Martin Heidegger et l'ontologie

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    rfutant l'argument ontologique, il fit prcisment tat de l'irrductibilit de l'tre unattribut de l'tant.

    Or, Heidegger conteste prcisment que le problme de la signification de l'tre soitimpossible et voit en lui le problme philosophique fondamental, -ontologieau sens

    fort du terme - auquel conduisent, la fois, les sciences empiriques et les sciences"eidtiques" au sens husserlien (c'est--dire les sciencesa priori qui tudient l'essence,eidos, des diffrents domaines du rel) et vers lequel tendait la philosophie antique envoulant dans leSophistecomprendre l'tre et en posant avec Aristote le problme del'tre de l'tre. Prcisment parce que l'tre n'est pas un tant, il ne faut pas le saisir" per genus et differentiam specificam". Qu'on puisse le saisir autrement, voil qui estprouv par le fait que nous en comprenons la signification chaque moment. Lacomprhension de l'tre est la caractristique et le fait fondamental de l'existencehumaine. Dira-t-on que, dans ce cas, la recherche est inutile ? Mais le fait de lacomprhension ne veut pas dire que cette comprhension soit explicite ni authentique.Certes, nous cherchons quelque chose que nous possdons dj d'une certaine manire- mais expliciter cette possession ou cette comprhension, n'est pas, pour autant, untravail subalterne ni secondaire. Pour Heidegger, la comprhension de l'tre n'est pasun acte purement thorique, mais comme nous le verrons, un vnement fondamentalo toute sa destine est engage ; et ds lors, la diffrence entre les modes, explicite etimplicite, de comprendre, n'est pas une simple diffrence entre connaissance claire etobscure ; elle concerne l'tre mme de l'homme. [...]

    Quoiqu'il en soit, retenons pour le moment, la caractristique de l'homme pose audpart :tant qui comprend l'tre implicitement (d'une manire pr-ontologique selonl'expression heideggerienne) ou explicitement (d'une manire ontologique). Et c'estparce que l'homme comprend l'tre qu'il intresse l'ontologie. L'tude de l'homme vanous dcouvrir l'horizon l'intrieur duquel le problme de l'tre se pose, car en lui lacomprhension de l'tre se fait .

    Nous n'avons pas employ cette dernire formule par hasard. La comprhension del'tre qui caractrise l'homme n'est pas simplement un acte, essentiel touteconscience, et qu'on pourrait isoler dans le courant temporel pour saisir en lui l'trequ'il vise tout en refusant cet acte de viser - la relation qu'il accomplit - toutetemporalit. Une pareille conception reviendrait prcisment sparer de la dimensiontemporelle o se fait l'existence de l'homme le rapport sujet-objet et voir dans lacomprhension de l'tre un acte de connaissance comme un autre. Or, toute l'oeuvre de

    Heidegger, tend montrer que le temps n'est pas le cadre de l'existence humaine, maisque, sous sa forme authentique, la "temporalisation" du temps est l'vnement de lacomprhension de l'tre.C'est vritablement la comprhension elle-mme qui se fait .Il ne faut pas commencer par se reprsenter la structure spcifique de lacomprhension de l'tre au moyen de notions qu'elle est appele dpasser. L'analysede la comprhension de l'tre montrera le temps la base de la comprhension. Letemps s'y trouvera d'une manire inattendue et dans sa forme authentique et originellecomme condition des articulations mmes de cette comprhension.

    Ces anticipations sur les rsultats des analyses heideggeriennes, nous permettent deprciser dans quel sens la comprhension de l'tre caractrise l'homme. Non point

    titre d'attribut essentiel, mais comme le mode d'tre mme de l'homme. elle dterminenon pas l'essence, mais l'existence de l'homme. Certes, si l'on considre l'homme

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    comme untant , la comprhension de l'tre fait l'essence de cettant . Maisprcisment - et c'est l le trait fondamental de la philosophie heideggerienne -l'essence de l'homme est en mme temps son existence. Ce que l'homme est, est enmme tempssa manire d'tre, sa manired'tre-l, de se "temporaliser".

    Cette identification de l'essence et de l'existence n'est pas un essai d'appliquer l'homme l'argument ontologique, comme certains ont pu le croire. Elle ne signifie pasque dans l'essence de l'homme est contenue la ncessit d'exister - ce qui serait faux,car l'homme n'est pas un tre ncessaire. Mais inversement, pourrait-on dire, laconfusion de l'essence et de l'existence signifie que dans l'existence de l'homme estincluse son essence, que toutes les dterminations essentielles de l'homme ne sont riend'autre que ses modes d'exister. Mais un tel rapport entre l'essence et l'existence n'estpossible qu'au prix d'un nouveau type d'tre qui caractrise le fait de l'homme. A cetype d'tre Heidegger rserve le motexistence- que nous emploierons dsormais dansce sens - et il rserve le nom de prsencepure et simple l'tre des choses inertes. Etc'est parce que l'essence de l'homme consiste dans l'existence que Heidegger dsignel'homme par le terme de Dasein(tre-l) et non pas par le terme de Daseineles(l'tant-l). La forme verbale exprime ce fait que chaque lment de l'essence de l'homme estun mode d'exister, de se trouver l.

    Et la forme verbale exprime encore autre chose qui est de la plus haute importancepour l'intelligence de la philosophie heideggerienne. Nous l'avons dj dit : l'hommen'intresse pas l'ontologie pour lui-mme. L'intrt de l'ontologie va vers le sens del'tre en gnral. Mais,l'tre en gnralpour tre accessible doit au pralable sedvoiler. Jusqu' Heidegger la philosophie moderne supposait cette rvlation unesprit connaissant ; elle tait son oeuvre. L'tre dvoil tait plus ou moins adquat l'tre voil. Que ce dvoilement soit lui-mme un vnement de l'tre, que l'existencede l'esprit connaissant soit cet vnement ontologique condition de toute vrit - toutcela tait, certes dj souponn par Platon quand il mettait la connaissance non pasdans le sujet mais dans l'me [..] mais que cet vnement, ce retournement de l'tre envrit s'accomplisse dans le fait de mon existence particulire ici-bas, que mon ici-bas,mon Da soit l'vnement mme de la rvlation de l'tre, que mon humanit soit lavrit - constitue l'apport principal de la pense heideggerienne. L'essence de l'hommeest dans cette oeuvre de vrit ; l'homme n'est donc pas un substantif, maisinitialement verbe : il est dans l'conomie de l'tre, le "se rvler" de l'tre, il n'est pas Daseiendes, mais Dasein.

    En rsum, le problme de l'tre que Heidegger pose nous ramne l'homme, carl'homme est untant qui comprend l'tre. Mais, d'autre part, cette comprhension del'tre est elle-mme l'tre ; elle n'est pas un attribut, mais le mode d'existence del'homme. Ce n'est pas l une extension purement conventionnelle du mot tre unefacult humaine - en l'occurrence, la comprhension de l'tre, - mais la mise en relief de la spcificit de l'homme dont les "actes" et les "proprits" sont autant de "modesd'tre". C'est l'abandon de la notion traditionnelle de la conscience comme point dedpart, avec la dcision de chercher, dans l'vnement fondamental de l'tre - del'existence du Dasein- la base de la conscience elle-mme.

    Ds lors l'tude de la comprhension de l'tre estipso factoune tude du mode d'tre

    de l'homme. elle n'est pas seulement une prparation l'ontologie, mais dj uneontologie. Cette tude de l'existence de l'homme, Heidegger l'appelle "Analytique du

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    Dasein". Sous une forme, trangre au problme del'tre en gnral, elle a dj tamorce et poursuivie, dans de multiples tudes philosophiques, psychologiques,littraires et religieuses consacres l'existence humaine. Heidegger appelleexistentielle, l'analyse de l'existence humaine qui ignore la perspective de l'ontologie.La replacer dans cette perspective - l'accomplir d'une faon explicite - est l'oeuvre

    d'une analytiqueexistentialeque Heidegger entreprend dansSein und Zeit .Nous allons rsumer ici quelques dveloppements de cetteanalytique existentiale. Apartir de la structure purement formelle que nous venons d'tablir : "l'existence duDasein consiste comprendre l'tre" - toute la richesse de l'existence humaine setrouvera dveloppe, c'est--dire toute la structure de dvoilement de l'tre. Il s'agirad'y retrouver l'homme tout entier et de montrer que cette comprhension de l'tre, c'estle temps lui-mme.

    III (L'intentionalit)

    L'homme existe de telle manire qu'il comprend l'tre. Cette formule quivaut uneautre qui, d'abord, semble en dire beaucoup plus : "L'homme existe de telle manirequ'il y va toujours pour lui de sa propre existence". Ce seraient l deux formulesdiffrentes, si l'on considrait que lacomprhension de l'treest purementcontemplative et s'ajoute, comme une illumination au mode d'existence du Daseinqui,initialement, ne se comprendrait pas. Or, ce serait prcisment effectuer la sparationentre existence et connaissance dont nous avons parl prcdemment, sparationcontre laquelle Heidegger combat.

    Pour faire mieux ressortir la lgitimit de ce combat, il faut renvoyer l'ide del'intentionnalit, labore par Husserl, et pense jusqu'au bout par Heidegger. On saitque Husserl voit dans l'intentionnalit l'essence mme de la conscience. La nouveautde cette vue n'a pas simplement consist affirmer que toute conscience estconscience de quelque chose, mais que cette tension vers quelque chose d'autre faisaittoute la nature de la conscience ; qu'il ne fallait pas se reprsenter la consciencecomme quelque chose quiest d'abord et qui se transcende ensuite, mais que de par sonexistence la conscience se transcendait. Si cette transcendance prsentait l'allure de laconnaissancetant qu'il s'agissait de vie thortique, elle avait, dans les autres ordres dela vie, une autre forme. Le sentiment, lui aussi,visequelque chose, quelque chose qui

    n'est pas un objet thortique, mais adquat et d'accessible au sentiment seul. L'"intentionnalit" du sentiment ne signifie pas que la chaleur affective du sentiment - ettout ce qui en fait le contenu - n'est quun noyau auquel s'ajoute une intention dirigesur un objet senti ; cette chaleur affective elle-mme et comme telle est ouverte surquelque chose et sur quelque chose auquel, en vertu d'une ncessit essentielle, onn'accde que par cette chaleur affective, comme on accde par la vision seule lacouleur.

    Nous comprenons maintenant dans quel sens l'existence du Dasein caractrisecomme une manire d'exister telle "qu'il y va toujours dans son existence de cetteexistence mme" quivaut la comprhension de l'tre par le Dasein. En effet, l'tre

    qui se rvle au Dasein, ne lui apparat pas sous forme de notion thorique qu'ilcontemple, mais dans une tension intrieure, dans le souci que le Dasein prend de son

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    existence mme. Et, inversement, cette manire d'exister o "il y va de l'existence",n'est pas un tat aveugle auquel la connaissance de la nature de l'existence devraits'ajouter, mais cette existence, en prenant soin de sa propre existence - et de cettemanire seulement - s'ouvre la comprhension de l'existence.

    Nous comprenons maintenant mieux que tout l'heure, comment l'tude de lacomprhension de l'tre est une ontologie du Dasein, une tude de l'existence duDasein dans toute sa plnitude concrte, et non pas seulement la rflexion sur un acteisol de cette existence par lequel une existence s'coulant dans le temps serait mmede quitter ce plan existentiel pour comprendre l'tre. La transcendance de lacomprhension est un vnement de l'existence.

    IV ( Le monde)

    Comprendre l'tre, c'est exister de manire se soucier de sa propre existence.Comprendre, c'est prendre souci. Comment prciser cette comprhension, ce souci ? Le phnomne du mondeou, plus prcisment,la structure de "l'tre-dans-le-monde" prsente la forme prcise sous laquelle se ralise cette comprhension de l'tre.

    Si cette thse pouvait se justifier, la "sortie de soi-mme" vers le monde serait intgredansl'existencedu Dasein, car la comprhension de l'tre, nous le savons dj, est unmode de l'existence. La comprhension de l'tre sous la forme de "il y va del'existence" - apparatra Heidegger au terme de ses analyses, comme lacaractristique fondamentale de la finitude du Dasein. C'est donc sur la finitude del'existence du Daseinque sa transcendance vers le monde se trouvera fonde. Et ainsila finitude de l'existence humaine rendra compte de la notion de sujet telle que nousl'avons depuis Descartes. Elle ne sera plus une simple dtermination du sujet - on nedira plus seulement " nous sommes une pense, mais une pense fini" - la finitudecontiendra le principe mme de la subjectivit du sujet. Parce qu'il y a uneexistence finie - le Dasein- que laconscienceelle-mme se trouvera possible. L'analyse duMonde devient donc la pice centrale de l' Analytique du Dasein, car elle va nouspermettre de rattacher la subjectivit la finitude, la thorie de la connaissance l'ontologie, la vrit l'tre.

    Certes, il faudra commencer par transformer la notion traditionnelle du monde, mais

    ce procd n'aura rien d'arbitraire. Ce que Heidegger va mettre la place de laconception habituelle du monde, c'est quelque chose qui rend celle-ci possible.procd de justification qui tient lieu de preuve. Le phnomne du monde, tel queHeidegger le dcrit rejoindra ou expliquera l'opinion classique qui ne part pas toujoursde phnomnes initiaux ni authentiques.

    Pour la conscience commune, le monde quivaut l'ensemble des choses quedcouvre la connaissance. Notion ontique et drive. En effet, les choses, si l'on s'entient la signification concrte de leur apparition pour nous, sontdans le monde.Toute apparition d'une chose particulire suppose le monde. C'est partir d'uneambiance que les choses nous sollicitent. Quelle signification donner cette rfrence

    au monde que l'analyse phnomnologique ne doit pas laisser hors de considration nieffacer ? Elle se rvle, une premire analyse, comme troitement lie avec le

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    Dasein: l' "ambiance", ce en quoi le Dasein vit, "notre monde", le "monde d'unepoque, d'un artiste" etc. Cela nous invite chercher dans unmode d'existenceduDasein lui-mme le phnomne du monde qui apparatra ainsi commestructureontologique. [...] L'ambiance du monde ambiant n'est pas la spatialit nue et abstraitedu monde, mais sa rfrence l'existence du Dasein. C'est un tre caractris par un

    engagement essentiel dans un monde, qui peut dcouvrir un fait tel que l'ambiance partir duquel une notion infiniment plus pauvre comme l'espace, acquiert un sens.[...]

    (Les ustensiles)

    Partons donc du monde ambiant pour en dterminer l'ambiance, pour dcrire la"mondanit du monde" selon l'expression de Heidegger. les choses au milieudesquelles le Daseinexiste sont, avant tout, objets de soins, de sollicitude ; elless'offrent la main, invitent au maniement. Elles servent quelque chose : des haches pour fendre du bois, des marteaux pour marteler le fer, des poignes pour ouvrir desportes, des maisons pour nous abriter etc. Ce sont, au sens trs large du terme desustensiles.

    Quel est leurmoded'tre ? L'tre de l'ustensile ne s'identifie pas avec celui d'un simpleobjet matriel se rvlant la perception ou la science. La contemplation ne sauraitsaisir l'ustensile en tant que tel. "Le regard purement contemplatif, quelque pntrantqu'il soit, jet sur l'aspect de telle ou telle chose ne saurait nous dcouvrir un ustensile" (Sein und Zeit p69). C'est par l'usage, par le maniement que nous accdons lui d'unemanire adquate et entirement originale. - Mais non seulement le maniement accded'une manire originale aux objets, il y accde d'une manire originelle : il n'est pasconscutif une reprsentation. C'est par cela surtout que Heidegger s'oppose l'opinion courante - opinion que Husserl partage encore - : avant de manier, il faut sereprsenter ce qu'on manie.

    Les ustensiles sont donc des objets que le Daseindcouvre par un mode dtermin deson existence : le maniement. Ils ne sont donc pas de simples choses. Le maniementest, en quelque manire, l'effectuation de leur tre. Il dtermine non pasce qu'ils sont,mais la manire dont ilsrencontrent le Dasein, dont ils sont. L'tre des ustensiles, c'estla maniabilit . Et c'est prcisment parce que le maniement n'est pas une simple prsencesur laquelle se grefferait une nouvelle proprit. Elle est entirementirrductible et originelle.

    [...]Quelle est la structure de lamaniabilit ? Elle est essentiellement constitue par le"renvoi". L'ustensileest "en vue de" quelque chose. C'est pourquoi ce n'est pas un trespar, mais toujours en cohsion avec d'autres ustensiles. Il appartient mme sonmode d'tre de cder le pas la totalit de l'uvre par rapport laquelle il est.L'ustensile est parfaitement dans son rle - et la maniabilit caractrise son tre en soi- uniquement quand cette maniabilit n'est pas explicite, mais se retire dans un arrire-fond et que l'ustensile est compris partir de l'uvre. - Cette uvre son tour est unustensile : le soulier est pour tre port, la montre pour indiquer l'heure. Mais, d'autrepart, la fabrication de l'uvre est une utilisation de quelque chose en vue de quelquechose. Le maniable renvoie donc aux matriaux. Nous dcouvrons ainsi partir de

    l'ustensile, la nature, les forts, les eaux, les montagnes, les mtaux, le vent etc. LaNature dcouverte de la sorte est toute relative au maniement : "matires premires".

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    Nous n'avons pas de forts, mais du bois, les eaux sont de la houille blanche ou desmoyens de transport, la montagne est la carrire, le vent est vent en poupe. Enfinl'uvre est faite non seulementen vue de quelque chose, mais aussi pourquelqu'un.La fabrication s'oriente sur le consommateur ; les hommes en tant que"consommateurs" se rvlent avec le maniable et, avec eux, la vie publique et tout

    l'ensemble des institutions, tout l'attirail de la vie publique.[...]L'existence du Daseinconsiste exister en vue de soi-mme. Cela veut aussi dire quele Dasein comprend son existence. Le Dasein comprend donc dores et dj cet "en vuede soi-mme" qui constitue son existence. C'est par rapport cet "en vue de soi-mme" o le Dasein est engag dans son existence et par rapport auquel peut se faireune rencontre du maniable.[...]En rsum, tre, pour le Dasein, c'est comprendre l'tre. Comprendre l'tre, c'estexister de telle sorte qu' "il y va, dans l'existence, de cette existence mme". "Il y va del'existence mme" - c'est tre-dans-le-monde ou tre-l. tre l - c'est se transcender.Tout le paradoxe de cette structure o l'existence en vue de soi-mme se prsentecomme essentiellement extatique - est le paradoxe mme de l'existence et du temps.Mais pour le voir encore mieux il nous faut pousser plus loin l' Analytiquedu Dasein,en dveloppant la structure de la transcendance.

    (Possibilits)

    "tre-dans-le-monde" est un mode d'existence dynamique. Dynamique dans un senstrs prcis. Il s'agit de la dynamis, de la possibilit. Non point de la possibilit au senslogique et ngatif en tant qu' "absence de contradiction" (possibilit vide) ; mais de lapossibilit concrte et positive, de celle qu'on exprime en disant qu'on peut ceci oucela, qu'on a des possibilits envers lesquelles on est libre. Le rgne des ustensiles quenous dcouvrons dans le monde, ces ustensiles utilisables et propres quelque chose,ont trait nos possibilits - saisies ou manques - de les manier. Possibilits, rendueselles-mmes possibles par la possibilit fondamentale d'tre-dans-le-monde, c'est--dire d'exister en vue de cette existence mme. Ce caractre dynamique de l'existence,en constitue le paradoxe fondamental : l'existence est faite de possibilits, lesquellescependant, prcisment en tant que possibilits, s'en distinguent en la devanant.L'existence se devance elle-mme.[..]

    Pour traduire l'intimit de ce rapport entre le Daseinet ses possibilits, nous pouvonsdire qu'il se caractrise, non pas par le fait d'avoir des possibilits, mais d'tre sespossibilits ; structure qui dans le monde des choses serait inconcevable et quidtermine positivement l'existence du Dasein.Etre-dans-le-monde, c'est tre sespossibilits.[...] Qu'est-ce qu'tre ses possibilits?

    tre ses possibilits, c'est les comprendre. [...]

    Mais cela ne signifie pas un retour la notion de conscience interne (mme si l'ondistingue celle-ci de la notion de perception interne, entendue comme rflexionintrospective et o, de toute vidence, la structure sujet-objet se retrouve). L'originalit

    de la conception heideggerienne de l'existence par rapport l'ide traditionnelle deconscience interne consiste en ce que ce savoir de soi-mme, cette illumination interne

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    - cettecomprhension- non seulement n'admet plus la structure sujet-objet, mais n'aplus rien dethorique. Ce n'est pas une prise de conscience, une constatation pure etsimple de ce qu'onest , constatation capable de mesurer notre pouvoir sur nous-mme,cettecomprhension c'est le dynamisme mme de cette existence, c'est ce pouvoir mme sur soi. Et dans ce sens la comprhension constitue le mode dont l'existenceest

    ses possibilits : ce qui tait prise de conscience devient prise tout court et, par l,l'vnement de l'existence mme. a la place de la conscience de la philosophietraditionnelle, laquelle, en tant qu'elle prend consciencereste sereine et contemplative,extrieure au destin et l'histoire de l'homme concret dont elle prend conscience,Heidegger introduit la notion du Dasein comprenant ses possibilits, mais qui, en tantquecomprenant , fait ipso facto son destin, son existence ici-bas. [...]

    VI ( L'humeur, la dreliction)

    Comment s'articule le pouvoir en tant que comprhension du possible ? Comment le Dasein est -il ici-bas ?

    Le Daseinse comprend dans une certaine disposition affective. Le Daseinse tient ici-bas dj dispos d'une faon dtermine. Il s'agit de ce phnomne, premire vuebanal que la psychologie classique vise en insistant sur la tonalit ou la couleuraffective qui se mle tout tat de conscience : la bonne ou la mauvaise humeur, la joie, l'ennui, la peur etc. Pour Heidegger, ces dispositions ne sont pas des tats, maisdesmodes de se comprendrec'est--dire, puisque cela ne fait qu'un, d'tre-l.

    La disposition affective qui ne se dtache pas de la comprhension - par laquelle lacomprhension existe - nous rvle le fait que le Daseinest vou ses possibilits queson "ici-bas" s'impose lui. Elle n'est pas le symbole, ni le symptme, ni l'index decette situation - elle est cette situation ; la description de l'affectivit n'en prouve pas laralit, mais en fournit l'analyse. En existant le Daseinest dores et dj jet au milieu de ses possibilits et non pas plac devant elles. Il en a d'ores et dj saisi ou manqu.Heidegger fixe par le terme deGeworfenheit ce fait d'tre jet et de se dbattre aumilieu de ses possibilits et d'y tre abandonn. Nous le traduirons par le mot dedreliction. La dreliction est la source et le fondement ncessaire de l'affectivit.L'affectivit n'est possible que l o l'existence est livre son propre destin.

    La dreliction, l'abandon aux possibilits imposes, donne l'existence humaine uncaractre de fait dans un sens trs fort et trs dramatique du terme : c'est un fait qui secomprend comme tel par son effectivit. Les faits empiriques de la science s'imposent un esprit ; mais pour tre constats comme faits, il faut au pralable qu'une situationtelle que l'effectivit soit possible. Elle est accomplie par une Dasein qui existe son Da,son ici-bas, qui est jet dans le monde. Avoir t jet dans le monde, abandonn etlivr soi-mme, voil la description ontologique du fait. L'existence humaine sedfinit pour Heidegger par cette "effectivit" ou "facticit". La comprhension etl'interprtation de cette effectivit, c'est l'ontologie analytique du Daseinelle-mme.c'est pourquoi Heidegger et ses disciples dfinissent l'ontologie comme"Hermneutique de la facticit".

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    Si la comprhension des possibilits par le Dasein se fait dans sa drilection, en tantque comprhension du possible, le Dasein existe dans une propension au del de lasituation impose. d'ores et dj le Dasein est au del de soi-mme. tre ainsi au delde soi, - tre ses possibilits - n'est pas contempler cet au-del comme un objet, choisirentre deux possibilits comme entre deux routes qui se croisent au carrefour. ce serait

    enlever la possibilit son caractre de possibilit que de la placer devant un plantabli d'avance o elle serait dj implicitement ralise. La possibilit est laprojection du Dasein lui-mme de par son existence, l'lan vers ce qui n'est pas encore.Heidegger fixe ce mouvement par le termeEntwurf - projet, esquisse. Dans ladreliction, et sans s'affranchir de la fatalit de cette dreliction, le Dasein par sacomprhension est au del de soi.[...]

    Le Dasein comprenant ses possibilits par l'existence - est la fois le Daseinsecomprenant soi-mme et dcouvrant les ustensiles dans le monde. en effet, lapossibilit initiale du Dasein d'tre en vue de soi-mme conditionne le maniement desustensiles. seulement au lieu de se comprendre dans sa possibilit fondamentale d'tre-dans-le-monde, c'est--dire - comme nous le savons dj - dans sa possibilit d'tre envue de soi-mme, tout livr au souci angoiss de sa propre finitude, le Dasein fuit cemode authentique de se comprendre ; il se disperse en comprhensions des possibilitssecondaires que la possibilit fondamentale, implicitement toujours comprise, mais jamais explicite rend seule possible. Le Dasein se comprend partir des possibilitsrelatives aux ustensiles, partir des tres intrieurs au monde. C'est le phnomne dela chute, troisime caractre de l'existence ct de ladrelictionet duprojet . Lachute, dont il faut loigner tout souvenir moral ou thologique, est un moded'existence du Daseinfuyant son existence authentique pour retomber dans la viequotidienne. Il ne se comprend pas dans sa personnalit authentique, mais en partantdes objets qu'il manie :il est ce qu'il faut , il se comprend partir de sa profession, deson rle social. Le Dasein dchu se perd dans les choses et ne connat d'autrepersonnalit quel'on, le tout le monde. Il se comprend - et ce terme signifie toujoursqu'ilest ses possibilits - dans un optimisme qui masque sa fuite devant l'angoisse,c'est--dire devant une comprhension authentique de soi.

    On retrouve toutes les structures de la comprhension sous une forme altre etdchue, chez le Dasein tomb dans la "vie quotidienne". La parole qui, pourHeidegger, se rattache la comprhension et sue le Daseinauthentique possde sousla modalit du silence - devient la parloteet leverbiageintroduisant l'quivoque dansl'existence. L'analytique du Daseinpossde donc une forme parallle - et une bonne

    partie deSein und Zeit s'en occupe - l'analytique du Daseindchu et plong dans laviequotidienne.[...]

    VII ( La philosophie)

    Dans la manire dont Heidegger dveloppe sa pense, la description du Daseinquotidien occupe une trs grande place et les multiples pages qui y sont consacressont d'une grande beaut, d'une rare perfection d'analyse. Nous nous sommes borns

    de brves remarques, mais il nous faut ds maintenant expliquer l'importance queHeidegger leur attribue, car elle tient l'essence mme de son ontologisme.

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    Nos dveloppements antrieurs nous ont rendu familire l'ide que l'existence del'homme est comprise de par cette existence elle-mme et non pas par un acte decontemplation, s'ajoutant l'existence. Si la philosophie est une comprhension del'tre - et si la comprhension de l'tre ne peut se faire que par la comprhension del'existence qui est dvoilement de l'tre - et si la comprhension de l'existence est une

    possibilit de cette existence mme - la philosophie ne se fait pasin abstracto, mais nese trouve possible que comme possibilit concrte d'une existence. Faire de laphilosophie quivaut donc un mode fondamental de l'existence du Dasein. Mais dslors la philosophie est une possibilit finie, dtermine par la dreliction, le projet-esquisse et la chute, par la situation concrte de l'existence philosophante. Or, si c'estdans l'tat de chute que nous nous comprenons habituellement, toutes les catgories l'aide desquelles nous nous efforons saisir le Daseinsont empruntes au monde deschoses. La rification de l'homme, l'absence du problme mme concernant lasignification de la subjectivit du sujet - tout cela ne forme pas une contingente erreurdue la maladresse de tel ou tel philosophe : tout cela vient de la chute, de la situationmme du Dasein philosophant install dans la vie quotidienne. Mais c'est aussi pourcela quel'analytique du Dasein, appele esquisser la possibilit authentiquedel'existence consiste, avant tout, remonter la penteet, en premier lieu, clairerontologiquement la situation mme de la chute o le Dasein est initialement plong.D'ailleurs, cette tendance vers la comprhension authentique de soi-mme - c'est--dire vers un mode d'existence authentique - ne vient pas d'un scrupule abstrait etintellectuel, mais se manifeste sous forme d'appel qu'entend le Dasein dchu etdispers dans les choses et qui quivaut pour Heidegger au phnomne originel de la"conscience morale"[2].

    Ainsi s'explique l'importance et la ncessit des analyses de "l'existence quotidienne" ;le Dasein est d'ores et dj dchu et la philosophie, en tant que possibilit finie, part dela vie quotidienne. [...]

    VIII ( L'angoisse)[3}

    En rsum, l'existence du Dasein consistant comprendre l'tre, apparue comme "tre-dans-le-monde", se prcise comme existence comprenant dans l'tat dedrelictionsapossibilit fondamentale d'exister ; comprenant une possibilit esquisse de par cetteexistence mme, mais d'une comprhension d'ores et dj glisse vers les possibilits

    de la "vie quotidienne", d'ores et dj gare dans les choses.[...]Quelle est donc la comprhension hors rang qui saisit le Dasein comme fait parexcellence et qui la fois accomplit cette effectivit ?

    Cette comprhension est l'angoisse.

    Toute comprhension se fait dans une disposition affective. L'affectivit est la marquemme de l'engagement du Dasein dans son existence, de son effectivit. Ce quicaractrise l'affectivit, c'est une double "intention" : la joie, la peur, la tristesse etc. sedirige sur un objet se trouvant dans le monde, objet de la joie, de la peur, de la

    tristesse, mais aussi sur soi-mme, sur celui "pour qui" on est attrist, joyeux ou

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    effray. Ce retour sur soi transparat d'ailleurs dans la forme rflchie des verbes quiexpriment les tats affectifs -se rjouir,s' effrayer,s' attrister.

    L'angoisse qui prsente la mme structure, offre cependant une particularit qui laplace part parmi les tats affectifs.

    Il faut d'abord la distinguer de la peur. Celui "pour qui" on a peur, c'est soi-mme, c'estle Dasein atteint et menac dans son "tre dans la monde" ; par contre l'objet de lapeur, nous le rencontronsdans le monde titre d'tre dtermin. Il en est autrement del'angoisse : l'objet angoissant ne se trouve pas l'intrieur du monde, comme un"quelque chose de menaant", l'gard duquel il y aurait prendre tel ou tel parti.L'objet de l'angoisse reste entirement indtermin. Indtermination n'ayant rien depurement ngatif : spcifique et originale, elle nous rvle une sorte d'indiffrencequ'ont pour le Dasein angoiss tous les objets qu'il manie habituellement. L'angoisseest une manire d'tre o la non-importance, l'insignifiance, le nant de tous les objetsintra-mondains devient accessible au Dasein. Cela ne veut pas dire que l'angoissenous serve de signe d'insignifiance des choses, ni que nous dduisions cetteinsignifiance partir du fait de l'angoisse, ni que nous prouvions l'angoisseaprsavoir pris connaissancede cette non-importance des choses. C'est l'angoisseelle-mmequi rvle, comprend cette insignifiance. Et, corrlativement, cette insignifiancene se rvle pas comme quelque chose d'inoffensif, espce de ngation thorique etthoriquement concevable ; elle est essentiellement angoissante et, par consquent faitpartie du domaine du Dasein, est quelque chose d'humain.

    Mais avec les objets "intramondains" sombrs dans le nant, le Daseinangoiss neperd pas sa constitution d'tre-dans-le-monde. Bien au contraire, l'angoisse ramne le Daseinau monde en tant que monde - la possibilit d'tre en vue de soi-mme - ellene l'arrache qu'au monde en tant qu'ensemble de choses, des ustensiles maniables.Dans l'angoisse le Dasein se comprend d'une manire authentique ramen qu'il est lapossibilit nue de son existence, son effectivit pure et simple vide de tout contenu,nant de toute chose. C'est cette effectivit de l'tre-dans-le-monde, du Da pur etsimple, qui est l'objet de l'angoisse ce qui menace.

    L'objet de l'angoisse (leWovor ) s'identifie donc avec son "pour qui" (leWorum) : c'estl'tre-dans-le-monde. En faisant disparatre les chosesintra-mondainesl'angoisse rendimpossible la comprhension de soi-mme partir des possibilits ayant trait cesobjets, et elle amne ainsi le Dasein se comprendre partir de soi-mme elle le

    ramne soi-mme. L'angoisse, en ramenant l'existence elle-mme, la sauve de sadispersion dans les choses et lui rvle sa possibilit d'exister d'une manireparticulirement aigu comme tre-dans-le-monde. Elle doit donc constituer lasituation o se ramasse en unit la totalit des structures ontologiques du Dasein.

    Mais l'angoisse est comprhension. Elle comprend d'une manire exceptionnelle lapossibilit d'exister authentique. Cette possibilit d'exister, Heidegger la fixe par leterme de souci. Le souci angoiss doit fournir la condition ontologique de l'unit de lastructure du Dasein.

    En tant qu'angoiss, le souci est une comprhension. Il comprend sa possibilit

    fondamentale d'tre dans le monde. En esquissant cette possibilit, il est au-del-de-soi. Non pas en rapport avec les objets, mais avec sa propre possibilit d'exister. Le

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    rapport avec l'objet extrieur, sous sa forme initiale de maniement, se trouve lui-mmepossible grce l'anticipation du souci qui est en vue de soi, c'est--dire qui est-dans-le-monde.

    D'autre part, la possibilit comprise par l'angoisse, l'tre dans le monde, se rvle dans

    l'isolement et l'abandon o le Daseinest livr cette possibilit. Le souci comprend sapossibilit en tant que possibilit o l'on estd'ores et dj jet. Le projet-esquisseet ladreliction - l'tre-au-del-de-soiet l'tre d'ores et dj danssont concrtement runisdans le souci compris par l'angoisse.[...]La formule totale exprimant le souci se compose donc de ces trois lments : tre-au-del de soi - avoir d'ores et dj t dans le monde - tre-auprs des choses. Leur unitn'est pas celle d'une proposition qu'on pourrait toujours tablir arbitrairement, maiscelle du phnomne concret du souci rvl par l'angoisse.

    (Conclusion)

    C'est mme l un excellent exemple du mode de penser heideggerien. Il ne s'agit pasde runir des concepts par une synthse pense, mais de trouver un mode d'existencequi les comprend, c'est--dire qui saisit en existant les possibilits - d'tre qu'ilsrefltent.

    La philosophie intellectualiste - empiriste ou rationaliste - cherchait connatrel'homme, mais elle s'approchait du concept de l'homme, en laissant de ct l'effectivitde l'existence humaine et le sens de cette effectivit. Les empiristes, tout en parlant deshommes rels, passaient galement ct de cette effectivit : l'intellectualisme nesaurait se trouver que devant le fait. Il lui manque la notion heideggerienne del'existence et de la comprhension, d'une connaissance qui se fait de par l'existencemme. Cette dernire rend possible la fameuse "introspection", mais en est biendistincte, car l'introspection est dj intellectualiste. Elle contemple un objet distinctd'elle. Heidegger apporte l'ide d'une comprhension dont l'oeuvre n'est pas distinctede l'effectuation et de l'effectivit mme du fait. Par l il a pu atteindre dans le fait del'homme non pas l' "tranger", l'objet que rvle l'introspection des psychologues, maisl'existence effective se comprenant de par son effectivit.

    C'est cette comprhension de l'existence qu'il a essay de faire parler. Nous en avonsessay de rsumer les premires articulations. Dj le fait que les structures tudiessont des "modes d'exister" et non pas des proprits, nous fait deviner leur parentavec le temps qui n'est pas untant mais l'tre. Et dj les expressions comme "d'oreset dj", "au del de" et "auprs de" - charges du sens fort qu'elles empruntent ausouci - nous laissent entrevoir la racine ontologique de ce qu'on appelle dans la viequotidienne - plonge dans un temps banalis et "inoffensif" - pass, avenir, prsent.

    FIN extrait de "En dcouvrant l'existence avec Husserl et Heidegger " E. Lvinas(Vrin)

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    [1]Je ne suis pas d'accord avec ce point bien qu'on puisse faire dire cela Hegel. Le temps tant la ngativit etle sujet tant processus, Kojve a eu raison d'identifier le sujet et le temps. Lvinas reprend ici la critique queHeidegger adresse Hegel dans son commentaire de la Phnomnologie de l'Esprit. JZ [2]C'est une des erreurs les plus funestes de Heidegger d'avoir rduit la morale cette qute d'authenticit avantde la rduire des "valeurs". En fait Lvinas, particulirement, montrera que la morale s'origine dans l'Autre. Lamorale est d'abord la loi du dialogue qui nous impose d'tre crdible, de ne pas perdre la face, mais aussi delaisser place l'Autre son point de vue (voir leCaf philosophiqueconsacr lamorale). JZ [3]Ici aussi il faut rtablir le rle de l'Autre dans la rvlation de soi qui ne se limite pas l'angoisse de l'tre-pour-la-mort mais devient pour Lvinas visage, regard et souci de l'Autre. L'angoisse serait plus acceptable soussa forme sartrienne "l'enfer c'est les autres".

    Il faut signaler qu'ensuite Lvinas, dans sa lecture philosophique de la Bible, introduira laprsance de l'Autre ( Le prochain, c'est prcisment ce qui a un sens "immdiatement" avant qu'on le lui prte... Nous avons appel visage l'auto-signifiance par excellence... La proximit n'est pas une intentionalit ) mais aussi du langage (le premier mot dit le dire lui-mme...l'vnement thique de la communication que toute transmission de messages suppose), de lanomination (comme Lacan) ds lors que toute vrit historique implique la structure narrativedu langage avec pour consquence phnomnologique :Tout phnomne est discours ou fragment de discours. Ds lors, la pense ne peut atteindre l'individuel que par le dtour del'universel.Voir aussi le siteLvinas(en anglais)