Nanotubes de Carbone, Le Pari d'Une Région d'Europe en Quête de Renouveau

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Dans le grand hall industriel, le réacteur est capable de produire jusqu’à 40 tonnes de nanotubes de carbone par année. Il n’oc- cupe pourtant au sol qu’une trentaine de mètres carrés. Le reste de la dalle de béton accueillerait facilement d’autres réacteurs, signe tangible des immenses espoirs fondés par la PME Nanocyl dans le développement de l’industrie des nanomatériaux. En matière de nanotechnologies, Nanocyl est tout à la fois le fer de lance et la fierté de la Wallonie, région francophone située au sud de la Bel- gique. Emanation des universités de Namur et de Liège, l’entreprise a connu une forte croissance depuis sa création en 2002, pour aujourd’hui figurer dans le top mondial des producteurs de nanotubes de carbone. La jeune entreprise s’est implantée à Sambreville, entre Namur et Charleroi, sur un terrain qui jouxte une usine du géant belge de la chimie Solvay. Chez Nanocyl, contraire- ment à son prestigieux voisin, aucun four- millement de travailleurs, pas de panaches de fumée dans le ciel. Juste une buse métal- lique qui crache du feu, seul signe extérieur d’une activité industrielle. Et pour cause, un seul opérateur par machine veille à la bonne marche de la production. L’industrie des na- nos est ici hautement automatisée. La réac- tion chimique à l’origine de la transformation des gaz en nanotubes de carbone se produit en circuit totalement clos (voir encadré). Les nanotubes tombent dans de grands sacs de plastique transparent qui, une fois remplis de la précieuse poudre noire, sont scellés auto- matiquement. Reste à l’opérateur à placer les sacs dans de banales caisses en carton et à les empiler sur des palettes. Un nouvel Eldorado ? L’Asie absorbe la majeure partie des nano- tubes de carbone "made in Wallonia". "Une question de culture. Le monde asiatique est plus ouvert à l’innovation que l’Europe", constate Francis Massin, le directeur gé- néral de Nanocyl. Plutôt discret quand on le questionne sur ses clients précis, le chef d’entreprise préfère vanter les qualités de ses nanotubes et les perspectives d’innovation incroyables qu’ils offrent aux industriels. Il est vrai, les chiffres laissent rêveur : le nanotube de carbone est 100 à 200 fois plus résistant que l’acier pour un poids six fois moindre 1 . Outre les propriétés mécaniques Un reportage de Denis Grégoire Rédacteur en chef Nanotubes de carbone, le pari d’une région d’Europe en quête de renouveau Les nanotechnologies sont au coeur d’une compétition économique mondiale. Une course dans laquelle personne ne veut être distancé, grands Etats comme acteurs régionaux. Illustration avec la Wallonie, une région de Belgique qui a décidé de miser sur les nanos pour assurer une partie de sa reconversion industrielle. Entre promesses économiques et incertitudes sanitaires, un pari risqué. Les nanotubes de carbone (NTC) sont une forme nouvelle de carbone cris- tallin qui ressemble structurellement à des feuillets de graphène enroulés et fermés à leurs extrémités. Leur forme de base est cylindrique. Ces tubes mi- nuscules peuvent être constitués d’une seule ou de plusieurs parois concen- triques. Les nanotubes de carbone mono-paroi ont un diamètre variant de 0,4 à 2 nanomètres (1 nanomètre = 1 milliardième de mètre). Les nanotubes de carbone multi-parois sont composés de plusieurs cylindres de graphène concentriques d’un diamètre variant, en fonction du nombre de parois, de 2 à 100 nm. Leur structure est donc plus complexe. Dossier spécial 16/30 1. Lafon, D, Roos, F et Ricaud, M 2008, Les nanotubes de carbone : quels risques, quelle prévention ?, Hygiène et sécurité du travail. Cahiers de notes documentaires, 1er trimestre, n° 210, INRS. 2 e semestre 2009/HesaMag #01 27

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Les nanotechnologies sont au coeur d’une compétition économiquemondiale. Une course dans laquelle personne ne veut être distancé,grands Etats comme acteurs régionaux. Illustration avec la Wallonie,une région de Belgique qui a décidé de miser sur les nanos pour assurerune partie de sa reconversion industrielle. Entre promesses économiqueset incertitudes sanitaires, un pari risqué.

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  • Dans le grand hall industriel, le racteur est capable de produire jusqu 40 tonnes de nanotubes de carbone par anne. Il noc-cupe pourtant au sol quune trentaine de mtres carrs. Le reste de la dalle de bton accueillerait facilement dautres racteurs, signe tangible des immenses espoirs fonds par la PME Nanocyl dans le dveloppement de lindustrie des nanomatriaux. En matire de nanotechnologies, Nanocyl est tout la fois le fer de lance et la fiert de la Wallonie, rgion francophone situe au sud de la Bel-gique. Emanation des universits de Namur et de Lige, lentreprise a connu une forte croissance depuis sa cration en 2002, pour aujourdhui figurer dans le top mondial des producteurs de nanotubes de carbone.

    La jeune entreprise sest implante Sambreville, entre Namur et Charleroi, sur un terrain qui jouxte une usine du gant belge de la chimie Solvay. Chez Nanocyl, contraire-ment son prestigieux voisin, aucun four-millement de travailleurs, pas de panaches de fume dans le ciel. Juste une buse mtal-lique qui crache du feu, seul signe extrieur dune activit industrielle. Et pour cause, un seul oprateur par machine veille la bonne marche de la production. Lindustrie des na-nos est ici hautement automatise. La rac-tion chimique lorigine de la transformation des gaz en nanotubes de carbone se produit en circuit totalement clos (voir encadr). Les nanotubes tombent dans de grands sacs de plastique transparent qui, une fois remplis de la prcieuse poudre noire, sont scells auto-matiquement. Reste loprateur placer les sacs dans de banales caisses en carton et les empiler sur des palettes.

    Un nouvel Eldorado ?

    LAsie absorbe la majeure partie des nano-tubes de carbone "made in Wallonia". "Une question de culture. Le monde asiatique est plus ouvert linnovation que lEurope", constate Francis Massin, le directeur g-nral de Nanocyl. Plutt discret quand on le questionne sur ses clients prcis, le chef dentreprise prfre vanter les qualits de ses nanotubes et les perspectives dinnovation incroyables quils offrent aux industriels.

    Il est vrai, les chiffres laissent rveur : le nanotube de carbone est 100 200 fois plus rsistant que lacier pour un poids six fois moindre1. Outre les proprits mcaniques

    Un reportage deDenis GrgoireRdacteur en chef

    Nanotubes de carbone, le pari dune rgion dEurope en qute de renouveau

    Les nanotechnologies sont au coeur dune comptition conomique mondiale. Une course dans laquelle personne ne veut tre distanc, grands Etats comme acteurs rgionaux. Illustration avec la Wallonie, une rgion de Belgique qui a dcid de miser sur les nanos pour assurer une partie de sa reconversion industrielle. Entre promesses conomiques et incertitudes sanitaires, un pari risqu.

    Les nanotubes de carbone (NTC) sont une forme nouvelle de carbone cris-tallin qui ressemble structurellement des feuillets de graphne enrouls et ferms leurs extrmits. Leur forme de base est cylindrique. Ces tubes mi-nuscules peuvent tre constitus dune seule ou de plusieurs parois concen-triques. Les nanotubes de carbone mono-paroi ont un diamtre variant de 0,4 2 nanomtres (1 nanomtre = 1 milliardime de mtre). Les nanotubes de carbone multi-parois sont composs de plusieurs cylindres de graphne concentriques dun diamtre variant, en fonction du nombre de parois, de 2 100 nm. Leur structure est donc plus complexe.

    Dossier spcial 16/30

    1. Lafon, D, Roos, F et Ricaud, M 2008, Les nanotubes de carbone : quels risques, quelle prvention ?, Hygine et scurit du travail. Cahiers de notes documentaires, 1er trimestre, n 210, INRS.

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  • quils confrent aux biens dans lesquels ils sont intgrs, les nanotubes de carbone pr-sentent une conductivit thermique et une conductivit lectrique tout fait exception-nelles2. Nous ne sommes encore qu laube de lexploitation de ces proprits qui pourraient rvolutionner des pans entiers de lindustrie.

    Face ses concurrents, Nanocyl mise sur linnovation. "Notre succs dpendra de notre capacit apporter de la valeur ajoute nos produits", estime Francis Massin. Consciente qu terme elle ne pourra rsister la concur-rence des pays mergents quand ceux-ci se lanceront dans la fabrication des nanopar-ticules, la PME wallonne sest lance dans une vritable course contre la montre afin de dvelopper des produits finis haute valeur ajoute. Une partie des nanopoudres de car-bone ne sortent pas de lusine de Sambreville. Elles sont transformes sur place en granules de plastique vendus lindustrie lectronique. Ils permettent de fabriquer des raviers utiliss dans la production des puces lectroniques et de disques durs dordinateurs. Les proprits antistatiques confres par les nanotubes ces plastiques rduisent considrablement le risque de dtriorer les puces. Des dbouchs prometteurs existent aussi dans lautomobile pour fabriquer des pices allant du circuit din-jection au tableau de bord.

    Des peintures base de silicone en-richi de NTC sont galement produites sur place. Elles pourraient intresser lindustrie navale. "Des tests ont permis de prouver que les coquillages ne peuvent pas saccrocher la coque de navires peints avec notre peinture. Celle-ci pourrait donc remplacer les peintures

    extrmement toxiques pour le milieu marin utilises aujourdhui", prdit Francis Massin.

    Dans le cadre de diffrents projets de R&D, Nanocyl a reu des fonds europens pour un total avoisinant le million et demi deuros. Lentreprise wallonne coordonne pour linstant le projet Inteltex, dont le but est de dvelopper des textiles intelligents qui ragissent dune certaine faon en cas, par exemple, de variation de temprature3. Parmi les applications possibles, la fabrica-tion de tenues de pompier capables de dtec-ter le monoxyde de carbone ou de vtements mdicaux qui surveillent la temprature du corps. Le dirigeant de la PME entrevoit ga-lement dnormes dbouchs dans le domaine de la construction, avec des btons enrichis de NTC ou des gaines de cbles lectriques ignifuges. "Des tests en laboratoire ont dj t raliss et dmontrent que quand ils sont soumis au feu, ces cbles ne brlent pas et ne dgagent pas de fume toxique."

    Sil en est incontestablement le porte drapeau, Nanocyl nest pas seul occuper le terrain des nanotechnologies en Wallonie. Nanople est une toute jeune socit repo-sant sur un partenariat public-priv en vue de dvelopper lindustrie des nanopoudres en Wallonie. La socit bnficie de fonds du Plan Marshall, un vaste programme dinves-tissement public pour le redressement cono-mique de la Wallonie. Grce cet argent, len-treprise a pu acqurir une impressionnante machine capable de produire douze diff-rents types de nanopoudres.

    Lobjectif commercial est double : il sagit terme de vendre les nanopoudres

    2. Les NTC peuvent transporter des densits de courant voisines de 1010 A/cm2 soit au moins deux ordres de grandeur de plus que les mtaux. Ils ont une conductivit thermique suprieure celle de largent, du cuivre et du diamant. Lafon, op.cit.

    3. www.inteltex.eu

    Dossier spcial 17/30

    Reprsentation dun nanotube de carbone. De 500 euros le gramme au dbut des annes 2000, le prix des nanotubes de carbone est tomb aujourdhui moins de 250 euros le kilo.Image : Nanocyl, Th. Strickaert

    2e semestre 2009/HesaMag #0128

  • des clients industriels et de commercialiser des lignes de production de nanopoudres. Laddition, dans des proportions trs faibles, de ces nanopoudres des matriaux tradi-tionnels comme le verre ou le plastique per-mettra damliorer leur rsistance mcanique et thermique. Le champ dapplication parat immense, depuis lindustrie mtallique tradi-tionnelle jusqu larospatiale.

    "Pour linstant, on rsiste bec et ongles toutes les demandes", nous confie Guy Fryns au sujet des sollicitations venant de clients potentiels. La formule a de quoi surprendre dans la bouche dun dirigeant dentreprise. Elle illustre pourtant le caractre encore trs exprimental de lindustrie des nanomat-riaux. "En juin, nous avons produit nos pre-mires poudres consistantes", se rjouit le responsable de Nanople. La qute de qualit constitue une obsession chez les industriels des nanoparticules. Le laboratoire nest donc jamais trs loin du racteur. Dans un labo, une jeune femme manipule un tube contenant une infime quantit de carbure de silicium4. Une vingtaine de rcipients en plastique qui-ps dun couvercle sont disposs sur une table en inox. Leur prcieux contenu sera analys au microscope lectronique afin, entre autres, de dterminer leur granulomtrie.

    Les proprits physiques des nanopar-ticules constituent en effet un lment tout aussi important que leurs caractristiques chimiques. Plus la taille dune particule dimi-nue, plus le rapport entre sa superficie et sa masse augmente. Une collection de nanopar-ticules a donc une surface plus importante quun matriau sous sa forme normale, ce qui peut augmenter sa ractivit5, et donc poser des inquitudes en termes de toxicit et de scurit. Au-del de la question de laugmen-tation de la ractivit, la taille minuscule des nanoparticules leur permettrait de traverser facilement les membranes des muqueuses du nez et des tubes bronchiques pour se lo-ger dans les alvoles pulmonaires. Certaines tudes ralises sur des rongeurs ont rvl que les nanotubes de carbone provoquaient dans les poumons des animaux des lsions importantes, dans certains cas comparables celles rsultant dune inhalation de parti-cules damiante (lire linterview p. 31).

    Toxicit : la rgion veut rassurer

    La publication dans la presse scientifique des rsultats inquitants dexpriences sur lanimal na pas manqu de susciter de nom-breuses interrogations, tant dans les milieux acadmiques que dans les sphres politiques et syndicales europennes. Consommateurs et producteurs de biens contenant des nanopar-ticules font-ils face sans le savoir un risque majeur pour leur sant ? Si le dbat sur les effets sanitaires des nanos est loin doccuper la mme place dans le champ mdiatique que celui sur les OGM ou lutilisation du tlphone portable, il commence cependant proccu-per srieusement les autorits europennes.

    En fvrier 2009, le Comit scientifique des risques sanitaires mergents et nouveaux a remis un avis sur les nanomatriaux. Cet organisme, mis sur pied par la Commission, reconnat les limites des mthodologies dis-ponibles pour valuer les risques lis lex-position humaine aux nanomatriaux et, faute dune approche gnrale, recommande deffectuer pour chaque nanomatriaux une valuation des risques au cas par cas. Dans son opinion, le comit cite le cas particulier des nanotubes de carbone et voque les r-sultats des tudes en laboratoires qui ont mis en vidence la ressemblance entre certains nanotubes de carbone et les fibres damiante6. En avril, le Parlement europen regrettait le manque de dispositions et de tests spci-fiques pour les nanomatriaux. Un mois plus tard, la Commission annonait le lancement dune consultation publique sur les risques potentiels des nanotechnologies.

    Les institutions europennes ne sont pas les seules sinquiter des consquences sanitaires de ces nouveaux matriaux et de limpact quune mobilisation de lopinion pu-blique pourrait avoir dans la course pour le leadership mondial des nanotechnologies. La rgion wallonne nest pas avare defforts pour prendre le bon wagon, elle qui tente une reconversion de son tissu industriel de lin-dustrie lourde vers les technologies de pointe (informatique, pharmacie, etc.). Outre le sou-tien apport aux projets de ses PME actives dans le secteur, la rgion a dbloqu5 millions deuros pour le projet Nanotoxico qui vise

    4. Cramique compose de silicium et de carbone. Du fait de sa rsistance mcanique et thermique leve, ce matriau est destin des applications lectroniques dans des secteurs tels que le militaire, le spatial et lautomobile.

    5. Ross, P 2007, "Nanotoxines", Technology Review, n 1, avril-mai 2007, p. 41.

    6. Assessing the risks in nanotechnology: Commissions Scientific Committee adopts opinion, Communiqu de presse consultable sur http://ec.europa.eu/health/ph_risk/news/news_en.htm

    Comment produire des NTC ?

    La mthode retenue est dite du dpt catalytique en phase vapeur ; un rac-tif solide appel catalyseur est plac dans un four tubulaire (le racteur) ; on y fait ensuite passer un hydrocarbure (de lactylne ou du mthane, par exemple). Au contact du catalyseur et certaines conditions de temprature, une raction chimique de dcomposition des gaz se produit et le carbone quils contiennent se dpose sous forme de nanotubes. Cest sur base de ce prototype, qui a fait lobjet de plusieurs brevets dont luniversit de Lige a cd lexclusivit dexploitation Nanocyl, qua t construit le racteur.

    Tir de Les nanos grandissent, Revue Athena, n 210, avril 2005

    Dossier spcial 18/302e semestre 2009/HesaMag #0129

  • la mise au point de modles de tests de toxicit adapts aux trois types de nanoparti-cules produites sur son territoire (nanotubes de carbone, carbures de silicium et de titane). Le projet a t confi luniversit de Namur, celle-l mme qui fut lorigine de la cration de Nanocyl.

    Le projet Nanotoxico a dj dbouch sur la mise au point dun prototype permettant de gnrer une atmosphre enrichie en nano-tubes de carbone. Les expriences dinhala-tion seront menes sur des rats dbut 2010. Ce modle suscite beaucoup despoirs au sein de lquipe du Dr Olivier Toussaint, coordinateur du projet et spcialiste en biologie cellulaire, car il permettra de mener des expriences sur les animaux dans des conditions plus proches de celles dune exposition humaine. En effet, la plupart des tests de toxicit mens jusqu prsent sur lanimal ont t raliss en injec-tant directement les nanotubes de carbone dans le corps des animaux, soit des condi-tions trs loignes des scnarios dexposition professionnelle les plus ralistes o le risque principal est dinhaler les nanoparticules. Les promoteurs de Nanotoxico esprent galement dvelopper des tests in vitro permettant aux producteurs de tester leurs nanoparticules, ce qui pourrait se rvler extrmement utile dans le nouveau contexte cr par REACH, la nou-velle lgislation europenne sur les produits chimiques qui impose aux industriels dva-luer la toxicit de leurs produits avant leur mise sur le march.

    "Nous esprons que les rsultats de ces expriences permettront daccompagner les producteurs par rapport leurs obligations dvaluation et de prvention des risques. Lobjectif ultime tant de contribuer lta-blissement de limites dexposition profession-nelles au niveau europen", explique Olivier Toussaint.

    En dbloquant des sommes aussi im-portantes, les autorits wallonnes veulent avoir la garantie que les technologies quelles soutiennent ne vont pas provoquer un scan-dale sanitaire dans vingt ou trente ans. Le but est galement de rassurer les citoyens, dvi-ter un scnario de type OGM7.

    "Ce sont les deniers publics qui financent les projets de dveloppement des nanotechno-logies en Wallonie. Ils doivent donc aller dans le sens de lintrt public. Si lon constate que les nanotubes de carbone sont extrmement toxiques, il est clair que nous cesserons dap-porter un soutien un secteur qui, de toute

    faon, ne prsenterait plus alors dintrt co-nomique", tient prciser Baudouin Jambe, de la direction gnrale Economie, Emploi et Recherche de la Rgion wallonne.

    Ce scnario de labandon des nanos nest pour linstant absolument pas envisag. Les autorits wallonnes prfrent insister sur la matrise du risque que sur la toxicit intrin-sque des nanoparticules dont on sait quelle peut varier du tout au tout en fonction de leur taille, de leur granulomtrie, de leurs propri-ts chimiques, des mthodes de fabrication, etc. "Il faut tre certain que ce qui est produit rpond aux exigences de scurit maximale, tant pour les ouvriers qui les fabriquent que pour les utilisateurs. Nous souhaitons savoir dans quels cas les nanos reprsentent un dan-ger afin de tout mettre en oeuvre pour viter des risques pour la sant."

    Comme cest gnralement le cas dans tout dbat sur les nanotechnologies, il sub-siste au moment des conclusions plus dinter-rogations que de rponses franches. A limage de tous ses "concurrents", la rgion wallonne a accept cette part dincertitude, en esp-rant que si la science narrive pas liminer la toxicit des nanomatriaux, elle pourra au moins nous offrir les cls permettant den ti-rer les bnfices maximums tout en en mini-misant les risques.

    7. Evoquant le rejet des OGM par de nombreux citoyens europens, la ministre wallonne en charge lpoque de la recherche et des technologies dclarait lors du lancement du projet Nanotoxico: "Il ne faudrait pas que le dveloppement des nanotechnologies soit frein par une mme attitude, sans quelle ne soit fonde sur des tudes scientifiques." Allocution tlchargeable sur www.fundp.ac.be/universite/services/relext/presse

    BASF recommande les mesures les plus strictes

    En juillet 2009, le numro 1 mondial de la chimie, le groupe allemand BASF, rendait public les rsultats dune tude sur la toxicit des nanotubes de carbone.

    Des rats ont inhal pendant 90 jours des concentrations variables (de 0,1 2,5 milligrammes par m3) de nanotubes de carbone multi-parois produits par la socit belge Nanocyl. Les auteurs de ltude ont constat une inflammation du poumon au niveau de concentration le plus bas (0,1 mg/m3), ce qui a rendu impossible la dfinition dune concentration sans effet observ. De linflamma-tion a galement t observe dans les cavits nasales, le larynx et la trache.

    Par consquent, les auteurs de ltude recommandent "les mesures dhygine industrielle les plus strictes lors de la manipulation des nanotubes de carbone multi-parois".

    Voir : Inhalation toxicity of multi-wall carbon nanotubes in rats exposed for 3 months, Toxico-

    logical Sciences, 7 July 2009. Rsum tlchargeable sur http://toxsci.oxfordjournals.org/

    cgi/content/abstract/kfp146v1

    Dossier spcial 19/302e semestre 2009/HesaMag #0130