le statut d’emploi affectait les
appréciations des répondants et nous avons corroboré que les employés à statut temporaire, où l’on retrouve
davantage d’immigrants, rapportent une moins bonne appréciation de leur situation que les travailleurs permanents.
Nos données d’enquête ne vont pas en profondeur sur la question des dynamiques réelles se jouant sur le terrain des
entreprises. Mais elles tendent à valider les constats de recherche dénotant un sous-emploi des immigrants, même
en économie sociale. Nos données laissent voir une sous-représentation des gestionnaires immigrants en économie
sociale et une certaine méconnaissance de ses réseaux institués. Du côté des travailleurs, nos analyses donnent un
éclairage sur des entreprises contribuant fortement à l’insertion des immigrants, mais font entrevoir le secteur de
l’économie sociale comme un tremplin vers autre chose de plus permanent pour eux et en adéquation avec leurs
aspirations.
Conclusion générale
60
Notre méthode n’était pas systématique et les chiffres qui en ressortent ne peuvent être généralisés sans nuance à
l’ensemble du tiers secteur. En outre, nous n’avons pas ici un échantillon de répondants choisis pour leurs
expériences difficiles, comme le mettent en relief des études produites récemment au Québec et qui jettent leur
propre éclairage. Tous ces éléments nous aident à appréhender à leur juste valeur les particularités émanant de nos
résultats jusqu’à présent. En effet, la spécificité de la situation immigrante ressort très peu. En outre, elle brosse
un portrait moins alarmiste que d’autres études récentes en ce qui concerne la discrimination. Cependant, en raison
du fait que nous ayons sélectionné uniquement des entreprises où il y avait une présence relativement importante
d’immigrants, d’autres méthodes de recherche, comparatives, pourraient être mises en place. Et les problématiques
de recherche pourraient être ajustées en conséquence. Enfin, ne minimisons pas le risque de « brûler le terrain »
dans les recherches futures sur les immigrants en économie sociale, car nous avons pu constater combien certaines
organisations étaient sollicitées pour des recherches à côté d’autres moins connues.
Enfin, cette recherche, en faisant un geste modeste pour dresser le portrait des immigrants en économie sociale,
indique aussi qu’il est urgent de mieux apprécier la situation des immigrants au vu du défi démographique et
économique à venir au Québec26.
26 Durant cette recherche, nous avons été à même de constater, avec le Comité d’orientation du CÉS, l’utilité de produire des données sur les
immigrants par l’intermédiaire des dispositifs d’économie sociale. Par exemple, les CDEC et CLD tentent de mettre sur pied une base commune d’information qui serait fort utile, à moyen et long terme, pour avoir un portrait à jour de la situation des entrepreneurs immigrants.
B ibl iographie
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62
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A n n e x e 1
Questionnaires
Annexes 1 : Quest ionnaires
64
QUEST IONNA IRE DES TRAVA ILLEURS
Portrait de la place des communautés culturelles dans l’économie sociale
But de la recherche :
- Faire le « portrait » de la place que prennent les communautés culturelles dans
l’économie sociale en comparant la vision et l’expérience des immigrants avec celle des
personnes nées au Québec.
- Interroger les participants sur : leur parcours avant leur immigration au Québec, s’ils
sont immigrants (origines, formations), leurs motivations à travailler en économie
sociale, leur appréciation de ce milieu, leur parcours pour arriver à cet emploi
(expériences de travail antérieures).
Participation et anonymat :
Votre participation consistera à répondre à quelques questions et devrait durer environ
dix (10) minutes. Veuillez noter qu’en aucun moment votre nom ou celui de
l’organisation où vous travaillez ne seront mentionnés dans les résultats de recherche de
façon à préserver l’anonymat le plus complet. Notez également que cette recherche a
reçu l’approbation du Comité d’éthique de la recherche avec des êtres humains de
l’UQAM (CIÉR).
Travaux du RQRP :
Pour en savoir davantage sur les travaux du RQRP, vous pouvez consulter nos publications
disponibles sur le site web suivant : www.aruc-es.uqam.ca
Document préparé par le Réseau québécois de recherche partenariale (RQRP) dans le cadre de la
recherche Projet économie sociale et personnes issues de l’immigration.
Décembre 2009
Annexes 1 : Quest ionnaires
66
DÉFINITION DE L’ÉCONOMIE SOCIALE
« Ce mouvement poursuit des objectifs à la fois économiques et sociaux : économiques parce qu’il regroupe des entreprises et des organisations produisant des biens et des services et sociaux parce que la recherche de profits y est subordonnée à la promotion de valeurs telles que la démocratie, la solidarité, l’amélioration de la qualité de vie ou le développement durable. »
(Source : RQRP, www.aruc-es.uqam.ca)
DONNÉES SOCIODÉMOGRAPHIQUES
1. Vous êtes? 2. Quel âge avez-vous? 3. Quel est le niveau de scolarité le plus
élevé que vous avez complété?
_____ une femme
_____ un homme
_____ 25 ans ou moins
_____ entre 26 et 35 ans
_____ entre 36 et 45 ans
_____ entre 46 et 55 ans
_____ entre 56 et 65 ans
_____ 66 ans ou plus
_____ primaire/élémentaire
_____ secondaire
_____ collégial
_____ universitaire
4. Êtes-vous né(e) au Canada?
_____ non → passez à la question 5
_____ oui → passez à la question 11
5. Quel est votre pays d’origine?
___________________________________
6. En quelle année êtes-vous arrivé(e)
au Canada?
___________________________________
7. Quel est votre statut d’immigration?
_____ travailleur (ou résident) permanent,
étudiant étranger, parrainé ou gens
d'affaires (programmes :
Entrepreneurs, investisseurs ou
Travailleurs autonomes)
_____ citoyen canadien
_____ travailleur temporaire
_____ réfugié
8. Quelle était votre formation (ou domaine d’études) avant votre arrivée au Canada ?
______________________________________________________________________________
9. Vos diplômes ont-ils été reconnus? oui ______ non ______ non applicable _____
10. Avez-vous entrepris des études depuis votre arrivée au Canada? oui ______ non ______
11. Travaillez-vous dans votre domaine de formation ? oui ______ non ______
Second volet d’étude Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et des bénévoles
67
EMPLOIS PRÉCÉDENTS 12. Dans vos emplois précédents, avez-vous travaillé dans une entreprise d’économie sociale?
non ______ oui ______ → Si oui, dans quelle(s) organisation(s) ou entreprise(s) ?
EMPLOI ACTUEL
13. Comment avez-vous connu l’entreprise ou l’organisation où vous travaillez ?
_____ par une offre d’emploi
_____ par un ami ou une connaissance
_____ par un service d’employabilité
_____ autres, précisez :____________________________________________________________
14. Depuis combien de temps occupez-vous l’emploi actuel? ______________________
15. Vous êtes un employé :
_____ permanent
_____ temporaire
16. Vous travaillez :
_____ à temps plein
_____ à temps partiel
17. Vous êtes embauché sur un programme d’employabilité :
_____ non
_____ subvention salariale
_____ PRIIME (Programme d’aide à l’intégration des immigrants et des minorités visibles en emploi)
_____ autre, précisez :
_______________________
18. Parmi les travailleurs de l’entreprise ou de l’organisation, y’a-t-il des personnes nées à l’extérieur du Canada?
non______ oui ______
Annexes 1 : Quest ionnaires
68
Pour chacune des affirmations suivantes, veuillez cocher la réponse correspondant le mieux à votre expérience.
Vous avez choisi de travailler dans cette organisation ou cette entreprise parce que : Pas du tout Un peu Beaucoup Tout à fait
19. Elle est située près de chez vous
20. Vous y avez déjà reçu des services
21. Vous y rencontrez des gens de votre culture
22. Vos compétences y sont mises à profit
23. Vous vous y sentez soutenu et encadré
24. Vous sentez que vous contribuez à la mission de l’organisation
25. Cela vous donne de l’expérience pour un obtenir un autre emploi
26. Les salaires sont intéressants
27. Les emplois sont stables
28. L’atmosphère y est agréable et/ou chaleureuse
Cette organisation : Pas du tout Un peu Beaucoup Tout à fait
29. Embauche des personnes nées à l’extérieur du Canada
30. Répond à un besoin exprimé par le milieu ou la communauté
31. Est ouverte aux différences de chacun
32. Respecte le rythme d’apprentissage de chacun
33. A une gestion démocratique et collective
34. Demande une implication importante
35. Est stable et solide
36. Trouve facilement de la relève
MERCI DE VOTRE PARTICIPATION!
Second volet d’étude Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et des bénévoles
69
QUEST IONNA IRE DES BÉNÉVOLES AU CONSE IL D ’ADM IN I STRAT ION
Portrait de la place des communautés culturelles
dans l’économie sociale
But de la recherche : - Faire le « portrait » de la place que prennent les communautés culturelles dans
l’économie sociale en comparant la vision et l’expérience des immigrants avec celle des
personnes nées au Québec.
- Interroger les participants sur : leur immigration au Québec, s’ils sont immigrants
(origines et année), leurs motivations à faire du bénévolat en économie sociale, leur
appréciation de ce milieu, leur parcours pour arriver à ce bénévolat en économie sociale
(expériences de bénévolat antérieures).
Participation et anonymat : Votre participation consistera à répondre à quelques questions et devrait durer environ
dix (10) minutes. Veuillez noter qu’en aucun moment votre nom ou celui de
l’organisation où vous travaillez ne seront mentionnés dans les résultats de recherche de
façon à préserver l’anonymat le plus complet. Notez également que cette recherche a
reçu l’approbation du Comité d’éthique de la recherche avec des êtres humains de
l’UQAM (CIÉR).
Travaux du RQRP : Pour en savoir davantage sur les travaux du RQRP, vous pouvez consulter nos publications
disponibles sur le site web suivant : www.aruc-es.uqam.ca
Document préparé par le Réseau québécois de recherche partenariale (RQRP) dans le cadre de la recherche Projet économie sociale et personnes issues de l’immigration.
Décembre 2009
Annexes 1 : Quest ionnaires
70
DÉFINITION DE L’ÉCONOMIE SOCIALE
« Ce mouvement poursuit des objectifs à la fois économiques et sociaux : économiques parce qu’il regroupe des entreprises et des organisations produisant des biens et des services et sociaux parce que la recherche de profits y est subordonnée à la promotion de valeurs telles que la démocratie, la solidarité, l’amélioration de la qualité de vie ou le développement durable. »
(Source : RQRP, www.aruc-es.uqam.ca)
DONNÉES SOCIODÉMOGRAPHIQUES
1. Vous êtes? 2. Quel âge avez-vous? 3. Quel est le niveau de scolarité le plus élevé que vous avez complété?
_____ une femme
_____ un homme
_____ 25 ans ou moins
_____ entre 26 et 35 ans
_____ entre 36 et 45 ans
_____ entre 46 et 55 ans
_____ entre 56 et 65 ans
_____ 66 ans ou plus
_____ primaire/élémentaire
_____ secondaire
_____ collégial
_____ universitaire
4. Êtes-vous né(e) au Canada?
_____ non → passez à la question 5
_____ oui → passez à la question 8
5. Quel est votre pays d’origine?
___________________________________
6. En quelle année êtes-vous arrivé(e) au Canada?
___________________________________
7. Quel est votre statut d’immigration?
_____ travailleur (ou résident) permanent, étudiant étranger, parrainé ou gens d'affaires (programmes :
Entrepreneurs, investisseurs ou Travailleurs autonomes)
_____ citoyen canadien
_____ travailleur temporaire
_____ réfugié
BÉNÉVOLAT PRÉCÉDENT 8. Avez-vous déjà fait du bénévolat dans une autre entreprise d’économie sociale avant de siéger au conseil d’administration de l’actuelle organisation ou entreprise d’économie sociale?
non ______ oui ______→ Si oui, dans quelle(s) organisation(s) ou entreprise(s) ?
Second volet d’étude Enquête quantitat ive auprès des travai l leurs et des bénévoles
71
BÉNÉVOLAT ACTUEL
9. Comment avez-vous connu l’entreprise ou l’organisation où vous faites du bénévolat?
_____ par une annonce dans un journal ou une affiche
_____ par un ami ou une connaissance
_____ par un organisme communautaire ou une entreprise d’économie sociale
_____ autre, précisez :___________________________________________________________
10. Depuis combien de temps faites-vous du bénévolat dans l’entreprise ou l’organisation actuelle?
______________________
11. Quelle fonction occupez-vous présentement au sein du conseil d’administration (CA)?
_____ président
_____ vice-président
_____ secrétaire
_____ trésorier
_____ administrateur
_____ membre du comité exécutif
_____ autre comité du CA, précisez :
_______________________________
12. Parmi les membres du conseil d’administration, y’a-t-il des personnes nées à l’extérieur du Canada?
non______ oui ______
Annexes 1 : Quest ionnaires
72
Pour chacune des affirmations suivantes, veuillez cocher la réponse correspondant le mieux à votre expérience.
Vous avez choisi de faire du bénévolat dans cette organisation ou cette entreprise parce que :
Pas du tout Un peu Beaucoup Tout à fait
13. Elle est située près de chez vous
14. Vous y avez déjà reçu des services
15. Vous y rencontrez des gens de votre culture
16. Vos compétences y sont mises à profit
17. On vous a demandé d’être membre de son conseil
d’administration
18. Vous sentez que vous contribuez à la mission de
l’organisation
19. Cela vous donne de l’expérience pour un obtenir
un emploi
20. Cela peut apporter une expérience utile à
l’entrée dans un autre milieu
21. L’atmosphère y est agréable et/ou chaleureuse
Cette organisation : Pas du tout Un peu Beaucoup Tout à fait
22. Embauche des personnes nées à l’extérieur du
Canada
23. Répond à un besoin exprimé par le milieu ou la
communauté
24. Est ouverte aux différences de chacun
25. Respecte le rythme d’apprentissage de chacun
26. A une gestion démocratique et collective
27. Demande une implication importante
28. Est stable et solide
29. Trouve facilement de la relève
MERCI DE VOTRE PARTICIPATION!