Musardons : à l'assaut des châteaux cathares - cspa.fr · Une longue descente s'amorce, ... il ne...

6
Musardons : à l'assaut des châteaux cathares Du 1 er au 5 juin 2015 Comme chaque année, le début de juin apporte ses démangeaisons de pédales. Nous mettons à profit un créneau météorologique favorable pour traduire en actes une envie récurrente : mettre nos pneus dans les pas des Bons Hommes et Bonnes Femmes, à défaut d'être des Parfaits ! Nous voilà donc partis le 1er juin, en direction de Saint Paul de Fenouillet, qui sera notre base arrière où nous dresserons le campement. Puisque la journée est trop courte pour envisager de rouler, une halte s'impose à la superbe abbaye cistercienne de Fontfroide (une des plus belles de France, qu'ils disent … Mais nous avons aussi bien chez nous, sans aucun chauvinisme!). En tout cas, ce fut malheureusement un haut- lieu de conspiration de l’Église qui y peaufina sa stratégie d'éradication du catharisme !!! Entouré d'une grande roseraie, d'un jardin médiéval et d'une colline boisée, l'ensemble des bâtiments est imposant et le cloître est un magnifique havre de paix, mêlant belles pierres, ferronnerie d'art et végétation luxuriante. Une heure et demie de visite guidée gratuite et fort intéressante, à laquelle il faut ajouter une bonne heure de flânerie, voici ce que mérite, au minimum, l'abbaye de Fontfroide ! Le lendemain, premier jour de vélo, nous voilà partis : Colette, Jeanine et moi (selfie original, non ?) . Et qui commence par un souci : j'ai prévu de remonter les gorges de Galamus, mais, après 7 km, nous sommes arrêtés par des panneaux indiquant qu'elles sont fermées tous les jours jusqu'à 15h, pour de très gros travaux de consolidation. Tant pis, nous ferons le trajet à l'envers. Cap vers le sud, il est hors de question de prendre la D117 qui longe la Maury en direction de Perpignan : trop de circulation, route toute droite et sans aucun intérêt visuel. Au contraire, nous allons suivre la ʺ Route des vins ʺ, franchir la clue de la Fou, accompagnés par l'Agly qui se fraye un passage dans cet étroit goulet traversé par un pont romain réduit à sa plus simple expression, puis rejoindre Maury par les coteaux de Lesquerde. Étonnamment la route n'est pas bordée de vert sur la carte Michelin, alors qu'elle est charmante, ouvrant de belles perspectives sur toute la vallée, les vignobles. Malheureusement, l'odeur prenante des traitements chimiques est à la limite du respirable … Colette, Jeanine et… …Didier (qui n’est que l’ombre de lui-même !)

Transcript of Musardons : à l'assaut des châteaux cathares - cspa.fr · Une longue descente s'amorce, ... il ne...

Page 1: Musardons : à l'assaut des châteaux cathares - cspa.fr · Une longue descente s'amorce, ... il ne suffit pas d'avoir des rustines, il faut aussi avoir sa paire de lunettes (ce n'est

Musardons : à l'assaut des châteaux cathares

Du 1er

au 5 juin 2015

Comme chaque année, le début de juin apporte ses démangeaisons de pédales. Nous mettons à profit

un créneau météorologique favorable pour traduire en actes une envie récurrente : mettre nos pneus

dans les pas des Bons Hommes et Bonnes Femmes, à défaut d'être des Parfaits ! Nous voilà donc

partis le 1er juin, en direction de Saint Paul de Fenouillet, qui sera notre base arrière où nous

dresserons le campement.

Puisque la journée est trop courte pour envisager de rouler,

une halte s'impose à la superbe abbaye cistercienne de

Fontfroide (une des plus belles de France, qu'ils disent …

Mais nous avons aussi bien chez nous, sans aucun

chauvinisme!). En tout cas, ce fut malheureusement un haut-

lieu de conspiration de l’Église qui y peaufina sa stratégie

d'éradication du catharisme !!!

Entouré d'une grande roseraie, d'un jardin médiéval et d'une

colline boisée, l'ensemble des bâtiments est imposant et le

cloître est un magnifique havre de paix, mêlant belles pierres,

ferronnerie d'art et végétation luxuriante. Une heure et demie

de visite guidée gratuite et fort intéressante, à laquelle il faut

ajouter une bonne heure

de flânerie, voici ce que

mérite, au minimum,

l'abbaye de Fontfroide !

Le lendemain, premier jour de vélo, nous voilà partis : Colette,

Jeanine et moi (selfie original, non ?) . Et qui commence par un

souci : j'ai prévu de remonter les gorges de Galamus, mais, après

7 km, nous sommes arrêtés par des panneaux indiquant qu'elles

sont fermées tous les jours jusqu'à 15h, pour de très gros travaux

de consolidation. Tant pis, nous ferons le trajet à l'envers.

Cap vers le sud, il est hors de question de prendre la

D117 qui longe la Maury en direction de Perpignan :

trop de circulation, route toute droite et sans aucun

intérêt visuel. Au contraire, nous allons suivre la

ʺ Route des vins ʺ, franchir la clue de la Fou,

accompagnés par l'Agly qui se fraye un passage dans

cet étroit goulet traversé par un pont romain réduit à

sa plus simple expression, puis rejoindre Maury par

les coteaux de Lesquerde. Étonnamment la route

n'est pas bordée de vert sur la carte Michelin, alors

qu'elle est charmante, ouvrant de belles perspectives

sur toute la vallée, les vignobles.

Malheureusement, l'odeur prenante des traitements chimiques est à la limite du respirable …

Colette, Jeanine et…

…Didier (qui n’est que l’ombre

de lui-même !)

Page 2: Musardons : à l'assaut des châteaux cathares - cspa.fr · Une longue descente s'amorce, ... il ne suffit pas d'avoir des rustines, il faut aussi avoir sa paire de lunettes (ce n'est

Traversée du village de Maury (bon vin doux,

blanc ou rouge, à tester!), puis nous attaquons la

montée au château de Quéribus, en plein soleil,

par deux lacets qui n'en finissent pas. Au loin,

tout là-haut, nous avons pour cible les ruines du

château. Passé le col du Grau de Maury, la pente

prend d'un coup ses trois chevrons, et c'est au

moins 1 km et demi de galère. Nous y arrivons

non sans peine, mais la récompense est à la

hauteur (c'est le cas de le dire) de l'effort : site

grandiose, vue imprenable de tous côtés,

quelques beaux restes, escalier de pierre en

colimaçon, salle voûtée, tour et belle façade

avec fenêtre à meneaux.

Redescente freins bloqués ou à fond la caisse, ça

dépend des goûts. Par une route fort sinueuse et

gravillonneuse « à souhait », nous atteignons le joli village

de Cucugnan, son joli moulin à vent, à visiter si possible :

meules en granit, engrenages en buis et chêne, il sert encore

parfois pour moudre le grain de la boulangerie du coin.

Dernier coup d’œil par-dessus le clocher en direction de

Quéribus, et nous descendons en direction du château de

Peyrepertuse.

D'un commun accord,

nous décidons qu'il

est encore plus beau

vu de loin… et nous

enchaînons jusqu'à

Cubières-sur-Cinoble,

et plein sud dans les

gorges de Galamus.

C'est bien en vélo

qu'il faut les faire, et

en descente : ça

commence

doucement par un

cours d'eau tranquille

qui creuse ses petites

marmites, puis

brusquement les

parois se resserrent et

s'élèvent, ôtant toute possibilité de stationner aux

voitures, alors que chaque virage mérite de se

pencher par-dessus le parapet pour contempler ces

falaises vertigineuses : plusieurs centaines de mètres

en-dessus et au-dessous.

Page 3: Musardons : à l'assaut des châteaux cathares - cspa.fr · Une longue descente s'amorce, ... il ne suffit pas d'avoir des rustines, il faut aussi avoir sa paire de lunettes (ce n'est

Ne pas rater l’invraisemblable ermitage

de Saint Antoine de Galamus, à l'ombre

d'un grand platane et d'un néflier, niché

dans une anfractuosité qui abrite aussi

une chapelle dans une faille.

Belle journée rendue un peu pénible par une forte chaleur.

Deuxième journée, commencée tôt pour pédaler ʺ à la fraîche ʺ. Objectif : Ille/Têt. Même départ que

la veille, le long de l'Agly que nous descendons sur une jolie route ombragée. A Ansignan, nous

abandonnons la facilité pour prendre une jolie petite route blanche, qui monte, qui monte … jusqu'au

col des Auzines.

Les collines sont couvertes de bosquets d'églantines que nous prenons tout d'abord pour des cistes.

Le village de Montalba-le-château, entouré de vignobles, de champs d'oliviers et d'abricotiers, est

richement décoré de sculptures métalliques intéressantes avec le Canigou enfin bien visible en fond:

Page 4: Musardons : à l'assaut des châteaux cathares - cspa.fr · Une longue descente s'amorce, ... il ne suffit pas d'avoir des rustines, il faut aussi avoir sa paire de lunettes (ce n'est

Dès que nous basculons dans la

vallée du Têt, le paysage change

brusquement : sol aride, gros

blocs de pierre dans les champs,

vignes basses et amandiers.

Depuis 10h30 la chaleur est

accablante en ce 3 juin. Le bord

de la route est déjà jauni, sec

comme de l'étoupe, les plantes

méditerranéennes font leur

apparition : mimosas, agaves,

cactus, etc. Avant de traverser le

Têt, seule image un peu

rafraîchissante, nous découvrons

les superbes orgues d'Ille-sur-Têt.

Nous trouvons refuge et coin pour pique-nique sur la place du marché, où une bonne mousse est

absolument indispensable ! Puis, nous reprenons la route, après avoir fait le plein des gourdes à une

fraîche fontaine sous les remparts, rue de la neige (oui, c'est vrai!).

Après c'est le bagne ! La météo a

annoncé 30°C cet après-midi, mais c'est

sous abri, et ici, il n'y a aucun abri

possible, pas un arbre, rien qu'un dur

cagnard, le thermomètre annonce

fièrement 40°C, et encore, je ne le

regarde pas tout le temps.

Heureusement, nous basculons enfin

sur le versant nord, et la verdure de

l'Aude nous apporte une légère brise et

une fraîcheur très relative, jusqu'au plan

d'eau de l'Agly. Grosse déception, les

berges sont en plein soleil, non

aménagées, et notre rêve de petite sieste

à l'ombre s'évapore aussitôt.

Page 5: Musardons : à l'assaut des châteaux cathares - cspa.fr · Une longue descente s'amorce, ... il ne suffit pas d'avoir des rustines, il faut aussi avoir sa paire de lunettes (ce n'est

De nouveau une montée pénible, les roues adhèrent bien au goudron qui fond, les graviers se collent

aux roues … Si le début de la route est charmant, elle finit assez mal : une immense éolienne semble

barrer le col de ses grands bras dressés vers le ciel, trônant au-dessus de l'immense carrière de

feldspath de Lansac. Mais c'est le début de la redescente et c'est ça qui compte ! A Saint Arnac, un

homme nous indique que la fontaine est fraîche et juste devant. Pause, je plonge par deux fois la tête

dans l'abreuvoir, pour refroidir la machine avant ébullition complète ! La route est un extraordinaire

toboggan qui ne nécessite presque pas de coups de frein (pas plus que la montée, d'ailleurs!).

Quelle dure journée, dont les 87 km. Et 1230 m de dénivelé auront été très éprouvants pour les

vieilles machines …

Troisième jour, cap à l'est : nous partons d'Axat. Changement complet de paysage : c'est presque la

montagne: vallons très resserrés, sapins, forêts de feuillus. Nous franchissons les belles gorges de

Saint Georges, la route monte peu, à l'ombre, les bas-côtés sont couverts de toutes les fleurs de

printemps : pois de senteur, mufliers, ancolies, grosses campanules, etc. Il est temps d'abandonner la

route trop classique pour une encore plus petite qui monte sur le plateau d'Aunat : belle campagne

comme on en rêve : prairies fleuries, herbe haute et dense, champs de blés qui commencent à dorer.

Le son de la voix du laboureur qui guide son cheval nous parvient.

Une longue descente s'amorce, qui devrait nous ramener au point de départ, Axat, sans aucun coup

de pédale sur 25 km, le long de la vallée du Rebenty : que du bonheur facile !

L'homme et la machine partagent tout : la roue arrière est crevée, le bonhomme aussi (pas récupéré

du coup de chaleur d'hier!). Pourtant, là s'arrêtent les similitudes, car un dernier coup de pompe la

remet en ordre de marche, mais le laisse complètement à plat ! Je me permets modestement de

partager avec vous ma petite expérience personnelle :

1) – si vous prenez une chambre à air de secours, prenez-en une qui ne soit pas pré-crevée ! Cela

évite une petite déconvenue !

2) - dans le cas contraire, il ne suffit pas d'avoir des rustines, il faut aussi avoir sa paire de

lunettes (ce n'est pas écrit dans toutes les brochures).

Car vous remarquerez vite qu'une rustine collée à côté du trou

est assez peu efficace ! Pour moi, elle tiendra jusqu'à la voiture,

elle ne devait pas être si mal placée que ça !!!

Belle route quand même, à travers le défilé de Joucou, il faudrait

presque baisser la tête tant des avancées de rocher sont basses

au-dessus de la route. Mais ça en fait le charme. Dommage qu'un

mauvais vent s'engouffre dans cette étroite vallée, évidemment

en sens contraire, ce qui gâche le plaisir de la descente.

Dernier jour consacré au tour de la superbe forêt d'Ayguebonnes-

Boucheville : départ du petit village de Caudiès. Dès les

premiers lacets, nous découvrons les ruines assez délabrées du

château de Fenouillet.

Page 6: Musardons : à l'assaut des châteaux cathares - cspa.fr · Une longue descente s'amorce, ... il ne suffit pas d'avoir des rustines, il faut aussi avoir sa paire de lunettes (ce n'est

Jolie route très tranquille qui monte

régulièrement jusqu'au village paisible de

Sournia. Ce que ne montre pas la carte, c'est

qu'entre le point 700 m et le point suivant 720

m, il y a une franche descente et qu'il faut

regagner les mètres perdus !

Heureusement, à la sortie du village, nous

trouvons un malheureux cerisier, à moitié mort

dans un champ d'herbes folles, et nous décidons

de lui faire honneur ! Des cerises noires,

gorgées de sucre (rapide, bon pour l'effort !), un

vrai régal, le dessert avant l'entrée mais ce n'est

pas grave. En quelques minutes, nous laissons

un champ de bataille jonché de queues et de

tristes noyaux ! Mais que c'était bon !

Encore 6 km. Et nous sommes au point 1020 m nommé col

d'Aussières sur la carte. Là, un grand doute nous prend : la route

descend jusqu'au point 1040 m, marqué au bord de la route par

le panneau « col d'Aussières ». Décidément, ils sont prêts à tout,

dans la région, pour tromper les extra-terrestres ! (nous sommes

à moins de 15 km. à vol d'oiseau, du célèbre village de

Bugarach (pour ceux qui ne connaissent pas, cherchez sur

internet!). Mais tant que ça descend, ce n'est pas grave. La forêt

épaisse nous prodigue une ombre salutaire, une belle petite

cascade mérite un petit arrêt.

Nous terminons la journée, et le petit séjour, par le château de

Puilaurens, accroché sur son éperon rocheux, magnifique.

Au bilan, quatre journées dans une région qui mérite d'être largement explorée, d'immenses

possibilités de circuits variés entre les paysages du Roussillon et des pré-Pyrénées, environ 270 km.

De petites routes souvent pleines de gravillons, plus de 4000 m de montées et descentes parfois

rudes, mais de beaux paysages qui méritent de lever le nez du guidon !

Didier Mathieu