Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

208
Délivré par l’UNIVERSITE de MONTPELLIER Préparée au sein de l’école doctorale INFORMATION, STRUCTURES, SYSTÈMES et de l’unité de recherche IES Spécialité : ÉLECTRONIQUE Présentée par YAHYAOUI Hanen Le 10 Avril 2015 devant le jury composé de : M. Lucien DASCALESCU Professeur à l'Université de Poitiers Président du jury M. Pascal RAIN Professeur à l'Université de Grenoble Rapporteur M. Gilbert TEYSSEDRE Directeur de recherche au CNRS, Laboratoire LAPLACE, Toulouse Rapporteur M. Yannick KIEFFEL Ingénieur R&D à Alstom Grid, Villeurbanne Examinateur M. Petru NOTINGHER Professeur à l'Université de Montpellier Directeur de thèse M. Serge AGNEL Professeur à l'Université de Montpellier Co-directeur de thèse Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans le domaine du courant continu Comportement et vieillissement

Transcript of Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Page 1: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Délivré par l’UNIVERSITE de MONTPELLIER

Préparée au sein de l’école doctorale

INFORMATION, STRUCTURES, SYSTÈMES

et de l’unité de recherche IES

Spécialité : ÉLECTRONIQUE

Présentée par YAHYAOUI Hanen

Le 10 Avril 2015 devant le jury composé de :

M. Lucien DASCALESCU

Professeur à l'Université de Poitiers

Président du jury

M. Pascal RAIN

Professeur à l'Université de Grenoble

Rapporteur

M. Gilbert TEYSSEDRE

Directeur de recherche au CNRS,

Laboratoire LAPLACE, Toulouse

Rapporteur

M. Yannick KIEFFEL

Ingénieur R&D à Alstom Grid, Villeurbanne

Examinateur

M. Petru NOTINGHER

Professeur à l'Université de Montpellier

Directeur de thèse

M. Serge AGNEL

Professeur à l'Université de Montpellier

Co-directeur de thèse

Matériaux isolants

pour appareillages haute tension

dans le domaine du courant continu

Comportement et vieillissement

Page 2: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...
Page 3: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

A mon Père Khamiss, ma Mère Khamissa

ma Sœur Malek et mon frère Mohammed Amine

Page 4: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...
Page 5: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

REMERCIEMENTS

Ce travail a été réalisé au sein de l'Institut d'Électronique et des systèmes - Groupe Énergie et

Matériaux (GEM) à l'Université de Montpellier, en collaboration avec la société Alstom Grid

de Villeurbanne.

J'exprime toute ma reconnaissance à Monsieur Serge AGNEL, professeur des universités et

responsable du Groupe Énergie et Matériaux (GEM), pour la confiance qu'il m'a accordée en

m'accueillant au sein de son groupe. Je le remercie aussi pour avoir encadré et orienté ces

travaux, pour la relecture de mes écrits, pour sa sympathie et tout son soutien. Tu as été un

chef génial, toujours à l'écoute des membres de l'équipe et très disponible. MERCI

Je ne saurais exprimer toute ma gratitude envers Monsieur Petru NOTINGHER, professeur à

l'université de Montpellier, qui m'a accompagnée, soutenue, guidée et conseillée tout au long

de ma thèse. Ses innombrables relectures, ses nombreuses réflexions et interrogations ainsi

que les différentes discussions que nous avons échangées m'ont permis d'avoir une réflexion

critique pour une analyse pertinente. Sa confiance et sa patience m'ont permis d'aller de

l'avant durant la thèse. Je serai toujours reconnaissante pour tous les efforts que tu as fournis

durant mon encadrement.

Je tiens à remercier Monsieur Yannick KIEFFEL, responsable du groupe Matériaux au sein

de la société Alstom Grid de Villeurbanne, pour avoir mis à ma disposition tous les

échantillons et le matériel nécessaire au bon déroulement de mon travail de thèse ainsi que

pour mon intégration au sein du Département ARC (Alstom Grid). Je le remercie également

pour sa confiance, son encadrement, sa disponibilité, ainsi que pour les différentes discussions

scientifiques constructives que nous avons eues.

J'ai été très honorée que Monsieur Lucien DASCALESCU, Professeur à l'Institut Pprime de

l'Université de Poitiers, ait accepté de présider le jury de cette thèse, je l’en remercie.

Je remercie très sincèrement Monsieur Pascal RAIN Professeur à l'Université Joseph Fourier

(Grenoble 1) et Monsieur Gilbert TEYSSEDRE Directeur de recherches au CNRS pour

l'honneur qu'ils m'ont fait d'être les rapporteurs de ce travail. Je les remercie pour leurs

remarques constructives qui ont contribué à rendre ce mémoire meilleur.

Mes remerciements s'adressent au personnel du Groupe GEM qui m'a accueillie pendant mon

stage de master et pendant la durée de ma thèse. Je remercie en particulier Monsieur François

Forest pour la confiance qu'il m'a accordée en acceptant de m'accueillir dans ce laboratoire

Page 6: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

lors de ma première demande de stage et Monsieur Olivier Guille pour sa gentillesse et toutes

ses aides précieuses lors de la mise en place et la maintenance des bancs expérimentaux.

Merci à Jean Charles Laurentie pour ses conseils ainsi que ses aides dans différentes parties

de ma thèse. Merci à M. Jérôme Castellion et M. Alain Toureille pour leurs explications

détaillées et leurs réponses à toutes mes questions.

Merci également à Messieurs Jean Jacques Huselstein, Philippe Enrici, Thierry Martiré et

Gilles Beaufils pour leur sympathie, ainsi que pour leurs aides et leurs nombreux conseils

pendant ma période d'enseignement.

Je voudrai également remercier mes chers collègues du GEM qui m'ont soutenu tout au long

de cette thèse comptant parmi eux les anciens doctorants : en particulier Laurent et Abdallah

(le spécialiste des présentations orales).

Merci à mes chers (es) futurs docteurs: Aurélien, Zahir, Shuo, Julien, Nadhem, Diana,

Phanuel et Achraf. Merci pour tous les moments passés ensembles, pour toutes les soirées de

jeudi de l'IES. Merci pour votre soutien, vos encouragements, vos aides, votre gentillesse, et

je n'oublierai jamais toutes les discussions partagées avec notre chère Odile que je veux

particulièrement la remercier et lui dire : Odile, tu es une vraie Maman. Merci pour TOUT.

Merci à mon premier collègue de bureau Amgad pour toutes tes aides tout au long de ma

thèse, pour ta bonne humeur, pour le stage de conduite que tu m'as fait faire, pour tes

encouragements, pour ta présence le jour de ma soutenance et sache que tu es toujours le

bienvenue en Tunisie. Je t'inviterai à un Couscous au poisson :D…

Grand Merci à mon cher collègue Sylvain qui a accepté de partager son bureau avec moi.

Merci pour ta gentillesse, pour ta présence le jour de ma soutenance qui m'a fait énormément

plaisir. Merci à Shuo pour les encouragements durant la période de rédaction.

Je tiens à remercier une amie qui m'est très chère Oana Preda qui a su me soutenir et

m'encourager tout au long de cette thèse et avec laquelle j'ai partagé plein de souvenirs depuis

ma première année en France. Tu es une amie géniale.

Enfin, comment pourrais-je dire Merci à mes parents ? Papa et ma Maman, Merci pour votre

amour, vos encouragements et votre soutien sans lesquels je n’en serai pas là. Vous avez été

toujours la pour Moi. Merci, un grand Merci. Je vous aime…

Merci à mes sœurs et mon très cher Frère Mohammed Amine qui m'ont beaucoup soutenue et

encouragée. Je vous souhaite plein de bonheur et de réussite. Je vous adore...

Page 7: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION GÉNÉRALE

CHAPITRE 1 Les résines époxydes dans les disjoncteurs à isolation gazeuse…………..5

1.1 Introduction ..............................................................................................................6

1.2 Les disjoncteurs haute tension à isolation gazeuse (DIG) ..........................................6

1.3 Les résines époxydes dans les DIG ...........................................................................8

1.4 Problématique de la conception des disjoncteurs haute tension courant continu

(HTCC) et phénomènes associés .........................................................................................9

1.5 Structure des systèmes époxydes ............................................................................ 13

1.6 Conclusion ............................................................................................................. 16

CHAPITRE 2 Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides.17

2.1 Introduction ............................................................................................................ 18

2.2 Polarisation des diélectriques .................................................................................. 18

2.2.1 Généralités ...................................................................................................... 18

2.2.2 Mécanismes de polarisation ............................................................................. 19

2.3 Pertes diélectriques ................................................................................................. 20

2.3.1 Permittivité complexe et facteur de pertes ....................................................... 21

2.3.2 Spectre diélectrique ......................................................................................... 23

2.4 Les charges d'espace ............................................................................................... 25

2.5 Transport des charges dans les isolants ................................................................... 26

2.5.1 Bandes d’énergie et niveaux de pièges ............................................................. 26

2.5.2 Injection de charges dans un isolant ................................................................. 27

2.5.3 Transport des charges dans le volume de l'isolant ............................................ 31

2.6 Mesure Non destructive de la charge d'espace ........................................................ 36

2.6.1 Méthodes de mesure de la densité de charges d'espace..................................... 36

2.6.2 Méthode de l'onde thermique ........................................................................... 38

2.7 Rigidité diélectrique des isolants solides ................................................................. 42

2.7.1 Claquage électronique ..................................................................................... 43

Page 8: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

2.7.2 Claquage thermique ......................................................................................... 43

2.7.3 Claquage électromécanique ............................................................................. 45

2.7.4 Considérations pratiques.................................................................................. 45

2.8 Vieillissement des isolants solides / résines époxydes ............................................. 47

2.8.1 Modes de vieillissement .................................................................................. 47

2.8.2 Modèles de vieillissement ............................................................................... 54

2.9 Quelques propriétés des résines époxydes ............................................................... 64

2.9.1 Propriétés diélectriques ................................................................................... 64

2.9.2 Mécanismes de conduction .............................................................................. 65

2.9.3 Résistivité surfacique et volumique ................................................................. 66

2.9.4 Rigidité diélectrique ........................................................................................ 68

2.10 Conclusion ............................................................................................................. 68

CHAPITRE 3 Mise en œuvre expérimentale……………………………………………...69

3.1 Introduction ............................................................................................................ 70

3.2 Constituants du composite étudié............................................................................ 70

3.2.1 Réticulation de la résine .................................................................................. 71

3.2.2 Fabrication ...................................................................................................... 72

3.2.3 Quelques propriétés du composite étudié ......................................................... 73

3.3 Types d'échantillons ............................................................................................... 74

3.4 Tests de rigidité diélectrique ................................................................................... 76

3.4.1 Aspects expérimentaux .................................................................................... 76

3.4.2 Traitement statistique des données ................................................................... 78

3.5 Spectroscopie diélectrique ...................................................................................... 79

3.6 Détermination de la permittivité relative du matériau à partir de mesures réalisées sur

des échantillons type 2 (à épaisseur non constante) ........................................................... 82

3.7 Résistivité volumique et caractéristiques courant-tension ........................................ 84

3.8 Résistivité surfacique ............................................................................................. 86

3.9 Cartographie du potentiel de surface ....................................................................... 90

3.10 Mesures de charges d'espace ................................................................................... 91

Page 9: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

3.11 Vieillissement électrothermique du matériau .......................................................... 92

3.12 Conclusion ............................................................................................................. 94

CHAPITRE 4 Résultats expérimentaux…………………………………………………..97

4.1 Introduction ............................................................................................................ 98

4.2 Permittivité et facteur de pertes .............................................................................. 98

4.3 Résistivité volumique et conduction à champ fort ................................................. 109

4.3.1 Considérations générales ............................................................................... 109

4.3.2 Analyse des mécanismes de conduction dans le matériau à l'état initial.......... 110

4.3.3 Influence de l'absorption d'eau sur la conduction et la résistivité volumique du

matériau………………………………………………………………………………...118

4.4 Propriétés surfaciques ........................................................................................... 124

4.4.1 Résistivité superficielle ................................................................................. 124

4.4.2 Répartition et variation du potentiel de surface .............................................. 129

4.5 Rigidité diélectrique sous champ électrique continu .............................................. 132

4.6 Charges d’espace et champs électriques résiduels ................................................. 136

4.7 Évolution à long terme des propriétés diélectriques du composite ......................... 140

4.7.1 Aspects liés à la mise en œuvre expérimentale ............................................... 140

4.7.2 Vieillissements à 125°C ................................................................................ 141

4.7.3 Vieillissements à 105°C ................................................................................ 153

4.7.4 Vieillissements à 85°C .................................................................................. 159

4.7.5 Rigidité diélectrique après vieillissement ....................................................... 165

4.8 Conclusions .......................................................................................................... 168

Conclusions et perspectives………………………………………………………………..171

Page 10: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...
Page 11: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Table des symboles et des abréviations

Table des symboles

Symbole Désignation

As Facteur pré-exponentiel de Schottky [1,26 106 A/ (m K)

2]

βs Constante de Schottky [J.m1/2

.V-1/2

]

βPF Constante de Poole-Frenkel [J.m1/2

.V-1/2

]

C Capacité d'un échantillon [F]

Cp Chaleur massique [J.kg-1

.K-1

]

D Épaisseur d'un échantillon [m]

E Champ électrique dans un matériau [V/m]

Ec

Champ électrique au contact [V/m]

ɛ Permittivité diélectrique du matériau [F/m]

ɛ0 Permittivité du vide [8,85 10 -12

F/m]

ɛr Permittivité diélectrique relative du matériau

0T Permittivité absolue à l'instant t0 [F/m]

g Distance entre électrodes [m]

h Constante de Planck [6,62620. 10-34

J. s]

hc Coefficient de convection [W.m-2

. K-1

]

IC Courant de conduction [A]

IMOT

Courant de l'onde thermique [A]

J Densité de courant [A/m2]

JPF Densité de courant Poole-Frenkel [A/m2]

JS Densité de courant Schottky [A/m2]

k Constante de Boltzmann [1,38. 10-23

J.K-1

]

n0 Densité de porteurs intrinsèques [C.m-3

]

nc Densité d'électrons libres à la cathode [C.m-3

]

nt Densité de pièges pleins [C.m-3

]

P Périmètre de l'électrode gardée [m]

ρV Résistivité volumique [Ω.m]

ρs Résistivité surfacique [Ω]

S Surface d'un échantillon [m2]

T Température [K ou °C]

Tan δ Facteur de pertes diélectriques

T0

Température initiale d'un échantillon [°C]

Tg Température de transition vitreuse [°C]

∆T Échelon de température [K ou °C]

UC Tension de claquage [V]

μ Mobilité de porteurs de charge [m2.s

-1.V

-1]

Page 12: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Table des symboles et des abréviations

μ0 Mobilité initiale de porteurs de charge [m2.s

-1.V

-1]

q Charge élémentaire [1,60219 10-19

C]

Qi

Charge contenue dans un isolant [C]

Φ0 Hauteur de la barrière au contact métal-isolant [eV]

αd

Coefficient de dilatation linéique d'un échantillon en fonction de la

température [K-1

]

α Coefficient de variation thermique de la capacité [K-1

]

αɛ

Coefficient de variation de la permittivité d'un échantillon en fonction de la

température [K-1

]

V Tension appliquée [V]

VTFL Tension correspondant au remplissage complet d'un niveau de pièges (Trap

Filled Limit) [V]

VTr Tension de passage entre le régime ohmique et limité par charges d'espace [V]

w Pulsation [rad/s]

χ Affinité électrique d'un isolant [eV]

θ Fraction de porteurs

σ Conductivité électrique du matériau [S.m-1

]

λ Distance de sauts [m]

γ Facteur d'augmentation du champ

Liste des abréviations

Abréviation Désignation

DIG Disjoncteur haute tension à Isolation Gazeuse

SF6 Hexafluorure de Soufre

MOT Méthode de l'Onde Thermique

HR Humidité Relative

FLIMM Focused Laser Intensity Modulation Method

LIMM Laser Intensity Modulation Method

PEA Méthode du Pulse Électrostatique (Pulsed Electro-Acoustic)

TSM Méthode de l'Onde Thermique (Thermal Step Method)

Page 13: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

1

Introduction Générale

Le développement des nouveaux réseaux de transport d’énergie utilisant le courant

continu, pour acheminer à grande échelle (quelques milliers de kilomètres) l’énergie produite par

des sources renouvelables éloignées des centres de consommation, est devenu un enjeu important

pour les années futures. Dans la plupart des cas, le transport de l’énergie électrique se fait en

courant alternatif. Néanmoins, dans le cas des très longues distances, le transport en courant

continu est économiquement plus avantageux qu’en courant alternatif. Ce mode de transport est

également utilisé pour l’interconnexion de réseaux électriques de fréquences différentes ou non

synchronisés. Au cours des dernières années, de nouvelles demandes sont apparues en termes de

stations électriques en courant continu ; on peut citer des pays comme le Brésil, la Russie, l’Inde

ou la Chine.

Pour réussir à transporter cette énergie sur de grandes distances, avec comme souci principal de

conserver la continuité d’approvisionnement et la stabilité du réseau en cas de perte d’une partie

des sources de production, il est nécessaire de créer un maillage dense transnational basé sur la

notion de nœuds de raccordement et de liaisons aériennes ou par câbles reliant les nœuds. Si les

niveaux de tension sont principalement de 320 kV et 500 kV, des projets 800 kV sont

actuellement en cours d’étude. Il est bien évident que ces nouveaux réseaux nécessitent le

développement de disjoncteurs à isolation gazeuse (DIG) capables de couper les courants

continus correspondants afin de protéger ces installations et les personnes qui y travaillent.

Si la technologie utilisée en courant alternatif est aujourd’hui parfaitement maitrisée, la mise au

point de disjoncteurs haute tension à courant continu (HTCC) nécessite encore d’importantes

recherches portant aussi bien sur le gaz, les isolants solides que sur les interfaces et les points

triples. Pour ce qui est des isolants polymères, les conséquences des fortes contraintes continues

sur ce type de matériaux dans les disjoncteurs sont aujourd’hui nettement moins bien maitrisées,

en particulier lorsqu’il s’agit de durées d’utilisation de plusieurs dizaines d’années, telles que

celles demandées par les exploitants. Ainsi, afin de réaliser des DIG HTCC fiables et compacts, il

est nécessaire de comprendre et de prendre en compte les mécanismes physiques et les

contraintes propres aux forts champs continus.

Page 14: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Introduction Générale

2

La conception des parties diélectriques dans l’appareillage HTCA repose principalement sur des

hypothèses liées à une répartition capacitive des contraintes électriques dans les systèmes

d’isolation. Si ces hypothèses sont justifiées en régime alternatif, notamment par la répartition du

champ électrique contrôlée par la permittivité qui varie très peu avec le champ et la température,

ce n’est plus le cas sous champ continu ; cette répartition devient alors contrôlée par la résistivité

qui présente également une variation avec le champ et la température. D’autres phénomènes

s’ajoutent également, comme l’injection et le piégeage de charges électriques (charges d’espace)

dans l’isolant, qui ne peuvent être négligées sous fort champ continu. Il est aujourd’hui établi que

les problèmes de baisse de performances et de rupture des isolants soumis à de forts champs

continus sont liés à la présence et à l’accumulation de charges en surface et en volume. En effet,

le champ électrique dû à la charge d’espace (dit champ « résiduel ») peut modifier localement la

contrainte électrique, conduisant à des champs réels dans la matière totalement différents des

champs moyens calculés macroscopiquement. De plus, lors d’un dépiégeage massif de la charge

accumulée, l’énergie relaxée est considérable et peut endommager localement ou complètement

le matériau [TOU91, DIS95, MAL97]. Dans le cas d’un renforcement de champ électrique, la

présence de charge d’espace peut donc conduire à une accélération du vieillissement électrique.

Le vieillissement de la matière conduisant généralement à une augmentation de la densité de sites

susceptibles de piéger la charge d’espace, il en résulte un phénomène auto-accélérant pouvant

conduire à la rupture diélectrique. La compréhension et la maîtrise de ces phénomènes dans les

diélectriques susceptibles d’être employés en courant continu sont donc indispensables à la

conception de DIG HTCC.

L’objectif de notre travail a été l’étude d’un matériau composite résine époxyde/alumine utilisé

jusqu’à maintenant pour la fabrication de supports des conducteurs dans les DIG haute tension

alternative. Ces supports doivent remplir le rôle d'isolateurs électriques entre phases et par

rapport au bâti du disjoncteur, qui est porté au potentiel de la terre. De plus, ils doivent assurer

l'étanchéité de la chambre de coupure qui contient du SF6 sous pression. Si la fiabilité de ce

composite en courant alternatif a été largement démontrée, son comportement à court et long

termes sous contraintes continues reste encore insuffisamment connu pour une utilisation en

HTCC, souhaitée par les industriels.

Afin d’augmenter la connaissance des propriétés diélectriques de ce matériau, nous avons réalisé

les travaux décrits dans le présent mémoire, qui est organisé en cinq chapitres.

Le premier chapitre est consacré à la problématique de l'utilisation des résines époxydes dans les

DIG. Nous présentons d’abord la structure et le fonctionnement des DIG, en détaillant les aspects

Page 15: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Introduction Générale

3

liés à la conception des futurs appareils pour les réseaux HTCC. Nous décrivons ensuite la

structure des systèmes époxydes.

Le deuxième chapitre traite des principaux phénomènes physiques rencontrés dans les isolants

solides soumis à des forts champs électriques, dans le but de mieux appréhender l’étude des

propriétés du matériau étudié. Sont ainsi traités les différents mécanismes liés à la polarisation, la

conduction, l’injection et le piégeage de charges. Dans une deuxième partie, le phénomène de

claquage diélectrique est abordé, suivi d’une présentation des différents modes et modèles de

vieillissement des polymères isolants. Un état des lieux sur les connaissances concernant les

résines époxydes termine cette partie.

Dans le troisième chapitre, nous présentons les différents aspects, théoriques et expérimentaux,

des techniques utilisées pour la détermination des propriétés isolantes et diélectriques de la résine

époxyde chargée d’alumine. Tout d'abord, le composite étudié, son procédé de fabrication à partir

des constituants de base ainsi que ses principales propriétés sont décrits. Les différentes mises en

œuvre expérimentales développées et réalisées sont ensuite détaillées.

Les résultats expérimentaux que nous avons obtenus suite à l’étude du matériau font l’objet du

quatrième chapitre. La première partie du chapitre est consacrée à la caractérisation et à l’analyse

du composite dans son état initial. On s’intéresse ainsi à son comportement en fonction de la

fréquence et de la température, aux mécanismes d’injection de charges et de conduction en

volume et en surface, à la rigidité diélectrique du matériau en fonction de la température et aux

phénomènes d’accumulation de charges d’espace sous contraintes thermoélectriques. L’ensemble

de ces résultats et l’analyse des phénomènes associés ont permis d’appréhender les propriétés du

composite et ont servi comme base aux travaux liés à son vieillissement électrothermique, qui fait

l’objet de la suite du Chapitre 4. Elle est dédiée au comportement à long terme du matériau

lorsqu’il est soumis à des contraintes électrothermiques sous champ électrique continu. Suite aux

résultats obtenus à l’état initial et en tenant compte des paramètres de fonctionnement des DIG,

des protocoles de vieillissement accéléré sous atmosphère contrôlée ont été mis en place sur une

période de 12 mois. Au cours de ces phases de vieillissement, nous avons étudié l’accumulation

de charges d’espace (liée à la présence et à l’évolution de défauts dans le matériau) et l’évolution

de la morphologie du composite (à travers le suivi des spectres diélectriques des échantillons).

Les résultats de cette étude et les enseignements qu’elle a pu apporter sont détaillés.

Les principaux aboutissements et les différentes perspectives ouvertes par ce travail sont enfin

résumés dans une conclusion générale.

Page 16: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...
Page 17: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

CHAPITRE 1

Les résines époxydes dans les

disjoncteurs à isolation gazeuse

Page 18: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 1 - Les résines époxydes dans les disjoncteurs à isolation gazeuse

6

1.1 Introduction

Dans ce chapitre, nous exposerons les principaux aspects et problématiques liés à l'emploi

des résines époxydes dans les disjoncteurs haute tension à isolation gazeuse (DIG).

En effet, si le milieu d’extinction de l’arc électrique utilisé dans les DIG est l’hexafluorure de

soufre (SF6), les conducteurs qui traversent la chambre de coupure sont soutenus par des pièces

réalisées, le plus souvent, en résine époxyde englobant des charges minérales. Ces pièces jouent

aussi bien le rôle de supports mécaniques que celui de structures isolantes électriques entre

phases et par rapport au bâti du disjoncteur, relié à la masse. Ils doivent également assurer

l’étanchéité de la chambre de coupure, remplie de gaz sous pression, par rapport au milieu

ambiant.

Dans un premier temps, nous présenterons la structure et les applications des DIG, en évoquant

les problématiques liées à la conception des nouveaux appareils pour les réseaux haute tension à

courant continu. Le chapitre se termine par une description de la structure des systèmes

époxydes.

1.2 Les disjoncteurs haute tension à isolation gazeuse (DIG)

Le disjoncteur est un élément essentiel pour la protection des installations électriques dans un

réseau haute tension. Son rôle est d'interrompre des courants dans les conditions normales de

service et dans des conditions anormales spécifiées (notamment lors de l’apparition de courts

circuits), en évitant ainsi des endommagements aux matériels et aux personnes.

La plupart des réseaux de transport et de distribution d’énergie électrique étant aujourd’hui des

réseaux haute tension alternative, les disjoncteurs actuels sont, dans leur écrasante majorité,

conçus pour fonctionner en régime sinusoïdal alternatif (50 ou 60 Hz).

Ces disjoncteurs peuvent être équipés de circuits et de capteurs permettant à tout moment de

connaître leur état (usure, pression du gaz pour la coupure…), ce qui donne la possibilité de

programmer des opérations de maintenance et éventuellement de détecter un risque de

défaillance. Ils peuvent aussi intégrer des dispositifs de synchronisation des ordres de fermeture

et d’ouverture afin de permettre de manœuvrer des lignes, des transformateurs, des réactances ou

des condensateurs, sans provoquer de surtensions ou de courants d’appel susceptibles

d’endommager les divers composants du réseau.

A ce jour, les disjoncteurs haute et très haute tension alternative (72,5 kV à 800 kV efficaces)

utilisent essentiellement le gaz ou l’huile comme milieu d’isolement et de coupure (la technique

de la coupure dans le vide est limitée aux applications moyenne tension, avec quelques

Page 19: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 1 - Les résines époxydes dans les disjoncteurs à isolation gazeuse

7

développements récents pour une tension assignée de 84 kV efficaces). Nous nous intéressons

donc dans ce travail aux disjoncteurs à isolation gazeuse (DIG ou GIS pour Gas Insulated

Switchgear).

Dans les DIG, la technique de coupure consiste à ouvrir le circuit concerné par le mouvement de

contacts mobiles, et à souffler du gaz sous pression sur l’arc électrique qui apparaît lorsque les

contacts se séparent de manière à le refroidir et à l’interrompre le plus rapidement possible. En

raison de ses propriétés chimiques et diélectriques, le gaz employé pour l’extinction de l’arc dans

les DIG est principalement l’hexafluorure de soufre (SF6). En effet, pendant la période de l’arc,

sous l’effet de la température qui peut atteindre 15000 à 20000 K, tout gaz se décompose. Dans le

cas du SF6, cette décomposition est quasi réversible : lorsque le courant diminue, la température

diminue, et les ions et les électrons se recombinent pour reconstituer la molécule SF6 [THÉ99].

De plus, grâce à son caractère électronégatif, la molécule SF6 possède une tendance marquée à

capturer les électrons libres pour former des ions lourds et peu mobiles, ce qui rend difficile le

développement d’une avalanche électronique. Il en résulte une rigidité diélectrique 2,5 fois plus

élevée que celle de l’air dans les mêmes conditions.

Dans la chambre de coupure, le déplacement relatif d’un cylindre par rapport à un piston fixe

permet de comprimer le gaz contenu dans le cylindre. Cette source de forte pression est utilisée,

après la séparation des contacts, pour souffler et refroidir l’arc et interrompre le courant. Cette

technique a été introduite par ALSTOM T&D vers la fin des années 50 pour des applications

moyenne tension, puis généralisée dans les années 60 aux disjoncteurs haute tension alternative.

Figure 1-1 : Les résines époxydes utilisées dans les disjoncteurs à isolation gazeuse

Outre le gaz utilisé pour la coupure de l’arc, des matériaux isolants solides avec des propriétés

adéquates sont indispensables pour assurer un fonctionnement efficace du disjoncteur pendant

des durées de plusieurs dizaines d’années, telles que le requièrent les exploitants. En effet, les

conducteurs de phases qui traversent la chambre de coupure sont maintenus par des supports

(Figure ‎1-1). Ces pièces jouent donc le rôle de soutien mécanique, mais également celui

Page 20: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 1 - Les résines époxydes dans les disjoncteurs à isolation gazeuse

8

d'isolateurs électriques entre phases et par rapport au bâti du disjoncteur, qui est porté au potentiel

de la terre. Ils doivent aussi assurer l'étanchéité de la chambre de coupure qui contient le SF6 sous

une pression de plusieurs bars. Le matériau à partir duquel sont fabriqués ces supports doit donc

comporter des propriétés mécaniques et électriques particulières et répondre à un cahier des

charges exigeant, prenant en compte les contraintes liées au fonctionnement et à l'environnement

du disjoncteur.

1.3 Les résines époxydes dans les DIG

Les résines époxydes sont des polymères thermodurcissables amorphes qui, dès leur apparition

dans les années 1950, sont devenues l'un des grands succès de l'industrie des matières plastiques.

Aujourd'hui, environ un million de tonnes d'époxydes est produit chaque année dans le monde

pour différentes applications. La majorité des résines époxydes (environ 65%) est utilisée pour

des applications comme la peinture ou le vernis de décoration et de protection. Dans l’industrie

électronique, ce matériau est employé essentiellement à la fabrication des circuits imprimés et

pour l'encapsulation des composants.

Dans le domaine de l'appareillage électrique moyenne et haute tension, on les rencontre

notamment en tant que [BAR92] :

supports isolants pour câbles de lignes à haute tension ;

traversées ;

corps de disjoncteurs et d'interrupteurs sous gaz ;

sectionneurs.

Les époxydes sont aussi employées dans les machines tournantes et dans les transformateurs.

Dans de nombreux cas, les résines époxydes sont utilisées en tant que composites englobant des

charges minérales, comme de la silice ou de l'alumine, qui permettent d’améliorer leurs

caractéristiques thermiques et mécaniques.

La résine étudiée dans le cadre de cette thèse sert à fabriquer des pièces pour DIG haute tension

alternative (Figure 1-2). Ses performances mécaniques sont conformes aux attentes des fabricants

jusqu'à des températures dépassant 100°C (105°C étant la température de fonctionnement

maximum des DIG auxquels on s’intéresse [SOR04]). Ce type de produit présente l’avantage

d’une bonne stabilité dimensionnelle dans le temps (par rapport, par exemple, aux

thermoplastiques), en permettant aux supports de conserver une géométrie constante dans le

temps. Elle est également résistante au SF6 et aux substances issues de sa décomposition durant

l’arc. Les caractéristiques diélectriques de cette résine sont suffisantes pour une utilisation en

courant alternatif et quelques-unes de ses propriétés seront données à titre indicatif à la fin du

Page 21: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 1 - Les résines époxydes dans les disjoncteurs à isolation gazeuse

9

Chapitre 2. La détermination et l’analyse approfondie de ses propriétés diélectriques, qui fait

partie des objectifs de notre travail, feront l’objet du Chapitre 4.

Figure 1-2 : Exemple d'isolateur à base de résine époxyde [SOR04]

1.4 Problématique de la conception des disjoncteurs haute tension courant

continu (HTCC) et phénomènes associés

Contrairement à la technologie utilisée en courant alternatif, qui est aujourd’hui parfaitement

maitrisée, la mise au point de disjoncteurs haute tension à courant continu (HTCC) nécessite

encore d’importantes recherches portant aussi bien sur le gaz, les isolants solides, les interfaces et

les points triples. Pour ce qui est des isolants polymères, les conséquences des fortes contraintes

continues sur ce type de matériaux dans les disjoncteurs sont aujourd’hui nettement moins bien

maitrisées, en particulier lorsqu’il s’agit des durées d’utilisation de plusieurs dizaines d’années.

Par ailleurs, il est à noter qu’il n’existe pas, à l’heure actuelle, de loi de vieillissement fiable

spécifique aux isolants synthétiques soumis à des forts champs continus. La CIGRE a mis en

place des recommandations destinées aux câbles HTCC jusqu’à 500 kV [CIG496], mais ces

recommandations ne sont pas applicables aux disjoncteurs. Certains constructeurs ont réalisé des

appareils pilotes sous tension continue, conçus selon les règles utilisées dans la technologie en

courant alternatif et surdimensionnés. Il est toutefois bien évident qu’un appareillage ainsi réalisé

ne peut constituer une solution fiable et économiquement viable ni à large échelle ni à long terme.

Afin de réaliser des DIG HTCC fiables et compacts, il est nécessaire de comprendre et de prendre

en compte les mécanismes physiques et les contraintes propres aux forts champs continus.

La conception des parties diélectriques présentes dans l’appareillage HTCA repose

principalement sur des hypothèses liées à une répartition capacitive des contraintes électriques

dans les systèmes d’isolation. Ceci est parfaitement justifié en alternatif par le fait que, sous

champ alternatif, la répartition du champ électrique est contrôlée par la permittivité qui varie très

peu avec le champ et la température. En revanche, sous champ continu, cette répartition est

contrôlée par la résistivité [TOU74]. A cela s’ajoutent l’injection et le piégeage de charges

Cônes en

résine époxyde

Conducteurs électriques

Disque métallique:

Support des cônes en résine

époxyde

Page 22: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 1 - Les résines époxydes dans les disjoncteurs à isolation gazeuse

10

électriques (charges d’espace) dans l’isolant qui ne peuvent pas être négligées sous fort champ

continu. La compréhension et la maitrise de ces phénomènes et des propriétés à court et long

termes des diélectriques employés en DC sont donc indispensables à la conception des DIG

HTCC.

De par la sollicitation électrique constante appliquée à l’isolation en DC, des charges électriques

(communément appelées charges d’espace) sont injectées dans l’isolant et modifient la répartition

du champ électrique interne. La présence de charges d’espace dans le matériau peut induire

d’importants renforcements du champ électrique local, conduisant à une forte distorsion qu’il est

indispensable de prendre en compte lors du dimensionnement. Ce renforcement de champ local

associé à la présence de charges d’espace peut également engendrer une accélération du

vieillissement. La charge d’espace accumulée en surface et en volume est ainsi un facteur

étroitement lié à la tenue diélectrique et un marqueur du vieillissement [TOU74], qu’il est

primordial de pouvoir mesurer pour une bonne conception du système d’isolation sous champ

continu. Pour illustrer les propos précédents, la Figure ‎1-3 [LAU99] présente le cas d’un film

isolant d'épaisseur d et ses électrodes. On suppose que le problème est unidirectionnel selon la

direction x.

En l'absence de charge (x) et pour un champ appliqué V0, le champ est constant en tout point

(sauf très près des électrodes) et a pour valeur 0 0E V d (Figure ‎1-3 a). Si l’on suppose ensuite

l'existence de deux zones de charge d'espace adjacentes aux électrodes, de même épaisseur, de

signes opposés et possédant des densités de charges 0 égales (Figure ‎1-3 b), le champ dû aux

charges d'espace, en l'absence de tout potentiel appliqué, est obtenu en résolvant l'équation de

Poisson :

divE

1-1

où représente la permittivité du matériau.

La Figure ‎1-3 c présente le cas où des homocharges sont présentes dans l'isolant. Il s’agit de

charges dont le signe est identique à celui du potentiel de l’électrode adjacente (le potentiel 0V est

appliqué de telle sorte que l'anode soit adjacente à la distribution des charges positives ; les

distributions de charges ont donc le même signe que les électrodes). L’effet de cette homocharge

est un abaissement du champ aux électrodes et son renforcement dans le volume de l'isolant. Si la

même tension est appliquée, mais en imposant que l'anode soit adjacente à la distribution des

charges négatives (Figure ‎1-3 d), on est en présence d'hétérocharges, qui ont pour conséquences

l'augmentation du champ interfacial et la diminution du champ volumique. Ces renforcements

Page 23: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 1 - Les résines époxydes dans les disjoncteurs à isolation gazeuse

11

locaux du champ électrique entrainent des sur-sollicitations localisées de l'isolant qui conduisent,

à terme, à la diminution de sa durée de vie. Le dépiégeage massif de la charge stockée peut

également conduire à la rupture de l'isolant.

Figure 1-3 : Illustration des effets de la charge d’espace

sur la répartition du champ électrique dans un échantillon plan [LAU99]

Parmi les répartitions illustrées, celle due à l’apparition d’hétérocharges est souvent considérée

comme la plus contraignante, car résultant en général d’accumulations sur des faibles épaisseurs,

conduisant de fait à des champs à l’interface plus élevés. Dans la réalité, les distributions sont

souvent plus compliquées que les cas d’école représentés ci-avant. Elles sont influencées par les

propriétés de conduction et dépiégeage du matériau et constituent ainsi un bilan de l’injection, du

piégeage et du dépiégeage de plusieurs types de porteurs, faisant intervenir des concentrations,

des mobilités et des distributions de pièges très difficiles à connaître. En raison de ce grand

nombre de paramètres difficiles à estimer et de la non homogénéité du matériau à l’échelle

microscopique, il est généralement impossible de prédire quelle sera, à un instant donné, la

répartition du champ interne : les calculs par simulation ne permettent pas (du moins, pour

l’instant) de reproduire de manière satisfaisante les résultats expérimentaux, surtout lorsqu’il

s’agit de fortes épaisseurs. La meilleure (et, le plus souvent, la seule) manière d’approcher ces

ρ(x) ρ(x)

E(x)

X X X X

X X X X

ρ(x) ρ(x)

E(x) E(x) E(x)

Page 24: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 1 - Les résines époxydes dans les disjoncteurs à isolation gazeuse

12

accumulations de charges est la mesure directe, notamment à l’aide de méthodes non destructives

(dites aussi « à stimuli »). De telles mesures ont montré que les champs électriques peuvent être

multipliés par des facteurs allant jusqu’à 10 près des électrodes après de longues périodes de

polarisation sous contrainte continue (ex. [ZHA96]).

Pour illustrer les effets que peut avoir sur le long terme une accumulation stable de charges

d’espace, même pour des champs résiduels plus réduits, considérons l’exemple d’une isolation

que l’on souhaite voir supporter 10 kV/mm pendant 30 ans, et dans laquelle la charge piégée

provoque une augmentation localisée du champ de 2 kV/mm. Aux endroits où la charge

s’accumule, le champ maximum sera donc de 12 kV/mm au lieu de 10 kV/mm. Si l’on considère

que la durée de vie du matériau tBD dépend de la contrainte appliquée selon une loi de puissance

inverse, tel que sous contrainte alternative (tBD ~ E-n

), avec n = 15 (valeur usuelle en AC pour le

polyéthylène), on obtient une durée de vie de 1,94 ans sous 12 kV/mm au lieu des 30 ans

souhaités. Même si l’effet réel est probablement plus réduit (la CIGRE TB 496 préconise n = 10

pour le cas du polyéthylène en DC, sans qu’il y ait pour l’instant consensus à ce sujet), il ressort

clairement que l’accumulation stable de charges d’espace, même à un degré réduit, diminue de

manière non négligeable la durée de vie du matériau et, doit, de ce fait, être maîtrisée.

Bien que les champs électriques auxquels sont soumis les époxy dans les DIG soient

sensiblement inférieurs aux valeurs présentes dans l’isolation des câbles haute tension, il est

certain que des charges d’espace s’accumulent dans ces matériaux car les seuils d’injection (de

l’ordre du kV/mm) sont généralement atteints, notamment lorsque la température de

fonctionnement dépasse 60°C, comme nous le verrons par la suite. De plus, même pour des

valeurs de coefficients n plus faibles (par exemple, des valeurs de n de l’ordre de 6 ont été

mesurées en AC pour des nanocomposites époxy testés à 6-8 kV/mm [PRE14]), l’effet sur la

durée de vie des systèmes reste très significatif (dans l’exemple précédent, avec n = 6, on obtient

10 ans de vie au lieu des 30 souhaités). Les industriels de l’appareillage ont pris récemment la

mesure de l’importance de ce phénomène, avec l’établissement en 2014 d’un groupe de travail

chargé par la CIGRE de réfléchir à des recommandations pour la conception et la qualification

des appareillages HTCC.

Les performances mécaniques et thermiques des résines époxydes utilisées en courant alternatif

depuis de nombreuses années étant bien connues et appropriées aux contraintes

thermomécaniques des DIG, et leur coût de fabrication étant bien maîtrisé par les industriels, la

question de l’utilisation de ces matériaux pour des futurs DIG HTCC s’est posée tout

naturellement. Elle constitue la raison d’être de cette étude, qui porte sur les caractéristiques

électriques de ces matériaux sous fort champ continu et sous contrainte thermique.

Page 25: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 1 - Les résines époxydes dans les disjoncteurs à isolation gazeuse

13

Avant de nous intéresser de près aux propriétés diélectriques de ces résines, nous allons faire le

point sur leur structure, leur morphologie, leur mise en œuvre et leurs principales propriétés

physiques.

1.5 Structure des systèmes époxydes

Les systèmes époxydes sont des composés qui s’obtiennent par la réticulation d’un "pré-

polymère" (la résine époxyde) à l’aide d’un agent réticulant (le durcisseur). La structure

moléculaire du "pré-polymère" intègre au moins deux groupes époxydes (Figure 1-4).

Figure ‎1-4 : Groupement époxyde

La résine la plus couramment utilisée est l'éther diglycidique du bisphenol A (DGEBA). Le

DGEBA s'obtient en faisant réagir le bisphenol A (4,4 diphénol isopropyidéne) avec

l'épichlorhydrine (1 Chloro 2,3 Epoxy Propane) en présence de soude avec formation de sel de

sodium et départ d’eau (Figure ‎1-5 et Figure ‎1-6).

Figure 1-5 : Synthèse du DGEBA

Figure ‎1-6 : Formule chimique du DGEBA

Les groupes époxydes à l'extrémité de la chaîne sont les responsables de la très grande réactivité

des résines époxydes. Les groupes hydroxyles OH qui se trouvent au milieu de la molécule

CHCH2

O

Page 26: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 1 - Les résines époxydes dans les disjoncteurs à isolation gazeuse

14

peuvent également réagir ; ce sont eux qui initient la réaction avec les durcisseurs du type

anhydride [BAR92A].

D’autres types de pré-polymères époxydes peuvent être obtenus en changeant la nature des

réactifs. On peut citer :

- les résines de bisphenol-formol (ou bisphenol F), qui sont plus fluides que les résines de

bisphénol A, mais qui n'affectent pas les propriétés thermiques du système réticulé ;

- les résines époxydes novolaques, présentant d'excellentes résistances aux agents chimiques et à

la chaleur ;

- les résines cyclo-aliphatiques, présentant une faible viscosité, une constante diélectrique de

faible valeur et une température de transition vitreuse du produit réticulé élevée.

Les résines époxydes sont utilisées à large échelle dans les applications électriques, sous champ

électrique élevé, car elles permettent le moulage de pièces de dimensions variées, sans que leur

mise en œuvre ne provoque la formation de cavités gazeuses néfastes à l'isolation (sièges de

décharges partielles).

Dans la plupart des cas, on fait réagir un durcisseur avec la résine pour former un réseau

tridimensionnel infusible. Le durcisseur est choisi en fonction de l’application envisagée et des

caractéristiques du produit fini. Les durcisseurs réagissent sur les groupes époxydes ou sur les

hydroxyles. On classe généralement les durcisseurs en deux principales familles : les polyamines

aliphatiques ou aromatiques et les anhydrides d'acides.

Les polyamines aliphatiques confèrent au réseau époxyde une bonne résistance mécanique et une

plus grande flexibilité que les polyamines aromatiques. Cette catégorie de durcisseurs permet la

création de matériaux offrant une excellente résistance aux solvants. Ils peuvent réagir très

rapidement à température ambiante et sont utilisés pour des applications courantes ne nécessitant

pas de recuit, mais ils ont l'inconvénient de non comptabilité totale avec les résines. Un des plus

célèbres est la triéthylénetétramine ou TETA. Ses caractéristiques sont honorables, mais il

présente l'inconvénient de donner des allergies de contact.

Les durcisseurs aromatiques sont plus lents à réagir et nécessitent un recuit à température élevée.

Ils confèrent aux résines après réticulation une excellente résistance mécanique (meilleure que

celle obtenue avec les anhydrides) et une très bonne stabilité aux agents chimiques. Les

durcisseurs aromatiques les plus connus sont le DDM (diaminodiphénylméthane) et le DDS

(diaminodiphénylsulfone) (Figure ‎1-7).

Page 27: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 1 - Les résines époxydes dans les disjoncteurs à isolation gazeuse

15

Triéthylénetétramine ou TETA DDS ou Diaminodiphénylsulfone

Figure 1-7 : Exemples de durcisseurs amines aliphatiques et aromatiques

Les anhydrides d’acides sont les plus utilisées dans le domaine de la construction électrique en

moyenne et haute tension. Les anhydrides d'acides sont des produits assez latents, c'est à dire

qu'ils ne réagissent pas (ou très peu) à température comprise entre 20°C et 40°C. En revanche, ils

nécessitent l'utilisation d'agents accélérateurs qui peuvent intervenir à des températures plus

élevées et entraînent une réticulation plus rapide.

Ils permettent une réaction et donc un réseau plus homogène accompagné d'une consommation

complète de la résine. Ces durcisseurs confèrent aux résines un excellent comportement au

vieillissement thermique. Les inconvénients sont une température de transition vitreuse limitée la

plupart du temps à 110-115°C et une résistance moyenne des résines obtenues aux agents

chimiques [BAR92A].

Parmi les principaux types de durcisseurs anhydrides, on peut citer : l'anhydride phtalique (PA),

l'anhydride hexahydrophtalique (HHPA) et le methylhexahydrophtalique (MHHPA) (Figure ‎1-8).

Anhydride phtalique (PA) Anhydride hexahydrophtalique

(HHPA)

Methylhexahydrophtalique

(MHHPA)

Figure 1-8 : Exemples de durcisseurs anhydrides

Parfois, on ajoute au durcisseur des accélérateurs, qui sont des substances ayant pour but de

permettre un durcissement le plus rapide possible, et ce parfois à des températures basses. Parmi

les accélérateurs les plus souvent utilisés, on peut citer les amines tertiaires, les imidazoles

substitués et les amines aliphatiques.

Page 28: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 1 - Les résines époxydes dans les disjoncteurs à isolation gazeuse

16

Dans le cas où certaines propriétés physico-chimiques doivent être privilégiées, on ajoute des

additifs. Ces additifs peuvent être des charges, pouvant intervenir à des taux très importants par

rapport au mélange total. Il s'agit surtout de charges minérales comme la silice, pouvant atteindre

60% en masse, ou l'alumine pure (qui est très utilisée dans les disjoncteurs haute tension au SF6 -

c’est le cas de notre étude), de solvants, de diluants réactifs, de pigments et colorants, de

plastifiants, d’extendeurs, de flexibilisateurs …

Les propriétés d'une résine chargée dépendent de la résine de base, des propriétés des particules

de charges, de leur dispersion, de leur distribution géométrique et de leur interaction avec la

résine. Dans les formules des résines époxydes, il est très fréquent de rencontrer des formules qui

sont plus performantes que d'autres pour telle caractéristique, alors qu'on trouve l'inverse pour

une autre caractéristique. C'est pour cette raison qu'il faut chercher souvent le meilleur

compromis pour une application déterminée.

1.6 Conclusion

Dans ce chapitre, nous avons passé en revue la structure des systèmes époxydes. Nous avons

également présenté la problématique de l’isolation solide dans la haute tension à courant continu,

où les phénomènes liés à la conduction et au piégeage nécessitent des matériaux permettant de

limiter ou de maîtriser les effets de l’accumulation de charges et de distorsion du champ

électrique.

Dans le but d’analyser la possibilité d’étendre l’utilisation des résines époxydes aux futurs

disjoncteurs haute tension à courant continu, après avoir présenté un état de l’art concernant les

phénomènes diélectriques apparaissant lorsqu’un isolant solide est soumis à des champs forts,

nous nous intéresserons à l'étude des propriétés diélectriques de la résine époxyde chargée

d'alumine, aussi bien dans son état initial que lors d'expositions à des contraintes

électrothermiques en régime continu, à court et à long termes.

Page 29: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

CHAPITRE 2

Comportement et propriétés

électriques des polymères

isolants solides

Page 30: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

18

2.1 Introduction

Nous allons nous intéresser, dans les pages suivantes, aux différents phénomènes

physiques qui apparaissent lorsqu’on soumet un matériau diélectrique solide à un champ

électrique. Le cas des forts champs continus sera détaillé en particulier, le but du présent chapitre

étant de faire le point sur le comportement diélectrique des polymères isolants sous ce type de

contrainte en vue de l’interprétation des résultats expérimentaux.

Dans un premier temps, nous passerons en revue le concept de polarisation, ses grandeurs

associées et ses effets sur le matériau, en lien avec sa structure. Par la suite, après un rappel

succinct de la structure en bandes d’énergie des isolants et de la structure métal-isolant-métal, les

mécanismes qui régissent le comportement d’un diélectrique solide soumis à un fort champ

continu (conduction, piégeage) seront abordés. Le phénomène de claquage diélectrique et les

différents modes et modèles de vieillissement des polymères isolants seront également présentés.

Quelques propriétés du matériau employé dans l’étude feront l’objet de la dernière partie du

chapitre.

2.2 Polarisation des diélectriques

2.2.1 Généralités

La notion de diélectrique est liée à la capacité d’un matériau à contenir ou véhiculer un champ

électrique, donc à sa capacité à se polariser. Le phénomène de polarisation correspond à

l’apparition ou à l’orientation de moments dipolaires sous l’effet d’un champ électrique extérieur.

Il se traduit soit par une séparation des barycentres des charges positives et négatives des atomes

et molécules, initialement confondus, soit par une orientation majoritairement dans la direction

du champ externe des molécules présentant déjà un moment dipolaire permanent.

L’état de polarisation d’un matériau peut être quantifié par le vecteur polarisation P

, qui

représente la densité volumique dp dv

de moments dipolaires p q r

, où q est la charge du

type de dipôle concerné (molécule, chaîne moléculaire…) et r sa longueur. Au niveau

macroscopique, la capacité d'un diélectrique à se polariser est quantifiée par sa permittivité

diélectrique absolue (qui est une mesure de sa capacité à attirer des charges à ses frontières).

On définit la permittivité relative du diélectrique comme le rapport 0r , où 0 est la

permittivité du vide. Entre le vecteur déplacement électrique D

, le champ électrique externe E

et le vecteur polarisation P

, on a alors les relations :

Page 31: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

19

0 0rD E E E P

2-1

Selon leur structure, les diélectriques peuvent être classés en deux catégories :

les diélectriques non polaires, constitués de molécules dont les centres de gravité des

charges positives et négatives se confondent en l'absence du champ électrique, ce qui a

pour effet un moment nul en l’absence du champ. Un moment dipolaire n'apparait que

lorsque le diélectrique est soumis à un champ électrique extérieur (exemples : le

polyéthylène, le polypropylène...). On parle alors de polarisation de déformation ;

les diélectriques polaires, constitués de molécules qui possèdent un moment dipolaire

permanent. Ces dipôles s'orientent majoritairement dans la direction du champ électrique

externe lorsqu’un tel champ est appliqué (exemples : le PVC, le PMMA, le PET...). On

parle alors de polarisation d’orientation.

2.2.2 Mécanismes de polarisation

Les mécanismes selon lesquels des moments dipolaires sont créés ou orientés au niveau

macroscopique permettent d'établir le classement suivant :

2.2.1.2 La polarisation électronique

Ce type de polarisation caractérise tous les diélectriques, même s'ils présentent d'autres types de

polarisation. Elle est due à la déformation du nuage électronique entourant les atomes ou les ions

sous l'action du champ électrique externe. Il y a ainsi création d'un dipôle au niveau de chaque

atome ou ion.

2.2.2.2 La polarisation ionique et atomique

La polarisation ionique affecte les matériaux présentant des liaisons ioniques. Le déplacement

relatif des ions positifs et négatifs sous l'effet du champ fait apparaitre un moment ionique induit

avec une constante de temps de l'ordre de 10-12

à 10-13

s. Cet effet existe également dans le cas

des molécules à liaisons covalentes, si les polarités des atomes qui les composent sont différentes.

2.2.3.2 La polarisation dipolaire ou d'orientation

Ce type de polarisation est spécifique aux diélectriques polaires. En l'absence du champ, les

dipôles sont orientés de façon désordonnée, sous l’effet de l'agitation thermique. Lorsqu'un

champ est appliqué au diélectrique, les dipôles ont tendance à s'orienter selon la direction du

champ. Ce phénomène, bien connu et largement étudié [COE93, FOU86, BLA92], peut durer

longuement après suppression du champ électrique et est à l’origine de nombreuses applications.

Page 32: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

20

2.2.4.2 La polarisation interfaciale (Maxwell - Wagner)

Le concept de la polarisation interfaciale a été introduit par Maxwell à la fin du XIXème

siècle

[MAX81]. Il s’agit d’un concept macroscopique, traduisant des effets observés dans les

matériaux hétérogènes, et qui correspond à l'accumulation, sous l'action du champ externe, de

charges électriques aux interfaces entre les différentes phases constituant la structure diélectrique

lorsque celles-ci possèdent des permittivités et des conductivités différentes.

2.2.5.2 La polarisation par charges d'espace

Ce concept prend en compte la migration des charges « libres » dans le matériau. Ainsi, si l’on

considère un isolant d’épaisseur d pourvu d’électrodes, contenant autant de pièges que de charges

libres (en l’absence d’injection), en l'absence de champ externe et si les électrodes sont «

bloquantes », l'échantillon est électriquement neutre en tout point. En revanche, lors de

l’application d’un champ électrique extérieur, les porteurs libres vont migrer vers l'électrode de

signe opposé. La neutralité globale de l'échantillon est conservée, mais une polarisation moyenne

peut être définie de la manière suivante [ROS53, COE83] :

0

1d

CEP x x dxd

2-2

où x désigne la densité volumique de charges à l'équilibre à la profondeur x dans le matériau.

La répartition de ( )x est fonction de la distribution et de la profondeur des pièges dans le

matériau, ce qui traduit au niveau microscopique l’effet Maxwell-Wagner.

2.3 Pertes diélectriques

Les pertes diélectriques correspondent à de l'énergie dissipée dans un diélectrique quand ce

dernier est soumis à un champ électrique extérieur. Ainsi, quand un champ électrique est appliqué

au diélectrique, la polarisation ne suit pas ce champ de manière instantanée : ceci traduit une

absorption d’énergie par le diélectrique, équivalente au travail nécessaire pour déplacer ou

induire les dipôles et pour déplacer les charges libres. Le cas d’école, correspondant à la situation

fréquente de l’application d’une tension sinusoïdale à un système d’isolation, est celui d’un

champ extérieur qui varie de façon sinusoïdale avec une pulsation : on remarque alors

l’existence d’une composante du courant à travers le diélectrique en phase avec le champ (à la

différence de la composante de déplacement, qui est, elle, en quadrature avec le champ).

L’existence de la composante du courant en phase avec le champ traduit ainsi les pertes

diélectriques.

Page 33: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

21

2.3.1 Permittivité complexe et facteur de pertes

Considérons un diélectrique placé dans un champ électrique sinusoïdal ωME t E sin t . Comme

les dipôles ne suivent pas instantanément le champ appliqué E, la polarisation P et donc

l'induction électrique D sont déphasées d'un angle h par rapport à E :

ωM hD t D sin t 2-3

Si l’on trace la fonction D(E), on obtient une ellipse dont l'aire est proportionnelle à l’énergie

dissipée par unité de volume lors du processus de polarisation, qu’on appelle pertes par hystérésis

diélectrique (Figure ‎2-1). L’angle h est appelé angle des pertes par hystérésis diélectrique.

Les grandeurs sinusoïdales E et D s'écrivent en complexe [NOT00] : 2eff ME E E et

exp 2 expeff h M h

D D i D i . Afin de rendre compte de cette dissipation d’énergie, on peut

définir une permittivité complexe , qui sera donc égale à :

exp cos sinM h M h h

Di i

E avec M

M

M

D

E

2-4

En posant i , on peut en déduire que cosM h et sinM h . La tangente de

l'angle de pertes, appelée facteur de pertes par hystérésis, est alors donnée par :

rh

r

tan

2-5

Figure 2-1 : Représentation graphique des pertes par hystérésis diélectrique

Er EM

E

D

DM

Dr

Page 34: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

22

De point de vue physique, on voit que la partie réelle de la permittivité ’ traduit la polarisation

du matériau, alors que la partie imaginaire est l’image de l’énergie dissipée lors de ce

processus.

Si l'induction électrique varie de dD , l'énergie électrique par unité de volume va varier de

e Ddw E d . La puissance dissipée par unité de volume, correspondant aux pertes, peut être

définie par :

e DP t dw dt EdD dt EJ 2-6

avec DJ dD dt la densité de courant de déplacement.

En régime sinusoïdal, le produit du champ électrique E par le conjugué complexe du courant de

déplacement DJ

permet d'obtenir la puissance apparente complexe par unité de volume :

h D h hS E J P iQ

2-7

où Ph représente les pertes par unité de volume et de temps (puissance active volumique) et Qh la

vitesse de variation de l'énergie du champ électrique par unité de volume (puissance réactive

volumique). CommeDJ i D , la puissance apparente par unité de volume s'écrit :

hS E i D E i i E

2-8

On en déduit donc :

2 20 rh eff effP E E 2-9

2 20 rh eff effQ E E 2-10

avec effE la valeur efficace du champ. L'expression de hP montre bien que la partie imaginaire de

la permittivité complexe est un coefficient de pertes.

Le passage du courant dans le diélectrique génère également des pertes par conduction, dues au

déplacement des charges non liées dans le diélectrique. Ces pertes s’écrivent, par unité de

volume :

Page 35: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

23

2c effP E 2-11

Les pertes totales dans le diélectrique, par unité de volume, correspondent à la somme des pertes

calculées précédemment :

2ch effP P P E et 2

h effQ Q E 2-12

Comme htan , si on pose :

htan tan

2-13

Il en résulte :

2effP E tan 2-14

Le coefficient tan est appelé facteur de pertes et est l'angle de pertes.

2.3.2 Spectre diélectrique

Si l’on suit le modèle développé ci-avant dans le cas d’un diélectrique avec un seul type de

dipôles, le facteur de pertes devrait diminuer continuellement avec la fréquence et tendre vers

l’infini lorsque la fréquence tend vers zéro (hyperbole). En réalité, lorsqu’on mesure la

permittivité et le facteur des pertes d’un matériau isolant solide en faisant varier la fréquence, on

obtient des courbes (« spectres diélectriques ») qui ressemblent plutôt à la figure ci-après et qui

traduisent l’existence, en raison de la structure chimique et morphologique du matériau, de

plusieurs « relaxations », correspondant aux différents mécanismes de polarisation décrits au

début du chapitre.

Ainsi, la taille des dipôles susceptibles de pouvoir suivre les variations du champ diminue avec la

fréquence. Pour les hautes fréquences, seules les petites entités telles que les électrons peuvent

suivre les variations du champ : on met alors en évidence la polarisation électronique. Pour des

fréquences plus basses, on retrouve les polarisations ionique et atomique.

L'orientation des dipôles moléculaires peut se produire sur une large gamme de fréquences (du

MHz au mHz), dépendant de la facilité avec laquelle les dipôles peuvent tourner, donc de leur

taille et de leur moment dipolaire.

Page 36: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

24

Figure 2-2 : Illustration du spectre diélectrique d’un isolant solide

Il en ressort que les « pics de relaxation » apparaissant aux fréquences les plus basses

correspondent plutôt à des entités dipolaires de grande taille, telles que les chaînes

macromoléculaires.

Néanmoins, lorsque la fréquence commence à diminuer en-dessous du Hz, la contribution des

charges « libres » (ioniques ou électroniques), qui peuvent se déplacer sur des distances de plus

en plus importantes dans le diélectrique, devient de plus en plus significative. Pour des

fréquences très basses (10-2

à 10-6

Hz), on peut mettre ainsi en évidence les effets de la

conduction et de la polarisation interfaciale. En effet, si l’on suit l’équation ‎2-13, une pente de -1

en échelle logarithmique dans le spectre du facteur des pertes (ou de la partie complexe de la

permittivité r ) traduit une contribution majoritaire de la conduction, car le terme correspondant

à la conductivité varie en 1/. Dans ce cas, la partie réelle de la permittivité ne varie pas, car il

n’y a pas de charge supplémentaire attirée aux électrodes. En revanche, lorsqu’on observe des

augmentations du facteur de pertes en basse fréquence accompagnées d’une augmentation de la

permittivité, on a affaire à un déplacement localisé de charges libres accompagnée d’une

accumulation de charges aux électrodes : il s’agit donc des effets de la polarisation interfaciale.

Pour distinguer les deux phénomènes, on parle de « conduction purement ohmique » pour le cas

où l’on observe une pente de -1 dans la représentation de r (Figure ‎2-3.a) et de « conductivité

non ohmique » lorsque cette pente est supérieure à -1 et est accompagnée d’une augmentation de

r , traduisant ainsi les effets de la polarisation interfaciale et par charge d’espace (Figure ‎2-3.b).

2101

210 410 610 810 1010 1210 1410 1610

''

r

'

r

' 1r

f

Radio Infrarouge Ultraviolet

Interfaciale et

charges d’espaceDipolaire ou

Orientation

Ionique Électronique

Page 37: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

25

(a) (b)

Figure 2-3 : Conductivité « purement ohmique » (a) et « non ohmique » (b)

observées en basse fréquence

2.4 Les charges d'espace

Afin d’empêcher le phénomène de conduction, un isolant parfait ne devrait pas contenir de

charges libres, donc pas d’autres charges que les noyaux atomiques et les électrons des couches

internes et de valence, fortement liés énergétiquement au noyau. En réalité, les matériaux utilisés

dans l’isolation électrique ne se comportent jamais comme des isolants parfaits, dans la mesure

où la conductivité est certes faible, mais non nulle. Ceci est attribuable à la présence de porteurs

de charges dont la mobilité est très faible (de l'ordre de 10-15

m2.V

-1.s

-1). L’ensemble des charges

réelles, positives ou négatives, existantes dans un isolant et qui sont susceptibles de s’y déplacer,

est appelé charge d’espace.

Ces charges peuvent être de deux types :

les charges extrinsèques, qui proviennent de l'extérieur du matériau. Ce sont les charges

injectées dans l'isolant à travers les électrodes lorsque la barrière de potentiel à l’interface

électrode-isolant est suffisamment faible ;

les charges intrinsèques, qui existent ou qui sont créées à l’intérieur du matériau. Elles

peuvent être des ions apparaissant suite à des dissociations ayant lieu sous l’effet du champ

appliqué, des électrons (ou des trous) excités à partir de leur bande de valence (ou de

conduction) ou d’un état localisé de la bande interdite.

log

r’’

log

r’

r’

log

r’’

F. Kremer, A. Schönals, Springer, 2002

log

r’’

log

r’

r’

log

r’’

Page 38: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

26

Sous l’effet du champ électrique, tous ces porteurs peuvent se déplacer dans l’isolant. En fonction

de leur nature et de la structure du diélectrique, les mobilités et donc les effets des différentes

charges sur la conductivité apparente de l’isolant peuvent être très variables.

2.5 Transport des charges dans les isolants

2.5.1 Bandes d’énergie et niveaux de pièges

La théorie des bandes de conduction est utilisée pour expliquer les mécanismes par lesquels les

différents phénomènes de conduction peuvent se produire dans un isolant. Adoptée pour

expliquer la conduction dans les métaux, cette théorie a été appliquée, dans un deuxième temps,

aux matériaux semi-conducteurs, pour être ensuite adaptée aux polymères [POH65]. Elle a ainsi

été complétée en tenant compte de l’existence de niveaux permis localisés dans la bande interdite

qui sépare les bandes de valence et de conduction [MOT40].

Si l’on se réfère au modèle en bandes d’énergie, le diagramme d’énergie représentatif d’un

isolant parfait est porté dans la Figure 2-4.a. Il représente une structure traditionnelle, avec une

bande de conduction et une bande de valence séparées par une bande interdite. Compte tenu de la

largeur de la bande interdite, la densité d’électrons libres dans la bande de conduction liée à

l’excitation thermique est insignifiante (de l’ordre de 10-18

m-3

à température ambiante [LAU99]).

Néanmoins, le désordre structurel et la présence d’impuretés qui ne peuvent être évités dans un

matériau réel affectent l’architecture du système moléculaire et modifient les états de la bande de

valence et de la bande de conduction, pour former des états localisés dans la bande interdite.

Suivant leur énergie, ils se situeront en bordure de la bande de valence ou de conduction, et la

différence d’énergie entre ces états localisés et les deux bandes feront d’eux des pièges à trous ou

à électrons. Le diagramme d’énergie d’un isolant réel sera donc plus proche de la représentation

donnée dans la Figure ‎2-4.b.

Page 39: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

27

(a) (b)

Figure 2-4 : Structure en bandes d’énergie d’un isolant parfait (a) et d’un isolant réel (b)

Les états localisés peuvent être divisés en deux grands groupes [BLA01, LAU99] :

les sites peu profonds : ces niveaux d’énergie sont proches des bandes de valence ou de

conduction. Les sites sont suffisamment proches les uns des autres pour que des porteurs

de charge ayant acquis une faible énergie puissent transiter d’un site à un autre. Ils sont

principalement dus au désordre de structure.

les sites profonds : ce sont des états isolés, localisés plus profondément dans la bande

interdite, dans lesquels les charges peuvent se piéger durablement. Ces sites de piégeage

sont principalement liés à la présence d’impuretés.

La mobilité de porteurs occupant ces états sera de plus en plus faible au fur et à mesure que l'on

se rapproche du milieu de la bande de conduction.

2.5.2 Injection de charges dans un isolant

Lorsqu' un métal est mis en contact avec un diélectrique, il se produit un transfert d'électrons du

matériau ayant le plus petit travail de sortie vers celui ayant le plus grand. En l'absence du champ

électrique appliqué, le niveau de Fermi du diélectrique s'aligne avec celui du métal, ce qui

provoque une courbure des bandes d'énergie de l'isolant au contact, facilitant le transfert des

charges. La Figure ‎2-5 représente un contact métal/isolant injectant pour des électrons, avant et

après mise au contact. Après contact, il subsiste une barrière de potentiel 0 m que les

porteurs de charge doivent franchir pour passer du métal dans le diélectrique. Dans un isolant

parfait, si la barrière de potentiel est faible ( 0 < 0,3 eV), un faible champ appliqué suffit pour

faire passer un courant [COE66, TOU74]. En revanche, si 0 est élevée (1 eV et plus), le champ

Bande de conduction

Bande de valence

Bande interdite

8 à 10 eV

Énergie potentielle

Des électrons

Énergie potentielle

Des électrons

Bande de conduction

Bande de valence

Densité

d’étatsDensité

d’états

— — — — —— — — —

— — — —— — — — —— — —

— — —

Page 40: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

28

au contact est négligeable devant le champ qu'il faut appliquer pour faire passer un courant

mesurable.

Dans le cas d'un isolant réel, les barrières d'énergie sont hautes, typiquement supérieures à 1 eV.

L'application d'un champ entraîne d'abord une polarisation du diélectrique (si le matériau est

polaire) et une séparation des charges intrinsèques positives et négatives, qui vont migrer et

s'accumuler sur les électrodes de signes opposés. Les charges vont se trouver en majorité

bloquées, en raison de la hauteur de barrière élevée aux électrodes. L'isolant est donc en régime

d'hétérocharges [TOU74]. Lorsqu'un champ suffisamment élevé (> 1 kV/mm) est appliqué, des

porteurs provenant du métal peuvent être émis. Le nombre de porteurs injectés peut dépasser le

nombre de porteurs intrinsèques. La situation peut alors s'inverser, et l'isolant se retrouve en

régime d'homocharges.

(a) (b)

Figure 2-5 : (a) Métal et isolant avant mise au contact. m est le travail de sortie du métal, i celui

de l'isolant, est l'affinité électronique de l'isolant, (b) équilibre des niveaux de Fermi après mise

au contact, 0 est la hauteur réelle de la barrière au contact métal isolant.

Lorsqu’un champ électrique est appliqué à l’isolant, une énergie supplémentaire est fournie aux

charges injectées par l’électrode, en plus de leur énergie thermique. Cette énergie apportée

conduit à un abaissement de la hauteur de barrière de potentiel. La barrière énergétique à

l'interface métal-isolant peut être franchie par les porteurs par deux processus distincts : il s'agit

de l'effet thermoélectronique (ou Schottky) et de l'effet tunnel (Fowler-Nordheim).

χ

i

m

Niveau du vide

FmE

FiE

cE

m

Niveau du vide

EF

χ

0 m

cE

Page 41: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

29

Figure 2-6 : Diagramme de bandes à une interface électrode métallique - diélectrique

5.2.1.2 L'effet Schottky

L’émission par effet Schottky traduit l'injection de charges dans l'isolant par passage au-dessus de

la barrière de potentiel présente à l'interface. Il est représenté par la voie 1 sur la Figure ‎2-6.

L’application d'un champ électrique favorise l’injection de charges en abaissant la barrière de

potentiel sous l'effet de la force colombienne F. Lorsqu'un électron se trouve à une distance x de

l'interface dans le diélectrique, et donc 2x de sa charge image, cette force vaut :

2 2

2 2

00164 2 rr

q qF

xx

2-15

où q = -1,610-19

C est la charge de l'électron et 0 et r sont respectivement la permittivité du

vide et la permittivité relative du diélectrique. En exprimant le potentiel du porteur dans l'isolant,

on peut estimer la hauteur de la barrière de potentiel abaissée [COE93] :

1

2

0

02

c

r

qEq

2-16

où EC est le champ électrique à la cathode. L'expression de la densité du courant d’émission,

représentant le nombre d'électrons d'énergie supérieure à qui tombent sur la barrière par unité

de surface et par seconde, est de la forme :

/ / / / / / / / / / / / / / / / / /

vE

0 Distance

cE

Métal

FE

0

2

3

1

Diélectrique

Page 42: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

30

02 expS c

S S

EJ A T

kT

2-17

où 2

5 2 2

3

412*10 /S

qmkA A m k

h

est la constante de Richardson-Dushman, T est la

température absolue, m la masse de l'électron, 3

04S

r

q

est la constante de Schottky, k la

constante de Boltzmann et h la constante de Planck.

Le champ à la cathode EC pouvant être modifié par la présence éventuelle de charge d'espace, sa

valeur n'est pas toujours celle du champ appliqué. Toureille a proposé de rendre compte de l'état

électrique du contact par un paramètre sans dimension , tel que [TOU74] :

c

VE

d

2-18

où V est la tension appliquée et d l'épaisseur de l'échantillon. On remarque que < 1 si

l’homocharge est dominante au contact et > 1 si l’hétérocharge est dominante au contact.

L'expression du courant Schottky avec correction de la distorsion du champ à la cathode s'écrit

alors :

1 2

02 exp

S

S S

V

dJ A T

kT

2-19

D'un point de vue pratique, il en ressort que, si le courant mesuré à travers l’isolant est

majoritairement l’effet d’un mécanisme de type Schottky, la représentation de ln J en fonction

de cE doit être une droite. La connaissance de r et de la pente expérimentale permet de trouver

. Sur le même graphique, l'extrapolation à champ nul donne accès à la hauteur de barrière 0 à

l'interface électrode-isolant.

Page 43: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

31

5.2.2.2 L'effet Fowler-Nordheim

Décrit par Fowler et Nordheim en 1928 [FOW28], l'effet Fowler-Nordheim traduit l'injection des

charges à travers la barrière de potentiel selon un effet tunnel, représenté par les voies 2 et 3 sur

la Figure ‎2-6. Cet effet prend en compte le caractère ondulatoire de l'électron, qui lui confère, si

sa longueur d'onde est supérieure à l'épaisseur de la barrière énergétique, la capacité de traverser

celle-ci sans avoir une énergie supérieure à la hauteur de barrière. Ceci est possible si l'épaisseur

de barrière n'excède pas 50 Å [COE93]. L'injection de type Fowler-Nordheim ne devient

significative que pour des champs élevés ; dans le cas des résines époxy, elle peut devenir

importante à des valeurs de champs au-dessus de 200 kV/mm [BEY91].

La densité de courant Fowler-Nordheim est donnée par :

2 expc

c

BJ AE

E

2-20

avec :

3

08

qA

h et

1 2 3 2

08 2

3

mB

hq

, les notations étant les mêmes que pour l'équation ‎2-17.

La température n'intervient pas dans l'équation ‎2-20, d'où son nom de « loi de l'émission froide ».

Le champ à la cathode cE possède, quant à lui, une forte influence, avec un contact

électrode/isolant pouvant devenir fortement injectant avant le claquage.

Selon l’expression précédente, la présence majoritaire d’un tel mécanisme doit se traduire par une

évolution linéaire de 2ln j E par rapport à 1 E . En effet, c'est le seul mécanisme qui évolue en

1 E .

Notons que le passage des électrons dans l'isolant à un niveau dont l'énergie est supérieure au

niveau de Fermi est également possible. Il s'agit de l'effet tunnel assisté thermiquement.

2.5.3 Transport des charges dans le volume de l'isolant

La conduction résulte du mouvement des porteurs présents dans le matériau ou injectés par les

mécanismes décrits précédemment, qui peuvent migrer dans le volume de l'isolant sous l'effet du

champ appliqué. Nous allons décrire dans les paragraphes suivants les phénomènes de conduction

rencontrés dans les matériaux isolants (tels que la résine époxy), en insistant sur les plus

fréquents.

Page 44: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

32

5.3.1.2 Conduction « ohmique »

La densité de courant circulant dans un matériau s'exprime en fonction du champ électrique par la

loi d’Ohm :

J E 2-21

J étant la densité de courant (A/m2), E le champ électrique appliqué (V/m) et la conductivité

du matériau (S/m). La conductivité est liée au déplacement des porteurs de charges intrinsèques

libres dans le volume et s'exprime par :

0n q 2-22

où 0n est la densité des porteurs de charge intrinsèques (m-3

), est leur mobilité (m2.V

-1.s

-1) et q

est leur charge électrique (C).

En régime dit « ohmique », est constante car est indépendante de E (cas des métaux). La

représentation de J(E) est alors une droite de pente 1 en représentation logarithmique. Dans le cas

des isolants, ce type de comportement n’est observé que pour des champs très faibles. Par

exemple, pour les résines époxy comme pour la plupart des diélectriques solides, l'effet du champ

électrique sur la conductivité commence à se faire sentir dès 1 kV/mm [BEY91].

5.3.2.2 Courants limités par charge d'espace

Ce régime, détaillé par Lampert et Mark [LAM70], concerne l’évolution du courant lorsque les

charges injectées sont plus importantes que les charges intrinsèques. Dans ce mécanisme,

l'injection de charge à l'interface électrode/isolant provoque l'abaissement du champ électrique à

l'interface, diminuant ainsi l'injection ; cependant, un équilibre peut être atteint entre le champ

interfacial et l'injection de charge qui a tendance à le réduire. Moyennant quelques

approximations, il est possible de calculer la valeur du courant limité par charges d'espace. Ainsi,

en régime permanent, la densité maximale de courant correspondant à la saturation de la charge

d'espace dans un isolant sans porteurs intrinsèques, sans pièges et à contacts ohmiques, a été

calculée par Mott et Gurney [MOT40] :

2

0 3

9

8r

VJ

d

2-23

avec μ la mobilité des porteurs, V la tension appliquée et d l’épaisseur de l'échantillon.

Page 45: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

33

Comme sous faible champ, le courant obéit à la loi d'Ohm, la transition entre le régime ohmique

et le régime quadratique se produit pour une valeur de la tension appliquée tr

V , qui peut être

calculée en égalant le courant ohmique et le courant limité par charges d'espace [COE93] :

2

0 3

9

8r

VJ

d

2-24

Dans le cas d'un diélectrique comportant un niveau de pièges, l'équation ‎2-24 devient :

2

0 3

9

8r

VJ

d

2-25

avec c

t

n

n la fraction des porteurs injectés libres cn par rapport aux porteurs piégés tn .

La valeur de va fortement conditionner la valeur du courant. Au début du régime limité par

charges d'espace, les pièges sont très efficaces et donc 1 ; peu de porteurs restent libres.

Lorsqu'une grande partie des pièges sont remplis, la plupart des électrons restent libres et donc

1 . Le courant augmente fortement: cette transition s'appelle la « Trap Filled Limit » ou TFL.

Au delà, le courant suit une loi de limitation par charge d'espace sans pièges (Figure ‎2-7). Le

potentiel associé à la TFL est donné par :

2

02

t

rTFL

qn dV

2-26

Figure ‎2-7 : Caractéristique courant-tension théorique pour un niveau de piégeage. Les contacts

sont supposés parfaitement ohmiques

Régime ohmique

Conduction limitée

par charges d’espace

(avec pièges)

Pièges remplis (TFL)

Conduction limitée

par charges d’espace

(sans pièges)

J V

2J V

J V

2J V

trVTFLV Log V

Log J

Page 46: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

34

5.3.3.2 Effet Poole-Frenkel

Ce mécanisme de conduction volumique traduit le déplacement des porteurs piégés dans la bande

interdite vers la bande de conduction par abaissement de la hauteur de la barrière de potentiel

sous l'effet du champ électrique.

Si ET0 est la profondeur du piège (Figure ‎2-8), l'abaissement de cette profondeur par le

champ électrique E est donné par :

1 2

0

1 2

PF

r

qEE

avec

3 2

1 2

0

PF

r

q

2-27

où PF représente la constante Poole-Frenkel et est égale à deux fois la constante de Schottky,

2PF s . La pente est donc double pour une représentation de ln J en fonction de

1 2V d .

En abaissant la hauteur de barrière, l'effet Poole-Frenkel augmente la probabilité de libération

d'un porteur piégé de la valeur :

1 2

exp exp PF Ep

K T k T

2-28

La densité du courant J est alors augmentée de p par l'effet Poole-Frenkel, et peut être écrite

sous la forme :

1 2

exp PFPF

EJ J

k T

2-29

Si l'on s'intéresse maintenant au cas particulier d'un diélectrique avec un niveau de pièges de

hauteur T0E , en supposant que la vitesse des porteurs de densité n est proportionnelle au champ,

et que leur mobilité dépend uniquement de la température, on peut écrire :

1 2

T00

PFPF

E EJ n qE exp

k T

2-30

Page 47: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

35

En pratique, lorsqu'on trace ln J E en fonction de 1 2

V d , on obtient souvent des droites dont

les pentes PF correspondent à des valeurs beaucoup trop élevées de la permittivité. Coelho et

Aladenize [COE93] ont proposé des équations prenant en compte la non-uniformité du champ à

l'intérieur du diélectrique.

Dans notre travail, nous considérerons l'effet de la charge d'espace sur le champ via le terme .

On peut écrire alors dans le cas général :

1 2

expPF

PF

EJ

k T

2-31

Pour le cas particulier traduit par l'équation 2-30 :

1 2

T0

0 expPF

PF

E EJ n q E

kT

2-32

Figure 2-8 : Diagramme de bandes dans le cas de l'effet Poole-Frenkel

5.3.4.2 Conduction par sauts

La conduction électronique peut s'effectuer sans passage par la bande de conduction mais

directement entre états localisés de la bande interdite, au voisinage du niveau de Fermi. En

introduisant une distance de saut entre états localisés dans la direction x, Nath et al. [NAT90]

ont exprimé la dépendance du paramètre du piégeage avec le champ par :

0TE

Page 48: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

36

0 exp2

q E xx

kT

2-33

Hill [HIL71] a considéré l'émission par effet de champ entre deux centres adjacents distants de

avec un écart énergétique . Il donne ainsi l'expression du courant par :

* 2

02 exp sinh2

q EJ qN kT

kT kT

2-34

où *N est homogène à une densité de porteurs et 0

la fréquence de dépiégeage thermique

(1013

Hz). Il a été souvent montré que, dans les polymères, pouvait varier de quelques

Angströms à quelques nanomètres [MIZ79, DAS87]. Typiquement pour des champs supérieurs à

107 V/m, on montre que l'équation ‎2-34 devient :

0 sinh2

q EJ J

kT

2-35

2.6 Mesure Non destructive de la charge d'espace

2.6.1 Méthodes de mesure de la densité de charges d'espace

Les techniques non-destructives mises au point pour mesurer les charges d’espace sont toutes

basées sur la perturbation locale de l’équilibre existant entre les forces élastiques et

électrostatiques dans le matériau par un stimulus qui peut avoir plusieurs origines (thermique,

mécanique, électrique). Suite à cette perturbation, la réponse du matériau (courant ou tension) ou

du système électrodes-isolant pour rétablir cet équilibre est observée. L'analyse de cette réponse

permet de remonter à la répartition du champ électrique et de la densité de charges d'espace dans

l'isolant.

Les principes des méthodes existantes sont rappelés ci-après. La méthode de l'onde thermique

(MOT), que nous avons utilisée dans cette étude, est détaillée par la suite.

6.1.1.2 Méthodes de pression

Ces techniques utilisent une onde élastique pour quantifier les charges piégées dans les

matériaux. Ce sont des méthodes « rapides », puisque la durée des signaux ne dépasse pas

quelques μs. Différents moyens sont utilisés pour générer cette onde (tube à onde de choc,

Page 49: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

37

transducteur piézoélectrique, impulsion laser), d’où la déclinaison en plusieurs méthodes. On

utilise aujourd'hui principalement:

La méthode LIPP (Laser Induced Pressure Pulse) : l’onde est générée par une brève

impulsion laser (de quelques nanosecondes à quelques picosecondes), dont le faisceau est

dirigé sur l'électrode de masse de l'échantillon. La compression de l'isolant entraine une

variation de la capacité de l'échantillon. Le courant issu de cette variation est fonction de

la quantité de charges présente sur l'électrode.

La méthode de l'impulsion électroacoustique PEA (Pulsed-Electro-Acoustic method)

[MAE88] : cette méthode consiste à détecter des ondes acoustiques générées par les

charges d’espace lorsqu’elles sont soumises à une impulsion de champ électrique.

Le principe est d’appliquer un potentiel électrique pulsé à un échantillon chargé. Par

effet « coulombien », les charges présentes dans le matériau se déplacent jusqu’à

reprendre leur position d’équilibre. Des ondes de pression (dont l’amplitude est

proportionnelle à la densité locale des charges) provenant de chaque zone chargée se

déplacent à la vitesse du son dans l’échantillon suite au mouvement des charges.

6.1.2.2 Méthodes thermiques

Dans ce cas, l'échantillon est soumis à un changement brusque de la température sur l'une de ces

faces. L'échantillon réagit (se dilate ou se rétracte) de façon inhomogène. Cela entraîne également

une variation de la permittivité. Cette réaction déplace les charges contenues dans le volume,

créant ainsi un courant dans le circuit extérieur. Selon la technique utilisée pour produire

l'échauffement localisé, on distingue les méthodes suivantes :

La méthode de l'impulsion thermique (Thermal Pulse Method) [COE93, DER82] : dans ce

cas, une impulsion laser (Thermal pulse) est appliquée sur une face métallisée de

l'échantillon dont les électrodes sont en circuit ouvert. L'impulsion se propage en

déplaçant les charges par la dilatation locale du matériau. Cette technique est surtout

adaptée aux échantillons fins (< 100 µm).

La méthode LIMM (Laser Intensity Modulation Method) [LAN86] : un faisceau laser

modulé en intensité à une fréquence variable est utilisé pour chauffer une face de

l'échantillon. Le courant résultant de l'échauffement de l'échantillon est mesuré. La LIMM

est appropriée aux échantillons minces (< 100 µm).

Les méthodes FLIMM (Focused Laser Intensity Modulation Method) et FLAMM

(Focused Laser Acoustic Modulation Method) [FRA97, FRA00] : elles utilisent le même

Page 50: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

38

principe que la LIMM, mais le faisceau laser est focalisé et son déplacement permet une

cartographie en 3D de l'échantillon.

La Méthode de l’onde thermique (MOT ou TSM pour Thermal Step Method) [TOU91] :

cette méthode sera détaillée ci-après. Dans ce cas, un échelon de température est appliqué

sur une face de l'échantillon et un courant dit « de thermo-dilatation » de l'échantillon est

alors mesuré.

Parmi les techniques citées ci-dessus, la LIPP, la PEA et la MOT sont compatibles avec les

épaisseurs et les types d’échantillons que nous avons employés. Pour notre part, nous avons

utilisé la MOT, développée à Montpellier depuis de nombreuses années.

2.6.2 Méthode de l'onde thermique

6.2.1.2 Principe et mesure en court-circuit

La méthode de l’onde thermique (MOT), mise au point par Toureille [TOU87, TOU91, TOU94],

et développée au sein du groupe « Énergie et Matériaux » de l’Institut d’Électronique et des

Systèmes à Montpellier [CHE93, AGN96, NOT00, CAS09, CER08, BOY10], permet de

déterminer la répartition du champ et de la charge d’espace dans un matériau isolant. Cette

méthode présente l’avantage de s’appliquer à tous les matériaux isolants, composites ou non.

Grâce à son caractère « non destructif », la MOT permet d’obtenir des mesures reproductibles,

tant sur des isolants plans que cylindriques.

Considérons un échantillon isolant plan, d’épaisseur d et de surface S supposée infinie (condition

vérifiée si ), muni d’électrodes sur ses deux faces mises en court-circuit à travers un

ampèremètre (Figure ‎2-9). L’isolant est considéré homogène et en équilibre électrostatique à une

température . Supposons qu’une charge iQ se trouve dans l’isolant à une distance ix de l’une

des électrodes. Comme le système échantillon/électrodes/fil est en équilibre électrostatique, la

charge iQ induit sur les électrodes des charges d’influence notées 1Q et 2Q . L’expression de ces

charges peut être obtenue en posant la condition de court-circuit, la loi de conservation de la

charge électrique et le théorème de Gauss [TOU91, CER08] :

0

0

d

E x dx 2-36

1 2 0iQ Q Q 2-37

d S

0T

Page 51: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

39

Sdiv E Q S

2-38

D’où l’expression des charges d’influence :

1i

i

d xQ Q

d

2-39

2i

i

xQ Q

d

2-40

Lorsqu’un échelon de température 0T T T est appliqué sur l’une des faces de l’échantillon,

« une onde thermique » va diffuser à travers le matériau, faisant varier localement son épaisseur

(dilatation ou contraction) et sa permittivité qui s’écrivent au premier ordre :

0 1 ddx dx T 2-41

0

, 1Tx t T 2-42

où d est le coefficient de dilatation linéique du matériau (1

d

x

x T

) et est le coefficient

de variation thermique de la permittivité (1

T

).

Ces variations modifient l’équilibre des charges d’influence 1Q et 2Q de sorte que :

1

0

,

,

i

d

i

x

d

dxQ

x tQ t

dx

x t

et

0

2

0

,

,

ix

i

d

dxQ

x tQ t

dx

x t

2-43

Avec les notations faites précédemment et en posant le coefficient de variation de la capacité

avec la température :

1 1 1d

dC dx d

C dT x dT dT

2-44

Page 52: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

40

avec C la capacité électrique de l’échantillon avant excitation thermique.

On obtient l’expression de 2Q t :

2

0 0

1 , ,ix d

ii

i

xQ t Q T x t dx T x t dx

d x d

2-45

La variation de charges d’influence à l’électrode se traduit par l’apparition d’un courant

transitoire dans le circuit extérieur, dit aussi « courant d’onde thermique » :

2MOT

dQI t

dt

2-46

De manière générale, si on définit par x dD x dx dE x dx la densité volumique de

charge à l’abscisse x dans une couche plane d’épaisseur dx , on peut montrer par intégration sur

tout l’échantillon que le courant total dans le circuit extérieur a pour expression [CHE93, NOT01,

CER08] :

0

,d

MOT

T x tI t C E x dx

t

2-47

où E x est l’intensité du champ électrique à l’abscisse x.

Figure 2-9 : Principe de la Méthode de l’Onde Thermique - Échantillon à l’équilibre

électrostatique à la température T0 (a) et en déséquilibre (b). [BOU2013]

A

xi0 dx

Qi

A

xi+dx0 dx

Qi

iMOT(t)

ΔTo

ΔT

tT0

T1

Q1 Q2 Q1 - dQ Q2 + dQ

Isolant

(a) o (b)

Charge

d’influence

Électrode 1 Électrode 2

Page 53: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

41

Si l’on connait à tout instant les paramètres C et , la répartition spatio-temporelle de la

température ,T x t et le courant MOTI t , la distribution du champ électrique dans la structure

peut être déterminée par traitement mathématique [TOU91, TOU94, ABO97]. L’équation de

Poisson donne ensuite la distribution volumique de la charge d’espace x dans l’échantillon.

6.2.2.2 Mesure sous champ électrique appliqué continu

Un échantillon de « compensation » identique au premier échantillon est ajouté pour pouvoir

réaliser une mesure sous fort champ appliqué. L’avantage de ce système à double condensateur

est de compenser les courants transitoires de polarisation et de conduction pouvant survenir en

présence d’un champ appliqué à l’échantillon.

La mesure sous champ est alors réalisée en deux étapes :

- Application de la tension (mise sous champ des échantillons) : le potentiel est appliqué à

l’électrode centrale. L’amplificateur de courant est court-circuité (Figure ‎2-10.a).

- Mesure proprement dite : déconnection de la source HT. L’amplificateur de courant est

connecté à l’échantillon de compensation (Figure ‎2-10.b) et l’échantillon de mesure est excité

thermiquement, le courant étant mesuré par le pico-ampèremètre.

Figure 2-10 : Étapes de mesure MOT sous champ continu [TOU09]

Le courant d’onde thermique généré est alors donné par l’expression :

0

0

2

,x d

MOT

x

T x tI t C E x dx

t

2-48

avec 2 2C C si les deux échantillons sont identiques.

Page 54: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

42

En l'absence de tension appliquée, le courant MOT doit être la moitié de celui obtenu en

conditions de court-circuit avec l'échantillon excité thermiquement 2C C .

A faible champ (< 1 kV/mm), pour un matériau non polaire, le champ peut être considéré comme

constant (pas de charges injectées, polarisation faible). Dans ce cas, le signal est directement

proportionnel à la tension appliquée V et peut être utilisé comme courant d’étalonnage :

0

0

2

,x d

MOT

x

T x tVI t C dx

d t

2-49

Si l’échantillon contient déjà des charges d’espace induisant un champ résiduel Er(x) et un champ

électrique externe appliqué Ee=V/d (ne modifiant pas la distribution de charge d’espace), le

champ total de l’échantillon est E(x)= Er(x)+Ee. L’équation du courant d’onde thermique suit

alors :

0

0

0

0

2

0 2

0

,

,

x d

MOT r e

x

x d

x

f

T x tI t C E x E dx

t

T x tVI t C dx

d t

I t I t

2-50

avec 0I t le courant dû aux charges résiduelles internes et fI t le courant dû au champ externe

appliqué.

Dans notre travail, afin de réaliser la phase d’étalonnage, nous avons utilisé ce montage en

appliquant des faibles valeurs de champ (1 à 2 kV/mm) à des échantillons« vierges ».

2.7 Rigidité diélectrique des isolants solides

La rigidité diélectrique d'un matériau correspond à la valeur maximale du champ électrique que

l'on peut appliquer à un échantillon, sans que se produise une dégradation irréversible (nommée

claquage ou perforation diélectrique) rendant impossible une nouvelle application de la tension.

On la définit comme le rapport entre la tension de claquage cU et l'épaisseur de l'isolant d

[NOR98] :

cc

UE

d

2-51

Page 55: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

43

Selon les applications, les essais de rigidité diélectrique peuvent être réalisés sous tension

continue ou sous tension alternative à différentes fréquences ; les vitesses de montée de la tension

d'essai peuvent être variables [MAS73]. Les caractéristiques intrinsèques du matériau, comme

son épaisseur, influent sur sa rigidité diélectrique. Les contraintes externes, comme la tension, la

pression, la température ou bien encore le vieillissement naturel, ont tendance à diminuer la

rigidité diélectrique.

Plusieurs théories ont été avancées pour expliquer le claquage. Elles sont décrites dans les

ouvrages de référence [DIS92, O'DW73]. Nous allons rappeler les principales dans les

paragraphes qui suivent.

2.7.1 Claquage électronique

Dans les théories liées au claquage électronique, on admet que le claquage est produit par des

électrons présents dans le matériau, dont l'origine peut être l'injection par effet tunnel, l'ionisation

stimulée par l'effet Poole-Frenkel, ou encore les rayons cosmiques [BAR83]. Ces électrons sont

fortement accélérés par le champ et provoquent l’avalanche électronique suite à des ionisations

par impact.

Ainsi, on considère que, tel dans un gaz, au-delà d'un champ critique, les électrons acquièrent une

énergie suffisante pour atteindre le seuil d'ionisation. Un nombre significatif de collisions

ionisantes apparait alors dans le diélectrique, produisant des électrons relativement mobiles et des

trous de moindre mobilité. Dans leur déplacement vers la cathode, les trous créent une zone de

charge d'espace qui déforme le champ, en le renforçant au voisinage de la cathode et en le

diminuant près de l'anode. Le diélectrique est alors rapidement détruit par une émission massive

d'électrons [O'DW64].

Il est considéré que les électrons acquièrent suffisamment d'énergie lors de leur passage dans le

volume libre de l'isolant pour causer la rupture diélectrique. Ainsi, dans son modèle, Artbauer

[ART65] considère des cavités sphériques de diamètre de quelques Angströms et une possibilité

qu’à certains endroits, où il y a accumulation de ces cavités, les électrons accélérés par le champ

puissent parcourir de grandes distances sans collision. Cette théorie a été vérifiée sur certains

polymères amorphes et permet de calculer la plus grande distance parcourue par les électrons qui

ont provoqué le claquage.

2.7.2 Claquage thermique

Lorsque l'on applique un champ électrique à un matériau isolant, un courant non nul (bien que

très faible) circule entre les électrodes, ayant pour conséquence l’échauffement du matériau (effet

Joule). Si la chaleur accumulée dans l'échantillon ne s'évacue pas suffisamment vite, le processus

Page 56: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

44

peut conduire à un emballement thermique (« thermal runaway ») menant à la destruction du

matériau.

Dans le cas d'un diélectrique plan, et en supposant égale la puissance dissipée par convection des

deux surfaces du diélectrique, l'équation du bilan thermique de l'échantillon s'écrit :

2

02 ( )c p

d TRI h S T T mc

dt

2-52

où ch est le coefficient de convection,

d T

dt

la dérivée du gradient de température par rapport au

temps, T la température de l'échantillon, 0

T la température ambiante, m la masse de l'échantillon,

pc la chaleur massique de l'échantillon, R sa résistance, I le courant qui traverse l'échantillon et

S la surface de l'échantillon.

Si on note par la conductivité électrique du matériau, par mv sa masse volumique et par d son

épaisseur, l'équation précédente devient :

2

0

1( ) 2 ( )c v p

d d TE S h S T T m S dc

S dt

2-53

et on obtient :

2

0

2( ) v p

h d TE T T m c

d dt

2-54

Au moyen de certaines approximations, notamment sur la loi de variation de la conductivité

[COE93], on obtient pour le champ de claquage une expression du type :

0

2

( )c

h TE

T ed

2-55

où e est la base des logarithmes naturels (e = 2,71...).

Ce type de claquage se caractérise donc par une variation linéaire de la rigidité diélectrique avec

1 épaisseur , souvent observée en pratique dans le cas des diélectriques épais.

Page 57: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

45

2.7.3 Claquage électromécanique

On considère que ce type de claquage peut se produire lorsque les forces électrostatiques de

compression exercées par le champ électrique et appliquées à l'isolant excédent sa résistance

mécanique à la pression. Il est donc notamment observé à haute température, lorsque le module

de Young baisse significativement.

Pour un échantillon plan d'épaisseur initiale d0, de module de Young Y, tant que la force de

compression développée électriquement est en équilibre avec la résistance à la pression, on peut

écrire :

2

00 22

r

dVYln

d d

2-56

Avec 0 la permittivité du vide, r la permittivité relative du diélectrique et d l'épaisseur de

l’isolant qui en résulte suite à l’application d’une tension V (d < d0).

En dérivant par rapport à d, nous constatons que l'expression 2.41 possède un maximum quand

0 0exp 1 2 0,6BDd d d .

Le champ de claquage est alors donné par :

0

BDBD

BD r

V YE

d

2-57

Ce type de claquage a pour caractéristique l'indépendance du champ de claquage par rapport à

l'épaisseur de l'échantillon.

2.7.4 Considérations pratiques

En pratique, et notamment dans le cas des isolants épais (plus de 100 µm), il est souvent difficile

d’attribuer clairement le claquage à l’un des mécanismes de base décrits ci-avant et encore moins

aisé à prédire les valeurs des champs de claquage. Plusieurs raisons contribuent à cela.

D’une part, bien que des tendances majoritaires puissent être dégagées, plusieurs de ces

mécanismes sont susceptibles d’agir simultanément. D’autre part, les modèles cités

précédemment ont été développés en supposant que les matériaux sont homogènes. Or, en

pratique, les isolants utilisés en haute tension ne le sont jamais parfaitement. Le claquage est alors

amorcé non pas dans la totalité du matériau, comme pourrait le laisser croire les paragraphes

précédents, mais dans les régions qui contiennent des défauts morphologiques ou structurels (des

Page 58: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

46

« points faibles »). Le claquage est donc un phénomène localisé, qui va autant dépendre de la

structure et de la mise en œuvre du matériau que de la configuration du système d’isolation, de la

forme et de la durée d’application de la contrainte.

En effet, les matériaux isolants peuvent contenir des inclusions gazeuses (des cavités) de formes

et dimensions diverses. Elles sont l’une des causes principales de vieillissement et de destruction

des isolants solides à moyen et à long terme en facilitant l'apparition et la propagation

d'arborescences électriques pouvant conduire au claquage (Figure 2-9). La propagation des

arborescences électriques et leur modélisation ont fait l'objet de nombreux travaux, y compris

pour la résine époxyde. Les plus récents sont ceux de Dissado [DIS02], Champion et Dodd

[CHA94, CHA95, CHA01a, CHA01b]. Dans tous les cas, le claquage débute par la création d’un

canal conducteur, qui s’étale par la suite jusqu’à court-circuiter les électrodes.

Figure ‎2-11 : Arborescences électriques dans une résine époxyde après 30 minutes à 7, 9, 10, 11,

12,5 et 15 kVeff [CHA94]

Dans la pratique, les valeurs de rigidité diélectrique intrinsèque des matériaux isolants atteignent

à température ambiante plusieurs centaines de kV/mm, voire 1 MV/mm, alors que la rigidité

diélectrique que l'on mesure sur des isolants solides est souvent limitée à quelques dizaines de

kV/mm. Tel évoqué ci avant, ceci est en partie dû au fait que le claquage se produit toujours au

point le plus faible du volume de l'isolation soumis au champ. D’autre part, les conditions de test

sont extrêmement importantes (géométrie de l’échantillon et des électrodes, présence ou non d’un

dépôt conducteur sur la surface, utilisation ou non d’un fluide isolant, forme et durée

d’application de la contrainte électrique, etc.).

Afin de pouvoir comparer les rigidités diélectriques des différents matériaux, des normes ont été

établies par la Commission Électrotechnique Internationale (CEI) pour indiquer des conditions de

Page 59: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

47

test standardisées [NOR98]. Les valeurs données dans les fiches techniques des matériaux sont

usuellement les résultats de tests effectués selon ces normes. Néanmoins, les configurations

préconisées influent de manière non-négligeable sur les résultats obtenus. Ainsi, dans la plupart

des cas, on peut considérer ces valeurs seulement à titre indicatif, des études approfondies étant

nécessaires pour déterminer la tenue diélectrique d’un matériau pour une application donnée.

2.8 Vieillissement des isolants solides / résines époxydes

Sous l’action de nombreux facteurs (champ électrique, température, contraintes mécaniques,

humidité, radiations…), les propriétés des isolants se dégradent dans le temps de manière

irréversible. La notion de vieillissement regroupe ainsi l’ensemble des mécanismes par lesquels

les propriétés physiques des matériaux en général, et électriques en particulier, évoluent dans le

temps sous l’action des contraintes de fonctionnement du système [LAU99].

L’étude du vieillissement des isolants électriques nécessite de quantifier l’évolution des

propriétés en fonction du temps lorsque les matériaux sont soumis à diverses contraintes (champ,

température) dans le but de prédire leur comportement à long terme. On distingue principalement

deux types de vieillissement : le vieillissement physique et le vieillissement chimique.

2.8.1 Modes de vieillissement

8.1.1.2 Vieillissement physique

Le vieillissement physique correspond à un vieillissement par relaxation de volume [VER05]. Il

est le plus courant dans les thermodurcissables. Il se caractérise par une augmentation des liaisons

physiques au sein du polymère, qui peut être mise en évidence par une augmentation du pic

endothermique lors de la transition vitreuse en calorimétrie différentielle. Ce vieillissement

contribue ainsi à augmenter la compacité du matériau [RAIN11]. Il n’existe par définition qu’à

l’état vitreux.

On peut distinguer essentiellement deux mécanismes importants de vieillissement physique : les

processus de relaxation structurale et les processus d’absorption-désorption.

2.8.1.1.1 Relaxation structurale

La relaxation structurale d'un polymère est uniquement liée à des causes internes au matériau

(mobilité moléculaire), c'est-à-dire au fait que le matériau soit, au terme de sa mise en œuvre,

dans un état thermodynamique instable. Le vieillissement physique résulte d'une évolution plus

ou moins lente vers un état plus stable.

Page 60: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

48

En effet, lorsqu’un polymère est refroidi, au terme de ses opérations de mise en œuvre, la

mobilité de ses chaînes macromoléculaires diminue de plusieurs ordres de grandeur. Les

changements de configuration du réseau macromoléculaire nécessaire pour atteindre l’équilibre

thermodynamique deviennent alors trop lents pour que cet équilibre puisse être atteint dans

l'échelle de temps imposée par la vitesse de refroidissement. Le matériau se trouve alors dans un

état instable. Les chaînes moléculaires cherchent à revenir vers un état plus stable (relaxation),

mais ce phénomène est limité par la faible mobilité des chaines : l'atteinte de l'état d'équilibre

dans ces conditions est donc un phénomène lent.

Plusieurs auteurs [SCH66, STR77] expliquent le phénomène de relaxation structurale par une

diminution du volume libre et par conséquent par une diminution de la mobilité des segments.

Ainsi, le vieillissement physique entraîne la diminution de l’entropie et l'augmentation de la

rigidité moléculaire et de la viscosité [WIT86]. Dans son étude sur le vieillissement, Vittoria

[VIT87] a proposé deux différents mécanismes de vieillissement à température ambiante. Le

premier est associé à la diminution du taux de molécules amorphes durant les premières heures

après la consolidation de l’état fluide. Le second mécanisme, plus lent, est relié à la réduction de

la mobilité de la fraction amorphe. En fait, c'est le second mécanisme qui entraîne la diminution

du volume libre de la phase amorphe. D’autre part, certains auteurs [MIT83] proposent que le

vieillissement physique soit associé avec un mouvement local des chaines moléculaires,

entrainant un ordre local dans la phase amorphe.

2.8.1.1.2 Absorption-désorption

Si une espèce de faible masse moléculaire (vapeur, liquide) se retrouve dans l’environnement du

polymère et présente une solubilité non nulle, ce dernier l’absorbe jusqu’à ce que l’équilibre des

potentiels chimiques soit atteint. S’il s’agit d’une espèce peu soluble, ce qui est généralement le

cas des gaz permanents (O2, N2), les conséquences sont négligeables. Par contre, lorsqu’il s’agit

d’une espèce relativement soluble (solvants, y compris l’eau, en raison des sous-produits de

réticulation), les effets sur le comportement mécanique et électrique peuvent être importants.

Les polymères contiennent souvent des substances organiques de faible masse molaire

(adjuvants). Ces dernières ont tendance à migrer vers la surface pour tendre vers l’équilibre des

potentiels chimiques. La perte des adjuvants entraîne bien entendu la perte des propriétés qu’ils

apportaient, comme par exemple la stabilité pour les stabilisants et la souplesse pour les

plastifiants. Notons que le dégazage est un procédé de désorption.

Page 61: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

49

8.1.2.2 Vieillissement chimique

Le vieillissement chimique se traduit par une modification irréversible de la structure chimique

du matériau. Elle est associée à l'influence de facteurs externes, c'est-à-dire à l'environnement du

matériau. Dans la pratique, le vieillissement chimique se superpose souvent à un vieillissement

physique [VER84].

Les processus chimiques intervenant dans la dégradation des polymères sont nombreux et

dépendent bien évidemment de la nature des isolants eux–mêmes. Cependant, quelques formes

principales de détérioration sont retrouvées dans la majorité des cas.

2.8.1.2.1 Oxydation

L'oxydation des chaînes moléculaires constitue la principale cause de vieillissement chimique des

polymères. Les réactions d’oxydation sont bien identifiées dans la plupart des matériaux. Les

modèles cinétiques utiles pour la prédiction des durées de vie se développent depuis la fin des

années 1990 grâce à l’utilisation des méthodes numériques. Des modèles ont été validés sur

plusieurs matériaux thermoplastiques, y compris des composites [VER02]. L’oxydation est une

réaction en chaine amorcée par la rupture d’une liaison en radicaux libres. Elle se produit par

l’accumulation des groupes tels que OH et CO. L’oxydabilité des matériaux dépend de la

solubilité et de la vitesse de diffusion de l’oxygène dans le matériau, mais surtout de la quantité,

de la qualité et de la répartition de l’antioxydant incorporé [DES83].

L’oxydation a pour effet l’apparition des dipôles électriques dans les macromolécules,

provoquant ainsi une augmentation du facteur de pertes diélectriques et une diminution de la

rigidité diélectrique du matériau polymère.

2.8.1.2.2 Réticulation

Le processus de réticulation est caractérisé par la formation de ponts covalents entre les segments

de chaînes voisines, qui réduit la souplesse de l’isolant et son aptitude à l’allongement, ce qui a

pour effet de le rendre cassant [FAL70]. Dans le cas de polymères initialement linéaires, une

réticulation modérée peut également conduire à une augmentation de l’allongement à la rupture.

Dans le cas réel de vieillissement, la réticulation est pratiquement toujours accompagnée de

coupures de chaînes. En effet, de nombreux polymères tridimensionnels peuvent subir

simultanément des coupures de chaînes et une réticulation dans le cas du vieillissement

thermique.

Page 62: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

50

2.8.1.2.3 Dépolymérisation

La dépolymérisation conduit à l’élimination d’un fragment moléculaire (monomère) et à une

diminution très faible et rapide de la masse moléculaire. La dépolymérisation est d’autant plus

facile que l’énergie monomère-monomère est faible [VER84]. Elle intervient de façon plus ou

moins importante dans les divers types de dégradation. Les phénomènes mis en jeu et les

relations qui les régissent présentent une très grande analogie avec ceux relatifs aux

polymérisations.

2.8.1.2.4 Coupure de chaînes

Une grande variété de mécanismes chimiques peut être la cause de coupure statistique des

chaînes ; citons par exemple l’hydrolyse [VER02]. Il est généralement admis que la dégradation

d’un polymère commence toujours par une rupture de liaison (scission primaire). Cette coupure

résulte d’un apport d’énergie (chimique, mécanique, thermique) à la macromolécule. Lorsque

cette énergie est concentrée sur une liaison et qu’elle est supérieure à l’énergie de liaison, la

rupture se produit.

Sur le plan de la structure, ces coupures de chaînes provoquent une diminution de la masse

moléculaire moyenne dans le cas des polymères linéaires et une diminution du taux de

réticulation dans le cas des polymères tridimensionnels. Les coupures de chaînes affectent

considérablement les propriétés mécaniques du matériau [VER84].

Si les phénomènes de vieillissement, qu’ils soient physiques ou chimiques, sont préoccupants,

c'est parce qu'ils peuvent entraîner la variation de propriétés d'utilisation au-delà d'un seuil

acceptable qu’on appellera « critère de fin de vie ». Il faut en général avoir recours à des

expériences de vieillissement accéléré pour pouvoir « prédire » le comportement du polymère à

long terme.

2.8.1.2.5 Vieillissement thermique des résines époxydes

Les vieillissements physique et chimique des résines époxydes sous contraintes thermiques sont

des phénomènes largement étudiés [FEN09, SIU81, HUY92, CIU91]. Prenons l’étude réalisée

par calorimétrie différentielle à balayage par Cook et al [COOK99] et qui a porté sur le

vieillissement physique d’une résine époxyde à une température T = Tg - 15°C. Le procédé de

vieillissement utilisé est un vieillissement thermique accompagné d’un balayage d’azote. Le

vieillissement se traduit par l’apparition d’un pic, appelé pic de relaxation pour le matériau lors

d’un chauffage. Le pic est d’autant plus intense et déplacé vers les hautes températures que le

vieillissement est important (Figure ‎2-12). La présence de ce pic de relaxation a été attribuée à la

relaxation moléculaire associée au procédé de vieillissement physique.

Page 63: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

51

Figure 2-12 : Évolution du flux thermique en fonction de la durée de vieillissement [COOK99]

Dans leurs travaux, Delor-Jestin et al. [DEL06] ont montré par des analyses à l’IRTF

(Spectroscopie Infrarouge à Transformée de Fourier) que la structure chimique du matériau est

modifiée avec le vieillissement à 100°C des résines DGEBA/amine et DGEBA/anhydride. La

Figure ‎2-13 présente les spectres IRTF de ces résines vieillies iso-thermiquement à 100°C.

(a) (b)

Figure 2-13 : Spectre infrarouge après vieillissement thermo-oxydatif à 100°C dans la zone

d’absorption des carbonyles : (a) pour l’époxyde-amine et (b) pour l’époxyde-anhydride [DEL06]

Les pics d’absorbance correspondant aux longueurs d’onde 1740 cm-1

, 1640 cm-1

et 1660 cm-1

sont observés sur ces spectres. Ce pic est caractéristique de la double liaison C=O. Le

vieillissement thermo-oxydatif à 100°C a donc augmenté l’absorbance de ces pics, quelle que soit

la nature de la résine époxyde. Ces analyses mettent en évidence le vieillissement chimique par

oxydation des chaînes de polymères.

Comme il a été énoncé précédemment, le vieillissement chimique d’un matériau tridimensionnel

abaisse généralement sa température de transition vitreuse car il provoque une diminution de la

Page 64: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

52

densité de réticulation. Polansky et al. [POL09] ont étudié l’évolution de la Tg, initialement égale

à 124°C, d’un composite à base d’une résine époxyde au cours de vieillissements isothermes sous

air. La Figure ‎2-14 montre l’évolution des Tg en fonction des vieillissements à 170°C, 180°C,

190°C et 200°C : on voit que la Tg diminue au cours du vieillissement. Cette diminution est

d’autant plus importante que la température de vieillissement est grande. Sa décroissance est

linéaire, quelle que soit la température de vieillissement.

Figure 2-14 : Évolution de la température de transition vitreuse Tg en fonction du temps et de la

température de vieillissement de la résine époxyde renforcée par des fibres de verre [POL09]

Tsotsis et al. [TSO98] ont aussi étudié le vieillissement thermo-oxydatif à 150°C d’un composite

de matrice époxyde chargé de fibres de carbone. Les deux types de dégradations dues à ce

vieillissement sont évoqués dans la Figure ‎2-15. La première dégradation est une décohésion

entre la matrice polymère et les fibres de carbone et la deuxième est une fissuration de la matrice

époxyde.

Figure 2-15 : Observation MEB des échantillons de composite carbone-époxyde vieillis à 150°C

sous environnement neutre (a) et oxydant (b et c) : endommagement de type retrait de décohésion

(b et c) et amorçage des fissures matricielles (c) [GRA09]

Page 65: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

53

La décohésion carbone/époxyde et les fissurations matricielles sont dues aux retraits. Elles sont,

en effet, liées à la réaction chimique d’oxydation due au vieillissement isotherme sous air.

Comme le composite est exposé durant son vieillissement à un environnement oxydant, qui

génère des espèces volatiles, ceci entraine une perte de masse ainsi qu’une contraction de la

résine entre les fibres. Il en résulte une baisse évidente des propriétés mécaniques [GRA09].

8.1.3.2 Vieillissement électrique des résines époxydes

La durée de vie d’un matériau diélectrique dépend de l'intensité de la contrainte électrique subie

par celui-ci, mais également de la durée d’application de cette contrainte. Le vieillissement

électrique présente un problème majeur pour les industriels, car il est difficile de contrôler ses

paramètres.

La présence de charges d'espace représente le principal marqueur du vieillissement électrique

sous fort champ continu. En effet, dès l’application du champ électrique, les charges d’espace

injectées à partir des électrodes ou provenant des phénomènes de décharge interne, se dirigent

vers des sites où elles peuvent être piégées. Comme nous l’avons précisé, dans les isolants

organiques, la distribution des sites de piégeage des charges n’est pas uniforme au sein du

matériau [MAR07]. Par conséquent, des concentrations locales de charge vont se former. Ceci a

lieu surtout autour des défauts morphologiques, des inclusions et des impuretés, dont la forme, la

taille et la densité peuvent varier énormément suivant les matériaux et les systèmes isolants

[DIS95].

Les charges d’espace sont présentes dans les vieillissements physiques et chimiques vus

précédemment :

La perte des adjuvants entraine, entre autres, l’apparition de défauts et de cavités dans

lesquels les charges d’espace viennent se piéger ;

Les scissions de chaînes macromoléculaires aboutissent à la création de défauts qui auront

tendance à piéger les charges d’espace.

En comparaison avec le grand nombre de travaux portant sur le comportement diélectrique sous

champ continu du polyéthylène que l’on rencontre dans la littérature, les études consacrées à la

génération et le développement de charges d'espace dans les résines époxydes sont moins

nombreux. Cependant, une injection significative de charges semble avoir lieu à partir de

quelques kV/mm. En effet, dans ses travaux, Griseri rend compte d'une injection d'homocharges

négatives et positives durant le processus de polarisation [GRI00a]. Il a été montré par Fukunaga,

Maeno et Griseri que l'injection des charges à partir des électrodes pouvait être observée dans une

résine à T < Tg [FUKU00].

Page 66: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

54

Dans les travaux de Guillermin [GUI04], concernant une étude sur des résines de type DGEBA

pures et chargées de silice, il a été montré que la génération de charges d'espace dans une résine

pure pouvait être mise en évidence sous contrainte continue, à partir de 2 kV/mm. À 55°C,

l'injection des charges négatives et positives à partir des électrodes a été observée, conduisant à la

formation d'homocharges avec une accélération à partir de 13 kV/mm. Ceci a renforcé le champ

de 15% au cœur de l'isolant pour un champ appliqué de 2 kV/mm et atteint environ 50% au

champ le plus fort (30 kV/mm). À 85°C, des hétérocharges positives ont été mises en évidence

dès 2 kV/mm créant un renforcement du champ à l'interface cathode-isolant. Il a été montré que

le type de charges générées dans ces conditions était affecté par la présence d'eau dans le

matériau.

Les travaux d’Ezoe [EZO01] ont également mis en évidence que des hétérocharges générées

dans une résine époxy, lors d’une polarisation sous 10 kV/mm, peuvent être issus des

groupements acides du matériau,leur formation étant favorisée par la présence d'eau dans le

matériau.

Lizuka et al. de leur côté, démontrent les effets d'un pré-conditionnement par l'eau à température

ambiante ou en ébullition sur des époxy chargées ou non sur le phénomène de charge d'espace. Il

a été rapporté que des hétérocharges sont en mesure de se développer sur des résines chargées et

pré-conditionnées à l'eau bouillante [LIZ99].

Sur la même résine étudiée par Guillermin [GUI04], Gallot [GAL04, GAL05] a mis en évidence

en utilisant la méthode LIPP (méthode de l’onde de pression induite par impulsion laser), un

développement d'homocharges positives et négatives sous l'effet du champ électrique

relativement faible (4 kV/mm) avec un seuil marquant le début de l'accroissement de 10 kV/mm,

quelle que soit la température (de 24°C à 72°C).

Afin de comprendre et quantifier le vieillissement de l’isolant des disjoncteurs haute tension à

isolation gazeuse, il est donc important de déterminer l’évolution de ces charges dans notre

matériau avec le temps. Ceci est particulièrement nécessaire dans le cas de l’isolant faisant l’objet

de notre travail, car on ne retrouve pas dans la littérature des études à ce sujet concernant les

résines chargées d’alumine. Par ailleurs, il est à noter que, en règle générale, peu de travaux ont

été publiés sur le comportement longue durée des résines chargées sous contrainte continue.

2.8.2 Modèles de vieillissement

La compréhension des phénomènes de vieillissement thermique, mécanique et électrique des

polymères préoccupe les experts du domaine depuis plusieurs décennies, durant lesquelles ont été

élaborés différents modèles décrivant le vieillissement ou définissant l’espérance de vie de ces

Page 67: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

55

matériaux [LAH09]. Ces modèles présentent des points communs, mais aussi des différences,

surtout vis-à-vis de l'origine du vieillissement. Nous allons citer quelques-uns des plus répandus.

8.2.1.2 Loi de puissance inverse

En raison de sa simplicité et de sa souplesse, cette loi est la plus utilisée dans les études de

vieillissement électrique des isolants solides, notamment sous contrainte alternative et en milieu

industriel. Il s’agit d’une expression empirique introduite par Peek en 1929 [PEE29], où la durée

de vie est donnée par la relation suivante :

nk E 2-58

avec E champ électrique et n le coefficient d'endurance. Les constantes k et n sont à déterminer

expérimentalement. Afin de vérifier la validité du modèle, on trace la courbe E(t) en coordonnées

logarithmiques : si la courbe est une droite, le modèle peut être appliqué [NED08]. Des difficultés

se présentent lors de l'extrapolation des résultats à des champs électriques faibles. En effet,

l'extrapolation de la droite de durée de vie conduit à conclure que l'isolant « claquera » au bout

d'un certain temps à champ nul.

Dans certains cas, la courbe d'endurance électrique est formée de deux ou plusieurs segments de

droite [NED08]. Le coefficient n constitue un critère d'évaluation de l'endurance en tension du

matériau. Pour les polymères usuels, ce coefficient est compris entre 4 et 20 sous contrainte

alternative [ZOL92] et ses valeurs sont relativement bien connues pour les polymères

usuellement employés en haute tension. En revanche, les valeurs de n dans le cas des contraintes

continues font encore débat.

8.2.2.2 Approche cinétique selon Zhurkov

Ce modèle a eu pour origine des expériences menées par Zhurkov [ZHU65, ZHU66] destinées à

mesurer le temps de rupture sous contrainte mécanique uni axiale sur une série de matériaux

différents tels que des métaux, des cristaux ou des polymères. Il existe une analogie entre cette

contrainte mécanique et la contrainte électrique puisque le champ électrique peut générer des

contraintes électromécaniques [DIS 97, PAR97, BLA95].

Selon Zhurkov, la durée de vie s’écrit dans le cas des polymères :

00 exp

U

kT

2-59

Page 68: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

56

Avec τ la durée de vie,τ0 le facteur pré-exponentiel, U0 un coefficient déterminé par extrapolation

en traçant U=f(σ), un coefficient représentant le volume qui subit la contrainte, la contrainte

de traction mécanique, k la constante de Boltzmann et T la température absolue.

Expérimentalement, l’auteur a pu définir que la valeur du facteur 0 , de l’ordre de 10-13

s,

coïncide avec la période des oscillations thermiques des atomes dans un solide. Cette valeur est

indépendante de la structure et de la nature chimique du matériau.

En écrivant l’expression de τ sous la forme :

0

0

kTln U

2-60

La partie gauche de cette équation s’identifie à une énergie U représentant la barrière à franchir

pour déclencher la rupture. Le fait d’avoir déterminé la valeur de 0 permet de tracer les courbes

U , montrant ainsi une relation linéaire entre la barrière effective U et la contrainte.

L’énergie de barrière extrapolée pour une contrainte nulle 0 est alors U0. Zhurkov assimile

cette grandeur à l’énergie de liaison atomique.

Le suivi de la cinétique de fracture du polymère sous contrainte mécanique a permis de mettre en

évidence une variation exponentielle entre la vitesse de formation des radicaux libres et la

contrainte mécanique appliquée. Zhurkov estimait ainsi que la fracture des polymères est due

essentiellement à la rupture des liaisons covalentes [ZHU65, ZHU66].

Zhurkov [ZHU83] exprime le coefficient γ en fonction de paramètres du matériau :

C

Y

2-61

Avec C la chaleur spécifique, un coefficient de surcharge proportionnel au libre parcours

moyen du phonon, le coefficient de dilatation thermique linéaire et Y le module

macroscopique d’Young.

Page 69: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

57

8.2.3.2 Approche thermodynamique selon Crine

Le modèle proposé par Crine est fondé sur un concept thermodynamique. Ce modèle, applicable

notamment à un vieillissement sous contrainte alternative, suppose que la déformation des

chaînes macromoléculaires est un processus de fatigue accéléré par la fréquence. Les concepts à

la base de ce modèle sont :

L’énergie de cohésion intermoléculaire ;

L’épaisseur de la phase amorphe dans le matériau [CRI90] ;

La théorie de rupture liée au volume libre proposée par Artbauer [ART96] ;

Le concept de création de cavités submicroniques ;

Le premier stade de vieillissement électrique est considéré comme étant essentiellement

un processus moléculaire.

La conductivité électrique, les relaxations diélectriques ou mécaniques sont considérées comme

dépendantes de la température selon une loi d’Arrhenius :

0 expE

X XkT

2-62

avec 0X un facteur empirique, E l’énergie d’activation apparente du processus, k la constante de

Boltzmann et T la température.

D’après la théorie d’Eyring, le passage de l’état activé à un état supérieur suit une relation :

#exp

kT Gk

f h kT

2-63

avec ΔG#

l’énergie libre d’activation.

Étant donné que la variation d’enthalpie #H et la variation d’entropie #S sont reliées par la

relation :

# # #G H T S 2-64

On peut écrire :

Page 70: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

58

0

# #exp exp

S HX X

k kT

2-65

Pour un processus ayant un faible volume d’activation #V , l’expression de l’enthalpie prend la

forme :

## V

HK

2-66

avec coefficient de compressibilité isotherme et K une constante sans dimension. #S peut

être exprimée de la façon suivante :

# #S V 2-67

représentant le coefficient de dilatation thermique.

L’énergie libre de Gibbs peut alors s’exprimer en fonction des variables thermodynamiques et

, du volume libre d’activation #V , du paramètre K et de la température :

1# #G V K T

2-68

Le modèle proposé par Parpal et Crine [PAR97] prend en compte un champ électrique critique

au-delà duquel des cavités submicroniques peuvent être créées et être ensuite le siège de

décharges menant à la rupture finale du polymère. Ce champ peut être quantifié grâce à l’énergie

de cohésion du polymère. Cela conduit à une relation de durée de vie simple prenant en compte

seulement deux paramètres physiques :

0G : l’énergie d’activation du processus déformant les chaînes considérées ;

max : la taille maximale des cavités submicroniques créées.

La caractéristique principale de ce modèle est la présentation du vieillissement électrique comme

un phénomène qui n’est pas nécessairement associé à un déplacement d’électrons sous l’action du

champ électrique, mais plutôt, à un phénomène de fatigue sous champ alternatif [LAH09]. Le

processus de vieillissement jusqu’à la rupture se décompose en deux étapes :

Page 71: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

59

La première étape est un processus chimique. Une déformation électromécanique des

chaînes de polymère provoque un réarrangement du volume libre au-delà d’un champ

critique. Des microcavités apparaissent.

La deuxième étape est caractérisée par une avalanche électronique. Comme les

microcavités ont été déjà créées, les charges injectées dans le polymère sont accélérées

dans les cavités sous l’action du champ électrique. Certaines charges parviennent à casser

des liaisons. La taille des cavités et l’énergie des charges accélérées augmentent pour

conduire finalement à la rupture.

Crine et ses collaborateurs ont montré, sur une très large gamme de températures (de 77 K jusqu'à

la température de fusion), que la tenue diélectrique de nombreux polymères est étroitement liée à

la densité d’énergie de cohésion du polymère :

Ecohd

nergiem

é V

2-69

avec Ecoh

l’énergie de cohésion du polymère, définie comme l’énergie à apporter pour briser

toutes ses liaisons et mV le volume molaire du polymère.

Les liaisons de Van der Waals sont les plus faibles dans le polymère. Si la rupture des liaisons de

type Van der Waals est le premier stade de la rupture mécanique, et comme l’énergie de cohésion

se rapporte à ces liaisons, cela implique que l’énergie de la déformation W est supérieure à

l’énergie de cohésioncoh

E du polymère :

W E H k Tcoh vap

2-70

Hvap

représente la chaleur de vaporisation du polymère [CRI97].

Par hypothèse, W correspond alors au travail de déformation exercé sur le polymère, soit :

W V 2-71

On déduit alors la contrainte critique c au-dessus de laquelle les cavités submicroniques peuvent

être générées :

Page 72: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

60

E Vc coh

2-72

Le champ électrique critique nécessaire pour déformer significativement les liaisons de Van der

Waals est celui qui apporte une énergie (ou un travail) supérieure à l’énergie de cohésion, soit :

max

EcohE

c e

2-73

avec la distance de la déformation de la chaîne moléculaire et e la charge d’un électron.

Le plus grand intérêt du modèle de Crine est qu’il permet d’adapter le paramètre λ à la

morphologie du polymère.

Selon CRINE, la durée de vie peut s'écrire :

exph G W

k T kT

2-74

En résumé, le modèle de Crine permet de :

Déduire les paramètres thermodynamiques : enthalpie et entropie d’activation d’un

processus permettant de déduire la valeur du volume libre ΔV# correspondant.

Déterminer le temps nécessaire à la rupture de liaisons intermoléculaires à partir d’un

champ critique Ec, entre autre le temps nécessaire à la création de cavités submicroniques

critiques. Le champ critique est lui aussi déterminé à partir de l’énergie de cohésion du

polymère et des paramètres propres du matériau.

Affirmer que le premier processus de vieillissement électrique des polymères est un

phénomène de fatigue induit par l’application d’un champ AC accéléré par la fréquence. Il

contraint essentiellement les liaisons du type Van der Waals, soit les liaisons

intermoléculaires, d’où la principale différence entre ce modèle et celui de Zhurkov, qui

ne s’intéresse pas au déplacement des électrons, car il s’agit d’une rupture des liaisons.

Parmi les paramètres que le modèle de Crine ne prend pas en compte, on note en particulier la

charge d’espace à laquelle d’autres auteurs se sont intéressés, notamment Dissado [DIS95,

DIS92], et la distribution des cavités submicroniques. Ce modèle pourrait néanmoins être

appliqué sous champ continu, en considérant l’application d’une tension continue comme

l’application d’une seule période de tension [CRI98].

Page 73: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

61

8.2.4.2 Approche thermoélectrique selon Dissado Mazzanti Montanari

Ce modèle présente également une approche microscopique. Le paramètre clé est ici la présence

des charges d’espace qui sont piégées aux frontières des cavités présentes dans l’isolant ou sont

localisées au niveau des inclusions et des impuretés. Ces charges d’espace ont pour effet une

modification significative du champ, entrainant un endommagement local au matériau. C’est

donc un concept à priori adéquat aux matériaux soumis à des champs continus.

2.8.2.4.1 Vieillissement thermique

Considérons deux états d’équilibre locaux distincts (1 et 2), avant et après vieillissement, présents

dans le milieu à une concentration C1 et C2. A chacun de ces états est associée une énergie libre

par entité (énergie de Gibbs) G1 et G2. Au-delà d’une température critique permettant de

déclencher un phénomène de dégradation thermique, la fraction des concentrations dans un

diélectrique A est définie par :

2

1 2

CA

C C

2-75

A l’état d’équilibre : 1

1 expeqA

kT

avec 2 1G G et k la constante de Boltzmann.

A un temps t de vieillissement, la valeur de A est donnée par :

1 2

1

1 0

eq

eq

A t Aln k k t

A A

2-76

où 0A représente la valeur initiale de A et 1K et

2K sont les constantes de vitesses de la

réaction réversible dans le sens 1 et le sens 2.

La rupture se produit lorsqu’une quantité critique d’unités passe de l’état initial non vieilli (1) à

l’état vieilli final (2). La fraction de concentration atteint alors une valeur critique *A . En

remplaçant dans l’équation précédente, le temps t par la durée de vie de l’isolant , on obtient :

1

1 2 *

1ln

1 eq

k kA A

2-77

Page 74: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

62

L’introduction de K1 et de K2 dans l’équation 2-77 donne :

*exp / ln

exp / 2 exp / 2

G eq eqkT A A Ah

kT kT kT

[DIS01]

2-78

où h est la constante de Planck, G est un paramètre dépendant des énergies libres d’activation

des états 1, 2 et de l’état à (Ga), correspondant au maximum de la barrière d’énergie entre les

états 1 et 2. G est défini comme suit :

1 2

2G a

G GG

2-79

Vu la nécessité d’atteindre A*, Dissado a pu définir la température seuil pour l’endommagement

des isolants (« threshold temperature » Tth) comme :

1th *

*

TA

k lnA

[DIS95] 2-80

2.8.2.4.2 Vieillissement sous champ électrique : effet des charges d’espace

Afin de prendre en compte le rôle des charges d’espace, les auteurs ont fait les hypothèses

suivantes :

Les charges accumulées dans les pièges sont injectées à partir de l’électrode, de sorte que

le courant dû à l’injection soit insuffisant pour générer une rupture directe. Les charges

piégées se mettent en équilibre pendant un temps très court (négligeable par rapport au

temps de vie de l’isolant) ;

A proximité des centres de charges, le champ extérieur (Laplacien) E est négligeable par

rapport au champ créé par les charges d’espace ;

Les centres de charges sont sphériques, de rayon r0, avec une densité de charge uniforme

et possèdent tous la même quantité de charges qc qui est fonction du champ appliqué, qc =

CEb

;

Une quantité Nm d’espèces ou « moitiés » est affectée, en moyenne, dans chaque

microcavité. Ces espèces résident dans une fine paroi d’épaisseur λ à la périphérie de la

cavité ;

Le matériau est homogène à l’échelle macroscopique.

Page 75: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

63

Le processus de vieillissement est considéré comme une sorte d’apparition des cheminements

locaux. Le modèle DMM décrit le temps de formation des défauts (microcavités, trous) dans les

matériaux isolants en fonction du champ électrique et des contraintes thermiques. Ainsi, ce

modèle détermine le temps nécessaire à la formation des vides en quantité critique pour

déclencher une rupture, plutôt que le temps de rupture. L’expression finale du modèle DMM sous

champ continu prend la forme suivante :

122

*

2, exp ln cosh2 2

bbH

eqS

eq

C EC EA Eh k kE T

kT T k A E A T

2-81

avec T la température absolue, ΔH l’enthalpie d’activation, ΔS l’entropie d’activation, Δ la

différence d’énergie libre entre les réactifs et les produits, E le champ électrique appliqué tel que

la quantité de charge qc = CEb

, A*

la valeur critique de A et Aeq la valeur de A à l’équilibre définie

par :

1

2

1 exp

b

eq

C EkA E

T

2-82

C est une constante qui dépend essentiellement du matériau :

2

2

016

E

m

B CC

r N k

2-83

où B est une constante de proportionnalité entre l'énergie électromécanique et sa contribution à la

barrière d’énergie libre de la réaction de dégradation, E le coefficient d’électrostriction, λ et Nm

définis dans les hypothèses énoncées précédemment, δ la déformation élémentaire, r0 le centre

des charges (supposées sphériques), k la constante de Boltzmann, C et b relient l’expression

précédente avec la relation entre les charges stockées dans les centres de charge et le champ

appliqué [MAZ05].

Comme on peut s’apercevoir, il s’agit d’un modèle élaboré, essayant de prendre en compte un

grand nombre de paramètres. Ceci constitue d’ailleurs l’une de ses faiblesses, car la

détermination de ces paramètres nécessite un grand nombre d’essais et souvent des champs très

Page 76: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

64

forts pour diminuer les temps des essais, ce qui n’est pas forcément compatible avec des

isolations épaisses.

2.9 Quelques propriétés des résines époxydes

Les résines époxydes sont de plus en plus utilisées dans des applications électriques. Cependant,

assez peu d'études ont été consacrées à l'étude de ce matériau, en partie en raison de sa

complexité qui rend de corréler ses propriétés (notamment diélectriques) avec sa structure.

2.9.1 Propriétés diélectriques

La permittivité relative et le facteur de pertes des résines époxyde dépendent de plusieurs

paramètres comme la charge, le taux de charge, la température et la teneur en eau. Les travaux de

Beyer [BEY91], portant sur le comportement à 50 Hz de la résine pure type DGEBA et de la

même résine chargée d'Al2O3 (Figure ‎2-16), met en évidence les différents mécanismes de

conduction et de polarisation qui peuvent apparaitre, ainsi que l'influence de la température sur le

comportement diélectrique (doublement de la valeur de la permittivité en augmentant la

température).

Plusieurs études ont été consacrées à l'analyse de l'effet d'absorption d'eau sur la variation des

propriétés diélectriques de la résine DGEBA [MAX83, BEY91, KAR91, EZO97, EZO99,

GON01, API88, TOD03].

D'après [KAR91] [EZO97], [EZO99], la permittivité et le facteur de pertes des matériaux

composites augmentent en fonction de l'eau absorbée. Les expériences ont montré que, pour

environ 1% d'eau absorbée, le facteur de pertes peut augmenter d'approximativement 20%, alors

que la constante diélectrique augmente de 10 % pour la même quantité d'eau absorbée [MAX83].

De même, lorsque qu’une résine époxyde bisphenolique chargée avec 60% de silice absorbe

0,6% d’eau, la permittivité double, alors que le facteur de pertes est multiplié par quatre à 10 kHz

[API88]. L'augmentation de la permittivité peut être liée aux mécanismes de polarisation

interfaciale (Maxwell – Wagner) [KAR87], [FUK97], [YAM99]. En effet, le facteur de pertes

augmente fortement dans le cas des échantillons chargés en fonction du pourcentage d’eau

absorbée. Dans le cas de la résine pure, ces variations ne sont pas observées. Elles peuvent donc

être attribuées aux effets dans les interfaces microscopiques.

Dans ses travaux de thèse [THI05], Thinh a constaté, en dessous de 10 Hz, une forte

augmentation de la permittivité et du facteur de pertes vers les basses fréquences. Ce

comportement a été associé à un phénomène interfacial lors de l'absorption d'eau.

Page 77: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

65

De plus, l'eau peut aussi augmenter la conductivité ionique, générant ainsi une relaxation à basse

fréquence [GER04].

I - Orientation des petits

segments de la chaine polaire

II - Polarisation interfaciale

III - Orientation des larges

segments de la chaine polaire

IV - Conduction

Figure 2-16 : Variation du facteur de pertes et de la permittivité relative pour une résine époxyde

non chargée (1) et chargée (2) en fonction de la température à fréquence constante (50 Hz)

Des études ont également été réalisées sur les résines époxydes afin de suivre l’évolution de ces

propriétés dans le temps au cours du vieillissement. Guillermin [Gui04] s'est principalement

intéressé à la mise en évidence du vieillissement par des mesures électriques suite à un

conditionnement électrique et thermique du matériau. Il a été observé une augmentation du

facteur de pertes ainsi que de la permittivité aux basses fréquences au cours du vieillissement.

Cependant, une comparaison avec le vieillissement thermique effectué sur les mêmes

échantillons a montré les mêmes évolutions.

2.9.2 Mécanismes de conduction

Les mécanismes de conduction dans la résine ont été peu étudiés. En 1974, Lovell [LOV74] a

présenté des mesures de courants en régime transitoire et en régime quasi-permanent pour

différentes températures inferieures à la Tg. Le mécanisme d'injection de type Schottky et le

mécanisme de conduction Poole Frenkel ont été proposés.

Dans [GRI00], une dépendance linéaire entre le courant et le champ électrique a été mise en

évidence jusqu'à 120 kV/mm. A partir de cette valeur du champ seuil, la dépendance entre le

courant et le champ a été régie par une relation en E4 représentative d'un mécanisme de

Page 78: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

66

conduction limité par charges d'espace. Cette caractéristique a également montré une dépendance

en sinh (eEλ / 2kT), correspondant à un mécanisme de conduction par sauts avec une distance de

sauts entre les pièges de l’ordre de 1 nm.

Plus récemment, des mesures de courant réalisées dans la résine pure et dans la résine chargée de

silice [GUI04] ont montré des mécanismes de conduction qui différent selon que la température

est inférieure ou supérieure à la température de transition vitreuse. À 55°C, un mécanisme de

conduction majoritaire par sauts a été identifié. À 80°C, les courants permanents ont mis en

évidence un mécanisme majoritaire de type Schottky. Les auteurs ont conclu à une prédominance

du rôle de la résine sur celui de la charge minérale dans le processus de conduction.

Une analyse sommaire des courants par Gallot [GAL04], sur la même résine que Guillermin

[GUI04], a permis de révéler une conduction limitée par le volume apparentée à une SCLC à

56°C.

2.9.3 Résistivité surfacique et volumique

Les résines époxydes présentent des bonnes résistivités de volume et de surface. La mesure de la

résistivité volumique pour une résine DGEBA chargée de 60% de silice et une résine pure

[GUI04] a donné des valeurs de résistivité de l'ordre de 4,5*1013

Ω.m pour la résine pure et

1,5*1014

Ω.m pour la résine chargée.

Des exemples de mesures de la résistivité surfacique et volumique en fonction du champ

électrique et de la température sont donnés dans la Figure ‎2-17 [OKA07]. Les mesures ont été

effectuées sur de la résine époxyde chargée d'alumine, sous SF6 à des pressions entre 0,25 MPa et

0,35 MPa. Ces résultats mettent en évidence l'effet de la température et du champ électrique sur

la variation des résistivités surfaciques et volumiques.

Dans sa thèse doctorale [ZAV14], Zavattoni a étudié les propriétés diélectriques d'une résine

époxyde DGEBA chargée de 60% d'alumine. Elle présente des résultats de variations de la

résistivité volumique (sous SF6 à 0,5 MPa) et surfaciques (sous SF6 à différentes pressions). Il a

été montré que la résistivité surfacique ne varie quasiment pas pour des pressions allant de 0,1

MPa à 0,8 MPa.

L’effet d’absorption d’eau sur les variations de résistivité des résines époxydes a été étudié par

quelques auteurs. Dans les études les plus récentes [CRI98a, LUT10, ZAV14], il a été montré

qu’une augmentation de la teneur d’eau dans une résine époxy peut provoquer la diminution de la

résistivité volumique jusqu'à 7 ordres de grandeur [LUT10].

Page 79: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

67

Figure 2-17 : Variations de la résistivité volumique et surfacique en fonction du champ électrique

et de la température [OKA07]

Dans le cas d’une résine époxyde DGEBA chargée de 60% d’alumine, une diminution de deux

décades a été observée sur les mesures de résistivité volumique mesurée sur un échantillon sec et

un échantillon contenant 0,2% d’eau [ZAV14].

La Figure 2-18 montre l’évolution de la résistivité surfacique pour différentes valeurs de

l’humidité relative [LUT09]. Une augmentation de la valeur de l’humidité relative jusqu'à 80%

entraîne la diminution de la résistivité surfacique de 3 ordres de grandeur.

Figure ‎2-18 : Variation de la résistivité surfacique d'une résine époxy

avec l'humidité à T° = 298 K [LUT09]

Page 80: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 2 - Comportement et propriétés électriques des polymères isolants solides

68

2.9.4 Rigidité diélectrique

Des nombreuses données concernant la rigidité diélectrique des résines époxydes sous contrainte

sinusoïdale (50 Hz) sont disponibles dans la littérature. Les valeurs de la rigidité diélectrique

varient selon le type de résine et selon la configuration d'essai. Des valeurs de 26 kV/mm ont été

mesurées à 25°C sur des échantillons de résine type cycloaliphatique renforcée à 45% en volume

par de la silice, d'épaisseur 1 mm [BLA11]. Des valeurs de 103 kV/mm ont été mesurées pour

une résine type DGEBA chargée de silice à 150°C, en utilisant des tests de montée en rampe de

tension avec la configuration d'électrodes sphère/sphère [BEY91]. Des valeurs de rigidité

diélectrique de l'ordre de 270 kV/mm (20°C) ont été mesurées sur des échantillons du même type,

mais non chargés, en utilisant les mêmes conditions de test.

Les informations concernant la tenue diélectrique des résines chargées d’alumine sous contrainte

continue sont en revanche moins nombreuses. Il s’agit de données indispensables pour le

dimensionnement des futurs appareillages HVDC, qui a impulsé le présent travail.

Le rôle de l'eau dans la dégradation de la résine époxyde, qu'elle soit chargée ou non, est connu

depuis plusieurs dizaines d'années. Une diminution d'un facteur deux de la tension de claquage a

été mesurée à température ambiante dans une résine époxyde non chargée après l'immersion dans

l'eau à 50°C jusqu'à saturation [KAR82].

Brun et al. [BRU07, BRU08] ont également étudié l'influence du taux d'humidité sur la rigidité

diélectrique pour des résines chargées par des grains de silice. Ils ont montré des diminutions d'un

facteur 5 à 10 du champ de claquage entre un matériau sec et un matériau humide.

2.10 Conclusion

Dans ce chapitre, nous avons passé en revue les concepts fondamentaux qui régissent le

comportement à court et long terme des isolants solides. Les différents mécanismes liés à la

conduction et à la polarisation des polymères ont été présentés, ainsi que les concepts liés au

claquage et au vieillissement de ces matériaux. Un état des lieux des connaissances acquises sur

les résines époxydes a été dressé à la fin de cette partie.

Avant de présenter et analyser, à la lumière de ces concepts et théories, les résultats

expérimentaux que nous avons obtenus, nous allons décrire les constituants du composite, ainsi

que le processus de fabrication de divers échantillons et les diverses mises en œuvre

expérimentales que nous avons employées.

Page 81: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

CHAPITRE 3

Mise en œuvre expérimentale

Page 82: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

70

3.1 Introduction

Dans les pages suivantes, nous allons présenter les techniques que nous avons employées

pour obtenir les résultats expérimentaux. Après une description du composite étudié, des

différents types d'échantillons et des leurs principales propriétés électriques et physico-

chimiques, nous détaillerons les principes et l'implémentation des différentes méthodes de

mesure, les développements que nous avons effectués et les divers protocoles expérimentaux. La

dernière partie du chapitre sera consacrée au dispositif réalisé dans le cadre de ce travail afin de

pouvoir réaliser un vieillissement longue durée du matériau et aux attentes en termes d’évolution

de marqueurs potentiels de vieillissement.

3.2 Constituants du composite étudié

Dans le cadre de ce travail, nous avons étudié une résine époxyde issue d'un mélange de résine

CY225 (C45923) et de durcisseur HY925 (HY5925). La résine CY225 est une résine époxyde de

type Diglycidyléther de Bisphenol A (DGEBA). Elle est composée de 75% en masse de

monomères (n=1), de 16% d'oligomères (n=2) et de 9% de dimères [AUB08, BRU09, GUI02,

GAL04, OLL95]. Ces constituants sont représentés dans la Figure ‎3-1. Le durcisseur HY925 est

un mélange d'anhydride de la famille des anhydrides phtaliques et d'un flexibilisateur di-esterdi-

acide carboxylique.

Figure 3-1 : Constituants de la résine CY225 [GUI04, BRU09]

Page 83: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

71

Dans l’application qui nous concerne, on rajoute au mélange résine/durcisseur une charge

d’alumine. Le taux de charge du matériau, quantité de charge minérale par rapport à la quantité

de matériau (charge + matrice), est le même pour l'étude et pour les applications. Il correspond à

66% en masse. Le diamètre moyen des particules d'alumine a été de 6 μm, avec un diamètre

maximum de 20 à 30 μm.

Tel qu’indiqué précédemment dans le chapitre 1, le rôle des charges minérales (SiO2, Al2O3…)

est d’améliorer la tenue mécanique et thermique du composite. Dans notre application, l’Al2O3 a

été préférée au SiO2 car la silice réagit avec l’un des produits de décomposition du SF6 (HF) dans

le disjoncteur. En présence de HF, la résistivité de surface des époxy-silice chute fortement, alors

que l'alumine est stable par rapport au HF.

3.2.1 Réticulation de la résine

La réaction de réticulation se déroule en trois phases [BAR92] :

- Phase 1 : l'anhydride attaque un des groupes OH (hydroxyle) de la résine époxy qui initie la

réaction. On peut constater que « l'anneau phtalique » s'est ouvert et que les deux carbones ne

sont plus reliés entre eux par un atome d'oxygène. La liaison C-O est rompue entrainant la

formation du « monoester » qui pourra réagir avec les molécules d'époxy.

Malgré l'aide du groupe OH qui initie cette réaction, il faut souvent contribuer à l'ouverture de

l'anneau phtalique grâce à un accélérateur (qui peut être une amine tertiaire).

Figure 3-2 : Ouverture de « l'anneau phtalique » par un groupe hydroxyle

- Phase 2 : le groupe OH formé sur l'anneau phtalique va réagir avec un groupe époxydique d'une

autre molécule pour donner un autre hydroxyle.

Figure ‎3-3 : Réaction entre le groupe carboxylique et le groupe époxyde

Anhydride d’acide + Groupe Hydroxyle Groupe carboxyle

de la résine

Groupe carboxyle + Groupe époxyde Ester carboxylique

Page 84: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

72

- Phase 3 : le groupe hydroxyle qui vient d'être formé suite à la phase 2 peut réagir avec un autre

Anhydride ou il peut réagir avec le groupe OH d'un autre époxyde sous l'effet catalytique du

durcisseur.

Figure ‎3-4 : Réaction entre un groupe hydroxyle et un groupe époxyde

3.2.2 Fabrication

La mise en œuvre des échantillons en résine époxyde suit un protocole spécifique et complexe.

La première étape consiste à sécher l'alumine sous vide et à la mélanger séparément avec le

durcisseur et la résine selon les proportions données dans le Tableau 3-1.

Tableau 3-1 : Proportions des constituants de base du matériau

Résine CY225 100 parties en poids

Durcisseur HY925 100 parties en poids

Alumine 360 parties en poids

L'ensemble du mélange est ensuite injecté dans un moule chauffé à 120 - 140°C pour le

durcissement de l'ensemble. Après cette phase de durcissement, une post-cuisson de 6 à 10 heures

à 120 - 140°C est nécessaire afin d'assurer la réticulation du mélange, d'optimiser les propriétés

mécaniques de la résine et de stabiliser la forme géométrique de la pièce [KIE12].

Après l'obtention de plaques, les échantillons sont usinés selon différents profils nécessaires pour

l'étude. Ils seront présentés dans la partie 3.3.

Malgré des remises en question dues au coût énergétique du moulage ou à son origine liée au

pétrole, la résine époxy continue à être utilisée à grande échelle dans les disjoncteurs AC en

raison de ses propriétés bien connues et satisfaisantes [RAIN11].

Groupe hydroxyle + Groupe époxyde Liaison éther

Page 85: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

73

3.2.3 Quelques propriétés du composite étudié

Dans l’annexe A sont répertoriées, à titre d’indication, quelques propriétés du composite qui fait

l’objet du présent travail, déterminées par le partenaire industriel selon les différentes normes

CEI.

2.3.1.3 Propriétés physico-chimiques

La température de transition vitreuse du matériau est l'une des principales propriétés physico-

chimiques. Elle est donnée dans l'annexe A comme étant ≥105°C. Des mesures de calorimétrie

différentielle réalisées dans le cadre de l’étude sont présentées dans la Figure 3-5. Le premier

thermogramme est réalisé sur un échantillon de résine à sa sortie du moule et l’autre après une

post-cuisson à 140°C pendant 6 heures. On observe que le recuit a pour effet une augmentation

de la température de transition vitreuse (Tg) de la résine de 107°C à 112°C, avec un décalage du

début de la transition à 106°C au lieu de 102°C, ce qui permet de s’assurer de la conservation de

sa tenue mécanique jusqu’à 105°C.

Cette post-cuisson a aussi pour but d’améliorer les propriétés diélectriques, car il a été montré

qu’un recuit de ce type de résine à des températures supérieures à la Tg permet de diminuer

significativement son facteur de pertes et sa permittivité à 50 Hz et d’augmenter sa résistivité

volumique [BEY91].

Figure 3-5 : Thermogrammes DSC réalisés sur des échantillons de résine époxy chargée

d'alumine avant et après post-cuisson à 140°C pendant 6 heures

^exo

2

mW

Résine BHT NT1744 IES 2eme, 20.08.2013 14:51:30 Résine BHT NT1744 IES 2eme, 21,0000 mg Glass Transition Onset 106,21 °C Midpoint 112,29 °C Inflect. Pt. 111,99 °C Inflect. Slp. -0,43 mWmin^-1

Résine BHT NT1744 IES, 20.08.2013 14:22:06 Résine BHT NT1744 IES, 21,0000 mg Glass Transition Onset 102,79 °C Midpoint 107,37 °C Inflect. Pt. 107,49 °C Inflect. Slp. -0,51 mWmin^-1

30 40 50 60 70 80 90 100 110 120 130 140 150 160 170 °C

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 min

ALSTOM Matériaux: Laboratoire 9.20 SW RTAS

107 112

Page 86: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

74

2.3.2.3 Propriétés mécaniques et diélectriques

Nous avons reporté dans le Tableau ‎3-2 quelques propriétés mécaniques du composite étudié.

Nous pouvons ainsi remarquer des valeurs élevées de la résistance à la traction et à la flexion,

ainsi que du module de Young, qui illustrent les raisons du choix de ce matériau par rapport aux

contraintes mécaniques de service.

Les valeurs du facteur de pertes, de la permittivité et de la rigidité diélectrique du matériau,

déterminées à 50 Hz et à température ambiante, sont aussi répertoriées dans le Tableau ‎3-2; la

détermination et l’analyse détaillée de son comportement diélectrique, en particulier sous forts

champs continus et sous l’effet de la température, est le but de notre travail et fera l’objet du

chapitre 4.

Tableau 3-2 : Quelques propriétés mécaniques et diélectriques du composite étudié

Propriété Valeur

Coefficient de dilatation linéaire (20°C - 85°C) 33,1*10-6

K-1

Résistance à la traction ≥ 60 MPa

Résistance à la flexion ≥ 90 MPa

Module de Young > 10000 MPa

Rigidité diélectrique en AC (50 Hz)

déterminée sur 3 mm d’épaisseur > 17 kV/mm

Facteur de pertes diélectriques (à 50 Hz, 23°C) 0,0136

Permittivité relative (à 50 Hz, 23°C) 5

3.3 Types d'échantillons

Tel indiqué précédemment, l’objet de ce travail était un matériau composite comprenant une

matrice de résine époxyde (DGEBA + durcisseur anhydride HY925) chargée à 66% en masse

avec de l’alumine (Al2O3). Trois types d’échantillons ayant des épaisseurs de l’ordre du

millimètre (aussi bien pour des raisons technologiques que pour conserver autant que possible des

dimensions du même ordre que celles rencontrées dans les pièces pour disjoncteurs) ont été

définis et préparés pour l’étude.

Page 87: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

75

Les échantillons type 1 ont été des échantillons plans, de type disque de 100 mm de diamètre et

d’épaisseur 1 mm. Ces éprouvettes ont notamment servi pour des expériences où les contraintes

appliquées n’induisaient pas des effets de bord et des risques de claquage élevés. Elles ont été

munies sur chaque face d’électrodes conductrices composées de bicouches chrome/or déposées

par pulvérisation cathodique afin de réduire au maximum les résistances de contact lors des

mesures et d’assurer au mieux l’uniformité du champ dans la direction perpendiculaire à

l’épaisseur lors du conditionnement.

Pour les expériences nécessitant l’application de contraintes fortes et/ou de longue durée, nous

avons employé plus de 200 échantillons plans ayant subi un usinage dans l’épaisseur pour obtenir

un profil de la zone contrainte électriquement s’apparentant à un profil Rogowski (Figure ‎3-6).

Le but de cette configuration a été de limiter les effets liés à l’augmentation du champ électrique

aux bords des électrodes, susceptibles de provoquer des claquages prématurés. La réalisation d'un

grand nombre d'échantillons à profil Rogowski étant relativement délicate et particulièrement

coûteuse, nous avons décidé, en accord avec le partenaire industriel, de faire réaliser des

échantillons d'épaisseur plus importante sur les bords qu'au centre, avec une variation de

l’épaisseur adéquate pour limiter efficacement les renforcements du champ, sans que pour autant

la section soit un vrai profil Rogowski. Ainsi, au lieu d'un profil ayant l'apparence d'une

exponentielle, les bords de ces échantillons ont été usinés selon un profil circulaire de rayon

5 mm. L’épaisseur « utile » au centre était de 0,7 mm. Les deux faces des échantillons ont été

couvertes de couches conductrices en chrome/or ou graphite. Ces échantillons, que nous allons

appeler « de type 2 », ont été utilisés pour des tests de rigidité diélectrique, pour l’obtention des

caractéristiques courant-tension et pour les différents vieillissements électrothermiques.

Figure 3-6 : Profil et dimensions des échantillons type 2 (à épaisseur non constante)

Page 88: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

76

Pour les mesures des caractéristiques de surface, nous avons employé des échantillons plans

d’épaisseur 3 mm préparés de manière à positionner précisément des électrodes concentriques sur

l’une des surfaces dans une cellule spécialement conçue pour l’étude; ils seront présentés en

détail à la section 3.7 (échantillons « type 3 »). Les surfaces de ces échantillons n’ont pas été

munies de couches conductrices.

Tous les échantillons décrits ci-avant ont été obtenus par usinage à partir de blocs moulés,

préparés selon la technique employée par le partenaire industriel pour la fabrication des supports

isolants de disjoncteurs haute tension alternative.

La préparation de chaque type d’échantillon pour les divers types de mesures, notamment en

terme de nature et de configuration de couches conductrices (électrodes) déposées sur leurs

surfaces et de précautions prises pour éviter les effets liés à l’application de fortes valeurs de

tension nécessaires aux expériences, sera détaillée dans chaque cas.

3.4 Tests de rigidité diélectrique

3.4.1 Aspects expérimentaux

Compte tenu que la rigidité diélectrique se définit comme le rapport entre la tension de claquage

et la distance entre les électrodes auxquelles cette tension est appliquée dans des conditions

d'essai spécifiées, pour que la valeur ainsi obtenue ait un sens physique, le champ à travers

l’échantillon doit être uniforme. Il convient alors, soit que les rayons de courbure des électrodes

soient grands devant la distance inter-électrodes, soit que le profil des échantillons soit tel qu’il

assure une uniformité satisfaisante du champ. Dans ce but, nous avons employé pour ce type de

test des échantillons de type 2. Pour limiter le risque de contournement, les échantillons ont été

immergés dans de l’huile silicone et pourvus de tubes isolants en plexiglas de hauteur 120 mm

collés, tel montré dans la Figure ‎3-7, et également remplis d’huile.

Des essais préliminaires ont été faits sur 20 échantillons d'épaisseur 0,7 mm, avec et sans dépôt

de graphite, et sur 20 échantillons de 1 mm, afin de déterminer l'épaisseur des échantillons à

utiliser pour des essais statistiques. Les dimensions des électrodes ont été celles définies par la

norme CEI 60243. Ces mesures ont montré des valeurs de rigidité diélectrique bien supérieures

pour les échantillons avec couche conductrice de graphite par rapport à ceux non pourvus de

dépôts. Ceci montre bien l’importance des phénomènes qui se produisent dans l’huile et en

surface des échantillons lors des tests de claquage et donc leur influence sur les résultats obtenus.

Dans le but de s’approcher au plus des caractéristiques intrinsèques du matériau, les échantillons

testés ont été par la suite pourvus d’électrodes en graphite de 50 mm de diamètre (application par

pulvérisation à température et pression ambiantes (Figure ‎3-7)). Le graphite présente l'avantage

Page 89: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

77

de résister beaucoup mieux qu'un dépôt métallique à l'immersion dans de l'huile silicone,

notamment à des températures supérieures à l’ambiante.

Figure 3-7 : Échantillons de résine époxy type 2 préparés pour des tests de rigidité diélectrique

L’utilisation de l'huile silicone et la configuration mise au point ont permis de limiter

sensiblement les phénomènes de contournement et les effets électro-hydrodynamiques. Les

échantillons à tester ont été préalablement placés dans une étuve, immergés dans l'huile, et portés

à la température désirée. Le test de claquage a été ensuite effectué automatiquement à l’aide d’un

banc de rigidité diélectrique. La température de l'huile chauffée a été soigneusement contrôlée

tout au long de l'étude.

La vitesse de montée en tension a été réglée selon les prescriptions de la norme CEI 60243-1

[NOR98], à l'aide d'un banc de test de rigidité diélectrique entièrement automatisé. La tension

appliquée durant les tests a été délivrée par une alimentation haute tension continue 150 kV de

type Sefelec HT19 (Figure ‎3-8). Pour chaque test réalisé, le banc de rigidité diélectrique affiche

la tension de claquage, correspondant à la dernière tension tenue avant la rupture du matériau.

Afin de s’approcher au plus des contraintes pouvant être imposées dans un disjoncteur en service,

la vitesse de montée de la tension a été estimée de l’ordre du kV/s (il a déjà été montré que, dans

un DIG, lors de l'établissement de l'arc électrique, il y a passage de la tension de -300 kV à +300

kV en 120 s ; ce qui correspond à une vitesse de 5 kV/s). Des tests préliminaires ont ainsi été

effectués à 0,2 kV/s et 2 kV/s. Les résultats ont mis en évidence une valeur du champ de claquage

de l'ordre de 93 kV/mm pour rampe de 0,2 kV/s contre 98 kV/mm pour une rampe de 2 kV/s.

Compte tenu de la très faible différence constatée sur les résultats, et afin de réduire la durée des

essais, il a été décidé, en accord avec le partenaire industriel, de réaliser l’étude avec une vitesse

de 2 kV/s. Pour évaluer la variation de la rigidité avec la température, des essais ont été effectués

à 25°C, 60°C et 85°C.

Page 90: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

78

Figure 3-8 : Banc de test de rigidité diélectrique sous tension continue utilisé dans le travail

Figure 3-9 : Mise en œuvre expérimentale des tests de rigidité diélectrique

3.4.2 Traitement statistique des données

Du fait de la distribution aléatoire des défauts structurels dans un échantillon, il est indispensable

de procéder à des essais sur plusieurs échantillons et en faire une analyse statistique. Des tests de

rigidité ont donc été effectués, à chaque température, sur plusieurs dizaines d’éprouvettes (50 à

25°C, 28 à 60°C et 45 à 85°C), de manière à minimiser, la dispersion des résultats. Les données

recueillies ont été traitées statistiquement en utilisant la loi de Weibull à deux paramètres

[WEI51] :

Banc

automatisé

Pupitre de

commande

Passage HT

Bac à huile

contenant

l’échantillon testé

Etuve

régulée

Passage HT

Bac à huile

Échantillon testé

Page 91: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

79

1 exp ii

EP E

3-1

avec P la probabilité de claquage, facteur d'échelle (qui représente la rigidité diélectrique pour

P() = 0,632) et le facteur de forme (lié à la dispersion des données).

La rigidité diélectrique iE a été calculée, pour chaque essai, à travers le rapport entre la tension

de claquage cU et l’épaisseur de l’échantillon (distance entre électrodes) d :

c

i

U iE

d

3-2

La probabilité de rupture P(Ei) a été approximée à l’aide de l’expression de Ross [GUI07,

ROS94] :

max

0, 44

0, 25

ii

NP E

N

3-3

avec iN et maxN respectivement le rang de l'échantillon et le nombre total d'échantillons claqués.

Généralement, la loi de Weibull est tracée dans un diagramme bi-logarithmique, de manière à

être aisément linéarisée à partir de la relation ‎3-1 [GUI07, ROS94] :

10 10 10

1log ln log log

1i

i

EP E

3-4

On peut alors déterminer par régression linéaire les valeurs des paramètres et .

On notera que le facteur d'échelle est en lien avec la rigidité diélectrique du diélectrique et que le

facteur de forme diminue quand la dispersion de la mesure augmente. Théoriquement, un

diélectrique ayant une bonne tenue en tension et une bonne homogénéité aura donc

respectivement un facteur d'échelle et un facteur de forme élevés.

3.5 Spectroscopie diélectrique

La spectroscopie diélectrique permet de déterminer la permittivité et le facteur de pertes d’un

diélectrique en fonction de la fréquence et, dans certains cas, en fonction de la tension appliquée.

On met ainsi en évidence la partie réelle r de la permittivité relative du matériau analysé, sa

Page 92: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

80

partie imaginaire r et éventuellement sa conductivité . Cette méthode, couplée à d'autres

techniques, fournit un apport important à la caractérisation des matériaux et à l'évaluation de leur

comportement dans le temps lorsqu'ils sont soumis à différentes contraintes telles que la

température, le champ électrique et l'humidité [RIE94, LI94, IVA02]. Dans le cas de notre

travail, la capacité des échantillons et leur facteur de pertes ont été suivis tout au long de l'étude

du vieillissement à long terme.

Les montages utilisés pour déterminer la permittivité et le facteur de pertes dépendent des

gammes de fréquences considérées. Pour des fréquences allant de quelques mHz à quelques

MHz, les mesures peuvent être réalisées principalement à l’aide :

Soit des montages en pont, consistant à faire varier des résistances et des capacités de

précision pour équilibrer un système [HIP61] ;

Soit par mesure du module et de la phase du courant lorsque l'échantillon est soumis à une

tension d'amplitude et de fréquence connues (mesure de l’impédance complexe de

l’échantillon). C'est ce dernier type de montage que nous avons utilisé (Figure ‎3-10).

Figure 3-10 : Principe de mesure de la permittivité et du facteur de pertes d'un échantillon isolant

Le principe de mesure est bien connu : si une tension sinusoïdale de pulsation

2 sinu t U t est appliquée à l'échantillon, un faible courant i(t), lié aux mouvements des

charges ou des dipôles présents dans le matériau, va s’établir. Ce courant est déphasé d’un angle

par rapport à la tension : . Dans le cas d'un diélectrique parfait, le

courant est en quadrature de phase avec la tension, mais dans la réalité, la valeur du déphasage est

inférieure à , et ceci en raison de la puissance dissipée dans le diélectrique par les

mouvements des dipôles et des charges libres qui essaient de suivre les oscillations du champ.

AV

U

Échantillon

Électrode

de garde

Electrode

de mesure

Système

de

traitement

et de

pilotage

2 sin i t I t

2

Page 93: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

81

Le matériau peut alors être modélisé électriquement par une capacité et une résistance mises en

parallèle, comme le montre la Figure ‎3-11.

Figure ‎3-11 : Modèle RC parallèle d'un diélectrique avec pertes

On peut alors écrire [BEA09]:

sinC

Z

,

cos

ZR

3-5

Avec 0 r

SC

d et

dR

S , S et d étant respectivement la surface et l'épaisseur de l'échantillon

plan, 1 sa résistivité et Z = U/I son impédance. Il en résulte :

0

sinr

d

Z S

3-6

tan tan2

r

r

3-7

On détermine ainsi la permittivité et le facteur de pertes tan du matériau. En reproduisant

l'expérience pour différentes valeurs de fréquence, on obtient le spectre diélectrique de

l'échantillon : f et f . L'analyse du spectre et de son évolution dans le temps permet

d'identifier les différents mécanismes de polarisation et de suivre le comportement du matériau

dans le temps.

Nous avons obtenu les spectres diélectriques de nos échantillons à l’aide du montage de la Figure

‎3-12 (analyseur d’impédance large bande de type Solartron SI 1260 connecté à une interface

diélectrique 1296). Les mesures ont été réalisées dans une gamme de fréquences allant de 0,1 Hz

R

C

R

C

Page 94: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

82

à 1 MHz, sous une tension alternative de 2 V efficace, sur des échantillons dans leur état initial et

sur des échantillons soumis au vieillissement électrothermique.

Figure 3-12 : Banc de spectroscopie diélectrique utilisé dans l’étude

Deux types d’éprouvettes ont été employés : des échantillons circulaires plans type 1 (diamètre

100 mm, épaisseur 1 mm et électrodes chrome/or de diamètre 52 mm, voir figure ci-après) et des

échantillons de type 2, qui ont été suivis tout le long du vieillissement (décrits à la section 3.11).

Figure 3-13 : Échantillons plans type 1 munis d’électrodes en or déposées sous vide

3.6 Détermination de la permittivité relative du matériau à partir de

mesures réalisées sur des échantillons type 2 (à épaisseur non

constante)

La configuration des échantillons utilisés lors du vieillissement ne permet pas de déterminer la

permittivité du matériau en utilisant l'expression de la capacité en géométrie plane car l'épaisseur

de ce type d'éprouvettes n'est pas constante. En revanche, la capacité C d'un échantillon type 2

peut être vue comme la mise en parallèle de deux capacités C1 et C2 : C1 correspond à la capacité

de la zone d’épaisseur constante d = 0,7 mm et de diamètre 42 mm (donc de surface S =

1385 mm2, 1 0 /r S dC ) alors que C2 correspond à la capacité de la zone se trouvant à la

périphérie des électrodes d’épaisseur variable (Figure ‎3-14).

Interface diélectrique

Analyseur

d'impédance

Capacités de référence

Porte-échantillon

Page 95: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

83

On peut ainsi écrire :

1 2 1 2 1 11 gC C C C C C C 3-8

A partir des dimensions de chaque échantillon (Figure 3-6), nous avons déterminé par simulation

le facteur de géométrie 1,37g . Ceci permet d’extraire la valeur de la capacité plan-parallèle

C1 directement de la capacité mesurée C, puis r à l’aide de l’expression de C1.

Nous avons pu vérifier expérimentalement que les valeurs de permittivité obtenues à partir des

mesures effectuées sur des échantillons type 2 étaient similaires à celles déterminées en utilisant

des échantillons plans (type 1).

Figure 3-14 : Schéma équivalent capacitif d'un échantillon type 2

Figure 3-15 : Simulation de la répartition du potentiel dans un échantillon type 2

en régime électrostatique

67 mm

5 mm

42 mm

52 mm

0,7 mm C2C1

C

Page 96: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

84

3.7 Résistivité volumique et caractéristiques courant-tension

La résistivité volumique (ou transversale) d’un matériau v est le rapport entre l’intensité du

champ électrique continu et homogène E à travers le matériau et la densité du courant J qui le

parcourt en régime établi (permanent) :

V

C

E U S

J I d

3-8

avec U la tension appliquée à l’échantillon, IC le courant qui le traverse en régime permanent

(courant de conduction), S la section de l'échantillon et d son épaisseur. Ainsi, en appliquant une

tension de valeur connue U à un échantillon dont on connaît les dimensions et en mesurant le

courant qui le parcourt, on peut déterminer sa résistivité volumique.

Lors de la mesure, le calcul et l’interprétation des valeurs, il faut néanmoins prendre en compte la

dualité isolant/diélectrique. En effet, lorsqu'un diélectrique est soumis à une tension continue, il

apparait d’abord un courant transitoire (dit courant d’absorption), qui décroit en fonction du

temps. Il traduit les différents phénomènes liés aux déplacements localisés des charges dans le

matériau (polarisation) et/ou aux interfaces entre celui-ci et ses électrodes. La durée de ce régime

transitoire dépend de la structure du matériau et du champ appliqué, et peut être très longue avant

d'obtenir une valeur stable du courant IC, qui correspond uniquement à la conduction (Figure

‎3-17). Dans le cas des « bons » isolants, le régime permanent n'est atteint en pratique qu'après des

temps extrêmement longs (plusieurs heures, voire quelques jours ou semaines). Pour cette raison,

les calculs sont le plus souvent effectués à partir des courants pseudo-permanents, c'est à dire

dont la variation en fonction du temps est très faible ou en-dessous du seuil de sensibilité des

appareils de mesure. Une fois le régime quasi-permanent atteint, l’échantillon est mis en court-

circuit pendant une durée équivalente à celle de la mesure afin d’assurer sa dépolarisation

complète (résorption).

Outre la valeur de la résistivité, cette technique permet l'identification des mécanismes de

conduction prépondérants aux différents niveaux du champ appliqué et aux différentes

températures et la détermination des champs à partir desquels le courant n’est plus proportionnel

au champ (« seuils » de non linéarité). En effet, lorsque la dépendance J(E) observée présente un

bon accord avec l’un des modèles présentés au chapitre 2, il est possible d'extraire les paramètres

de transport du matériau.

Page 97: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

85

Figure 3-16 : Courants d’absorption, de conduction et de résorption

Pour éliminer les courants surfaciques du circuit de mesure et pour minimiser les effets de bord

inhérents aux tensions que nous souhaitions appliquer pour aller jusqu’à des valeurs élevées du

champ électrique, nous avons utilisé le montage de la Figure ‎3-17 et des échantillons type 2

préparés selon la Figure ‎3-18. Les tensions appliquées aux électrodes (jusqu’à 27 kV) ont été

délivrées par une source haute tension continue stabilisée FUG HCP 140-35000. Les mesures de

courant ont été effectuées à l’aide d’un électromètre Keithley 6517A. Chaque éprouvette a été

pourvue, sur une des faces, de 2 électrodes concentriques : l’une en forme de disque, composée

d’une couche d’or superposée à une couche de chrome, de diamètre 30 mm (électrode de

mesure), l’autre de type couronne de diamètre intérieur 34 mm, ayant pour rôle de dériver les

courants superficiels vers la terre (anneau de garde). Sur l’autre face, une électrode circulaire de

54 mm de diamètre a été déposée (électrode « haute tension », servant à appliquer le potentiel).

Afin d’allonger les lignes de contournement, un tube isolant de hauteur 100 mm et de diamètre

légèrement supérieur à l’électrode haute tension a été également collé sur chaque échantillon.

Figure 3-17 : Mise en œuvre expérimentale pour la détermination des caractéristiques I-V

Pendant la mesure, chaque échantillon a été placé dans une étuve régulée et porté d’abord à la

température désirée. Les mesures ont été effectuées aux températures suivantes : 25°C, 60°C,

Courant

Temps (s)

Resorption

Conduction

Resorption

Absorption

pA

Echantillon

Alimentation

HT

Anneaux de garde

Etuve

Electrode

de mesure

Électromètre

Page 98: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

86

85°C et 105°C. Les caractéristiques courant-tension (I-V) à une température donnée ont été

tracées à partir des valeurs du courant mesuré après 10 000 s, ce qui correspond dans notre cas à

un régime quasi permanent, comme il sera montré par la suite.

Figure ‎3-18 : Échantillons employés pour la mesure de résistivité volumique

et des caractéristiques I-V

3.8 Résistivité surfacique

La résistivité surfacique (ou superficielle) S d’un matériau isolant solide est généralement

déterminée en utilisant le montage de la Figure ‎3-19 et en calculant le rapport entre l’intensité du

champ électrique continu E à travers la surface du matériau et la densité de courant en régime

établi surfJ qui traverse les couches superficielles du matériau :

s

surf surf

E U p

J I g

3-9

Avec U la tension appliquée à la surface de l’échantillon, surfI le courant qui traverse la surface

de l’échantillon en régime permanent, p le périmètre de l’électrode centrale et g la distance entre

les deux électrodes illustrées dans la Figure ‎3-19 [NOR80].

54mm

52mm

30mm

Recto Verso

34mm

67

mm

0.7mm

Page 99: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

87

Il est à noter que l’expression précédente n’est valable que si le rapport R2/R1 des rayons des deux

électrodes est proche de 1, car vu la géométrie radiale du montage, la dépendance densité de

courant/intensité du champ électrique est donnée par une loi logarithmique.

En réalité, 2 12 lns surfU I R R . Le logarithme doit donc pouvoir être approximé par

un développement limité au premier ordre sans trop d’erreur, ce qui implique des électrodes de

rayons proches et supérieurs d’au moins un ordre de grandeur à la distance inter-électrodes g.

Figure ‎3-19 : Schéma du montage utilisé pour les mesures de résistivité surfacique

D’autre part, le régime permanent n'étant atteint, dans le cas des mesures surfaciques, qu'après

des temps extrêmement longs en raison de l'influence de l'environnement de mesure (humidité,

particules chargées, rugosité du matériau...), la norme CEI 60093 [NOR80] recommande de

calculer la valeur de la résistance superficielle après application de la tension pendant 1 minute,

même si le régime établi n'a pas été atteint. Nous avons donc calculé des valeurs de résistivité

après 1 minute d’application de la tension, mais également en régime quasi-permanent, lorsque

cela a été possible dans un temps raisonnable.

Dans le même sens, les phénomènes de conduction surfaciques étant fortement dépendants des

facteurs environnementaux, il est indispensable de spécifier et de bien contrôler les conditions

dans lesquelles sont faites les mesures (tension, durée, température, humidité...).

Pour s’affranchir de l’influence de l’humidité extérieure, une cellule spéciale a été conçue et

réalisée pour l’étude. Les détails concernant cette cellule sont donnés dans la Figure ‎3-20. Elle

permet de remplacer l’air ambiant en contact avec l’échantillon par un gaz sous pression. Les

mesures de résistivité superficielle ont été réalisées avec ce dispositif, sous atmosphère d’azote à

0 bar relatif et sous température contrôlée.

pA

Échantillon

Alimentation HT

Etuve

R2

R1 g

Page 100: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

88

Figure 3-20 : Cellule réalisée pour les mesures de la résistivité surfacique

Le profil des échantillons (type 3) est précisé dans la Figure ‎3-21. Il s’agit d’éprouvettes

circulaires planes, de diamètre 100 mm et d'épaisseur 3 mm, ne comportant aucune couche

conductrice. Le diamètre de la pièce circulaire en contact avec la surface sur laquelle la tension

est appliquée est égal à 50 mm. La distance entre cette pièce et la couronne métallique qui sert

d’électrode de masse est g = 5 mm. La face opposée de l’échantillon est en contact avec le fond

de la cellule, relié à la masse, afin de s'affranchir du courant transversal. Les électrodes sont

maintenues en contact avec la surface de l’échantillon par un système de bagues-ressorts

comprimés lorsqu’on ferme la cellule. Afin de permettre un placement parfaitement concentrique

des électrodes, les échantillons ont été usinés de manière à posséder sur la surface deux

épaulements circulaires de hauteur 0,5 mm et de largeur g = 5 mm, qui servent de guide ; par

ailleurs, l’épaulement intérieur représente la zone de mesure.

L’étanchéité de l’ensemble est assurée par des joints capables de supporter des températures

jusqu’à 120°C.

Page 101: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

89

Figure 3-21 : Échantillons plans utilisés pour les mesures de résistivité surfacique

Comme pour les mesures en volume, les mesures de résistivité surfacique ont été effectuées aux

températures de 25°C, 60°C, 85°C, 105°C et 120°C. Les tensions appliquées aux électrodes

(U = 1, 2 et 3 kV) ont été délivrées par une source haute tension (Fug HCP 35-12500). Les

mesures de courant ont été effectuées à l’aide d’un électromètre Keithley 6517 piloté par

ordinateur.

Pour chaque échantillon testé, la procédure de mesure a été la suivante :

1. Placement de l'échantillon dans la cellule à température ambiante ;

2. Réglage de la pression de l’azote à 0 bar relatif ;

3. Application de la tension (1, 2 puis 3 kV) et mesure, pour chaque valeur de tension, du

courant d'absorption (10000 s) et de résorption (10000 s) ;

4. Passage à la température suivante ;

5. Répétition des étapes 3 et 4 pour chaque température.

Page 102: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

90

Les valeurs de résistivité surfacique ont été calculées pour chaque tension appliquée et à chaque

température avec l'équation indiquée au début de cette section.

3.9 Cartographie du potentiel de surface

Des mesures de potentiel de surface ont également été effectuées sur les mêmes échantillons que

ceux utilisés pour les mesures de la résistivité surfacique afin d’évaluer l’homogénéité des

propriétés de conduction surfaciques. Pour cartographier le potentiel de surface, un dispositif de

charge couronne et une sonde électrostatique haute tension ont été incorporés à un système de

déplacement en trois dimensions (Figure ‎3-22). Le chargement a été effectué par décharge

couronne produite par une source haute tension continue connectée à un système pointe-grille

placé à 1 mm au-dessus de la surface de l’échantillon. Le dispositif de charge est entrainé à 20

mm/s au-dessus d'un anneau de 5 mm de large et de 55 mm de diamètre, qui correspond à l'écart

entre l'électrode gardée et l'électrode de garde dans les mesures de la résistivité surfacique.

Le potentiel de la grille est mesuré par l'intermédiaire d'une résistance de 200 MΩ en série avec

un électromètre Keithley. Toutes les mesures ont été effectuées après la charge à un potentiel de

grille de l'ordre de 1 kV. Le potentiel de surface a été mesuré avec une sonde électrostatique

haute tension Trek 347 placée à 1 mm au-dessus de la surface de l'échantillon. Les mesures de

potentiel de surface ont été effectuées régulièrement toutes les 10 minutes pendant 14 heures.

Chaque mesure a consisté en 5 cartographies de potentiel à 20 mm/s. Lors de l'étape de charge

comme durant la mesure, chaque échantillon a été placé sur une plaque métallique reliée à la

terre. Le chargement et la mesure du potentiel ont été tous les deux réalisés à température

ambiante et à 20% d’humidité relative.

Figure ‎3-22 : Dispositif utilisé pour la cartographie du potentiel de surface

Page 103: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

91

3.10 Mesures de charges d'espace

Des mesures de charges d’espace ont été réalisées sur des échantillons plans type 1 munis

d’électrodes en chrome/or, identiques à ceux utilisés pour la spectroscopie diélectrique, ainsi que

sur les éprouvettes de type 2 soumises au vieillissement longue durée (voir section suivante).

Le banc de mesures est composé de deux cryo-thermostats contenant dans leurs réservoirs un

liquide caloporteur (mélange d’eau et d’éthanol). Ce liquide est régulé à la température

0 25T C dans le premier, et à 1 5T C dans le second. Il permet d’appliquer l’échelon

thermique 1 0 30T T T C à travers un radiateur par l’intermédiaire d’un système

d’électrovannes pilotées par ordinateur via une carte d’acquisition (Figure ‎3-23). L’échantillon à

analyser est placé sur le radiateur et maintenu à l’aide d’un système de serrage à couple constant.

Le système échantillon-radiateur se trouve dans une cellule en aluminium qui joue le rôle de cage

de Faraday.

La réponse de l’échantillon à l’échelon thermique est mesurée à l’aide d’un amplificateur de

courant de type Keithley 428 et enregistré sur ordinateur à partir d’une connexion GPIB vers la

carte d’acquisition. Son amplitude (quelques dizaines à quelques centaines de pico-ampères),

dépend de la quantité de charges stockée dans l’échantillon, de sa distribution et des paramètres

du matériau. Après la mesure, l’échantillon est ramené à température ambiante pour restaurer les

conditions initiales. Il est alors possible de répéter la mesure, soit pour vérifier sa reproductibilité,

soit pour suivre la décharge de l’échantillon.

Figure 3-23 : Banc employé dans l’étude pour les mesures de charges d’espace

Cryo-thermostat

à T0

Cryo-thermostat

à T1

Amplificateur de

courant

Cellule de

mesure

Ordinateur de

contrôle et

d’acquisition

Page 104: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

92

3.11 Vieillissement électrothermique du matériau

Afin de déterminer l’effet de l’exposition du matériau à des contraintes électrothermiques

prolongées, des vieillissements accélérés ont été mis en place. Les contraintes liées à la

représentativité des résultats et à l’utilisation souhaitée du matériau ont imposé les conditions

suivantes :

Vieillissement pour 3 températures, supérieures et inférieures à la température de

transition vitreuse du matériau (environ 112°C, comme nous avons pu le voir), afin

d'observer un éventuel effet de la transition vitreuse sur l'évolution des propriétés

diélectriques du matériau ;

Vieillissement pour 3 valeurs de champ électrique (supérieures et inférieures au champ

seuil déterminé par des mesures courant/tension) ;

Vieillissement simultané de plusieurs échantillons dans une même cellule pour la même

température afin d’augmenter la fiabilité des résultats ;

Utilisation d'un liquide ou d’un gaz isolant qui soit simple à manipuler et en même temps

compatible avec le matériau étudié.

Les éprouvettes utilisées pour les vieillissements électrothermiques ont été de type 2 (Figure ‎3-6).

Elles ont été munies sur chaque face d'un dépôt or/chrome de diamètre 52 mm afin de permettre

l’application de la contrainte électrique et la réalisation de mesures périodiques de charges

d'espace et de spectroscopie diélectrique (Figure ‎3-24).

Figure 3-24 : Échantillons utilisés pour les vieillissements électrothermiques (faces A et B)

Afin de permettre le vieillissement simultané de plusieurs échantillons sous température et

atmosphère contrôlées, il a été nécessaire de concevoir et réaliser des cellules de vieillissement

dont le schéma est illustré dans la Figure ‎3-25. Le partenaire industriel a ainsi réalisé trois

cellules de ce type, chacune ayant été portée à une température différente pendant le

vieillissement. Dans chacune des trois cellules, 16 échantillons ont été vieillis : 15 sous contrainte

électrothermique et un échantillon « témoin », qui n’a subi que l’effet de la température. La

Figure ‎3-26 montre la disposition des échantillons dans une cellule de vieillissement. Pour

appliquer des valeurs différentes du champ électrique à des séries de 5 échantillons dans chaque

Page 105: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

93

cellule, nous avons réalisé des circuits diviseurs 1/3 – 2/3 que nous avons couplés à des

alimentations haute tension et à chaque cellule.

Pour limiter les phénomènes de décharge autour des électrodes et éviter l’utilisation de liquides

diélectriques, les vieillissements ont été réalisés sous azote. Avant chaque mise sous tension, l’air

contenu dans chaque cellule a été éliminé à l’aide d’une pompe (vide primaire) et a été remplacé

par de l’azote à une pression de 1 bar relatif, gardée constante tout au long du vieillissement.

En utilisant les valeurs « seuils » obtenues après étude des mécanismes de conduction, des

champs électriques de 4, 8 et respectivement 12 kV/mm ont été appliqués aux échantillons. Les

vieillissements réalisés dans chaque cellule sont récapitulés ci-après :

15 échantillons vieillis sous 4, 8 et 12 kV/mm continu à 125°C (5 échantillons pour

chaque valeur de champ) et 1 échantillon vieilli seulement thermiquement à 125°C,

pendant 12 mois ;

15 échantillons vieillis sous 4, 8 et 12 kV/mm à 105°C (5 échantillons pour chaque valeur

du champ) et 1 échantillon vieilli seulement thermiquement à 105°C, pendant 12 mois ;

15 échantillons vieillis sous 4, 8 et 12 kV/mm à 85°C (5 échantillons pour chaque valeur

du champ) et 1 échantillon vieilli seulement thermiquement à 85°C, pendant 12 mois.

Figure 3-25 : Cellule de vieillissement sous atmosphère contrôlée

Page 106: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

94

Dans le but de suivre l'évolution des propriétés du matériau en fonction du temps de mise sous

contrainte, les échantillons ont été prélevés périodiquement des cellules (après arrêt de la

contrainte électrique et refroidissement), les charges d'espace et les spectres diélectriques de

chaque échantillon étant ensuite évalués selon les méthodes et les procédures indiquées aux

sections précédentes.

Figure 3-26 : Schéma et photographie d’un dispositif de vieillissement

3.12 Conclusion

Dans cette partie du mémoire, nous avons présenté les différents aspects expérimentaux liés aux

phases de caractérisation et de vieillissement de la résine époxy chargée d’alumine. Plusieurs

méthodes ont été détaillées, notamment :

- les tests de rigidité diélectrique pour déterminer le champ électrique maximal susceptible

d’être tenu par le matériau ;

- les mesures de courant volumique afin d’identifier les principaux mécanismes d’injection

de charges et de conduction ;

- la spectroscopie diélectrique pour observer les changements dans la structure du

matériau ;

- les mesures de charges d’espace pour évaluer la faculté du matériau à accumuler les

charges électriques.

Pont diviseur de tension

Alimentation Haute tension

Etuve

1

3V

2

3V V

V

P Manomètre

Page 107: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 3 - Mise en œuvre expérimentale

95

Différents dispositifs expérimentaux ont également été développés et réalisés en collaboration

avec le partenaire industriel. Ainsi, une cellule de mesure de résistivité surfacique, permettant

notamment des mesures sous atmosphère contrôlée, a été spécialement conçue pour cette étude.

Les systèmes de conditionnement longue durée mis en place ont permis d’effectuer des

vieillissements électrothermiques sous trois valeurs de champ simultanément et sous atmosphère

contrôlée.

L’ensemble des concepts et techniques expérimentales décrits dans ce chapitre nous ont permis à

la fois de caractériser les propriétés électriques de la résine dans son état initial et de suivre son

évolution en fonction du temps de mise sous contrainte.

Page 108: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...
Page 109: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

CHAPITRE 4

Résultats expérimentaux

Page 110: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

98

4.1 Introduction

Ce chapitre est dédié aux travaux expérimentaux que nous avons menés pour déterminer

les propriétés diélectriques de notre composite et pour analyser les phénomènes et mécanismes

physiques qui les induisent et/ou les affectent.

Après avoir présenté le comportement diélectrique à faible champ du matériau en fonction de la

fréquence et de la température, nous exposerons les expériences qui nous ont permis d’étudier et

de déterminer les mécanismes de conduction volumique à des champs continus élevés (jusqu’à

40 kV/mm) et à des températures comprises entre 25°C et 105°C. Une étude des propriétés

surfaciques sera également présentée, puis nous analyserons les résultats de tests de rigidité

diélectrique et de mesures de charges d’espace que nous avons pratiqués après conditionnement

de l’époxy sous divers champs continus et à plusieurs températures.

La dernière partie du chapitre sera consacrée à l’étude de l’évolution des propriétés diélectriques

du composite suite à des conditionnements de longue durée (1 an) sous différentes contraintes

thermoélectriques. Nous nous intéresserons au suivi et à l’analyse de la capacité, du facteur de

pertes, du champ électrique résiduel du matériau durant le vieillissement et à l’évolution de sa

rigidité diélectrique après l’application des contraintes longue durée.

4.2 Permittivité et facteur de pertes

Les spectres diélectriques du matériau, obtenus sur des éprouvettes vierges de type 1 à 25, 60, 85,

105 et 125°C dans une gamme de fréquences comprise entre 0,1 Hz et 1 MHz, sont représentés

dans les figures (Figure ‎4-1 à Figure ‎4-16).

L’examen des spectres révèle des valeurs de la permittivité relative entre 5,7 et 10,2, alors que le

facteur de pertes varie dans l’intervalle [0,01 ; 0,76]. Une forte dépendance avec la fréquence est

observée. En dessous de 102 Hz, on constate une forte hausse de la permittivité et des pertes

diélectriques lorsque la fréquence diminue. Cette hausse est d’autant plus marquée que la

température augmente. Une image plus claire des variations avec la température est mise en

évidence par les représentations graphiques des Figures 4-2 et 4-3, tracées pour trois valeurs de la

fréquence (0,1 Hz, 50 Hz et 316 kHz).

Il ressort une forte augmentation du facteur de pertes au voisinage de la transition vitreuse et au-

delà (Tg = 112°C pour notre matériau à l’état vierge, voir section 3.2.3), montrant la corrélation

entre les propriétés mécaniques et diélectriques du matériau.

Page 111: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

99

Figure ‎4-1 : Permittivité diélectrique relative et facteur de pertes du matériau en fonction

de la fréquence pour diverses températures

Figure ‎4-2 : Variation de la permittivité relative du matériau à 0,1 Hz, 50 Hz et 316 kHz

avec la température

0,001

0,01

0,1

1

10

100

1000

0,1 1 10 100 1000 10000 100000 1000000

0

2

4

6

8

10

0,1 1 10 100 1000 10000 100000 1000000

Fa

cte

ur

de

pe

rte

s

Fréquence [Hz]

Pe

rmit

tiv

ité

re

lati

ve

Epsilon r 25 °C

Epsilon r 60°C

Epsilon r 85°C

Epsilon r 105°C

Epsilon r 125°C

Tan Delta 25°C

Tan Delta 60°C

Tang delta 85°C

Tang Delta 105°C

Tang Delta 125°C

5,5

6,5

7,5

8,5

9,5

10,5

20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 120 130

Température [°C]

Pe

rmit

tiv

ité

re

lati

ve

Valeurs permittivité avec T

Epsilon r 0.1 Hz

Epsilon r 50 Hz

Epsilon r 316 kHz

Page 112: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

100

Figure 4-3 : Variation du facteur de pertes du matériau à 0,1 Hz, 50 Hz et 316 kHz avec la

température

L’augmentation simultanée de la permittivité semble ainsi indiquer que ce comportement est

l’image de l’orientation de longues chaines polaires du polymère (« chaines principales »),

usuellement appelée « relaxation ». Ceci correspond à la zone des fréquences basses du spectre

fréquentiel, où ces chaines ayant une inertie importante sont capables de suivre les variations du

champ électrique alternatif appliqué. D’autre part, des mécanismes liés à la relaxation des charges

d’espace et à la conductivité se font également sentir en basse fréquence, comme nous l’avons

indiqué au Chapitre 2. Le comportement basse fréquence du composite présente par ailleurs un

intérêt particulier pour les applications à courant continu. Afin d’analyser ces phénomènes, nous

allons utiliser les représentations graphiques des Figures 4-4 à 4-16.

On rappelle qu’une contribution majoritaire de la conduction (« electrical conductivity

relaxation ») se traduit par une pente égale à -1 dans la permittivité imaginaire lorsqu’on la

représente en échelle logarithmique, associée à une valeur constante de la permittivité réelle. Les

représentations de la Figure ‎4-4 (spectres de la permittivité imaginaire entre 0,1 Hz et 100 Hz)

montrent que, quelle que soit la température, les pentes calculées sont bien supérieures à -1.

D’autre part, la première figure du présent chapitre montre que la permittivité du matériau

augmente fortement lorsque la fréquence diminue en-dessous de 100 Hz. Même si l’existence de

phénomènes de conduction n’est pas à exclure dans la gamme de fréquences considérée, leur

contribution aux propriétés diélectriques du matériau au-dessus de 0,1 Hz est donc négligeable.

0,001

0,01

0,1

1

20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 120 130

Facte

ur

de p

ert

es

Température [°C]

Valeurs tan delta avec T

Tan Delta 0.1 Hz

Tan delta 50 Hz

Tan delta 316 kHz

Page 113: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

101

Figure 4-4 : Variation de la permittivité imaginaire dans la partie basse du spectre diélectrique du

matériau pour les différentes températures étudiées

Un autre phénomène pouvant se manifester de manière significative à des fréquences basses est

celui de « conductivité non-ohmique », à savoir le déplacement localisé de porteurs non liés dans

le matériau, qui s’accumulent aux interfaces et aux électrodes (polarisation interfaciale ou de

Maxwell-Wagner [VAN67, MAX81]). Elle implique une pente de r supérieure à -1 en

coordonnées log-log. On a affaire dans ce cas non seulement à une augmentation du facteur de

pertes, mais également de la permittivité, car l’accumulation de charges aux diverses interfaces

fait augmenter les charges d’influence aux électrodes et donc la valeur de la permittivité [JON 83,

JON 75, ADA 89, COE 79]. Ceci semble effectivement être le cas pour notre matériau dans la

partie basse du spectre. Pour conclure à la prédominance de ce phénomène de « dispersion basse

fréquence » [JON 83, DIS 84], il faudrait que les tracés des permittivités réelle et imaginaire

soient parallèles, de pente proche de -0,991 et de rapport ~ cotan (n/2) (avec n (0, 1)), donc

supérieur à 36 [JON 83]. Les représentations suivantes, réalisées pour la décade [0,1 Hz ; 1 Hz]

montrent que l’on est loin de ces conditions. Néanmoins, la pente de Caugmente sensiblement

en valeur absolue au-delà de 105°C (elle vaut -0,8 à 125°C), la tendance observée ne laissant

aucun doute quant à son passage largement au-dessus de C’ pour des valeurs de la fréquence

inférieures à 10-2

Hz.

y = 0,126x-0,10

R² = 0,967 y = 0,184x-0,17

R² = 0,999

y = 0,212x-0,19

R² = 0,997

y = 0,352x-0,26

R² = 1

y = 1,228x-0,79

R² = 0,999

y = 0,997x-0,18

R² = 0,892

0,01

0,1

1

10

0,1 1 10 100

Pe

rmit

tiv

ité

re

lati

ve

im

ag

ina

ire

Fréquence [Hz]

Epsilon r imag 25°C

Epsilon r imag 60°C

Epsilon r imag 85°C

Epsilon r imag 105°C

Epsilon r imag 125°C

Page 114: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

102

De plus, si l’on regarde la partie du spectre à 125°C comprise entre 0,1 Hz et 1 Hz (Figure ‎4-8),

on perçoit aisément un point d’inflexion autour de 1 Hz qui traduit l’augmentation de la

polarisation par charges d’espace et/ou de la conduction, qui commencent à se manifester de

manière prépondérante à cette température dès que les fréquences diminuent en-dessous du Hertz.

Figure ‎4-5 : Capacités réelle et imaginaire mesurées à 25°C entre 0,1 Hz et 1 Hz

Figure 4-6 : Capacités réelle et imaginaire mesurées à 105°C entre 0,1 Hz et 1 Hz

y = 1E-10x-0,014

R² = 0,9976

y = 2E-12x-0,16

R² = 0,9981E-12

1E-11

1E-10

1E-09

1E-12

1E-11

1E-10

1E-09

0,1 1

Cap

acit

é

imag

inair

e

Fréquence [Hz]

Cap

acit

é

réelle

Spectre résine chargée d'alumine 25 °C

Capa réelle

Capa imaginaire

Loi de puissance (C réelle)

Loi de puissance (C imag)

y = 1E-10x-0,035

R² = 0,9988

y = 6E-12x-0,265

R² = 0,9999

1E-12

1E-11

1E-10

1E-09

1E-12

1E-11

1E-10

1E-09

0,1 1

Cap

acit

é

imag

inair

e

Fréquence [Hz]

Cap

acit

é

réelle

Spectre résine chargée d'alumine 105 °C

Capa réelle

Capa imaginaire

Loi de puissance (C réelle)

Loi de puissance (C imag)

Page 115: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

103

Figure 4-7 : Capacités réelle et imaginaire mesurées à 125°C entre 0,1 Hz et 1 Hz

Figure 4-8 : Partie du spectre diélectrique du matériau mesuré à 125°C entre 0,1 Hz et 10 Hz

On conclut ainsi que les variations observées dans les spectres entre 0,1 Hz et 100 Hz sont

principalement l’image, notamment en-dessous de 105°C, de l’orientation des chaînes principales

du polymère (pic principal ou relaxation ). Ce large pic de relaxation se déplace vers les

fréquences hautes avec la température, ce que l’on aperçoit dans les Figures de 4-9 à 4-13 à

travers un étalement de l’épaulement basse fréquence de la région des Hz (à 25°C) vers celle des

y = 1E-10x-0,076

R² = 0,9359

y = 2E-11x-0,797

R² = 0,9993

1E-11

1E-10

1E-09

1E-11

1E-10

1E-09

0,1 1

Cap

acit

é r

éelle

Fréquence [Hz]

Cap

acit

é i

mag

ion

air

e

Spectre résine chargée d'alumine 125 °C

Capa réelle

Capa imaginaire

Loi de puissance (C réelle)

Loi de puissance (C imag)

0,008

0,08

0,8

0,1 1 10

5,6

6,6

7,6

8,6

9,6

10,6

0,1 1 10

Fa

cte

ur

de

pe

rte

s

Fréquence [Hz]

Pe

rmit

tiv

ité

re

lati

ve

Spectre résine chargée d'alumine 125 °C

Epsilon r Tan Delta

Page 116: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

104

kHz (à 105°C). Bien que relativement difficile à identifier en-dessous de 105°C en raison de sa

largeur et de son centrage « à gauche », hors de notre spectre, on identifie bien ce pic à 125°C, où

il est centré sur 10 Hz (« Pic principal », Figure ‎4-13). Une contribution significative de la

conduction et de la polarisation interfaciale devrait se manifester, en-dessous de 100°C, à des

fréquences plus basses, mais elle devient significative dès 1 Hz au-dessus de la Tg, tel qu’on peut

l’apercevoir à 125°C.

Ces augmentations des pertes diélectriques et des niveaux de conduction dès qu’on s’approche de

100°C montrent que, lors de l’utilisation en basse fréquence (et donc en régime continu) de ce

type de matériau, des échauffements et des distorsions importantes du champ électrique sont

susceptibles d’apparaître. La suite du présent chapitre, notamment l’étude des mécanismes de

conduction, nous permettra de mieux appréhender ces phénomènes. En effet, vu les temps

nécessaires pour réaliser des mesures de spectroscopie diélectrique à des fréquences inférieures

au dixième de Hz et la nécessité de pouvoir appliquer aux échantillons des tensions bien

supérieures à celles délivrées par les spectroscopes diélectriques, nous avons poursuivi l’analyse

du matériau en régime continu à travers des mesures de courants de conduction et de charges

d’espace.

Figure ‎4-9 : Spectre diélectrique du matériau mesuré à 25°C entre 0,1 Hz et 1 MHz

0,008

0,08

0,1 1 10 100 1000 10000 100000 1000000

5,6

5,8

6

6,2

6,4

6,6

6,8

7

0,1 1 10 100 1000 10000 100000 1000000

Fa

cte

ur

de

pe

rte

s

Fréquence [Hz]

Pe

rmit

tiv

ité

re

lati

ve

Spectre résine chargée d'alumine 25 °C

Epsilon r Tan Delta

Pic tertiairePic secondaire

Pic principal

25°C

Page 117: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

105

Figure 4-10 : Spectre diélectrique du matériau mesuré à 60°C entre 0,1 Hz et 1 MHz

Figure 4-11 : Spectre diélectrique du matériau mesuré à 85°C entre 0,1 Hz et 1 MHz

0,008

0,08

0,1 1 10 100 1000 10000 100000 1000000

5,6

5,8

6

6,2

6,4

6,6

6,8

7

0,1 1 10 100 1000 10000 100000 1000000

Fa

cte

ur

de

pe

rte

s

Fréquence [Hz]

Pe

rmit

tiv

ité

re

lati

ve

Spectre résine chargée d'alumine 60 °C

Epsilon r Tan Delta

Pic secondaire

Pic tertiaireExtrémité

pic principal

60°C

0,008

0,08

0,1 1 10 100 1000 10000 100000 1000000

5,6

5,8

6

6,2

6,4

6,6

6,8

7

0,1 1 10 100 1000 10000 100000 1000000

Fa

cte

ur

de

pe

rte

s

Fréquence [Hz]

Pe

rmit

tiv

ité

re

lati

ve

Spectre résine chargée d'alumine 85 °C

Epsilon r Tan Delta

Pic secondaire

Extrémitépic principal

85°C

Page 118: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

106

Figure 4-12 : Spectre diélectrique du matériau mesuré à 105°C entre 0,1 Hz et 1 MHz

Figure 4-13 : Spectre diélectrique du matériau mesuré à 125°C entre 0,1 Hz et 1 MHz

Les spectres précédents mettent aussi en évidence des relaxations secondaires. Elles ont des

amplitudes plus faibles et sont masquées sur des zones de largeur importante par la relaxation

principale ; elles sont donc moins apparentes. Il s’agit de pics reliés à des mouvements plus ou

moins locaux : des mouvements de type manivelle de la chaîne principale qui entraînent une

0,008

0,08

0,1 1 10 100 1000 10000 100000 1000000

5,6

5,8

6

6,2

6,4

6,6

6,8

7

7,2

7,4

0,1 1 10 100 1000 10000 100000 1000000

Facte

ur

de p

ert

es

Fréquence [Hz]

Perm

itti

vit

é r

ela

tiv

e

Spectre résine chargée d'alumine 105 °C

Epsilon r Tan Delta

Pic secondaire

Extrémitépic principal

105°C

0,008

0,08

0,8

0,1 1 10 100 1000 10000 100000 1000000

5,6

6,6

7,6

8,6

9,6

10,6

0,1 1 10 100 1000 10000 100000 1000000

Fa

cte

ur

de

pert

es

Fréquence [Hz]

Pe

rmit

tiv

ité

re

lati

ve

Spectre résine chargée d'alumine 125 °C

Epsilon r Tan Delta

125°C

Pic principal

Polarisation interfaciale,conduction

Page 119: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

107

modification des conformations de la partie de chaîne considérée, des mouvements des groupes

latéraux, des mouvements à l’intérieur des groupes latéraux, ou des combinaisons des

mouvements précédents (intra et inter chaînes). On peut ainsi apercevoir un pic centré sur 15 Hz

à 25°C (« Pic secondaire », Figure ‎4-9), qui se déplace vers 1500 Hz à 60°C, puis vers 30 kHz à

85°C et vers 210 kHz à 105°C. La représentation de la variation de la fréquence de ce pic avec

l’inverse de la température (ln(f) = f(1/T), Figure ‎4-14) montre des points de données bien alignés

sur une droite, satisfaisant donc une équation du type f = f0 exp[-Ea/(kT)], caractéristique d’un

processus de type Arrhenius avec une énergie d’activation Ea. Cette représentation permet de

calculer Ea = 0,51 eV (49 kJ/mol), valeur relativement faible et caractéristique de mouvements de

chaînes se trouvant dans des régions de faible densité de réticulation, d’unités époxydes qui n’ont

pas réagi lors de la réticulation ou d’autres mouvements locaux cités ci-avant.

Figure 4-14 : Représentation de type Arrhenius du pic secondaire observé

Un autre pic (« Pic tertiaire ») peut être identifié à 25°C et à 60°C dans la zone des 80-150 kHz,

avec un déplacement vers 300 kHz à 85°C. Il est probable que ce pic soit relié au comportement

de l’alumine contenue dans le composite, tel que le montre le spectre de l’Al2O3 que nous avons

mesuré et représenté dans la Figure ‎4-15. Enfin, les remontées de la permittivité et du facteur de

pertes que l’on peut observer lorsque l’on approche du MHz ne sont pas à relier à la morphologie

du matériau car dues à des effets inductifs, souvent remarqués en haute fréquence en présence

d’électrodes métalliques.

Les résines époxydes étant connues comme des matériaux qui absorbent facilement de l’eau

(notamment en présence de charges minérales), nous avons essayé d’estimer l’effet de cette

absorption dans le composite. Dans ce but, nous avons relevé le spectre diélectrique d’un

y = -5858,8x + 20,818R² = 0,9997

1

1,5

2

2,5

3

3,5

4

4,5

5

5,5

6

0,002 0,0025 0,003 0,0035 0,004

ln(f

[H

z])

1/T [K-1]

ln(f) = f(1/T) pic secondaire

Page 120: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

108

échantillon avant et après exposition pendant 24 heures à un taux d’humidité de 80% et à une

température de 60°C. Nous avons déterminé par pesée la prise en eau du matériau, qui a été de

0,03%.

Figure ‎4-15 : Spectre diélectrique de l’alumine mesuré à 25°C entre 0,1 Hz et 1 MHz

Figure ‎4-16 : Spectres diélectrique à 25°C d’un échantillon avant et après conditionnement

en atmosphère humide

0,0001

0,001

0,01

0,1

0,1 1 10 100 1000 10000 100000 1000000

9,8

10

10,2

10,4

10,6

10,8

11

11,2

0,1 1 10 100 1000 10000 100000 1000000

Facte

ur

de p

ert

es

Fréquence [Hz]

Perm

itti

vit

é r

ela

tiv

e

Spectre Al203 à 25°C

Epsilon r Tan Delta

Al2O3, 25°C

0,005

0,05

0,1 1 10 100 1000 10000 100000 1000000

5,4

5,5

5,6

5,7

5,8

5,9

6

6,1

6,2

6,3

6,4

0,1 1 10 100 1000 10000 100000 1000000

Fa

cte

ur

de

pe

rte

s

Fréquence [Hz]

Pe

rmit

tiv

ité

re

lati

ve

Spectres résine chargée d'alumine avant / aprés 24h à 60°C et 80% HR

Epsilon_r_avant

Epsilon r apres

Tan_delta_avant

Tan Delta apres

25°C

Page 121: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

109

Comme le montre la Figure ‎4-16, une prise d’eau de 0,03% a un effet significatif sur le

comportement diélectrique de notre composite. On observe ainsi une augmentation de la

permittivité de 3% (en haute fréquence) à 6% (en basse fréquence), accompagnée d’une hausse

du facteur de pertes comprise entre 40% (en B.F.) et 100% (en H.F.). L’absorption d’eau affecte

les mécanismes de polarisation et de conduction, car l’on constate un déplacement du pic B.F.

vers des fréquences plus hautes après conditionnement. Il s’agit donc clairement d’un paramètre à

prendre en compte lors d’une utilisation en courant continu.

4.3 Résistivité volumique et conduction à champ fort

4.3.1 Considérations générales

Afin d’étudier les mécanismes de conduction de notre matériau, nous avons déterminé ses

caractéristiques courant-tension (I-V) sous des champs électriques allant jusqu’à 40 kV/mm

(valeur maximum de la tension appliquée de 27 kV), à des températures de 25°C, 60°C, 85°C et

105°C. On rappelle que les caractéristiques courant-tension sont à tracer avec des valeurs du

courant les plus proches possibles de celles du régime permanent. Des exemples de courants

d’absorption sont présentés dans la Figure ‎4-17 et la Figure ‎4-18.

Vu les diverses vitesses de variation dans le temps et afin de pouvoir réaliser des mesures dans

des délais acceptables, les caractéristiques I-V ont été tracées avec des valeurs de courants

d’absorption relevées 10000 s après l’application des échelons de tension. Afin d’éliminer le

bruit, une moyenne sur les 100 dernières secondes de chaque courant d’absorption a été

employée.

Figure ‎4-17 : Exemples de courants d'absorption mesurés à 25°C

100

101

102

103

104

10-14

10-12

10-10

10-8

Temps [s]

Coura

nt

[A]

600 V

1 kV

3 kV

5 kV

7 kV

9 kV

11 kV

13 kV

15 kV

17 kV

19 kV

21 kV

23 kV

25 kV

Page 122: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

110

Figure 4-18 : Exemples de courants d'absorption mesurés à 85°C

4.3.2 Analyse des mécanismes de conduction dans le matériau à l'état initial

Des caracteristiques I-V déterminées à diverses températures sur le composite à l’état initial

(après réception et dépôt d’électrodes) sont représentées dans la Figure ‎4-19).

Figure ‎4-19 : Caractéristiques courant-tension du matériau à l’état initial

obtenues à 25, 60, 85 et 105°C

100

101

102

103

104

10-10

10-9

10-8

10-7

Temps [s]

Coura

nt

[A]

600V

1kV

3kV

5kV

7kV

9kV

11kV

13kV

15kV

17kV

19kV

21kV

1E-13

1E-12

1E-11

1E-10

1E-09

1E-08

1E-07

1E-06

100 1000 10000 100000

I [A]

V [V]

105 C

85 C

60 C

25 C

Page 123: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

111

Ces caractéristiques révèlent une variation significative des courants de conduction avec la

température. D’autre part, la dépendance courant-tension est non linéaire sur l’ensemble de la

gamme de tension analysée, comme on pouvait s’y attendre. Ce phénomène est surtout

observable en haute température et sous fort champ. Autour de 100°C, une variation non

monotone du courant est observée avec la température. A 105°C, pour les plus fortes valeurs de

champ, les valeurs de courant sont inférieures à celles mesurées à 85°C. Nous reviendrons un peu

plus loin sur ce phénomène.

Afin d’analyser les mécanismes de conduction qui contribuent aux évolutions observées, les

données ont été analysées en utilisant différentes représentations de la densité de courant J en

fonction du champ électrique appliqué E, chaque représentation permettant de tirer des

renseignements sur un mécanisme de conduction particulier. Ces mécanismes, ainsi que les

équations qui les régissent avec leurs paramètres, ont été détaillés au chapitre 2 ; nous

rappellerons néanmoins quelques équations et notions, dans la mesure où cela est susceptible de

faciliter la compréhension des raisonnements développés.

Des représentations en double échelle logarithmique des courbes J(E) (Figure ‎4-21) mettent en

évidence, à faible champ, des parties linéaires de pente 1, caractéristiques d’une conduction de

type « ohmique ». Ces zones sont présentes à toutes les températures étudiées. Les résistivités

volumiques calculées à partir du regime ohmique sont de l'ordre de 1,5*1013

Ω.m (à 105°C) à

1,7*1015

Ω.m (à 25°C) (Figure ‎4-20), dans la gamme usuellement rencontrée dans la littérature

pour ce type de matériau [BEY91] [GUI04] [ZAV14].

Figure 4-20 : Variation de la résistivité volumique en fonction de la température

1E+09

1E+10

1E+11

1E+12

1E+13

1E+14

1E+15

1E+16

1E+17

0 20 40 60 80 100 120

Resistivité

volumique

(Ωm)

Température C

Page 124: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

112

A partir d’une valeur du champ électrique comprise entre 4,5 et 9 kV/mm (selon la température),

la Figure ‎4-21 met en évidence, pour chaque tracé, une transition vers des pentes de valeurs

supérieures à 1, caractéristiques de régimes « non ohmiques ».

Figure 4-21 : Représentation de la densité de courant en fonction du champ électrique

en double échelle logarithmique

Ainsi, à 25°C, 60°C et 85°C, on relève à fort champ des pentes égales ou légèrement supérieures

à 2, caractéristiques d’un régime limité par charges d’espace (« Space Charge Limited Current –

SCLC »). A 25°C, la pente est très proche de 2, ce qui correspond soit à un régime sans piège soit

à une seule profondeur de pièges [LAM70] ; alors que les pentes correspondant à 60°C et 85°C

sont égales à 2,2 (piégeage avec plusieurs niveaux de pièges). Il en ressort donc, pour des

températures inférieures à 85°C, deux régimes de conduction prédominants : un régime ohmique

(à champ faible) et un régime limité par charges d’espace (à champ fort), le piégeage des charges

pouvant s’effectuer dans des pièges de différentes profondeurs énergétiques situés dans la résine

et/ou aux interfaces résine/charge minérale (correspondant à des lois du type

1 29 8 k kJ V d , avec µ mobilité et k [0,3] facteur dépendant de la distribution

énergétique des pièges). Les valeurs des champs « seuils », pour lesquelles le passage du régime

de conduction « ohmique » vers les régimes « non ohmiques » a lieu, se situent entre 4,5 et 9

kV/mm, selon la température.

Pente 2,2

P ente 2,2

Pente 2

Pente 1,4

Pente = 1

Pente = 2

-33

-31

-29

-27

-25

-23

-21

-19

-17

-15

13 13,5 14 14,5 15 15,5 16 16,5 17 17,5 18

ln(J)

Ln(E)

105 C

85 C

60 C

25 C 4,5 9 E(kV/mm)

Page 125: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

113

A 105°C, la pente de la droite obtenue en interpolant les données expérimentales correspondant à

la zone des champs forts est de l’ordre de 1,4. Elle est donc sensiblement supérieure à 1, mais

reste inférieure à 2. Bien que décrivant une dépendance J(E) non linéaire, cette valeur apparaît

trop faible pour témoigner d’un régime majoritairement contrôlé par charges d’espace. On en

conclut que la conduction à cette température est également influencée par un ou plusieurs autres

mécanismes, tel qu’il a déjà pu être observé par d’autres auteurs sur ce type de résine en haute

température [GUI06].

Un mécanisme de conduction volumique souvent rencontré dans les isolants soumis à des champs

forts est le mécanisme de Poole-Frenkel. Il met en évidence une conduction amplifiée par la

diminution, sous l’effet du champ électrique, de la hauteur de la barrière de potentiel que les

porteurs émis d’un site donneur doivent franchir. Dans ce cas, on rappelle que la conductivité est

définie par [FRE38] :

4-1

avec 0 la conductivité intrinsèque du matériau et PF la constante de Poole-Frenkel.

Puisque J = E, dans le cas où ce mécanisme est majoritaire, une représentation de type

1 2ln J E f E doit donner une droite de pente proche de , comme nous l’avons

indiqué à la section 2.5.3.3.

Afin de déceler une contribution de ce type de mécanisme aux courants mesurés, des

représentations en coordonnées Poole-Frenkel sont données dans la Figure ‎4-22. A 105°C, la

représentation peut s’identifier à une droite, mais sa pente serait alors nettement inférieure à

(1,4*10-4

au lieu de 10-3

). Nous pouvons donc déduire qu’un mécanisme majoritaire de

type Poole-Frenkel ne peut pas expliquer les dépendances courant-tension observées à 105°C, car

cela impliquerait des valeurs du champ interne 6 à 7 fois inférieures au champ de Laplace, ce qui

paraît difficilement concevable. Par ailleurs, ces représentations ne permettent pas non plus de

conclure à une influence notable de ce mécanisme à 25, 60 et 85°C.

Un autre mécanisme pouvant intervenir dans les diélectriques solides est le mécanisme de

conduction par sauts (« hopping »), décrivant un déplacement de charges de piège en piège qui

génère un courant proportionnel à sinh [eλE/(2kT)], avec distance moyenne entre pièges. Une

représentation de la densité de courant J en fonction de sinh [eλE/(2kT)] donnerait alors une

1 2

00 exp PF E

kT

/PF kT

/PF kT

Page 126: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

114

droite. Comme la valeur de n’est à priori pas connue, nous l’avons ajustée, dans la Figure ‎4-23,

de manière à obtenir la meilleure régression sur cette représentation.

Figure 4-22 : Représentation des données concernant les courants de conduction

sous la forme ln (J/E)=f (E1/2

)

Figure 4-23 : Représentation de J = f(sinh [eλE/(2kT)]) pour les données obtenues à 105°C

(échelle linéaire)

-36

-35

-34

-33

-32

-31

-30

-29

-28

-27

-26

600 1600 2600 3600 4600 5600 6600

ln (σ)

E 1/2

105 C

85 C

60 C

25 C

λ=4 λ=5

λ=3

λ=6

1,0E-12

5,1E-11

1,0E-10

1,5E-10

2,0E-10

2,5E-10

3,0E-10

3,5E-10

4,0E-10

4,5E-10

5,0E-10

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

J(A/m2)

sinh(eλE/2kT)

Page 127: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

115

On constate que, pour les données correspondant aux expériences réalisées à 105°C, une bonne

régression (exposant et facteur R2

très proches de 1) est obtenue pour λ = 4 nm (Figure 4-24).

Les valeurs de λ rencontrées dans la littérature pour les polymères sont très variées (de 0,1 nm à

quelques nanomètres, en fonction du type de matériau étudié [DAS80, DAS87, MIZ79, GRI00]).

Par exemple, une valeur de 0,9 nm a été obtenue pour le polyéthylène haute densité (HDPE)

[MIZ79], de 6,9 nm pour le polyéthylène téréphtalate (PET) à 130°C [AMB62], de 5 nm dans le

polyether-etherketone [DAS87], et entre 1,65 nm et 4,5 nm pour le polychlorure de vinyle

[KOS71]. En ce qui concerne les résines époxy, Griseri et al. [GRI00] ont obtenu λ =1,04 nm

pour une résine de type DGEBA. Guillermin et al. [GUI06] ont calculé des valeurs de λ de

1,5 nm à 5,6 nm dans des résines DGEBA pure et chargée de silice.

La taille de la maille d’un polymère peut être déterminée à partir de sa courbe de relaxation

mécanique, en utilisant la loi de l’élasticité caoutchoutique :

3

A

m m

RT kN T kTG'

M V a

4-2

avec G’ le module de conservation au niveau du plateau caoutchoutique, ρ la masse volumique,

R = 8,31 J.mol-1

.K-1

la constante universelle des gaz parfaits, T la température absolue, Mc la

masse moléculaire, k la constante de Boltzmann et a la longueur de la maille. Si l’on considère

une valeur de G’ = 6,7*106 Pa, telle qu’indiquée par Nassiet et al. [NAS06] pour une époxy de

type DGEBA chargée d’alumine, on obtient une valeur de a = 1 nm. Cette valeur est compatible

avec les valeurs de que nous avons déterminées. En effet, l’arrangement des mailles est

tridimensionnel et il n’est pas parfaitement régulier : les distances réelles entre deux sites de

piégeage peuvent donc être plus élevées que la taille de la maille. D’autre part, les champs

électriques locaux qui régissent cette conduction sont généralement plus élevés que le champ

macroscopique, comme nous le verrons d’ailleurs par la suite ; ceci signifie que, à produit E

équivalent, la valeur de peut être plus faible que celle calculée en considérant E = V/d. Au vu de

toutes ces valeurs expérimentales, nous concluons qu’un mécanisme de type « hopping » est tout

à fait envisageable dans notre matériau à 105°C.

Les courants mesurés peuvent également être contrôlés par l’interface métal/isolant à travers des

mécanismes d’injection de type Schottky ou Fowler-Nordheim. Dans le deuxième cas, la

représentation de doit être assimilable à une droite, ce que ne montre pas la

Figure ‎4-25. Par ailleurs, l’hypothèse d’une telle « loi d’émission froide » ne se vérifie pas dans

notre cas, où les variations des courants avec la température sont importantes. De plus, l’effet

2ln 1J E f E

Page 128: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

116

Fowler-Nordheim n’est significatif que pour des barrières isolantes très fines, obtenues pour des

champs de l’ordre de 109 V/m [DIS92], largement supérieurs à ceux appliqués dans notre étude.

L’émission Schottky traduit, quant à elle, l'injection de charges dans l'isolant par-dessus la

barrière de potentiel que représente l'interface électrode/isolant. On rappelle que la densité de

courant due à l’effet Schottky s’écrit :

4-3

avec 0 la hauteur de la barrière en l’absence du champ appliqué, As la constante de Richardson,

S la constante de Schottky, k la constante de Boltzmann et EC le champ électrique à la cathode.

Figure ‎4-24 : Représentation de J = f(sinh [eλE/(2kT)]) pour les données obtenues à 105°C

(double échelle logarithmique)

Si les courants mesurés sont principalement dus à une émission de type Schottky, ln(J) est

proportionnel à (V/d)1/2

et la représentation de ln(J) en fonction de (V/d)1/2

est alors assimilable à

une droite. La connaissance de r et de la pente expérimentale permet de trouver , alors que la

prolongation de la droite permet de trouver 0. Ceci est illustré dans la Figure ‎4-26.

En analysant cette représentation, on trouve, à champ fort, une pente de 6,8*10-4

m1/2

.V-1/2

et 0 =

1,37 eV. Un effet Schottky « pur » (avec un champ à la cathode égal à V/d) se traduirait par une

02 expS c

S S

EJ A T

KT

λ=4y = 1E-06x1,047

R² = 0,998

λ=5y = 9E-07x0,986

R² = 0,997

λ=3y = 2E-06x1,100

R² = 0,997

λ=6y = 7E-07x0,924

R² = 0,993

1E-08

1E-07

1E-06

1E-05

1E-04

0,01 0,1 1 10

J(A/m2)

sinh(eλE/2kT)

Page 129: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

117

pente S/(kT) = 4,6*10-4

m1/2

.V-1/2

. Ceci donne un coefficient d’amplification du champ à la

cathode = 2,15.

De telles hausses du champ aux interfaces sont possibles à cause de porteurs pouvant se trouver

bloqués aux électrodes [TOU74, NOT01b], d’autant plus que les mesures de spectroscopie

diélectrique ont mis en évidence des mécanismes de polarisation interfaciale importants à 105°C.

Il est donc très probable qu’un mécanisme d’injection de type Schottky assisté par de la charge

d’espace contrôle une partie importante des courants mesurés à fort champ au-dessus de 105°C.

Cette analyse montre que, si en-dessous de 100°C la conduction à fort champ dans le composite

est contrôlée majoritairement par un mécanisme de type SCLC, les courants mesurés au-dessus

de cette température peuvent résulter principalement de deux mécanismes (injection Schottky et

hopping), dans lesquels les effets liés à l’amplification du champ interne en raison de la charge

d’espace sont à prendre en compte. Il est à noter que des mécanismes de conduction similaires

ont été identifiés par Guillermin dans une même résine de type DGEBA mais chargée en silice

[GUI04].

Figure 4-25 : Représentations ln (J/E2)=f (E

1/2)

-52

-50

-48

-46

-44

-42

-40

1E-08 1E-07 1E-06 1E-05

ln(J/E2)

(1/E)

105 C

85 C

60 C

25 C

Page 130: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

118

Figure 4-26 : Représentation des données courant/tension à 105°C en coordonnées Schottky -

ln(J) = f (E1/2

)

4.3.3 Influence de l'absorption d'eau sur la conduction et la résistivité volumique

du matériau

Autour de 100°C, nous avons observé une variation du courant non monotone en fonction de la

température (Figure ‎4-19). En effet, une baisse des valeurs du courant de conduction à 105°C a

été observée par rapport à 85°C. Compte tenu du caractère hydrophile du composite étudié, que

nous avons pu mettre en évidence lors des expériences de spectroscopie diélectrique, nous avons

souhaité vérifier si ce comportement pouvait être relié à la présence d’eau dans le matériau : en

effet, dans la littérature, des diminutions de la valeur de résistivité volumique ont déjà été

rapportées pour la résine lorsque la teneur en eau augmente (ex. [LUT10-GON05]).

Des mesures complémentaires ont ainsi été effectuées sur des échantillons soumis à un post-

traitement thermique. Son but a été d’éliminer le plus possible de l’eau ayant pu être absorbée par

le matériau depuis sa fabrication. Les masses des échantillons ont été mesurées toutes les 24

heures durant le traitement, effectué à 100°C. La courbe d’évolution de la perte de masse relative

a ainsi été tracée (Figure ‎4-27) en utilisant la relation suivante :

0

0

100m m t

M tm

4-4

avec m(t) la masse mesurée à l’instant t et m0 la masse initiale (avant traitement thermique).

y = 0,00068x - 25,38

ɤ=2,15

Φ0 =1,37

-25

-24

-23

-22

-21

-20

2500 3000 3500 4000 4500 5000 5500 6000

ln(J)

E 0.5

Page 131: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

119

Figure ‎4-27 : Perte de masse du matériau en fonction du temps de traitement thermique (100°C)

On constate que la perte de masse, principalement due à la résorption d’eau, est de l’ordre de

0,06% après 24 heures à 100°C, puis augmente jusqu’à 0,075% au bout de 72 heures. On

s’aperçoit par la suite que la masse de l’échantillon cesse de diminuer. Ceci ne signifie pas

nécessairement que toute l’eau contenue dans le composite a été éliminée, mais témoigne d’une

situation où la teneur en eau de l’air ambiant ne permet plus à l’eau restée dans l’échantillon

d’être éliminée. L’équilibre peut même basculer jusqu’au point où le matériau se remet à

absorber de nouveau de l’humidité ambiante (la masse de l’échantillon augmente légèrement

entre 72 et 96 heures). Vu ces résultats obtenus à l’air ambiant, nous avons conclu que 48 heures

à 100°C dans ces conditions sont suffisantes pour que la dynamique résorption/absorption soit

significative.

Des mesures de courants de conduction ont alors été effectuées à 60, 85 et 105°C sur un

échantillon post-traité thermiquement à 100°C pendant 48 heures. La Figure ‎4-28 montre les

caractéristiques courant/tension obtenues. Les résultats ont ensuite été comparés à ceux issus du

matériau dans son état initial (Figure ‎4-19), c’est à dire sur un échantillon sans aucun post-

traitement thermique.

D’après la Figure ‎4-28, nous pouvons constater que les courants mesurés augmentent

significativement avec la température, le rapport entre les valeurs mesurées à 60°C et 105°C

pouvant atteindre jusqu'à deux décades. Comme pour l’échantillon non traité thermiquement

(Figure ‎4-19), la dépendance courant/tension s’avère être non linéaire sur l’ensemble de la

gamme de tension analysée, quelle que soit la température.

0

0,01

0,02

0,03

0,04

0,05

0,06

0,07

0,08

0 20 40 60 80 100

ΔM (%)

Temps (Heures)

Page 132: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

120

Figure 4-28 : Caractéristiques courant-tension en double échelle logarithmique

pour un échantillon post-traité thermiquement pendant 48 h à 100°C

Figure 4-29 : Caractéristiques courant-tension à 60°C et à 85°C pour les 2 types d'échantillons

Une comparaison des caractéristiques I-V obtenues à 85°C et 105°C pour les deux types

d'échantillons est présentée dans la Figure ‎4-29. On perçoit très bien l'effet du post-traitement

thermique à 100°C : les valeurs de courant mesurées sont sensiblement plus faibles, mettant en

évidence l’influence de la résorption d’eau sur la conduction dans la résine.

Les valeurs de résistivité volumique, calculées à partir du régime ohmique avant et après post-

traitement thermique, sont données dans le Tableau ‎4-1. Nous pouvons ici encore constater une

1E-13

1E-12

1E-11

1E-10

1E-09

1E-08

100 1000 10000 100000

I [A]

V [V]

105 C

85 C

60 C

1E-15

1E-14

1E-13

1E-12

1E-11

1E-10

1E-09

1E-08

1E-07

100 1000 10000 100000

I [A]

V [V]

Echantillon état initial

Echantillon post-traité thermiquement1E-15

1E-14

1E-13

1E-12

1E-11

1E-10

1E-09

1E-08

1E-07

100 1000 10000 100000

I [A]

V [V]

Echantillon état initial

Echantillon post-traité thermiquement

Page 133: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

121

augmentation, parfois très significative (jusqu’à 2 décades), de la résistivité volumique après

conditionnement thermique.

Tableau 4-1 : Résistivité volumique du matériau à l’état initial et après conditionnement

thermique à 100°C

Résistivité volumique (Ω.m)

Température

60°C 85°C 105°C

A la réception – état initial 8,24*1013

3*1012

1,5*1013

Après traitement thermique à

100°C pendant 48 h 4,62*10

15 10

15 4*10

13

Afin de déterminer l’influence de ce traitement sur les mécanismes de conduction dominants,

différentes représentations de J(E) ont été analysées, comme pour le matériau dans son état

initial. La Figure ‎4-30 concerne ainsi les caractéristiques courant-tension relevées pour un

échantillon post-traité thermiquement à 100°C, représentées sous la forme ln(J) = f (ln(E)).

Figure ‎4-30 : Représentation des caractéristiques courant-tension sous la forme ln(J)= f(ln(E))

pour un échantillon post-traité thermiquement pendant 48 h à 100°C

Pente 1,9

Pente 1,7Pente 1

Pente 2

Pente 2

-33

-31

-29

-27

-25

-23

-21

-19

14 14,5 15 15,5 16 16,5 17 17,5 18

ln (J)

ln (E)

105 C

85 C

60 C7,5 10,5 E (kV/mm)

Page 134: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

122

Ces caractéristiques montrent que le régime ohmique est prédominant jusqu’à des valeurs du

champ comprises entre 7,5 et 10,5 kV/mm, en fonction de la température (existence d’une droite

de pente quasi égale à 1).

Pour les températures de 60 et 85°C, au-dessus du champ « seuil », un mécanisme de type SCLC

régit la conduction volumique. Ceci est mis en évidence par l’existence d’une droite de pente

quasi égale à 2. A 105°C, la pente au-delà du seuil n’est plus que de 1,7 ; ce qui indique une

contribution significative d’autres mécanismes de conduction.

La Figure ‎4-31 montre les caractéristiques de J = f (sinh [eλE/(2kT)]) à 105°C pour le matériau

ayant subi le conditionnement thermique. Une bonne régression est obtenue pour = 5 nm,

témoignant de la possibilité d’une conduction par sauts.

Figure 4-31 : Représentations de J = f(sinh [eλE/(2kT)]) pour les données obtenues à 105°C

La représentation en coordonnées Schottky des données obtenues à fort champ sur le matériau

conditionné thermiquement (Figure ‎4-32) permet de calculer une pente de 7,9*10-4

m1/2

.V-1/2

et

une valeur de 0 = 1,42 eV. Le coefficient d’amplification du champ à la cathode vaut alors =

2,9, plus élevé mais comparable à celui correspondant au matériau à l’état initial.

Il en résulte que l’absorption d’eau par le composite étudié ne modifie pas les mécanismes de

conduction, mais augmente de manière significative la conductivité du matériau, en abaissant

également les seuils de passage vers des régimes non linéaires.

λ=5

y = 3E-07x1,043

R² = 0,992

λ=4y = 4E-07x1,120

R² = 0,993

λ=6y = 2E-07x0,966

R² = 0,988

λ=3y = 6E-07x1,191

R² = 0,991

1E-09

1E-08

1E-07

1E-06

1E-05

0,01 0,1 1 10

J [A/m 2 ]

Sinh (eλE/kT)

Page 135: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

123

Figure 4-32 : Représentation ln(J) = f (E1/2

) des caractéristiques courant-tension

pour le matériau traité thermiquement

Les valeurs que nous avons obtenues sont à rapprocher de résultats de la littérature concernant un

matériau similaire, ayant fait état d’une diminution de deux décades de la résistivité suite à une

absorption d’eau de 0,2 % [ZAV14]. Une diminution de la résistivité de deux ordres de

grandeurs a également été observée sur d'autres types de résines suite à l’absorption de 0,1%

d’eau [ZOU08]. Rappelons que la perte de masse de nos échantillons a été de 0,07% :

l’augmentation de la résistivité volumique de plus de deux ordres de grandeurs que nous avons

observées à 60°C et à 85°C après séchage montre que nous sommes en présence d’un

comportement similaire.

Enfin, il est à noter, que dans le cas du matériau séché, il n’y a pas de baisse du courant de

conduction entre 85°C et 105°C, contrairement au matériau à l’état initial. A la lumière des

résultats et de l’analyse ci-dessus, on conclut que le phénomène de baisse du courant entre 85°C

et 105°C est dû à l’élimination d’eau du matériau suite à sa soumission à la température pendant

les tests de conduction.

D’un point de vue pratique, les résultats de spectroscopie diélectrique et de courants de

conduction montrent qu’un post-traitement thermique des pièces isolantes en résine avant

montage dans un appareillage haute tension permettrait d’éliminer une partie de l’eau du

matériau, et aurait vraisemblablement un impact positif sur ses propriétés volumiques, surtout

pour une utilisation en courant continu. Il n’en demeure pas moins que, vu les dimensions des

y = 0,00079x - 26,94262

ɤ=2,91

Φ0=1,42

-26

-25,5

-25

-24,5

-24

-23,5

-23

-22,5

-22

-21,5

-21

3000 3500 4000 4500 5000 5500 6000

ln (J)

E 0.5

Page 136: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

124

pièces utilisées dans les appareillages haute tension et la cinétique de la diffusion de l’eau, des

durées de conditionnement thermique significatives (de l’ordre de la semaine, voire plus) seraient

vraisemblablement nécessaires.

4.4 Propriétés surfaciques

L’objectif de cette partie du travail a été d’étudier les propriétés de surface de la résine époxy

chargée d’alumine. Dans les paragraphes qui suivent, nous allons présenter et analyser les

différents résultats issus de mesures de résistivités surfaciques et de potentiel de surface.

4.4.1 Résistivité superficielle

La Figure ‎4-33 présente des courants d’absorption surfacique obtenus après application d’une

tension de 1 kV à 25, 60, 85, 105 et 120°C (distance entre électrodes : 5 mm). Ces tests ont été

répétés à 2 kV, puis à 3 kV ; les champs de surface appliqués ont donc été de 0,2 kV/mm,

0,4 kV/mm et 0,6 kV/mm. Les mesures ont été réalisées sous azote dans la cellule décrite au

Chapitre 3 (Figure ‎3-20).

Figure 4-33 : Exemple de courants surfaciques relevés à 1 kV pour différentes températures

Des valeurs de résistivité superficielle déterminées en utilisant la valeur du courant mesuré après

une minute d'application de la tension (conformément aux prescriptions de la norme IEC 60093

[NOR80]) sont illustrées dans la figure suivante.

100

101

102

103

104

10-16

10-14

10-12

10-10

10-8

Temps [s]

Coura

nt [ A

]

1kV - 25°C

1kV - 60°C

1kV - 85°C

1kV -105°C

1kV -120°C

Page 137: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

125

Figure 4-34 : Résistivité surfacique mesurée pour différentes températures à 0,2 kV/mm,

0,4 kV/mm et 0,6 kV/mm

D’après ces évolutions, nous pouvons déduire que, en-dessous de 100°C, la résistivité surfacique

du composite diminue sensiblement avec la contrainte électrique appliquée. Cet effet est plus

réduit à partir de 105°C. D’autre part, la résistivité surfacique diminue avec l'augmentation de la

température, quelle que soit la tension appliquée. Par exemple, pour 1 kV appliqué, elle passe de

2,4*1017

Ω (25°C) à 1014

Ω (120°C), ce qui correspond à une baisse d'environ trois ordres de

grandeur. Comme pour les phénomènes volumiques, nous avons essayé d’évaluer le rôle de

l’humidité absorbée par le matériau, car des diminutions de la résistivité surfacique des résines

époxy ont souvent été rapportées dans la littérature lorsque la teneur en eau augmente (ex.

[LUT09, ZAV13]).

Nous avons ainsi effectué des mesures sur des échantillons avec les mêmes caractéristiques que

les précédents, mais ayant été séchés au préalable pendant 48 heures à 100°C. Les courants

surfaciques ont été déterminés à 25, 60, 85, 105 et 120°C. Sur la Figure ‎4-35, nous présentons les

résultats obtenus suite à l’application d’une tension de 1 kV à un échantillon post-traité

thermiquement. Ces valeurs sont bien plus faibles que celles obtenues dans le cas du matériau

n’ayant pas subi de traitement thermique (Figure ‎4-33).

1E+13

1E+14

1E+15

1E+16

1E+17

1E+18

0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7

Rh

os(Ω

)

E[kV/mm]

120 C

105 C

85 C

60 C

25 C

Page 138: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

126

Figure 4-35 : Courants surfaciques relevés à 1 kV pour différentes températures

pour un échantillon post-traité thermiquement

Pour le matériau post-traité, les valeurs de résistivité surfacique ont été déterminées pour les

différentes températures et pour les tensions appliquées de 1, 2 et 3 kV correspondant aux

champs 0,2 kV/mm, 0,4 kV/mm et 0,6 kV/mm (Figure ‎4-36) afin de les comparer à celles

obtenues sur le composite dans son état initial (déjà présentées dans la Figure ‎4-34).

Quelle que soit la température, la valeur de résistivité surfacique est toujours plus élevée

(d’environ un ordre de grandeur) dans le cas du matériau post-traité. Ainsi, si l’on considère les

valeurs obtenues sous 1 kV, la résistivité surfacique à 25°C passe de 2,4*1017

Ω à 1018

Ω. En

revanche, cette augmentation est plus faible au-dessus de 100°C (ex. passage de 1014

Ω à 5*1014

Ω à 120°C). Une diminution de deux décades sur le même type de composite a été observée

[ZAV14]

À partir de ces résultats, il apparaît que l'humidité a une influence considérable sur les propriétés

de conduction superficielle du composite.

Des absorptions d'eau de l'ordre de 0,5% ont été rapportées pour les résines époxy [GON05] ;

nous avons par ailleurs pu le vérifier lors des mesures de permittivité décrites au début de ce

chapitre. La valeur de résistivité surfacique, nettement plus faible pour les échantillons non

séchés, peut ainsi être attribuée à la présence de molécules d'eaux adsorbées en surface de

100

101

102

103

104

10-16

10-14

10-12

10-10

Temps [s]

Coura

nt [ A

]

1kV - 25°C

1kV - 60°C

1kV - 85°C

1kV - 105°C

1kV - 120°C

Page 139: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

127

l'isolant [DAS92]. En effet, il est connu que la présence de telles molécules sur la surface d’un

solide ou près de celle-là contribue à la conduction surfacique, et que la résistivité surfacique peut

être réduite de manière significative si une couche continue de molécules d'eau se forme en

surface. Avec la croissance du nombre de couches d'eau à la surface, une diminution de la

résistivité surfacique se produit [AWA72]. On peut donc conclure que la résistivité superficielle

du matériau séché est plus élevée car les couches d'eau adsorbées pendant la fabrication et le

stockage ont été éliminées lors du séchage induit par le processus de conditionnement thermique

(des mesures ont montré des pertes de masse de l'ordre de 0,08% pour les échantillons traitées

thermiquement).

Figure ‎4-36 : Résistivité surfacique en fonction de la température

(résine à l’état initial et résine post-traitée thermiquement 48 h à 100°C)

Afin d'analyser la dépendance de la résistivité surfacique avec la température, les résultats

obtenus à 1 kV pour les deux types d’échantillon (état initial et post-traité thermiquement) ont été

tracés en fonction de l'inverse de la température, en utilisant une représentation semi-

logarithmique (Figure ‎4-37).

Les représentations quasi-linéaires de la Figure ‎4-37 mettent en évidence des lois exponentielles

de type Arrhenius :

0S S

Wexp

kT

4-5

1E+12

1E+13

1E+14

1E+15

1E+16

1E+17

1E+18

1E+19

20 40 60 80 100 120 140

Rhos (Ω)

Température ( C)

1 k V_résine post-traitée thermiquement 48 h à 100 C

2 k V_résine post-traitée thermiquement 48 h à 100 C

3 k V_résine post-traitée thermiquement 48 h à 100 C

1 k V_résine à l'état initial

2 k V_résine à l'état initial

3 kV_résine à l'état initial

Page 140: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

128

Un changement de pente apparaît aux alentours de 105°C pour les deux types

d’échantillons, mettant en évidence un changement de mécanisme de conduction surfacique

autour de cette valeur de température. Dans les deux cas (état initial ou post-traitement

thermique), il s'agit vraisemblablement du même type de mécanisme activé thermiquement,

mettant en jeu deux types de pièges surfaciques de profondeurs très différentes. De tels

mécanismes ont été amplement étudiés et validés [CLA78]. Les énergies d'activation calculées

avec les pentes sont de l'ordre de 0,17 eV et 1,53 eV pour le matériau post-traité et de 0,2 eV et

1,4 eV pour l'échantillon dans son état initial. Des liens avec des processus liés à la transition

vitreuse (105°C à 112°C pour ce matériau) sont très probables : l'influence de l'état

morphologique de la surface sur la conduction surfacique a déjà été évoquée dans la littérature

[BAR87], et un mécanisme similaire a été observé dans le cas du polyéthylène téréphtalate

[BEA09].

Figure 4-37 : Représentation de la résistivité surfacique en fonction de l'inverse de la température

pour les deux types d'échantillons (état initial et post-traité thermiquement)

Il apparaît donc qu’un post-traitement thermique des pièces avant montage dans un appareillage

aurait un impact positif sur leur résistivité surfacique, en éliminant une partie de l’eau absorbée.

Comme l'absorption et la résorption d'eau semblent se produire facilement, il serait alors

nécessaire que les pièces isolantes soient montées aussi vite que possible après le séchage.

1E+11

1E+12

1E+13

1E+14

1E+15

1E+16

1E+17

1E+18

1E+19

0,0024 0,0026 0,0028 0,003 0,0032 0,0034 0,0036

Rhos (Ω)

1/T [K-1]

Echantillon post-traité thermiquement

à 100 C pendant 48h

Echantillon dans son état initial

120 105 85 60 25 T [ C]

Page 141: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

129

Une baisse de la résistivité superficielle lorsque la contrainte électrique appliquée augmente a

également été mise en évidence. Elle est moins marquée au-dessus de 85°C (on l’aperçoit en

particulier pour le matériau traité thermiquement). Ce comportement laisse penser à une influence

de l’état de surface sur le mécanisme de conduction, qui diminue lorsqu’on approche de valeurs

de la température susceptibles d’augmenter l’homogénéité surfacique du matériau.

4.4.2 Répartition et variation du potentiel de surface

L’objectif des expériences suivantes a été d’analyser l’homogénéité surfacique des échantillons,

ainsi que d’évaluer les facultés du matériau à stocker ou évacuer des charges déposées en surface.

Plusieurs configurations de test ont été utilisées pour des échantillons dans leur état initial et pour

des échantillons ayant subi un post-traitement thermique pendant 48 heures à 100°C. Les

éprouvettes ont été chargées positivement par effet Corona, en utilisant le système pointe/grille

décrit au Chapitre 3. Des résultats sont présentés dans les Figures 4-38 à 4-42 en fonction du

temps et de la position de la sonde de potentiel au-dessus de la surface.

Les mesures montrent des valeurs du potentiel variables selon la position radiale de la sonde au-

dessus de la surface (angle ), donc selon la zone caractérisée. Ces dispersions sont dues à

l’inhomogénéité de l’état de la surface, qui se traduit par une évolution différente des charges

dans les différentes régions analysées (Figure ‎4-38 et Figure ‎4-39). Ainsi, à certains endroits bien

spécifiques, les charges semblent être plus ou moins évacuées en surface ou en volume du

matériau (exemple dans la Figure ‎4-39 : comparaison entre les localisations à θ =100° et θ =

250°). On voit également que la dynamique du déclin de potentiel diffère en fonction de l’endroit

caractérisé : par exemple (Figure ‎4-39), on retrouve après 50 000 s, pour le même potentiel

appliqué (1,2 kV), environ 50% du potentiel initial à θ = 100°, alors qu’à θ = 225° la décroissance

est bien plus faible (environ 15%).

A certains endroits, un bruit dans les mesures peut également être observé (Figure ‎4-40). Il n’est

à priori pas inhérent à la mesure en elle même, mais plus vraisemblablement lié à une forte

mobilité des charges, qui ont tendance à migrer en surface ou vers le volume du matériau.

Page 142: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

130

Figure 4-38 : Évolution du potentiel de surface sur la zone circulaire analysée d’un

échantillon dans son état initial, après charge Corona à V0 = + 1,2 kV

Figure 4-39 : Évolution du potentiel de surface en fonction de θ pour un échantillon

dans son état initial, après charge Corona à V0 = +1,2 kV

Page 143: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

131

Figure 4-40 : Évolution du potentiel de surface à différents emplacements θ = 45°, θ = 135°,

θ = 225° et θ = 315°. Mesures effectuées sur un échantillon dans son état initial après charge

Corona à V0 = +1,2 kV

Figure 4-41 : Évolution du potentiel de surface à différents emplacements θ=45°, θ=135° θ=225°

et θ=315°. Mesures effectuées sur un échantillon dans son état initial initialement chargé par

effet Corona à V0 = + 1,6 kV

Page 144: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

132

Figure 4-42 : Évolution du potentiel de surface à différents emplacements θ=45°, θ=135° θ=225°

et θ = 315°. Mesures effectuées sur un échantillon post-traité thermiquement initialement chargé

par effet Corona à V0 = + 1,6 kV

Les Figures 4-41 et 4-42 présentent des mesures de déclin de potentiel sur un échantillon dans

son état initial et sur un autre ayant subi un post-traitement thermique à 100°C pendant 48 heures.

Dans le cas de l’échantillon post-traité thermiquement (Figure ‎4-42), la pente du déclin est deux

fois moins importante (1,5 mV/s) que pour l’échantillon dans son état initial (3,5 mV/s). Les

mobilités des charges sont donc bien plus faibles après le post-traitement à 100°C. Ceci se corrèle

bien avec les mesures de résistivité surfacique, mettant encore en évidence l’influence bénéfique

du post-traitement thermique sur les propriétés surfaciques de la résine.

Il ressort de ces mesures que la distribution de la charge sur la surface de la résine n’est pas

uniforme sur l’ensemble de la zone analysée. Ceci témoigne d’une répartition non homogène de

pièges de différents niveaux qui interviennent principalement à faible température, en expliquant

les variations de la résistivité avec le champ. L’origine des différences observées dans les

diverses régions est très probablement liée au processus d’usinage des échantillons.

4.5 Rigidité diélectrique sous champ électrique continu

Les résultats d’essais de claquage réalisés sous tension continue sont illustrés dans les figures

suivantes, chacune concernant une température de test différente (25°C, 60°C et 85°C).

Page 145: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

133

Figure 4-43 : Représentation des résultats des tests de rigidité diélectrique à 25°C

selon la statistique de Weibull

Figure 4-44 : Représentation des résultats des tests de rigidité diélectrique à 60°C

selon la statistique de Weibull

y = 10,08x - 48,89R² = 0,9865

-5

-4

-3

-2

-1

0

1

2

4,4 4,5 4,6 4,7 4,8 4,9 5

ln(-ln(1-P(Ei))

ln (Ei)

EMBF

y = 10,98x - 52,30R² = 0,9649

-5

-4

-3

-2

-1

0

1

2

4,4 4,5 4,6 4,7 4,8 4,9 5

ln(-ln(1-P(Ei)

ln(Ei)

EMBF

Page 146: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

134

Figure 4-45 : Représentation des résultats des tests de rigidité diélectrique à 85°C

selon la statistique de Weibull

A partir de ces courbes, nous avons déterminé, pour chaque température, les valeurs de la rigidité

diélectrique et du facteur de forme. Le champ électrique moyen de claquage a également été

déterminé en faisant une moyenne arithmétique des valeurs déterminées sur l’ensemble des

échantillons testés. Ces valeurs sont regoupées dans le Tableau ‎4-2 et représentées graphiquement

dans la Figure ‎4-46.

Tableau 4-2 : Résultats des tests de rigidité diélectrique

Température β α = EMBF [kV/mm] Emoy [kV/mm]

25°C 10,08 127,4 121,3

60°C 10,98 116,8 111,6

85°C 14,14 103,2 99,5

On constate que les valeurs obtenues sont de l’ordre de la centaine de kV/mm. Les différences

entre une répartition statistique normale et celle de Weibull sont assez mineures (moins de 5%).

La rigidité diélectrique diminue sensiblement lorsque la température augmente : elle passe de

127 kV/mm à 103 kV/mm lorsque la température passe de 25°C à 85°C, soit une baisse de 24%.

La contrainte thermique a donc une influence importante sur le champ de claquage du matériau.

y = 14,14x - 65,58R² = 0,934738

-5

-4

-3

-2

-1

0

1

2

4,4 4,5 4,6 4,7 4,8 4,9 5

ln(-ln(1-P(Ei))

ln(Ei)

EMBF

Page 147: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

135

Cette baisse peut être reliée à l’augmentation très significative de la conductivité volumique que

nous avons constatée entre 25 et 85°C (jusqu’à 3 décades), qui multiplie le risque d’emballement

thermique.

Figure 4-46 : Variation de la rigidité diélectrique en fonction de la température du matériau

On peut également noter que le facteur de forme est sensiblement le même à 25°C et à 60°C,

mais plus élevé à 85°C. Comme ce facteur diminue avec l'augmentation de la dispersion, il

témoigne d’une dispersion plus importante des résultats pour les essais réalisés aux températures

inférieures à 85°C. En effet, malgré un nombre important d’échantillons testés (par exemple, 50

échantillons à 25°C), la dispersion de données issues des tests réalisés à 25°C et à 60°C est restée

supérieure à 15%. Les résultats des tests de rigidité étant influencés par l’état surfacique des

échantillons, il est fort probable que cette dispersion soit liée à l’usinage réalisé pour obtenir le

profil type Rogowski souhaité. La dispersion plus faible observée à 85°C pourrait s’expliquer par

un léger ramollissement du matériau avec la température, tendant à réduire les irrégularités dues à

l’usinage.

Il est à noter que, de point de vue de l’utilisateur, une probabilité de claquage de 63 % est très

élevée et ne correspond pas aux exigences rencontrées lorsqu’on fait la conception d’un système

d’isolation dont on demande une durée de vie de plusieurs dizaines d’années. Il est alors

nécessaire de s’assurer à ce que la probabilité de claquage soit nettement plus faible (de l’ordre

du pourcent). Nous avons ainsi calculé les valeurs de rigidité diélectrique pour des probabilités de

claquage de 1%, 10% et de 50% pour chaque température de test. Les résultats sont donnés dans

le Tableau ‎4-3.

80

90

100

110

120

130

140

20 30 40 50 60 70 80 90

Champ de claquage

(Statistique de

Weibull) [kV/mm]

Température [ C]

Page 148: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

136

Tableau 4-3 : Valeurs de rigidité diélectrique calculées pour différentes probabilités de claquage

Température

Rigidité diélectrique correspondant à différentes probabilités de claquage P

EBD (P = 1%) [kV/mm] EBD (P = 10%) [kV/mm] EBD (P = 50%) [kV/mm]

25°C 81 102 123

60°C 77 95 113

85°C 74,6 88 101

Dans tous les cas, les valeurs de rigidité diélectrique déterminées sous champ continu pour le

matériau à l’état initial s’avèrent être largement supérieures à la valeur du champ électrique

souhaitée lors d’une utilisation dans un disjoncteur à isolation gazeuse, qui ne devrait pas

dépasser la dizaine voire la vingtaine de kV/mm. Il est néanmoins important de tenir compte de

l’évolution de ces valeurs à long terme, car, comme il a été évoqué au chapitre précédent, des

baisses importantes de la rigidité peuvent apparaître dans le temps, selon les conditions de

vieillissement du matériau (temps, température, champ électrique appliqué).

4.6 Charges d’espace et champs électriques résiduels

Afin d’estimer les facultés du matériau à accumuler des charges d’espace et de déterminer les

valeurs des champs électriques résiduels susceptibles d’apparaître dans le composite sous

contraintes électriques continues, une étude a été réalisée en soumettant le matériau pendant 7

jours à plusieurs contraintes électrothermiques.

Les valeurs des champs appliquées lors du conditionnement (3 kV/mm et 12 kV/mm) ont été

choisies suite aux résultats des études de conduction, de manière à caractériser le matériau en-

dessous et au-dessus des « seuils » de non linéarité (4,5 à 10 kV/mm), à des températures de

25°C, 60°C, 85°C et 105°C. Des mesures de charges d’espace ont été réalisées en court-circuit

après 1 jour, 3 jours et 7 jours d’application des contraintes. Les résultats obtenus sont présentés

dans les figures ci après (Figure ‎4-47 à 4-50).

Les profils obtenus montrent des répartitions variées, fortement dépendantes du champ appliqué,

de la température et de la durée de conditionnement. Des répartitions fluctuantes avec le temps

sont observées durant les conditionnements à 25°C et 105°C, alors que les formes des

distributions sont relativement stables à 60°C et 85°C. Ceci met en évidence le bilan entre

injection, piégeage et dépiégeage, qui conduit à l’accumulation de charges d’espace, et où chacun

Page 149: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

137

des trois facteurs cités dépend à des degrés divers du champ électrique et de la température. Nous

rappelons que les charges et les gradients de polarisation observés sont celles et ceux dont les

constantes de temps associées aux profondeurs du piège ou aux mouvements de dépolarisation

sont supérieures à la durée de la mesure ; les charges piégées dans des pièges peu profonds et les

charges liées dont l’énergie d’activation est faible et ne sont donc pas mesurées.

Figure 4-47 : Distributions de champs électriques résiduels et de densités de charges d’espace

mesurées durant le conditionnement à 25°C

Figure ‎4-48 : Distributions de champs électriques résiduels et de densités de charges d’espace

mesurées durant le conditionnement à 60°C

Suite au conditionnement sous champ faible (3 kV/mm) à 25°C, on observe après un jour un

champ résiduel de l’ordre de 0,75 kV/mm, qui diminue en-dessous de 0,4 kV/mm après 3 jours.

Cette évolution s’accompagne également d’une fluctuation de la répartition de la charge aux

électrodes.

-1,5

-1,25

-1

-0,75

-0,5

-0,25

0

0,25

0,5

0,75

1

1,25

1,5

0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1

Ch

am

p é

lect

riq

ue

sid

ue

l (kV

/mm

)

Epaisseur (mm)

1 j, 25°C, 3kV/mm

3 j, 25°C, 3 kV/mm

7 j, 25°C, 3 kV/mm

1 j, 25°C, 12 kV/mm

3 j, 25°C, 12 kV/mm

7 j, 25°C, 12 kV/mm

Anode Cathode

25°C

-1

-0,8

-0,6

-0,4

-0,2

0

0,2

0,4

0,6

0,8

1

0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1

De

nsi

té d

e c

ha

rge

s d

'esp

ace

(C

/m3)

Epaisseur (mm)

1 j, 25°C, 3kV/mm

3 j, 25°C, 3 kV/mm

7 j, 25°C, 3 kV/mm

1 j, 25°C, 12 kV/mm

3 j, 25°C, 12 kV/mm

7 j, 25°C, 12 kV/mm

Anode Cathode

25°C

-1,5

-1,25

-1

-0,75

-0,5

-0,25

0

0,25

0,5

0,75

1

1,25

1,5

0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1

Ch

am

p é

lect

riq

ue

sid

ue

l (kV

/mm

)

Epaisseur (mm)

1 j, 60°C, 3kV/mm

3 j, 60°C, 3 kV/mm

7 j, 60°C, 3 kV/mm

1 j, 60°C, 12 kV/mm

3 j, 60°C, 12 kV/mm

7 j, 60°C, 12 kV/mm

Anode Cathode

60°C

-1

-0,8

-0,6

-0,4

-0,2

0

0,2

0,4

0,6

0,8

1

0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1

De

nsi

té d

e c

ha

rge

s d

'esp

ace

(C

/m3)

Epaisseur (mm)

1 j, 60°C, 3kV/mm

3 j, 60°C, 3 kV/mm

7 j, 60°C, 3 kV/mm

1 j, 60°C, 12 kV/mm

3 j, 60°C, 12 kV/mm

7 j, 60°C, 12 kV/mm

Anode Cathode

60°C

Page 150: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

138

Figure 4-49 : Distributions de champs électriques résiduels et de densités de charges d’espace

mesurées durant le conditionnement à 85°C

Figure 4-50 : Distributions de champs électriques résiduels et de densités de charges d’espace

mesurées durant le conditionnement à 105°C

Compte tenu des faibles valeurs du champ appliqué et résiduel, il est probable que cette évolution

soit liée à des mouvements de charges dans des pièges relativement peu profonds, qui se

superposent à la polarisation, l’équilibre étant atteint au bout de quelques jours. Le fait que nous

ayons également observé une décroissance de l’amplitude des courants d’onde thermique et une

variation de leur forme pendant la période de stabilisation en court-circuit qui a précédé

l’acquisition des profils présentés va dans ce sens. Après un jour de conditionnement à

12 kV/mm, on observe, en dehors des phénomènes liés à la polarisation, un champ résiduel à la

cathode de l’ordre du kV/mm, accompagné d’homocharges associées à de l’injection et à du

piégeage. Ces charges à la cathode ne sont plus observables après 3 jours de conditionnement,

-4

-3,5

-3

-2,5

-2

-1,5

-1

-0,5

0

0,5

1

1,5

2

2,5

3

3,5

4

0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1

Ch

am

p é

lect

riq

ue

sid

ue

l (kV

/mm

)

Epaisseur (mm)

1 j, 85°C, 3kV/mm

3 j, 85°C, 3 kV/mm

7 j, 85°C, 3 kV/mm

1 j, 85°C, 12 kV/mm

3 j, 85°C, 12 kV/mm

7 j, 85°C, 12 kV/mm

Anode Cathode

85°C

-1

-0,8

-0,6

-0,4

-0,2

0

0,2

0,4

0,6

0,8

1

1,2

0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1

De

nsi

té d

e c

ha

rge

s d

'esp

ace

(C

/m3)

Epaisseur (mm)

1 j, 85°C, 3kV/mm

3 j, 85°C, 3 kV/mm

7 j, 85°C, 3 kV/mm

1 j, 85°C, 12 kV/mm

3 j, 85°C, 12 kV/mm

7 j, 85°C, 12 kV/mm

Anode Cathode

85°C

-1,5

-1,25

-1

-0,75

-0,5

-0,25

0

0,25

0,5

0,75

1

1,25

1,5

0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1

Ch

am

p é

lect

riq

ue

sid

ue

l (k

V/m

m)

Epaisseur (mm)

1 j, 105°C, 3kV/mm

3 j, 105°C, 3 kV/mm

7 j, 105°C, 3 kV/mm

1 j, 105°C, 12 kV/mm

3 j, 105°C, 12 kV/mm

7 j, 105°C, 12 kV/mm

Anode Cathode

105°C

-1

-0,8

-0,6

-0,4

-0,2

0

0,2

0,4

0,6

0,8

1

0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1

De

nsi

té d

e c

ha

rge

s d

'esp

ace

(C

/m3)

Epaisseur (mm)

1 j, 105°C, 3kV/mm

3 j, 105°C, 3 kV/mm

7 j, 105°C, 3 kV/mm

1 j, 105°C, 12 kV/mm

3 j, 105°C, 12 kV/mm

7 j, 105°C, 12 kV/mm

Anode Cathode

105°C

Page 151: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

139

mais on les retrouve après 7 jours d’application de la contrainte. Ceci illustre des processus de

piégeage/dépiégeage dans des pièges avec des constantes de temps de quelques dizaines d’heures.

Les résultats du conditionnement à 105°C sous 3 kV/mm font ressortir de très faibles valeurs du

champ résiduel (< 0,25 kV/mm) et des répartitions de type polarisation, stables dans le temps.

Pour des champs aussi faibles à des températures élevées, la conduction dans ce matériau est

donc prédominante sur l’injection et le piégeage, ce qui n’est pas étonnant. Des phénomènes de

piégeage sont en revanche mis en évidence durant le conditionnement réalisé à 105°C sous

12 kV/mm, aux deux électrodes après 1 jour et à l’anode après 3 jours. Une zone de charge

négative est également identifiée près de la cathode après 3 jours, laissant penser à une migration

vers le volume des charges injectées précédemment. Cependant, les champs internes résiduels

associés sont, dans les deux cas, faibles (< 0,4 kV/mm). Après 7 jours, ces charges ne sont plus

observables : on retrouve ainsi une répartition de type polarisation, avec néanmoins un champ

associé de l’ordre du kV/mm. Ceci laisse supposer des phénomènes d’injection, piégeage et

dépiégeage périodiques, avec la possibilité d’accumulations pouvant donner naissance, à certains

moments, à des champs résiduels beaucoup plus élevés que ceux que nous avons observés aux

instants où nous avons procédé aux mesures présentées ci-avant.

Dans le cas du conditionnement à 60°C, on retrouve des répartitions de type polarisation,

symétriques et stables dans le temps, les champs résiduels associés augmentant avec la hausse de

la contrainte (de l’ordre de 0,75 à 1 kV/mm pour le conditionnement sous 3 kV/mm et de 1 à

1,4 kV/mm sous 12 kV/mm). En revanche, à 85°C, si la forme des répartitions et les valeurs des

champs sont similaires à celles observées à 60°C pour le conditionnement sous 3 kV/mm, les

répartitions de charge et de champ à l’anode se révèlent différentes sous 12 kV/mm. On observe

ainsi des homocharges à l’anode dont la densité augmente avec le temps et qui, au bout de 7

jours, génèrent un champ résiduel avoisinant les 4 kV/mm, donc de l’ordre de 30 % du champ

appliqué, ce qui n’est pas négligeable.

L’analyse de ces résultats permet de conclure à la possibilité de voir s’établir dans le composite

étudié, lorsque les champs appliqués dépassent la dizaine de kV/mm et la température du

matériau est supérieure à 80°C, des contraintes résiduelles dues à des porteurs piégés

profondément pouvant atteindre assez rapidement 30 % de la contrainte appliquée, et très

probablement davantage. On remarquera que ces valeurs sont du même ordre que celles observés

sur le même type de résine mais avec une charge de silice(renforcement de champ de 15 % pour

un champ appliqué de 2 kV/mm, pouvant atteindre environ 50 % pour un champ de 30 kV/mm

[GUI104]).

Page 152: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

140

Cependant, bien que donnant un aperçu sur les contraintes réelles à prendre en compte, les

données que nous avons obtenues et analysées ci-dessus ne permettent pas d’appréhender la

dynamique de la charge d’espace à long terme, ni de déterminer les valeurs du champ résiduel

auxquelles on peut s’attendre après des durées plus élevées. Afin d’étudier cette problématique,

nous avons donc réalisé une étude à long terme, que nous présentons dans la section suivante.

4.7 Évolution à long terme des propriétés diélectriques du composite

4.7.1 Aspects liés à la mise en œuvre expérimentale

L’étude a été réalisée sur des échantillons type 2 pour neuf conditions de vieillissement

différentes (température, champ électrique continu). Le choix des contraintes thermiques (85, 105

et 125°C) a été dicté par le souci de tester le matériau à des températures proches des

températures maximales subies en fonctionnement par les disjoncteurs haute tension, ainsi que

par la volonté d’évaluer le comportement du matériau autour de sa température de transition

vitreuse. Nous rappelons que la température maximale visée pour les DIG en service est de

105°C, alors que la température de transition vitreuse du composite étudiée est proche de 110°C.

Concernant les valeurs de champ électrique utilisées lors des vieillissements, tel que pour les

mesures de charges d’espace décrites à la section précédente, nous avons fait le choix d’appliquer

des valeurs situées pour certaines en dessous et pour d’autres au-dessus des « champs seuils »

déterminées lors de la phase de caractérisation de la résine (4,5 à 10 kV/mm). Ainsi, pour chaque

température de vieillissement, des échantillons ont été soumis à 4, 8 et 12 kV/mm pendant une

durée de 12 mois. La mise en œuvre expérimentale que nous avons conçue et présentée au

Chapitre 3 a permis d’amener l’ensemble des échantillons au terme de la phase de vieillissement,

quelles que soient les contraintes appliquées.

L’évolution des propriétés diélectriques de la résine époxy chargée d’alumine a été étudiée à

travers la capacité électrique, le facteur de pertes et le champ électrique résiduel des échantillons

vieillis. Afin de perturber le moins possible leur état électrique interne, pour chaque point de

caractérisation et pour chaque échantillon placé sous contraintes, la procédure a été la suivante :

- diminution de la température de la cellule de vieillissement jusqu’à température ambiante tout

en gardant la contrainte électrique appliquée ;

- arrêt de la contrainte électrique ;

- retrait des échantillons de la cellule de vieillissement ;

- mesure des charges d’espace et du champ électrique interne par la méthode de l’onde thermique

en conditions de court-circuit ;

Page 153: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

141

- mesure de la capacité électrique et du facteur de pertes à température ambiante, dans une plage

de fréquences comprise entre 0,1 Hz et 1 MHz ;

- remise des échantillons dans la cellule et reprise du vieillissement.

Le caractère non destructif des techniques employées permet d’évaluer l’état d’un matériau sans

pour autant modifier celui-ci pendant la mesure. Pour les mesures de charges d’espace, du fait de

la configuration particulière des échantillons type 2, il n’est pas possible de remonter aux

distributions de charges d’espace et de champ électrique interne, car la non-uniformité de

l’épaisseur (nécessaire pour diminuer les effets de bord pendant le vieillissement) ne permet pas

de considérer la diffusion de la chaleur dans une configuration plan-plan sans engendrer des

erreurs importantes. L’évolution de la valeur maximale du courant d’onde thermique mesurée

pendant les vieillissements a ainsi été utilisée comme indicateur. Elle nous a permis, par

corrélation avec des étalonnages réalisés sous faible champ continu à l’état initial, d’estimer les

valeurs des champs électriques internes dans les échantillons.

Dans le cas des mesures par spectroscopie diélectrique, il est en principe possible de déterminer

la permittivité du matériau si les caractéristiques géométriques de l’échantillon sont connues,

même s’il ne s’agit pas d’une configuration plan-parallèle, comme nous l’avons montré au

Chapitre 3. En pratique, nous verrons que la variation pendant le vieillissement de la surface des

électrodes en or déposées sur les échantillons nous a contraints à nous contenter de suivre les

évolutions de la capacité. Ceci est néanmoins amplement suffisant pour rendre compte de

l’évolution du matériau.

Cinq échantillons type 2 d’épaisseur 0,7 mm (décrits au Chapitre 3) ont été utilisés pour chaque

vieillissement afin d’augmenter la fiabilité statistique des résultats. A l’exclusion des exemples de

courants d’onde thermique, toutes les données présentées ci-après représentent, pour chaque point

de mesure, des moyennes des valeurs obtenues sur les 5 échantillons conditionnés en parallèle

dans la même cellule.

4.7.2 Vieillissements à 125°C

7.2.1.4 Capacité et facteur de pertes

Les Figures 4-51 à 4-54 présentent l'évolution des moyennes des capacités électriques et des

facteurs de pertes des 5 échantillons durant les 12 mois de vieillissement à 125°C.

Une diminution du facteur de pertes est clairement observée pour les basses fréquences dès les

premières mesures (15 jours après application de la contrainte), quelle que soit la valeur du

champ électrique de vieillissement. La valeur de tan passe ainsi de 1-2*10-2

à environ 3*10-3

Page 154: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

142

pour une fréquence de 10-1

Hz, soit une baisse d’environ 80%. Une diminution similaire est

observée au début du vieillissement de l’échantillon « témoin thermique », qui n’a été soumis

qu’à la température (l'échantillon E16 - Figure ‎4-54). On en conclut à un effet lié à la contrainte

thermique.

Afin d’interpréter ce résultat, on rappelle que nous avons montré à la section 4.2 que l’absorption

d’eau par le matériau, même en faible quantité, augmente significativement le facteur de pertes ;

l’élimination d’eau absorbée par le matériau mène à l’effet contraire. Il est ainsi certain que la

soumission pendant 15 jours du composite à une température de 125°C a eu pour conséquence

une désorption d’eau significative, qui est, dans une mesure prépondérante, à l’origine de cette

forte baisse du facteur de pertes au début du vieillissement. D’autres facteurs, tels la variation de

la mobilité moléculaire et la poursuite du phénomène de réticulation pourraient aussi contribuer,

dans une moindre mesure, à cette variation.

Après la baisse observée au début du vieillissement, les spectres oscillent autour d’une valeur

d’équilibre, et il est difficile de conclure à une relation claire entre cette évolution et le champ

appliqué ou la durée du vieillissement. Il n’apparaît donc pas que la contrainte électrique soit la

source principale de ce comportement, bien qu’une certaine influence ne puisse être exclue,

comme nous le verrons par la suite. Il est en revanche très probable que ces variations réversibles

soient la manifestation de phénomènes périodiques d’absorption/désorption d’eau lors des cycles

mesures/vieillissement. En effet, la réalisation de campagnes de mesure tous les 15 à 30 jours a

nécessité, à chaque fois, de retirer les échantillons de leur cellule de vieillissement pendant 1 à 2

jours. Les mesures de spectroscopie et de charges d’espace se faisant à température, pression et

humidité ambiante, le matériau s’est vraisemblablement chargé en eau pendant cette durée, qui,

comme nous l’avons montré dans les sections liées à la permittivité et à la résistivité volumique,

est suffisante pour avoir un effet visible sur ces propriétés. Ceci est d’autant plus probable que les

mesures de capacité et de facteur de pertes ont toujours été réalisées en dernier, après les mesures

de charges d’espace ; le matériau a donc eu le temps d’absorber de l’humidité ambiante. Par la

suite, la contrainte thermique subie pendant les périodes de vieillissement a contribué à éliminer

l’eau absorbée lors de la période passée hors contrainte. Les variations observées du facteur de

pertes s’expliquent alors selon l’humidité ambiante plus ou moins importante que les échantillons

ont rencontré lors de chaque campagne de mesure, les périodes où ce taux d’humidité a été le

plus fort ayant eu pour résultat des augmentations plus importantes du tan par rapport à la

valeur minimale mesurée. Il est à noter qu’un comportement similaire a été observé pendant le

vieillissement à 105°C et à 85°C, comme nous le verrons dans les sections suivantes. Si la

dynamique de diminution initiale du tan à 105°C est très proche de celle observée à 125°C, elle

Page 155: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

143

est plus progressive à 85°C, alors que les variations sont par la suite similaires dans les trois cas ;

ceci va dans le sens du raisonnement précédent.

Dans les figures 4-51 et 4-52, une diminution significative de la capacité électrique (valeur

moyenne réalisée sur 5 échantillons) apparaît à partir de 110 jours à 12 kV/mm et à partir de 130

jours à 8 kV/mm. Cette baisse ne peut pas être attribuée à une évolution structurale du matériau

car elle ne s’accompagne d’aucun effet corrélable avec l’évolution du facteur de pertes.

Figure ‎4-51 : Évolution de la capacité et du facteur de pertes

durant le vieillissement réalisé sous 12 kV/mm à 125°C

100

102

104

106

70

80

90

100

110

120

130

140

150

160

Fréquence [Hz]

C [

pF

]

12 k V/mm 125°C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

110 j

130 j

150 j

175 j

215 j

235 j

255 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

100

102

104

106

10-3

10-2

10-1

Fréquence [Hz]

Tan

delt

a

12 k V/mm 125°C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

110 j

130 j

150 j

175 j

215 j

235 j

255 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

Page 156: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

144

Figure 4-52 : Évolution de la capacité et du facteur de pertes

durant le vieillissement réalisé sous 8 kV/mm à 125°C

En analysant les échantillons en cause, des dégradations des électrodes déposées en surface des

échantillons pour assurer le contact électrique pendant le conditionnement et les mesures ont été

constatées (Figure ‎4-55). Cette diminution significative de la capacité le long du vieillissement

est ainsi due à une détérioration progressive des électrodes en or des échantillons placés au plus

proche des bords de la cellule de vieillissement, à proximité de l’entrée du gaz, et soumis aux

champs électriques les plus élevés (8 et 12 kV/mm). En effet, malgré les précautions prises dans

100

102

104

106

110

115

120

125

130

135

140

145

150

155

Fréquence [Hz]

C [

pF

]

8 k V/mm 125 °C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

110 j

130 j

150 j

175 j

235 j

255 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

100

102

104

106

10-3

10-2

10-1

Fréquence [Hz]

Tan

delt

a

8 k V/mm 125 °C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

110 j

130 j

150 j

175 j

235 j

255 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

Page 157: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

145

la mise en œuvre expérimentale, des décharges surfaciques, se produisant à cet endroit, ont

provoqué l’arrachement de particules d’or des électrodes déposées en surface des échantillons, en

engendrant une diminution de la surface des électrodes. La capacité étant proportionnelle à la

surface des électrodes, elle diminue en conséquence. Malgré cette diminution de la surface des

électrodes, les valeurs de capacité, la forme des spectres et les valeurs de champ résiduel ont pu

être déterminées. Le vieillissement sous 12 kV/mm a donc été poursuivi afin de tirer des

informations relatives à l’évolution morphologique du matériau et à l’évolution des phénomènes

d’accumulation de charge d’espace. Il est à noter que, malgré la dégradation des électrodes,

aucun claquage n'a été observé jusqu'à la fin du vieillissement réalisé sous 12 kV/mm; l’ensemble

des échantillons ont été amenés jusqu’aux 12 mois prévus pour le vieillissement. Néanmoins, ce

phénomène ne nous a pas permis d’extraire la permittivité réelle du matériau de la capacité

mesurée en utilisant l’expression établie au Chapitre 3, la surface des échantillons n’ayant pas pu

être déterminée avec précision à chaque mesure en raison de sa trop grande irrégularité

périphérique.

Pour le vieillissement réalisé sous 4 kV/mm à 125°C (Figure ‎4-53), après la diminution du

facteur de pertes observée au début du vieillissement et dont l’origine a été discutée

précédemment, la capacité et le facteur de pertes ont montré peu de variations durant

l’application des contraintes. Si l’on s’intéresse à la capacité, ses variations beaucoup plus faibles

peuvent être corrélées à l’état des électrodes, qui ne se sont pas dégradées pendant ce

vieillissement, contrairement à celles des échantillons vieillis à 8 kV/mm et 12 kV/mm.

Si l’on compare les évolutions du facteur de pertes observées aux 3 champs de vieillissement, on

s’aperçoit que l’amplitude des variations des spectres est d’autant plus grande que la contrainte

électrique augmente : la « dispersion verticale » des spectres est ainsi la plus faible durant le

vieillissement à 4 kV/mm et la plus élevée durant le vieillissement à 12 kV/mm. Il est alors

probable que, en dehors des effets liés à la diminution de la surface des électrodes que nous avons

discutés, l’injection et le piégeage/dépiégeage périodique de charges aient une influence sur les

résultats. En effet, comme ont pu le montrer les mesures de charges d’espace, des phénomènes de

piégeage/dépiégeage périodiques peuvent se manifester dans le matériau en haute température

sous des champs supérieurs à 8 kV/mm. Il n’est alors pas exclu que ce type de phénomène ait un

effet sur cette dispersion des spectres, surtout en basse fréquence.

Page 158: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

146

Figure 4-53 : Évolution de la capacité et du facteur de pertes

durant le vieillissement réalisé sous 4 kV/mm à 125°C

Dans ce sens, il est à noter que la polarisation interfaciale ou les effets liés à la conductivité

peuvent être mis en évidence à des fréquences basses. Ce type de comportement, dont l’évolution

sous l’effet du champ continu est susceptible d’apporter des informations d’un point de vue

électrique, est difficilement identifiable sur les spectres mesurés, sans doute parce qu’il devient

observable pour notre matériau à des fréquences plus basses (10-2

à 10-4

Hz). Étant donné les

durées importantes que nécessiteraient des mesures à ces fréquences et le nombre d’échantillons

nécessaires pour obtenir des résultats statistiquement significatifs, un suivi de l’évolution des

100

102

104

106

70

80

90

100

110

120

130

140

150

160

Fréquence [Hz]

C [

pF

]

4 k V/mm 125° C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

110 j

130 j

150 j

175 j

215 j

235 j

255 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

100

102

104

106

10-3

10-2

10-1 4 k V/mm 125°C

Fréquence [Hz]

Tan

delt

a

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

110 j

130 j

150 j

175 j

215 j

235 j

255 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

Page 159: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

147

spectres dans le domaine [10-4

Hz…10-2

Hz] était malheureusement difficilement compatible

avec une durée raisonnable de l’étude. Pour cette raison, et également pour obtenir des

informations concernant l’amplitude des champs résiduels, des mesures de charges d’espace ont

été réalisées pendant le vieillissement.

Figure 4-54 : Évolution de la capacité et du facteur de pertes de l’échantillon vieilli uniquement

thermiquement à 125°C

100

102

104

106

70

80

90

100

110

120

130

140

150

160

Fréquence [Hz]

C [

pF

]E16 0 kV/mm 125°C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

110 j

130 j

150 j

175 j

215 j

235 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

100

102

104

106

10-3

10-2

10-1

Fréquence [Hz]

Tan

delt

a

E16 0 kV/mm 125°C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

110 j

130 j

150 j

175 j

215 j

235 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

Page 160: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

148

Figure 4-55 : Effets des décharges superficielles sur les électrodes

des échantillons vieillis à 125°C sous 12 kV/mm

7.2.2.4 Charges d’espace et champ électrique interne

Des mesures de charges d'espace ont été effectuées en utilisant la méthode de l'onde thermique

(MOT). La Figure 4-56 ci-après montre des exemples d'évolution de signaux MOT mesurés sur

des échantillons vieillis à 125°C, sous 4, 8 et 12 kV/mm.

Comme nous l’avons indiqué auparavant, la géométrie des échantillons utilisés pour le

vieillissement ne rend pas possible l’obtention de distributions de champs et charges dans

l’épaisseur avec une précision raisonnable. En revanche, les allures des courbes étant similaires,

il est possible, dans une première approche, de comparer leurs amplitudes (maximums des

courants en valeur absolue, IMax = Max (|IMOT(t)|) afin de les corréler avec l’évolution de la charge

d’espace durant le vieillissement. Cette valeur maximale du courant MOT permet, en fonction

des étalonnages réalisés sous faible champ continu à l’état initial, de donner des valeurs

approchées du champ électrique résiduel dans les échantillons lors des vieillissements.

On rappelle ainsi que le courant MOT est proportionnel à la capacité électrique de l’échantillon

excité thermiquement :

0

,d

MOT

T x tI t C E x dx

t

4-6

Tous les échantillons n’ayant pas une capacité identique (ce qui est d’autant plus vrai pour ceux

qui ont vu la surface de leurs électrodes diminuer durant le vieillissement), l'amplitude du signal

d’onde thermique doit être normalisée afin d’assurer une bonne comparaison des données

obtenues sur les différents échantillons.

Page 161: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

149

Figure ‎4-56 : Exemples de courants MOT

obtenus sur des échantillons vieillis sous 12, 8 et 4 kV/mm à 125°C

0 5 10 15-300

-250

-200

-150

-100

-50

0

Temps [S]

Co

ura

nt

[pA

]

E2 - 12 kV/mm - 125°C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

110 j

130 j

150 j

175 j

215 j

235 j

255 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

0 5 10 15-300

-250

-200

-150

-100

-50

0

Temps [S]

Co

ura

nt

[pA

]

E6 - 8 kV/mm - 125°C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

110 j

130 j

150 j

175 j

215 j

235 j

255 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

0 5 10 15-300

-250

-200

-150

-100

-50

0

Temps [S]

Co

ura

nt

[pA

]

E14 - 4 kV/mm - 125°C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

110 j

130 j

150 j

175 j

215 j

235 j

255 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

Page 162: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

150

Pour cette raison, les courbes représentées dans la Figure ‎4-57 ont été obtenues à partir des

données représentant le rapport IMax/C (entre l’amplitude IMax du courant MOT mesuré et la

capacité C mesurée de l’échantillon) en fonction de la durée de mise sous contraintes :

0

,d

MOTI t T x tE x dx

C t

4-7

Afin d’assurer une représentativité statistique, chaque point figurant sur la Figure ‎4-57 représente

la moyenne des valeurs de IMax/C mesurées sur les cinq échantillons soumis à la même contrainte

de vieillissement.

Figure 4-57 : Évolutions des valeurs maximales normalisées des courants MOT (moyenne sur 5

échantillons) lors des vieillissements à 125°C

Afin d'obtenir des valeurs approchées du champ électrique interne, on peut utiliser le théorème de

la moyenne. En effet, pour toutes fonctions d'une variable réelle f et g continues sur le segment

[a, b], avec a < b, g gardant un signe constant sur [a, b], il existe un réel c ]a, b[ tel que :

b b

a a

f x g x dx f c g x dx 4-8

Si l’on applique cette propriété à l’équation du courant d’onde thermique (en posant f(x) = E(x) et

g(x) = T(x,t)/t, il résulte qu’à chaque instant t la valeur du courant IMOT(t) est le produit d’une

0

0,5

1

1,5

2

2,5

3

3,5

0 50 100 150 200 250 300 350 400

I MA

X /C

[A

/F]

Temps de conditionnement [Jours]

12 kV/mm

8 kV/mm

4 kV/mm

Page 163: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

151

valeur particulière du champ E(c) dans l’échantillon par l’intégrale du stimulus thermique. Pour

le maximum du courant, on a donc, en regardant la composante du champ dans la direction de

l'épaisseur considérée prépondérante :

0

,, 0,

d

MaxMaxT x tI

E c dx avec c dC t

4-9

Si l’on dispose d’un courant d’étalonnage, on peut alors déterminer, à travers le rapport entre le

maximum du courant mesuré et celui du courant d’étalonnage, la valeur du rapport entre le

champ E(c) et le champ d’étalonnage et, si ce dernier est connu, la valeur E(c). On obtient ainsi

l’une des valeurs du champ dans l’échantillon, ce qui permet d’estimer l’ordre de grandeur du

champ résiduel dans le matériau.

Afin d’évaluer le champ électrique interne dans les échantillons, nous avons appliqué la

procédure classique d'étalonnage de la méthode de l'onde thermique, sous faible champ électrique

continu, décrite dans le paragraphe 2.6.2. Pour effectuer ces mesures, nous avons utilisé deux

échantillons identiques type 2 et le montage en « double condensateur ». La tension appliquée sur

l'électrode centrale a été de +/- 1000 V, représentant une valeur de champ appliquée au centre de

l’échantillon de 1,43 kV/mm.

Les courants MOT mesurés sont donnés dans la Figure ‎4-58. Il en ressort qu'un champ appliqué

de 1,43 kV/mm engendre, sur un échantillon type 2 de 0,7 mm d'épaisseur utile, une

augmentation de signal d'environ 45 pA. Cette valeur est équivalente à une amplitude double en

condition de court circuit (« simple condensateur »), soit 90 pA. Les courants mesurés pour les

tensions appliquées de +/- 1 kV ne sont pas tout à fait symétriques puisque le courant mesuré à -

1 kV a été mesuré 6 heures après l'application de la tension négative afin d'obtenir un signal plus

stable, ce qui a dû sans doute avoir pour résultat une petite modification de l’état interne, mais les

ordres de grandeur sont respectés.

En tenant compte des valeurs normalisées des courants, nous avons ainsi pu déduire que 0,43 A/F

correspondent à un champ interne dans l’échantillon de l’ordre de 1 kV/mm.

En utilisant la valeur ainsi obtenue, nous avons tracé la courbe de la Figure ‎4-59. Son allure est

bien évidemment identique à celle de la Figure ‎4-57.

Page 164: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

152

Figure 4-58 : Courants MOT d'étalonnage mesurés sur des échantillons

de résine type 2 de 0,7 mm d'épaisseur utile

Figure ‎4-59 : Évolutions des valeurs approchées du champ résiduel

lors des vieillissements à 125°C

Il ressort de l’analyse des courbes (Figure ‎4-57 et Figure ‎4-59) que l’évolution du champ interne

n'est pas monotone avec la durée de vieillissement. Ainsi, une augmentation est visible jusqu’à

175 jours sous 12 kV/mm et jusqu'à 130 jours sous 8 kV/mm. Les valeurs mesurées sous

0 5 10 15-60

-40

-20

0

20

40

60

80

Temps [S]

Co

ura

nt

d'o

nd

e t

herm

iqu

e[p

A]

1000 V

- 1000 V

0

1

2

3

4

5

6

7

8

0 50 100 150 200 250 300 350 400

E [

kV

/mm

]

Temps de condtionnement [Jours]

12 kV/mm

8 kV/mm

4 kV/mm

Page 165: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

153

8 kV/mm diminuent par la suite, puis une nouvelle tendance à l’augmentation apparaît après 215

jours de conditionnement, mais avec une dynamique à priori plus faible. Une diminution très

importante marquant un possible dépiégeage de la charge stockée apparait après 295 jours avant

une nouvelle augmentation après 340 jours de vieillissement. En revanche, pour la plus faible

valeur de champ appliqué (4 kV/mm), une tendance à la stabilisation est observée à partir de 215

jours de vieillissement.

Concernant le vieillissement sous 12 kV/mm, le champ interne augmente quasi-continuellement

jusqu’à 175 jours, puis des oscillations sont observées autour d’une valeur d’équilibre. Ces

oscillations sont vraisemblablement reliées à des phénomènes successifs d’accumulation puis de

dépiégeage de charges. Comme la charge accumulée est un équilibre entre les porteurs injectés et

ceux évacués par conduction, ces évolutions peuvent être interprétées comme le résultat de

l'évacuation périodique d'une fraction des charges accumulées sous l'effet du champ interne.

Ainsi, tant que les charges sont accumulées dans des pièges relativement peu profonds, elles

peuvent être facilement dépiégées pour des valeurs plus basses du champ interne. En revanche,

les charges stockées dans des pièges profonds vont être dépiégées plus difficilement. Une plus

grande valeur du champ sera nécessaire pour faciliter la libération de ces charges. Par

conséquent, les charges continueront à s'accumuler jusqu'à ce que le champ interne atteigne des

valeurs capables de favoriser l'extraction des charges des pièges profonds, puis le phénomène va

recommencer.

Indépendamment de la dynamique d’évolution des charges, il est à noter que les niveaux de

charges maximum observés sont d’autant plus importants que le champ électrique appliqué est

élevé. Les valeurs de champ électrique interne que nous avons pu estimer sont de l’ordre de 6 à

7 kV/mm pour des champs appliqués de 8 et 12 kV/mm, donc jusqu’à 75 % de la contrainte

appliquée. Vu la manière que nous avons utilisée pour calculer ces valeurs, il ne fait pas de doute

que dans certaines régions du volume de l’isolant le champ résiduel est encore plus élevé. Il faut

également garder en mémoire que les signaux MOT mesurés sont l’image des charges piégées

dans des défauts profonds (« charges statiques »), et que les effets des charges piégées peu

profondément ne sont pas pris en compte dans ces mesures, ce qui peut amplifier davantage le

champ interne.

4.7.3 Vieillissements à 105°C

7.3.1.4 Capacité et facteur de pertes

Les Figures 4-60 à 4-62 présentent l'évolution des spectres diélectriques mesurés durant les 12

mois de vieillissement à 105°C. Comme pour les vieillissements réalisés à 125°C, une diminution

Page 166: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

154

du facteur de pertes apparaît en basse fréquence dès les premières mesures (après 50 jours de

mise sous contraintes), quelle que soit la valeur du champ électrique appliqué.

Figure 4-60 : Évolution de la capacité et du facteur de pertes

durant le vieillissement réalisé sous 12 kV/mm à 105°C

Cette baisse, que nous avons attribuée à l’effet de l’élimination d’eau du matériau sous l’effet de

la température, est du même ordre de grandeur que pour 125°C (environ 80%). Par la suite, quel

que soit le champ électrique appliqué, les valeurs relevées de capacité et tan évoluent

100

102

104

106

70

80

90

100

110

120

130

140

150

160

Fréquence [Hz]

C [

pF

]

12 k V/mm 105°C

0 j

50 j

70 j

90 j

110 j

130 j

150 j

175 j

195 j

235 j

255 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

100

102

104

106

10-3

10-2

10-1

Fréquence [Hz]

Tan

delt

a

12 k V/mm 105°C

0 j

50 j

70 j

90 j

110 j

130 j

150 j

175 j

195 j

235 j

255 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

Page 167: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

155

faiblement : les spectres oscillent ainsi autour des mêmes valeurs jusqu’aux 360 jours de

vieillissement.

Figure 4-61 : Évolution de la capacité et du facteur de pertes

durant le vieillissement réalisé sous 8 kV/mm à 105°C

On peut ainsi conclure à des comportements régis par des phénomènes similaires à ceux observés

à 125°C. Néanmoins, les problèmes liés à la détérioration des électrodes n’ont pas été rencontrés

à 105°C, d’où les variations beaucoup plus faibles de la capacité. Pour ce qui est du facteur des

pertes, on rencontre le même comportement qu’à 125°C ; mise à part le phénomène

100

102

104

106

70

80

90

100

110

120

130

140

150

160

Fréquence [Hz]

C [

pF

]

8 k V/mm 105 °C

0 j

50 j

70 j

110 j

130 j

150 j

175 j

195 j

215 j

235 j

255 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

100

102

104

106

10-3

10-2

10-1

Fréquence [Hz]

Tan

delt

a

8 k V/mm 105 °C

0 j

50 j

70 j

110 j

130 j

150 j

175 j

195 j

215 j

235 j

255 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

Page 168: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

156

d’absorption/résorption périodique d’eau que nous tenons pour responsable de ces variations, on

ne décèle pas de changements morphologiques significatifs dans le matériau pendant ce

vieillissement.

Figure 4-62 : Évolution de la capacité et du facteur de pertes

durant le vieillissement réalisé sous 4 kV/mm à 105°C

7.3.2.4 Charges d’espace et champ électrique interne

La Figure ‎4-63 montre des exemples de signaux MOT obtenus durant les 12 mois de

vieillissement réalisés à 105°C, sous 4, 8 et 12 kV/mm.

100

102

104

106

70

80

90

100

110

120

130

140

150

160

Fréquence [Hz]

C [

pF

]

4 k V/mm 105 °C

0 j

50 j

70 j

90 j

110 j

130 j

150 j

175 j

195 j

215 j

235 j

255 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

100

102

104

106

10-3

10-2

10-1

Fréquence [Hz]

Tan

delt

a

4 k V/mm 105 °C

0 j

50 j

70 j

90 j

110 j

130 j

150 j

175 j

195 j

215 j

235 j

255 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

Page 169: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

157

Figure ‎4-63 : Exemples de courants MOT obtenus sur des échantillons vieillis

sous 12, 8 et 4 kV/mm à 105°C

0 5 10 15-900

-800

-700

-600

-500

-400

-300

-200

-100

0

Temps [S]

Co

ura

nt

[ p

A ]

E3 - 12kV/mm - 105°C

0 j

50 j

70 j

90 j

110 j

130 j

150 j

175 j

195 j

215 j

235 j

255 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

0 5 10 15-900

-800

-700

-600

-500

-400

-300

-200

-100

0

Temps [S]

Co

ura

nt[

pA

]

E8 - 8 kV/mm - 105°C

0 j

50 j

70 j

90 j

110 j

130 j

150 j

175 j

195 j

215 j

235 j

255 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

0 5 10 15-900

-800

-700

-600

-500

-400

-300

-200

-100

0

Temps [S]

Co

ura

nt

[ p

A ]

E15 - 4 kV/mm - 105°C

0 j

50 j

70 j

90 j

110 j

130 j

150 j

175 j

195 j

215 j

235 j

255 j

275 j

295 j

320 j

340 j

360 j

Page 170: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

158

Afin de mieux percevoir l’évolution des signaux en fonction de la durée de vieillissement,

comme pour 125°C, nous avons représenté dans la Figure ‎4-64 les courbes d’évolution des

valeurs maximales normalisées des signaux MOT (moyenne sur 5 échantillons), obtenues pour

les 3 vieillissements à 105°C (4, 8 et 12 kV/mm). Comme pour les vieillissements réalisés à

125°C, nous avons utilisé les signaux d’étalonnage pour déterminer les niveaux de champ

électrique interne présents dans les échantillons analysés.

Figure 4-64 : Évolutions des valeurs maximales normalisées des courants MOT

(moyenne sur 5 échantillons) lors des vieillissements à 105°C

Figure ‎4-65 : Évolutions des valeurs approchées du champ résiduel lors des

vieillissements à 105°C

0

0,5

1

1,5

2

2,5

3

3,5

4

4,5

0 50 100 150 200 250 300 350 400

I M

AX

/C

[A/F

]

Temps de conditionnement [Jours]

12 kV/mm

8 kV/mm

4 kV/mm

0

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

0 50 100 150 200 250 300 350 400

E [

kV

/mm

]

Temps de conditionnement [Jours]

12 kV/mm

8 kV/mm

4 kV/mm

Page 171: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

159

L’analyse de ces courbes fait apparaitre une dynamique d’évolution du champ électrique interne

différente par rapport à celle observée à 125°C. En effet, quelle que soit la valeur du champ

appliqué, les niveaux augmentent sensiblement durant les premières semaines de vieillissement

(jusqu’à 70 jours pour 4 kV/mm à 130 jours pour 8 et 12 kV/mm), puis tendent à se stabiliser,

(voire à diminuer) ensuite, sauf à 12 kV/mm, où l’on observe une nouvelle tendance à

l’augmentation vers la fin de la durée de mise sous contraintes.

La dynamique d’établissement de la charge d’espace est sensiblement plus élevée par rapport aux

vieillissements réalisés à 125°C ; autour de 130 à 175 jours pour les niveaux maximum observés

à 125°C, contre 70 à 130 jours pour les niveaux maximum relevés à 105°C. Il est également à

noter que les niveaux de charge d’espace sont d’autant plus élevés que le champ appliqué est

grand. En plus d’une vitesse d’établissement plus importante, les niveaux de champ interne sont

également plus élevés qu’à 125°C, notamment sous 4 et 12 kV/mm. Les valeurs du champ

électrique résiduel peuvent ainsi atteindre 9 kV/mm pour les échantillons vieillis sous 12 kV/mm

(Figure ‎4-64).

Il en ressort que cette température de 105°C (au demeurant proche de la température de transition

vitreuse du matériau) est susceptible de favoriser les phénomènes d’accumulation des charges

d’espace, d’autant plus marqués que le champ électrique appliqué est élevé. De plus, compte tenu

de la tendance à l’augmentation des niveaux relevés pour 12 kV/mm vers la fin de la durée de

vieillissement, ce niveau de contraintes pourrait, à priori, être le plus préjudiciable de l’ensemble

des tests réalisés.

4.7.4 Vieillissements à 85°C

7.4.1.4 Capacité et facteur de pertes

Les Figures 4-66 à 4-68 présentent l'évolution de la capacité électrique et du facteur de pertes

correspondant aux échantillons vieillis à 85°C.

Comme pour les vieillissements réalisés à 125°C et 105°C, une diminution sensible du facteur de

pertes apparaît en basse fréquence dès les premiers points de caractérisation après la mise sous

contraintes, en raison de l’élimination d'eau. Les spectres sont restés ensuite proches des mêmes

valeurs, sauf pour le vieillissement réalisé sous 12kV/mm, où on remarque une augmentation du

facteur de pertes après 350 jours et 370 jours de vieillissement, accompagnée d'une diminution de

la capacité électrique. On aurait tendance à relier cette évolution (vérifiée sur les 5 échantillons

soumis à 12 kV/mm) à une détérioration des électrodes, mais cet effet n’était pas apparent à

l’inspection visuelle, en contraste avec les tests à 125°C, où les effets des décharges sur les

électrodes étaient clairement identifiables. Un lien avec une évolution du matériau paraît difficile

Page 172: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

160

à concevoir, tant la diminution de la capacité semble importante ; cependant, il n’est pas

totalement à exclure, car la forme des spectres de pertes a évolué en même temps que celle de la

capacité. Il nous paraît néanmoins difficile de tirer des conclusions sans procéder à des analyses

complémentaires sur ces échantillons, qui n’ont pas pu être réalisées dans le cadre de cette étude.

Figure 4-66 : Évolution de la capacité et du facteur de pertes

durant le vieillissement réalisé sous 12 kV/mm à 85°C

100

102

104

106

70

80

90

100

110

120

130

140

150

160

Fréquence [Hz]

C [

pF

]12 k V/mm 85 °C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

90 j

110 j

130 j

150 j

175 j

195 j

215 j

255 j

275 j

295 j

325 j

350 j

370 j

100

102

104

106

10-3

10-2

10-1

Fréquence [Hz]

Tan

delt

a

12 k V/mm 85 °C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

90 j

110 j

130 j

150 j

175 j

195 j

215 j

255 j

275 j

295 j

325 j

350 j

370 j

Page 173: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

161

Figure 4-67 : Évolution de la capacité et du facteur de pertes

durant le vieillissement réalisé sous 8 kV/mm à 85°C

100

102

104

106

70

80

90

100

110

120

130

140

150

160

Fréquence [Hz]

C [

pF

]

8 k V/mm 85 °C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

90 j

110 j

130 j

150 j

175 j

215 j

255 j

275 j

295 j

325 j

350 j

370 j

100

102

104

106

10-3

10-2

10-1

Fréquence [Hz]

Tan

delt

a

8 k V/mm 85 °C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

90 j

110 j

130 j

150 j

175 j

215 j

255 j

275 j

295 j

325 j

350 j

370 j

Page 174: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

162

Figure 4-68 : Évolution de la capacité et du facteur de pertes

durant le vieillissement réalisé sous 4 kV/mm à 85°C

7.4.2.4 Charges d’espace et champ électrique interne

La Figure ‎4-69 présente quelques exemples de signaux MOT obtenus sur des échantillons placés

sous contraintes prolongées à 85°C, sous les trois valeurs de champ électrique appliqué.

100

102

104

106

70

80

90

100

110

120

130

140

150

160

Fréquence [Hz]

C [

pF

]

4 k V/mm 85 °C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

90 j

110 j

130 j

150 j

175 j

195 j

215 j

255 j

295 j

325 j

350 j

370 j

100

102

104

106

10-3

10-2

10-1

Fréquence [Hz]

Tan

delt

a

4 k V/mm 85 °C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

90 j

110 j

130 j

150 j

175 j

195 j

215 j

255 j

295 j

325 j

350 j

370 j

Page 175: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

163

Figure ‎4-69 : Exemples de courants MOT

obtenus sur des échantillons vieillis sous 12, 8 et 4 kV/mm à 85°C

0 5 10 15-400

-350

-300

-250

-200

-150

-100

-50

0

Temps [S]

Co

ura

nt

[pA

]

E2 - 12kV/mm - 85°C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

90 j

110 j

130 j

150 j

175 j

195 j

215 j

255 j

275 j

295 j

325 j

350 j

370 j

0 5 10 15-400

-350

-300

-250

-200

-150

-100

-50

0

Temps [S]

Co

ura

nt

[pA

]

E8 - 8kV/mm - 85°C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

90 j

110 j

130 j

150 j

175 j

195 j

215 j

255 j

275 j

295 j

325 j

350 j

370 j

0 5 10 15-400

-350

-300

-250

-200

-150

-100

-50

0

Temps [S]

Co

ura

nt

[pA

]

E15 - 4kV/mm - 85°C

0 j

15 j

30 j

50 j

70 j

90 j

110 j

130 j

150 j

175 j

195 j

215 j

255 j

275 j

295 j

325 j

350 j

370 j

Page 176: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

164

La Figure ‎4-70 et 4-71 mettent en évidence la dynamique d’évolution des valeurs maximales

normalisées des courants MOT et du champ électrique interne sur la durée d’un an des

vieillissements réalisés à 85°C.

L'évolution et la dynamique de développement des charges d'espace sont sensiblement différentes

de celles observées à 125°C et 105°C. En effet, pour les trois valeurs de champ appliqué, malgré

l’augmentation du champ interne vers la fin du vieillissement, les valeurs sont restées faibles

comparées avec ce que nous avons pu observer aux autres températures de vieillissement. Ainsi,

pour les échantillons vieillis sous 12 kV/mm, le maximum du champ résiduel atteint 4 kV/mm

sur les 300 premiers jours de vieillissement, contre 9 kV/mm à 105°C et 7 kV/mm à 125°C. De

même, pour les échantillons vieillis sous 8 kV/mm, la valeur maximale du champ est de l’ordre

de 3,5 kV/mm, contre 6 kV/mm à 105°C et à 125°C. Pour les échantillons vieillis sous 4 kV/mm,

le niveau maximum du champ est de l’ordre de 2 kV/mm à 85°C, comparé aux 5 kV/mm à 105°C

et aux 1,9 kV/mm à 125°C.

Figure 4-70 : Évolutions des valeurs maximales normalisées des courants MOT

(moyenne sur 5 échantillons) lors des vieillissements à 85°C

L'évolution du champ résiduel à 85°C semble donc montrer que ce type de contraintes appliquées

au composite étudié est moins favorable à l’accumulation de charges d'espace, tout au moins si

on considère le début de vieillissement (jusqu’à 300 jours). La tendance à l’augmentation,

observée à partir de 300 jours pour les trois valeurs de champ appliqué, est toutefois à considérer.

0

0,5

1

1,5

2

2,5

3

3,5

4

4,5

0 50 100 150 200 250 300 350 400

Ima

x /

C

[A/F

]

Temps de conditionnement [jours]

12 kV/mm

8 kV/mm

4 kV/mm

Page 177: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

165

Il aurait été intéressant de suivre cette évolution sur une durée supérieure à un an, mais la durée

limitée de la thèse ne nous l’a malheureusement pas permis.

Figure 4-71 : Évolutions des valeurs approchées du champ residuel

lors des vieillissements à 85°C

4.7.5 Rigidité diélectrique après vieillissement

La rigidité diélectrique étant l’une des caractéristiques principales d’un matériau isolant, nous

avons souhaité déterminer dans quelle mesure un vieillissement sous contrainte continue longue

durée était susceptible de l’affecter. Du fait du caractère destructif des tests de rigidité

diélectrique, ces derniers ont été réalisés à l’issue de la période d’un an du vieillissement réalisé à

125°C.

Afin de se placer dans les mêmes conditions de tests que pour le matériau dans son état initial,

tous les échantillons ont été munis d'un dépôt en graphite et les tests ont été réalisés à température

ambiante dans de l'huile de silicone. Les tableaux ci-après regroupent les valeurs de champ de

claquage obtenues sur les échantillons vieillis sous 125°C, 105°C et 85°C.

0

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

0 50 100 150 200 250 300 350 400

E [

kV

/mm

]

Temps de conditionnement [jours]

12 kV/mm

8 kV/mm

4 kV/mm

Page 178: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

166

Tableau 4-4 : Valeurs de rigidité diélectrique des échantillons vieillis à 125°C (mesurées à 25°C)

Champ électrique de

vieillissement

Référence

échantillon

Champ de claquage

[kV/mm]

Champ de claquage moyen

[kV/mm]

12 kV/mm

E1 112

124,4

E2 112

E3 128

E4 144

E5 126

8 kV/mm E1 106

112,4

E2 106

E3 122

E4 126

E5 102

4 kV/mm

E1 104

100

E2 Valeur aberrante

E3 102

E4 108

E5 90

Nous rappelons que la valeur moyenne de la rigidité diélectrique à 25°C déterminée pour le

composite à l'état initial a été à 121,3 kV/mm. Compte tenu du nombre réduit d'échantillons

disponibles pour les tests après vieillissement (5 au lieu de 50), l’utilisation de traitements

statistiques aurait ici un sens limité ; cependant, la dispersion de ces résultats, qui est d'environ

20 %, n’est pas très éloignée de celle obtenue sur un nombre d’échantillons beaucoup plus grand

à l’état neuf dans les mêmes conditions.

En comparant les valeurs obtenues sur les échantillons « vierges » et sur les échantillons

« vieillis », on trouve des baisses de la rigidité diélectrique de 10 à 20% par rapport à la valeur

initiale ; la dispersion des résultats ne permettant pas de conclure à une variation significative de

la rigidité diélectrique après vieillissement. Ces résultats sont d’autant plus troublants que les

échantillons soumis aux contraintes les plus fortes semblent parfois montrer des valeurs de

rigidité plus élevées. En conséquence, ils doivent être regardés et interprétés avec une grande

prudence tant qu’ils n’auront pas été confirmés par un nombre de tests plus importants.

Page 179: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

167

Tableau 4-5 : Valeurs de rigidité diélectrique des échantillons vieillis à 105°C (mesurées à 25°C)

Champ électrique de

vieillissement

Référence

échantillon

Champ de claquage

[kV/mm]

Champ de claquage moyen

[kV/mm]

12 kV/mm

E1 103

113,6

E2 111

E3 118

E4 129

E5 107

8 kV/mm E1 120

113,4

E2 105

E3 101

E4 122

E5 119

4 kV/mm

E1 82

105,8

E2 99

E3 89

E4 127

E5 132

Page 180: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

168

Tableau 4-6 : Valeurs de rigidité diélectrique des échantillons vieillis à 85°C (mesurées à 25°C)

Champ électrique de

vieillissement

Référence

échantillon

Champ de claquage

[kV/mm]

Champ de claquage moyen

[kV/mm]

12 kV/mm

E1 89

110

E2 100

E3 112

E4 132

E5 118

8 kV/mm E1 104

97 E2 85

E3 103

E4 99

E5 93

4 kV/mm

E1 122

113,6

E2 108

E3 117

E4 122

E5 99

4.8 Conclusions

Dans ce chapitre, les propriétés et le comportement diélectrique d’une résine époxyde chargée

d’alumine (66% en masse) ont été étudiés, notamment sous champ continu (jusqu’à 12 kV/mm)

et sous haute température (jusqu’à 125°C).

L’étude du matériau à l’état initial a montré une permittivité relative de l’ordre de 6 et un facteur

de pertes de 0,01 à 1, fortement variable avec la fréquence et la température. L’analyse

diélectrique a mis en évidence trois pics de relaxation : un pic principal, illustrant les

Page 181: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

169

mouvements des chaînes principales, et deux pics secondaires, l’un lié aux mouvements des

chaînes se trouvant dans des zones de faible densité de réticulation et à des mouvements locaux

des chaînes principales, l’autre lié à la charge minérale. Cette analyse a également montré une

forte augmentation de la conduction en basse fréquence à des températures dépassant les 100°C,

ainsi qu’un effet significatif de l’absorption d’eau sur le facteur de pertes.

L’analyse des mécanismes de conduction volumique a pu révéler des valeurs de la conductivité

de 1013

à 5*1015 .m, diminuant fortement avec la température et avec l’humidité absorbée par le

matériau. Les valeurs des champs seuils, correspondant à des contraintes à partir desquelles le

piégeage des charges d’espace dans le matériau devient significatif, ont été établies dans

l’intervalle [4,5 kV/mm ; 10,5 kV/mm], également dépendants de manière significative de la

température et de l’absorption d’eau. Les mécanismes de transport de charges à fort champ ont

été identifiés comme étant de type courants limités par charge d’espace, conduction par sauts et

injection Schottky. Concernant la résistivité surfacique, des valeurs de 1014

à 1018 ont été

mesurées ; une modification importante du mécanisme de conduction surfacique a été identifiée

au voisinage de la transition vitreuse. Comme pour la conduction volumique, il a été montré que

la conduction surfacique est fortement influencée par l’eau adsorbée par le composite.

Des tests de rigidité diélectrique réalisés sur un grand nombre d’échantillons vierges ont montré

des valeurs du champ de claquage supérieures à 100 kV/mm pour des épaisseurs de l’ordre de

0,7 mm. Il a également été montré que la rigidité diélectrique diminue avec la température, la

baisse pouvant atteindre 20% lorsqu’on dépasse 60°C, très probablement en raison de

l’augmentation significative de la conductivité du matériau.

L’étude de l’accumulation de charges d’espace effectuée durant plusieurs jours à des

températures comprises entre 25°C et 105°C a mis en évidence la possibilité de l’apparition, aux

électrodes et dans le volume du matériau, de champs électriques résiduels du même ordre de

grandeur que les champs appliqués, si la contrainte thermique dépasse 85°C et le champ appliqué

10 kV/mm.

En tenant compte des résultats obtenus sur le matériau à l’état initial, des vieillissements

thermoélectriques d’une durée d’un an ont été appliqués à des températures en-dessous (85°C) et

au-dessus (125°C) de la température de transition vitreuse (autour de 110°C), pour des valeurs de

champ appliqué choisies en-dessous et au-dessus du seuil ohmique (4, 8 et 12 kV/mm). Durant

ces conditionnements, l'évolution des propriétés diélectriques du matériau a été analysée en

utilisant la spectroscopie diélectrique et une méthode de mesure de charge d’espace non

destructive (pour le suivi du champ électrique interne).

Page 182: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Chapitre 4 – Résultats expérimentaux

170

Les résultats obtenus ont mis en évidence des évolutions sensibles de la permittivité et du facteur

de pertes, observées dès les premiers points de mesures au début du processus de vieillissement.

Ces évolutions ont principalement été attribuées à la résorption et à l’absorption d’eau par le

matériau. Des dépendances directes avec le champ électrique appliqué ont été plus difficiles à

établir.

La contrainte électrothermique a induit des phénomènes d’établissement et d’accumulation de

charges d’espace qui sont apparus sensiblement différents selon la température de vieillissement.

Ainsi, l’analyse des résultats des vieillissements longue durée a permis d’établir que :

- la dynamique d’évolution des charges d’espace est fortement dépendante de la valeur du

champ (4, 8 ou 12 kV/mm) et de la température (85, 105 ou 125°C) ;

- quelle que soit la température de vieillissement comprise entre 85 et 125°C, les niveaux

de charges (et donc de champs internes) augmentent sensiblement au-dessus de

8 kV/mm ;

- les valeurs de champ interne les plus fortes, du même ordre de grandeur que le champ

appliqué, ont été relevées à 105°C.

Les conditions les plus défavorables pour le matériau en termes d’accumulation de charges ont

été déterminées pour une mise sous contraintes sous 12 kV/mm à 105°C.

Des essais de rigidité diélectrique réalisés sur les échantillons vieillis à 125°C, 105°C et 85°C ont

mis en évidence, en fonction de la valeur du champ appliqué lors du vieillissement, une baisse

pouvant aller jusqu’à 20% de la valeur initiale ; ces résultats sont toutefois à confirmer en raison

du faible nombre d’échantillons sur lesquels ont porté les tests de rigidité après vieillissement.

Tous ces résultats laissent présager la possibilité d’utiliser ce type de matériau pour des

applications à courant continu, à condition de bien appréhender la problématique de l’absorption

d’eau (qui, même à des faibles taux, influe sensiblement sur la conductivité) et des champs

électriques résiduels (qui, dans le domaine étudié, sont susceptibles de doubler la contrainte

électrique appliqué au matériau).

Page 183: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Conclusions et perspectives

Page 184: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Conclusions et perspectives

172

La nécessité de plus en plus aiguë de transporter des fortes puissances sur des longues distances

requiert aujourd’hui la mise en place de réseaux haute tension à courant continu (HTCC).

L'utilisation de matériaux isolants dans de telles applications, dont les durées de service

souhaitées atteignent plusieurs dizaines d’années, implique une bonne connaissance et maîtrise de

leurs propriétés à l'état initial et de leur évolution sous les fortes contraintes électriques et

thermiques qu’imposent les appareillages et leur environnement.

Les composites à base de résines époxydes sont utilisées depuis de nombreuses années en tant

qu’isolants dans les disjoncteurs à isolation gazeuse des réseaux haute tension alternative, où ils

ont montré leur fiabilité. Leur emploi souhaité dans les futurs appareillages haute tension

continue requiert, en raison de ce type de contrainte et des phénomènes diélectriques associés, de

déterminer les propriétés de conduction volumique et surfacique de ces matériaux, leur

comportement en termes d’accumulation de charges d’espace et leur rigidité diélectrique sous

champ continu, en relation avec leur structure et pour des contraintes similaires à celles

susceptibles d’être rencontrées en service. Il est également important d’étudier l’évolution de ces

propriétés pendant des durées significatives. Tout ceci a fait l’objet de notre travail de thèse.

Les travaux présentés dans ce manuscrit ont ainsi porté sur l'étude des propriétés diélectriques

d’un composite résine époxyde/alumine (Al2O3) en vue de son utilisation sous fort champ continu

et haute température. Il s’agit d’un matériau constitué d'une résine type Diglycidyléther de

Bisphenol A (DGEBA) et d’un durcisseur anhydride HY925, chargée à 66% en masse avec de

l'alumine. La structure du composite, sa mise en œuvre et ses principales propriétés physiques ont

été détaillées dans la première partie du mémoire.

Afin de mener à bien notre travail, nous avons utilisé différentes méthodes expérimentales, tels

que la spectroscopie diélectrique, les courants de conduction en volume et en surface, le déclin et

la cartographie du potentiel de surface, les tests de rigidité diélectrique, ainsi que des techniques

de mesure des charges d'espace. En effet, bien que des tendances générales aient été établies sur

les résines à travers des travaux publiées dans la littérature, seules des informations partielles

étaient disponibles au sujet du composite étudié. L'évolution des propriétés diélectriques a

également été suivie lors de vieillissements longue durée sous contraintes électro-thermiques. Il

s’agit de travaux originaux, les études concernant le comportement longue durée de ce composite

sous champ continu (et, par ailleurs, de beaucoup de polymères) étant pratiquement inexistantes.

Les échantillons utilisés dans cette étude ont été de trois types selon la nature des mesures, ayant

des épaisseurs de l'ordre du millimètre. Ils ont été obtenus par usinage à partir de blocs moulés,

préparés selon la technique employée par le partenaire industriel pour la fabrication des supports

isolants de disjoncteurs haute tension alternative. Pour chaque type de mesure, des précautions

Page 185: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Conclusions et perspectives

173

particulières ont été prises et des préparations spécifiques des échantillons ont été faites,

notamment en termes de nature et de configuration de couches conductrices, afin d'éviter les

effets liés à l'application de fortes valeurs de tension.

Pour pouvoir réaliser les différentes expériences (à court et à long termes), nous avons dû adapter

les techniques existantes et développer des nouveaux outils et protocoles de mesure. Une cellule

permettant d'effectuer des mesures surfaciques sous température contrôlée, tout en remplaçant

l'air ambiant en contact avec l'échantillon par un gaz sous pression, a ainsi été conçue et réalisée

pour l'étude à l’aide du partenaire industriel. Afin de pouvoir réaliser des vieillissements

simultanés de plusieurs échantillons sous température et atmosphère contrôlées pendant 12 mois,

trois dispositifs associant des cellules sous pression d’azote, capables de supporter des

températures jusqu’à 125°C, et des circuits permettant l’application simultanée de hautes tensions

de différentes valeurs dans la même cellule ont été réalisés dans le cadre de ce travail. Tout ceci

s’est accompagné de travaux spécifiques en terme de mise en œuvre d’échantillons afin de

pouvoir réaliser les mesures de charges d’espace, les tests de claquage et les vieillissements

longues durées. L’aspect statistique des résultats a également été pris en compte, avec l’emploi

d’un nombre important d’échantillons, afin de vérifier la reproductibilité des résultats (plusieurs

dizaines d’éprouvettes pour chaque essai de claquage et plusieurs échantillons pour toutes les

autres mesures).

Le travail que nous avons accompli fait ressortir les éléments suivants :

La spectroscopie diélectrique basse tension, réalisée dans la gamme de fréquences

[0,1 Hz ; 1 MHz] pour des températures comprises entre 25°C et 125°C, a montré une

permittivité relative du composite de l’ordre de 6, pouvant augmenter jusqu’à 10 en basse

fréquence au-dessus de la transition vitreuse (110°C). En-dessous de cette température, le

facteur de pertes est compris entre 0,01 et 0,1, mais peut atteindre des valeurs de l’ordre

de 1 au-dessus de la Tg, notamment en raison de mécanismes de conduction et de

polarisation par charges d’espace, qui commencent à avoir une importance

considérable dès 105°C ;

L’analyse des spectres diélectriques a mis en évidence trois pics de relaxation : un pic

principal, illustrant les mouvements des chaînes principales, et deux pics secondaires, l’un

lié aux mouvements des chaînes se trouvant dans des zones de faible densité de

réticulation et à des mouvements localisés des chaînes principales, l’autre lié à la charge

minérale ;

L’absorption d’eau par le matériau influe de manière significative sur son facteur de

pertes et, dans une moindre mesure, sur sa permittivité diélectrique. Ainsi, il a été constaté

Page 186: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Conclusions et perspectives

174

qu’une prise d'eau de 0,03% du matériau entraine une augmentation du facteur de pertes

comprise entre 40% (en basse fréquence) et 100% (en haute fréquence), accompagnée

d'une hausse de la permittivité de 3% en haute fréquence à 6% en basse fréquence ;

L’analyse des courants de conduction volumique a permis de déterminer des valeurs de

résistivité de 1013

à 1,7*1015 .m, diminuant fortement avec la température (une à deux

décades entre 25°C et 105°C, en fonction de la quantité d’eau absorbée par le matériau).

Après le régime « ohmique », un mécanisme de conduction volumique de type « courants

limités par charge d'espace » a été mis en évidence en dessous de 100°C. Au-dessus de

cette température, deux mécanismes de transport prédominants ont été identifiés :

conduction par sauts (« hopping») et injection de type Schottky. Les valeurs des champs

seuils, correspondant aux contraintes à partir desquelles le piégeage des charges d’espace

dans le matériau devient significatif, ont été établies dans l’intervalle [4,5 kV/mm ; 10,5

kV/mm], avec une diminution significative lors de l’augmentation de la température ;

L'absorption d'eau par le composite étudié, si elle ne modifie pas les mécanismes de

conduction majoritaires dans le matériau, a une forte influence sur la valeur de la

résistivité volumique et sur le seuil de passage du régime ohmique au régime non

ohmique. Nous avons ainsi montré qu’une absorption d’eau de l’ordre de 0,1% a pour

effet une diminution de la résistivité volumique jusqu'à deux décades et une baisse du

seuil de non-linéarité pouvant aller jusqu’à 40% ;

Les mesures de résistivité surfacique ont révélé des valeurs de 1014

à 1018 . Il a été établi

que la résistivité surfacique diminue fortement avec la contrainte thermique. Une

modification importante du mécanisme de conduction surfacique a été identifiée au

voisinage de la transition vitreuse. Comme pour la conduction volumique, il a été montré

que la conduction surfacique est fortement influencée par l’eau adsorbée par le

composite ;

Les mesures de potentiel de surface ont révélé des distributions non uniformes des

charges sur la surface de la résine. Ces dispersions mettent en évidence une répartition

non homogène de pièges, en relation avec la technique de préparation de la surface. Une

diminution de la mobilité des charges en surface a été observée après traitement

thermique, vraisemblablement liée à la résorption d’eau et à l’homogénéisation de l’état

de la surface ;

Les valeurs de rigidité diélectrique déterminées à 25°C, 60°C et 85°C, suite à des tests

avec une rampe de tension continue de 2 kV/s appliquée à des échantillons à épaisseur

d’isolant de 0,7 mm, sont comprises entre 103 et 127 kV/mm. Il en est donc ressorti une

Page 187: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Conclusions et perspectives

175

baisse d’environ 20% de la rigidité entre 25°C et 85°C, pouvant être associée à

l’augmentation significative de la conduction avec la température ;

Les mesures de charges d’espace réalisées après des conditionnements à des temps courts

(1 jour à 1 semaine) ont mis en évidence la possibilité d’apparition, aux électrodes et dans

le volume du matériau, de champs électriques résiduels du même ordre de grandeur que

les champs appliqués, notamment si la contrainte thermique dépasse 85°C et le champ

appliqué 10 kV/mm ;

Des vieillissements électrothermiques longues durées (12 mois), réalisés sous contraintes

électriques en-dessous et au-dessus des seuils de non-linéarité, ont mis en évidence des

évolutions sensibles de la permittivité et du facteur de pertes, observées dès les premiers

points de mesures au début du processus de vieillissement, quelles que soient les

contraintes appliquées. Ces évolutions ont principalement été attribuées à la résorption et

à l’absorption d’eau par le matériau sous l’effet de la température (entre 85°C et 125°C) et

au moment de leur retrait des cellules de vieillissement pour les campagnes de mesures.

Des dépendances directes avec le champ électrique appliqué ont été plus difficiles à

établir ;

La contrainte électrothermique a induit, pendant les vieillissements longues durées, des

phénomènes d’établissement et d’accumulation de charges d’espace. L’analyse des

résultats a permis d’établir que la dynamique d’évolution des charges d’espace est

fortement dépendante de la valeur du champ (4, 8 ou 12 kV/mm) et de la température (85,

105 ou 125°C). Nous avons montré que, quelle que soit la température de vieillissement

comprise entre 85 et 125°C, les niveaux de charges (et donc de champs internes)

augmentent sensiblement au-dessus de 8 kV/mm ;

Les valeurs de champ interne les plus fortes, du même ordre de grandeur que le champ

appliqué (~ 10 kV/mm), ont été relevées à 105°C. Les conditions les plus défavorables

pour le matériau en termes d’accumulation de charges ont été déterminées pour une mise

sous contraintes sous 12 kV/mm à 105°C.

Ces résultats ont des implications concernant l’emploi de ce composite dans des appareillages

haute tension continue. Nous avons ainsi montré que sa permittivité et sa conductivité volumique

sont très fortement affectées par la température (doublement de la permittivité en basse fréquence

entre 25°C et 125°C et augmentation de la conductivité d’un facteur 10 à 100 dans la même

gamme de températures). En même temps, le seuil de non-linéarité diminue avec la température,

ce qui peut favoriser l’accumulation de charges d’espace. Il est donc important que ces effets

soient pris en compte à la conception des appareillages, notamment en termes de répartition des

contraintes en géométrie cylindrique, où, comme dans le cas des câbles, un gradient de

Page 188: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Conclusions et perspectives

176

température s’établit. Des précautions sont également à prendre en termes de contraintes

surfaciques, les valeurs mesurées dans ce cas suivant des variations similaires.

D’autre part, nous avons montré que l’on pouvait s’attendre, notamment lors des

conditionnements à long terme, à l’apparition de champs résiduels du même ordre de grandeur

que le champ externe si celui-ci excède 10 kV/mm, ce qui peut se traduire par une multiplication

par deux de la contrainte appliquée, voire davantage si l’on tient compte des charges

« dynamiques » et du gradient de température. La prise en compte de ce phénomène paraît donc

nécessaire si l’on approche de la dizaine de kV/mm, ainsi que le suivi à long terme de l’évolution

des charges d’espace dans les structures mises au point, tel qu’il a pu être établi pour la

qualification des câbles HTCC.

Enfin, l’un des problèmes liés à l’emploi de ce composite est son caractère hydrophile et surtout

les effets de cette absorption d’eau sur ses propriétés diélectriques, que nous avons pu mettre en

évidence, en particulier la variation significative de sa conductivité. Il paraît ainsi souhaitable que

cette problématique soit bien appréhendée et prise en compte au niveau du processus de

fabrication des composants, afin de diminuer le plus possible ses effets.

Par ce travail, nous avons tenté d'apporter notre contribution à la compréhension des phénomènes

se produisant dans les diélectriques soumis à des forts champs continus et aux applications des

matériaux polymères dans le domaine de l’isolation électrique. Il s'inscrit dans le cadre d'études

menées conjointement par des scientifiques et des industriels pour permettre la réalisation de

nouvelles installations à courant continu à fiabilité accrue.

Page 189: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Annexe

Page 190: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Annexe

178

Annexe A: Propriétés de la résine déterminées par l'industriel

Page 191: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Références bibliographiques

Page 192: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Références Bibliographiques

180

[ABO97] M. Abou-Dakka, S. S. Bamji, A.T. Bulinski, « Space Charge Distribution in XLPE by

Thermal Step Method, using inverse matrix technique », IEEE Transactions on Dielectrics

and Electrical Insulation, Vol. 4, No3, pp. 314-320, 1997.

[ADA89] V. Adamec, J. H. Calderwood, « Electrode Polarization in Polymeric Dielectrics », IEEE

Transaction on Electrical Insulation, Vol. 24 (2), pp. 205-213, 1989.

[AGN96] S. Agnel, « Mesure de charge d’espace dans les oxydes diélectriques par la méthode de

l’onde thermique », Thèse de doctorat, Université Montpellier 2, 1996.

[AMB62] L E. Amborski, « Structural dependence of the electrical conductivity of polyethylene

terephtalate », Journal of Polymer Science, Vol. 62, pp. 331-346, 1962.

[API81] A. Apicella, L. Nicolais, G. Astarita et E. Drioli, « Hygrothermal history dependence of

equilibrium moisture sorption in epoxy resins », Polymer, Vol. 20, pp. 1143-1148, 1981.

[ART65] J. Artbauer, « Elektrishefestigkeit von polymeren », Kolloid Z.und Z. Polymere, Vol. 202,

pp. 15-25, 1965.

[ART96] J. Artbauer, « Electric strength of polymer », Journal of Phys. D: Applied. Physics, Vol. 29,

pp. 446-456, 1996.

[AUB08] E. Aubert, « Diagnostic optique du vieillissement électrique des résines époxydes sous faible

champ électrique », Thèse de doctorat, Université de Toulouse, 2008.

[AWA72] Y. Awakuni, J. H. Calderwood, « Water vapor adsorption and surface conductivity in

solids », Journal of Phys. D: Applied. Physics, Vol. 5, pp. 1038-1045, 1972.

[BAR83] R. Bartinikas, R M. Eichhorn, « Electrical properties of solid insulating materials:

Molecular structure and electrical behaviour », Engineering dielectrics, Vol. II A. ASTM.

STP 783, 1983.

[BAR87] R. Bartinikas, « Engineering dielectrics », Vol. 2B, ASTM Special technical publications,

1987.

[BAR92] P. Bardonnet, « Résines époxydes. Mise en œuvre et applications », Techniques de

l’ingénieur, Vol. A 3466, pp. 1-16, 1992.

[BAR92A] P. Bardonnet, « Résines époxydes Composants et propriétés », Techniques de l’ingénieur,

Vol. A 3465, pp. 1-16, 1992.

[BEA09] D. Beauguitte, « Étude du vieillissement électrique du Polyéthylène Téréphtalate pour

application haute tension », Thèse de doctorat, Université Montpellier 2, 2009.

Page 193: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Références Bibliographiques

181

[BEY91] M. Beyer, « Electrical and dielectric behaviour of cast epoxy resins », Schering Institute for

High-voltage Engineering and High-Voltage equipment, Hannover University, 1991.

[BES05] J. L. Bessede, I. Huet, Y. Kieffel et al, « Suitability of thermoplastic polymer for the making

of HV gas insulated substation insulator », Annual report Conference on Electrical

Insulation and Dielectric Phenomena, pp. 277-280, 2005.

[BLA92]

G. Blaise, « Microscopic and Macroscopic description of the polarization of dielectric

materials. The concept of Polaron applied to the conduction and trapping of charges »,

Interdisciplinary conference on dielectric, Supplément de revue: Le vide, les couches

minces, No 260, 1992.

[BLA95] G. Blaise, « Charge trapping/detrapping induced lattice polarization/ relaxation-process »,

Conference on Electrical Insulation and Dielectric Phenomena, Annual Report, pp.37-39,

1995.

[BLA01] G. Blaise, « Charge localization and transport in disordered dielectric materials », Journal

of Electrostatics. Vol. 50, pp. 69-89, 2001.

[BLA11] P.L. Blanca, « Caractérisation physico-chimique et diélectrique des résines

thermodurcissables candidates au développement d'isolateurs haute tension à matrice

polymère pour le transport ferroviaire», Thèse de doctorat, Université de PAU et des pays

de l'ADOUR, 2011.

[BOY10] L. Boyer, « Analyse des propriétés de l’oxyde de grille des composants semi-conducteurs de

puissance soumis à des contraintes électrothermiques cycliques : Vers la définition de

marqueurs de vieillissement », Thèse de doctorat, Université Montpellier 2, 2010.

[BOU13] S. Baudon, « Étude de l'influence des contraintes appliquées sur l'évolution des propriétés

diélectriques des couches minces isolantes dans les composants semi-conducteurs de

puissance », Thèse de doctorat, Université Montpellier 2, 2013.

[BRU07] E. Brun , « Hygrothermal aging of a filled epoxy resin », E. Brun, P. Rain, G. Teissèdre, C.

Guillermin, S.W. Rowe, Proceedings International Conference on Solid Dielectrics, pp.239 -

242, 2007.

[BRU08] E. Brun, « Caractérisations du conditionnement hygrothermique des résines époxydes

chargées silice », P. Rain, G. Teissèdre, C. Guillermin, S.W. Rowe, Composites et

Matériaux Avancés, vol. 18, pp.91-102, 2008.

[BRU09] E. Brun, « Vieillissement hygrothermique d'un composite résine époxyde silice et impact sur

Page 194: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Références Bibliographiques

182

sa rigidité diélectrique », Thèse de doctorat, Université Joseph Fourier Grenoble, 2009.

[CAS09] J. Castellon, P. Notingher jr, S. Agnel et al, « Electric field and space charge measurement

in thick power cable insulation », IEEE Electrical Insulation Magazine, Vol. 25 , No 3, pp.

20-42, 2009.

[CER08] A. Cernomercenco, P. Notingher jr, « Application of the thermal step method to space

charge measurements in inhomogeneous solid insulating structures: A theoretical

approach », Applied physics letters, No 93, Issue 19, 192903, 2008.

[CHA94] J.V. Champion, S.J. Dodd, G.C. Stevens, « Analysis and modelling of electrical tree growth

in synthetic resins over a wide range of stressing voltage », Journal of Phys. D: Applied

Physics, Vol. 27, pp. 1020-1030, 1994.

[CHA95] J.V. Champion, S.J. Dodd, « The effect of material age on the electrical tree growth and

breakdown characteristics of epoxy resins », Journal of Phys. D: Applied Physics, Vol. 28,

pp. 398-407, 1995.

[CHA01a] J.V. Champion, S. J. Dodd, « Simulation of partial discharges in conducting and non-

conduction electrical tree structures », Journal of Phys. D: Applied Physics, Vol. 34, pp.

1235-1242, 2001.

[CHA01b] J.V. Champion, S.J. Dodd, Y. Zhao, A.S. Vaughan, M. Brown, A.E. Davies, S.J. Sutton et

S.G. Swingler, « Morphology and the growth of electrical trees in a propylene/ethylene

copolymer », IEEE Transactions on Dielectrics and Electrical Insulation, Vol.8 (2), pp. 284–

292, 2001.

[CHE93] A. Cherifi, « Contribution à l’étude des charges d’espace dans les polymères isolants

utilisés en haute tension. Amélioration de la méthode de l’onde thermique », Thèse de

doctorat, Université Montpellier 2, 1993.

[CIG496] Cigré TB496, « Recommendations for testing dc extruded cable systems for power

transmission at a rated voltage up to 500 kV », 2012.

[CIU91] S. Ciutacu, P. Budrugeac, I. Niculae, « Accelerated thermal aging of glass reinforced epoxy

resin under oxygen pressure », Polymer Degradation and Stability, Vol. 31, pp. 365-372,

1991.

[CLA78] D. T. Clark, W.J. Feast, « Polymer surfaces », Wiley, N.Y, 1978.

[COE66] R. Coelho, « Considérations théoriques sur le contact métal-diélectrique », Revue générale

Page 195: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Références Bibliographiques

183

d'électricité, No 75, Vol. 6, pp. 759-770, 1966.

[COE79] R. Coelho, « Physics of dielectrics for the engineer », Elsevier Amsterdam, 1979.

[COE83] R. Coelho, « Sur la relaxation d'une charge d'espace », Revue de Physique Appliquée, No

18, pp. 137-146, 1983.

[COE93] R. Coelho et B. Aladenize, « Les diélectriques-propriétés diélectriques des isolants »,

Edition Hermès Paris, 1993.

[COOK99] W. D. Cook, M. Mehrabi, G.H. Edward, « Ageing and yielding in model epoxy thermosets »,

Polymer, Vol. 40, pp. 1209-1218, 1999.

[CRI90] J.P. Crine, « Model of solid dielectric ageing », Proc. IEEE Intern. Symp. EI, pp. 25-27,

1990.

[CRI97] J.P. Crine, « A molecular model to evaluate the impact of ageing on space charges in

polymers dielectrics ». IEEE Transactions on Dielectrics and Electrical Insulation, Vol. 4,

pp. 487-495, 1997.

[CRI98] J.P. Crine, « A molecular model to evaluate the impact of ageing on space charges in

polymers dielectrics », [comment and reply], IEEE Transactions on Dielectrics and

Electrical Insulation, Vol. 5, N°3, pp. 461-462, 1998.

[CRI98a] A. Crisci, B. Gosse, J. Gosse, and V. Ollier-Duréault, « Surface-potential decay due to

surface conduction », EPJ Applied physics, vol. 4, pp. 107-1116, 1998.

[DAS80] D. K. Das-Gupta, K. Doughty, R. S. Brockley, « Charging and discharging currents in

polyvinylidene fluoride », Journal of Phys. D: Applied Physics, Vol. 13 pp.2101–2114,

1980.

[DAS87] D.K. Das-Gupta, K. Dougty, « Dielectric and conduction process in polyetheretherketone

(PEEK) », IEEE Transactions on Dielectrics and Electrical Insulation, Vol. EI-22, No1, pp.

1-7, 1987.

[DAS92] D.K. Das-Gupta, « Electrical properties of surfaces of polymeric insulators », IEEE

Transactions on Dielectrics and Electrical Insulation, Vol. 27, N° 5, pp. 909-923,

1992.

[DEL06] F. Delor-Jestin, D. Drouin, P.-Y. Cheval, J. Lacoste, « Thermal and photochemical ageing

of epoxy resin-Influence of curing agents », Polymer Degradation and Stability, Vol. 91, pp.

Page 196: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Références Bibliographiques

184

1247-1255, 2006.

[DER82] A. Dereggi, F. I. Mopsik, « Numerical Evaluation of the Dielectric Polarisation

Distribution for Thermal Pulse Data », Journal of Applied Physics, Vol. 53, pp. 4333-4339,

1982.

[DES83] L. Deschamps, C. Caillot, M. Pars, J. Perret, « L’utilisation des matériaux synthétiques pour

l’isolation des câbles haute tension et très haute tension », R.G.E, Tome 83, N° 5, pp. 343-

360, 1983.

[DIS84] L. A. Dissado, R. M. Hill., « Anomalous Low Frequency Dispersion », J. Chem. Soc.

Faraday Trans 2, Vol. 80, pp. 291-319, 1984.

[DIS92] L. A. Dissado, J. C. Fothergill, « Electrical degradation and breakdown in polymers »,

Peregrinus, 1992.

[DIS95] L. A. Dissado, G. Mazzanti, G. C. Montanari, « The incorporation of space charges

degradation in the life model for electrical insulating materials », IEEE Transactions on

Dielectrics and Electrical Insulation, Vol. 2, pp. 1147-1158, 1995.

[DIS97] L. A. Dissado, G. Mazzanti, G. C. Montanari. « The role of trapped space charges in the

electrical aging of insulating materials ». IEEE Transactions on Dielectrics and Electrical

Insulation, Vol. 4, pp. 496-506, 1997.

[DIS01] L. A. Dissado, G. Mazzanti, G. C. Montanari, « Elemental strain and trapped space charge

in thermo electrical ageing of insulating materials », IEEE Transaction on Dielectrics and

Electrical Insulation, Vol. 8, pp. 959-965, 2001.

[DIS02] L. A. Dissado, « Understanding electrical trees in solids: from experiment to theory », IEEE

Transactions on Dielectrics Electrical Insulation, Vol. 9 (4), pp. 483–497, 2002.

[EZO97] M. Ezoe, M. Tada et M. Nakanisi, « Effects of water absorption on interfacial phenomena in

HV insulating materials », Proc. of the 5th Int. Conf. on properties and applications of

dielectric materials, IEEE, , pp. 25-30, Tokyo, Japan, 1997.

[EZO99] M. Ezoe, M. Nakanisi, N. Masayuki et J. Shouguo, « Effects of interfacial phenomena on

dielectric breakdown of filled epoxy resin », High voltage engineering symposium, IEEE,

London, UK, 1999.

[EZO01] M. Ezoe, K. Kuwda and T. Kawashima, « Effects of impurity on space charge distribution

in solid dielectrics », 7th IEEE International Conference on Solid Dielectrics, pp. 85–88,

2001.

Page 197: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Références Bibliographiques

185

[FAL70] B. Fallou, « Caractéristiques des isolants solides. Méthodes de mesures. Valeurs et

signification », Techniques de l’ingénieur, D214 et D215, D2I, 1970.

[FAY05] B. Fayolle, J. Verdu, « Vieillissement physique des matériaux polymères », Techniques de

l’ingénieur, AM 3 150, pp. 1-19, 2005.

[FEN09] A. De Fenzo, C. Formicola, V. Antonucci, M. Zarrelli, M. Giordano, « Effects of zinc-based

flame retardants on thedegradation behaviour of an aerospace epoxy matrix », Polymer

Degradation and Stability, Vol. 94, pp. 1354-1363, 2009.

[FOW28] R. H. Fowler and L. Nordheim, « Electron Emission in Intense Electrical Field »,

Proceedings of the Royal Society, Vol. 119, N° 781, 1928.

[FOU86] R. Fournie, « Les isolants en électrotechnique, concept et théorie », Édition Eyrolles, 1986.

[FOU00] R. Fournie, R. Coelho, « Diélectriques bases théoriques », Techniques de l’ingénieur, D2

300, 2000.

[FRA00] J. L. Franceschi et al, « Profils de charges d'espace dans les isolants polymères minces par

une méthode d'excitation thermique avec laser focalise », Proceedings of SFE 2000, pp. 22-

32, Montpellier, France, 2000.

[FRA97] J. L. Franceschi, V. Hass, « Laser thermo-acoustic Modulation Method for Space charge

Measurements », Applied Physics Letters,4/28, Vol.70, issue 17, 1997.

[FRE38] J. Frenkel, « On pre-breakdown phenomena in insulators and electronic semi-conductors »,

Physical Review. Vol. 54. pp.647, 1938.

[FUK97] A. Fukuda, H. Mitsiu, Y. Inoue et K. Goto, « The influence of water absorption on dielectric

properties of cycloaliphatic epoxy », Proc. of the 5th ICPADM, Seoul, Korea, pp 58-61,

1997.

[FUK00] K. Fukunaga, T. Maeno et V. Griseri , « Space charge observation of a filler free epoxy

resin », International Conference on Electrical Insulation and Dielectric Phenomena, pp.

125–127, 2000.

[GAL04] O. Gallot-Lavallée, « Étude de la charge d'espace et des phénomènes luminescents comme

précurseurs du vieillissement électrique et d'une résine époxy utilisée dans l'isolation haute

tension », Thèse de doctorat, Université Paul Sabatier (Toulouse III), 2004.

[GAL05] O. Gallot-Lavallée, G. Teyssedre, C. Laurent and S. Rowe, « Space charge behaviour in an

epoxy resin: the influence of fillers, temperature and electrode material », J. of Phys. D:

Page 198: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Références Bibliographiques

186

Applied Physics, Vol.38, pp. 2017-2025, 2005.

[GER04] F. Gerdinand, M. Budde et M. Kurrat, « Electrical and mechanical strength of mineral

filled epoxy insulators in correlation to power loss factor », Proc. of the IEEE Int. Conf on

Solid Dielectrics, Toulouse France, 2004.

[GON01] P. Gonon, A. Sylvestre, J. Teysseydre et C. Prior, « Combined effects of humidity and

thermal stress on the dielectric properties of epoxy-silica composites », Mater. Sci. Eng. B,

Vol. 83, pp. 158-164, 2001.

[GON05] P. Gonon, T. Pham Hong, O. Lesaint, S. Bourdelais, H. Debruyne, « Influence of

high levels of water absorption on the resistivity and dielectric permittivity of epoxy

composites, Polymer Testing », Vol. 24, pp. 799-804, 2005.

[GRA09] J-C. Grandidier, L. Olivier, M. Gigliotti, M-C Lafarie, D. Quy Vu, « Modélisation de la

thermo-oxydation des composites Carbone- Époxy - Étude de l'initiation de

l'endommagement », 19ème

Congrès français de Mécanique, 2009.

[GRI00] V. Griseri, K. Fukunaga, C. Laurent, D. Mary, L.A. Dissado et J.C. Fothergill, Charge

injection, electroluminescence, and ageing of an epoxy resin in high divergent fields », 8th

IEE International Conference on Dielectric Materials, Measurement and Applications, pp.

88–93, 2000.

[GRI00a] V. Griseri, « The effects of high electric fields on an epoxy resin », Thesis in Electrical

Engineering. Leicester: University of Leicester, pp. 1-205, 2000.

[GRI02] V. Griseri, L. A. Dissado, J. C. Fothergill, G. Teyssedre, C. Laurent, « Electroluminescence

excitation mechanisms in epoxy resin under divergent and uniform fields », IEEE

Transactions on Dielectrics and Electrical Insulation, Vol. 9, N° 1, pp. 150-160, 2002.

[GUI02] C. Guillermin, P. Rain and S. Rowe, « Space charge measurements in epoxy resin under DC

voltage », Proc. Of the IEEE Int. Conf. on Electrical Insulation and Dielectric Phenomena

(CEIDP),Cancun, Mexico, pp. 606-609, 2002.

[GUI04] C.Guillermin, « Vieillissement électrique et thermique d'un composite résine-époxyde

silice : étude des charges d'espace et de la conduction », Thèse de doctorat, Université

Joseph Fourier Grenoble, 2004.

[GUI06] C. Guillermin, P. Rain and S. Rowe, « Transient and steady-state currents in epoxy resin »,

Journal of Phys. D: Applied Physics, Vol. 39, pp. 515-524, 2006.

[GUI07] IEEE Guide for the statistical analysis of electrical insulation breakdown data, IEEE 930,

2007-07, IEC 62539, International Standard.

Page 199: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Références Bibliographiques

187

[HIL71] R. M. Hill, « Poole-Frenkel conduction in amorphous solids », Philosophical Magazine,

Vol. 23, pp. 59-86, 1971.

[HIP61] V. Hippel, « Les diélectriques et leurs applications », Dunod Paris, 1961.

[HUY92] H. M. Le Huy, V. Bellenger, J. Verdu, M. Paris, « Thermal oxidation of anhydride cured

epoxies. I-mechanistic aspects », Polymer Degradation and Stability, Vol. 35, pp. 77-86,

1992.

[IVA02] K. I. Ivanova, R. A. Pethrick, S. Affrossman, « Hygrothermal aging of rubber-modified and

mineral-filled dicyandiamide-cure DGEBA epoxy resin Dielectric spectroscopy

investigation », Journal of Applied Polymer Science, Vol. 84, pp. 1011–1024, 2002.

[JON75] A. K Jonscher, « A New Model of Dielectric Loss », Colloid and Polymer Science, Vol. 253,

pp. 231-250, 1975.

[JON83] A. K Jonscher, « Dielectric Relaxation in Solids », Chelsea Dielectric Press, 1983.

[JON90] A. K Jonscher, « The universal dielectric response III », IEEE Electrical Insulation

Magazine, Vol. 6 N°.4, pp. 19-24, 1990.

[JON08] A. K. Jonscher, « Dielectric Relaxation in Solids », ISBN 978-7-5605- 2706-2, Xi’an Jiao

tong Press, University 2008.

[KAR82] H.C. Karner et U. Stietzel, « The influence of moisture on the electrical properties of

polymeric insulating materials », IEEE Proc. of the Int. Symp on electrical insulating

(ISEI), Tokyo, p.51-55, 1982.

[KAR87] A. Karmer, H.C. Karner, E. Hubler et K.A. Munk, « Improvement of ageing resistivity of

cycloaliphatic epoxy resin », Proc. of the 5th Int. Symp. On High Voltage Engineering,

Braunsschweig, Germany, pp. 1-4, 1987.

[KAR91] H.C. Karner et M. Ieda, « Technical aspects of interfacial phenomena in solid insulating

systems », Proc. of the 3rd Int. Conf. on properties and applications of dielectric materials,

IEEE, Tokyo, pp. 593-597, 1991.

[KIE12] Y. Kieffel, A. Girodet, K. Pohlink, S. Bouti, D. Beauguitte, « Suitability of thermoplastic

polymer used as insulator for HV apparatuses », EJEE European Journal of Electrical

Engineering, Vol. 15, pp.169-178, 2012.

[KIT83] C. Kittel, « Physique de l’état solide », 5ème

édition : Dunod Université, 1983.

[KOS71] M. Kosaki, K. Sugiyama, M. Ieda, « Ionic jump distance and glass transition in polyvinyl

Page 200: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Références Bibliographiques

188

chloride », J. Appl. Phys. 42, pp. 3388–3392, 1971.

[LAH09] N. Lahoud, « Modélisation du vieillissement des isolants organiques sous contrainte

électrique », Université Toulouse III, Thèse de doctorat, 2009.

[LAM70] M. A. Lampert and P. Mark, « Current injection in solids », Academic press, 1970.

[LAN86] S.B. Lang, D. K. Das Gupta, « Laser Intensity Modulation Method: A Technique for

Determination of Spatial Distribution of Polarisation and Space Charge in Polymer

Electrets ». Journal of Applied Physics, Vol. 56, pp. 2151-2160, 1986.

[LAU99] C. Laurent, « Diélectriques solides et charge d’espace », Techniques de l’ingénieur, Vol. D

2305, pp. 1-13, 1999.

[LI94] Y. Li and J. Unsworth, « Effect of physical aging on dielectric, thermal and mechanical

properties of cast epoxy insulators », IEEE Transactions on Dielectrics and Electrical

Insulation, Vol. 1, N° 1, pp. 9-17, 1994.

[LIZ99] T. Lizuka, K. Yoshimoto, H. Takai, K. Fukunaga, T. Maeno, « Measurement of space

charge distribution in epoxy resin », Electrical Engineering in Japan, Vol. 129, Issue 3, pp.

9–16, 1999.

[LOV74] R. Lovell, « Decaying and steady currents in an epoxy polymer at high electric fields »,

Journal of Physics D: Applied Physics, Vol. 7, pp. 1518–1530, 1974.

[LUT09] B. Lutz, J. Kindersberger, « Influence of relative humidity on surface charge decay

on epoxy resin insulators », 9th international conference on properties and

applications of dielectric materials, pp. 883-886, July, 2009.

[LUT10] B. Lutz, J. Kindersberger, « Influence of Absorbed Water on Volume Resistivity of

Epoxy Resin Insulators », Proc. 2010 ICSD, pp. 667-670, 2010.

[MAE88] T. Maeno, T. Futami, H. Kusibe, T. Takada, C.M. Cooke., « Measurements of Spatial

Charge Distribution in Thick Dielectrics using the Pulsed Electro acoustic Method ». IEEE

Transactions on Dielectrics and Electrical Insulation, Vol. 23, pp. 433-439, 1988.

[MAL97] S. Malrieu, P. Notingher jr, F. Pacreau, A. Toureille, « Influence of space charge on the

breakdown of multilayered epoxy: A study by the thermal step method », IEEE CEIDP,

Annual report, pp. 88-91, 1997.

[MAR07] J. Martinez-Vega, « Matériaux diélectriques pour le génie électrique 1, propriétés,

vieillissement et modélisation », Chapitre 9, pp. 235-255, Vol. 1, Hermès, Lavoisier, 2007.

Page 201: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Références Bibliographiques

189

[MAS73] Mason J.H, « Dielectric breakdown of solids », Insulation Engineer, pp.5-12, 1973.

[MAX81] J. C. Maxwell, « A Treatise on Electricity and Magnetism », Clarendon, 1881.

[MAX83] I.D. Maxwell, R.A. Pethrick, « Dielectric studies of water in epoxy resins », J. Polym. Sci,

pp. 2363-2379, Vol. 28, 1983.

[MAZ05] G. Mazzanti, G. C. Montanari, L. A. Dissado, « Electrical ageing and life models: The role

of space charge ». IEEE Transactions on Dielectrics and Electrical Insulation, Vol. 12, pp.

876-890, 2005.

[MEN97] C. Menguy, « Mesure des caractéristiques des matériaux isolants solides », Techniques de

l'ingénieur, D2 310, 1997.

[MIT83] G.R. Mitchell, A. H. Windle, « Measurement of molecu1ar orientation in thermotropic

liquid crystalline polymers », Polymer, Vol. 24 (12), pp. 1513-1520, 1983.

[MIZ79] T. Mizutani, M. Ieda, « Carrier transport in high-density Polyethylene », Journal of Physics

D: Applied Physics, Vol. 12, No 2, pp. 291-296, 1979.

[MOT40] N. F. Mott, R. W. Gurney, « Electronic Processes in Ionic Crystals », Oxford University

Press, New York, 1940.

[NAS06] V. Nassiet, J.P. Habas, B. Hassoune-Rhabbour, Y. Baziard, J. A. Petit, « Correlation

between Viscoelastic Bahavior and Cooling stresses in a Cured Epoxy Resin Systems »,

Journal of Applied Polymer Science, Vol. 99, pp. 679-690, 2006.

[NAT90] R. Nath, T. Kaura, M. Perlman, « Steady state conduction in linear low density

polyethylene », IEEE Transactions on Dielectrics and Electrical Insulation, Vol. 25, pp. 419-

425, 1990.

[NED08] M. Nedjar, A. Beroual, « Electrical aging of polyurethane under AC voltage », Journal of

Applied Polymer Science, Vol.109, pp. 789-794, 2008.

[NOR80] International Standard IEC 60093, « Methods of test for volume resistivity and surface

resistivity of solid electrical insulating materials », 1980.

[NOR98] Norme internationale CEI 60243-1, « Rigidité diélectrique des matériaux isolants-Méthode

d'essais », 1998.

[NOT00] P. Notingher, « Étude des charges d’espace et des pertes dans l’isolant des câbles de

transport d’énergie électrique en vue de l’accroissement du rendement », Thèse de doctorat,

Page 202: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Références Bibliographiques

190

Université Montpellier 2, 2000.

[NOT01] P. Notingher jr, S. Agnel, A. Toureille, « Thermal step method for space charge

measurements under applied dc field », IEEE Transactions on Dielectrics and Electrical

Insulation, Vol. 8, No 6, pp. 985-994, 2001.

[NOT01b] P. Notingher, A.Toureille, J. Santana, L. Martinotto, M. Albertini, « Space Charge

Accumulation in Polyolefins submitted to ac Stress », IEEE Transactions on Dielectrics and

Electrical Insulation, Vol. 8, N°. 6, pp.972-984, 2001.

[OʼDW64] J. J. OʼDwayer, « Theory of dielectric breakdown of solids », Oxford: Clarendon, 1964.

[O'DW73] J. J. O'Dwayer, « The theory of electrical conduction and breakdown in solid dielectrics »,

Clarendon Press, Oxford, 1973.

[OKA07] S. Okabe, « Phenomena and mechanism of electric charges on spacers in gas insulated

switchgears », , IEEE Transactions on Dielectrics and Electrical Insulation, Vol. 14, No. 1,

pp. 46-52, 2007.

[OLL95] V. Ollier-Durault, « Vieillissement de surfaces d'isolateurs en résine époxy-anhydride: rôles

respectifs des UV et du champ électrique », Thèse de doctorat, Université Joseph Fourier

Grenoble, 1995.

[PEE29] F. W. Peek, « Dielectric phenomena in high voltage engineering », MC Graw Hill, 1929.

[POH65] H. A. Pohl, J. Rembaum, T. Moacanin, « Progress in dielectrics », Vol. 6, 1965.

[PAR97] J. L. Parpal, J. P. Crine., C. Dang, « Electrical ageing of extruded dielectric cables ». Part II

- A physical model. IEEE Transactions on Dielectrics and Electrical Insulation, Vol. 4, pp.

197-209, 1997.

[POL09] R. Polansky, V. Mentlik, P. Prosr, J. Susir, « Influence of thermal treatment on the glass

transition temperature of thermosetting epoxy laminate », Polymer Testing, Vol. 28, pp.

428–436, Elsevier, 2009.

[PRE14] P. Preetha, M .J. Thomas, « Life estimation of electrothermally stressed epoxy

nanocomposites », IEEE Transactions on Dielectrics and Electrical Insulation, Vol.21, N°.3,

pp. 1154-1160, 2014.

[RAIN11] P. Rain, « Étude des précurseurs de la rupture diélectrique des isolations composites à

matrice époxyde en électrotechnique », Mémoire d’Habilitation à Diriger les Recherches,

Grenoble, 2011.

Page 203: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Références Bibliographiques

191

[RIE94] N. Rieux, V. Pouilles et T. Lebey, « Dielectric spectroscopy of epoxy based insulation

systems aged under functional electrical and thermal conditions », International Conference

on Electrical Insulation and Dielectric Phenomena, pp. 361–366, 1994.

[ROS53] J. R. Macdonald, « Theory of AC Space-charge polarization effects in Photoconductors,

Semiconductors and Electrolytes », Physical review letters, Vol. 92, No 1, pp. 4-17, 1953.

[ROS94] R. Ross, « Graphical methods for plotting and evaluating Weibull distributed data »,

Proceedings of the IEEE International conference on properties and applications of

dielectric materials, pp. 250-253, 1994.

[SCH66] G. W. Schael, « Study of morphology and physical properties of polypropylene films »,

Journal of Applied Polymer Science, Vol. 10, pp. 901-915, 1966.

[SEG00] Y. Segui, « Diélectriques, Courants de conduction », Techniques de l’Ingénieur, Vol. D-

2301, pp. 1-12, 2000.

[SEIT49] F. Seitz, « On the theory of electron multiplication in crystals », Physical review, Vol. 76,

N° 9, 1949.

[SIU81] E. Siu-Wai Kong, G. L. Wilkes, J. E. Mc Grath, A. K. Banthia, Y. Mohajer, M. R. Tant, «

Physical aging of linear an network epoxy resins », Polym. Eng. Sci., Vol. 21, Issue 14, pp.

943-950, 1981.

[SOR04] J. Sorbe, « Étude d'un polyester thermoplastique pour application électrique », Rapport

interne AREVA T&D, 2004.

[STR77] LCE. Struik, « Physical ageing in plastics and other glassy materials », Polymer

Engineering and Science, Vol.17, pp. 165-173, 1977.

[THÉ99] S. Théoleyre, « Techniques de coupure en moyenne tension », Techniques de l’ingénieur, D

4705, 1999.

[THI05], P. H. Thinh, « Caractérisation et modélisation du comportement diélectrique d'un matériau

composite soumis à un vieillissement hygrothermique », Thèse de doctorat, Université

Joseph Fourier, Novembre, 2005.

[TOD03] M. G. Todd et F. G. Shi, « Characterizing the interphase dielectric constant of polymer

composite materials: Effect of chemical coupling agents », J. Appl. Phys., Vol. 94, issue 7,

pp. 4551-4557, 2003.

[TOU74] A. Toureille, « Sur les phénomènes de conduction à champ électrique élevé dans les hauts

Page 204: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Références Bibliographiques

192

polymères », Thèse d'état, Université des Sciences et Techniques du Languedoc, 1974.

[TOU87] A. Toureille, « About a method to measure space charge density inside PE », Proceedings of

the international conference on insulated power cables Jicable, pp. 89-103, 1987.

[TOU91] A. Toureille, « Détermination des charges d’espace dans les isolants solides par la méthode

de l’onde thermique », Revue Générale de l’Électricité, N° 8/91, pp.15-20, 1991.

[TOU94] A. Toureille, « Mesures de charge d’espace par la méthode d’onde thermique : différentes

techniques de validation numérique et expérimentale », Elsevier, Vol. 32, N° 3, pp. 277-

286, 1994.

[TOU09] A. Toureille, « Mesures électriques des matériaux diélectriques solides » Techniques de

l’ingénieur, R 1 115 v2, 2009.

[TSO98] T. K. Tsotsis, S. M. Lee, « Long term thermo-oxidative aging in composite materials:

failure mechanisms », Composites Sciences and Technology, Vol. 58, pp. 355-368, 1998.

[VAN67] B. Van, « Dielectric Behaviour of Heterogeneous Systems », Progress in Dielectric, Vol. 7,

pp. 69-114, Edition London Heywood Books, 1967.

[VER84] J. Verdu, « Vieillissement des plastiques », Afnor technique, Edition Eyrolles, Paris, 1984.

[VER02] J. Verdu, « Vieillissement chimique : Modélisation cinétique », Paris, Techniques de

l’ingénieur, Vol. AM 3 153,2002.

[VER05] J. Verdu, « Vieillissement physique », Techniques de l’ingénieur, Paris, vol AM 3 150,

2005.

[VIT87] V. Vittoria, « Ageing effects on the transport properties of crystalline isotactic

polypropylene », Polymer communications, Vol. 28, pp. 199-201, 1987.

[VOU06] L. Vouyovitch, N. D. Alberola, L. Flandin, A. Beroual and J. L. Bessede, « Dielectric

breakdown of epoxy based composites: relative influence of physical and chemical aging »,

IEEE Transactions on Dielectrics and Electrical Insulation, Vol. 13, N° 2, pp. 282-292,

2006.

[WEI51] W. Weibull, « A statistical distribution function of wide applicability », Journal of applied

mechanics, Vol. 18, pp. 293-297, 1951.

[WIT86] W. Brostow and R. D. Comeliussen, « Failure of Plastics », New York: Hanser, 486, 1986.

[YAM99] S. Yamanaka, H. Kawamura, M. Ezoe et M. Tada, « Frequency dependence of dielectric

properties for water absorbed epoxy resin filled with silica », Proc. of the IEE High Voltage

Page 205: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Références Bibliographiques

193

Engineering symposium, pp. 67-70, 1999.

[ZAV13] L. Zavattoni, O. Lesaint, O. Gallot-Lavallée, « Surface resistance measurements on epoxy

composites, influence of surrounding gas, pressure, temperature, and origin of measured

currents», IEEE ICSD, Bologna, Italie, pp. 370-373, 2013

[ZAV14] L. Zavattoni, « Conduction phenomena through gas and insulating solids in HVDC Gas

Insulated Substations, and consequences on electric field distribution », Thése de Doctorat,

Université de Grenoble, 2014.

[ZHA96] Y. Zhang, J. Lewiner, C. Alquié et N. Hampton, « Evidence of strong correlation between

space-charge buildup and breakdown in cable insulation », IEEE Transactions on

Dielectrics and Electrical Insulation, Vol. 3 (6), pp. 778–783, 1996.

[ZHU65] S. N. Zhurkov, « Kinetic concept of the strength of solids ». Fracture Mechanics, pp. 311-

323, 1965.

[ZHU66] S. N. Zhurkov, E. E. Tomashevski, « An investigation of fracture process of polymers by the

electron spin resonance method ». Proc. Conf.: Physical basis of yield and fracture, Oxford,

pp. 200-208, 1966.

[ZHU83] S. N. Zhurkov, S. N. Dilaton, « Mechanism of the strength of solids », Sov. Phy Sol State,

Vol. 25, pp. 1797-1800, 1983.

[ZOL92] S. Zoledziowski, A. Sierota, « Physical and statistical aspects of breakdown characteristics

of solid dielectrics », IEEE Dielectric Materials Measurements and Applications, pp. 84-87,

1992.

[ZOU08] C. Zou, J.C. Fothergill, S.W. Rowe, « The Effect of Water Absorption on the Dielectric

Properties of Epoxy Nanocomposites », IEEE Transactions on Dielectrics and Electrical

Insulation, Vol. 15, no. 1, pp. 110-117, 2008.

Page 206: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...
Page 207: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Production scientifique

Conférences internationales avec comité de lecture

- H. Yahyaoui, P. Notingher, S. Agnel, Y. Kieffel, A. Girodet, « Analysis of conduction

mechanisms in alumina-filled epoxy resin under dc field and temperature », IEEE

Conference on Electrical Insulation and Dielectric Phenomena, CEIDP, pp. 667-670,

October 20-23, Shenzhen (Chine), 2013

- H. Yahyaoui, « Conduction mechanism and dielectric properties of epoxy resins

submitted to dc stress », European Seminar on materials for HVDC cables and

accessories, Jicable HVDC'13, November 18-20, Perpignan (France), 2013

- D. Beauguitte, H. Yahyaoui, P. Notingher, S. Agnel, « Dielectric Properties of

Polyethylene Terephtalate Submitted to long-term thermo electrical AC stress », IEEE

Conference on Electrical Insulation and Dielectric Phenomena, CEIDP, pp. 843-846,

October 14-17, Montreal (Canada), 2012

- J.C. Laurentie, H. Yahyaoui, P. Notingher, J. Castellon, S. Agnel, « Contactless electric

field and space charge measurement across solid dielectrics : a fully non-intrusive thermal

technique », IEEE Industry Applications Society Annual Meeting 2014, DOI : 10. 1109 /

IAS. 2014. 6978356, pp. 1-4, Vancouver (Canada), 2014

Conférences nationales avec comité de lecture

- H. Yahyaoui, P. Notingher, S. Agnel, Y. Kieffel, « Étude des propriétés diélectriques

d’une résine époxy chargée d’alumine sous contraintes électro-thermiques en régime

continu », SGE (Symposium de Génie Électrique), 8-9 et 10 Juillet, Cachan (France),

2014

- H. Yahyaoui, « Propriétés diélectriques d’une résine époxy chargée d'alumine sous l’effet

du champ électrique continu et de la température », Conférence des jeunes chercheurs en

génie électrique (JCGE), 4-5 Juin, Saint Louis (France), 2014 (publié dans la revue 3EI

2014 - 79)

- H. Yahyaoui, J. C. Laurentie, P. Notingher, S. Agnel, Y. Kieffel, « Study of Surface

Properties of Alumina-Filled Epoxy Resin in view of Use in HVDC Applications »,

Société Française de l’électrostatique (SFE), August 27-29, Toulouse (France), 2014

Page 208: Matériaux isolants pour appareillages haute tension dans ...

Résumé

Les matériaux isolants organiques font l'objet de beaucoup d'études en vue de leur utilisation pour

le transport de l’énergie en haute tension à courant continu (HTCC).

Ce travail de recherche concerne l'étude du comportement diélectrique des résines époxydes

chargées à 66% en masse avec de l'alumine, utilisées comme supports isolants dans les

disjoncteurs à isolation gazeuse (DIG), en vue d'évaluer leur aptitude à être utilisées dans les

appareillages de coupure HTCC.

Les différentes propriétés diélectriques de ce composite (facteur de pertes, résistivité volumiques

et surfaciques, seuils et coefficients de non linéarité du champ électrique, résistivité surfacique,

rigidité diélectrique, l'évolution des charges d'espace) sont déterminées à l'état initial et étudiées

sous contraintes électriques continues à différentes températures.

Afin de mieux évaluer l'effet à long terme de la charge d'espace sur le matériau et d'en tirer des

informations approfondies pour la conception de composants pour la haute tension à courant

continu, une étude de vieillissement électrothermique accéléré sous différents champs continus et

sous différentes températures est présentée.

Mots-clés : Résine époxyde, composite, haute tension, courant continu, résistivité volumique,

résistivité surfacique, charges d'espace, rigidité diélectrique, vieillissement électrothermique.

Abstract

Organic insulating materials are widely studied in view of their use in high voltage dc

applications.

This study focuses on the analysis of dielectric properties and behaviour of an epoxy resin filled

with 66 wt% with alumina, used as insulating supports for ac Gas Insulated Switchgears (GIS) in

order to assess their suitability for use in high DC voltage switchgear.

Dielectric properties of the material at initial state with continuous temperature and electrical

stress (loss factor, volume resistivity, thresholds and nonlinearity coefficients, surface resistivity,

breakdown, evolution of space charge) are determined and investigated under dc fields at

different temperatures.

Evolutions of several electrical properties of the material submitted to long-term thermo electrical

stress under various dc fields and temperatures are presented and discussed.

Keywords : Epoxy resin, composite, alumina, high voltage, direct current, volume resistivity, ,

space charge, surface resistivity, electrothermal ageing.