Courbe de tarissement, coefficient d'écoulement et perméabilité du ...
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BUREAU DE RECHERCHES GÉOLOGIQUES ET MINIÈRES
SERVICE GÉOLOGIQUE NATIONAL
B.P. 6009 - 45 Orléans (02) - Tél.: (38) 66.06.60
MESURE DE LA VITESSE D'ÉCOULEMENT EN MILIEU
SATURÉ PAR LES MÉTHODES DE TRAÇAGE
Étude documentaire
par
M. BONNET et A. LALLEMAND-BARRÈS
Département HYDROGEOLOGIE
Service de recherches expérimentales
B.P. 6009 - 45 Orléans (02)
Tél.: (38) 66.06.60
70 SGN 365 HYD Décembre 1970
RESUME
Cet exposé des différentes méthodes de mesure de la vitesse
d'écoulement des eaux souterraines, a pour but de remettre en mémoire les
différentes notions de vitesse, les méthodes anciennes, classiques de
mesure, et de faire connaître aux hydrogéologues les méthodes modernes
qui ont été utilisées surtout par des physiciens. On peut s'interroger ainsi
sur la validité de ces différentes méthodes de mesure.
Cette étude documentaire a été réalisée dans le cadre des
travaux méthodologiques du département d'Hydrogéologie.
SOMMAIRE
INTRODUCTION
1 . GENERALITES. RAPPEL DE DEFINITIONS
2. MESURE DE LA VITESSE A L'AIDE DE DEUX OU PLUSIEURS PUITS
2.1. Historique
2.2. Interprétation des données expérimentales
2.3. Exemples de mesure de vitesse avec au moins deux puits
2.4. Exemples de mesure de vitesse avec un seul puits
2.4.1. Méthode dite de pulsion en puits unique ("single-well pulse
technique")
2.4.2. Méthode dite de dilution ("bore-hole dilution technique")
CONCLUSIONS
BIBLIOGRAPHIE
INTRODUCTION
L'idée de déterminer directement, au moyen de traçages opérés
sur le terrain, la vitesse d'écoulement des eaux souterraines est relativement
ancienne puisqu'elle fut mise en pratique dès le 19è siècle.
Mais dans la mesure où l'on cherchait surtout à atteindre, par
ces techniques, des informations utilisables pour entreprendre des évalua¬
tions quantitatives sur le débit des nappes ou effectuer des calculs hydrody¬
namiques (recherche de la perméabilité), elles se sont trouvées supplantées
par des méthodes d'acquisition plus rigoureuses des paramètres hydrodynami¬
ques des aquifères, notamment par les méthodes basées sur l'analyse des
données des pompages d'essai - progressivement perfectionnées.
La vitesse d'écoulement moyenne d'une nappe souterraine
n'étant généralement pas une information directement utilisée pour des calculs
hydrodynamiques, sa détermination ne constituait pas un objectif d'investi¬
gation primordial. Aussi l'emploi des traceurs à cette fin n'occupait-il qu'une
place marginale dans les méthodes d'étude hydrogéologique, en dehors du
domaine particulier des aquifères karstiques, oià la description des trajec¬
toires d'écoulement est toutefois demeurée un objectif plus général que la
détermination de vitesses.
L'étude de la propagation des polluants dans les nappes souter¬
raines a modifié cette situation, en donnant un regain d'intérêt aux méthodes
de détermination des vitesses réelles d'écoulement à l'aide de traceurs. Ces
vitesses constituent en effet dans ce cas une information utile en elle-même.
Aussi a-t-il paru utile de rappeler brièvement à l'attention des
hydrogéologues, en se basant sur une revue bibliographique, les principes et
les procédés techniques des méthodes mises en oeuvre.
Les mesures des temps de transit sur une distance donnée
donnent^outre des renseignements sur les vitesses de déplacement, des infor¬
mations sur la façon dont le marqueur se dilue et se disperse. Les expériences
de traçage dans le but de mesurer des vitesses ou des temps de transfert sont
effectuées en routine aux Etats-Unis dans les fleuves, en vue de prévoir les
effets éventuels de contamination accidentelle.
Pour la propagation dans les nappes, il serait intéressant de
connaître de la même façon, la vitesse d'écoulement dans diverses conditions
hydrogéologiques. Notons toutefois qu'avant de se propager dans la nappe,
donc en milieu saturé, le polluant éventuel est supposé avoir déjà traversé la
zone non saturée.
Il faut noter que cette étude documentaire ne concerne que les
mesures de vitesse par des traceurs, dans les nappes ^'-K .
On distingue deux sortes de procédures expérimentales : les
méthodes anciennes qui mesurent la vitesse d'écoulement naturel entre un point
amont et un point aval, et les méthodes modernes qui mesurent une vitesse,
parfois en n'utilisant qu'un seul puits, d'autres fois avec deux puits, ces
méthodes faisant intervenir en général un pompage.
(1) Une étude bibliographique antérieure a été consacrée à la détermination par
traçage des transferts d'eau en zone non saturée (cf. rapport 69 SGN 281 HYD).
1. GENERALITES . RAPPEL DES DEFINITIONS
1.1. Notion d'échelle
Quand on aborde l'étude des vitesses de fluide en milieu poreux, il
faut définir à quelle échelle on veut considérer les phénomènes et à quels
volumes géométriques seront rapportées les vitesses considérées. En par¬
tant de l'échelle microscopique vers l'échelle macroscopique, on peut, en
général, rapporter les vitesses à l'un des volumes élémentaires suivants :
- La molécule de fluide : il s'agit évidemment du plus petit élément possible.
- La particule : c'est un domaine géométrique continu constitué de plusieurs
molécules, mais toujours largement plus petit qu'un pore du milieu.
-Le sous-système est une portion de sol (fluide + solide) suffisamment
grande pour présenter des caractéristiques moyennes statistiquement si¬
gnificatives et toutefois assez petite pour permettre les opérations de
différenciation dans l'espace.
Ceci veut dire que l'ordre de grandeur A ïd'un sous-système doit
être tel que pour toute grandeur affectable à un point (par exemple la vi¬
tesse) les écarts à la moyenne pour deux valeurs de cette grandeur prises
en deux points distants de A x ^ A C soient statistiquement indépendants.
De la même façon en régime transitoire, les sous-systèmes doivent
être observés pendant des intervalles A t assez longs pour que l'on puisse
éliminer par des opérations de prise de moyenne (par rapport au temps) les
fluctuations de pression et de vitesse des particules fluides contenues
dans le sous-système et toutefois suffisamment courts pour permettre des
opérations de différenciation par rapport au temps.
Les paramètres ainsi moyennes pour un sous-système (Ax, Ay, /\Z)
(voir figure 1) et pour un intervalle A t sont rapportés au centre de gravi¬
té G. L'ensemble des sous-systèmes représentant un domaine poreux
constitue donc un milieu continu statistiquement équivalent au milieu po¬
reux réel (qui lui est essentiellement discontinu) où toutes les grandeurs
(propriétés du milieu et paramètres de l'écoulement) sont différenciable s
dans l'espace et le temps.
1.2. Le point de vue hydrodynamique
L'hydrodynamique s'intéresse essentiellement aux transferts de
masse dans leur ensemble et étudie les lois qui relient ces transferts aux
forces agissant sur le milieu fluide.
Ces lois s'appliquent donc à l'échelle du milieu continu équiva¬
lent et donc à l'échelle des sous-systèmes.
Ainsi par exemple, la grandeur vectorielle qui intervient dans la
loi de DARCY, principale loi de l'hydrodynamique des écoulements en milieu
poreux et que l'on appelle le plus souvent :
-La vitesse de filtration ou vitesse de DARCY est en fait un vecteur flux
spécifique qui représente le débit moyen de fluide par unité de surface (de
chaque sous-système) de temps et de densité. Cette grandeur essentielle¬
ment moyenne, doit être rapportée au centre de gravité G de chaque sous
système (voir figure 1 ci-dessous).
.fou ft/
vz iX
Figure 1
Définition de la vitesse de DARCY
Département d'hydrogéologie Orléans, le 8 Juillet 1971
MB/iyiCB-N. 316
ERRATA AU RAPPORT 70 SGN 365 HYD
Page 5 :
2ème ligne (formiole)
V. =1
:V 11 ^ ^ ^ ^iAA
e
6 ème ligne
Le vecteur ^ (au lieu de v ) résultant est rapporté en G.
(V de composantes V¿)
- Page 8 :
Sème ligne : ajouter un point .
... du raisonnement. Sans entrer...
M. BONNET
Sur chaque face on détermine V. (i = x, y, z) tel que
V = vitesse particulaire
AAg = section de passage efficace = Aa x m
mg = porosité efficace
->
Le vecteur v résultant est rapporté en G.
En fait l'eau circule seulement à travers les pores de la roche et
la section d'écoulement est donc limitée aux vides et on pourra distinguer
La vitesse moyenne (SCHOELLER)
V = m = porositém m
La vitesse effective (SCHOELLER)
VV = ~zr m^, = porosité effective
e mg e ^
en remarquant que seule l'eau gravitaire peut s'écouler.
1.3. Le point de vue cinématique
La cinématique a pour objet l'étude des vitesses à toutes les
échelles et non seulement à l'échelle macroscopique où se situent la loi de
DARCY et les lois de l'hydrodynamique en général.
On distinguera donc :
-La vitesse moléculaire attachée à la trajectoire d'une molécule dont la
définition est évidente.
- La vitesse particulaire attachée au mouvement d'une particule et qui demande
donc une définition plus précise que la précédente car du fait de l'agitation
moléculaire, la constitution d'une particule est sans cesse modifiée.
Aussi la position d'une particule à un instant t est définie par le
centre de gravité g de toutes les molécules qui à un instant û t précédent
la constituaient.
Et le mouvement de la particule est par définition le mouvement de
son centre de gravité. On en déduit la définition de la vitesse particulaire :
TT" ÁySU" xr
1.4. Le phénomène de dispersion - Relations entre hydrodynamique et cinématique
Considérons un écoulement uniforme du point de vue de l'hydro¬
dynamique, c'est-à-dire tel que le débit traversant deux sections de milieu
poreux distantes d'une longueur ^x d'un ordre de grandeur égal ou supérieur
à la dimension des sous- systèmes par lesquels on a représenté le milieu po¬
reux, soit constant dans l'espace et le temps, ou autrement dit un écoulement
tel que la vitesse de DARCY soit uniforme.
Si, dans un tel écoulement, on s'intéresse au mouvement particu¬
laire on s'aperçoit qu'une série de particules partant simultanément d'un même
point,ne se retrouvent pas toutes au même endroit après un certain temps A t,
mais dispersées autour du point que la considération de la vitesse de DARCY
ou plutôt la vitesse effective permet de prévoir ; ceci du fait principalement
de la tortuosité des trajectoires que chaque particule peut suivre dans les
canalicules du milieu poreux.
De plus, si on examine l'évolution de chaque particule au cours
de son mouvement on s'aperçoit que chacune se déforme assez considérable¬
ment en échangeant, du fait du mouvement brownien, des molécules avec les
particules voisines.
L'ensemble de ces deux phénomènes est appelé dispersion (sensu
lato) ou dispersion hydrodynamique.
Le premier est généralement distingué sous le terme de dispersion
mécanique (ou cinématique) ou convection : il est uniquement lié à la nature
de l'écoulement et à la nature microscopique du milieu poreux.
Le second est appelé diffusion moléculaire : il est lié à l'état
d'agitation thermique des molécules.
Macroscopiquement le phénomène de dispersion se traduit par le
fait que si les particules considérées ci-dessus sont constituées par un tra¬
ceur injecté avec une certaine concentration au point de départ, on constatera
une évolution de la concentration de ce traceur dans l'espace selon des profils
transversaux à la direction moyenne de l'écoulement (indiquée par la loi
de DARCY) ou encore si on observe en un seul point le long de cette direction
on constatera une variation de concentration du traceur dans le temps (voir
figure 2 et plus loin expériences de SLIGHTER).
Par diverses considérations de statistiques concernant la structure
du milieu poreux et d'hydrodynamique concernant l'écoulement à l'échelle mi¬
croscopique (microhydrodynamique) on peut montrer que la vitesse particulaire
peut se décomposer en deux termes :
v(t) =V + V.(t)
_ -»
où V est une vitesse moyenne égale à la "vitesse effective" (V/me) déduite
de la loi de DARCY
et V, (t) une vitesse instantanée traduisant la déviation de la vitesse particu¬
laire par rapport à la "vitesse effective".
On aura pour une même particule et pour un temps t assez grand :
Vi = Y / Vi d t = o
(la moyenne dans le temps de la vitesse instantanée est nulle pour une parti¬
cule) et à un même instant pour un volume U de milieu poreux d'un ordre de
grandeur égal ou supérieur à un sous-système
Vi d u = o
U
Ces mêmes considérations d'ordre statistique permettent de formuler
la loi qui doit régir la dispersion d'un traceur injecté dans un écoulement en
milieu poreux (à la condition expresse qu'il n'y ait pas adsorption du traceur
par le milieu poreux). La forme obtenue pour cette loi dépend d'ailleurs des
hypothèses d'ordre statistique et hydrodynamique que l'on peut faire au cours
du raisonnement sans entrer dans le détail de ces développements ni dans
celui de la signification physique des paramètres nouveaux qu'ils permettent
d'introduire, citons la forme la plus couramment admise, exprimée pour un
système de coordonnées cartésiennes (xi , i = 1,2,3) :
^c(D.. + Dd T..) -v-^ - C Vi
IJ IJ OX]ôt "dxi
avec :
C = concentration du traceur
Vi - vitesse effective (ou terme moyen de la vitesse particulaire)
Dd = coefficient de diffusion moléculaire
Dij - coefficient de dispersion cinématique
Tij = tenseur de dispersion du milieu
D'ij = Dij + Tij Dd = coefficient de dispersion hydrodynamique.
Dirtcy»on fnoy*nn»
e* jao/'C»f*r/r^^
A/ Illustration schématique du phénomène de dispersion cinématique des trajectoires
traceur & l'instant t«o
-0-
/. yt
B/ Effet de la diffusion chimique : dispersion de la particule
^oiit/ JirfJ*eyion
Di^piiv/i9H
C/ Conséquence : dispersion des concentrations
Figure 2
Trajectoires des particules, vitesse et
dispersion d'un traceur en milieu poreux
10
2. MESURE DE LA VITESSE A L'AIDE DE DEUX OU PLUSIEURS PUITS
2.1 . Historique
THIEM (6) en 1887 a été un des premiers à utiliser un traceur
pour obtenir une mesure de la vitesse du mouvement de l'eau souterraine.
Il a opéré dans des roches telles que les sables ou les alluvions gra¬
veleuses. Il fore plusieurs puits, injecte du chlorure de sodium dans
un puits amont et note le temps que met le chlore à apparaître en un
puits aval. Il prélève des échantillons d'eau à intervalles de temps
réguliers, dont il mesure la concentration en sel. Il porte la concentra¬
tion en fonction du temps écoulé depuis l'injection au puits amont
jusqu'au passage au puits aval.
SLIGHTER en 1901 et 1903 (16,17) a repris la méthode en utili¬
sant du CINH^. Au lieu de faire comme THIEM des prélèvements d'eau,
SLIGHTER suit la progression de l'électrolyte dans l'eau, à l'aide d'un
courant électrique.
Les puits sont forés en groupes, chaque groupe de puits cons¬
tituant une seule station de mesure de la direction d'écoulement et de
la vitesse d'écoulement. On localise le puits d'injection, et trois
autres puits forés à une distance d'environ 1,20 m du premier, et dis¬
tants les uns des autres de 60 cm.
11
Le puits C est localisé de façon à ce que la droite AC coïncide
avec la direction probable d'écoulement. La direction coïncidera avec la
pente locale de la surface piézométrique, et si on ne la connait pas, on
la déterminera avec les isopièzes. Plus les puits seront profonds, plus
ils seront éloignés les uns des autres. Les angles BAC, et CAD ne dé¬
passeront pas 3 0° .
Le dispositif expérimental utilisé par SLIGHTER est représenté
sur le schéma suivant :
Bo//ericA mpir^miyre
I d*cot/f
nopp»
Puifa amonf \/ \Zy Pu//,» ayo/
Fig. 4
La méthode est décrite très en détail dans (17). On se contente¬
ra de la résumer brièvement. On injecte dans le puits amont un electrolyte
fort, comme le CINH^, qui se déplace dans la direction de l'écoulement,
en rendant l'eau conductrice. Si l'eau se déplace dans la direction de
l'un des puits avals, B, C, D, le courant entre A et B, ou A et C, ou
A et D augmentera graduellement, et quand il atteint un des puits, il se
forme un court-circuit entre le tubage du puits et l'électrode interne,
provoquant une montée abrupte du courant. On obtient ainsi le temps sé¬
parant l'injection au puits A de l'arrivée. DIENERT (6) a utilisé une mé¬
thode différente et a abouti aux mêmes valeurs de vitesse. Il introduit
un colorant dans un tube central et le recherche dans des tubes enfoncés
aux sommets d'un pentagone de 1 m de rayon.
12
Il a également procédé de la manière inverse, c'est-à-dire en
introduisant un colorant dans les puits situés aux sommets du pentagone,
de 1 m de rayon, ces puits étant à différentes profondeurs. Il pompe dans
le tube central et il détermine le temps mis par le colorant pour parcourir un
mètre. Notons qu'il introduit un pompage.
DIENERT a, par ailleurs, apporté plusieurs modifications à la mé¬
thode de SLIGHTER, utilisant un electrolyte. Il déterminait le volume d'eau
V contenu dans le forage et sa teneur en chlore A . Il doublait cette teneur en
introduisant du chlorure de sodium, et mesurait la nouvelle concentration
en chlore a . Au bout d'un temps T on mesurait une teneur a de chlore,o
En négligeant la diffusion, on avait dans le forage un débit :
V f^o - a \d =
a - A
On corrigeait de l'effet de diffusion d' d'où D = d - d'. En divisant
D par la section, on obtenait la vitesse. Ceci est à relier à la méthode
moderne de dilution dans un forage.
2.2. Interprétation des données expérimentales
En fait que représente cette vitesse mesurée ? D'après
H. SCHOELLER (15) on enregistre d'abord la vitesse des filets liquides les
plus rapides, c'est-à-dire ceux qui circulent au milieu des pores ou dans
les plus gros pores, et non la vitesse moyenne des filets. On enregistre
ensuite les vitesses plus faibles, ce qui fait qu'un étalement des vitesses
se produit. Si l'on porte sur un graphique la concentration du traceur en
fonction du temps, on constate que l'on a une courbe de distribution de
GAUSS. D'après SCHOELLER les centres de gravité donnent les mesures
des vitesses moyennes.
13
Fiq. 5
Les temps de repère doivent être donnés par les centres de gravité
et non par la première apparition du colorant .
D'autres auteurs, notamment DANEL (4), considèrent que c'est
l'apparition du colorant qui donne la vitesse maximale et c'est cette va¬
leur qu'ils retiennent. Cet auteur pense que la vitesse effective mesurée
lors d'une expérience de traçage est inférieure ou au plus égale à la
moitié de la vitesse maximale correspondant à l'apparition du produit
injecté.
2.3. Exemples de mesure de vitesse dans une nappe à l'aide de traceurs et de
deux puits au moins
En fait on ne trouve pas beaucoup d'expériences récentes de ce
type relatées dans la littérature. Les expériences de traçage décrites,
sont en général effectuées dans les karsts. Pour les mesures de vitesse,
les expériences citées ont trait souvent aux traceurs radioactifs, et font
intervenir un pompage. On citera l'expérience réalisée par DEGOT,
LEVEQUE et al. (5), dans une nappe alluviale. Les injections de traceur
sont faites dans trois piézomètres situés autour du puits de pompage. Le
pompage à débit constant avait commencé 48 heures avant les injections,
ainsi le cône de dépression au voisinage du puits était à peu près stabili¬
sé. L'activité du traceur était mesurée à 200 m du puits de pompage à la
sortie de la conduite de rejet.
14
Le traceur utilisé était le Br^^^ q^ pour l'un des piézomètres le Br^^
et la fluorescéine. Dans ce dernier cas, les auteurs décèlent "d'abord une
première et courte bouffée d'activité enregistrée 3|4 minutes 3 0 secondes après
l'injection. Puis la fluorescéine a été vue deux minutes plus tard. Enfin l'ap¬
parition de l'activité principale a commencé 50 minutes après l'injection". Avec
les premières détections, on mesure une vitesse de 17,4 m/h, et pour la
deuxième détection, on obtient 11,3 m/h.
Cette façon de procéder soulève deux objections : on fait intervenir
un pompage, donc la vitesse dépend de ce gradient de charge arbitraire et
radial. D'autre part on n'est pas sûr d'avoir des écoulements linéaires.
Ces auteurs ont effectué plusieurs opérations de ce type. Notons ici
que ces mesures de vitesse nous par-aissent très relatives, car elles varient
considérablement suivant que l'on prend comme temps de repère la première
détection du traceur ou le maximum d'activité, que d'autre part elle dépend du
seuil de détection du produit utilisé, de l'appareillage de mesure. De toute
façon, on mesure la vitesse des filets les plus rapides, puis des moins rapides
comme le montre cette expérience, et non pas une vitesse moyenne. Mais pour
le problème qui nous occupe ici, à savoir d'appliquer ces mesures pour con¬
naître le temps que mettra un polluant éventuel injecté en un point A pour arri¬
ver en un point B, ce qui importe c'est bien cette vitesse maximale, c'est-à-
dire celle qui est déduite de la première apparition du traceur, en l'absence
de pompage.
En Israël, NIR, HAVELY, MANDEE, HARPAZ (14) ont réalisé une expé¬
rience du même type dans une nappe circulant dans du calcaire turonien. On a
injecté 60 mcie d'I-'-^^ et une solution de Kl entraîneur, dans un puits 1, et on
a pompé ensuite dans le puits 6 distant de 50 m. On a pompé 6 heures avant
l'injection, dans le puits 6, pour avoir un certain équilibre, ensuite le débit
était constant. On a porté l'activité en fonction du temps et en fonction du
volume pompé.
Le temps de transit du traceur était de 33 heures.
r
Selon les auteurs, ce temps de transit : t =V
r étant la distance entre les deux puits
V étant la vitesse d'écoulement.
15
Les auteurs utilisent les résultats de pompages d'essais et cette
valeur de t pour en déduire la perméabilité à partir de la loi de DARCY.
Signalons aussi une expérience relatée par KAUFMAN et ORLOB (10),
Quatre traceurs : fluorescéine, chlorure, dextrose etl-'-^l, étaient injectés
avec un certain débit par l'intermédiaire d'un puits de 3 0 cm de diamètre
dans la nappe située à 27 m de profondeur. On utilisait 23 puits de 15 cm
de diamètre situés en cercle autour du puits d'injection, pour suivre le
front du traceur. L'épaisseur de la nappe était voisine de 1,3 0 m, et l'aqui¬
fère était composé de gravier et sable. La quantité importante de Cl Na
nécessaire pour que l'on ait une concentration détectable au puits d'obser¬
vation situé à 150 m, a provoqué une séparation par densité, du traceur,
au voisinage du puits d'injection, et une arrivée sporadique du traceur
aux puits d'observation. On injectait de la même manière la fluorescéine
et le dextrose. Au bout de trois minutes on injectait 2 0 mcie d'P^^ sans
entraîneur. On constate que les vitesses maximales d'écoulement de la
nappe dépassent beaucoup la vitesse moyenne. L'll31 a été détecté bien
après la fluorescéine et le dextrose.
HAZZAA (7,8) utilise également les traceurs pour obtenir des mesu¬
res de vitesse. Il a opéré soit par la méthode de dilution dans un forage,
soit à l'aide d'un puits et de deux piézomètres. On examinera la deuxième
méthode. On dispose d'un puits W et de deux piézomètres P-, et Po
situés respectivement à des distances x-, et X2 du puits W.
W .PI
FiQ. 6
16
Un isotope radioactif est injecté en P^ . On le laisse se déplacer
avec l'écoulement naturel. Au bout du tempsTXj^, le front du traceur se trouve
au point a-|^ , la droite P-^ a-, faisant un angle *f. avec la droite joignant W à
Pl . La distance parcourue est égale à vT^ . Au tempsiL on commence à pomper,
en W au débit Q^ . Si le front de traceur atteint W au bout du temps t. .1 1
^e
b
d
d'où
e ^d^b
porosité effective
débit de pompage
épaisseur de l'aquifère
rayon du cylindre contenant l'eau pompée.
D'autre part :
dJ-- xf + (vT^ )^- 2 v77^ . x^ COS 4)^
On obtient :
On répète l'expérience dans ce piézomètre. On aura
^j^ = x^^MvT^)^-2vr^.x, cosc^^
l L^- i^) x^ -¡X^Q^ h \' ^Tôg b
La même expérience est répétée dans un piézomètre ?£ , Les auteurs
font ensuite la moyenne des valeurs de v obtenues.
Cette méthode suppose que la nappe est rigoureusement homogène
c'est-à-dire que perméabilités, porosités et puissance de la nappe sont des
constantes et que la concentration en marqueur est constante sur une vérti- .
cale. Ceci limite un peu son intérêt.
17
2.4. Exemples de mesure de vitesse dans une nappe à l'aide de traceurs et
d'un seul puits ("single well")
2.4.1. M£tliode_de_p^ii^ljjon_en_ puit s^ ir'I^iSy ÊJ.Î.'lJff^^LQÍI-í'Hif _P.°.'ïîP53f
Les premières expériences ont été réalisées semble-t-il par
les Israéliens. MANDEE (13) relate une expérience effectuée en Galilée.
Le but de la manipulation était de faire une mesure directe de la "vite s se
physique" d'écoulement. On a injecté dans un puits, de petites quan¬
tités variant de 1 0 à 1 000 /(cie de K3 CO^O (CN) qu'on laissait se
déplacer avec l'écoulement naturel pendant 15 minutes à,94 heures
suivant les cas. On récupérait ensuite le traceur par pompage dans le
même puits. Les courbes d'activité étaient très asymétriques avec une
partie ascendante démarrant après le pompage, des pics pendant 7 à 25
minutes et des parties descendantes s'étendant sur 20 à 120 minutes
après le début du pompage.
L'interprétation était basée sur les équations :
r = V T
V = Qt = pbrr^= p bTv^-C^
T : intervalle de temps entre l'injection et le début du pompage
t : temps depuis le début du pompage
V : quantité d'eau pompée
Q : débit de pompage
V : vitesse physique d'écoulement ou vitesse de terrain
p : porosité effective
b : épaisseur de l'aquifère
TV vpb^ V ypb^r
On trouve -;/- , en connaissant p et 1? , et en faisant plusieurs
expériences pour faire varier T . Ceci suppose que la vitesse naturelle
est négligeable devant la vitesse de l'écoulement due au pompage et
que l'injection du marqueur ne modifie pas l'écoulement naturel, ce qui
est en fait un peu contradictoire.
Pour définir le temps représentatif de l'arrivée du traceur,
les auteurs ont pris le pic d'activité.
La vitesse obtenue était de l'ordre de 0,6 m/jour. Dans (3)
BOROWGZYK, MAIRHOFER, ZUBER, utilisent la méthode du puits unique
et reprennent la formule déjà utilisée par MANDEE :
r = vV
Qt = pbT'^*'
avec les mêmes significations pour les paramètres.
D'après les auteurs, la difficulté réside dans la détermina¬
tion du temps t , c'est-à-dire de l'instant d'arrivée du traceur. Par
suite de la dispersion du traceur et de l'écoulement radial dû au pom¬
page, le pic de concentration ne représente pas le temps de transit
du traceur.
Les auteurs utilisent comme temps de transit, le temps au
bout duquel on a retrouvé 50 % de la quantité de traceur récupérée,
et non pas de la quantité injectée car une partie du traceur est perdue
par adsorption.
Il sera d'autant plus difficile de déterminer le temps de tran¬
sit que l'hétérogénéité de l'aquifère sera plus grande.
2.4.2, Iyfê^thpde_de jdi2uüon_dan&j¿n_ jeul j^^^ )
Les mesures de vitesse par la méthode du puits unique ont
été ensuite reprises par différents auteurs dont BOROWGZYK,
MAIRHOFER et HAZZAA, mais ce n'est pas à proprement parlé la mé¬
thode de pulsion , c'est la méthode dite de dilution dans un
forage. MAIRHOFER (11,12) a trouvé qu'après injection d'un isotope
19
dans un forage, cet isotope est adsorbe principalement dans la direction de
l'écoulement. En faisant tourner dans le forage, une sonde pourvue d'une
fenêtre, on peut déterminer la direction de la plus grande intensité de rayon¬
nement, c'est-à-dire la direction de l'écoulement. Il est par conséquent in¬
dispensable que l'isotope soit un peu adsorbe par le sol au voisinage du
forage.
D'après BOROWGZYK (2), le temps nécessaire pour le transport de
l'isotope se déduit de :
V , ^v^ = - r ln
^a
V
F
t
'a Ft <^o
vitesse apparente
volume dans lequel se fait la dilution
section efficace du volume mesuré
intervalle de temps entre les mesures des concentrations c et c
Si l'on fait intervenir un coefficient oC tenant compte de la déformation
du flux horizontal, due à la présence du forage :
V , cV f = - , . In
^Ft Co
vf : vitesse de filtration
BOROWGZYK utilise une sonde identique à celle de MAIRHOFER. Il
détermine la direction de l'écoulement en déplaçant la sonde sur la paroi du
forage, tous les 45° par exemple. Les vitesses de filtration étaient mesurées
par la méthode de dilution ponctuelle. L'introduction du traceur se fait à l'aide
d'une seringue ou en brisant une ampoule ; à une ou plusieurs profondeurs.
Après injection et mélange, on fait les mesures avec une sonde à la profondeur
désirée. Une sonde spéciale, pour cette technique, comporte généralement un
injecteur qui libère le traceur dans un volume déterminé dans lequel il est
mélangé continuellement, et un instrument de mesure, GEIGER-MULLER, ou
compteur à scintillation.
20
Remarque
Il ressort de tous ces essais que d'une expérience à l'autre, la
vitesse mesurée n'a pas forcément la même signification dans tous les cas.
Les expériences qui ne mettent pas en oeuvre un pompage, donnent les seules
mesures qui correspondent à la vitesse de terrain. Elles impliquent que l'on
connaisse la direction d'écoulement.
Les méthodes modernes utilisant un seul puits donnent la mesure :
soit de la vitesse de terrain naturelle, dans le cas de la méthode de dilution
dans un forage, soit une "vitesse physique" dans le cas de la méthode de
pulsion en puits unique, c'est-à-dire injection suivie de pompage. Dans ce
dernier cas la vitesse mesurée ne doit pas être la vitesse de terrain. Elle est
plus grande puisque l'on fait intervenir un pompage.
Le pompage crée un gradient, donc perturbe les conditions natu¬
relles.
La question reste posée de savoir si les mesures de vitesse obte¬
nues par ces méthodes, sont valables. Il semble que oui, mais chacune a ses
limites et ne doit être appliquée qu'avec des conditions établies.
Quelques exemples
Auteur
MANDEE
SUCHTER
THIEM
HUG
HUG
de valeurs de vitesses
roche
calcaire
alluvions
sable fin
alluvions
alluvions
grossières
de terrain mesurées
vitesse
0,6 m/jour
1 à 5 m/jour
3,5 0 à 4 m/jour
1 à 1 0 m/jour
3,50 m/jour
21
CONCLUSIONS
La détermination in situ de la vitesse d'écoulement d'une nappe souter¬
raine par traçage a été réalisée dès le début de l'utilisation des traceurs. Ces
méthodes mises en pratique par SLIGHTER, DIENERT, semblent faciles à mettre
en oeuvre. Quand on cherche à la fois la direction d'écoulement et la vitesse,
les méthodes mises au point par les auteurs modernes sont intéressantes, mais
plus difficiles à mettre en oeuvre, et leurs résultats sont plus délicats à analyser.
Dans tous les cas, il est essentiel de ne pas perdre de vue que la
vitesse de terrain déterminée par ces méthodes traduit à l'échelle macroscopique
la moyenne d'un ensemble de vitesses particulaires microscopiques : elle n'a
qu'une signification cinématique moyenne et statistique, dépendant de la procé¬
dure expérimentale appliquée et du temps de transit mesuré. Cette vitesse ne
peut être reliée analytiquement aux vitesses macroscopiques conceptuelles qui
dérivent de la vitesse de filtration de DARCY (vitesse effective) et n'ont pas de
signification cinématique.
C'est pourquoi la validité de ces méthodes est douteuse dans une
perspective hydrodynamique. Mais inversement les vitesses macroscopiques
théoriques considérées en hydrodynamique n'ont qu'une portée pratique très
restreinte pour déterminer les temps de transit réels de l'eau dans un milieu
aquifère. Les méthodes expérimentales utilisant des traceurs ont donc un large
champ d'application.
En pratique, dans le cas où l'on veut déterminer la vitesse de terrain,
pour l'appliquer à des études de propagation d'un polluant dans une nappe, il
paraît nettement plus sûr d'opérer avec les méthodes consistant à suivre l'écou¬
lement naturel entre un puits amont et un puits aval, la direction d'écoulement
étant déterminée indépendamment.
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