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www.aravis.aract.fr Les mutations auxquelles sont confrontées les entreprises sont quasiment permanentes. La gestion de la mutation mal maîtrisée peut avoir des effets négatifs sur la performance de l’entreprise, voire sur sa survie. L’objectif de cette étude est de repérer les pratiques de dialogue social qui contribuent à la réussite de la mutation. Quatre mutations d’entreprises ont été étudiées au regard des questions suivantes: quels ont été les objets et les processus de dialogue social travaillés ? quels acteurs ont été impliqués et pour quoi faire ? quels ont été les éléments freinants ou facilitants? Il ne s’agit pas d’en tirer des règles universelles, mais d’attirer l’attention des dirigeants d’entreprise, des représentants du personnel sur quelques enseignements. MUTATIONS ET DIALOGUE SOCIAL

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Les mutations auxquelles sont confrontées les entreprises sont quasiment permanentes.

La gestion de la mutation mal maîtrisée peut avoir des effets négatifs sur la performance de l’entreprise, voire sur sa survie.

L’objectif de cette étude est de repérer les pratiques de dialogue social qui contribuent à la réussite de la mutation.

Quatre mutations d’entreprises ont été étudiées au regard des questions suivantes : – quels ont été les objets et les processus de dialogue social travaillés ? – quels acteurs ont été impliqués et pour quoi faire ? – quels ont été les éléments freinants ou facilitants?

Il ne s’agit pas d’en tirer des règles universelles, mais d’attirer l’attention des dirigeants d’entreprise, des représentants du personnel sur quelques enseignements.

MUTATIONS ET DIALOGUE SOCIAL

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Ce travail a été piloté par Jérôme Bertin et Marie Odile Sasso (Aravis).

Les consultants Luc Chaize (Luc Chaize consultants), Dominique Fauconnier (ITG), Yves Jorand (BJA) et Jérôme Margotin(Alpha Conseil) ont proposé les monographies. Les échanges ont permis la rédaction de ce document. Il a été présenté aucomité d’orientation d’Aravis qui l’a enrichi.

AvertissementIl s’agit de cas réels, dont nous avons changé les noms. Les monographies ont été rédigées à un moment de leur histoire. Celles-ci peuvent paraître en décalage avec leur situation actuelle.

QUELQUES RÉFÉRENCES BILIOGRAPHIQUES

SOMMAIRE

Page 02 INTRODUCTION

Page 03 PRÉSENTATION DES CAS

Page 04 LES ENSEIGNEMENTS

Page 10 LES MONOGRAPHIES

Page 10 Tamar

Page 13 Métalplastik

Page 16 Thermix

Page 20 Métalbat

ÉDITÉ PAR ARAVISLe facteur humain dans les mutations industriellesFiche pratique n° 18, octobre 2005

Dialogue social et performance en PMEFiche pratique n° 19, août 2006

Reprise d'entreprise et gestion du changement :une organisation délicate,Fiche pratique n° 21, juin 2007

Réussir le dialogue social dans l'entrepriseDocument de sensibilisation, octobre 2006

Le schéma directeur des ressources humainesGuide pratique GRH en PME, dossier n° 2, mai 2006

La feuille de route du repreneur, intégrer le facteur humainpour réussir sa repriseGuide n° 1, novembre 2007

ÉDITÉ PAR L'ANACTAnticiper et accompagner les mutations des entreprises et des territoires, Travail et changement,n° 311, 12/2006, 15 pagesYahiaoui (Farida), Dumalin (Frédéric), Raveyre (Marie),Beaujolin-Bellet (Rachel), Conjard (Patrick), Lenain (Marie-Christine)

AUTRES ÉDITIONSLes relations sociales dans l'entreprise,Labbé (Daniel), Landier (Hubert), Éditions sociales, 1999, 267 pages.

Les acteurs de l'entreprise face aux restructurations : une délicate mutation, Travail et emploi,n° 100, 10/2004, pp. 99-112Aubert (Jean-Pierre), Beaujolin-Bellet (Rachel)

Petites entreprises et territoires, dialoguer pour anticiper,Pour, n° 192, 12/2006, pp. 47-178Exiga (Irène), Plan (Odile), Rouault (Sophie)

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INTRODUCTION

Aravis a été créée dans les années 1990, avec la convictionque le dialogue social est un facteur essentiel de la réussite dela conduite du changement et de la performance en PME.

L’ampleur des mutations qui traversent l’économie desentreprises aujourd’hui nous a conduit à reposer les ques-tions qui étaient au cœur de nos fondements d’hier : en quoile dialogue social est-il utile à l’anticipation et à la gestion deschangements à l’œuvre dans toutes les organisationspubliques ou privées ? À quelles conditions permet-il auxentreprises de mieux s’adapter à un environnement de plusen plus mondialisé, de plus en plus imprévisible ? A-t-il unepart dans cette financiarisation qui déplace les centres dedécisions hors les murs de l’entreprise ?Les acteurs du dialogue social sont-ils toujours les mêmes ?Devront-ils faire évoluer leurs pratiques pour mieux s’adap-ter aux nouveaux défis du développement ou de la survie des entreprises ?

Ces questions, nous avons voulu les poser à quatre consul-tants habitués à accompagner les PME en évolution, en par-tant de leur expérience. Avec eux, nous avons interrogéquatre cas de mutations qui nous ont semblé emblématiquesdes changements qu’affrontent les PME d’aujourd’hui.

Une restructuration avec le cabinet Secafi-Alpha (JérômeMargotin).Une fusion-aquisition avec le cabinet ITG (DominiqueFauconnier).Une reprise d’entreprise en difficulté avec le cabinet Luc ChaizeConsultant (Luc Chaize).Un changement de statut d’un établissement public, avec le cabinet BJA (Yves Jorand).

Les principaux enseignements de ces études tendent à validerl’importance du dialogue social comme facteur de réussite.Néanmoins le cas de fusion-acquisition montre qu’il peut nepas être absolument nécessaire à la réussite économique desprojets à court terme. Une conclusion qu’il nous faudraapprofondir dans l’avenir, et qui montre que les mutationsactuelles remettent en question beaucoup de nos certitudespassées. Pour autant, quatre enseignements utiles peuventêtre tirés.

Le dialogue social entre employeurs et instances représen-tatives des salariés (IRP) est une condition nécessaire maisnon suffisante. Il n’est efficace que si les autres éléments dela régulation sociale fonctionnent. Ce sont bien les relations

entre quatre types acteurs (dirigeants, IRP, mais aussi enca-drement et salariés) auxquelles il s’agit de veiller. À titred’exemple, si les relations entre l’encadrement intermé-diaire et les IRP sont conflictuelles, deux conséquences sontpossibles : une rivalité s’instaure, avec pour effet un risquede décrédibilisation des IRP et des négociations difficiles, ouun risque de retrait de l’encadrement qui n’assure plus samission de relais entre les dirigeants et les salariés.

Ainsi, un système de communication équilibré doit êtretrouvé pour construire la confiance et permettre à chacund’assumer son rôle.

Dans les relations au quotidien, les délégués développentdes compétences de « traducteur » (capacité à faire enten-dre aux dirigeants les préoccupations des salariés et àexpliquer aux salariés les enjeux de l’entreprise) et de« fédérateur » (capacité à intégrer les intérêts particuliersdans des enjeux d’intérêt général). Cet apprentissage nese réalise pas dans l’urgence, sans quoi il peut en résulter unmanque de confiance en soi, de compétences jusqu’à pro-voquer une radicalisation des positions lors de négociations.Le dirigeant doit admettre qu’il doit laisser le temps auxdélégués de se réassurer par une pratique régulière du dialogue, par une formation ou par le recours au conseilauprès d’experts ou de leur syndicat.

Cette réassurance doit également se faire au niveaumanagérial. Le dirigeant a intérêt à dialoguer avec desreprésentants de qualité et il est de sa responsabilité deleur donner les moyens nécessaires au développement deleurs compétences. Assumer cette responsabilité supposede la part du dirigeant et de son encadrement d’avoir prisdu recul sur un certain nombre de craintes, de s’être aussilaissé le temps d’expérimenter d’autres modes de relationset de développer des pratiques de management plusadaptées aux enjeux des mutations.

Enfin, un dernier enseignement tend à montrer que l’en-vironnement prend une place de plus en plus prépondé-rante : acteurs locaux de l’économie et du social, unionslocales, société civile sont autant de composantes qu’il estde plus en plus utile d’associer à des modes renouvelés dedialogue.

Jérôme Bertin et Marie-Odile Sasso

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Agro-alimentaire

150 salariés

Moyenne d’âge 50 ans, ancienneté moyenne supérieure à 25 ans

Fusion - acquisition

Cession d’un site d’une multinationale à une PME

Accord de méthode

Négociation d’accord d’entreprise

Plan d’information et d’animation interne sur la communication d’entreprise

Gestion de crise réussie, à court terme : acquis maintenus pour les personnels en place et nouveaux statuts pour les nouveaux recrutés

Gestion du changement pas vraimentréussie : si l’équilibre économique a été rétabli, il s’est créé un déséquilibre, entre les sites,défavorable au développement de Tamar

Fabrication de presse à injecter

Groupe allemand

186 salariés

Reprise et deuxième restructuration en 3 ans

Suppression de 46 postes

Négociation d’un accord de méthode

Création d’un groupe de travail ad hoc

Dialogue sur l’organisation et les mesures d’accompagnement

Pour les représentants du personnel : une lisibilité sur la stratégie de l’entrepriseet des postes sauvegardés

Pour la direction :pas de grève, un budget tenu

BTP

200 salariés

Après une période longue de croissance, récession forte

Climat social très conflictuel

Reprise

Construction d’un nouveau projet d’entreprise

Pas de plan social, mais un plan d’investissement avec changement d’organisation et mise en place d’une GRH

Le dialogue social est utilisé comme outil de mobilisation des personnes

Rôle de l’encadrement est renforcé

Le budget formation est doublé

Baisse forte des accidents du travail puisdisparition du turnover des ingénieurs

Redressement économique

Légitimité des représentants du personnelplus forte

Tension importante entre encadrement et DP

Établissement de santé

250 fonctionnaires et 280 agents contractuels

Déficit, baisse d’activité

Privatisation Évolution de la politique ressourceshumaines sans que le projet stratégique soit arrêté

Formation des acteurs du dialogue social,encadrement et représentants du personnel, au droit privé

Accord de méthode

Négociation d’une convention d’entreprise

Cohabitation de personnel à statut public et à statut privé

Mise en place d’institutions représentativesdu personnel

Les questions préoccupant le personnel ont été résolues

Plus de disponibilité et de confiance pourdévelopper de nouvelles activités

ACTIONS CONDUITES RÉSULTATS

PRÉSENTATION DES CAS

MÉTALPLASTIK

THERMIX

TYPE DE MUTATIONENTREPRISE

TAMAR

MÉTALBAT

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LES ENSEIGNEMENTS

Ces exemples illustrent deux risques1. L’encadrement n’accompagne pas la restructuration. 2. Il se trouve encore plus en rivalité avec les représentants du personnel qui ont accès aux informations.

Il peut en résulter une dégradation des relations de travail au quotidien.

Le dirigeant doit s’interroger sur ses relations avec l’encadrementComment l’encadrement est associé par le dirigeant aux nouvelles orientations stratégiques et projet de changement ?Comment la direction écoute et prend en compte dans les décisions les difficultés vécues par l’encadrement dans la mise en œuvre ?

La régulation sociale concerne l’ensemble des acteurs del’entreprise: direction, encadrement, représentants du personnelet opérateurs.

Le dialogue social institutionnel concerne la relation entredirection et représentant du personnel.

1.1. Les relations entre direction et encadrement

MétalbatLe directeur revoit sa stratégie sociale lors de la reprise, il pri-vilégie l’information auprès des représentants du personnelet les informe sur les évolutions économiques de l’entreprise.Mais les différents niveaux hiérarchiques n’ont pas suffisam-ment intégré cette nouvelle stratégie sociale.Pour l’encadrement de premier niveau, les tensions avec lesreprésentants du personnel restent fortes, il accepte mall’émergence de ce qu’il ressent comme un contre-pouvoir, lesrelations au quotidien restent rudes.

ThermixL’encadrement supérieur (directeur administratif et finan-cier, responsable ressources humaines et directeur des soins)participe aux négociations du statut social et peut faireremonter des informations au directeur général, mais lerelais vers l’encadrement intermédiaire n’est pas suffisant.Le personnel est donc mieux informé par les représentantsdu personnel que par la direction.

DIRECTION

ENCADREMENTREPRÉSENTANTSDU PERSONNEL

OPÉRATIONNELS

1. LE DIALOGUE SOCIAL INSTITUTIONNEL SERA D’AUTANT PLUS CONSTRUCTIF S’IL S’INSCRIT DANS UN ENSEMBLE DE RELATIONS ÉQUILIBRÉES

DIRECTION

ENCADREMENTREPRÉSENTANTSDU PERSONNEL

OPÉRATIONNELS

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Dans un contexte de mutation, la compétence des représentantsdu personnel est fondamentale d’où la nécéssité de :

Associer les représentants du personnel aux partages desenjeux, à la conduite du projet de changement, aux évolutionsdu mode de management.

Donner les moyens aux représentants du personnel d’être compétents et autonomes, éléments nécessaires pour un dialogue constructif et utile pour l’entreprise

Laisser le temps aux représentants de se réassurer auprès d’experts (l’expert au CE, avocats, leur syndicat) peut êtrenécessaire. Le manque de confiance en soi, lié à un déficitd’expérience ou d’expertise est un élément freinant.

1.2. La relation entre la direction et les représentants du personnel

MétalplastikDirection et élus ont l’habitude de dialoguer sur les enjeuxéconomiques et industriels de l’entreprise à travers l’analyseannuelle des comptes faite par l’expert-comptable du comitéd’entreprise (CE) depuis plusieurs années.Cette habitude d’échanges sur les questions financières, éco-nomiques et stratégiques construit de la confiance utile lorsde restructurations. Elle permet une montée en compétencesdes représentants des salariés nécessaire à un dialogue socialéquilibré.

MétalbatLe dirigeant accepte mal que ses représentants du personneléchangent avec des acteurs extérieurs au syndicat et consi-dère cela comme un manque de confiance.

1.3. La relation entre les représentants du personnel et les salariés

MétalplastikLes représentants des salariés connaissent fort bien leurentreprise sur le plan industriel et économique. Ils ont com-muniqué régulièrement au cours d’assemblées généralesauprès des salariés autant sur la situation économique etfinancière de l’entreprise que sur leur négociation.Ils ont porté des revendications qui n’allaient pas toujours dansle sens des demandes des salariés (revitalisation du bassin).

Dans un contexte de mutation, il est particulièrement importantque les délégués puissent remplir leur mission.

Rôle de traducteur :– expliquer aux salariés les enjeux, la mutation, la situation

économique,– comprendre les préoccupations de leurs collègues et

les faire entendre aux dirigeants.

Rôle fédérateur :– garder le lien,– prendre en compte les enjeux particuliers et mobiliser autour

d’un intérêt général, un intérêt supérieur.

DIRECTION

ENCADREMENTREPRÉSENTANTSDU PERSONNEL

OPÉRATIONNELS

DIRECTION

ENCADREMENTREPRÉSENTANTSDU PERSONNEL

OPÉRATIONNELS

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LES ENSEIGNEMENTS

Les facteurs de confianceUn dirigeant qui a une vision et sait la faire partager.Les conditions du changement sont lisibles et comprises : anticipation et action.Des acteurs référents qui connaissent la culture de l’entreprise.Un accord de méthode.Le respect des engagements et des délais fixés.Un apprentissage antérieur.

2. LA RÉUSSITE DÉPEND DE LA QUALITÉ DE LA CONFIANCE INSTAURÉEENTRE LES ACTEURSMétalbatLe dirigeant a annoncé un plan d’action sur deux ans et lemet en œuvre. Il a toujours veillé à la cohérence entre paroleset actes y compris dans des situations très délicates pourl’entreprise ; la constance de ses convictions, sa sincérité sontles éléments majeurs de la restauration de la confiance et del’évolution du climat social.Le dirigeant s’attache à créer une relation de confiance : lesquestions des représentants du personnel ont toutes desréponses, ce qui est dit est fait, les individus sont respectés.

TamarTant que les négociateurs initiaux ont gardé la main, uneconfiance a pu se construire dans des relations entre la direc-tion et les instances représentatives du personnel, malgré despoints de vue différents. Un accord a pu être signé lors de la fusion.Par la suite, la direction du groupe a été moins vigilante surles problèmes concernant l’établissement, elle n’a plus été en prise avec la globalité des enjeux sociaux et culturels del’établissement.La mutation sociale réussie dans un premier temps n’a pasété suivie du développement économique.

ThermixL’accord de méthode a un effet structurant. Il a formalisé desengagements forts de part et d’autre. Leur respect a confortéla confiance réciproque. Il a permis de co-construire le processusde mutation en donnant un cadre transparent et rassurant.

MétalplastikL’entreprise a déjà connu un plan de restructuration,quelques années auparavant, l’apprentissage du dialogue etl’instauration de la confiance ont été utiles pour gérer cettedeuxième restructuration.Le dirigeant a racheté l’établissement au groupe allemand,montrant la confiance qu’il a dans l’avenir de l’entreprise.

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3. LA RÉUSSITE DÉPEND DES MOYENS DONNÉS À CHAQUE ACTEURMétalbatLe dirigeant souhaite renforcer la capacité des représentantsdu personnel à comprendre les enjeux et les grandes donnéeséconomiques de l’entreprise pour renforcer leurs capacitésde proposition et de négociation. Cela se fait notamment lorsdes réunions d’instances mais aussi dans la préparation denégociations.La signature d’un nouvel accord d’intéressement permettantde réduire les montants attribués en période de résultats faiblesen contrepartie d’un déplafonnement du maximum enpériode de résultats forts a été l’occasion d’un dialogue positif.

MétalplastikL’encadrement est conforté dans son rôle.Les communications de la direction étaient préparées et diffusées dès la sortie des réunions. L’encadrement a été unvecteur de communication descendante et ascendante.L’encadrement intermédiaire a été sollicité pour envisager lesconséquences des décisions sur l’organisation.Des moyens spécifiques sont donnés aux représentants dessalariés : dépassement des crédits d’heures et mutualisationde ces crédits par organisation syndicale, réunions d’infor-mation du personnel (cinq ou six) d’une demi-heure maxi-mum, payées comme du temps de travail effectif, assistanced’un expert comptable avec des missions clairement définiesdans l’accord.Un calendrier repoussant les délais légaux de un à trois mois.

ThermixUne formation préalable à la discussion devant aboutir à unaccord a été dispensée aux représentants du personnel et àl’encadrement concernant le statut public et le statut privé.Ceci a permis à chacun de mieux comprendre les enjeux duchangement à venir.

TamarLa présence rassurante de tiers compétents (proches desorganisations syndicales, experts mandatés, tribunaux,représentant des services du travail) a rassuré les organisa-tions syndicales locales sur des aspects pointus juridiques,économiques lors de la reprise.

Offrir une place à chaque acteur pour lui permettre de tenir son rôle.Permettre à chacun d’avoir le temps, la formation et les connaissances pour s’approprier les enjeux.Veiller à l’équilibre des parties prenantes au dialogue.

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LES ENSEIGNEMENTS

Une entreprise ne se suffit pas à elle-même.Les différents acteurs sont en relation avec l’environnement, le territoire, éventuellement le groupe, mais aussi avec leurorganisation professionnelle ou syndicale.L’entreprise a une histoire et une image sur le territoire. Le dialogue social s’inscrit dans celle-ci. Il faut permettre à chacun de changer de référence.Les stratégies des collectivités peuvent être aidantes ous’opposer à certaines restructurations car les préoccupationsde maintien de l’emploi sur le court terme sont souvent prédominantes. Les élus pèsent alors indirectement sur le dialogue social.

1. Espace dans lequel l’entreprise entretient des relations régulières

4. LES SOLUTIONS TROUVÉES LORS D’UNE MUTATION PEUVENT ÊTRELES PROBLÈMES DE DEMAINTamarLors de la cession, un accord a été conclu sur les conditionsde travail et d’emploi des salariés. Cet accord a permis deréussir le transfert de l’établissement.Les « successeurs » vont interpréter des règles qu’ils n’ont pasnégociées eux-mêmes et dont l’esprit leur échappe. Il enrésulte une rupture de confiance… S’en suit une assignationde la direction au tribunal.

L’accord de cet établissement n’a pas permis une bonne inté-gration dans le groupe. La spécificité du statut des salariés etdes divergences au sein du comité de direction ont eu poureffet une stagnation de son développement par rapport auxautres établissements.

5. L’ENVIRONNEMENT TERRITORIAL1 EST IMPORTANTTamarL’établissement est depuis longtemps intimement lié à l’his-toire du territoire et impliqué dans les activités sociales locales.Changer de nom, de statut social, de marque emblématiqueet certains produits, c’est changer d’histoire. En faire le deuilsuppose de le vivre et d’associer la « communauté locale » (ycompris les anciens) pour préparer ce passage, puis en célé-brer la réussite collective.

MétalplastikL’entreprise a une place importante dans le bassin, le « lea-der » de la représentation salariée est très présent sur le terri-toire, tout ce qui se passe à l’intérieur de l’entreprise estobservé et médiatisé.Par ailleurs cette entreprise jouit d’une « mauvaise réputationsociale » vis-à-vis du patronat local. Cette porosité interne -externe a influencé la gestion de la restructuration dans deuxdomaines principalement.

Choix du cabinet de reclassement : le cabinet choisi devaitpouvoir reclasser efficacement le personnel licencié enprovenance de l’entreprise n’ayant pas bonne réputation.La participation de l’entreprise à une action de revitalisa-tion du bassin.

ThermixDes influences discrètes mais réelles

Attente forte envers l’État qui « nous abandonne » après un siècle de prise en charge.Vigilance du député-maire à l’égard de l’activité écono-mique principale de sa ville.

Conforter la responsabilité des acteurs pour l’avenir surtoutlorsqu’il y a changement de personnes.Le compromis d’aujourd’hui peut générer des problèmes à venir.Les acteurs doivent prévoir comment ils pourront les dépassersans que l’un des protagonistes soit discrédité.

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L’éthique du tiers intervenant est de reconnaître chacun dans son rôle.Son objectif : permettre à chacun de l’exercer et ainsi aider l’entreprise à passer la mutation dans les meilleures conditions possibles pourles deux parties direction et représentants des salariés.

Une mutation ou une restructuration est un moment d’exception qui permet une reconnaissance mutuelle et une expérience quipeuvent être réinvesties dans les relations au quotidien.La mission du tiers intervenant est de créer les conditions de cet apprentissage :– reconnaissance mutuelle,– confiance,– anticipation,– autonomie.

L’intervenant a trois registres principaux d’intervention– Aide à la construction du sens, travail sur la communication, (l’écoute de l’autre, repérage des enjeux et des attentes, diagnostic

partagé, pédagogie),– Facilitation et garantie du processus : construction de règles communes, de méthode, rappel de la finalité, du respect du cadre fixé,

permettre un îlot de sécurité dans un océan d’incertitudes,– Expertise : permettre aux parties d’aboutir à un résultat contractuel, évaluation, apport sur le contenu.

Les difficultés du tiers intervenant– Accéder au décideur, lorsque la mutation est en confrontation avec le modèle social du groupe et lorsqu’il est l’expert mandaté par les

représentants du personnel,– Permettre que la confrontation aux principes de réalité se traduise par des apprentissages pour l’avenir,– Repérer la capacité d’écoute afin que la présentation des risques d’une situation, d’une décision, d’un accord n’aboutisse pas à des blocages,– S’approprier rapidement l’histoire et des jeux d’acteurs.

6. UN TIERS INTERVENANT FACILITE LE DIALOGUE SOCIAL DANS UNEENTREPRISE EN MUTATIONMétal plastikL’expert auprès des représentants du personnel a tenu plu-sieurs rôles : technicien, pédagogue, descripteur des diffé-rents enjeux de la restructuration. Il aide à formuler despréconisations prenant en compte les enjeux divergents desparties.L’efficacité de l’appui est liée à la confiance qui s’estconstruite avec le temps entre l’expert et ses clients (dans cecas précis le CE) d’une part et l’expert et la direction d’autre part.

ThermixLa médiation juridique exercée par l’intervenant et acceptéepar les deux parties a permis d’identifier les hypothèses possibleset de se positionner sans risque d’erreur.

Lorsque les parties ont, in fine, consulté leurs experts respec-tifs, cela a compliqué les relations et retardé les négociations.

MétalbatL’intervenant n’avait pas le statut de tiers, il est en fait devenuDRH à temps partagé, il n’est pas positionné comme le seraitun consultant intervenant dans une logique paritaire. Par ailleurs il n’est pas au contact direct des salariés.Sa connaissance du contexte repose donc essentiellementsur la présentation des faits par les dirigeants de l’entreprise.Il ne peut servir d’interface entre les différents interlocuteurs.

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TAMARPLACE DU DIALOGUE SOCIAL DANS UNE OPÉRATION DE FUSION-ACQUISITION

1. LES ENTREPRISESRorqual est le groupe acquéreur;Nidel est le groupe mondial ;Tamar est un établissement du groupe Nidel. Nidel cède l’éta-blissement Tamar à Rorqual.

1.1. Rorqual en recherche de développementIl s’agit d’un groupe d’agro-alimentaire de 350 salariés appartenant à un groupe familial de 1 000 collaborateurs.Implantée dans le Sud-Ouest, Rorqual est la filiale leader dugroupe, numéro 2 sur le marché français de produits cuisinésdits « de terroir », avec une forte recherche et développement(R & D) et une bonne implantation dans la grande distribution.

En 2002, la situation économique de Rorqual (perte de 2 %annuel du chiffre d’affaires) l’oblige à rechercher une activitécomplémentaire de façon à diluer ses frais de structure touten offrant une plus grande capacité de production.Cette solution ne pouvant se trouver au sein du groupe,Rorqual entend diversifier sa production en acquérant unproduit leader soutenu par une « marque » lui ouvrant denouvelles marges de manœuvre dans la grande distribution.

Socialement, Rorqual ne se distingue pas d’autres PME. Elleapplique à la lettre la convention collective, sans aller au-delà. Ses instances représentatives du personnel (IRP) sont pré-sentes sur le site logistique et le site de production (CFDT).Les relations se déroulent sans conflit particulier.

1.2. Nidel: un groupe se concentrant sur ses marques «mondialisables»En phase de rationalisation, le groupe agro-alimentaire Nidelentend concentrer son activité sur les produits et marques sus-ceptibles d’être facilement mondialisés.Le groupe décide donc de se désengager de la France et de seséparer dans un premier temps du site Nidel-Tamar qui pos-sède une marque traditionnelle « terroir » représentant 45 % depart de marché national.

Sous une apparente bonne santé économique, en réalité,Nidel-Tamar est sous dépendance du groupe. Si sa part demarché est élevée et constante, les lignes de produits subis-sent une érosion régulière : la perte de rentabilité par le jeucroissant des « marges arrières » de la grande distributionreprésente 20 % du chiffre d’affaires en 10 ans.

Par ailleurs Tamar est une usine en bout de cycle, avec descoûts de main d’œuvre élevés. Pour autant, le groupe ne four-nit aucun indicateur sur la rentabilité du site.

Socialement, Tamar se caractérise par :– une forte politique sociale issue de l’histoire et renforcée

par la logique de groupe (par ex. : récents accords d’intéres-sement et de participation calculés en fonction des résul-tats groupe et non site),

– une politique sociale ancrée localement (l’entreprise est leprincipal employeur, ses œuvres sociales rythment la vielocale : clubs sportifs, villages vacances, etc.),

– des IRP peu expérimentées à la négociation sociale, celle-cise réalise au niveau national (les IRP groupe ont une forteinfluence sur celles du site : CGT-FO, CFDT, CGC-CFE),

– l’âge moyen des salariés est de 50 ans avec une anciennetémoyenne de 25 ans.

Tamar est un site économiquement et socialement soustutelle du groupe, sans que ses acteurs en aient pleinementconscience. L’écart entre les politiques sociales des entre-prises du groupe est en revanche bien repéré par l’ensembledes acteurs.

2. LA MUTATIONL’objectif est pour le groupe Nidel de céder le site de Tamar.Une précédente cession s’est mal gérée (avec au final deslicenciements ayant provoqué une action des IRP de Nidel),Il s’agit pour le groupe d’engager une démarche allant bienau-delà de la simple réussite financière. Il faut trouver unacquéreur qui réponde à trois priorités :– reprendre l’ensemble du personnel,– développer un projet industriel solide et durable,– réussir la migration de la marque par un plan marketing de

qualité.

Par rapport à cette mutation, les acteurs sociaux ont des positions différentes.

La direction du groupe Nidel adopte la stratégie suivante :donner les moyens humains et financiers pour que la ces-sion se déroule sans dommage et laisser l’encadrement sursite pour accompagner la cession et assurer les transitions(système d’information et base logistique).

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LES MONOGRAPHIES

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De plus, elle accorde des facilités de trésorerie à Rorqual.

Les IRP du groupe Nidel (CCE et DS centraux) s’opposent àtoute nouvelle cession du groupe en France.

Les IRP de Tamar ont peur d’un nouveau dépeçage et d’une dégradation de leurs statuts sociaux. Manquant d’expérience et de compétence de négociation, ils centrentleurs objectifs sur le maintien des acquis des salariés enplace, sans se préoccuper d’éventuels nouveaux salariésaprès la cession.

Les cadres de Tamar sont pleinement engagés dans la muta-tion, sachant qu’ils pourront faire le choix de rester dans legroupe Nidel ou d’entrer dans l’entreprise Rorqual.

La direction de Rorqual considère l’acquisition comme uneopportunité. Elle est prête à préserver les différences destatuts entre les deux sociétés. Et ce d’autant plus que lecoût de la migration de la marque (15 M d’euros) pris encharge par Nidel.

Les IRP de Rorqual sont favorables au projet qui leur sembleêtre le garant de la stabilité du groupe et offrir des amélio-rations potentielles de statuts.

3. L’ACTION CONDUITELa dimension sociale de la fusion-acquisition est pleinementprise en considération. Pourtant cette prise en compte neréduira pas la méfiance des IRP de Tamar. Ainsi, en parallèledes actions techniques, deux initiatives sont prises.

L’adaptation des accords sociaux avec la signature préalabled’un accord de méthode.L’accompagnement du changement sur la migration de la marque (passage de la marque Nidel à Rorqual).

Se joue dans ce passage, la création d’une nouvelle cultured’entreprise, d’un nouveau contrat social portés par l’évolu-tion des modes de management.

L’action est conduite en trois phases avec plus ou moinsd’aléas.

Phase 1–Préparation de la cession (un an)L’annonce de la cession est faite aux salariés avec la présen-tation du projet industriel.Des rencontres sont organisées avec la direction de Rorqualqui s’engage à reprendre tous les salariés.Un droit d’alerte est lancé par les IRP de Tamar sous l’in-fluence des IRP centraux, toujours en litige avec la directiondu groupe à propos de deux autres cessions problématiques.La direction de Rorqual fait alors pression pour signer unaccord CATS, qui ne réduit pas la méfiance des salariés (il faudra six mois de procédure pour signer l’accord).

Phase 2 – Conduite des négociations statutaires (six mois)Un accord de méthode est trouvé, mais non signé. Il estnéanmoins appliqué et prévoit trois types d’actions.1. Des négociations par étapes.2. La validation de chaque compromis avant le passage à

l’étape suivante.3. Le bouclage de l’accord final au vue de l’ensemble des

résultats de la négociation.Les étapes sont au nombre de sept. Elles permettent de traiterle temps de travail et son aménagement, les rémunérations, laprotection sociale, les congés, l’épargne salariale, les retraites,les actions sociales et culturelles. L’ensemble est bouclé enneuf semaines. Le principe retenu est la préservation inté-grale des acquis Nidel pour les « anciens » et l’application desstatuts de Rorqual aux nouveaux embauchés.

Phase 3 – Gestion du changementVoyant la rapidité de l’accord, la direction de Rorqual décidede ne pas lancer la totalité du plan « gestion du changement »qui prévoyait l’association du personnel sous l’égide de l’en-cadrement Nidel.Une information régulière des changements est mise en place.La confiance qui avait commencé à s’instaurer est alorsremise en question, y compris au sein même de la direction.L’encadrement de Nidel décide de quitter le site de Tamar. Une nouvelle équipe (directeur général et directeur des res-sources humaines) est instaurée. Dès lors les relations sociales du site se dégradent (assigna-tion au tribunal du directeur de Rorqual par les IRP de Tamar).

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TAMARPLACE DU DIALOGUE SOCIAL DANS UNE OPÉRATION DE FUSION-ACQUISITION

4. LES RÉSULTATS4.1. Les résultats économiquesLa fusion-acquisition est une réussite économique.

Le retour à l’équilibre de Tamar se fait au bout de deux ans(contre trois prévus).Le coût global de la migration de la marque est limité à 12 Meuros.Les frais de siège sont divisés par trois.La reprise bénéfique des ventes MDD (Marques Distributeurs)maintient les volumes d’affaires du site, malgré le changementde marque.La masse salariale après départs (CATS) est baissée de 1,6 Meuros.

4.2. Les résultats « sociaux »Le projet de créer un nouveau contrat social autour d’unnouveau nom, de nouveaux statuts sociaux, de nouvellesrelations sociales plus transparentes, d’un style de manage-ment plus proche s’arrête de lui-même… sans pour autantaffecter les résultats de l’entreprise !

Un groupe hybride à plusieurs niveaux.Des salariés Rorqual et de nouveaux salariés Rorqual -Tamar appliquant la stricte convention collective.Des anciens issus du groupe Nidel bénéficiant d’avantagesincompris par les nouveaux salariés.Un développement de l’emploi déséquilibré : création devingt emplois pour Rorqual en trois ans et réduction d’ef-fectifs pour Rorqual - Tamar (soixante emplois dus au CATS,turn-over accru, départs négociés). Cet écart montre que lessites ont différemment bénéficié des bons résultats écono-miques du groupe.

4.3. Le dialogue social comme vecteur et résultat de la mutationLa faible qualité du dialogue social ne semble pas avoir jouésur la réussite économique de la fusion-acquisition.

Elle semble avoir eu des impacts en terme d’emploi et derelations sociales sur le seul site cédé (Tamar).

Cette expérience tend à montrer l’importance des compé-tences de dialogue social et de concertation et négociation àdétenir de la part des instances représentatives du personnel,de façon générale et surtout en cas de mutation économique.C’est à cette condition qu’ils pourront être reconnus commedes acteurs à part entière par la direction, afin qu’ils puissentjouer leur rôle de contre-pouvoir et de proposition.

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MÉTALPLASTIKREPRISE AVEC PLAN DE RESTRUCTURATION, LE DEUXIÈME EN TROIS ANS

1. L’ENTREPRISE1.1. Carte d’identitéCette entreprise conçoit, fabrique et commercialise despresses à injecter pour la plasturgie. Elle a plus d’un demi-siècle d’existence. Métalplastik est la dernière entreprisefrançaise du secteur.Elle appartenait à un groupe allemand dont le principalactionnaire était un fond de pension américain.Depuis un peu plus d’un an, elle a été reprise par le dirigeantet n’est donc plus filiale d’aucun groupe.Métalplastik relève de la convention collective de la métallurgie.Elle compte environ 180 salariés.La situation économique de la société est tendue. En effet,depuis plusieurs années le marché de la presse s’effondre enFrance. De plus la concurrence chinoise est beaucoup plusforte que prévue, tirant les prix vers le bas.Métalplastik réussit à tirer son épingle du jeu avec une stratégied’innovation et de développement de l’exportation.

1.2. Les acteurs en présenceLe comité d’entreprise et organisations syndicalesMajorité nette de la CGT au comité d’entreprise. Le secré-taire du CE est aussi délégué syndical CGT. Il est secrétairede l’union locale d’Oyonnax.La CFE CGC a un délégué syndical. FO existe dans l’entreprise, mais n’est plus du tout active.Les élus sont matures et très professionnels. Ils ont unebonne connaissance technique des dossiers. Il faut égale-ment noter la très forte implication de la CGT au niveaulocal sur les problématiques de revitalisation de la filièreplasturgie.

La directionLa directrice des ressources humaines est en fonctiondepuis quatre ans. Elle est la personne « référente » suiteaux départs successifs et rapprochés des directeurs géné-raux (quatre DG en quatre ans !). Elle est ouverte au dia-logue social.

Le directeur général nouvellement arrivé vient de la filièreUS du groupe qu’il vient de restructurer. Il a la confiance dugroupe. C’est un pragmatique connaissant bien le métier del’entreprise. Il a été formé à « l’américaine » et a baigné dansdes relations sociales à « l’allemande » (culture de négociation).

L’encadrement est une équipe très diversifiée en terme de« qualité » et d’implication vis-à-vis de la direction générale.Certains cadres « maison » sont en conflit larvé permanentvis-à-vis de certains représentants des salariés.

1.3. Historique du dialogue socialReprésentants des salariés et direction sont habitués à dialo-guer. Avant 2002, les relations sociales étaient avant toutbasées sur la confrontation, voire le conflit.Lors d’une première intervention dans le cadre d’un plan derestructuration, il existait une défiance réciproque forte entreles organisations syndicales, les IRP et la direction.Au fur et à mesure du déroulement de l’intervention, les par-tenaires sociaux ont compris qu’une « sortie par le haut »nécessitait un minimum de confiance. Cette confiance s’estconcrétisée par :

L’acceptation par la direction de retravailler le projet d’or-ganisation qui devait être mis en place à l’issue de larestructuration avec un comité restreint de cinq représen-tants des salariés : balayage complet de l’organisationactuelle, du projet d’organisation future et du passage del’un à l’autre. Les représentants des salariés ont pu fairemodifier certains aspects de l’organisation initialementprévue et sauvegarder quelques postes.L’acceptation par la direction de travailler avec le comitérestreint de représentants des salariés sur les mutationsinternes, les dispositifs d’accompagnement et leur amélio-ration.L’acceptation par les représentants des salariés du respectde la plus stricte confidentialité en externe comme eninterne sur l’ensemble des sujets traités.

Le résultat de ce dialogue social renoué et de ce début deconfiance réciproque ont permis que cette procédure derestructuration se déroule dans de bonnes conditions et sanslicenciement sec.

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MÉTALPLASTIKREPRISE AVEC PLAN DE RESTRUCTURATION, LE DEUXIÈME EN TROIS ANS

2. LA MUTATIONLa situation économique difficile de Métalplastik nécessiteune restructuration.En effet :– le marché français décroît plus vite que prévu,– la concurrence étrangère est beaucoup plus agressive,– les résultats de l’entreprise sont négatifs et en forte dégra-

dation depuis plusieurs années.

Le principal objectif de la direction à travers la restructura-tion de la société est d’abaisser le « point mort ». Cela passepar une stratégie défensive de la société (maintien du chiffred’affaires) et par le recentrage sur les activités à plus fortevaleur ajoutée.La restructuration envisagée entraîne la suppression de qua-rante six postes.

2.1. La demande expriméeLe comité d’entreprise fait appel à un intervenant dans lecadre de ses prérogatives prévues par le code du travail en casde restructuration. La mission confiée à l’expert consiste en un accompagne-ment sur les aspects économiques et sociaux de la restructu-ration à travers des actions d’audit, de conseil etd’accompagnement à la négociation.La mission a consisté en un accompagnement au long coursdurant l’ensemble du processus «d’information-consultation»du CE. Les différents acteurs souhaitaient une interventiondu type de celle menée en 2002-2003 lors de la précédenterestructuration.

2.2. Les acteurs et leur positionnementLe comité d’entreprise et les organisations syndicales

Minimiser l’impact social.Préserver l’avenir de l’entreprise à travers de nouveaux produits.Préserver l’emploi dans le bassin.

La directionRedresser la situation financière préoccupante de l’entre-prise au plus vite.Être compris par les salariés.Éviter toute communication négative à l’extérieure du site.Restructurer au moindre coût.

Les salariésSont plutôt fatalistes et inquiets pour l’avenir du site.

La DDTEFPConnaît le site. Elle est présente, mais ne prend pas position.

Le patronat localVoit Métalplastik comme une entreprise tenue par la CGToù le climat social est très mauvais.Demande à la direction de Métalplastik de s’investir localement.

3. L’ACTION CONDUITEL’action a été menée en deux phases distinctes encadrées parun accord de méthode.

3.1. La négociation de l’accord de méthodeDès la réunion d’ouverture de la procédure d’information -consultation relative à la restructuration, la négociation d’unaccord de méthode est proposée par la direction.Cette négociation s’est déroulée sur deux semaines.

L’accord de méthode a pour objectif de :Fixer les modalités d’information et de consultation ducomité d’entreprise dans le cadre du projet de réorganisation.D éterminer les moyens supplémentaires accordés auxreprésentants du personnel durant le déroulement de laprocédure d’information-consultation relative au projet deréorganisation de Métalplastik.

À l’issue de quatre séances de négociation, les partenairessociaux ont signé un accord de méthode dont les points prin-cipaux sont les suivants :

La création d’un groupe de travail ad hoc composé des délé-gués syndicaux et de trois membres du comité d’entreprise.Son objectif principal est d’échanger et de débattre sur leprojet présenté. La direction s’engage à fournir toutes lesinformations et à donner une réponse aux questionsentrant dans les attributions légales du comité d’entreprise.Les sujets abordés porteront principalement sur l’organisation et les mesures sociales d’accompagnement.L’aspect stratégique et économique fera l’objet d'un rapportde l’expert.

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La direction s’engage à étudier les propositions alternativesdu comité d’entreprise et à s’efforcer de les prendre enconsidération dans la mesure où elles assurent la pérennitéde l'entreprise et qu'elles réduisent le nombre de suppres-sions de postes. Dans ce sens, la direction s'engage à apporter une réponsemotivée et argumentée aux partenaires sociaux.Un calendrier repoussant les délais légaux de un à trois mois.Des moyens spécifiques pour les représentants des salariéstels que le dépassement des crédits d’heures et la mutuali-sation de ces crédits par l’organisation syndicale, les réu-nions d’information du personnel (cinq ou six) d’unedemi-heure maximum, payées comme du temps de travaileffectif, l’assistance d’un expert-comptable avec des missionsclairement définies dans l’accord.Le choix commun du cabinet en charge du reclassementdes salariés licenciés.Un engagement à rechercher un consensus et un règlementamiable de tout litige avec l’aide des services du travail sibesoin.

3.2. La mise en œuvre de l’accord de méthodeLa signature de cet accord de méthode a eu pour consé-quence de faire du groupe de travail ad hoc le pilier du dialogue social pendant toute la durée du processus d’infor-mation - consultation relatif à la restructuration.

Différentes modalités de dialogue social ont été mises enœuvre :

Co-construction avec l’élaboration du cahier des charges ducabinet de reclassement et des critères de choix de ce cabinet.Co-décision sur le choix du cabinet.Proposition des élus puis contre-proposition de la directionconcernant une action de revitalisation du bassin d’emploi.Propositions de la direction puis contre-proposition desreprésentants des salariés concernant l’ensemble desmesures du plan de sauvetage de l’emploi.

Même si ces modalités ont été mises en œuvre exclusivemententre représentants des salariés, organisations syndicales etdirection, les salariés de l’entreprise ont eu un rôle primor-dial en tant que régulateur du dialogue entre les représen-tants de salariés et la direction :

Les communications de la direction étaient préparées et diffu-sées dès la sortie des réunions. L’encadrement était mobilisécomme vecteur de communication descendante et ascen-dante.Des assemblées générales du personnel ont été organiséesrégulièrement par les représentants des salariés, dont le rôle estd’informer, de consulter et d’être mandatés.

Cet acteur « salariés de l’entreprise » a ainsi pesé directementsur le contenu des différentes négociations menées.

4. LES RÉSULTATS4.1. Pour les représentants des salariés

Des informations claires sur la situation de l’entreprise.Une stratégie définie pour l’entreprise.Trois postes sauvegardés.Un apprentissage du nouveau directeur général commenégociateur.Un engagement à une revitalisation du bassin.

4.2. Pour la directionUn budget tenu.Pas de grève.Un apprentissage accéléré des relations sociales à la Françaisepour le directeur général.

4.3. Pour tousL’action du cabinet de reclassement probablement facilitéepar un choix commun engageant les deux parties.Un plan de sauvegarde de l’emploi de bonne facture.

4.4. Impacts des processus mis en œuvre sur le dialogue socialLe dialogue social dans le cadre de cette restructuration a étéconstructif et de très bonne qualité. En effet, direction et représentants de salariés ont échangésur le fond à propos des enjeux de stratégie de l’entreprise,d’organisation, de nouveaux produits, d’aspects financiers, àtravers d’une part un jeu de questions-réponses et d’autrepart un mécanisme de propositions et contre-propositions.L’intervenant a eu un double rôle d’une part de pédagogueexpert et d’autre part de médiateur dans la relation sociale.

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1. L’ENTREPRISE ET SON CONTEXTE1.1. Présentation de l’entrepriseCet établissement de santé est une entreprise emblématiquede sa ville dont elle conditionne l’activité commerciale. Endépit des évolutions, son statut d’établissement public estresté inchangé jusqu’en 2002 bien qu’il soit inadapté à sonactivité.

L’effectif est de 250 fonctionnaires titulaires et de 280 agentscontractuels recrutés à l’année ou à la saison.L’activité est saisonnière et l’on constate une baisse de la fré-quentation régulière.

Elle résulte de causes exogènes qui tiennent notamment à lapolitique de la sécurité sociale visant la maîtrise desdépenses de santé. Les facteurs internes résultent d’une partde la faiblesse de l’action commerciale et d’autre part de l’im-pact négatif de la fermeture de l’établissement survenue audébut des années 1990 suite au développement de bactériesdifficiles à éradiquer.

1.2. Le management et les relations socialesDepuis l’origine et jusqu’en janvier 2004, l’établissementdépend du Ministère de la santé (les salariés sont soit fonc-tionnaires, soit contractuels de la fonction publique) et ledirecteur est nommé par le Ministre.

Les règles statutaires sont déterminées par décret et la comptabi-lité ressort du budget de l’État, qui éponge les éventuels déficits.

Les acteurs de l’établissement ont une très faible autonomie.Ils règlent les questions sociales dans un cadre réglementairestrict lors de réunions de la commission administrative pari-taire locale (CAPL), du Comité technique d’établissement(CTE) et du Comité d’hygiène et de sécurité (CHSCT).

Les partenaires sociaux ne négocient pas.

1.3. Les acteurs sociaux en 2004Le directeur général fait partie du corps des directeurs d’hôpitaux,il a une expérience dans le public et dans le privé. Il a éténommé pour réaliser le changement de statut.Les deux syndicats présents sont la CGT et FO. Leurs leaders

respectifs ont des engagements syndicaux extérieurs, l’undans la branche et l’autre au niveau interprofessionnel.

Le personnel est très syndiqué et souvent mobilisé par desmouvements de grève. La représentation du personnel orga-nisée selon les règles de la fonction publique et les électionsprofessionnelles locales donnent un léger avantage à la CGT.

L’hostilité des deux syndicats à toute forme de privatisation ajusqu’à présent eu pour effet de bloquer toute réforme.

2. LA MUTATION2.1. Type de mutation en coursIl s’agit d’une privatisation entraînant une modification dustatut du personnel dans un contexte de difficultés finan-cières. Le passage d’un établissement public administratif àun établissement privé à caractère commercial est imposépar la loi.

Cette décision entraîne dans un premier temps trois change-ments majeurs : le passage à une comptabilité privée, la miseen place d’institutions représentatives du personnel et lechangement de statut de la moitié de l’effectif. Nous nouspencherons sur ces deux dernières questions.Le changement de statut concerne tous les agents contrac-tuels de droit public qui au moment du renouvellement deleur contrat vont être réembauchés sous contrat de droitprivé. Quant aux fonctionnaires titulaires, ils peuvent opterpour un statut privé ou le maintien de leur situation.

Les difficultés budgétaires conduisent la direction à réaliserce changement en prenant des mesures restrictives : limita-tion du recours aux saisonniers, réembauche le plus tard pos-sible, modulation des horaires…En outre la méconnaissance des règles du code du travail parla direction peut conduire à des erreurs ponctuelles surdiverses questions comme les coefficients applicables, lesheures supplémentaires, le travail du dimanche, les congés, etc.

THERMIXUNE PRIVATISATION

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2.2. La demande expriméeLe nouveau directeur général décide, sans attendre le décretd’application, de mettre en œuvre le nouveau statut à comp-ter du 1er janvier 2004 et ainsi mettre fin à une période d’in-certitude qui a trop duré.

La première demande de la direction à un consultant est trèsjuridique. Il s’agit de se conformer à des textes réglemen-taires. Un premier intervenant a proposé d’élaborer d’abordun projet d’établissement puis de traiter par la suite la ges-tion des ressources humaines adéquate à ce projet.

Sollicité par la direction, le consultant propose de traiter parle dialogue les questions concrètes qui préoccupent le per-sonnel, sans attendre la finalisation du projet d’établisse-ment.

2.3. Le positionnement des acteursCette privatisation peut entraîner des réactions du personnelet des syndicats CGT et FO qui, dans le passé, ont fortementmobilisé le personnel. Le risque de grève et de paralysie del’activité est grand.

Le changement de statut dès janvier 2004 prend les syndicatsau dépourvu. Mais à défaut de stratégie alternative, ils se sai-sissent de toutes les difficultés de mise en œuvre de laréforme, à travers une défense individuelle des salariés qui sesentent lésés. La situation est idéale pour qui veut constituerun front des mécontentements. Mais les responsables syndi-caux ont dû s’interroger sur les graves conséquences pourl’avenir de l’entreprise d’une stratégie de refus.

De son côté, le directeur général sait que son prédécesseur adû démissionner à cause des actions syndicales. Il a besoinde temps pour constituer au fil des mois une équipe de direc-tion en remplaçant les fonctionnaires mutés par des cadresde droit privé. Le secrétaire général est remplacé par undirecteur administratif et financier. Un directeur commercialest nommé pour valoriser l’image de l’établissement auprèsde la clientèle.

Par contre la culture de l’hôpital public reste très présente à ladirection des soins infirmiers et dans le service de gestion des

ressources humaines et ce encore en 2006.L’équipe de direction est profondément divisée et traverséepar une méfiance réciproque entre les nouveaux et les anciens.

3. L’ACTION CONDUITE3.1. La méthodeConsidérant que la réussite de la mutation dépend de l’adhé-sion des salariés et de leurs représentants, le consultant pro-pose de mettre le dialogue social au centre de la réflexion afinde construire avec les syndicats la mise en place du change-ment de statut.Le directeur général voulait passer en force et appliquer la loiau 1er janvier 2004, mais il craignait un conflit social.

Le consultant a pu le convaincre, en faisant appel à son senspolitique et grâce à l’appui de son secrétaire général (pour-tant sur le départ) d’engager très tôt le dialogue.

3.2. Le processus de dialogueLa mission comporte plusieurs volets complémentaires :conseil de direction en ingénierie sociale, expertise en droitdu travail et facilitation des relations sociales.Elle se déroule selon deux grandes phases autour de la négo-ciation de deux accords d’entreprise.

Phase 1 – Mise en place du dialogue social (janvier à avril 2004)Le directeur général annonce aux délégués qu’il leur proposede négocier la conduite du processus de changement de statutdu personnel et qu’il attend leurs propositions. Il précise queles décisions qu’il doit prendre au quotidien sont provisoireset seront revues dans le cadre des négociations.Pour préparer cette première négociation, le consultant dis-pense une formation concernant les règles de base du droitdu travail et de GRH du personnel de droit privé, à l’encadre-ment puis aux représentants du personnel qui y participent tous.La première phase de négociation se conclura par un accordde méthode signé par les deux syndicats en avril 2004.

L’accord prend acte de principes forts comme: – « leur volonté partagée de régler par la négociation les inci-

dences sociales du changement de statut de l’établisse-ment »,

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– « la recherche de solutions évitant les conflits sociaux etfacilitant la discussion avant la saisine d’instances adminis-tratives ou judiciaires ».

Les représentants syndicaux de statut public sont reconnuslégitimes pour négocier le statut de leurs collègues de droitprivé.

Cet accord précise la composition des délégations pour lanégociation à venir, l’architecture du cadre social à négocier,les thèmes et le calendrier de négociation, ainsi que lesmoyens alloués et les modalités d’information du personnel.Sur ce dernier point, une communication régulière est pré-vue « sur des bases concertées pour éviter des divergencesd’interprétation et des malentendus ».

L’accord est conclu à l’issue de trois séances de négociation,signé et diffusé au personnel.

Phase 2 – La négociation d’une convention d’entrepriseLa coexistence d’agents publics et de salariés de droit privérend la situation complexe. Néanmoins, le statut des fonc-tionnaires reste une référence fort éloignée de dispositionsde la convention collective de branche.

L’enjeu de la négociation est de trouver un compromisacceptable entre les deux, sans pénaliser les finances fragilesde l’établissement.Les négociations se déroulent pendant un an au rythme de deuxréunions par mois dans la mesure du possible. Les questionssuivantes sont réglées dans l’accord signé en septembre 2005:1. Définition et classification des emplois,2. Régime de prévoyance,3. Congés payés et autorisations d’absence,4. Durée du travail,5. Rémunérations,6. Droit syndical et représentation du personnel.

3.3. Évolution des relations des acteursLe processus de négociation s’est vite transformé enconduite de projet participative.Les réunions sont très structurées et bien préparées. Chaquequestion fait l’objet de longues explications et les alternatives

sont posées clairement. Chaque point fait l’objet d’un accordinformel avant d’aborder le point suivant.Les anciens antagonismes qui ont pu exister entre la direc-tion et certains délégués, mais aussi entre les deux syndicats,se sont estompés derrière la volonté d’aboutir.

La fin de négociation a été plus difficile pour trois raisonsessentielles :

Un nouveau syndicat est apparu, l’UNSA, porté par la caté-gorie des administratifs. L’UNSA a paraphé le texte qu’iln’avait pas négocié après avoir soulevé diverses objections.L’opposition des syndicats CGT et FO a porté sur la repré-sentativité de l’UNSA, que le Tribunal d’instance a reconnue.Les revendications syndicales sur le terrain des rémunérations.La consultation de l’avocat de la CGT soulevant des questionsde pure forme juridique, décalées par rapport aux questionsde fond.

La CGT a joué un rôle d’entraînement, consultant le person-nel et acceptant de signer au vue des avancées. Elle serarécompensée lors des élections du personnel qui lui donne-ront une large majorité au CE. Le syndicat FO subira unéchec et sera distancé par l’UNSA.

4. LES RÉSULTATS4.1. Au regard des objectifsLe choix du dialogue social allié à l’habileté du directeurgénéral ont permis de régler les questions qui préoccupaientle personnel et ce sans conflit.Le fait que, dès les premiers temps, les deux syndicats aientsigné l’accord de méthode a eu une portée considérable auprèsdu personnel. Les syndicats sont passés du statut d’opposants(opposant systématique pour la CGT et opposant ponctuelpour FO) à une posture d’adhésion. L’expérience et l’ouverturedu délégué syndical CGT ont été précieuses, en opposition àcertains de ses collègues plus radicaux.

Face aux difficultés, une logique de résolution de problème aremplacé une attitude de revendication.

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Le temps qui s’est écoulé, soit dix-huit mois, peut semblerlong, mais il était nécessaire au vu du changement de cultureque la mutation entraînait.La confiance créée pendant ces temps de négociation a permisà la direction de préparer sereinement diverses réorganisa-tions. Parmi les décisions à effet immédiat, le développement d’unenouvelle activité pour une clientèle différente aurait puentraîner des réactions négatives du fait des contraintesd’horaires pour le personnel. Il n’en fut rien, et la question futréglée lors des séances de négociation.

4.2. Au regard du processusLa réussite des deux premières négociations conclues par unaccord de méthode et une convention d’entreprise constitueun acte fondateur fort pour le dialogue social.

Le fait que tous les syndicats présents (deux puis trois) aientsigné les deux accords permet une défense unanime des réa-lisations communes. L’expérience montre en effet qu’un syn-dicat non signataire a souvent la tentation d’attiser lesmécontentements.

Par ailleurs, le comité d’entreprise et la délégation du person-nel se sont mobilisés sur de bonnes bases.

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1. L’ENTREPRISECréée en 1960, Métalbat est une entreprise de travaux publicsqui a connu une forte progression après son rachat en 1996par un groupe d’investisseurs (croissance régulière du chiffred’affaires de 40 % par an entre 1996 et 2001).

En 2004, date de la mutation traitée ici, l’entreprise compte200 salariés.

La culture de l’entreprise est fortement marquée par unmanagement directif et paternaliste, peu sensible au dia-logue social. Si les structures formelles existent (CE, CHSCT,délégués syndicaux – CGT, CFDT, CGC, UNSA), les relationssont marquées par l’inexpérience des acteurs.

La direction ne s’engage pas au-delà de la stricte légalité.Les acteurs syndicaux sont peu formés aux pratiques denégociation.L’encadrement (qui reste technique, peu autonome, et sansréelle pratique managériale) ne reconnaît pas les représen-tants des salariés comme des acteurs à part entière. Il estpeu sensible au respect des consignes et des normes,notamment en matière de sécurité.

Ce mode de relations trouve ses limites dans plusieurs situations:La difficulté à s’adapter aux nouveaux modes d’organisa-tion et de relations qu’implique la création d’une nouvelleunité de fabrication en 1996. Les conséquences sont deschangements fréquents de responsables, des problèmes dequalité et de productivité.L’incapacité de réduire des taux très forts d’accidents dutravail et d’absentéisme.La lisibilité insuffisante de la stratégie provoquant le départd’ingénieurs aux compétences clés avec des impacts sur laperformance.Enfin, la mise en place d’une réduction du temps de travailqui donne lieu à un conflit long, dégradant le climat socialet marquant les relations sociales pour les années à venir.

L’arrivée en 1996 d’un délégué syndical affichant, aux yeux dela direction, des objectifs « révolutionnaires » modifie profon-dément la gestion paternaliste et directive du dialogue social.

2. LA MUTATIONEn 2004, la situation économique de l’entreprise engage lesactionnaires à se retirer. Le dirigeant en place prend saretraite.

L’entreprise est rachetée par un nouveau dirigeant originairede la région et connaissant bien l’entreprise. Sa culturemanagériale est marquée par une expérience de vingt ansdans un groupe international. C’est un dirigeant dévelop-peur qui trouve du plaisir et sa véritable raison d’être dans lamise en œuvre de nouveaux projets. Ses valeurs affirméessont :– le développement de l’entreprise est un facteur de motivation

et fidélisation des salariés,– le facteur humain est un avantage concurrentiel fort, dans

un secteur sous-managé.

Néanmoins, la situation de l’entreprise est plus dégradée queprévue. La direction a le choix entre un plan social et une sortie« par le haut », s’appuyant sur un plan d’investissement avecréorganisation de la production et ajustement des compétences.

C’est ce second scénario qui est choisi. Pour le dirigeant, la condition de réussite de ce nouveau projet réside dans la mobilisation de l’ensemble du personnel. Deux acteurssont particulièrement ciblés comme des vecteurs essentielsde la mutation: les représentants du personnel et l’encadrementintermédiaire.

L’implication de ces deux acteurs suppose une modificationdes relations sociales et des pratiques de dialogue tellesqu’elles existaient jusqu’à présent.

Au fur et à mesure que le projet avance, la direction va prendreconscience de l’inexpérience de l’entreprise en matière dedialogue social et de la nécessité de professionnaliser l’ensembledes acteurs (dirigeant, encadrement, représentants du personnel)sur cette question pour assurer le changement voulu.

MÉTALBATÉVOLUTION DES RELATIONS SOCIALES À L’OCCASION D’UNE REPRISE DANS UN CONTEXTE ÉCONOMIQUE ET SOCIAL PRÉCAIRE

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3. L’ACTION CONDUITE3.1. Un plan de développement en trois axes

Évolution de l’organisation managériale : le directoire (troispersonnes) est remplacé par un comité de direction asso-ciant les dix directeurs de services ; la politique commer-ciale est modifiée ; une direction des ressources humainesest créée ; l’encadrement de proximité est renforcé, son rôleen matière de sécurité est réaffirmé.

Réorganisation de la production : une fonction « achat » estcréée ; les processus de production sont remis à plat,notamment la politique qualité de l’entreprise.

Mise en œuvre d’une politique emploi-formation novatrice :une action de GPEC est lancée; des embauches d’encadre-ment de proximité sont réalisées (doublement des effectifs) ;un plan de formation du personnel est engagé.

3.2. Une méthode privilégiant communication et conduite dechangement participatifLe plan de développement est conduit en deux ans. Pour lemettre en oeuvre, le dirigeant s’appuie sur un consultant quiassure les fonctions de DRH à temps partiel et le conseille surla gestion du changement. Un coaching étroit est réalisé qui permettra au dirigeant dereconsidérer certains éléments de son mode de managementet de sa vision des IRP.

Le plan est annoncé et une communication régulière estassurée par le dirigeant auprès de l’ensemble des acteurs. En amont, le dirigeant veille à informer les représentants dupersonnel et à affirmer l’importance de leur rôle. Par la suite, les relations avec eux seront quotidiennementassurées par le nouveau directeur des affaires financières,aidé du DRH/consultant. Néanmoins, le dirigeant conserve des relations régulières,soit de façon informelle, soit de façon formelle à travers lesdifférentes instances auxquelles il participe. Ces relationsviennent compléter les actions qu’il conduit régulièrementauprès de l’ensemble du personnel (visites d’ateliers, réunionannuelle, etc.).

La conduite de changement associe l’ensemble des acteurs.Le management : des séminaires de direction, des journéesde l’encadrement sont organisés lui permettant de mieuxs’approprier la stratégie de l’entreprise.

Les salariés : des groupes de travail sont créés ; de nouveauxoutils de management sont mis en place, permettant unmeilleur soutien aux opérateurs (réunions de services,entretiens annuels, etc.).

Les représentants du personnel sont de plus en plus reconnuscomme des acteurs importants : ils sont associés auxgroupes de travail, notamment sur les parcours profession-nels et le développement des compétences. Des actionssont conduites pour renforcer leur capacité à comprendre lesenjeux et les grandes données économiques de l’entreprise etrenforcer ainsi leurs capacités de proposition et de négociation.

Pour autant, la conduite du changement a négligé l’importancedes rapports entre encadrement et représentants du personnel.La faible expérience de dialogue social de l’entreprise, les consé-quences du conflit lié aux 35 heures, le cloisonnement tradi-tionnel entre ces deux types d’acteurs les ont engagés dansune rivalité contre-productive. Se considérant comme porteursd’enjeux opposés (la défense d’intérêts catégoriels aux yeuxdes uns, la promotion d’enjeux purement productivistes auxyeux des autres), aucune synergie respectueuse des missionsde chacun n’était recherchée, ni favorisée (au moins dans unpremier temps).

4. LES RÉSULTATS4.1. Les résultats économiquesCette stratégie s’est traduite par une progression de 40 % duchiffre d’affaires en 2005 sur un marché étal, un rétablisse-ment de la rentabilité et une forte progression de la qualité defonctionnement de l’organisation.

Cette évolution positive s’est prolongée en 2006. Une nou-velle progression importante devrait être réalisée en 2007.

Page 23: MUTATIONS ET DIALOGUE SOCIAL - Anact...Dans un contexte de mutation, la compétence des représentants du personnel est fondamentale d’où la nécéssité de: Associer les représentants

4.2. Les résultats « sociaux »Les taux d’accident a chuté de façon importante et le turn-over des ingénieurs et des techniciens a disparu.Le taux de participation aux élections du personnel a forte-ment progressé dans les ateliers probablement en raison duremplacement du vote par correspondance par un vote sur lelieu de travail avec une volonté de la direction d’avoir un tauximportant de votants.

4.3. Le dialogue social comme vecteur et résultat de la mutationLe constat est fait par l’ensemble des acteurs d’une améliorationperceptible du dialogue social, avec des effets significatifs sur laqualité et la productivité.

Les évolutions sont surtout perceptibles dans la qualité desrelations entre les représentants de la direction et les repré-sentants du personnel.

Ce progrès a permis la signature d’un nouvel accord d’inté-ressement « gagnant-gagnant » qui permet de réduire lesmontants versés lorsque les résultats sont modestes et de lesaugmenter fortement lorsqu’ils sont importants.

Un enjeu futur sera de transformer les représentants du per-sonnel au CHSCT en partenaires de la Direction pour la miseen place d’une politique de réduction des risques.

Un apprentissage a été réalisé par l’ensemble des acteurs.Aujourd’hui, le dialogue social est marqué par plusieurscaractéristiques.

Pour le dirigeant : la qualité du dialogue est la conditiond’un changement efficace. Il tient à assurer et à faire assurerune bonne qualité de relation avec les représentants dupersonnel et à démontrer que leur engagement syndical neconstitue pas un handicap que ce soit en termes de gestionde carrière ou de participation à des groupes de travail enterme de sécurité et de gestion des compétences.

Pour le management : de façon générale, cette nouvellephilosophie en matière de relations sociales est portée par l’encadrement intermédiaire. Mais des tensions entre l’en-cadrement de proximité et les représentants du personnelrestent fortes. L’existence de ce contre-pouvoir est encore malacceptée. La conscience existe que des efforts sont à fairepour assurer le fonctionnement de l’entreprise.

Pour les représentants du personnel : ils sont perçus et se vivent comme l’un des canaux de communication del’entreprise et comme des interlocuteurs importants danscertains temps de discussion ou de négociation en respectantles rôles prévus par la législation. Les compétences et lesmotivations restent très variables. Une amélioration de cesaspects doit être réalisée. Il est à noter qu’aujourd’hui seulela CGT demeure parmi les syndicats autrefois présents.

MÉTALBATÉVOLUTION DES RELATIONS SOCIALES À L’OCCASION D’UNE REPRISE DANS UN CONTEXTE ÉCONOMIQUE ET SOCIAL PRÉCAIRE

Direction régionaledu travail, de l'emploi

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