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1 Université de Provence Département des Sciences de l’Education Année 2007-2008 Florence Saint-Luc Sous la direction de Jeanne Mallet Mémoire Master recherche 2 Education, systèmes d’apprentissage, d’évaluation et de formation Soutenue le 3 juillet 2008 Formation des enseignants dans une association coopérative : le cas d’un projet d’établissement secondaire Freinet

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    Universit de Provence

    Dpartement des Sciences de lEducation

    Anne 2007-2008

    Florence Saint-Luc

    Sous la direction de

    Jeanne Mallet

    Mmoire

    Master recherche 2

    Education, systmes dapprentissage, dvaluation et de formation

    Soutenue le 3 juillet 2008

    Formation des enseignants dans une

    association cooprative :

    le cas dun projet dtablissement

    secondaire Freinet

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    Plan

    Introduction ..............p.5

    1 .Problmatique pratique : .............p.10

    1.1 . La pdagogie Freinet .............p.10 1.1.1 Clestin Freinet ...............p.10

    1.1.2 Un mode de travail pdagogique ............. ...p.11 1.1.2.1 Les 4 axes .................p.11

    1.1.2.2 Education du travail ..............p.15 1.1.2.3 Le rapport lerreur .............p.15 1.1.2.4 Ouverture sur la vie ..............p.16 1.1.2.5 Emergence et gestion de projets................p.17 1.1.2.6 Les complexes dintrts ..........p.17 1.1.2.7 Pdagogie Institutionnelle, institution, institu, instituant........p.18

    1.1.3 LInstitut Coopratif de lEcole Moderne..........p.19 1.1.3.1 Historique .........p.19 1.1.3.2 Organisation ..........p.20 1.1.3.3 Rencontres ................p.21

    1.1.4 Un exemple de secteur : le Second Degr dans lICEM ................p.22 1.1.5 Un exemple de groupe dpartemental ...........p.25

    1.1.5.1 : Historique ..............p.25 1.1.5.2 Organisation ........p.26 1.1.5.3 Ecoles Freinet dans le dpartement.............p.27 1.1.5.4 Projet de collge lyce Freinet .............................p.27 1.1.5.5 Rencontres au sein de lIDEM..............p.30

    1.1.6 Le niveau rgional..........p.30 1.1.6.1 : Historique ...........p.30 1.1.6.2 Organisation .............p.31 1.1.6.3 Rencontres ...........p.31

    1. 2 Praxis et poisis, formation, et professionnalisation ................p.32 1.2.1 Praxis et poisis ..........p.32 1.2.2 Formation ............p.33

    1.2.2.1 Auto-formation ............p.33 1.2.2.2 Co-formation ............p.34 1.2.2.3 Ecoformation et htroformation ..........p.34 1.2.2.4 Trans-formation ............p.35

    1.2.3 Professionnalisation, professionnalit et agir professionnel ...........p.35

    1.3 Coopration, implication dans la vie associative, parrainage, et travail en quipe ........p.36

    1.3.1 Coopration...........p.37 1.3.2 Implication dans la vie associative...........p.37 1.3.3 Le parrainage, le tutorat, laccompagnement, le compagnonnage...........p.38 1.3.4 Le travail en quipes ..........p.39

    1.4 Expression communication cration ............p.40 1.4.1 Lcriture et les changes oraux ..........p.40 1.4.2 Les expositions ............p.40

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    1.4.3 Les spectacles ...p.40

    1.5 Lindividualisation des apprentissages ..........p.41

    1.6 Le travail et le matrialisme pdagogique .............p.42

    1.7 Relation entre ttonnement exprimental, rflexivit et rapport lerreur dans la pratique professionnelle : la posture exprimentale .............p.43

    1.8 Louverture sur lextrieur et les complexes dintrts ............p.44 1.8.1 Louverture sur lextrieur ....................p.44

    1.8.1.1 Les mouvements pdagogiques......................p.44 1.8.1.2 Louverture la recherche .........................p.45 1.8.1.3 Louverture linternational ..............................p.47

    1.8.2 Les complexes dintrts .p.47

    1.9 Synthse de la problmatique pratique .............p.48

    2. Eclairages thoriques .p.49

    2.1 Recrer du mtier : les thories de laction ......................p.49

    2.2 Apprentissage et formation ..............p.50 2.2.1 Apprentissage social...............p.50

    2.2.2 Apprentissage situ.............p.50

    2.3 La dynamique de groupe ..........p.51 2.3.1 Les runions ............p.51

    2.3.1.1 Typologie de runions ..............p.51 2.3.1.2 Les conditions de russite dune runion .............p.52

    2.3.2 Lcole de Palo Alto...............p.55 2.3.3 La dynamique des groupes restreints ..........p.56

    2.4 Lapproche philosophique ...............p.58 2.4.1 Phnomnologie et sens ..............p.58 2.4.2 Interprtation et hermneutique .................p.59 2.4.3 Le projet comme processus .............p.60

    2.5. Lapproche complexe ......p.61 2.5.1 Multirfrentialit ...........p.61 2.5.2 Incertitude et auto-organisation .........p.62 2.5.3 Auto-co-r organisation ............p.62 2.5.4 Interactions, rtroactions, rcursivit, lien.........p.63 2.5.5 Entropie et nguentropie............p.63 2.5.6 La connaissance comme naction ..........p.64 2.5.7 Intelligence organisationnelle, intelligence collective ...........p.64 2.5.8 La richesse et les ambiguts du concept dorganisation apprenante.........p.66 2.5.9 Le lien : du rseau lorganisation apprenante, vers la communaut de pratiques........p.66

    2.6 Synthse et notre hypothse de recherche .........p.70

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    3. Mthodologie ..p.72

    3.1 La posture du chercheur ........p.72 3.1.1 Ethnomthodologie et ethnographie constitutive ........p.72 3.1.2 Observation participante .........p.74

    3.2 Mes choix mthodologiques .........p.75

    3.2.1 Lobservation...........p.74 3.2.2 Les questionnaires...........p.74

    3.3.2.1 Les questionnaires ouverts ...........p.74 3.2.2.2 Le questionnaire ferm. ........p.76

    3.2.3 Le travail sur documents .........p.77 3.2.4 Le journal de bord ...p.77

    3.3 Les rsultats ......................................................................................................................p.77

    3.3.1 Les rsultats des questionnaires...p.77 3.3.1.1 Principaux lments significatifs .p.78 3.3.1.2 Interprtation ...p.86

    3.3.2 Les rsultats de lobservation ...p.87 3.3.2.1 Principaux lments significatifs ..p.87 3.3.2.2 Interprtation . p.115

    3.3.3 Les rsultats du travail sur documents .. p.117 3.3.3.1 Principaux lments significatifs ... p.117 3.3.3.2 Interprtation ..p.126

    3.3.4 Le journal de bord .. p.126 3.3.4.1 Principaux lments significatifs ... p.127 3.3.4.2 Interprtation . p.137

    3.3.5 Croisement des rsultats p.138 3.3.5.1 Principaux lments significatifs p.138 3.3.5.2 Interprtation ..p.142

    3.4 Synthse des rsultats et interprtations ...........p.145

    4. Pistes pour laction . p.148

    Conclusion .................................................................................................................................. p.152

    Bibliographie . p.155

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    Introduction

    Le champ de la formation professionnelle des enseignants mintresse depuis longtemps. En master 1, jai

    choisi dtudier la professionnalisation des enseignants en primaire, prise de risque et source dangoisse, les

    apports possibles du mouvement Freinet. Ce sujet sest prcis pour moi par rapport un thme de recherche

    prsent par Samuel Joshua : comment se forme-t-on en dehors de la forme scolaire ? Quels sont les modes

    spcifiques de formation dans un syndicat ? Dans une association ? Cela ma renvoy mon propre cursus. Je me

    suis forme lEcole Normale, avec lexprience professionnelle sur le terrain. Tout au long de mon parcours

    professionnel, jai lu des livres autour des sciences de lducation. Mais la vie associative a pris une norme place

    dans mon processus de professionnalisation, au sein du mouvement Freinet, travers dabord le groupe

    dpartemental, puis le groupe rgional, ensuite lInstitut Coopratif de lEcole Moderne, puis la Fdration

    Internationale de lEcole Moderne.

    En tant que titulaire mobile, jai eu loccasion de remplacer des enseignants dbutants, et parmi eux, den

    rencontrer qui taient dprims par le fait de se sentir seuls face des contextes complexes et difficiles. Je me suis

    donc interroge sur la formation professionnelle telle quelle est dlivre en Institut Universitaire de Formation

    des Matres, et sur la formation continue. Paralllement, en master 1, lors dentretiens cliniques, jai suivi un

    jeune enseignant qui a particip un stage dinitiation national la pdagogie Freinet ; un des formateurs

    travaillait lcole lmentaire Hlne Boucher de Mons en Baroeul, une des deux coles dun groupe scolaire

    suivi par le laboratoire Thodile1. Cest grce ce professeur des coles dbutant que jai connu cette recherche :

    elle a t mene durant 5 ans et a apport des clairages trs intressants sur les effets de la pdagogie Freinet

    applique par cette quipe dans un milieu trs populaire et prcaire.

    Linspecteur de la circonscription, membre de lICEM, est la base de cette ide douverture lvaluation

    universitaire de ce projet dquipe. Les effets sur ces enfants en contexte social, conomique et familial prcaire

    se sont rvls trs positifs sur bon nombre daspects : rapports avec lcrit, relation lerreur, sentiment de

    scurit dans lenceinte de lcole, construction cooprative de normes et pacification, prise en charge diversifie

    et cooprative des lves en difficults... Lvaluation au collge a permis de montrer le prolongement chez les

    sujets au sein de lenseignement secondaire. Dans la prsentation des rsultats, la notion de cohrence lintrieur

    du systme ouvert mis en place, comprenant lui-mme des sous-systmes, est apparue trs clairement, tout en

    pointant des aspects dialogiques. Elle a mis en vidence lexpertise des enseignants, tenant des rles trs divers

    1 THODILE. enseignants chercheurs luniversit Charles de Gaulle-Lille 3 ou lIUFM du Nord-Pas-de-Calais Spcialistes de

    lducation, ils sont sociologue (Carra, membre du CESDIP), psychologues (A.-M. Jovenet, M. Pagoni), didacticiens du franais, crit (B.

    Daunay, M. Fialip-Baratte, Y. Reuter) ou oral (I. Delcambre, R. Hassan-Pilartz), de lhistoire-gographie (G. Bcousse), des

    mathmatiques (D. Lahanier-Reuter) ou des sciences (C. Cohen-Azria).

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    la manire dhommes orchestres, mettant en tension souplesse et rigueur, individu et collectif, et un trs grand

    engagement. Comment ont-ils pu atteindre ces comptences de haut niveau leur permettant :

    - de faire changer le regard sur lcole denfants de milieu populaire, et particulirement denfants en

    souffrance parmi eux ?

    - de transformer pour eux le travail en une activit passionnante et panouissante ?

    Partant de ma connaissance du mouvement Freinet, jai voulu montrer comment seffectue la formation dans

    lassociation. Jai moi-mme particip lanimation de stages dinitiation la pdagogie Freinet, en France, dans

    le cadre du plan dpartemental ou national de formation, et au niveau international avec des trangers, autour de

    congrs de lICEM ou dans diffrents pays dEurope de lEst (Roumanie et Bulgarie) et en Colombie. Le

    mouvement dispose dun vritable savoir-faire en matire de stages, mais la mise en place dans les classes peut se

    rvler angoissante et comporter des risques. Le problme est dautant plus difficile que la pdagogie Freinet est

    en fait un systme complexe : dmarrer en prenant juste un petit bout rend lentreprise dlicate, tant lensemble

    des aspects y sont en interaction.

    Dans le mme temps, je me suis largement intresse la pense complexe, et cet intrt sest renforc depuis

    la reprise de mes tudes en sciences de lducation. En tant quenseignante, institutrice, puis professeur des

    coles, je ne sais si mon rapport au savoir est lorigine, ou est une consquence du choix de ma profession, dont

    le postulat de base est la polyvalence. Les deux sont certainement intimement lis dans mon histoire de vie. Il

    nexiste pas de cloisonnements pour moi dans la connaissance, dautant moins que depuis 1982, jessaie de me

    former et dappliquer la pdagogie Freinet, un paradigme ducatif inventif de nature systmique (Lmery, 1996).

    Auto-organisation, incertitude, dure, taient les trois thmes traits lors du congrs de lInstitut Coopratif de

    lEcole Moderne Sophia Antipolis, en 2006, linitiative de Nicolas Go. La complexit a t prsente de

    manire gnrale par deux intervenants, Jacques Ardoino et Andr Giordan, et traite par des praticiens, dont un

    certain nombre travaillent dans le laboratoire coopratif de recherche, lanc cette occasion et anim par Nicolas

    Go2. En 1972, dans un texte collectif de prsentation de lICEM, il tait crit : De plus en plus la simple

    reproduction de schmas de pense appris se rvle inapte rsoudre les problmes de l'homme dans la socit

    moderne. Il ne suffit plus d'apporter des solutions toutes faites des problmes dj poss, de se tirer aux

    moindres frais des situations dans lesquelles on s'est laiss mettre. Il s'agit au contraire d'viter de se laisser

    enfermer dans une situation, de garder l'initiative, de faire oeuvre d'imagination. En observant un monde o

    chacun est sur la dfensive et se glorifie d'avoir vit le pire, on conoit l'urgence d'une mutation de

    l'ducation. (ICEM, GET et al., 1972, p.163). Nicolas Go se demande si on peut faire lapprentissage dun

    comportement complexe sans lexercer ds le dbut dans sa complexit. (Go N., 2007)

    2 Exemple de compte-rendu de travail du laboratoire : http://www.icem-pedagogie-freinet.org/travail-

    cooperatif/espace_organisation/rencontres/congres/bilan/comptes-rendus-d-ateliers/laboratoire-cooperatif-de-recherche-1

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    Edgar Morin pose le dfi de la complexit pour le XXIme sicle, dans La tte bien faite et Les sept

    savoirs ncessaires lducation du futur (Morin, 2000). Les cinq finalits ducatives ultimes pour lui sont:

    laptitude organiser la connaissance, lenseignement de la condition humaine, lapprentissage du vivre,

    lapprentissage de lincertitude et lducation citoyenne. Il dnonce la fragmentation des savoirs en disciplines et

    les parcours parallles des spcialistes.

    Cette pense disjointe peut mme sobserver pour les lves anciens ou actuels du systme ducatif, tous les

    niveaux, qui ont cr une frontire tanche entre les savoirs de lcole et la vie. Dans les milieux populaires, le

    rejet de lcole est massif, le rapport au savoir est dun type particulier (Bautier, Charlot, Rochex, 1992). Mme

    chez les bons lves , les tudiants , on observe un effet de poisis (Imbert): on fait des produits conformes.

    On est quitte quand on a rendu sa copie. On ne fait rien de la connaissance pour soi, qui nest pas intgre. Les

    lments entre disciplines ne sont pas relis dans un travail personnel, ne sont pas transfrs dans dautres

    domaines de connaissance, sont oublis dun mois sur lautre, dune anne sur lautre.

    Plus grave encore, il y a une sparation totale entre ces connaissances et la vie. Deux exemples pour illustrer ce

    fait : une tudiante en chimie qui faisait des mnages au campus de Grenoble a mlang de lacide chlorhydrique

    et de lammoniaque et a t victime de blessures graves Les lves sortants de lIUFM tmoignent trs

    majoritairement du gouffre qui spare ce quils ont appris en formation de leurs pratiques de terrain. Ils

    reprochent leurs formateurs de ne pas rpondre leurs questions et de leur apporter des savoirs qui ne sont pas

    demands.

    Le manque de cohrence entre les thories et les pratiques de formation semble galement tre un obstacle dans

    leurs apprentissages (Saint-Luc, 2007). Donner du sens aux apprentissages est la rponse officiellement

    apporte ce problme. On voit ici apparatre lapproche hermneutique. Le sens peut tre donn par un projet.

    La pense pragmatique considre ltre humain comme un tre en projets (un auteur). Derrire ce concept se

    profile la notion de praxis, oppose poisis (Imbert) : en faisant, on se fait, laction construit Dans lagir

    professionnel, dans cette conception, le mtier construit lidentit. Agir, cest voluer, se rorganiser, se

    recombiner. La prise en compte des projets personnels semblerait donc tre un lment de construction dune

    praxis pouvant conduire la professionnalisation, comme processus inachevable, comme dsir de bien faire.

    Un autre effet de la pense disjointe est lincapacit de rpondre de manire adapte la mondialisation et

    surtout des problmes qui recouvrent plusieurs champs disciplinaires comme le dveloppement durable

    conomique et cologique par exemple. La formation scientifique cloisonne en disciplines peut faire perdre la

    dimension thique ; pourtant, Science sans conscience nest que ruine de lme , crivait Rabelais.

    Il apparat donc la ncessit de relier les connaissances et de construire une pense complexe. Les sept

    savoirs pour lducation du futur proposent des pistes pour aller dans ce sens. Existe-t-il un mode de travail

    pdagogique qui permette une approche dialogique formant la pense complexe ? Existe-t-il un mode de

    formation qui permette une approche pragmatique ? Une ducation scientifique peut-elle galement tre thique ?

    Une approche rationaliste peut-elle prendre en compte lintuition, lalatoire, limprvu ?

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    Il existe une proximit trs grande entre les pratiques de lICEM, que lon tente prsent de thoriser, et les

    principes de base noncs par Edgar Morin dans Les sept savoirs ncessaires lcole du futur (Morin, 2000).

    Yves Reuter crit ainsi : Cela signifie [] que diffrentes formes de pense, notamment convergente et

    divergente, sont constamment sollicites et cela dans de nombreuses matires, remettant ainsi en cause certains

    fonctionnements scolaires classiques tels la dominance des exercices appelant la convergence et le cloisonnement

    disciplinaire. (Reuter, 2007, P. 24), et un peu plus loin, toujours dans un sens proche des objectifs noncs par

    Morin : Dans ce cadre sinscrit encore la place fondamentale accorde la production dhypothses et

    lexprimentation ainsi que la gestion permanente de la mise en tension entre rigueur et libert, et, de manire

    saisissante, en comparaison avec les modes de fonctionnement scolaire dominants ailleurs, laccent port sur le

    fait quil existe, en gnral, de multiples solutions un problme, diffrents chemins pour atteindre un objectif.

    JL Le Moigne crivait en 2003, dans une note de lecture propos dun ouvrage sur lintelligence collective

    (Bonabeau E., G Theraulaz G., 1994) : On se dit, en achevant ce livre, qu'il faudra sans doute le r-crire dans

    quelques annes (surtout le premier et les deux derniers chapitres) lorsque les concepts d'appui se seront mieux

    assurs pistmologiquement, et lorsque la boucle de l'intelligence collective se sera complexifie par la prise en

    compte de la smiotique et de la pragmatique dans la modlisation du comportement des agents.

    En convergence avec tous ces aspects, jai souhait tudier le rapport entre intelligence collective et formation

    des enseignants dans une organisation cooprative. De manire plus concrte, et afin de rduire mon champ

    dtude pour des raisons de faisabilit, pour mon travail de recherche en master 2, jai choisi de prendre le cas

    dun projet dtablissement secondaire Freinet comme une mergence de lInstitut Coopratif de lEcole Moderne

    et dun Institut Dpartemental de lEcole Moderne. Ce projet, que nous nommerons E, verra son dmarrage sous

    une forme rduite (une version dessai, avec deux classes de collge et une classe de lyce) en septembre 2008.

    Pour cerner le sujet, la problmatique pratique prsente dabord la pdagogie Freinet et ses grands principes,

    afin de comprendre comment est construite cette approche et en quoi elle est complexe. Dans un deuxime temps,

    la description de lInstitut Coopratif de lEcole Moderne et de ses instances dpartementales et rgionales devrait

    permettre dinscrire le projet dtablissement secondaire innovant E de manires diachronique et synchronique.

    La partie traitant de praxis et de poisis tablit une articulation entre pdagogie et andragogie, car elle se trouve au

    carrefour. Les diffrentes formes de formation possibles sont alors dclines, permettant de dboucher sur les

    concepts de professionnalit, de professionnalisation et dagir professionnel. La prsentation essaie damener des

    parallles entre pdagogie et andragogie, ceci afin de montrer un possible isomorphisme entre les pratiques dans

    les classes et la construction dune praxis professionnelle lintrieur du mouvement Freinet, justifis par un

    besoin de cohrence.

    Les clairages thoriques sont alors pertinents pour dterminer le rle du collectif professionnel, et la manire

    dont se construit le mtier, travers les concepts de genre et de style professionnels. Les diffrentes notions

    prsentes autour de lapprentissage sont lies une conception de la formation comme alternance, et elles

    permettent de cibler le rle du groupe. Les fonctionnements et effets de ce dernier sont alors tudis dans le cadre

  • 9

    de la psychosociologie : des outils sont ainsi proposs pour analyser les runions, que lon peut tendre aux

    formations, et les interactions. Lapproche philosophique permet de poser limportance des notions de sens et de

    projets, cadre dinterprtation de lethnographie constitutive dcrite dans la partie concernant la mthodologie. La

    description de la pense complexe donne les concepts ncessaires une approche multirfrentielle,

    interactionniste et systmique ; cette dernire nous amne reconsidrer le groupe en dfinissant lintelligence

    collective, le rseau, lorganisation apprenante et la communaut de pratiques. Ce sont ces dernires notions qui

    servent de base la description des milieux dans lesquels pourrait se co-construire une formation un mode de

    travail pdagogique complexe, li lauto-organisation, la dure et lincertitude : tout ceci apparat comme

    essentiel au traitement des rsultats.

    La dernire partie amne des pistes de rflexion sur les intrts possibles des rsultats de cette recherche et les

    questions dvelopper ou axes poursuivre.

  • 10

    1 .Problmatique pratique :

    Initialement, je souhaitais tudier le processus de formation dans le groupe dpartemental en liaison avec le

    niveau national, et particulirement la co-formation, sujet sur lequel on trouve trs peu de textes disponibles. Jai

    rencontr en octobre une personne du groupe E, qui ma propos un suivi de ce projet. Jai accept, parce que ce

    choix mest apparu comme opportun pour pouvoir tudier le fonctionnement de la formation pour un groupe de

    jeunes professeurs, en liaison avec le groupe dpartemental, le groupe rgional, et le niveau national du

    mouvement Freinet.

    La localisation du travail sur le milieu du secondaire, que je ne connais pas, et dans un groupe dpartemental

    que je nai jamais frquent, devait mapporter un sentiment dtranget assez grand pour pouvoir prendre du

    recul sur les marqueurs et caractristiques de la formation au sein du mouvement Freinet. Pour commencer ce

    travail, il semble ncessaire de dfinir ce quest la pdagogie Freinet.

    1.1 . La pdagogie Freinet

    Janou Lmery a pos la question : La pdagogie Freinet, est-ce une mthode ou une organisation

    systmique ? . Elle rpond que la pdagogie Freinet, par ses organisations diversifies, selon les classes

    d'un modle social interactif, coopratif d'auto-dveloppement de l'enfant, se prsente aujourd'hui non pas

    comme une mthode, mais comme un paradigme ducatif inventif, de nature systmique, porteur d'avenir.

    (Lmery J.,1996)

    Les fonctions de ce paradigme ducatif inventif sont de promouvoir la connaissance sous un mode

    symbiotique, la mise lcoute, de faire saisir quil existe une dialectique entre les parties et le tout, de mettre

    laccent sur lunicit et la globalit de la personne, de dvelopper la crativit, de sappuyer sur lhtrognit et

    les interactions rcursives entre personnes, communauts et environnement, au sein dun mutualisme

    dmocratique. Cette pdagogie est base sur les principes essentiels dfinis par Clestin Freinet.

    1.1.1 Clestin Freinet

    La blessure aux poumons de Clestin Freinet durant la Premire Guerre Mondiale entrana chez lui un refus

    du bellicisme et lamena dvelopper des stratgies o sa voix pouvait tre conomise. Il lut un certain nombre

    duvres pdagogiques, voyagea en Suisse (intrt pour Ferrire) et en Russie. Il cra le Mouvement de

    limprimerie lcole, adhra en 1927 au parti Communiste. En 1934, la suite de laffaire de Saint-Paul, o il

    fut poursuivi par Maurras et lAction Franaise travers les notables locaux, il fonda une cole prive Vence.

    Pendant la Deuxime Guerre Mondiale, il fut enferm puis assign rsidence, et en profita pour crire. En 1947,

    lInstitut Coopratif de lEcole Moderne (ICEM) est constitu, puis en 1957, la Fdration Internationale des

    Mouvements de lEcole Moderne (FIMEM). Au dbut des annes cinquante, une polmique des intellectuels du

    Parti Communiste le fait rompre avec ce dernier. Cet pisode a eu des consquences sur les rapports entre

    mouvement Freinet et universit pour une quinzaine dannes, suscitant des attaques du mode de travail

  • 11

    pdagogique.

    1.1.2 Un mode de travail pdagogique

    Pour comprendre les enjeux de la formation des enseignants de lquipe de ltablissement secondaire Freinet,

    il semble ncessaire de dfinir ce mode de travail pdagogique. La pdagogie Freinet est en fait un systme

    complexe, une auto-co-r-organisation. Selon Yves Reuter (Reuter, 2007, site du caf pdagogique): Ce qui est

    spcifique la pdagogie Freinet, cest larticulation de toutes ces dimensions. A notre avis, ce qui fait

    lefficience, cest le fonctionnement en systme. Je crois que ces enseignants l ne sont pas dans le flou, dans le

    confus. Ils ont une grande conscience de ce quils font. Nous avons t trs surpris de voir comment ils

    rpondaient de manire trs prcise nos questions. Il existe des formes de thorisation lies aux pratiques, qui

    nous ont impressionn. Le travail collectif, lexprience, amnent des clarifications trs pousses, trs loin de

    celles de lUniversit. Mais vous avez raison de soulever un paradoxe : cette cole est trs marginale, alors

    quelle est fond dans la prescription telle quelle existe dans les programmes. Ils arrivent raliser ce que

    linstitution-Ecole semble rclamer comme fonctionnement, sans arriver le mettre en uvre.Ce mode de

    travail est donc dfini comme complexe. Il soulve cependant un paradoxe : Comment le systme scolaire peut-il

    marginaliser un systme qui correspond des attentes officielles ? Il semble exister une redondance de cette

    question dans le projet dtablissement secondaire E, que nous tudierons plus en dtail un peu plus loin.

    La pdagogie Freinet considre lenfant comme un auteur, au sens o la dfini Ardoino, de ses

    apprentissages, li aux diffrents groupes auquel il est assujetti, dans une classe en lien avec diffrents milieux et

    avec la vie. Quatre axes sont articuls dans cette dmarche.

    1.1.2.1 Les 4 axes

    Ces 4 axes se doivent prsent dtre dfinis de manire plus prcise.

    Coopration

    Cooprer signifie oprer ensemble, avoir une uvre commune. La coopration suppose la libre adhsion

    de lindividu au projet dune autre personne ou dun groupe. Elle sous-entend la rciprocit, la parit de statut : si

    celle-ci nest pas constante, elle peut tre de lentraide mutuelle, c'est--dire le fait dentrer dans des relations

    successivement en position haute et basse, sur un mode de complmentarit. La coopration est en quelque sorte

    le ciment de la vie de la classe. Elle existe de manire transversale et se retrouve dans de nombreux autres

    domaines.

    Limpulsion, c'est l'ide (hypothse, projet, production) de l'individu. C'est grce au groupe qu'elle peut tre

    verbalise puis raisonne (elle devient l'expression cooprative). Il y a coopration quand le sujet a besoin des

    autres pour se raliser. Le dpart pourra tre l'mission d'hypothse(s) qui va se transformer grce la

    confrontation, c'est dire la mise en place d'un dispositif exprimental pour tester l'hypothse, ou le renvoi

    critique du groupe. C'est alors que va s'laborer le raisonnement.

    Dans la classe cooprative s'tablit un quilibre entre le groupe et l'individu. L'individu qui propose un projet,

    produit un objet, met une hypothse, reoit un renvoi du groupe. Le groupe se trouve enrichi par l'apport de la

  • 12

    personne. La critique du groupe va enrichir l'individu. Pour un mme sujet, cette interrelation avec enrichissement

    rciproque pourra s'effectuer plusieurs fois. Il y a l la ralisation du ttonnement exprimental; c'est cette

    dmarche que l'on va observer dans la mise en place de la mthode naturelle.

    Dans une classe cooprative, chacun est un noeud dans le filet, il y a cration d'un rseau avec des relations qui

    s'tablissent entre tous les membres. Des groupes de tailles et de dures variables peuvent se constituer autour de

    projets. Ces groupes sont constitus de personnes qui se ralisent, et pas seulement d'individus, (c'est dire

    l'opposition entre un et le collectif). C'est grce au groupe que quelqu'un peut verbaliser ses impulsions pour

    ensuite les raisonner. Ces groupes se sparent lorsque le but est atteint. La vie cooprative permet linstituant, et

    dveloppe lesprit critique, assorti de forces de propositions, dans un esprit de cration.

    Expression- communication cration

    Christiane Olivier (Fayard, 1998) a effectu une approche psychanalytique des faits de socit contemporains.

    Concernant la violence chez les enfants et les adolescents, elle pense qu'elle est due essentiellement l'absence

    d'autorit et de protection parentales. La consquence en est la construction de personnalits pourvues dun

    moi faible et dun a envahissant qui fait entrer dans une demande de consommation effrne ou lavoir

    prend le pas sur ltre. " L'ouverture au monde, l'Autre, par l'ducation, par l'initiation la musique, la

    lecture, la posie, donc par la sublimation (dtournement des besoins primaires vers une satisfaction de l'esprit)

    n'est pas faite. Sur les chemins de l'anti-violence, l'cole a donc un rle fondamental. Le dveloppement de

    pratiques artistiques et culturelles l'cole peut permettre aux enfants d'exprimer leur propre histoire travers la

    cration et favoriser l'ouverture un autre mode d'expression de leurs pulsions et de leurs dsirs."

    Lenvironnement propos doit tre riche, stimulant, avec la possibilit d'avoir des projets, tant individuels que

    coopratifs. Pour les enfants, (mais cela reste vrai pour des adultes, des tudiants), une imprgnation s'effectue

    dans le domaine culturel, mais paralllement l'enfant peut exprimer sa propre culture et celle de son

    environnement. Il est essentiel que le groupe et l'adulte respectent l'expression personnelle, permettent le

    ttonnement, les interactions, l'aboutissement. Enfin, il est capital que cette expression orale, crite, ou artistique,

    soit communique et valorise, quelle qu'en soit la manire. C'est cette condition que l'individu pourra

    s'panouir.

    La communication entretient et renouvelle la motivation. Quoi de plus dcourageant que de produire un

    travail, souvent sur demande, qui n'est pas communiqu ? L'ide de produire pour communiquer modifie l'nergie

    que l'individu (les individus) va (vont) mettre dans l'acte de cration et de production. Le regard des autres est

    essentiel pour exister. Il va permettre d'augmenter le niveau d'exigence dans la qualit de la production, sans pour

    autant mettre un objectif factice, comme une note, pour inciter l'individu aller jusqu'au bout de la ralisation du

    travail.

    Quelquefois, on peut produire pour soi, ou pour une personne, et vouloir que ce dvoilement de l'intimit

    profonde n'arrive pas au vu et au su du groupe ou d'un public plus large. Comment accepter alors qu'un travail o

    l'on a exprim une motion reoive une note arbitraire, rductrice et dcourageante ?

    Pour celui qui, timide, inhib, refuse au dpart de communiquer vers l'extrieur, la rgularit des priodes

    d'ateliers, de bilans, et l'aboutissement d'autres projets individuels, coopratifs ou collectifs, vont maintenir

  • 13

    une porte ouverte vers l'expression et la cration. Dans certains cas, avec le temps, elle va un jour tre emprunte

    et permettre l'individu de rvler des motions, d'exister en tant que personne. Les retours favorables du groupe

    vont lui donner confiance en lui, permettre de poursuivre le chemin vers l'panouissement.

    Cette manire de prendre en compte la personne propre lexpression, la communication, la crativit et la

    vie cooprative, intgre la voie heuristique, se trouve reprise dans la personnalisation des apprentissages, dans

    une voie plus didactique.

    Personnalisation des apprentissages

    Les apprentissages personnaliss peuvent donc se faire par la voie heuristique, mais on les retrouve plus

    structurs dans une organisation qui sert de recours-barrires , comme pouvait le dfinir Clestin Freinet dans

    Pour lcole du peuple, (Freinet, 1974, p.79) : Cette organisation est conditionne par la position pralable de

    ce que nous avons appel recours-barrires : famille, nature, socit, individualits, qui posent leurs barrires

    plus ou moins gnantes, mais que nous ne pouvons pas toujours reculer ni faire sauter, et qui peuvent tre en

    mme temps des appuis, des aides qui recueillent plus ou moins favorablement les recours que leur adresse

    l'individu en difficult.

    Cette notion de recours-barrires met en tension deux aspects, dune manire dialogique. Elle exprime le souci

    de fonctionner en systme ouvert : il est propos de transformer laspect barrire du systme ducatif, du milieu et

    du monde environnant, totalement habituel, pour en faire un recours, proposant ainsi une culture de

    lenracinement. Cette dernire soppose la culture darrachement, vision promue habituellement dans les

    classes. Les plans de travail individuels des lves sont articuls des plans de travail collectifs et des

    rfrentiels de comptences sur le mois et lanne, sans planification prcise : ils jouent le rle de recours

    barrire, mais permettent de garder une certaine souplesse pour noter les notions au fur et mesure quelles sont

    traites. La prparation de ces rfrentiels permet, grce leur laboration par les enseignants, de connatre les

    savoirs en jeu et daccompagner ainsi lanalyse a priori caractristique de la dvolution, telle quelle se prsente

    dans le cadre des situations de recherche. On retrouve l encore cette mise en tension entre rigueur et souplesse.

    Hormis le plan de travail, Freinet avait travaill sur les fichiers auto-correctifs, les bandes enseignantes. Il tait

    alors inspir par le behaviorisme et la pdagogie par objectifs. Dans ce cadre, un courant de lICEM a travaill sur

    valuation formative, puis ensuite formatrice :

    - salon des apprentissages personnaliss de Nantes,

    - travail avec Les arbres de connaissance (Authier, Lvy, 1992).

    La brochure Brevets et chefs duvre (Freinet, 1949) aborde cette dimension formatrice travers la

    notion de brevets inspire par Baden Powell et les Compagnons du Devoir. Il est possible encore de percevoir ce

    souhait dorganiser une valuation relie la fois au milieu, la vie, aux parents, et aux instructions officielles,

    ceci toujours dans une perspective de systme ouvert, connect dautres systmes et sous-systmes.

    Ces brevets sont lis des activits relles. Ils excluent ce que Freinet appelait la scolastique (terme que lon

    retrouve dans les Essais de Montaigne), c'est--dire pour Freinet une activit purement artificielle et fictive,

    caractristique du faux-problme .

  • 14

    Le dernier aspect parat connect avec le souci de relier les connaissances intgr une comprhension de

    lhumain : Les brevets ne doivent pas orienter l'ducation vers une formation d'troits spcialistes, mais vers

    une nouvelle culture, adapte aux besoins de notre sicle. Nous ne pouvons tout savoir, mais il faut que nous

    sachions ce que nous faisons, et non pas machinalement mais intelligemment et humainement en replaant sans

    cesse l'activit considre dans le cadre de la communaut scolaire et sociale dont elle n'est qu'un lment.

    (Freinet, 1949)

    Ces valuations mesurent ou apprcient des connaissances, des savoir-faire, des savoir-tre, des comptences

    Les acquisitions peuvent se faire dans diffrentes dmarches, mais lune dentre elle est un pilier des

    apprentissages en pdagogie Freinet : il sagit du ttonnement exprimental, intimement li la mthode

    naturelle.

    Mthode naturelle et ttonnement exprimental

    Le terme mthode naturelle constitue un oxymore, une contradiction profonde. Dans le mouvement Freinet,

    certains prfrent le terme dmarche naturelle . On peut aussi y lire une dialectique. Freinet prend pour modle

    celui de lapprentissage de la marche et de la parole. Elle soppose une mthode normative, par

    conditionnement, punitions et rcompenses. La part du matre y joue un rle essentiel, difficile cerner, qui subit

    des variations importantes dune personnalit lautre. Cette dimension relve souvent de lexpertise. Elle

    suppose la scurit, louverture de pistes, parfois venant du groupe, mais valorise par lenseignant par exemple

    lors de bilans dateliers ou de journe Lenseignant a galement un droit de veto. Dans Dmarrer en pdagogie

    Freinet, pourquoi ? Comment ?, Jean Roucaute3 crit Il y a interaction, dialectique, dialogique, entre le

    dynamisme interne (besoins, dsirs...) de l'enfant et le milieu, la situation ducative. La part du matre est

    d'aider, d'accompagner, les efforts de l'lve dans la matrise de techniques (imprimerie, correspondance...)

    grce des outils et des procdures (comme le Conseil). (Roucaute, 2005).

    Apprentissages personnaliss et ttonnement exprimental supposent un travail de postparation important,

    permettant par exemple le suivi des projets en cours. Cela suppose ici une fonction daccompagnement. On

    pourrait ainsi considrer cela comme une mise en tension entre gestion, scurisation, et complexit, permettant la

    poursuite dobjectifs dapprentissage intgrant les trajets personnaliss de chacun et limprvu

    Ttonnement exprimental et technique de vie

    Le concept de techniques de vie doit tre dfini de manire prcise. Il sagit dune accommodation de

    savoirs transforms en connaissances mobilisables, de comptences intgres permettant dagir, davoir des

    conduites sociales, coopratives entre autres. Elles sont une cration personnelle partir de la combinaison de

    diffrents lments. Elles peuvent se construire au travers de lexprience vcue, en interaction avec un milieu,

    des personnes, la famille joue par exemple un rle, ainsi que lenseignant. Elles servent durablement ragir dans

    des situations diverses au quotidien et faire face limprvu.

    3 Roucaute J., Quelques concepts fondamentaux de la pdagogie Freinet, in Dmarrer en pdagogie Freinet Pourquoi ?

    Comment ? (CD), ditions ICEM, 2005 (voir bibliographie) Jean Roucaute est la retraite ; il a obtenu un doctorat en sciences de

    lducation luniversit de Grenoble.

  • 15

    Cette possibilit de ragir limprvu est en relation avec un mode de pense complexe, telle quEdgar Morin

    peut le prner, ou encore Christiane Peyron-Bonjan. Tout ceci repose sur une pistmologie constructiviste : Le

    schma d'acquisition des techniques de vie peut tre prsent simplement par :

    - une pratique (fonde sur l'imitation ou des hypothses)

    - une russite renouvele qui transforme une trace en rgles de vie (pragmatisme, automatisme)

    - une construction, une mise en cohrence des rgles de vie qui deviennent une technique de vie , matrise,

    transfrable, intgrable dans divers ensembles pour raliser des projets plus complexes.

    - un chec analys, trait, permettant de limiter les possibles et d'laborer de nouvelles hypothses.

    C'est ce que Freinet nomme le ttonnement exprimental. (Roucaute, 2005)

    Le ttonnement exprimental articule un projet, une pratique et un travail intellectuel (transformation des

    reprsentations). Il n'est pas l'assimilation d'un savoir extrieur reproduire. Il contribue dsaliner le

    travail, dans la vision de Freinet.

    1.1.2.2 Education du travail

    Le travail, pour Freinet, est ce qui libre, qui lutte contre lalination. Mais cette volution ne peut se

    construire que par tapes : 1. NE COMMETTEZ PAS LERREUR D'ACCORDER SENTIMENTALEMENT

    TROP VITE ET TROP BRUSQUEMENT, LA LIBERTE A VOS ELEVES. Non seulement parce qu'ils n'y sont pas

    habitus et risquent fort, en consquence, d'en faire un mauvais usage, mais parce qu'il faut surtout viter de

    considrer la libert comme une sorte d'entit intellectuelle. Or, cette libert intellectuelle n'existe que dans les

    livres. On est libre de faire quelque chose ou de ne pas le faire. C'est dans le travail et la vie que l'enfant doit

    sentir et possder la libert. Instituer une libert qui n'est pas l'manation de la vie et du travail de la classe, c'est

    aller un chec que vous devez tout prix viter. La libert ne sera pas au dbut. Elle sera l'aboutissement de la

    nouvelle organisation du travail. Vous ne risquerez pas, alors, le dsordre et l'indiscipline qui sont si souvent

    reprochs celles de nos classes qui, sous prtexte de nouveaut placent dangereusement la charrue avant les

    bufs. (Freinet, 1966)

    Travail est donc associ libert, pour Clestin Freinet.

    Le travail est ce qui permet de transformer, de se transformer, ou de transformer le monde. Il est lexpression

    de la puissance de vie. Il a une fonction dpanouissement, de dsalination, mais aussi de citoyennet. La

    matrise des techniques permet lefficacit du travail individuel, et la coopration lefficacit du travail social.

    Parmi les rsultats importants du travail de lquipe Thodile, la transformation de la reprsentation du travail

    est prsente comme trs importante ; la diffrence entre boulot (caractre obligatoire, fiches, etc) et travail

    (ralisation de soi, accomplissement dun projet) est particulirement forte, ce qui concide avec lobjectif

    d ducation du travail tel que la dfini Clestin Freinet.

    1.1.2.3 Le rapport lerreur

    La distinction est clairement tablie entre erreur et faute. Cette dernire suppose une intention, et une

  • 16

    culpabilisation. Utiliser ce vocabulaire dans le cadre de lapprentissage bloque la capacit dmettre des

    hypothses, par peur de retours ngatifs : cela inhibe donc les productions. Elles sont pourtant essentielles, car

    elles permettent la mise au jour de procdures, de raisonnements. Autoriser lerreur, cest la prendre en compte

    pour :

    - une interaction avec les pairs (conflit socio-cognitif, auto et auto-socio-contruction du savoir) : lentraide est un

    point essentiel dans les apprentissages, ainsi que la coopration.

    - sappuyer dessus pour cerner, proposer, organiser un travail en rapport avec sa zone limite de comptences

    (travailler dans la zone proximale de dveloppement) :

    * soit dans une production en rapport avec des projets (exemple : travail sur la langue partir des textes

    produits par les lves).

    * soit dans le cadre dun champ de tests suffisamment bien talonns, chacun (quel que soit son niveau et

    son rythme) doit tre en situation de russir, de valoriser ce quil sait, mais aussi de rencontrer des difficults :

    cest au niveau de ses erreurs quil va rentrer dans une procdure de remdiation et travailler dans sa zone

    proximale de dveloppement. Il est alors possible dentrer dans le champ dune valuation formative.

    Lenseignant qui travaille dans le cadre de la mthode naturelle, du ttonnement exprimental, utilise la

    construction dhypothses dans la dmarche des enfants, et sappuie sur les interactions au sein du groupe, il joue

    un rle aussi par ses questions pour proposer des pistes. Au sein des diffrentes activits de la classe, il montre

    ltendue de ses comptences, ainsi que ses limites. Il sautorise faire des erreurs, avoir des doutes et

    chercher du recours auprs de sources documentaires ou de personnes ressources. Cette attitude fait cho celle

    daccueil et de traitement de lerreur quil rserve aux lves.

    Dominique Lahanier Reuter (revue franaise de pdagogie, mars 2005) signale la rflexivit de la dmarche

    des lves et leur rapport lerreur.

    1.1.2.4 Ouverture sur la vie

    Clestin Freinet crit en 1948, dans Lducateur : " Pour cette tude du milieu local nous irons puiser

    dans la vie vritable de l'enfant, l'origine de ses sensations, de ses expriences et de ses dcouvertes, les

    lments essentiels, les lments de base - les seuls solides et dfinitifs - de sa formation, de son instruction, et de

    son ducation.

    Vie et milieu sont ici intimement lis. Il existe un processus de relocalisation des apprentissages qui va

    loppos de la conception centralisatrice de lenseignement. Il sappuie sur laffectivit. Il sagit de la cration

    dun patrimoine culturel de proximit qui va souvrir vers un largissement progressif une culture plus

    universelle, mue par une curiosit et une motivation intrinsque. On voit ainsi un ancrage dans lexprience et

    dans la vie : il ny a plus de cloisonnement entre la vie de lenfant lcole et lextrieur. Dans cette approche

    complexe, sous-systmes et systmes sont relis La construction des savoirs se fait en prenant en compte une

    historicit, un environnement et une culture locale, pour dboucher vers une extension. Lenseignant a ici une

    posture de passeur, tout en reliant les connaissances

    [] Nous pourrions dire que, par l'activit fonctionnelle et l'expression libre, nous enfonons sans cesse nos

  • 17

    pieds dans la solide ralit du milieu, nous creusons prudemment les fondations qui soutiendront jamais les

    constructions ultrieures. Mais par notre documentation, par le cinma et la radio puissamment motivs et

    orients par nos changes interscolaires, nos yeux et notre esprit dbordent constamment ce milieu restreint et

    s'lvent hardiment vers les conqutes qui enrichissent en permanence les lmentaires enseignements du

    milieu. (Freinet, 1948)

    En cho ce texte de Freinet, on peut lire cette citation dY. Reuter et C. Carra (Revue franaise de pdagogie,

    mars 2005, p.48), Concernant les fonctionnements, et sans vouloir entrer dans les dtails, nous avons ainsi pu

    relever quelques mcanismes fondamentaux, qui ne sont pas tous fortement thmatiss dans la littrature critique

    sur le sujet : l'articulation individuel/collectif avec l'importance de la coopration (22), la constitution

    systmatique d'une culture interne la classe servant de transition entre culture externe et culture vise (23), le

    poids accord la mmoire du trajet collectif et des cheminements individuels (via le cahier de vie de la classe,

    les expositions, la conservation mticuleuse des travaux de chaque lve et l'activation rgulire de ces

    instruments), les dispositifs d'accueil et de gestion de ce qu'amnent les lves (les " quoi de neuf ? ou les

    entretiens du matin)

    Cette vie parat largement dans les projets qui mergent.

    1.1.2.5 Emergence et gestion de projets

    Diffrentes sortes de projets coexistent :

    - Les projets individuels : remplir son ou ses contrat(s) individuel(s), crire un texte pour le journal ou une lettre,

    raliser une oeuvre individuelle d'expression artistique, faire une recherche mathmatique, ...

    - Les projets de groupes : certains projets, individuels au dpart, peuvent tre proposs la classe et trouver un

    cho. Un enfant propose par exemple un thme d'expos et cherche des partenaires pour l'aider le raliser ; un

    atelier peut tre impuls partir d'une proposition ou d'une oeuvre prsente... Un groupe peut rebondir sur une

    cration mathmatique et vouloir la reprendre

    - Les projets collectifs : le journal est un projet collectif, de mme que la correspondance. Les classes peuvent

    avoir des projets collectifs de sorties, de spectacles, dexpositions Ces projets mettent en uvre un travail

    coopratif, auquel chacun s'associe de la manire quil souhaite.

    1.1.2.6 Les complexes dintrts

    Les complexes dintrt sont lis louverture sur la vie. Dans Pour lcole du peuple (Freinet C.,1974),

    Clestin Freinet crit : Plutt que de centres d'intrts, nous parlerons de complexes d'intrts. Notre cole du

    travail est au centre de la vie et conditionne par les mobiles multiples et divers de cette vie. Aux enfants de

    choisir parmi nos rayons les articles leur parfaite convenance. Que ce complexe d'intrts soit suprieur aux

    centres plus ou moins logiques, nul n'en doutera. Ce qui n'a pas permis jusqu' ce jour de passer du formalisme

    de l'un la ralit vivante de l'autre, ce n'est qu'une question de technique, comme pour le marchand. Si nous

    rsolvons cette question - et par nos techniques pdagogiques et par notre organisation du milieu scolaire, nous

  • 18

    pensons y tre parvenus - nous aurons fait pdagogiquement un pas important dans la voie de l'ducation

    fonctionnelle.

    Cette notion de complexe dintrts apparat comme tout fait spcifique de la pdagogie Freinet.

    1.1.2.7 Pdagogie Institutionnelle, institution, institu, instituant

    Les pdagogies institutionnelles sont issues de dissidents de la pense de C. Freinet. Dans le contexte de

    lcole-caserne , une volution dans la pdagogie Freinet leur paraissait ncessaire. Il existe principalement

    deux courants de la pdagogie institutionnelle : lun est en rapport avec la psycho-sociologie et la non-directivit

    de Carl Rogers (M. Lobrot), et se base sur un concept de pdagogie auto-gestionnaire (R. Fontvielle, G.

    Lapassade, R. Lourau), lautre se base sur les apports de la psychanalyse freudienne et lacanienne (F. et J. Oury,

    A. Vasquez). La base en est lanalyse institutionnelle, et le rapport entre institution, institu, instituant et

    institutionnalisation. Linstitu reprsente pour Lourau ce qui est tabli, les cadres, les normes, les rgles.

    Linstituant, selon Castoriadis, est la remise en cause de linstitu, il correspond lauto-organisation. Il existe

    un rapport de force, une opposition entre institu et instituant, base de conflits et de violence.

    Linstitutionnalisation intervient comme un tiers de lordre de la dialogique, ncessaire la survie de

    linstitution. Elle est un travail dinvention par o dautres normes, dautres valeurs trouvent sactualiser dans

    une stabilit provisoire. La ngociation, llaboration de rgles de vie, la rgulation des relations au sein du

    groupe, dans et autour de linstitution par le conseil de cooprative relvent de linstituant. Fernand Oury, dans la

    prsentation du groupe Techniques Freinet Pdagogie Institutionnelle, donne des exemples illustrant ces

    concepts : il appelle institution ce qui sinstitue collectivement dans une classe cooprative, et permet le vivre

    ensemble en rponse aux besoins ressentis et aux demandes exprimes. (Oury F., 1986).

    Fernand Oury dfinissait ainsi les concepts de la pdagogie institutionnelle (Oury F., 1972, p.103) :

    -Un ensemble de techniques, d'organisations, de mthodes de travail, d'institutions internes, nes de la praxis

    des classes actives, qui place les enfants et les adultes dans des situations nouvelles et varies qui requirent de

    chacun engagement personnel, initiative, action, continuit...

    Ces situations souvent anxiognes -travail rel, limitation de temps et de pouvoir -dbouchent naturellement sur

    des conflits qui, non rsolus, interdisent la fois l'activit commune et le dveloppement affectif et intellectuel des

    participants.

    -De l cette ncessit d'utiliser, outre des outils matriels et des techniques pdagogiques, des outils conceptuels

    et des institutions sociales internes capables de rsoudre ces conflits par la facilitation permanente des changes

    matriels, affectifs et verbaux. Les changements techniques, les relations interindividuelles et de groupe des

    niveaux conscients et inconscients, la structuration du milieu, crent des situations qui, grce des institutions

    varies et variables, favorisent la communication et les changes... .

    De nombreuses institutions ont t intgres dans les pratiques des pdagogues de lICEM, mme hors de ce

    chantier : les mots Conseil de cooprative , quoi de neuf , en sont directement issus et souvent utiliss, mais

    ne font pas lunanimit chez les membres de lICEM. Le courant de pdagogie institutionnelle psychanalytique,

    aprs avoir t exclu, a t rintgr dans lICEM. Raymond Fontvielle a t galement exclu de lICEM,

  • 19

    mais des reprsentants du courant de pdagogie autogestionnaire sont par contre rests lintrieur de

    lassociation.

    Peut-on tablir un parallle entre ces aspects de la pdagogie Freinet et le mode de formation dans le

    mouvement ? Pourrait-on considrer linstituant et la coopration comme des formes dauto-organisation ? Peut-

    on voir un lien entre praxis et professionnalisation ? Les complexes dintrts reprsentent-ils des facteurs

    dentropie ou de nguentropie ? Comment les enseignants de lquipe E se situent-ils, en tant que professeurs du

    Second Degr, face ce mode de travail pdagogique ? Comment peuvent-ils se former ? Quels pourraient tre

    les signes dappropriation de ce mode de travail pdagogique ? Ces signes pourraient-ils tre la base de la cration

    dune culture commune ? Quels sont les lieux et moments possibles de formation ?

    Au niveau national, il existe une instance qui permet de faire vivre et voluer les principes de la pdagogie

    Freinet en France, et dapporter de la formation, cest lICEM. Existe-t-il un lien entre les membres du projet E et

    lICEM ? Peut-on percevoir un rle de facilitation dans les rapports entre projet E et ICEM ?

    1.1.3 LInstitut Coopratif de lEcole Moderne

    LICEM propose diffrents moyens pour la formation, par exemple dans le cadre des rencontres nationales

    proposes (congrs et stage), mais aussi grce aux outils comme le site, comportant un bon nombre darchives

    numrises, la prsentation de lassociation et des principes essentiels de la pdagogie Freinet, et les listes de

    communication. Sur la page Web de prsentation de lICEM sur le site Toil'ICEM, lassociation se dfinit de la

    manire suivante : LICEM-pdagogie Freinet se donne pour objectifs et bases de travail la recherche et

    l'innovation pdagogiques, la diffusion de la Pdagogie Freinet par l'organisation de stages, par la conception, la

    mise au point et l'exprimentation doutils pdagogiques pour la classe, de revues documentaires pour les

    enfants, les jeunes et les enseignants, et ldition de publications pdagogiques. . Les dimensions qui

    apparaissent ici comme essentielles sont la recherche, la formation, la publication et ldition doutils.

    Lassociation a t agre par le Ministre de lEducation Nationale.

    Pour comprendre le projet E et son volution, il parat important de le situer dans une historicit, dabord au

    niveau national.

    1.1.3.1 Historique

    Le fonctionnement du mouvement Freinet a toujours t complexe, et il s'est inscrit de manire trs

    particulire dans la ralit associative. A l'origine, le groupe "L'Imprimerie l'Ecole" n'est pas enregistr

    immdiatement comme association (pour des motifs financiers). Pour des raisons d'organisation matrielle de

    production d'outils, la C.E.L., fonde en 1927, a fonctionn dans le cadre lgal de cooprative d'actions jusqu'en

    1986. C'est la structure des dcisions relles sinon officielles du mouvement pour des questions aussi bien

    pdagogiques que commerciales. (Bruliard & Schlemminger, 1996, p.21)

    LInstitut Coopratif de lEcole Moderne a t cr en 1947 par C. FREINET. Le terme d institut renvoie

  • 20

    un projet de formation et de recherche.

    Pendant longtemps, lengagement en activit et en temps a t privilgi, sans demande de participation

    financire. Il est vrai que, en son sein, on privilgie l'engagement de l'individu par rapport aux fonctions

    officielles attribues. Ainsi, la ralit du travail militant s'carte volontiers des organigrammes proposs. Le

    travail militant constitue une valeur toute aussi importante que la participation financire. Cette valorisation de

    l'engagement permet ainsi de comprendre ce qui fait office d'adhsion au mouvement. Le principe de la cotisation

    n'a t adopt (non sans difficults) qu'en 1987. Auparavant, l'acte adhsion pouvait s'effectuer par le fait

    d'acheter des actions de la C.E.L., en s'abonnant L'Educateur, en devenant un "travailleur" c'est--dire en

    prenant une part active des activits de production ou en assumant des responsabilits dans une commission ou

    un dpartement. On saisit de la sorte combien le mouvement Freinet est en fait gomtrie variable. L'inscription

    militante se fait librement (en temps, sur le plan financier), partiellement centre sur un aspect particulier (art

    enfantin, technologie audiovisuelle, etc.) ou dans un accord plus gnralement pdagogique ou politique.

    (Bruliard & Schlemminger, 1996, p.22).

    La Cooprative de lEnseignement Lac tait linstance permettant dditer et de diffuser le matriel ncessaire

    au travail en pdagogie Freinet. Cette dernire est bien antrieure lICEM. Elle a fait faillite en 1986. C'est une

    socit anonyme, les Publications de l'Ecole Moderne Franaise (P.E.M.F.) qui a diffus l'essentiel des

    publications du mouvement. Les outils, tels que le matriel d'imprimerie scolaire et les fichiers, lui ont t cds.

    Des versements taient prvus pour rmunrer lassociation pour le travail fait bnvolement par ses membres

    dans le cadre des chantiers outils ou ditoriaux. Cette socit a t rachete par Mango, mais a d dposer le

    bilan. Le tribunal de commerce vient daccorder la reprise des nombreux titres issus du mouvement Freinet par

    lICEM, qui a constitu les ditions ICEM , destines assurer la production et la vente de publications, grce

    un catalogue en ligne dun peu moins de 100 titres ce jour.

    Le nombre dadhrents a dclin de faon trs importante, connaissant la baisse la plus significative au

    moment dune priode gnrale de dsengagement dans les annes 90. Depuis 2000, il se situe entre 500 et 600

    pour lICEM, en ne prenant pas en compte les adhrents des groupes dpartementaux. La frquentation des

    congrs a remont lors des congrs de Rennes (2000) et Talence (2002).

    Les textes fondateurs

    La Charte de lEcole Moderne a t adopte au Congrs de Pau de 19684. Les Perspectives de lEducation

    Populaire ont t publies dans le Nouvel Educateur en 1978.5

    Lexplicitation de lorganisation de lICEM parat importante pour percevoir larticulation entre les diffrents

    sous-systmes et lchelon national.

    1.1.3.2 Organisation

    L'I.C.E.M. est une association nationale. Des associations dpartementales portant la mention Ecole Moderne

    existent dans pratiquement tous les dpartements franais de mtropole et en Corse, et il existe des groupes

    rgionaux qui peuvent tre des associations aux statuts officiellement dposs en prfecture, mais ce nest pas le

    4 http://www.freinet.org/pef/charte.htm

    5 http://www.freinet.org/ne/pep/pep.htm

  • 21

    cas de toutes les rgions franaises. Leur vie connat des priodes dessor, de productions et rencontres intenses,

    et de dclins, voire de quasi-disparition, qui peuvent tre suivies de reprises par de nouvelles personnes ou

    quipes, qui intgrent ou non les anciens, selon leur ge, leur implication dans la vie pdagogique ou leurs choix

    de vivre une vie tranquille ou de sinvestir dans dautres projets. Certaines personnes peuvent tre dans un

    dpartement et ne pas frquenter les rencontres locales, alors quelles participent la vie de secteurs ou des

    rencontres internationales. Quelques dpartements et rgions publient des revues permettant lchange

    dinformations et la parution darticles pdagogiques. Il existe :

    - des secteurs et commissions qui apparaissent au gr de quelques personnes souhaitant en porter le projet. Ces

    secteurs peuvent, comme les groupes locaux, connatre un dveloppement, une apoge, un dclin, voire une

    disparition, suivis dune reprise si de nouvelles personnes veulent reprendre le projet. Ils ne sont gnralement pas

    regroups dans une zone gographique, et se rencontrent dans les journes dtude et congrs nationaux. Les

    secteurs peuvent produire des bulletins pdagogiques qui permettent les changes.

    - des structures autour d'un projet circonscrit, les "chantiers" ("Chantier Outils" pour la production des fichiers,

    "Chantier J Magazine" pour la production de cette revue...).

    Certains articles publis dans les revues locales, de secteurs ou chantiers, peuvent tre intgrs dans des revues

    nationales usage interne, ou dans le Nouvel Educateur , distribu par abonnement des particuliers,

    bibliothques municipales ou de structures de formation comme les coles dducateurs ou les IUFM. LICEM

    connat des difficults financires importantes, dues la diminution des subventions qui lui sont accordes (baisse

    de 50%). Les cotisations dpartementales et nationales sont indpendantes. La majorit des membres des groupes

    dpartementaux ne cotisent pas lICEM. Pour des raisons dconomie, de moins en moins de revues sont dites

    sur papier. Elles sont gnralement en ligne et les liens sont diffuses par courriel aux membres de lICEM, des

    secteurs ou groupes locaux ou rgionaux, grce des listes de communication sur Internet (liste Freinet, pour

    toutes les personnes intresses par la pdagogie Freinet, liste Com-ICEM, pour la communication interne

    lassociation, listes de secteurs, liste de groupes dpartementaux).

    Les statuts ont volu. Actuellement, une personne ne peut se prsenter que si elle est adresse par un secteur,

    un chantier ou un groupe dpartemental. Le nombre de siges slve 18, mais ils ne sont gnralement pas tous

    pourvus.

    1.1.3.3 Rencontres

    Les rencontres peuvent avoir un caractre institutionnel, de lordre du fonctionnement, mais la dimension

    pdagogique est de loin la plus importante. Leur fonctionnement a peu volu depuis les origines du mouvement.

    Depuis 1927, le mouvement Freinet organise des congrs, annuels jusqu'en 1979, biennaux depuis, occasions

    de rassemblement, de manifestation et d'expression majeure de son existence. Une autre forme de rassemblement

    national sont les "Journes d'Etudes" annuelles, priode de travail caractre interne dont la vocation est

    d'offrir simultanment un cadre d'approfondissement des travaux en cours et leur communication l'ensemble

    des militants.

  • 22

    De plus, les Secteurs et Groupes dpartementaux se rencontrent rgulirement. Le but est d'changer ses

    expriences, de travailler sur un problme de la classe, de participer la vie institutionnelle du mouvement,

    d'laborer des actions de formation. L'I.C.E.M. organise des stages pour former des militants et aussi pour faire

    connatre la pdagogie Freinet. Ces stages peuvent avoir un caractre national ou local. Parfois, ils peuvent

    mme se situer l'intrieur d'un cadre officiel de l'Education Nationale comme le Plan National de Formation ou

    dans un Institut Universitaire de Formation des Matres (I.U.F.M.). (Bruliard & Schlemminger, 1996, p.21)

    Les congrs et journes dtude sont tenus en alternance (un congrs tous les deux ans). De grandes plages

    horaires ainsi que des locaux sont prvus pour la rencontre des secteurs dans les rencontres nationales. Des

    commissions de type animation dpartementale essaient de faire le lien entre les expriences des diffrents

    groupes locaux, et dapporter des ides et outils pour les groupes en perte de vitesse, ou en priode de

    (re)cration.

    Les congrs comportent des thmes de rflexion avec des moments collectifs, et une assemble gnrale.

    Hormis les plnires, une multitude dactivits sont proposes en mme temps, un jargon propre lassociation y

    est pratiqu (GD = Groupe dpartemental par exemple) et les novices ont parfois du mal comprendre ce

    foisonnement. Lambiance et la qualit des changes formels et informels font que, gnralement, malgr la

    difficult dapprhension globale, les personnes y participant sont touches et repartent pleines dnergie et de

    projets. Ce dernier aspect est aussi caractristique des stages proposs.

    LICEM apporte-t-il des lments dans la formation ? Dans la construction dune culture commune ? Quelles

    sont les interactions entre lICEM et le projet E ? Quels types de lien existe-t-il ? Le secteur Second Degr joue-t-

    il un rle dans ces relations ? Ces systmes et sous-systmes sont-ils en interrelations ? Existe-t-il des boucles

    rcursives ?

    Pour aborder certains points lis ces questions, il est ncessaire de prsenter un des secteurs de lICEM, qui

    en constitue un bon exemple, ici spcialement intressant de par son rapport avec le projet dtablissement

    secondaire Freinet, le secteur Second Degr.

    1.1.4 Un exemple de secteur : le Second Degr dans lICEM

    Vu de lextrieur, la pdagogie Freinet semble inexistante au Second Degr. En ralit, il existe un secteur

    Second Degr dans lICEM : il est un point dappui pour la formation des enseignants du Second Degr.

    Les premiers professeurs du Second Degr dans lICEM taient des PEGC, (Professeurs dEnseignement

    Gnral de Collge), corps maintenant en voie de disparition issu du concours de lEcole Normale, c'est--dire du

    Premier Degr. Ils taient gnralement bivalents. Le secteur Second Degr est n un peu avant 1968, et a connu

    un trs grand essor ce moment. Des stages ont t proposs qui rassemblaient 200 300 enseignants de collges

    et lyces dans les annes 70. Janou Lmery tait animatrice du secteur. Pendant un deux ans est sortie une revue,

    Lducateur Second Degr . Puis est apparue la revue du Secteur Second Degr, La brche .

    En 1974, Catherine Mazurie, lactuelle responsable du secteur Second Degr, tait une lve de Jacques

    Brunet, professeur de franais, membre de lICEM travaillant dans le secteur Second Degr. Pendant des annes,

  • 23

    elle a frquent le groupe dpartemental de Gironde, en ne rencontrant que des membres professeurs du Second

    Degr. Ils taient entre 30 et 35. Elle enseigne le franais et elle a commenc participer aux activits de lICEM

    au niveau national en 1985. Le secteur tait alors en priode de dclin depuis le dbut des annes 80. Elle en

    assume lanimation depuis 20 ans. La revue du secteur sappelle Second degr liaisons . Il y a un renouveau

    actuellement, avec une demande de jeunes professeurs (une soixantaine au congrs de Paris). Malheureusement,

    peu de professeurs du Second Degr expriments sont encore actifs. La gnration des annes 70 est partie la

    retraite, en emportant ses outils, et cela pose un problme pour la formation des nouveaux arrivants. Certains

    continuent jouer un rle actif dans le cadre dchanges sur la liste Internet Second Degr. Ainsi, Roger Favry est

    la base dun exemple de transmission d'outils : les fiches "Retorica", un norme travail de synthse sur des

    pratiques du Second Degr. Deux jeunes enseignants sont responsables des revues destination des lves de

    collge (BT) et de lyce (BT2) ; ils sont impliqus dans lICEM, mais nont que trs peu dexprience

    professionnelle. Ils ne peuvent donc pas se placer en situation de formateurs. Il existe cependant une demande

    croissante pour la formation denseignants du Second Degr. Un des membres du secteur Second Degr depuis

    plusieurs annes, ayant men un projet douverture de collge Freinet dans le Sud-Ouest avec Catherine Mazurie,

    sera intgr dans le projet E la rentre de septembre. Une des membres de lquipe E a particip au stage

    national dmarrer en pdagogie Freinet, tenu lors de la fdration de stages aux vacances de Toussaint 2007.

    Catherine Mazurie animait lintrieur un module pour le Second Degr.

    Une centaine de professeurs du Second Degr sont adhrents lICEM, entre 10 et 20 sont engags de

    manire militante et active. Un stage de formation pour le Second Degr est prvu en aot 2008.

    Etablissements secondaires en pdagogie Freinet

    Il existe actuellement deux projets dtablissements secondaires Freinet en France, dont lun va ouvrir en

    septembre 2008 sous la forme de deux classes de 6me

    et 5me

    en inclusion dans un collge, et une classe de

    Seconde en inclusion dans un lyce : cest ce groupe denseignants, travaillant sur le projet E, qui est lobjet

    dtude de ce mmoire, comme mergence de lICEM et de lInstitut Dpartemental de lEcole Moderne.

    La pdagogie Freinet a dj t mise en place par des professeurs isols dans des tablissements secondaires,

    des quipes partielles, comme dans le collge dOlron, mais aussi sur un collge entier. Michel Bertrand,

    professeur danglais, est devenu principal au collge de Sainte-Maure de Touraine (37) dans les annes 80. Un

    fonctionnement innovant de type pdagogie Freinet a alors t mis en place. Plusieurs professeurs ont particip

    des activits pdagogiques lies la pdagogie Freinet. Quand il est parti la retraite, le collge a recommenc

    fonctionner de manire relativement traditionnelle. Il porte cependant encore le nom de Collge Clestin Freinet.

    Le changement propos venait den haut. Le poste de chef dtablissement demande des qualits extraordinaires.

    Etre aux manettes est un avantage, mais cela ne suffit pas installer une dynamique durable. Etre une quipe

    est un point fort, mais cela nassure pas forcment la russite : vers 1979, le Vaucluse a runi jusqu' une

    vingtaine de collgues avec un projet de collge Freinet Vedne qui a chou cause de l'opposition des

    syndicats (SNI et SNES surtout)... Certains tablissements secondaires alternatifs ont russi cependant voir le

    jour.

  • 24

    Etablissements scolaires du Second Degr proposant des pratiques pdagogiques alternatives

    - Le lyce exprimental de Saint-Nazaire : Fond par Gabriel Cohn-Bendit sur des principes de dmocratie et

    dauto-gestion, il accueille des lves du niveau lyce en difficults, en souffrance. Rcemment, certaines

    personnes de lquipe se sont rapproches de lICEM. Un film prsentant ltablissement a t prsent au

    congrs de Paris, et plusieurs enseignants du lyce ont anim un atelier. Une correspondance sest tablie avec un

    tablissement secondaire de Core pour lves dcrocheurs, autour de la pdagogie Freinet. Des actions de

    formation ont t animes l-bas par un des enseignants du lyce, et des enseignants corens ont t reus Saint-

    Nazaire.

    - Le Lyce Auto-gr de Paris : Trois enseignants du lyce auto-gr de Paris ont t invits au congrs de

    Bordeaux, en 2003, pour prsenter le fonctionnement de leur tablissement dans le cadre dun atelier. Quelques

    lves ont particip. Un enseignant au LAP a particip au congrs de lICEM Paris et au stage international

    dinitiation la pdagogie Freinet. Il travaille dans le secteur international de lICEM prsent. Les informations

    donnes viennent de lui, et il nest pas certain que tous les membres de lquipe se reconnaissent dans les phrases

    qui suivent. Ce projet est la base le fait dlves qui se sont organiss pour travailler autrement et ont demand

    laide de professeurs. Jean Lvy, qui est le fondateur du lyce, sest retrouv trs vite dans cette exprience. Le

    modle pdagogique est celui du lyce dOslo, n en 19676. Quant aux apports thoriques, on peut se rfrer

    effectivement la Pdagogie Freinet (certains membres de lquipe, de par leur parcours dinstituteur, ont t trs

    influencs) mais aussi la Pdagogie Institutionnelle tendance non autoritaire (voire mme libertaire).

    - Le CLE dHrouville Saint-Clair (14) : Il fonctionne galement sur des principes de vie dmocratique. Un des

    professeurs de ltablissement a particip un stage de pdagogie Freinet, mais ltablissement ne fonctionne pas

    en appliquant les principes de la pdagogie Freinet en dehors de laspect dmocratie. Ce projet a cependant

    inspir les initiateurs du projet dtablissement secondaire Freinet.

    - CLISTHENE Collge Lyce Innovateur (et) Socialisant () Taille Humaine (dans l)Education Nationale (et)

    Exprimental (Bordeaux). CLISTHENE est le nom dun Grec qui tablit la dmocratie en 507 avant notre re. Au

    dbut des annes 2000, un projet dtablissement secondaire Freinet existait Bordeaux. LInspection

    Acadmique avait donn son accord. Un des professeurs (arts plastiques) membre du secteur Second Degr,

    habitant dans le Sud-Ouest, avait obtenu une demie mise disposition pour mener bien ce projet, qui tait suivi

    depuis trois ans par lEducation Nationale. Un autre projet tait en lice dans les dossiers grs par une commission

    de pilotage laquelle participait un membre du Conseil dAdministration pour reprsenter lInstitut Coopratif de

    lEcole Moderne. Un stage de 15 jours avait t organis pour la formation des enseignants en juin de la troisime

    anne. Catherine Mazurie avait pu y participer. Lors du stage, linformation que le projet CLISTHENE tait

    retenu aux dpens du collge Freinet est tombe. Il ntait pourtant pas officiellement dans les dossiers tudis par

    la commission, qui sest dissoute ensuite. Un des deux protagonistes de ce projet, se rfre la pdagogie Freinet.

    Il a pris contact avec lICEM pour chercher un professeur de mathmatique qui faisait dfaut dans leur mise en

    place. Il na ensuite plus eu de contact avec lICEM. Ce collge accepte tous les lves en difficult. Il fait

    officiellement rfrence au mouvement des Rseaux dEchanges Rciproques de Savoirs. Beaucoup de

    6 Un lyce aux lycens, Mosse Jrgensen

  • 25

    communication autour du collge : le tutorat et les activits dateliers de laprs-midi sont promues dans diffrents

    mdias, dont le Monde de lEducation. Les syndicats le portent aux nues. Lintrt de cet tablissement est quun

    rel travail en quipe sy accomplit. Il ne peut cependant tre considr comme un collge Freinet.

    Ce projet que nous appellerons E serait donc le premier projet dtablissement secondaire Freinet parti de

    la base, partir dune quipe constitue au pralable.

    Plusieurs personnes du projet E ont particip des ateliers du congrs de lICEM, Paris, en aot 2007. Parmi

    les participants, des professeurs dun tablissement secondaire coren qui a dj mis en place la pdagogie Freinet

    suite un stage dinitiation organis par le secteur international de lICEM. Ils avaient particip un stage/

    rencontre international de pdagogie Freinet pralable au congrs de Paris. Voici le contenu des ateliers :

    - prsentation du lyce exprimental de Saint-Nazaire

    - prsentation du projet dtablissement secondaire Freinet

    - la rentre en classes Freinet du Secondaire

    - la prsentation du travail de D8, professeur des coles, durant lanne 2006-2007 dans un collge ambition

    russite et son rle auprs des enseignants et des classes de sixime.

    De quelle nature sont les liens entre lICEM et le projet E ? Existe-t-il des boucles rcursives ? Des

    rtroactions positives ou ngatives ? Des effets de rgulation ou damplification ? Comment sarticulent les

    instances locales et lchelon national ? Existe-t-il des liens ? Si oui, de quelle nature ?

    La prochaine fdration de stages se droulera dans le dpartement aux vacances de Toussaint 2008, sur

    linitiative dune des personnes de lInstitut Dpartemental, charge de la communication et de lorganisation de

    la formation. Le paragraphe suivant prsente un exemple de groupe dpartemental, faisant apparatre larticulation

    entre lchelon national et lchelon local.

    1.1.5 Un exemple de groupe dpartemental

    Lassociation sappelle IDEM, Institut Dpartemental de lEcole Moderne, suivi du numro du dpartement.

    Le projet E est partie intgrante de lIDEM. Il est clair par certains aspects de son histoire et de ses

    caractristiques.

    1.1.5.1 Historique

    Une des grandes figures du groupe, QR, situait sa premire rencontre avec Freinet, ds l'aprs-guerre, alors

    quil tait venu donner une confrence. Elle se trouvait au dbut des annes 60 dans le groupe dpartemental, avec

    deux autres instituteurs. Un enseignant de retour du Maroc, entra dans le groupe aprs un stage avec C. Freinet.

    QR avait de trs bonnes relations avec lInspecteur dAcadmie, et obtint un stand la foire de Marseille. Le

    nombre de participants augmenta rgulirement grce une politique de formation lors de stages dune semaine.

    M2, actuelle prsidente du groupe dpartemental entra lIDEM en 1972/73. En 2004, un film a t tourn dans

    sa classe : il a t diffus sur France 3.

  • 26

    Le rapport entre le groupe dpartemental et lICEM

    Plusieurs personnes issues du dpartement sigrent diffrentes priodes aux conseils dadministration de la

    CEL ou de lICEM, ou encore au comit directeur de lICEM. Le groupe dpartemental organisa un Congrs

    Freinet et des journes dtude dans les annes 70.

    Partenariat avec dautres associations

    LIDEM a toujours eu des relations amicales avec les C.E.ME.A. et surtout avec le GFEN (invitations

    rgulires respectives aux rencontres ) ; des actions communes ont t menes - dans le cadre du CLIMOPE -

    avec l'INRP, le GFEN, les CEMEA, l'OCCE (organisation d'Assises de l'Innovation Pdagogique en 1982). Deux

    membres du groupe ont longtemps sig au Conseil dadministration de l'Office Central de la Coopration

    lEcole. Une action de concert a t entreprise, avec plus ou moins de bonheur, pour obtenir une place officielle

    dans les IUFM.

    1.1.5.2 Organisation

    En 2008, lIDEM compte 46 adhrents. Une dlgue dpartementale assure le lien entre lIDEM et lICEM.

    Une personne soccupe de la communication du groupe depuis fin 2006 : circulation dinformations, de comptes

    rendus, cration de listes de diffusion et dun site Internet, organisation de stages.

    Les actions (productions et publications) du groupe

    A partir des annes 70, la revue pdagogique parut rgulirement, comportant des articles pdagogiques et

    des informations sur la vie de lassociation au niveau local et national, jusquen 2005. Les crits du groupe se

    trouvent actuellement sur une version lectronique dun bulletin rgional, envoy par courriel et en ligne sur le

    site de lICEM, Toil'ICEM.

    Lune des membres de lIDEM fut responsable du chantier national "Equipes Pdagogiques" et coordonna

    deux dossiers spciaux sur les quipes pdagogiques publis dans L'Educateur

    le livre "Les quipes pdagogiques : caprice, pouvantail ou panace? Non: outil de rupture" (Maspro -

    Textes l'appui - 1980)

    Le travail du Chantier "Approfondissement" a fonctionn rgulirement entre 2000 et 2006, et trois dossiers

    ont t publis.

    La formation dans le groupe

    Elle a t un souci constant du groupe. Dans les annes 70, dans les runions, il tait propos des sujets de

    rflexion partir dcrits de Freinet ; la formation se faisait lors de stages d'initiation d'une semaine, (dans les

    Alpes, par exemple, mais le lieu changeait tous les ans) o enfants et conjoints taient prsents. Le stage tait

    propos une anne sur deux, jusqu'au jour o il n'y eut pas assez d'inscrits et de "forces vives" pour les animer ; il

    y avait des manques, mais les gens taient de plus en plus rticents pour des stages "rsidentiels" si longs. La

  • 27

    formule s'est alors convertie en un stage sur 6 mercredis aprs-midi conscutifs entre fvrier et avril. Cette

    formule perdure toujours actuellement.

    Le dbat sur les rapports avec l'institution est rcurrent dans le groupe dpartemental : ce fut un sujet

    proccupant et permanent des diffrents responsables, compte tenu la fois des positions internes et varies dans

    le groupe, ainsi que des positions contradictoires des institutions, entre l'ouverture aux mouvements pdagogiques

    et / ou le repli en circuit ferm des organismes de formation, autour des liens du groupe avec les institutions.

    Convenait-il ou non de devenir matre-formateur, ou mme "matre d'application temporaire"? Fallait-il rejoindre

    les IUFM ou rester hors du circuit institutionnel de formation des enseignants? Aprs plusieurs tentatives

    infructueuses pour obtenir l'inscription de modules de formation la Pdagogie Freinet sous la responsabilit du

    Groupe Dpartemental dans les programmes acadmiques de formation, la plupart des membres ont choisi de

    rester l'extrieur de l'IUFM, les formations se faisant lors des rencontres ou en accueillant des stagiaires dans les

    coles. Quelques enseignants ont choisi de passer les preuves du CAFIMF ou du CAFIPEMF pour devenir

    formateurs dans la formation initiale et continue (statut de matre-formateur). Un contact a t pris avec lIUFM

    en dcembre 2007 pour rtablir des liens avec la formation initiale, et un partenariat semble possible.

    1.1.5.3 Ecoles Freinet dans le dpartement

    Cest un des aspects qui explique la forte demande des parents pour un suivi de leurs enfants en pdagogie

    Freinet au niveau du secondaire. Le dpartement compte actuellement 4 coles sujtion spciale (ou coles

    statut exprimental) dclares en pdagogie Freinet fonctionnant avec des quipes pdagogiques constitues, sur

    la base d'un projet dont la principale constante est le partage des responsabilits, donc une gestion collgiale de

    l'cole, allant, dans plusieurs cas, jusqu'au reversement par le(la) directeur(trice) en titre du complment indiciaire

    gr collectivement pour les besoins de l'quipe.

    La premire cole Freinet fut lcole G, ouverte en 1962 grce QR, dans la ville de N, avec lappui de

    lInspecteur dAcadmie. Elle en devint la directrice. Ce point de dpart peut tre considr comme une

    bifurcation, ayant entran louverture de nouvelles coles Freinet. Parmi les soutiens accords au projet E,

    certains viennent de personnes dont les enfants ont frquent une cole Freinet.

    A partir de 1972 fut cr lembryon de la future cole statut exprimental, NE, dans une autre ville du

    dpartement, B. Elle dmarra dans des locaux prfabriqus, la maternelle et llmentaire se trouvant regroupes

    en 1973 avant dtre installs dans les locaux en dur lachvement des travaux lemplacement actuel. Cet

    tablissement eut par la suite un rayonnement national et international, travers de nombreux stagiaires et

    visiteurs trangers reus. Actuellement, un problme majeur apparat : la mairie semploie restreindre au

    maximum les inscriptions de lcole, au motif que beaucoup dlves ne sont pas de la commune, et que la

    municipalit ne veut pas prendre en charge les dpenses qui devraient revenir aux communes dorigine de ces

    lves. Lcole connat donc des difficults, et sa prennit est en jeu.

    Un groupe de parents, avec une quipe denseignants, obtint louverture de la troisime cole Freinet, lcole

    C, dans N, peu aprs louverture de lcole NE.

  • 28

    La quatrime cole Freinet fut ouverte dans les locaux M, dans la ville de N, en 1985.

    Depuis 2000, une cinquime cole se rclame de la pdagogie Freinet, dans N, sans en obtenir le statut. Le

    public qui la frquente est en grande difficult, il reprsente une source dusure importante pour les personnes qui

    y travaillent, et un turn-over important rsulte de ces conditions assez pnibles.

    1.1.5.4 Projet de collge lyce Freinet

    Le cadre dimplantation

    Le public vis est htrogne. Les prix de limmobilier M tant trs levs, certains en ont limage dune

    ville favorise. Cest une ville avec une forte population ouvrire qui sest retrouve au chmage aprs la

    fermeture dun site industriel trs important. Le principal dun collge de la commune a t assassin en

    septembre 2003. Il existe des zones en centre ville avec des habitants de milieu trs modeste. Bien sr, les

    nouveaux arrivants appartiennent des couches plus aises. On peut ici parler de mixit sociale.

    Les fondements du projet

    Lobjectif de ce projet est de proposer un tablissement visage humain fond sur le travail, la

    coopration, le respect de lindividu. Ce collge-lyce doit donner ou redonner le dsir dapprendre et daccder

    des responsabilits. Il doit rellement se donner les moyens pdagogiques de prparer les lves une vie de

    citoyens actifs, autonomes, capables de sadapter toutes les situations et surtout de crer la socit de demain.

    Il se veut aussi tre un tablissement dexcellence o chaque lve se construira un parcours scolaire

    ambitieux. (projet E, P.2)

    Ce projet a t bti dans le cadre des instructions officielles et du socle commun de connaissances. Il est

    beaucoup plus proche des prescriptions officielles que la majorit des tablissements secondaires. Les objectifs

    poursuivis sont les suivants :

    - un travail ouvert sur la vie et le monde,

    - la valorisation de diffrentes dmarches dapprentissage,

    - le respect du rythme de chacun et la prise en compte de la personne,

    - lautonomie, le dveloppement de lesprit critique, la responsabilisation,

    - une ducation par la russite en reconnaissant les progrs de chacun et lacquisition de comptences , (projet

    E, p.2),

    - le positionnement du travail comme valeur fondamentale.

    Le cadre choisi pour ce projet est celui de la pdagogie de Clestin Freinet travers laquelle il a toutes les

    chances de se raliser, cette pdagogie vivante tant en relation constante avec les chercheurs en sciences de

    lducation. Dailleurs, le laboratoire Thodile (science de lducation Lille III) sous la direction dYves Reuter

    vient de publier les conclusions remarquables dun travail de recherche dune immense envergure (plus de cinq

    ans) sur ltude dune cole Freinet Mons en Baroeul. Dans Une Ecole Freinet, fonctionnements et effets dune

    pdagogie alternative en milieu populaire les rsultats prsents montrent que globalement les lves russissent

    mieux tous les niveaux. (prprojet 7, p.2)

    Lquipe

  • 29

    Deux professeurs sont la base de ce projet, un professeur de franais en lyce, et un professeur de

    mathmatiques en collge, ancien professeur des coles dans une cole Freinet du dpartement. " Un groupe

    denseignants et de parents dlves sest constitu autour deux, aids par deux enseignants retraits de lIDEM,

    praticiens expriments en pdagogie Freinet et notamment en ce qui concerne les quipes pdagogiques.

    L'Inspecteur de lEducation Nationale d