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    CRISE FINANCIRE OU DE SURPRODUCTION ? Actualit de Marx pour une critique des politiques anti-crise

    Paulo NAKATANI* et Rmy HERRERA**

    Lerreur principale des interprtations les plus courantes de la crise capitaliste actuelle

    est quelle ne serait quune crise financire, qui contaminerait la sphre relle de lconomie. Au contraire, il sagit en fait dune crise du capital dont la manifestation a surgi au sein de la sphre financire, en raison de la gigantesque financiarisation du systme capitaliste nous en avons donn quelques lments danalyse dans un rcent article de La Pense (cf. n 353, pp. 109-113, janvier-fvrier-mars 2008)1. Tout au long de lhistoire du capitalisme, et surtout aprs la grande dpression des annes 1930, les connaissances accumules par les sciences sociales en gnral, et conomiques en particulier, ont permis au capital de se forger des institutions et des instruments dintervention publique, lis pour lessentiel aux politiques des Banques centrales, assurant une certaine gestion tatique des crises et amortissant leurs effets les plus destructeurs au centre du systme mondial, do est partie la crise actuelle. Mais quen est-il au juste des politiques anti-crise mises en uvre aujourdhui ?

    Une crise de surproduction

    On le sait depuis Marx : les crises font partie intgrante de la dynamique contradictoire de la reproduction largie du capital. Au cours de ces priodes, les capitaux correspondant aux activits conomiquement les plus fragiles ou technologiquement dpasses se trouvent dvaloriss. Une partie dentre eux disparat, une autre est concentre et centralise par les fractions les plus puissantes et avances du capital, entendu comme un rapport social. Aussi la rsolution des crises capitalistes vient-elle recrer les conditions de laccumulation pour une nouvelle phase dessor des forces productives, oprant sur des bases dextorsion de plus-value et dans des rapports de production moderniss. Cest l lun des enseignements majeurs de Marx. Le systme capitaliste, en mutation permanente, nest donc videmment jamais stationnaire et ne pourra pas le devenir, contrairement aux arguties de lidologie thorique dominante dite no-classique, laquelle adhrent lheure prsente la grande majorit des conomistes y compris les critiques autoproclams du no-libralisme que seraient Joseph Stiglitz ou Paul Krugman. Linspiration soi-disant keynsienne de ces derniers ne saurait occulter le fait que, dans llment de la thorie, la crise du capital nexiste pas pour le mainstream no-classique, dont Stiglitz et Krugman sont parmi les leaders de gauche les plus prolifiques et cratifs.

    Cest dans ce contexte quil convient de prendre au srieux notre affirmation de lactualit du marxisme (ou des marxismes) afin de tenter dapprhender les transformations actuelles du capitalisme et dclairer les transitions post-capitalistes qui samorcent. En opposition aux courants dominants keynsien de 1945 1975, no-classique depuis la fin des annes 1970

    * Professeur en Master de Politiques sociales lUniversit fdrale de Espirito Santo (Vitoria, Brsil) et prsident de la Socit brsilienne dEconomie politique (SEP). ** Chercheur au CNRS (UMR 8174 - Centre dEconomie de la Sorbonne, Universit de Paris 1 Panthon-Sorbonne) et coordinateur du Forum mondial des Alternatives. 1 Une version actualise de cet article est disponible dans louvrage collectif, La Gran Depresin del Siglo XXI, publi en 2009 San Jos de Costa Rica par lObservatorio Internacional de la Crisis.

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    et peut-tre keynso-no-classique dans les prochaines annes , rapparaissent lautre bout du spectre politique des analyses systmiques et des alternatives post-capitalistes formules partir de luvre de Marx. Car les interprtations les plus profondes de la crise actuelle sont selon nous venues des auteurs marxistes, du Nord comme et peut-tre surtout du Sud2. Plusieurs dentre eux avaient annonc depuis plusieurs annes dj, avec rigueur et lucidit, linluctabilit dune dvalorisation du capital, brutale et de grande ampleur, accompagnant lclatement dune nouvelle crise capitaliste. Leurs argumentations ntaient pas celles dune humeur catastrophiste, dune illumination visionnaire ou dune incantation du grand soir ; elles reposaient plutt sur une comprhension des contradictions et des limites fondamentales de la dynamique de laccumulation du capital dvoiles par Marx.

    Fondamentalement, la raison profonde de la crise qui se dploie actuellement lchelle mondiale peut tre explique par une surproduction du capital, dcoulant de lanarchie mme de la production et conduisant une pression la baisse du taux de profit lorsque les contre-tendances viennent spuiser. Cette suraccumulation se manifeste travers un excs de production vendable, non pas du fait dune insuffisance de personnes dans le besoin ou ayant le dsir de consommer, mais bien plutt parce que la tendance la concentration de richesses tend exclure une proportion toujours plus grande de la population de la possibilit dacheter des marchandises. Au lieu davoir affaire une surproduction de marchandises, lessor du systme du crdit permet au capital de saccumuler sous forme de capital argent, lequel peut se prsenter soit comme capital porteur dintrt, soit de manire plus irrelle encore en tant que capital fictif .

    Ce dernier constitue selon nous un concept-cl pour lanalyse de la crise actuelle et des mutations du systme du crdit qui lont prcde. Son principe gnral, en lespce la capitalisation dun revenu driv dune survaleur venir, tout comme certaines des formes dans lesquelles on le retrouve (capital bancaire, actions boursires, dettes publiques), ont t perus en son temps par Marx. Il en esquissa ltude, en liaison avec celles du capital porteur dintrt et du dveloppement du crdit dans la socit capitaliste, dans la Section 5 du Livre III du Capital, et spcialement partir du chapitre XXV (intitul Kredit und fiktives Kapital [crdit et capital fictif]) , puis surtout au chapitre XXIX ( Bestandteile des Bankkapitals [composantes du capital bancaire]), et encore dans les chapitres XXX ( Geldkapital und wirkliches Kapital - I [capital-argent et capital rel]) XXXIII ( Das Umlaufsmittel unter dem Kreditsystem [les moyens de circulation dans le systme du crdit])3. Dautres lments importants se rencontrent ailleurs, des Livres I et II aux annexes des Thories sur la plus-value, comme aussi chez Engels4.

    Le lieu de constitution par excellence de ce capital fictif se situe dans le systme du crdit, reliant lentreprise capitaliste ltat capitaliste : les banques, les bourses, mais aussi aujourdhui les fonds de pensions (qui grent lpargne retraite par capitalisation), les fonds dinvestissement spculatifs (ou hedge funds) et dautres entits de nature similaire. Certains de ses vecteurs privilgis suivent galement les processus de titrisation de crdits et les changes dinstruments financiers appels produits drivs. Ces derniers sont des contrats5

    2 Lire, entre autres exemples, les crits de John Bellamy Foster et de lquipe qui anime la Monthly Review, et des conomistes comme Wen Tiejun en Asie, Samir Amin en Afrique, Alejandro Valle en Amrique latine... Parmi les meilleures tudes de la gauche non marxiste, citons : Morin, Franois (2006), Le Nouveau Mur de largent Essai sur la finance globalise, Seuil, Paris. 3 Pour ldition en allemand : Marx et Engels (1964), tout particulirement pp. 482-487 (dans le chapitre XXIX). Pour la version franaise : Marx (1977), pp. 430-437. 4 Les contributions marxistes les plus puissantes sur le capital financier, immdiatement postrieures luvre de Marx, sont dues Hilferding (1970) et Lnine (1954). Pour ce qui est des travaux rcents, nous inviterons lire, entre autres : de Brunhoff (1976), Harvey (1982) et Carcanholo et Sabadini (2008). 5 Les contrats peuvent renvoyer des transactions fermes (forwards [ terme de gr gr], futures [ terme organiss], swaps [changes de flux financiers], drivs de crdit) ou non (options, warrants, hybrides).

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    fixant les flux financiers futurs en fonction des variations du prix dun actif sous-jacent, pouvant correspondre des taux dintrt, des taux de change, des cours boursiers ou autres (des matires premires ou mme des vnements venir). Ces divers outils de couverture servent en fait frquemment de supports des stratgies de spculation, jouant sur l effet de levier par prise de risque partir du placement dune mise limite, notamment quand ils sont combins entre eux et quils donnent lieu des ventes dites dcouvert (short sell, sans contrepartie). Les oprations spculatives les plus risques peuvent amener, en thorie, des pertes infinies (sur les options de vente ou put , par exemple). Les montants mis en jeu par ces transactions, induisant la cration de capital fictif, dpassent dsormais trs largement celui destin la seule reproduction du capital directement productif. titre dexemple, pour lanne 2007, la valeur des exportations cumules de tous les pays du monde sur 12 mois galaient trois jours dchanges de contrats drivs over-the-counter (OTC, i.e. ngocis de gr gr sans intermdiaire) : 13 720 milliards de dollars annuellement pour les premires contre 4 200 milliards quotidiennement pour les seconds. En dpit de sa nature (en majeure partie) parasitaire, ce capital bnficie dune redistribution de plus-value et vient alimenter laccrtion de capital fictif additionnel comme moyen de sa propre rmunration6.

    Lexacerbation de la crise

    Les contradictions qua rvles la crise actuelle plonge leur racine dans lpuisement des moteurs de la longue priode dexpansion de laprs Seconde Guerre mondiale, qui avait abouti la fin des accords de Bretton Woods et lessor de nouveaux marchs financiers. Dans la sphre productive, les formes dextraction de la plus-value et dorganisation de la production fondes sur le taylorisme et le fordisme touchaient leurs limites et taient relayes par de nouvelles mthodes (toyotisme, Kanban). Durant la guerre froide, le dveloppement des forces productives avait t impuls en partie par les dpenses de ltat occasionnes par la rivalit entre les complexes militaro-industriels tats-unien et sovitique, qui finit par se convertir en une course aux armements. Ces volutions jourent un rle fondamental dans la consolidation des systmes informatiss, avec linvention des micro-ordinateurs et dinternet, mais aussi de machines robotises commandes par ordinateurs, qui bouleversrent les bases technologiques et sociales de la production notamment par une substitution du travail par du capital et donnrent un lan nouveau laccumulation capitaliste.

    Aprs une longue priode de suraccumulation de capital, qui se concentra toujours plus dans la sphre financire sous la forme de capital argent, lexcs doffre accentua la pression la baisse du taux de profit. Pour tenter de rsoudre la crise aux tats-Unis, la Fed (rserve fdrale) augmenta brusquement et unilatralement ses taux dintrt en 1979, posant les conditions dune crise de la dette. Cette dernire, qui clatait ds le dbut des annes 1980, nallait pas tre suffisante pour dvaloriser la totalit de lexcs de capital fictif accumul ; et pas davantage les explosions successives des bulles financires , en 1987 aux tats-Unis, en 1994 au Mexique, en 1997 dans lAsie mergente , en 1998 en Russie et au Brsil, puis encore aux tats-Unis en 2000 avec lclatement de la bulle de la nouvelle conomie , ou avec leffondrement de lArgentine no-librale en 2000-01. Insuffisantes taient aussi les dvalorisations conscutives aux multiples scandales de fraudes comptables impliquant des firmes transnationales (comme Enron, par exemple).

    La crise actuelle surgit dans le contexte dune modification de la politique montaire tats-unienne lie laggravation de gigantesques dficits internes et externes, le premier en raison du besoin de financement principalement associ aux guerres contre lAfghanistan et lIrak, le second d pour partie aux dlocalisations de firmes, du Mexique la Chine. la suite du

    6 Voir ici : Carcanholo et Nakatani (1999).

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    ralentissement de la croissance conomique de 2000-01, la Fed rduisit son taux dintrt de base (prime rate) de 6,5 % en dcembre 2000 1,75 % en dcembre 2001, puis 1 % en juin 2003, en le maintenant ce niveau trs bas jusqu mai 2004. Exprim en termes rels (en tenant compte de linflation), ce taux dintrt devenait donc ngatif. Cest pendant cette priode de taux ngatif que les mcanismes de la crise des subprimes se mirent en place dans le secteur de limmobilier, o les prises de risques slevaient toujours plus. Par la suite, en liaison avec leffort de guerres imprialistes, la Fed lanait partir de la mi-2004 un mouvement de hausse du prime rate. Ce dernier tait ainsi fortement relev 5,25 % en juin 2006. Ds la fin de lanne 2006, les dbiteurs les plus fragiles commencrent interrompre en masse les flux de traites de leurs prts hypothcaires. Laccroissement du nombre des dfauts de paiement tait acclr par la contraction de la croissance conomique aggrave par les hausses de taux dintrt et les pressions continues la diminution des salaires rels. Le taux dintrt demeurait fix au-dessus de 5 % jusquen juin 2007, en dpit de signes de plus en plus vidents dexacerbation de la crise.

    En aot 2007, aprs lenclenchement dune spirale de chute des grands indices boursiers, les Banques centrales du Nord accordrent pour plusieurs centaines de milliards de dollars de crdits aux systmes bancaires. Malgr tout, les marchs financiers restaient extrmement volatiles au second semestre de lanne, plongeant chaque annonce de pertes enregistres par les plus grands tablissements bancaires tats-uniens, de Citigroup Morgan Stanley. Dans un article intitul Roulette russe financire publi le 15 septembre 2008 dans le New York Times, le prix Nobel dconomie 2008 Paul Krugman crivait (en dtournant les termes de lancien secrtaire la Dfense de George W. Bush, Donald Rumsfeld, justifiant linvasion de lIrak par la soi-disant dcouverte darmes de destruction massives) : Et quand les inconnues non connues se sont transformes en inconnues connues, le systme a t la proie de paniques bancaires postmodernes. Celles-ci ne ressemblent pas leur ancienne version : quelques exceptions prs, il ne sagit plus dune foule de dposants en dtresse venant frapper aux portes dune banque prive. Elles se traduisent plutt par une frnsie dappels tlphoniques et de clics de souris, lorsque les acteurs financiers tirent des fonds sur leurs lignes de crdit et essaient de se prmunir contre les risques. Cependant, les effets conomiques une disparition du crdit, une spirale descendante dans la valeur des actifs sont les mmes que ceux des grandes paniques bancaires des annes 1930 .

    Le 21 janvier 2008 fut lun de ces jours de panique pour la finance mondiale. La Fed rduisit immdiatement son taux dintrt de 4,25 % 3,5 %, puis 3,0 % peu aprs, et ainsi de suite, jusqu le fixer peine au-dessus de zro (0,25 %) depuis dcembre 2008. La mise en uvre des premires mesures anti-crise par ladministration de G.W. Bush au premier semestre de 2008 ne rsolut aucune des contradictions qui minaient le systme. Les marchs continurent chuter. En juillet 2008, les difficults de la banque californienne IndyMac, lun des plus importants prteurs hypothcaires aux tats-Unis, exigeaient lintervention de lagence fdrale en charge de garantir les dpts bancaires (la Federal Deposit Insurance Corporation). Il sagissait de la plus grave faillite bancaire depuis plus dun quart de sicle. Elle fut suivie par un plan durgence destin sauver les principales institutions financires intervenant sur le march immobilier, en particulier Fannie Mae et Freddie Mac, concernant entre un et deux millions de dbiteurs pour plus de 300 milliards de dollars. Mi-septembre 2008, lun des points tournants de la crise fut la quasi-faillite des banques dinvestissement Lehman Brothers et Merryl Lynch, qui ncessita le montage de rachats, respectivement par Citigroup et la Bank of America. Presque au mme moment, lAmerican International Group (AIG), lpoque la premire compagnie dassurance du monde, devait rechercher des fonds auprs de la Fed de New York, avant dtre nationalis pour une opration dpassant les 85 milliards de dollars.

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    Les politiques anti-crise

    La destruction de capital fictif fut brutale. La capitalisation totale des bourses mondiales serait ainsi passe au cours de lanne 2008 de 48,3 26,1 billions (ou milliers de milliards, soit 10 puissance 12 !) de dollars7. Entre le 1er janvier 2008 et le 1er janvier 2009, les principaux indices de cotation de New York, le Dow Jones Indus, le S&P 500 et le Nasdaq, ont chut de -33,8 %, -39,8 % et -40,5 % respectivement. Le Nikkei de Tokyo a connu une baisse de mme ordre (-42,1 %), comme lASX 200 de Sydney (-44,1 %). En zone euro, les dgringolades ont parfois t plus dures : -31,3 % Londres (FTSE 100), -40,8 % Francfort (DAX 30), -42,7 % Paris (CAC 40), -48,4 % Milan (MIB 30), et -52,3 % Amsterdam (AEX 25), -53,8 % Bruxelles (pour le BEL 20) LEurostoxx 50 perdait quant lui -44,3 %. Mmes tendances ailleurs en Europe : de -34,8 % pour le Zurich SMI (Suisse) -52,8 % pour lOslo AS (Norvge). sa priphrie, ctait mme pire : -52,0 % Tel Aviv (TA 100), -52,5 % Istanbul (ISE Nat. 100) Le plus fort recul fut enregistr Moscou (RST), avec -72,7 %. Dans lAsie mergente , les baisses ont t de -45,4 % pour le TSE Taipei, -48,6 % pour le STI Singapour, -51,9 % pour le SENSEX Bombay. Cest en Chine que les chutes ont t les plus graves : -61,9 % pour le Shenzhen bta, -65,4 % pour le SSE de Shanguai Sur les autres bourses du Sud, sauf exceptions (comme lindice de la Bolsa de Valores de So Paulo, dgrad de -42,2 %), les variations taient peine moins marques : -24,5 % Mexico (MXSE IPC), -24,0 % Santiago du Chili (IGPA) ou -28,0 % Johannesburg (FTSE JSE) De janvier mars 2009, les volutions des indices boursiers taient encore nettement ngatives, presque partout : -15,9 % pour le CAC 40, -16,3 % pour le DJ Indus., -19,7 % pour lEuro Stoxx 50

    Les principales banques centrales sefforcrent de coordonner leurs interventions, en offrant des lignes de crdit privilgies aux systmes bancaires et en rduisant continment leurs taux dintrt. Le secrtaire au Trsor, Henry Paulson, et le prsident de la Fed, Ben Bernanke, proposrent un gigantesque plan de renflouement du systme financier, mobilisant un montant suprieur 700 milliards de dollars pour lachat de titres toxiques dactifs bancaires. Initialement rejet par le Congrs, ce projet fut finalement approuv par le Snat, aprs plusieurs modifications, dont les principales consistaient recourir lachat dactions des banques et tendre laide publique des entreprises, ce qui porta les sommes prvues plus de 850 milliards de dollars. Sur ce total, quelque 500 milliards de dollars ont t engags sous le mandat de G.W. Bush (y compris les prts destins General Motors et Chrysler, de 13 et 4 milliards de dollars respectivement)8.

    Aprs llection de Barak Obama, un autre plan anti-crise devait tre soumis au Congrs. Il fut labor par une quipe dconomistes entourant le nouveau prsident, compose par quelques-uns des principaux hauts responsables passs de lessor du capital fictif spculatif, par la drgulation des marchs financiers et la mondialisation des politiques no-librales ayant amen les conditions les plus dcisives de lclatement de la crise : Larry Summers, ex-secrtaire au Trsor de ladministration Clinton et chef conomiste de la Banque mondiale, dsormais conseiller de la Maison blanche ; Timothy Geithner, ancien prsident de la Fed de New York et directeur de la politique de dveloppement au FMI, aujourdhui ministre des Finances ; et surtout Paul Volcker lui-mme, qui prsida de 1979 1987 la Banque centrale et est lorigine du changement de stratgie tats-unienne avec ladoption du montarisme, dornavant directeur du Presidents Economic Recovery Advisory Board (Conseil pour la reconstruction conomique). 7 Daprs les statistiques de 2008 construites par Thomson Financial Datastream, disponibles en janvier 2009. 8 En fvrier 2009, la fin du terme accord pour que ces entreprises prsentent un plan de restructuration, General Motors, dont la perte tait de 30,9 milliards de dollars en 2008, sollicita 16 milliards supplmentaires et Chrysler 5 milliards, pour viter la banqueroute. Dans le mme temps, 52 000 licenciements sont annoncs.

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    Le plan de sauvetage tant attendu fut approuv par le prsident Obama le 18 fvrier 2009. Il venait ajouter au prcdent programme, prsent sous la mandature de G.W. Bush, plus de 780 milliards de dollars, pour un montant cumul slevant en fait plus de 1 600 milliards. En dpit de lampleur de ce dispositif, le prsident Obama na pas cart la possibilit den tendre encore le champ daction dans la dcennie venir, en cas de ncessit : sur ce total, 38 % iront au soutien des finances des gouvernements fdrs et des collectivits locales, ainsi qu lassistance la population faibles revenus ou sans emploi ; 38 % correspondront des rductions dimpts pays, supports principalement par les classes moyennes ; et 24 % seront consacrs aux travaux publics avec lobjectif de crer quatre millions demplois. Cela na pas empch les marchs financiers de poursuivre leurs dgringolades, New York, Londres, Frankfort ou Paris, dmontrant non seulement linsatisfaction persistante des grands propritaires du capital fictif face au plan envisag, mais aussi et surtout linsuffisance des masses de ressources pourtant gigantesques dj injectes dans le systme bancaire pour le sauver.

    Lhypothse la plus probable est donc bien celle dune insolvabilit, confirme par la succession dannonces de pertes enregistres par les grands oligopoles financiers tats-uniens depuis le dernier trimestre 2008 (par exemple, 58,7 milliards de dollars pour Fannie Mae en 2008)9. La Federal Deposit Insurance Corporation, qui classait 252 tablissements bancaires tats-uniens comme tant problmatiques , sattendait en 2009 ce que plus de mille banques soient dclares en faillite, sur un total de 8 300 institutions dans le pays. Cest dans cette tourmente que le prsident Obama affirmait apercevoir le dbut de la fin de la crise (the beginning of the end of crisis)10... Son gouvernement prsenta une proposition de budget pour lanne 2010 dont les caractristiques taient une augmentation des dpenses sociales, un ralentissement de laccroissement du fardeau miliaire et la hausse des impts sur les mnages les plus aiss. Ce que daucuns ont qualifi de budget Robin des Bois, prenant aux riches pour donner aux pauvres na pourtant pas oubli les investisseurs et spculateurs oprant sur les marchs financiers. Si les conditions conomiques venaient se dtriorer, affirme le document prsidentiel envoy au Congrs, le gouvernement pourra utiliser [les ressources supplmentaires prvues] pour nationaliser temporairement des institutions en difficults . Le dficit budgtaire prvisionnel pour 2009 atteint le montant record de 1,75 trillions de dollars, soit 12,3 % du produit intrieur brut des tats-Unis.

    Pas plus que les divers essais de ractivation de loffre de crdit par les banques centrales depuis 2007, les mesures impliques par les plans des gouvernements du G7 (dguis en G20, dfaut de G192) nont pas produit limpact souhait. Les uns comme les autres se sont avres trs insuffisantes pour viter leffondrement de pans entiers de la financiarisation mondialise. Laggravation de la dimension financire de la crise na pas connu de rpit, et la transmission de ses effets la sphre relle sest acclre, lchelle mondiale, travers laffectation des niveaux de la production, de lemploi et des changes commerciaux. La plupart des grandes institutions internationales, du FMI lOCDE, ont plusieurs reprises rvis la baisse leurs prvisions de croissance conomique pour 2009-10. LOrganisation internationale du Travail (OIT) estime que le ralentissement actuel de la croissance dans les principaux pays du systme mondial devrait entraner une augmentation du nombre de chmeurs de lordre de 20 millions en 2009, tandis que le total mondial des personnes sans emploi pourrait dpasser les 210 millions cette mme anne. normes sont les dgts sociaux provoqus par le mode de production capitaliste, devenu une menace pour lhumanit entire.

    9 Selon le journaliste britannique Martin Wolf, commentateur en chef pour lconomie au Financial Times : Une proportion considrable de banques est insolvable, leurs actifs valant moins que leurs passifs. Le FMI estime les pertes potentielles sur les crdits 2,2 trillions de dollars aux tats-Unis. Dautres calculs suggrent quelles dpasseraient 3,6 trillions de dollars . Lire ici : http://news.ft.com/comment/columnists/martinwolf. 10 Par exemple : The Washington Post, 17 fvrier 2009, Economy Watch: Coverage of the Financial Crisis .

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    Des interprtations aux solutions

    La grande dpression des annes 1930 avait mis en vidence les limites de lconomie dominante no-classique. Son explication du fonctionnement du capitalisme se fonde sur la loi de Say et sur lquilibre des marchs, par un ajustement automatique des prix, interdisant en thorie lapparition spontane dune crise. Comme cette dernire que lon se borne qualifier de financire est pourtant une ralit difficile nier en pratique, la plupart des auteurs no-classiques (et des vulgarisateurs conomiques mdiatiques) lanalysent partir de divers facteurs extrieurs aux marchs, et spcialement par des interventions de ltat ou lactivit des syndicats, quand ce nest pas la mtorologie et/ou par des excs dans le comportement dagents, allant dune cupidit exagre jusqu la fraude en passant par des erreurs de gouvernance dentreprise, qui perturbent le libre jeu des mcanismes de march. Les logiques de concentration de la proprit prive et de maximisation du profit individuel ne sont pas problmatiques ; seuls des cas dincomptence ou de corruption sont en cause. Bien que nombre dconomistes du mainstream occupent des positions de responsabilit au sein des appareils de ltat capitaliste et agissent dlibrment en faveur du grand capital, leur conception de ltat est celle dune institution spare de la sphre conomique et non domine par les intrts des capitalistes. Les syndicats existent, mais pas la lutte des classes. Les dommages causs lenvironnement et la crise climatique elle-mme ne seraient pas lis au capitalisme, mais seulement lactivit des hommes en gnral et de ceux des pays mergents du Sud en particulier, commencer par la Chine

    Les politiques no-librales sont pourtant, lvidence, sur le dclin. La gravit de la crise actuelle est propice au retour sur le devant de la scne des thses de John Maynard Keynes, critique aigu de la vision no-classique dun ajustement auto-rgul du capitalisme. Depuis quelques annes dj, une partie des thoriciens no-classiques a commenc abandonner certaines positions no-librales dures, non pour se convertir au keynsianisme, mais pour relancer lambition dune absorption de celui-ci par le paradigme walrasien, travers ce que lon appelle poliment la synthse keynso-no-classique entreprise ds les annes 1940 par les efforts dauteurs comme Sir John R. Hicks ou Paul A. Samuelson. Leurs descendants parmi les plus minents, rests fidles la thorie no-classique standard au prix de quelques adaptations (sur les ajustements de prix, les anticipations ou la concurrence imparfaite) sont aujourdhui Joseph Stiglitz, Paul Krugman ou Olivier Blanchard. Le premier, prix Nobel dconomie 2001, a t vice-prsident de la Banque mondiale et nest plus prsenter ; le deuxime, prix Nobel 2008, termine son dernier ouvrage, Pourquoi les crises reviennent toujours, en crivant que Keynes qui a compris la Grande Dpression [des annes 1930] est aujourdhui, plus que jamais, lordre du jour 11 ; le troisime, longtemps professeur dconomie au MIT, paule dsormais la fois le managing director socialiste du FMI Dominique Strauss-Kahn en tant que chief economist de cette institution, et le prix Nobel de la Paix 2009 Barack Obama comme conseiller des Federal Reserve Banks de New York et de Boston.

    Force est toutefois de constater que, bien quelles sopposent frquemment au sujet des propositions relatives aux degrs dintervention de ltat, les interprtations de ces soi-disant nouveaux keynsiens et des no-classiques traditionnels participent de la mme matrice politico-idologique de la thorie conomique, que nous qualifierons ici de bourgeoise . Pour les plus avancs dentre eux, malgr des nuances, variantes et subtilits, ils ne formulent que des visions peine rformistes , consistant introduire de minimes modifications dans le fonctionnement du capitalisme pour que ce dernier survive le plus longtemps possible quitte se rsoudre accepter, temporairement, une intervention tatique directe et massive

    11 Voir : Krugman, Paul (2009), Pourquoi les crises reviennent toujours, Seuil, Paris.

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    travers lachat dactions de banques, de compagnies dassurance et de caisses dpargne au bord de la faillite, le plus souvent mme sans droit de vote ni nouveaux critres de contrle. Si quelques outils keynsiens sont perceptibles dans les mesures anti-crise dcides par ladministration tats-unienne ds le plan propos par (lquipe de) G.W. Bush au premier semestre 2008 (comme la rtrocession dune partie de limpt sur le revenu dj acquitt pour tenter de stimuler la consommation) et, surtout, avec le programme du prsident Obama (travaux de rnovation dinfrastructures) , la prdominance va encore assez nettement aux politiques no-librales visant sauver le maximum de richesse financire cest--dire de capital fictif accumul par les oligopoles de la haute finance.

    La conversion dans lurgence de plans de sauvetage du capitalisme un interventionnisme dtats et de Banques centrales actionns de faon anti-dmocratique par les dirigeants des gouvernements no-libraux du Nord ne peut pas faire illusion. Le mlange de fortes baisses de taux dintrt, douverture de gigantesques lignes de crdit et dachat dactifs bancaires demeure trs orthodoxe, et ses initiateurs sont encore loin de stre extraits des dogmes de lconomie dominante. Le Rapport de la Commission Stiglitz en fournit lillustration12. Rdig en 2008-09 la demande du prsident de lAssemble gnrale des Nations unies Miguel dEscoto, le document final ne remet pas vritablement en question les fondements de lidologie no-librale, pourtant malmens par la crise. Selon ce rapport, les anciennes certitudes du no-libralisme sont rviser, mais certainement pas abandonner : les taux de changes doivent tre flexibles, les vertus du libre-change sont raffirmes face aux dangers du protectionnisme, les dfauts de la corporate governance sont corriger, la gestion des risques financiers continue dtre confie aux oligopoles privs eux-mmes et la rgulation du systme mondial capitaliste reste dans la dpendance de lhgmonie tats-unienne Nous voil fort loigns des manifestations de rejet de la libralisation financire mondialise exprimes par de plus en plus de pays au Sud, de la Chine au Venezuela non sans limites, difficults et contradictions il est vrai13.

    Par ailleurs, une partie minoritaire mais significative des courants libraux continue de se radicaliser, pour se rapprocher des thses ultra-librales autrichiennes inspires par Mises ou Hayek. Fondes sur une foi raffirme dans le caractre automatique des rquilibrages des marchs, ces analyses de la crise, dont on trouve un bel chantillon sur le site de lInstitut von Mises14, sont gnantes pour nos no-libraux nouveaux keynsiens dans la mesure o elles dfendent depuis le dbut les ides que la crise viendrait dun excs dinterventionnisme et que ltat ne devrait aucunement chercher sauver les banques et les firmes en difficult. Ce quil faudrait plutt faire, selon eux, ce serait den finir avec toutes les rglementations tatiques qui limitent la libre action des agents sur les marchs. Les politiques publiques de logement, appuyes sur Fannie Mae et Freddie Mac, prtendaient de faon populiste que les citoyens pouvaient tous accder la proprit immobilire. Les marchs ont dmontr quil nen est rien. Les ultra-libraux dveloppent leurs argumentations contre tout plan anti-crise, et en particulier contre toute rglementation externe des taux dintrt par la Banque centrale. Les plus extrmistes dentre eux vont jusqu rclamer la suppression pure et simple des institutions tatiques (y compris larme), ainsi que la privatisation de la monnaie. Ils sont bien sr conscients du fait que de telles mesures amneraient le systme capitaliste vers le chaos, mais leur confiance dans les mcanismes de march les conduit penser que ce chaos savrerait bnfique pour le capital et que ce dernier se reconstituerait plus rapidement et plus vigoureusement que sil sappuyait sur des interventions tatiques artificielles, prenant la forme de diverses aides publiques des entreprises condamnes la faillite. 12 Samir Amin en a tout rcemment propos une critique trs dure, mais thoriquement et politiquement lucide. 13 Lire : Herrera et Nakatani (2004, 2005) ou Nakatani et Herrera (2007, 2008). 14 Voir, par exemple, les articles crits par Rockwell et Rozeff, consulter sur : http://www.mises.org.br.

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    En guise de conclusion

    Aucun de ces courants de pense ne suggre de rflchir aux conditions dun processus de dpassement du capital en tant que rapport social dexploitation et doppression pas mme les propositions de gauche demandant la rforme du FMI et de la Banque mondiale ou la cration dune monnaie mondiale . Il existe cependant des dfenseurs de lide selon laquelle la crise actuelle du capital conduira probablement leffondrement du capitalisme. Robert Kurz soutenait ds le milieu des annes 1990, dans plusieurs ouvrages pionniers (dont Avis aux naufrags - Chroniques du capitalisme mondialis en crise), que le systme de production capitaliste est en voie dextinction et que le XXIe sicle ouvrira une priode de transition vers une forme nouvelle de socit. Immanuel Wallerstein, qui tudie les tendances longues du capitalisme partir dune thorie du systme-monde , dclarait rcemment : Je pense que nous sommes entrs depuis 30 ans dans la phase terminale du systme capitaliste. La situation devient chaotique, incontrlable pour les forces qui la dominaient jusqualors, et lon voit merger une lutte, non plus entre les tenants et les adversaires du systme, mais entre tous les acteurs pour dterminer ce qui va le remplacer. Je rserve lusage du mot crise ce type de priode. Eh bien, nous sommes en crise. Le capitalisme touche sa fin 15. Et dajouter, ailleurs : Nous pouvons tre srs que, dans 30 ans, nous ne vivrons plus dans le systme-monde capitaliste 16. Ces interprtations rejoignent celles de certains analystes de la conjoncture mondiale du capitalisme, notamment lquipe du Global Europe Anticipation Bulletin (GEAB - LEAP), dont les prvisions sur lvolution de la crise sont chaque fois plus pessimistes. Depuis 2006, nous avons estim que la crise systmique globale se droulerait selon quatre phases : le dclenchement, lacclration, limpact et la dcantation. Ce processus a bien dcrit les vnements jusqu aujourdhui [15 fvrier 2009]. Mais () lincapacit des dirigeants mondiaux prendre la mesure de la crise, caractrise notamment par leur acharnement depuis plus dun an en traiter les consquences au lieu de sattaquer radicalement ses causes, va faire entrer la crise systmique globale dans une cinquime phase partir du quatrime trimestre 2009 : [celle] de dislocation gopolitique mondiale 17. Cette nouvelle tape de la crise en cours pourrait selon eux conduire, dune part, leffondrement du dollar tats-unien et la disparition du socle financier international, dautre part, une fragmentation des intrts des acteurs du systme. Laissons-leur le dernier mot : Nous avions espr que la phase de dcantation permettrait aux dirigeants du monde entier de tirer les consquences de leffondrement du systme qui organise la plante depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. () [I]l nest plus vraiment permis dtre optimistes. Aux tats-Unis comme en Europe () ou au Japon, les dirigeants persistent faire comme si le systme global tait seulement victime dune panne passagre et [comme sil sagissait de] faire repartir la machine [en ajoutant du] carburant (des liquidits) [avec quelques rglages supplmentaires : une baisse de taux, des achats dactifs toxiques, des plans de relance des industries en quasi-faillite]. Or cest () le systme global [qui] est dsormais hors dusage. Il faut en reconstruire un nouveau au lieu de sacharner sauver ce qui ne peut plus ltre 18.

    15 Article disponible sur : http://www.lemonde.fr/la-crise-financiere/article/2008/10/11/le-capitalisme-touche-a-sa-fin_1105714_1101386.html ( Le Capitalisme touche sa fin , Le Monde, 11 octobre 2008). 16 Voir larticle El capitalismo no existir en 30 aos du 5 octobre 2009 (disponible sur : www.publico.es). 17 Extrait du rapport n 32 (15 fvrier 2009), sur : http://www.leap2020.eu/GEAB-N-32-Sommaire_a2797.html. 18 Des analystes de lquipe de Money and Markets aux tats-Unis sont eux aussi pessimistes et prvoient une aggravation de la crise dans un proche avenir mme si les enchanements et les canaux de transmission quils identifient sont parfois un peu diffrents (creusement du dficit budgtaire, gonflement de la dette publique, insuffisante dfense du dollar).

  • 10

    Rfrences Carcanholo, Reinaldo et Paulo Nakatani (1999), O Capital Especulativo parasitrio: Uma preciso

    terica sobre o capital financeiro, caracterstico da globalizao , Revista Ensaios, vol. 20, n 1, pp. 284-304.

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