Meurtre en haute montagne

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8 Meurtre en haute montagne Par Jean-Marie Giraud - Debout ! fait une voix forte qui me fait sursauter. Moi, c’est Thomas, jeune Øtudiant, peine 17 ans et me voil assis sur une chaise, derriLre une table dans cette salle dinterrogatoire. L’homme qui vient de rentrer dans la piLce, aprLs m’avoir fait mariner pendant d’interminables minutes, pourrait avoir une trentaine d’annØe. Il dispose devant moi plusieurs photos de cadavres diffØrents, avec une certaine aisance qui me fait froid dans le dos. Puis il me dit, avec un certain dØgoßt : - Tu as peine 17 ans et te voil dØj accusØ de deux homicides. - Je n’y suis pour rien ! Je rØponds, tout en me levant et en renversant la chaise. - RASSIEDS-TOI ! m’ordonne-t-il en tapant du poing sur la table, puisque tu n’y es pour rien tu vas m’expliquer ce qui s’est passØ, OK ? - OK, alors voil comment a s’est passØ : Tout a commencØ au mois daoßt, pendant les vacances d’ØtØ, ma mLre m’avait payØ un sØjour de pŒche aux Lacs Noirs qui durait trois nuits et quatre jours. Puis le jour du dØpart est arrivØ, on Øtait cinq pŒcheurs au total. Durant les dix heures de marche pour rejoindre le refuge, j’en ai profitØ pour faire connaissance avec le reste du groupe : Philippe, une personne de taille moyenne, la trentaine, un avocat (et il s’en cachait pas). Il m’a expliquØ qu’il avait gagnØ ce sØjour une loterie. Ensuite il y avait AndrØ, un retraitØ d’une soixantaine d’annØes, plutt petit et assez trapu. Lui c’Øtait sa femme qui lui avait offert ce sØjour, sßrement pour se dØbarrasser de lui. Puis il y avait lise, sa beautØ Øtait loin de me laisser indiffLrent, elle avait des yeux de la mŒme couleur que les pierres dØmeraude, des cheveux bruns et bouclØs qui lui tombaient jusqu’en bas des hanches. Sa bouche elle seule reprØsentait la sensualitØ. A vue dil, je dirais qu’elle mesurait environ un mLtre soixante-dix tout au plus. Pour elle, c’Øtait sa mLre qui lui avait payØ le voyage pour fŒter son dix-septiLme anniversaire. Et aprLs, il y avait Stephan, l’encadrant de cette

description

Nouvelle policière écrite par Jean-Marie Giraud, élève de 1ère bac professionnel Productions aquacoles du Legtpa Louis Pasteur de La Canourgue, dans le cadre d'un atelier d'écriture mené en novembre 2012 par C. Estevenon, M. Fouché et l'écrivain Sergueï Dounovetz.

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Meurtre en haute montagne

Par Jean-Marie Giraud

- Debout ! fait une voix forte qui me fait sursauter.

Moi, c'est Thomas, jeune étudiant, à peine 17 ans et me voilà assis sur une chaise,

derrière une table dans cette salle d�interrogatoire. L'homme qui vient de rentrer dans la

pièce, après m'avoir fait mariner pendant d'interminables minutes, pourrait avoir une

trentaine d'année. Il dispose devant moi plusieurs photos de cadavres différents, avec

une certaine aisance qui me fait froid dans le dos.

Puis il me dit, avec un certain dégoût :

- Tu as à peine 17 ans et te voilà déjà accusé de deux homicides.

- Je n'y suis pour rien ! Je réponds, tout en me levant et en renversant la chaise.

- RASSIEDS-TOI ! m'ordonne-t-il en tapant du poing sur la table, puisque tu n'y es

pour rien tu vas m'expliquer ce qui s'est passé, OK ?

- OK, alors voilà comment ça s'est passé : Tout a commencé au mois d�août,

pendant les vacances d'été, ma mère m'avait payé un séjour de pêche aux Lacs

Noirs qui durait trois nuits et quatre jours. Puis le jour du départ est arrivé, on

était cinq pêcheurs au total. Durant les dix heures de marche pour rejoindre le

refuge, j'en ai profité pour faire connaissance avec le reste du groupe : Philippe,

une personne de taille moyenne, la trentaine, un avocat (et il s'en cachait pas). Il

m'a expliqué qu'il avait gagné ce séjour à une loterie. Ensuite il y avait André, un

retraité d'une soixantaine d'années, plutôt petit et assez trapu. Lui c'était sa

femme qui lui avait offert ce séjour, sûrement pour se débarrasser de lui. Puis il y

avait Élise, sa beauté était loin de me laisser indiffèrent, elle avait des yeux de la

même couleur que les pierres d�émeraude, des cheveux bruns et bouclés qui lui

tombaient jusqu'en bas des hanches. Sa bouche à elle seule représentait la

sensualité. A vue d��il, je dirais qu'elle mesurait environ un mètre soixante-dix

tout au plus. Pour elle, c'était sa mère qui lui avait payé le voyage pour fêter son

dix-septième anniversaire. Et après, il y avait Stephan, l'encadrant de cette

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session. D�après ce que j'ai compris, il avait une renommée internationale. J'ai

remarqué un détail particulier : il avait un léger accent russe et je m'amusais à

l'imiter.

Au bout de dix heures et trente longues et épuisantes minutes, nous sommes arrivés

devant le refuge. Ici nous étions coupés du monde, pas une seule habitation à plus de

vingt kilomètres, aucune trace de réseau sur nos portables. Le seul moyen de

communication était un téléphone cellulaire qui servait uniquement à appeler les

secours en cas de problème.

Mais le cadre était magnifique, des lacs et des montagnes à perte de vue et de temps en

temps on pouvait voir des isards ou des marmottes. Tout d'abord nous avons installé

tout notre matériel dans le refuge puis nous avons dû aller chercher du bois sec pour le

feu car en pleine nuit les températures chutent énormément. Au bout de quelques

dizaines de minutes, Stephan est arrivé les bras surchargés de bois mort ce qui a pu me

permettre de constater qu'il connaissait bien le coin. C'était dix-sept heures, il nous

restait quelques heures devant nous avant que la nuit tombe alors nous avons décidé

d�aller faire le coup du soir. Nous nous sommes séparés en deux groupes, un groupe de

trois et un groupe de deux, pour ma part je m'étais arrangé pour être avec Élise. Nous

nous rendions au bord du lac '' Liliana ''. Durant la partie de pêche, une certaine

complicité et compétition se sont installées entre Élise et moi, c'était celui qui faisait le

moins de poisson qui finissait à l'eau. On utilisait la technique du poisson mort-manié : le

principe est d'utiliser un poisson loché sur une monture drachkovitch* et de donner des

coups irréguliers de scion* dans le but de l'animer comme un poisson mort ou en fin de

vie ou malade pour déclencher l�agressivité.

*Monture drachkovitch : monture qui permet de maintenir le poisson mort tout en le « hérissant »

d'hameçons et tridents

*scion : extrémité la plus fine de la canne à pêche.

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Mais à mon plus grand soulagement les résultats étaient égaux : trois truites Fario dont

une de plus de trente centimètres ce qui est énorme car la croissance des poissons est

ralentie suite aux température froides des eaux en lac de montagne et quatre saumons

de fontaine dont le plus gros faisait vingt-six centimètres. La nuit est tombée et on s'est

tous retrouvés au refuge.

Le lendemain matin, on s'est levés aux aurores pour faire le coup du matin, mais j'avais

une sensation bizarre, comme si quelqu'un nous observait. Nous avons repris le système

de groupe de la veille, sauf que là Stephan était absent pour aller tester un autre lac

avant de nous y amener. Élise et moi, nous nous sommes dirigés vers le lac '' Fourcat ''.

Nous étions à peine arrivés sur les berges du lac qu'un bruit sourd a retenti dans les

montagnes, comme un coup de feu. Aussitôt on s'est précipités vers l'autre groupe. Une

fois arrivés sur les lieux, nous avons vu Philippe qui gisait dans son propre sang , avec

André qui faisait un poing de compression sur son artère jugulaire : la balle avait

littéralement traversé son cou. Durant son agonie, Philippe avait essayé de nous dire

quelque chose mais j'ai compris juste deux mots : ''mafia,tueurs''. A peine ces mots

prononcés, un autre bruit sourd a retenti, il a fallu attendre trois interminables secondes

avant qu'une autre balle percute à nouveau Philippe sauf que là, la balle a traversé le

crâne. Une exécution, voilà à quoi nous avons assisté, nos corps étaient tétanisés, on ne

pouvait plus bouger à cause de la peur, le temps était comme figé. J'étais recouvert de

sang suite au dommage que la deuxième balle avait fait. Jusqu'au moment où Élise m'a

mis une claque qui m'a fait aussitôt redescendre sur terre .

Dans les quelques secondes qui ont suivi, on s'est mis à courir dans le refuge pour se

mettre à l'abri du tireur. Une fois à l�intérieur, on s'est mis à chercher le téléphone mais

aucune trace de celui-ci.

Et à partir de là, je me suis mis à réfléchir aux deux mots que Philippe avait prononcés

''Mafia, tueurs'' et j'ai compris que ce séjour était un traquenard pour Philippe, que la

loterie avait été truquée pour qu'il gagne ce séjour mais la question restait : pourquoi ?

Un jour était passé sans sortir dehors puis on a commencé à manquer de bois pour le feu

alors j'ai décidé d'aller en chercher. A peine sorti du refuge, j�ai aperçu un reflet juste sur

la colline en face du refuge. Je suis alors rentré en panique dans le refuge. Les autres,

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tout affolés, sont venus me demander ce que j'avais pu voir. Après de longues heures de

réflexion, j'ai pris la parole et dit : ''De toutes façons, soit c'est lui qui y passe, soit c'est

nous''. Une fois ces paroles dites, un grand silence a suivi, jusqu'à ce qu'Élise me

demande ce que je voulais faire � Une fois mon plan exposé, on commença à le mettre

en �uvre. Je commençais à sortir par une fenêtre à l'arrière du refuge pendant que

André ouvrait la porte pour faire diversion puis je suis entré dans les bois qui bordait le

lac. Une fois dans les bois, il ne me restait plus que la colline où était posté le tireur. Au

bout d'une heure et demi, j'arrivais au pied de la colline, je tremblais comme une feuille

mais je devais me reprendre car les autres comptaient sur moi.

J'ai commencé à monter la colline et une fois en haut, j�ai aperçu un homme en tenue de

camouflage avec un M82A1. Je suis arrivé derrière lui, j'ai sorti mon couteau de survie

que j'ai mis sous sa gorge. Il a lâché son arme, son fusil et j'ai saisi son arme de poing

située sur sa jambe droite. Le menaçant avec sa propre arme, je lui ai ordonné de retirer

sa cagoule et là, à ma plus grande surprise, j'ai vu Stephan. Surpris par cette découverte,

je lui ai demandé qui il était et pourquoi il avait fait ça. Il m'a répondu qu'il s�appelait

Victor Sakaev et qu'il avait fait ça car il y avait un contrat sur la tête à Philippe parce qu'il

avait mal protégé un client, qui se trouvait être le fils d'un des grands de la mafia russe,

et que à cause de lui, il avait été condamné à plusieurs années d�emprisonnement. Juste

après qu'il ait fini d�expliquer, il s'est jeté sur moi et un coup de feu parti du pistolet, cet

homme s�est écroulé devant moi. Il trempait dans son sang. La balle lui avait touché les

poumons, son agonie a duré quelques minutes puis il a fini par succomber à sa blessure.

Choqué par cet enchaînement d'actions, je me suis assis à côté du corps en ayant du mal

à réaliser que c'était moi qui avait tué cet homme, moi qui avais à peine dix-sept ans et

qui était classé en tant que meurtrier, j'étais terrifié par cette idée� Puis une main est

venue se poser sur mon épaule, c'était Élise qui, suite au coup de feu était venue voir ce

qui s'était passé.

Elle m'a déposé un doux baiser sur mes lèvres, puis André a suivi en me chuchotant ces

mots : '' Tu n'avais pas le choix, soit c�était lui, soit c'était toi, comme tu nous l'as dit tout

à l'heure''. Il s'est dirigé vers le corps dans le but de rechercher le téléphone cellulaire.

Une fois cela fait, on vous a appelé et vous connaissez la suite�

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- Alors pour le premier corps, si j'ai bien compris tu plaides non coupable et pour le

second, tu plaides la légitime défense ?, reprend-il.

- Oui, je réponds avec une certaine arrogance.

Puis une femme entre dans la pièce, tend un dossier au brigadier et sort aussitôt. Il le

feuillette avec vitesse et tourne les pages avec une certaine violence, puis il dit :

- Ce document prouve que le deuxième corps était bien Victor Sakaev, un tueur à gage

recherché depuis plusieurs années par Interpol. Cela prouve entièrement ton innocence

dans ces crimes. Tu seras quand même jugé mais je peux te garantir que tu vas t'en

sortir intact.

Les mois passent en attente de mon jugement, puis le jour J arrive. Après deux jours de

procès, le brigadier avait raison, je suis acquitté de toutes les charges qui pèsent contre

moi. A la sortie du tribunal, à ma plus grande surprise, j�aperçois Élise ce qui m'apporte

un grand réconfort. Mais après cette histoire, je ne serai jamais le même.